Accueil > Travaux en commission > Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire > Les comptes rendus

Afficher en plus grand
Afficher en plus petit
Voir le compte rendu au format PDF

Commission des Finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

Mercredi 6 octobre 2010

Séance de 9 heures 15

Compte rendu n° 3

Présidence de M. Jérôme Cahuzac, Président

– Audition, ouverte à la presse, de M. Didier Migaud, Premier président de la Cour des comptes, sur un rapport demandé à la Cour des comptes, en application de l’article 58-2° de la LOLF, relatif aux interventions de l’État dans l’économie par des moyens extra-budgétaires

– Présences en réunion

Annexe : rapport de la Cour des comptes : « Les interventions de l’État dans l’économie par des moyens extra-budgétaires »

La Commission entend M. Didier Migaud, Premier président de la Cour des comptes, sur un rapport demandé à la Cour des comptes, en application de l’article 58-2° de la LOLF, relatif aux interventions de l’État dans l’économie par des moyens extra-budgétaires.

M. le président Jérôme Cahuzac. J'ai le plaisir d'accueillir en votre nom M. Didier Migaud, Premier président de la Cour des comptes, que je remercie pour sa disponibilité.

Nous poursuivons nos auditions préparatoires à l'examen du projet de loi de finances, et le grand nombre de ces auditions est bien le signe du resserrement des relations entre la haute juridiction financière et le Parlement, favorisé à la fois par la LOLF et par la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008.

Ce qui nous réunit aujourd'hui est la présentation du rapport que nous avions demandé à la Cour sur les interventions de l'État dans l'économie par des moyens extrabudgétaires. Ce rapport avait fait l'objet d'une note d'étape le 20 janvier, juste avant l'examen du premier collectif budgétaire de 2010 et de ses dispositions relatives au grand emprunt. Aujourd'hui, le rapport complet dresse un panorama très intéressant par sa précision, son exhaustivité et sa pertinence.

La Cour devait progresser sur un terrain par définition mouvant. Elle a dressé une cartographie de grande qualité, qui est en soi un excellent instrument d'analyse. J'en citerai pour exemple le graphique de la page 37, dans lequel la Cour répertorie les interventions de l'État dans l'économie en fonction de leur effet de levier, tout en précisant la « distance » des financements mobilisés par rapport au budget.

Nous trouverons d'autres sources de réflexion dans votre analyse de la mécanique d'endettement liée aux financements hors-budget, ainsi que dans les risques de « fuites » que subit la norme de dépenses.

Nous sommes sensibles à l'attention portée aux travaux de notre mission d'information sur la mise en œuvre de la LOLF, la MILOLF ; elle transparaît dans les pages 81 et suivantes du rapport, et les propos de la Cour reflètent la convergence de nos analyses.

M. Didier Migaud, Premier président de la Cour des comptes. Je vous remercie d'avoir invité la Cour des comptes à présenter son rapport sur les interventions de l'État dans l'économie par des moyens extrabudgétaires. Je suis accompagné pour ce faire du président Christian Babusiaux, président de la première chambre de la Cour, de M. Claude Lion, conseiller référendaire, et de M. Thibault Dornon, auditeur.

Ce rapport, demandé le 2 décembre 2009, vous a été remis le 15 septembre, monsieur le Président, conformément au calendrier décidé en commun. Nos procédures habituelles de contradiction ont été respectées et étendues : la direction du budget, la direction générale du Trésor, l'agence des participations de l'État, la Caisse des dépôts et consignations, le fonds stratégique d'investissement, Oséo et le commissariat général à l'investissement ont été entendus. Leurs remarques et réponses ont été intégrées au texte du rapport. La version finale qui vous a été remise est issue de ce travail complexe pour lequel je remercie le rapporteur, son équipe et la première chambre.

Comme je vous l'avais annoncé voici quelques semaines lors de la remise du rapport sur le plan de relance, ces conclusions sur les interventions extrabudgétaires de l'État permettent de compléter nos rapports précédents. Les travaux que la Cour a menés en 2010, en grande partie sur votre demande, encadrent et décrivent de manière désormais très approfondie l'utilisation des fonds publics par l'État : après les rapports obligatoires portant sur la situation et les perspectives des finances publiques ainsi que sur la régularité de la gestion budgétaire, après le rapport sur le plan de relance, voici une nouvelle étude qui, je le crois, comble un manque. C'est aussi, d'une certaine manière, le troisième volet de l'analyse des mesures de soutien de l'activité prises par le Gouvernement en réaction à la crise économique depuis 2008 : le rapport sur le plan de soutien aux établissements de crédit, celui sur le plan de relance, et ce dernier rapport forment un triptyque que nous avons la faiblesse de penser assez complet.

Plus généralement, en nous demandant cette enquête, votre commission a ouvert de très vastes perspectives : nous espérons que ce rapport apportera une contribution durable à la réflexion sur un sujet de toute première importance, celui des modes d'intervention économiques de l'État par des moyens extrabudgétaires. Ces moyens recouvrent les interventions ne s'accompagnant pas d'un flux de crédits budgétaires mais aussi celles qui, bien que se traduisant par un flux de crédits, permettent de s'affranchir des grands principes budgétaires d'annualité, d'unité et d'universalité. Jugez plutôt : fin 2009, la dette garantie par l'État atteignait 150 milliards d’euros, les encours garantis par la COFACE et la Caisse centrale de réassurance dépassaient 83 milliards et la valeur nette des concessions figurant à l'actif du bilan de l'État représentait plus de 131 milliards. En termes de flux, les dispositifs extrabudgétaires d'apport en fonds propres aux entreprises représentent plus de 2 milliards d’euros, et les investissements effectués par l'intermédiaire d'opérateurs de l'État plus de 6 milliards. Et cela, sans compter les ressources que l'emprunt national apportera, soit un flux annuel de 4 à 5 milliards.

La Caisse des dépôts et consignations est un moyen ancien d'interventions extrabudgétaires. Avant l'adoption de la nouvelle règle de partage des bénéfices avec l'État, elle consacrait en moyenne 700 millions d’euros par an à des missions d'intérêt général. Elle a été fortement mobilisée lors de la crise financière et sa contribution au plan de relance s'est élevée à 5,5 milliards d’euros.

Des considérations de deux ordres ont pu présider à votre demande : d’une part, l'impression que l'État a multiplié ces dernières années les interventions dans l'économie par des canaux extrabudgétaires ; d'autre part, les interrogations portant sur les conditions d'exercice du contrôle parlementaire sur ces modalités d'intervention, anciennes ou nouvelles.

Sur ces deux points, le rapport apporte des éléments de réponse, puisqu'il dresse l’inventaire des interventions extrabudgétaires et qu'il établit un bilan nuancé de leur mise en œuvre en en présentant une typologie budgétaire et comptable.

En accord avec vous, nous avons tout d'abord délimité le champ de l'enquête et défini les interventions extrabudgétaires. Ainsi, ont été exclus du champ les instruments spécifiques à la politique sociale, les dépenses fiscales ou encore les mesures réglementaires correspondant à l'action générale de l'État.

Une fois ces bases posées, la Cour a procédé à l'analyse des mesures visant à développer l'investissement public ; à stimuler l'investissement privé par des dispositifs en faveur des entreprises ; à encourager l'innovation ; à garantir le financement de l'économie.

À titre liminaire, je tiens à remarquer que l'enquête a porté sur un thème jusqu'ici largement inexploré et qui, par son ampleur, a semblé surprendre l'administration elle-même. Son étude implique de croiser l'analyse budgétaire avec des considérations de comptabilité patrimoniale et de comptabilité nationale.

La notion même d'intervention extrabudgétaire n'est pas très facile à cerner, puisqu’elle est négative dans son expression même, désignant tout ce qui n'est pas budgétaire, ce qui est « hors du budget ». La multiplicité des dispositifs et la grande variété des intervenants rendent difficile d'en donner une définition générale. Toutefois, comme indiqué précédemment, nous avons retenu les mesures ne s'accompagnant pas d'un flux de crédits budgétaires ou, si ces flux budgétaires existent, les mesures permettant de s'affranchir des principes d'annualité, d'unité et d'universalité. Au-delà de cette catégorisation, seul un recensement méthodique permet de prendre la mesure des interventions extrabudgétaires puis de les analyser. La Cour a procédé à ce recensement, que nous avons établi pour la première fois.

L'intervention de l'État dans l'économie par des moyens extrabudgétaires est loin d'être nouvelle. Qu'il s'agisse des modalités concrètes, des acteurs concernés ou des moyens mobilisés, cette intervention est extrêmement diverse : l'État peut financer des infrastructures, agir en faveur du développement des entreprises, promouvoir la diffusion de l'innovation ou, plus globalement, assurer le financement de l'économie en cas de défaillance du marché. Les dispositifs évoqués dans le rapport constituent un ensemble hétérogène dont la cohérence n'apparaît pas toujours de manière évidente.

Certains dispositifs, tels ceux gérés par la Caisse des dépôts et consignations, sont anciens. De même, les dispositifs de soutien financier des exportations ont été mis en place depuis plusieurs décennies, tout comme la réassurance par la Caisse centrale de réassurance avec la garantie de l'État ou encore le mécanisme des concessions auquel l'État a eu recours depuis plusieurs décennies. D'autres sont plus récents et originaux, tels les véhicules créés ad hoc pendant la crise financière pour apporter des concours financiers aux établissements de crédit, ou les dispositifs retenus dans le cadre de l'utilisation du produit de l'emprunt national. Le recours à ces mécanismes peut être justifié par la recherche d'une plus grande efficacité et d'un meilleur retour sur investissement. De fait, certains mécanismes ont été institués précisément pour pouvoir bénéficier de la spécialisation des organismes chargés de les mettre en œuvre et afin de mieux mesurer la rentabilité économique des investissements réalisés.

L'objectif peut aussi être de rechercher un effet de levier en suscitant des co-financements par des partenaires privés, par exemple pour des financements d'infrastructures ou pour développer l'apport de fonds propres aux entreprises par l'intermédiaire de fonds partenaires. L'analyse des interventions économiques de l'État par des moyens extrabudgétaires soulève cependant des difficultés d'ordre méthodologique attachées au concept même d'interventions économiques. Celles-ci peuvent viser plusieurs objectifs, comme l'aide aux entreprises, le financement d'infrastructures ou l'aménagement du territoire, et s'effectuent par l'intermédiaire d'outils très divers. L'extrême diversité des interventions conduit à croiser plusieurs axes et outils d'analyse. Ainsi, le soutien à la recherche et au développement peut être considéré comme un investissement, et c'est d'ailleurs souvent le cas ; pourtant, au sens strict de la comptabilité nationale, ce n'est pas un investissement, parce qu'il n'y a pas, en l'espèce, de « formation brute de capital fixe ».

Ces difficultés d'ordre méthodologique rendent impossible toute construction d'un agrégat unique représentatif de l'ensemble des interventions économiques extrabudgétaires de l'État et uniquement de celles-ci. On ne peut par exemple chercher à totaliser les dépenses des opérateurs, les garanties accordées, les partenariats public-privé, les concessions, les interventions de la Caisse des dépôts et ce qui sera financé par l'emprunt national. Il n'existe pas de dispositif de comptabilisation susceptible de regrouper sous un même indicateur les données quantitatives se rapportant à un ensemble d'actions aussi hétérogènes. La comptabilité générale dont dispose désormais l'État permet certes d'avoir une approche patrimoniale d'ensemble des actifs immobilisés, des passifs financiers et non financiers et des engagements hors bilan, mais elle ne permet pas de totaliser l'ensemble des interventions extrabudgétaires.

Pour lutter contre les conséquences de la crise économique, le Gouvernement a eu recours de façon massive au mécanisme de la garantie, précédemment devenu résiduel, ainsi qu'à d'autres types d'intervention extrabudgétaire comme les partenariats public-privé, les concessions, ou les investissements par des entreprises publiques. In fine, il ressort de la dernière crise une impression de fort accroissement des moyens extrabudgétaires au détriment des moyens budgétaires plus conventionnels, d'habitude privilégiés quand on veut relancer l'activité. Cette impression est tout particulièrement liée à la mobilisation des garanties dans le cadre du dispositif de concours financiers aux établissements de crédit. Si le recours à ce procédé ancien tendait à diminuer jusqu'aux derniers mois de 2008 avec les premiers impacts de la crise financière, l'année 2009 a marqué une rupture avec, notamment, un fort accroissement du montant des dettes garanties.

D'une manière générale, les éléments conjoncturels liés au plan de relance de l'économie ont également contribué à accroître, en principe de façon temporaire, le recours à des dispositifs extrabudgétaires, dans le triple but d'augmenter le volume des investissements publics, de garantir le financement des petites et moyennes entreprises et de soutenir les exportations.

Mais si l'on fait abstraction du recours massif aux garanties lors de la crise financière et de la mobilisation de dispositifs d'interventions extrabudgétaires dans le cadre non pérenne du plan de relance, les éléments réunis au cours de l'enquête ne permettent pas de penser qu'il y ait une tendance avérée à l'accroissement du champ des interventions extrabudgétaires dans l'économie. Contrairement au sentiment que l'on peut parfois avoir, nous n’avons pas constaté de multiplication tendancielle des dépenses extrabudgétaires à finalité économique.

