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Compte rendu

Commission des affaires culturelles, familiales et sociales

Mardi 17 juin 2008

Séance de 17 heures

Compte rendu n° 48

Présidence de Pierre Méhaignerie Président

– Audition, ouverte à la presse, de Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative, de M. Eric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique, et de Mme Valérie Létard, secrétaire d’État chargée de la solidarité, sur la mise en application de la loi n° 2007-1786 du 19 décembre 2007 de financement de la sécurité sociale pour 2008 (MM. Yves Bur, Jean-Pierre Door, Denis Jacquat et Hervé Féron, rapporteurs) 2

La commission des affaires culturelles, familiales et sociales a procédé à l’audition, ouverte à la presse, de Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative, de M. Eric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique, et de Mme Valérie Létard, secrétaire d’État chargée de la solidarité, sur la mise en application de la loi n° 2007-1786 du 19 décembre 2007 de financement de la sécurité sociale pour 2008

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales : Je donne immédiatement la parole aux rapporteurs sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale.

M. Yves Bur, rapporteur pour les recettes et l’équilibre général : Apprécier l’application de la loi de financement de la sécurité sociale constitue un exercice de nature un peu particulière compte tenu de sa spécificité. La proportion d’articles d’application directe y est en effet très élevée – 62 sur 101. Ces dispositions sont importantes même si elles n’entrent pas dans le strict cadre de l’évaluation prévue par l’article 86 de notre règlement. Nombre d’entre elles sont ainsi de nature purement financière, mais sur ce point, nous en saurons davantage dès demain dans le cadre de la réunion de la Commission des comptes de la sécurité sociale.

Les textes d’application de seulement huit articles ont été publiés, totalement ou partiellement, sur les 39 restants – parfois tout récemment, comme si l’exercice auquel nous nous livrons aujourd’hui favorisait une subite floraison de décrets et arrêtés. Certains textes seraient par ailleurs en voie d’être signés.

Il est vrai que l’application de la loi de financement représente une charge de travail d’autant plus importante qu’elle compte chaque année de plus en plus d’articles. La compétence et le dévouement des administrations ne sont donc pas en cause.

Au-delà de l’application au sens strict, c’est-à-dire de l’édiction de textes règlementaires et conventionnels, la mise en œuvre des dispositions de la loi de financement, d’application directe ou non, doit également nous intéresser. Publier des décrets n’est en effet qu’une condition nécessaire, mais pas suffisante, de l’application de ces dispositions.

Je souhaiterais obtenir des précisions sur les dispositions relatives aux recettes.

En ce qui concerne l’article 16, l’arrêté fixant le modèle de déclaration des préretraites et cessations anticipées d’activité n’est pas encore publié alors que les données sociales doivent être transmises avant le 31 janvier. Comment les chefs d’entreprise pourront-ils transmettre les données sur les préretraites et les cessations anticipées d’activité intervenues entre le 11 octobre et le 31 décembre 2007 ?

S’agissant de l’article 20, relatif à l’affiliation au régime général des personnes exerçant une activité procurant de faibles revenus, quelles sont les principales orientations de la circulaire en cours d’élaboration quant aux modalités d’évaluation du dispositif ?

Par ailleurs, l’article 138 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2007 a créé le répertoire national commun aux organismes de sécurité sociale. L’article 111 de la loi de financement pour 2008 en a étendu l’accès à une troisième catégorie d’organismes, les centres communaux et intercommunaux d’action sociale. Malheureusement, l’article 138 n’a fait encore l’objet d’aucune mesure règlementaire d’application. Sans méconnaître les difficultés techniques de constituer un fichier national regroupant les informations nominatives de l’ensemble des assurés sociaux, les parlementaires aimeraient être informés de l’état d’avancement de ce grand chantier informatique et de l’avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL).

Qu’en est-il enfin de l’obligation pour les pharmaciens de délivrer les traitements pour les affections de longue durée en grands conditionnements, de la taxation des feuilles de soins pour encourager les praticiens à télétransmettre et des modalités de mise en application de l’information sur les dépassements d’honoraires ? Je sais que ces propositions votées à mon initiative ne devraient pas tarder à s’appliquer, mais j’aimerais que vous nous en disiez davantage.

M. Jean-Pierre Door, rapporteur pour l’assurance maladie et les accidents du travail : La loi de financement de la sécurité sociale pour 2008 comporte 41 articles concernant spécifiquement les dépenses d’assurance maladie, dont 2 dans sa deuxième partie relative à l’année 2007. Parmi ceux-ci, 19 articles ne nécessitaient aucun texte réglementaire et sont entrés en vigueur dès le lendemain de la promulgation de la loi. Il s’agit tout d’abord des articles visant à fixer les montants des objectifs de dépenses, comme l’objectif national de dépenses d’assurance maladie (ONDAM), ou des dotations à divers organismes, tels que l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM), le Fonds d’intervention pour la qualité et la coordination des soins (FIQSC) ou l’Établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires (EPRUS).

D’autres articles de la loi, également d’application directe, prévoyaient diverses mesures telles que : la modification de la procédure d’alerte et des modalités d’entrée en vigueur des accords de revalorisations tarifaires, la prise en compte du critère médico-économique dans les avis et les recommandations de la Haute autorité de santé, l’instauration du dépistage et de la vaccination, anonymes et gratuits, des hépatites virales dans les centres de soins, d’accompagnement et de prévention en addictologie (CSAPA). L’ensemble des articles relatifs aux accidents du travail et aux maladies professionnelles sont également d’application directe.

Par ailleurs, plusieurs dispositions de la loi ne nécessitaient pas l’adoption d’un décret ou d’un arrêté mais celle d’un accord conventionnel entre l’assurance maladie et les syndicats représentatifs des professionnels de santé concernés. C’est le cas notamment des trois articles qui nécessitent, et exclusivement, l’adoption de telles mesures concernant la contribution forfaitaire aux frais de gestion des professionnels n’assurant pas une transmission électronique des feuilles de soins, dont le montant doit être déterminé par les partenaires conventionnels, d’une part, et les mesures visant à favoriser une répartition plus équilibrée des professionnels de santé sur l’ensemble du territoire, d’autre part.

