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N° 3813

_____________

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 12 juin 2007

RAPPORT D'INFORMATION

FAIT

en application de l'article 29 du Règlement

au nom des délégués de l'Assemblée nationale à l'Assemblée

parlementaire du Conseil de l'Europe (1) sur l'activité de cette Assemblée

au cours de la deuxième partie de sa session ordinaire de 2007

par M. Bernard SCHREINER

Député

ET PRÉSENTÉ A LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES

(1) La composition de cette délégation figure au verso de la présente page.

La Délégation de l’Assemblée nationale à l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe est composée de  : MM. Georges Colombier, Claude Evin, Mme Claude Greff, MM. Armand Jung, Jean-Pierre Kucheida, Gilbert Meyer, Jean-Claude Mignon, Marc Reymann, François Rochebloine, André Schneider, Bernard Schreiner, en tant que membres titulaires, et MM. Alain Cousin, Jean-Marie Geveaux, Mme Arlette Grosskost, MM. Jean-Yves Hugon, Michel Hunault, Denis Jacquat, Jean-Claude Lefort, Jean-Marie Le Guen, Guy Lengagne, François Loncle, Frédéric Reiss, Rudy Salles, en tant que membres suppléants.

S O M M A I R E

Pages

INTRODUCTION 5

I. INFORMATIONS GÉNÉRALES SUR LE 7

DÉROULEMENT DE LA SESSION

A. Liste des recommandations et résolutions adoptées 7

B. Interventions des parlementaires français 9

II. LES GRANDS DÉBATS DE LA SESSION 13

A. Le débat « Démocratie et droits de l’homme en Europe » 13

1. La situation des droits de l’homme en Europe 13

2. La situation de la démocratie en Europe 15

3. Suivi des résultats obtenus par les Etats 19

B. Les questions internationales 23

1. Adhésion de la République du Monténégro au Conseil 23

de l’Europe

2. Le débat d’actualité « Darfour-Soudan » : la responsabilité 27

de l’Europe

3. L’avis sur le projet de mémorandum d’accord entre le 29

Conseil de l’Europe et l’Union européenne

C. Les questions de société 39

1. Le code de bonne conduite des partis politiques 39

2. Equité des procès dans les affaires d’espionnage et de 55

divulgation des secrets d’Etat

3. Contrefaçon et médicaments 57

ANNEXES 65

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

La deuxième partie de la session de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe s'est déroulée du 16 au 20 avril 2007 à Strasbourg et la délégation française y a été très active bien qu’elle se soit déroulée pendant la campagne pour les élections présidentielles.

Cette session a été marquée par une nouveauté : l’organisation d’une journée à thème, démocratie et droits de l’homme, au cours de laquelle sont intervenues de nombreuses personnalités invitées.

Les sujets internationaux ont également occupé une place importante avec l’adhésion du Monténégro, l’examen de la situation en Ukraine et au Darfour ainsi qu’un débat sur le projet de mémorandum d’accord entre le Conseil de l’Europe et l’Union européenne.

Les questions de société ont également mobilisé l’Assemblée qui a examiné des rapports sur le code de bonne conduite des partis politiques, la contrefaçon et l’équité des procès dans les affaires d’espionnage ou de divulgation des secrets d’Etat.

Au cours de cette session l'Assemblée a entendu :

- M. Ranko KRIVOKAPIC, Président du Parlement du Monténégro ;

- M. Viktor YANOUKOVYTCH, Premier ministre de l’Ukraine ;

- M. Fiorenzo STOLFI, Ministre des affaires étrangères de Saint-Marin, Président du comité des ministres ;

- Mme Louise ARBOUR, Haut-commissaire des Nations Unies pour les droits de l’homme ;

- M. Thomas HAMMARBERG, Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe ;

- M. Jean-Paul COSTA, Président de la Cour européenne des droits de l’homme ;

- Mme Irène KHAN, Secrétaire générale d’Amnesty international ;

- M. Ken ROTH, Directeur éxécutif d’Human rights watch ;

- M. Terry DAVIS, Secrétaire général du Conseil de l’Europe ;

- M. Halvdan SKARD, Président du Congrès des pouvoirs locaux et régionaux ;

- M. Mifsud BONNICI, Vice-président de la commission européenne pour la démocratie par le droit ;

- M. Jean-Michel BELORGEY, Rapporteur général et ancien président du Comité européen des droits sociaux ;

- M. Mauro PALMA, Président du Comité européen pour la prévention de la torture ;

- Mme Eva Smith Asmussen, Présidente de la commission européenne contre le racisme et l’intolérance ;

- M. Alan PHILIPPS, Président du Comité consultatif de la Convention-cadre pour la protection des minorités nationales ;

- M. Alexandre MOROZ, Président du parlement d’Ukraine.

Après avoir fait état des textes adoptés et donné des précisions sur les interventions des membres de la délégation française, le présent rapport reproduira, pour plusieurs débats importants, les textes adoptés et les interventions des membres de la délégation française.

*

* *

I. INFORMATIONS GÉNÉRALES SUR LE DÉROULEMENT DE LA SESSION

A.  Liste des avis, recommandations et résolutions adoptés

Titre

Doc.

Recommandation 1791

Situation des droits de l’homme et de la démocratie en Europe

11202

Recommandation 1792

Equité des procédures judiciaires dans les affaires d’espionnage ou de divulgation de secrets d’Etat

11031

Recommandation 1793

Nécessité d’une convention du Conseil de l’Europe relative à la suppression de la contrefaçon et du trafic de produits contrefaits

11227

Recommandation 1794

La qualité des médicaments en Europe

11193

Résolution 1545

Respect des obligations et des engagements de l’Azerbaïdjan

11226

Résolution 1546

Le code de bonne conduite pour les partis politiques

11210

Résolution 1547

Situation des droits de l’homme et de la démocratie en Europe

11203

Résolution 1548

Evolution de la procédure de suivi de l’Assemblée

11214

Résolution 1549

Fonctionnement des institutions démocratiques en Ukraine

11255

Résolution 1550

Situation au Proche-Orient

11250

Résolution 1551

Equité des procédures judiciaires dans les affaires d’espionnage ou de divulgation de secrets d’Etat

11031

Avis 261

Adhésion de la République du Monténégro au Conseil de l’Europe

11204

Avis 262

Mémorandum d’accord entre le Conseil de l’Europe et l’Union européenne

11244

Avis 263

Projet de convention pour la protection des enfants contre l’exploitation sexuelle et les abus sexuels

11256

B. Interventions des parlementaires français

Séance du lundi 16 avril, matin :

Rapport d’activité du bureau

Intervention de M. Jean-Guy Branger sur le déroulement de la campagne du Conseil de l’Europe contre la violence domestique.

Séance du mardi 17 avril, matin :

Adhésion de la République du Monténégro

Interventions de :

- M. Jean-Marie Bockel se félicitant de cette adhésion ;

- M. Jean-Marie Geveaux se félicitant des conditions dans lesquelles le Monténégro a obtenu son indépendance ;

- M.  Gilbert Meyer appelant notamment à une meilleure application des lois adoptées.

Discours de M. Viktor Yanoukovytch, Premier ministre de l’Ukraine

Question de Mme Josette Durrieu sur le conflit de Transnistrie.

Séance du mardi 17 avril, après-midi :

Code de bonne conduite des partis politiques

Code de bonne conduite des partis politiques (suite)

Interventions de :

- Mme Josette Durrieu sur le statut, les conditions de financement et la parité ;

- M. Jean-Pierre Kucheida plaidant pour un élargissement de l’approche de ce code notamment au respect des valeurs du Conseil de l’Europe et au rôle des partis dans les médias ;

- M. Jean-Guy Branger insistant sur le coût des campagnes, la lutte contre la corruption et le respect de l’indépendance et de la transparence des partis ;

- M. Yves Pozzo di Borgo soulignant notamment l’importance de la séparation et de l’équilibre des pouvoirs ;

- M. Bernard Schreiner rappelant la réglementation des partis applicable en France.

   

Séances du mercredi 18 avril :

Débat Droits de l’homme et démocratie

Interventions de :

- M. André Schneider apportant plusieurs précisions sur des affirmations du rapport relatives à la France ;

- Mme Josette Durrieu insistant sur la nécessité de rester vigilant et exigeant quant au respect des principes démocratiques ;

- M. Jacques Legendre soulignant l’importance de la liberté d’expression et appelant au développement du dialogue des cultures.

Séance du jeudi 19 avril, matin :

Débat d’actualité Darfour-Soudan

Intervention de M. Jacques Legendre soulignant la dégradation de la situation humanitaire et les risques de déstabilisation de la région et appelant à une mobilisation de l’opinion internationale.

Séance du jeudi 19 avril, après-midi :

Equité des procès dans les affaires d’espionnage

Intervention de M. Marc Reymann rappelant la nécessité d’une indépendance absolue du pouvoir judiciaire et du respect de la liberté des médias.

Avis sur le projet de mémorandum d’accord entre le Conseil de l’Europe et l’Union européenne

Intervention de M. Bernard Schreiner jugeant ce texte inacceptable en l’état et déplorant le peu de considération accordé par le Comité des ministres à l’Assemblée parlementaire.

Vendredi 20 avril, matin :

Contrefaçon et médicaments

Contrefaçon et médicaments

(suite)

Interventions de :

- M. Bernard Schreiner, rapporteur de la commission des questions économiques et du développement ;

- M. Francis Grignon dénonçant les conséquences des contrefaçons en matière d’emploi et de sécurité des consommateurs ;

- M. Gilbert Meyer sur l’inadap-tation des réponses apportées à la contrefaçon notamment au niveau international et l’urgence d’une réforme.

L'ensemble des documents et débats de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe est consultable sur le site :

http://conseil-europe.assemblee-nationale.fr

II. LES GRANDS DÉBATS DE LA SESSION

L'ordre du jour de la session de printemps a tout d'abord permis à l'Assemblée de tenir une journée de débats sur le thème « Démocratie et droits de l’homme ». De nombreux experts ont, à cette occasion, été invités à s’exprimer et les échanges ont été à la fois denses et riches.

Les questions internationales ont, comme d’habitude, tenu une place importante avec notamment l’intervention du Premier ministre ukrainien, un débat d’actualité sur la situation au Darfour et l’examen du projet de mémorandum d’accord entre le Conseil de l’Europe et l’Union européenne.

Enfin, l’Assemblée a consacré une importante partie de son ordre du jour aux questions de société en examinant en particulier un rapport présenté par M. Bernard Schreiner sur la lutte contre les contrefaçons et un autre portant sur le code de bonne conduite des partis politiques.

A. Le débat « Démocratie et droits de l’homme en Europe »

1. La situation des droits de l’homme en Europe

Après les interventions des rapporteurs, Mme Louise Arbour, Haut-commissaire des Nations Unies pour les droits de l’homme, a notamment déclaré que la lutte contre le terrorisme devait respecter les principes des droits de l’homme et exprimé sa préoccupation face aux violations constatées de ces droits malgré l’existence de sauvegardes légales.

M. Thomas Hammarberg, Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe, a ensuite estimé que la liste des problèmes existant en matière de droits de l’homme était longue et appelé les Parlements nationaux à mieux surveiller l’application des textes.

Dernier intervenant extérieur sur ce débat, M. Jean-Paul Costa, Président de la Cour européenne des droits de l’homme, a ensuite prononcé l’allocution suivante :

« La situation des droits de l’homme en Europe, pour la Cour, est assez difficile à appréhender dans sa totalité. La Cour est un miroir. Elle ne peut s’autosaisir. Elle est donc tributaire des requêtes qu’elle reçoit.

Je formulerai cependant cinq remarques.

L’origine géographique des requêtes : quatre pays sur quarante-six fournissent plus de la moitié de celles-ci, la Russie, la Roumanie, la Turquie et l’Ukraine. Certes, ils totalisent plus du tiers de la population totale, mais tout de même.

Deuxièmement, un grand nombre des requêtes sont soit irrecevables soit fondées, mais répétitives comme les durées de procédures. Toutefois un petit nombre de requêtes révèlent des violations graves : tortures, situations dans les prisons, procédures pénales inéquitables, détentions provisoires trop longues, violences policières, racismes, …

Troisièmement : les libertés de la pensée, d’expression, d’association, syndicales et de religion restent fragiles dans de nombreux pays.

Quatrièmement, les questions de société, les problèmes de transsexuels, d’homosexualité, de fécondation in vitro, de handicaps, d’euthanasie, d’avortement, occupent une place de plus en plus importante dans la jurisprudence de la Cour. Cela montre d’ailleurs qu’elle a un rôle européen qui dépasse les frontières de chaque État contre lesquels sont présentées des requêtes.

Cinquièmement, il est banal de le dire mais cela me frappe de plus en plus, il existe une étroite corrélation entre la paix civile et les droits de l’homme. Il n’y a pas de paix sans droits de l’homme, il n’y a pas de droits de l’homme sans paix.

Nous constatons ainsi un apaisement relatif en Turquie depuis l’amélioration dans le Sud-Est de ce pays. De même, les événements récents montrent un espoir de règlement définitif en Irlande du Nord.

En revanche, il existe d’autres zones très troublées en Europe, notamment dans la partie que l’on appelle caucasienne. Les menaces les plus lourdes demeurent liées au terrorisme, je suis donc tout à fait d’accord avec ce qu’a dit Mme Louise Arbour, la commissaire des Nations Unies pour les droits de l’homme, il y a quelques minutes.

Monsieur le Président, mesdames, messieurs, nous sommes bien conscients qu’il existe pour la Cour de nouveaux défis. D’abord d’ordre quantitatif car elle reçoit un nombre de requêtes absolument considérable, ensuite qualitatif car il s’agit de trouver sans cesse de nouveaux moyens pour concilier l’ordre, la paix, la sécurité et la défense des libertés les plus fondamentales.

Je crois sincèrement que la Cour est en mesure de relever ces défis. Mais il lui faut trouver un nouveau souffle dans des instruments juridiques tels que le Protocole n° 14 de la Convention dont j’appelle à la ratification, le plus rapidement possible, par le dernier État qui n’y a pas procédé, la Fédération de Russie.

Je pense aussi aux propositions contenues dans le rapport déposé récemment au Conseil de l’Europe, par le Comité des sages créé par le 3e Sommet des chefs d’État et de gouvernement du Conseil de l’Europe en mai 2005.

Au-delà des problèmes de procédure et d’instruments, il faut à la Cour des appuis renouvelés du Conseil de l’Europe, de tous ses organes et toutes ses composantes et de l’Union européenne dont je souhaite vivement l’adhésion prochaine à la Convention européenne des Droits de l’Homme ; enfin des Etats membres dans leurs composantes gouvernementales et de la société civile.