Ce jugement doit cependant être complété par trois remarques. Premièrement, cette appréciation est avant tout qualitative et exprime un ordre de grandeur, en raison de l'absence d'un instrument unique de mesure pour l'ensemble des modes d'intervention extrabudgétaire. Deuxièmement, le caractère conjoncturel de l'accroissement des dispositifs extrabudgétaires, lié à la crise, ne sera pleinement avéré que si l'on assiste bien à un reflux à brève échéance. Troisièmement, la prise en compte de l'emprunt national peut également conduire à nuancer l'appréciation : les dispositifs retenus pour utiliser le produit de cet emprunt ne relèvent pas d'une action ou d'une logique conjoncturelle et se traduiront par des décaissements de l'ordre de 4 à 5 milliards d’euros par an entre 2010 et 2014, les 35 milliards de l'emprunt comprenant 15 milliards de « dotations non consomptibles » produisant intérêts et 20 milliards de dotations dont la consommation s'étalera sur plusieurs années. Les investissements d'avenir, qui sont d'un niveau légèrement supérieur au montant des investissements civils de l'État financés sur ressources budgétaires, permettront de doubler le montant total de ces investissements sur la période et ne transiteront plus par le budget de l'État.

Outre cela, l'utilisation accrue de moyens extrabudgétaires pourrait devenir une tentation en raison du contexte budgétaire tendu dans lequel nous nous trouvons, caractérisé par un déficit et un endettement très importants. Dans ce contexte, il peut être tentant de recourir à une débudgétisation : débudgétisation dans l'espace, consistant à recourir à des véhicules se situant en dehors du budget, ou débudgétisation dans le temps, consistant à différer l'impact budgétaire de certaines mesures. Il en serait ainsi en cas de recours massif à des partenariats public-privé. Si, actuellement, les investissements de l'État financés par ce biais représentent le montant relativement modeste de 3 milliards d’euros, un recours croissant à ce mode de financement pourrait s'avérer coûteux pour les finances publiques.

Le développement éventuel de nouveaux dispositifs requiert par conséquent d'être particulièrement vigilant sur les risques de contournement de la norme de dépenses et sur la création de véhicules faisant sortir certaines dépenses de la dette publique consolidée au sens du Traité de Maastricht. Dans les circonstances actuelles, il ne faudrait pas que la mécanique extrabudgétaire conduise à accroître l'endettement global des administrations publiques.

Il doit être souligné que les interventions extrabudgétaires dans l'économie ne font pas l'objet d'une politique globale conduite par l'État et qui obéirait à une stratégie prédéfinie. Le recours aux divers modes d'intervention dépend avant tout des circonstances et ne semble pas relever d'une doctrine ou d'un dessein particulier. Bien que la direction du budget estime avoir une visibilité sur l'ensemble des moyens d'interventions mentionnés, il est clair pour la Cour que les interventions extrabudgétaires dans l'économie manquent de lisibilité et font l'objet d'une évaluation insuffisante. À cet égard, les documents budgétaires remis au Parlement sont, en règle générale, peu éclairants, ce qui est quelque peu contraire à l'un des objectifs principaux de la LOLF, la transparence financière.

Certes, ces interventions visent toutes, d'une manière ou d'une autre, à améliorer la performance de l'économie française, mais on peut regretter l'absence de réflexion sur une possible rationalisation de l'utilisation de ces différents instruments. Dans bien des cas, par exemple dans le domaine des aides aux entreprises, les pouvoirs publics peuvent combiner un financement budgétaire, des interventions extrabudgétaires et une politique fiscale. Cependant, une réflexion globale fait défaut et il est aujourd'hui impossible de savoir quelle combinaison de ces trois modes de financement est optimale en termes économiques. Pour le dire plus simplement, le manque d'évaluation des interventions extrabudgétaires rend impossible leur comparaison avec les autres moyens d'intervention de l'État. Il est nécessaire de prolonger la réflexion, ce qui appelle aussi des recherches approfondies sur la mesure de l'impact économique véritable des outils à disposition du Gouvernement. Vaste sujet que celui-là.

Du point de vue des finances publiques, ces interventions, bien qu'elles soient en tout ou partie extrabudgétaires, ne sont pas neutres : elles ont des incidences budgétaires. Certains dispositifs affectent directement l'équilibre de la loi de finances – les taxes affectées par exemple, qui sont un non recouvrement de recettes évitant la consommation de crédits budgétaires. D'autres, telles les dotations en capital, conservent la nature de charges budgétaires au sens de la LOLF. Plusieurs sont porteurs de risques ou susceptibles d'induire des charges futures ; il en est ainsi de la mise en jeu des garanties consenties, ou encore des financements innovants.

Les enjeux financiers liés à ces interventions sont cependant très inégaux, de même que les risques qui leur sont associés. Si les risques associés aux dispositifs extrabudgétaires en vigueur apparaissent limités, notamment en raison des « collatéraux » associés aux dettes garanties, le recours à ces modes d'intervention mérite une attention particulière compte tenu de l'impact différencié qu'ils peuvent avoir sur la norme de dépenses et l'évolution de la dette publique. La typologie de leur impact budgétaire et comptable, que décrit le tableau de la page 73 du rapport, met en évidence l'intérêt que peuvent présenter des modes d'intervention fondés sur des actifs créateurs de valeur. Certains, pourtant, s'accompagneront de charges futures ou se traduiront par un surcroît d'endettement.

Si on le compare à d'autres dispositifs, l'ordre de grandeur de certaines interventions budgétaires est relativement modeste. À titre d'exemple, les soutiens aux entreprises accordés par des moyens extrabudgétaires, soit 2 milliards d’euros d'apports de fonds propres et 800 millions d’euros d'aide à l'innovation en 2009, représentent une part très minime – à peine plus de 4 % – de l'ensemble des aides de l'État aux entreprises, évaluées à 45 milliards par la direction du budget. Ils ne sont pas négligeables pour autant.

La question de la gouvernance et de l'évaluation de ces dispositifs est centrale.

Pour la Cour, le défaut majeur des interventions extrabudgétaires de l'État est de déroger aux grands principes du droit budgétaire, notamment ceux de l'annualité, de l'unité et de l'universalité. Certes, la mise en place de ces dispositifs résulte, en règle générale, de décisions soumises à l'approbation du Parlement. Cependant, une fois approuvées, ces interventions permettent de s'affranchir en partie de toute autorisation parlementaire. Leur multiplication prive le Parlement de l'exercice de ses missions de contrôle sur des dispositifs qui s'accompagnent bien souvent de la création de nouvelles structures de gestion et qui échappent aux dispositifs de performance instaurés par la loi organique. La transparence de l'action publique en est forcément affectée.

Des progrès majeurs ont certes été accomplis ces dernières années. Ce disant, je pense à l'adoption d'une comptabilité patrimoniale qui permet une meilleure connaissance des actifs et des passifs, ou encore aux dispositions de la LOLF relatives aux garanties, qui imposent désormais une autorisation préalable du Parlement. Mais il faut encore, me semble-t-il, renforcer les dispositifs d'évaluation et de contrôle. C'est notamment le cas pour les modes d'intervention extrabudgétaire les plus récents que sont la Société de prises de participations de l'État et les dispositifs associés à l'emprunt national ; ils se sont traduits par un endettement important et ils ne pourront être appréciés qu'en fonction de l'effet de levier et du retour sur investissement obtenus. En complément d'une évaluation renforcée, une approche consolidée est indispensable. Plus l'État développe des mécanismes ayant pour effet de sortir des dispositifs de son budget ou de s'affranchir de règles budgétaires, plus il doit avoir une vision consolidée de ses risques.

Certes, la comptabilité nationale assure en partie une vision consolidée, mais incomplètement, en raison de l'absence de comptes consolidés englobant l'État, ses opérateurs et les diverses entités qui dépendent de lui. Par ailleurs, cette consolidation doit s'étendre à l'harmonisation des méthodes utilisées pour sélectionner les investissements et mesurer leur rentabilité. Les procédures d'évaluation et de contrôle mises en place dans le cadre de l'emprunt national fournissent à cet égard un exemple intéressant. Il faudra, le moment venu, examiner leur portée.

L'enquête de la Cour ouvre ainsi de vastes perspectives de réflexion et de travaux, tant pour elle-même que pour le Parlement, dans plusieurs directions. Quatre me semblent prioritaires : le renforcement du contrôle parlementaire ; une meilleure appréciation des risques associés aux interventions extrabudgétaires ; une consolidation accrue des comptes ; une réflexion sur l'organisation administrative et ministérielle. Ce dernier sujet me paraît d’une importance particulière, car de nouvelles actions entraînent parfois la création de nouveaux ministères, ou de hauts-commissariats peut-être appelés à se pérenniser.

M. le président Jérôme Cahuzac. Je vous remercie, monsieur le Premier président. Votre communication souligne la nécessité de préciser la gouvernance des financements extrabudgétaires, qui dérogent à des principes fondamentaux. À titre d'exemple, le rapport de la Cour souligne la très grande latitude dont dispose le Commissaire général à l'investissement pour modifier le cas échéant l'affectation des moyens du grand emprunt. On déroge ainsi aux règles minutieuses de la LOLF sur les changements d’affectation des crédits du budget, dont l’adoption avait fait l’objet d’un consensus parfait. Cette situation vous paraît-elle acceptable ? Faut-il la modifier et si oui, de quelle manière et selon quel calendrier ? Le rapport de la Cour appelle aussi à garantir la qualité de l'information dont dispose la représentation nationale sur ces financements. Il signale la grande faiblesse des indicateurs de performance et le caractère très superficiel de l'annexe jaune sur l'effort en faveur des PME. Que suggérez-vous pour remédier à ces carences ?

Enfin, en multipliant les emplois prévus pour le fonds d'épargne, dont la gestion est confiée à la Caisse des dépôts, ne menace-t-on pas son équilibre à terme ? Ne menace-t-on pas, aussi, le respect des ratios de fonds propres prévus par l'accord « Bâle II » ? Surtout, préserve-t-on le financement du logement social ? Le rapport suggère sur ce point des réponses préoccupantes. Je ne doute pas que ces sujets inspireront des remarques à M. Michel Bouvard, qui, en sa qualité de président du conseil de surveillance de la Caisse des dépôts, joue un rôle de vigie dont je le remercie.

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Je tiens à souligner une nouvelle fois tout l’intérêt qu’il y a pour notre commission à travailler avec la Cour des comptes. Nous en avons eu une nouvelle démonstration hier lors de la présentation par M. Christian Babusiaux de la communication de la Cour relative aux conditions d’une stabilisation en valeur de la masse salariale de l'État. Les conclusions de ce rapport d’un extrême intérêt nous ont permis de mesurer exactement ce que signifierait la mise en œuvre concrète de l’objectif d’augmentation nulle, en valeur, des 85 milliards d’euros que représente cette masse salariale.

Pour ce qui concerne la débudgétisation, nous avons beaucoup progressé au cours de la dernière décennie. Ainsi avons-nous rendu obligatoire, dans le cadre de la LOLF, le fait que toute affectation de taxe ou d’impôt à un tiers doit être justifiée par l’existence d’une mission de service public. Nous avons aussi tordu le cou aux taxes parafiscales. Nous avons encore rendu obligatoire le vote annuel, en loi de finances uniquement, des rétrocessions à des opérateurs. Outre cela, la garantie de l’État ne peut plus être donnée qu’après autorisation du Parlement. Puis nous avons mené le combat, à l’initiative de M. Michel Bouvard, sur le contrôle des effectifs des opérateurs – car nombre de mesures de débudgétisation se font par le biais des opérateurs. Enfin, exception faite de la Caisse d'amortissement de la dette sociale, la CADES, et de la Société de financement de l'économie française, la SFEF, les opérateurs ne pourront dorénavant plus s’endetter au-delà d’un an.

Ce faisceau de mesures très positives ne donne que plus de relief à une question taraudante : qu’en est-il de la gouvernance de la gestion de l’emprunt national ? La structure qui a été définie à cette fin est un objet très particulier au regard du renforcement du contrôle de la débudgétisation poursuivi avec ténacité au cours des dix ans écoulées : 35 milliards d’euros lui ont été délégués en une seule fois, mais la gestion pluriannuelle de ces fonds échappe au contrôle du Parlement. Le Commissariat est certes doté d’une commission de surveillance où siègent plusieurs d’entre nous, mais nous devrons être d’une particulière vigilance quant aux affectations car, comme la Cour le souligne, le Commissaire général à l'investissement a une très grande latitude dans la répartition des crédits. Le Parlement doit d’autant moins être dessaisi de ses prérogatives de contrôle que ces 35 milliards constituent la rare marge de manœuvre dont nous disposons en matière de dépenses d’avenir.

M. Didier Migaud, Premier président de la Cour des comptes. S’agissant de la gouvernance, la Cour des comptes cerne le sujet ; il est ensuite de votre responsabilité de définir les solutions que vous jugez bonnes. Pour ce qui est singulièrement de la gestion de l’emprunt national, la structure de gouvernance a été votée par le Parlement sur proposition du Gouvernement. Ce que dit la Cour, c’est qu’à partir du moment où l’on s’écarte des procédures budgétaires ordinaires, il faut renforcer les dispositifs de contrôle.

M. Gilles Carrez, Rapporteur général. Cet aspect des choses concerne aussi la Cour.

M. Didier Migaud, Premier président de la Cour des comptes. C’est ce qui nous a conduits à formuler des observations et des recommandations. Cette question rejoint celle de la qualité de l’information, et c’est pourquoi nous évoquons la recension dans un seul jaune de l’ensemble des moyens extrabudgétaires. Il faudrait vraisemblablement aller au-delà, mais ce peut être le minimum : qu’il y ait au moins cela… à condition que cet inventaire soit complet et utilisé par le Parlement.

Les questions de gouvernance se posent avec une acuité croissante. La Cour a constitué une formation inter-chambres présidée par M. Alain Pichon, chargée d’établir un premier bilan de la LOLF ; il vous sera remis au deuxième semestre 2011. Par ailleurs, en vous remettant, en juin prochain, notre rapport sur l’exécution du budget, nous vous ferons part de nos observations sur l’utilisation des crédits.

