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le 18 mars 2003

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N° 689

(1ère partie)

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 12 mars 2003.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES, DE LA LÉGISLATION ET DE L'ADMINISTRATION GÉNÉRALE DE LA RÉPUBLIQUE SUR LE PROJET DE LOI (N° 638) renforçant la lutte contre la violence routière.

PAR M. Richard DELL'AGNOLA,

Député.

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Sécurité routière.

INTRODUCTION 9

I. - DES CHIFFRES QUI TÉMOIGNENT DE L'IMPORTANCE DE LA VIOLENCE ROUTIÈRE 10

A. LA FRANCE, MAUVAIS ÉLÈVE DE L'EUROPE 10

1. Des comparaisons européennes défavorables à la France 10

2. Des statistiques élevées malgré une récente amélioration 10

B. L'IMPORTANCE DU CONTENTIEUX EN MATIÈRE DE SÉCURITÉ ROUTIÈRE 11

1. Un nombre élevé de procès-verbaux 11

2. De nombreux délits et contraventions de la cinquième classe 12

II. - UN PROJET DE LOI À FINALITÉ PRÉVENTIVE 14

A. UNE MEILLEURE LISIBILITÉ DES SANCTIONS APPLICABLES 14

1. La création des délits d'homicide et de blessures involontaires à l'occasion de la conduite d'un véhicule 14

2. La suppression des « permis blancs » 15

B. UNE AMÉLIORATION DE LA RÉPRESSION 15

1. La prise en compte de la réitération de comportements dangereux 15

2. La création de nouvelles peines complémentaires 16

3. La mise en place d'une chaîne automatisée contrôle-sanction 16

C. UN RENFORCEMENT DE LA PRÉVENTION 17

1. La mise en place d'un permis probatoire 17

2. Les autres mesures destinées à renforcer la sécurité routière 17

III. - DES DISPOSITIONS QUI NE CONSTITUENT QU'UN VOLET DU PROGRAMME D'ACTION GOUVERNEMENTAL 18

A. LES MESURES D'ORDRE RÉGLEMENTAIRE ARRETÉES PAR LE COMITÉ INTERMINISTÉRIEL DE SÉCURITÉ ROUTIÈRE 19

1. La mise en place d'un système de contrôle et de sanction automatisé 19

2. L'amélioration de la répression 19

3. L'encadrement des conducteurs 20

B. LA NÉCESSAIRE MOBILISATION DES TOUS LES ACTEURS DE LA SÉCURITÉ ROUTIÈRE 21

1. La poursuite de l'effort financier en faveur de la sécurité routière 21

2. La participation des différents acteurs de la sécurité routière 21

AUDITION DE M. DOMINIQUE PERBEN, GARDE DES SCEAUX, MINISTRE DE LA JUSTICE, ET DE M. GILLES DE ROBIEN, MINISTRE DE L'ÉQUIPEMENT, DES TRANSPORTS, DU LOGEMENT, DU TOURISME ET DE LA MER ET DISCUSSION GÉNÉRALE 22

EXAMEN DES ARTICLES 31

Chapitre Ier - Répression des atteintes involontaires à la vie ou à l'intégrité de la personne commises à l'occasion de la conduite d'un véhicule 31

Articles 1er et 2 (art. 221-6-1, 222-19-1 et 220-20-1 [nouveaux] du code pénal) : Homicide involontaire et blessures involontaires à l'occasion de la conduite d'un véhicule 31

Article additionnel après l'article 2 (art. 223-11 et 223-12 [nouveau] du code pénal) : Création d'un délit d'interruption involontaire de grossesse 40

Article 3 (art. 434-10 du code pénal, L. 234-11, L. 324-12, L. 234-13 et L. 235-5 du code de la route) : Coordinations 41

Chapitre II - Récidive, peines complémentaires et amende forfaitaire 42

Section 1 - Dispositions relatives à la répression des infractions com-mises en récidive 42

Article 4 (art. 131-13, 132-11, 132-16-2 [nouveau] du code pénal, L. 221-2 et L. 413-1 du code de la route) : Infractions commises en état de récidive 42

Section 2 - Dispositions relatives aux peines complémentaires 44

Article 5 (art. 131-6, 131-14, 131-16, 132-28, 221-8, 222-44, 223-18, 435-5 du code pénal, 708 du code de procédure pénale, L. 223-5, L. 224-16, 224-17 L. 234-2, L. 234-8, L. 235-1, L. 235-3 et L. 413-1 du code de la route) : Suppression de la possibilité d'aménagement de la peine de suspension du permis de conduire 44

Article 6 (art. 131-16, 131-21, 131-35-1 [nouveau], 132-45, 221-8, 222-44, 223-18, 434-41 du code pénal, 41-1 du code de procédure pénale, L. 221-2, L. 222-14, L. 221-5, L. 223-5, L. 224-16, L. 231-2, L. 234-2, L. 234-8, L. 235-1, L. 235-3 et L. 413-1 du code de la route) : Peines complémentaires en cas d'infractions commises à l'occasion de la conduite d'un véhicule 48

Article additionnel après l'article 6 (art. 131-35-2 [nouveau] du code pénal) : Peine d'interdiction de conduire un véhicule non équipé d'un enregistreur de vitesse 56

Après l'article 6 56

Section 3 - Dispositions relatives à la procédure de l'amende forfaitaire 57

Article 7 (art. L. 121-3 et L. 322-1 du code de la route, 529-8, 529-10 et 529-11 [nouveaux], 530, 530-1 du code de procédure pénale) : Extension de la responsabilité pécuniaire du titulaire de la carte grise - Modification de la procédure de l'amende forfaitaire 57

Article additionnel après l'article 7 : Examen médical obligatoire 66

Chapitre III - Dispositions relatives au permis à points et instituant un permis probatoire 66

Article 8 (art. L. 223-1, L. 223-2, L. 223-6, L. 223-8, L. 224-5, L. 224-16, L. 224-17, L. 224-18, L. 231-3, L. 232-1, L. 232-3, L. 233-1, L. 233-2, L. 234-1, L. 234-8, L. 235-1, L. 235-3, L. 317-2, L. 317-3, L. 317-4, L. 412-1 et L. 413-1 du code de la route) : Permis de conduire probatoire pour les conducteurs novices 67

Après l'article 8 70

Article 9 (art. L. 223-5 du code de la route) : Délai minimum pour passer son permis de conduire après une invalidation 70

Article 10 (art. L. 223-1, L. 223-3 et L. 223-6 du code de la route) : Modalités du retrait des points 71

Article additionnel après l'article 10 : Modification de la réglementation de la vitesse 73

Après l'article 10 73

Article 11 (art. L. 223-5 du code de la route) : Création d'un délit de conduite malgré un permis invalidé 73

Article additionnel après l'article 11 : Formation des candidats au permis de conduire aux premiers secours 74

Après l'article 11 75

Chapitre IV - Autres dispositions de nature à renforcer la sécurité routière 75

Avant l'article 12 75

Section 1 - Dispositions relatives aux matériels de débridage des cyclo-moteurs et aux détecteurs de radars 76

Article 12 (Chapitre VII du titre Ier du livre III de la partie législative du code de la route chapitre III du titre Ier du livre IV et article L. 130-8 [nouveau] du code de la route) : Interdiction des matériels de débridage des cyclomoteurs et des détecteurs de radars 76

Section 2 - Dispositions relatives au déplacement des obstacles latéraux situés sur le domaine public routier 80

Article 13 (art. L. 113-3 du code de la voirie routière) : Déplacement d'installa-tions et d'ouvrages situés sur le domaine public routier 80

Après l'article 13 81

Section 3 - Dispositions relatives aux véhicules gravement endommagés 82

Article 14 (Chapitre VI du titre II du livre troisième de la partie législative du code de la route, art. L. 326-3, L. 326-5, chapitre VII [nouveau], art. L. 326-13 à L. 326-15 [nouveaux] du code de la route) : Profession d'experts en automobile et procédure relative aux véhicules gravement endommagés 82

Section 4 - Dispositions relatives à la sécurité des inspecteurs du permis de conduire et de la sécurité routière 84

Article 15 (art. L. 211-1 [nouveau] du code de la route) : Peine complémentaire en cas de violences ou d'outrage à l'encontre d'un inspecteur du permis de conduire 84

Section 5 - Dispositions relatives à la connaissance des accidents de la circulation routière 85

Article 16 (art. L. 330-7-1 [nouveau] et L. 330-8 du code la route) : Système d'information sur le réseau routier géré par les collectivités locales 85

Section 6 - Dispositions relatives à la sécurité des transports de voyageurs et de marchandise 86

Article 17 (art. L. 325-1, L. 130-6 et L. 225-5 du code de la route) : Immobilisation des transports de marchandises dangereuses - Habilitation des contrôleurs des transports terrestres - Fichier national du permis de conduire 86

Après l'article 17 88

Article 18 (art. 8, 17 et 37 de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982) : Régle-mentation des entreprises de déménagement - Commissions des sanctions administratives 88

Article 19 (art. 25 de la loi n° 52-401 du 14 avril 1952 et 3 de l'ordonnance n° 58-1310 du 23 décembre 1958) : Entreprises de déménagement - Chrono-tachygraphe électronique 89

Après l'article 19 90

Chapitre V - Dispositions diverses et de coordination 91

Article 20 (art. L. 232-1 à L. 232-3 du code de la route) : Insertion dans le code de la route des nouvelles infractions d'homicide et de blessures involontaires à l'occasion de la conduite d'un véhicule 91

Après l'article 20 92

Article 21 (art. L. 225-2, L. 234-8, L. 234-10 du code de la route) : Simplification - Coordinations 92

Article additionnel après l'article 21 (art. L. 224-1 et L. 224-2 du code de la route) : Rétention et suspension du permis de conduire en cas de conduite après usage de stupéfiants 94

Article additionnel après l'article 21 (art. L. 235-2 du code de la route) : Modification rédactionnelle de la loi du 3 février 2002 94

Article additionnel après l'article 21 (art. 398-1 et 522 du code de procédure pénale) : Harmonisation terminologique du code de procédure pénale 95

Article 22 : Ratification du code de la route 95

Article 23 : (art. L.711-1, 711-2 à 711-3 et 731-1 du code de l'aviation civile) : Enquêtes relevant du bureau enquêtes accidents défense 98

Après l'article 23 99

Article 24 (art. 68 de la loi n° 2000-516 du 15 juin 2000) : Aménagement du principe de l'encellulement individuel 99

Après l'article 24 102

Chapitre VI - Dispositions relatives à l'outre-mer 102

Article 25 : Application à Mayotte 102

Après l'article 25 (art. 837 du code de procédure pénale) : Coordination outre-mer 103

Article 26 : Application en outre-mer et habilitation du Gouvernement au titre de l'article 38 de la Constitution 103

Titre du projet de loi 105

2ème partie du rapport
TABLEAU COMPARATIF

3ème partie du rapport
ANNEXE AU TABLEAU COMPARATIF

ANNEXE : MONTANT DES AMENDES CONTRAVENTIONNELLES

AMENDEMENTS NON ADOPTÉS PAR LA COMMISSION

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES PAR LE RAPPORTEUR

MESDAMES, MESSIEURS,

Dans son allocution du 14 juillet dernier, le Président de la République a fait de la lutte contre l'insécurité routière une priorité de son quinquennat, l'un des trois grands chantiers nationaux avec la lutte contre le cancer et l'insertion des handicapés.

Lors des États généraux de la sécurité routière, le 17 septembre dernier, le Gouvernement a annoncé la mise en place d'un programme d'action destiné à faire diminuer l'insécurité routière, première responsable de morts violentes dans notre pays.

Ce programme, définitivement arrêté lors du comité interministériel de sécurité routière du 18 décembre, a pour objectifs de multiplier les contrôles automatisés, de renforcer la répression par un redéploiement des forces de l'ordre sur le territoire, de forfaitiser les contraventions de la quatrième classe, d'aggraver les peines en cas de conduite en état d'ivresse, de non port de la ceinture de sécurité et d'usage du téléphone portable au volant, de mieux sanctionner les récidivistes et de supprimer les aménagements de suspension du permis de conduire (« permis blancs ») pour les infractions les plus graves.

L'annonce de ces mesures a eu un effet immédiat sur l'insécurité routière, puisque le nombre de morts sur les routes a diminué respectivement de 28,7 % et 33,3 % en décembre et janvier derniers. Pour pérenniser cette tendance et tenter de l'amplifier, il convient d'adopter rapidement les dispositions permettant de traduire dans les faits cette priorité gouvernementale.

C'est ce que propose le projet de loi soumis aujourd'hui à notre assemblée. Ce texte reprend, en effet, l'ensemble des mesures de nature législative décidées par le comité interministériel de sécurité routière. Contrairement à ce que l'on a pu lire ici ou là, il ne s'agit pas d'un texte purement répressif, mais d'un projet à vocation préventive et pédagogique. Il ne crée pas de nouvelles incriminations, mais réécrit certaines dispositions du code pénal et du code de la route afin de rendre les sanctions plus lisibles pour les automobilistes.

Les Français semblent désormais prêts à entendre un discours clair et sans ambiguïté sur la violence routière, comme en témoigne la multiplication des émissions consacrées à ce sujet. Lors d'un sondage réalisé en novembre 2001, soit bien avant le nouveau plan de lutte contre l'insécurité routière, 87 % des français s'intéressaient aux problèmes de sécurité sur les routes. Tout en reconnaissant conduire plus vite que la moyenne, ils admettent à une très large majorité que la vitesse est une cause majeure d'accidents.

I. -  DES CHIFFRES QUI TÉMOIGNENT DE L'IMPORTANCE DE LA VIOLENCE ROUTIÈRE

A. LA FRANCE, MAUVAIS ÉLÈVE DE L'EUROPE

Avec 8 160 tués à trente jours, 153 945 blessés et 116 745 accidents corporels en 2001, la France se classe parmi les mauvais élèves de l'Europe en matière de sécurité routière. La vitesse demeure le facteur principal des accidents, même si l'on constate une récente amélioration dans le respect des réglementations.

1. Des comparaisons européennes défavorables à la France

En 2000, le plus grand nombre d'accidents corporels (382 949) a été enregistré en Allemagne, pays le plus peuplé de l'Union européenne. Mais c'est en France qu'on dénombre le plus grand nombre de tués à trente jours. Avec à peu près le même nombre d'habitants et le même trafic, le nombre de morts sur les routes de France est deux fois supérieur à celui observé au Royaume-Uni.

Si, en 30 ans, le nombre de tués à trente jours a diminué de moitié, passant de 16 445 en 1970 à 8 160 en 2001, ce chiffre a été divisé par trois pendant la même période en Allemagne et aux Pays-Bas. En 2001, la France a un nombre de tués par habitants équivalent à celui du Royaume-Uni en 1970 et de l'Allemagne en 1985.

Avec un taux de tués par milliard de kilomètres parcourus de 5,45, les autoroutes françaises sont environ trois fois moins sûres que celles de Grande-Bretagne. Elles ont également moins sûres que les autoroutes allemandes, qui ont un taux de tués de 4,48. Cette différence de sécurité sur les autoroutes se retrouve sur les routes nationales de rase campagne : avec 19, 4 tués par milliard de kilomètres parcourus, la France se situe loin derrière la Grande-Bretagne, qui enregistre un taux de tués de 9,99.

2. Des statistiques élevées malgré une récente amélioration

La France a connu en 2002 une nette diminution du nombre de victimes sur les routes. Le nombre de tués à six jours s'est élevé à 7 230, soit une diminution de 6,3 % par rapport à 2001. Le nombre de blessés a baissé, lui, de 10,7 %.

Comme l'a souligné le ministre des transports, cette diminution de la violence routière s'est essentiellement concentrée sur les derniers mois de l'année 2002, notamment en décembre où, par rapport au même mois de l'année précédente, le nombre de morts a diminué de 28,7 %, ce qui représente 217 vies sauvées.

Les jeunes adultes âgés de 18 à 24 ans paient un lourd tribu à l'insécurité routière : alors qu'ils représentent 9,1 % de la population française, ils comptent pour 21,4 % des tués et 22,8 % des blessés.

Pour l'Association pour la sécurité des autoroutes, la vitesse est un facteur déterminant ou aggravant dans un accident mortel sur deux. D'après les travaux effectués par le laboratoire Peugeot-Renault, lors d'un choc frontal, la probabilité qu'un conducteur de véhicule léger soit tué à une vitesse d'impact donnée est la suivante :

10 km/h

20 km/h

30 km/h

40 km/h

50 km/h

60 km/h

70 km/h

Ceinturés (%)

0

0

~0

~0

2

22

48

Non ceinturés (%)

0

0

~0,1

~2

22

45

70

Jusqu'à 30 km/h, la probabilité d'être tué lors d'un choc frontal est quasi nulle ; elle augmente cependant rapidement avec la vitesse. La probabilité d'être blessé dans un accident, non nulle pour les petites vitesses, est nettement supérieure à la probabilité d'être tué.

Une étude statistique a montré que l'abaissement de 60 à 50 km/h de la vitesse en agglomération avait permis d'éviter 1 400 accidents en milieu urbain et de sauver 580 vies sur la période 1991-1992.

Pourtant, les automobilistes respectent mal les limitations de vitesse. Ainsi, en 2001, en rase campagne, quel que soit le type de réseau, plus de la moitié des conducteurs étaient en infraction. Les pourcentages de dépassement de la vitesse autorisée sont encore plus élevés en agglomération, puisqu'ils atteignent 83 % dans les traversées d'agglomération par les routes nationales. De manière générale, le taux de dépassement de la vitesse limite est d'environ 60 % pour les voitures de tourisme et les poids lourds et de 65 % pour les motocyclettes.

S'agissant de l'alcool, l'analyse des accidents mortels montre qu'une alcoolémie illégale est présente dans 40 % des cas. Cette proportion s'élève à 51 % lorsqu'il s'agit d'accidents mortels à un véhicule sans piéton.

En 2001, 8 275 651 dépistages ont été effectués, parmi lesquels 182 829 se sont révélés positifs. Le taux de positivité, défini comme le nombre de dépistages positifs rapporté un nombre de dépistages pratiqués, est de 1, 97 pour l'ensemble des dépistages et de 1,36 pour les dépistages préventifs. Le nombre de dépistages pratiqués est cependant en très forte diminution, en raison notamment de la mobilisation des forces de l'ordre rendue nécessaire par l'application du plan Vigipirate.

B. L'IMPORTANCE DU CONTENTIEUX EN MATIÈRE DE SÉCURITÉ ROUTIÈRE

1. Un nombre élevé de procès-verbaux

En 2001, 17 501 856 procès-verbaux ont été dressés pour des infractions routières.

État récapitulatif des infractions au code de la route
Année 2001

Procès-verbaux

Délits routiers

246 162

Règles de conduite

447 682

Limitation de vitesse (hors délits)

1 282 745

Croisements et dépassements

49 627

Priorité de passage - intersections

266 955

Arrêt et stationnement

7 844 884

Éclairage et signalisation

30 263

États et équipement des utilisateurs de véhicules

984 790

Règles administratives

1 089 079

Infractions diverses

638 653

Nombre total de procès-verbaux dressés par la police
et la gendarmerie nationales

12 890 840

Infractions relevées par les polices municipales,
les gardes-champêtres et les agents assermentés

4 611 016

Nombre total de procès-verbaux

17 501 856

La procédure de l'amende forfaitaire est utilisée pour poursuivre plus de 12 millions de contraventions, le ministère public recourant à l'ordonnance pénale (jugement sans audience) dans plus de 470 000 affaires.

Les contraventions liées à l'arrêt et au stationnement représentent une part importante de ce contentieux de masse, avec près de 8 millions de procès-verbaux.

Le taux de recouvrement des amendes et des condamnations pécuniaires est faible. Sur un total de 2,24 millions d'euros (14,7 millions de francs) mis en recouvrement en 1999, seulement 0,8 million (5,2 millions de francs) a été recouvré, soit 35,5 %.

Pour les contraventions des quatre premières classes, qui ne font pas l'objet d'une inscription au casier judiciaire, ce taux de recouvrement est à peine supérieur à 33 %. Il descend à 20 % pour les contraventions de stationnement.

2. De nombreux délits et contraventions de la cinquième classe

Les infractions à la sécurité routière représentent près de 40 % des délits et des contraventions de la cinquième classe sanctionnés en 2001.

Les infractions liées à l'état alcoolique (conduite en état alcoolique, homicide et blessures involontaires par un conducteur en état alcoolique) représentent 40,9 % de ces infractions, celles liées aux irrégularités en matière de documents administratifs 31,3 %, les excès de vitesse et les homicides et blessures involontaires « simples » 18,3 % et les infractions tendant à faire obstacle aux contrôles (délits de fuite, refus de se soumettre aux vérifications) 9,3 %.

Plus de 103 000 condamnations pour conduite en état alcoolique sans atteinte corporelle (CEA) ont été prononcées en 2001 par les juridictions pénales. A elle seule, les CEA représentent plus de 24 % des condamnations prononcées pour délits, loin devant les violences volontaires et le vol.

Les délits liés à la conduite en état alcoolique ont été sanctionnés principalement par des peines d'emprisonnement, dont la partie ferme dépend de l'existence d'une atteinte corporelle et de sa gravité : la durée des peines d'emprisonnement ferme varie de 3,3 mois en moyenne à 11 mois en cas d'accident mortel. Lorsqu'il s'agit d'une conduite en état alcoolique seule, les magistrats utilisent une palette plus diversifiée de sanctions, notamment les mesures restrictives du permis de conduire.

Quantum ferme d'emprisonnement dans des condamnations
ne sanctionnant que des infractions de circulation routière
Année 2001

Infractions

Quantum ferme d'emprisonnement

Total

moins de 4 mois d'emprisonnement

4 mois à 8 mois d'emprisonnement

8 mois à 12 mois d'emprisonnement

12 mois d'emprisonnement
et plus

Conduite sous l'empire d'un état alcoolique seule (CEA)

4 604

1 458

199

133

6 394

Blessures volontaires
avec ou sans CEA

388

189

39

30

646

Homicides involontaires avec ou sans blessures, avec ou sans CEA

80

122

29

125

356

Total

5 072

1 769

267

288

7 396

En 2001, les tribunaux ont prononcé 13 482 condamnations pour blessures involontaires avec une incapacité totale de travail (ITT) inférieure ou égale à trois mois, 3 587 condamnations pour blessures involontaires avec une ITT de plus de trois mois et 16 643 condamnations pour homicides involontaires commis à l'occasion de la conduite d'un véhicule.

La peine la plus lourde prononcée concerne un homicide involontaire par un conducteur en état alcoolique ayant commis une violation délibérée d'une obligation de sécurité et un délit de fuite, puni de sept ans ferme d'emprisonnement. Un délit de blessures involontaires « simple » a été sanctionné de deux ans d'emprisonnement ferme.

Il n'en demeure pas moins que les peines prononcées sont en moyenne très inférieures aux peines encourues, avec une très grande disparité en fonction des tribunaux.

Les chiffres encore relativement élevés de la violence routière nécessitent à l'évidence une meilleure communication sur les sanctions encourues par les conducteurs au comportement dangereux et leur application effective. Celle-ci ne sera toutefois possible que si elle s'accompagne d'une réforme du traitement du contentieux routier, destinée à éviter le blocage d'un système déjà fortement engorgé. C'est à ces deux objectifs que répond le projet de loi.

II. -  UN PROJET DE LOI À FINALITÉ PRÉVENTIVE

A. UNE MEILLEURE LISIBILITÉ DES SANCTIONS APPLICABLES

1. La création des délits d'homicide et de blessures involontaires à l'occasion de la conduite d'un véhicule

Malgré l'importance et la spécificité de ce contentieux, l'homicide et les blessures involontaires commis par les automobilistes ne sont pas réprimés par des dispositions spécifiques, mais relèvent à la fois des articles du code pénal sanctionnant de manière générale les atteintes involontaires à la vie et à l'intégrité de la personne et des articles du code de la route.

Afin d'améliorer la lisibilité des sanctions applicables, les articles 1er et 2 du projet de loi créent trois infractions spécifiques à la conduite automobile et aggravent les peines encourues.

L'homicide involontaire « simple » commis à l'occasion de la conduite d'un véhicule sera désormais puni de cinq ans d'emprisonnement, au lieu de trois actuellement ; en présence d'une circonstance aggravante, la peine sera de sept ans d'emprisonnement, au lieu de cinq ans, cet quantum étant porté à dix ans lorsqu'il existe au moins deux circonstances aggravantes (article 221-6-1 du code pénal).

Les blessures involontaires entraînant une ITT supérieure à trois mois seront punies de trois ans d'emprisonnement, au lieu de deux ans actuellement, de cinq ans en présence d'une circonstance aggravante et de sept ans lorsque ces circonstances aggravantes sont au nombre de deux ou plus (article 222-19-1 du code pénal).

Enfin, les blessures involontaires ayant entraîné une ITT inférieure ou égale à trois mois, qui constitue actuellement une contravention de la cinquième classe, seront punies respectivement de deux ans, trois ans ou cinq ans d'emprisonnement en fonction de l'existence de circonstances aggravantes (article 222-20-1 du code pénal).

Outre les délits de conduite sous l'empire d'un état alcoolique ou après usage de stupéfiants, la violation manifestement délibérée d'une obligation particulière de prudence ou de sécurité et le délit de fuite, qui permettent déjà d'aggraver les sanctions encourues, le projet de loi propose trois nouvelles circonstances aggravantes : la contravention de conduite sous l'empire d'un état alcoolique (1), l'infraction de conduite sans permis et le délit de grand excès de vitesse (2).

2. La suppression des « permis blancs »

La possibilité d'aménager la peine complémentaire de suspension du permis de conduire, en limitant celle-ci à la conduite en dehors de l'activité professionnelle, est utilisée couramment par les tribunaux. Outre les abus auxquels elle donne souvent lieu, cette pratique nuit à la lisibilité et à la crédibilité de la peine de suspension du permis de conduire, pourtant particulièrement bien adaptée aux délits routiers.

L'article 5 du projet de loi supprime donc toute possibilité d'aménagement de ces peines pour les délits routiers les plus graves. Les « permis blancs » ne seront plus possibles pour les délits d'homicide et de blessures involontaires, de conduite sous l'empire d'un état alcoolique ou après usage de stupéfiants, de grand excès de vitesse, de conduite malgré la suspension ou l'invalidation du permis ou de délit de fuite.

B. UNE AMÉLIORATION DE LA RÉPRESSION

1. La prise en compte de la réitération de comportements dangereux

Afin de mieux sanctionner les conducteurs qui, malgré une première condamnation, continuent à avoir un comportement dangereux sur les routes, l'article 4 du projet de loi durcit les règles applicables en matière de récidive.

Ainsi, pour les contraventions de la cinquième classe devenant des délits en cas de récidive, ce qui est le cas des infractions de défaut de permis et de grand excès de vitesse, le délai pour apprécier la récidive est porté de un à trois ans.

Dans le même esprit, les délits d'homicide et de blessures involontaires sont considérés comme une seule et même infraction au regard de la récidive. Les infractions de conduite sans permis, de conduite sous l'empire d'un état alcoolique ou après usage de stupéfiants et de grand excès de vitesse sont également assimilées pour l'appréciation de la récidive. Enfin, lorsqu'un de ces délits constitue le second terme de la récidive, il est assimilé, pour l'appréciation de la récidive, aux infractions d'homicide et de blessures involontaires. Ces modifications permettent d'alourdir les peines encourues par les conducteurs récidivistes, qui sont alors passibles d'un doublement du montant de l'amende et du quantum d'emprisonnement. Ainsi, l'auteur de blessures involontaires qui commet par la suite un homicide involontaire aggravé encourra vingt ans d'emprisonnement, au lieu de dix actuellement.

Si un conducteur voit son permis de conduire invalidé à la suite du retrait de la totalité de ses points pour la deuxième fois en moins de cinq ans, il ne pourra pas repasser son permis avant un délai d'un an, au lieu de six mois actuellement (article 9 du projet de loi).

2. La création de nouvelles peines complémentaires

L'article 6 du projet de loi crée deux nouvelles peines complémentaires, l'interdiction de conduire certains véhicules à moteur et l'obligation de suivre un stage de sensibilisation à la sécurité routière, encourues pour l'ensemble des délits routiers. Le stage de sensibilisation à la sécurité routière, organisé sur le modèle du stage de sensibilisation aux causes et conséquences des accidents de la route, qui permet aux conducteurs de récupérer des points, sera payé par le condamné.

L'article 6 propose également d'appliquer la peine complémentaire de confiscation du véhicule aux délits routiers les plus graves.

Enfin, il étend la peine d'annulation automatique du permis de conduire, actuellement limitée aux homicides et blessures involontaires accompagnés des délits de conduite en état alcoolique ou après usage de stupéfiants, à l'ensemble des homicides et blessures involontaires aggravés, et fixe la durée d'interdiction de solliciter un nouveau permis à dix ans, au lieu de cinq actuellement, cette interdiction pouvant être définitive en cas de récidive d'homicide involontaire aggravé.

3. La mise en place d'une chaîne automatisée contrôle-sanction

L'article 7 du projet de loi étend la possibilité de recourir à des contrôles automatisés des infractions routières, en élargissant le champ d'application de l'article L. 121-3 du code de la route, qui prévoit une responsabilité pécuniaire du propriétaire du véhicule : outre les contraventions à la réglementation sur les vitesses maximales autorisées et sur les signalisations imposant l'arrêt des véhicules, cette responsabilité s'appliquera en cas de non respect des distances de sécurité entre les véhicules et des règles sur l'usage des voies réservées à certaines catégories de véhicules.

Par ailleurs, l'article 7 facilite le traitement contentieux de ces infractions en cherchant à éviter les recours abusifs.

Ainsi, sauf s'il indique l'identité de l'auteur véritable de l'infraction ou fournit le récépissé du dépôt de plainte pour vol, le propriétaire du véhicule ne pourra contester l'amende forfaitaire appliquée que s'il dépose, au préalable, une consignation d'un montant égal à celui de l'amende forfaitaire ; en cas de condamnation, l'amende prononcée devra au moins être égale à l'amende forfaitaire majorée de dix pour cent.

Ces dispositions semblent conformes à la jurisprudence du Conseil constitutionnel, qui, dans une décision du 16 juin 1999, a validé le principe de la responsabilité pécuniaire du propriétaire du véhicule, en considérant que le refus ou l'incapacité d'apporter les éléments justificatifs utiles était constitutif d'une faute personnelle s'analysant comme un refus de contribuer à la manifestation de la vérité ou un défaut de vigilance dans la garde du véhicule.

L'article 7 institue également une présomption de domiciliation à l'égard des propriétaires de véhicules, afin d'éviter que ces derniers n'échappent à l'amende en ne déclarant pas leur changement d'adresse au fichier national des immatriculations. Il limite à cet effet à trois mois le délai de contestation de l'amende forfaitaire majorée, sauf si le contrevenant apporte la preuve qu'il a déclaré son changement d'adresse avant l'expiration de ce délai.

C. UN RENFORCEMENT DE LA PRÉVENTION

1. La mise en place d'un permis probatoire

Réclamé depuis de nombreuses années par les associations de lutte contre l'insécurité routière, le permis probatoire pour les conducteurs novices, proposé par l'article 8 du projet de loi, devrait contribuer à faire reculer la surmortalité de la classe d'âge des 18-24 ans.

Le permis de conduire sera doté, lors de son obtention, d'un capital initial correspondant à la moitié du capital total de points, soit six points, le conducteur novice ne récupérant l'ensemble des douze points qu'à l'issue d'une période probatoire de trois ans pendant laquelle il ne devra avoir commis aucune infraction.

Si, au cours de cette période probatoire, le conducteur novice commet une infraction sanctionnée par le retrait de points, il devra attendre une nouvelle période de trois ans à compter de la date du dernier retrait de points pour acquérir la totalité de ses points.

Le plafond de la réduction de points est par ailleurs relevé : celui-ci pourra atteindre la moitié du nombre de points maximal pour les contraventions et les deux tiers de ce nombre en cas de cumul d'infractions.

Enfin, la conduite d'un véhicule malgré l'invalidation du permis de conduire consécutive au retrait total de points, qui est actuellement une simple contravention, devient un délit, comme la conduite malgré la suspension du permis de conduire (article 11).

2. Les autres mesures destinées à renforcer la sécurité routière

Afin de dissuader les conducteurs de prendre des risques aux conséquences parfois tragiques, l'article 12 du projet de loi renforce la répression de la commercialisation des détecteurs de radars et des kits de débridage des cyclomoteurs, destinés à augmenter la puissance de ces derniers.

Le code de la voirie routière est modifié pour permettre d'assurer le financement, par les occupants du domaine public, du déplacement des obstacles latéraux susceptible d'épargner des vies et des blessures graves en cas de sortie de route (article 13).

L'article 14 donne aux experts en automobile de nouveaux pouvoirs en matière de retrait des véhicules gravement endommagés. Il redéfinit en outre la composition de la commission nationale chargée la liste annuelle des experts en automobile.

Pour mieux prévenir les agressions dont peuvent être victimes les inspecteurs du permis de conduire, l'article 15 donne la possibilité aux magistrats de prononcer une peine complémentaire d'interdiction de se présenter à l'examen du permis de conduire pour une durée de trois ans, en cas de violences ou d'outrage à l'encontre d'un représentant de cette profession.

Afin d'améliorer la connaissance des réseaux et de l'exposition aux risques, les départements, les communes et leurs groupements devront désormais communiquer aux services de l'État, en qualité de gestionnaires de voirie, toute information utile en la matière, le seuil de population à partir duquel cette obligation s'applique étant déterminé par décret en Conseil d'État (article 16).