C’est sur cet espoir que je veux conclure ma brève intervention en vous remerciant, Monsieur le Président, mesdames, messieurs, de votre attention. »

2. La situation de la démocratie en Europe

Intervenant après les rapporteurs, M. Terry Davis, Secrétaire général du Conseil de l’Europe, a en particulier relevé que « Le paradoxe est que les exigences en matière de démocratie et de droits de l’homme sont toujours plus élevées, alors que l’engagement politique sur ces questions n’est pas aussi ferme qu’il devrait être ».

Le débat a été ouvert aux parlementaires après les interventions de M. Haldan Skard, Président du congrès des pouvoirs locaux et régionaux, et de M. Lifsud Bonnici, vice-président de la commission européenne pour la démocratie par le droit.

Première intervenante française, Mme Josette Durrieu a appelé à la vigilance, soulignant que même les droits qui paraissaient les mieux enracinés étaient aujourd’hui menacés :

« Qu’est-ce qu’une démocratie ? Nous tournons tous autour de ce mot qui est essentiel. La démocratie, c’est une construction. Elle suppose, par conséquent, un acte conscient et volontaire. Elle suppose aussi la définition d’une méthode, d’un contenu et d’une dynamique. Au centre du système, l’homme. L’homme, c’est-à-dire le citoyen. Il est à la base du système, il doit être reconnu, il a des droits. Et il a même pour devoir d’exercer son rôle de citoyen. Il a donc une responsabilité, ce qui implique, comme l’ont dit M. Hancock et d’autres intervenants, qu’il soit intéressé, formé et informé et qu’il ait aussi la possibilité d’exercer son droit de contrôle.

Je porte aussi un regard particulier sur ceux des citoyens qui se retrouvent dans l’opposition, au-delà des élus qui ne sont pas “passés”, comme on dit. N’oublions pas qu’il n’y a jamais de démocratie sans opposition reconnue et respectée.

Naturellement, pour ce citoyen, le moment essentiel est celui du choix, c’est-à-dire l’élection au suffrage universel. Nous devons plaider pour le respect du pluralisme, des partis, des candidats, des bonnes pratiques pour le respect des procédures. Nous avons ici, au niveau du Conseil de l’Europe, ce qu’il faut pour avancer dans les différents pays : la Commission de Venise dont je salue le Président, la Commission du monitoring, les observateurs, les rapporteurs et la Cour européenne des Droits de l’Homme.

En ce qui concerne le contenu, c’est-à-dire les droits, faisons référence une fois de plus à la Convention de sauvegarde des Droits de l’Homme de 1950 – elle a plus d’un demi–siècle – qui permet à plus de 800 millions d’européens de bénéficier à la fois de la substance du droit et d’un certain nombre de garanties. N’oublions pas non plus que c’est l’individu, le citoyen universel, quel qu’il soit, quel que soit son groupe, qu’il appartienne à une majorité ou à une minorité, quelle que soit son origine ethnique ou religieuse, qui porte avec lui ces droits universels.

Il faut une dynamique. Celle-ci suppose une volonté. Il ne suffit pas de voter des lois, encore faut-il les appliquer. L’opinion publique est souvent en retard. Je pense à l’abolition de la peine de mort, qui a posé des problèmes partout. Il faut savoir oser et avancer. Parfois, les mœurs sont en avance sur les lois. Lors du vote de la loi autorisant l’interruption volontaire de grossesse en France, la loi de 1920 punissait encore de mort les femmes qui avortaient.

Je dirai que l’espace démocratique s’élargit à quarante-six États, dont la Russie. L’Amérique latine et les pays musulmans arabes bougent. Cependant, Mme Arbour disait ce matin que la démocratie est menacée. Les menaces pèsent même sur les droits qui semblaient être les plus enracinés. C’est un défi qui exige à la fois notre vigilance et toute notre exigence. »

M. Jacques Legendre a plus particulièrement insisté sur les aspects « culturels » du débat :

« Le débat d’aujourd’hui honore notre Assemblée parlementaire. Il faut en féliciter tous les initiateurs. Dans un monde tourmenté, la Grande Europe semble une terre de paix et de liberté. C’est à peine si nos enfants ont conscience des luttes fratricides qui ont ensanglanté naguère le vieux continent.

Certes, les procédures de la démocratie, l’équilibre des libertés fondamentales et les droits individuels par rapport à la paix publique et aux droits et aux libertés d’autrui sont sans cesse à parachever. Mais nous savons, nous, responsables politiques, ce que nous devons à l’idéal européen fondé sur la démocratie et les droits de l’homme.

S’agissant plus précisément de la liberté d’expression, on qualifie quelquefois la presse et les médias de “quatrième pouvoir”. Il me semble que cette qualification peut induire en erreur : il ne s’agit pas d’un droit en quelque sorte annexe mais bien d’une liberté constitutive de la démocratie et de l’exercice des droits fondamentaux. En effet, quelle force mieux que l’opinion éclairée peut ramener à la raison les pouvoirs exécutif, législatif voire judiciaire, tentés par l’excès ?

Dès le 26 août 1789, les premiers représentants élus du peuple français déclaraient : “La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l’homme : tout citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l’abus de cette liberté, dans les cas déterminés par la loi”.

Notre Convention des Droits de l’Homme de 1950 reprend cet équilibre en trois parties : l’affirmation de la liberté, la nécessaire répression des abus et, enfin, l’arbitrage selon une norme impersonnelle et préalablement établie. La Convention européenne des Droits de l’Homme a en outre organisé le contrôle des atteintes à la liberté d’expression par le juge statuant sur les décisions des autorités publiques.

Si j’ai rappelé que l’Europe apparaît comme un monde paisible, je n’en suis pas moins conscient, avec vous tous, des menaces que le terrorisme fait peser sur notre continent. Il y a eu les morts de Madrid, puis ceux de Londres, venant après ceux de Paris en 1995 et surtout ceux du 11 septembre 2001 aux États-Unis. Ce terrorisme s’en prend aujourd’hui au Maroc et à l’Algérie afin d’y déstabiliser un processus qui pourrait s’engager en faveur de la démocratie et du respect des droits fondamentaux de la personne humaine.

Je suis profondément convaincu que ces aspirations sont universelles et ne sont pas étroitement européennes, mais il nous appartient d’en porter plus particulièrement l’exigence et de considérer qu’elles sont valables pour tous.

Nous devons résolument écarter de nous le piège de la notion de “guerre de civilisations”. Nous militons avec plusieurs organisations, dont l’Unesco, pour la diversité des cultures, le dialogue interculturel et interreligieux. Une convention a été signée à ce sujet à l’Unesco et je souhaite qu’elle soit ratifiée bientôt par les États membres du Conseil de l’Europe. Oui, la démocratie est un combat. C’est le rôle du Conseil de l’Europe de soutenir ce combat. Ce sera l’exigence de notre Assemblée, année après année, d’affiner la nécessaire vigilance. »

M. André Schneider a rectifié quelques approximations relevées dans le rapport de M. Gross :

« Comment ne pas se réjouir aujourd’hui des succès enregistrés dans ce domaine par notre organisation, le Conseil de l’Europe, succès dont les différents rapports se font tous l’écho. Je voudrais insister tout particulièrement sur l’importance de la Convention européenne des droits de l’homme et de la Cour européenne des droits de l’homme.

Aujourd’hui les Etats européens dans leur très grande majorité ont le privilège de vivre dans une démocratie, ce qui n’était pas le cas avant 1989. Le Conseil de l’Europe a accompagné efficacement les Etats qui ont connu ces processus de transformation.

Cependant de nombreux défis demeurent, tant pour les démocraties que pour les droits de l’homme, et de nombreux progrès restent à accomplir, comme le souligne le travail des différents rapporteurs.

En tant que membre de la délégation française je voudrais d’ailleurs réagir amicalement à certains propos de notre collègue M. Andréas Gross dans son rapport sur la situation de la démocratie, propos relatifs à la France.

Le premier point se rapporte au financement illégal de partis politiques. Je voudrais tout de même préciser que depuis 1988 le législateur français a adopté de nombreuses dispositions en matière de financement de la vie politique destinées à en assurer la transparence :

- les partis reçoivent une aide publique proportionnelle à leurs résultats électoraux et les dons des personnes morales sont interdits ;

- les candidats doivent, sous peine d’annulation de l’élection et d’inéligibilité, retracer leurs dépenses et recettes dans un compte de campagne contrôlé par une autorité indépendante.

Le deuxième point concerne l’indépendance du parlement.

Il est exact qu’en France, de par la Constitution, l’ordre du jour des assemblées est fixé prioritairement par le gouvernement. Mais cet élément du parlementarisme rationalisé a été approuvé par référendum par 79,2 % de nos citoyens. Par ailleurs, l’article 16 de la déclaration des droits de l’homme, partie intégrante de notre bloc constitutionnel, dispose que «Toute Société dans laquelle la garantie des Droits n'est pas assurée, ni la séparation des Pouvoirs déterminée, n'a point de Constitution. ». Il ne me paraît donc pas que cet élément, pris isolément et sans tenir compte du contexte historico politique français, puisse sérieusement faire douter du caractère démocratique du régime de mon pays.

Ces précisions étant apportées, j’exprime mon soutien aux excellents rapports sur la démocratie et les droits de l’homme soumis aujourd’hui à notre assemblée. »

3. Suivi des résultats obtenus par les Etats

Au cours de ce débat est intervenu M. Jean-Michel Belorgey, rapporteur général du Comité européen des droits sociaux, ancien député :

« Mes treize collègues du Comité européen des droits sociaux ont souhaité que notre message soit bien perçu comme collectif. C’est pourquoi je m’en tiendrai scrupuleusement, ou presque, au texte écrit remis aux interprètes.

Je rends hommage au rapporteur de la Commission du suivi et à ceux d’entre vous qui ont été suffisamment sensibilisés à ses enjeux, ainsi qu’aux représentants des mécanismes de régulation.

Si l’idée de continuum des droits civils et politiques, des droits sociaux n’est pas frappée de caducité, s’il ne fait pas non plus bon de la caresser sans lui donner les moyens de s’incarner, la Charte sociale du Conseil de l’Europe doit être regardée, de toute évidence, comme le prolongement, s’agissant des droits sociaux, de la Convention européenne de sauvegarde des libertés et des droits fondamentaux.

De même, son organe de régulation, le Comité européen des droits sociaux doit être regardé comme investi d’une fonction essentielle, sinon à l’égal de la Cour européenne des Droits de l’Homme, faute d’un statut équivalent, du moins fonctionnellement de même nature que la sienne.

Le Comité, depuis qu’il lui revient, non seulement d’examiner le rapport des États, mais aussi de se prononcer sur des réclamations collectives tendant à mettre en évidence la violation, par certains d’entre eux, d’engagements souscrits au titre de la charte, exerce une fonction quasi juridictionnelle.

Tout doit donc être mis en œuvre pour que les décisions rendues soient suivies d’effets comme le sont désormais les arrêts de la Cour. Il en va ainsi la plupart du temps, pas encore toujours.

Le fait est aussi que pour modeste que soit le statut du Comité – en comparaison de celui de la Cour –, on gagnerait à en faire application, en particulier en ce qui concerne le mode de désignation de ses membres, qu’il vous revient en principe à vous, Assemblée parlementaire, d’élire comme les membres de la Cour. Malheureusement, cette prérogative continue à être exercée, pour l’instant, contrairement au texte du Protocole de Turin, par le Comité des Ministres. C’est là, je crois, l’un des fronts sur lesquels votre Assemblée pourrait se mobiliser en soutien de la Charte et du Comité, car les droits énoncés, par quelque instrument que ce soit, ne valent que pour autant qu’ils sont justiciables, que pour autant que les manquements qui sont constatés sont sanctionnés. Cela a été redit ce matin par de nombreux orateurs. Or la justiciabilité des droits énoncés par la Charte passe évidemment par la consolidation du statut de son organe de régulation.

La justiciabilité des droits énoncés par la Charte passe aussi par l’élargissement du cercle des pays ayant accepté la juridiction du Comité en matière de réclamation collective, puisque cette acceptation est optionnelle. A la réalisation de cet objectif, à l’adhésion du plus grand nombre de pays possible, aux dispositions correspondantes de la Charte, votre Assemblée – et chacun d’entre vous dans son propre pays – peut également apporter un concours décisif.

C’est enfin de l’évolution de la conception que se font les juges nationaux de l’applicabilité des litiges qui leur sont soumis, des dispositions figurant dans les instruments, tels que la Charte, que dépend, dans le long terme, l’entrée dans les mœurs d’un droit et de droits, qui sinon persisteront à relever de vœux pieux, de résolutions ambiguës. Cette applicabilité doit être regardée comme directe.

Une telle avancée n’était pas, il y a vingt ans, davantage gagnée pour la Convention des Droits de l’Homme qu’aujourd’hui pour la Charte. Le pas a pourtant été franchi. Comme juge dans mon propre pays, j’ai assisté aux longues étapes ; elles ont été parcourues. Nulle raison à ce que le pas ne soit aussi franchi pour la Charte. Chacun d’entre vous, une fois encore, peut prêter décisivement la main. C’est une affaire de conviction et de persévérance, vertus que les membres du Comité essaient pour leur part de cultiver dans leur propre pays. J’ai constaté toute la journée que vous-mêmes ne manquiez ni de conviction ni de souci de persévérance.

Ainsi, ensemble, parviendrons-nous – peut-être – à améliorer comme l’exige la Charte la vie des personnes de tout milieu, de tout groupe d’âge, y compris fragiles, y compris minoritaires ou menacées de discrimination s’agissant de questions aussi fondamentales que le plein emploi, les salaires, les conditions de travail, la dignité dans le handicap, la protection contre la pauvreté et contre l’exclusion sociale, l’égal traitement en matière de protection sociale des migrants.

Les membres du Comité vous agréent, quoi qu’il en soit, de la récolte de votre solidarité avec les laboureurs que nous sommes et de la part que vous voudrez bien prendre aux labours. »

A l’issue de cette journée de débat, l’Assemblée a adopté :

- la résolution n°  1547 rappelant le rôle central joué par le Conseil de l’Europe en matière de droits de l’homme et de protection de la démocratie et proposant des pistes pour améliorer la situation dans ces domaines ;

- la recommandation n° 1791 invitant notamment le Comité des ministres à « défendre le rôle du Conseil de l’Europe …en tant que première organisation attachée à la défense, au soutien et à la promotion de la démocratie et des droits de l’homme…et, à cette fin, s’opposer à toutes les tentatives de l’Union européenne de dupliquer ou d’interférer dans ses travaux » ;

- la résolution n° 1548 relative à l’évolution de la procédure de suivi de l’Assemblée.

