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Assemblée nationale

Compte rendu
analytique officiel

Séance du mardi 6 novembre 2007

Séance de 16 heures 15
Commission des finances, de l'économie générale et du Plan
Commission des affaires culturelles, familiales et sociales
Présidence de M. Didier Migaud, Président, M. Pierre Méhaignerie, Président

– Commission élargie : Solidarité, insertion et égalité des chances

La séance est ouverte à seize heures quinze.

M. Didier Migaud, président de la commission des finances, de l’économie générale et du plan  – Avec M. Pierre Méhaignerie, nous avons le plaisir d’accueillir une importante délégation gouvernementale – M. Bertrand, Mme Bachelot, Mme Boutin, Mme Létard, M. Hirsch – dans le cadre de l’examen de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances », mission importante tant sur le plan budgétaire que sur le plan politique.

M. Bertrand m’a prévenu de son départ probable vers 18 heures.

Comme convenu dans le cadre de ces commissions élargies, nous entendrons tout d’abord les observations et les réflexions des rapporteurs spéciaux et pour avis. Les ministres répondront ensuite aux questions qui les concernent avant que nous entendions les orateurs des différents groupes et les questions des parlementaires. Le rapporteur spécial est M. Jean-Marie Binetruy et les deux rapporteurs spéciaux sont Mme Valérie Boyer pour la solidarité, l’insertion et l’égalité des chances et Mme Bérangère Poletti pour le handicap et la dépendance.

M. Jean-Marie Binetruy, rapporteur spécial de la commission des finances – Je salue le travail de mon prédécesseur, Mme des Esgaulx, qui m’a permis, à travers son excellent rapport de l’an dernier, de prendre contact avec une mission qui ne m’était pas familière. Je remercie également M. le président et M. le rapporteur général de la commission des finances pour leur confiance ainsi que les administrateurs et, en particulier, Mme Christelle Thomas.

Cette mission comporte sept programmes : le programme 177, prévention de l’exclusion et insertion des personnes vulnérables ; le programme 106, action en faveur des familles vulnérables ; le programme 157, handicap et dépendance – qui représente, avec plus de 8 milliards, les deux tiers du budget de la mission ; le programme 183, protection et maladie, qui recouvre trois actions – CMUC, AME et fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante – ; le programme 137, égalité entre les hommes et les femmes ; le programme support 124, conduite et soutien des politiques sanitaires et sociales, qui regroupe les dépenses de personnels et de fonctionnement de quatre missions – solidarité, insertion et égalité des chances, mission santé, mission veille et sécurité sanitaire, mission sécurité sanitaire ; il regroupe aussi les dépenses des services déconcentrés de l’administration sanitaire et sociale amenés à appliquer la mission Immigration, asile et intégration ; le nouveau programme 304, enfin : lutte contre la pauvreté.

Cette mission connaît une évolution intéressante sous l’effet conjugué de mesures législatives ou gouvernementales récentes - loi travail, emploi et pouvoir d’achat du 21 août 2007, loi du 5 mars 2007, loi de cohésion sociale, loi sur l’égalité des chances - et d’une nouvelle définition du périmètre des compétences ministérielles dans le Gouvernement. Par ailleurs, le budget de cette mission doit être exécuté par trois ministres, deux secrétaires d’État et un haut commissaire, ce qui doit être un record. Les crédits sur lesquels la représentation nationale devra se prononcer – plus de 12 milliards – ne représentent qu’une partie de l’effort de la nation pour la solidarité puisqu’il faudrait y ajouter les exonérations fiscales ainsi que les efforts des associations et le financement des collectivités. Lors des auditions, j’ai essayé d’obtenir, sans succès, le montant global de cet effort pour chacune de ces missions. Sans doute serait-il aujourd’hui intéressant d’en donner au moins une évaluation.

Quatre réflexions me viennent à l’esprit : la complexité des dispositifs, la multitude d’intervenants, la difficile conciliation de la solidarité et de l’équilibre budgétaire, la difficulté des indicateurs à renseigner et donc, la difficile appréciation des objectifs.

Madame Létard, l’application de la loi du 11 février 2005 s’accompagne de la montée en charge de la prestation de compensation du handicap. Quelles sont les garanties d’un passage correct en PCH, sans rupture de charges pour les personnes handicapées ?

Les personnes handicapées en recherche d’emploi sont proportionnellement deux à trois plus nombreuses que les autres et elles mettent quatre fois plus de temps pour trouver un emploi. Un rapport d’audit de modernisation relatif à l’allocation d’adulte handicapé publié en 2006 avait fait état de l’absence de stratégie d’insertion dans l’emploi des personnes handicapées. Quelles sont les mesures prises ou envisagées pour répondre à ces obstacles ?

Le défenseur des enfants joue un rôle important. Sa présence est assurée par des correspondants territoriaux qui exercent leur activité à titre bénévole et ne bénéficient que d’une indemnité forfaitaire destinée à compenser les frais qu’ils engagent pour assurer leur mission. Ne peut-on leur accorder une exonération de charge et d’impôt sur le revenu au titre des indemnités perçues ?

M. Xavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité – Oui, avec un support législatif.

M. Jean-Marie Binetruy, rapporteur spécial – L’apurement de la dette de l’État envers la sécurité sociale, pour un montant de 5 milliards, Madame la Ministre de la Santé, est un point capital du PLF 2008. Sur ce total 920 millions concernent la dette au titre de l’AME pour 2006. Dans le prolongement de cet effort inédit, 180 millions de dotations supplémentaires sont prévus, ce qui laisse espérer qu’aucune dette nouvelle n’apparaîtra en 2008. Pour autant, cela ne règle pas la dette de 250 millions au titre de l’exercice de 2007. Le Gouvernement prendra-t-il des mesures en ce sens ?

Les 413 millions prévus pour l’AME reposent sur une hypothèse d’économies qui passeraient par l’extension du contrôle médical aux bénéficiaires de l’AME, par la prise en charge limitée des médicaments princeps quand un générique existe, et par l’instauration d’un ticket modérateur. Un rapport d’audit ayant émis des réserves sur le ticket modérateur, je souhaiterais savoir ce qu’entend faire le Gouvernement.

Monsieur le Haut commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté, le PLF pour 2008, conformément à la loi TEPA, prévoit une dotation de 25 millions au titre de l’expérimentation du RSA. Le choix des départements candidats pour la seconde vague devait être finalisé au 1er novembre. Je souhaiterais savoir quel est l’état d’avancement du dispositif. Enfin, le Président de la République vous a confié l’organisation d’un Grenelle de l’insertion : quels en sont les axes prioritaires et le calendrier ?

Madame la ministre du logement et de la ville, 2008 consacre l’entrée en vigueur du droit au logement opposable. Le plan d’action renforcé en faveur des sans abris sera poursuivi. Mais je me fais le relais des inquiétudes d’associations, qui considèrent que vos engagements en faveur notamment des moyens budgétaires, ne sont pas respectés. Je veux aussi souligner les difficultés spécifiques que rencontrent les maisons relais créées avant 2007, en raison d’un financement insuffisant. Quels sont les efforts fournis par le Gouvernement sur ce point et est-il envisageable de stimuler le financement privé en matière d’hébergement ?

Mme Valérie Boyer, rapporteure pour avis de la commission des affaires culturelles pour la solidarité, l’insertion et l’égalité des chancesJ’ai centré mon rapport sur la CMU, et plus spécifiquement sur les mesures de contrôle et de lutte contre les fraudes. Le PLFSS, amendé, comprend de telles mesures : nous avons notamment acté le principe de l’inscription obligatoire des bénéficiaires de la CMUC dans les parcours de soins. Mais il reste encore à faire et je suis convaincue que notre assemblée devrait être associée en amont à l’élaboration du plan de lutte contre les fraudes, confié à Eric Woerth.

Le lien entre la CMUC et le RMI donne lieu à des abus évidents. Les CPAM, dès qu’elles sont informées du dépôt d’une demande de RMI, proposent la CMUC. Mais l’information en retour, si le RMI n’est pas accordé, n’est pas établie. La CMUC peut donc être attribuée à des personnes non allocataires du RMI, et par ailleurs de bonne foi. Qu’entendez-vous faire pour y remédier ?

D’autres mesures pourraient être prises pour faciliter l’établissement et le contrôle des déclarations de ressources pour l’accès à la CMU. Les caisses des regimes de base maladie qui gèrent l’essentiel de la CMUC pourraient bénéficier, comme les CAF, d’un accès direct aux fichiers du fisc. Il conviendrait de retenir, comme période de référence, l’année civile et non les douze derniers mois. Il faudrait aussi procéder à la révision des dispositions réglementaires permettant d’obtenir la CMUC sur déclaration sur l’honneur. Mais nous pourrions aller plus loin encore, obligeant les organismes de sécurité sociale à demander des pièces justificatives, sauf en cas de force majeure.

Qu’envisage le Gouvernement pour rendre plus accessible l’ACS, l’aide à la complémentaire santé ?