Les articles 17 à 19 adaptent les dispositions applicables dans le secteur du transport public routier de marchandises et de voyageurs, afin d'améliorer la sécurité du transport des matières dangereuses, étendent aux entreprises de déménagement la réglementation applicable aux transporteurs routiers, créent une commission consultative des sanctions administratives chargée de donner un avis sur les sanctions susceptibles d'être prononcées à l'encontre des transporteurs et renforcent les possibilités d'immobilisation des véhicules et le contrôle des paramètres de conduite grâce au chronotachygraphe électronique.

Par ailleurs, le projet de loi comporte un certain nombre de dispositions de coordination qui modifient notamment les modalités de conservation des données inscrites au fichier du permis de conduire (article 21), ratifient les ordonnances relatives à la partie législative du code de la route (article 22) et autorisent le Gouvernement à étendre par ordonnances les dispositions du projet de loi outre-mer (articles 25 et 26).

Enfin, le projet de loi comporte deux séries de dispositions, sans lien avec le texte, mais qui se justifient par l'urgence de leur adoption. L'article 23 étend ainsi certaines dispositions du code de l'aviation civile aux enquêtes techniques destinées à déterminer les causes des accidents d'aéronefs militaires. L'article 24 complète les dérogations apportées au principe de l'encellulement individuel, posé par la loi du 15 juin 2000 et qui doit entrer en vigueur le 16 juin 2003, afin d'y introduire une référence à la distribution intérieure des maisons d'arrêt et au nombre de détenus présents.

III. -  DES DISPOSITIONS QUI NE CONSTITUENT QU'UN VOLET DU PROGRAMME D'ACTION GOUVERNEMENTAL

Le projet de loi renforçant la lutte contre la violence routière constitue le volet législatif du programme d'action décidé par le comité interministériel de sécurité routière du 18 décembre dernier, qui a par ailleurs annoncé la mise en œuvre d'un certain nombre de mesures d'ordre réglementaire. L'application de ce plan de lutte contre l'insécurité routière nécessite, en tout état de cause, une augmentation des moyens financiers et humains, que le Gouvernement semble avoir déjà engagée, et la mobilisation de tous les acteurs concernés.

A. LES MESURES D'ORDRE RÉGLEMENTAIRE ARRETÉES PAR LE COMITÉ INTERMINISTÉRIEL DE SÉCURITÉ ROUTIÈRE

1. La mise en place d'un système de contrôle et de sanction automatisé

L'extension du champ d'application de la responsabilité pécuniaire du propriétaire du véhicule et le principe d'une consignation préalable en cas de contestation de l'amende ne constituent que deux des éléments de la mise en place de la chaîne de contrôle et de sanction automatisée décidée par le comité interministériel.

Cette chaîne, qui a déjà fait l'objet de quelques expériences, notamment sous le tunnel du Mont-Blanc, se décompose de la manière suivante : après la constatation de l'infraction, à l'aide de radars jumelés à des appareils de photos numériques homologués, les données seront transmises automatiquement à un centre de traitement, qui identifiera le contrevenant grâce à la consultation du fichier national des immatriculations ; l'avis de contravention sera alors envoyé automatiquement au contrevenant et au centre chargé du recouvrement.

Le Gouvernement prévoit ainsi d'installer plus de 1 000 appareils de contrôle en trois ans, la première phase de déploiement étant financée par une dotation de 15 millions d'euros. Parallèlement, il est envisagé de créer une structure spécifique chargée de concevoir et de mettre en œuvre le système de contrôle automatisé et d'assurer la coordination entre les différents acteurs impliqués. Une refonte du fichier national des permis de conduire est également à l'étude, afin d'accélérer l'enregistrement des retraits de points.

Le comité interministériel a également annoncé la création d'une infraction de vitesse moyenne supérieure aux limites réglementaires sur autoroutes, à laquelle votre rapporteur est très favorable. La mise en place de ce dispositif, qui relève du pouvoir réglementaire puisque l'infraction serait de nature contraventionnelle, devrait inciter les automobilistes à mieux respecter les limitations de vitesse. Constitué de caméras reliés à des ordinateurs placée en deux endroits de la voie de circulation, ce dispositif pourra également être utilisé sur les autoroutes de dégagement et sur celles qui ont mise en place un paiement automatisé.

2. L'amélioration de la répression

Les forces de l'ordre devraient disposer de moyens supplémentaires pour assurer le respect des dispositions du code de la route, avec notamment la mise à disposition de véhicules banalisés qui pourront se mêler aux flux de circulation et procéder à des contrôles aléatoires. Les éthylotests électroniques, plus fiables et plus performants, devraient remplacer les alcootests et les éthylotests chimiques. Enfin, des hélicoptères de la gendarmerie et des véhicules banalisés seront équipés de caméras destinées à détecter les comportements dangereux.

Parallèlement à la création des nouveaux délits d'homicide et de blessures involontaires commis à l'occasion de la conduite d'un véhicule, le comité interministériel a décidé d'alourdir les peines encourues pour certaines contraventions.

La conduite avec un taux d'alcoolémie compris entre 0,5 et 0,8 g/l dans le sang sera sanctionnée par le retrait de six points du permis de conduire, au lieu de trois actuellement.

L'absence de port de la ceinture de sécurité devient une contravention de la quatrième classe, et non plus de la deuxième classe, et entraîne le retrait de trois points, contre un point auparavant. De même, le non port du casque sera puni d'une amende de la quatrième classe et sanctionné par le retrait de trois points.

Enfin est créée la contravention d'usage du téléphone portable au volant, sanctionnée par une amende de la deuxième classe et le retrait de deux points du permis de conduire. La création de cette nouvelle infraction semble d'autant plus justifiée qu'une étude réalisée à partir de la fréquence des communications au moment de l'accident a conclu à une multiplication par quatre du taux d'accidents.

3. L'encadrement des conducteurs

Sur le modèle de ce qui existe dans plusieurs pays européens, il a été décidé de mettre en place une vérification continue de l'aptitude à conduire.

Un certificat médical d'aptitude à la conduite sera ainsi exigé avant la délivrance du permis de conduire.

Pendant la vie active, un module d'évaluation de l'aptitude à conduire sera inséré dans les visites médicales prévues (médecine du travail, visites médicales pour étudiants...).

Enfin, au-delà de 75 ans, un examen d'aptitude médicale à conduire devra être effectué tous les deux ans par un médecin de ville avec possibilité d'appel devant la commission médicale du permis de conduire. En cas de déficience physique sans inaptitude totale à conduire, le conducteur pourra se voir imposer une limitation des déplacements dans le temps (conduite de jour, par exemple) ou dans l'espace. Le fait de conduire sans avoir déposé une demande d'examen médical à l'âge de 75 ans sera puni de l'amende prévue pour les contraventions de la troisième classe. En cas de refus de se soumettre à la visite médicale, le préfet pourra prononcer une suspension du permis de conduire jusqu'à la production du certificat médical.

Par ailleurs, conformément à une directive européenne, la durée de l'épreuve pratique du permis de conduire sera fixée à 35 minutes, au lieu de 22 minutes actuellement.

B. LA NÉCESSAIRE MOBILISATION DES TOUS LES ACTEURS DE LA SÉCURITÉ ROUTIÈRE

1. La poursuite de l'effort financier en faveur de la sécurité routière

La sécurité routière, priorité nationale, doit bénéficier de l'effort financier de la Nation.

Le Gouvernement s'est engagé dans cette voie lors du vote de la loi de finances pour 2003, qui a prévu de consacrer 1,65 milliard d'euros à la sécurité routière, contre 1,58 milliard d'euros l'année précédente.

Cet effort financier doit se poursuivre, afin de permettre notamment aux forces de l'ordre de disposer des moyens nécessaires pour appliquer le dispositif répressif en vigueur, au-delà des contrôles automatisés qui concerneront principalement les excès de vitesse. Celui-ci souffre en effet avant tout d'un manque de crédibilité dû à la rareté des contrôles pratiqués. Pour prendre l'exemple de l'alcool, malgré un triplement des contrôle au cours des dix dernières années, les conducteurs français sont contrôlés en moyenne une fois tous les dix ans, contre une fois tous les trois ans en Grande-Bretagne.

Le recrutement de 500 policiers et 700 gendarmes chargés de la lutte contre l'insécurité routière, décidé dans le cadre de la loi d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure, participe de cette démarche.

L'effet positif des nouvelles mesures annoncées ne pourra se prolonger au-delà de 2003 que si les Français ont le sentiment qu'il ne s'agit pas d'un simple affichage, mais qu'elles témoignent d'une réelle volonté politique des pouvoirs publics se traduisant dans les faits par une augmentation des contrôles.

Dans cette optique, il convient également d'examiner avec attention la question du contrôle de la vitesse des motos, qui, trop souvent, échappent à toute verbalisation en raison de l'absence de plaque d'immatriculation à l'avant ou du caractère non réglementaire de la plaque arrière.

2. La participation des différents acteurs de la sécurité routière

Le succès des mesures proposées ne dépend pas uniquement de la mobilisation des forces de l'ordre, mais suppose également un effort de la part de l'ensemble des acteurs de la sécurité routière.

Afin d'assurer le bon fonctionnement des contrôles automatisés, le fichier national des cartes grises devra faire l'objet d'un travail de mise à jour, éventuellement avec l'aide des assureurs.

Il conviendrait également de réfléchir, en liaison avec les sociétés d'assurance, à la mise en place de tarifs spécifiques pour les jeunes conducteurs ayant suivi une formation en conduite accompagnée, afin, d'une part, de favoriser ce type d'apprentissage, dont les effets sont très positifs en terme de sécurité routière, et, d'autre part, d'éviter que des jeunes ne conduisent sans assurance, faute de moyens suffisants.

Les pouvoirs publics doivent également encourager la commercialisation d'éthylotests électroniques, plus maniables et plus fiables que les éthylotests chimiques actuels, par ailleurs très difficiles à trouver.

Une réflexion pourrait également s'engager avec les constructeurs automobiles afin de réfléchir aux améliorations à apporter aux véhicules en terme de sécurité. Il serait ainsi envisageable d'installer sur les automobiles de série des avertisseurs de dépassement de vitesse et de sous gonflage des pneus ou un témoin de non port de l'ensemble des ceintures de sécurité, et non pas seulement de celles des passagers avant.

De manière plus générale, le Gouvernement s'est engagé à mettre en œuvre des programmes de recherche sur la sécurité routière qui, outre la mise au point de nouvelles technologies permettant à terme de doter les véhicules de systèmes permettant d'éviter l'accident et d'aide à la gestion des situations à risques, devraient contribuer à la création de systèmes d'information cohérents sur les données relatives aux accidents et à leurs victimes et au développement de programmes hospitaliers de recherche clinique sur les pathologies, les lésions et les accidents.

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La Commission a procédé le mercredi 5 mars à l'audition de M. Dominique Perben, garde des Sceaux, ministre de la justice, et de M. Gilles de Robien, ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer, et à la discussion générale du projet de loi.

M. Gilles de Robien, ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer a tout d'abord souligné que les mesures prises, depuis 30 ans, par les pouvoirs publics pour lutter contre l'insécurité routière avaient permis de réduire le nombre annuel de tués sur les routes, qui a été ramené de 17 000 en 1973 à 8 000 depuis quatre ans. Il a ensuite rappelé que le Président de la République avait décidé de faire de l'insécurité routière l'un des trois grands chantiers de son quinquennat et indiqué qu'à la suite de cette décision, des États généraux, auxquels avaient participé le Premier ministre et sept autres ministres, s'étaient tenus le 17 septembre, puis un comité interministériel de la sécurité routière le 18 décembre 2002. Il a indiqué que le projet de loi présenté en Conseil de ministres par le garde des Sceaux et lui-même avait pour objet de mettre en œuvre une partie des décisions arrêtées par le comité interministériel et devrait être accompagné, avant Pâques, d'un certain nombre d'autre textes d'ordre réglementaire portant notamment sur la prévention des accidents grâce à un suivi médical des automobilistes, l'incitation au port de la ceinture et du casque et au non usage du téléphone portable. Il a précisé que le contrôle de l'aptitude à conduire pourrait être effectué dans le cadre des visites médicales accomplies dans le milieu professionnel et que les personnes de plus de 75 ans seraient obligatoirement soumises à une visite tous les deux ans. Il a indiqué par ailleurs que le défaut du port du casque serait sanctionné du retrait de trois points de permis de conduire, l'usage de téléphone portable de deux points et la conduite avec 0,5 à 0,8 g d'alcool dans le sang, de six points.

Présentant les dispositions préventives du projet de loi, il a évoqué l'instauration du permis probatoire, destiné à favoriser une meilleure maîtrise de la conduite par les conducteurs novices : le permis qui leur serait délivré comprendrait six points, les six points complémentaires étant ajoutés après trois années s'ils n'ont pas commis d'infractions ; il en résulte, a-t-il souligné, que la commission d'une infraction assortie d'un retrait de six points, comme la conduite sous l'empire d'un état alcoolique, entraînerait l'invalidation de leur permis. Il a ajouté que le projet tendait également à mettre fin à la commercialisation des détecteurs de radars et des kits de débridage des cyclomoteurs, à favoriser le déplacement des obstacles dangereux placés en bordure de route, notamment par EDF ou France Télécom, à retirer du trafic les véhicules gravement accidentés, à mieux prévenir les risques d'agression des inspecteurs du permis de conduire, à mettre en place des chronotachygraphes électroniques sur les poids lourds conformément aux exigences de la réglementation communautaire, à mieux assurer le respect de la réglementation du travail par les transporteurs routiers de voyageurs et de marchandises, enfin, à obtenir des collectivités territoriales gestionnaires des réseaux de voirie les informations nécessaires à la connaissance de l'accidentologie.

M. Dominique Perben, garde des Sceaux, ministre de la justice, a souligné que la préparation du projet de loi avait été l'occasion d'un dialogue nourri avec de nombreuses associations de victimes et d'usagers de la route et souligné que l'objectif du texte n'était pas de modifier des règles, qui avaient trop souvent changé par le passé, mais de faire en sorte qu'elles soient rigoureusement respectées, ce qui constituait un véritable changement de culture.

Il a estimé que ce but pourrait être atteint grâce à trois séries de mesures : la première tend à aggraver les peines en cas d'homicide et de blessures involontaires, afin de dissuader plus efficacement des comportements qui sont assimilables à d'authentiques formes de violence, l'analyse des accidents les plus graves montrant qu'ils réunissent toujours deux ou trois des circonstances aggravantes que sont, notamment, l'état alcoolique, la conduite après usage de stupéfiants, le délit de fuite, la conduite sans permis ou le grand excès de vitesse ; la deuxième mesure est une modification des règles de récidive, qui seront plus strictes ; enfin, le projet de loi diversifie les peines complémentaires et supprime, dans les cas les plus graves, la possibilité d'aménager la peine de suspension du permis de conduire.

Abordant la question des amendes forfaitaires, aujourd'hui peu efficaces, le ministre a insisté sur la mise en place du contrôle automatisé grâce au recours à des caméras numériques et à l'envoi automatique au propriétaire du véhicule de l'amende correspondante. Donnant l'exemple d'une expérience menée pendant une seule nuit dans un tunnel alpin et qui a donné lieu à un nombre de procès-verbaux équivalent à celui qui était traité en une année par le tribunal compétent, il a fait ressortir les avantages du caractère automatique de la procédure, à défaut duquel les juridictions seraient totalement engorgées.

M. Richard Dell'Agnola, rapporteur, a observé que ce projet de loi constituait l'aboutissement d'un long processus d'évolution des mentalités, qui conduit désormais l'ensemble de la population française à considérer la violence routière comme l'un des principaux fléaux dont souffre notre société et incite les pouvoirs publics à prendre, enfin, les mesures nécessaires pour lutter contre ce phénomène. Rappelant que le texte tendait principalement à améliorer l'application des sanctions prononcées à l'encontre des conducteurs dangereux, il s'est félicité des dispositions interdisant au juge d'aménager la peine de suspension du permis de conduire dans les cas les plus graves, par exemple lorsque le conducteur du véhicule a, par maladresse, imprudence ou négligence, commis un homicide involontaire. Abordant ensuite la disposition du texte faisant du dépassement de la vitesse maximale autorisée égal ou supérieur à 50 km/h une circonstance aggravante, il s'est interrogé sur les moyens dont peuvent disposent les magistrats pour établir avec certitude, après un accident, la vitesse des véhicules et a exprimé la crainte que son évaluation ne fasse l'objet de nombreuses contestations et ne soit à l'origine d'un important contentieux. Évoquant l'instauration d'un permis probatoire d'une durée de trois ans, il a demandé comment cette nouvelle disposition allait s'articuler avec le développement de la conduite accompagnée, dont les résultats en matière de sécurité routière étaient satisfaisants et qu'il convenait donc d'encourager. Il a ensuite souhaité savoir si des mesures étaient envisagées pour améliorer l'identification des conducteurs de motos en infraction, qui est actuellement largement défaillante. Ayant fait observé que le renforcement de l'application des sanctions prononcées à l'encontre des conducteurs dangereux supposait que leur adresse mentionnée sur la carte grise soit exacte, ce qui n'est pas toujours le cas, il a demandé si des initiatives allaient être prises pour améliorer l'actualisation des informations figurant dans les fichiers de cartes grises gérés par les services des préfectures.

M. Gérard Léonard s'est demandé si l'immatriculation obligatoire de tous les deux roues était désormais envisagée, ajoutant que, compte tenu du nombre des accidents provoqués ou subis par les conducteurs de deux roues, une telle décision serait hautement souhaitable, bien que vraisemblablement coûteuse, et a suggéré que, dans un premier temps, son champ d'application soit limité aux seules acquisitions de cyclomoteurs neufs. Tout en approuvant la volonté du Gouvernement de lutter contre la violence routière, il a souligné l'importance des actions éducatives en ce domaine, y compris au sein des établissements scolaires, et a appelé de ses vœux leur développement. S'agissant des « points noirs routiers », particulièrement dangereux pour la circulation et d'ailleurs identifiés par les pouvoirs publics, il a souhaité savoir si le Gouvernement prendrait les mesures de sécurité qui s'imposent. Ayant observé que de très nombreux accidents de la route étaient provoqués par des conducteurs de poids lourds étrangers, il a exprimé la crainte que les dispositions du projet de loi aggravant les sanctions des délits routiers ne pénalisent davantage, voire exclusivement, les chauffeurs routiers français, la poursuite des chauffeurs étrangers étant extrêmement difficile à défaut d'une coopération européenne appropriée.

Faisant référence à l'extension des dispositifs d'automatisation des contrôles des infractions routières, M. René Dosière a souhaité savoir si les problèmes d'homologation et de compatibilité des matériels, observés dans le cadre de l'expérimentation menée dans un nombre limité de départements, avaient été résolus, quand les dispositifs techniques seraient opérationnels et combien d'appareils de ce type seraient installés d'ici à la fin de l'année 2003. Puis, rappelant que le produit des amendes forfaitaires est reversé aux collectivités locales et que celui des amendes majorées revient à l'État, dans des conditions contestables, il s'est interrogé sur la future répartition du produit des amendes entre les collectivités locales et l'État dans le cadre de la généralisation de la forfaitisation prévue par le projet de loi. Il a interrogé le ministre de l'équipement et des transports sur le montant des crédits destinés à l'entretien de la voirie concerné par le gel global de 4,5 milliards d'euros appliqué à l'ensemble des crédits votés dans la loi de finances pour 2003. Il a enfin souhaité connaître le montant du budget de communication affecté à la sécurité routière en 2003.

M. Francis Delattre s'est déclaré dubitatif à l'égard de l'aggravation des peines envisagée, rappelant, d'une part, que tous les textes législatifs analogues avaient montré leurs limites et que, d'autre part, le doublement ou le triplement des peines n'avait guère de sens en l'absence de renforcement des moyens de la police de la route. Il a souligné, en outre, qu'une application stricte du projet de loi se heurterait très rapidement aux limites des capacités pénitentiaires. Il a ensuite souhaité savoir s'il existait une définition juridique claire de la « faute de maladresse », qui est passible d'un emprisonnement de trois ans, avant de s'interroger sur l'efficacité des contrôles de vétusté des véhicules. Évoquant l'accroissement des dangers liés à la conduite automobile en cas de pluie, il a souhaité savoir si les sociétés de construction d'autoroutes pouvaient être mises dans l'obligation de revêtir les chaussées de matériaux réduisant le risque d'accident et de veiller à l'éclairage approprié des tronçons dangereux.

Sur la base du double constat, unanime, selon lequel, d'une part, la lutte contre la violence routière représente un enjeu majeur, et, d'autre part, la vitesse, notamment la très grande vitesse, constitue l'une des causes principales de la mortalité routière, M. Philippe Houillon s'est demandé pour quelle raison aucune disposition n'était prévue pour limiter la vitesse des véhicules. Tout en se déclarant conscient des problèmes d'harmonisation européenne ou internationale que de telles mesures soulèveraient, il a, en effet, jugé paradoxal que la cause majeure de la violence routière, dès lors qu'elle était connue, ne fût pas éradiquée. Dans le même esprit, il a jugé quelque peu hypocrite de ne pas aborder la question de la médiatisation des performances routières des véhicules.

Rejoignant les préoccupations du rapporteur, M. Georges Fenech s'est déclaré sceptique sur l'applicabilité de la notion de très grande vitesse comme circonstance aggravante, s'interrogeant notamment sur la possibilité de mesurer celle-ci à la suite d'un accident. Outre le contentieux que cette notion ne manquerait pas de susciter pour les praticiens du droit, il a estimé qu'elle contribuait à faire naître dans l'esprit des conducteurs l'idée d'une tolérance de 50 km/h au-delà de la vitesse maximale autorisée. Il s'est donc demandé s'il ne conviendrait pas plutôt de définir comme circonstance aggravante la notion de vitesse manifestement excessive, en laissant de la sorte une marge d'appréciation au juge.

M. Jérôme Lambert a reconnu que le projet de loi suscitait un sentiment de crainte chez les automobilistes, qui les amènera peut-être à modifier leur comportement. Il a déploré néanmoins que l'on en arrive aujourd'hui à de telles extrémités, avec des sanctions aussi lourdes que celles prévues dans le projet de loi ; il a estimé que, de ce point de vue, le texte était un constat d'échec des politiques de prévention et d'éducation menées jusqu'à présent. Il a ensuite mis en avant les caractéristiques techniques des véhicules, et notamment des motocyclettes, qui incitent bien souvent au dépassement des limites de vitesse autorisées. Il a également cité le manque d'entretien de certaines routes, qui, conjugué à un trafic routier important, peuvent se révéler particulièrement dangereux en terme de vies humaines. Évoquant le contenu du projet de loi, il a exprimé la crainte que la mise en place d'une consignation préalable à la contestation des amendes constitue une injustice sociale. Il a également émis des réserves sur la suppression des permis blancs en cas d'accident corporel grave ou de décès, estimant qu'il conviendrait de sanctionner la faute en elle-même et non de déterminer la sanction en fonction des conséquences de la faute. Tout en déclarant partager la philosophie du texte, il a regretté que la réflexion n'ait pas été approfondie sur les moyens d'encourager les alternatives à l'automobile, notamment dans les cas des trajets quotidiens pour se rendre au travail, qui sont, d'après les statistiques, les plus meurtriers.

En écho aux propos de M. Philippe Houillon, M. Didier Quentin a appelé de ses vœux une réflexion à l'échelle européenne sur les limitations de vitesse. Il a rappelé que certains pays, tels que les États-Unis ou le Japon, avaient mis en place des limites de vitesse très strictes, avec de bons résultats en terme de sécurité routière. Tout en exprimant sa satisfaction à l'égard des 54 millions d'euros destinés à résoudre les points noirs en matière de sécurité routière, il a souligné que certains d'entre eux pourraient être aisément traités par une simple modification de signalétique. Il a évoqué par ailleurs le cas des véhicules sans permis, qui peuvent, compte tenu de leur vitesse réduite, se révéler très dangereux en zone rurale. Il a ensuite déploré certains comportements en zone urbaine, notamment des rollers ou des cyclistes sans feu de signalisation, qui sont des causes et des victimes d'accidents.

M. Guy Geoffroy, après s'être félicité des dispositions du projet instituant un permis probatoire, s'est interrogé sur la portée de celui-ci et souhaité savoir si seuls les nouveaux conducteurs seraient soumis à cette obligation, ou si la mesure s'appliquerait également à ceux dont le permis a été retiré.

M. Sébastien Huygue s'est demandé si le projet de loi ne cédait pas trop à la facilité en renvoyant de façon excessive la responsabilité de l'insécurité routière à la vitesse, alors que le problème est d'abord une question de comportement. Il a cité l'exemple de l'Allemagne, pays dans lequel la vitesse n'est pas limitée sur certains axes de circulation et qui obtient pourtant de meilleurs résultats sur le plan de la sécurité routière, grâce au comportement plus responsable des conducteurs ; il a regretté que les contrôles d'alcoolémie soient extrêmement rares, alors qu'ils permettent d'identifier et de réprimer des comportements beaucoup plus graves. Il s'est demandé si la multiplication des cas de retrait et d'annulation de permis de conduire ne risquait pas d'entraîner une certaine forme d'exclusion sociale, contraignant certains conducteurs à perdre leur travail ou à ne pas respecter la sanction dont ils ont fait l'objet. Il a suggéré, par ailleurs, de prévoir, en cas de vente du véhicule, une obligation de transmettre aux préfectures la vignette représentant le certificat d'assurance, afin d'éviter tout risque de fraude.

Le président Pascal Clément a jugé opportun que le législateur affirme clairement sa volonté de réprimer l'insécurité routière. Il s'est demandé, néanmoins, si cette action ne pourrait également s'appuyer sur des mesures « rédemptrices » : infliger de très fortes amendes à l'auteur d'un délit routier non intentionnel pourrait être à la fois plus juste et plus efficace qu'une longue peine de prison, sanction qui, lorsqu'elle est disproportionnée, ne répare pas le mal mais détruit durablement l'existence du fautif, dont on peut penser qu'il est déjà traumatisé par les conséquences irrémédiables de son acte. Il a suggéré qu'à côté d'une répression reposant sur des peines d'emprisonnement, puisse exister une autre forme de répression, composée de sanctions financières, ces dernières ne compromettant pas le droit à une « deuxième chance ».

M. Jean Tiberi a jugé cette réflexion intéressante et a souhaité que le législateur s'interroge sur le sens de la peine en général, et de la prison en particulier.

En réponse aux intervenants, le garde des Sceaux a apporté les précisions suivantes :

- Le Gouvernement ne propose pas de changer les règles, mais simplement de les faire appliquer grâce à un certain nombre de mesures nouvelles.

- La circonstance aggravante liée à la vitesse pour les homicides et les blessures involontaires concerne la contravention et le délit de grand excès de vitesse. S'il n'est pas possible de constater ces infractions, ce qui risque d'être le cas jusqu'à ce que les véhicules soient équipés de boîtes noires, la circonstance aggravante ne pourra pas être établie. Le Gouvernement a choisi de ne retenir que les dépassements de vitesse supérieurs à 50 km/h. La rédaction suggérée par M. Georges Fenech est trop floue et laisserait une marge d'appréciation excessive aux tribunaux.

- La référence à la faute de maladresse est une transposition de l'article 221-6 du code pénal sur l'homicide involontaire.

- Les peines d'homicide et de blessures involontaires résultant de l'imprudence d'un conducteur sont respectivement portées de 3 à 5 ans d'emprisonnement et de 2 à 3 ans d'emprisonnement par le projet de loi. Lorsque les faits sont commis avec une circonstance aggravante, les peines passent à 5 et 7 ans d'emprisonnement et à 7 et 10 ans d'emprisonnement lorsque deux ou plus de ces circonstances sont réunies. La peine maximale de 10 ans d'emprisonnement peut déjà être appliquée en cas d'homicide aggravé en état alcoolique ou après usage de stupéfiants.

- En 2001, la peine la plus lourde d'emprisonnement prononcée pour homicide involontaire est une peine de 7 ans fermes, mais la plupart des peines d'emprisonnement prononcées pour les homicides ou les blessures involontaires le sont avec sursis. Le projet prévoit par ailleurs toute une série de peines complémentaires, parmi lesquelles figure la suspension ou le retrait du permis de conduire, qui pourront être appliquées à ces infractions.

- Le problème n'est pas la malhonnêteté de l'auteur de l'infraction au code de la route, mais son éventuelle irresponsabilité, chaque citoyen se devant d'être responsable de son véhicule ; à partir du moment où l'on accepte que l'irresponsabilité soit sanctionnée pénalement, on peut s'interroger sur le niveau de la sanction. La dérive que l'on constate actuellement en matière de violence routière, ave la multiplication de faits divers qui bouleversent l'opinion publique, appelle, du point de vue du Gouvernement, des sanctions au moins aussi importantes que celles prévues pour un vol avec effraction.

- L'application de la procédure de l'amende forfaitaire aux véhicules étrangers ne sera possible que si ceux-ci sont effectivement arrêtés ; dans le cas contraire, le paiement de l'amende relèvera des règles de droit commun du contentieux international.

- Une mission interministérielle a été créée pour mettre en œuvre le système de contrôle automatisé, notamment pour homologuer le matériel qui sera utilisé.

- Les infractions concernées par la suppression des permis blancs correspondent aux délits routiers les plus graves : homicide et blessures involontaires, conduite en état d'ivresse ou après usage de stupéfiants, grand excès de vitesse et délit de fuite. Dans les autres cas, les magistrats pourront aménager, si nécessaire, la peine de suspension du permis de conduire, afin de tenir compte des contraintes auxquelles doivent faire face les auteurs d'infractions, notamment en milieu rural.

- Il est possible de réfléchir à une initiative internationale sur la limitation de la vitesse des véhicules, mais il faut garder à l'esprit que la vitesse excessive est une spécificité française, partagée par quelques pays du sud de l'Europe.

Le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer a également apporté les éléments d'information suivants :

- La prise en compte de la conduite accompagnée dans les modalités d'octroi du permis probatoire est une piste de réflexion intéressante, à condition que l'on puisse s'assurer de sa constitutionnalité.

- L'adaptation des jeunes à la conduite est progressive, puisqu'elle comporte une attestation scolaire en 5e et en 3e, puis une formation avec conduite accompagnée à partir de 16 ans.

- Le permis probatoire s'appliquera à l'ensemble des personnes sollicitant un permis de conduire, y compris à celles ayant vu leur précédent permis de conduire annulé.

- Il est exact que beaucoup de personnes conduisent déjà sans permis ; pour éviter une augmentation de ce nombre liée à la probable progression du nombre de retrait de permis, il est nécessaire de réfléchir à l'application de peines complémentaires de confiscation ou d'immobilisation du véhicule en cas de conduite sans permis.

- Le juge conservera une marge d'appréciation même en cas d'interdiction de permis blanc, puisqu'il pourra moduler la durée de la suspension du permis de conduire.

- Le problème de la répartition du produit des amendes entre l'État et les collectivités locales est actuellement à l'étude, même si l'on peut faire observer que les recettes supplémentaires seront obtenues grâce à du matériel financé par l'État.

- Les causes des accidents mortels et corporels se répartissent de la manière suivante : 50 % sont imputables à la vitesse, 30 % à l'alcool et 20 % à l'absence de ceinture de sécurité.

- Afin de responsabiliser le conducteur, le Gouvernement envisage, à titre expérimental, de faire figurer sur le ticket d'autoroute la vitesse moyenne entre deux péages et de pratiquer des éthylotests préventifs.

- Les constructeurs automobiles ont conscience de la puissance excessive des véhicules qu'ils construisent au regard des limitations de vitesse en vigueur ; on s'oriente toutefois vers une banalisation des régulateurs de vitesse, notamment sonores.

- L'obligation d'immatriculation des deux roues se heurte à des problèmes de moyens, la solution consistant sans doute à limiter cette obligation aux nouveaux cyclomoteurs.

- Les crédits consacrés à la résorption des points noirs, soit 54 millions d'euros en 2003, n'ont fait l'objet d'aucune mesure de gel. Par ailleurs, le projet de loi comporte un article destiné à faciliter le déplacement des obstacles latéraux, qui sont à l'origine de nombreuses victimes. Lorsque les lois de décentralisation auront été votées, les collectivités locales prendront le relais de l'État pour l'aménagement des routes nationales. S'agissant des autoroutes, il serait sans doute nécessaire de revoir leurs modalités de concession.

- Les infractions commises par les poids lourds étrangers constituent un vrai problème, qui ne pourra être résolu à terme que par une concertation européenne et une immobilisation des véhicules.

- Si la politique française de lutte contre l'insécurité routière donne de bons résultats, il sera envisageable de partager notre expérience avec des pays européens, comme c'est déjà le cas avec la Belgique.

- 12,5 millions d'euros ont été consacrés en 2002 et 2003 à la communication sur la sécurité routière. Les moyens humains seront fortement augmentés, puisque 1 200 personnes devraient être affectées à la sécurité routière en plus des effectifs dégagés par l'automatisation des relevés d'infractions.

*

* *

La Commission a rejeté l'exception d'irrecevabilité n° 1 et la question préalable n° 1 présentées par M. Jean-Marc Ayrault.