B. Les questions internationales

1. Adhésion de la République du Monténégro au Conseil de l’Europe :

Membre du Conseil de l’Europe avant son indépendance, le Monténégro a été accueilli favorablement et le rapporteur, M. Jean-Charles Gardetto, a conclu en faveur de l’adhésion de cette nouvelle République.

M. Jean-Marie Bockel a soutenu cette position :

« Je félicite nos rapporteurs, qui nous invitent à accueillir la République du Monténégro parmi nous. Je devrais d’ailleurs dire “accueillir de nouveau” puisque, à la suite du référendum, la République du Monténégro a bénéficié de sa pleine souveraineté politique, ce qui implique un parcours de réadmission de l’entité nouvelle alors même que nos amis Monténégrins faisaient déjà partie de l’Europe dans son acception politique du “Conseil de l’Europe”. Je joins mon amical salut à nos concitoyens européens du Monténégro aux vœux de bienvenue de nos rapporteurs et à ceux de nos collègues qui sont déjà intervenus.

La souveraineté du Monténégro résulte d’un référendum validé par tous les observateurs, qu’il s’agisse des représentants de l’Union européenne, de l’OSCE ou du Conseil de l’Europe. Tous les voisins de la République du Monténégro, y compris la Fédération de Russie et la République de Serbie, ont déclaré qu’ils entendaient concourir loyalement à la réussite du processus né du référendum. Il me semble que toute assimilation de certaines situations séparatistes plus ou moins inspirées de l’extérieur aurait peu à voir avec une réalité de fait très dissemblable.

Je soutiens donc la proposition d’adhésion que contiennent les rapports qui nous sont soumis.

La répétition des prescriptions qui accompagnent toute adhésion s’impose à la République du Monténégro. Sans doute, la lecture de cette liste d’engagements peut faire apparaître une foule de détails juridiques. En fait, toutes ces prescriptions sont constitutives du “modèle européen”. De même, je veux apporter mon soutien aux deux amendements déposés et en particulier à celui qui préconise des procédures d’enquête impartiales à l’égard des événements qui ont suivi l’émancipation des États issus de l’ancienne Yougoslavie.

Je forme le vœu très ardent que les autorités du Monténégro collaborent pleinement avec la commission de suivi et qu’elles considèrent les observations des rapporteurs de cette commission comme un appui pour conduire les réformes encore nécessaires.

C’est ainsi que l’aspiration européenne si forte parmi la population du Monténégro l’emportera, j’en suis sûr, sur l’empreinte d’une vieille méfiance à l’égard des réglementations tatillonnes héritées du totalitarisme de naguère. Cette méfiance est bien explicable pour un peuple qui se libère d’un système largement calqué sur celui de l’Union soviétique.

Mais ce libéralisme ne doit pas se confondre avec un relativisme généralisé ni un individualisme régi par la seule loi du plus fort. C’est pourquoi, les observations détaillées énoncées par notre excellent collègue Jean-Charles Gardetto doivent inspirer, à mon sens, les objectifs de réforme de la législation interne du Monténégro comme de sa coopération avec les principales organisations internationales.

Enfin, j’espère très vivement assister prochainement au couronnement de ces efforts avec la signature solennelle du statut de la République du Monténégro qui marquera non seulement le retour de ce peuple dans le concert européen mais également le partage de notre idéal commun. »

M. Jean-Marie Geveaux s’est félicité de la voie démocratique qui a amené le Monténégro à l’indépendance et a évoqué les progrès restant à accomplir par ce pays :

« En juin dernier, dans cette même assemblée, nous nous félicitions de l’accession à l’indépendance du Monténégro, selon un processus démocratique et sans violence. Fait significatif, le Parlement, dans sa déclaration d’indépendance, a défini le nouvel État comme une société civile, multinationale, multiethnique et multiconfessionnelle.

Depuis, le Monténégro a continué à faire preuve de maturité politique. Des élections législatives, en septembre 2006, se sont déroulées conformément aux critères démocratiques et ont illustré le pluralisme politique du pays. De nombreuses réformes sont en cours ou ont déjà été adoptées. Certaines ont du mal à se mettre en œuvre, faute de moyens financiers, matériels ou humains: en tout cas, ce petit État fait preuve d’un réel dynamisme législatif.

Ces efforts sont motivés par la volonté clairement affichée du Monténégro d’intégrer la famille européenne. Une première étape a d’ailleurs été franchie, le 15 mars, avec la signature d’un accord de stabilisation et d’association avec l’Union européenne. Néanmoins, le pays doit relever de nombreux défis : dans le domaine économique, des efforts restent à faire car 15 % de la population sont demandeurs d’emploi. C’est pourquoi l’économie parallèle, le trafic d’êtres humains prospèrent.

Il est plus que jamais prioritaire que continue la lutte contre la corruption, déjà bien engagée, comme le souligne le rapport.

Dans le domaine politique, il est urgent et primordial que l’adoption d’une nouvelle Constitution en discussion depuis un an aboutisse. Pierre angulaire des institutions, ce texte doit notamment répondre aux normes européennes et veiller à garantir les droits des minorités.

Autre point sur lequel notre rapporteur a insisté et sur lequel je le rejoins bien volontiers : le système judiciaire doit être amélioré et une véritable indépendance des juges doit être assurée.

Ce n’est qu’au prix de ces réformes que le Monténégro appartiendra à la communauté de valeurs partagées par les membres du Conseil de l’Europe. Car adhérer au Conseil de l’Europe, c’est affirmer son engagement envers les valeurs démocratiques et le respect des droits de l’homme. Adhérer au Conseil de l’Europe, c’est aussi pouvoir bénéficier d’un appui et d’un soutien dans ces domaines.

C’est pourquoi, pour conclure, il me paraît judicieux de continuer à accueillir nos collègues monténégrins en tant que délégation ad hoc au sein de notre Assemblée en formant le vœu de tout cœur que le Monténégro devienne très rapidement le 47e État à rejoindre le Conseil de l’Europe. »

M. Gilbert Meyer a en particulier insisté sur la nécessité de veiller à la bonne application des lois adoptées :

« Ainsi que le rapport le mentionne, cette situation est particulière. En effet, l’Union d’États de Serbie-Monténégro était déjà membre du Conseil de l’Europe jusqu’à ce que le Monténégro proclame son indépendance en juin 2006. A cet égard, on ne peut que se réjouir de la décision des autorités de la République du Monténégro de respecter les traités et les accords internationaux, auxquels l’Union d’États de Serbie-Monténégro avait adhéré, et spécialement les obligations découlant de la Convention européenne des Droits de l’Homme.

Autre sujet de satisfaction : le dynamisme législatif et la volonté de réformes manifestés par ce pays. La rédaction de la nouvelle Constitution forme un élément-clé de cette volonté de réformes et de construction d’un ordre juridique respectant les valeurs fondamentales du Conseil de l’Europe.

Le fait que l’opposition ait finalement participé aux travaux de la commission constitutionnelle est une preuve de la maturité politique de ce petit pays. L’engagement des autorités d’intégrer dans la Constitution les principes fondamentaux d’un État de droit démocratique, nous incite à considérer l’avenir du Monténégro avec optimisme.

Pour autant, des préoccupations demeurent, spécialement quant à la mise en œuvre effective des lois adoptées, comme le souligne le rapporteur. La justice, par exemple, manque cruellement de moyens. La formation des juges doit être améliorée. L’abolition de la peine de mort doit être garantie par la nouvelle Constitution. Il est également important que le Monténégro ratifie la Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention des cas d’apatridie, en relation avec la succession d’États. Le fonctionnement du Parlement pourrait aussi être amélioré utilement. Un nouvel effort doit être fait dans la lutte contre la corruption au sein des pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire, ainsi que dans celle contre les trafics d’êtres humains.

En revanche, on peut se féliciter de la bonne tenue des élections intervenues au Monténégro depuis son indépendance ainsi que de la bonne coopération des autorités avec le Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY).

Dans cette description, les éléments positifs l’emportent largement. Je ne peux que suivre les conclusions du rapporteur quant à la volonté d’inviter la République du Monténégro à devenir le 47e État membre du Conseil de l’Europe. »

En conclusion de ces débats, l’Assemblée a adopté l’avis n° 261 demandant au Comité des ministres d’inviter le Monténégro à devenir membre du Conseil de l’Europe.

2. Le débat d’actualité « Darfour-Soudan : la responsabilité de l’Europe »

Dans son rapport, M. Dick Marty a évoqué en termes forts le drame en train de se dérouler au Darfour. Il a notamment déclaré : « Une assemblée comme le Conseil de l’Europe, ne peut et ne doit pas rester silencieuse face à une tragédie, un désastre humanitaire de cette dimension. Elle ne peut, et ne doit pas rester sans réaction… Permettez-moi de poser quelques simples questions. D’où viennent les armes acheminées au Darfour? Où agissent les intermédiaires qui fournissent ces armes, ces personnages hideux et ignobles qui s’enrichissent sur cette tragédie ? Où sont les comptes bancaires de ces personnages qui vendent des armes ? L’Europe ne sera-t-elle pas concernée par la vague de migration que cette tragédie va indiscutablement provoquer ? L’Europe est bel et bien concernée et ne peut rester silencieuse ! »

Intervenant dans le débat, M. Jacques Legendre a insisté sur la défaillance du gouvernement soudanais et sur les risques que ce conflit faisait peser sur l’ensemble de la région :

« Il est important de dire ici que, pour le Conseil de l’Europe, une vie est une vie et qu’une vie africaine vaut une vie européenne. A propos du Darfour, nous devons en apporter la preuve. Oh, bien sûr, le Darfour, c’est loin, peu exposé aux médias ! D’ailleurs, rares sont les Européens qui savent où se trouve le Darfour.

Toutefois laissons la géographie et voyons les faits humains : quatre millions de personnes sont menacées ; des centaines de milliers d’habitants ont été déplacées ; on ne sait pas exactement combien il y a eu de morts : on parle de 100 000, 200 000 personnes.

Que disent nos diplomates au Conseil de sécurité ? Dans cette enceinte, le représentant de la France, le 4 avril dernier, dénonçait des actes de barbarie, des violences envers les civils, des violences sexuelles, c’est-à-dire tout ce que nous dénonçons ici, année après année. Malgré les efforts des ONG et l’admirable travail de milliers de travailleurs humanitaires auxquels il faut rendre hommage, il constatait la dégradation en profondeur de la situation humanitaire.

Face à cette situation, le Gouvernement soudanais, auquel incombe malgré tout la responsabilité – c’est à lui de protéger ses nationaux – est défaillant, si ce n’est complice. Il dit qu’il appartient à la police de protéger sa population, mais nous voyons bien que sa police ne protège pas la population. Alors, bien évidemment, ce problème qui se déroule en Afrique doit être traité en évitant au maximum les ingérences, qu’elles soient internationales ou d’un continent vers un autre. Certes il s’agit d’abord d’un problème africain, mais l’Afrique a-t-elle la volonté et, surtout, les moyens de le traiter ?

Le 12 avril, le Sénégal, qui a envoyé des troupes au Darfour, a déclaré que l’Afrique n’avait pas donné à l’Union africaine les moyens nécessaires à sa mission de paix au Darfour. Il a menacé de retirer son contingent après que cinq soldats sénégalais aient été tués.

Si la situation humanitaire se dégrade en profondeur, elle est aussi en train de déstabiliser une partie de l’Afrique. Les interventions réciproques du Tchad au Soudan, du Soudan au Tchad pour soutenir les aspirations de telle ou telle fraction de population ou tribu – par exemple, les Agawas – contribuent à alimenter le conflit.

J’étais moi-même en République centrafricaine (RCA) au début du mois de mars. La France y maintient quelques soldats – deux cents hommes –, pour tenter d’aider à la stabilité de ce pays. A cette époque, les troupes centrafricaines et françaises, présentes à Birao sur la frontière du Soudan, ont été attaquées par des éléments irréguliers se déplaçant au Tchad et en République centrafricaine. En fait trois États se trouvent déstabilisés par cette affaire. Il faut être conscients, mes chers collègues, qu’il y a, au cœur du continent africain, un espace qui dépasse le million de kilomètres carrés dans lequel il n’existe plus d’autorité civile, plus de moyens sanitaires, plus de justice et où tout peut se pratiquer.

Il est plus que temps que l’opinion internationale impose à tous une attitude responsable. Le Secrétaire général des Nations Unies a pris l’initiative d’un dialogue direct avec le Président soudanais, en marge du dernier Sommet de la Ligue arabe. Nous devons saluer et soutenir les efforts du Secrétaire général des Nations Unies. Les autorités soudanaises ont donné enfin leur accord à ce que l’on appelle le Paquet renforcé de soutien de l’Onu à l’Amis, la mission de l’Union africaine au Soudan. Il faut maintenant que le Soudan apporte enfin la preuve qu’il accepte et soutient sans réserves le déploiement des moyens et des effectifs prévus au plan adopté à Addis-Abeba en novembre dernier.

Au Soudan, au Tchad, en RCA, la France et la Grande-Bretagne ont des responsabilités qu’elles tiennent de l’histoire. Elles leur donnent non pas le droit de s’ingérer, mais le devoir d’aider l’Afrique.

Quant au Conseil de l’Europe, qui débattait hier des droits de l’homme dans la Grande Europe, il a l’occasion d’apporter la preuve que, pour lui, les droits de l’homme ne sont pas seulement les droits des européens mais bien ceux de tous les hommes. Voilà une bonne raison, mes chers collègues, de soutenir aujourd’hui la proposition de notre collègue, M. Marty. »

Lors de sa réunion en fin de session, le Bureau de l’Assemblée a décidé qu’un rapport sur ce conflit serait examiné lors d’une prochaine session, sans doute en octobre.

3.  L’avis sur le projet de mémorandum d’accord entre le Conseil de l’Europe et l’Union européenne

Les relations entre l’Union européenne et le Conseil de l’Europe font l’objet de débats récurrents en particulier depuis le Troisième sommet des chefs d’Etat et de gouvernement des pays membres du Conseil de l’Europe qui avait chargé M. Jean-Claude Juncker d’un rapport sur ce sujet.