La question des effets de seuil et des trappes à inactivité n’est pas résolue, même si elle est mieux connue, notamment grâce aux travaux menés par Mme Létard. Les dispositifs locaux d’aide sociale sont divers – on en a dénombré 250 différents dans dix localités – et de générosité très variable, puisqu’ils peuvent majorer les transferts nationaux de 6 à plus de 60 %. Ne conviendrait-il pas de répertorier ces aides ?

Une réflexion est à mener sur les conditions de prise en compte du patrimoine, et en particulier du logement, pour l’évaluation des ressources. Le système du forfait logement peut en effet conduire à des situations abusives. Enfin, Marseille fait partie des zones d’expérimentation du RSA et je souhaiterais en savoir davantage sur ce dispositif.

Mme Bérengère Poletti, rapporteure pour avis de la commission des affaires culturelles pour la handicap et la dépendanceLes crédits handicap et dépendance sont pour l’essentiel dévolus aux versement de l’AAH pour 5,7 milliards et à l’incitation à l’insertion professionnelle des handicapés dans une entreprise ou une société de services d’aides par le travail pour 2,7 millards, le financement de l’action de compensation du handicap empruntant essentiellement les canaux de la CNSA et des compléments départementaux.

La revalorisation de l’AAH cette année est de 2,1 %. Je souhaite savoir comment le Gouvernement entend parvenir à l’engagement présidentiel d’une augmentation de 25% des ressources.

Mon propos, cette année, porte sur la maladie d’Alzheimer, dont la France est, semble-t-il, le seul pays à avoir pris la mesure. Les deux derniers plans de 2001 et 2003 n’ont pas suffisamment pris en compte la détresse des aidants, souvent touchés par la dépression. Comment le Gouvernement entend-il permettre un diagnostic plus rapide de la maladie et un accompagnement immédiat du malade et de ses proches ? Des actions d’information et de formation des aidants seront-elles mises en place ? Quelles sont les propositions du Gouvernement pour améliorer la prise en charge à domicile ? Y aura-t-il un fléchage des crédits, issus notamment des franchises, destinés aux structures d’accueil ? Actuellement, deux tiers, voire trois quarts des lits des EPAHD sont occupés par des personnes atteintes de dégénérescence cérébrale. Quels sont donc les efforts que l’État consentira afin de permettre une meilleure formation des personnels et un environnement adapté à ces pathologies ?

Les experts contestent l’efficacité des quatre molécules utilisées actuellement. L’espoir se fonde donc sur la recherche. Sans progrès concernant le traitement et la prévention de la maladie d’Alzheimer, 1,3 millions de personnes seront atteintes en 2020. Quels sont les projets du Gouvernement en la matière ? Ne faut-il pas un effort européen ?

Enfin, cette maladie repose la question de la création d’un cinquième risque. Où en est la réflexion du Gouvernement dans ce domaine ?

M. Xavier Bertrand, ministre du travail Monsieur Binetruy, Je suis favorable à la mesure concernant les correspondants du défenseur des enfants. Peu coûteuse, elle pourrait être instituée grâce à une proposition ou un projet de loi.

Madame Boyer, même s’il n’est pas exempt de critiques, le forfait logement a fait des progrès. Les montants pour l’API et le RMI sont désormais unifiés. Une réforme d’ensemble aurait des conséquences importantes pour de nombreux allocataires, et il convient donc d’examiner cette question avec M. Hirsch et Mme Boutin. S’agissant des fraudes, la procédure « train de vie » permettra de sanctionner les comportements les plus abusifs – je pense notamment aux occupants de logements fastueux ou aux propriétaires de résidences secondaires. Plus généralement, nous avons réfléchi au renforcement du pouvoir de contrôle et de sanction des administrations, au croisement des fichiers et à la mise en place d’un fichier national des allocataires de la CNAF.

J’ai par ailleurs demandé au directeur général de la CNAF que les contrôles relatifs à l’allocation de parent isolé soient faits de façon inopinée et non plus en avertissant les allocataires à l’avance.

Mais il faut aller plus loin. Au-delà de la Délégation nationale de lutte contre les fraudes voulue par le Président de la République, il faut en particulier décliner le comité de lutte contre les fraudes sur tout le territoire et en faisant en sorte que les agents des caisses primaires, des caisses d’allocation familiales et des centres des impôts se parlent et travaillent ensemble. En la matière, les méthodes de travail sont le ressort essentiel d’une action efficace. Je sais qu’il y a beaucoup à faire car j’ai bien vu, lorsque j’étais ministre de la santé et que je me suis engagé dans la lutte contre la fraude, que je ne m’attaquais en fait qu’à la partie visible de l’iceberg. Pourtant, si l’on veut renforcer la confiance des citoyens dans notre modèle social, il faut faire en sorte que les fraudes reculent et que ceux qui fraudent prennent conscience que la volonté politique mais aussi les outils juridiques et informatiques font qu’il ne leur est désormais plus possible de pratiquer comme par le passé.

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé, de la jeunesse et des sports En effet, Monsieur Binetruy, les crédits pour 2007 de l’aide médicale d’État étaient insuffisants, c’est pourquoi j’ai demandé une inscription complémentaire au collectif budgétaire. La réponse dépendra de l’équilibre général du budget 2007.

Vous l’avez souligné, un effort important est fait avec 920 millions remboursés à l’assurance maladie et une augmentation de 180 millions de la dotation qui nous rapproche de la réalité. En 2008, le rebasage de la dotation budgétaire s’accompagnera de mesures de rationalisation du coût de la prestation. Plusieurs mesures législatives et réglementaires renforceront le contrôle de l’efficience des dépenses. Il est en particulier prévu, dans le PLF et dans le PLFSS, d’aligner les droits et les devoirs des bénéficiaires de l’AME sur le droit commun ainsi que de mieux contrôler et gérer l’ouverture du dispositif. Dans le PLF il s’agit de ne pas prendre en charge les médicaments en cas de refus du bénéficiaire de l’AME d’accepter la substitution d’un produit générique. Dans le PLFSS, le contrôle médical est étendu aux bénéficiaires de l’AME. Des mesures de gestion sont destinées à renforcer le contrôle de l’accès au bénéfice de l’AME et la lutte contre la fraude. Il sera ainsi établi en 2008 un titre non photocopiable et comportant la photographie de chaque bénéficiaire. Nous entendons également promouvoir une harmonisation des pratiques de contrôle des caisses, notamment sur les ressources et sur les adresses. Mes services étudient actuellement une mesure réglementaire instaurant une participation des bénéficiaires à leurs dépenses de soins, sous la forme proportionnelle d’un ticket modérateur ou sous une forme forfaitaire.

Valérie Boyer m’a interrogée sur les abus en matière de couverture maladie universelle complémentaire. À ce jour aucun élément ne permet d’affirmer que la fraude atteint un niveau significatif : le nombre des bénéficiaires est largement inférieur aux prévisions et le niveau moyen des dépenses est conforme à ce que l’on pouvait attendre. Le risque de fraude est moindre parce qu’il s’agit d’une prestation en nature.

Pour autant, le Gouvernement ne saurait admettre aucune utilisation frauduleuse du dispositif. Les outils de lutte contre la fraude ont été renforcés. Une amende était prévue dès l’origine, ainsi que des échanges d’informations entre certains organismes. Ces derniers ont été élargis à l’administration fiscale et à d’autres organismes de sécurité sociale, ainsi que, dans le PLFSS 2008, aux établissements bancaires. Depuis la loi de financement de 2006, les organismes de sécurité sociale ont l’obligation de déposer plainte avec constitution de partie civile quand la fraude est supérieure à trois fois le plafond mensuel de la sécurité sociale. Le PLFSS 2008 étend le régime de pénalités en cas de responsabilité des assurés dans l’octroi indu de la prestation. Je vous tiendrai informés des résultats de l’expérimentation de croisement de fichiers qui est conduite actuellement.

Vous m’avez également interrogée sur la possibilité d’un alignement de la période de référence de la CMUC sur celle de l’impôt sur le revenu. Il est vrai que le décalage entre les déclarations rend difficile le contrôle des ressources. Toutefois, les échanges d’informations avec la Direction générale des impôts permettent aux caisses d’assurance maladie de déceler les incohérences. Une modification de la période de référence est à l’étude pour améliorer l’efficacité des contrôles. Toutefois, les différences entre les ressources prises en compte font que, même en harmonisant les périodes de référence, les caisses ne seraient pas en mesure de contrôler l’ensemble des ressources déclarées ou non par les bénéficiaires de la CMUC. Pour ces raisons, un peu de temps est nécessaire pour mener une étude plus approfondie.

S’agissant de la déclaration sur l’honneur, je rappelle que la disposition relative aux pièces justificatives introduite en loi de financement pour 2006 vise à donner toute latitude aux caisses pour demander l’ensemble des justificatifs nécessaires à l’examen des droits à une prestation. Cette disposition se combine avec celle préexistante qui prévoit la possibilité d’une déclaration sur l’honneur du demandeur qui ne dépasse pas le plafond de ressources lorsqu’il n’est pas susceptible de fournir les éléments justificatifs de ses revenus. Une circulaire rappellera aux caisses qu’elles doivent demander tous les justificatifs requis, mais sans refuser pour autant la fourniture exceptionnelle d’une déclaration sur l’honneur.

