Accueil > Projet de loi de finances pour 2008 > Les comptes rendus analytiques des réunions des commissions élargies > Compte rendu analytique de la séance

Afficher en plus grand
Afficher en plus petit

Assemblée nationale

Compte rendu
analytique officiel

Séance du mardi 13 novembre 2007

Séance de 9 heures
Commission des finances, de l'économie générale et du Plan
Commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire
Présidence de M. Didier Migaud, Président, M. Patrick Ollier, Président

La séance est ouverte à neuf heures.

M. Didier Migaud, président de la commission des finances – Nous sommes heureux d’accueillir ce matin Mme Christine Boutin et Mme Fadela Amara, afin de les entendre sur les crédits « Ville et logement ». Le rapporteur général, M. Gilles Carrez, qui préside ce matin le comité des finances locales, vous prie d’excuser son absence.

Nous entendrons d’abord M. Yves Jego, rapporteur spécial de la commission des finances et M. Philippe Pemezec, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, qui s’exprimeront sur les crédits de la ville ; puis M. François Scellier, rapporteur spécial de la commission des finances et M. Jean-Pierre Abelin, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, interviendront sur les crédits du logement.

Après les réponses des ministres, nous entendrons un orateur de chaque groupe pour une première série de questions et de réponses. La parole ira ensuite aux députés qui souhaiteraient poser des questions complémentaires.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire – Je voudrais remercier également Mme Boutin et Mme Amara de leur présence.

J’indique d’emblée que la commission des affaires économiques s’intéresse en particulier aux mesures relatives à l’accession sociale à la propriété, dont nous aimerions que la ministre dresse un premier bilan. Alors que l’Espagne et le Royaume-Uni comptent respectivement 85 et 72 % de propriétaires, ce taux ne dépasse pas 56 % en France, ce qui doit nous inciter à adopter des dispositions énergiques, comme le Gouvernement s’y emploie déjà, afin d’aider ceux dont les salaires sont les plus bas.

S’agissant du Grenelle de l’environnement, j’aimerais que le Gouvernement revienne sur les grandes orientations qui se dessinent, notamment en matière de bâtiment, d’économies d’énergies, et plus généralement de lutte contre le réchauffement climatique. Nos rapporteurs auront sans doute à cœur de poser des questions plus précises à ce sujet.

M. Yves Jego, rapporteur spécial de la commission des finances pour les crédits de la villeLa politique de la Ville doit être au cœur de nos préoccupations – les douloureux événements qui se sont produits, voilà deux ans, le démontrent bien.

Ma première question porte sur le programme national de rénovation urbaine. Compte tenu de sa remarquable montée en puissance, les besoins de financement seront extrêmement élevés. L’État s’est engagé à apporter 465 millions d’euros par an, tout en mobilisant des crédits provenant de la Caisse des Dépôts et des SACI. Le budget pour 2008 permettra de faire face aux engagements, mais j’aimerais des garanties concernant les crédits de paiement ouverts en 2008 et 2009 pour financer les appels d’offres que nous lançons aujourd’hui sur le fondement des conventions signées.

Ma deuxième question s’inspire de l’enquête sur la gestion des crédits d’intervention de l’État au titre de la politique de la ville, réalisée par la Cour des comptes à la demande de la commission des finances du Sénat. On peut s’interroger sur la diversité des outils actuels – Agence nationale pour la rénovation urbaine, Agence nationale pour la cohésion sociale et l'égalité des chances, Établissement public d'aménagement et de restructuration des espaces commerciaux et artisanaux ou encore Délégation interministérielle à la ville. Entendez-vous rationaliser la politique de la ville afin d’accroître l’efficacité des interventions et de mieux suivre l’utilisation des crédits ?

Peut-on également envisager un meilleur ciblage des actions menées ? La liste des quartiers éligibles à la politique de la ville est très diverse selon les objectifs ou les moyens que l’on considère. Mieux vaudrait définir des priorités claires au lieu de mener des interventions à géographie variable.

Un mot également sur le remboursement par l’État des déductions de charges sociales consenties dans les zones franches urbaines. En interrogeant le délégué interministériel à la ville, j’ai eu la surprise d’apprendre qu’il n’y avait pas de vérification sur les montants pourtant considérables que l’État doit rembourser.

Enfin, le pilotage de la politique des adultes relais, dont je connais l’utilité dans bien des cas, me semble lacunaire. Je rappelle que son coût unitaire annuel est de 19 000 euros.

M. Philippe Pemezec, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques pour la politique de la ville – Chacun est attaché au succès de notre politique de la ville qui, aujourd’hui, va dans le bon sens. Certaines questions demeurent néanmoins. Ainsi, le plan national de rénovation urbaine à mobilisé plus de deux milliards entre 2004 et 2008. Quelles sommes mobiliserez-vous après 2008, et quel calendrier prévoyez-vous ? D’autre part, les versements de la Caisse des dépôts et consignations seront-ils bien effectués ? Le nombre de zones concernées par l’ANRU n’est-il pas trop élevé, et ne faudrait-il pas approfondir son action dans certains quartiers, plutôt que de disperser ses crédits ? Que dire des débuts de l’ACSE ? Ne faudrait-il pas renforcer les crédits consacrés aux infrastructures de transports ? S’agissant du service civil volontaire, son coût est-il justifié et les publics concernés sont-ils pertinents ?

Par ailleurs, je suggère une modification de l’Observatoire national des zones urbaines sensibles afin qu’il embrasse, outre ses compétences actuelles, l’ensemble des politiques de la ville. Quel bilan dressez-vous des stages de citoyenneté ? Envisagez-vous toujours de modifier le programme « Ville-vie-vacances » ? Sur combien de sites les équipes de réussite éducative opèrent-elles, et quels sont leurs résultats, ainsi que ceux des internats de réussite éducative ?

Ensuite, deux millions d’euros sont consacrés à l’amélioration de l’habitat dans les quartiers de plus de cinq cents logements. Est-ce suffisant ? Quels sont les résultats du programme « Pourquoi pas moi » dans les grandes écoles ? Les contrats urbains sont-ils un outil efficace à la résolution de problèmes de terrain ? Enfin, quelles leçons tirez-vous du rapport de la Cour des comptes sur la politique de la ville ?

M. Migaud, président de la commission des finances Nous abordons l’examen des crédits du programme « Logement ».

M. Yves Jego, rapporteur spécial suppléant M. Scellier, rapporteur spécial pour le programme logement – Je le remplace d’autant plus volontiers que j’étais moi-même, avec d’autres, à l’initiative des maisons à 100 000 euros. Or, force est de constater que l’objectif de construire près de 600 000 logements sociaux d’ici 2009 se heurte à la hausse importante des coûts de construction. Aujourd’hui, on ne peut guère espérer payer moins de 125 000 à 130 000, ce qui n’était pas le cas il y a encore trois ans. Comment ferez-vous face à cette dérive des coûts ? S’agissant de la PALULOS, attribuée à 47 880 personnes hors ANRU en 2006, ne faudrait-il pas augmenter davantage les crédits qui lui sont affectés, afin d’éviter l’intervention de l’ANRU dans des quartiers se trouvant à la limite de la rénovation pure et simple, où le droit commun peut être plus efficace ? Par ailleurs, le Gouvernement envisage-t-il de redonner un peu de lisibilité pour le grand public aux dispositifs Robien et Borloo ? M. Scellier propose d’ailleurs qu’ils soient soumis à un agrément préalable, qui renforcerait leur efficacité territoriale. Enfin, permettra-t-on la fongibilité des crédits de l’ANAH, dont 25 millions n’ont pas été consommés l’an dernier ?

M. Jean-Pierre Abelin, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques pour le programme logement – Ces crédits, dont l’augmentation est conséquente et auxquels s’ajoute un effort fiscal de plus de douze milliards, illustrent la priorité accordée au logement par le Gouvernement, conformément à l’ambition du Président de la République de créer 500 000 logements neufs et 140 000 logements sociaux par an, ainsi que de vendre 40 000 logements HLM. Quelle sera votre stratégie pour atteindre ces objectifs, compte tenu du contexte économique, bancaire et productif difficile ? D’autre part, nombreuses sont les associations qui craignent que le droit opposable au logement reste lettre morte. Les maisons-relais, notamment, sont en retard. Comptez-vous reprendre certaines des 37 propositions remises par le comité de suivi au Président de la République ? Quelles mesures foncières proposerez-vous en Île-de-France ? De combien de logements sociaux la cession de terrains publics de l’État permettra-t-elle la création ? Qu’en est-il du montant et du calendrier des ventes de HLM ? Dans le cadre du Grenelle de l’environnement, quels nouveaux moyens consacrerez-vous à la réhabilitation de logements anciens et à la mise aux normes de consommation énergétique ? Enfin, que ferez-vous si la Cour de justice européenne rejette le recours de la France concernant la banalisation du livret A ?

Mme Christine Boutin, ministre du logement et de la ville – Avec Mme Amara, nous sommes très heureuses de cette réunion de travail, dont la forme est un peu inédite pour moi, et je remercie les différents orateurs de leurs questions concises mais riches.

Monsieur le président Ollier, vous m’avez interrogée sur l’accession sociale à la propriété : avec une moyenne de 56 % de propriétaires, la France accuse en la matière un certain retard, 80 % de nos voisins et amis espagnols étant, par exemple, propriétaires de leur logement. Pour faire une « France de propriétaires », le Président de la République a donc fixé l’objectif ambitieux qu’à la fin du quinquennat, 70 % de nos compatriotes, toutes classes d’âge confondues, aient accédé à la propriété. Il faut savoir cependant que dans la classe d’âge des 60-65 ans, 80 % des Français sont déjà propriétaires, ce qui montre que l’allongement de la vie permet finalement de réaliser le rêve légitime de chacun. Bien entendu, je m’attacherai à tenir l’objectif des 70 % fixé par le Président de la République, tout en estimant nécessaire de conserver la diversité d’offre qui existe aujourd’hui. Plusieurs exemples européens montrent en effet qu’un taux de propriété égal ou supérieur à 80 % de la population ne va pas sans poser problème. Mon principe d’action pour le quinquennat est donc clair : tendre aux 70 %, mais ne pas chercher à aller au-delà.

Bien entendu, le prêt à taux zéro et le crédit d’impôt constituent des outils très efficaces pour l’accession sociale et, contrairement à certaines rumeurs, il n’a jamais été dans mes intentions de les remettre en cause.

S’agissant du Pass foncier, une convention a été signée lors de la délocalisation temporaire de mon ministère à Lyon – opération qui a suscité quelque curiosité mais a permis de faire avancer nombre de dossiers, notamment celui du droit opposable au logement. La convention vise à permettre l’application du taux réduit de TVA et à exonérer les opérations des taxes sur le foncier bâti pendant 25 ans. Ainsi, devrait-il être possible de réaliser environ 20 000 opérations chaque année à partir de 2008.

Outre les objectifs de construction et de réhabilitation, le Président de la République a fixé celui de mettre en vente 40 000 logements HLM par an, pour permettre aux locataires les occupant depuis longtemps d’accéder à la propriété dans de bonnes conditions. J’espérais qu’une convention de vente portant sur les 40 000 premiers logements sociaux pourrait être signée à Lyon, et, à l’exception des offices, tous les acteurs du monde HLM y étaient prêts. Ne souhaitant pas faire exploser l’unité du monde HLM, je n’ai pas forcé les choses, mais j’ai fixé le 15 décembre comme date butoir pour la signature d’un accord. La négociation avec les offices se poursuit, et j’ai bon espoir qu’elle aboutisse dans les délais. Je dois vous dire que, si je tiens cet objectif dans les six premiers mois de mon ministère, ce sera pour moi une grande joie.

La vente de logements HLM constitue un moyen parmi d’autres de mettre fin au scandale de notre incapacité à loger tout le monde, car il reste à cet égard d’énormes efforts à accomplir. Il ne s’agit évidemment pas de déposséder le monde HLM d’une part de son patrimoine, mais, au contraire, de lui procurer de nouvelles ressources pour construire de nouveaux logements.