D’une manière générale les membres de l’Assemblée parlementaire déplorent le peu de cas accordé au Conseil de l’Europe alors même que l’Union européenne bénéficie de moyens beaucoup plus importants et en constante augmentation. Il s’agit d’un sujet très sensible comme l’ont montré les débats intervenus lors de la difficile élaboration du budget du Conseil de l’Europe pour 2007. La création, par l’Union européenne, d’une Agence européenne des droits de l’homme destinée à agir dans un domaine jusque là réservé au Conseil de l’Europe n’a fait qu’envenimer les choses.

Dans un contexte déjà tendu, le projet de mémorandum, longuement négocié au sein du Comité des ministres, a fait l’objet d’un accueil pour le moins hostile.

Le rapporteur de la commission des questions politiques a souligné d’emblée que ce qui était en jeu c’était la pérennité du Conseil de l’Europe : « L’Organisation sera-t-elle avalée par l’Union européenne ou poursuivra-t-elle ses activités ? » et il a considéré que le projet en examen n’était pas satisfaisant : « Il ne s’agit pas d’un texte politique. Il ne fait que refléter la pratique actuelle des relations entre le Conseil de l’Europe et l’Union européenne sans vision nouvelle. Les recommandations de M. Juncker n’ont pas été intégrées dans le texte pas plus que les propositions émises par l’Assemblée parlementaire.

L’avis reprend la proposition de l’Assemblée. Le rapporteur ne veut pas entrer dans le détail qui figure dans le texte écrit mais cite les points les plus préoccupants : l’expertise du Conseil de l’Europe dans le domaine des droits de l’homme, de l’état de droit et de la démocratie, la cohérence des espaces juridiques des deux organisations, l’adhésion de l’Union européenne aux instruments juridiques du Conseil de l’Europe et surtout à la convention européenne des droits de l’homme, la dimension parlementaire des réunions quadripartites. »

S’exprimant au nom du groupe PPE, M. Bernard Schreiner est intervenu de manière très offensive et son propos reflète bien le sentiment majoritaire de l’Assemblée parlementaire :

« Il faut essayer de comprendre ce que l’on attend de ce texte qui devrait marquer le renforcement de la coopération des institutions et organisations européennes ainsi que la coordination entre elles, afin de fixer les conditions nécessaires à une véritable construction européenne. Ce texte devrait nous indiquer clairement comment partager les compétences, comment éviter le double emploi et, par conséquent, le gaspillage d’argent public, comment instaurer un dialogue constructif sur des questions de fond. Or il n’en est rien.

Ce mémorandum et ce protocole se devraient d’établir avec clarté les priorités, fixées conjointement, et les stratégies communes pour édifier une construction européenne claire.

Comment le Comité des Ministres peut-il traiter à ce point à la légère les recommandations et les engagements de nos chefs d’État et de gouvernement qui, à Varsovie, déclaraient qu’il fallait assurer la complémentarité du Conseil de l’Europe et des autres organisations participant à la construction de l’Europe ? Ils évoquaient une Europe démocratique et la création d’un nouveau cadre pour renforcer la coopération et l’interaction entre le Conseil de l’Europe et l’Union européenne dans les domaines d’intérêts communs, en particulier les droits de l’homme, la démocratie et l’État de droit.

Lors de ce sommet, des chefs d’État et de gouvernement ont chargé M. Jean-Claude Juncker, Premier ministre du Luxembourg, de préparer, à titre personnel, un rapport sur les relations entre le Conseil de l’Europe et l’Union européenne sur la base des décisions prises lors du Sommet.

Sur le Mémorandum qui nous est proposé, sans trop allonger mon discours, car tout a déjà été dit, j’ajouterai que le texte est un texte “défaillant” – je reprends le terme. Il est insuffisant, décevant. Nous ne pouvons admettre cela. Il faudrait tout de même que le Comité des Ministres comprenne que notre Assemblée est une assemblée d’élus du peuple, d’élus de nos nations, qui représentent les intérêts de leurs pays et qui, à ce titre, ont des avis à donner. Il ne s’agit pas de nous traiter à la légère !

Ce texte ne renforce en rien les acquis du Conseil de l’Europe. Il ne renforce en rien nos domaines d’excellence, qui sont essentiellement, la protection des droits de l’homme, de la démocratie, et de l’État de droit. Notre rôle s’entend en un partenariat réel avec l’Union européenne. Nous ne voudrions pas être considérés comme “la cinquième roue du carrosse”.

Ce texte, tel qu’il est présenté, est inacceptable. Il nous faut l’améliorer. Les propositions de M. Ateş et de la commission des questions politiques sont tout à fait pertinentes. Si elles ne sont pas acceptées par le Comité des Ministres ni par le Comité de suivi, le Mémorandum sera entièrement à reprendre. Depuis déjà deux ans que dure ce travail, nous attendons l’avis que doit rendre le Comité des Ministres !

Je regrette vivement le peu de considération porté à notre Assemblée d’élus ainsi que le peu de considération accordé aux chefs d’État et de gouvernement qui se sont engagés à clarifier et à renforcer le rôle du Conseil de l’Europe aux côtés/à côté de l’Union européenne. »

A l’issue de ses débats l’avis adopté par l’Assemblée propose plusieurs amendements substantiels au texte et indique que si « le Comité des Ministres n’acceptait pas les amendements essentiels proposés ci-après, l’Assemblée considère que le mémorandum ne serait conforme ni aux engagements du Sommet de Varsovie ni au rapport Juncker, et n’apporterait aucune valeur ajoutée. »

Avis no 262

Mémorandum d’accord entre le Conseil de l’Europe et l’Union européenne

1. Le renforcement de la coopération entre les institutions et organisations européennes ainsi que la coordination de leurs actions représentent des conditions nécessaires au succès de la construction européenne. Il faut, pour cela, partager clairement les compétences, éviter les doubles emplois et instaurer un dialogue constructif sur les questions de fond en vue de fixer des priorités conjointes et d’élaborer des stratégies communes chaque fois que cela est possible.

2. Etant donné que le Conseil de l’Europe et l’Union européenne ont en commun certains domaines d’intérêt et regroupent, en partie, les mêmes Etats membres, leurs relations, à cet égard, sont d’une importance toute particulière.

3. L’Assemblée parlementaire a exprimé son point de vue sur ces relations à plusieurs reprises et, dans ce contexte, elle renvoie à ses Recommandations 1693 (2005) sur la contribution de l’Assemblée au 3e Sommet des chefs d’Etat et de gouvernement du Conseil de l’Europe, 1712 (2005) sur le suivi du 3e Sommet, 1743 (2006) sur le mémorandum d’accord entre le Conseil de l’Europe et l’Union européenne, et 1744 (2006) sur le suivi du 3e Sommet – le Conseil de l’Europe et la création de l’agence des droits fondamentaux de l’Union européenne.

4. L’Assemblée rappelle que lors du 3e Sommet du Conseil de l’Europe, tenu les 16 et 17 mai 2005 à Varsovie, les chefs d’Etat et de gouvernement se sont engagés à «assurer la complémentarité du Conseil de l’Europe et des autres organisations participant à la construction d’une Europe démocratique et sûre, et à créer un nouveau cadre pour renforcer la coopération et l’interaction entre le Conseil de l’Europe et l’Union européenne dans des domaines d’intérêt commun, en particulier les droits de l’homme, la démocratie et l’Etat de droit». A cette fin, il a été décidé de rédiger un mémorandum d’accord entre les deux institutions «afin de créer une structure nouvelle de coopération et de dialogue politique intensifiés».

5. En outre, les chefs d’Etat et de gouvernement ont chargé M. Jean-Claude Juncker, Premier ministre du Luxembourg, d’élaborer, à titre personnel, un rapport sur les relations entre le Conseil de l’Europe et l’Union européenne sur la base des décisions prises lors du 3e Sommet et tenant compte de l’importance de la dimension humaine de la construction européenne. Ce rapport a été présenté à l’Assemblée le 11 avril 2006.

6. L’Assemblée reconnaît que le Comité des Ministres a passé beaucoup de temps à discuter du projet de mémorandum d’accord et à le rédiger, mais elle regrette que le texte n’ait été communiqué que le 10 avril, ce qui n’a guère laissé de temps aux membres de l’Assemblée parlementaire pour l’examiner.

7. L’Assemblée apprécie que le Comité des Ministres se soit montré disposé à associer l’Assemblée à ses travaux, mais regrette qu’il n’ait pas motivé son rejet de tant de recommandations majeures du rapport Juncker et des avis correspondants de l’Assemblée.

8. Elle désire que le projet de mémorandum qui lui a été transmis pour avis ne subisse aucune autre modification que celles qui pourraient résulter des propositions de l’Assemblée.

9. Si toutefois le Comité des Ministres n’acceptait pas les amendements essentiels proposés ci-après, l’Assemblée considère que le mémorandum ne serait conforme ni aux engagements du Sommet de Varsovie ni au rapport Juncker, et n’apporterait aucune valeur ajoutée.

10. Le projet de mémorandum est un document important et son élaboration est accueillie avec satisfaction par l’Assemblée. Il comporte un certain nombre de dispositions qui pourraient améliorer l’état actuel des relations entre les deux institutions.

11. En même temps, néanmoins, l’Assemblée est déçue du contenu global du projet de mémorandum. Il ne comporte aucun engagement précis et concret incitant les parties à déployer de nouveaux efforts substantiels pour renforcer la coopération. Il ne propose pas d’approche novatrice et ambitieuse pour faire face aux défis de la construction européenne. Il ne traduit aucune volonté politique véritable de faire avancer le processus de coopération. En conséquence, il n’ouvrira pas la voie à une coopération plus large et plus intense entre les deux institutions.

12. En outre, le projet de texte ne reflète suffisamment ni les propositions ni les recommandations du rapport de M. Juncker, ni les propositions formulées par l’Assemblée et réitérées à maintes occasions par son Président et ses représentants au cours du processus de rédaction.

13. Dans ce contexte, l’Assemblée observe que la coopération entre l’Assemblée et le Comité des Ministres à ce sujet ne doit pas se limiter à la participation de représentants de l’Assemblée aux réunions de son comité de suivi du 3e Sommet. Pour que la coopération soit fructueuse, il faut aussi que le point de vue de l’Assemblée soit pris en compte lors de la finalisation du document.

14. L’Assemblée relève que la coopération entre les deux institutions au niveau parlementaire (Assemblée parlementaire et Parlement européen) fait l’objet d’un document distinct qui doit être signé par leurs présidents respectifs.

15. L’Assemblée estime que le projet de mémorandum, tel qu’il est actuellement formulé, doit être amélioré et complété de manière à prendre en compte les recommandations figurant dans le rapport de M. Juncker ainsi que les avis précédemment exprimés par l’Assemblée parlementaire et son Président. En conséquence, l’Assemblée recommande au Comité des Ministres d’introduire les amendements suivants dans le projet de mémorandum d’accord :

S’agissant du préambule :

15.1. Au paragraphe 1, à la première ligne, remplacer le mot «unité» par le mot «coopération».

15.2. Au paragraphe 1, à la première ligne, après les mots «les Etats», insérer le mot «souverains».

15.3. Au paragraphe 1, à la première ligne, remplacer le mot «Etats» par le mot «pays».

15.4. Après le paragraphe 2, insérer un nouveau paragraphe libellé comme suit : «Reconnaissant le rôle unique et les acquis du Conseil de l’Europe dans ses domaines d’excellence, notamment la protection des droits de l’homme, la démocratie et l’Etat de droit ;».

15.5. Après le paragraphe 4, insérer un nouveau paragraphe libellé comme suit : «Désireuses d’intensifier la coopération et d’assurer la coordination des actions sur des questions d’intérêt commun ;».

S’agissant des objectifs et principes de la coopération :

15.6. Au paragraphe 8, supprimer les mots «Ce faisant, ils suivront les lignes directrices adoptées par le 3e Sommet à Varsovie, qui a appelé à la construction d’une Europe sans clivages».

15.7. Après le paragraphe 8, insérer un nouveau paragraphe libellé comme suit : «Le Conseil de l’Europe restera la référence en matière de droits de l’homme, de primauté du droit et de démocratie en Europe.»

15.8. Au paragraphe 10, à la première ligne, après le mot «tiendra», insérer le mot «systématiquement».

15.9. Au paragraphe 10, remplacer les mots «en évitant les doubles emplois inutiles» par les mots «en évitant tous les doubles emplois».

15.10. Au paragraphe 10, à la deuxième ligne, après les mots «en évitant les doubles emplois inutiles», ajouter «notamment lorsqu’il s’agit d’envisager la création d’agences européennes et d’élaborer de nouvelles politiques».

S’agissant des priorités communes et domaines d’intérêt pour la coopération :

15.11. Au paragraphe 15, à la première ligne, remplacer les mots «se fonderont sur» par le mot «accepteront».

15.12. Au paragraphe 16, à la fin de la dernière phrase, remplacer les mots «seront prises en compte par les institutions de l’Union européenne» par les mots «seront systématiquement prises en considération par les institutions européennes».

15.13. A la fin du paragraphe 19, ajouter la phrase : «Les deux institutions et leurs Etats membres s’engagent à achever sans délai les travaux préparatoires nécessaires à la réalisation de cet objectif.»

15.14. Après le paragraphe 19, insérer un nouveau paragraphe libellé comme suit : «L’Union européenne reconnaît que le bureau du commissaire aux droits de l’homme deviendra l’institution européenne à laquelle l’Union européenne, tout comme l’ensemble des Etats membres du Conseil de l’Europe, soumettra tous les problèmes qui relèvent des droits de l’homme et qui ne sont pas couverts par les actuels mécanismes de suivi et de contrôle.»

15.15. Remplacer le paragraphe 23 par le nouveau paragraphe suivant : «Gardant cela à l’esprit, il convient d’établir un ordre juridique cohérent par l’intégration des principaux instruments normatifs du Conseil de l’Europe dans le système juridique de l’Union européenne ou par l’adhésion de l’Union européenne aux principaux instruments du Conseil de l’Europe.»

15.16. Après le paragraphe 24, insérer un nouveau paragraphe libellé comme suit : «L’Union européenne et le Conseil de l’Europe remplaceront, dans les nouveaux instruments juridiques du Conseil de l’Europe, la “clause de déconnexion” par une “clause de modulation”, en précisant que les Etats membres de l’Union européenne sont tenus de respecter les conventions du Conseil de l’Europe, en partie par l’exercice des compétences de la Communauté européenne. En cas d’incohérence, il faudra recourir au mécanisme normal de réserves.»