En ce qui concerne l’amélioration de l’aide à la complémentaire santé, je rappelle que cette aide a déjà été relevée en 2006 de 33 % pour les moins de soixante ans et de 60 % pour les soixante ans et plus. Le plafond de ressources a également été relevé en 2007. Mais tout ceci n’a pas entraîné une augmentation de l’attraction du dispositif comme certains avaient pu le penser. Selon des enquêtes, l’absence de demande d’aide tient davantage au manque d’information et à une mauvaise compréhension du système qu’à un niveau d’aide insuffisant. Des actions de communication émanant des caisses sont en cours afin de mieux informer le public susceptible d’être éligible. L’élargissement de l’accès à l’ACS paraît indispensable mais il est nécessaire préalablement d’améliorer l’information des bénéficiaires potentiels. Ce n’est qu’après avoir fait le bilan de telles actions que l’on pourra procéder à cet élargissement.

Mme Poletti m’a interrogée, concernant la maladie d’Alzheimer, sur les aidants et sur la recherche. Je ne répondrai bien évidemment que pour ce qui concerne le pôle santé. La présentation, dans quelques jours, du rapport de Joël Ménard permettra d’aller plus loin mais le Président de la République s’est déjà fait l’écho du rapport d’étape. La formation des intervenants et des aidants sera une des orientations du plan. L’amélioration importante du crédit impôt recherche profitera à l’industrie pharmaceutique qui porte les programmes sur les médicaments. J’ai également demandé qu’une part importante des programmes hospitaliers de recherche clinique soit consacrée à la maladie d’Alzheimer. Enfin, à l’occasion de la présidence française de l’Union, je présiderai le Conseil santé et je souhaite à cette occasion faire de la recherche sur cette maladie un des axes forts de notre présidence.

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales  Quand un hebdomadaire reconnu chiffre la fraude à 30 milliards, le moins que le Gouvernement et le Parlement puissent faire c’est de ne pas laisser l’opinion publique sans réponse. Je souhaite donc que nous nous emparions véritablement de ce sujet.

Mme Christine Boutin, ministre du logement et de la ville – Je veux tout d’abord rappeler mon attachement à la loi sur le droit au logement opposable : j’avais déposé, comme députée, une proposition de loi à ce propos et, lorsqu’elle a été reprise par le Gouvernement, j’en ai été la rapporteure en séance publique. Je ne pensais toutefois pas alors que j’aurais moi-même à mettre en œuvre cette loi difficile. Mais ma détermination est absolue.

J’ai déjà dit à quel point il était difficile de respecter le calendrier et j’y reviendrai la semaine prochaine lors de la commission élargie consacrée plus spécifiquement au logement. Je puis toutefois vous dire dès maintenant que le calendrier est parfaitement respecté et qu’il continuera à l’être. En particulier, les commissions départementales de médiation seront effectivement instituées le 1er janvier prochain. On avait pourtant dit que ce serait impossible mais j’ai pu obtenir le budget nécessaire et même, ce qui n’est pas courant dans le contexte actuel, des créations de postes.

Un certain nombre d’associations que je respecte et avec lesquelles je travaille depuis des années pensent que seule une augmentation des crédits peut permettre d’aller de l’avant. Pour ma part, je considère que la principale difficulté tient à la construction et qu’il faut donc en premier lieu que nous disposions du foncier nécessaire. Les objectifs d’hébergement fixés par le PARSA seront atteints fin décembre, mais on peut bien sûr se demander si cela sera suffisant. En tout cas, la ministre ne demande pas de moyens supplémentaires.

Un retard a, en revanche, été pris en ce qui concerne les maisons relais qui permettent une réadaptation à la vie sociale et qui visent à faire retrouver tous les aspects de la citoyenneté à des personnes en très grande exclusion. Ce concept intéressant répond à un véritable besoin mais il demande plus de temps que les autres. Nous avons pu réaliser la moitié de ce qui avait été demandé et l’autre moitié le sera l’an prochain. Avec des crédits en augmentation de 55,2 %, nous disposons des moyens de rattraper notre retard.

La participation de l’État aux frais de fonctionnement est passée de 8 à 12 puis à 16 euros pour les nouvelles créations. Certains se demandent pourquoi on ne fait pas bénéficier tout le monde de 16 euros, c’est tout simplement parce que les maisons qui sont déjà installées n’ont pas les mêmes besoins que les nouvelles créations. Mais les préfets se verront attribués une dotation globale qu’il leur reviendra d’adapter en fonction des besoins.

S’agissant de la nécessité de mobiliser le parc privé pour répondre aux besoins d’hébergement, à l’occasion de la décentralisation du ministère à Lyon, nous avons rassemblé l’ensemble des partenaires et des accords ont déjà été signés ou sont en voie de l’être pour réserver 4 000 logements dans le parc privé et 3 000 HLM.

Nous réfléchissons à des aménagements fiscaux qui pourraient figurer dans la loi de règlement afin d’aider les associations à trouver des propriétaires qui accepteraient de sous-louer à des loyers sociaux. À coté des problèmes d’hébergement et d’hébergement d’urgence, le plus grave est certainement le manque de fluidité dans l’ensemble de la chaîne du logement.

Mme Valérie Létard, secrétaire d’État chargée de la solidarité – Je répond d’abord aux questions de M. Binetruy. S’agissant du financement du forfait d’auxiliaires de vie auquel la prestation de compensation du handicap se substitue depuis la loi de 2005, les 15 millions inscrits en loi de finances initiale pour 2008 contre 55 millions en 2007 suffiront. En effet, ces forfaits concernaient les personnes les plus handicapées et ce sont les premières qui devraient basculer vers la PCH. Il m’a interrogée ensuite sur les moyens d’accompagner vers l’emploi les personnes handicapées, qui ont un taux de chômage deux fois supérieur à la moyenne. Un premier obstacle est l’accessibilité des locaux. Nous travaillons avec l’AGEFIPH et le FIPHFP à élargir les modalités de financement de travaux d’accessibilité en les conditionnant au recrutement de personnes handicapées. Un second obstacle tient à l’accès à la formation initiale. Pour la rentrée 2008, 2 700 postes supplémentaires d’auxiliaires de vie et 1 250 nouvelles places de services d’éducation spéciale et de soins à domicile (SESSAD) seront créés afin de soutenir l’intégration des enfants handicapés à l’école ordinaire. Par contrat signé avec Mme Pécresse, il est prévu 1 000 inscriptions d’étudiants handicapés à l’université. S’agissant de l’accès des travailleurs handicapés à la formation professionnelle continue, nous souhaitons conclure un partenariat avec les régions, l’AFP, les organismes collecteurs, l’AGEFIPH et le FIPHFP. Enfin 1 000 places seront consacrées à des projets expérimentaux d’ESAT « hors les murs » afin de créer des passerelles entre milieu de travail adapté et milieu de travail ordinaire. S’agissant de l’insertion des bénéficiaires de l’AAH, une expérimentation a été mise en place à la suite de l’audit de modernisation mené auprès de 4 000 bénéficiaires, afin d’offrir aux personnes concernées un bilan d’employabilité et un soutien renforcé à la recherche d’emploi. Le Gouvernement souhaite approfondir cette démarche dans le cadre d’un groupe de travail spécifique mis en place au sein du comité de suivi de la réforme de la politique du handicap créé le 23 octobre dernier et dont le propositions sont attendues pour la fin du premier semestre 2008.

Mme Poletti m’a interrogée sur la revalorisation de l’AAH. Le Président de la République a pris l’engagement de le faire sur cinq ans. Mais il est nécessaire d’avoir une approche plus globale des ressources des personnes handicapées : l’AAH n’en est qu’un élément à côté des ressources d’activité et des droits connexes. Nous ferons des propositions dans le cadre du comité de suivi afin qu’une revalorisation de l’AAH ne décourage pas ceux qui peuvent reprendre un emploi. Nous voulons également mener cette réflexion avec les conseils généraux et les associations et un groupe de travail sera constitué, qui établira un bilan en 2008.

La prise en charge des personnes âgées dépendantes et des malades d’Alzheimer est le chantier prioritaire du Président de la République. Un effort important est consenti en faveur des personnes âgées dépendantes dans le PLFSS, avec la création en 2008 de 1 600 places dans les EHPAD et 3 200 places d’accueil de jour et d’hébergement. S’agissant de l’accueil de jour, il y a quelques difficultés pour créer effectivement toutes les places programmées. Nous avons pris plusieurs mesures afin de les résoudre. Une première difficulté est liée aux modalités de médicalisation et de tarification des prestations de soins dans les établissements de moins de 25 places autorisées, dont les accueils de jour autonomes. Elle a été levée par le décret du 10 février 2005 qui fournit à ces petites structures un budget prévisionnel pour les dépenses prises en charge par l’assurance maladie. D’autre part, dans les accueils de jour autonomes, le forfait soins des rémunérations des aides soignants est élargi à 70 %. Enfin, les décrets des 30 avril 2007 et 11 mai 2007 instituent un forfait transport pris en charge par l’assurance-maladie entre le domicile des patients et l’accueil de jour. Pour 2007 le montant plafond du forfait transport est fixé à 3 000 euros par place autorisée par an. Le PLFSS 2008 finance également le transport des malades atteints d’Alzheimer vers les accueils de jour.