M. Marcel Rogemont.– On en vend deux pour en construire un !

Mme Christine Boutin, ministre du logement et de la ville – J’ai été interpellée sur les suites du Grenelle de l’environnement : soyez sûrs que je suis, moi aussi, d’accord pour sauver la planète ! (Rires et exclamations) Je tiens à lever toute ambiguïté à ce sujet… Sans entrer dans aucune polémique, je constate qu’un objectif de réduction de 70 % des émissions a été fixé au secteur du bâtiment, alors que celui-ci n’est responsable que de 45 % de la production globale de CO2. Un effort singulier est donc exigé de l’habitat, alors que nous faisons déjà beaucoup pour réduire les consommations d’énergie, en particulier dans les programmes neufs et réhabilités.

Un mot, Monsieur Jego, sur la maison à 100 000 euros : je ne vais pas tout dévoiler aujourd’hui (Sourires), mais j’ai des formules pour fournir des logements à ce prix à ceux qui en ont besoin. Le problème, c’est le foncier… (Exclamations)

Pour en revenir aux suite du Grenelle, je veux vous dire que j’engage ma responsabilité de ministre sur un point particulier : les aides financières d’État devant aider les ménages à mettre leur logement aux normes énergétiques devront s’adresser en priorité aux familles dont le budget est le plus fragile. J’ai aussi la lutte contre la précarité et l’exclusion dans mon portefeuille d’attributions, et je refuse, cher Étienne Pinte qui souriez, que certains foyers soient condamnés à la double peine énergétique : la sanction pour un logement qui n’est pas aux normes et une facture énergétique plus élevée.

Yves Jego m’a interrogée sur l’action de l’Agence nationale pour la rénovation urbaine : 531 quartiers – dont 189 prioritaires et 342 « supplémentaires » – sont concernés par les interventions de l’agence. Je suis déterminée à poursuivre l’action de l’ANRU, en tentant de donner une dimension sociale plus affirmée aux projets de reconstruction. L’agence n’est peut-être pas l’interlocuteur idoine pour les plus petites opérations, lesquelles devraient plutôt bénéficier de crédits déconcentrés pilotés par les préfets. Jusqu’à présent, le programme national de rénovation urbaine a bénéficié, entre autres sources de financements, d’environ 500 millions de dotations d’État par an ; fin 2008, l’effort devrait s’établir à 800 millions de crédits de paiement, pour atteindre 1 milliard fin 2009. La participation de la Caisse des dépôts et consignations est essentielle et nous entretenons avec elle d’excellentes relations : elle intervient à hauteur de 4 millions par an dans le fonctionnement de l’ANRU, et de 20 millions pour les programmes de rénovation, l’encours de ses prêts s’établissant à plus de 4 milliards.

J’en viens au très intéressant rapport de la Cour des comptes sur la gestion des crédits de la ville et Mme Amara complètera sans doute mon intervention à ce sujet. Ce rapport légitime l’action que j’ai entreprise pour réunifier la ville et ses habitants. Il signale également certains dysfonctionnements, en particulier le fait qu’en 19 ans, il y a eu 17 ministres de la ville, ce qui pose bien sûr un problème de continuité de la politique suivie. Le Gouvernement s’en soucie, et la RGPP aura certainement des conséquences sur l’organisation administrative et politique. Il confirme enfin l’urgence d’une rupture. Je la mets en œuvre – Mme Amara y reviendra, de même que sur le ciblage de cette politique. Sur un plan global, depuis sept mois, je me suis vraiment posé la question de l’opportunité des zonages. Il me semble que sur le plan administratif, politique, financier, ils finissent par créer des ghettos qui empêchent les échanges véritables. Ma réflexion sur ce point n’est pas aboutie.

La politique des adultes relais relève de la compétence de Mme Amara.

En ce qui concerne l’Agence nationale pour la cohésion sociale et l’égalité des chances créée le 31 mars 2006, outre sa mission première de lutte contre les discriminations que subissent les habitants des quartiers prioritaires, je souhaite qu’elle s’occupe du service civil volontaire, de la lutte contre l’illettrisme et de la gestion du fonds interministériel de prévention de la délinquance. Après six premiers mois difficiles, la situation est aujourd’hui excellente et nous ferons un bilan en fin d’année.

Le dispositif du service civil volontaire n’a pas encore trouvé son équilibre. Mme Amara y reviendra.

Pour ce qui est du programme « Ville-vie-vacances », l’objectif 2008 est de le consolider et de l’ouvrir davantage sur le monde extérieur, avec des exigences accrues pour l’encadrement éducatif et l’instauration de contreparties pour les jeunes et les familles.

Les crédits pour la réussite éducative permettront de mener les mêmes actions qu’en 2007. L’opération de tutorat « Une grande école : pourquoi pas moi », expérimentée depuis 2002 par l’ESSEC, réunit désormais une trentaine de grandes écoles et d’universités ; pour un coût de 1,24 million en 2007, elle a bénéficié à plus de 1 600 lycéens. Pour mieux coordonner ces initiatives, nous travaillons sur l’opération « Objectif réussir » dont la charte nationale est en cours d’élaboration.

Mme Fadela Amara, secrétaire d’État chargée de la politique de la ville – Je reviens d’abord sur le rapport de la Cour des comptes concernant la politique de la ville. En fait, il souligne les mêmes problèmes que celui du Sénat, et ces critiques recoupent celles que font les habitants des quartiers dans le cadre de la concertation territoriale lorsqu’ils nous disent ne pas comprendre de quoi il retourne et se sentir à l’abandon : cette politique manque de lisibilité. J’ai donc engagé une réflexion, qui se nourrit également de mes rencontres avec les associations de terrain et les associations de maires de banlieue. Je tiendrai compte des remarques qu’elles ont faites. Le travail engagé par le préfet Lacroix et la RGPP vont également nous aider à construire une politique qui, sans être en rupture avec ce qu’ont fait mes prédécesseurs, soit plus pertinente et plus efficace.

L’important, à mes yeux, est de réaffirmer le rôle du préfet et du maire, ainsi que celui des associations de quartier, qui mobilisent les forces vives. On a vu, lors de la signature des contrats urbains de cohésion sociale, tout leur apport dans ce domaine.

Je pense également qu’il faut se poser la question du ciblage et du zonage de la politique de la ville. Elle a pris une telle extension ces dernières années qu’on peut avoir le sentiment d’un saupoudrage. Il faut la recentrer et je tiendrai compte des propositions de plusieurs personnalités pour mettre en place un nouveau système de ciblage simple et compréhensible, par exemple à base de couleurs. Les quartiers les plus difficiles seraient les quartiers rouges (Murmures sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR), les quartiers orange auraient moins de difficultés et les quartiers jaunes donneraient des signes d’alerte. On pourrait ainsi mener une politique de la ville sur mesure et « mettre le paquet » sur les quartiers les plus difficiles. Mais je suis ouverte aux propositions, et avec Christine Boutin, nous voulons adapter la réponse à apporter aux difficultés des quartiers.

Le dispositif des adultes relais est très important à mes yeux. Certes, il coûte 88 millions, et il faut l’évaluer pour le faire évoluer, dans le cadre de la RGPP. L’ACSE et ses services régionaux doivent veiller à contractualiser avec les associations. Quand celles-ci disposent d’adultes relais, elles peuvent agir en profondeur et avec plus de pérennité. Je compte également utiliser le contrat d’objectifs pour faire passer l’ACSE d’une logique de guichet à une logique de respect.

En tout cas, l’ACSE est beaucoup trop récente pour qu’il soit possible de tirer un bilan de son travail. Ce qu’on sait en revanche, c’est que, dans le cadre des contrats urbains de cohésion sociale, le paiement des associations ne s’est pas fait de façon suffisamment rapide. Il a notamment été freiné par la mise en place du nouveau circuit financier et de l’outil informatique. Aujourd’hui, tout est opérationnel : il n’y a plus qu’un effort d’apprentissage à fournir. L’ACSE doit désormais trouver ses marques et progresser dans son action. Il faut aussi unifier les cultures locales et nationale, car il y a quelques problèmes de gouvernance, et développer la contractualisation – nous tiendrons compte de toutes les critiques formulées sur ce point.

Le service civil volontaire est un dispositif très important, qui permet de promouvoir la mixité dans les quartiers et de lutter contre la « glandouille » . Mais s’il devait se généraliser, il faudrait poser clairement la question de son financement car à ce jour, il ne concerne que 15 % des jeunes des quartiers. La question de la mobilisation des financements de droit commun est également posée.

J’ai entendu beaucoup de critiques sur le dispositif « Ville-vie-vacances », et je ne suis pas tendre non plus à son égard, mais il ne faudrait pas jeter le bébé avec l’eau du bain. Le dispositif avait mal évolué, vers de pures activités de consommation, sans projet éducatif. Aujourd’hui, ce programme est axé sur des projets à vocation éducative et préventive. Il faut le renforcer, car il participe à la politique de prévention de la délinquance et en faveur de la citoyenneté, et est géré depuis janvier par l’ACSE. Pour 2008, les objectifs sont donc de le consolider et de l’orienter vers les adolescents les plus en difficulté, qui font déjà l’objet d’un suivi, et surtout de faire en sorte qu’il réponde mieux aux attentes des filles, au lieu de se concentrer sur les seuls garçons. Il faut aussi multiplier les activités pour sortir des quartiers et favoriser un brassage social et culturel, accroître l’encadrement éducatif et favoriser l’implication des parents. Il faut aussi établir une forme de contrepartie de la part du jeune ou de sa famille, dans une logique de droits et de devoirs : cela est essentiel.

Les programmes de réussite éducative sont extrêmement importants. Je me battrai, avec vous je l’espère, pour donner l’occasion à l’élite des quartiers populaires d’émerger et de prendre des responsabilités dans le pays. Cela redonnera de l’espoir aux jeunes des cités. Il faut réussir ce pari extraordinaire. J’ai été une des premières à soutenir la convention avec Sciences Po. Les cités ont besoin de cette élite. Il faut aussi multiplier les internats de réussite éducative, car il arrive un moment où il faut sortir certains jeunes de la mouise, les arracher aux pressions et aux tentations qui les empêchent de réussir leur processus d’insertion. Ces dispositifs sont des réponses adaptées, et il faut les renforcer. Pour cela, j’aurai besoin de l’aide des élus de la nation.

M. Didier Migaud, Président de la commission des finances Nous en revenons aux questions sur le logement.

Mme Christine Boutin, ministre du logement et de la ville – M. Abelin m’a interrogée sur la stratégie envisagée, et je le remercie d’avoir souligné que le contexte était difficile. En arrivant au ministère, j’ai commencé par rencontrer l’ensemble des partenaires : constructeurs, bailleurs, locataires, financeurs… Le constat est unanime sur la situation de pénurie et sur le déficit très important de la construction pendant les vingt ou trente dernières années. Mais pour ce qui est des réponses, en gros, chacun estime que c’est de la faute des autres ! C’est la raison pour laquelle j’ai estimé indispensable de réunir l’ensemble de ces partenaires. C’est ce que j’ai fait, à l’occasion de trois congrès importants qui se tenaient à Lyon. La décentralisation du ministère pendant quinze jours, place Bellecour, a fait beaucoup sourire, mais les résultats vont commencer à se faire sentir d’ici quelques semaines. Une bonne vingtaine de conventions ont été signées à Lyon, qui vous seront présentées plus en détail lors du congrès des maires. Or, dans la course contre le temps à laquelle nous nous livrons – car en matière de logement, il faut un long délai entre le moment où la décision est prise et celui où elle est réalisée – cela a été très profitable : si j’avais dû laisser les choses se faire de façon normale entre les partenaires, l’ensemble des conventions aurait mis dix-huit mois à être signé. Dorénavant, grâce à l’opération de Lyon, tous les partenaires, publics et privés, sont sur la ligne de départ et les synergies sont importantes.