Enfin, 19 articles nécessitaient la parution d’un ou plusieurs textes réglementaires. Or une grande partie de ces articles n’a toujours pas reçu la traduction réglementaire nécessaire à leur mise en application. C’est notamment le cas pour ceux visant à : permettre aux infirmiers d’effectuer, sans prescription médicale, certaines vaccinations ; autoriser les médecins à adhérer à des contrats comportant des objectifs individualisés d’amélioration des pratiques ; améliorer l’information des assurés et renforcer le contrôle des caisses d’assurance maladie sur les dépassements d’honoraires ; permettre aux missions régionales de santé (MRS) d’expérimenter de nouveaux modes de rémunération ; prévoir des pénalités financières pour lutter contre certains abus ; renforcer les incitations pour les bénéficiaires de la couverture maladie universelle complémentaire (CMUc) à s’inscrire dans le parcours de soins. Sont également concernées les dispositions relatives au dossier pharmaceutique, aux critères de classification des zones de recours aux soins ambulatoires par les MRS ou à l’interruption volontaire de grossesse par voie médicamenteuse dans les centres de planification.

Sur les 36 textes règlementaires prévus par la loi ou jugé nécessaires à son application par le gouvernement, seuls 7 ont été publiés, dont 4 décrets et 3 arrêtés, ainsi que 3 circulaires, concernant principalement les franchises médicales et la tarification à l’activité (T2A). Cependant, à l’exception du décret relatif au dossier médical personnel (DMP), la plupart d’entre eux devraient être prochainement publiés. Permettez-moi à présent de vous poser quelques questions, Madame la ministre.

– Le rapport sur l’utilisation des franchises, prévu par l’article 52 de la loi, pourra-t-il être remis au Parlement d’ici l’automne prochain, afin d’assurer toute la transparence en la matière et apaiser ainsi les inquiétudes qui ont pu s’exprimer sur ce point ?

– S’agissant des dépassements d’honoraires, quelle est la date prévisionnelle de publication des trois textes réglementaires nécessaires à la mise en application des articles 39 et 51 de la loi, relatifs à l’affichage des informations sur les honoraires des professionnels de santé dans leur salle d’attente, à la délivrance d’une information écrite préalable par ces professionnels à leurs patients concernant le tarif des actes effectués ainsi que le montant du dépassement et aux pénalités financières concernant notamment les dépassements d’honoraires excédant le tact et la mesure ? Quelles sont les principales dispositions de ces projets de texte d’application ?

– L’article 44 prévoit le lancement par les MRS d’expérimentations de nouveaux modes de rémunération des professionnels de santé et de financement de la permanence des soins. Cette mesure pourrait permettre de renforcer structurellement l’efficience de notre système de santé. Dès lors, pourquoi les décrets d’application n’ont-ils pas encore été publiés ? Quelle est la date prévue pour le lancement effectif de ces expérimentations ?

– Suite aux différents travaux, en particulier parlementaires, remis à ce sujet au cours du premier semestre 2008, et à l’avis récent du Comité consultatif national d’éthique pour les sciences de la vie et de la santé (CCNE), quel est le calendrier de relance du dossier médical personnalisé (DMP) ? Le décret prévu par l’article 55 de la loi pourra-t-il être publié avant la fin de l’année ?

– Concernant les établissements de santé, le décret n° 2007-1931 du 26 décembre 2007 portant diverses dispositions financières ainsi que deux arrêtés en date des 26 décembre 2007 et 23 janvier 2008 ont permis d’appliquer toutes les dispositions de l’article 62 de la loi concernant la valorisation de l’activité à 100 % des tarifs dans les établissements antérieurement sous dotation globale. Désormais les hôpitaux publics sont financés intégralement par la tarification à l’activité comme les cliniques privées, ce qui permettra aux établissements les plus dynamiques de poursuivre la recherche de gains d’efficience. Pourtant, la T2A ne peut seule remédier à la situation financière critique de nombre d’hôpitaux publics et il est regrettable que n’ait pas été édicté le décret prévu pour fixer les critères de déséquilibre financier justifiant l’élaboration d’un plan de redressement et la conclusion d’un avenant au contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens entre l’établissement de santé en difficulté et l’Agence régionale de santé (ARH). Quelles sont les raisons de ce retard ?

– Par ailleurs, quels progrès ont été réalisés en vue d’un constat objectif et partagé sur les écarts de coûts entre les tarifs du public et du privé ? Le rapport prévu par l’article 62 sur le bilan des travaux relatifs à l’ampleur et aux causes de ces écarts pourra-t-il effectivement être remis au Parlement avant le 15 octobre 2008 ?

– Enfin, même si l’article 65 de la loi est d’application directe et ne prévoit qu’à compter du 1er janvier 2009 d’imputer les dépenses afférentes aux prescriptions assurées par des professionnels de santé exerçant en ville sur le budget des établissements de santé lorsque ces dépenses ont été prescrites sans mention du numéro personnel d’identification du médecin mentionné à l’article L. 162-5-15 du code de la sécurité sociale, où en est la mise en œuvre effective de ce numéro ?

Je vous remercie de vos réponses, Madame la ministre, ainsi que vos collaborateurs et les services du ministère, particulièrement la direction de la sécurité sociale (DSS), pour leur aide précieuse.

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission : Sur 61 textes d’application nécessaires, 49 restent à publier ! Que de progrès à faire !

M. Hervé Féron, rapporteur pour la famille : Permettez-moi de vous poser quelques questions sur la branche famille.

Les associations familiales et les caisses d’allocations familiales (CAF) s’inquiètent de ne toujours pas savoir si le principe de la modulation de l’allocation de rentrée scolaire (ARS) selon l’âge de l’enfant sera appliqué pour la rentrée scolaire 2009. Il est urgent de prendre une décision car la prestation est versée mi-août.

Je rappelle que la question d’une réforme à budget constant est toujours posée. Si tel est le choix du gouvernement, la prestation sera réduite pour les enfants du primaire au bénéfice des collégiens ou des lycéens.

Aucun compromis ne semble s’être dégagé des récentes concertations entre le conseil d’administration de la Caisse nationale des allocations familiales (CNAF) et les associations familiales. Quelles sont leurs positions respectives ?