La mobilisation des fonds d’épargne a fait l’objet d’une insertion au rapport public annuel de la Cour en février dernier. Une conjoncture particulière a pu entraîner la nécessité d’une utilisation particulière de ces fonds, mais nous avons considéré qu’un problème d’équilibre pouvait se poser à trois ans et qu’il fallait redoubler de vigilance à ce sujet – ce que votre Commission des finances est bien placée pour faire, par le contrôle qu’elle exerce sur la Caisse des dépôts.

M. le président Jérôme Cahuzac. Je suggère que lors de l’examen de la deuxième partie du projet de loi de finances, un amendement de la Commission tende à garantir la qualité d’un jaune spécifique.

M. Jérôme Chartier. Je salue la qualité du rapport qui nous a été présenté et j’observe que la Cour des comptes ne remet pas en cause l’utilité de la débudgétisation dès lors que deux critères sont réunis : l’urgence liée à une situation particulière et une participation privée à l’investissement public.

Pourriez-vous, monsieur le Premier président, préciser votre opinion sur la transparence de l’information : certaines des interventions extrabudgétaires dont le rapport dresse la liste pourraient-elles être mieux contrôlées que d’autres par l’Assemblée nationale, et si oui, lesquelles ?

Par ailleurs, quel est votre point de vue sur le principe de l’affectation des ressources ?

M. Dominique Baert. Je tiens à souligner tout l’intérêt de la très éloquente communication faite hier à notre commission par M. Christian Babusiaux sur les conditions d’une stabilisation en valeur de la masse salariale de l’État. Tout aussi remarquable est la communication que nous venons d’entendre.

Lors de l’installation, hier, du Comité de surveillance des investissements d’avenir dont j’ai été nommé membre, nous avons appris que 25 milliards d’euros ont déjà été transférés aux opérateurs et que les 10 milliards restants le leur seraient avant la fin de l’année – si ce n’est que ces milliards ne sont pas réellement versés aux opérateurs chargés de la gestion de ces fonds mais fléchés à cette fin dans les comptes du Trésor pour leur être transférés progressivement, certaines sommes donnant lieu à versement d’intérêts, d’autres non. J’ai demandé si ces intérêts s’ajouteraient aux sommes destinées aux programmes d’investissement d’avenir, et je n’ai pas eu la complète certitude qu’il en serait ainsi : la réponse qui m’a été faite est que ces intérêts viendraient en atténuation de la dette de l’État… Que pensez-vous, monsieur le Premier président, de ces versements théoriques qui se traduisent en réalité par des décaissements progressifs ?

Vous avez par ailleurs évoqué l’augmentation très significative, crise aidant, de la dette garantie par l’État. Or, les dispositions de la « loi Galland » qui a instauré des ratios limitant les conditions d'octroi des garanties par une collectivité à des sociétés de droit privé ne s’appliquent pas à la garantie de l’État. Que pensez-vous de cette envolée ?

D’autre part, dans la fonction publique hospitalière, les partenariats public-privé sont de plus en plus fréquents. La Cour s’est-elle préoccupée de cette évolution ? A-t-elle chiffré les recettes à venir de ces investissements ?

Enfin, vous avez plusieurs fois appelé notre attention sur le fait que la débudgétisation met à mal les grands principes budgétaires d'annualité, d'unité et d'universalité. Mais, monsieur le Premier président, les dispositifs dont la Cour a dressé la liste ne sont-ils pas de nature à altérer aussi la sincérité du budget de l’État ?

M. Daniel Garrigue. Je partage l’inquiétude exprimée par le président de notre Commission sur le devenir du fonds d’épargne de la CDC et sur la multiplication de ses affectations, et sa préoccupation légitime quant à l’allocation de ses ressources à son affectation en principe prioritaire : le financement du logement social.

Il me semble par ailleurs nécessaire d’analyser de manière poussée l’évolution de l’Agence nationale de la recherche. L’idée qui a présidé à la création de l’Agence était de décloisonner les crédits de recherche et de renforcer les appels à projets hors les structures existantes. Or, j’ai le sentiment que la définition des programmes donne l’occasion aux grandes institutions de reprendre le dessus dans la gestion de l’Agence. La Cour pourrait utilement se pencher sur ce sujet.

J’en viens au manque général de lisibilité des interventions extrabudgétaires, dû à la multiplication des outils et des fonds. Manquent cruellement la concertation et la mobilisation nationale sur le suivi de ces dispositifs. Au temps du Commissariat général du Plan, les commissions de modernisation étaient le lieu de cette concertation. Le Commissariat général n’est plus, et le Conseil économique, social et environnemental, en retrait, ne joue pas ce rôle. Or l’absence de concertation lors de la définition des enjeux est le signe d’une crise profonde de la démocratie économique et sociale.

M. Didier Migaud, Premier président de la Cour des comptes. Avant même les mesures prises en raison de la crise, la Cour avait considéré excessive la diversification des recours aux fonds d’épargne en dehors du logement, par des décisions prises au coup par coup, sans cadrage clair. La crise ayant accentué cette tendance, nous devrons suivre cette question de très près. Des précisions à ce sujet figureront dans le prochain rapport de la Cour sur l’exécution du budget. La débudgétisation peut se justifier dans certaines situations exceptionnelles ; la Cour n’en critique pas le principe, car les interventions extrabudgétaires peuvent avoir des effets positifs, mais elle juge qu’il ne faut pas en abuser et que des éléments d’information suffisants doivent permettre au Parlement de suivre chacun de ces dispositifs. À partir du moment où l’on sort des moyens budgétaires, une vigilance exacerbée s’impose sur l’information, la transparence et le contrôle des crédits ainsi affectés. C’est ce qui nous conduit à recommander la rédaction d’un jaune exhaustif. Le premier bilan de la LOLF, dont l’esprit et les dispositions sont d’une certaine manière contournés par les interventions extrabudgétaires, sera aussi pour la Cour l’occasion de procéder à une analyse fouillée de cette question.

Quant aux ressources affectées, la Cour estime avec constance qu’il y en a beaucoup, sans doute trop, et que, à ce sujet aussi, une vigilance sans faille s’impose.

Aujourd’hui, la garantie de l’État s’exerce principalement par le biais de la SFEF, et elle doit a priori se résorber. Mais des garanties nouvelles sont apparues après la création de mécanismes communautaires de concours aux États européens dont l’économie a été fragilisée par la crise. Ces garanties-là ne se résorberont pas aussi vite que celles de la SFEF, et il faudra surveiller de près l’évolution de la situation.

La Cour se penche actuellement sur la recherche et l’innovation, et ce travail fera l’objet d’une insertion dans le rapport public annuel qui sera présenté au Parlement en février 2011. Nous traiterons du CNRS, sur la base du suivi d’un contrôle effectué au cours des années précédentes, et de l’Agence nationale de la recherche.

M. Michel Bouvard. Je suis en mesure d’apporter des compléments en tant que président de la Commission de surveillance de la Caisse des dépôts et consignations. La débudgétisation, par nature dangereuse, doit être strictement encadrée, et tout dispositif de ce type doit faire l’objet d’un contrôle étroit du Parlement. On retrouve dans la communication de grande qualité qui nous a été faite les observations qui figuraient dans le dernier rapport de la MILOLF à propos du financement des universités, à présent éclaté entre le « fonds EDF » destiné à financer le plan Campus, l’emprunt national et des crédits budgétaires, et caractérisé par l’absence de pilotage global et d’indicateurs cohérents qui entraîne un manque de lisibilité pour le Parlement. Le travail de la Cour est éminemment utile.

Je remercie la Cour pour l’appréciation portée sur le rôle joué par la Commission de surveillance de la Caisse des dépôts dans l’information du Parlement. Mes collègues Jean-Pierre Balligand et Arlette Grosskost et moi-même veillons en effet à ce que la transparence soit totale. Dans le cadre du contrôle des entreprises publiques, la Cour rend des rapports qui concernent directement la Caisse. L’avant-dernier de ces rapports particuliers portait sur les fonds d’épargne et j’avais indiqué au Président de notre commission ne voir que des avantages à ce que tous ceux qui le souhaitent puissent en prendre connaissance, car tous les aspects évoqués ne sont pas repris en détail dans le rapport annuel. Récemment, un autre rapport particulier consacré par la Cour aux participations aux sociétés d’économie mixte a permis d’améliorer grandement la gouvernance de la Caisse des dépôts dans ce domaine – même s’il ne s’agit que de 1% des encours et donc d’un volet limité des engagements de la section générale. Les rapports de la Cour des comptes concernant la Caisse sont systématiquement présentés en Commission de surveillance et donnent lieu à un droit de suite de sa part.

L’une de mes premières préoccupations après mon installation à la présidence de la Commission de surveillance a été de mettre un terme aux mécanismes de débudgétisation multiples qui pouvaient obérer à terme la capacité d’investissement de la Caisse. Toutes les conventions entre la Caisse et l’État sont désormais soumises à l’examen de la Commission de surveillance, ce qui n’était pas le cas auparavant. Cela nous permet de vérifier qu’il ne s’agit ni de subventions ni de la prise en charge, à perte, de dépenses qui reviennent à des ministères. Nous pouvons apporter du savoir-faire – ainsi pour la dématérialisation des procédures pour la Chancellerie – mais nous ne pouvons subventionner la Chancellerie, car cela ne fait pas partie des missions de la Caisse. Nous avons aussi mis fin à la bonification d’intérêts sur la section générale, qui n’était qu’une autre forme de subvention. Enfin, nous avons clarifié les règles pour en finir avec les prélèvements « sauvages » observés quand la Caisse faisait état de résultats exceptionnels. À cet égard, j’ai le souvenir de la promesse faite au ministère du Logement que deux versements de 100 millions lui seraient accordés pour l’ANRU, sans que jamais notification ait été faite de cette promesse ni au directeur général de la Caisse ni à la Commission de surveillance.

Le fonds d’épargne de la Caisse s’élève à 223 milliards d’actifs dont une partie de fonds propres et 100 milliards d’actifs financiers. Il n’y a donc aucun problème de financement du logement social et de la politique de la ville, deux politiques définies comme prioritaires dans la loi de modernisation de l’économie, et cela même si les besoins progressent régulièrement. À ce jour est en vigueur un dispositif transitoire concernant l’épargne réglementée, ainsi conçu que le montant centralisé à la Caisse de la ressource issue du Livret A et du livret de développement durable est fixé à 160 milliards. En 2012, le dispositif transitoire viendra à son terme, et les observations de la Cour à ce sujet sont parfaitement fondées ; nous aurons besoin d’un engagement du Parlement visant à améliorer le taux de centralisation. Les engagements hors bilan actuels relatifs à la politique du logement et à la politique de la ville représentent 12 milliards supplémentaires en 2014 et 48 milliards supplémentaires en 2020, il faudra en revenir à un taux de centralisation supérieur à 70 % de la collecte du livret A et du livret de développement durable, pour respecter le ratio plancher défini par la loi, soit 125 % du montant des prêts.

S’agissant des nouveaux emplois du fonds d’épargne de la Caisse, il faut relativiser : ils portent sur 15 milliards d’euros, un montant très raisonnable au regard des 223 milliards du Fonds. Une partie de ce montant, qui a servi de crédit relais en préfinancement de la SFEF, a été remboursée dans les deux mois. Il y a aussi des engagements de plus long terme : 12 milliards pour des prêts d’infrastructures, qui correspondent aux missions du fonds d’épargne, et 2 milliards correspondant au financement du plan Hôpital 2012. Ce que je tiens pour le plus critiquable, et qui a été décidé avant mon arrivée, c’est le prêt de 1,5 milliard accordé aux agences de l’eau. C’est une somme que les agences distribuent en subventions – et qu’elles prétendent pouvoir rembourser au motif que, demain, elles auront moins de financement à assurer mais qu’elles continueront à percevoir la taxe d’assainissement…

M. Henri Emmanuelli. Mais les agences n’ont pas le choix !

M. Michel Bouvard. Les nouveaux emplois du fonds d’épargne n’ont pas vocation à s’étendre. Je rappelle enfin que les propositions de nouveaux emplois sont faites par la ministre de l’économie et soumises à la Commission de surveillance.

M. Marc Goua. Dans sa communication, la Cour fait état de « l’importante trésorerie de l’ANRU », qu’elle évalue à plus de 710 millions fin 2010. Et pour cause : les retards de paiements sont d’environ 18 mois ! On peut comprendre que la trésorerie de l’Agence soit abondante ! Par ailleurs, alors que ses engagements sont bien supérieurs à ses ressources, un nouveau hold-up se prépare à son détriment, une ponction de 260 millions d’euros étant prévue sur le chiffre d’affaires des organismes de logement social. Voilà qui confirme l’observation de la Cour selon laquelle la sécurité du financement de l’ANRU, comme celle d’autres opérateurs, n’est pas garantie.

M. René Couanau. Nous sommes très sensibles à la veille qu’exerce la Cour des comptes sur l’orthodoxie budgétaire. Mais, au-delà, devrait aussi s’exercer une veille sur l’impact des interventions budgétaires et non-budgétaires de l’État sur la croissance et sur l’emploi. Quels outils seraient nécessaires à cette fin ? La question est d’importance : ne s’agit-il pas de déterminer précisément à quoi sert l’argent public ?

Autre chose. L’État n’est pas le seul qui procède à des interventions économiques publiques. Beaucoup sont le fait des collectivités territoriales. La Cour entend-elle en évaluer le volume et les effets sur l’emploi ?

Quand on examine le budget des missions régaliennes, dont celui de la justice, on se rend compte du développement des partenariats public-privé. Ils font certes l’objet d’une évaluation préalable, mais les avantages de ces mécanismes par rapport à l’intervention directe sont décrits de manière plutôt succincte. Pour ma part, je suis persuadé qu’il ne s’agit que d’un report de charges important dans des domaines déterminants, ces dispositifs se développant dans le système hospitalier et le système pénitentiaire. Je n’ignore pas qu’ils évitent à l’État de lourds investissements d’un seul coup mais je me demande si ces montages ne devraient pas constituer l’un des prochains sujets d’étude de notre commission, en liaison avec la Cour. J’apprécie le travail très important que nous pouvons réaliser de conserve.