EXAMEN DES ARTICLES

Chapitre Ier

Répression des atteintes involontaires
à la vie ou à l'intégrité de la personne
commises à l'occasion de la conduite d'un véhicule

Articles 1er et 2

(art. 221-6-1, 222-19-1 et 220-20-1 [nouveaux] du code pénal)


Homicide involontaire et blessures involontaires à l'occasion de la conduite d'un véhicule

Alors qu'actuellement la répression des accidents mortels ou corporels de la circulation relève des dispositions générales du code pénal sanctionnant les atteintes involontaires à la vie ou à l'intégrité de la personne, les articles 1er et 2 créent trois nouvelles infractions spécifiques d'homicide ou de blessures involontaires commises à l'occasion de la conduite d'un véhicule, qui alourdissent sensiblement les peines encourues.

1. Les dispositions actuelles réprimant les atteintes involontaires à la vie ou à l'intégrité de la personne commises par les automobilistes

a) Les dispositions générales

-  L'article 121-3 du code pénal

L'article 121-3 du code pénal distingue deux catégories de fautes délictuelles non intentionnelles.

· La faute d'imprudence qualifiée, en cas de mise en danger délibérée de la personne d'autrui (deuxième alinéa de l'article 121-3), qui suppose une violation manifestement délibérée d'une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi et le règlement.

· La faute d'imprudence ordinaire, définie comme une imprudence, une négligence ou un manquement à une obligation de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement (troisième alinéa de l'article 121-3).

La responsabilité pénale de l'auteur de la faute ne pourra toutefois être établie que si l'auteur des faits n'a pas accompli les diligences normales, compte tenu de la nature de ses missions, de ses compétences et des moyens dont il disposait. Cette appréciation « in concreto » ne joue pas en matière de circulation routière, la Cour de cassation considérant que « tout manquement par le conducteur d'un véhicule à ses obligations de prudence et de diligence est nécessairement incompatible avec les diligences normales que lui impose le code de la route et caractérise à sa charge la faute définie par l'article 121-3 » (Cass. crim. 2 avril 1997).

Depuis la loi du 10 juillet 2000 tendant à préciser la définition des délits non intentionnels, lorsque la faute commise par une personne physique est seulement la cause indirecte du dommage, la responsabilité pénale de l'auteur des faits n'est engagée que s'il a violé de façon manifestement délibérée une obligation particulière de prudence et de sécurité prévue par la loi ou le règlement, ou s'il a commis une faute caractérisée qui exposait autrui à un risque d'une particulière gravité qu'il ne pouvait ignorer (quatrième alinéa de l'article 121-3).

La circulaire du 11 octobre 2000 considère que ces nouvelles dispositions n'auront aucune incidence sur la responsabilité pénale des automobilistes, les accidents de la route étant causés, dans la plupart des cas, par des auteurs directs. En cas de faute indirecte, comme celle d'un conducteur brûlant un feu et renversant un cycliste qui est ensuite écrasé par une autre voiture, l'auteur des faits a le plus souvent commis une faute caractérisée exposant autrui à un risque d'une particulière gravité qu'il ne pouvait ignorer.

-  Les articles 221-6, 222-19 et 222-20 du code pénal

· L'article 221-6 du code pénal applique ces distinctions pour réprimer les atteintes involontaires à la vie.

Il punit de trois ans d'emprisonnement et de 45 000 € d'amende le fait de causer la mort d'autrui, dans les conditions et selon les distinctions prévues à l'article 121-3, par maladresse, imprudence, inattention, négligence ou manquement à une obligation de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou le règlement.

En cas de violation manifestement délibérée d'une obligation particulière de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou le règlement, les peines encourues sont portées à cinq ans d'emprisonnement et 75 000 € d'amende.

· Les articles 222-19 et 222-20 répriment, dans les mêmes termes, les atteintes involontaires à l'intégrité de la personne.

Le fait de causer à autrui, dans les conditions et selon les distinctions prévues à l'article 121-3, par maladresse, imprudence, inattention, négligence ou manquement à une obligation de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou le règlement une incapacité totale de travail pendant plus de trois mois est puni de deux ans d'emprisonnement et 30 000 € d'amende. En cas de violation manifestement délibérée d'une obligation particulière de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou le règlement, les peines encourues sont portées à trois ans d'emprisonnement et 45 000 € d'amende (article 222-19).

Lorsque l'incapacité totale de travail est inférieure ou égale à trois mois et que l'auteur des faits a violé de façon manifestement délibérée une obligation particulière de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou le règlement, les peines encourues sont d'un an d'emprisonnement et de 15 000 € d'amende (article 222-20).

Signalons également qu'en cas de maladresse, imprudence, inattention, négligence ou manquement à une obligation de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou le règlement, le fait de causer à autrui une incapacité totale de travail d'une durée inférieure ou égale à trois mois est une contravention punie de l'amende prévue pour les contraventions de la cinquième classe (article R. 625-2). Une peine similaire est prévue en cas de violation manifestement délibérée d'une obligation particulière de sécurité ou prudence prévue par la loi ou le règlement ayant porté atteinte à l'intégrité d'autrui sans incapacité totale de travail (article R. 625-3). Lorsqu'il s'agit d'une simple faute de maladresse, d'imprudence, d'inattention, de négligence ou de manquement à une obligation de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou le règlement, la peine encourue est une contravention de la deuxième classe (article R. 622-1).

· La jurisprudence a précisé la portée des différentes notions employées dans ces articles.

En matière de circulation routière, les fautes les plus souvent retenues sont l'inattention ou l'imprudence, comme celle d'un automobiliste qui, par distraction, ne respecte pas un signal d'interdiction ou celle d'un chauffeur routier qui, à court de gas-oil, veut à tout prix franchir la frontière dans le seul but de réaliser une économie sur les carburants (TGI Perpignan, 27 mars 1987).

Le non-respect du code de la route constitue en soit un manquement à une obligation de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement. Il n'est pas nécessaire que l'inobservation du code de la route soit poursuivie pour engager des poursuites aux titres des articles 221-6, 222-19 ou 222-20 (Cass. crim. 16 fév. 1972).

Le code pénal ne donne pas de définition de la notion d'incapacité totale de travail, mais la jurisprudence l'analyse comme une incapacité totale temporaire, qui exclut les incapacités partielles diminuant plus ou moins gravement la force de travail et qui subsistent après la consolidation de la blessure (Cass. crim. 28 mai 1959). Cette expression vise également l'impossibilité d'effectuer un travail corporel, soit dans l'exercice d'une profession, soit en dehors de celle-ci : l'écrivain dont la jambe est cassée et qui peut continuer à écrire subit une incapacité totale de travail personnel tant qu'il ne peut pas marcher (Cass. crim. 6 oct. 1960).

b) Les dispositions du code de la route

Le code de la route fait du délit de fuite et de la conduite sous l'empire d'un état alcoolique ou après usage de stupéfiants une circonstance aggravante des infractions d'atteintes involontaires à la vie ou à l'intégrité de la personne prévues par les articles 221-6 et 222-19 du code pénal.

L'article L. 234-11 du code de la route prévoit un doublement des peines mentionnées aux articles 221-6 et 222-19 lorsque l'auteur d'un homicide ou de blessures involontaires conduisait en état d'ivresse, sous l'empire d'un état alcoolique ou a refusé de se soumettre aux vérifications destinées à établir l'état alcoolique.

Lorsque l'atteinte à l'intégrité physique de la personne a entraîné une incapacité totale de travail inférieure à trois mois, les peines encourues sont celles de l'article 222-19, soit deux ans d'emprisonnement (faute d'imprudence) ou trois ans d'emprisonnement (violation délibérée d'une obligation de sécurité).

Ainsi, en cas d'accident mortel commis par un conducteur en état alcoolique qui a délibérément brûlé un feu rouge, les peines encourues sont de dix ans d'emprisonnement et de 150 000 € d'amende

La jurisprudence considère qu'il n'est pas nécessaire, pour l'application de ces dispositions, de rechercher si la circonstance d'ivresse ou d'état alcoolique a été la cause déterminante de l'accident (Cass. crim. 5 janv. 1963).

L'article L. 235-5 prévoit des dispositions similaires lorsque l'auteur de l'atteinte involontaire à la vie ou à l'intégrité physique conduisait après avoir fait usage de stupéfiants ou lorsqu'il a refusé de se soumettre aux vérifications destinées à établir son état.

Enfin, l'article L. 231-1, qui reprend les dispositions de l'article 434-10 du code pénal relatif au délit de fuite, prévoit également un doublement des peines en cas d'homicide ou de blessures involontaires accompagnées d'un délit de fuite.

La répression des atteintes involontaires à la vie ou à l'intégrité de la personne commises à l'occasion de la conduite d'un véhicule résulte donc de dispositions disparates, difficilement lisibles par les justiciables. Par ailleurs, certains comportements inadmissibles, comme le fait de causer un accident alors même que l'auteur de l'infraction a vu son permis de conduire annulé, ne sont pas sanctionnés de manière spécifique.

C'est pourquoi les articles 1er et 2 du projet de loi créent dans le code pénal trois nouvelles infractions réprimant de manière spécifique les atteintes involontaires à la vie ou à l'intégrité de la personne commises à l'occasion de la conduite d'un véhicule et aggravant les peines encourues.

2. Les nouveaux délits créés par le projet de loi

a) Les délits d'homicide et de blessures involontaires commis à l'occasion de la conduite d'un véhicule

L'article 1er insère dans le code pénal, à la suite des dispositions réprimant les atteintes involontaires à la vie, un nouvel article 221-6-1 relatif aux homicides involontaires commis par les conducteurs d'un véhicule terrestre à moteur.

Le premier alinéa prévoit une peine de cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 € d'amende lorsque l'homicide involontaire commis par le conducteur d'un véhicule terrestre à moteur résulte d'une faute de maladresse, d'imprudence, d'inattention, de négligence ou de manquement à une obligation législative ou réglementaire de sécurité ou de prudence visée par l'article 221-6.

L'article 2 prévoit des dispositions similaires pour les atteintes involontaires à l'intégrité de la personne.

Le premier alinéa du nouvel article 220-19-1 punit de trois ans d'emprisonnement et de 45 000 € d'amende le conducteur d'un véhicule à moteur auteur d'une atteinte involontaire à l'intégrité de la personne ayant entraîné une incapacité totale de travail pendant plus de trois mois, qui a commis une faute de maladresse, d'imprudence, d'inattention, de négligence ou de manquement à une obligation législative ou réglementaire de sécurité ou de prudence prévue par l'article 222-19.

Lorsque l'incapacité totale de travail est inférieure ou égale à trois mois, les peines encourues sont de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 € d'amende (premier alinéa de l'article 222-20-1).

On observera que ces nouveaux délits ne visent que les véhicules à moteur, ce qui exclut notamment les blessures involontaires causées par un cycliste.

Par rapport aux dispositions répressives actuelles, les peines encoures sont sensiblement augmentées, puisque l'homicide involontaire résultant d'une faute d'imprudence ordinaire sera puni cinq ans d'emprisonnement, au lieu de trois ans, et les blessures involontaires de trois ans ou deux ans d'emprisonnement, en fonction de la durée de l'incapacité totale de travail, au lieu de respectivement de deux ans et un an.

Comme le souligne l'exposé des motifs du projet de loi, « la dangerosité intrinsèque d'un véhicule, que la jurisprudence n'hésite d'ailleurs pas dans certains cas à assimiler à une arme, justifie en effet un surcroît d'attention et de prudence de la part de la personne qui l'utilise. Elle rend ainsi plus blâmable la commission d'une faute d'imprudence au volant ».

b) Les circonstances aggravantes

-  La définition des circonstances aggravantes

Les nouveaux articles 221-6-1, 222-19-1 et 222-20-1 énumèrent toute une série de circonstances entraînant l'aggravation des peines encourues. Rappelons que, actuellement, les seules circonstances aggravantes en cas d'homicide ou de blessures involontaires sont la violation manifestement délibérée d'une obligation particulière de sécurité ou de prudence prévue par la loi ou le règlement, la conduite sous l'empire d'un état alcoolique ou en état d'ivresse manifeste, la conduite après usage de stupéfiants et le refus de se soumettre aux vérifications destinées à établir la réalité de ces infractions, ainsi que le délit de fuite.

Les peines prévues seront aggravées lorsque :

· Le conducteur a commis une violation manifestement délibérée d'une obligation particulière de sécurité ou de prudence prévue par la loi ou le règlement, autre que celles qui figurent désormais parmi les circonstances aggravantes. On peut citer, comme exemple de violation manifestement délibérée d'une obligation particulière de prudence, le non-respect délibéré d'un stop ou le franchissement d'une ligne blanche.

Cette rédaction reprend celle figurant actuellement aux articles 221-6, 222-19 et 222-20 du code pénal.

· Le conducteur se trouve en état d'ivresse manifeste ou est sous l'empire d'un état alcoolique caractérisé par une concentration d'alcool égale ou supérieure aux taux fixés par les dispositions législatives ou réglementaires du code de la route ou a refusé de se soumettre aux vérifications destinées à établir l'existence d'un état alcoolique.

On observera que cette nouvelle circonstance aggravante est plus large que celle actuellement définie à l'article L. 234-11 du code de la route, puisqu'elle vise non seulement le délit de conduite sous l'empire d'un état alcoolique (article L. 234-1), caractérisé par une concentration d'alcool dans le sang supérieure ou égale à 0,8 gramme par litre, mais également la contravention de conduite sous l'empire d'un état alcoolique (article R. 234-1), constituée lorsque ce taux est compris entre 0,5 et 0,8 gramme d'alcool dans le sang.

· Le conducteur a fait usage de plantes ou substances classées comme stupéfiants ou a refusé de se soumettre aux vérifications destinées à établir s'il conduisait en ayant fait usage de stupéfiants.

· Le conducteur n'est pas titulaire du permis de conduire exigé par la loi ou le règlement ou son permis a été annulé, invalidé, suspendu ou retenu.

Cette nouvelle circonstance aggravante concerne l'ensemble des cas où le conducteur ne dispose pas du permis de conduire requis, que ces cas relèvent d'une simple contravention (conduite sans permis réprimée par l'article R. 221-1 du code de la route) ou constituent un délit (conduite avec un permis annulé, suspendu ou invalidé sanctionnée par l'article L. 224-16 et par l'article L. 223-5 modifié par l'article 11 du projet de loi).

· Le conducteur a commis un dépassement de la vitesse maximale autorisée égal ou supérieur à 50 km/h.

Cette disposition nouvelle permet de mieux prendre en compte la dangerosité des conducteurs commettant de très grands excès de vitesse, sanctionnés par une contravention de la cinquième classe pour la première infraction (article R. 413-4 du code de la route) et par des peines délictuelles en cas de récidive (article L. 413-1). Rappelons que, dans le même esprit, l'article 4 du projet de loi porte de un à trois ans le délai retenu pour apprécier le délit de récidive du très grand excès de vitesse.

Cette circonstance aggravante sera cependant difficile à établir, car elle suppose l'existence d'un contrôle radar au moment de l'accident. Elle pourra néanmoins être effective lorsqu'il existera à bord des véhicules des appareils enregistreurs de vitesse.

· Le conducteur ne s'est pas arrêté et a tenté d'échapper à sa responsabilité pénale ou civile alors qu'il savait qu'il avait causé un accident.

Cette nouvelle circonstance aggravante correspond au délit de fuite, défini à l'article 434-10 du code pénal, auquel renvoie l'article L. 231-1 du code de la route, comme le fait pour un conducteur d'un véhicule, sachant qu'il vient de causer ou d'occasionner un accident, de ne pas s'arrêter et de tenter ainsi d'échapper à la responsabilité pénale ou civile qu'il peut avoir encourue.

-  Les peines encourues

Le nouvel article 221-6-1, qui sanctionne les atteintes involontaires à la vie, porte à sept ans d'emprisonnement et 100 000 € d'amende les peines encourues lorsqu'une des circonstances aggravantes énumérées ci-dessus a été constatée. Ces peines sont portées à dix ans d'emprisonnement et 150 000 € d'amende lorsque l'homicide involontaire a été commis avec au moins deux des circonstances aggravantes.

Les blessures involontaires entraînant une incapacité totale de travail de plus de trois mois sont punies de cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 € d'amende lorsqu'elles ont été commises avec une des circonstances aggravantes. Ces peines sont portées à sept ans d'emprisonnement et 100 000 € d'amende lorsque les circonstances aggravantes sont au nombre de deux ou plus (article 222-19-1).

Enfin, l'article 222-20-1 punit de trois ans d'emprisonnement et de 45 000 € d'amende l'atteinte involontaire à l'intégrité de la personne ayant entraîné une incapacité de travail de trois mois ou moins, lorsque cette infraction a été commise avec une circonstance aggravante, et de cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 € d'amende lorsque les circonstances aggravantes sont au nombre de deux ou plus.

Le tableau ci après présente les modifications proposées par le projet de loi.

Homicide
involontaire

Blessures
involontaires avec une ITT
>à 3 mois

Blessures involontaires avec une ITT ≤ à 3 mois

Peines
actuelles

Peines
prévues

Peines
actuelles

Peines
prévues

Peines
actuelles

Peines
prévues

Simple

3 ans

5 ans

2 ans

3 ans

Amende contraventionnelle

2 ans

Violation délibérée d'une obligation de sécurité

5 ans

7 ans

3 ans

5 ans

1 an

3 ans

Avec alcool

6 ans

7 ans

4 ans

5 ans

2 ans

3 ans

Avec stupéfiants

6 ans

7 ans

4 ans

5 ans

2 ans

3 ans

Absence de permis de conduire

3 ans

7 ans

2 ans

5 ans

Amende contraventionnelle

3 ans

Très grand excès de vitesse

3 ans

7 ans

2 ans

5 ans

Amende contraventionnelle

3 ans

Délit de fuite

6 ans

7 ans

4 ans

5 ans

Amende contraventionnelle

3 ans

Avec 2 circonstances aggravantes

10 ans uniquement pour violation délibérée d'une obligation de sécurité + alcool, stupéfiants ou délit de fuite

10 ans

  6 ans uniquement pour violation délibérée d'une obligation de sécurité + alcool, stupéfiants ou délit de fuite

7 ans

3 ans uniquement pour violation délibérée d'une obligation de sécurité + alcool, stupéfiants

5 ans

On observera que l'article 6 du projet de loi prévoit par ailleurs l'annulation de plein droit du permis de conduire avec interdiction de solliciter un nouveau permis pendant une période maximum de dix ans lorsque l'homicide involontaire ou les blessures involontaires ayant entraîné une incapacité totale de travail supérieure à trois mois ont été commis avec au moins une circonstance aggravante.

L'augmentation des peines encoures contribue à renforcer l'adéquation du droit positif avec les pratiques judiciaires. L'analyse du quantum moyen des peines d'emprisonnement prononcées en 2001 par les juridictions en matière d'accidents de la circulation permet en effet de constater que celui-ci est relativement élevé, notamment par rapport aux peines prononcées pour des infractions comme le vol, pour lesquelles les peines encourues sont pourtant identiques. Ainsi, en 2001, le quantum moyen des peines d'emprisonnement prononcées en matière d'accidents de la circulation, pour les homicides « simples », punis de trois ans d'emprisonnement, est de six mois, contre quatre mois pour un vol simple. Ce quantum est de dix mois pour l'homicide involontaire avec alcool.

À l'article 1er, la Commission a examiné un amendement de M. Georges Fenech tendant à retenir comme circonstance aggravante, en cas d'homicide ou de blessures involontaires, la conduite à une « vitesse manifestement excessive eu égard aux circonstances et compte tenu de la réglementation » au lieu du dépassement de la vitesse maximale autorisée égal ou supérieur à 50 km/h. Son auteur a fait observer que la fixation d'un seuil précis de dépassement de la vitesse maximale autorisée risquait de s'avérer inapplicable, à défaut de la présence d'un contrôle au moment de l'accident. Il a en outre ajouté que la fixation d'un tel seuil risquait d'accréditer dans l'esprit des automobilistes l'idée d'une tolérance à l'égard de la conduite à une vitesse inférieure à ce seuil. Soulignant qu'en matière d'alcoolémie il était fait application d'une notion « d'ivresse manifeste », il a précisé que la notion de vitesse manifestement excessive serait laissée à l'appréciation du juge, lequel pourrait retenir cette circonstance aggravante sur la base d'un faisceau d'indices objectivement établis, tels que les témoignages, les traces de freinage ou l'impact du choc du véhicule.

Estimant que la notion de vitesse manifestement excessive était trop vague pour être retenue comme une circonstance aggravante entraînant de lourdes sanctions, le rapporteur s'est déclaré défavorable à l'amendement.

En accord avec ces propos, le président Pascal Clément a souligné que le juge pourrait avoir recours à des indices pour prouver que le seuil de dépassement de la vitesse maximale autorisée avait été franchi. M. Rudy Salles s'est déclaré au contraire favorable à l'amendement, en estimant que le texte examiné poursuivait également un objectif de prévention, qui justifiait que le risque d'être condamné soit maximal.

La Commission a rejeté l'amendement de M. Georges Fenech, ainsi que l'amendement n° 4 de M. Richard Mallié tendant à retenir comme circonstance aggravante un dépassement de 40 % de la vitesse maximale autorisée.

Elle a en revanche adopté un amendement du rapporteur, tendant à harmoniser la définition de la circonstance aggravante en cas de fuite du conducteur avec la définition du délit de fuite figurant à l'article 434-10 du code pénal (amendement n° 20).

Après l'article 1er, la Commission a examiné un amendement de M. Christian Vanneste tendant à ramener à 0,10 au lieu de 0,80 g d'alcool par litre de sang le seuil prévu à l'article L. 234-1 du code de la route pour caractériser le délit de conduite sous l'empire d'un état alcoolique. Son auteur a souligné qu'il s'agissait de renforcer la prévention des accidents dus à l'alcoolisme et d'inviter les conducteurs à renoncer à toute boisson alcoolique, comme le prévoient déjà certains pays, tels que la Suède. Il a indiqué que les pays européens dans lesquels l'alcoolémie était la plus forte, le Portugal et la France, comptaient également le plus grand nombre d'accidents de la route.

Tout en reconnaissant que le principe du « taux zéro » pouvait faire l'objet d'un débat, le rapporteur a souhaité qu'avant toute modification des taux en vigueur, les sanctions prévues en cas de dépassement de ceux-ci soient effectivement appliquées. M. Jean-Pierre Soisson a estimé, pour sa part, que la fixation d'un taux si bas paralyserait totalement la circulation automobile dans bien des régions, tandis que le président Pascal Clément en a fait ressortir le caractère irréaliste compte tenu du taux constaté chez les personnes à jeun.

M. Xavier de Roux, également opposé à l'amendement, a rappelé que le dépassement du taux d'alcoolémie autorisé pouvait conduire à des retraits de points de permis, voire à la suppression du permis, et priver ainsi de nombreux Français de leur outil de travail. M. Alain Marsaud s'est demandé si cette mesure était bien cohérente avec une disposition introduite par amendement parlementaire dans la loi de finances pour 2003 et prorogeant le privilège des bouilleurs de cru. Après que M. Bernard Roman eut invité à la prudence en soulignant qu'il convenait de se référer aux travaux de la Mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie (MILDT), la Commission a rejeté cet amendement.

À l'article 2, la Commission a rejeté deux amendements de M. Georges Fenech, ainsi que les amendements nos 5 et 6 de M. Richard Mallié, par cohérence avec la position précédemment adoptée. Elle a ensuite examiné un amendement de M. Philippe Houillon tendant à supprimer la notion de faute, dans le nouvel article 222-20-1 du code pénal, sanctionnant la maladresse du conducteur, son imprudence, son inattention, sa négligence ou le manquement à une obligation de prudence ou de sécurité, d'une peine de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 euros d'amende. Son auteur a précisé que la faute en droit pénal était intentionnelle, alors que la maladresse ne l'était pas. Après que le rapporteur eut indiqué que la jurisprudence utilisait déjà la notion de « faute de maladresse », la Commission a adopté cet amendement (amendement no 22), ainsi que deux amendements de coordination du rapporteur (amendement nos 21 et 23).

La Commission a adopté les articles 1er et 2 ainsi modifiés.

Article additionnel après l'article 2

(art. 223-11 et 223-12 [nouveau] du code pénal)


Création d'un délit d'interruption involontaire de grossesse

La Commission a examiné deux amendements présentés, l'un par M. Jean-Paul Garraud, tendant à instaurer un nouveau délit d'interruption involontaire de grossesse, et l'autre par M. Michel Hunault, sanctionnant le délit d'homicide involontaire commis sur un enfant à naître.

M. Jean-Paul Garraud a expliqué que, dans un arrêt du 29 juin 2001, la Cour de cassation avait considéré qu'en application du principe d'interprétation stricte de la loi pénale, le délit d'homicide involontaire n'était pas applicable à ce cas, et jugé qu'il convenait par conséquent de combler le vide juridique ainsi créé en complétant les dispositions de l'article 223-10 du code pénal, qui punit de cinq ans d'emprisonnement le fait de provoquer, uniquement de façon volontaire, une interruption de grossesse sans le consentement de la femme enceinte. Reconnaissant qu'une telle disposition dépassait la seule mise en cause de responsabilité dans le cadre d'un accident de la circulation pour concerner le problème plus général de la responsabilité du fait d'un tiers, M. Jean-Paul Garraud a cependant fait observer que la loi du 10 juillet 2000 relative aux délits non intentionnels avait clairement circonscrit les contours de la faute involontaire, l'article 121-3 du code pénal subordonnant l'engagement de la responsabilité à l'existence d'une faute caractérisée.

M. Michel Hunault a fait valoir que, s'il poursuivait le même objectif, l'amendement qu'il proposait visait à protéger, non la mère, mais l'enfant lui-même, ce qui permettait d'aborder le problème de non-assistance à personne en danger. Il a expliqué qu'il se situait ainsi dans la ligne d'un arrêté du 19 juillet 2002, autorisant l'inscription dans le livret de famille d'un enfant mort-né.

M. Xavier de Roux a exprimé des réserves à l'égard de ces amendements, qui traitent de questions générales touchant à la responsabilité et ouvrent à nouveau le débat sur un sujet traité par la loi du 10 juillet 2000 et dont la jurisprudence a précisé la portée. Il a estimé qu'un tel cavalier législatif n'avait pas sa place dans un texte relatif à la sécurité routière. Récusant cette analyse, M. Jean-Paul Garraud a estimé qu'il n'était pas possible d'esquiver ce débat, qui concerne de nombreux cas de violence routière.

M. Philippe Houillon a craint que l'adoption d'un tel amendement ne vienne compliquer excessivement le droit de la responsabilité, qui a le mérite de la clarté puisqu'il est fondé sur l'existence d'une faute, d'un dommage et d'un lien de causalité entre la faute et le dommage. Tout en contestant par conséquent l'existence d'un vide juridique, il a jugé que la question du statut du fœtus relevait d'un autre débat.

M. René Dosière a jugé peu opportun de revenir sur les dispositions de la loi du 10 juillet 2000, dont il a rappelé qu'elle avait été adoptée à l'unanimité par les deux assemblées, qui avaient travaillé sur ce texte en étroite concertation, de façon à aboutir à la rédaction d'un texte clair et aisément applicable par les magistrats. En réponse à une question de M. Alain Marsaud, M. Jean-Paul Garraud a indiqué que son amendement n'écartait pas le cas d'une interruption involontaire de grossesse due à l'homicide involontaire de la mère.

Compte tenu de modifications rédactionnelles suggérées par le rapporteur, la Commission a adopté l'amendement présenté par M. Jean-Paul Garraud (amendement n° 24) et rejeté celui de M. Michel Hunault.

Article 3

(art. 434-10 du code pénal,
L. 234-11, L. 324-12, L. 234-13 et L. 235-5 du code de la route)


Coordinations

Cet article effectue, dans le code pénal et le code de la route, les coordinations rendues nécessaires par la création des trois nouvelles infractions prévues par les articles 1er et 2 du projet de loi.

Le paragraphe I modifie le deuxième alinéa de l'article 434-10 du code pénal, relatif au doublement des peines prévues lorsque l'homicide ou les blessures involontaires s'accompagnent du délit de fuite, afin de préciser que ces dispositions ne s'appliquent pas lorsque l'homicide ou les blessures involontaires ont été commises par le conducteur d'un véhicule terrestre à moteur (articles 221-6, 222-201 et 222-20-2).

Lorsque les atteintes involontaires à la vie ou à l'intégrité physique de la personne accompagnées d'un délit de fuite sont le fait d'un conducteur d'un véhicule fluvial ou maritime, les dispositions du deuxième alinéa de l'article 434-10 continueront à s'appliquer.

Le paragraphe II procède à un certain nombre d'abrogations des dispositions du code de la route, notamment par coordination avec l'article 5 du projet de loi, qui définit de nouvelles peines complémentaires encourues pour les infractions d'homicide et de blessures involontaires :

· L'article L. 234-11, qui prévoit une aggravation des peines en cas d'homicide ou de blessures involontaires commis par un conducteur en état d'ivresse manifeste ou sous l'empire d'un état alcoolique.

· Le paragraphe II de l'article L. 234-12, relatif aux peines complémentaires susceptibles d'être prononcées en cas d'homicide ou de blessures involontaires commis par un conducteur en état d'ivresse manifeste ou sous l'empire d'un état alcoolique.

· Le deuxième alinéa de l'article L. 234-13, qui prévoit une annulation de plein droit du permis de conduire avec interdiction de solliciter un nouveau permis pendant cinq ans au plus dans les cas d'homicide ou de blessures involontaires accompagnée d'un état d'alcoolémie.

· L'article L. 235-5, qui énumère les peines applicables en cas d'homicide ou de blessures involontaires commis par un conducteur ayant fait usage de stupéfiants. La durée de vie de cet article aura été très limitée, puisque celui-ci n'est en vigueur que depuis le 4 février dernier.

La Commission a adopté un amendement du rapporteur coordonnant les dispositions du projet de loi avec la procédure du juge unique (amendement n° 25).

Puis elle a adopté l'article 3 ainsi modifié.

Chapitre II

Récidive, peines complémentaires et amende forfaitaire

Section 1

Dispositions relatives à la répression des infractions commises en récidive

Article 4

(art. 131-13, 132-11, 132-16-2 [nouveau] du code pénal,
L. 221-2 et L. 413-1 du code de la route)


Infractions commises en état de récidive

Cet article renforce la sévérité des règles applicables en matière de récidive, afin de mieux sanctionner les conducteurs qui, après avoir commis une première infraction, continuent d'avoir un comportement dangereux sur les routes.

Les paragraphes I et II complètent les articles 131-13 et 132-11 du code pénal, relatifs à la récidive des contraventions de la cinquième classe.

Le 5° de l'article 131-13 fixe à 3 000 € le montant de l'amende encourue en cas de récidive d'une contravention de la cinquième classe lorsque le règlement le prévoit.

Le paragraphe I complète cet alinéa afin de préciser que cette disposition ne s'applique pas lorsque la loi prévoit que la récidive de la contravention constitue un délit.

La portée de cet ajout est plus pédagogique que juridique, puisque l'absence de disposition de ce type n'a pas empêché le législateur de faire des contraventions de conduite sans permis et de grand excès de vitesse des délits en cas de récidive (articles L. 221-2 et L. 413-1 du code de la route).

L'article 132-12 précise les modalités d'application de la récidive d'une contravention de la cinquième classe, en fixant à un an à compter de l'expiration ou de la prescription de la précédente peine le délai pour apprécier la récidive.

Le paragraphe II ajoute à cet article un nouvel alinéa qui fixe à trois ans le délai pour apprécier la récidive d'une contravention de la cinquième classe lorsque cette récidive constitue un délit. Rappelons qu'actuellement, le délai de récidive mentionné aux articles L. 221-2 (conduite sans permis) et L. 413-1 (grand excès de vitesse) est fixé à un an.

Cette modification correspond à une décision prise par le comité interministériel de la sécurité routière du 18 décembre dernier, qui s'est engagé à porter de un à trois ans le délai de récidive pour les conducteurs sans permis ou ayant commis un excès de vitesse égal ou supérieur à 50 km/h.

Le paragraphe III insère, à la fin de la sous-section du code pénal consacrée aux peines applicables en cas de récidive, un nouvel article 132-16-2 qui assimile au regard de la récidive un certain nombre d'infractions, en opérant une distinction entre les atteintes à la personne et les autres infractions au code de la route.

Le premier alinéa du nouvel article 132-16-2 dispose que les délits d'homicide et de blessures involontaires prévus par les articles 221-6-1, 222-19-1 et 222-20-1 du code pénal sont considérés comme une même infraction pour l'appréciation de la récidive.

Le deuxième alinéa prévoit une disposition similaire pour les délits de conduite sans permis (article L. 221-2 du code de la route), de conduite en état d'alcoolémie (article L. 234-1), de conduite après usage de stupéfiants (article L. 235-1) et de grand excès de vitesse (article L. 413-1). Lorsque l'un de ces délits constitue le second terme de la récidive, il est assimilé, pour la récidive, aux infractions d'homicide ou de blessures involontaires.

Cette assimilation au regard de la récidive permet de doubler les peines encourues par le conducteur auteur de telles infractions. Rappelons, en effet, que l'article 132-10 du code pénal dispose que, lorsqu'une personne, déjà condamnée définitivement pour un délit, commet dans un délai de cinq ans soit le même délit, soit un délit qui lui est assimilé au regard des règles de la récidive, le maximum des peines d'emprisonnement et d'amende encourues est doublé.

Ainsi, l'automobiliste arrêté pour conduite en état alcoolique et déjà condamné pour un accident mortel de la circulation encourra quatre ans d'emprisonnement, au lieu de deux actuellement. A l'inverse, une condamnation pour conduite en état alcoolique précédant un accident mortel n'entrera pas en ligne de compte dans la définition de la peine encourue, le premier terme de la récidive ne constituant pas une atteinte à la personne.