La réforme sur la majoration unique à 14 ans des allocations familiales permettra à la branche famille d’économiser 138 millions d’euros. Il serait équitable de s’en servir pour financer la réforme de l’ARS au moment où le pouvoir d’achat des familles modestes baisse.

Je me réjouis par ailleurs de la publication des textes d’application de l’article 94, qui crée un droit d’option entre la prestation de compensation du handicap et le complément d’allocation d’éducation de l’enfant handicapé. Comment les maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) pourront-elles faire face à ces nouvelles demandes alors que les délais d’instruction pour la prestation de compensation du handicap des adultes sont déjà très longs ?

Qu’en est-il du projet de créer une prestation de compensation spécifique aux enfants handicapés ? Un groupe de travail sera-t-il créé par la délégation interministérielle aux personnes handicapées ?

Enfin, l’article 95 de la loi de financement vise à clarifier le droit aux prestations familiales des ressortissants communautaires qui n’ont plus à justifier d’un titre de séjour ou d’une autorisation de travail pour séjourner dans un autre État européen, en s’appuyant sur les règles d’une directive européenne transposée en droit interne par la loi du 24 juillet 2006 relative à l’immigration et à l’intégration – les ressortissants communautaires doivent exercer une activité professionnelle ou prouver qu’ils disposent de ressources suffisantes et d’une assurance maladie. Les avis ont divergé sur la nécessité de publier un texte réglementaire, la direction de la sécurité sociale ayant considéré dans un premier temps que le décret du 21 mars 2007 relatif au droit de séjour en France des citoyens de l’Union européenne suffisait. Cependant, suite aux multiples questions pratiques soulevées par les caisses d’allocations familiales (CAF), il a été décidé de préparer une circulaire. Confirmez-vous cette décision ? Le recours à une circulaire n’est-il pas juridiquement risqué ? En précisant la manière de vérifier la réalité des ressources du demandeur ou la date de son arrivée en France, la circulaire pourrait être plus restrictive que le décret du 21 mars 2007 et encourir la sanction du Conseil d’État.

La politique familiale doit rester dynamique. S’il faut moderniser certaines prestations, la branche famille devenue excédentaire ne doit pas servir de variable d’ajustement pour l’équilibre des finances sociales.

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission : Permettez-moi de dire quelques mots de la branche vieillesse, dont le déficit ne doit pas occulter l’avancée sociale qu’a représentée la retraite anticipée des assurés ayant accompli une carrière longue avant
60 ans.

En France, les cotisations UNEDIC sont de 6,4 points, contre une moyenne de 4, voire moins, pour les autres pays européens. Il resterait ainsi une marge de manœuvre pour équilibrer la branche vieillesse et sécuriser les régimes de retraite en transférant une fraction des cotisations chômage vers les cotisations retraite.

Par ailleurs, beaucoup de cadres choisissent un départ anticipé à la retraite de peur de ne pouvoir à l’avenir bénéficier d’un même niveau de retraite complémentaire. Cette situation est fort inquiétante pour les entreprises. Quelles mesures peut-on prendre ?

M. Marcel Rogemont : Selon les informations figurant dans l’avant-projet de rapport, les franchises devraient rapporter 850 millions d’euros par an qui financeront la poursuite du plan Alzheimer et du plan national de lutte contre le cancer ainsi que le développement des soins palliatifs. Pour mesurer l’impact réel des franchises, il serait toutefois utile d’avoir des informations précises sur le montant des dépenses qui ont été consacrées à chacune de ces actions en 2007.

M. Pierre Morange : S’agissant du recours au numéro d’identification (communément appelé numéro de sécurité sociale) comme identifiant au répertoire national commun des organismes de sécurité sociale, un comité de pilotage a été constitué et un décret serait en cours de finalisation. Il semble qu’il aurait déjà été transmis pour avis consultatif à la CNIL et devrait être présenté en Conseil d’État en septembre. L’hébergeur qui recueillera l’ensemble des informations dans le fichier sécurisé devrait être opérationnel mi-2009 et l’ensemble des connexions avec la totalité des organismes sociaux devrait être effective début 2010. Confirmez-vous cet agenda ? La disposition votée à la suite des travaux de la Mission d’évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale (MECSS) visait à améliorer les services rendus aux administrés et à lutter contre la fraude. Disposez-vous d’une estimation des bénéfices attendus de ce dispositif ?

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission : Pour quelles raisons le décret d’application n’a-t-il toujours pas été publié compte tenu des délais écoulés depuis l’adoption de ces dispositions, d’autant qu’il y a une urgence certaine en la matière ?

M. Jean-Luc Préel : M. le Ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique, le gouvernement, conformément à son engagement, a financé les exonérations de cotisations sociales qui s’élevaient à plus de 5 milliards d’euros, mais la Cour des comptes a critiqué le mécanisme retenu. Qu’en est-il ? Depuis, une dette de 2,5 milliards d’euros s’est reconstituée. Est-il prévu de la compenser cette année ou lors de la prochaine loi de financement de la sécurité sociale ? Par ailleurs, comment seront financées les lois de financement pour 2007 et 2008, votées en déficit ? Où en sommes-nous sur ce point et où en est le DMP ?

Enfin, les établissements de santé sont en train de voter les états prévisionnels des recettes et des dépenses (EPRD), approuvés ou non par les ARH : est-ce bien raisonnable de ne le faire qu’à la fin juin ? Peut-on réduire les délais ? Par ailleurs, quelles seront les conséquences des baisses des tarifs sur la trésorerie des établissements ?

M. Roland Muzeau : L’an dernier, un rapport de l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS) a mis en évidence le doublement en quinze ans du montant des dépassements d’honoraires, qui apportent aux médecins 2 milliards de revenus sur les 19 milliards d’honoraires, les deux tiers de ces dépassements restant à la charge des patients. L’IGAS dénonçait également les inégalités d’accès, voire les renoncements aux soins et un recul de la solidarité nationale. Le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2009 prévoira-t-il des mesures pour lutter contre ces abus, alors que l’IGAS proposait d’encadrer, voire de supprimer les dépassements ? L’assurance maladie pourra-t-elle assumer sa mission de contrôle et sanctionner les médecins ou allez-vous traiter ce problème « par la bande », c’est-à-dire par la mise en place d’un secteur optionnel et des revalorisations tarifaires ?