M. Jean-Pierre Balligand. Je tiens à dire mon inquiétude à propos du fonds d’épargne de la CDC. Elle tient à ce que l’on a mal évalué l’insolvabilité possible de certains intervenants de la rénovation urbaine, ce à quoi s’ajoute le risque d’un effet de ciseaux. On investit de plus en plus dans la rénovation urbaine à partir des fonds d’épargne centralisés à la CDC. Or, certaines collectivités voient leurs ressources s’affaiblir en raison notamment de la transformation de la taxe professionnelle en cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, si bien qu’à mon sens un risque réel d’insolvabilité va apparaître d’ici trois à cinq ans.

À cela s’ajoute un autre risque. Aussi longtemps que l’investissement en actions restera peu attrayant, le livret A sera un exutoire naturel au yoyo boursier. Mais si la bourse retrouve un certain dynamisme, elle se substituera à l’épargne réglementée. Or, le livret A étant une épargne liquide, les établissements financiers doivent pouvoir immédiatement disposer des sommes nécessaires pour satisfaire les demandes de retrait des clients. La Caisse doit donc maintenir un niveau de liquidités assez élevé alors même qu’elle prête à quinze ans sinon davantage.

La conjonction de ces deux facteurs – insolvabilité possible de certaines collectivités territoriales ; éventualité d’une décollecte importante au moment de la reprise économique – incite à s’interroger. Outre ce que fait la Caisse, la Cour des comptes ne devrait-elle pas mettre au point des indicateurs aptes à mesurer ces éléments d’instabilité potentielle ? Il serait bon qu’elle se penche sur ces questions.

M. Henri Emmanuelli. Je partage les préoccupations exprimées par M. Couanau à propos des partenariats public-privé : c’est une débudgétisation qui va coûter beaucoup plus cher qu’un investissement public, car aux intérêts d’emprunts viendront s’ajouter les bénéfices qui me paraissent assez largement attribués aux partenaires privés. J’aimerais que la Cour analyse ce sujet car je crains des lendemains très difficiles. L’addition sera lourde.

Dans un autre domaine, les départements sont systématiquement sollicités pour garantir les prêts HLM. S’il existe un document recensant toutes les garanties données par les départements de France, il doit donner le vertige ; existe-t-il ? Si ce n’est pas le cas, il serait utile de le compiler.

Mme Marie-Anne Montchamp. Je tiens à souligner la très haute qualité de la communication qui nous a été faite. La Cour, qui met en exergue les questions de gouvernance, dispose-t-elle des outils qui lui permettraient d’analyser l’impact des interventions budgétaires et extrabudgétaires de l’État ? Aujourd’hui, nous naviguons au fil de l’eau et nous sommes bien en peine de mesurer l’impact des interventions économiques extrabudgétaires. Il en est ainsi, notamment, des partenariats public-privé, dont nous sommes incapables de déterminer les coûts à terme. Comment, dans ces deux cas, parfaire l’analyse ?

M. le président Jérôme Cahuzac. Nous pouvons, sur le fondement de l’article 58 2° de la LOLF, demander à la Cour de réaliser une enquête sur les partenariats public-privé. Le bureau de la Commission évoquera cette possibilité.

M. François Goulard. Je suis très heureux d’avoir entendu le Premier président rappeler les principes essentiels des finances publiques – annualité, unité et universalité –, principes inséparables du pouvoir de contrôle du Parlement. Le recul du respect de ces principes est très préoccupant : ainsi, les modalités choisies pour la gestion du grand emprunt forment un exemple exceptionnel de leur violation, puisque l’on a délégué des fonds sans savoir quand et comment ils seront utilisés.

On a par ailleurs mentionné l’ANRU. J’observe à ce sujet que l’État va piocher dans les ressources destinées au logement de manière tout à fait contestable, en contradiction avec les principes de non affectation des recettes et de saine gestion des finances publiques.

M. Henri Emmanuelli. C’est que la Cour ne contrôle pas la technocratie.

M. Didier Migaud, Premier président de la Cour des comptes. La Cour a fait part depuis longtemps de ses préoccupations relatives au respect de ces grands principes. Cela étant, je serai plus nuancé en ce qui concerne l’annualité, car une gestion pluriannuelle peut avoir une efficacité réelle.

La Cour répondra à toute demande de votre commission si elle souhaite une enquête sur les partenariats public-privé ; pour l’heure, ces opérations sont en nombre très limité, sauf dans les collectivités territoriales. Je puis seulement observer que si l’État peut emprunter à des taux très bas, un partenariat public-privé, imaginé dans un contexte financier différent, ne se justifie pas.

En liaison avec la Caisse des dépôts, nous avons engagé un travail sur la maîtrise des risques qu’elle court. C’est un sujet essentiel, évoqué plusieurs fois, et nous poursuivrons cette réflexion. L’investissement hospitalier est un exemple de débudgétisation par le biais de la CDC, investissement qui échappe de ce fait au contrôle ordinaire du Parlement. Une vigilance particulière s’impose.

Les dépenses extrabudgétaires se sont développées en raison de la crise. Elles recèlent un danger, même si leur montant est très inférieur à celui de la dépense fiscale. La Cour des comptes et le Parlement doivent être très vigilants.

S’agissant de l’évaluation, nous sommes prêts à examiner certains résultats au cours de l’exercice 2010. À propos du plan de relance, nous avons formulé des observations non pas à partir d’un raisonnement comptable mais à partir d’études conduites par l’OCDE. Nous sommes prêts à continuer ce travail, qui n’est pas simple. En créant la fonction de Commissaire général à l'investissement, vous avez prévu des crédits destinés à lui permettre d’évaluer les mesures qu’il met en œuvre ; c’est un dispositif intéressant. La Cour devra pouvoir examiner la qualité de ces évaluations et des outils mis en place pour les réaliser. Dans tous les cas, l’évaluation de l’efficacité de la dépense publique s’impose.

M. le président Jérôme Cahuzac. Monsieur le Premier président, messieurs, nous vous remercions pour cette très intéressante communication.

*

* *

Membres présents ou excusés

Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Réunion du mercredi 6 octobre 2010 à 9 h 30

Présents. - M. Dominique Baert, M. Jean-Pierre Balligand, M. Claude Bartolone, M. Xavier Bertrand, M. Pierre Bourguignon, M. Michel Bouvard, M. Jean-Pierre Brard, Mme Chantal Brunel, M. Jérôme Cahuzac, M. Thierry Carcenac, M. Olivier Carré, M. Gilles Carrez, M. Jérôme Chartier, M. René Couanau, M. Jean-Yves Cousin, M. Richard Dell'Agnola, M. Michel Diefenbacher, M. Jean-Louis Dumont, M. Christian Eckert, M. Henri Emmanuelli, Mme Aurélie Filippetti, M. Jean-Claude Flory, M. Marc Francina, M. Daniel Garrigue, M. Georges Ginesta, M. Louis Giscard d'Estaing, M. Jean-Pierre Gorges, M. Marc Goua, M. François Goulard, M. David Habib, M. François Hollande, M. Jean-Louis Idiart, M. Jean-François Lamour, M. Patrick Lemasle, M. Jean-François Mancel, M. Hervé Mariton, M. Jean-Claude Mathis, Mme Marie-Anne Montchamp, M. Pierre Moscovici, M. Pierre-Alain Muet, M. Nicolas Perruchot, M. Jean-Claude Sandrier, M. Michel Sapin, Mme Isabelle Vasseur, M. Michel Vergnier

Excusés. - M. Bernard Carayon, M. Alain Claeys, M. Nicolas Forissier, M. Jean-Michel Fourgous, M. Victorin Lurel, M. Henri Nayrou, Mme Béatrice Pavy, M. Camille de Rocca Serra, M. François Scellier

——fpfp——

COMMUNICATION A LA COMMISSION DES FINANCES DE L’ASSEMBLÉE NATIONALE

(art. 58-2 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances)

Les interventions de l’Etat dans l’économie

par des moyens extra-budgétaires

SOMMAIRE

INTRODUCTION 4

PARTIE I : des dispositifs varies, poursuivant des objectifs multiples 7

I. Des dispositifs d’une grande variété 7

A. Les investissements publics 7

1. L’investissement de l’Etat via ses opérateurs 7

2. Les financements privés concourant à l’investissement public 15

3. La prise en compte des investissements des entreprises publiques 17

B. Les interventions en faveur des entreprises et de l’innovation 18

1. Les interventions visant le renforcement des fonds propres des entreprises 18

2. Le soutien extra-budgétaire en faveur de la recherche et de l’innovation 22

C. Les interventions visant à garantir le financement de l’économie 28

1. Les interventions en faveur du financement externe des entreprises 28

2. Les garanties octroyées en faveur de l’exportation 31

II. Des objectifs specifiques 32

A. De legitimes objectifs permanents 33

1. La création de structures publiques dédiées 33

2. La recherche d’un effet de levier 33

3. Faire financer des infrastructures par l’usager 36

B. Des objectifs de nature conjoncturelle, des mécanismes temporaires 36

1. Les concours financiers aux établissements de crédit 36

2. La mobilisation de ressources extra-budgétaires dans le cadre du plan de relance 38

C. L’éventuel contournement de la norme de dépense 44

1. Une faible capacité d’investissement 44

2. La tentation du recours à la débudgétisation 48

Conclusion de la première partie 50

PARTIE II : UN BILAN NUANCÉ, UNE GOUVERNANCE A PRECISER 52

I. Des poids relatifs inegaux et des risques en apparence limités 52

A. Des poids relatifs très inégaux 52

1. Les garanties 52

2. Les dispositifs d’apports de fonds propres et de soutien à l’innovation 58

3. Les investissements publics par des moyens extra-budgétaires 60

B. Des risques en apparence limités 63

1. Des risques différenciés pour des effets d’ampleur variable 63

2. Un risque en apparence limité compte tenu des volumes en jeu et des mécanismes utilisés 65

II. Un impact differencie sur les normes de depenses et de dette publique 67

A. L’impact au regard de la norme de dépense et du solde budgétaire 68

B. L’impact sur le solde des administrations et sur la dette publique au sens du Traité de Maastricht 70

1. L’impact sur le solde public d’une opération en capital dépend de sa contrepartie financière 70

2. Le classement en opération financière dépend des caractéristiques économiques de l'opération 71

3. L’impact des opérations en capital sur la dette publique au sens de Maastricht 71

C. L’impact sur la situation nette de l’Etat 72

1. L’impact immédiat sur la situation nette 72

2. L’impact ultérieur 73

3. Le cas particulier des dotations non consomptibles 73

III. Une gouvernance a preciser 74

A. un risque d’atteinte aux principes budgétaires 74

1. Les réponses de la LOLF au risque de débudgétisation 74

2. Un risque d’atteinte aux principes budgétaires 79

3. Des modalités de contrôles différentes 80

B. Des modes d’intervention qui appellent une reflexion sur les dispositifs de gouvernance 82

1. Un mode de gouvernance centré sur l’évaluation économique 82

2. Une approche consolidée 82

conclusion de la deuxieme partie 83

conclusion generale 85

INTRODUCTION

Par lettre du 2 décembre 2009, le Président de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire de l’Assemblée nationale a fait connaître au Premier président de la Cour des comptes une liste de six sujets sur lesquels la commission demandait la réalisation d’enquêtes, sur le fondement de l’article 58-2° de la loi organique relative aux lois de finances. Le premier thème était intitulé « Evaluation des interventions de l’Etat dans l’économie par des moyens extra-budgétaires (prêts participatifs, avances remboursables, dotations en capital, garanties) ». Sur celui-ci, la lettre indiquait que la commission souhaitait disposer d’informations avant l’examen du premier projet de loi de finances rectificative pour 2010, dont le dépôt était prévu pour le 20 janvier 2010.

Ainsi que l’avait souhaité la Commission, une note d’étape, adressée le 22 janvier 2010, a présenté une typologie large des diverses modalités d’intervention économique de l’Etat. En accord avec le Président et le Rapporteur général de la Commission, la communication finale devait être transmise pour le 15 septembre 2010.

L’enquête a été conduite auprès des services de la direction du budget, de la direction générale du Trésor, de l’Agence des participations de l’Etat, ainsi qu’auprès de la Caisse des dépôts et consignations, du Fonds stratégique d’investissement, d’Oséo et du Commissaire général à l’investissement. Elle s’est également appuyée, comme la note d’étape, sur des travaux publiés par la Cour.

La présente communication a été établie à l’issue d’une procédure contradictoire écrite avec les administrations et organismes précités, complétée par l’audition du directeur du budget et du directeur général du Trésor.

La demande d’enquête obéit à deux ordres de considérations : d’une part, l’impression que l’Etat a multiplié ces dernières années les canaux d’interventions extra-budgétaires et, d’autre part, la préoccupation des conditions d’exercice du contrôle parlementaire sur ces modalités d’intervention, anciennes ou nouvelles. Elle mentionne parmi les moyens dits extra-budgétaires des instruments qui se traduisent par une charge budgétaire initiale (prêts participatifs, avances remboursables, dotations en capital) et d’autres instruments (garanties) où la recette peut être immédiate si la garantie est assortie d’une rémunération et la charge budgétaire n’est qu’hypothétique ou différée en fonction du niveau de risque que représente le bénéficiaire de la garantie.