Chacun y prendra sa part : il faudra faire jouer les mécanismes du monde HLM et du 1 %, mais aussi des partenariats entre le public et le privé, car il faut construire des logements de toute nature. Aujourd’hui, il est impossible de faire sortir des personnes des CHRS, les centres d’hébergement et de réinsertion sociale, parce que nous n’avons pas de logement ordinaire à leur proposer. Par conséquent, les personnes qui sont en CHU ne peuvent accéder aux CHRS et ceux qui sont à la rue ne peuvent entrer en CHU. L’urgence est donc de construire. Le logement doit prendre une place importante dans le développement de la croissance, et tout le monde est sur la ligne de départ. Vous allez commencer à voir des résultats, et je vous assure qu’il n’était pas possible d’aller plus vite.

Une autre priorité est de favoriser les maires bâtisseurs. Nous sommes en train de travailler sur des aides de nature fiscale ou financière. Je ne veux à ce propos stigmatiser personne : il y a des maires qui construisent et d’autre non, mais parmi ces derniers, il y en a qui le voudraient et qui en sont empêchés. Ce qu’il faut encourager, c’est la construction, et par tous les moyens. J’aimerais que cela devienne une cause nationale. Pourquoi y a-t-il eu un tel déficit de construction, sous la droite comme sous la gauche ? C’est sans doute parce que, dans les années 1990, les prévisions démographiques de l’INSEE ont été largement sous-estimées. En outre, l’Institut n’a absolument pas tenu compte de l’évolution de la société, notamment de la séparation des familles. L’administration et les élus se sont fondés sur ces données.

Encourager les maires bâtisseurs, c’est aussi agir au niveau de la responsabilité citoyenne. De nombreux maires sont en effet empêchés de construire par des associations créées par leurs administrés pour mettre des bâtons dans les roues aux projets de construction ! Mais dans le cadre de cette stratégie d’encouragement, vous allez forcément me demander ce qu’il en sera de l’article 55 de la loi SRU. Il sera appliqué de façon stricte et ferme.

Mme Martine Billard – Mais encore ?

Mme Christine Boutin, ministre de la ville et du logement – Les ordres seront très clairs. Je ne reviendrai pas sur la loi SRU parce qu’alors il faudrait rediscuter des pourcentages, la gauche me demanderait de les augmenter et la droite de les supprimer ! (Sourires) Ce serait perdre du temps en discussions stériles. Toute cette énergie, de droite comme de gauche, pourrait être utilisée de façon plus créative pour trouver des solutions au problème du logement. Mieux vaut s’ingénier à mettre au point des dispositifs en vue d’encourager les maires bâtisseurs, et s’attacher à convaincre ensuite Bercy.

Je ne peux laisser dire, Monsieur Abelin, que le droit opposable au logement serait un droit virtuel. Je rappelle que la loi a été votée à l’unanimité.

Mme Annick Lepetit, Mme Claude Darciaux et M. Jean-Yves Le Bouillonnec  – C’est inexact, nous nous sommes abstenus.

Mme Christine Boutin, ministre du logement et de la ville – C’était seulement l’unanimité des votants, en effet, cela est assez relativement rare. De toute façon, ce texte appartient au patrimoine politique de la nation. Alors parlementaire, j’avais, face à ce que je considère comme un scandale, déposé une proposition instituant le droit au logement opposable, laquelle a été reprise par le Gouvernement. Rapporteure de ce texte, je savais la difficulté de sa mise en œuvre – dont j’ignorais, à l’époque, que j’en serai chargée. Nous relèverons ce défi, et nous n’avons pas le droit de faire croire que le droit au logement opposable ne serait que virtuel. C’est un droit républicain, qui s’appliquera comme s’est appliqué, en son temps, le droit à l’école pour tous.

M. Maxime Bono – Jules Ferry y avait mis d’autres moyens !

Mme Christine Boutin, ministre du logement et de la ville – Nous nous sommes imposé un calendrier difficile à tenir. Or, à ce jour, il est parfaitement respecté. Comme prévu, la commission de suivi a été installée, le décret d’application est examiné par le Conseil d’État et sera publié sous peu, les commissions de médiation seront installées le 1er janvier 2008. L’échéance du 1er décembre 2008 sera difficile à tenir, nous le savions tous, mais nous savions aussi que le fait de la reporter aurait été perçu comme un manque de volonté politique. Comme j’étais convaincue que cette volonté politique existe, à droite comme à gauche, j’ai préféré que l’on s’en tienne à la date initialement prévue, et je fais du respect de cette échéance ma priorité. Il y aura peut-être quelques difficultés, que je n’ai pas voulu dissimuler. Si elles devaient se produire, vous en seriez tenus informés et elles seront réduites au mieux car j’ai quelques idées dans ma besace à ce sujet. Je le répète : le droit au logement opposable ne sera pas un droit virtuel.

Je n’entrerai pas dans le détail des trente-sept propositions du comité de suivi, diverses en portée et en application dans le temps, sinon pour dire qu’elles me conviennent globalement. La presse a mis l’accent sur la trente-sixième proposition, qui suggère de lancer un « Plan Marshall du logement » pour l’Île-de-France, région qui à elle seule concentre la moitié des problèmes de logement que connaît notre pays. Je l’avais anticipé en demandant au préfet de région de rassembler tous les partenaires, élus compris, pour que nous envisagions ensemble la possibilité de traiter la question par un dispositif expérimental spécifique. À l’occasion de la remise de son rapport par le comité de suivi, j’ai fait valoir au Président de la République que nous étions à la croisée des chemins : soit on renforce la décentralisation, et les élus prennent l’entière responsabilité de l’application de la loi DALO ; soit on décide, pendant une période donnée, d’expérimenter une recentralisation. Le Président de la République n’a pas semblé hostile à cette expérimentation.

Vous m’avez demandé combien de terrains publics ont été cédés. Comme chacun le sait, la crise du logement a pour première cause la crise du foncier. S’agissant des réserves foncières, nous avons donc demandé aux services de l’État d’être exemplaires, et l’une des conventions signées à Lyon avec la Société de valorisation foncière et immobilière a cet objet ; la SOVAFIM s’engage à ce que moins d’un an s’écoule entre le moment où des emprises lui sont transférées et celui où elles sont proposées aux opérateurs publics et privés en vue de construire des logements. J’ajoute qu’en 2006 135 cessions ont eu lieu, qui représentent 190 hectares – dont la moitié en Île-de-France – et que dix décotes ont été faites, dont les trois quarts à Paris, ce qui représente un effort de 16 millions pour l’État.

M. Didier Migaud, président de la commission des finances – Vous nous parlez de l’Île-de-France avec insistance, Madame la ministre, mais il existe beaucoup d’autres régions dans lesquelles les problèmes de logement et de foncier se posent avec une égale acuité (Marques d’approbation sur plusieurs bancs). Ce qui serait nécessaire, c’est un « Plan Marshall » pour la France entière, qui ne se réduit pas à la seule région Île-de-France.

Mme Christine Boutin, ministre du logement et de la ville Je reconnais là un débat ancien.

M. Didier Migaud, président de la commission des finances – Nous sommes les élus de toute la nation, Madame la ministre.

Mme Christine Boutin, ministre du logement et de la ville Le comité de suivi de la loi DALO a compétence nationale, et il a estimé devoir proposer un Plan Marshall pour l’Île-de-France en raison de la gravité des problèmes observés. Il ne s’agit en aucun cas d’opposer cette région aux autres mais d’envisager une expérimentation là où les difficultés sont d’une ampleur particulière.

M. Didier Migaud, président de la commission des finances – Il serait bon aussi que les commissions nationales comprennent davantage de provinciaux (Approbation sur plusieurs bancs).

Mme Christine Boutin, ministre de la ville et du logement J’en suis parfaitement d’accord, car cela permettrait que les problèmes de chacun soient mieux connus de tous.

Je vous ai répondu à propos des ventes de HLM. S’agissant des suites du Grenelle de l’environnement, M. Borloo a l’intention de créer des commissions thématiques, dont l’une s’attachera à définir les modalités d’emprunts bancaires qui pourraient être financés par les économies de charges. Mon collègue est très favorable à ce dispositif et il a raison, mais je sais d’expérience qu’il faudra beaucoup de travaux et de temps, dans certains logements, avant que l’on y arrive à l’énergie positive !

J’en viens au livret A, question importante qui préoccupe à bon droit tous les Français. Suite à la décision prise par la Commission européenne le 10 mai, le Gouvernement a déposé une requête en annulation devant le tribunal de première instance des Communautés européennes. J’ai pour ma part chargé M. Michel Camdessus de réfléchir aux conditions d’une éventuelle banalisation. Le tribunal ne se prononcera pas avant la mi-2008, et il n’est pas exclu qu’il donne raison à la France.

La mission Camdessus a auditionné les différents acteurs concernés – organismes d’HLM, associations, banques, économistes. Il s’agit d’assurer les meilleures conditions possibles au logement social, et l’accès aux banques des plus démunis. La mission remettra ses conclusions mi-décembre. En tout état de cause, le rôle du livret A dans le financement du logement sera maintenu. On peut même espérer une amélioration des conditions de financement du logement social.

Monsieur Scellier, vous avez eu un excellent interprète avec M. Jego, mais je suis heureuse de pouvoir vous répondre personnellement.

M. François Scellier, rapporteur spécial pour le logement – Je regrette d’avoir été défaillant, et vous prie de bien vouloir excuser mon retard.

M. Didier Migaud, président de la commission des finances C’est tellement exceptionnel que vous êtes tout excusé.

Mme Christine Boutin, ministre du logement et de la ville – Vous vous inquiétez de l’avenir de la maison à 100 000 euros. Je vous ferai dans quelques mois des propositions concernant les logements à faible coût.

J’en arrive aux PALULOS. La crise du logement a conduit le gouvernement précédent à orienter le plan de cohésion sociale vers les productions nouvelles. Mais l’ANRU compte aussi, parmi ses objectifs, la réhabilitation de 400 000 logements entre 2004 et 2013. Pour les territoires exclus de son champ d’intervention, l’État s’est engagé, dans la convention signée en décembre 2004 avec l’USH, à financer 40 000 PALULOS par an. La Caisse des dépôts s’est pour sa part engagée pour un montant de 200 millions d’euros par an, via le prêt à l’amélioration, pour la durée du plan de cohésion sociale.

D’ici le budget 2009, nous ferons le bilan des trois premières années d’application de la convention et des quatre premières années d’intervention de l’ANRU. En ce qui concerne les PALULOS, ma réflexion n’est pas aboutie. Il me semble qu’un certain nombre d’élus, n’en ayant plus suffisamment, se rabattent sur des projets de rénovation qui ne sont pas adaptés à leurs besoins. C’est parfois choisir un pilon pour écraser une mouche !

Je me pose également beaucoup de questions sur le ciblage des quartiers. Le zonage a des effets pervers sur les plans politique, financier, économique et culturel. Il empêche d’avoir une vision globale de la ville.

Vous m’avez demandé de remettre en cohérence les dispositifs Robien et Borloo. Un rapport au Parlement vous sera prochainement adressé. C’est sur cette base que pourraient être envisagés des ajustements sur les plafonds de loyer afin de mieux prendre en compte la diversité géographique des marchés immobiliers. Je suis sensible à cette nécessité, car des questions se posent en effet pour le Robien.

M. Didier Migaud, président de la commission des finances Je vais donner la parole à M. Scellier, puis aux orateurs des groupes – M. Piron pour l’UMP, M. Le Bouillonnec pour le groupe SRC, M. Vercamer pour le Nouveau centre et Mme Billard pour le groupe GDR.

M. François Scellier, rapporteur spécial pour le logement – Un débat a été lancé tout à l’heure sur le plan Marshall pour l’Île de France. Le problème posé est en effet – on vient de le voir à propos du dispositif Robien – celui de l’adaptation territoriale des politiques du logement. Même si c’est toujours délicat à mettre en œuvre au regard du principe d’égalité, il est absolument nécessaire d’adapter les dispositifs aux différents territoires, tant les situations diffèrent.