La Commission a rejeté un amendement présenté par M. René Dosière tendant à limiter l'assimilation, pour l'appréciation de la récidive, du délit d'homicide involontaire au délit de blessures involontaires ayant entraîné une mutilation ou une infirmité permanente, le rapporteur ayant fait valoir que cette limitation affaiblirait les dispositions proposées en matière de récidive. Elle a adopté un amendement de coordination du rapporteur (amendement n° 26), avant de rejeter un amendement de M. Thierry Mariani aggravant lourdement les peines lorsqu'une infraction de conduite sans permis de conduite a été commise concomitamment de celle d'usage d'un faux permis.

Les paragraphes IV et V modifient les articles L. 221-2 et L. 413-1 du code de la route, qui font de la récidive des contraventions de conduite sans permis de conduire et de grand excès de vitesse un délit.

Dans sa rédaction actuelle, l'article L. 221-2 punit de deux ans d'emprisonnement et de 3 750 € d'amende le fait, en état de récidive au sens de l'article 132-11 du code pénal, de conduire un véhicule sans être titulaire du permis de conduire correspondant au véhicule.

Le paragraphe IV complète ces dispositions afin de préciser que la récidive doit s'apprécier au regard du deuxième alinéa de l'article 132-11 du code pénal, qui fixe à trois ans le délai dans lequel la récidive d'une contravention de la cinquième classe constitue un délit.

Le paragraphe V procède à une modification similaire à l'article L. 413-1, qui punit de trois mois d'emprisonnement et de 3 750 € d'amende le fait de dépasser de plus de 50 km/h la vitesse maximale autorisée alors même que le conducteur a été condamné définitivement moins d'un an auparavant pour la même infraction, en remplaçant la référence au délai d'un an par un renvoi au deuxième alinéa de l'article 132-11 du code pénal.

La Commission a adopté l'article 4 ainsi modifié.

Section 2

Dispositions relatives aux peines complémentaires

Article 5

(art. 131-6, 131-14, 131-16, 132-28, 221-8, 222-44, 223-18, 435-5 du code pénal,
708 du code de procédure pénale, L. 223-5, L. 224-16, 224-17
L. 234-2, L. 234-8, L. 235-1, L. 235-3 et L. 413-1 du code de la route)


Suppression de la possibilité d'aménagement
de la peine de suspension du permis de conduire

Cet article met en application la décision du comité interministériel de sécurité routière du 18 décembre dernier relative à la suppression des permis blancs. Ce comité a en effet souhaité « rendre à la sanction de retrait de permis toute sa valeur pédagogique avec une meilleure prise de conscience de la gravité du comportement en rendant impossible pour les infractions graves les « permis blancs » quand il s'agit d'une peine complémentaire ».

Rappelons que les permis blancs correspondent à des aménagements de la peine de suspension du permis de conduire, qui ont pour effet, dans la plupart des cas, de limiter cette suspension à la seule conduite en dehors de l'activité professionnelle.

Les paragraphes I et II modifient les articles 131-6 et 131-14 du code pénal, qui énumèrent les peines alternatives susceptibles d'être prononcées pour les délits punis d'une peine d'emprisonnement et pour les contraventions de la cinquième classe, afin de préciser que la limitation de la suspension du permis de conduire à la conduite en dehors de l'activité professionnelle n'est pas possible pour les délits ou les contraventions pour lesquels l'aménagement de la suspension du permis de conduire, encourue à titre de peine complémentaire, est interdit.

Ces ajouts ont pour objet d'éviter que la suppression des permis blancs pour certaines infractions ne soit contournée par le prononcé, dans le cadre des articles 131-6 et 131-14 du code pénal, de peines de suspension du permis de conduire aménagées.

La Commission a adopté deux amendements rédactionnels du rapporteur (amendements nos 27 et 28).

Le paragraphe III modifie l'article 131-16 du code pénal, qui énumère les peines complémentaires susceptibles d'être appliquées pour réprimer une contravention.

Il complète le 1° de cet article, qui porte sur la suspension, pour une durée de trois ans au plus, du permis de conduire et rappelle que cette suspension peut être limitée à la conduite en dehors de l'activité professionnelle, afin de préciser que le règlement peut exclure expressément cette suspension limitée.

Bien qu'elle ne soit pas juridiquement indispensable, cette mention permet de lever toute ambiguïté sur la possibilité dont dispose le pouvoir réglementaire pour supprimer tout aménagement de la peine complémentaire de suspension du permis de conduire prévue pour les contraventions.

La Commission a examiné un amendement présenté par M. René Dosière, incitant le juge à condamner les auteurs d'infraction routière à des peines de travail d'intérêt général dans un établissement spécialisé dans l'accueil de blessés de la route. Favorable à l'objectif poursuivi par cet amendement, le rapporteur s'est toutefois interrogé sur le point de savoir si une telle disposition devait figurer dans la loi, préférant pour sa part s'en remettre à l'appréciation du juge. M. Xavier de Roux, soutenant l'amendement, a estimé nécessaire d'imposer des peines alternatives à la prison dans la mesure où les magistrats renonçaient parfois, à défaut de celles-ci, à prononcer toute sanction. M. Bernard Roman a jugé qu'il revenait à la représentation nationale, et non au juge, de favoriser ce type de peines alternatives. Le rapporteur ayant fait observer que, si les magistrats répugnaient à prononcer de telles peines, c'était aussi en raison de la faible capacité d'accueil des établissements concernés, M. Philippe Houillon a fait observer qu'en règle générale, les magistrats prononçaient peu de peines d'intérêt général et qu'en dépit des demandes des communes, celles-ci n'accueillaient que très peu de personnes condamnées à des peines d'intérêt général. Soutenant l'amendement, il a souhaité le modifier pour lui donner un caractère systématique. Cette dernière suggestion a été rejetée, le rapporteur ayant observé que l'automaticité rendrait le texte inapplicable. La Commission a alors adopté l'amendement de M. René Dosière compte tenu de la correction d'erreurs de référence (amendement n° 30).

Le paragraphe IV modifie l'article 132-28 du code pénal, qui dispose qu'en matière correctionnelle ou contraventionnelle, la juridiction peut décider le fractionnement de la peine de suspension du permis de conduire pour des motifs graves d'ordre médical, familial ou professionnel, afin de préciser que ce fractionnement n'est pas possible lorsque la loi ou le règlement interdit de limiter la peine de suspension à la conduite en dehors de l'activité professionnelle.

La Commission a adopté un amendement rédactionnel du rapporteur (amendement n° 29).

Dans le même esprit, le paragraphe IX complète le troisième alinéa de l'article 708 du code de procédure pénale, qui détermine les modalités de suspension ou de fractionnement de l'exécution d'une peine de police ou d'une peine correctionnelle non privative de liberté, afin de préciser que cette suspension ou ce fractionnement ne sont pas possibles pour la peine de suspension du permis de conduire lorsque la loi ou le règlement ont interdit de limiter cette suspension à la conduite en dehors de l'activité professionnelle.

Il s'agit, là encore, d'éviter que l'interdiction de l'aménagement de la peine de suspension du permis de conduire ne soit battue en brèche par le recours au fractionnement de la peine.

Les paragraphes V à VIII et X suppriment toute possibilité d'aménagement de la peine de suspension du permis de conduire pour les délits les plus graves commis à l'occasion de la conduite d'un véhicule.

Les paragraphes V et VI modifient les articles 221-8 et 222-44 du code pénal, qui énumèrent les peines complémentaires applicables en cas d'atteintes involontaires à la vie et à l'intégrité de la personne.

Ils complètent le 3° de ces articles, relatif à la peine de suspension, pour une durée de cinq ans au plus, du permis de conduire, afin de préciser que cette peine ne peut pas être assortie de sursis, même partiellement, et ne peut pas être limitée à la conduite en dehors de l'activité professionnelle en cas d'homicide ou de blessures involontaires commis à l'occasion de la conduite d'un véhicule (article 221-6-1 et 222-19-1 et 222-20-1) ; lorsque l'homicide ou les blessures involontaires sont accompagnées d'au moins une circonstance aggravante, la durée de la suspension peut être portée à dix ans .

L'article 223-18 du code pénal recense les peines complémentaires applicables aux personnes coupables du délit de mise en danger d'autrui. Rappelons que cette infraction, définie à l'article 223-1 du code pénal comme le fait d'exposer directement autrui à un risque immédiat de mort ou de blessures de nature à entraîner une mutilation ou une infirmité permanente par la violation manifestement délibérée d'une obligation particulière de sécurité ou de prudence imposée par la loi et le règlement et punie d'un an d'emprisonnement et de 15 000 € d'amende, est fréquemment utilisée pour sanctionner les comportements dangereux au volant.

Le paragraphe VII complète donc le 3° de l'article 223-18, afin de préciser que la peine complémentaire de suspension, pour une durée de cinq ans au plus, du permis de conduire, ne peut pas être assortie de sursis, même partiel, et ne peut pas être limitée à la conduite en dehors de l'activité professionnelle lorsqu'elle sanctionne un délit commis à l'occasion de la conduite d'un véhicule.

Le paragraphe VIII modifie l'article 434-45 du code pénal, qui dispose que les personnes coupables du délit de fuite encourent la peine complémentaire de suspension du permis de conduire, cette suspension pouvant être limitée à la conduite en dehors de l'activité professionnelle, afin de supprimer la référence à la possibilité d'aménagement de la peine.

La Commission a adopté un amendement rédactionnel du rapporteur (amendement n° 31).

Le paragraphe X supprime, pour les délits les plus graves du code de la route, qui « mettent en danger la vie d'autrui », la possibilité de limiter la peine complémentaire de suspension du permis de conduire à la conduite en dehors de l'activité professionnelle.

Les délits concernés sont :

- le refus de remise du permis de conduire au préfet après le retrait de la totalité des points (article L. 223-5) ;

- la conduite d'un véhicule à moteur malgré la suspension, la rétention, l'annulation ou l'interdiction d'obtenir la délivrance du permis de conduire (article L. 224-16) ;

- le refus de restituer le permis de conduire à la suite d'une décision de suspension ou de rétention de ce permis (article L. 224-17) ;

- la conduite en état d'ivresse ou sous l'empire d'un état alcoolique et le refus de se soumettre aux vérifications destinées à établir cet état (articles L. 234-2 et 234-8) ;

- la conduite après usage de stupéfiants et le refus de se soumettre aux vérifications destinées à établir l'éventuel usage de stupéfiants (articles L. 235-1 et 235-3) ;

On observera, s'agissant des infractions de conduite en état alcoolique ou après usage de stupéfiants, que le code de la route interdit déjà d'assortir la suspension du permis de conduire d'un sursis, même partiellement.

- le dépassement de la vitesse maximale autorisée égal ou supérieur à 50 km/h (article L. 413-1).

Sur la base des condamnations délictuelles prononcées en 2001, l'étude d'impact estime à environ 69 000 le nombre total de peines complémentaires de suspension de permis de conduire qui verront toute possibilité d'aménagement par le juge supprimée, soit 52 % de l'ensemble des condamnations liées à la circulation routière, auxquelles il convient d'ajouter les 5 563 mesures de suspension du permis de conduire prononcées à titre de peine complémentaire pour la contravention de blessures involontaires ayant entraîné une incapacité totale de travail de moins de trois mois, transformée en délit par le projet de loi.

La Commission a adopté un amendement du rapporteur supprimant l'interdiction d'aménager la peine de suspension du permis de conduire pour les délits de refus de remise du permis de conduire après le retrait de la totalité des points et de refus de restituer le permis après une décision de suspension ou de rétention de ce permis (amendement n° 32), son auteur ayant souligné qu'il convenait de limiter l'interdiction des permis blancs aux délits les plus graves mettant en danger la sécurité d'autrui. Elle a également adopté un amendement rédactionnel du rapporteur (amendement n° 33).

La Commission a adopté l'article 5 ainsi modifié.

Article 6

(art. 131-16, 131-21, 131-35-1 [nouveau], 132-45, 221-8, 222-44, 223-18,
434-41 du code pénal, 41-1 du code de procédure pénale, L. 221-2, L. 222-14, L. 221-5, L. 223-5, L. 224-16, L. 231-2, L. 234-2, L. 234-8, L. 235-1, L. 235-3
et L. 413-1 du code de la route)


Peines complémentaires en cas d'infractions commises
à l'occasion de la conduite d'un véhicule

Cet article crée de nouvelles peines de stage de formation à la sécurité routière et d'interdiction de conduire certains véhicules et étend la peine complémentaire de confiscation du véhicule.

-  Peine d'interdiction de conduire des véhicules à moteur (paragraphe I)

Le paragraphe I crée une nouvelle peine complémentaire d'interdiction de conduire des véhicules à moteur pour les infractions contraventionnelles.

Il complète à cet effet l'article 131-16 du code pénal, qui énumère les peines complémentaires applicables, lorsque le règlement le prévoit, aux contraventions, par une référence à l'interdiction de conduire certains véhicules à moteur, y compris ceux pour lesquels le permis de conduire n'est pas exigé, pour une durée de trois ans au plus.

On observera que l'article 131-6 du code pénal, relatif aux peines alternatives susceptibles d'être prononcées pour les délits punis d'une peine d'emprisonnement, prévoit une peine similaire d'interdiction de conduire des véhicules pour une durée de cinq ans au plus.

Désormais, outre la suspension pour une durée de trois ans au plus du permis de conduire, l'auteur d'une contravention pourra se voir interdire pour la même durée la conduite de tout véhicule à moteur. Sont concernées par cette interdiction l'ensemble des véhicules à moteur, définis par l'article L. 110-1 du code de la route comme les véhicules terrestres pourvus d'un moteur à propulsion et circulant sur route par ses moyens propres, y compris les voiturettes, actuellement utilisés par certains conducteurs multirédicivistes pour contourner la suspension du permis de conduire (3).

Les magistrats pourront adapter cette peine à la personnalité de l'auteur de l'infraction, en interdisant par exemple aux auteurs d'excès de vitesse la conduite de véhicules puissants ou en excluant les voiturettes pour les conducteurs condamnés en récidive pour alcoolémie.

La Commission a adopté un amendement rédactionnel du rapporteur (amendement n° 34).

-  Peine de confiscation du véhicule (paragraphe II)

Le paragraphe II complète l'article 131-21 du code pénal, qui définit les modalités d'application de la peine de confiscation, afin de préciser les conditions de confiscation d'un véhicule : lorsque celui-ci n'a pas été saisi au cours de la procédure, la personne condamnée doit le remettre, sur injonction du ministère public, au service ou à l'organisme chargé de sa destruction ou de son aliénation.

Cette modification permettra aux juridictions de prononcer plus facilement la peine de confiscation. En l'absence de saisie préalable du véhicule au cours de la procédure, au demeurant fort rare, les magistrats hésitaient à prononcer cette peine, la confiscation en valeur, prévue lorsque la chose confisquée n'a pas été saisie, étant dans ce cas peu adaptée.

-  Définition du stage de sensibilisation à la sécurité routière (paragraphe III)

Le paragraphe III précise les modalités du stage de sensibilisation à la sécurité routière pouvant être encourue à titre de peine complémentaire en cas de délit. Cette nouvelle peine n'a pas à figurer en tant que telle dans la liste des peines complémentaires applicables en cas de délit, puisque l'article 131-10 du code pénal dispose, de manière générale, qu'un délit peut être sanctionné par une peine complémentaire emportant obligation de faire lorsque la loi le prévoit.

Le paragraphe III insère à cet effet dans le code pénal, à la fin de la sous-section consacrée au contenu et aux modalités d'application de certaines peines, un nouvel article 131-35-1 qui précise que l'obligation d'accomplir un stage de sensibilisation à la sécurité routière doit être exécutée dans les six mois de la condamnation. Ce délai est volontairement relativement long, afin de tenir compte à la fois du nombre limité, tout au moins au départ, de stages proposés et des disponibilités des auteurs de l'infraction.

Les frais du stage, qui sont à la charge du condamné, ne peuvent pas excéder la moitié du montant de l'amende encourue.

L'exécution du stage donne lieu à la remise au condamné d'une attestation prouvant cette exécution, qui doit être envoyée au procureur de la République. En cas d'inexécution, des poursuites pourront être engagées sur le fondement de l'article 434-41 du code pénal, modifié par le paragraphe VIII, qui prévoit une peine de deux ans d'emprisonnement et 30 000 € d'amende en cas de violation de l'obligation d'effectuer un stage.

D'après les informations fournies à votre rapporteur, ce stage de sensibilisation à la sécurité routière sera en pratique très proche de la formation de sensibilisation aux causes et conséquences des accidents de la route, prévue par les articles L. 223-6 et R. 223-5 et suivants du code de la route, pour les titulaires du permis de conduire souhaitant reconstituer leurs points et pour les jeunes conducteurs. Cette formation est actuellement organisée sous forme de stage d'une durée minimale de seize heures réparties sur deux jours et doit comporter un enseignement portant sur les facteurs généraux de l'insécurité routière et un ou plusieurs enseignements spécialisés dont l'objet est d'approfondir des facteurs générateurs d'accidents de la route.

La Commission a adopté un amendement du rapporteur supprimant la référence au montant des frais de stage (amendement n° 35), son auteur ayant fait valoir que ces dispositions présentaient un caractère réglementaire et étaient en outre inadaptées, puisqu'en cas d'homicide aggravé, le montant du stage pouvait être de 75 000 €, ce qui semble très excessif.

-  Introduction du stage de sensibilisation à la sécurité routière parmi les obligations du sursis avec mise à l'épreuve (paragraphe IV)

Le paragraphe IV complète l'article 132-45 du code pénal, relatif aux obligations imposées par les juridictions de condamnation dans le cadre d'un sursis avec mise à l'épreuve, afin d'ajouter une référence au stage de sensibilisation à la sécurité routière ; comme lorsqu'il est suivi à titre de peine complémentaire, les frais de stage sont à la charge du condamné ; de manière tout à fait logique, il est précisé que ce stage ne peut être imposé qu'en cas d'infraction commise à l'occasion de la conduite d'un véhicule terrestre à moteur. Rappelons que le non respect par le condamné des obligations du sursis avec mise à l'épreuve peut entraîner la révocation de ce dernier et l'exécution de la peine d'emprisonnement.

-  Extension des peines complémentaires encourues en cas d'homicide ou de blessures involontaires ou de mise en danger de la vie d'autrui et peine d'annulation de plein droit du permis de conduire (paragraphes V à VIII)

Les paragraphes V, VI et VII complète la liste des peines encourues pour les délits d'homicide ou de blessures involontaires (articles 2221-6-1, 222-19-1 et 222-20-1) et de mise en danger de la vie d'autrui (article 223-1).

· L'article 221-8 du code pénal énumère les peines complémentaires encourues en cas d'atteinte involontaire à la vie (article 221-6) et d'homicide involontaire commis par le conducteur d'un véhicule (article 221-6-1 créé par l'article 1er du projet de loi). Il s'agit de la peine d'interdiction d'exercer l'activité professionnelle à l'occasion de laquelle l'infraction a été commise, de l'interdiction de détenir, pour une durée de cinq ans au plus, une arme, de la suspension, pour une durée de cinq ans au plus, du permis de conduire, cette suspension ne pouvant pas être limitée à la conduite en dehors de l'activité professionnelle ni assortie d'un sursis pour les délits visés à l'article 221-6-1 (article 5 du projet de loi), de l'annulation du permis de conduire avec interdiction de solliciter un nouveau permis pendant cinq ans au plus, de la confiscation d'une arme et du retrait du permis de chasser pendant cinq ans au plus.

Le paragraphe V complète cette liste en ajoutant :

- l'interdiction de conduire certains véhicule à moteur, y compris ceux pour lesquels le permis de conduire n'est pas exigé, pour une durée de cinq ans au plus ; cette rédaction reprend celle proposée au paragraphe I pour les peines complémentaires contraventionnelles.

- l'obligation d'accomplir un stage de sensibilisation à la sécurité routière, défini par le nouvel article 131-35-1 (paragraphe III).

- l'immobilisation, pour une durée d'un an au plus, du véhicule dont le condamné s'est servi pour commettre l'infraction, s'il en est le propriétaire. Les modalités d'application de cette peine complémentaire sont définies aux articles R. 131-5 à R. 131-11 du code de la route (remise du certificat d'immatriculation, placement du véhicule sous scellés, etc.).

- la confiscation du véhicule dont le condamné s'est servi pour commettre l'infraction, s'il en est le propriétaire. Cette peine complémentaire est également encourue pour les délits de conduite en état d'alcoolémie et après usage de stupéfiants commis en état de récidive.

S'agissant de l'immobilisation et de la confiscation du véhicule, on observera que les articles L. 234-12 et L. 235-4 du code de la route prévoient déjà de telles peines complémentaires pour les homicides involontaires commis par un automobiliste conduisant sous l'empire d'un état alcoolique, en état d'ivresse ou après usage de stupéfiants.

Ces quatre nouvelles peines complémentaires ne s'appliquent pas à l'ensemble des homicides involontaires, mais uniquement à ceux commis par les conducteurs de véhicule terrestre à moteur (article 221-6-1).

La Commission a été saisie d'un amendement de M. Georges Fenech ayant pour objet de permettre au juge de prononcer une peine interdiction de conduire un véhicule non équipé d'un enregistreur de vitesse, pour une durée de cinq ans ou plus. Malgré les objections de M. Christian Estrosi sur les difficultés auxquelles se heurteraient les personnes souhaitant louer une voiture et ne pouvant obtenir un véhicule muni d'un tel équipement, et les observations du rapporteur, qui a souligné que ces dispositions étaient couvertes par la peine générale d'interdiction de conduire certains véhicules, la Commission a adopté cet amendement (amendement n° 36).

Le paragraphe V prévoit par ailleurs que toute condamnation pour un délit d'homicide involontaire commis par le conducteur d'un véhicule avec au moins une circonstance aggravante (violation délibérée d'une obligation de sécurité, état alcoolique, stupéfiants, absence de permis de conduire, grand excès de vitesse, délit de fuite) donne lieu de plein droit à l'annulation du permis de conduire avec interdiction de solliciter un nouveau permis pendant une durée maximum de dix ans. C'est au juge qu'il appartiendra de fixer, à l'intérieur de ce délai de dix ans, la durée de l'interdiction. En cas de récidive, la durée de l'interdiction est portée de plein droit à dix ans et le tribunal peut même décider, par une décision spécialement motivée, que cette interdiction sera définitive.

Cette annulation de plein droit du permis de conduire est déjà prévue par le code de la route dans un certain nombre de cas.

Les articles L. 234-13 et L. 235-4 prévoient ainsi une annulation de plein droit du permis de conduire avec interdiction de solliciter la délivrance d'un nouveau permis pendant une durée maximum de trois ans en cas de récidive de conduite en état alcoolique ou après usage de stupéfiants.

En cas d'homicide ou de blessures involontaires accompagnés des délits de conduite en état alcoolique ou après usage de stupéfiants, les articles L. 234-13 et L. 235-5 imposent également l'annulation de plein droit du permis de conduire, avec interdiction de solliciter un nouveau permis pendant une durée maximale de cinq ans.

Enfin, l'article L. 224-15 fixe à dix ans le délai minimum pour solliciter un nouveau permis de conduire après un homicide involontaire accompagné d'un délit de conduite en état alcoolique commis en récidive.

Le paragraphe V consiste se contente donc d'étendre les motifs d'annulation de plein droit du permis de conduire, d'allonger la durée pendant laquelle le tribunal pourra interdire au condamné de solliciter la délivrance d'un nouveau permis et, en cas de récidive, de prévoir que cette interdiction peut être définitive.

· Le paragraphe VI complète l'article 222-44, qui énumère les peines complémentaires encourues en cas d'atteintes involontaires à l'intégrité de la personne. Ces peines sont identiques à celles actuellement mentionnées à l'article 221-8, à l'exception du retrait du permis de chasser. L'article 222-44 prévoit en outre la peine de confiscation du véhicule appartenant au condamné et de confiscation de la chose qui a servi à commettre l'infraction.

Comme à l'article 221-8, le paragraphe VI ajoute à cette liste l'interdiction de conduire certains véhicules à moteur, y compris ceux pour lesquels le permis de conduire n'est pas exigé, pour une durée de cinq ans au plus, l'obligation d'accomplir un stage de sensibilisation à la sécurité routière et l'immobilisation, pour une durée d'un an au plus, du véhicule du condamné.

Si les deux premières peines sont encourues pour l'ensemble des délits de blessures involontaires commis par les conducteurs de véhicule terrestre à moteur (articles 222-19-1 et 222-20-1), la peine d'immobilisation est limitée aux atteintes involontaires à l'intégrité de la personne les plus graves, celles ayant entraîné une incapacité totale de travail supérieure à trois mois et commises avec au moins une circonstance aggravante.

On observera que le paragraphe VI n'ajoute pas la peine de confiscation du véhicule, déjà prévu par le 5° de l'article 222-44 du code pénal.

La Commission a adopté un amendement rédactionnel du rapporteur (amendement n° 37), ainsi qu'un amendement du même auteur étendant la peine d'immobilisation du véhicule à l'ensemble des blessures involontaires (amendement n° 38), le rapporteur ayant souligné que cette extension permettait d'établir une cohérence avec la peine de confiscation du véhicule, applicable aux blessures involontaires, quelle que soit la durée de l'incapacité totale de travail. Puis elle a adopté un amendement de coordination de M. Georges Fenech (amendement n° 39).

Comme pour les homicides involontaires aggravés, la nouvelle rédaction de l'article 222-44 prévoit l'annulation de plein droit du permis de conduire avec interdiction de solliciter un nouveau permis pendant dix ans au plus lorsque l'atteinte involontaire à l'intégrité de la personne est commise avec au moins une circonstance aggravante. Cette annulation de plein droit est cependant limitée aux blessures involontaires ayant entraîné une incapacité totale de travail supérieure à trois mois (article 220-19-1).

· L'article 223-18 énumère les peines complémentaires applicables aux personnes physiques coupables de l'infraction de mise en danger de la vie d'autrui (article 223-1) : interdiction d'exercer l'activité professionnelle à l'occasion de laquelle l'infraction a été commise ; interdiction, pour une durée de cinq ans, de détenir une arme ; suspension, pour une durée de cinq ans, du permis de conduire, cette suspension ne pouvant pas être assortie d'un sursis ni limitée à la conduite en dehors de l'activité professionnelle si l'infraction a été commise à l'occasion de la conduite d'un véhicule (article 5 du projet de loi) ; annulation du permis de conduire, avec interdiction de solliciter la délivrance d'un nouveau permis pendant cinq ans au plus.

Le paragraphe VII ajoute à cette liste les peines d'interdiction de conduire certains véhicules à moteur, y compris ceux pour lesquels le permis de conduire n'est pas exigé, pour une durée de cinq ans au plus et l'obligation d'accomplir un stage de sensibilisation à la sécurité routière, cette dernière peine étant applicable uniquement lorsque l'infraction a été commise à l'occasion de la conduite d'un véhicule.

La Commission a adopté un amendement de coordination de M. Georges Fenech (amendement n° 40).

Elle a ensuite examiné un amendement du rapporteur ayant pour objet d'étendre les peines d'interdiction de conduire certains véhicules, d'immobilisation et de confiscation du véhicule au délit de mise en danger de la vie d'autrui commis à l'occasion de la conduite d'un véhicule. M. Jérôme Lambert s'est interrogé sur la possibilité d'appliquer effectivement la peine d'interdiction de conduire certains véhicules pour lesquels le permis de conduire n'est pas exigé. M. Bernard Roman a souligné que les polices municipales, qui pouvaient être chargées d'effectuer des contrôles routiers, n'auraient pas les moyens de vérifier qu'un conducteur de véhicule sans permis a fait l'objet ou non d'une telle interdiction et que le seul moyen d'assurer un contrôle efficace en la matière - et qu'il a récusé - consisterait à définir un signe distinctif attaché à la personne. M. Christian Estrosi, rappelant que les pouvoirs des polices municipales avaient été élargis dans la loi pour la sécurité intérieure, a dit son scepticisme sur les possibilités pour les agents de ces polices d'accéder aux informations permettant de relever l'infraction visée par le troisième alinéa de cet amendement. M. Jean-Paul Garraud a fait observer qu'il appartenait au pouvoir réglementaire de se donner les moyens de faire respecter les prescriptions de la loi. La Commission a rejeté cet amendement.

· Enfin, le paragraphe VIII complète l'article 434-41 du code pénal, qui punit de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 € d'amende la violation des obligations ou interdictions résultant des peines de suspension ou d'annulation du permis de conduire, afin d'étendre ces sanctions à la violation de l'interdiction de conduire certains véhicules et de l'obligation d'accomplir un stage.

La Commission a adopté un amendement de coordination de M. Georges Fenech (amendement n° 41).

-  Introduction de stage de sensibilisation à la sécurité routière dans les mesures alternatives aux poursuites (paragraphe IX)

L'article 41-1 du code de procédure pénale définit les mesures que peut ordonner le procureur de la République comme alternative aux poursuites afin d'assurer la réparation du dommage causé à la victime, de mettre fin au trouble résultant de l'infraction ou de contribuer au reclassement de l'auteur des faits. Ces mesures sont le rappel à la loi, l'orientation de l'auteur des faits vers une structure sanitaire, sociale ou professionnelle, la régularisation de la situation de l'auteur des faits, la réparation du dommage et la médiation entre l'auteur des faits et la victime.

Le paragraphe IX complète cette liste en précisant que la mesure d'orientation vers une structure sanitaire, sociale ou professionnelle peut consister dans l'accomplissement par l'auteur des faits, à ses frais, d'un stage de sensibilisation à la sécurité routière, lorsque l'infraction a été commise à l'occasion de la conduite d'un véhicule.

Cet ajout permet de consacrer dans la loi une pratique effective depuis déjà quelques années. Il est à rapprocher des dispositions introduites par la loi du 9 septembre 2002 d'orientation et de programmation pour la justice, qui ont fait du suivi d'un stage ou d'une formation dans un organisme sanitaire ou social une mesure de composition pénale (article 41-2 du code de procédure pénale).

-  Extension des peines complémentaires encourues pour les délits prévus par le code de la route (paragraphes X à XVII)

· Les paragraphes X à XII étendent les peines complémentaires d'interdiction de conduire certains véhicules à moteur, d'obligation d'accomplir un stage de sensibilisation à la sécurité routière et de confiscation du véhicule dont le condamné s'est servi pour commettre l'infraction aux délits suivants :

- conduite en état de récidive sans le permis de conduire correspondant à la catégorie du véhicule considéré (article L. 221-2 du code de la route) ;

- refus de remettre son permis de conduire au préfet après le retrait de la totalité des points ou conduite d'un véhicule malgré l'invalidation du permis (article L. 223-5 modifié par l'article 11 du projet de loi) ;

- conduite d'un véhicule malgré la suspension, la rétention, l'annulation ou l'interdiction d'obtenir la délivrance du permis de conduire (article L. 224-16) ;

Ces nouvelles peines complémentaires s'ajoutent à celles de suspension du permis de conduire, de travail d'intérêt général, de jours-amendes ou d'annulation du permis de conduire déjà prévues.

La Commission a adopté trois amendements de coordination de M. Georges Fenech (amendements nos 42 à 44).

· Les paragraphes XIII à XVI autorisent l'application des peines complémentaires d'interdiction de conduire certains véhicules à moteur et d'obligation d'accomplir un stage de sensibilisation à la sécurité routière aux délits suivants :

- délit de fuite (article L. 231-2) ;

- conduite en état d'ivresse ou sous l'empire d'un état alcoolique et refus de se soumettre aux vérifications destinées à établir cet état (articles L. 234-2 et L. 234-8) ;

- conduite après usage de stupéfiants et refus de se soumettre aux vérifications destinées à établir la présence du stupéfiants (articles L. 235-1 et L 235-3).

Ces nouvelles peines complètent les peines de suspension du permis de conduire, d'annulation du permis de conduire, de travail d'intérêt général ou de jours-amende qui existent déjà.

S'agissant de la conduite en état alcoolique ou après usage de stupéfiants, les articles L. 234-12 et L. 235-4 prévoient en outre, en cas de récidive, la confiscation du véhicule appartenant au condamné.

La Commission a adopté quatre amendements de coordination de M. Georges Fenech (amendements nos 45 et 47 à 49) ainsi qu'un amendement du rapporteur étendant la peine de confiscation du véhicule au délit de fuite (amendement n° 46), par cohérence avec les autres dispositions de l'article 6 qui étendent cette peine à des délits similaires.

· Enfin, le paragraphe XVII complète l'article L. 413-1, qui prévoit une peine complémentaire de suspension du permis de conduire pour une durée de trois ans au plus en cas de dépassement de la vitesse maximale autorisée égal ou supérieur à 50 km/h, par une référence aux peines de d'interdiction de conduire certain véhicules à moteur, d'obligation d'accomplir un stage de sensibilisation à la sécurité routière et de confiscation du véhicule qui a servi à commettre l'infraction.

La Commission a adopté un amendement de coordination de M. Georges Fenech (amendement n° 50).

-  Coordinations (paragraphes XVIII et XIX)

L'article L. 224-14 du code de la route impose un examen médical et psychotechnique destiné à établir l'aptitude d'une personne sollicitant un nouveau permis après une annulation prononcée en application du code de la route. Cet examen est effectué aux frais de l'intéressé.

Par cohérence, le paragraphe XVIII étend cet examen médical obligatoire aux personnes ayant vu leur permis annulé pour les délits d'homicide ou de blessures involontaires (articles 221-6-1, 222-19-1 et 222-20-1) visés par le code pénal.