15.17. Remplacer le paragraphe 29 par le nouveau paragraphe suivant : «Eu égard à leur but commun de promouvoir la stabilité démocratique en Europe, le Conseil de l’Europe et l’Union européenne renforceront leur coopération dans les pays qui participent à la politique européenne de voisinage ou au processus de stabilisation et d’association de l’Union européenne, en tenant dûment compte des compétences spécifiques des deux institutions et du respect par les Etats membres du Conseil de l’Europe de leurs obligations et engagements.»

15.18. Au paragraphe 30, à la première ligne, remplacer le mot «Etats» par le mot «pays».

S’agissant des modalités de coopération :

15.19. Après le paragraphe 42, insérer un nouveau paragraphe libellé comme suit : «Afin de garantir la dimension parlementaire des réunions quadripartites, l’Assemblée parlementaire et le Parlement européen seront systématiquement invités à y participer.»

15.20. Au paragraphe 44, après les mots «des consultations plus fréquentes», insérer les mots «destinées à renforcer le dialogue politique».

15.21. Après le paragraphe 49, insérer un nouveau paragraphe libellé comme suit : «Dans le cadre de la politique européenne de voisinage, les deux institutions tiendront des échanges de vues réguliers, et les programmes joints seront planifiés, mis en œuvre et évalués. Des consultations entre la Commission européenne, le Secrétariat du Conseil de l’Europe et des responsables nationaux des pays concernés pourraient être organisées pour discuter des priorités de coopération concernant les programmes joints.»

15.22. Immédiatement après le nouveau paragraphe précité, insérer un nouveau paragraphe libellé comme suit : «Le Conseil de l’Europe et l’Union européenne œuvreront conjointement au renforcement de la coopération avec les pays qui participent au processus de stabilisation et d’association. Ils échangeront régulièrement des informations et coordonneront leurs activités afin de contribuer à développer davantage, s’il y a lieu, les capacités démocratiques de ces pays. L’Union européenne étudiera la possibilité de mettre en œuvre des programmes thématiques (“horizontaux”) en coopération avec le Conseil de l’Europe.»

15.23. Immédiatement après l’insertion ci-dessus, ajouter un nouveau sous-titre intitulé «Présence institutionnelle» et insérer un nouveau paragraphe libellé comme suit : «L’Union européenne prendra de nouvelles mesures pour coordonner ses activités et renforcer sa présence au sein du Conseil de l’Europe, parmi lesquelles la création, dès que possible, de bureaux permanents de la Commission européenne et du Conseil européen à Strasbourg. Le Bureau de liaison du Conseil de l’Europe à Bruxelles deviendra une représentation de plein droit du Conseil de l’Europe auprès de l’Union européenne.»

16. L’Assemblée appelle le Comité des Ministres à élaborer un recueil des principales conventions auxquelles l’Union européenne sera ultérieurement conviée à adhérer.

17. L’Assemblée espère que, malgré ses lacunes, le mémorandum d’accord, une fois adopté et signé, servira d’instrument pour le développement de la coopération et l’amélioration des relations entre les deux organisations. Il est impératif, selon elle, que la mise en œuvre du mémorandum soit évaluée par un groupe de haut niveau et que le mémorandum fasse l’objet d’une révision dans un délai de cinq ans au maximum 

C. Les questions de société

1. Le code de bonne conduite des partis politiques

Le rapporteur de la commission des questions politiques, M. Luc van den Brande, a souligné que l’objet de ce texte était de « de savoir comment construire des règles respectant la démocratie et les droits de l’homme dans les partis politiques. »

Première intervenante française, Mme Josette Durrieu a insisté sur les statuts des partis, leurs conditions de financement et sur le respect de la parité :

« En ce qui concerne les partis, nous faisons les uns et les autres les mêmes remarques. Il importait de rappeler, notamment sous les points 4 et 5, ce que sont les partis politiques, mais nous pourrions peut-être insister davantage. Il est écrit que “les partis politiques constituent une caractéristique permanente des démocraties modernes”. C’est plus qu’une caractéristique ! Le parti politique est un des piliers de la démocratie. “Leur rôle, est-il écrit, est d’intégrer les groupes et les individus (…) et d’élaborer des politiques – c’est-à-dire des réflexions – et des programmes”. Ce n’est pas rien.

La démocratie, et nous aurons sans doute l’occasion de le répéter demain, comprend trois pouvoirs - législatif, exécutif et judiciaire - et trois piliers - les partis politiques, les syndicats et les médias. Il importe de redire que cette organisation de la vie politique et démocratique est essentielle. C’est une organisation collective. Nous savons très bien, les uns et les autres, que nous n’avons pas de vie individuelle, que nous appartenons à un groupe politique, dans chacune de nos assemblées.

Par conséquent, le parti, qui est une institution, devrait retrouver toute sa force. Je constate comme tout le monde, dans mon pays comme dans les autres, que les dysfonctionnements des partis politiques affectent tout le système de nos institutions. Cette crise de fonctionnement est liée à une crise de conscience. Il en résulte une crise de légitimité et une crise de la jeunesse.

La jeunesse se désintéresse non pas de la politique, mais de l’engagement dans une structure au sein de laquelle elle pourrait réfléchir en groupe et confronter des idées, ce qui est principalement le rôle des partis. La crise est idéologique, aussi. Voilà pourquoi peut-être il y a une crise des partis. Le plus souvent un parti adopte une posture ou a du mal à distinguer les grands axes de réflexion, les grandes idées, les idéologies - le mot est devenu tabou, mais on n’en trouve pas d’autre. Dès lors, il n’y a pas de raison pour que le parti ne s’affaiblisse pas. Il n’est plus dans son rôle.

Il convient sans doute de reprendre à la base la définition du parti, de la place qu’il occupe dans l’institution démocratique et, dès lors, d’essayer de lui rendre sa légitimité pour lui rendre sa force.

Le document que nous essayons d’élaborer et que - la Commission de Venise l’enrichira sans doute - vise à promouvoir un certain nombre de principes. Nous en avons repris l’essentiel. Je le rappelle, un parti politique s’appuie d’abord sur une association. Or, pour former une association, a priori, il suffit d’être deux. Il est des pays – nous le voyons dans nos actions de suivi – où l’on bloque assez facilement le processus d’enregistrement. Une telle situation peut se corriger assez rapidement. En revanche, nous sommes peut-être censés ignorer qu’un parti peut être dissous, il peut être interdit et déclaré non licite s’il porte atteinte à des points essentiels du droit ou si son programme comporte des propos racistes ou violents. La Cour européenne des droits de l’homme a déjà tranché. Il existe des jurisprudences. Un parti, cela se crée, mais cela peut être interdit et dissous.

En ce qui concerne le financement, nous savons fort bien, les uns et les autres, qu’un parti politique a besoin de moyens pour exister. Nous sommes en droit de demander de la transparence. On redoute la corruption, on a peur de l’argent dont les origines sont “diverses”. Nous avons évoqué, l’autre jour, à Venise, le problème des fonds en provenance de l’étranger : mais un parti européen est financé par plusieurs pays à la fois. On ne sait donc plus quelle formulation choisir.

En revanche, il convient d’être attentif aux “candidatures bidons” - nous en avons en France, aujourd’hui, pour la présidentielle –, et à la création de certains partis quand la législation s’y prête. Cela nous est aussi arrivé en France. On a évoqué tout à l’heure les “partis nomades”. Il est certain qu’à partir du moment où l’on finance, il convient d’être vigilant.

S’agissant des droits de l’opposition, je pensais à ce qui se passe dans un pays comme le mien où la proportionnelle n’existe pas pour les élections législatives. A l’évidence, une partie des citoyens ne sera pas représentée à l’Assemblée nationale à l’issue des prochaines législatives, notamment le Front national. Je ne le regretterai pas, mais il est évident que certains électeurs ne seront pas représentés dans certaines formules.

Quant aux femmes, il nous faudra dépasser un jour le simple système des quotas. Quand s’emparera-t-on enfin du mot “parité”, qui est essentiel ? Ce serait l’honneur du Conseil de l’Europe que de l’introduire par le biais de ce rapport ! »

M. Jean-Pierre Kucheida a plaidé pour un élargissement de l’approche de ce code notamment au respect des valeurs du Conseil de l’Europe et au rôle des partis dans les médias :

« Dans les démocraties modernes, les partis politiques ont un rôle très important. Le principe est de permettre à des individus, à des groupes partageant des objectifs similaires de s’allier pour promouvoir un programme commun afin que la société de demain puisse progresser dans un sens ou dans un autre.

Or il semblerait que les jeunes notamment, représentant notre avenir, soient moins intéressés par la politique. Cet éloignement se traduit par une abstention de leur part lors des votes, sauf, mes chers collègues, quand il y a un renouvellement de fond, comme c’est le cas aujourd’hui en France. En effet, nous avons pu constater, depuis quelques mois, que les inscriptions sur les listes électorales étaient beaucoup plus nombreuses que jamais, que les sondages sur la future participation permettaient de retrouver quelque espoir dans cette participation des jeunes. Or une partie de ce comportement est à mettre à l’actif des “affaires” qui secouent certains hommes et certains partis politiques : corruption, fonctionnement non démocratique, sous représentation des femmes – encore faut-il que les femmes s’engagent véritablement aussi en politique – surtout quand, dans ces affaires, les actes délictueux ne sont pas punis.

Il est donc très important de créer un code de bonne conduite des partis politiques et de leur permettre de vivre également grâce à des moyens strictement réglementés afin que les citoyens s’intéressent à nouveau à la vie politique de leur pays et reprennent confiance en la démocratie.

Les propositions développées dans le rapport de M. Van den Brande au sujet des mesures à prendre pour qu’il y ait plus de transparence et de meilleures pratiques sont très complètes mais elles devraient aussi toucher à d’autres responsables : hauts fonctionnaires responsables de la haute administration, juristes de haut niveau, hauts représentants de certaines ONG.

Néanmoins, je veux insister sur le fait que d’autres dangers mettent aussi en péril la démocratie : xénophobie, intégrisme, contrôle des médias par des grands groupes financiers qui manipulent l’opinion d’un pays et, parfois, celle du monde entier.

En effet, nous assistons depuis quelques années, dans l’ensemble de nos pays, à la montée des voix intégristes et xénophobes souvent reprises par des partis populistes. Ces derniers ne font que répandre des idées nauséabondes sur les races, le déterminisme, les femmes – toute citation est inutile – dans le seul but de réduire, voire de détruire, la démocratie et la laïcité. Il serait ainsi judicieux d’ajouter au code de bonne conduite des partis politiques, l’obligation, pour eux, de baser leurs programmes sur des idées démocratiques en adéquation avec les valeurs défendues par le Conseil de l’Europe.

Il est également urgent de prendre des mesures pour lutter contre les groupes financiers qui prennent de plus en plus le contrôle des médias. Tel est le rôle, en France, de TF 1. Mon collègue, M. Mota Amaral, vient de le rappeler également, pour d’autres médias qui imposent leur point de vue.

Pour qu’il y ait vraiment la possibilité d’un réel débat démocratique et de plus de démocratie, il faudrait, parallèlement à l’application d’un code de bonne conduite des partis politiques – le masochisme de ceux-ci n’est plus à démontrer – rendre à la presse sa vraie liberté en lui rendant son indépendance.

Il faut donc élargir l’approche. Les politiques, oui, et aussi un code de bonne conduite pour les hommes politiques : mais également pour tous ceux qui touchent de près ou de loin à la vie politique ! »

M. Jean-Guy Branger a insisté sur le coût des campagnes, la lutte contre la corruption et le respect de l’indépendance et de la transparence des partis :

« Notre débat vient à son heure. En effet, il nous appartient de convaincre et de convaincre encore nos concitoyens d’avoir confiance dans la démocratie représentative. Cette confiance ne peut reposer que sur notre propre fair-play. Je reprends d’ailleurs cette heureuse expression du rapport de M. Van den Brande, mon président de groupe.

Appuyé sur les recommandations de la Commission de Venise, le projet de code de bonne conduite des partis politiques obéit en effet tout entier à la volonté de garantir le fair-play du fonctionnement des partis. Les partis sont l’école de la démocratie et, pour les citoyens désireux de s’impliquer dans la vie publique, la première démarche pour structurer leur opinion. J’approuve donc l’exhortation à proposer des activités de formation aux responsabilités politiques non seulement aux femmes, mais à tout jeune candidat.

Quelles sont les grandes caractéristiques des récents scrutins en Europe ? La première est le coût des campagnes. Nous connaissons la dérive qui se produit aux États-Unis. En France, une loi permet de limiter les dépenses maximum. Je précise que les comptes de campagne doivent être présentés au juge, qui seul peut les rejeter pour dépassement des montants fixés.

S’agissant de la lutte contre la corruption, elle me semble en effet nécessaire, mais elle doit se faire sous le contrôle du juge. Á cet égard, les partis politiques comme les ONG doivent respecter les législations visant la circulation “d’argent sale”, y compris les fonds provenant d’organisations classées comme terroristes.

En revanche, je ne suis pas favorable à l’alinéa qui prévoit “la divulgation des biens des politiciens avant, pendant et à la fin de l’exercice de leurs fonctions”. D’abord, la notion de “politiciens” est imprécise. Ensuite, la divulgation sur la place publique des biens de tous les responsables politiques ne peut qu’alimenter la pire démagogie. Les mesures de publicité devraient être réservées aux fonctions de chef de l’État, tandis que les autres titulaires de mandats électifs politiques, au moins à partir d’un certain niveau de responsabilités, devraient être tenus de déposer le décompte de leurs biens et revenus auprès d’une autorité judiciaire.

Quant aux obligations en matière d’indépendance et de transparence, elles devraient s’appliquer à tous, y compris aux ONG de la société civile avec lesquelles les partis politiques sont appelés à dialoguer.

Enfin, je souhaite que le projet de bonne conduite des partis politiques, comme la note de la Commission européenne pour la démocratie par le droit, dite Commission de Venise, fasse référence à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme, laquelle a reconnu comme licite l’interdiction de partis politiques qui comportaient, dans leur programme, des incitations à la violence, alors même que ces partis n’étaient pas au pouvoir et donc pas directement en situation de provoquer des violences.

Si je fais référence à l’arrêt “Refah et autres”, c’est parce qu’il doit nous inspirer : le droit électoral est toujours d’interprétation stricte pour protéger l’exercice du suffrage universel. Il convient donc d’inscrire la possibilité, pour le juge, de contrôler les déclarations des partis afin d’exclure les programmes racistes ou incitant à la violence.

Je tiens enfin à exprimer mon soutien résolu à notre rapporteur pour avis, Mme Bilgehan, et, bien entendu, aux amendements qu’elle va nous proposer au nom de notre commission de l’égalité.