La notion d’interventions extra-budgétaires peut sembler nouvelle alors même qu’elle recouvre des mécanismes utilisés parfois depuis fort longtemps par les pouvoirs publics. Elle n’est pas sans lien avec celle de « débudgétisation », sans se confondre avec elle, car elle renvoie aussi à un ensemble de modalités d’actions auxquelles la puissance publique peut recourir pour démultiplier l’impact de ses mesures de soutien à l’activité économique : recours à des opérateurs auxquels sont affectées des ressources fiscales, garanties octroyées directement ou indirectement à des agents économiques publics ou privés, mobilisation de financements d’organismes publics, tels que le groupe de la Caisse des dépôts et consignations, l’Agence française de développement ou les entreprises publiques, ou de ressources privées, dans le cadre de délégations de service public ou encore de financements innovants, tels que les différents contrats de partenariat public-privé.

Sous cet angle, l’intervention sera extra-budgétaire dès lors qu’elle ne s’accompagnera pas d’un flux de crédits budgétaires. Mais elle sera également extra-budgétaire si elle se traduit par un flux de crédits permettant de s’affranchir, à l’instar du mécanisme retenu pour l’emprunt national, du principe d’annualité ou d’autres grands principes budgétaires tels que l’unité, l’universalité ou la spécialité.

Dans le cadre de la présente enquête, portant sur les interventions extra-budgétaires dans l’économie, le parti a été pris d’analyser les mesures visant à développer l’investissement public, à stimuler l’investissement privé par des dispositifs en faveur des entreprises, à encourager l’innovation et à garantir le financement de l’économie. En conformité avec la demande de la commission des finances de l’Assemblée nationale, cette limitation du champ de l’enquête a pour effet d’exclure les instruments spécifiques à la politique sociale, ainsi que l’analyse des dépenses fiscales ou celle de l’action générale de l’Etat par l’intermédiaire de la réglementation.

A ces mécanismes poursuivant des objectifs de nature pérenne, se sont ajoutées des mesures conjoncturelles, liées à la crise économique et financière, qui ont sensiblement accru l’ampleur des interventions extra-budgétaires de l’Etat dans l’économie. Celles-ci ont également été augmentées dans la perspective de l’utilisation du produit de l’emprunt national qui vise à accroître l’effort d’investissement de l’Etat et à augmenter le potentiel de croissance de l’économie française.

L’analyse des interventions économiques de l’Etat par des moyens extra-budgétaires se heurte à des difficultés d’ordre méthodologique attachées au concept même d’interventions économiques. Celles-ci peuvent poursuivre plusieurs objectifs, comme l’aide aux entreprises, le financement d’infrastructures ou l’aménagement du territoire, et s’effectuent par l’intermédiaire d’outils très divers. L’extrême diversité des interventions conduit à croiser plusieurs axes d’analyse. Ainsi, le soutien à la recherche et au développement peut être considéré comme un investissement alors qu’il est étranger à la notion d’investissement telle qu’elle résulte de la comptabilité nationale sous la dénomination de formation brute de capital fixe. Par ailleurs, le partage qui doit être fait avec les interventions extra-budgétaires dans le domaine social et qui ne relèvent pas du champ de l’enquête souhaitée par le Parlement, comporte inévitablement une part de convention.

Ces difficultés d’ordre méthodologique justifient qu’il ne soit pas tenté de construire un agrégat unique représentatif de l’ensemble des interventions économiques extra-budgétaires de l’Etat et uniquement de celles-ci. Au demeurant, il n’existe pas de dispositif de comptabilisation susceptible de regrouper sous un même indicateur les données quantitatives se rapportant à un ensemble d’actions aussi hétérogènes. La comptabilité générale permet d’avoir une approche patrimoniale des actifs immobilisés, des passifs financiers et non financiers et des engagements hors bilan mais non de totalisation de l’ensemble. Pour autant, il reste possible de situer les différents modes d’intervention les uns par rapport aux autres en fonction de leur poids relatif et de leur impact respectif sur les finances publiques.

Le recours à des mécanismes extra-budgétaires d’intervention dans l’économie peut être justifié par la recherche d’une plus grande efficacité et d’un meilleur retour sur investissement. De fait, certains mécanismes ont été mis en place pour bénéficier de la spécialisation des organismes chargés de les mettre en oeuvre et afin de mieux mesurer la rentabilité économique des investissements réalisés.

L’utilisation accrue de moyens extra-budgétaires peut en revanche devenir une tentation, dans un contexte budgétaire tendu, caractérisé par un déficit et un endettement très importants. Dans ce contexte, une « débudgétisation » dans l’espace, consistant à recourir à des véhicules se situant en dehors du budget, ou dans le temps, consistant à différer l’impact budgétaire de certaines mesures pourrait être recherchée.

Tout bilan des interventions extra-budgétaires se heurte aux mêmes limites que celui relatif aux interventions budgétaires dans l’économie, faute de mesure pertinente de l’efficacité et d’outils d’évaluation ex-ante et ex-post. En outre, la cohérence d’ensemble des dispositifs est difficile à appréhender eu égard à leur diversité et à l’absence de réflexion globale des pouvoirs publics sur ce sujet.

Du point de vue des finances publiques, les incidences budgétaires de ces interventions ne sont généralement pas nulles bien qu’elles soient en tout ou partie extra-budgétaires. Certains dispositifs affectent directement l’équilibre de la loi de finances (taxes affectées, non recouvrement de recettes évitant la consommation de crédits budgétaires, par exemple). D’autres conservent la nature de charges budgétaires au sens de la LOLF (dotations en capital, par exemple). Plusieurs sont porteurs de risques et susceptibles d’induire des charges futures (mise en jeu des garanties consenties, financements innovants…). Enfin, les modalités d’interventions peuvent avoir ou non un effet « déconsolidant » du point de vue de la dette publique au sens du traité de Maastricht.

Il est ainsi possible d’établir une typologie de ces interventions au regard des règles budgétaires et comptables applicables à l’Etat et de les analyser sous l’angle de leur caractère dérogatoire au regard des grands principes budgétaires (annualité, unité, universalité, spécialité, sincérité) et comptables. La mise en place de mécanismes extra-budgétaires doit également être examinée au regard de leur impact sur les autorisations parlementaires et des modalités de contrôle dont dispose le Parlement.

In fine, le développement de mécanismes extra-budgétaires conduit à distinguer entre ceux qui sont porteurs de risques budgétaires ou financiers et ceux qui se caractérisent par une absence de risque. Au regard des premiers, se pose la question des limites et des contrôles à opérer. Mais la nécessité du contrôle est également forte vis-à-vis des dispositifs qui apparaissent comme des instruments de valorisation d’un patrimoine ou d’un droit. En présence de ces derniers, la mise en place d’une organisation différente du contrôle budgétaire et du contrôle de la performance doit être envisagée.

La première partie de ce rapport examine les dispositifs qui se caractérisent par leur grande variété (I), et les objectifs qui leur sont assignés (II).

La seconde partie évalue le poids relatif des différents dispositifs et les risques qui y sont associés (I), examine la traduction budgétaire et comptable de certains d’entre eux (II) et souligne la nécessité d’en préciser la gouvernance (III).

PARTIE 1 : des dispositifs varies, poursuivant des objectifs multiples,

Les interventions extra-budgétaires de l’Etat dans l’économie, telles qu’entendues dans le cadre de cette enquête, recouvrent à la fois des actions de nature structurelle qui passent par la mise en place de dispositifs de longue durée, et des actions à finalité conjoncturelle visant à répondre à une situation de récession ou de crise. Les premières tendent au développement d’infrastructures ou d’autres investissements, à l’amélioration de la compétitivité de l’économie ou constituent des mesures de soutien aux entreprises. Les secondes, qui visent à assurer le financement de l’économie et à soutenir l’activité, se sont fortement développées dans la période récente.

Les dispositifs d’intervention extra-budgétaire dans l’économie, qui se caractérisent par leur grande variété (I), poursuivent des objectifs apparaissant légitimes mais dont l’accroissement pourrait devenir une tentation non dénuée de risques (II).

I. Des dispositifs d’une grande variété

La diversité même des dispositifs concernés et l’absence de définition pré-existante de la notion d’intervention extra-budgétaire entraînent qu’il convient de les recenser, de les décrire et de les classer avant toute analyse générale.

Entendu comme ne se traduisant pas par un flux budgétaire ou, en présence d’un tel flux, comme s’affranchissant de la règle de l’annualité budgétaire, l’intervention extra-budgétaire dans l’économie peut concourir à la réalisation d’investissements publics (A), soutenir les entreprises et l’innovation (B) ou, de façon plus générale, garantir le financement de l’économie (C).

A. Les investissements publics

L’investissement public constitue une modalité traditionnelle d’intervention économique des Etats. La notion n’est cependant pas sans ambiguïté dès lors qu’une grande partie des investissements d’infrastructures, qui sont réalisés par des entreprises publiques ou des sociétés privées, n’est pas comptabilisée, en comptabilité nationale, parmi les investissements publics.

Alors que les investissements civils de l’Etat, qui ont représenté 3,6 Md€ en 2008 et 4,8 Md€ en 2009, concernent principalement des bâtiments, les financements d’infrastructures ou à finalité structurante sont assurés de manière extra-budgétaire, par l’intermédiaire des opérateurs de l’Etat (1), des partenaires privés (2) et des entreprises publiques (3).

1. L’investissement de l’Etat via ses opérateurs

Les ressources des opérateurs de l’Etat, qui concourent à la mise en œuvre des politiques publiques, sont constituées de crédits budgétaires (subventions pour charges de service public, crédits d’intervention, dotations) ou de taxes affectées.

Les crédits budgétaires versés aux opérateurs prennent la forme de subventions pour charges de service public, quasi intégralement affectées à des dépenses de fonctionnement (seulement 4 % d’investissement) et de crédits d’intervention, qui peuvent financer des investissements dans des proportions variables selon les opérateurs. Les subventions pour charges de service public, versées aux opérateurs pour compenser leurs propres dépenses de fonctionnement et d’investissement, se sont élevées en 2009 à 20,1 Md€ de crédits de paiement1. Pour leur part, la même année, les crédits d’intervention versés aux opérateurs se sont élevés à 8,6 Md€.

Les dépenses des opérateurs peuvent aussi être financées, de manière extra-budgétaire, par des impôts et taxes affectés ». C’est le cas, notamment, pour les agences de l’eau, l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME) ou Voies navigables de France (VNF). Au total, les impôts et taxes affectés à des opérateurs se sont élevés à 8,4 Md€ en 2009. Ils ont connu une forte croissance sur les dernières années (+21 % entre 2006 et 2009). Quelques opérateurs, dont les agences de l’eau et l’ANRU sont autorisés à recourir à l’emprunt.

A titre indicatif, le tableau suivant présente les principaux opérateurs de l’Etat bénéficiant de ressources fiscales affectées :

Source : Jaunes budgétaires annexées au PLF – Opérateurs

[En rose, les opérateurs menant des interventions économiques au sens de ce rapport]

Le recours aux opérateurs permet de spécialiser les intervenants. En ce sens, leur intervention vise un objectif d’efficacité. Lorsque les ressources sont constituées de taxes affectées, le caractère extra-budgétaire se traduit par une économie de crédits budgétaires mais aussi par une perte de recettes pour le budget de l’Etat qui constitue, en outre, une dérogation au principe de l’unité de caisse. Dans un certain nombre de cas, l’affectation de la taxe est présentée comme économiquement proche d’une redevance en ce qu’elle permettrait le financement d’un service public par l’usager ou relèverait de l’application du principe « pollueur-payeur ». Tel serait le cas, selon la direction du budget, avec la création de la « taxe poids lourds ».

a. L’AFITF

L’Agence de financement des infrastructures de transports de France (AFITF)2 concourt au financement des grands projets d’infrastructures ferroviaires, routières, fluviales et portuaires, ainsi qu’aux autoroutes de la mer et ferroviaires et à la réalisation des projets inscrits aux contrats de projet Etat régions (CPER). Son financement a été assuré par une dotation en capital de 4 Md€, prélevée sur le produit des cessions de parts de l’Etat dans les sociétés publiques concessionnaires d’autoroutes en 2005. Ayant entièrement consommé cette dotation, l’Agence perçoit actuellement une dotation budgétaire dans l’attente des ressources que lui procurerait l’affectation du produit de l’écotaxe sur les poids lourds empruntant le réseau non concédé. L’instauration de cette taxe conférerait aux dépenses de l’AFITF un statut pleinement extra-budgétaire.

Pour 2010, le montant prévu pour la dotation s’élève à 980,3 M€. Celle-ci revient cependant pour partie dans le budget de l’Etat sous la forme de fonds de concours, dans le cadre du financement des actions du programme 203 « infrastructures et services de transport », pour un montant de 755,3 M€ en AE et 832,3 M€ en CP3. Le positionnement budgétaire de l’AFITF est ainsi paradoxal. Alors que l’Agence a été conçue comme un instrument de nature extra-budgétaire, son mode actuel de financement et son intervention sous la forme d’un fonds de concours lui redonnent une dimension budgétaire.

b. VNF

Voies navigables de France4 fournit un intéressant exemple d’investissements publics financés par des moyens extra-budgétaires combinés. Si l’Etat a contribué aux investissements de l’établissement au moyen de crédits budgétaires, VNF procède à des investissements financés sur ses ressources propres, constituées d’une taxe affectée, auxquelles s’ajoutent des financements en provenance des collectivités territoriales, de fonds européens et de partenaires privés.

VNF est un établissement public industriel et commercial qui assure l’exploitation, l’entretien, l’amélioration et l’extension des voies navigables qui lui ont été confiées par l’État, ainsi que la gestion des dépendances et du domaine terrestre associé. Les ressources de fonctionnement de l’établissement se sont élevées en 2009 à 178 M€ et les ressources d’investissement à 238 M€5.

L’Etat a contribué à hauteur de 129 M€ aux ressources de fonctionnement, par le biais d’une taxe affectée, la « taxe hydraulique »6. Cette taxe est acquittée par les titulaires d'ouvrages de prise d'eau, rejet d'eau ou autres ouvrages hydrauliques destinés à prélever ou évacuer des volumes d'eau sur le domaine public fluvial confié à l’établissement.