En ce qui concerne l’hébergement temporaire, il est prévu pour la période 2008-2012 5 625 places pour un coût de 60 millions. Concernant la formation des aidants familiaux des personnes atteintes d’une maladie d’Alzheimer, des associations ont commencé à organiser des cycles de formation. Un appel à projet conjoint de la caisse nationale de solidarité pour l’autonomie, de la délégation interministérielle à l’innovation sociale et à l’économie sociale, de la délégation interministérielle à la famille et de la direction générale de l’action sociale a été lancé en janvier 2007 pour susciter des actions de sensibilisation, de soutien et de formation pour ces aidants. D’autre part, des formations sur les principales pathologies liées à la dépendance sont organisées pour les professionnels.

S’agissant du cinquième risque, le Président de la République a fixé le 18 septembre le cadre de la réforme. La perte d’autonomie est un enjeu essentiel des années à venir ; entre 2005 et 2015 le nombre de personnes âgées de plus de 85 ans passera de un à deux millions. Cette réforme crée un nouveau droit de la protection sociale et un droit universel à compensation. Elle repose sur la solidarité et la responsabilité. Les quatre objectifs sont de mieux prendre en charge la perte d’autonomie pour garantir le libre choix entre le maintien à domicile et le départ en établissement, de maîtriser le reste à charge pour les personnes âgées en maison de retraite, de nous interroger sur l’équilibre entre solidarité nationale et prévoyance individuelle et collective et d’amortir le financement de la dépendance dans la durée. Suite au rapport rendu hier par la CNSA, nous allons lancer la concertation avec tous les acteurs.

M. Martin Hirsch, haut commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté – Le RSA entre dans sa phase opérationnelle. La loi a été promulguée il y a deux mois et demi et depuis lors, tous les textes réglementaires ont été pris et l’informatique a été mise en place dans les CAF afin de se mettre au travail. Il est en effet important que tous se mobilisent puisque nous savons qu’il va falloir modifier les règles du jeu : plus il y aura de participants, mieux ce sera. L’expérimentation a commencé dans l’Eure, dans la zone de Louviers, avec 120 passages au RSA, soit 82 reprises d’activité, 26 prolongements d’activité et plusieurs passages d’un temps partiel à un temps complet. Il s’agit donc bien d’une dynamique de retour à l’emploi et nous espérons qu’il en ira de même ailleurs.

Un certain nombre de départements commenceront l’expérimentation en novembre, d’autres en décembre et nous allons voir s’il est possible d’élargir la liste afin que d’autres commencent en janvier. L’État a pris des engagements clairs sur sa participation à hauteur de 50 % et j’ai écrit à chacun des présidents de conseil général concernés pour le lui confirmer. Cependant ce sont bien les conseils généraux qui prennent l’initiative. Sur les dix-sept départements qui avaient manifesté avant le vote de la loi leur intention de mettre en place cette expérimentation, tous l’ont confirmée et ont obtenu l’autorisation de s’y engager. D’autres pouvaient se manifester jusqu’au 31 octobre : vingt à vingt-cinq l’ont fait et quelques-uns ont demandé des possibilités de dérogation aux contrats aidés. Il y a donc plus de départements volontaires que prévu.

J’ai demandé au Premier ministre son accord pour élargir la liste des départements pouvant expérimenter et compléter les crédits de 25  millions d’euros, sur la base d’une évaluation partagée et avec une clause de revoyure. L’État prendra également en charge une partie des frais liés à l’embauche de Rmistes convaincus de l’intérêt du retour au travail et qui pourront mener une action de sensibilisation.

Nous travaillons aussi à la réforme à venir des minima sociaux. Nous avons discuté avec l’ensemble des partenaires sociaux sans exception, de la CGT au MEDEF en passant par la FNSEA. Ils sont partants pour mettre en place le RSA avec nous. C’est très important, car nous voulons apporter une réponse à ceux qui veulent reprendre le travail mais également aux employeurs qui disent que personne ne répond à leurs annonces d’offres d’emploi. Nos principes sont simples. D’abord les prestations sociales ne doivent pas être un substitut au travail, sauf quand il est impossible, mais lui apporter un complément.

Il y a là un changement fondamental par rapport à la philosophie qui sous-tendait le RMI et la prime pour l’emploi.

Par ailleurs, nous essayons de mettre de l’ordre, de la logique et de la cohérence dans les multiples prestations auxquelles personne, et je dis bien personne, ne comprend plus rien. Pour cela, nous partons du principe que les aides allouées en complément du revenu en fonction de la situation familiale et de la situation professionnelle doivent être fondues en une seule. Cela ne dispense pas du « sur mesure », car la situation n’est pas la même selon que l’on trouve un travail à sa porte ou à 40 kilomètres de chez soi, que l’on est surendetté ou qu’on ne l’est pas, que l’on doive ou non faire garder un enfant pour pouvoir accepter un emploi. Enfin, il faut toujours garder à l’esprit que les personnes en grande difficulté sont toujours confrontées à plusieurs problèmes conjugués – logement, transport, habitat…. Si les politiques publiques sont à ce point cloisonnées que l’on règle admirablement un de ces problèmes mais pas les autres, on ne parviendra à rien.

Dans certains départements, il peut s’être écoulé cinq années sans que rien n’ait été proposé à un RMiste (exclamations). Mais ces départements font partie des volontaires pour les expérimentations, car ils veulent que cela change ! Au moment de faire signer un contrat, on observe d’ailleurs qu’un déclic se produit lorsque les personnes concernées admettent, parce qu’on le leur démontre, qu’elle ne vont pas perdre au change et qu’on ne les considère pas comme des naufragés mais comme de futurs employés.

Pour progresser, nous travaillons bien sûr de conserve, car rien ne serait moins constructif que de mettre trois mois pour mettre au point un contrat d’insertion. J’ai été frappé de constater le très grand nombre de RMistes qui devraient avoir la CMU et qui ne l’ont pas (Mme Martine Billard marque son approbation). Dans l’Eure, le premier département où le dispositif est en voie d’expérimentation, ce n’est plus le cas. Pourquoi ? Parce que nous avons fait travailler ensemble CAF et CPAM, sans compter l’ANPE et d’autres acteurs.

Les 23 et 24 novembre prochains aura lieu à Grenoble un colloque sur l’insertion qui traitera de l’expérimentation sociale. Il s’agit, chacun l’aura compris, de préparer une sorte de « Grenelle de l’insertion » pour éviter qu’en 2008, vingt ans après la création du RMI, on en soit encore à se demander où est le « I », où est l’insertion... Les questions qui se posent sont multiples. Il faut en effet définir ce qu’est être éloigné de l’emploi, à qui il faut offrir un soutien transitoire, pour qui l’on peut envisager un emploi durable, quelle est la logique des droits et des devoirs, où est le centre de gravité de l’insertion – l’État, les régions, les départements, les communes ? Il faut aussi parvenir à mesurer la performance, car il n’est plus tolérable de dénombrer quatre retours à l’emploi en tout et pour tout après qu’un département a versé une subvention de 500 000 euros pour favoriser l’insertion. Telles sont les questions qui seront abordées au cours de ce colloque. Ensuite, d’autres réunions auront lieu, où vous le souhaitez, et cette réflexion protéiforme permettra d’élaborer la réforme des minima sociaux et des contrats aidés, en s’appuyant sur une plus forte implication des employeurs.

M. Didier Migaud, président de la commission des finances – J’appelle les questions des représentants des groupes.

M. Guénhaël Huet – Le groupe UMP tient à souligner que ce budget est à la fois un budget de solidarité et un budget de responsabilité. L’augmentation globale des sept programmes concernés est de 3,5 %, cette hausse significative traduisant l’important effort voulu par le Gouvernement en faveur de la solidarité, de l’insertion et de l’égalité des chances. J’aimerais savoir quelle est la ventilation exacte des augmentations, notamment pour ce qui concerne la lutte contre la pauvreté. Toutefois cette implication marquée de la puissance publique suppose, en parallèle, la responsabilisation de ceux qui bénéficient de ces dispositifs, donc des contrôles suivis de sanctions en cas d’abus et de fraude. A cet égard, le croisement des fichiers est-il possible ?

J’aimerais enfin savoir comment ont été prises en comptes, lors de l’élaboration de ce budget, les conclusions des différents audits réalisés au cours des dernières années sur les minima sociaux.

M. Christophe Sirugue – Je prends la parole au nom du groupe socialiste. Mes questions porteront sur l’hébergement d’urgence, le RSA et la CMU.