Voilà, mes chers collègues, les observations dont je voulais vous faire part, en insistant pour que l’élaboration d’un code de bonne conduite conforte les partis, cet outil irremplaçable de la vitalité de nos démocraties. »

M. Yves Pozzo di Borgho a notamment souligné l’importance de la séparation et de l’équilibre des pouvoirs :

« Le régime naturel des relations entre les hommes dans la cité est le rapport de forces. La démocratie n’est pas un régime naturel. C’est un combat permanent.

Elle est la conséquence d’une longue maturation, d’une prise de conscience des acteurs de la société que les rapports entre les hommes et les femmes doivent être moins brutaux, plus policés, plus organisés.

L’évolution d’un pays vers la démocratie est lente et variable pour chacun des pays, ce qui fait qu’il n’y a pas de démocratie parfaite.

Mais le critère principal de la démocratie, comme le rappelait Mme Durrieu, est la séparation entre les différents pouvoirs :

– le judiciaire ;

– le législatif ;

 l’exécutif.

Les partis politiques sont les opérateurs de cette vie démocratique.

Ils sont l’émanation d’une philosophie et d’une pensée. Ils sont les principaux vecteurs d’application des idées dans l’action quotidienne.

Ce sont aussi eux qui choisissent ou proposent les membres de l’exécutif (président, chef du gouvernement, ministres), via le choix des électeurs.

Mais ce sont aussi eux qui choisissent les représentants du législatif, qui seront proposés aux électeurs, ceux qui vont faire les lois qui façonneront la vie de leurs concitoyens.

Avant d’affronter l’électeur, la grande majorité d’entre nous, les parlementaires présents ici, ont dû obtenir l’investiture de leur parti.

Dans les partis démocratiques, le poids des membres de l’exécutif ou de ceux qui l’ont été ou de ceux qui sont sur la voie de l’être ont un poids déterminant sur les décisions de leur appareil, notamment sur le choix des candidats aux différentes élections parlementaires, sur l’investiture.

Pour prendre l’exemple de la France, pour ne pas avoir à pointer d’autres pays, un parti n’existe en grande partie que s’il est capable de propulser un de ses leaders au poste suprême de Président de la République.

Son poids est tel que, dans la pratique quotidienne, c’est soit ce leader présidentiable, soit le président, quand il est élu, qui contrôle, choisit les parlementaires qui vont accompagner son action, et ceci quelle que soit la forme statutaire du parti politique dont il est issu.

Comment voulez-vous, après cela, que ces parlementaires choisis ou nommés (dans le cas de la proportionnelle) puissent être indépendants dans la proposition et la rédaction des lois, quand ils sont, avant d’affronter leurs électeurs, aussi dépendants de l’investiture de leur parti pour leur survie électorale ? Cette investiture est attribuée par ceux qui seront les membres de l’exécutif.

Tous les grands candidats à l’élection présidentielle française de cette année se plaignent de la faiblesse de notre Parlement, mais aucun n’a pris conscience que c’est le poids de l’exécutif dans le choix des postulants aux élections législatives qui affaiblit le Parlement.

La démocratie américaine, dès sa création, a compris ce problème et, pour réagir au poids traditionnel du monarque, a instauré un système complexe, qui est le système des « primaires ».

J’adhère à ce rapport car il est une réflexion intéressante sur les partis politiques, mais je regrette que la problématique que je viens de soulever n’ait pas été beaucoup mieux prise en compte.

Comme tous les rapports du Conseil de l’Europe, ce rapport a l’avantage de poser des problèmes, d’aborder des pistes de réflexion, d’apporter des solutions, mais ce ne sont pas des réponses définitives aux différents problèmes que rencontrent les démocraties européennes et je crois que ce rapport, par la suite, devra être repris et approfondi. »

M. Bernard Schreiner a rappelé la réglementation des partis applicable en France :

« Parlant des partis politiques l’écrivain et ancien Président tchèque Vaclav Havel disait « On ne peut guère imaginer le fonctionnement d’une société démocratique sans eux ».

Et effectivement, ce sont eux qui animent le débat politique, participent au pluralisme, permettent à l’opposition de s’exprimer, présentent des candidats aux élections. En un mot, la démocratie représentative ne saurait s’en passer.

En France leur rôle est reconnu par la Constitution qui, dans son article 4, énonce : « les partis et groupements politiques concourent à l’expression du suffrage ». Toutefois, leur influence a pu être critiquée par les populistes tout d’abord qui voient dans les partis un syndicat de privilégiés qu’il est urgent de déloger du pouvoir pour mieux occuper leur place sans doute. Ces critiques là, on peut les considérer comme de peu d’importance. Mais d’autres critiques sont à prendre en considération.

Ainsi un rôle excessif des partis dans les institutions peut être considéré comme néfaste et le général de Gaulle a ainsi pu dénoncer la « République des partis » et dénoncer sous ce vocable une quatrième république plongée dans l’impuissance.

Tout cela pour dire que si les partis sont une condition nécessaire à l’existence d’une démocratie, ils ne sont pas une condition suffisante. Le système institutionnel dans lequel ils évoluent ayant une importance capitale.

Même s’il s’agit là d’une observation d’une démocratie ancienne, je pense qu’elle devait être faite.

Mais cette remarque faite, je tiens à affirmer avec force que tout discrédit jeté sur les partis à la suite de scandales financiers et de leur manque de transparence interne, ne peut qu’aggraver la crise de confiance entre les électeurs et les élus et ainsi miner les bases de nos sociétés démocratiques.

Je ne peux donc que soutenir la proposition de notre rapporteur d’élaborer un code de bonne conduite pour les partis politiques.

Tout ce qui pourra rapprocher les partis des citoyens, accroître leur représentativité sociale, leur attractivité doit être encouragé car les partis politiques doivent absolument apparaître comme légitimes aux yeux de nos concitoyens.

Je rappellerai, pour ma part, le dispositif mis en place en France, depuis une vingtaine d’années par les pouvoirs publics afin d’améliorer la transparence du fonctionnement des partis, assainir leur mode de financement et assurer en leur sein une parité hommes/femmes.

Cependant, comme le souligne le rapporteur, ce sont aux partis eux-mêmes d’évoluer et de s’efforcer de reconquérir l’opinion.

En France, tous les partis ont su profiter de l’émergence des nouvelles technologies en créant leur site sur Internet et en mettant en place des forums de discussion qui sont très fréquentés en ce moment de campagne électorale. Des campagnes pour relancer les adhésions et mobiliser les militants ont été lancées, des primaires ont été organisées pour désigner les candidats.

Tous ces efforts visent à réconcilier l’électeur avec ses élus, à redonner une légitimité aux partis. En effet, la crise que traversent les partis politiques est aussi une crise du politique. C’est pourquoi il est primordial que les pouvoirs publics renforcent la crédibilité des partis comme l’est tout autant la nécessité pour les partis eux-mêmes de regagner la confiance des électeurs.

Un code de déontologie ou de bonnes pratiques ne peut que les aider dans cette tâche et c’est pourquoi je soutiens tout à fait les conclusions de notre rapporteur. »

L’Assemblée a adopté une résolution comportant un projet de Code de bonne conduite des partis politiques :

Résolution 1546

Code de bonne conduite des partis politiques

1. L’Assemblée parlementaire se réfère à sa Recommandation 1438 et à sa Résolution 1344 relatives à la menace des partis et mouvements extrémistes pour la démocratie en Europe ; à sa Résolution 1308 sur les restrictions concernant les partis politiques dans les Etats membres du Conseil de l’Europe ; à sa Recommandation 1516 sur le financement des partis politiques, ainsi qu’à ses Résolutions 1264 et 1320, et à sa Recommandation 1595 sur un code de bonne conduite en matière électorale.

2. Elle se réfère également aux textes suivants adoptés par la Commission européenne pour la démocratie par le droit (Commission de Venise) : les Lignes directrices sur la législation des partis politiques, les Lignes directrices sur le financement des partis politiques, les Lignes directrices sur l’interdiction et la dissolution des partis politiques et les mesures analogues et le Code de bonne conduite en matière électorale.

3. L’Assemblée rappelle les conclusions du Forum du Conseil de l’Europe sur l’avenir de la démocratie, qui s’est tenu à Moscou en octobre 2006 et qui était consacré au rôle des partis politiques dans la construction de la démocratie.

4. L’Assemblée reconnaît que les partis politiques constituent une caractéristique permanente des démocraties modernes, un élément clé de la concurrence électorale et un mécanisme de lien essentiel entre l’individu et l’Etat. Leur rôle consiste à intégrer les groupes et les individus dans le processus politique, à servir d’outil pour formuler et représenter leurs intérêts, à mettre en place les autorités publiques à différents niveaux, à élaborer des politiques et des programmes politiques alternatifs, et à demander des comptes au pouvoir exécutif.

5. Par conséquent, dans la mesure où ils constituent le lien clé entre l’individu et la gouvernance démocratique, les partis politiques portent une responsabilité particulière. Leur bien-fondé et leur crédibilité sont de la plus haute importance pour la légitimité du processus démocratique dans son ensemble. Par ailleurs, leur dysfonctionnement peut affecter la totalité du système et des institutions démocratiques.

6. Il est regrettable que beaucoup de partis politiques et que les politiciens dans leur ensemble soient de plus en plus critiqués et qu’on leur fasse de moins en moins confiance. Dans de nombreux Etats membres du Conseil de l’Europe, certains sont confrontés à une crise de légitimité : ils sont parfois considérés comme corrompus, non démocratiques dans leurs procédures internes et servant plus les intérêts de petits groupes ou d’individus que l’ensemble de la société.

7. Cette baisse de confiance à l’égard des partis politiques contribue à créer une méfiance envers le système démocratique dans son ensemble et, par voie de conséquence, une indifférence à l’égard des institutions politiques et un manque d’intérêt pour le processus politique. La meilleure illustration de ce phénomène est donnée par une baisse de la participation à la vie politique et de forts taux d’abstention aux élections.

8. L’Assemblée est convaincue du fait que les partis politiques devraient reconnaître qu’ils ont le devoir d’améliorer la réputation du système politique. Ils devraient prendre des mesures urgentes :

8.1. pour renouer avec les citoyens en tant qu’individus et se concentrer sur leurs attentes et leurs préoccupations ;

8.2. pour améliorer leur responsabilité envers leurs électeurs ;

8.3  pour renforcer le rôle des représentants élus en tant qu’individus ;

8.4. pour développer leur ouverture et celle des organes décideurs dont ils font partie ;

8.5. pour résister à la tentation de faire des promesses irréalisables aux électeurs.

9. L’Assemblée considère que l’élaboration d’un code de bonne conduite pour les partis politiques, qui définirait les éléments les plus importants pour leur comportement, est à la fois nécessaire et opportune. Ce code devrait s’appuyer sur l’expérience des partis politiques dans les Etats membres du Conseil de l’Europe et s’inspirer des bonnes pratiques existantes. Il devrait promouvoir des concepts et des stratégies qui développent et renforcent le rôle, le statut et l’importance des partis politiques dans un système démocratique.

10. Un tel code renforcerait la démocratie interne des partis et accroîtrait leur crédibilité aux yeux des citoyens, contribuant ainsi à leur plus grande participation à la vie politique. L’Assemblée considère que les bonnes pratiques devraient également promouvoir des principes démocratiques tels que l’égalité, le dialogue, la coopération, la transparence et la lutte contre la corruption.

11. L’Assemblée est préoccupée par le fait que des personnes fortunées peuvent bénéficier de faveurs de la part de partis politiques en échange d’un soutien financier et elle estime que chaque pays devrait adopter des méthodes de financement des partis politiques que le public soutient.

12. L’Assemblée considère également qu’un tel code aiderait les partis à améliorer leur impact sur le processus démocratique et leur capacité à être conformes au cadre juridique dans lequel ils fonctionnent.

13. L’Assemblée considère que le code de bonne conduite des partis politiques devrait porter sur les points suivants :

13.1  bonnes pratiques pour le processus électoral :

13.1.1  promouvoir les principes démocratiques, en particulier la transparence et l’égalité des chances, dans la sélection et la nomination des candidats sur les listes électorales ;

13.1.2. encourager la participation et la nomination de membres venant de groupes sous-représentés (par exemple les jeunes, les minorités, les immigrés et les personnes souffrant d’un handicap) ;

13.1.3. établir une stratégie à long terme comprenant des projets spéciaux et des activités de formation visant à développer la confiance en soi, les connaissances et l’expérience des groupes sous-représentés au sein du parti ;

13.1.4  examiner l’expérience des partis politiques qui ont introduit des quotas pour la sélection et la nomination de candidats pour des élections, et prendre en compte cette possibilité dans leur propre pratique ;

13.1.5. respecter les principes de fair-play et définir des normes générales de conduite pendant les campagnes électorales ;

13.1.6. développer des règles internes qui assureront la conformité avec la législation sur le financement juste et transparent des campagnes électorales;

13.1.7. développer considérablement les moyens par lesquels les électeurs peuvent voter et augmenter le nombre de lieux de vote ;

13.2. bonnes pratiques pour le renforcement de l’égalité entre les hommes et les femmes au sein des partis politiques :

13.2.1. mettre en place des mécanismes favorisant l’accès des femmes aux candidatures et aux fonctions élues, en s’inspirant de l’expérience des autres partis politiques qui ont introduit des quotas et d’autres formes d’action positive pour les femmes, non seulement pour les élections parlementaires mais également pour les élections à des postes décisionnaires, à la fois au sein des partis (présidences, vice-présidences, comités directeurs, etc.) et en dehors des partis (au sein des gouvernements, des commissions parlementaires, etc.) ;

13.2.2. organiser des activités de formation et d’autres formes d’encouragement à la participation active des femmes et des jeunes aux partis politiques et établir des règles de fonctionnement du parti qui permettent tant aux hommes qu’aux femmes de concilier vie professionnelle, exercice des responsabilités familiales et responsabilités au sein du parti politique ;

13.2.3. inviter les partis politiques à fournir chaque année les indicateurs mesurant les progrès accomplis en matière d’égalité entre les femmes et les hommes ;

13.3.  bonnes pratiques pour le financement des partis politiques et des campagnes électorales :

13.3.1. développer des règles internes qui viendraient compléter et renforcer la législation nationale relative au financement des partis politiques et des campagnes électorales, en particulier en ce qui concerne la transparence et la responsabilité ;

13.3.2. développer des règles internes, complémentaires à la législation nationale, afin de contrôler la situation financière des représentants élus avant, pendant et à la fin de leur mandat ;