L’Etat a contribué aux ressources d’investissement, en versant une subvention de 51,4 M€ en 20097. A cela s’ajoute la capacité d’autofinancement (58 M€) et d’autres financements, essentiellement en provenance des collectivités territoriales, qui s’élèvent à 37,8 M€, complétés par des produits de cessions de terrains (6,3 M€).

En 2008, VNF avait bénéficié de ressources au titre du financement du projet Seine-Nord Europe pour 13 M€. Ce dernier projet, qui a vocation à démultiplier, à l’horizon 2015, l’offre de services fluviaux, est particulièrement illustratif du mode de financement d’une infrastructure de transport par des moyens extra-budgétaires. Son coût prévisionnel de plus de 4 Md€ sera financé pour partie sur ressources publiques (300 M€ de fonds européens, 900 M€ par les collectivités territoriales et 900 M€ par l’Etat via l’AFITF) et pour partie sur ressources privées dans le cadre d’un partenariat public-privé d’un montant de 2,1 Md€. L’effet recherché est un effet de levier.

c. L’ADEME

Les missions de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME), en matière de maîtrise de l’énergie et de promotion des énergies renouvelables, revêtent également une dimension structurante. L’évolution de ses modes de financement est riche d’enseignements en termes d’interventions extra-budgétaires de l’Etat, celui-ci alternant au gré des arbitrages un financement par dotations budgétaires et un financement par taxes affectées.

Jusqu’en 1998, l’agence a été financée par des dotations budgétaires et par le produit de cinq taxes fiscales et parafiscales affectées à l’agence. A compter de 1999, la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP), qui s’est substituée aux cinq taxes, a été affectée au budget de l’Etat. Les produits correspondants ont alors été remplacés par des dotations budgétaires, le financement de l’Agence redevenant budgétaire.

En 2004, le ministère en charge de l’écologie a mis en place, en complément des dotations budgétaires, un fonds de concours de 135 M€ en crédits de paiement, collecté auprès des agences de l’eau. En 2005, l’ADEME a reçu des crédits attribués sous forme de subvention pour charge de service public. A partir de 2006, l’affectation du produit de la taxe sur les véhicules les plus polluants et du produit de la taxe intérieure sur la consommation de gaz naturel, a constitué une part du financement de l’Agence (pour un total de 189,2 M€ en AE et de 192,8 M€ en CP, en 2006). En 2007, le produit d’une nouvelle taxe sur la consommation du charbon, de la houille et des lignites s’est ajouté aux autres taxes affectées. Les produits de ces taxes sont devenus majoritaires, pour un total de 237,6 M€ en AE et 241,4 M€ en CP. En 2008, le financement sur taxes, stabilisé à 242 M€, a été entièrement porté sur les recettes de TGAP. Ce financement prend la forme d’un montant forfaitaire inscrit en loi de finances.

Enfin, à partir de 2009, la part de TGAP attribuée à l’ADEME en loi de finances initiale a été augmentée de 121 M€ pour atteindre 363 M€. Ce montant est en outre majoré par le produit des nouvelles TGAP mises en place sur les installations d’incinération des ordures ménagères et sur les installations produisant des poussières (estimé à 65 M€).

Le tableau suivant, qui retrace l’évolution des dotations budgétaires (CP) et des recettes affectées à l’ADEME depuis 1998, met particulièrement en évidence la débudgétisation que représente le mode actuel de financement de l’Agence.

Source : ADEME

d. Les agences de l’eau

Au nombre de six, les agences de l’eau, qui sont des établissements publics de l’Etat à caractère administratif, fournissent un autre exemple d’investissements par des moyens extra-budgétaires. Elles peuvent en outre recourir à l’emprunt, ce qui constitue une autre modalité de financement extra-budgétaire.

Ces agences participent, au niveau d’un ou de plusieurs bassins hydrographiques, à la mise en œuvre des politiques nationales et communautaires de l’eau. Le montant des autorisations d’engagements sur la période 2007-2012 s’élève à 14 Md€8 (soit 1,8 Md€ par an). Les recettes des agences de l’eau sont exclusivement des impôts et taxes affectés, les redevances sur l’eau9, et des remboursements des avances qu’elles peuvent consentir selon les règles fixées par leur programme pluriannuel d’intervention. Les taxes affectées aux agences de l’eau (pour un montant de 2 025 M€ dans le projet de loi de finances pour 2010)10 sont les plus importantes des ITAF perçues par les opérateurs (soit 24 % de celles-ci)11.

Les agences peuvent également recourir à l’emprunt, dont le remboursement s’étalera sur la durée de leur programme. Cette solution est actuellement mise en œuvre par deux agences (Loire-Bretagne et Rhin-Meuse). Une enveloppe de prêts sur fonds d’épargne de 1,2 Md€ sur la métropole a également été mise à disposition par la Caisse des dépôts et consignations, dans le but d’aider les agences à mettre en conformité les stations d’épuration aux normes communautaires. Deux agences y ont déjà eu recours (Adour-Garonne et Seine-Normandie). Au total, 533 M€ de prêts ont été engagés en comité de crédit et 155 M€ ont déjà été signés.

Pour la période 2007-2012, les prévisions de recettes, s’élèvent, comme celles des autorisations d’engagement, à 14 Md€ dont 11,5 Md€ de redevances, 1,8 Md€ de remboursements de prêts et avances, 413 M€ de prêts CDC et 280 M€ d’autres recettes.

e. L’ANRU

Un autre exemple d’intervention structurante est fourni par l’Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU)12, qui est un établissement public national à caractère industriel et commercial chargé de mettre en œuvre le Programme National de Rénovation Urbaine (PNRU). L’Agence apporte un soutien financier aux collectivités locales, aux établissements publics et aux organismes privés ou publics qui conduisent des opérations de rénovation urbaine.

Alors que la participation de l’Etat au financement de l’ANRU était jusqu’en 2008 déterminante ou significative, selon les années, un financement extra-budgétaire en provenance du 1% logement l’a remplacé. Si, depuis l’origine du dispositif, les pouvoirs publics ont orienté une partie de ces ressources (4 Md€/an) vers des emplois jugés prioritaires, la loi du 25 mars 2009 de mobilisation pour le logement et la lutte contre l’exclusion, a accentué ce mouvement. La redéfinition des catégories possibles d’emplois des ressources du 1% logement a permis d’accroître de manière importante les financements affectés à la rénovation urbaine. Sur la durée du PNRU (2004 – 2013(13), ce sont 42 Md€ d’investissements qui seront réalisés, avec un financement de 6 Md€ en provenance de l’Etat(14) et de 6 Md€ de l’Union d’économie sociale pour le logement (UESL) au lieu des 12 Md€ auxquels l’Etat s’était engagé initialement (15).

Le tableau suivant présente l’évolution de l’affectation des ressources du 1 % logement aux politiques publiques du logement. 

Source : Action Logement, Livre Blanc mars 2010

Note : le PNRQAD est le Plan national de requalification des quartiers anciens dégradés

Sur la période 2004/2010, la réorientation de ressources du 1% logement vers des politiques publiques a été massive (les crédits du 1% logement affectés à ces actions étant multipliés par plus de 7).

Le décret du 22 juin 2009 et son arrêté d’application du 10 août 2009, prévoient que le 1% logement apportera 770 M€ par an à l’ANRU (avec un échéancier de versement de 595 M€ en 2009, 1100 M€ en 2010, 615 M€ en 2011). Les arbitrages pour la LFI 2011 portent cette contribution à 830 M€ en 2012 et 850 M€ en 2013.

Pour les années 2012 à 2018 un complément de financement important devra toutefois être trouvé. La renégociation du décret sur les règles d’utilisation du 1% logement, qui interviendra en 2012 pourrait être l’occasion d’une mobilisation accrue de cette ressource en faveur de la rénovation urbaine. La mobilisation de l’abondante trésorerie de l’ANRU (717 M€ prévus en fin 2010) est également une des pistes possibles de financement.

Les recettes de l’agence sont donc désormais principalement constituées de contributions de l’Union d’économie sociale pour le logement (UESL) et de subventions de la Caisse des dépôts et consignations. Elle reçoit également des ressources de la Caisse de garantie du logement locatif social (CGLLS) (179 M€ entre 2004 et 2009). Celle-ci versera encore 30 M€ par an jusqu’à extinction du PNRU. Les subventions de l’Etat ne sont plus que marginales (5 M€ par an) et la parité de financement programmée entre l’Etat et l’UESL n’est plus actuellement une réalité.

L’Agence est également autorisée à contracter des emprunts, dans la limite d’un plafond fixé par décret. Ses dépenses sont essentiellement des dépenses d’intervention.

Ce mode de financement, conjugué aux autres sources de financement de l’Agence, confère à cette dernière le caractère d’un dispositif d’investissement de nature extra-budgétaire.

Le graphique ci-dessous illustre bien la décision de réorienter les ressources de l’UESL vers les politiques nationales (en l’occurrence la politique de rénovation urbaine), qui permet à l’Etat de consacrer ses propres financements à d’autres actions.

Source : Rapport du Sénat sur la LFI 2009 (politique de la Ville) citant des données ANRU

Si les données de ce graphique ne sont plus totalement d’actualité, il a le mérite de bien montrer l’importance des financements en provenance du 1 % logement dans les ressources du PNRU et l’ampleur des besoins à partir de 2012.

Les financements en provenance du 1 % logement ne devraient pas suffire à faire face à l’ensemble des besoins de l’ANRU et la question de la réintroduction de l’Etat dans le schéma de financement global de l’Agence est posée à partir de 2012.

La substitution d’un financement par l’intermédiaire du 1 % logement à des dotations budgétaires a été étendue, par la loi de mobilisation pour le logement et la lutte contre l’exclusion, à l’Agence nationale pour l’amélioration de l’habitat (ANAH)16. Bien que les interventions de cet opérateur n’entrent pas dans le champ des investissements structurants pour l’économie, l’évolution de son mode de financement participe d’une démarche similaire. Depuis 2008, l’agence bénéfice d’avances de trésorerie de l’Agence France Trésor (pour un maximum conventionnel de 240 M€).

La réorientation des ressources du 1% logement vers des politiques prioritaires va dans le sens des remarques répétées de la Cour (Rapports publics annuels 2006,2009 et 2010) en faveur d’une réforme en profondeur de la gouvernance du 1 % logement pour faire de ce dispositif un levier plus puissant pour la politique du logement. Ces rapports avaient notamment relevé l’absence de débats parlementaires sur l’utilisation des crédits du 1% logement. Leur mobilisation massive pour le financement de l’ANRU et de l’ANAH les réintroduit dans des mécanismes de contrôle parlementaire.

Dans le cas particulier du financement de la rénovation urbaine, le passage à une utilisation comme mode de financement extra-budgétaire s’accompagne d’une amélioration des contrôles publics sur une ressource importante.

2. Les financements privés concourant à l’investissement public

Le financement d’investissements au moyen de délégations de service public, et notamment de concessions, constitue un mode ancien d’intervention économique de l’Etat. Il en va de même, pour partie, lorsque l’Etat finance des opérations dans le cadre de contrats de partenariat public privé ou de tout autre mode de financement dit innovant.

a. La délégation de service public

La délégation de service public confie, pour une durée déterminée, la gestion d'un service public à un délégataire public ou privé dont la rémunération est substantiellement liée aux résultats de l'exploitation du service. La plupart des infrastructures publiques financées à travers des délégations de service public sont régies par des contrats de concession. Les entreprises concessionnaires prennent en charge, à leurs risques et périls, les investissements et l’exploitation du service. Dans cette hypothèse, le financement de l’investissement initial et de l’entretien, de même que celui des charges d’exploitation, s’effectuent sans utilisation de ressources budgétaires17.

Les biens indispensables à l’exploitation du service sont des biens dits de retour, c’est-à-dire destinés à être remis gratuitement à la personne publique à l’expiration du contrat et réputés appartenir dès l’origine à cette dernière, à la différence des biens de reprise, utiles mais non indispensables à l’exploitation du service, susceptibles d’être transférés à titre onéreux à la personne publique.

La délégation de service public est un instrument de valorisation d’un patrimoine ou d’un droit. Les actifs mis en concession qui, pour la première fois en 2009, ont été comptabilisés à l’actif du bilan de l’Etat représentent une valeur nette immobilisée de 131,5 Md€ au 31 décembre de l’exercice, soit 21 % de l’actif net immobilisé et 17 % de l’actif net total du bilan de l’Etat. Cette valorisation comprend les concessions autoroutières (125,4 Md€), les concessions ferroviaires (4,7 Md€) et les concessions aéroportuaires (1,3 Md€)18. En contrepartie, les droits du concessionnaire sur la durée résiduelle du contrat sont comptabilisés sous la forme d’un passif non financier qui s’élève, à la même date, à 38,5 Md€.

Toutes les concessions de l’Etat ne sont cependant pas encore comptabilisées au bilan de l’Etat. La liste des biens dont la valorisation n’a pas encore été prise en compte figure à l’annexe des comptes de l’Etat. La concession relative au Stade de France fera l’objet d’une comptabilisation en 2010. Le traitement comptable à réserver aux ouvrages de force hydraulique qui sont inscrits à l’actif du bilan des concessionnaires (EDF, CNR,…) pour une valeur brute de 12,4 Md€ et une valeur nette de 6,6 Md€, doit faire l’objet d’une analyse complémentaire.

b. Les partenariats public-privé (PPP)

Les partenariats public-privé (contrats de partenariat et autres montages financiers dits innovants tels les autorisations d’occupation temporaire, les baux emphytéotiques administratifs, les locations avec option d’achat) constituent une autre modalité de financement privé d’investissements publics19.