La mission d’évaluation et de contrôle de la sécurité sociale du Sénat vient de conclure à la légitimité de nouveaux transferts des dépenses prises en charge par les régimes d’assurance maladie obligatoire vers les organismes complémentaires, notamment pour les cures thermales, la kinésithérapie et l’homéopathie, ainsi qu’à la possibilité d’augmenter la participation des complémentaires au fonds de financement de la couverture maladie universelle. Des mesures dans ce sens figureront-elles dans le PLFSS pour 2009 ? Comment garantir alors le principe d’universalité de la sécurité sociale ?

Enfin, en avril dernier, M. Jean Le Garrec a rendu ses conclusions sur la réforme du Fonds de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante (FCAATA). Les organisations syndicales et les associations de défense des victimes de l’amiante ont jugé que l’occasion de proposer un système plus juste et moins opaque avait été manquée. Que pensez-vous, Mme la ministre, de ce rapport ? Le PLFSS pour 2009 permettra-t-il d’augmenter les contributions au FCAATA de l’État et des entreprises qui ont exposé leurs salariés à l’amiante ou avez-vous abandonné l’intention d’augmenter le montant de l’allocation de cessation anticipée d’activité (ACAATA) ?

M. Régis Juanico : Permettez-moi de revenir sur la situation financière des hôpitaux publics qui présentent aujourd’hui un déficit cumulé de l’ordre de 800 millions d’euros. Nombre de CHU sont aujourd’hui en déficit et il est demandé aux élus, au sein des conseils d’administration, d’entériner des plans de redressement financiers imposés par les ARH, sans qu’il leur soit possible de se déterminer, alors même que chacun s’accord à reconnaître, comme l’illustre la question posée au gouvernement le 4 juin 2008 par M. Olivier Jardé, ce sont bien souvent des décisions prises au niveau national qui sont à l’origine de ces déficits ? qu’il s’agisse de la baisse des tarifs hospitaliers, de l’évolution insuffisante de l’enveloppe des missions d’intérêt général et d’aide à la contractualisation (MIGAC) ou de l’explosion des charges de fonctionnement (dépenses énergétiques, prix des médicaments, assurances).

Que compte dès lors faire le gouvernement pour résorber ces déficits et ne pas mettre en difficulté les élus locaux lors des conseils d’administration où ils sont parfois obligés d’entériner des plans de redressement prévoyant la suppression des 100 à 200 emplois sur leur territoire ?

M. Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique : Nous respectons le cadrage financier de la loi de financement de la sécurité sociale. Demain, nous animerons avec Mme Roselyne Bachelot, Mme Valérie Létard et M. Xavier Bertrand la Commission des comptes de la sécurité sociale. Contrairement à l’année dernière, le seuil d’alerte n’est pas déclenché. L’ONDAM sera dépassé d’environ 700 millions d’euros, selon les prévisions, mais nous prenons garde, avec Mme Bachelot, à limiter les dépenses.

Sur les cinquante articles relatifs au champ financier, seuls huit appelaient un texte d’application. Deux sont publiés aujourd’hui – le redressement forfaitaire en cas de travail dissimulé et le contrôle des arrêts de travail avec la contre-visite de l’employeur. Les textes d’application relatifs aux exonérations pour les jeunes agriculteurs et aux taxes pharmaceutiques sont signés et en cours de publication.

En ce qui concerne l’article 20, le texte d’application est soumis à l’avis des caisses nationales de sécurité sociale. La circulaire définira les modalités d’évaluation du dispositif, qui devrait entrer prochainement en vigueur, en s’appuyant sur les associations relais.

S’agissant de l’article 16, qui impose aux employeurs d’adresser chaque année au ministère du travail une déclaration indiquant le nombre de salariés partis en préretraite ou mis en cessation anticipée d’activité, leur âge et le montant des avantages alloués, il serait prématuré de fixer les modèles de déclaration car les concertations sur l’emploi des seniors sont en cours et les dispositifs pourraient évoluer. Les modèles ne seront réalisés que pour les déclarations transmises à partir de 2009.

Cela étant, l’article 16 s’applique bel et bien et le dispositif de préretraite a permis de collecter 80,4 millions d’euros contre 60 auparavant. Les mises à la retraite d’office ont permis de dégager 3,5 millions en 2007, sur une assiette de 13,9 millions et 130 établissements.

Concernant l’article 111 qui vise à constituer un fichier national regroupant les informations nominatives de l’ensemble des assurés sociaux, nous avons rencontré la CNIL le 9 juin. Elle sera saisie du projet de décret en juillet et ce dispositif devrait être mis en œuvre à partir de 2009. La Caisse nationale d’assurance vieillesse sera chargée de réaliser le répertoire commun qui sera financé dans le cadre de la convention d’objectifs et de gestion 2009-2012.

Nous avons par ailleurs l’intention d’affecter, à taux de cotisation égal, une partie des cotisations UNEDIC à la Caisse nationale d’assurance vieillesse.

M. Jean-Luc Préel est revenu sur les critiques émises par la Cour des comptes à l’encontre du mécanisme par lequel nous avons réglé une partie des dettes de l’État envers la sécurité sociale. L’ACOSS a émis des billets de trésorerie pour 5,1 milliards d’euros. La Caisse de la dette publique, grâce à des recettes de privatisation, les a souscrits puis a abandonné la créance qu’elle détenait sur l’ACOSS, laquelle a alors annulé la dette de l’État à son égard. Cette opération s’est réalisée dans la plus totale transparence et a été expliquée devant la commission des finances et la représentation nationale. La Cour nous reproche de ne pas avoir inscrit cette dette au budget 2007, mais cette dette s’est accumulée bien avant l’exercice 2007 qu’elle ne concernait pas. Nous avons en tout cas apuré la dette au 31 décembre 2006. Certes, elle s’est reconstituée, mais j’espère que la prochaine loi de finances pourra l’apurer à nouveau.

J’ai fait parvenir, à la demande du Premier ministre, des instructions aux gestionnaires des ministères pour leur demander de ne pas alourdir la dette à l’égard de la sécurité sociale.