13.3.3. garantir la transparence, des normes de conduite élevées et une gestion saine de leurs activités publiques afin de maintenir la confiance des citoyens ;

13.3.4. renforcer et soutenir les mesures préventives et répressives visant à combattre la corruption ;

13.3.5. mettre en place des organes disciplinaires indépendants pour enquêter sur la corruption au sein des partis et appliquer des sanctions ;

13.3.6. renforcer l’évaluation, le contrôle et les procédures disciplinaires ;

13.4. bonnes pratiques pour les partis politiques d’opposition :

13.4.1. reconnaître que le rôle de l’opposition a un effet bénéfique sur le processus démocratique ;

13.4.2  renforcer le dialogue entre les partis de gouvernement et d’opposition, et renforcer le principe selon lequel le devoir majeur de l’opposition est de demander des comptes au gouvernement ;

13.4.3. favoriser les conditions garantissant que le rôle des partis d’opposition ne soit pas simplement limité à la critique des partis au pouvoir ;

13.4.4. encourager l’opposition à mettre en place un «cabinet fantôme» ;

13.5. bonnes pratiques pour l’obligation de rendre compte des activités externes et institutionnelles :

13.5.1. respecter l’obligation de rendre compte au public en assurant la transparence, le respect de normes de conduite élevées et une gestion saine des activités publiques ;

13.5.2. renforcer les mesures préventives ainsi que les procédures de mise en œuvre, notamment les procédures d’évaluation et de contrôle, et les mesures disciplinaires ;

13.5.3. contrôler et publier systématiquement les résultats obtenus par les représentants des partis dans les institutions publiques ;

13.5.4. tenir les citoyens informés de l’exécution des promesses électorales, notamment en présentant au public une évaluation du programme du parti et en indiquant dans quelle mesure celui-ci a été traduit en politiques publiques ;

13.5.5. publier le programme électoral sur le site web du parti pendant la durée de son mandat législatif afin qu’il puisse faire l’objet d’un examen public ;

13.5.6. présenter en détail les procédures de présélection et les principales procédures de prise de décision lors de leur enregistrement officiel ;

13.5.7. prévoir la divulgation des biens des politiciens avant, pendant et à la fin de l’exercice de leurs fonctions publiques ;

13.6. bonnes pratiques pour l’obligation de rendre compte des activités et de la démocratie internes :

13.6.1. veiller à ce que le règlement interne des partis politiques soit guidé par des principes de sécurité juridique, de clarté, de transparence, de responsabilité et d’indépendance ;

13.6.2. veiller à ce que l’interaction entre les partis politiques locaux et la société soit fondée sur le dialogue, l’interdépendance et la coopération ;

13.6.3. promouvoir et renforcer l’égalité au sein du système administratif des partis politiques à tous les échelons ;

13.6.4. renforcer les liens entre la hiérarchie des partis et les niveaux locaux et régionaux des organisations ;

13.6.5. renforcer les mesures visant à combattre la corruption au sein du parti et à améliorer l’obligation de rendre compte au niveau interne ;

13.6.6. introduire des conditions claires pour l’adhésion et les droits des membres ;

13.6.7. adopter des procédures internes prévoyant la consultation des membres sur la politique du parti ou sur des décisions importantes pour lui, comme des alliances électorales ou des accords gouvernementaux ;

13.6.8. établir des mécanismes pour garantir l’obligation des membres exerçant des fonctions publiques de rendre compte au sein de leur parti ;

13.7. bonnes pratiques pour la participation des jeunes au processus politique :

13.7.1. créer des sections de jeunes au sein des partis ;

13.7.2. soutenir les organisations de jeunesse des partis aux niveaux local et régional ;

13.7.3. proposer des formations dans le domaine de la participation des jeunes ;

13.7.4. promouvoir la participation active des jeunes membres dans les organes du parti et, en particulier, encourager les candidatures de jeunes à tous les échelons et à toutes les élections, en particulier celles des jeunes femmes ;

13.7.5. encourager les établissements scolaires à prendre mieux en compte la nécessité d’enseigner aux élèves les mécanismes de gouvernement à tous les niveaux ;

13.8. bonnes pratiques pour la participation des minorités nationales :

13.8.1. encourager et renforcer la participation des minorités à tous les niveaux du processus politique ;

13.8.2. veiller à ce que le respect de la dignité et les droits des minorités nationales soient pris en compte dans tout le processus électoral ;

13.9. bonnes pratiques pour l’éducation à la citoyenneté démocratique :

13.9.1. faciliter l’accès des citoyens aux informations concernant les affaires politiques locales, les renseigner sur toutes les formes de participation à la vie publique locale et ouvrir des bureaux visant à faciliter les contacts entre les autorités locales et les citoyens; cela ne devrait pas entraîner l’utilisation de fonds publics pour la propagande de partis politiques ou de certaines idéologies ;

13.9.2. organiser des actions en matière d’éducation à la citoyenneté démocratique, notamment des conférences ouvertes et des groupes de discussion sur les thèmes concernant les droits et les responsabilités du citoyen dans une démocratie, la Constitution, les partis politiques ou le rôle de la société civile ;

13.10. bonnes pratiques pour les médias et la diffusion de l’information :

13.10.1. promouvoir les nouvelles technologies de l’information et de la communication ;

13.10.2. chercher les moyens par lesquels les progrès en technologies de l’information pourraient permettre de renforcer le processus démocratique, la participation individuelle et la prise de décision ;

13.10.3. accroître le flux des informations que les partis peuvent offrir aux citoyens, et recueillir l’avis et la contribution de ces derniers ;

13.10.4. promouvoir des médias libres, compétitifs et actifs, respectueux de la dignité humaine et de l’égalité des sexes ;

13.11. bonnes pratiques pour les relations et l’interaction avec la société dans son ensemble :

13.11.1. veiller à ce que les relations entre les partis politiques et la société civile soient fondées sur l’indépendance, l’interdépendance, le dialogue ainsi que sur le principe de transparence ;

13.11.2. renforcer les liens entre les partis politiques et les citoyens, de manière à contribuer à un système de gouvernement plus transparent et plus participatif.

14. Les principes énoncés ci-dessus devraient être appliqués également aux fédérations des partis au niveau européen.

15. L’Assemblée invite la Commission de Venise à élaborer un code de bonne conduite des partis politiques prenant en compte les éléments ci-dessus.

16. En même temps, l’Assemblée appelle les partis politiques dans les Etats membres du Conseil de l’Europe à fonder leurs actions sur les principes énoncés ci-dessus.

17. L’Assemblée invite la Conférence des organisations internationales non gouvernementales (OING) du Conseil de l’Europe à compléter le code de bonne conduite des partis politiques avec un code de bonne conduite pour la participation civique.

2.  Equité des procès dans les affaires d’espionnage et de divulgation des secrets d’Etat

Le rapport présenté par M. Christos Pourgourides se penche sur diverses affaires dans lesquelles des journalistes ou des scientifiques ont été inquiétés pour avoir montré trop d’indépendance par rapport au pouvoir central.

M. Marc Reymann a rappelé la nécessité d’une indépendance absolue du pouvoir judiciaire et du respect de la liberté des médias :

« Je tiens tout d’abord à féliciter M. Pourgourides pour son excellent rapport, appuyé par des faits concrets.

Après avoir rappelé les points essentiels caractérisant l’équité des procédures judiciaires, il applique ces points significatifs à des affaires d’espionnage intervenues récemment notamment dans la Fédération de Russie, affaires qui lui ont été signalées principalement par des groupes de défense des droits de l’homme. Le rapporteur ne prétend pas se substituer à un tribunal, mais il ne peut que constater des manquements à l’équité des procédures et des abus.

La Fédération de Russie n’est pas seule en cause. Les pressions de l’exécutif exercées sur les médias aux États-Unis, notamment au sujet des pratiques secrètes de la CIA, sont aussi rappelées.

Le rapporteur s’est également livré à un rapide survol de la législation applicable dans vingt-trois pays membres du Conseil de l’Europe en matière de lois relatives à l’espionnage. Sa conclusion est très intéressante; je la cite : “En l’absence d’un pouvoir judiciaire vigilant et véritablement indépendant et de médias indépendants et prompts à dénoncer tout abus de pouvoir, tous les systèmes législatifs passés en revue sont susceptibles de donner lieu à des abus”. Nous sommes donc tous concernés.

Séparation des pouvoirs, indépendance absolue du pouvoir judiciaire, liberté d’information et d’expression, notamment des médias, libre circulation de l’information, voilà quelques principes qui fondent nos démocraties.

Certes, la protection des secrets d’État est légitime et nécessaire depuis toujours mais sans que cela mette en danger les fondements de nos sociétés démocratiques. Il s’agit bien de trouver un équilibre entre l’intérêt des pouvoirs publics à protéger le secret d’État d’une part, et la liberté d’expression et d’information d’autre part, ainsi que l’intérêt pour la société de dénoncer les abus de pouvoir.

En tout état de cause, les services secrets ne doivent pas être en même temps chargés d’effectuer des enquêtes criminelles et d’intenter des poursuites contre les auteurs présumés de ces violations. La Fédération de Russie n’a toujours pas modifié la loi relative à son service de sécurité.

Le rapporteur conclut en appelant les organes compétents de la Fédération de Russie à libérer MM. Soutiaguine, Danilov et Trepachkine et, en attendant leur libération, à leur prodiguer les soins médicaux nécessaires. Je ne peux que souscrire à cet appel. »

A l’issue de ses débats l’Assemblée a adopté :

- la recommandation n° 1792 appelant le Comité des ministres à exhorter les Etats membres, et notamment la Fédération de Russie, à réexaminer leurs législations sur le secret d’Etat afin d’en extraire les formulations trop vagues et de l’appliquer de manière compatible avec le respect de la liberté de communication ;

- la résolution n° 1551 rappelant les principes retenus par elle dans ce domaine et appelant l’attention de la Fédération de Russie sur quelques cas spécifiques.

3.  Contrefaçon et médicaments

M. Bernard Schreiner a présenté ainsi le rapport de la commission des questions économiques et du développement :

« J’ai le plaisir et l’honneur de vous présenter, au nom de la commission des questions économiques et du développement, le rapport sur la « nécessité d’une convention du Conseil de l’Europe relative à la suppression de la contrefaçon et du trafic de produits contrefaits ».

Je tiens à remercier mes collègues de la commission économique qui m’ont aidé à améliorer ce rapport par le biais de toute une série de discussions. J’adresse aussi mes remerciements très sincères à M. Pierre Delval, éminent expert français, dont les avis documentés sur la contrefaçon se sont révélés particulièrement utiles à l’établissement du rapport que je vous soumets.

Il y a quelques années déjà, notre Assemblée tenait son premier débat sur la contrefaçon en Europe. Nous soulignions alors notre préoccupation face à ce phénomène en rapide expansion, en insistant sur les dangers qu’il présente pour la sécurité des consommateurs et sur les dommages économiques qu’il engendre, tout en proposant des mesures ciblées que pourraient mettre en œuvre nos États membres mais aussi le Conseil de l’Europe lui-même.

Je dois dire qu’à l’époque, le Comité des Ministres a fait preuve d’une certaine étroitesse de vue lorsqu’il a examiné les recommandations de l’Assemblée, en faisant remarquer que l’Organisation ne s’occupait pas « pour l’instant » de la contrefaçon, à l’exception des médicaments contrefaits, ce qui est important. Je pense qu’il n’avait pas saisi l’ampleur du problème et avait sous-estimé le rôle normatif et les capacités du Conseil de l’Europe.

La contrefaçon représente aujourd’hui une menace croissante très grave pour l’Europe et le monde. En tant que composante de l’économie souterraine, elle est de plus en plus diversifiée, complexe, massive et liée à des réseaux criminels organisés. La contrefaçon présente des risques majeurs pour la santé publique, la sécurité et l’économie. Elle affecte tous les États membres du Conseil d’Europe, qu’ils soient pays d’origine et de production, de transit ou de destination et de consommation des produits contrefaits.

Alors que nous avons aboli la plupart des obstacles à la libre circulation des personnes et des biens en Europe, nos lois et notre coopération judiciaire n’ont pas suivi. Il reste toujours à créer un espace judiciaire européen sans frontières. Le Conseil de l’Europe contribue notablement à cette création ainsi qu’à la protection des Européens contre certaines menaces majeures. Séparément, nos pays sont vulnérables, ils font ce qu’ils peuvent pour se protéger du fléau de la contrefaçon ; ensemble, ils peuvent être beaucoup plus actifs et beaucoup plus efficaces.

Nul ne peut ignorer que certaines catégories de produits risquent de blesser gravement, voire de tuer, lorsqu’ils sont contrefaits. Je veux parler des pièces détachées, notamment d’automobiles, des jouets, des produits d’hygiène corporelle, des appareils électriques, des produits alimentaires, des alcools. On peut les comparer à des bombes à retardement entre les mains d’utilisateurs finaux souvent non avertis et dont la confiance est, en fait, trompée.

Compte tenu de la mauvaise qualité générale des composants - cancérigènes, allergènes ou extrêmement inflammables -, ou bien d’un montage défectueux provoquant des dysfonctionnements, des coupures, des brûlures, des électrocutions, des incendies voire des explosions, ces produits de contrefaçon sont un vrai problème de santé publique majeur.

Les chiffres parlent d’eux-mêmes. Le nombre d’articles contrefaits saisis aux frontières extérieures augmente d’environ 20 % par an. Les produits contrefaits, dangereux pour la santé et la sécurité, sont de plus en plus nombreux. Parmi les saisies opérées en 2005, ils représentaient 57 %. Quant aux médicaments falsifiés, leurs saisies ont atteint quelque 600 000 articles. Les saisies de denrées alimentaires et d’alcools contrefaits ont concerné 5,3 millions d’articles en 2005.

La plupart des contrefaçons sont aujourd’hui des produits de consommation courante plutôt que des produits de luxe. Leur apparence anodine, passe-partout, rend souvent leur identification impossible sans compétence technique. En partie, cette explosion tient au fait que les fraudeurs sont aujourd’hui capables de produire des contrefaçons à une échelle industrielle. Ils peuvent ainsi accroître leurs bénéfices et disposent, par la même occasion, d’un nouveau mécanisme de blanchiment d’argent efficace.

Inévitablement, les économies européennes sont de plus en plus affectées. De manière générale, la contrefaçon échappe à l’impôt, évite les réglementations concernant la sécurité des produits et se dispense d’investissements coûteux pour le développement des produits, ce qui diminue alors les recettes publiques et les revenus des entreprises légitimes, pénalise la libre concurrence, porte atteinte à la réputation des entreprises, aux emplois, aux investissements et à l’innovation.