En contrepartie du paiement d’un loyer (qui est une charge budgétaire) lissant les dépenses sur la durée du contrat, le partenaire privé finance les investissements (matériels ou immatériels) et prend en charge les services associés. A la différence du marché public, pour lequel le paiement différé est prohibé, le PPP permet d’étaler la dépense d’investissement sur l’ensemble de la période contractuelle. L’impact budgétaire de l’investissement est ainsi différé dans le temps. Le partenariat public-privé apparaît donc comme un mode de préfinancement privé des investissements qui majore le coût réel payé par l’Etat à concurrence de la marge du bénéficiaire et du différentiel de taux auquel le partenaire emprunte par rapport à l’Etat.

Le partenariat public-privé permet d’utiliser le levier de la commande publique pour soutenir l’investissement et jouer un rôle contra cyclique, sans consommer immédiatement les ressources budgétaires correspondantes. Cette modalité d’intervention a constitué un des éléments du plan de relance. Une enveloppe de garanties par l’Etat de 10 Md€ a été mise en place par l’article 6 de la loi n° 2009-122 du 4 février 2009, afin de faciliter la mobilisation des financements. La garantie de l’Etat, qui peut être accordée aux contrats de partenariat, aux concessions de travaux et aux contrats de délégation de service public, ne s’applique qu’aux contrats signés avant le 31 décembre 2010. Elle est rémunérée et peut contribuer au financement initial du projet ou à son refinancement. Cette garantie peut être accordée aux prêts, aux titres de créance de la société de projet ou aux titres de créance émis par des établissements de crédit pour financer les contrats, dans la limite de 80 % du montant des prêts ou titres de créances. A ce jour, aucune garantie de l’Etat n’a toutefois été accordée à ce titre.

Une enveloppe de prêts sur fonds d’épargne a été ouverte par le ministre chargé de l’économie pour une durée de cinq ans (2009-2013) pour faciliter la réalisation d’infrastructures, notamment sous la forme de PPP, en apportant aux projets concernés des compléments de financement sur longue durée à des conditions avantageuses. Sur l’enveloppe de 8 Md€, un montant de 7 Md€ est destiné aux infrastructures de transport, le solde ayant vocation à participer au financement du plan Campus pour les universités.

Les prêts, d’une durée maximum de 40 ou 50 ans pour les grands projets d’infrastructures, peuvent être accordés aux collectivités territoriales, dans la limite de 50 % de leurs besoins de financement, et aux sociétés de projet, dans la limite de 25% du montant total à emprunter.

La loi n° 2009-179 du 17 février 2009 pour l’accélération des programmes de construction et des investissements publics et privés permet qu’une partie du financement du projet puisse être apportée par la personne publique, à l’exception de toute participation au capital de la société de projet. Lorsqu’il s’agit d’un contrat d’une collectivité territoriale ou d’un établissement public local, le financement définitif doit toutefois être majoritairement assuré par le partenaire privé, sauf pour les projets d’un montant supérieur à un seuil fixé par décret (40 M€). Au-dessus de ce seuil et, pour le cas de l’Etat quel que soit le montant du projet, le financement peut être majoritairement public.

La loi, qui prévoit la possibilité d’ajuster le montage du financement des contrats de partenariat après la remise de l’offre finale, généralise des dispositions introduites par la loi n° 2008-735 du 28 juillet 2008 afin d’ouvrir les investissements publics en contrat de partenariat à tous les financements possibles. Outre qu’elles favorisent le bilan coûts / avantages qui est une des conditions du recours à un contrat de partenariat, ces dispositions transforment sensiblement la nature de ces contrats en faisant d’un dispositif de financement privé d’investissements publics un mode de cofinancement public / privé de ces derniers.

S’agissant de l’Etat, le bilan des partenariats public privé (contrats partenariat, autorisations d’occupation temporaire, locations avec option d’achat) s’établit à 17 contrats signés représentant un montant d’investissement de près de 3 Md€. En termes de flux annuels, les montants d’investissement au moyen de contrats de partenariat au titre de l’année 2009 apparaissent toutefois en retrait par rapport à ceux de 2008, en dépit des dispositifs adoptés pour en favoriser le recours. Pour l’Etat, les investissements par contrat de partenariat se sont élevés à 207 M€ en 2009 contre 377 M€ en 200820.

3. La prise en compte des investissements des entreprises publiques

En raison de leur appartenance au secteur marchand, les investissements des entreprises publiques ne sont pas pris en compte en comptabilité nationale dans les agrégats relatifs aux investissements publics. Cependant, ce sont elles qui réalisent une grande partie des investissements considérés comme publics, notamment les investissements d’infrastructures qui ont un effet structurant important et un effet d’entraînement sur l’activité économique d’ensemble.

Le budget d’investissement de la RATP s’est élevé à 1,4 Md€ en 2009, celui du groupe SNCF à 2,5 Md€. Les investissements de RFF ont atteint 3,4 Md€ en 2009. Pour EDF, les investissements opérationnels en France ont représenté 7,162 Md€21 en 2009, dont 2,15 Md€ d’investissements de production.

Dans le cas le plus général, ces investissements ne peuvent être classés au nombre des interventions extra-budgétaires de l’Etat, dans la mesure où ils répondent avant tout aux besoins des entreprises et sont prélevés sur la marge bénéficiaire dégagée par l’entreprise et sur des financements de marché. Toutefois, l’accélération des programmes d’investissement dans le cadre du plan de relance a pu constituer une intervention de cette nature permettant d’accroître, à des fins conjoncturelles, le volume des investissements publics22 et d’amplifier l’effet des stabilisateurs automatiques.

B. Les interventions en faveur des entreprises et de l’innovation

Dans le cadre de la Stratégie de Lisbonne, l’Union européenne vise un accroissement de la croissance potentielle des Etats membres, chacun d’entre eux étant appelé à décliner cette stratégie dans un programme national de réforme. Différents instruments, destinés à renforcer la compétitivité de l’économie française, visent en particulier à renforcer les fonds propres des entreprises et à investir dans l’enseignement supérieur et la recherche. La volonté actuelle des pouvoirs publics de relancer la politique industrielle de l’Etat s’inscrit également dans ces orientations. Certains de ces instruments correspondent à des mécanismes d’intervention extra-budgétaire.

1. Les interventions visant le renforcement des fonds propres des entreprises

Le renforcement des fonds propres des petites et moyennes entreprises et des entreprises de taille intermédiaire est un facteur essentiel de leur croissance. La mise en place de dispositifs favorisant ce renforcement constitue un enjeu majeur des politiques publiques de soutien économique.

Elle s’effectue selon deux axes, l’incitation à l’apport de fonds par des investisseurs privés et l’apport de fonds propres d’origine publique par l’intermédiaire de prises de participation minoritaires. Dans l’un et l’autre cas, l’intervention extra-budgétaire se caractérise par la recherche d’un effet de levier destiné à démultiplier l’action publique.

a. Le Fonds stratégique d’investissement

Le dispositif France Investissement lancé à la fin de 2006 participe du soutien public au développement de l’amorçage, du capital-risque et du capital développement. A l’origine, il était prévu un apport public de 2 Md€ complété par un apport d’1 Md€ de la part des partenaires privés du dispositif23. La part publique a été relevée à hauteur de 2,4 Md€, de 2006 à 2012, alors que les engagements privés se sont élevés à 300 M€ et ne sont pas susceptibles d’augmenter du fait de la décision des pouvoirs publics d’interrompre le mécanisme d’alimentation de nouveaux fonds de fonds privés.

A la fin 2009, les engagements des partenaires publics et privés de France Investissement s’élevaient à 1,6 Md€. Ils avaient bénéficié à 559 entreprises dont 230 nouvellement créées. Les engagements de ce fonds, géré par CDC Entreprises ont été repris par le Fonds stratégique d’investissement (FSI). Entre le 1er janvier 2009 et le 30 juin 2010, 129 investissements ont été réalisés par CDC Entreprises (Avenir Entreprises et Consolidation Développement Gestion).

Détenu à 49 % par l’Etat et à 51 % par la Caisse des dépôts et consignations, le FSI se positionne comme un investisseur de moyen et long terme. Les investissements, minoritaires en capital, sont choisis pour leur contribution potentielle à la compétitivité du pays et en fonction d’une rentabilité attendue. S’il entend s’impliquer dans la gouvernance des entreprises dans lesquelles il investit, le FSI ne recherche pas la prise de contrôle ou la direction de ces entreprises.

La dotation en fonds propres du FSI est de 20 Md€, apportés à hauteur de 14 Md€ sous forme de participations et 6 Md€ en numéraire24. L’apport de l’Etat en titres de participations est constitué principalement des participations cotées dans France Télécom (13,5 %) et ADP (8 %). La CDC a apporté de son côté une vingtaine de participations minoritaires dans des sociétés cotées, trois participations minoritaires dans des sociétés non cotées ainsi que des participations, parfois majoritaires, dans des sociétés de portefeuille et de capital-investissement.

La contribution en numéraire de l’Etat a été apportée sous la forme de dotations en capital du compte d’affectation spéciale des participations financières de l’Etat (PFE), pour un montant total de 2,94 Md€ dont 1,16 Md€ ont été appelés en 2009.  La capacité d’investissement du FSI est comprise entre 1,5 et de 2 Md€ par an.

Les investissements directs du FSI

Le premier investissement direct du FSI a été annoncé le 25 février 2009 et le deuxième le 4 mars. Le FSI a investi en 2009 pour 800 M€ dans 21 entreprises qui se répartissent en 4 grandes entreprises cotées, 5 entreprises de taille intermédiaire de croissance, 11 PME en croissance et 1 entreprise en création. La répartition des participations est de 0,5 Md€ en titres cotés et de 0,3 Md€ en titres non cotés.

Dans la plupart des cas, les investissements ont été réalisés sous forme d’augmentations de capital. Mais certaines prises de participation se sont faites par rachat de titres existants dans des sociétés cotées ou non (Valeo, Gemalto, Nexans, Technip). Certains investissements ont été réalisés sous la responsabilité de l’équipe de la société de gestion CDC Entreprises.

Dans le cadre du programme FSI-PME d’octobre 2009, l’enveloppe réservée aux investissements directs dans les PME a été doublée, pour être portée à 300 M€ sur 2009/2010. La gestion des investissements directs dans les PME est partagée entre les équipes de CDC Entreprises et celles du FSI.

L’action du FSI par l’intermédiaire de fonds partenaires

Le Fonds de modernisation des équipementiers automobiles (FMEA) a été créé en mars 2009 entre le FSI, Renault et PSA Peugeot Citroën et doté de 600 M€, apportés pour un tiers par chacun des trois investisseurs. Il intervient en fonds propres et quasi-fonds propres dans les entreprises stratégiques du secteur des équipementiers automobile, notamment celles qui seront capables de consolider et moderniser les grands métiers de la filière, dans un contexte de fragilité résultant des surcapacités industrielles exacerbées par la crise.

En février 2010, le FMEA a créé un fonds de 50 M€ avec cinq équipementiers automobiles25 (Valeo, Bosch, Faurecia, Plastic Omnium et Hutchinson). Ce fonds est destiné à apporter des fonds propres et des quasi-fonds propres aux fournisseurs de ces équipementiers. Le FMEA apporte la moitié des investissements.

Le financement FSI-France Investissement concerne 177 fonds nationaux et régionaux partenaires du FSI (plus de cent fonds nationaux et 67 fonds régionaux). L’enveloppe allouée par le FSI, qui était de 200 M€ en 2009, a été portée à 300 M€ en 2010. Cet ensemble de fonds représente, au total, 36 % de l’amorçage et 20 % du capital-risque et du petit capital-développement en France. Les nouveaux financements seront orientés sur les fonds les plus efficaces et les plus actifs, sans oublier les fonds régionaux.

Le Fonds de consolidation et de développement des entreprises (FCDE) a été créé en partenariat avec la médiation du crédit début octobre 2009 dans le cadre du programme FSI-PME, avec pour objectif de venir renforcer rapidement les fonds propres d’entreprises mises en difficulté par la crise. Ce fonds commun de placement à risques (FCPR), doté de 189,9 M€, est financé à hauteur de 89,9 M€ par le FSI, le reste étant apporté par des banques et des compagnies d’assurance.

Le FSI et les principaux laboratoires pharmaceutiques opérant en France, ont signé le 26 octobre 2009 un accord créant un fonds d’investissement dans les biotechnologies, InnoBio. Doté au départ de 140 M€, dont 52 M€ provenant du FSI, ce fonds commun de placement à risques (FCPR) a pour objectif de développer le savoir-faire dans les biotechnologies, d’accroître le potentiel des sociétés françaises et d’accélérer la mise sur le marché de leurs produits.

Le FSI entend également financer directement les entreprises cotées ou matures dans le secteur de la biotechnologie, en prenant des participations minoritaires supérieures à 10 M€, en association avec d’autres partenaires. Enfin il a décidé de renforcer ses investissements dans les nouveaux fonds dédiés aux biotechnologies. Un premier investissement a été réalisé dans ce cadre dans Kurma Fund, qui travaille en partenariat avec l’Institut Pasteur et l’Institut Curie.

Le Fonds Bois a été créé le 13 novembre 2009 par quatre actionnaires que sont le FSI, le Crédit Agricole, le groupe Eiffage et l’Office national des forêts. Il a vocation à contribuer au développement des entreprises du secteur et éventuellement à leur regroupement, afin de faire émerger un tissu de PME de taille suffisante pour structurer la filière et répondre à la demande de produits en bois. Le fonds investit en fonds propres ou quasi-fonds propres et prend des participations minoritaires dans des entreprises situées en France, dont les activités s’exercent notamment dans les secteurs de la scierie, de la fabrication de charpentes et autres menuiseries, de la construction de maisons à ossature bois, et de la production de plaquettes forestières et de pellets.