Le paragraphe XIX abroge l'article L. 224-15 du code de la route, dont le premier alinéa prévoit un doublement de la durée des peines complémentaires de suspension, d'annulation ou d'interdiction d'obtenir la délivrance d'un permis de conduire lorsque l'infraction en cause est commise simultanément avec un délit de fuite ou un délit de conduite sous l'empire d'un état alcoolique et dont le deuxième alinéa fixe à dix ans le délai minimum pour solliciter un nouveau permis en cas de récidive d'homicide involontaire commis simultanément avec un délit de conduite en état alcoolique, après un examen médical destiné à établir l'aptitude de l'intéressé.

Le premier alinéa complique inutilement la détermination des peines complémentaires applicables en cas d'homicide ou de blessures involontaires. Quant au deuxième alinéa, ses dispositions sont reprises à l'article 221-8 (paragraphe V), qui fixe à dix ans la durée de l'interdiction de solliciter un nouveau permis en cas de récidive d'homicide involontaire aggravé.

La Commission a adopté l'article 6 ainsi modifié.

Article additionnel après l'article 6

(art. 131-35-2 [nouveau] du code pénal)


Peine d'interdiction de conduire un véhicule non équipé
d'un enregistreur de vitesse

La Commission a adopté, par coordination avec ses décisions précédentes, un amendement présenté par M. Georges Fenech précisant les conditions d'application de la nouvelle peine complémentaire d'interdiction de conduire un véhicule non équipé d'un enregistreur de vitesse (amendement n° 51).

Après l'article 6

La Commission a été saisie d'un amendement de M. Jean-Paul Garraud prévoyant que la personne coupable de l'infraction d'interruption involontaire de grossesse sans le consentement de l'intéressée encourre également les peines complémentaires prévues aux articles 5 et 6 du projet de loi. Après avoir noté que l'amendement prévoyait la possibilité pour le juge de prononcer l'interdiction de conduire des véhicules pour lesquels le permis n'est pas exigé, M. Jérôme Lambert a douté de l'efficacité du dispositif proposé, les forces de l'ordre ne pouvant savoir si la personne concernée avait fait l'objet d'une interdiction de conduire puisqu'elles n'étaient pas fondées à lui demander de présenter son permis. La Commission a alors rejeté cet amendement. Elle a ensuite examiné un amendement de M. René Dosière tendant à sanctionner d'une amende de 15 000 euros le conducteur d'un véhicule à moteur abordant un passage prévu à l'intention des piétons à une vitesse supérieure à celle autorisée. Soutenant cet amendement, M. Jean-Claude Viollet a indiqué que de nombreux pays européens, comme la Suède, avaient adopté des dispositions de cette nature. Après que le rapporteur eut rappelé que tout excès de vitesse pouvait faire l'objet d'une sanction et souligné que le dispositif proposé relevait de la compétence du pouvoir réglementaire, la Commission a rejeté cet amendement.

Section 3

Dispositions relatives à la procédure de l'amende forfaitaire

Article 7

(art. L. 121-3 et L. 322-1 du code de la route, 529-8, 529-10 et 529-11 [nouveaux],
530, 530-1 du code de procédure pénale)


Extension de la responsabilité pécuniaire du titulaire de la carte grise -
Modification de la procédure de l'amende forfaitaire

Cet article étend la présomption de responsabilité pécuniaire du propriétaire du véhicule, prévue par l'article L. 121-3 du code de la route, aux contraventions à la réglementation sur le respect des distances entre les véhicules et sur l'usage de voies et chaussées réservées à certaines catégories de véhicules et modifie la procédure de l'amende forfaitaire, dans les cas visés à l'article L. 121-3, en subordonnant la recevabilité des contestations des personnes titulaires de la carte grise à une consignation préalable égale au montant de l'amende encourue.

I. - L'EXTENSION DE LA PRÉSOMPTION DE RESPONSABILITÉ PÉCUNIAIRE DU TITULAIRE DE LA CARTE GRISE (PARAGRAPHE I)

1. Le dispositif prévu par l'article L.121-3 du code de la route

Par dérogation aux dispositions de l'article L. 121-1 du code de la route, qui pose le principe de la responsabilité pénale du conducteur du véhicule, l'article L. 121-2 dispose que le titulaire du certificat d'immatriculation du véhicule est responsable pécuniairement des infractions à la réglementation sur le stationnement des véhicules pour lesquelles seule une peine d'amende est encourue, à moins que ce dernier n'établisse l'existence d'un évènement de force majeure (panne ou vol du véhicule, par exemple) ou qu'il ne fournisse des renseignements permettant d'identifier l'auteur véritable de l'infraction. Lorsque le véhicule est loué à un tiers, cette responsabilité pèse sur le locataire ; lorsque le certificat d'immatriculation est établi au nom d'une personne morale, la responsabilité incombe au représentant légal de la personne morale.

Cette dérogation au principe de responsabilité personnelle de l'auteur de l'infraction, introduite dans le code de la route en 1972, a été étendue par la loi n° 99-505 du 18 juin 1999 portant diverses mesures relatives à la sécurité routière, aux contraventions à la réglementation sur les vitesses maximales autorisées et sur les signalisations imposant l'arrêt des véhicules.

L'article L. 121-3 du code de route dispose, en effet, que le titulaire du certificat d'immatriculation du véhicule est redevable pécuniairement de l'amende encourue pour les contraventions à la réglementation sur les vitesses maximales autorisées et sur les signalisations imposant l'arrêt des véhicules, à moins qu'il n'établisse l'existence d'un vol ou de tout autre évènement de force majeure ou qu'il n'apporte tous éléments permettant d'établir qu'il n'est pas l'auteur véritable de l'infraction.

Afin de bien différencier la responsabilité pécuniaire de la responsabilité pénale, outre l'emploi de termes différents, le deuxième alinéa de l'article L. 121-3 précise que la personne redevable pécuniairement n'est pas pénalement responsable de l'infraction et que la décision du tribunal de police ne donne pas lieu à inscription au casier judiciaire, ne peut être pris en compte pour la récidive et n'entraîne pas le retrait de points du permis de conduire ; de même, la contrainte par corps n'est pas applicable. Comme pour les contraventions de stationnement, cette présomption de responsabilité pécuniaire s'applique au locataire d'un véhicule et au représentant légal de la personne morale lorsque le véhicule est immatriculé au nom d'une personne morale.

Dans sa décision n° 99-411 du 16 juin 1999, le Conseil constitutionnel a jugé ces dispositions conformes à la Constitution, estimant qu' « à titre exceptionnel, de telles présomptions [de culpabilité] peuvent être établies, notamment en matière contraventionnelles, dès lors qu'elles ne revêtent pas de caractère irréfragable, qu'est assuré le respect des droits de la défense et que les faits induisent raisonnablement la vraisemblance de l'imputabilité ». La haute juridiction va même jusqu'à considérer que le refus ou l'incapacité d'apporter des éléments justificatifs utiles serait constitutif d'une « faute personnelle », s'analysant comme un refus de contribuer à la manifestation de la vérité ou un défaut de vigilance dans la garde du véhicule.

Comme le souligne la circulaire d'application du 16 juin 2000, l'intérêt de ces dispositions est de donner une effectivité aux contrôles de vitesse effectués sans interception du véhicule ou en l'absence de cliché photographique probant.

2. Les modifications apportées par le projet de loi

Le paragraphe I de l'article 7 modifie l'article L. 121-3, afin d'étendre cette présomption de responsabilité pécuniaire aux contraventions de non respect des distances de sécurité entre les véhicules et de non respect des règles sur l'usage des voies et chaussées réservées à certaines catégories de véhicules, punies par les articles R. 412-12 et R. 412-23 du code de la route d'une contravention de deuxième classe. D'après les informations fournies à votre rapporteur, un projet de décret est actuellement à l'étude afin de transformer cette dernière infraction en une contravention de la quatrième classe.

Comme ceux relatives aux excès de vitesse ou aux non respect des feux rouges et des stops, de tels comportements sont en effet actuellement difficiles à constater, puisqu'ils nécessitent l'interception du véhicule en cause, ce qui peut s'avérer dangereux dans bien des cas. L'instauration d'une présomption de responsabilité pécuniaire, en facilitant la répression de ces infractions, contribuera à lutter contre l'insécurité routière.

II. - LES AMÉNAGEMENTS APPORTÉS À LA PROCÉDURE DE L'AMENDE FORFAITAIRE (PARAGRAPHES II À VII)

1. La procédure de l'amende forfaitaire

a) Le dispositif prévu par les articles 529 à 530-3 du code de procédure pénale

-  Le champ d'application

L'article 529 du code de procédure pénale réserve la procédure de l'amende forfaitaire aux contraventions des quatre premières classes dont la liste est fixée par décret. Parmi les contraventions concernées, énumérées à l'article R. 48-1 du même code, figurent les contraventions réprimées par le code de la route punies uniquement d'une peine d'amende, à l'exclusion de toute peine complémentaire. Ainsi, le refus de priorité ou l'inobservation d'un feu rouge ou d'un stop, pour lesquels le contrevenant encourt également la peine complémentaire de suspension du permis de conduire, sont exclus actuellement de cette procédure. La perte de points du permis de conduire n'est, en revanche, pas considérée comme une peine complémentaire, mais comme une sanction administrative (article 48-1 et Cass. crim.. 6 juillet 1993).

-  L'amende forfaitaire, l'amende forfaitaire majorée et l'amende forfaitaire minorée

Le contrevenant dispose d'un délai de trente jours depuis la constatation de l'infraction ou de l'envoi de l'avis de contravention, lorsqu'il n'y a pas de remise immédiate de celui-ci, pour payer l'amende forfaitaire (article 529-1 du code de procédure pénale).

Pour encourager les automobilistes à s'acquitter rapidement de leurs amendes, les articles 529-7 à 529-9 ont institué au profit des bons payeurs une amende forfaitaire minorée, qui s'applique à toutes les contraventions au code de la route, à l'exception des contraventions de première classe et des contraventions de stationnement, quelle que soit leur classe. Le montant de celle-ci, fixé par l'article R. 49-9, est d'environ un tiers inférieur à l'amende forfaitaire de base. Le contrevenant dispose, pour payer cette amende, d'un délai de trois jours si l'avis lui a été remis à personne, et d'un délai de sept jours si celui-ci a été envoyé par la poste.

Le paiement de l'amende, forfaitaire ou forfaitaire minorée, éteint l'action publique.

Si le contrevenant n'acquitte pas l'amende forfaitaire dans le délai légal de trente jours, un nouveau titre est émis par le Trésor public et rendu exécutoire par le ministère public. Le montant à payer est une amende forfaitaire majorée, plus élevée que l'amende forfaitaire initiale (article R. 49-7). Le comptable du Trésor adresse au contrevenant l'extrait du titre exécutoire le concernant. Lorsque ce dernier ne s'acquitte pas de la somme demandée dans le délai de trente jours suivant cet envoi, des voies d'exécution sont diligentées contre lui, dans les mêmes formes que s'il y avait eu condamnation.

-  La requête contre l'avis de contravention ou la réclamation contre l'état exécutoire

Le contrevenant peut contester sa contravention de deux manières : soit après avoir reçu l'avis de contravention, par une requête, soit après avoir reçu le titre exécutoire, par une réclamation.

La requête contre l'avis de contravention, formulée dans le délai de trente jours, prend la forme d'une demande d'exonération adressée au service indiqué dans l'avis de contravention (service de police judiciaire, commissariat, préfecture de police..). Si le service administratif rejette la requête, le ministère public poursuit la procédure en signant les états exécutoires, en saisissant le tribunal de police ou en classant l'affaire sans suite.

La réclamation formée contre l'état exécutoire doit être adressée au ministère public pendant le délai de trente jours dont dispose le contrevenant pour payer l'amende forfaitaire majorée. La réclamation reste toutefois recevable tant que la peine n'est pas prescrite, c'est-à-dire pendant trois ans, lorsque le contrevenant n'a pas eu connaissance du titre exécutoire. La recevabilité de la réclamation est subordonnée à la production de l'avis de contravention et l'existence d'une motivation (article 530). Le ministère public peut alors classer sans suite ou exercer l'action publique devant le tribunal de police.

Lorsque le tribunal de police déclare le contrevenant coupable, la peine prononcée ne peut être inférieure à l'amende encourue (4).

b) Les limites du dispositif actuel

Le nombre important de recours dont sont saisis les tribunaux de police ne permet pas de les traiter efficacement. Ainsi, entre août 2001 et septembre 2002, seulement 3,43 millions d'infractions sur un total de 11, 33 millions de procès-verbaux dressés pour des contraventions des quatre premières classes ont fait l'objet d'un paiement spontané au centre d'encaissement des amendes de Rennes, soit à peine 33 %. Le rapport élaboré par M. Pierre Pélissier en juillet 2002 sur les nouveaux modes de poursuites des contraventions au code de la route cite le cas du tribunal de police de Paris, qui consacrait il y a quelques années environ 80 audiences par an à l'examen des recours.

La mise en place de contrôles automatisés, annoncée par le Gouvernement, risque de conduire à une augmentation significative du nombre de contraventions, et donc du nombre de contestations.

Afin d'éviter l'engorgement des tribunaux de police tout en préservant, conformément à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme, le droit d'accès du contrevenant à un tribunal impartial et indépendant, le Gouvernement propose de modifier la procédure de l'amende forfaitaire, en subordonnant la recevabilité de la contestation à la consignation préalable d'une somme équivalente au montant de l'amende encourue, uniquement dans les cas visés par l'article L. 121-3 du code de la route. Par ailleurs, le projet de loi institue une présomption de domiciliation, afin d'éviter que les contrevenants n'échappent aux poursuites en ne déclarant pas leur changement d'adresse au fichier national des immatriculations. Les dispositions proposées reprennent en partie les conclusions du rapport élaboré par M. Pierre Pélissier. On observera toutefois que M. Pélissier suggérait d'étendre le principe de la consignation préalable à l'ensemble des contestations des amendes forfaitaires, et non pas uniquement à celles concernant des contraventions mentionnées à l'article L. 121-3.

2. Les modifications apportées par le projet de loi

Le paragraphe II de l'article 7 procède à une modification rédactionnelle de l'article 529-8 du code de procédure pénale, relatif au paiement de l'amende forfaitaire minorée, afin de préciser que le délai de sept jours dont dispose le contrevenant pour payer cette amende court à compter de l'envoi de l'avis de contravention, et non pas d'un autre avis.

Le paragraphe III insère dans le code de procédure pénale, à la fin de la section II bis consacrée aux dispositions applicables à certaines infractions au code de la route, deux articles 529-10 et 529-11 modifiant la procédure de contestation de l'amende forfaitaire pour les contraventions soumises à une présomption de responsabilité pécuniaire.

· L'article 529-10 précise que, lorsque l'avis d'amende forfaitaire concernant une contravention visée à l'article L. 121-3 a été adressée au titulaire du certificat d'immatriculation, au locataire d'un véhicule ou au représentant légal de la personne morale propriétaire du véhicule (article L. 121-2 du code de la route), la requête en exonération ou la réclamation formée contre l'état exécutoire doit être adressée par lettre recommandée avec demande d'accusé de réception et accompagnée de documents.

Les documents exigés sont les suivants :

- soit un récépissé du dépôt de plainte pour vol ou destruction du véhicule, une copie de la déclaration de destruction de véhicule établie conformément à l'arrêté du 5 novembre 1984 ou une lettre de l'auteur de la requête ou de la réclamation précisant l'adresse, l'identité et la référence du permis de conduire de la personne supposée conduire le véhicule lors de l'infraction ;

- soit un document prouvant le dépôt d'une consignation préalable d'un montant égal, selon le cas, à celui de l'amende forfaitaire (requête en exonération) ou de l'amende forfaitaire majorée (réclamation formée contre l'état exécutoire), cette consignation n'étant pas assimilable au paiement de l'amende forfaitaire et ne donnant pas lieu au retrait de points du permis de conduire.

Le dernier alinéa de l'article 529-10 précise que les conditions de recevabilité de la requête ou de la réclamation sont appréciées par l'officier du ministère public.

La Commission a adopté un amendement du rapporteur remplaçant la notion d'appréciation par celle de vérification (amendement n° 54), son auteur ayant fait valoir que la rédaction initiale était ambiguë et semblait donner au ministère public la possibilité de formuler un jugement sur le bien-fondé des informations fournies.

L'article 529-10 impose donc de nouvelles formalités au contrevenant qui conteste sa responsabilité pécuniaire : outre la lettre recommandée avec avis de réception, il devra fournir soit un document l'exonérant de cette responsabilité (vol, destruction du véhicule, identité de l'auteur véritable de l'infraction), soit, s'il met en doute la réalité de l'infraction, un document mentionnant le dépôt d'une consignation préalable. Rappelons qu'actuellement, les seules formalités exigées par la loi concernent la réclamation formée contre l'état exécutoire (lettre de motivation, avis de contravention).

La Commission a adopté un amendement d'harmonisation rédactionnelle du rapporteur (amendement n° 53). Puis elle a été saisie d'un amendement de M. René Dosière prévoyant que la personne contrevenante condamnée à une amende forfaitaire et qui fait appel de cette décision n'est pas tenue, si elle est insolvable, de consigner préalablement un montant égal à celui de l'amende. A l'appui de l'amendement, M. Jérôme Lambert a dénoncé le caractère socialement inéquitable de la disposition du projet de loi qui conditionne l'exercice d'un droit fondamental de la défense à la possession d'une somme d'argent. Après que le rapporteur eut rappelé que le montant maximum de la somme consignée était de 375 euros, ce qui constitue un montant modeste pour un propriétaire d'automobile, la Commission a rejeté cet amendement.

L'obligation de fournir, au stade la requête ou de la réclamation, les éléments permettant d'exonérer le titulaire de la carte grise de sa responsabilité pécuniaire est conforme à une jurisprudence de la Cour de cassation, qui considère, à propos de la responsabilité pécuniaire prévue pour les contraventions de stationnement, que les renseignement permettant d'identifier le conducteur du véhicule le jour de l'infraction devaient être fournies lors de la réclamation, les révélations faites devant la juridiction étant irrecevables (Cass. crim. 23 oct. 1991, 27 janv. 1993 et 29 mars 2000). En outre, la circulaire du 16 juin 2000 relative aux dispositions du code de la route instituant un mécanisme de responsabilité pécuniaire du titulaire du certificat d'immatriculation du véhicule précise que le titulaire qui conteste être le conducteur au moment des faits doit, lors de la contestation, fournir des éléments prouvant que son véhicule a été volé ou qu'il ne pouvait être le conducteur (certificat d'hospitalisation, par exemple) ou des renseignements permettant d'identifier l'auteur véritable de l'infraction.

On observera cependant que le dispositif proposé ne couvre pas tous les cas visés à l'article L. 121-3 du code de la route : ainsi, si le titulaire de la carte grise était à l'étranger ou hospitalisé au moment de l'infraction, il devra, tout en contestant sa responsabilité pécuniaire, déposer une consignation égale au montant de l'amende encourue. Une extension du dispositif risquerait cependant de donner lieu à des abus qui priveraient d'effets les modifications proposées (certificats de complaisance par exemple).

Le principe de la consignation existe déjà dans le code de la route. L'article L. 121-4 dispose que le conducteur incapable de justifier d'un domicile ou d'un emploi sur le territoire français doit verser à un comptable du Trésor ou à un agent de police judiciaire une consignation, destinée à garantir l'amende encourue. L'arrêt du 11 août 1998 a aligné le montant de la consignation pour les contraventions des quatre premières classes sur le montant de l'amende forfaitaire encourue. Rappelons par ailleurs que les articles 88 et 392-1 du code de procédure pénale prévoient le dépôt d'une consignation, dont le montant est fixé en fonction des ressources du plaignant, en cas de constitution civile. Comme le souligne M. Pierre Pélissier, le principe d'une consignation « ne constitue pas en soi une atteinte intolérable au droit d'accès à un tribunal ».

Les auteurs du projet de loi ont en outre pris soin de limiter cette exigence de consignation aux contraventions relevant de l'article L. 121-3 du code de route, considérant que la décision du Conseil constitutionnel du 16 juin 1999 donnait un fondement juridique à cette mesure.

Signalons enfin que, parallèlement à ces modifications législatives, le Gouvernement prévoit de modifier l'article R. 48-1 du code de procédure pénale, afin d'étendre la procédure de l'amende forfaitaire à l'ensemble des contraventions de la quatrième classe, y compris celles punies d'une peine complémentaire. Toutes les infractions mentionnées à l'article L. 121-3 seront donc concernées par ces nouvelles dispositions, notamment les contraventions relatives aux vitesses maximales autorisées.

· L'article 529-11 précise lorsqu'une contravention au code de la route est constatée au moyen d'un appareil homologué de contrôle automatique, le procès-verbal ou le rapport de l'officier ou de l'agent de police judiciaire peut n'être établi qu'en cas de réclamation portée devant le tribunal de police, après l'envoi de l'avis de contravention demandant le paiement d'une amende forfaitaire (article 529-1) ou d'une amende forfaitaire minorée (article 529-8) : l'avis de contravention pourra donc être adressé au contrevenant sans procès-verbal préalable.

Estimant que, lors de leur audition par la Commission, le ministre de la Justice et celui de l'Équipement n'avaient pas apporté de réponses précises à ses questions, M. René Dosière a souhaité obtenir des précisions de la part du rapporteur sur les délais dans lesquels les dispositifs techniques destinés à permettre l'automatisation des contrôles seraient opérationnels. Il lui a également demandé si le produit des amendes forfaitaires, actuellement versé aux collectivités territoriales, qui les utilisent pour effectuer des aménagements de sécurité, allait revenir désormais à l'État et priver ainsi ces collectivités de sommes très substantielles qui leur permettent de s'impliquer dans la prévention routière.

Rappelant qu'une mission interministérielle avait été créée pour mettre en œuvre le système de contrôle automatisé, et notamment pour homologuer le matériel qui serait utilisé, le rapporteur a indiqué que ce dispositif devrait être opérationnel l'été prochain, précisant à ce propos que mille radars devraient être mis en place dans les trois ans grâce à une dotation de quinze millions d'euros. Il a ajouté que la question de la répartition du produit des amendes entre l'État et les collectivités territoriales n'était pas tranchée, tout en souhaitant que celles-ci ne soient pas privées d'une ressource aussi importante.

Le paragraphe IV modifie l'article 530 relatif au titre exécutoire de l'amende forfaitaire majorée et à ses modalités de contestation, afin notamment d'introduire une présomption de domiciliation.

Le 1° complète le deuxième alinéa, qui détermine les délais de la contestation, afin de préciser que lorsqu'il s'agit d'une contravention au code de la route, le délai maximum de recevabilité de la réclamation est fixée à trois mois à compter de la réception de la lettre recommandée contenant l'avis d'amende forfaitaire majorée expédiée à l'adresse figurant sur le certificat d'immatriculation du véhicule. L'envoi par lettre recommandée permet de s'assurer que l'avis parviendra bien à l'adresse indiquée. Si le contrevenant apporte la preuve qu'il a déclaré son changement d'adresse avant l'expiration de ce délai, sa réclamation sera recevable dans le délai de droit commun, c'est-à-dire trois ans à compter de la signature du titre exécutoire s'il n'a pas eu connaissance de l'avis.

La Commission a adopté un amendement du rapporteur fixant le point de départ du délai de trois mois au jour de l'envoi de la lettre recommandée et non au jour de sa réception, afin d'éviter toute contestation (amendement n° 55).

Rappelons que l'article R. 322-7 du code de la route punit de l'amende prévue pour les contraventions de la quatrième classe le propriétaire d'un véhicule qui, ayant changé de domicile, ne demande pas dans le mois qui suit un nouveau certificat d'immatriculation.

Ces dispositions sont à rapprocher de celles de l'article 116 du code de procédure pénale, qui instituent également une présomption de domiciliation à l'égard de la personne mise en examen, puisque les notifications faites à l'adresse qu'elle a déclarée, qui font souvent courir des délais, sont réputées faites à sa personne.

Par coordination avec le nouvel article 529-10, le 2° du paragraphe IV complète le dernier alinéa de l'article 530, qui mentionne uniquement l'avis d'amende forfaitaire dans les documents exigés lors de la réclamation, afin de préciser que, dans les cas visés à l'article 529-10, la réclamation doit également être accompagnée des documents prévus par cet article (récépissé du dépôt d'une plainte pour vol, identité de l'auteur véritable de l'infraction, consignation..). L'absence de ces documents rend la réclamation irrecevable, empêchant ainsi l'annulation du titre exécutoire.

La Commission a adopté un amendement du rapporteur rappelant les documents exigés pour les requêtes en exonération lorsque la procédure de l'amende forfaitaire est appliquée aux contraventions sans interception (amendement n° 52).

Le paragraphe V complète l'article 530-1, qui traite notamment du montant de l'amende prononcée en cas de condamnation du contrevenant, par un alinéa précisant qu'en cas de classement sans suite ou de relaxe, la somme consignée en application de l'article 529-10 est reversée à l'intéressé, à sa demande. Le nouvel alinéa précise également que l'amende prononcée, en cas de condamnation, ne pourra être inférieure au montant de l'amende forfaitaire ou de l'amende forfaitaire majorées encourue, augmenté de 10 %.

La Cour de cassation, dans un arrêt du 16 juin 1999 rendu sur les dispositions actuelles de l'article 530-1, a jugé que dès lors que le juge, qui fixe la peine dans les limites de l'amende forfaitaire majorée et du maximum encouru, dispose du pouvoir de proportionner le montant de l'amende à la gravité de la contravention commise, à la personnalité de son auteur et à ses ressources, l'article 530-1 n'était pas incompatible avec l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme.

Il convient, à ce stade, de rappeler que les règles relatives à la procédure de l'amende forfaitaire sont rappelées à l'article L. 121-5 du code de la route, selon la technique du code pilote et du code suiveur  (5). Les modifications apportées à cette procédure figureront donc également automatiquement dans le code de la route.

D'après les informations fournies par l'étude d'impact, ces modifications législatives pourraient être accompagnées de dispositions réglementaires prévoyant notamment :

- une indication, sur la lettre transmettant la requête en exonération prévue à l'article 529-10, par laquelle que le signataire déclare connaître les sanctions pénales auxquelles il s'expose en cas de déclarations mensongères ;

- les modalités pratiques du paiement de la consignation (timbre fiscal sur imprimé spécifique) ;

- la notification par écrit du classement sans suite lorsque la personne a déposé une consignation, afin de lui permettre de demander la restitution des sommes au Trésor.

Les paragraphes VI et VII modifient l'article L. 322-1 du code de la route, afin notamment de simplifier la procédure d'opposition au transfert de la carte grise.

Cet article prévoit actuellement que, lorsqu'une amende forfaitaire majorée a été émise et que le comptable du Trésor constate que le contrevenant n'habite plus à l'adresse figurant dans le fichier national des immatriculations, il peut demander au procureur de la République de faire opposition à la préfecture d'immatriculation à tout transfert de la carte grise. Cette opposition rend impossible la vente du véhicule, puisque, préalablement à toute vente, le propriétaire est tenu de fournir à l'acheteur un certificat de non-opposition.

L'opposition peut être levée par le paiement de l'amende forfaitaire majorée. Lorsque l'intéressé a formé une réclamation dans les conditions prévues à l'article 530 et qu'il justifie avoir déclaré sa nouvelle adresse au service d'immatriculation des véhicules, le procureur de la République lève l'opposition.

Le paragraphe VII modifie le premier alinéa de l'article L. 322-1 afin d'autoriser le comptable du Trésor à faire directement opposition au transfert du certificat d'immatriculation, sans passer par l'intermédiaire du procureur de la République, ce dernier étant simplement informé de l'opposition ainsi formée. Cette disposition, tout en assurant l'information du parquet, permet d'alléger la charge de travail de celui-ci.

Le paragraphe VI procède à une coordination à la fin de l'article, en précisant que la réclamation doit être formée selon les modalités et dans les délais prévus par les articles 529-10 et 530 du code de procédure pénale à peine d'irrecevabilité.

La Commission a adopté l'article 7 ainsi modifié.

Article additionnel après l'article 7

Examen médical obligatoire

La Commission a rejeté un amendement de M. Christian Vanneste rendant obligatoire un contrôle médical d'aptitude à la conduite tous les cinq ans après l'obtention du permis. Elle a en revanche adopté un amendement de M. Christian Estrosi, approuvé par M. René Dosière, instituant un examen médical obligatoire préalablement à la délivrance du permis de conduire puis renouvelé tous les dix ans, la périodicité étant de trois ans pour les personnes âgées de plus de 70 ans (amendement n° 56).

Chapitre III

Dispositions relatives au permis à points
et instituant un permis probatoire

Créé par la loi n° 89-469 du 10 juillet 1989 relatives à diverses dispositions en matière de sécurité routière et en matière de contraventions, le permis à points est entré en vigueur le 1er juillet 1992.

L'article L. 223-1 du code de la route dispose que le permis de conduire est affecté d'un nombre de points, fixé par l'article R. 223-1 à douze. Ce nombre de points est réduit de plein droit lorsque le titulaire du permis de conduire a commis une infraction pour laquelle cette réduction est prévue. Lorsque le nombre de points est nul, le permis perd sa validité. Le contrevenant est informé que le paiement de l'amende entraîne la reconnaissance de la réalité de l'infraction et par là même la réduction de son nombre de points.

La jurisprudence a considéré que le retrait de points est une mesure administrative qui ne méconnaît pas les dispositions de la Convention européenne des droits de l'homme.

Le retrait de points n'est possible que s'il est expressément prévu par le texte réprimant l'infraction. En l'absence de mention, il ne peut avoir lieu au retrait de points.

Lorsque le titulaire du permis de conduire n'a pas commis, dans un délai de trois ans à compter de la dernière infraction, une nouvelle infraction sanctionnée par le retrait de points, son permis est à nouveau affecté du nombre de points initial. Il peut également obtenir la reconstitution partielle des points initiaux en se soumettant à une formation spécifique comprenant un programme de sensibilisation aux causes et aux conséquences des accidents de la route (article L. 223-6 du code de la route).

En 2001, 3,2 millions de points ont été retirés. Le nombre de permis invalidés a progressé de 14 % par rapport à 2000, pour atteindre 13 410. L'application de la règle des trois années passées sans commettre de nouvelle infraction entraînant un retrait de points a bénéficié à près de 770 000 conducteurs.

Les excès de vitesse représentent 47,5 % des infractions entraînant un retrait de points, contre 25,2 % pour le non port du casque ou de la ceinture de sécurité, 10,1 % pour les règles de priorité et 8,2 % pour l'alcoolémie.

Article 8

(art. L. 223-1, L. 223-2, L. 223-6, L. 223-8, L. 224-5, L. 224-16, L. 224-17,
L. 224-18, L. 231-3, L. 232-1, L. 232-3, L. 233-1, L. 233-2, L. 234-1, L. 234-8, L. 235-1,
L. 235-3, L. 317-2, L. 317-3, L. 317-4, L. 412-1 et L. 413-1 du code de la route)


Permis de conduire probatoire pour les conducteurs novices

Si les jeunes adultes âgés de 18 à 24 ans représentaient au 1er janvier 2001 9,1 % de la population française, ils formaient en 2000 21,4 % des morts sur les routes et 22,8 % des blessés : 1 tué sur 5 et 1 blessé grave sur 5 a entre 18 et 24 ans.

L'analyse des accidents de la circulation pour l'année 2000 montre que plus de 60 % des 1 633 jeunes adultes tués l'ont été dans un accident de nuit. Les fins de semaines sont particulièrement meurtrières, avec 59 % des décès, dont 66,4 % la nuit.

Les décès dus aux accidents de la route constituent la première cause décès accidentelle, avec 58 % du total, loin devant les suicides, qui ne représentent que 22 % des décès accidentels.

Les dispositions actuelles, principalement destinées à limiter la vitesse des jeunes conducteurs (6), ne suffisent pas à faire diminuer cette surmortalité.

Le comité interministériel de sécurité routière du 18 décembre dernier a donc décidé d'instaurer un permis de conduire probatoire pour les conducteurs novices, se traduisant par l'acquisition progressive de points pendant les trois premières années.

L'article 8 du projet met en pratique cette décision en modifiant en conséquence les articles du code de la route.

Le paragraphe I complète l'article L. 223-1, afin de préciser que le permis de conduire est affecté lors de son obtention de la moitié du nombre maximal de points, soit six. Le conducteur ne bénéficiera de son capital de douze points qu'à l'issue d'une période probatoire de trois ans, au cours de laquelle il ne devra avoir commis aucune infraction ayant donné lieu au retrait de points.

Si, au cours de cette période probatoire, le conducteur se voit retirer des points, il devra attendre trois ans à compter de la date du dernier retrait de points pour acquérir son nombre maximal de points, conformément aux dispositions de l'article L. 223-6.

Il pourra cependant effectuer un stage de sensibilisation aux accidents de la route qui lui permettra de récupérer quatre points (article R. 223-8), sans que son total de points ne puisse excéder cinq. D'après les informations fournies à votre rapporteur, le Gouvernement envisage, en effet, de procéder à des modifications de la partie réglementaire du code de la route afin de limiter, pendant une période de trois ans, la reconstitution du nombre de points pour les jeunes conducteurs.

A l'issue de la période de trois ans, le conducteur pourra récupérer ses points dans les conditions de droit commun : reconstitution limitée à onze points, nouvelle reconstitution possible qu'à l'issue d'un délai de deux ans.