La contrefaçon reste une activité très lucrative et à faible risque. Les contrefacteurs peuvent tirer de leur activité des profits aussi élevés que les narcotrafiquants et souvent ce sont des narcotrafiquants qui la reprennent, tout en encourant beaucoup moins de risques. Les poursuites engagées et les peines infligées pour contrefaçon laissent grandement à désirer dans tous les pays, à l’exception des États-Unis. Les dispositions anticontrefaçon en Europe sont essentiellement axées sur les affaires civiles. Le pénal reste pour sa part le grand oublié. L’arsenal répressif est loin d’être à la mesure des profils criminogènes émergents.

Dans ce contexte, la contrefaçon continue d’être perçue globalement comme un délit mineur. Ainsi, le résultat de la lutte anti-contrefaçon répond de manière décalée et partiale aux vrais dangers de la contrefaçon : crime organisé, industrialisation de la contrefaçon, cybercriminalité, blanchiment d’argent et financement du terrorisme. L’Europe doit mieux protéger ses citoyens, victimes directes ou indirectes des menaces criminelles contemporaines.

Mes chers amis, nous devons, par conséquent, nous féliciter des propositions récentes du Parlement européen visant à harmoniser les sanctions pénales pour contrefaçon infligées aux contrefacteurs et aux auteurs de toute violation intentionnelle des droits de propriété intellectuelle commise à une échelle commerciale.

Il est manifestement urgent d’agir pour mieux sensibiliser l’opinion publique aux dangers que représente la contrefaçon pour la sécurité individuelle et collective et d’élaborer une politique européenne cohérente de prévention, de dissuasion et de répression de la contrefaçon. Nous nous réjouissons des perspectives d’élaboration d’une convention européenne sur la lutte contre la criminalité pharmaceutique et je suis convaincu qu’une initiative similaire est nécessaire pour lutter contre la contrefaçon et le trafic de produits falsifiés.

Il importe de rendre hommage aux travaux de grande valeur menés par les autorités nationales et européennes et les organisations spécialisées, au premier rang desquelles l’Union européenne, l’Office européen des brevets, Europol, Eurojust, les services nationaux des douanes et beaucoup d’autres. Nous devons nous aussi mobiliser nos gouvernements à travers ce rapport, sensibiliser l’opinion publique pour que ce crime qu’est la contrefaçon puisse être éradiquée sur notre continent. »

M. Francis Grignon a dénoncé les conséquences des contrefaçons en matière d’emplois et de sécurité des consommateurs :

« Je veux tout d’abord féliciter nos collègues, Bernard Marquet et Bernard Schreiner, qui nous proposent des recommandations sur des problèmes trop méconnus de notre vie politique européenne.

Je citerai à mon tour les effets dévastateurs de la contrefaçon pour l’Europe : elle fausse la concurrence, elle met en danger la sécurité des consommateurs et, enfin, elle ruine nos efforts de recherche.

Cette activité illicite, qui représentait 5 % du commerce mondial en 1998, atteint aujourd’hui 10 %. Interpol estime que ce trafic s’est développé huit fois plus vite que le commerce légitime depuis 1990. Les pertes pour la production mondiale sont de l’ordre de 500 milliards d’euros et 200 000 emplois, dont la moitié pour l’Europe.

Cependant il ne s’agit pas seulement de pertes économiques ou de perte d’emplois, mais aussi de danger pour les consommateurs. A côté des produits traditionnellement contrefaits – marques de luxe, parfums, habillement – la contrefaçon se développe, notamment par le biais d’Internet, dans le domaine des jouets, des appareils électriques, des pièces mécaniques ou encore des médicaments. Si la contrefaçon de médicaments fait l’objet d’un rapport séparé en raison des dangers mortels qu’elles font courir, il faut souligner qu’elle touche très inégalement nos pays, selon les modes de distribution et les systèmes de contrôle ou de remboursement proposés.

Les jouets contrefaits peuvent aussi représenter de graves dangers pour les enfants alors même que les parents sont induits en erreur par une imitation de marques et de logos garantissant les normes européennes. Les appareils électriques domestiques doivent répondre à des normes strictes, qui ne sont presque jamais respectées. Enfin, la libéralisation de la fourniture des pièces détachées automobiles serait particulièrement fâcheuse, aboutissant non seulement à ruiner le marché naguère réservé aux constructeurs, mais aussi à mettre en danger les usagers de la route.

A moyen terme, la contrefaçon menace aussi les capacités d’innovation des producteurs européens.

Comme beaucoup d’entre vous, je place beaucoup d’espoir dans la « stratégie de Lisbonne ». L’Europe ne parviendra à conserver tout son rôle dans l’économie mondiale que grâce aux efforts de formation et de recherche. Cependant, cette contribution décisive au progrès de nos économies pour le plus grand profit de tous les consommateurs ne pourra se développer que si l’innovation trouve sa juste rétribution. Malheureusement, la contrefaçon, c’est aussi le non-respect de la priorité intellectuelle et industrielle.

La principale source de contrefaçon se trouve dans l’immense Chine. « L’atelier du monde », comme on la qualifie souvent, est aussi membre de l’Organisation mondiale du commerce. Il est grand temps qu’elle en respecte les règles de fonctionnement.

La lutte contre la contrefaçon était le message du G8 en juillet 2005, puis en juillet 2006. Je suis persuadé que notre action contribuera à inciter le prochain G8, qui doit se tenir du 6 au 8 juin 2007 près de Rostock, à se saisir de la création d’une « structure internationale de lutte contre la contrefaçon et la piraterie » avec, à la clé, des contrôles et des amendes dissuasives.

En conclusion, l’ouverture des économies au libre échange est un gage de progrès et de prospérité pour l’ensemble de nos consommateurs, aussi bien en Europe que dans le reste du monde, mais cela ne peut se développer que dans le cadre de règles respectées par tous. Or, l’élaboration de ces règles ne peut être que le fait d’États démocratiques, lesquels États ne peuvent être démocratiques que s’ils respectent les droits de l’homme. Or, les droits de l’homme ne se décrètent pas, ils se cultivent. Je me réjouis donc que dans cette enceinte où l’on cultive les droits de l’homme grâce à des rapports tels que ceux que nous examinons aujourd’hui, nous puissions avoir des attaques significatives sur la prospérité pour l’ensemble de nos citoyens. »

M. Gilbert Meyer a souligné l’inadaptation des réponses apportées à la contrefaçon notamment au niveau international et l’urgence d’une réforme :

« Je tiens à féliciter notre collègue et ami, M. Bernard Schreiner, pour la qualité de son rapport sur la contrefaçon, très détaillé et argumenté. J’associerai à ces remerciements notre collègue M. Bernard Marquet.

Ce rapport est un véritable cri d’alarme qui met en lumière plusieurs points importants, à commencer par l’ampleur du phénomène, même s’il est par définition difficilement mesurable. Cette ampleur croissante est désormais facilitée par l’essor des nouvelles technologies telles qu’Internet.

Il met également l’accent sur l’inadéquation des réponses actuelles : insuffisance de la prévention, dispositions communautaires principalement axées sur les affaires civiles, notamment les processus de dédommagement financier, oubli du volet pénal, insuffisance de la coopération policière et judiciaire dans l’espace européen.

Citons également la perception insuffisante de la gravité du problème, que je tiens à souligner. Aux yeux de beaucoup d’Européens, la contrefaçon reste un délit mineur, cantonnée au piratage des objets de luxe. La réalité est tout autre. Le trafic de médicaments contrefaits, qui inquiète à juste titre, n’est que la partie la plus voyante du phénomène. Tous les objets sont concernés et les effets sur le consommateur en termes de santé publique sont sous-estimés. De plus, le manque à gagner des entreprises est colossal.

La lutte ne peut pas être compartimentée. Elle doit être globale et transsectorielle. Une convention relative au seul trafic des médicaments contrefaits est une réponse insuffisante.

Par ailleurs, la contrefaçon est aujourd’hui le fait de réseaux criminels organisés et structurés. Les activités sont mafieuses et dépassent la seule contrefaçon. Elles sont attirées par la perspective de gagner beaucoup en risquant peu.

Les organisations de fraude internationale disposent d’une logistique industrielle leur permettant de produire ou faire produire à échelle commerciale. Le rapport le souligne. En outre, il existe des liens patents entre certains contrefacteurs et des réseaux terroristes.

Une prise de conscience au niveau européen de la gravité du problème et des enjeux économiques et humains est toujours d’actualité. Le Conseil de l’Europe qui, jusqu’à présent, a été peu actif dans ce domaine précis, se doit de tirer la sonnette d’alarme et de proposer des solutions.

Il s’agit de recourir à des instruments internationaux puisque ce commerce illicite est mondial. La proposition du rapporteur d’élaborer un instrument juridique paneuropéen paraît dès lors parfaitement logique et cohérente. Je vais plus loin : cet instrument s’impose et la lutte contre la contrefaçon plus encore.

Monsieur le Président, mes chers collègues, j’apporte mon entier soutien aux analyses et conclusion de l’excellent rapport qui vient de nous être présenté. »

L’Assemblée a conclu ses débats sur ce point en adoptant :

- la recommandation n° 1793 sur la nécessité d’une convention du Conseil de l’Europe relative à la suppression de la contrefaçon et du trafic de produits contrefaits ;

- la recommandation n° 1794 sur la qualité des médicaments en Europe.

ANNEXES

Autres interventions en séance

des membres de la délégation française

Séance du lundi 16 avril, matin :

RAPPORT D’ACTIVITÉ DU BUREAU

Intervention de M. Jean-Guy Branger :

« Je voudrais interroger le Bureau sur le déroulement et les échos de notre campagne du Conseil de l’Europe contre la violence domestique.

L’actualité judiciaire en France est marquée par des poursuites du chef de crimes épouvantables. D’une part, à Marseille, vient de se tenir la reconstitution de l’incendie volontaire d’un bus qui a laissé très grièvement handicapée une jeune femme, brillante étudiante. Depuis à Nantes, nous avons retrouvé le corps d’une jeune femme de 23 ans affreusement mutilée.

Il y a, d’autre part, une cour d’assises à Aix-en-Provence qui vient de juger les auteurs du meurtre d’une jeune femme de 23 ans, Ghofrane Haddaoui. Le rapport d’autopsie a «établi qu’une trentaine de coups, à l’aide de grosses pierres jetées sur la boîte crânienne avaient entraîné des lésions cérébrales et une hémorragie mortelle».

En un mot, il s’agit d’une lapidation. Je voudrais rappeler que le secrétaire général de l’Organisation de la Conférence islamique a été reçu, ici même, le 4 octobre 2005.

Je l’avais alors interrogé sur la déclaration finale de cette Conférence qui s’était tenue à Istanbul en juin 2004 et qui contenait un paragraphe intimant aux autorités européennes de ne pas s’ingérer dans les «affaires intérieures» des États respectant la Charia, même s’il s’agissait de légitimer la lapidation.

Mes chers collègues, si je rappelle ces faits, c’est précisément pour mettre en garde notre Assemblée contre tout «dialogue structuré» avec des organisations non gouvernementales qui, dans leurs textes de référence eux-mêmes, rangent la violence contre les femmes, y compris la lapidation, parmi les «affaires intérieures». Ce ne sont pas des affaires intérieures !

Mercredi, nous allons consacrer toute une journée de débats, avec les plus éminents spécialistes, à la situation des droits de l’homme en Europe.

Je voudrais, pour ma part, que les travaux de notre Assemblée ne se déroulent pas dans l’ignorance réciproque : d’une part, la campagne contre la violence domestique, d’autre part, la réflexion sur les progrès en matière de droits de l’homme.

En rappelant l’actualité dramatique de mon propre pays - 110 décès de femmes mortes sous les coups de leur compagnon chaque année –, je voudrais non seulement souligner que le Gouvernement français a réellement pris au sérieux, avec la loi de 2006, cette atteinte majeure aux droits de la personne, mais je voudrais également rappeler notre Assemblée à ne pas fuir dans l’empyrée des idées pures et du raffinement indéfini des droits de l’homme, en oubliant la tâche bien concrète et primordiale de protéger les femmes contre les violences qui leur sont faites au quotidien.

Voici les observations que je souhaitais formuler à l’appui de ma question à notre collègue José Vera Jardim afin de connaître le premier bilan et les nouvelles impulsions qui peuvent être données à la campagne contre la violence domestique, dont nous avions fait nôtre le thème pour l’année 2007. »

En réponse, le rapporteur, M. José Vera Jardim a apporté les précisions suivantes :

« Je commencerai par répondre à M. Branger que j’ai vu ce matin une exposition ... Vous me rétorquerez que l’on ne résoudra pas les problèmes avec des expositions, et je vous donnerai raison. Toutefois, il est un élément nouveau : la conscience que tous nous avons désormais, et que nous n’avions pas voilà dix ou quinze ans. Je suis intimement convaincu qu’au Portugal, les violences domestiques étaient aussi grandes, voire plus grandes encore qu’aujourd’hui, mais nos concitoyens n’étaient pas habités de cette conscience civique qui les anime désormais. Au Portugal, le fléau était grand, violent, terrible. C’est pourquoi je suis comme vous en accord avec la campagne lancée dans notre Assemblée et, je l’espère, prochainement dans nos parlements respectifs. Mon collègue qui en est chargé au Portugal a joué dans notre Assemblée un rôle considérable en la matière. Au Portugal, la campagne est bien engagée. Bien entendu, les résultats ne se feront pas sentir en quelques mois ; un long chemin reste à parcourir. »

Séance du mardi 17 avril, matin :

DISCOURS DE M. VIKTOR YANOUKOVYTCH, PREMIER MINISTRE DE L’UKRAINE

Question de Mme Josette Durrieu :

« Monsieur le Premier ministre, votre pays est également concerné par un problème extérieur, mais tout proche, celui du conflit gelé de Transnistrie.

Par la voix de son président, votre pays avait proposé un plan pour trouver une solution et peut-être un statut à la zone. Par ailleurs, votre pays participe avec la Moldova au contrôle de la frontière entre Tiraspol et Odessa.

Quelle est votre position par rapport à ce problème ? Comment le voyez-vous évoluer ? »

En réponse, M. Yanoukovytch a apporté les indications suivantes :

« L’Ukraine espère que la résolution du conflit se fera sur le modèle “5+2”. L’Ukraine participe au processus de négociation en cours, qu’elle soutient et souhaite voir se poursuivre. »


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