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N° 2307

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 11 mai 2005.

PROPOSITION DE LOI

tendant à lutter contre les excès des ventes par lots
et de la
spéculation immobilière,

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration
générale de la République, à défaut de constitution d'une commission spéciale dans les délais
prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

PRÉSENTÉE

par MM. Patrick BEAUDOUIN, Jean-Claude ABRIOUX, Pierre AMOUROUX, René ANDRÉ, Jacques-Alain BÉNISTI, Claude BIRRAUX, Bruno BOURG-BROC, Mme Chantal BOURRAGUÉ, MM. Loïc BOUVARD, Roland CHASSAIN, Jean-François CHOSSY, Dino CINIERI, Philippe COCHET, Georges COLOMBIER, Edouard COURTIAL, Francis DELATTRE, Léonce DEPREZ, Dominique DORD, Olivier DOSNE, Philippe DUBOURG, Jean-Michel FERRAND, André FLAJOLET, Marc FRANCINA, René GALY-DEJEAN, Franck GILARD, Maurice GIRO, François GROSDIDIER, Mme Pascale GRUNY, MM. Jean-Jacques GUILLET, Christophe GUILLOTEAU, Jacques KOSSOWSKI, Pierre LASBORDES, Lionnel LUCA, Thierry MARIANI, Mme Henriette MARTINEZ, MM. Patrice MARTIN-LALANDE, Christian MÉNARD, Dominique PAILLÉ, Robert PANDRAUD, Christian PHILIP, Daniel PRÉVOST, Christophe PRIOU, Jacques REMILLER, Mme Juliana RIMANE, MM. Francis SAINT-LÉGER, Yves SIMON, Michel SORDI, Daniel SPAGNOU, Michel TERROT, Jean-Claude THOMAS, Jean-Sébastien VIALATTE et Gérard WEBER
Additions de signatures :
Daniel Fidelin

Députés.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Les prix du marché immobilier connaissent aujourd'hui une hausse préoccupante : le prix de l'ancien a ainsi crû de 15,5 % en 2004. Cette hausse entrave l'accession à la propriété et augmente de façon inquiétante le niveau d'endettement des ménages.

Si plusieurs facteurs contribuent à cette hausse, il apparaît clairement que les ventes par lots - appelées ventes à la découpe - accentuent ce phénomène de flambée des prix. Discrète au début des années quatre-vingt dix, la vente par les sociétés immobilières de pans entiers de leur patrimoine locatif a pris récemment beaucoup d'ampleur. Ces ventes contribuent à renforcer la hausse des prix de l'immobilier et remettent en cause profondément la mixité sociale en conduisant à évincer de ces immeubles les locataires qui sont dans l'incapacité de payer des loyers plus importants ou de devenir propriétaires de leur logement. L'intervention du législateur apparaît dès lors nécessaire.

Ainsi, à Saint-Mandé, fin 2004, cinq immeubles ont été vendus à la découpe, dont trois à des fonds de pensions émanant du Proche-Orient. Deux cents appartements sont concernés sur une commune de moins de 20 000 habitants. L'un des immeubles a été acheté par le fonds de pension 2 993 euros le mètre carré, et proposé à la vente aux locataires deux mois plus tard 4 993 euros le mètre carré. Dans certains cas, de telles hausses ne sont même pas justifiées par des travaux de rénovation ou d'aménagements conséquents, rendant encore plus artificielles les hausses constatées.

Des mesures de protection des locataires apparaissent aujourd'hui primordiales. Le Gouvernement vient ainsi de renforcer la protection des locataires handicapés ou âgés de plus de soixante-dix ans. Ces mesures sont salutaires et nécessaires mais restent insuffisantes. Il est impératif de s'attaquer également à la source de ces hausses rapides et injustifiées.

L'objectif de cette proposition de loi est donc de poser un garde-fou au phénomène de ventes à la découpe en taxant les plus-values immobilières réalisées dans ce genre d'opérations.

Cette « contribution annuelle sur les ventes déclenchant le droit de préemption du locataire » s'appliquerait aux deux cas où, dans le cadre d'une vente par lots, un droit de préemption est déclenché. Ce droit de préemption correspond à l'obligation pour le propriétaire d'un bien loué, lorsqu'il décide de vendre son bien immobilier, de proposer ce bien par priorité à l'occupant locataire.

Deux textes, la loi n° 75-1351 du 31 décembre 1975 relative à la protection des occupants de locaux à usage d'habitation et la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986, prévoient ce droit dans le cas de vente par lots. Ainsi, l'article 15-II de la loi du 6 juillet 1986 précise que le congé pour vente doit intervenir au moins six mois avant la fin du bail et doit comporter une offre de vente, le locataire bénéficiant ainsi d'un droit de préemption. L'article 10 de la loi du 31 décembre 1975 prévoit un droit de préemption au profit du locataire, dans le cas de toute vente d'un ou plusieurs locaux à usage d'habitation consécutive à la division initiale ou à la subdivision de tout ou partie d'un immeuble par lot.

En appliquant cette taxe 10 % dans ces deux cas de déclenchement du droit de préemption, la présente proposition pourra freiner efficacement les envolées purement spéculatives liées aux ventes par lots qui affectent de plus en plus certains quartiers des grandes villes françaises.

Versée au budget de l'Etat, cette taxe pourra permettre le financement de la construction de logements sociaux, notamment de logements intermédiaires dont tout le monde reconnaît aujourd'hui le manque.

En conséquence, il vous est demandé, Mesdames, Messieurs, d'adopter la proposition suivante.

PROPOSITION DE LOI

Article unique

Le chapitre III du titre Ier de la première partie du livre Ier du code général des impôts est complété par une section XXI ainsi rédigée :

« Section XXI

« Contribution annuelle sur les ventes
déclenchant le droit de préemption du locataire

« Art. 235 ter ZE. - I. - A compter du 1er janvier 2006, il est institué une contribution annuelle de 10 % sur les plus-values, retirées des ventes par lots déclenchant le droit de préemption prévu à l'article 10 de la loi n° 75-1351 du 31 décembre 1975 relative à la protection des occupants de locaux à usage d'habitation ou celui prévu à l'article 15 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986.

« II. - Pour l'application du présent article, les plus-values sont évaluées selon les règles fixées par les articles 150 V, 150 VA, 150 VB, 150 VC, 150 VD et 150 VE du présent code.

« III. - Le contrôle, le recouvrement, le contentieux, les garanties, sûretés et privilèges sont régis comme en matière de taxe sur la valeur ajoutée. »

Composé et imprimé pour l'Assemblée nationale par JOUVE
11, bd de Sébastopol, 75001 PARIS

Prix de vente : 0,75 €
ISBN : 2-11-119154-X
ISSN : 1240 - 8468

En vente à la Boutique de l'Assemblée nationale
4, rue Aristide Briand - 75007 Paris - Tél : 01 40 63 61 21

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N° 2307 - Proposition de loi tendant à lutter contre les excès des ventes par lots et de la spéculation immobilière (M. Patrick Beaudouin)


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