Bien que destinées principalement aux conducteurs novices, ces dispositions sur le permis probatoire s'appliquent à l'ensemble des personnes sollicitant un permis de conduire, notamment lorsque leur demande fait suite à l'annulation ou l'invalidation d'un précédent de permis de conduire.

Les paragraphes II à V procèdent aux coordinations rendues nécessaires par l'introduction de ces nouvelles dispositions.

La Commission a adopté un amendement du rapporteur réduisant la période probatoire des conducteurs novices à deux ans lorsque ceux-ci ont bénéficié de la conduite accompagnée (amendement n° 57). Par coordination, elle a rejeté l'amendement n° 7 de M. Jean-Michel Bertrand accordant un bonus de deux points aux conducteurs novices ayant suivi cette formation.

Le paragraphe II de l'article 8 modifie l'article L. 223-2 du code de la route.

Cet article détermine un barème des retraits de points en fonction de l'infraction en cause. Pour les délits, le retrait de points est égal à la moitié du nombre de points initial, soit six (paragraphe I). Ce nombre est au plus égal au tiers du nombre de points initial pour les contraventions, soit quatre (paragraphe II). Lorsque plusieurs infractions entraînant le retrait de points sont commises simultanément, les retraits de points se cumulent dans les limites suivantes : la moitié du nombre de points initial, soit six points, lorsqu'il s'agit de contraventions, et les deux tiers du nombre de points initial, soit huit points, lorsque figure au moins un délit parmi les infractions (paragraphe III).

Les 1° et 2° du paragraphe II de l'article 8 précisent que le retrait de points prévu pour les contraventions et les délits s'entend par rapport au nombre maximal de points, et non pas au nombre initial de points. Le 2° fixe, en outre, à la moitié du nombre total de points, au lieu d'un tiers actuellement, le nombre maximum de points pouvant être retirés pour les contraventions.

Cette modification donne une base juridique au retrait de six points en cas de conduite avec un taux d'alcoolémie dans le sang compris entre 0,5 et 0,8 g/l, annoncé par le dernier comité interministériel de la sécurité routière.

Le 3° propose une nouvelle rédaction du paragraphe III l'article L. 223-2 ; Outre la coordination rédactionnelle relative au nombre « maximal » de points, cette nouvelle rédaction porte aux deux tiers le nombre maximum de points pouvant être retirés en cas de commission simultanée de contraventions, afin de tenir compte de l'alourdissement des sanctions annoncé pour un certain nombre de contraventions (non-port de la ceinture de sécurité, non port du casque...)

Le paragraphe III modifie l'article L. 223-6, relatif à la reconstitution du nombre de points.

Le 1° précise que le titulaire du permis de conduire qui n'a pas commis d'infractions sanctionnées par le retrait de points dans un délai de trois ans récupère le nombre maximal de points, et non pas le nombre initial.

De même, le 2° remplace, dans le deuxième alinéa de l'article L. 223-6, la référence au nombre de points initial par un renvoi au nombre maximal de points et précise que la reconstitution partielle porte sur le nombre de points retirés, et non sur le nombre de point initial, afin de prendre en compte la situation des jeunes conducteurs, qui chercheront à récupérer leur nombre de point initial, comme celle des conducteurs plus expérimentés, qui souhaiteront se voir restituer le nombre maximal de points.

Le 2° modifie également la disposition obligeant le jeune conducteur titulaire du permis de conduire depuis moins de deux ans et auteur d'une infraction ayant donné lieu à une perte de points égale ou supérieur au tiers du nombre total de points à se soumettre à une formation spécifique, qui se substitue à l'amende sanctionnant l'infraction, afin de viser tout conducteur titulaire de permis de conduire depuis moins de trois ans.

Le paragraphe IV modifie le 1° de l'article L. 223-8 du code de la route, qui renvoie à un décret en Conseil d'Etat le soin de fixer le nombre de point initial du permis de conduire, afin de préciser que ce décret devra également fixer le nombre maximal de points de permis de conduire, le nombre de points affecté lors de l'obtention du permis de conduire et les modalités d'acquisition de nombre total de points.

Le paragraphe V substitue, dans différents articles du code de la route sanctionnant l'infraction commise du retrait de plein droit de la moitié des points du permis de conduire, la référence au nombre de points initial par un renvoi au nombre maximal de points.

Les infractions concernées sont les délits d'obstacle à l'immobilisation d'un véhicule (article L. 224-5), de conduite d'un véhicule malgré la suspension, la rétention ou l'annulation du permis de conduire (article L. 224-16), de refus de restitution d'un permis de conduire suspendu ou annulé (article L 224-17), d'obtention du permis de conduire par une fausse déclaration (article L. 224-18), d'atteintes involontaires à la vie ou à l'intégrité de la personne (article L. 232-1), de fuite après un accident (article L. 232-3), de refus d'obtempérer (article L. 233-1), de refus de se soumettre aux vérifications prescrites (article L. 233-2), de conduite sous l'empire d'un état alcoolique ou en état d'ivresse manifeste (article L. 234-1), de refus de se soumettre aux vérifications destinées à établir un éventuel état alcoolique (article L. 234-8), de conduite après usage de stupéfiants (article L. 235-1), de refus de se soumettre aux vérifications destinées à établir si le conducteur avait consommé des stupéfiants (article L. 235-3), d'usage de fausses plaques d'immatriculation (articles L. 317-2 à L. 317-4), d'entrave à la circulation (article L. 412-1) et de récidive de grand excès de vitesse (article L. 413-1).

Enfin, le paragraphe VI précise que les dispositions relatives au permis probatoire ne s'appliqueront qu'aux permis de conduire délivrés après l'entrée en vigueur de la loi. Cette précision permet d'éviter toute ambiguïté sur le fait que la nouvelle loi ne s'applique pas aux conducteurs titulaire du permis de conduire depuis moins de trois ans à sa date d'entrée en vigueur.

Après avoir adopté trois amendements rédactionnels ou corrigeant une erreur matérielle présentés par le rapporteur (amendements nos 58, 60 et 61), la Commission a examiné un amendement de M. Georges Fenech subordonnant la validité du permis de conduire à l'accomplissement, par son titulaire, d'un stage de formation obligatoire tous les douze ans après son obtention. Après que le rapporteur eut fait observer l'extrême sévérité du dispositif proposé et indiqué qu'il aboutissait à la remise en cause du principe même du permis à points, la Commission a rejeté l'amendement. Elle a, en revanche, adopté un amendement de coordination de M. Georges Fenech (amendement n° 59).

La Commission a adopté l'article 8 ainsi modifié.

Après l'article 8

La Commission a rejeté un amendement de M. Thierry Mariani tendant à réformer les modalités d'enseignement et d'apprentissage de la conduite.

Article 9

(art. L. 223-5 du code de la route)


Délai minimum pour passer son permis de conduire après une invalidation

L'article L. 223-5 du code de la route détermine les conséquences du retrait de la totalité des points du permis de conduire.

L'intéressé reçoit de l'injonction de remettre son permis de conduire au préfet de son département de résidence et perd le droit de conduire un véhicule. Le fait de refuser de se soumettre à cette injonction est punie de deux ans d'emprisonnement et de 4 500 € d'amende, ainsi que des peines complémentaires de suspension pour une durée de trois ans du permis de conduire, de travail d'intérêt général et jours-amende.

Il peut toutefois solliciter un nouveau permis de conduire à l'issu d'un délai de six mois à compter de la date de la remise de son permis au préfet, après avoir été reconnu apte par un examen médical et psychotechnique effectué à ses frais (paragraphe II de l'article L. 223-5). Si l'intéressé était titulaire de son permis de conduire depuis plus de trois ans et qu'il sollicite un nouveau permis dans un délai de trois mois après l'expiration de la période de six mois, seule l'épreuve théorique (code) devra être repassée (article R. 223-14 du code de la route).

L'article 9 du projet de loi complète ce dispositif en prévoyant un délai spécifique pour solliciter un nouveau permis de conduire lorsque le retrait de la totalité des points intervient moins de cinq ans après une précédente invalidation.

Il ajoute à cet effet au paragraphe II de l'article L. 223-5 une phrase précisant que le délai de six mois est porté à un an lorsqu'un nouveau retrait de la totalité des points est constaté dans un délai de cinq ans suivant un précédent retrait.

Comme dans les autres cas, l'intéressé devra, avant de pouvoir solliciter un nouveau permis, subir un examen médical et psychotechnique le déclarant apte à la conduite. Il devra également repasser l'ensemble des épreuves, pratique et théorique, du permis de conduire, le dernier comité interministériel de la sécurité routière ayant annoncé une modification de l'article R. 223-14 afin d'obliger ces conducteurs récidivistes à repasser le test de conduite.

La Commission a adopté l'article 9 sans modification.

Article 10

(art. L. 223-1, L. 223-3 et L. 223-6 du code de la route)


Modalités du retrait des points

Le paragraphe I (1°) modifie l'article L. 223-1 du code de la route, qui pose le principe du permis à points, afin de préciser que la réalité d'une infraction entraînant le retrait de points est établie non seulement par le paiement de l'amende forfaitaire, l'exécution d'une composition pénale ou une condamnation définitive, mais également par l'émission du titre exécutoire de l'amende forfaitaire majorée.

Cet ajout permet de donner un fondement législatif aux retraits de points effectué à la suite de l'émission d'un titre de recouvrement d'une amende forfaitaire impayée. Le Conseil d'État en effet estimé, dans un arrêt du 14 octobre 2002 rendu dans l'affaire Association club défense permis, que « en l'absence d'une réclamation formée dans le délai légal, l'émission du titre exécutoire de l'amende forfaitaire majorée doit être assimilée à une condamnation définitive établissant la réalité de l'infraction et entraînant de plein droit le retrait de points du permis de conduire ».

Ainsi, un changement d'adresse non signalé ne pourra plus faire obstacle au retrait de points.

Le paragraphe II précise les conditions d'information de l'auteur d'une infraction susceptible d'entraîner le retrait des points.

Dans l'état actuel du droit, le dernier alinéa de l'article L. 223-1 dispose que le contrevenant est dûment informé que le paiement de l'amende entraîne la reconnaissance de la réalité de l'infraction et par là même la réduction de son nombre de points. Par ailleurs, le premier alinéa de l'article L. 223-3 prévoit que lorsque l'intéressé est avisé qu'une infraction entraînant un retrait de points a été relevée à son encontre, il est informé du retrait de points encouru, de l'existence d'un traitement automatisé de ces points et de la possibilité d'avoir accès aux informations le concernant. Les modalités d'accès à ces informations sont définies par les articles L. 225-1 à L. 225-9.

Dans un avis rendu le 22 novembre 1995 dans l'affaire Charton, le Conseil d'État a considéré que l'information exacte de l'auteur de l'infraction était une formalité substantielle conditionnant la régularité de la procédure suivie et, partant, la légalité du retrait de points.

Or, cette obligation est difficile à respecter, le nombre de points susceptibles d'être retirés pouvant être modifié si le juge requalifie l'infraction.

Le paragraphe II propose donc une nouvelle rédaction du premier alinéa de l'article L. 223-3, afin de ne prévoir une information exacte qu'en cas d'application de la procédure d'amende forfaitaire ou celle de composition pénale.

Le conducteur en infraction ne sera désormais informé que des dispositions de l'article L. 223-2, qui détermine le nombre maximum des points susceptibles d'être retirés pour les délits, les contraventions et le cumul d'infractions, ainsi que de l'existence d'un traitement automatisé de ces points et de la possibilité d'y avoir accès.

En cas d'application de la procédure de l'amende forfaitaire ou de la procédure de composition pénale, l'auteur de l'infraction sera en outre informé que le paiement de l'amende ou l'exécution de la composition pénale entraînera la réduction du nombre de points correspondant à l'infraction reprochée, dont la qualification lui sera indiquée.  

Rappelons que la procédure de composition pénale, qui permet à l'auteur d'une infraction d'éteindre l'action publique en exécutant une mesure proposée par le procureur de la République et validée par un magistrat du siège (versement d'une amende, remise du permis de conduire, exécution d'un travail non rémunéré, assistance à un stage, etc.), a été étendue par la loi du 9 septembre 2002 aux contraventions figurant sur une liste élaborée par un décret en Conseil d'État. Le futur projet de loi portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité envisage, par ailleurs, de rendre cette procédure applicable à l'ensemble des contraventions. Cette procédure est, en tout état de cause, déjà appliquée au délit de conduite sous l'empire d'un état alcoolique (article 41-2 du code de procédure pénale).

Par coordination, le 2° du paragraphe I supprime le dernier alinéa de l'article L. 223-1.

Le paragraphe III précise le point de départ du délai de trois ans, prévu par l'article L. 223-6, pour récupérer le nombre total de point du permis de conduire après la dernière infraction.

Ce délai court à compter de la date de paiement de la dernière amende forfaitaire, de l'émission du titre exécutoire de la dernière amende forfaitaire majorée, de l'exécution de la dernière composition pénale ou de la dernière condamnation définitive. Par rapport aux dispositions actuelles, le paragraphe III ajoute les références à l'émission d'un titre exécutoire et à l'exécution d'une composition pénale, coordination avec les nouvelles dispositions de l'article L. 223-1.

La Commission a adopté trois amendements de précision ou d'harmonisation rédactionnelle du rapporteur (amendements nos 62 à 64).

Puis elle a adopté l'article 10 ainsi modifié.

Article additionnel après l'article 10

Modification de la réglementation de la vitesse

La Commission a été saisie d'un amendement de M. Christian Estrosi prévoyant notamment que la vitesse des véhicules, en dehors des agglomérations, est limitée à 150 km/h sur les autoroutes d'au moins trois voies, à 130 km/h sur les autres autoroutes, à 110 km/h sur les « quatre voies » et à 90 km/h sur les routes. Après avoir expliqué que les règles de limitation de vitesse devaient prendre en considération l'amélioration de la qualité du réseau routier et le renforcement de la sécurité des véhicules, l'auteur de l'amendement a ajouté que des pays européens, comme l'Allemagne, ne connaissaient pas de limitation de vitesse sur certaines de leurs autoroutes sans avoir, pour autant, de mauvais résultats en matière de sécurité routière. Malgré les objections du rapporteur, qui a fait valoir que cet amendement était totalement contraire à l'esprit de la réforme et que le dispositif proposé relevait de la compétence du pouvoir réglementaire, la Commission a adopté cet amendement (amendement n° 65).

Après l'article 10

La Commission a rejeté un amendement de M. Christian Estrosi obligeant les véhicules de plus de 3,5 tonnes en dépassant un autre à observer une vitesse d'au moins 20 km/h supérieure au véhicule le précédant, sans pour autant dépasser la vitesse maximale autorisée de 90 Km/h. Un amendement du même auteur punissant d'une amende les conducteurs de véhicules circulant sur la voie de gauche des autoroutes à une vitesse inférieure à 80 km/h a été retiré, le rapporteur ayant observé qu'une partie de ses dispositions était satisfaite par celles de l'article R. 413-19 du code de la route.

Article 11

(art. L. 223-5 du code de la route)


Création d'un délit de conduite malgré un permis invalidé

L'article L. 224-16 du code de la route punit de deux ans d'emprisonnement et de 4 500 € d'amende le fait de conduire un véhicule malgré la notification d'une décision prononçant la suspension, la rétention, l'annulation ou l'interdiction d'obtenir la délivrance du permis de conduire. Les peines complémentaires actuellement encourues sont la suspension, pour une durée de trois ans, du permis de conduire, le travail d'intérêt général et de jours-amende, ainsi que l'immobilisation administrative du véhicule.

La Cour de cassation a considéré que le fait de conduire un véhicule malgré l'invalidation du permis de conduire résultant de la perte totale de points ne relevait pas de ces dispositions, mais constituait une contravention de conduite sans permis (Cass. crim 6 mai 1998, 13 sept. 2000).

L'article R. 221-1 punit en effet de l'amende prévue pour les contraventions de la cinquième classe la conduite d'un véhicule sans être titulaire de la catégorie de permis de conduire exigée pour le véhicule considéré ou après l'invalidation de son permis de conduire résultant de l'application des dispositions de l'article L. 223-5.

En revanche, l'article L. 223-5 prévoit une peine de deux ans d'emprisonnement et de 4 500 € d'amende en cas de refus de remettre son permis de conduire au préfet de son département de résidence lorsque l'intéressé a perdu la totalité de ses points. L'auteur de l'infraction encourt également les peines complémentaires de suspension, pour une durée de trois ans, du permis de conduire, de travail d'intérêt général et de jours-amende.

L'article 11 du projet de loi met fin à cette incohérence en faisant de la conduite malgré un permis invalidé à la suite de la perte totale des points un délit punit de deux ans d'emprisonnement.

Il insère à cet effet, à la fin de l'article L. 223-5, un paragraphe V qui fait de la conduite d'un véhicule à moteur, pour lequel un permis est nécessaire, par une personne ayant reçu l'injonction de remettre son permis de conduire un délit puni des peines prévues aux paragraphes III et IV, c'est à dire de celles encourues en cas de refus de remettre son permis de conduire.

Désormais, les peines encourues en cas de conduite malgré la suspension, la rétention, l'annulation ou l'interdiction d'obtenir un permis de conduire et celles prévues en cas de conduite malgré l'invalidation de celui-ci seront identiques, à l'exception de l'immobilisation du véhicule.

La Commission a adopté l'article 11 sans modification.

Article additionnel après l'article 11

Formation des candidats au permis de conduire aux premiers secours

La Commission a été saisie d'un amendement de M. Patrick Delnatte rendant obligatoire, pour les candidats au permis de conduire, l'acquisition des notions de premier secours. Son auteur a indiqué qu'une telle formation existait d'ores et déjà dans d'autres pays européens, comme en Allemagne ou en Suisse, et qu'elle améliorait la prévention des accidents en sensibilisant les conducteurs aux éventuelles conséquences de leur comportement. Tout en approuvant cet amendement, M. Jérôme Lambert a émis le souhait que les candidats au permis de conduire bénéficient également d'une information en matière de dons d'organes. Après l'avis favorable du rapporteur, et compte tenu d'une modification rédactionnelle qu'il a suggérée, la Commission a adopté l'amendement (amendement n° 66).

Après l'article 11

La Commission a été saisie d'un amendement de M. René Dosière prévoyant que le titulaire du permis de conduire peut constituer une épargne de points à la faveur d'un stage homologué. M. Jean-Paul Garraud a observé qu'il serait préférable que le bénéfice de cette majoration de points ne profite qu'au titulaire ayant réussi les différentes épreuves du stage et non à celui qui se contente d'y assister. Le rapporteur ayant indiqué que l'adoption de cet amendement constituerait une véritable remise en question du permis à points et pourrait accroître les comportements dangereux de certains conducteurs en raison des nombreux points ainsi « épargnés », son auteur a retiré l'amendement.

Chapitre IV

Autres dispositions de nature à renforcer la sécurité routière

Avant l'article 12

La Commission a rejeté deux amendements de M. Christian Estrosi ayant pour objet d'assujettir au taux réduit de TVA l'acquisition des équipements de sécurité des véhicules, ainsi que les dépenses de formation en matière de conduite automobile. Un débat s'est ensuite engagé sur un amendement de M. René Dosière prohibant les campagnes de publicité mentionnant la vitesse maximale des véhicules lorsque celle-ci est supérieure à la vitesse maximale autorisée. M. Philippe Houillon s'est déclaré favorable à l'adoption de cet amendement, qui traite de façon appropriée la situation contradictoire résultant de la fabrication de véhicules de plus en plus rapides dans un contexte de lutte contre les excès de vitesse et la violence routière. Après que le rapporteur eut indiqué que l'amende encourue par les contrevenants était contraventionnelle, donc de nature réglementaire, M. René Dosière a retiré son amendement, ainsi que l'amendement rendant obligatoire l'installation de dispositifs de limitation de la vitesse sur les véhicules construits postérieurement à l'entrée en vigueur du présent projet de loi.

La Commission a rejeté un amendement du même auteur autorisant les régions à expérimenter l'installation, sur les véhicules neufs, d'équipements tendant à limiter leur vitesse, le rapporteur l'ayant estimé inapplicable, puisqu'il tend à imposer des contraintes techniques aux seuls véhicules circulant dans une région déterminée alors même que leur fabrication est organisée à l'échelle de l'Europe.

Section 1

Dispositions relatives aux matériels de débridage des cyclomoteurs
et aux détecteurs de radars

Article 12

(Chapitre VII du titre Ier du livre III de la partie législative du code de la route
chapitre III du titre Ier du livre IV et article L. 130-8 [nouveau] du code de la route)


Interdiction des matériels de débridage des cyclomoteurs
et des détecteurs de radars

La vitesse est responsable de 50 % des accidents ; en interdisant le commerce du matériel de débridage des cyclomoteurs et des dispositifs anti-radars, l'article 12 a pour objet de mettre fin à des comportements à risques, qu'ils soient le fait de cyclomotoristes en quête de véhicules plus puissants ou d'automobilistes peu scrupuleux sur la réglementation des limites de vitesse.

1. L'interdiction du matériel de débridage des cyclomoteurs

Même si la tendance depuis les années 70 est à la baisse, le nombre de tués en cyclomoteurs était encore de 431 en 2000 ; près de la moitié d'entre eux sont des mineurs.

L'Observatoire national interministériel de la sécurité routière met en avant le comportement à risque des cyclomotoristes, les vitesses moyennes observées, notamment sur les routes nationales à deux ou trois voies étant de 54 km/h, soit un dépassement de 9 km/h par rapport à la vitesse maximale autorisée pour les cyclomoteurs en application de l'article R. 311-1 du code de la route. En 2000, la proportion des cyclomotoristes dépassant la vitesse de 50 km/h s'élève à 55 % dans les traversées d'agglomération de moins de 5 000 habitants sur les routes nationales et à 51 % sur les voies d'entrée.

Ces comportements liés à la vitesse sont caractéristiques d'une classe d'âge et d'un goût certain pour la prise de risque ; dans ce contexte, les dispositifs destinés à modifier les moteurs et les accessoires afin d'augmenter leur puissance ont rencontré un grand succès auprès des jeunes, les « kits de débridage » permettant en effet à un cyclomoteur de dépasser les 70 km/h.

La réponse juridique pour empêcher ces modifications techniques a été menée en premier lieu au niveau communautaire : la réglementation européenne a renforcé les règles de réception et d'homologation des véhicules à deux roues afin de rendre plus difficile le placement de matériel de débridage sur le cyclomoteur ; parmi ces mesures techniques figure notamment la présence dans le moteur de pièces clés normalement non démontables et non réusinables. En outre, le marquage dans le métal des pièces mécaniques sensibles est rendu obligatoire afin de vérifier, en cas de contrôle ou d'accident, que le véhicule est conforme au modèle de série ou a au contraire fait l'objet de remplacement de pièces autrement qu'à l'identique. L'ensemble de ces contraintes techniques est applicable à tous les véhicules neufs à compter du 17 juin 2003.

Au niveau national, la lutte contre ces manipulations techniques a fait l'objet d'un décret en date du 10 septembre 1992 introduisant dans le code de la route un article R. 317-29 réprimant la fabrication, l'importation, la détention en vue de la vente ou la distribution à titre gratuit de kits de débridage ; le fait de contrevenir à cette interdiction est puni de l'amende prévue pour les contraventions de cinquième classe, soit 1 500 euros.

Afin d'enrayer définitivement un trafic particulièrement dangereux pour la santé et la sécurité publique, le projet de loi introduit quatre nouveaux articles dans le code de la route, qui renforcent les sanctions encourues ; la rédaction proposée pour l'article L. 317-5 reprend ainsi les dispositions de l'article R. 317-29 en faisant de la commercialisation du matériel de débridage un délit : désormais, le fait de fabriquer, d'importer, d'exporter, d'exposer, d'offrir, de mettre en vente, de vendre, de louer, ou d'inciter à acheter ou à utiliser un dispositif ayant pour objet d'augmenter la puissance du moteur d'un cyclomoteur au-delà de la puissance maximale autorisée est puni de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 € d'amende. En outre, comme le précise le paragraphe II de l'article L. 317-5 proposé par le projet de loi, le fait pour un professionnel de transformer un moteur de cyclomoteur en vue d'en augmenter la puissance, sans qu'il soit fait référence explicitement au kit de débridage, est puni des mêmes peines.

La Commission a adopté un amendement de nature rédactionnelle présenté par le rapporteur permettant de substituer au terme « louer » le terme « proposer à la location » (amendement n° 67).

Le dernier paragraphe du nouvel article L. 317-5 précise également que le dispositif de débridage doit être saisi ; lorsqu'il est déjà placé sur un véhicule, le véhicule peut également être saisi.

À l'instar des dispositions réglementaires actuelles, le projet de loi a pour objectif de sanctionner les professionnels à l'origine de la mise sur le marché des dispositifs de transformation des moteurs ; le fait, pour un particulier, de détenir ce kit ou de l'installer sur un cyclomoteur n'est pas poursuivi en lui même. Néanmoins, l'utilisation d'un kit de débridage est susceptible d'être incriminée sur la base de plusieurs dispositions réglementaires figurant dans le code de la route : ainsi, le cyclomotoriste ayant modifié les caractéristiques de son moteur contrevient aux dispositions réprimant les nuisances sonores(7), ainsi qu'à celles relatives à l'utilisation d'un dispositif non homologué (8) ou celles réprimant la conduite sans permis d'un véhicule dépassant les 45 km/h par construction (9) .

L'article L. 317-6 introduit par l'article 12 punit la tentative du délit de débridage des mêmes peines que le délit lui même, soit deux ans d'emprisonnement et 30 000 € d'amende : la distinction entre le délit et la tentative du délit opérée par le projet de loi est rendue obligatoire par l'article 121-4 du code pénal qui définit l'auteur de l'infraction non seulement comme la personne qui commet les faits incriminés, mais également comme celle qui « tente de commettre un crime ou, dans les cas prévus par la loi, un délit » : ainsi, aux termes de cet article, la tentative des délits n'est punissable que dans les cas explicitement prévus par la loi, d'où la mention faite au nouvel article L. 317-6 du code de la route.

L'article L. 317-7 assortit le délit de débridage de plusieurs peines complémentaires : les personnes physiques reconnues coupables de commercialisation de matériel de débridage pourront ainsi également encourir la peine de suspension du permis de conduire, pour une durée de trois ans au plus, la confiscation du dispositif de débridage ainsi que la confiscation du véhicule lorsque le dispositif qui a servi ou qui était destiné à commettre l'infraction est placé, adapté ou appliqué sur un véhicule.

Cette définition, classique en matière de peines complémentaires, appelle néanmoins deux observations : en premier lieu, l'article L. 317-7 prévoit la confiscation obligatoire du dispositif qui a servi ou était destiné à commettre l'infraction. Cette obligation de confiscation parait a priori aller à l'encontre du caractère facultatif qui régit habituellement la peine complémentaire. Il s'agit néanmoins, à l'identique de ce qui est déjà prévu dans le code pénal en matière de trafic des stupéfiants ou de fausse monnaie, de retirer de la circulation une marchandise « dangereuse ou nuisible », pour reprendre l'expression retenue à l'article 121-1 du code pénal. La confiscation n'est pas seulement une peine mais également une mesure de sûreté qui doit permettre de retirer de la circulation des objets dangereux.

La deuxième observation porte sur la faculté de saisir le véhicule sur lequel a été adapté un kit de débridage ; le dispositif installé pouvant être, selon les modèles, inamovible, il est en effet indispensable de prévoir la confiscation de l'ensemble. S'il ne s'agit pas, comme pour les kits eux-mêmes, d'une confiscation obligatoire, cette disposition pose néanmoins, au regard du droit pénal, la question de la personnalité de la peine, puisque le véhicule confisqué peut ne pas appartenir à l'auteur de l'infraction. Il est constant néanmoins que la confiscation affecte l'objet de la fraude, abstraction faite du propriétaire ; la chose d'autrui peut donc toujours être confisquée si le propriétaire est de mauvaise foi : tel sera le cas notamment s'il est établi que le cyclomotoriste a laissé son véhicule au professionnel aux fins de l'équiper d'un kit de débridage.

La Commission a adopté un amendement du rapporteur distinguant de manière plus claire, parmi les peines complémentaires, celles facultatives, qui sont la confiscation du véhicule, de celles obligatoires, qui sont la confiscation du dispositif de débridage (amendement n° 68).

Le nouvel article L. 317-8 du code de la route permettra désormais d'incriminer également les personnes morales. De façon classique en matière de responsabilité des personnes morales, l'article L. 317-8 renvoie à l'article 131-38 du code pénal qui permet de condamner les personnes morales à une peine d'amende ; le montant de celle-ci est égal au quintuple de celui prévu pour les personnes physiques par la loi qui réprime l'infraction, soit en l'occurrence, pour les infractions liées au débridage, 150 000 €. Le nouvel article L. 317-8 du code de la route assortit cette peine d'amende des peines mentionnées aux 4°, 5°, 6°, 8° et 9° de l'article 131-39 du code pénal : la société ayant commercialisé du matériel de débridage de cyclomoteurs pourra ainsi encourir la peine de fermeture définitive ou provisoire pour une durée maximum de cinq ans, être exclue des marchés publics à titre définitif ou pour une période de cinq ans au plus et être interdite de faire appel public à l'épargne pour la même période ; le matériel ayant servi à commettre l'infraction pourra être confisqué et la décision judiciaire affectant la société affichée ou diffusée par voie de presse.

La Commission a adopté un amendement du rapporteur corrigeant, à l'article L. 317-8, une erreur de référence (amendement n° 69).

2. L'interdiction des détecteurs de radars

L'article 12 introduit, dans un paragraphe II, quatre nouveaux articles dans le code de la route afin de réprimer la fabrication, l'importation, l'exportation, la vente, l'exposition, la location, l'incitation à l'achat ou à l'utilisation de matériel permettant de déceler la présence ou de perturber le fonctionnement des appareils servant à constater les infractions à la législation ou la réglementation de la circulation routière.

Les dispositifs « anti-radars » font déjà l'objet d'une interdiction, puisque l'article R. 413-15 du code de la route punit d'une amende prévue pour les contraventions de cinquième classe le fait aussi bien de commercialiser ces appareils que celui de les détenir. Sur la base de ces dispositions, 4 213 verbalisations ont été dressées par les forces de l'ordre en 2001, mais seules 390 d'entre elles ont fait l'objet de condamnation.

Afin de réaffirmer la priorité du Gouvernement en matière de lutte contre les comportements à risques, l'article 12 du projet de loi a pour objet de correctionnaliser cette infraction en en faisant un délit puni de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 € d'amende ; la rédaction retenue pour réprimer ce trafic est en tout point identique à celui introduit au premier paragraphe pour les articles L.317-5 à L. 317-8 relatifs aux kits de débridage.

Ainsi, comme pour les matériels de débridage, la rédaction retenue se limite à sanctionner les professionnels reconnus coupables d'avoir commercialisé le détecteur anti-radar, le particulier ayant installé un tel dispositif sur son véhicule étant toujours passible d'une contravention de cinquième classe sur la base de l'article R. 413-15.

Le dispositif retenu pour réprimer le trafic de matériel anti-radar est identique à celui prévu pour les kits de débridage ; saisine du matériel, et, le cas échéant, du véhicule sur lequel il est installé et possibilité, prévue à l'article L. 413-3, de réprimer des mêmes peines la tentative des délits liés au matériel anti-radar. L'article L. 413-4 assortit en outre, comme pour les infractions liées au kit de débridage, la peine principale de plusieurs peines complémentaires, soit la suspension du permis de conduire pour une durée de trois ans au plus, la confiscation, à titre obligatoire, du matériel et la confiscation du véhicule lorsque l'appareil est déjà installé.

Enfin, les personnes morales reconnues coupables de trafic de matériel anti-radars peuvent se voir condamnées à une peine d'amende égale au quintuple de l'amende encourue par les personnes physiques ainsi qu'aux peines prévues aux 4°,5°, 6°, 8° et 9° de l'article 131-39 du code pénal (peine de fermeture définitive ou provisoire pour une durée maximum de cinq ans, exclusion des marchés publics à titre définitif ou pour une période de cinq ans au plus, interdiction de faire appel public à l'épargne pour la même période ; le matériel ayant servi à commettre l'infraction peut être confisqué et la décision judiciaire affectant la société affichée ou diffusée par voie de presse).

Par coordination avec les amendements adoptés sur les infractions liées au débridage des cyclomoteurs, la Commission a adopté, à l'initiative du rapporteur, deux amendements précisant le délit de location d'un dispositif anti-radar et distinguant les peines complémentaires obligatoires des peines complémentaires facultatives (amendements n° 70 et 71).

3. L'habilitation des agents de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes

Le dernier paragraphe de l'article 12 habilite de façon explicite les agents de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes à rechercher et constater les infraction prévues par le présent projet de loi en matière de kits de débridage et de dispositifs de détecteurs de radars. Cette compétence était prévue initialement dans le décret du 10 septembre 1992 instituant la contravention relative au kit de débridage mais la nouvelle codification du code de la route a omis de reprendre cette disposition dans la partie réglementaire. L'habilitation est une habilitation spécifique, sans préjudice de la compétence générale des officiers et agents de la police judiciaire prévue aux articles L. 130-1 à L. 130-4 du code de la route, et de la compétence particulière reconnue aux agents des douanes en matière de contrebande, en application de l'article 417 du code des douanes.

Le projet de loi renvoie au livre II du code de la consommation, qui précise les pouvoirs d'enquête et de saisie des agents de la DGCCRF.

La Commission a adopté l'article 12 ainsi modifié.