Je voudrais également évoquer l’hébergement d’urgence. Connaissant votre volonté et vos engagements passés, Madame la ministre, je vous fais confiance pour que le droit au logement ne reste pas un droit virtuel. Mais l’hébergement d’urgence concerne des publics particuliers, qui exigent un véritable accompagnement social. Je me demande si les crédits prévus sont suffisants pour conduire une politique très attendue et emblématique, eu égard au mal-logement et au mal-vivre qui touchent notre société. Je proposerai donc un amendement visant à dégager quelques moyens supplémentaires.

M. Michel Piron – Je vous prie d’abord de bien vouloir m’excuser : je serai sans doute obligé de partir avant d’entendre les réponses aux questions que je vais poser, étant attendu au Comité des finances locales. Mais je lirai attentivement ces réponses dans le compte rendu de la séance.

Vous avez lancé à Lyon, Madame la ministre, une démarche visant à accroître l’offre de logements accessibles. Une des propositions concernant la mise sur le marché de logements locatifs privés grâce à la sécurisation des propriétaires bailleurs. Pourriez-vous nous en dire plus sur ce dispositif ?

Dans un contexte de pénurie de logements et d’écarts de loyer importants entre le parc privé et le parc public, le taux de rotation du parc HLM tend à diminuer. Comment assurer une meilleure fluidité ? Les questions qui se posent sont évidemment celles du montant des loyers et du maintien dans le parc.

Les financements ne font pas défaut pour la production de logements locatifs sociaux, mais les mises en chantier peinent à suivre. Comment réduire ce décalage ?

Vous avez évoqué l’hébergement d’urgence. Plus on transforme de lieux d’hébergement d’urgence en lieux de stabilisation – ce qui est évidemment la tendance en période hivernale – moins il en reste. Pouvez-vous nous en dire plus sur ce sujet ?

Les 495 CUCS jouent un rôle majeur dans la rénovation urbaine. Les difficultés de leur mise en œuvre et les lourdeurs de l’instruction administrative débouchent malheureusement sur une certaine inertie. Qu’en est-il, alors que la rénovation urbaine concerne quelque 2,9 millions de personnes ?

La question foncière fait depuis longtemps l’objet de débats quant à la disponibilité foncière « sur plans » et la disponibilité foncière « réelle ». Envisagez-vous des mesures permettant d’augmenter l’une ou l’autre, sachant que – cela a été dit – la région parisienne est loin d’être la seule concernée ?

M. Jean-Yves Le Bouillonnec – En préalable à mes questions qui rejoignent assez largement celles des rapporteurs, je voudrais observer que nous avons un problème de méthode. Je regrette qu’il faille évoquer dans le cadre de deux réunions distinctes un sujet qui est unique, ce qui nuit au débat et contraint nos rapporteurs à poser à nouveau des questions auxquelles il a déjà été répondu.

Nous avons également besoin de connaître la réalité des chiffres et des résultats. Après avoir adopté quatre grandes lois en la matière – les lois dites de « renouvellement urbain » et de « cohésion sociale », l’engagement national pour le logement et la loi instituant le droit au logement opposable –, où en sommes-nous ? Personne ne le sait. On se perd dans des accumulations de chiffres contradictoires, et l’on continue à se référer aux seuls financements engagés au lieu de prendre en compte les chantiers effectivement lancés. Depuis 2000, il semble que nous n’ayons pas construit plus de 18 000 logements supplémentaires par an. Pourquoi tant d’efforts pour un si faible résultat ?

Ce qui fait problème, ce ne sont pas seulement la démographie et les évolutions sociologiques, mais aussi les choix budgétaires. Nous avions pourtant dit notre crainte à l’occasion de la loi sur le renouvellement urbain, qu’en limitant ses interventions à des quartiers spécifiques, l’État se condamne, soit à présenter un nouveau plan « Banlieues » dans quelques années, soit à manipuler dès maintenant les élus, en les amenant à chercher ailleurs d’autres financements. De 100 000 PALULOS en 2000, nous sommes passés à 37 000 !

Si nous avons déposé un amendement tendant à supprimer le dispositif Robien, c’est que nous ne pouvons accepter que vous racliez des fonds de tiroir pour financer le DALO, alors que des centaines de millions d’euros d’exonérations fiscales sont consenties dans le même temps. Nous devons faire un choix politique !

Au nom de mon groupe, j’en appelle à la vérité – celle des statistiques. Pour avoir un aperçu de la situation, il faut aujourd’hui compiler des données disparates – loi DDUHC, Fondation « Abbé Pierre » ou Union des HLM – et je ne parle pas des corrections apportées aux chiffres, jusqu’à sept années plus tard, par l’Union européenne. Les pouvoirs publics appréhendent leur propre action dans des conditions invraisemblables !

Sans entrer dans le détail du budget, je constate qu’il ne s’attaque pas à la situation de crise dénoncée par la ministre. Le décrochage des crédits de paiement de l’ANRU va ainsi provoquer un « effet de ciseaux ». Pour la deuxième année consécutive, l’agence est abondée par des crédits exceptionnels, et je me demande quels moyens vous affecterez en 2009 : la machine est enfin lancée, il va maintenant falloir l’alimenter !

Or, l’État a laissé des ardoises derrière lui : la moitié des 400 millions d’euros dus aux bailleurs sociaux ont été réglés, conformément à l’engagement de M. Borloo, mais la situation va se détériorer à nouveau. Les bailleurs sociaux vont donc devoir lancer de nouvelles opérations alors qu’ils souffrent déjà de problèmes de financement.

Nous avons pris acte des annonces du Premier ministre, qui s’est engagé à porter la hausse de l’APL à 3 %. Il reste que cela ne figure pas encore dans ce budget ! Nous proposons par ailleurs de supprimer le seuil de versement actuel de 15 euros par mois – ce qui représente tout de même 180 euros par an ! L’APL est la seule prestation soumise à ce régime, qui est une aberration juridique et sociale. Il faut saluer le combat unanimement mené, pendant trois ans, par notre commission, qui a déjà obtenu que le seuil soit ramené de 24 à 15 euros, et je rends un hommage tout particulier à notre Président, Patrick Ollier.

Sans critiquer l’ANRU, je rappelle également qu’elle mène une politique de rénovation urbaine, non de logement. Pour la fin de l’année 2007, il est notamment question d’un taux de remplacement de dix démolitions pour sept constructions, ce qui signifie que la crise du logement locatif social va s’accentuer dans toutes les zones de renouvellement urbain.

Pour en revenir à l’intervention de l’État, pourrait-on disposer d’un état des cessions de patrimoine réalisées au cours des trois dernières années, ainsi de leur répartition entre les objectifs de développement économique et de logement ? Je crois savoir que le rapport est de 1 à 5. Si l’État veut utiliser les cessions de patrimoine comme instrument en faveur du logement et de la construction, il faut qu’il fixe des objectifs clairs aux opérateurs ou aux collectivités.

J’en viens au zonage : lorsque nous avons obtenu que la loi de renouvellement urbain ne retienne pas les seuls quartiers dits en difficulté, nous espérions un engagement de l’État dans les autres espaces concernés afin d’alléger le poids pesant sur l’ANRU. Or, il reste aujourd’hui impossible de mener d’opération de renouvellement urbain hors de l’ANRU.

Un mot sur les opérations « Ville-vie-vacances », toujours inscrites sur la ligne interministérielle consacrée à la prévention de la délinquance : une grande majorité de maires a fixé à ces opérations d’autres objectifs de cohésion sociale, ce qui englobe les lignes allouées à l’éducation, aux loisirs et à la culture.

M. Francis Vercamer – Ce budget prend un relief particulier avec la publication récente de plusieurs rapports. Parmi les insuffisances relevées par la Cour des comptes, on peut citer la complexité des zonages, la multiplicité des instances en jeu, l’absence de lisibilité des dispositifs, l’incertitude sur leurs financements ou encore la complexité des procédures. Il reste que la politique est indispensable. Nous devons donc nous battre pour renforcer son efficacité.

Pour cela, il faudra concentrer l’action sur les quartiers les plus en difficulté au lieu de saupoudrer les crédits. Nous soutenons la politique de rénovation urbaine, qui permet utilement de réunir tous les partenaires autour de la table, mais force est de reconnaître sa complexité. À titre d’exemple, j’ai apporté un des rapports qu’il nous faut remplir (M. Vercamer déploie une longue liasse de documents).

M. Jean-Yves Le Bouillonnec – (L’orateur brandit un petit porte-monnaie presque vide) Et voici le porte-monnaie qui va avec ! (Rires)

M. Francis Vercamer – En outre, la concertation, dont on souligne par ailleurs l’importance, n’aboutit jamais à la modification de la convention, car trop d’acteurs sont impliqués.

Par manque de réalisme, on ignore trop souvent les aléas qui menacent les projets, notamment les appels d’offres, au sujet desquels l’administration décline le plus souvent toute responsabilité, ou la découverte tardive d’une pollution du terrain. J’ajoute que le rapport entre l’ACSE et l’ANRU est rarement clair. Dans ces conditions, quel sort réservera-t-on aux projets qui n’aboutissent pas ? De nouveaux projets verront-ils le jour, ou d’autres, non prioritaires, seront-ils maintenus ? Quelles mesures de simplification proposerez-vous afin que l’ANRU, dont le rôle n’est pas de faire des économies, réalise enfin tous ses projets ?

S’agissant de l’équité territoriale, il y a lieu de s’interroger sur la pérennité des financements des centres sociaux et des associations, qui passent souvent plus de temps en paperasse qu’à effectuer leur mission sociale ! L’amélioration de leur visibilité financière est d’autant plus urgente que les CUCS ne sont jamais respectés par l’administration – notamment par le ministère de la culture, qui ne tolère pas que le droit commun s’applique aux territoires concernés !

Je félicite le Gouvernement de ses efforts en matière d’accession à la propriété et de construction de logements neufs. Néanmoins, tous les Français ne sauraient être propriétaires ! En outre, sur les 20 000 logements très sociaux de type PLAI prévus pour 2007, seuls 12 700 ont été construits. Comment améliorerez-vous les choses, alors que les taux d’intérêt augmentent et que les marchés publics sont souvent infructueux, surtout en province ? Par ailleurs, le rapport du comité de suivi de la loi DALO, outre le permis de louer que j’ai proposé, préconise une augmentation des crédits de l’ANAH. Qu’en sera-t-il ?

Enfin, je me réjouis de la fermeté du Gouvernement s’agissant de la loi SRU – au grand dam de M. Ollier, dont j’avais autrefois réprouvé l’amendement.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques C’est parce que vous ne l’aviez pas compris ! (Sourires)

M. Francis Vercamer – Quid, dès lors, du droit de préemption de l’État dans les villes qui n’atteignent pas le seuil prescrit ? Le président Ollier s’interrogeait aussi sur les logements sociaux vendus, dont les habitants restent les mêmes : le Nouveau Centre considère que le seuil de 20 % ne doit pas être remis en cause.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques Ne me mettez pas en cause, car je devrais vous répondre, et cela allongerait débat !

Mme Martine Billard – Madame la ministre, vous faites du foncier un problème majeur, et c’est souvent vrai. Par ailleurs, vous soulignez que la vente de logements HLM financera une partie des constructions neuves. Sans doute, mais, dès lors, comment reconstruira-t-on dans ces zones où, précisément, l’État cède ses propriétés, en Île-de-France notamment ? Vous risquez au contraire de réduire l’offre de logement social sur des territoires où les familles modestes sont pourtant nombreuses !

Vous évoquez les incitations proposées aux maires bâtisseurs. Mais pour les autres ? Plus de 240 d’entre eux n’ont eu aucune politique active en 2006 : l’État utilisera-t-il les outils législatifs dont il dispose pour, via le préfet, se substituer au maire défaillant en imposant la construction ou la préemption ?

S’agissant des familles en hôtel, nombreuses en Île-de-France et dont les enfants se nourrissent et étudient dans de mauvaises conditions, le coût pour la collectivité ne serait pas plus élevé bien au contraire, si d’autres solutions de logement leur étaient offertes.