S’agissant de l’hébergement d’urgence, le projet de loi de finances annonce une augmentation des crédits de 8,5%. Mais, si l’on tient compte des financements décidés en 2007 qui ont permis la mise en œuvre du PARSA ainsi que des crédits débloqués pour le volet immobilier, la réalité est plutôt une baisse de 3 % des crédits qu’une augmentation de 8,5 % ! Qu’en est-il exactement ? De même, le nombre de créations de places dans les CHRS semble moindre que prévu initialement alors que, comme nul ne l’ignore, la situation demanderait à être grandement améliorée.

De plus, les transformations de places annoncées et les places de stabilisation n’apparaissent pas davantage dans le projet qui nous est présenté. Madame le ministre a fait état des maisons relais et d’un prix de journée porté à 16 euros, mais, là encore, un rééchelonnement du budget nécessaire semble déjà programmé. Où en est-on véritablement ? S’agissant de l’hébergement d’urgence, on a le sentiment d’un sous-dimensionnement budgétaire qui appelle des précisions ; ou serait-ce que les priorités affichées ont changé ?

Pour ce qui est des outils d’insertion et des contrats aidés, d’autres questions se posent, les crédits connaissant une réduction significative. Cela signifie-t-il que le nombre des contrats aidés baissera en 2008 ? Si tel est le cas, comment les structures d’insertion pourront-elles poursuivre leurs tâches ? Incidemment, que se passera-t-il à l’Éducation nationale ?

M. Hirsch a traité du RSA et d’un prochain « Grenelle de l’insertion » mais, à la lecture du rapport Lambert, on peut s’interroger pour savoir ce qu’il en sera dans les faits.

Pour ce qui concerne la CMU, personne ne conteste la nécessité de lutter contre les abus, et chacun le fait. Cela ne justifie en rien un certain discours culpabilisateur et je me félicite que madame la ministre ait tempéré par sa réponse la curieuse question qui lui a été posée à propos des bénéficiaires de la CMU. Le groupe socialiste considère qu’une politique sociale ne peut être fondée sur la lutte contre la fraude.

Sur un autre plan, l’article 49 du projet nous inquiète, car le dispositif qu’il prévoit peut conduire à l’exclusion d’un très grand nombre de bénéficiaires de la CMU. On se rappellera pourtant les propos tenus par M. Xavier Bertrand, alors ministre délégué pour la sécurité sociale, selon lesquels la prise en compte des enfants, pour la CMU, devait être faite avec rigueur. Comment concilier ces propos avec le dispositif prévu à l’article 49, qui pourrait conduire à l’exclusion de plus de 20 000 bénéficiaires de la CMU, principalement des familles avec enfants ?

Étant donné ces multiples ambiguïtés, on ne peut que s’interroger sur la volonté réelle du Gouvernement sur tous ces sujets.  

Mme Martine Billard – Les crédits pour l’accès à la protection maladie complémentaire ont baissé. Certes, toutes les personnes qui pourraient en bénéficier ne font pas les démarches nécessaires, mais prévoir d’ores et déjà une baisse, n’est-ce pas avant tout baisser les bras ? Je remercie M. le Haut commissaire d’avoir souligné que certaines personnes, compte tenu de leurs moyens, manquent de très peu l’accès à la CMU. Ce serait-là une bataille à mener plutôt que de se focaliser sur la lutte contre la fraude.

Le décret de février 2007 réduit à un an au lieu de quatre le maintien de la couverture médicale gratuite découlant d’une activité salariée. Cette modification vise à lutter contre les personnes quittant la France et continuant de bénéficier de ces dispositifs mais, par ricochet, il s’exerce aussi contre des salariés précaires, des divorcés sans activité professionnelle ou des veuves sans retraite ou pension de réversion. Un rattrapage est-il possible pour ces catégories ?

Plutôt que de diminuer les crédits inscrits à l’action « Accès à la protection complémentaire », une meilleure gestion du forfait logement en faveur de ceux qui en ont le plus besoin serait judicieuse.

De nombreuses familles en situation régulière sont logées dans des hôtels en Île-de-France. En attendant un programme de constructions, la loi de réquisition peut-elle être utilisée ?

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales – Une question d’actualité a été posée cet après-midi sur le pouvoir d’achat. Cette année, l’État providence français dépassera la Suède avec plus de 700 milliards de dépenses sociales. Selon une étude du CERC, la France a privilégié pendant ces vingt dernières années le salaire indirect sur le salaire direct. N’est-ce pas là une vraie question ?

M. Didier Migaud, président de la commission des finances – Il faut prendre garde aux comparaisons et, en l’occurrence, raisonner proportionnellement aux richesses des deux pays.

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé Je remercie M. Méhaignerie pour son intervention. Je demeure quant à moi très attachée au modèle social français.

Je note que nombre de questions ont porté sur la fraude, certains m’accusant d’être trop rigoureuse et d’autres trop laxistes. Ma position doit donc être équilibrée car je refuse angélisme et stigmatisation. Toute révélation d’une fraude, chez les familles modestes, peut avoir des effets dévastateurs et entraîner une remise en cause des indispensables mécanismes de solidarité.

Je participe à l’action interministérielle présidée par M. Woerth visant à lutter contre la fraude. Mme Boyer m’a demandé si on pouvait y associer les parlementaires mais, selon moi, la proposition de M. Méhaignerie visant à mener une réflexion à l'Assemblée nationale permettrait de maintenir une claire séparation des pouvoirs. Rien n’empêche en revanche les parlementaires de s’associer à toutes les expérimentations qui ont lieu sur le terrain.

Pour l’AME : le titre d’admission sera non photocopiable, les pratiques de contrôle des caisses seront harmonisées, les fichiers de rejet de demande seront communiqués à tous les organismes. Pour la CMU, des échanges auront lieu avec l’administration fiscale et les pénalités applicables aux assurés responsables dans l’octroi d’une prestation au bénéficiaire de la CMUC seront étendues.

Le financement par l’État du fonds CMU a baissé, mais les autres recettes ont augmenté, notamment le produit de la contribution due par les organismes de protection complémentaire sur leur chiffre d’affaires santé, la contribution sur les alcools de plus de 25° ou les droits sur le tabac.

L’article 49 concerne la simplification des règles de prise en compte des aides personnelles au logement dans les ressources des demandeurs de CMUC. Elles sont en effet prises en charge à concurrence d’un forfait déterminé mensuellement par rapport au RMI et qui varie en fonction de la composition du foyer. Ce forfait est actuellement calculé selon des règles différentes selon qu’il s’agit d’une première demande de bénéfice de la CMUC ou d’un renouvellement.

Ces règles sont toutefois d’un maniement très complexe pour les caisses d’assurance maladie complémentaire. La mesure proposée vise donc à les unifier pour tous les demandeurs en leur appliquant les pourcentages prévus dans la règlementation du RMI et en retenant une définition du foyer unique qui est celle de la réglementation de la CMUC. Cette mesure mettra fin à une différence de traitement entre les primo demandeurs et les demandeurs d’un renouvellement de droit ; elle allègera en outre la gestion des dossiers de demandes de CMUC en permettant une accélération de la procédure d’instruction.

Mme Christine Boutin, ministre du logement et de la ville – Monsieur Sirugue, non seulement notre ambition n’a pas changé, mais elle est peut être plus forte qu’il y a six mois !

Les crédits de l’hébergement d’urgence augmentent. Notre objectif est de diminuer les places d’urgence au profit de places de stabilisation. Le PLF pour 2008 prévoit bien la réalisation de 6 000 places. Les crédits sont en outre fongibles sur l’ensemble du programme et des ajustements sont possibles. Ainsi 10 000 places d’hébergement d’urgence seront transformées en 6 000 places de stabilisation et 4 000 en CHRS. En outre, 2 500 places hivernales seront transformées en places d’hébergement à l’année. Le PLF prévoit enfin 3 000 places supplémentaires, selon les besoins, pour la période des grands froids. Les dépenses CHRS étant juridiquement obligatoires, les besoins seront financés.

Une partie des maisons relais a été financée sur la base de 8 puis 12 euros, mais cette partie est moins importante que celle reposant sur un financement de 16 euros. Il sera toujours possible de procéder à une adaptation selon les besoins locaux.

Madame Billard, je n’exclus pas la possibilité d’utiliser la réquisition, la situation du logement étant catastrophique. Néanmoins, outre que ce n’est pas facile à mettre en œuvre, il faut savoir que Mme Lienemann et M. Périssol qui, eux, l’ont utilisée, n’ont ainsi relogé que 42 personnes. La réquisition ne répond donc pas à l’ampleur des problèmes qui se posent.

En ce qui concerne l’API, la hausse correspond à 200 millions de rebudgétisation, à 40 millions de hausse et à 90 millions d’économies, liées au contrôle.

L’audit de modernisation de l’API nous a conduits à travailler sur l’amélioration des contrôles : un article du PLFSS prévoit le droit de communication et d’information aux organismes de sécurité sociale. Xavier Bertrand a par ailleurs demandé au directeur général de la CNAF de développer les contrôles inopinés sur place et sur pièces.

Toutes les recommandations de l’audit de l’AAH ont été incluses dans le plan d’action. La grande majorité a été mise en œuvre. Nous avons mené un travail commun avec la CNSA sur l’information, la formation et le cadrage des pratiques.