Section 2

Dispositions relatives au déplacement des obstacles latéraux
situés sur le domaine public routier

Article 13

(art. L. 113-3 du code de la voirie routière)


Déplacement d'installations et d'ouvrages
situés sur le domaine public routier

L'article 13 du projet de loi complète l'article L. 113-3 du code de la voirie routière consacré à l'occupation du domaine public routier par les exploitants de réseaux de télécommunications et les services publics de transport ou de distribution d'électricité ou de gaz ; il autorise ainsi le gestionnaire du domaine public routier, État ou collectivités locales, à déplacer les installations et ouvrages situés sur ce domaine aux frais de l'occupant.

À l'heure actuelle, aucun texte réglementaire ne régit les droits et obligations des occupants du domaine public. C'est donc par construction jurisprudentielle du juge administratif qu'a été défini le régime de l'occupation : les occupants du domaine public, en contrepartie des obligations décrites dans les conventions d'occupation, ont droit à une jouissance paisible. Les frais de déplacement de leurs installations peuvent leur être imputés lorsque « ce déplacement est la conséquence des travaux entrepris dans l'intérêt du domaine public occupé et que ces travaux constituent une opération d'aménagement conforme à sa destination ». En l'absence de travaux sur la route proprement dite, le déplacement des obstacles latéraux appartenant aux occupants du domaine public est à la charge du gestionnaire de la voirie.

Il paraît indispensable, dans l'objectif de sécurisation du réseau routier, de modifier ce régime : les obstacles fixes, situés en bordure des routes, génèrent chaque année 3 000 victimes. La perception des enjeux de sécurité routière par les occupants du domaine public apparaît en conséquence primordiale. Dans cet objectif, le projet de loi permet aux gestionnaires de voirie d'engager des actions de traitement des obstacles latéraux, sans que ces actions ne soient liées à des travaux entrepris sur la voirie elle-même.

Le déplacement des ouvrages, une fois révélée leur dangerosité, sera à la charge de l'occupant. La mise en œuvre de ce dispositif repose sur une évaluation approfondie des besoins : l'étude d'impact du projet de loi précise à cette fin que chaque itinéraire du réseau routier national fera l'objet d'un diagnostic de l'accidentologie liée aux obstacles latéraux. Un relevé sera effectué, faisant apparaître les obstacles situés dans la zone de sécurité des deux premiers mètres, puis dans la zone de gravité située entre deux et quatre mètres. Pour les autres réseaux, il sera demandé aux collectivités locales d'évaluer l'accidentologie liée aux obstacles latéraux et d'en faire connaître les incidences à la Direction de la sécurité et de la circulation routières.

L'étude d'impact chiffre à 700 le nombre de vies humaines qui pourraient être épargnées par la mise en place du dispositif.

Un décret en Conseil d'État permettra de préciser les modalités de la prise en charge par les occupants du domaine public, en fonction notamment de la date d'implantation de l'ouvrage sur le domaine.

La Commission a adopté l'article 13 sans modification.

Après l'article 13

La Commission a rejeté les amendements nos 8 et 9 de M. Jean-Michel Bertrand, prévoyant l'insertion, dans le programme du permis de conduire, d'un module de formation relatif au comportement à adopter par l'élève conducteur lors d'un contrôle effectué par les forces de l'ordre. Elle a également rejeté un amendement de M. Christian Estrosi renvoyant à un décret en Conseil d'État le soin de définir la distance minimale en deçà de laquelle il est interdit d'implanter un obstacle latéral nouveau sur les routes nationales et départementales et prévoyant un aménagement des obstacles existants.

Section 3

Dispositions relatives aux véhicules gravement endommagés

Article 14

(Chapitre VI du titre II du livre troisième de la partie législative du code de la route,
art. L. 326-3, L. 326-5, chapitre VII [nouveau],
art. L. 326-13 à L. 326-15 [nouveaux] du code de la route)


Profession d'experts en automobile et procédure
relative aux véhicules gravement endommagés

L'article 14 a un double objet : il réforme en premier lieu les modalités de composition de la commission nationale compétente pour l'inscription des experts en automobile ; il modifie également la procédure et les pouvoirs attribués à ces experts en automobile en matière de véhicules gravement accidentés.

La profession d'expert en automobile est une profession réglementée par la loi n° 72-1097 du 11 décembre 1972 ; en 1995, les conditions d'accès à cette profession réglementée ont été réformées pour accroître les garanties de sérieux et de professionnalisme.

Suivant le même objectif, le projet de loi crée un nouveau chapitre VI au sein du livre III consacré spécifiquement à l'organisation de la profession d'experts en automobile. Il reprend dans ce nouveau chapitre les articles L. 326-1 à L. 326-9 qui figuraient auparavant dans le chapitre relatif aux retraits de la circulation des véhicules accidentés. L'essentiel des dispositions régissant la profession reste inchangé par rapport au droit actuel ; le projet de loi modifie cependant, dans le paragraphe II de l'article 14, les modalités de composition de la commission nationale compétente pour arrêter la liste des experts en automobile et habilitée à sanctionner, par une suspension provisoire ou une radiation, les manquements aux conditions d'exercice de cette profession ; l'article L. 326-3 du code de la route impose, dans sa rédaction actuelle, la présence en nombre égal de représentants de l'État, des professions concernées et de consommateurs. Le projet de loi supprime l'obligation d'un nombre égal de représentants : ce paritarisme a nui par le passé au bon fonctionnement de la commission, du fait des règles de quorum instituées et de l'absentéisme de certains de ses membres. La rédaction ainsi retenue permet de donner davantage de souplesse dans le fonctionnement de la commission et de lui redonner ainsi un rôle effectif, notamment en matière disciplinaire.

Les paragraphes III et IV de l'article 14 instaurent une nouvelle procédure concernant les véhicules ayant subi des dommages tels qu'ils représentent un danger pour la sécurité routière.

La procédure existant actuellement est celle des « véhicules gravement accidentés » (VGA), prévue aux articles R. 326-1 à R. 326-5 du code de la route. En 1982, un rapport d'enquête démontrait que le mauvais état général et l'insuffisance d'entretien des véhicules étaient à l'origine de près de 30 % des accidents mortels. L'obligation du contrôle technique des véhicules mis en place en 1985 fut une première réponse à ce constat, suivie peu après, en 1986, de la procédure des « véhicules gravement accidentés ».

L'initiative de la procédure incombe aux forces de l'ordre. Lorsque l'intervention d'un agent donne lieu à l'établissement d'un procès-verbal d'accident, l'agent peut procéder au retrait matériel de la carte grise d'un véhicule, s'il estime qu'en raison de la gravité des dommages subis par le véhicule, celui-ci n'est plus en état de circuler sans danger pour la sécurité. Un expert en automobile, qualifié VGA, doit ensuite confirmer ou infirmer le diagnostic établi par l'agent. En cas de confirmation, l'expert doit évaluer si le véhicule est techniquement réparable ; s'il ne l'est pas ou si le propriétaire renonce aux travaux de remise en état, l'expert en automobile doit en aviser le préfet qui procède alors à l'annulation du certificat d'immatriculation.

Cette procédure, destinée à retirer de la circulation les véhicules présentant un réel danger en matière de sécurité routière n'a pas atteint les résultats escomptés et elle semble être quelque peu tombée en désuétude : un an après sa mise en place, 125 000 cartes grises étaient retirées au titre VGA ; dix ans après, ce nombre ne s'élève qu'à 50 000. Les explications tiennent tant à un manque de formation et d'information des forces de l'ordre qu'à la procédure elle-même, qui se limite aux véhicules accidentés ayant fait l'objet d'un procès-verbal. Ainsi, selon les estimations des professionnels de l'expertise, 54 % des véhicules endommagés et présentant un danger échapperaient aux procédures mises en place dans le cadre des véhicules gravement accidentés ou économiquement irréparables.

Afin de restaurer un dispositif essentiel à la sécurité routière, le projet de loi introduit un nouveau chapitre VII intitulé « véhicules endommagés » qui reprend les articles L. 326-10 à L. 326-12 relatifs à l'indemnisation par les compagnies d'assurances et y ajoute trois nouveaux articles consacrés plus précisément à la procédure des véhicules ayant subi des dommages graves. Une disposition législative s'impose compte tenu des nouvelles possibilités d'action en matière de retrait et d'opposition à transfert des cartes grises.

L'assouplissement du dispositif tient à la fois à l'élargissement des personnes compétentes, puisque l'expert en automobile peut de lui-même lancer une procédure d'information à la préfecture, et à la modification de la terminologie, la procédure n'étant plus réservée aux seuls véhicules accidentés. Ainsi, le projet de loi instaure deux circonstances pour lesquelles la procédure peut être engagée, la première, prévue à l'article L. 327-4, à l'initiative de l'officier ou de l'agent de police judiciaire qui procède, en raison des dommages qu'a subis un véhicule, à son immobilisation; la seconde, prévue à l'article L. 327-5, à l'initiative de l'expert en automobile lorsque il estime qu'un véhicule ne peut circuler dans des conditions normales de sécurité.

Dans le premier cas, l'agent de police retire le certificat d'immatriculation ou, en cas de non-remise, en informe la préfecture qui notifie au propriétaire l'interdiction de circuler. Jusqu'à la remise du certificat d'immatriculation, le véhicule ne peut être cédé ou vendu et la préfecture procède à une inscription en vue d'une opposition au transfert de carte grise. Dans le second cas, l'expert en automobile informe le préfet de la dangerosité du véhicule ; le préfet avise alors le propriétaire de l'interdiction de circulation et procède à une opposition à transfert tant que le certificat d'immatriculation n'a pas été remis.

Un décret en Conseil d'État est prévu à l'article L. 327-6 pour fixer les conditions d'application du nouveau chapitre ; il est en effet évident que la partie réglementaire devra être réécrite, notamment les articles R. 326-1 à R. 326-5, afin de tirer les conséquences de la mise en place de ces nouvelles procédures sur celle des véhicules gravement accidentés.

La Commission a adopté à l'initiative du rapporteur un amendement de coordination avec le premier alinéa du paragraphe III de l'article, qui procède à une renumérotation des articles L. 326-10 à L. 326-12 (amendement n° 72).

Puis elle a adopté l'article 14 ainsi modifié.

Section 4

Dispositions relatives à la sécurité des inspecteurs du permis de conduire
et de la sécurité routière

Article 15

(art. L. 211-1 [nouveau] du code de la route)


Peine complémentaire en cas de violences ou d'outrage
à l'encontre d'un inspecteur du permis de conduire

L'article 15 a pour objet de renforcer les sanctions à l'encontre des auteurs de violences ou d'outrage envers un inspecteur du permis de conduire.

Les agressions envers les inspecteurs du permis de conduire constituent un phénomène récent, qui a indubitablement contribué à détériorer le climat des examens : en 2002, 67 plaintes à la suite d'une agression ont été recensées et 79 en 2001.

Ce phénomène a conduit les pouvoirs publics, en coopération avec les organisations syndicales d'inspecteurs et les organisations professionnelles représentatives de l'enseignement de la conduite, à mettre en place une série de mesures visant à aménager les épreuves et à garantir la sécurité des inspecteurs. Parmi celles-ci figure une expérimentation portant sur l'annonce différée du résultat des examens. La France est en effet le seul pays d'Europe à organiser une épreuve pratique avec annonce immédiate, dans le véhicule, de l'obtention du permis.

La répression accrue de tels comportements est également une priorité : dans le droit actuel, les violences ou outrages sur un inspecteur de permis de conduire sont punies des peines prévues aux articles 222-10 à 222-13 et 433-5 du code pénal, qui prévoient, de façon générale, une aggravation des sanctions lorsque la victime est chargée d'une mission de service public et que l'agression a eu lieu en raison de sa qualité. La qualité d'agent exerçant une mission de service public a été reconnue aux inspecteurs de permis de conduire dans une jurisprudence ancienne (T. corr. Le Mans, 21 juin 1952).

Ce dispositif répressif souffre cependant de réelle portée pratique, puisque il n'empêche pas un individu de réitérer ses menaces ou violences : le projet de loi prévoit en conséquence une disposition pénale permettant au tribunal d'assortir la condamnation d'une peine complémentaire d'interdiction de se présenter à l'examen du permis de conduire pour une durée de trois ans au plus.

La Commission a été saisie d'un amendement du rapporteur précisant que la condamnation à la peine complémentaire d'interdiction de se présenter à l'examen du permis de conduire doit être portée à la connaissance du préfet du département concerné, le rapporteur ayant précisé qu'il s'agissait du département du domicile de la personne condamnée et souligné qu'aucune disposition du projet de loi ne permettait de rendre applicable cette nouvelle peine complémentaire. La Commission a adopté son amendement (amendement n° 73).

Puis elle a adopé l'article 15 ainsi modifié.

Section 5

Dispositions relatives à la connaissance des accidents
de la circulation routière

Article 16

(art. L. 330-7-1 [nouveau] et L. 330-8 du code la route)


Système d'information sur le réseau routier géré
par les collectivités locales

L'article 16 introduit un nouvel article L. 330-7-1 dans le code de la voirie routière, afin de rendre obligatoire, pour le réseau routier géré par les collectivités locales, la mise en place d'un système d'information.

Les départements gèrent actuellement 360 000 kilomètres de routes, qui supportent à elles seules 37 % de la circulation totale ; les communes, à travers notamment les établissements publics de coopération intercommunale, gèrent 420 000 kilomètres, dont 60 000 km en milieu urbain. Les futurs transferts de compétences qui suivront la révision constitutionnelle relative à l'organisation décentralisée de la République devraient en outre se traduire par un accroissement de la voirie gérée par les départements, 28 000 kilomètres devant être transférés du niveau national au niveau départemental.

Dans cette perspective, la mise en place d'un système performant d'informations statistiques permettant d'appréhender le réseau routier dans son ensemble paraît indispensable.

L'article 16 du projet de loi a pour objet d'étendre aux collectivités locales le dispositif existant actuellement pour les routes gérées par l'État, permettant de collecter des informations sur le volume et les caractéristiques du trafic sur les voies nationales.

Dans un deuxième alinéa, l'article 16 prévoit un décret en Conseil d'État qui devra notamment déterminer le seuil de population des communes concernées, afin de ne pas faire peser des obligations excessives sur les petites communes.

La Commission a rejeté deux amendements de M. Christian Estrosi qui prévoient que les systèmes d'information devront relever les facteurs susceptibles d'être mis en cause dans un accident de la route - tels que l'état de voirie, le tracé, la signalisation - et permettre la réalisation d'études afin d'évaluer les conséquences des signaux qui parasitent les panneaux de signalisation routière.

Elle a en revanche adopté un amendement du rapporteur précisant que le décret en Conseil d'État fixera les conditions dans lesquelles la constitution du système d'information sur le réseau routier fera l'objet d'une compensation financière par l'État ; la loi constitutionnelle relative à l'organisation décentralisée de la République oblige en effet l'État à assortir des ressources correspondantes tout transfert de compétences au profit des collectivités locales (amendement n° 74).

Puis elle a adopté l'article 16 ainsi modifié.

Section 6

Dispositions relatives à la sécurité des transports
de voyageurs et de marchandise

Les dispositions proposées dans la section 6 concernent les professionnels de la route et visent à renforcer les dispositifs existants en matière de sécurité.

Les poids lourds représentent aujourd'hui 3,8 % des véhicules impliqués dans des accidents de la route, mais ces accidents, avec 13 % de tués, sont beaucoup plus graves. En 2001, le nombre de tués sur les routes a diminué pour la plupart des catégories d'usagers, mais a augmenté de 16,4 % pour les conducteurs de poids lourds. Dans ce contexte, il est apparu essentiel de conforter et d'améliorer la législation, afin de faire évoluer le comportement des professionnels de la route qui ne respecteraient pas les réglementations auxquelles ils sont soumis.

Article 17

(art. L. 325-1, L. 130-6 et L. 225-5 du code de la route)


Immobilisation des transports de marchandises dangereuses -
Habilitation des contrôleurs des transports terrestres -
Fichier national du permis de conduire

L'article 17 du projet de loi modifie plusieurs articles du code de la route afin de renforcer la sécurité des transports par poids lourds.

Le premier paragraphe vise à introduire, à l'article L. 325-1 du code de la route une disposition permettant l'immobilisation des véhicules routiers en infraction aux prescriptions de la réglementation du transport des marchandises dangereuses et compromettant la sécurité.

Une telle immobilisation était autorisée auparavant sur la base de l'ancien article R. 278 (6°), mais le travail de recodification du nouveau code de la route a supprimé cette disposition, au motif qu'elle excédait les prescriptions législatives sur l'immobilisation d'un véhicule énumérées à l'article L. 325-1. Le projet de loi réintroduit donc, au niveau législatif, une disposition explicite sur l'immobilisation pour infraction à la réglementation du transport des marchandises.

Cette disposition permet de pouvoir exiger d'un transporteur qu'il interrompe un transport de marchandises dangereuses effectué dans des conditions contraires à la sécurité, et qu'il procède dans un lieu adéquat, aux remises en conformité requises avant de poursuivre son trajet. Elle s'inscrit en outre dans le respect des normes communautaires qui ont prévu, dans la directive 95/50/CE du 6 octobre 1995, la possibilité d'immobilisation du véhicule : « lorsqu'une ou plusieurs infractions figurant notamment parmi celles figurant à l'annexe II ont été constatées au cours de transports de marchandises dangereuses par route, les véhicules concernés peuvent être immobilisés, sur place ou à un endroit désigné par les autorités de contrôle et obligés de se mettre en conformité avant de poursuivre leur voyage, ou faire l'objet d'autres mesures appropriées ».

Le deuxième paragraphe étend les pouvoirs des fonctionnaires ou agents de l'État chargés du contrôle des transports terrestres. A l'heure actuelle, ces agents, dont le champ de compétence est délimité à l'article L. 130-6 du code de la route, sont habilités à constater les infractions liées à la réglementation en matière d'excès de vitesse ou de bridage des moteurs pour les véhicules affectés au transport routier de voyageurs ou de marchandises. Ils ont accès pour cela à l'appareil de contrôle dit « chronotachygraphe », dont ils peuvent vérifier l'intégrité.

En application de la directive européenne n° 2000-30 définissant le cadre d'intervention des contrôleurs terrestres, le projet de loi étend ces compétences au contrôle des prescriptions techniques des véhicules en ajoutant à l'article L. 130-6 précité une référence à l'article L. 233-2 (10).

Le troisième paragraphe est une disposition technique qui étend la liste des autorités ou organismes susceptibles de détenir les informations relatives à l'existence, la catégorie et la validité du permis de conduire. Cette liste, qui figure à l'article L. 225-5 du code de la route, comprendra désormais également l'organisme chargé de la délivrance et de la gestion des cartes de conducteur associées au chronotachygraphe électronique utilisé pour le contrôle des transports routiers.

Cet organisme, choisi dans le cadre d'une délégation de service public, est une filiale de l'Imprimerie nationale dénommée Chronoservices. Il sera ainsi habilité à recueillir toutes les informations contenues dans le Fichier national du permis de conduire, afin de pouvoir délivrer et gérer les cartes de conducteur ; selon la réglementation européenne, ces cartes sont des documents tachygraphiques délivrés par les autorités d'un État membre à un conducteur donné. Afin que cette délivrance puisse avoir lieu dans des conditions de sécurité satisfaisantes, la vérification de l'identité du titulaire du permis poids lourd, par l'accès au Fichier national, est indispensable.

La Commission a adopté l'article 17 sans modification.

Après l'article 17

La Commission a rejeté un amendement de M. Christian Estrosi imposant au Gouvernement de présenter chaque année au Parlement un rapport d'exécution des contrats de plan routiers État-région.

Article 18

(art. 8, 17 et 37 de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982)


Réglementation des entreprises de déménagement -
Commissions des sanctions administratives

La loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 d'orientation des transports intérieurs, dite LOTI, constitue le fondement législatif de la réglementation du transport routier, notamment de marchandises.

L'article 18 modifie trois articles de la LOTI portant sur des points très différents ; le premier paragraphe modifie ainsi l'article 8 afin de réglementer les entreprises de déménagement ; le deuxième modifie l'article 17 concernant la composition des comités régionaux de transports (CRT) et les commissions des sanctions administratives (CSA) ; le troisième modifie l'article 37 qui traite des sanctions de retrait des titres administratifs de transport et de l'immobilisation des véhicules des entreprises.

L'article 8 de la LOTI met en place un registre sur lequel peuvent être inscrites les entreprises de transport public de marchandises, fixe le cadre général des contrats de transport intérieur et impose l'utilisation de contrats types à défaut de convention écrite entre les parties.

Les entreprises de déménagement ont toujours été incluses dans le champ d'application de l'article 8 ; cependant, un arrêt de la Cour de cassation en date du 26 juin 2001 a considéré que « le contrat de déménagement est un contrat d'entreprise qui se différencie du contrat de transport en ce que son objet n'est pas limité au déplacement de la marchandise ». L'interprétation de cet arrêt pouvant prêter à confusion en exonérant les entreprises de déménagement des obligations qui leur incombent en matière de transports, l'article 18 du projet de loi modifie l'article 8 de la LOTI afin de prévoir une mention explicite pour ces entreprises.

Le deuxième paragraphe de l'article 18 du projet de loi modifie l'article 17 de la LOTI relatif aux commissions des sanctions administratives (CSA). Le rôle de ces commissions est de proposer aux préfets de région des sanctions administratives, telles que retrait de titres ou immobilisations de véhicules, à l'égard des entreprises de transports qui ne respecteraient pas les réglementations auxquelles elles sont soumises, et notamment celles concernant la sécurité routière. Sur la base de ces dispositions, plus de 250 entreprises ont fait l'objet de sanctions administratives après leur passage en CSA ; 132 véhicules ont été immobilisés pour des durées allant de un à trois mois et 500 titres de transports retirés dont 160 définitivement.

Ces chiffres démontrent l'importance de l'activité de régulation des CSA dans le domaine du transport routier ; leur mise en place est toutefois rendue difficile en raison des dispositions actuelles de l'article 17, qui placent la commission des sanctions administratives au sein des comités régionaux des transports. Ces derniers ont un nombre de participants bien supérieurs à ceux des CSA et la lourdeur de leur organisation nuit au bon déroulement des commissions de sanctions administratives. L'article 18 du projet de loi a donc pour objet de dissocier les commissions des sanctions administratives des comités régionaux de transport en les plaçant directement auprès du préfet de région. La composition de ces commissions est également précisée dans la loi ; le texte proposé, qui indique que la commission comprend des représentants des entreprises qui participent aux opérations de transport, de leurs salariés et des différentes catégories d'usagers ainsi que des représentants de l'État, ne modifie pas le droit actuel.

Le troisième paragraphe modifie l'article 37 de la LOTI relatif aux sanctions de retrait des titres administratifs de transport et de l'immobilisation des véhicules des entreprises. Cette modification a pour objet de lever toute ambiguïté sur les réglementations dont peuvent avoir à connaître les commissions des sanctions administratives. La référence aux règles d'hygiène est ainsi prévue de manière explicite. En outre, le projet de loi précise les cas d'interventions des CSA, en substituant aux termes « en cas d'infraction » les termes « en cas de constat d'infraction », afin de ne pas créer d'ambiguïté entre les attributions des commissions et les poursuites pénales menées par ailleurs. Le texte élargit aussi, par coordination avec les modifications de l'article 8 de la LOTI effectuées au premier paragraphe, le champ d'application des CSA aux entreprises de déménagement, dans le cas d'immobilisation des véhicules à la suite d'une récidive. Ces dispositions concerneront également désormais les entreprises « dont le transport est accessoire à leur activité », notamment les entreprises effectuant des transports pour leur propre compte.

Le dernier paragraphe de l'article prévoit une application différée du deuxième paragraphe relatif aux modalités de fonctionnement des commissions des sanctions administratives : porté au premier jour du sixième mois après la promulgation de la loi, ce délai permet de mettre en place dans de bonnes conditions les nouvelles commissions.

La Commission a adopté l'article 18 sans modification.

Article 19

(art. 25 de la loi n° 52-401 du 14 avril 1952 et 3 de l'ordonnance
n° 58-1310 du 23 décembre 1958)


Entreprises de déménagement - Chronotachygraphe électronique

L'article 19 du projet de loi a deux objets distincts ; le premier, énoncé au premier paragraphe, ajoute, par coordination avec l'article 18, une référence explicite aux entreprises de déménagement à l'article 25 de la loi du 14 avril 1952 sanctionnant l'absence d'autorisation pour l'exercice d'une activité de transporteur ; le second a trait aux dispositifs chronotachygraphes.

Les véhicules de transport routier de marchandises et de voyageurs ont l'obligation d'être équipés d'un appareil de contrôle appelé chronotachygraphe. Cette obligation, qui résulte d'un règlement européen, permet le contrôle du respect des temps de conduite et de repos des chauffeurs routiers. Le respect de ces règles répond à un impératif social et constitue un enjeu déterminant en matière de sécurité routière.

Actuellement, les contrôles sont réalisés sur route et en entreprise, par l'analyse des données enregistrées sur des disques papier préalablement introduits dans le chronotachygraphe. L'appareil actuel, qui fait appel aux techniques classiques de l'horlogerie, fait l'objet de nombreuses fraudes : les autorités communautaires ont en conséquence été conduites à édicter de nouvelles normes pour rendre obligatoire un appareil beaucoup plus sûr. L'appareil actuel va donc être remplacé, à partir d'août 2004, par un appareil entièrement numérique auquel sera associée une carte propre à chaque conducteur sur laquelle seront enregistrées les données qui le concernent.

L'objet du second paragraphe de l'article 19 est donc de réécrire l'article 3 de l'ordonnance du 23 décembre 1958 modifiée, qui a trait aux sanctions en matière de falsification du chronotachygraphe, afin d'introduire la notion de données électroniques propres à ces nouveaux dispositifs. Constitueront désormais un délit puni d'un an de prison et de 30 000 euros d'amende la falsification des données électroniques ; en outre, faire du transport sans carte à puce ou avec celle d'un autre sera passible de six mois de prison et de 3 750 € d'amende.

La Commission a adopté l'article 19 sans modification.

Après l'article 19

La Commission a rejeté un amendement de M. Thierry Mariani instaurant une visite médicale obligatoire préalable à l'obtention du permis de conduire et obligatoire pour les conducteurs de plus de soixante ans, le rapporteur ayant indiqué que son objet était satisfait par l'amendement de M. Estrosi adopté par la Commission avant l'article 8. Puis elle a rejeté un amendement du même auteur rendant obligatoire la mise en place d'un dispositif spécifique pour les non-voyants aux abords des passages pour piétons, le rapporteur en ayant noté le caractère réglementaire. Elle a également rejeté un amendement de M. Christian Estrosi obligeant les véhicules à circuler avec les feux de croisement allumés, le rapporteur s'étant déclaré défavorable à cet amendement, les expériences menées jusqu'à présent n'ayant pas eu de résultats probants en terme de sécurité routière ; relevant que la proposition avait un caractère réglementaire, il a ajouté que l'extension à tous les véhicules d'une obligation aujourd'hui circonscrite aux deux-roues était contestée par les motocyclistes.

Chapitre V

Dispositions diverses et de coordination

Article 20

(art. L. 232-1 à L. 232-3 du code de la route)


Insertion dans le code de la route des nouvelles infractions d'homicide
et de blessures involontaires à l'occasion de la conduite d'un véhicule

Cet article insère dans le code de la route, dans le chapitre consacré aux atteintes involontaires aux personnes, trois nouveaux articles L. 232-1, L. 232-2 et L. 232-3 qui reproduisent les dispositions du code pénal relatives aux délits d'homicide et de blessures involontaires commis à l'occasion de la conduite d'un véhicule à moteur, ainsi que celles déterminant les peines complémentaires applicables à ces délits.

Cette technique de reproduction d'articles d'un code, dit code pilote, dans un autre code, dit code suiveur, est fréquemment utilisée en matière de codification, afin de faciliter la lisibilité des dispositions applicables. Elle a été employée à plusieurs reprises dans le code de la route, afin d'y faire figurer des dispositions contenues dans d'autres codes, mais qui s'appliquent particulièrement au domaine de la circulation routière. C'est ainsi qu'ont été reproduites des dispositions du code général des collectivités territoriales relatives aux pouvoirs de police de la circulation, du code de la voirie routière sur la définition des voiries, du code de procédure pénale pour les amendes forfaitaires, du code des assurances sur l'obligation d'assurance et du code pénal sur le délit de fuite.

Les dispositions relatives à l'homicide et aux blessures involontaires des articles 221-6 et 222-19 du code pénal n'ont cependant pas été reproduites dans le chapitre II du titre III du code de la route, relatif aux atteintes volontaires aux personnes, alors même, comme le souligne le commentaire du code Dalloz figurant sous le chapitre II, que ces délits « sont bien souvent commis à l'occasion de la conduite d'un véhicule à moteur. Il aurait été envisageable de les reproduire dans le code de la route en dispositions suiveuses ». La création d'infractions spécifiques commises lors de la conduite du véhicule est l'occasion pour le législateur de réparer cet oubli.

C'est pourquoi l'article 20 du projet de loi remplace l'unique article du chapitre II par trois nouveaux articles qui reproduisent les dispositions du code pénal relatives aux atteintes involontaires à la vie et à l'intégrité de la personne commises à l'occasion de la conduite d'un véhicule.

Le chapitre II du titre III du code de la route, relatif aux atteintes involontaires aux personnes, comporte actuellement un seul article, l'article L. 232-1, qui précise que les délits d'atteintes involontaires à la vie ou à l'intégrité physique d'une personne commis à l'occasion de la conduite d'un véhicule donnent lieu de plein droit à la réduction de la moitié du nombre de points du permis de conduire.

Ces dispositions sont reprises à la fin du chapitre II, dans le nouvel article L. 232-3, qui prévoit également une réduction de plein droit de la moitié du nombre de points en faisant référence aux nouvelles infractions d'atteintes involontaires à la vie ou à l'intégrité de la personne visées aux articles 221-6-1, 222-19-1 et 222-20-1 du code pénal.

L'article 20 propose une nouvelle rédaction de l'article L. 232-1 qui reproduit dans leur intégralité les dispositions de l'article 221-6-1 du code pénal, relatif à l'infraction d'homicide involontaire commis à l'occasion de la conduite d'un véhicule, et celles de l'article 221-8 du même code, qui détermine les peines complémentaires applicables.

L'article L. 232-2 procède de manière similaire pour les dispositions relatives aux atteintes involontaires à la personne, en reproduisant les dispositions des articles 222-19-1 et 222-20-1 (délits de blessures involontaires), ainsi que celles de l'article 222-44 (peines complémentaires applicables).

La Commission a adopté quatre amendements du rapporteur tendant à rectifier des erreurs matérielles et à procéder à des harmonisations rédactionnelles (amendements nos 75 à 78).

Puis elle a adopté l'article 20 ainsi modifié.

Après l'article 20

La Commission a rejeté un amendement de M. Thierry Mariani relatif à la vitesse maximale sur autoroute, satisfait par l'amendement adopté à l'initiative de M. Christian Estrosi après l'article 10.

Article 21

(art. L. 225-2, L. 234-8, L. 234-10 du code de la route)


Simplification - Coordinations

Cet article unifie les peines applicables en cas de refus de se soumettre aux vérifications destinées à établir l'existence d'un état alcoolique (paragraphes I et II) et précise les modalités de conservation des informations relatives aux mesures affectant le permis de conduire (paragraphe III).

-  Sanctions applicables en cas de refus de se soumette aux vérifications destinées à établir l'existence d'un état alcoolique (paragraphes I et II)

Le refus de se soumettre aux vérifications imposées par l'officier de police judiciaire relève actuellement de deux articles différents, selon que le contrôle est effectué dans les conditions prévues aux articles L. 234-4 à L. 234-6 du code la route (accident, infraction aux dispositions sur les vitesses maximum autorisée, le port du casque ou de la ceinture de sécurité, état d'ivresse manifeste) ou de façon aléatoire (article L. 234-9).

L'article L. 234-8 punit de deux ans d'emprisonnement et de 4 500 € d'amende le refus de se soumettre aux vérifications prévues par les articles L. 234-4 à L. 234-6. Les peines complémentaires encourues sont la suspension, pour une durée de trois ans au plus, du permis de conduire, cette suspension ne pouvant pas être limitée à la conduite en dehors de l'activité professionnelle (article 5 du projet de loi) ni être assortie de sursis, même partiellement, la peine de travail d'intérêt général et la peine de jours-amende. En outre, ce délit donne lieu de plein droit à la réduction de la moitié du nombre maximal de points du permis de conduire.

L'article L. 234-9 prévoit des peines d'emprisonnement et d'amende et un nombre de retrait de points similaires pour les vérifications effectuées dans le cadre des contrôles aléatoires, mais limite les peines complémentaires encourues à la seule suspension, pour une durée de trois ans, du permis de conduire, sans interdire le sursis.

Les paragraphes I et II de l'article 21 mettent fin à ces différences injustifiée en complétant l'article L. 234-8, afin de faire référence aux vérifications effectuées dans le cadre de l'article L. 234-9 et en supprimant, par coordination, l'article L. 234-10. Ainsi, le refus de se soumettre aux vérifications destinées à établir l'état d'alcoolémie sera désormais puni des mêmes peines, quelles que soient les conditions dans lesquelles ce contrôle est effectué.

Cette unification des sanctions applicables est permet d'aligner les dispositions relatives à l'alcool sur celles prévues par l'article L. 235-3 en cas de refus de se soumettre aux vérifications destinées à établir si la personne conduisait sous l'influence de stupéfiants.