J’ai plusieurs fois proposé des mesures en matière d’isolation et de chauffage, et je me réjouis que le Grenelle de l’environnement ait abordé ces questions. Allez-vous inciter au remplacement du chauffage au fioul, de toute façon menacé par l’explosion inéluctable des prix du pétrole ? J’observe d’ailleurs que les aides, dans ce domaine, vont aux propriétaires et aux habitants de logements sociaux. Qu’en est-il des locataires du secteur privé, qui restent dépendants de leurs bailleurs ? Envisagez-vous d’imposer à ces derniers des mécanismes coercitifs lorsque l’incitation ne suffit pas, afin que le locataire n’ait pas à payer pour l’inaction de son propriétaire ?

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques L’attitude de Mmes les ministres est très courageuse. Deux interrogations, toutefois : je rappelle que j’étais à l’origine de l’amendement transformant l’article 6 de la loi de cohésion sociale, Monsieur Le Bouillonnec. Nos prédécesseurs, en effet, avaient mis en place une politique de guichets qui excluait de nombreuses villes sans motif légitime. À cette politique de guichets, je préfère une politique de projets qui, s’ils sont bénéfiques à une ville et à son environnement, méritent d’être soutenus, que l’on soit à Cachan ou à Rueil-Malmaison. Je connais la première pour y avoir fait mes études – j’étais même un fidèle de l’ancien cinéma.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec – Il existe toujours !

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques – À Rueil-Malmaison, dont je suis le maire, 23 000 des 80 000 habitants vivent dans des cités où les difficultés, la violence, la misère sont les mêmes qu’ailleurs, y compris à Cachan, pourquoi ces problèmes seraient-ils considérés autrement ? Donnons plus de lisibilité à une véritable politique de projets !

S’agissant de la politique de la ville, je ne crois pas que remplacer un zonage par une couleur changera quoi que ce soit. Sachez, Madame la secrétaire d’État, que, si vous avez besoin de notre aide en matière d’insertion, nous avons aussi besoin de la vôtre ! Je vous félicite de vouloir aider les maires bâtisseurs, mais que faites-vous des maires volontaristes ? Songez qu’une grande muraille sépare les intentions politiques de la réalité de terrain. Il faut aider ces maires – plus compétents en la matière que les préfets – car ils sont trop souvent confrontés à d’impossibles parcours du combattant.

Ces maires sont en première ligne, par exemple, lorsqu’il s’agit de remettre le pied à l’étrier à des jeunes non qualifiés, en les accueillant pour un temps dans les services municipaux, avant de démarcher les entreprises locales pour obtenir une embauche plus durable. Je l’ai fait, dans ma commune, pour plus de cent d’entre eux, en les accueillant en CDI. J’aurais été aidé par une politique d’exonération des charges sociales : le Gouvernement, madame la ministre, envisage-t-il de mieux soutenir – les maires qui font preuve de volontarisme pour combattre toutes les formes d’exclusion ?

Mme Christine Boutin, ministre du logement et de la ville – Mesdames et messieurs les députés, l’exercice auquel vous me conviez est passionnant et j’apprécie particulièrement cet échange de questions réponses très concrètes, propre à stimuler la créativité de chacun !

J’ai bien compris, Monsieur Scellier, votre amendement sur les CHRS et, aussi, qu’il était financé par des créations de postes ! Je crains par conséquent qu’il n’aille un peu à l’encontre de la tendance générale, d’autant que nous avons déjà reçu une centaine de créations de postes pour les commissions de médiation. Dans la négociation budgétaire, nous avons aussi obtenu le financement de tous les objectifs assignés aux CHRS par mon prédécesseur : sera-ce suffisant ? En toute transparence, je n’en suis pas du tout certaine, et, si vous, parlementaires, pouvez obtenir des financements complémentaires au profit des hommes, des femmes et des enfants qui ont besoin d’un accueil d’urgence, ne vous en privez surtout pas ! Nous devons mobiliser ensemble tous les moyens d’action, ne serait-ce que pour rénover les centres qui en ont le plus besoin.

D’accord, Monsieur Piron, pour développer le marché locatif privé. Rendue universelle par la loi sur le droit au logement opposable, la garantie du risque locatif permet au propriétaire de ne plus avoir d’impayés et de récupérer son logement dans l’état où il l’a loué. Je fonde donc de grands espoirs sur ce dispositif et je salue les efforts réalisés par les collecteurs du 1 % logement pour le financer. Il va désormais atteindre sa vitesse de croisière et je gage qu’il permettra la remise sur le marché de nombre de logements vacants.

Lors de la délocalisation temporaire de mon département ministériel à Lyon, nous avons également initié une convention – aujourd’hui en cours de finalisation – avec l’Union nationale de la propriété immobilière, en vue de créer une sorte de « pass foncier » pour les petits propriétaires – je pense à ceux qui louent une petite surface pour compléter leur retraite, pas aux grands investisseurs. Leur serait donnée la possibilité, tout en restant propriétaire du bien, d’en donner l’usufruit pour quinze ans à un organisme HLM,…

Mme Martine Billard – Cela ne marche pas !

Mme Christine Boutin, ministre du logement et de la ville – … de manière à se dégager des risques et contraintes qui s’attachent à la gestion locative.

Nombre d’entre vous m’ont, avec Michel Piron, interrogée sur l’insuffisante fluidité du parc HLM. Notre semaine à Lyon – décidément très riche, bien que les media n’en aient pas mesuré tout l’impact – nous a permis d’obtenir une évolution fondamentale de la part du mouvement HLM : issue de la loi de 1948, la notion de droit à maintien dans les lieux se transforme en droit à se maintenir dans le parc social. Sur ce point crucial, nous avons obtenu un accord de principe du président Delebarre, et cela permettra notamment de mettre fin à certaines anomalies – sans doute pas aussi fréquentes qu’on le prétend –, comme le maintien dans un cinq-pièces du parc social d’une personne âgée désormais seule. Avec l’assurance de conserver un loyer social, il sera plus aisé de la reloger.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques Est-ce d’ores et déjà applicable ?

Mme Christine Boutin, ministre du logement et de la ville – Cela va l’être rapidement.

Nous prendrons aussi un décret pour créer un dispositif de surloyer enfin dissuasif…

M. Gérard Bapt – Très bien !

Mme Christine Boutin, ministre du logement et de la ville – J’ai renvoyé une première mouture car je la trouvais trop peu incitative : un projet définitif est en cours d’examen au Conseil d’État. Nous souhaitons ainsi que ceux qui ont des revenus suffisants pour se loger ailleurs libèrent le parc HLM. Soyez assurés, mesdames et messieurs les députés, de ma détermination à tout faire pour rendre plus fluide l’ensemble de la chaîne du logement. Et lorsque je dis « tout faire », je n’exclus rien, pas même l’option de réquisitionner des terrains.

Plusieurs d’entre-vous ont évoqué la problématique archi-connue du décalage entre l’obtention du financement et la mise en chantier : je ne nie pas la réalité du problème mais vous connaissez aussi bien que moi les réponses à apporter à vos questions…

En matière de logement d’urgence et de stabilisation, la loi DALO, n’en déplaise à ses détracteurs, est fondamentale puisqu’elle pose le principe que la remise à la rue est désormais impossible. Quel que soit le degré d’embolie dont souffre la chaîne, il est exclu de ne pas accueillir une personne en demande d’hébergement d’urgence, quelle que soit par ailleurs – et l’on me comprendra – sa situation au regard du droit français. Toutefois, il reste acquis que personne n’a vocation à se maintenir dans une structure d’accueil d’urgence, la suite du parcours de réinsertion passant par un CHRS ou une place de stabilisation. Quoi qu’il en soit, il est à mes yeux impératif de faire face à l’urgence : personne ne doit pâtir de l’encombrement du système, auquel nous nous attachons bien entendu à remédier.

Chacun des 495 contrats urbains de cohésion sociale est fondé sur un partenariat volontaire entre le maire – ou l’exécutif d’une structure intercommunale –, l’État, le conseil régional, le conseil régional… et la circulaire de mise en œuvre du 24 mai 2006 est venue en préciser les modalités. Sur les 495 CUCS, 354 prennent le relais des anciens contrats de ville ; 282 ont été signés par des communes et 213 par des EPCI ; 18 % font l’objet d’un financement conjoint par le conseil régional, 35 % par le conseil général, 26 % par des bailleurs sociaux et 41 % par les CAF.

Michel Piron m’a interpellée sur la subtile distinction qui doit être faite entre la disponibilité foncière théorique et la possibilité réelle d’utiliser des espaces vacants. N’ayant pas d’élément technique à lui transmettre sur le champ, je lui répondrai ultérieurement.

J’en viens aux questions de M. Le Bouillonnec, toujours extrêmement, comment dire ? (Sourires)

M. Jean-Yves Le Bouillonnec – Créatif ?

Mme Annick Lepetit – Et bouillonnant ! (Sourires)

Mme Christine Boutin, ministre du logement et de la ville – En tout cas, cela fait longtemps que j’apprécie sa compétence sur le dossier du logement !

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques C’est vrai !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec – Merci du compliment.

Mme Christine Boutin, ministre du logement et de la ville – Sur le plan méthodologique, j’attends beaucoup de la révision des politiques publiques car la réalité que je vis au quotidien, c’est que je souffre beaucoup de n’avoir pas la main sur l’urbanisme….

Mme Chantal Robin-Rodrigo – Il est vrai que cela serait plus cohérent.

Mme Christine Boutin, ministre du logement et de la ville – On me dit : « construisez, construisez ! », mais je ne dispose d’aucun moyen d’action en matière d’urbanisme. Je compte sur votre soutien, mesdames et messieurs les parlementaires, pour que cette situation évolue.

Ce que je souhaiterais, c’est que le ministère de l’écologie et du développement durables définisse l’aménagement du territoire, et que, dans ce cadre, le ministère du logement puisse agir dans le domaine de l’urbanisme, faute de quoi construire 500 000 logements sera assez compliqué.

En ce qui concerne la vérité des chiffres, je l’aime tout autant que vous, et je vous entends donc fort bien. Cela étant, la multiplicité des lois que l’on a votées, et qui ont toutes, certes, apporté quelque chose, complique singulièrement l’action. Une chose est sûre : je n’ai pas l’intention d’ajouter une « loi Boutin » au corpus existant. Mais bien entendu, si des ajustements législatifs de nature technique sont nécessaires, nous les ferons.

Pour ce qui est des délais de paiement de l’ANRU, je reconnais le problèmes qu’ils posent, tout en insistant sur la qualité du directeur général qui, comme nous tous, se heurte à toutes sortes de contraintes qui freinent l’action. Mais des décisions ont été prises et les choses s’améliorent. Selon un nouveau règlement financier, 70 % de la subvention peut être versée sur seule déclaration du maître d’ouvrage, et les relations seront intensifiées avec les DDE à ce sujet. Le service financier de l’ANRU a été réorganisé, avec quatre agents supplémentaires, soit un doublement de l’effectif. Mais certaines difficultés sont dues aux maîtres d’ouvrage eux-mêmes : aussi surprenant que cela paraisse, certains tardent parfois à demander les subventions de l’ANRU ! Et, même si le règlement est clair, on essaie dans certains dossiers d’aller au-delà de ce qu’il permet, ce qui oblige à des contrôles pointilleux qui font perdre du temps.

En ce qui concerne les opérations de démolition-reconstruction, une des premières choses que j’ai dites en prenant mes fonctions est que, étant donné l’ampleur du problème du logement, je ne peux pas accepter qu’il s’écoule trop de temps entre la démolition et la reconstruction. Nous y veillerons. L’obligation de reconstuire autant de logements qu’on en démolit est respectée : quand elle ne l’est pas, il n’y a pas de financement de l’ANRU. Mais en général, quand on démolit un immeuble, le taux de vacance y est déjà important, et on n’a pas autant de ménages à reloger que de logements détruits.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec – C’est une question technique. Pendant les cinq ans nécessaires pour faire aboutir un projet de démolition, on n’attribue plus les logements.