S’agissant du retour à l’emploi, l’insertion professionnelle est un objectif inclus dans les conventions État ANPE et État AGEFIP ; le suivi des allocataires est effectué dans chaque plan départemental pour l’insertion des travailleurs handicapés ; des indicateurs LOLF sur la sortie vers l’emploi ont été créés ; une expérimentation pour évaluer l’employabilité est menée ; les allocations AAH sont rendues éligibles à tous les contrats aidés ; un dispositif d’intéressement pérenne a été mis en place ; Enfin, l’AAH est incluse dans le dispositif général de lutte contre la fraude.

La revue générale des politiques publiques reprendra la question de la gouvernance locale et un groupe de travail travaillera sur le fonctionnement des MDPH et le statut de leurs personnels.

M. Martin Hirsch, haut commissaire Monsieur Huet, en effet, les crédits de la mission 304 augmentent de 100 % (Sourires), ils iront directement – via les conseils généraux – dans les poches des allocataires. Par amendement, et si le Premier ministre en est d’accord, nous proposerons une hausse de ces crédits.

Madame Boyer, les Bouches-du-Rhône ont mis en place un barème qui leur est propre pour l’expérimentation du RSA, le dispositif prévu variant selon que les personnes travaillent moins de 10 heures, entre 10 et 30 heures, ou entre 30 et 35 heures. Nous évaluerons ce barème et sa possible extension.

Monsieur Sirugue, vous m’avez notamment interrogé sur le calendrier des expérimentations. Nous nous sommes engagés auprès des départements et des personnes concernées sur trois ans. Pour autant, cela n’interdit pas une généralisation précoce, car, dans bien des cas, cette expérimentation créera des iniquités entre les territoires et au sein même des territoires, entre ceux qui bénéficient du RSA et les travailleurs pauvres qui n’y ont pas droit.

Qui sera le chef de file du RSA ? Je suis demandeur de rendez-vous avec le bureau de l’ADF afin que nous en parlions.

Le budget des contrats aidés, c’est vrai, diminuera en 2008.

Mme Martine Billard – On le sait !

M. Martin Hirsch, haut commissaire Parlons sans langue de bois et rappelons-nous que si les contrats aidés sont plus nombreux en période de hausse du chômage, leur nombre a aussi tendance à augmenter en période électorale (Protestations sur les bancs du groupe socialiste)

M. Gérard Bapt – Il a raison, voyez 2006 !

M. Martin Hirsch, haut commissaireDepuis vingt-cinq ans qu’ils existent, on observe des stop-and-go permanents. C’est la raison pour laquelle il faut redéfinir les contrats aidés et réfléchir à un contrat unique d’insertion, afin de repartir sur des bases nouvelles.

Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont - Cette procédure me permet, sans être membre de cette commission, de m’exprimer sur un sujet qui me tient à cœur. Tordons enfin le cou à l’idée qu’il existe d’un côté ceux qui assistent les personnes, et ceux qui les aident à s’insérer dans la vie professionnelle ! Bien avant le RSA, les conseils généraux ont mené des politiques d’insertion : ne cassez pas les outils existants, comme les contrats aidés ou les chantiers d’insertion. La suppression de l’obligation réglementaire faite il y a deux ans de consacrer une partie du RMI à l’insertion porte également un coup à ces politiques.

Aucun de nous ne se satisfait de l’assistanat : notre objectif à tous est d’amener les gens vers le travail et la dignité qu’il confère.

Mme Pascale Crozon – Très bien !

Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont – Les politiques d’insertion relèvent des départements ; c’est là leur mission essentielle. Pour autant, les limites du possible sont atteintes. Comme le disait le président du Sénat au congrès de l’ADF, si l’on continue ainsi, on va dans le mur ! Entre 2005 et 2006, la dépense nette d’action sociale des départements a progressé de 7 % et les marges de manœuvre continuent de s’amenuiser.

En 2001, l’APA était prise en charge à parts égales par les départements et l’État. La part des conseils généraux est aujourd’hui de 68 % ; et l’on trouve encore à les stigmatiser lorsqu’ils augmentent la fiscalité locale !

Le cinquième risque a été annoncé, notamment par le Président de la République. On parle maintenant d’une cinquième branche. La différence n’est pas uniquement sémantique ! Lorsque les personnes très dépendantes sont prises en charge en établissement, elles relèvent du sanitaire, et non plus du médico-social. Or il se trouve que, lorsqu’elles sont en EPAD, elles financent une partie de la construction de l’établissement et le personnel. Cela n’est pas normal et il faudra aller, à terme, vers une solidarité nationale.

Malgré une baisse du nombre des RMIstes, on constate que les montants des allocations augmentent, les plans moyens étant plus élevés. A cause des difficultés sociales, on constate aussi une explosion des montants de l’aide à l’enfance en danger.

Quelle ligne de partage tracez-vous donc entre la solidarité nationale et la solidarité locale ?

M. Yves Bur – La réforme de l’API est attendue depuis longtemps. Le rapport de l’IGAS a montré que 16 % des bénéficiaires déclarent ne pas vivre seuls et que 40 % reçoivent l’allocation au-delà de trois ans, grâce à l’arrivée d’un nouvel enfant. On dénombre 217 000 bénéficiaires en 2007, soit 5 % de plus qu’en 2006.

C’est l’exemple même de l’allocation qui provoque des comportements sociaux : si l’accès n’était pas aussi libre, les comportements seraient autres. Qui plus est, les efforts d’insertion vers l’emploi restent extrêmement limités. Je souhaite donc savoir si le Gouvernement a effectivement l’intention de rénover l’API, par exemple en reprenant la proposition de l’IGAS en vertu de laquelle, à défaut d’accepter l’insertion, on retournerait vers le RMI.

M. Jean-Marc Lefranc – Je souhaite interroger Mme Létard sur la situation des parents d’enfants atteints de maladie ou de handicap. Ces parents subissent en effet une triple angoisse : celle de l’évolution de la maladie ou du handicap, celle de l’insertion de leur enfant dans la société, celle de la façon dont il pourra subvenir à ses besoins après la disparition de ses parents.

Dans ce dernier cas, il existe deux possibilités de constituer un complément de ressources : la première est la rente survie par laquelle le père et la mère souscrivent à des contrats collectifs ou individuels assurant une rente à leur enfant à leur décès. Cette formule présente l’avantage de pouvoir être cumulée avec l’AAH.

La seconde solution est celle de l’épargne handicap constituée directement par la personne handicapée. Elle présente l’inconvénient d’être plafonnée à 1 830 euros par le code de la sécurité sociale alors qu’une étude portant sur 6 000 rentes montre que la rente moyenne est de 2 875 euros par an, réduite à due concurrence du montant de l’AAH. Il paraîtrait donc équitable de relever le plafond à 2 875 euros pour inciter à aller vers ce type de complément de ressources d’autant que la rente survie pénalise les fratries, les années de cotisations étant perdues en cas de décès de l’enfant handicapé avant le terme du contrat ou en cas d’interruption temporaire des versements.

Je n’ai pas déposé d’amendement à ce propos, car il s’agit d’une question réglementaire, mais je souhaite que le Gouvernement puisse prendre en compte cette demande des familles.

Mme Martine Carrillon-Couvreur – Je souhaite poser quelques questions sur le programme 157 « Handicap et dépendance ».

En ce qui concerne l’évaluation et l’orientation personnalisée des personnes handicapées qui sont intégrées à l’action 1, la question de la contribution de l’État au fonds départementaux pour la compensation n’est pas abordée alors que ce désengagement est un signal démobilisateur. Pouvez-vous, madame la ministre, nous apporter des éclaircissement à ce propos.

La loi du 11 février 2005 a supprimé la barrière d’âge pour l’obtention de la prestation de compensation. En l’état, une fusion de l'allocation d'éducation de l'enfant handicapé - AEEH - et de la prestation de compensation du handicap – PCH - ne paraît pas acceptable et les associations nous ont fait part de leurs inquiétudes. L’accès d’un enfant à la PCH dépend d’un taux d’invalidité et de certains critères comme les charges effectives ou l’emploi des parents. Tout cela manque de clarté et j’aimerai que vous apportiez des précisions sur ce point.

Bien plus que d’une incitation à exercer une activité professionnelle, les personnes handicapées ont surtout besoin d’un accompagnement et d’une véritable politique de compensation du handicap leur permettant de surmonter les obstacles auxquels elles doivent faire face.

S’agissant des ESAT, on annonce la création de 2 000 places contre 3 000 en 2007 sans que l’on dispose d’un état effectif des créations. Qui plus est le coût de la place n’est pas revu et il reste trop rigide alors que les métiers évoluent et que la prise en charge s’en trouve alourdie.

La diminution des crédits destinés aux entreprises adaptées nous inquiète. Le coût moyen des subventions reste au même montant que l’année dernière. Surtout, on passe de 20 099 à 17 811 places et les crédits diminuent de 5 millions d’euros.