Je tiens enfin à vous rassurer, il n’est pas question, s’agissant du déficit à fin 2007 qui s’élève à 23 milliards d’euros pour le régime général et à un peu plus de 7 milliards d’euros pour le Fonds de financement de la protection sociale agricole (FFIPSA), de prolonger la durée de vie de la Caisse d'amortissement de la dette sociale (CADES), ni d’utiliser le Fonds de réserve des retraites (FRR) ou le flux d’alimentation de ces fonds, ni d’augmenter la contribution pour le remboursement de la dette sociale (CRDS).

Il reste peu de solutions pour utiliser les excédents disponibles. Grâce à la baisse du chômage, nous pourrons transférer une partie des excédents du Fonds de solidarité vieillesse pour couvrir l’annuité d’amortissement de la dette supplémentaire que nous transférerons à la CADES, y compris la dette du Fonds de solidarité vieillesse, qui s’élève à 3,8 milliards d’euros. Je vous donnerai d’autres précisions dans les prochaines semaines.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative : Sur 42 articles de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2008 concernant le ministère de la santé, 20 sont d’application directe, les 22 autres nécessitant 31 décrets et arrêtés d’application. Sur ces 31 textes, 11 sont d’ores et déjà publiés ou en cours de contreseing et 20 ont été élaborés ou sont en cours de concertation. Les débats sont récurrents s’agissant des retards pris mais je note qu’il n’en va pas différemment eu égard aux années précédentes, quels qu’aient été les gouvernements qui se sont succédé. À cela s’ajoute que le ministère de la santé est à l’origine de 30 % des textes règlementaires de l’ensemble du gouvernement…

M. Roland Muzeau : Quelle santé !

Mme la ministre : … alors que son administration – à laquelle je rends hommage – représente moins de 1 % des personnels administratifs de l’État. En outre, les textes votés sont extrêmement complexes, impliquent des concertations avec des acteurs très divers et comportent des aspects éthiques, voire philosophiques, particulièrement délicats. Les efforts réalisés, enfin, sont loin d’être négligeables.

Les textes réglementaires qui ont été publiés ou les articles qui sont d’application directe ont d’ores et déjà permis d’engager un changement en profondeur de notre système de santé – même si des progrès restent bien entendu à accomplir. Je songe, tout d’abord, aux modalités d’entrée en vigueur des accords conventionnels prévoyant des revalorisations tarifaires prévues à l’article 36 : le délai de six mois entre la date de ces accords et l’entrée en vigueur des revalorisations s’applique déjà pour les orthoptistes et pourrait s’appliquer prochainement aux généralistes dans l’hypothèse d’un avenant portant la consultation à 23 euros.

C’est également le cas avec la prise en compte de critères médico-économiques dans les avis et recommandations de la Haute autorité de santé (HAS), en application de l’article 41. J’ai envoyé au début de l’année une lettre de mission à son président pour lui demander que soit mise en œuvre sans tarder cette nouvelle mission afin de promouvoir les thérapeutiques les plus efficaces et les plus économiques ; les premières recommandations pourraient être émises par la HAS cet été en ce qui concerne l’intérêt relatif des inhibiteurs de l’enzyme de conversion (IEC) par rapport aux sartans dans la prise en charge de l’hypertension artérielle.

En outre, les franchises médicales sont appliquées depuis le 1er janvier 2008 aux boîtes de médicaments, aux transports sanitaires et aux actes paramédicaux. La rapidité avec laquelle cette mesure a été mise en œuvre permet aujourd’hui un rendement conforme aux prévisions initiales, celui-ci représentant en effet un peu plus de 300 millions d’euros à la fin du mois d’avril. Le rapport qui doit être adressé au Parlement à ce sujet sera transmis avant la fin de l’année : il indiquera les montants correspondants aux franchises qui auront pu être affectés à la lutte contre la maladie d’Alzheimer et contre le cancer mais également au développement des soins palliatifs. Je vous ferai part de chiffres plus précis mais je peux d’ores et déjà vous indiquer que le montant des dépenses pour 2007, s’agissant du régime général, atteindrait 13 milliards d’euros pour le cancer (soit 3,5 % d’augmentation par an), 2 milliards d’euros pour la maladie d’Alzheimer (6 % à 7 %) et 500 millions d’euros pour les soins palliatifs (6 %).

Une autre mesure changera la vie de nos concitoyens dès l’automne prochain : grâce à deux décrets qui seront publiés très prochainement, il ne sera plus nécessaire d’aller chez le médecin pour se faire revacciner contre la grippe, cet acte pouvant être accompli sans prescription par une infirmière.

Le PLFSS pour 2008 m’a par ailleurs donné les moyens d’engager la modernisation de notre système hospitalier à travers trois avancées significatives : la valorisation de l’activité à 100 % des tarifs dans les établissements antérieurement sous dotation globale, les critères encadrant les contrats de retour à l’équilibre (CRE) et la possibilité de mise sous entente préalable des établissements de santé présentant une proportion excessive d’hospitalisations complètes.

Le passage à un financement de 100 % de l’activité par les tarifs pour les établissements de santé du secteur public est effectif depuis le 1er janvier 2008 grâce à la publication de plusieurs textes d’application de l’article 62 de la loi qu’il s’agisse du décret n° 2007-1931 du 26 décembre 2007 portant diverses dispositions financières relatives aux établissements de santé ou des arrêtés en date des 26 décembre 2007 et 23 janvier 2008. La rémunération en totalité du court séjour dans les établissements par les tarifs à l’activité contribue désormais à responsabiliser ces derniers et les incite à réaliser des gains d’efficience.