Mme Christine Boutin, ministre du logement et de la ville 54 % des logements démolis sont reconstruits sur place. Il peut donc y avoir un manque momentané. Mais les familles sont relogées soit dans des logements neufs, soit dans des logements de moins de cinq ans. C’est que, indépendamment du plan national de rénovation urbaine, les communes font l’effort de reconstruire des logements sociaux. J’ai demandé à l’ANRU de faire que les 46 % de logements reconstruits en dehors de la zone le soient toujours avant d’entreprendre la démolition. J’y veillerai personnellement.

En ce qui concerne l’APL, si le Premier ministre a parlé d’une augmentation de l’ordre de 3 %, c’est un résultat de la loi sur le droit au logement opposable, qui a prévu l’indexation sur l’indice de référence des loyers. C’est une mesure importante pour le maintien du pouvoir d’achat.

M. Jean-Yves le Bouillonnec et M. Marcel Rogemont – C’est une bonne mesure.

Mme Christine Boutin, ministre du logement et de la ville Vous avez demandé qu’une volonté politique forte s’exprime pour que le foncier vendu par l’État aille toujours à des opérations de construction de logements. Cette volonté existe, mais ce ne peut être systématique : l’État vend des terrains qui ne sont pas forcément libres, et qui n’ont pas tous vocation à accueillir des logements. Il en va de même, d’ailleurs, pour la ville de Paris qui vient d’acheter des terrains et les transforme en bureaux. On ne peut donc réserver systématiquement au logement les terrains vendus par l’État.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec – Pouvez-vous nous donner quelques indications statistiques ?

Mme Christine Boutin, ministre du logement et de la ville Je vous les ferai parvenir. En tout cas, c’est une réalité qui s’impose à tous.

Reste la question du non-versement de l’allocation en-dessous de 15 euros. Elle n’est pas facile, et m’est très souvent posée. J’y réfléchis activement, mais vous devez comprendre que, lorsque je suis arrivée en mai, le budget 2008 était déjà élaboré dans ses grandes lignes. Depuis, ma réflexion a abouti sur un certain nombre de sujets, mais mon premier budget véritable sera celui de 2009.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec – Je le comprends, mais il y avait une possibilité, dès celui-ci, de résoudre la question que je posais.

Mme Christine Boutin, ministre du logement et de la ville  – Je répondrai simplement, à ce stade, que ce montant de 15 euros n’a pas été réévalué par rapport à 1988.

Monsieur Vercamer, vous avez souligné la complexité des procédures. Nous en pâtissons tous, et croyez bien que l’ai la volonté d’avancer.

S’agissant des logements indignes, je viens de lancer une opération pour traquer les marchands de sommeil. Là encore, la complexité réglementaire est telle qu’il m’a fallu d’abord définir quelles mesures je pouvais prendre. Mais sachez que la circulaire que je vais envoyer aux préfets requiert la signature de trois autres ministres.

Je vous confirme que les logements HLM vendus restent pendant cinq ans dans le quota de logements sociaux pris en compte par la loi SRU.

M. Francis Vercamer – Y compris pour les dotations financières ?

Mme Christine Boutin, ministre du logement et de la ville Oui.

On peut aussi se demander ce qui doit être comptabilisé comme logements sociaux au sens de la loi SRU. À titre personnel, je trouve surprenant que les CHRS n’en fassent pas partie. C’est une question à laquelle je réfléchis également.

Devant le manque de foncier, Madame Billard, j’ai fait une proposition simple, qui a pu surprendre, mais qui serait efficace : c’est d’autoriser, quand les conditions techniques s’y prêtent, à rehausser d’un étage les bâtiments collectifs ou individuels. Cela en demande pas de foncier supplémentaire, ni d’infrastructures de transport ou autres, et on peut espérer qu’il y aura moins de recours que contre des constructions neuves. Cette idée est à l’étude aussi en Italie et en Allemagne.

S’agissant des familles logées en hôtel, il est clair que cela coûte très cher et que c’est une très mauvaise solution. Une réponse pourrait être d’offrir des aides fiscales aux propriétaires pour les inciter à remettre des logements sur le marché, comme le propose M. Lamour mais je vous encourage à voter son amendement. Une autre réponse est la garantie des risques locatifs, dont j’ai parlé tout à l’heure.

Quant au coût du chauffage, je vous rappelle que Mme Lagarde a doublé la prime à la cuve. Ce n’est certes pas suffisant , mais cela a été fait.

Mme Martine Billard – Cela ne résout pas le problème d’environnement !

Mme Christine Boutin, ministre du logement et de la ville – En revanche, je ne crois pas que des mesures plus coercitives seraient de bonne méthode. Dans la situation de crise actuelle, il me semble essentiel, plutôt que d’opposer public et privé, ou locataires et propriétaires, de mobiliser toutes les énergies afin que chacun fasse son possible. Je suis ainsi en train de négocier un dispositif qui inciterait les propriétaires à remettre leurs logements sur le marché.

Enfin, je suis d’accord avec M. Ollier sur la politique de projets. Je pense sincèrement que les maires bâtisseurs sont des maires volontaristes, et nous allons creuser les façons de les accompagner.

Mme Fadela Amara, secrétaire d’État chargée de la politique de la ville – Je voudrais d’abord revenir sur l’ANRU : le travail qu’elle fournit est d’une qualité remarquable, et je rends hommage à M. Borloo qui s’est battu pour créer ce guichet unique. Les concertations pour l’élaboration du plan « Respect et égalité des chances » font souvent état de petits dysfonctionnements de l’Agence, mais qui sont en train de se résorber. Les responsabilités qui pèsent sur Philippe Van de Maele sont gigantesques et la rénovation urbaine est un domaine extrêmement complexe, mais sur le terrain, et notamment de la part des maires, on constate une grande satisfaction. S’agissant du débat sur la destruction, la reconstruction ou la réhabilitation, je sais que la réflexion n’est pas aboutie et qu’il faut tout faire pour trouver des solutions de logement, mais je persiste à penser qu’il faut détruire certaines barres pourries dans les banlieues. Les vacances de logements sont une réalité, mais elles existent depuis longtemps.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec – Elles ont beaucoup diminué ! Ce n’est d’ailleurs pas rassurant, car cela donne à penser que les niveaux d’exigence des familles ont baissé.

Mme Fadela Amara, secrétaire d’État chargée de la politique de la ville – Quant à la loi DALO, je pense qu’elle est parfaitement légitime. Chacun de nos concitoyens doit avoir un logement décent, c’est de notre responsabilité. Mais cette loi ne doit pas être appliquée dans les seuls quartiers en difficulté : si l’on parque les pauvres avec les pauvres, la politique de la ville en sera toujours au même point dans trente ans. Je fais entière confiance à Mme Boutin pour prendre en compte cette problématique très complexe.

Des concertations territoriales sont en cours pour l’élaboration du plan « Respect et égalité des chances », c’est-à-dire le « plan Marshall » voulu par le Président de la République. J’ai entendu les rapports de la Cour des comptes et du Sénat sur la complexité et la mauvaise lisibilité des dispositifs, j’ai entendu vos propres critiques, et j’ai entendu tous les habitants des quartiers dire la même chose lors de cette concertation. Nous allons donc faire des propositions pour améliorer cette lisibilité. Mon idée d’une gamme de couleurs pour les quartiers, qui a suscité quelques réactions polémiques, va dans ce sens.

Mais il faut sortir de la dialectique et agir, car la situation des banlieues est catastrophique, tout le monde le sait. Parmi les trois axes retenus par le Président de la République, il y a le désenclavement, qui est un objectif prioritaire ! J’aurais beau mettre en place à Clichy-sous-Bois ou à Montfermeil le plus magnifique des plans Banlieue, y consacrer tout l’argent dont je disposerais, cela ne servira à rien si ces deux villes ne sont pas désenclavées. L’État sera au rendez-vous, mais il faut que chacun assume ses responsabilités.

La politique de la ville ne pourra être pertinente et efficace que si l’on renforce le couple préfet-maire et qu’on y associe les forces vives et les associations. C’est pourquoi je veux développer les conventions pluriannuelles, qui leur facilitent beaucoup la vie. Actuellement, il faut avoir « bac + 10 » pour lire un dossier de financement ! Il faut alléger les procédures administratives pour que les associations puissent agir plus facilement, et faire en sorte qu’elles aient leurs financements dès le début de l’année. Actuellement, seules les associations les plus riches, celles qui ont une trésorerie, peuvent continuer à fonctionner dans ces conditions. Les autres, qui ont souvent les idées les plus innovantes, crèvent faute de moyens. C’est un problème qui remonte de toutes les concertations territoriales, et j’ai assuré aux associations que nous développerions les conventions pluriannuelles.

Autre priorité du plan Banlieue : l’emploi des jeunes, notamment non qualifiés – autre sujet essentiel des concertations territoriales. L’amélioration du taux de chômage a bien sûr un impact dans les cités, mais les chiffres y restent deux à trois fois plus élevés que sur le reste du territoire ! Or ce sont certains de ces jeunes désoeuvrés, réduits à passer leur temps dans les cages d’escaliers, qui peuvent basculer dans la délinquance. Il faut mettre en place un dispositif personnalisé, permettant de prendre en compte des profils différents, afin de les accompagner jusqu’à l’employabilité. Il faut bien comprendre que certains jeunes sont dans une situation telle qu’ils n’ont aucune idée de ce que cela signifie de respecter des horaires, un certain comportement, voire un certain langage ! Il y a un travail de fond à réaliser, une sorte de coaching, et nous allons nous y atteler. Votre idée, Monsieur Ollier, d’une exonération de charges sociales pour les collectivités qui sont prêtes à embaucher des jeunes, fera partie de la réflexion.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques – Ce n’est pas exactement cela. Il y a des maires qui, sans être soutenus par l’État, embauchent des jeunes pour un, deux ou trois mois, selon leurs difficultés, pour les préparer à entrer dans une entreprise. Des tuteurs, à la mairie, leur apprennent le comportement à respecter. Ces maires, toujours tout seuls, vont voir les entreprises de leur ville pour essayer de trouver des emplois. Un climat de confiance se crée, qui sert de tremplin pour l’embauche des jeunes. Dans ma ville, nous avons ainsi obtenu une centaine de CDI en dix-huit mois ! Il faudrait aider les maires qui veulent s’engager dans un tel processus, par exemple sous la forme d’une exonération de charges sociales sur ces jeunes.

Mme Fadela Amara, secrétaire d’État – Toutes les propositions tendant à lutter contre le chômage des jeunes sont les bienvenues, et je suis prête à examiner celle-là.

Enfin, je compte beaucoup sur la révision générale des politiques publiques pour améliorer la gouvernance de la politique de la ville. Selon moi, la première urgence est de coordonner les travaux de l’ANRU et ceux de l’ACSE, car rénovation urbaine et rénovation sociale vont de pair.

M. Étienne Pinte – Un budget, aussi bon soit-il, ne suffit pas à tout régler, tant s’en faut, car bien des rigidités persistent, dont nous gagnerions tous à ce qu’elles disparaissent. Un maire qui tient à construire des logements sociaux se heurte à de multiples obstacles – fonciers, administratifs, juridiques, techniques, psychologiques – dont je vous donnerai quelques exemples. En premier lieu, l’État éprouve des réticences manifestes à transférer ses terrains – j’en sais quelque chose, pour n’avoir toujours pas vu la couleur des terrains qui m’ont été promis il y a maintenant quatre ans. Il éprouve les mêmes difficultés à accorder les 35 % de réfaction prévus sur le prix fixés par les Domaines. En outre, de nombreux terrains appartenant au ministère de la défense sont pollués, et comme l’État n’a pas d’argent pour les dépolluer, des centaines d’hectares sont gelés. J’ai proposé qu’ils nous soient cédés à un prix diminué du coût de la dépollution, dont la collectivité et les aménageurs feraient leur affaire, mais je n’ai eu aucune réponse. D’autre part, il est très difficile d’obtenir de RFF des prix raisonnables, ce qui est d’autant plus fâcheux que l’établissement a un patrimoine considérable. Enfin, de nombreux bailleurs sociaux seraient intéressés par des baux emphytéotiques concernant des terrains de l’État, qui ne veut rien savoir.