S’agissant enfin des ressources d’existence, le nombre des allocataires de l’AAH a tendance à diminuer tandis que le nombre des personnes de plus de soixante ans augmente. On ne peut que regretter que cela ne soit pas l’occasion de faire un effort important en faveur du montant de l’AAH.

Mme Valérie Létard, secrétaire d’État S’agissant du comité de suivi de la politique du handicap et de la gouvernance sur le territoire, je confirme que l’Assemblée des départements de France y sera associée, à tel point que l’on peut parler d’un co-pilotage avec l’État.

En ce qui concerne la participation de l’État au fonds de compensation, les engagements pris par l’État continueront à être tenus, mais, en 2008, cela se fera grâce à un versement par un fonds de concours, toujours à hauteur de 14 millions d’euros.

Pour ce qui est du droit d’option entre l’AEEH et la PCH, il paraît évident que l’on ne peut pas s’aligner sur la PCH des adultes dès lors qu’il s’agit d’enfants. Nous avons besoin de progresser dans l’évaluation de la PCH pour les enfants. Cette réflexion sera menée par le groupe de travail sur la compensation. Si le droit d’option est ouvert, c’est tout simplement pour que la famille et l’enfant puissent bénéficier de la prestation la plus avantageuse.

J’ai l’intention de tenir mon engagement d’une revalorisation de 2,5 % de l’AAH. Avant d’aller plus loin, il convient de s’assurer que cela ne risque pas de compromettre les ressources globales des personnes handicapées qui peuvent accéder à l’emploi. C’est bien parce que j’entends aller vers une vraie revalorisation du pouvoir d’achat de la personne handicapée que je veux m’intéresser à la question du revenu global.

S’agissant des ESAT, les 2 000 places créées cette année correspondent à la première phase d’un plan quinquennal de création. Le coût à la place de 11 698 euros est conforme au GVT. Avec les départs en retraite l’ancienneté diminue, de même que le GVT.

Les entreprises adaptées bénéficient de 244 millions d’euros au titre de l’aide au poste et de 42 millions au titre de subventions spécifiques. Même avec 19 625 postes, soit 387 de moins qu’en 2007, les crédits restent supérieurs aux postes réellement consommés. Un meilleur suivi permet de réallouer les postes non consommés aux nouvelles entreprises. En complément, 2 000 créations de places en ESAT sont prévues dont 1 000 hors les murs. C’est aussi la consommation constatée qui justifie la diminution de 5 millions d’euros des subventions spécifiques. L’objectif du plan de modernisation lancé en 2006 est d’accompagner les structures en difficulté ainsi que celles qui se développent.

La question abordée par M. Lefranc tient à cœur à toutes les familles concernées. Il faut en effet encourager et récompenser la prévoyance des personnes handicapées et des familles. Cette question pourra être traitée au sein du groupe de travail sur les ressources et sur l’emploi afin que des propositions globales puissent être faites lors de la première conférence nationale sur le handicap qui se tiendra en 2008. J’espère que le groupe de travail pourra répondre favorablement à votre demande.

M. Martin Hirsch, haut commissaire Le nombre des allocataires à l’API augmente assez naturellement car les familles monoparentales sont de plus en plus nombreuses. S’il y a en effet un problème avec cette allocation, il ne faut toutefois pas oublier que l’on parle de revenus extrêmement faibles, à tel point que ce sont parfois les travailleurs sociaux eux-mêmes qui encouragent certaines familles à poser une deuxième boite aux lettres pour toucher 440 euros de plus…

Manifestement, on ne plus en rester à ce système. C’est pourquoi j’ai tenu à ce que l’État expérimente des méthodes de retour à l’emploi non seulement pour le RMI mais aussi pour l’API, dont les bénéficiaires étaient par exemple exclus du dispositif des contrats aidés. Depuis qu’ils bénéficient du dispositif du retour à l’emploi, on sent un frémissement. C’est pour qu’il n’y est plus d’effet pervers que l’on va, dans le cadre du RSA, remplacer le RMI et l’API par un barème différent.

Madame Pérol-Dumont, je ne crois vraiment pas qu’il y ait une culture de l’assistanat dans les conseils généraux, qu’ils soient de gauche ou de droite, et encore moins chez les gens en difficulté. Si l’on a pu croire que j’avais redécouvert l’insertion, c’est que je me suis mal exprimé. Il n’est pas question de faire table rase, au contraire : rarement politique aura été autant construite à partir des expériences locales et des idées des conseils généraux. Nous essayons simplement de mener une évaluation rigoureuse pour savoir, parmi tous ces programmes différents, lesquels ont donné les meilleurs résultats et permis d’utiliser l’argent efficacement.

La question du rapport entre solidarité nationale et solidarité locale est, avec celle du rapport entre le RSA et les salaires, l’une des plus importantes que nous ayons à traiter cette année. On connaît les arguments de part et d’autre. L’État doit-il assurer la solidarité envers les territoires et les territoires assurer la solidarité envers les personnes ou l’État doit-il assurer également une solidarité envers les personnes dans le cadre de nouveaux dispositifs ? Nous aurons à débattre de cette question de fond avec les départements, laquelle rejoint d’ailleurs celle de l’éclatement des compétences.

Effectivement, si la moitié seulement des allocataires du RMI sont inscrits à l’ANPE, c’est aussi qu’on leur demande de ne pas s’y inscrire pour ne pas alourdir les statistiques. De ce fait, il n’est jamais question pour eux d’accompagnement professionnel. Cela est totalement inacceptable. De plus, les dépenses de formation sont mal réparties et profitent peu aux moins qualifiés et aux personnes les plus éloignées de l’emploi. Il y a un jeu compliqué entre l’État, l’ANPE, les régions et les départements. Il faut revoir le rôle de chacun ; redéfinir les prestations forcera à le faire.

Mme Catherine Coutelle – Je souhaite interroger M. Bertrand – ou peut-être Mme Létard - sur le sixième programme d’égalité entre les hommes et les femmes.

Notre groupe regrette qu’il n’y ait pas de ministère de l’égalité à part entière. Elle existe dans les mots, mais, pour atteindre l’égalité réelle, il reste beaucoup à faire. Je note par exemple qu’il n’y a pas de femme présidente de commission à l'Assemblée nationale. Cependant c’est sur le plan économique que la situation est la plus scandaleuse, avec la précarisation du travail féminin, le temps partiel non choisi, la difficulté d’accéder à des responsabilités et des écarts de salaire avec les hommes qui sont toujours de 15 à 25 %. Enfin, le problème des violences faites aux femmes a été rappelé récemment. Une femme meurt tous les trois jours sous les coups de son conjoint. Comptez-vous proposer une loi cadre à ce sujet ?

Améliorer la vie des femmes, c’est améliorer la vie de toute la société. Vous annoncez, dans ce domaine, cinq axes prioritaires, mais il me semble que le ministère se concentre sur deux axes : l’égalité professionnelle et la dignité de la femme.

S’agissant de l’égalité professionnelle, la loi relative à l’égalité salariale, votée en 2006, devrait entrer en application en 2010, mais il est difficile de dresser un bilan fin 2007. Dans les auditions conduites par la délégation aux droits des femmes, les partenaires sociaux qui devaient réaliser des diagnostics disent qu’ils sont démunis pour le faire. Il était prévu un accompagnement des PME. Demandent-elles à en bénéficier ?

L’articulation des temps de vie concerne les deux parents et pas seulement les femmes. Toutefois ce sont celles-ci qui, majoritairement, assument les tâches domestiques, l’éducation des enfants et les soins aux personnes âgées. Or nous n’avons pas su accompagner la révolution qu’ont provoquée l’entrée des femmes sur le marché du travail et une fécondité élevée. Cela est vrai pour la politique d’accueil de la petite enfance, en ce qui concerne les capacités, mais aussi les modalités d’accueil avec les horaires variables et le nombre accru de familles monoparentales. Cela est vrai également pour l’accueil des enfants de trois ans. Les collectivités locales s’inquiètent de la diminution des crédits des CAF pour les contrats locaux enfance. Quels moyens peut-on mobiliser ?

Favoriser l’emploi des femmes, leur accès à tous les métiers, une formation adaptée et l’égalité des salaires, c’est aussi mener une politique économique efficace. Quels moyens allez-vous consacrer pour assurer aux femmes une place normale sur le marché du travail ?

Il existe des bureaux du temps expérimentaux. En 2001, ils bénéficiaient des crédits de la DATAR dans le cadre du programme « Temps et Territoire » ainsi que d’aides européennes. Le financement de la DATAR a disparu. Comment favoriser une politique de l’articulation des temps de vie  et l’adaptation des services publics locaux ?

M. Jean-Yves Le Bouillonnec – Ma question s’adresse à Mme la ministre du logement.

En janvier 2007, on annonçait 26 millions de crédits pour le PARSA. On n’en trouve pas trace dans le budget pour 2008. Où sont-ils ou comment va-t-on les y inscrire ?

Vous dites que la veille sociale progresse, mais les crédits sont stables pour les équipes mobiles, le 115, l’accueil de jour et le SAO, pris en charge conjointement par l’État et les départements. Comment améliorer la veille sociale dans ces conditions ?