Le décret d’application de cet article sur le renforcement du cadre juridique des contrats de retour à l’équilibre fixant les critères précis de déséquilibre financier justifiant l’élaboration d’un plan de redressement donnant lieu à la conclusion d’un avenant au contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens entre l’établissement de santé en difficulté et l’Agence régionale de l’hospitalisation (ARH), est quant à lui en cours de contreseing. Je tiens toutefois à souligner que nous n’avons pas attendu la publication du décret pour donner des instructions précises aux ARH, en raison d’une vigilance toute particulière sur l’équilibre financier des hôpitaux. C’est d’ailleurs le sens de la circulaire de début de campagne tarifaire, datée du 3 mars 2008, qui rappelle que « l’objectif de retour à l’équilibre des établissements de santé est une priorité » et demande aux ARH de s’« impliquer fortement et de mobiliser à cet effet l’ensemble des outils et procédures qui sont à leur disposition », « la présentation et l’approbation d’un état prévisionnel des recettes et des dépenses (EPRD) en équilibre » étant « la règle posée par l’article R. 6145-11 du code de la santé publique, à laquelle il n’est possible de déroger qu’à certaines conditions et au vu de solides justifications ». Je rappelle que, même sans attendre le décret, les ARH peuvent déjà conclure des contrats de retour à l’équilibre dès l’apparition d’une situation déficitaire. Au-delà d’un seuil de 2,5 % de déficit pour les CHU et de 3,5 % pour les autres établissements, les ARH peuvent en outre demander aux chambres régionales des comptes un avis sur la situation financière des établissements et des propositions en vue de leur redressement. L’approbation des budgets de 2008 par les ARH s’inscrit dans cette volonté de redressement progressif des comptes des établissements de santé.

L’ONDAM hospitalier a par ailleurs augmenté quasiment deux fois plus vite que la richesse nationale. Outre que le déficit d’un hôpital n’est en rien une fatalité et que ses causes sont souvent identiques, les hôpitaux publics ne font pas preuve de la réactivité qui s’impose, par exemple en matière de plans d’investissement : il faut six mois à une clinique privée pour acheter un lit médicalisé ; il faut deux ans pour un hôpital public. La loi que je présenterai à l’automne tendra à faciliter leur gestion. J’ajoute que l’ensemble des groupes politiques a réclamé le passage de la T2A à 100 % …

M. Roland Muzeau : Pas du tout. Là, c’est Alzheimer !

Mme la ministre : …de même que la Fédération hospitalière de France (FHF). Outre que les établissements en difficulté seront accompagnés jusqu’en 2012, la précarité sera désormais mieux prise en compte pour les établissements recevant des populations en grande difficulté (titulaires du RMI, de la CMU ou de l’AME par exemple).

Le passage à la T2A a été un révélateur des difficultés rencontrées, et tout spécialement pour les CHU. Cette dernière visant à égaliser les conditions de financement des établissements, il n’y a aucune raison pour que des injustices se fassent jour entre des structures ayant des activités égales. Ce sont des prévisions d’activité trop optimistes pour 2007 qui ont, hélas, contribué à dégrader les équilibres de certains d’entre eux en fin de gestion. Je signale par ailleurs que l’on dénombre autant de CHU « gagnants » à la T2A que d’établissements « perdants ». La tarification à l’activité implique donc des efforts d’adaptation. J’ai eu également l’occasion de dire aux maires présidents de conseils d’administration de CHU que le gouvernement accompagnerait les mesures de redressements qu’ils mettront en place. Enfin, j’ai demandé à la direction de l’hospitalisation et de l’organisation des soins (DHOS) d’animer un groupe de travail avec la conférence des directeurs généraux de CHU afin d’identifier les difficultés rencontrées. Je crois en effet beaucoup, en la matière, à la comparaison entre établissements qui est toujours très riche d’enseignements.

S’agissant de la convergence intersectorielle, les divers travaux en cours visent à isoler les facteurs de différenciation des écarts de coûts entre les tarifs du public et du privé qui pourront ainsi être financés selon d’autres modalités. Outre l’étude nationale des coûts commune aux secteurs public et privé, deux études spécifiques sont menées : l’une portant sur l’élaboration de la nouvelle classification des prestations, dite « V11 », et devant prendre en compte la sévérité des pathologies, l’autre concernant la précarité des patients. L’application de ces modifications du modèle de la T2A est prévue pour la campagne tarifaire 2009. Le rapport sur le bilan des travaux sur la mesure des écarts qui existent entre les tarifs du public et ceux du privé, enfin, sera bien remis le 15 octobre 2008 comme prévu par la loi.

L’article 37 prévoit la mise sous accord préalable des établissements de santé pour lesquels une proportion excessive d’hospitalisations complètes est constatée. Une instruction de la CNAM a été adressée au réseau des caisses d’assurance maladie en janvier 2008. J’ai en outre rappelé aux directeurs des ARH l’existence de cette procédure dans une instruction du 29 avril dernier afin notamment de promouvoir le développement de la chirurgie ambulatoire. D’après les premières informations, le dispositif fonctionne bien dans plusieurs régions, notamment en Île-de-France, en Picardie et en Champagne-Ardenne.

Le numéro unique d’identification devrait être quant à lui disponible le 15 octobre prochain. Ce retard s’explique par des problèmes rencontrés lors du rapprochement des données éparpillées dans de multiples fichiers. Ce numéro figurera sur la carte du professionnel de santé (CPS) et sera également utilisé par les ordres professionnels.

Deux décrets en Conseil d’État et un arrêté sont par ailleurs prévus pour l’application des dispositions de la loi concernant les dépassements d’honoraires. L’article 39 permet tout d’abord de renforcer la transparence dans ce domaine, en prévoyant l’obligation pour les professionnels de santé de délivrer à leurs patients une information écrite préalable sur le tarif des actes et le montant du dépassement et d’afficher les informations concernant leurs honoraires dans leur salle d’attente, ces deux obligations étant assorties de sanctions. La mise au point de ces textes a nécessité des discussions approfondies avec les régimes d’assurance maladie et les partenaires sociaux, s’agissant notamment de l’arrêté fixant le montant à partir duquel cette information écrite préalable est obligatoire, qui doit prendre en compte les contraintes des professionnels de santé et a suscité des discussions particulièrement animées. Le Conseil de la Caisse nationale d’assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS) a fait part de ses réserves sur un projet d’arrêté fixant ce seuil à 80 euros, en s’y déclarant défavorable en mai dernier. Des discussions sont en cours mais je tiens à ce que cet arrêté sorte rapidement.