Sur un autre plan, le dispositif des surloyers, inefficace parce qu’obsolète, devrait être revu. Doubler les taux permettrait de calculer des loyers plus en rapport avec la réalité du marché, en Île-de-France en tout cas.

J’en viens à l’ANAH, dont le seuil de conventionnement est trop bas. Il en résulte un écart est trop marqué entre l’aide qu’accorde l’Agence et les loyers intermédiaires. Elle ne remplit pas son rôle, comme nous l’avons constaté à regret lors d’une expérimentation conduite avec d’autres villes et tendant à la remise de logements privés sur le marché. Nous n’avons pas poursuivi, tant l’expérience a été décevante.

J’insiste sur la nécessité de coordonner la politique du logement sociale de l’État avec celle des régions, des départements, des communes et des intercommunalités. Ce n’est pas le cas aujourd’hui, si bien que la tendance générale est que chaque entité attend qu’une autre mette au pot.

Pour améliorer la capacité d’investissement des bailleurs sociaux, pourquoi ne pas continuer de les exonérer de la taxe sur le foncier bâti au-delà des vingt-cinq années actuelles, en les obligeant à construire des logements neufs ou à réhabiliter le parc existant ? J’ai fait une proposition en ce sens, qui n’a pas été acceptée à ce jour. Bien que l’élu local que je suis ait plaisir à récupérer le produit de cette taxe au terme des vingt-cinq années réglementaires, un dispositif de ce type me paraîtrait utile.

Enfin, Madame la ministre, avez-vous transmis à Mme la secrétaire d’État le rapport de la Halde relatif aux discriminations dans l’accès au logement social ?

Mme Annick Lepetit – Le budget de l’ANRU subit une diminution considérable, ses crédits de paiement chutant de 40 %. L’Agence sera pourtant très sollicitée pour mener à bien les lourdes opérations décidées en 2006. Comment seront-elles financées ? Vous avez dit votre « détermination », Madame la ministre, mais comment agirez-vous, sans budget, dans les quartiers concernés ?

Sur les effets du dispositif « Robien », je sais que, si le ministère du budget y consent, un rapport sera rendu public sous peu. Pourrions-nous sans attendre avoir quelques précisions sur l’emplacement des logements concernés par cet avantage et savoir qui sont leurs propriétaires ? Notre colère vient de ce que nous avons dès l’origine dénoncé le coût faramineux de ce dispositif pour les finances publiques. Il est maintenant avéré que des logements ainsi subventionnés restent vacants. Le mécanisme ne sert donc à personne mais, contrairement à ce qui est fait en Allemagne où les déductions fiscales sont plafonnées et les abus sanctionnés, il n’est, en France, aucunement encadré. Au moment où l’on fait feu de tout bois pour financer le logement, il s’agit là d’une dépense publique scandaleuse.

M. René Couanau – Je me dois de souligner que les dispositifs de la politique de la ville sont des mouvements à extrême complication. L’ANRU a installé des guichets uniques, ce qui est bien, mais pour le reste ! J’ai signé hier un contrat urbain de cohésion sociale et j’ai été effaré par la complexité des formalités requises. Je n’ignore pas que l’on ramasse en une seule enveloppe les miettes oubliées dans les fonds de tiroir de plusieurs administrations qui doivent toutes donner leur aval, mais ne serait-il pas temps de simplifier ce qui peut l’être, au lieu que, dans un gaspillage de ressources éhonté, on continue de perdre plus de temps en réunions de coordination qu’à agir ? Toute commune sincèrement impliquée dans la politique de la ville souhaite y associer ses habitants, mais comment faire si personne n’y comprend rien ?

Ma deuxième question concerne la politique du logement. A gauche comme à droite, nous sommes tous engagés dans le développement du logement social, que ce soit par le locatif aidé ou par l’accession sociale à la propriété – compte tenu du marché immobilier, les deux sont nécessaires. Mais nous assistons en même temps à un glissement progressif de la demande : les classes moyennes à faibles revenus, qui sollicitaient jusqu’à présent le marché privé, se tournent maintenant vers le logement social, devenu plus attrayant, si bien que dans la région de Rennes et de Saint-Malo, de plus en plus de logements privés ne trouvent plus de locataires. A-t-on une solution qui permettrait de les mettre sur le marché à des loyers plus bas ?

En matière de politique urbaine, le couple préfet-maire ne fonctionne pas. Cela nous incite aussi à nous tourner vers le logement privé.

Mme Chantal Robin-Rodrigo – Je voudrais revenir sur les CUCS et l’ACSE, car c’est de pire en pire. Les contrats de ville 2000-2006 ont au moins eu le mérite de mettre autour de la table l’ensemble des intervenants financiers. Nous avions mis en place pour ce qui nous concerne un GIP politique de la ville : lorsque l’État mettait un euro, le conseil général et l’agglomération mettaient aussi chacun un euro. Cela nous a permis de conduire des actions importantes. Rien de tel avec l’ACSE, qui verse des fonds en fonction de lignes budgétaires thématiques : pour chaque territoire, l’agence nationale délègue ainsi plusieurs enveloppes – enveloppe CUCS, enveloppe intégration et lutte contre les discriminations – un projet ne pouvant recevoir de fonds que d’une enveloppe. Comment monter un projet alors que la lutte contre les discriminations, par exemple, est définie de manière transversale ? Personne ne sait faire ! Bref, l’ACSE ne fait que compliquer les critères d’intervention de la politique de la ville et décourager les élus locaux. Ce n’est pas ainsi que nous améliorerons les choses !

Dix-neuf ministres de la ville se sont succédés en dix-sept ans. Je vous souhaite à toutes deux de rester cinq ans, comme M. Bartolone, qui avait eu le temps de mettre en place les conventions pluriannuelles qui ont amélioré de beaucoup la lisibilité des associations sur le plan financier. Aujourd’hui, nous sommes dans le brouillard. On nous promet que cela va s’améliorer pour l’ANRU. Mais sur le terrain les organismes HLM restent ses banquiers, et cela ne peut plus durer.

En ce qui concerne l’accompagnement à l’emploi, je précise enfin que les plans locaux d’insertion par l’économique – PLIE – n’ont plus de financement. Alors comment faire ?

M. Didier Migaud, Président de la commission des finances Mmes les ministres seront sensibles aux vœux personnels que vous avez formulés pour elles (Sourires).

M. Yves Vandewalle – La fluidification du parcours résidentiel est ma principale préoccupation. J’ai donc noté avec satisfaction ce que vous nous avez dit sur la mobilité au sein du parc social : c’est une réelle avancée. Je me félicite également de votre intention de revoir le surloyer de solidarité pour faciliter le passage d’un parc à l’autre. Mais il nous faut aussi faciliter l’accès au parc privé, notamment par la réduction des frais d’agence, la simplification du dépôt de garantie ou d’autres mesures préconisées à l’échelle européenne. Enfin, il est nécessaire de favoriser la production de logements sociaux – notamment neufs – si l’on ne veut pas arriver à un dispositif à deux vitesses – un parc privé performant et un parc social à la traîne. Or les investissements à consentir pour assurer une meilleure performance environnementale des logements induisent un coût supplémentaire de l’ordre de 10 %. Certains organismes sociaux estiment qu’il faudrait déplafonner les loyers pour y faire face, cette mesure étant compensée pour les locataires par la baisse des charges induite par les économies d’énergie. Voilà quelques pistes.

M. Daniel Goldberg – Je partage le constat que la chaîne de la construction de logements est bloquée. Les demandeurs de logements savent bien – hélas – que la question n’est pas réglée.

Vous aurez notre soutien sur l’aide aux maires bâtisseurs. J’ai bien noté votre engagement sur le respect de l’article 55 de la loi SRU, mais il faut aller plus loin : une politique réellement incitative devrait permettre de faire passer les villes qui sont à 22 % ou 23 % de logements sociaux à 30 %. Cela exige d’aider les maires de bonne volonté, qui devront construire en plus les équipements publics nécessaires. Bref, il faut passer des déclarations d’intention à un dispositif concret. De même, la DGF doit prendre en compte beaucoup plus rapidement l’augmentation de la population dans les communes qui construisent des logements supplémentaires – aujourd’hui, le délai est de presque dix ans !

J’en viens aux démolitions-reconstructions. Tout parlementaire que je suis, j’ai dû aller sur le site d’un quotidien pour me procurer le rapport de la Cour des comptes au Sénat ! Il y a un problème sur la typologie des logements reconstruits : quand on démolit un cinq-pièces pour reconstruire un deux-pièces, on n’est pas dans le un pour un. Il faudrait de toute façon prendre en compte les décohabitations que permet souvent la démolition-reconstruction – je pense notamment aux jeunes couples hébergés par leurs parents. En fait, il faudrait reconstruire quatre logements pour trois démolis, ce qui n’est pas pris en compte dans la règle du un pour un.

J’évoquerai également les questions de gouvernance. En Île de France, on marche sur la tête : trois établissements publics fonciers départementaux plus un établissement public foncier compétent pour l’ensemble de la région, et une aide à la pierre qui n’est pas globalisée sur la région !

Il serait par ailleurs bon que l’on différencie les différentes catégories dans la répartition du logement social. Le PLS et le PLAI, ce n’est pas la même chose !

J’observe enfin que l’augmentation de la DSU prévue dans votre budget est inférieure à celle prévue par le Plan de cohésion sociale – 94 millions d’euros au lieu de 120.

Pour conclure, j’aimerais que les deux ministres – qui semblent avoir une vision différente sur le zonage – nous disent clairement ce que compte faire le Gouvernement.

M. Philippe Boënnec – Dans certains espaces particulièrement attractifs, notamment les zones côtières et les grandes villes, l’accès des jeunes au logement reste difficile. En raison de l’augmentation des prix de l’immobilier, ils sont de plus en plus nombreux à éprouver des difficultés à se loger, alors que leur présence est indispensable à la mixité sociale et à la vie économique locale.

Bien des mesures sont envisageables afin de favoriser l’accès à la propriété, qui est un facteur de solidarité familiale et d’insertion professionnelle, mais aussi un début d’épargne pour les primo-accédants et une forme particulièrement efficace d’insertion dans le tissu social local. Pourquoi ne pas donner aux collectivités locales la possibilité de lutter contre la spéculation en recourant à des procédures de préemption ? J’ai réalisé plusieurs opérations de ce type dans ma commune, mais on pourrait faire mieux encore !

Nous pourrions de même inciter les organismes prêteurs à adopter des dispositifs spécifiques en faveur des primo-accédants, qui doivent payer pendant quelques mois leur loyer en même temps que les premiers remboursements de leur crédit.

Enfin, je rappelle que seuls 55 % des Français sont aujourd’hui propriétaires de leur logement, contre plus de 75 % dans de nombreux pays européens. Il faut donc agir !

Mme Claude Darciaux – Le Président de la République veut transformer la France en pays de propriétaires. Ce slogan pourrait être séduisant s’il n’était irréalisable…

C’est à la construction que nous devons donner la priorité, et ce n’est pas en autorisant les habitants des HLM à acquérir leur logement que l’on résoudra le problème. Souvenons-nous que seul un quart des accédants à la propriété appartenait aux classes modestes et populaires en 2004, et que la part des seules classes populaires recule.

L’accès au crédit demeure en effet réservé aux personnes jeunes et en bonne santé. Il suffit parfois d’avoir été malade pour que l’on vous refuse un crédit ! Avec la hausse des taux, les charges des ménages augmentent même de 55 euros par mois en moyenne. Il faudrait une hausse des revenus d’au moins 5 % pour compenser la hausse des taux, qui prive aujourd’hui plus de 2,5 millions de personnes de toute possibilité de devenir propriétaires.

Nous sommes d’accord sur tous les bancs : il faut construire des logements, en particulier sociaux, et surtout très sociaux. Sur ce point, je partage les propos de M. Goldberg, qui demandait plus de PLAI. On construit beaucoup de logements bénéficiant d’un PLS, mais peu de logements très sociaux.