En ce qui concerne l’ALT, on annonce 1 000 places supplémentaires au budget, mais les crédits sont stables par rapport à 2007. Comment va-t-on les créer ?

S’agissant enfin du logement d’urgence, la pérennisation pose un véritable problème, souligné par les associations. Certes, l’article 4 de la loi relative au DALO prévoit bien un maintien dans les lieux et non un retour à la rue, mais sa mise en œuvre demande des moyens importants. Selon les associations, le coût serait au moins de 13 800 euros par place alors que le PLF prévoit 11 700 euros par place. Si la différence est bien de 2 000 euros, le volume de prise en charge diminuera. Dans les centres d’hébergement, les coûts des personnels représentent 82 % des dépenses. Consacrer plus d’effectifs à la pérennisation va accroître le problème.

M. Alain Néri – Mes questions s’adressent à Mme la ministre du logement.

Vous avez proposé aux départements de contractualiser sur les PLAi afin d’en accroître le nombre. L’État accorderait 12 000 euros si le département en accorde 10 000. Vous demandez donc aux collectivités d’accompagner votre politique. Nous le faisons, car nous ne voulons pas que les places de PLAi soient détournées pour l’hébergement d’urgence. Il faudra nous préciser dans quelles conditions vous souhaitez contractualiser, en ce qui concerne notamment la possibilité de transférer le PLAi ailleurs dans le département.

Vous dites également être preneur de nos propositions pour trouver des logements. J’en ai fait lors du débat sur le DALO. Il s’agit par exemple de créer un fond national de garantie des loyers qui permettrait de remettre sur le marché des logements vacants et de supprimer la caution. D’après l’enquête que j’ai faite dans ma circonscription, plus de 300 logements y seraient disponibles.

J’en viens aux maisons de retraite.

L’APA a permis de maintenir plus de gens à domicile. Je note que le financement était d’abord assuré par l’État et par les départements, mais que la part de l’État est aujourd’hui tombée à 32 %. Avec le maintien à domicile, les personnes âgées ne rentrent plus en maison de retraite vers 75-76 ans, mais vers 85 ou 86 ans. On a donc besoin de plus de maisons de retraite médicalisées, avec un prix de journée plus élevé. Or on manque cruellement de places dans ce genre d’établissement. Par exemple dans le Puy-de-Dôme, cinq projets ont reçu l’avis favorable du CROSS mais sont en attente de financement car il n’y a pas d’ouverture de lits au programme interdépartemental d’accompagnement des handicaps et de la perte d’autonomie (PRIAC). Ce sont ainsi 413 lits que nous ne pouvons pas créer dans notre département.

Par ailleurs, les personnes âgées qui entrent en maison de retraite à 85 ans ont souvent des ressources très modestes et ne peuvent pas payer le prix de journée. On se tourne alors vers les « obligés alimentaires », leurs enfants. Or ceux-ci ont 65 ans et arrivent à l’âge de la retraite ; leurs ressources diminuent, ils ne peuvent pas payer. On se tourne donc vers l’aide sociale, c’est-à-dire les contribuables du département. Vous dites qu’on va mettre en place un cinquième risque. D’accord, mais qui va le financer ? Si l’État se désengage et qu’on compte sur les conseils généraux, cela ne tiendra pas longtemps. D’autant que l’on sait bien que l’État ne paye pas ce qu’il doit. Dans le Puy-de-Dôme par exemple, il nous doit encore 9 millions au titre du RMI, soit six points de fiscalité.

M. Gérard Bapt – Monsieur Hirsch, ne jugez-vous pas contre-productif que l’on contraigne en quelque sorte les demandeurs d’emploi à demeurer deux ans au chômage avant qu’ils puissent prétendre à un contrat aidé ?

J’aimerais aussi connaître votre opinion sur l’article 49, par lequel des dizaines de milliers de foyers seront privés de l’accès direct à la CMU. Je souhaite que le Gouvernement soit sensibilisé à cette question et que l’on revienne sur cette disposition en seconde lecture.

Mme Christine Boutin, ministre du logement et de la ville – Je vous confirme, monsieur Le Bouillonnec, que les 26 millions consacrés au PARSA figurent dans le budget. Les 27,5 millions auxquels vous avez fait allusion avaient été dégagés de manière exceptionnelle, l’année dernière, pour financer des déficits anciens.

S’agissant de la veille sociale, mille postes ont été créés l’an dernier et la même dotation sera maintenue cette année ; un autre millier de postes sera donc créé. Pour l’ALT, l’effort consenti l’an dernier est reconduit. Pour ces deux lignes, l’augmentation est bel et bien de 8,5 %, ce qui traduit la volonté déterminée du Gouvernement.

Sans doute, monsieur Néri, avez-vous fait allusion à l’aide à la pierre. Nous en reparlerons, mais je ne vois pas de difficulté particulière à une mobilité départementale. Votre proposition de fonds de garantie a été reprise, sous une autre forme, dans la loi DALO, adoptée à l’unanimité : c’est la garantie du risque locatif, que nous voulons rendre universelle. Si, par ce biais, nous parvenons, comme je l’espère, à remettre 100 000 logements sur le marché sur l’ensemble du territoire en 2008, nous aurons amorcé une fluidité bien nécessaire.

Mme Valérie Létard, secrétaire d’État Je souhaite rappeler à Mme Coutelle que la Conférence sur l’égalité professionnelle se réunit régulièrement. Les partenaires sociaux sont associés au sein de ses groupes de travail et les délégations parlementaires aux droits des femmes peuvent faire part de leurs propositions. La Conférence, qui rendra ses conclusions à la fin du mois, souhaite la relance des négociations sur l’égalité des chances et la lutte contre les discriminations professionnelles.

Elle veut aussi ouvrir des pistes nouvelles, s’agissant notamment des modes de garde des enfants ; c’est également une des préoccupations exprimées par M. Xavier Bertrand, qui souhaite voir la branche « famille » renforcer son action en ce sens. La question du temps partiel subi est au cœur des réflexions en cours avec les branches professionnelles. Les services à la personne étant amenés à se développer toujours davantage, il convient d’améliorer les parcours professionnels en prévoyant des formations qui permettront de donner aux employés de ce secteur des perspectives d’avenir réelles. Nous travaillons à une expérimentation en ce sens dans le cadre d’un partenariat associant l’État, les régions et la CNSA. L’enjeu est d’une extrême importance, car on peut attendre des PRIAC et de la mise en œuvre de la politique en faveur des personnes handicapées la création de 400 000 emplois.

Pour lutter contre les violences conjugales, une loi cadre est-elle nécessaire ? L’Espagne s’est dotée d’un tel texte, mais elle n’en avait aucun. En France, une loi cadre serait plutôt symbolique, car les dispositions nécessaires relèvent désormais bien davantage du réglementaire que du législatif, différents textes ayant déjà été adoptés sur la question, qu’il serait utile de rassembler. Il n’empêche qu’un second plan de lutte contre les violences à l’encontre des femmes portant sur la période 2008-2010 vous sera présenté à la fin du mois, car nous avons bien l’intention de poursuivre l’effort engagé, qui suppose en particulier de s’assurer de la prise en charge correcte des victimes.

S’agissant des crédits de la CNAF, M. Xavier Bertrand vous fera des propositions relatives au droit opposable à la garde d’enfants et je ne doute pas que les choses peuvent évoluer de manière positive pour les collectivités.

M. Néri a estimé que les collectivités étaient fortement sollicitées ; je lui rappelle que le projet de budget prévoit 7 500 places nouvelles au lieu de 5 000 l’année dernière. Quant aux PRIAC, ils correspondent à l’expression des besoins locaux, dans le respect de l’équilibre territorial. Il est exact que certains territoires éprouvent des difficultés à obtenir des moyens ; c’est que, dans un premier temps, il fallait réparer les inégalités.

Nous travaillons à raccourcir les délais, car le problème est réel.

La question du reste à charge pour les familles nous tient particulièrement à cœur et le Président de la République souhaite que le sujet soit traité dans le cadre du cinquième risque. Je rappelle que, sans attendre, 250 millions de crédits d’investissement ont été débloqués, qui réduisent d’autant le reste à charge.

M. Martin Hirsch, haut commissaire S’agissant de l’article 49, je ne saurais, monsieur Bapt, vous répondre mieux que ne l’a fait Mme Bachelot.

Quant à l’exemple que vous avez cité, selon lequel il faut être demandeur d’emploi pendant deux ans avant de pouvoir bénéficier d’un contrat aidé, il administre la preuve qu’une remise à plat des règles s’impose. Nous avons quelques mois pour en discuter.

M. René Couanau – Je remercie les ministres et le haut commissaire de s’être prêtés aussi longtemps à cet échange. Nous vous saurions gré, monsieur Hirsch, de nous tenir informés des premiers résultats des expérimentations menées dans les départements pilotes.

La séance est levée à dix-neuf heures trente-cinq.

La Directrice du service
du compte rendu analytique,

Marie-Christine CHESNAIS

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