Le projet de décret sur l’obligation d’affichage a quant à lui fait l’objet de plusieurs consultations. Ce texte, piloté par la direction générale de la consommation, de la concurrence et de la répression des fraudes (DGCCRF) a été soumis à la consultation du Conseil national de la consommation (CNC) le 29 mai. Les professionnels l’ont plutôt bien accueilli mais l’avis du CNC a permis d’apporter quelques clarifications. Ainsi, le praticien devrait non seulement afficher ses tarifs mais également la base de remboursement. En outre, la phrase indiquée sur l’affichette a dû être adaptée à chaque profession en fonction de sa situation. Le projet de décret devrait pouvoir être transmis au Conseil d’État à la fin du mois de juin, ce qui permettrait une publication en juillet. Une série de contrôles de la DGCCRF sera par ailleurs lancée en 2009 afin de vérifier le respect de cette obligation d’affichage. Le contenu du décret est donc très simple : l’obligation d’affichage portera sur les honoraires moyens des actes les plus couramment pratiqués par les professionnels de santé, en regard des tarifs opposables ; il définit également une phrase-type que le praticien doit afficher et qui précise son mode de conventionnement ou s’il n’est pas conventionné. Enfin, des sanctions administratives sont instituées, ce qui devrait accroître leur efficacité par rapport au dispositif antérieur qui prévoyait des sanctions pénales.

L’article 39 a ainsi permis de renforcer les sanctions à l’égard des professionnels de santé qui ne respectent pas leur devoir d’information préalable des patients. Par ailleurs, l’article 51 de la loi permet aux directeurs des caisses primaires d’assurance maladie (CPAM) de prononcer des pénalités à l’encontre des médecins facturant des dépassements d’honoraires au-delà du tact et de la mesure. Un projet de décret en Conseil d’État relatif à ces deux types de sanctions fait l’objet de consultations informelles auprès des trois caisses nationales d’assurance maladie. Outre la définition du barème des pénalités applicables, il permettra de simplifier la procédure des pénalités. Ce texte devrait être publié au début de l’automne.

Les décrets d’application de l’article 44 de la loi prévoyant des expérimentations sur de nouveaux modes de rémunération, alternatifs ou complémentaires au paiement à l’acte, et le financement de la permanence des soins seront très brefs, la loi étant déjà complète ; ils seront principalement procéduraux, afin notamment de préciser le rôle des missions régionales de santé (MRS). Le nombre de consultations obligatoires avec, par exemple, l’UNCAM et les syndicats de professionnels explique que la préparation des textes prenne du temps. J’ai par ailleurs sensibilisé dès le mois de février les MRS sur l’ensemble de ces questions et certaines se sont spontanément manifestées pour conduire ces expérimentations. S’agissant des nouveaux modes de rémunération, un groupe de travail s’est réuni pendant les quatre premiers mois de l’année, puis un comité de pilotage comprenant des représentants des professionnels de santé et des MRS a été convoqué. La réunion du 15 mai a ainsi permis d’élaborer un cahier des charges détaillant les caractéristiques minimales attendues des expérimentateurs, notamment en ce qui concerne la nature du projet de santé et l’informatisation. Je souhaite que les sites expérimentateurs puissent être choisis en septembre. Les modèles économiques de rémunérations alternatives au paiement à l’acte intégral restent quant à eux à définir ; il s’agit là d’un problème crucial dès lors qu’ils permettront la répartition de la rémunération des professionnels, par exemple, entre un forfait pour la prise en charge globale des patients et les nouvelles missions d’éducation thérapeutique et d’accompagnement, le paiement à l’acte pour l’activité et une partie de paiement à la performance sur des indicateurs de santé publique et d’efficience. Il sera en outre nécessaire d’adapter ces modèles économiques aux spécificités des sites expérimentateurs et de mettre en place des systèmes d’information et de communication avec les patients. Nous n’avons donc pas perdu notre temps : si cette mesure est simple, il n’en va pas de même de ses modalités d’application.

M. Jean-Pierre Door, rapporteur pour l’assurance maladie et les accidents du travail : Qui sera pilote ?

Mme la ministre : Les MRS.

L’expérimentation relative au transfert du financement de la permanence des soins (PDS) vers les MRS s’inscrit quant à elle dans un contexte de modernisation de ce dispositif. Elle ne pourra s’effectuer que dans les départements où la PDS aura été stabilisée pour l’ensemble des périodes de fermeture des cabinets. L’avenant 27 à la convention médicale, signé en décembre 2007, ayant étendu ce dispositif à l’ensemble des périodes de fermeture des cabinets de médecins libéraux, ses conditions d’application ont entraîné une nouvelle organisation dans certains départements : diminution du nombre de secteurs de garde, points de consultation fixes, collaborations plus fréquentes avec les établissements de santé. Cette mutation a été facilitée par une mission d’appui pluridisciplinaire dont le travail devrait s’achever en juillet après que les représentants de plus de 30 départements auront été auditionnés. Ce n’est que lorsque ce travail sera achevé que l’expérimentation prévue par l’article 44 pourra s’effectuer dans les départements où la PDS a été stabilisée.

Le projet de dossier médical personnel (DMP) était au point mort lorsque j’ai pris mes fonctions. Après un audit ayant démontré la nécessité de le conserver tout en changeant d’approche, j’ai mandaté un groupe d’experts afin de définir un plan de relance. Le rapport qui m’a été remis est excellent, quant au diagnostic comme aux préconisations. Je vais donc prochainement relancer le DMP sur la base de grandes orientations stratégiques en vue de sa généralisation progressive en 2012. Je rappelle toutefois que l’article 55 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2008 sur le DMP garde toute sa pertinence : le portail de confiance pour l’accès au DMP est conservé, de même que le droit de masquage. Nous pourrons également avancer s’agissant de l’arrêté prévu par cet article concernant les conditions de mise à disposition des fonctions de ce portail de confiance pour d’autres réseaux de santé. Un décret sur le DMP sera par ailleurs soumis à concertation avant d’être transmis au Conseil d’État.

Je souscris évidemment à l’objectif d’une application très rapide des lois votées par le Parlement mais la mise en œuvre effective des dispositions que vous avez votées dépend aussi de la qualité des textes d’application et suppose, pour certaines mesures novatrices, l’engagement de concertations préalables particulièrement nourries. Chacun doit être placé devant ses responsabilités et s’approprier les outils de la réforme. L’application de la loi de financement, enfin, ne relève pas seulement du droit mais également de l’économie puisqu’il s’agit de piloter au plus près l’ONDAM. Je m’associe, en la matière, aux propos de M. le ministre des comptes publics.