-  Conservation des informations relatives aux mesures affectant le permis de conduire (paragraphe III)

L'article L. 225-1 du code de la route prévoit l'enregistrement de l'ensemble des informations relatives aux permis de conduire et aux mesures susceptibles de l'affecter au sein du fichier national des permis de conduire.

L'article L. 225-2 précise que les informations relatives aux condamnations judiciaires, aux compositions pénales, aux amendes forfaitaires et aux mesures administratives affectant le permis de conduire doivent être effacées à l'issue d'un délai de six ans, si aucune décision judiciaire, mesure administrative concernant le permis de conduire ou mesure établissant la réalité d'une infraction dans les conditions prévues à l'article L. 223-1 n'est intervenue (paragraphe I). Le paragraphe IV de l'article L. 225-2 porte ce délai de conservation à dix ans en cas de récidive du délit d'homicide involontaire en état alcoolique, l'intéressé ne pouvant solliciter un nouveau permis avant l'expiration de ce délai de dix ans (article L. 224-15). Enfin, ce délai est réduit à trois ans à compter du jour où la dernière condamnation est devenue définitive, du jour du paiement de la dernière amende, ou de l'émission du titre exécutoire de cette amende pour les informations relatives au nombre de points affecté au permis de conduire (paragraphe V).

Le paragraphe III de l'article 21 modifie les dispositions de l'article L. 225-2 sur trois points :

· Il fixe à dix ans, au lieu de six actuellement, le délai de droit commun pour conserver les informations relatives aux mesures affectant le permis de conduire (1° du paragraphe III).

Cette modification permet notamment de tenir compte de l'allongement à dix ans de la durée d'interdiction de solliciter un nouveau permis de conduire après l'annulation du premier.

· Il supprime, par coordination, les dispositions destinées à permettre l'application de l'interdiction de solliciter pendant dix ans un nouveau permis en cas de récidive d'homicide involontaire en état alcoolique et les remplace par un paragraphe précisant qu'en cas d'interdiction définitive de solliciter un nouveau permis de conduire, les informations sont effacées lorsque la personne a atteint sa quatre-vingtième année (2° du paragraphe III). On peut en effet espérer qu'à cet âge-là, la personne qui a vu son permis de conduire annulé ne cherche pas à repasser en fraude un nouveau permis.

· Enfin, le 3° du paragraphe III précise que la réduction à trois ans du délai prévu par le paragraphe V de l'article L. 225-2 ne s'applique pas lorsque le conducteur a commis, pendant ce délai, une nouvelle infraction sanctionnée par un retrait de points.

La Commission a adopté deux amendements rédactionnel ou de coordination du rapporteur (amendements nos 79 et 80), ainsi qu'un amendement supprimant une mention inutile relative au délai de conservation des informations sur le permis à points (amendement n° 81).

Elle a ensuite adopté l'article 21 ainsi modifié.

Article additionnel après l'article 21

(art. L. 224-1 et L. 224-2 du code de la route)


Rétention et suspension du permis de conduire
en cas de conduite après usage de stupéfiants

La Commission a adopté un amendement du rapporteur rendant applicables aux infractions de conduite après usage de stupéfiants les dispositions relatives à la rétention du permis de conduire par un officier de police judiciaire et à la suspension du permis par le préfet (amendement n° 82).

Article additionnel après l'article 21

(art. L. 235-2 du code de la route)


Modification rédactionnelle de la loi du 3 février 2002

La Commission a adopté un amendement du rapporteur corrigeant une erreur rédactionnelle résultant de la loi du 3 février 2002 relative à la conduite sous l'influence de substances ou de plantes classées comme stupéfiants (amendement n° 83).

Article additionnel après l'article 21

(art. 398-1 et 522 du code de procédure pénale)


Harmonisation terminologique du code de procédure pénale

À l'initiative du rapporteur, la Commission a adopté un amendement d'harmonisation terminologique du code de procédure pénale en matière de réglementation relative aux transports terrestres (amendement n° 84).

Article 22

Ratification du code de la route

Cet article ratifie les ordonnances du 22 septembre et 21 décembre 2000 relatives à la partie législative du code de la route ;

1. L'habilitation législative

a) La nécessaire refonte du code de la route

L'ancien code de la route, datant de 1958, était devenu difficilement lisible à la suite de nombreuses adjonctions et modifications. Sa présentation était confuse et sa lecture supposait, à propos d'une question déterminée, de consulter des textes épars, souvent en dehors du code. S'agissant par exemple de la conduite sous l'empire d'un état alcoolique, les dispositions relatives à cette infraction figuraient dans divers endroits du code.

Dans un rapport du 7 janvier 1974, l'ingénieur des ponts et chaussées Guy constatait déjà que « la succession des articles laisse beaucoup à désirer au plan de la logique et il est difficile à un non-initié de trouver facilement le ou les articles du code traitant d'un sujet déterminé ». La commission supérieure de codification indiquait dans un rapport d'activité que « la réfection du code de la route est impérative et urgente. Il a été tant de fois modifié depuis 1958 qu'il a perdu sa cohérence et sa lisibilité au détriment de ceux-là mêmes qui sont chargés de son application ».

Lors d'une réunion interministérielle tenue le 30 mai 1994, il a donc été décidé de procéder à la refonte du code de la route.

b) Le recours à l'habilitation législative

Relancée en 1989 avec la création de la commission supérieure de codification, le processus de codification s'est rapidement ralenti, en raison notamment des difficultés rencontrées pour inscrire les projets de loi de codification à l'ordre de jour des assemblées.

Pour pallier cet encombrement législatif, le Gouvernement a choisi de recourir à la procédure des ordonnances et a fait adopter le 16 décembre 1999 une loi l'habilitant à procéder, par ordonnances, à l'adoption de la partie législative de certaines codes. Parmi les neuf codes concernés par cette habilitation figurait le code de la route. Le délai de dépôt de l'ordonnance relative à ce code a été fixé à douze mois suivant la publication de la loi d'habilitation, soit le 22 décembre 2000. Le projet de loi de ratification devait, lui, être déposé dans un délai de deux mois à compter de la publication de l'ordonnance et au plus tard le dernier jour du quatorzième mois suivant la publication de la loi d'habilitation.

L'ordonnance n° 2000-930 relative à la partie législative du code de la route a été publiée le 22 septembre 2000. Cette ordonnance a été modifiée moins de trois mois après par l'ordonnance n° 2000-1255 du 21 décembre 2000.

Le projet de loi portant ratification de l'ordonnance du 22 septembre 2000 a été déposé à l'Assemblée nationale le 8 novembre 2000. Aucun projet de ratification n'a, en revanche, été déposé pour l'ordonnance du 21décembre 2000.

En application de l'article 7 de l'ordonnance du 22 septembre 2000, le code de la route en entrée en vigueur le 1er juin 2001. En l'absence de ratification, ses dispositions demeurent théoriquement des actes réglementaires, susceptibles de recours devant le juge administratif. Seule une ratification par le Parlement peut leur donner une valeur législative.

Cette ratification peut être explicite, grâce au vote d'une disposition législative de ratification. Depuis une décision du Conseil constitutionnel en date du 24 février 1972, elle peut également être implicite, la modification par le Parlement d'un ou plusieurs articles de l'ordonnance valant ratification. La juridiction constitutionnelle a en effet admis cette pratique, à partir du moment où il existe une « manifestation de volonté implicitement mais clairement exprimée par le Parlement ».

S'agissant du code de la route, il semble que l'on puisse considérer qu'il y a eu une validation implicite, ce code ayant déjà été modifié à plusieurs reprises par le Parlement (11), avant même le présent projet de loi, qui modifie de très nombreux articles de ce nouveau code. Les auteurs du projet de loi ont néanmoins préféré procéder à une validation explicite, afin d'éviter toute difficulté d'interprétation quant à la volonté du législateur de ratifier la totalité, ou seulement une partie de l'ordonnance.

2. La ratification des ordonnances

La ratification explicite d'une ordonnance de codification peut également être l'occasion pour le législateur de corriger certaines imperfections d'ordre technique. Les délais d'examen du présent projet de loi n'ont malheureusement pas permis à votre rapporteur de se livrer à un examen détaillé des dispositions adoptées. Cette approbation de principe ne doit pas pour autant dispenser le Parlement de corriger, à l'occasion de futurs projets de loi modifiant le code de la route, les éventuelles imprécisions du nouveau code.

Conformément aux principes énoncés à l'article 3 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, la codification s'est faite « à droit constant, sous réserve des modifications nécessaires pour améliorer la cohérence rédactionnelle des textes rassemblés, assurer le respect de la hiérarchie des normes et harmoniser l'état du droit ».

L'ordonnance n° 2000-930 du 22 septembre 2000 relative à la partie légis-lative du code de la route organise ce nouveau code en quatre livres, eux-mêmes scindés chacun en quatre titres : après une présentation des dispositions générales (livre Ier), le code traite de la formation et du comportement du conducteur (livre II), avant de présenter les règles techniques et administratives applicables aux véhicules (livre III) et les règles de circulation (livre IV). Comme le souligne le rapport au Président de la République qui accompagne l'ordonnance, « l'organisation des livres et chapitres est guidée par un souci de chronologie, l'enseignement de la conduite, par exemple dans le livre II, étant abordé avant l'obtention du permis de conduire et avant le comportement sur la route.

La codification a été l'occasion d'intégrer dans le code de la route des textes législatifs non encore codifiés, mais traitant de toute évidence de la circulation routière, comme l'article 6 de la loi n° 70-597 du 9 juillet 1970 sur la possession d'un éthylotest ou l'article 23 de la loi n° 89-469 du 10 juillet 1989 sur le contrôle technique.

Comme cela a été rappelé ci-dessus, la technique du code suiveur, c'est-à-dire la possibilité de reproduire une ou plusieurs articles d'un autre code, a été utilisée à plusieurs reprises afin de faire figurer dans le code de la route des dispositions contenues dans d'autres codes, mais qui s'appliquent particulièrement au domaine de la circulation routière.

Outre l'article 1er, qui fait référence à la partie législative du code de la route, l'ordonnance du 22 septembre 2000 comporte six articles qui, respectivement, remplacent, dans tous les textes législatifs, des références à l'actuel code par le nouveau code, fixent les règles applicables pour la modification de plein droit des articles de codes ou de lois non codifiées citées dans le nouveau texte, modifient le code de la voirie routière, abrogent les textes nouvellement codifiés, rendent l'ordonnance applicable outre-mer et fixent la date d'entrée en vigueur de l'ordonnance à la date d'entrée en vigueur de la partie réglementaire du code de la route et, au plus tard, au 1er juin 2001.

L'ordonnance n° 2000-1255 du 21 décembre 2000 modifie certains articles du code de la route, afin notamment de donner compétence aux personnels de l'office national des forêts, aux gardes champêtres communaux, aux agents chargés de la surveillance de la voie publique, aux agents des services publics urbains de transports en commun, aux officiers des ports, aux contrôleurs des transports terrestres, aux agents des douanes, aux agents des concessionnaires d'autoroute et aux agents habilités à constater les infractions à la conservation du domaine public routier pour constater par procès-verbal les contraventions prévues par la partie réglementaire du code de la route ou par d'autres dispositions réglementaires, dans la mesure où elles se rattachent à la sécurité et à la circulation routières.

En l'absence de dépôt d'un projet de loi de ratification, cette ordonnance est devenue caduque. L'article 38 de la Constitution dispose en effet que les ordonnances « deviennent caduques si le projet de loi de ratification n'est pas déposé devant le Parlement avant la date fixée par la loi d'habilitation ».

Certes, l'ordonnance du 21 décembre 2000 se contente de modifier l'ordonnance du 22 septembre de la même année qui, elle, a fait l'objet d'un dépôt de projet de loi de ratification. On pourrait donc considérer que le projet de ratification porte sur l'ordonnance du 22 septembre modifiée par celle du 21 décembre. Il semble malgré tout difficile de soutenir que le projet de loi de ratification, déposé le 8 novembre, concerne des dispositions publiées près d'un mois et demi après. Une telle interprétation pourrait en effet conduire à des dérives constituant une violation manifeste des droits du Parlement, notamment dans le cas d'une ordonnance initiale profondément remaniée par la publication d'une ordonnance rectificative postérieure au dépôt du projet de loi de ratification. Conjuguée à la possibilité de ratifier les ordonnances de manière implicite, cette interprétation prive les parlementaires de repères clairs dans le processus de délégation du pouvoir législatif accordé au Gouvernement et méconnaît les principes posés par l'article 38 de la Constitution.

La rédaction même de l'article 21 infirme cette théorie, puisqu'elle fait référence explicitement aux deux ordonnances, et non pas à l'ordonnance du 22 septembre modifiée.

En tout état de cause, devant l'incertitude qui entoure cette interprétation, le Gouvernement aurait dû opter pour la simplicité et assurer la sécurité juridique de l'ordonnance en déposant un nouveau projet de loi de ratification.

Sur proposition du rapporteur, la Commission a adopté un amendement supprimant la référence à l'ordonnance du 21 décembre 2000, devenue caduque (amendement n° 85).

Elle a ensuite adopté l'article 22 ainsi modifié.

Article 23

(art. L.711-1, 711-2 à 711-3 et 731-1 du code de l'aviation civile)


Enquêtes relevant du bureau enquêtes accidents défense

L'article 23 du projet de loi a pour objet de transposer les dispositions de la loi n° 99-243 du 29 mars 1999 relative aux enquêtes techniques sur les accidents et les incidents dans l'aviation civile, aux enquêtes techniques menées à la suite d'accidents ou d'incidents survenant aux aéronefs militaires.

Bien qu'éloignée du thème de la sécurité routière, cette disposition, comme celle de l'article qui suit, figure dans le présent projet de loi compte tenu de l'urgence qui s'attache à son adoption.

L'alignement des procédures en matière de défense sur celles en vigueur dans l'aviation civile répond à un double souci de transparence à l'égard des personnes victimes d'un accident aérien et d'harmonisation des standards aéronautiques internationaux existants en matière de sécurité aérienne. Dans cet objectif a été créé par décret, en novembre 2002, un bureau enquête accidents défense, sur le même modèle que le bureau enquête accidents (BEA) de l'aviation civile. Il importe aujourd'hui de mettre en œuvre rapidement le fonctionnement de ce bureau en définissant par voie législative les compétences de ses agents.

À cet effet, la rédaction du premier alinéa de l'article 23 du projet de loi a privilégié le renvoi pur et simple aux dispositions du code de l'aviation civile plutôt que de créer un dispositif législatif nouveau. Ainsi, par analogie avec le BEA, le BEA défense aurait la charge des enquêtes techniques sur le terrain dans un objectif de reconstitution des faits et de l'exploitation des enseignements dans le milieu civil et militaire ; il serait également chargé de faire toute proposition de mesures préventives et de recommandations.

Le deuxième alinéa de l'article procède à des coordinations s'agissant de la définition des compétences respectives du ministre de la défense, des agents commissionnés ou agrées et des organismes militaires ou civils chargés de la sécurité aérienne.

Dans le dernier alinéa, il est renvoyé à un décret en Conseil d'État le soin de fixer les conditions d'application de l'article, s'agissant notamment des conditions de commissionnement des enquêteurs et de la composition de la commission d'enquête.

La Commission a adopté l'article 23 sans modification.

Après l'article 23

La Commission a rejeté deux amendements de M. Thierry Mariani, proposant, pour le premier, un abattement de la taxe foncière sur les propriétés bâties et de la taxe d'habitation pour les habitations situées à proximité d'une installation aéroportuaire, le second instaurant un périmètre de sécurité aux alentours des installations militaires.

Article 24

(art. 68 de la loi n° 2000-516 du 15 juin 2000)


Aménagement du principe de l'encellulement individuel

L'article 24 du projet de loi introduit des dispositions fort éloignées du thème de la sécurité routière, puisqu'il consiste à aménager le principe de l'encellulement individuel posé par la loi du 15 juin 2000 renforçant la protection de la présomption d'innocence et les droits des victimes. L'urgence qui s'attache à son adoption a amené le Gouvernement à utiliser le premier vecteur législatif utile ; même si le procédé est cavalier, force est cependant de reconnaître qu'il est indispensable.

Le principe de l'encellulement individuel pour les prévenus est posé à l'article 716 du code de procédure pénale, qui disposait, dans sa rédaction issue de la loi du 4 janvier 1993, qu'il « ne peut être dérogé à ce principe qu'en raison de la distribution intérieure des maisons d'arrêt ou de leur encombrement temporaire ou, si les intéressés ont demandé à travailler, en raison des nécessités d'organisation du travail ».

La loi du 15 juin 2000 est revenue sur les dérogations au principe de l'encellulement individuel, en indiquant qu'elles ne pouvaient être motivées qu'à la demande de l'individu ou en raison de l'organisation du travail, la clause relative à la distribution intérieure des maisons d'arrêt étant supprimée: « il ne peut être dérogé à ce principe qu'à leur demande ou si les intéressés sont autorisés à travailler, en raison des nécessités d'organisation du travail ». Le législateur a fixé un délai de trois ans après la publication de la loi pour la mise en application effective du principe.

Là encore, comme sur beaucoup d'autres dispositions, la loi du 15 juin 2000 se heurte au principe de réalité ; il apparaît dès lors indispensable, à l'échéance de la date butoir fixée en 2000, d'aménager le principe de l'encellulement individuel. Les chiffres sont en effet éloquents : au 1er janvier 2003, 29 109 places étaient recensées en maisons d'arrêt et quartiers maisons d'arrêt des centres pénitentiaires, dont 19 342 cellules individuelles ; la population incarcérée dans ces établissements est de 40 298 détenus, dont 20 852 en détention provisoire.

Le Gouvernement a lancé, dès juillet dernier, un vaste chantier de construction d'établissements et de rénovation pour remédier à cette surpopulation carcérale ; la loi d'orientation et de programmation pour la justice du 9 septembre 2002 a prévu des moyens financiers et juridiques inédits jusqu'à présent, en se fixant pour objectif la création de 13 100 places de détention d'ici 2007 : 268 millions d'euros sont ainsi mobilisés en autorisations de programme, dont 141 millions affectés à la construction de nouvelles places, 90 millions à la construction d'établissements pour mineurs et 18 millions à la création de quartiers pour mineurs dans les établissements pénitentiaires.

La détermination du Gouvernement est telle que des procédures spécifiques ont été prévues pour accélérer la mise en œuvre ; néanmoins, certains délais sont incompressibles. En juin 2003, date d'entrée en vigueur du principe de l'encellulement individuel posé par la loi du 15 juin 2000, seuls devraient être terminés deux nouveaux établissements (Toulouse-Seysses et Avignon-le Pontet) issus du « programme 4000 » initié en 1997 et représentant, compte tenu des places supprimées par ailleurs, 406 places nouvelles. Ces nouvelles constructions ne suffiront donc pas à combler le déficit de places en maison d'arrêt : l'immobilisme de ces dernières années en matière de constructions pénitentiaires se fait cruellement ressentir et il faut maintenant faire face à des promesses qui ne pouvaient être tenues par leurs auteurs.

Il est ainsi nécessaire de revenir sur la rédaction issue du 15 juin 2000 ; le non-respect prévisible des dispositions du nouvel article 716 du code de procédure pénale est en effet de nature à engager la responsabilité de l'État, puisque celui-ci peut être mis en cause au titre de la non-application d'un texte législatif ; en application de cette jurisprudence, les autorités publiques sont tenues de prendre « dans un délai raisonnable » toutes les mesures de nature tant matérielles que juridiques qu'implique l'application d'une loi. En l'absence de modification législative, il reviendrait au juge d'apprécier si le délai de trois ans prévu dans la loi du 15 juin 2000 était raisonnable pour mettre en œuvre le principe de l'encellulement individuel.

En outre, la responsabilité du service public de la justice pourrait également être engagée pour faute lourde si des dommages étaient causés alors qu'un détenu se trouvait en cellule commune, compte tenu du caractère très restrictif de la loi du 15 juin 2000, qui n'a prévu que des dérogations mineures au principe de l'encellulement individuel.

La rédaction proposée par l'article 24 du projet de loi ne revient pas sur le principe de l'encellulement individuel, qui constitue une avancée indéniable en terme d'amélioration des conditions de détention des prévenus. Il aménage simplement les conditions de dérogation à ce principe ; il apparaît en premier lieu nécessaire de tenir compte de la personnalité du détenu, qui peut subir de façon douloureuse l'encellulement individuel. Il appartiendra ainsi à l'administration d'évaluer le profil psychologique du détenu avant de le placer seul en cellule, afin notamment d'éviter les risques d'automutilation et de suicides. La rédaction du projet de loi retient ainsi comme dérogation au principe, l'hypothèse où les détenus font la demande d'être placés en cellule commune et celle où leur personnalité justifie dans leur intérêt qu'ils ne soient pas laissés seuls.

En outre, le projet de loi retient également comme critère de dérogation à l'encellulement individuel, outre les cas exigés par les nécessités du travail, le critère de distribution intérieure des maisons d'arrêt et le nombre de détenus présents ; il s'agit ainsi d'un principe réaliste qui tient compte de la situation actuelle du parc immobilier, dans l'attente de l'achèvement des programmes de construction en cours.

La Commission a été saisie d'un amendement de suppression de l'article présenté par M. René Dosière, son auteur soulignant son caractère totalement étranger au thème de la sécurité routière. Rappelant que la loi du 15 juin 2000 rendait obligatoire le principe de l'encellulement individuel, le rapporteur en a jugé l'application tout à fait impossible à la date fixée par ladite loi, c'est-à-dire au 16 juin 2003.

Tout en convenant que l'article 24 n'avait qu'un lien indirect avec le projet de loi, il a mis en avant les risques de contentieux et de condamnation de l'État si la loi du 15 juin 2000 n'était pas modifiée sur ce point. Il a précisé que, selon le texte proposé, il pourrait être dérogé au principe de l'encellulement individuel si le détenu le demande, si sa personnalité le justifie, pour des raisons tenant à l'organisation du travail ou pour des motifs tenant à la distribution intérieure des maisons d'arrêt ou au surencombrement des établissements. Il a ajouté que le Gouvernement ne renonçait pas pour autant à l'amélioration des conditions de détention, comme l'atteste le programme de constructions, d'une ampleur inégalée, prévu dans la loi d'orientation pour la justice de septembre 2002.

Exprimant son refus de se prononcer sur le fond, M. René Dosière a critiqué le procédé et annoncé que le maintien de l'article conduirait son groupe à voter contre le projet de loi. La Commission a néanmoins rejeté son amendement, ainsi que l'amendement n° 1 présenté par Mme Christine Boutin supprimant le dernier alinéa de l'article, qui prévoit une dérogation du principe de l'encellulement individuel en cas de surencombrement des établissements.

La Commission a ensuite adopté l'article 24 sans modification.

Après l'article 24

La Commission a rejeté un amendement de M. René Dosière instaurant un contrôle médical tous les dix ans pour les conducteurs, déjà satisfait par un amendement de M. Christian Estrosi adopté précédemment.

Elle a ensuite été saisie d'un amendement du même auteur instaurant un contrôle de la sécurité des infrastructures routières réalisées dans les trois ans suivant la publication de la loi. Le rapporteur a indiqué que le dernier Conseil interministériel de sécurité routière avait fait de la sécurisation des infrastructures une priorité ; il a rappelé qu'avait été mis en place à cet effet un contrôle de sécurité des nouveaux projets routiers, ainsi qu'un audit portant sur les infrastructures existantes. Il a ajouté qu'une telle disposition, déjà présentée par M. Dosière lors de la précédente législature sur le projet portant diverses mesures de sécurité routière, avait fait l'objet d'une discussion en commission mixte paritaire pour être finalement rejetée au motif qu'elle créait des contraintes excessives à l'égard des élus locaux sans définir des normes minimales de sécurité.

M. René Dosière a rappelé que le texte élaboré en commission mixte paritaire avait été, comme toujours, le fruit d'un compromis avec le Sénat et qu'il avait fallu à l'époque céder sur ce point pour parvenir à un accord en dépit des divergences résultant des majorités respectives de l'Assemblée nationale et du Sénat. Il a considéré que la conjoncture avait changé, compte tenu notamment des perspectives de transferts du réseau routier national aux régions. Souhaitant que, dans cette perspective, puissent être définies des normes de sécurité pour tous les gestionnaires de voirie, il a plaidé pour l'instauration d'une politique des infrastructures. M. Emile Blessig a fait part de son accord sur l'amendement présenté par M. René Dosière, jugeant indispensable l'édiction de normes à l'échelle nationale pour garder une cohérence des règles de sécurité sur l'ensemble du territoire. Tout en reconnaissant la nécessité de définir des normes minimales de sécurité, le rapporteur a considéré que l'audit mené à l'heure actuelle sur les voiries existantes pourrait apporter des réponses satisfaisantes. La Commission a rejeté l'amendement.

Chapitre VI

Dispositions relatives à l'outre-mer

Article 25

Application à Mayotte

Cet article applique à Mayotte l'ensemble du projet de loi, à l'exception de quelques dispositions qui modifient des textes initialement non applicables à la collectivité départementale : il s'agit en l'occurrence de l'article 13 qui modifie le code de la voirie routière, des articles 18 et 19 qui modifient la loi d'orientation pour les transports intérieurs et du paragraphe III de l'article 17 qui concerne les pouvoirs des agents de la DGCCRF décrits au livre II du code de la consommation.

Pour le reste, à savoir, à titre principal, les dispositions relatives au code de la route, l'article 25 prévoit une application intégrale, l'ensemble du code étant déjà applicable moyennant quelques adaptations d'ordre terminologique.

Ne sont cependant pas mentionnés comme étendus les articles modifiant le code pénal, puisque l'article 3 de la loi n°2000-616 du 11 juillet 2001 relative à Mayotte énumère désormais les domaines d'application immédiate, qui ne nécessitent donc pas de mention d'applicabilité, parmi lesquels figurent le droit pénal et la procédure pénale.

Les paragraphes II et III de l'article prévoient également l'application à Mayotte des principales dispositions de la loi n° 2003-87 du 3 février 2003 relative à la conduite sous l'emprise des stupéfiants, qui n'avaient pas été étendus jusqu'alors.

Le rapporteur a proposé un amendement, qui a été adopté par la Commission, donnant une nouvelle rédaction des deux premiers alinéas de l'article (amendement n° 86): l'énumération des articles applicables ayant été établie sur la base d'un avant-projet de loi, il est nécessaire de revoir cette énumération compte tenu de la nouvelle numérotation. En outre, la mention des dispositions applicables de plein droit en vertu de l'article 3 de la loi du 11 juillet 2001 est superfétatoire et source de confusion, dans la mesure où les textes adoptés récemment modifiant le code pénal ou le code de procédure pénale et s'appliquant en conséquence de plein droit à Mayotte, en vertu de l'article 3 précité, ne contiennent pas cette mention.

La Commission a ensuite adopté l'article 25 ainsi modifié.

Après l'article 25

(art. 837 du code de procédure pénale)


Coordination outre-mer

La Commission a adopté un amendement de coordination présenté par le rapporteur (amendement n° 87).

Article 26

Application en outre-mer et habilitation du Gouvernement
au titre de l'article 38 de la Constitution

Les trois paragraphes de cet article prévoient une habilitation du Gouvernement, en application de l'article 38 de la Constitution, à prendre par ordonnances les mesures législatives nécessaires à l'application et l'adaptation du présent projet de loi ainsi que des dispositions relatives à la conduite sous l'influence de substances ou plantes classées comme produits stupéfiants en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis-et-Futuna.

Le code de la route dans ces territoires n'est que très partiellement applicable, compte tenu des compétences des autorités territoriales en la matière ; seules sont applicables, moyennant des adaptations et, bien entendu, une mention expresse d'applicabilité, les dispositions relatives à la recherche de l'alcoolémie ainsi que celles sur l'immobilisation du véhicule.

Dans le même esprit, la présente habilitation aura pour objet de veiller à rendre applicables les dispositions du projet de loi, sans empiéter sur les compétences territoriales. Le premier alinéa de l'article 38 de la Constitution dispose à cet effet que « le Gouvernement peut, pour l'exécution de sons programme, demander au Parlement l'autorisation de prendre par ordonnances, pendant un délai limité, des mesures qui sont normalement du domaine de la loi. » Ainsi, à la demande du Gouvernement, le Parlement peut se dessaisir momentanément de sa compétence, à la condition comme l'a rappelé le Conseil constitutionnel, « [d']indiquer avec précision au Parlement, lors du dépôt d'un projet de loi d'habilitation et pour la justification de la demande présentée par lui, quelle est la finalité des mesures qu'il propose ».

Dans le projet de loi présenté, le domaine de l'habilitation est précisément déterminé et la finalité clairement définie : l'adaptation du droit outre-mer constitue, en effet, un « classique » des lois d'habilitation.

Le paragraphe I de l'article indique quelles autorités seront consultées sur les projets d'ordonnance, en renvoyant aux lois statutaires : en Polynésie française, l'article 32 de la loi organique n° 96-312 du 12 avril 1996 dispose que le conseil des ministres est obligatoirement consulté sur les dispositions réglementaires prises par l'État dans le cadre de sa compétence et touchant à l'organisation particulière de la Polynésie française. Le conseil des ministres dispose d'un délai d'un mois pour rendre son avis. En Nouvelle-Calédonie, en application de l'article 90 de la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999, le congrès dispose d'un mois pour rendre son avis sur les projets qui modifient ou suppriment des dispositions spécifiques à la Nouvelle-Calédonie (quinze jours en cas d'urgence). Le délai expiré, l'avis est réputé donné. Enfin, le 2° du paragraphe I propose que l'assemblée territoriale des îles Wallis-et-Futuna soit consultée pour les dispositions qui concernent ces îles. La Commission a adopté un amendement du rapporteur prévoyant un délai d'un mois pour la consultation de l'assemblée territoriale (amendement n° 88).

Le paragraphe II prévoit en outre une consultation de l'assemblée territoriale de Polynésie française.

Conformément à l'article 38 de la Constitution, le paragraphe III de l'article fixe un double délai :

-  le délai pendant lequel le Gouvernement pourra prendre la ou les ordonnances est fixé à douze mois à compter de la promulgation de la présente loi.

-  le délai dans lequel le Gouvernement devra avoir déposé le projet de loi portant ratification de ces ordonnances, sous peine de caducité, est fixé à dix-huit mois suivant leur publication. La Commission a adopté un amendement réduisant ce délai de dépôt à dix-huit mois suivant la promulgation de la présente loi (amendement n° 89).

La Commission a ensuite été saisie d'un amendement de M. Michel Buillard étendant à la Polynésie française, sans recourir à l'habilitation, la loi du 3 février 2003 relative à la conduite sous l'influence de stupéfiants. Soulignant les résultats catastrophiques de la Polynésie française en matière de sécurité routière, M. Michel Buillard a contesté l'utilisation des ordonnances compte tenu de l'urgence qui s'attache à réprimer la conduite sous l'emprise de stupéfiants. Tout en déclarant partager les préoccupations de l'auteur de l'amendement, le rapporteur a indiqué qu'une nouvelle rédaction devrait être trouvée d'ici la réunion tenue en application de l'article 88 du Règlement, l'amendement ne faisant pas mention, notamment, des possibilités d'immobilisation du véhicule. Après que M. Buillard eut fait part de son accord pour élaborer une nouvelle rédaction, la Commission a rejeté l'amendement.

Elle a ensuite adopté l'article 26 ainsi modifié.

Titre du projet de loi

La Commission a rejeté un amendement de M. René Dosière supprimant le terme de violence routière, qu'il a jugé excessif, dans le titre du projet de loi. Le rapporteur a indiqué que ce terme décrivait bien la réalité quotidienne des accidents de la circulation routière, répondait aux aspirations des associations et traduisait le nouvel état d'esprit dans lequel on abordait désormais les questions de sécurité routière. M. Jean-Paul Garraud a admis que le terme de violence impliquait l'acte volontaire de nuire, et n'était donc pas approprié à la thématique des accidents de la route. Relevant au contraire que le code pénal comprenait déjà des infractions pour violence involontaire, le président Pascal Clément a mis en avant l'aspect pédagogique du titre retenu pour le projet.

La Commission a adopté l'ensemble du projet de loi ainsi modifié.

En conséquence, la commission des Lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République vous demande d'adopter le projet de loi (n° 638) renforçant la lutte contre la violence routière, modifié par les amendements figurant au tableau comparatif ci-après

N° 0689 - Rapport sur le projet de loi renforçant la lutte contre la violence routière (M. Richard Dell'Agnola)

1 () Taux d'alcoolémie compris entre 0,5 et 0,8 g/l.

2 () Dépassement de 50 km/h ou plus de la vitesse maximale autorisée

3 () Ces véhicules sont appelés « muscadettes » dans les pays de la Loire.

4 () Amende forfaitaire pour les requêtes et amende forfaitaire majorée pour les réclamations.

5 () Sur cette question, voir commentaire de l'article 18 du projet de loi.

6 () Vitesse limitée à 110 km/h sur les autoroutes et 80 km/h sur les routes, réduction de trois points en cas de dépassement de la vitesse inférieur à 40 km/h.

7 () R. 318-4 du code de la route.

8 () R. 321-4 du code de la route.

9 () R. 221-1 du code de la route.

10 () L'article L. 233-2 sanctionne d'une peine de trois mois d'emprisonnement et de 25 000 F d'amende le fait pour tout conducteur de refuser de se soumettre à toutes vérifications prescrites concernant son véhicule ou sa personne.

11 () Loi n° 2001-1062 relative à la sécurité quotidienne (article 17) ; loi n° 2003-87 du 3 février 2003 relative à la conduite sous l'influence de substances ou plantes classées comme stupéfiants.

2ème partie du rapport


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