Loin de s’être réduite, la « fracture sociale » s’est aggravée. Le droit au logement opposable sera effectif au 1er janvier, c’est vrai, mais je crains que ce soient les communes déjà vertueuses, remplissant leur quota de logements sociaux, qui soient sollicitées par le préfet. Je constate déjà une telle tendance dans ma commune.

Quant au plan Banlieue, il y a effectivement urgence. Mais où sont les crédits dans ce budget ? La moindre étincelle pourrait mettre le feu aux quartiers, et ce n’est pas une image – deux gymnases ont brûlé dans ma commune, je sais de quoi je parle ! L’emploi des jeunes doit maintenant devenir une priorité. Comme je l’ai déjà fait hier à l’occasion des rencontres territoriales organisées à Dijon, je demande des exonérations sur les charges patronales acquittées sur les jeunes résidant dans les quartiers en difficultés, qu’ils y travaillent ou non.

N’oublions pas non plus l’accès des mères de famille isolées à l’emploi et au logement. Le nombre des familles monoparentales explose dans nos quartiers. Il faudra en tenir compte dans l’élaboration du plan Banlieue.

M. Didier Migaud, président de la commission des finances – Souvenons-nous que les exonérations s’élèvent déjà à 22 milliards ! Peut-être pourrait-on commencer par mieux les cibler.

Mme Claude Darciaux – Oui, en supprimant par exemple celles qui sont accordées au titre des heures supplémentaires !

M. Marcel Rogemont – Président d’un organisme HLM, je me dois d’appeler votre attention sur plusieurs cas précis.

Nous avons récemment construit un T3 coûtant 106 000 euros. L’aide versée par l’État au titre du PLUS s’élevait à 2 140 euros, soit à peine 2 % du prix réel, contre un financement de 36 000 euros du conseil général et de l’agglomération. De son côté, l’organisme HLM a versé 5 526 euros de titre de TVA. La construction de ce logement social a donc rapporté 3 386 euros à l’État ! Et nous avons bâti 220 logements éligibles au PLUS cette année… Quand l’État cessera-t-il de gagner de l’argent par ce biais ?

La ministre a annoncé qu’un texte sur la vente des logements HLM devrait être signé, le 15 décembre prochain, avec l’Union sociale pour l’habitat. Or, le président de la fédération des offices m’a indiqué que sa position n’avait pas changé sur ce sujet. Je rappelle également que ce sont les collectivités locales qui financent, pour l’essentiel, la construction des HLM. S’il doit y avoir vente, ne faudrait-il pas leur en laisser la décision ? Si une loi vient imposer la vente…

Mme Christine Boutin, ministre du logement et de la ville – Il n’y aura pas besoin d’une loi.

M. Marcel Rogemont – Espérons-le ! Les offices qui devront vendre des logements contre l’avis des collectivités locales connaîtront certaines difficultés plus tard, notamment quand elles voudront construire de nouveaux logements.

S’agissant des surloyers, une étude du CREDOC montre qu’en 1997, 50 % des personnes résidant dans des HLM se trouvaient en dessous de 60 % du plafond, contre 66 % en 2006. En 1997, 82 % étaient également en dessous de 100 % du plafond, contre 93 % en 2006. Les HLM correspondent donc à leur destination, et les surloyers ne joueront qu’un rôle marginal.

J’en viens au droit opposable au logement : les dispositifs prévus arriveraient enfin, paraît-il ; mais pas les logements ! Dans mon département, le comité régional de l’habitat vient seulement d’annoncer les objectifs pour 2007 – ce qui est bien tardif, même si on peut comprendre ce retard pour cette année. Le problème, c’est que l’enveloppe réservée au financement des logements sociaux n’augmente pas à due proportion des logements supplémentaires que nous sommes appelés à construire. Afin de remplir les engagements quantitatifs, l’aide par logement baissera donc.

M. Régis Juanico – Quelle cohérence y a-t-il à stabiliser le financement de l’équité sociale dans ce budget – malgré les réductions successives qui eurent lieu jusqu’aux émeutes de 2005 – alors que, dans le même temps, le budget de la vie associative que nous avons examiné la semaine dernière diminue de 3 %, et même de 5 % pour les associations d’éducation populaire, dont on connaît pourtant le rôle essentiel dans certains quartiers ? Soutien d’une part, abandon de l’autre : quelle est cette logique ?

S’agissant des zones franches urbaines, sur lesquelles Mmes les ministres semblent diverger quelque peu, je m’interroge sur les 340 millions consacrés à la compensation d’exonérations de charges sociales – en regard des 414 millions affectés aux actions de proximité du tissu associatif. Quand disposerons-nous d’une évaluation précise de cette mesure ?

M. François Brottes – Pour commencer, quelques observations perfides (Sourires) : nous avons eu raison, Madame la ministre, de demander le report de votre audition, initialement prévue à 18 heures 30. Songez, vu l’intérêt que vous suscitez, le temps qu’il nous aurait fallu siéger ! Je note cependant que, quelle que soit l’heure, vous vous appliquez à supprimer les crédits du dispositif Robien. Par ailleurs, la loi DALO me semble en contradiction avec un texte que M. Karoutchi, avant de devenir ministre, nous avait proposé, pour exclure en quelque sorte la construction de logements sociaux du quartier de la Défense et les réserver à l’Est parisien.

Plusieurs questions, ensuite : tout d’abord je reçois de nombreux coups de téléphone s’agissant du calendrier de la vente des HLM. Dois-je donner à mes interlocuteurs votre numéro, Madame la ministre ? Vous savez bien que vous ne pourrez prendre aucune initiative en la matière sans l’accord des communes.

D’autre part, chacun souhaite encourager l’accession sociale à la propriété. Or, la spéculation, à laquelle pourraient se livrer les accédants, est souvent un frein à l’enthousiasme des collectivités : comment l’éviterez-vous ?

Par ailleurs, vous devez nous aider à valoriser la notion de densité de construction : tout le monde ne peut pas s’attendre à devenir propriétaire d’une villa ou d’un domaine !

Un mot sur la colocation choisie, qu’il faut encourager : les bailleurs sociaux n’ouvrent pas spontanément ce droit, et certains propriétaires sont loin d’être vertueux, en matière de caution notamment.

Enfin, je m’interroge sur l’attitude du service des Domaines qui, souvent en avance sur les prix du foncier, contribue à les renchérir. Ne faudrait-il pas le contrôler plus étroitement, sachant que le foncier est précisément au cœur de votre action ?

Mme Christine Boutin, ministre du logement et de la ville – Le temps me manque pour répondre à tous, mais je me tiens prête à revenir à tout moment si vous le souhaitez, et je répondrai par écrit à certains d’entre vous – à M. Pinte, par exemple, dont je souligne le remarquable travail social à Versailles qui n’est pas seulement, comme on le dit trop souvent, une ville de nantis.

Mme Lepetit trouvera des réponses précises sur le dispositif Robien dans un rapport qui vous sera adressé.

À M. Couanau, je rappelle que 72 % de la population française est éligible à l’attribution d’un logement HLM, mais que 22 % seulement en bénéficient. Autrement dit, un Français sur deux est locataire dans le secteur libre.

S’agissant des PLI, il faut se souvenir qu’ils sont désormais à la charge des départements.

Nous travaillons, Monsieur Goldberg, à la piste que vous évoquiez concernant la mise en adéquation de la DGF avec la réalité de terrain.

Plusieurs d’entre vous ont évoqué l’Île-de-France, où la situation est en effet très tendue : j’ai demandé au préfet Mutz de convoquer les états généraux du logement francilien ; quatre groupes de travail et un groupe de pilotage se réuniront donc dès demain.

M. Rogemont a manqué quelque peu d’objectivité : l’équilibre du financement du logement social est assuré par un ensemble de mesures fiscales, que vous oubliez.

Enfin, Monsieur Brottes peut rassurer ceux qui s’inquiètent de la vente des HLM : il ne s’agit pas de menacer quiconque d’un éventuel couperet. Nous voulons tendre vers un objectif et, si possible, le dépasser, mais le volontariat, en l’espèce, a force de loi. Quant à la densité, nous y avons répondu en autorisant la construction d’un étage supplémentaire. Enfin nous serons attentifs à la politique du service des Domaines.

Mme Fadela Amara, secrétaire d’État – Le PLF pour 2008 prévoit les crédits nécessaires au règlement des opérations engagées par l’ANRU, même s’ils sont en baisse par rapport à 2007, et ce pour des raisons surtout techniques : les paiements se font plus lentement que prévu. Certes, il faut améliorer le montage des dossiers mais, d’ores et déjà, le règlement général de l’ANRU a clarifié les choses en substituant le versement d’avance à hauteur de 15% au paiement sur service accompli. L’harmonisation avec les DDE est indispensable pour éviter tout doublon, et le couple que forment le maire et le préfet devra être au cœur du dispositif de paiement et de suivi. L’État tiendra son rôle et respectera tous ses engagements. Je connais les problèmes liés à cette « bosse » de l’ANRU, mais je mettrai toute ma force de persuasion à accélérer les opérations, afin que l’argent arrive plus vite sur le terrain.

Quant aux CUCS, auxquels sont associés tous les acteurs de terrain, il me semblent encore trop récents pour pouvoir vraiment les évaluer. Peut-être faut-il dans un premier temps améliorer l’information des intervenants. Le CUCS, en effet, est un contrat ambitieux qui couvre tous les aspects d’une crise sociale, de l’emploi à la délinquance.

Je pense sincèrement qu’il faut inciter les partenaires – qui sont très nombreux – à se parler, ne serait-ce que parce que l’on signe pour trois ans. Bien entendu, il faudra s’obliger à évaluer le dispositif une fois qu’il aura commencé de produire ses effets.

Vous avez regretté que l’ACSE semble adopter un mode de fonctionnement trop rigide : je vous rappelle qu’il revient au préfet de ventiler son enveloppe en fonction des projets qui lui semblent prioritaires. Seul le volet relatif à la réussite éducative fait l’objet d’un encadrement très strict. Entre nous, le système a aussi été conçu de cette façon pour éviter que l’argent n’aille aux associations les plus proches de l’élu du coin, au détriment des structures plus récentes ou plus novatrices !

Pour ce qui concerne le plan banlieue – que le Président de la République imagine comme un véritable « plan Marshall » pour les banlieues –, nous partageons à l’évidence, Madame la députée, le même souci. Pour que les choses changent, nous devons mettre l’accent sur la lutte contre le chômage, notamment des jeunes et des femmes chefs de familles monoparentales ; le plan « Respect et égalité des chances » constitue à cet égard une première étape. Soyez rassurée : nous avons conscience que l’emploi constitue la première priorité et nous en faisons l’axe central de toute notre action.

Dans les réunions de concertation – auxquelles je me félicite que vous ayez participé – comme dans les réunions d’appartement que je tiens à chacun de mes déplacements dans les cités, j’entends la demande de sécurité des femmes qui élèvent seules des enfants dans un environnement difficile. Nous devons y répondre et tout faire pour les rassurer, même si cela ne figure directement dans aucun des trois axes prioritaires tracés par le Président de la République.

S’agissant, Monsieur Juanico, du financement des associations, je me garderai bien de toute polémique. D’abord transversale, la politique de la ville ne dispense en rien de mobiliser tous les outils relevant du droit commun. Elle doit être envisagée comme un plus, destiné aux quartiers confrontés aux difficultés les plus extrêmes.

Plusieurs députés du groupe UMP – Très bien !

Mme Fadela Amara, secrétaire d’État S’agissant des dispositifs de droit commun intéressant les secteurs de la jeunesse et de la vie associative, je serai attentive à ce que mes collègues du Gouvernement remplissent leurs obligations et fassent preuve d’un sens aigu des priorités. Tout doit être fait pour que nous ne revivions pas les événements de l’automne 2005.

M. Didier Migaud, président de la commission des finances – Il me reste à remercier mesdames les ministres. Pour riche qu’elle ait été, la discussion n’épuise pas le sujet mais il est temps de passer au vote des crédits.

La séance est levée à 13 heures 5.

La Directrice du service
du compte rendu analytique,

Marie-Christine CHESNAIS

© Assemblée nationale