M. Roland Muzeau : Quid des transferts de charges vers les assurances complémentaires ?

Mme la ministre : À ce jour, rien n’est encore arrêté et les négociations se poursuivent.

M. Jean-Luc Préel : Qu’en est-il du délai de validation des EPRD, particulièrement long ?

Mme la ministre : Cette année a été un peu exceptionnelle : outre les élections municipales, la réunion des nouveaux conseils d’administration a été plus tardive.

M. le Président : Qu’en est-il du financement de cent maisons de santé pluridisciplinaires ?

Mme la ministre : Il est en voie de réalisation.

M. le Président : Vous avez déjà reçu des dossiers ?

Mme la ministre : Oui.

M. le Président : À combien s’élève le montant de l’aide ?

Mme la ministre : À 50 000 euros par maison de santé.

Mme Valérie Létard, secrétaire d’État auprès du ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité, chargée de la solidarité : En ce qui concerne les secteurs médico-social, vieillesse, accident du travail/maladies professionnelles (AT/MP) et famille, 15 textes devaient paraître, dont huit ont été publiés et trois le seront dans les jours prochains.

En application de l’article 93 prévoyant le principe de modulation de l’allocation de rentrée scolaire en fonction de l’âge de l’enfant (ARS), Mme Nadine Morano, secrétaire d’État chargée de la famille, mène une négociation avec les partenaires sociaux et l’Union nationale des associations familiales (UNAF) sur les seuils et les montants qui pourraient être inscrits dans le décret d’application. Il s’agit en l’occurrence d’adapter les prestations familiales aux besoins des familles car plus l’enfant grandit, plus ces dernières supportent des dépenses importantes. Quelle que soit l’option finalement retenue sur la modulation, je vous confirme que l’ARS sera servie comme chaque année le 20 août.

Les ressortissants communautaires inactifs ne sont en situation régulière que s’ils disposent de ressources suffisantes – RMI ou allocation de solidarité aux personnes âgées (ASPA) – et d’une couverture maladie. Ces deux conditions figurent dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2008 qui a modifiée en ce sens l’article L. 512-2 du code de la sécurité sociale. Une circulaire conjointe de la direction de la sécurité sociale et de la direction générale de l’action sociale est en cours de finalisation afin de préciser l’application de la loi. Par ailleurs, l’article 95 étant d’application directe, cette circulaire ne vise qu’à préciser les modalités de mise en œuvre et n’a pas valeur réglementaire ; le risque juridique est nul.

Le gouvernement souhaite par ailleurs étendre le bénéfice de la prestation de compensation du handicap (PCH) aux enfants ; environ 6 000 d’entre eux, lourdement handicapés, devraient en bénéficier cette année. Cette ouverture doit se faire en deux étapes : la première a pris la forme d’un droit d’option entre les compléments d’allocation d’éducation de l’enfant handicapé (AEEH) et la PCH – sa mise en place nécessitait d’ailleurs quatre textes d’application, qui ont été pris – ce droit étant en outre en vigueur depuis le mois d’avril 2008, la charge de travail des maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) est donc progressive. Néanmoins, comme cela a été annoncé le 10 juin dernier lors de la Conférence nationale du handicap, des concertations seront menées entre les usagers, les associations représentatives des personnes handicapées et les conseils généraux autour du « cinquième risque » – qui permettront de formuler des propositions précises afin de régler plus largement les difficultés de fonctionnement des maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) : statut, personnels, retards de traitement dans les dossiers. Cette extension de la PCH aux enfants handicapés devrait contribuer à améliorer les situations les plus difficiles, mais il impose également un délai supplémentaire à beaucoup de familles. C’est pourquoi la seconde étape demeure nécessaire afin d’adapter la PCH aux spécificités de la compensation du handicap chez l’enfant, notamment pour la prise en charge des besoins éducatifs. Nous avons donc mis en place un groupe piloté par le délégué interministériel aux personnes handicapées qui devra faire des propositions afin de s’assurer que la PCH rénovée permettra de bien prendre en compte l’ensemble des besoins spécifiques de tous ces enfants et de déterminer une ligne de partage entre les besoins pris en compte au titre des prestations familiales et ceux qui le sont au titre de la PCH.

Je rappelle, enfin, que les règles de liquidation et de service des pensions versées par organismes complémentaires AGIRC et ARRCO dépendent des partenaires sociaux mais également que les règles relatives aux durées d’assurance permettant d’obtenir une retraite à taux plein s’appliquent par génération. Les personnes âgées de plus de 60 ans peuvent donc continuer à travailler en toute sécurité. Les mesures décidées – libéralisation du cumul emploi-retraite et relèvement du taux de la surcote – ne font en outre que renforcer l’intérêt qu’il y a, pour les seniors, à travailler.

M. le Président : Même en cas de baisse des retraites complémentaires ?

Mme la secrétaire d’État : Tel qu’il est prévu, le dispositif ne devrait pas susciter quelque problème que ce soit.

Il faut par ailleurs sortir du système actuel de listes d’établissements ouvrant droit au Fonds de cessation d’activité anticipée des travailleurs de l’amiante (FCATA) au profit de listes de métiers pouvant exposer des salariés. C’est en tout cas ce que préconise le rapport de M. Jean Le Garrec, remis le 24 avril 2008. Cela nécessite non seulement un travail commun avec les partenaires sociaux mais une évaluation des effectifs potentiellement concernés afin de respecter les exigences de soutenabilité financière. Nous allons donc engager une nouvelle concertation afin de pouvoir répondre à ces questions dans le cadre du prochain PLFSS.

M. Hervé Féron, rapporteur : Des moyens supplémentaires seront-ils transférés aux départements afin de permettre aux maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) de gérer au mieux ces nouvelles dispositions ?

Les 138 millions économisés par la branche famille serviront-ils à la nouvelle organisation de la modulation de l’ARS ?

Mme la secrétaire d’État : L’objectif prioritaire est d’utiliser la mise en place du « cinquième risque » afin de travailler sur le statut des MDPH et de leurs personnels. Nous sommes par ailleurs en train de définir les conditions de mise en place de la modulation de l’ARS, en particulier son budget.

M. le Président : Je vous remercie.

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La commission a autorisé, en application de l’article 145 du Règlement, le dépôt du rapport d’information en vue de sa publication.