Créé en octobre 2009 dans le cadre du programme FSI-PME, afin de lever les obstacles liés à l’ouverture du capital et à la valorisation des petites entreprises, l’instrument OC+ est constitué d’une obligation convertible d’un maximum de cinq millions d’euros et d’un bon de souscription d’actions (BSA) qui permet à l’investisseur de participer à la création de valeur réalisée par l’entreprise. Le FSI entend y consacrer 300 M€.

A la suite des états généraux de l’industrie, l’opportunité de mettre en place d’autres fonds sectoriels cofinancés et gérés, à l’image du FMEA, par le FSI et les principaux acteurs des secteurs et filières sera étudiée. Une partie des 300 M€ dédiés aux filières dans l’action « états généraux de l’industrie » de l’emprunt national pourra être investie dans ces fonds. Sur cette enveloppe, des projets structurants pour certaines filières industrielles porteuses de croissance pourront également être cofinancés par l’Etat et des entreprises « têtes de filière » sous la forme d’avances remboursables ou d’interventions en capital.

Mécanisme récent, le FSI constitue ainsi un moyen d’intervention extra-budgétaire qui vise un effet de levier et procède par ramifications successives.

b. L’intervention de la CDC dans le cadre de ses missions d’intérêt général

Le financement des PME constitue une des quatre priorités du plan stratégique Elan 2020 adopté en 2008 par le groupe Caisse des dépôts. Il s’agit de résorber les imperfections du marché qui limitent structurellement le développement de l’offre de financement privé, notamment dans les phases amont de création et de développement des entreprises.

Si les interventions de CDC Capital Investissement, devenue Qualium26 Investissement en janvier 2010, n’entrent pas dans le cadre des missions d’intérêt général mais relèvent du secteur concurrentiel, CDC Entreprises gère pour le compte de la Caisse des dépôts et consignations des actions relevant de l’intérêt général qui sont portées par la société CDC Entreprises-élan PME, filiale à 100 % de la CDC. Les engagements pris par celle-ci s’élèvent à 35,6 M€, notamment dans le secteur des industries culturelles et patrimoniales (fonds Patrimoine & Création 2), d’une part et dans les pays du sud de la Méditerranée, d’autre part (fonds Averroes 2). L’enveloppe annuelle est de 50 M€.

Par ailleurs, le programme « Agir pour l’emploi » renforce également l’implication territoriale du groupe en favorisant la création-transmission de très petites entreprises ainsi que les initiatives locales créatrices d’emploi, dans le domaine de l’économie sociale. Ces soutiens, ainsi que le dispositif NACRE (Nouvel Accompagnement pour la Création et la Reprises d’Entreprises) sont contractualisés avec l’Etat pour ce programme pour un montant total d’environ 40 M€ par an.

c. Les Contrats de Développement Participatif d’Oséo

Le président de la République a annoncé le 5 octobre 2009 un plan de 2 Md€ pour renforcer le haut de bilan des entreprises touchées par la crise. Outre 1 Md€ sous forme d’obligations convertibles simplifiées porté par le FSI, ce plan prévoit 1 Md€ sous forme de contrats de développement participatifs confiés à Oséo.

Ces prêts d’une durée de 7 ans sont consentis sans aucune garantie et sont assortis d’un différé de 2 ans. Leur montant est compris entre 300 000 € et 3 M€. Il en est attendu un effet de levier important dans la mesure où ces prêts doivent être jumelés à un concours bancaire d’un montant au moins du double. Au 16 juin 2010, ce dispositif compte 335 entreprises bénéficiaires pour des apports en fonds propres de 800 M€ (dont 300 M€ en provenance d’OSEO et 500 M€ des banques et investisseurs).

d. Les contributions de l’Etat au développement du capital risque

Le Fonds de fonds technologique 3 (FFT3) est un fonds commun de placement à risque, géré par la société CDC Entreprise qui fait partie du groupe de la Caisse des dépôts et consignations. L’Etat consacre une enveloppe d’un montant plafonné à 50 M€ à son financement, le Fonds européen d’investissement, filiale spécialisée de la Banque européenne d’investissement spécialisé dans le capital risque et la Caisse des dépôts et consignations apportant chacun un financement identique.

Ce fonds a vocation à investir dans les fonds de capital risque qui participent au financement de la création et du développement des PME innovantes. Un autre fonds, le Fonds de promotion pour le capital risque 2000, a vocation à investir dans des fonds de capital risque majoritairement privés.

Dans le cadre de l’emprunt national, le Fonds national d’amorçage (FNA), doté de 400 M€, viendra renforcer les instruments de soutien à l’amorçage.

2. Le soutien extra-budgétaire en faveur de la recherche et de l’innovation

Le soutien public à la recherche et à l’innovation constitue un instrument essentiel de politique industrielle. Celui-ci peut être budgétaire, à l’instar du mécanisme d’avances remboursables à l’aéronautique civile que l’Etat consent dans le cadre du soutien apporté à certains secteurs « de pointe »27. Celles-ci permettent de financer des programmes qui représentent des investissements particulièrement lourds. En 2009, ces avances remboursables ont représenté 134 M€ d’AE et 110 M€ de CP. En 2010, les avances devant être versées s’élevaient à 190,4 M€ en AE et 115,4 M € en CP.

Ces avances sont encadrées par les règles communautaires et par une convention signée entre l’Etat et le bénéficiaire, qui précise notamment les conditions et modalités de remboursement : ceux-ci interviennent dès les premières ventes. Ces remboursements se sont montés à 207 M€ en 2008 et à 210 M€ en 2009.

Mais les politiques en faveur de la recherche et de l’innovation font également appel à des modalités de financement extra-budgétaire. Ceux-ci reposent en partie sur le dispositif des pôles de compétitivité et sur Oséo Innovation. Une part importante du produit de l’emprunt national, dont la gestion s’effectuera dans un cadre extra-budgétaire, sera affectée à cette politique.

Ces modalités d’intervention visent à encourager l’accroissement de l’effort d’innovation et à obtenir un effet de levier significatif, par l’intermédiaire de partenariats et par la recherche de synergies. Elles tendent également à pallier des défaillances de marché en apportant des soutiens publics indispensables au lancement de certaines opérations.

a. Les pôles de compétitivité

Les pôles de compétitivité rassemblent sur un territoire donné des entreprises, des laboratoires de recherche et des établissements de formation pour développer des synergies et des coopérations. Ils visent à développer la croissance et l’emploi sur des marchés porteurs en accroissant l’effort d’innovation, en confortant des activités, principalement industrielles, à fort contenu technologique ou de création, et en améliorant l’attractivité du territoire national. Chaque pôle élabore sa stratégie à cinq ans.

Si des soutiens publics sont accordés par l’Etat, sous forme de dotations budgétaires, selon trois axes (octroi d’aides financières sur la base d’appels à projets via le fonds unique interministériel28, financement partiel des structures de gouvernance des pôles aux côtés des collectivités territoriales et des entreprises, financement d’actions thématiques initiées par les pôles), une part du financement est de nature extra-budgétaire.

Des financements sont apportés par l’Agence nationale de la recherche, Oséo Innovation et la CDC pour des projets de recherche et développement menés par des acteurs des pôles de compétitivité. Les collectivités locales soutiennent également des projets, soit de recherche, soit de plates-formes d’innovation.

Les pôles de compétitivité, dont 71 ont été labellisés à l’origine, ont financé 738 projets sur la période 2005-2008. L’ensemble des financements de l’Etat et de ses opérateurs a représenté 1,46 Md€ sur la période dont 946 M€ par l’Etat correspondant à près de 4 Md€ de dépenses de recherche et développement. Pour la seconde phase de ce dispositif, qui porte sur la période 2009-2011, les ressources publiques affectées s’élèvent à 1,5 Md€ dont 600 M€ du fonds unique interministériel, auxquels s’ajoutent 50 M€ de crédits d’animation et 850 M€ d’interventions de l’Agence nationale de la Recherche (à hauteur de 600 M€) ainsi que d’Oséo et de la Caisse des dépôts et consignations (à hauteur de 250 M€).

Les pôles de compétitivité sont appelés à bénéficier de ressources résultant de l’emprunt national à hauteur de 500 M€. Celles-ci seront gérées par la CDC (200 M€ pour le financement de plates-formes mutualisées d’innovation pour les pôles de compétitivité) et par Oséo (300 M€ pour financer des projets structurants de recherche et développement portés par les partenaires des pôles).

Par ailleurs, les pôles de compétitivité interviendront dans la création des instituts de recherche technologique (IRT) et des instituts d’excellence en énergies décarbonées (IEED) dans la mesure où les projets d’IRT et d’IEED devront être labellisés par au moins un pôle de compétitivité pour être éligibles aux investissements d’avenir. L’enveloppe prévue pour l’ensemble de ces projets est de 3 Md€. Entre quatre et six IRT (pour 2 Md€) et cinq à dix IEED (pour 1 Md€) seront retenus. Les fonds seront gérés par l’Agence nationale de la recherche.

Ces instituts devront conduire à la constitution de campus d’innovation technologique à finalité industrielle de dimension et de visibilité mondiales, en regroupant sur un même site des établissements de formation, des laboratoires publics et privés de recherche appliquée, des moyens de prototypage et de démonstration industrielle, et en recherchant un cofinancement privé de l’ordre de 50 %.

b. Oséo Innovation

Oséo Innovation a pour mission de promouvoir et soutenir le développement industriel et la croissance par l’innovation, notamment technologique, ainsi que de contribuer au transfert de technologies. Les missions dévolues à l’ex-agence de l’innovation industrielle lui ont été transférées. Le contrat de performance 2009-2012 insiste sur la nécessité de pallier les défaillances du marché en soutenant les opérations qui ne pourraient se dérouler sans concours financier public.

Cet opérateur gère principalement deux programmes de soutien à l’innovation relatifs respectivement aux « aides à l’innovation » et à l’« innovation stratégique industrielle ».

Le premier de ces programmes correspond à l’activité historique de l’ANVAR. Il vise à accompagner les projets innovants de l’idée initiale jusqu’au prototype précédant le lancement commercial du produit ou du service innovant. Le soutien financier s’articule entre des subventions en phase amont du projet et des avances à taux zéro, remboursables en cas de succès, lorsque le projet est plus avancé, avant la démonstration de faisabilité notamment. Depuis 2005, l’intervention en faveur de projets collaboratifs ou partenariaux, au travers des pôles de compétitivité et du montage de projets éligibles aux financements européens, est devenue une priorité.

Oséo innovation intervient sur la base de la dotation de l’Etat et sur dotations de partenaires (Commission européenne, collectivités territoriales et direction générale de l’aviation civile notamment). La dotation représentait 388 M€ en 2008 et les interventions sur comptes de tiers 62 M€. Les aides distribuées sur le budget propre de l’établissement sont à 80 % des avances remboursables. Les interventions sur subventions, qui sont souvent de faible montant unitaire, visent à favoriser l’émergence et le démarrage de projets.

Les PME de moins de 50 salariés ont été bénéficiaires de 83 % des dossiers d’aides et de 73,7 % des montants. La part des aides contractualisées avec des entreprises de moins de 250 salariés atteint 96 %.

Le second programme est issu de l’activité de l’ex-AII. Il vise à soutenir des projets de recherche collaborative conduits par des entreprises de moins de 5 000 personnes portant sur des innovations dites de rupture pour des montants d’aides compris entre 3 et 10 M€. En 2008, les aides sous forme de subventions ou d’avances remboursables avec un taux d’intérêt non nul ont concerné 18 projets regroupant 89 entreprises et 46 laboratoires, ce qui représente un montant total de 273 M€.

Le rapport d’activité 2009 de l’établissement indique qu’en 2009 les financements de l’Etat, qui ont représenté un montant de 304,5 M€, étaient en retrait de 25 % par rapport à 2008. La part des financements provenant des partenaires d’Oséo (hors Etat) est en progression, passant de 13,5 à 26 % des financements totaux du programme Aide à l’innovation.

Cette augmentation résulte de l’accroissement des fonds structurels gérés par Oséo en région et de la montée en puissance des aides ciblées aux sous-traitants du secteur aéronautique, dont la gestion est confiée à Oséo par la direction générale de l’aviation civile. Les autres financements proviennent des moyens confiés par les collectivités territoriales et par le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche pour le concours national d’aide à la création d’entreprises technologiques innovantes.

Source : Rapport d’activité d’Oséo pour 2009

c. L’emprunt national

La loi de finances rectificative du 9 mars 2010 a ouvert 34,640 Md€ de crédits supplémentaires sur le budget de l’Etat, destinés à financer des investissements d’avenir. Ces investissements, qui doivent apporter un supplément de ressources par rapport aux dotations budgétaires ordinaires, ont été présentés comme devant avoir un effet positif sur la croissance de l’économie française.

Les mécanismes dérogatoires du droit commun qui ont été retenus pour utiliser le produit de l’emprunt national reposent sur un transfert des crédits alloués en loi de finances à différents opérateurs. Au-delà de ce transfert réalisé en 2010, l’utilisation des fonds, qui s’étalera sur une période de 10 ans, s’effectuera de façon entièrement extra-budgétaire.

Par ailleurs, la totalité des 35 Md€ n’est pas destinée à être consommée dans la mesure où une partie de ce montant (15,03 Md€) sera attribué sous la forme de dotations non consomptibles produisant des intérêts qui seuls pourront être dépensés. En conséquence, ainsi que le présent rapport l’indique plus loin, les montants réellement affectés à des investissements seront sensiblement inférieurs.

Ces investissements d’avenir s’inscrivent tout particulièrement dans une perspective de développement de la recherche et de l’innovation. Ils sont ciblés sur cinq priorités stratégiques : l’enseignement supérieur et formation (11 Md€), la recherche (7,9 Md€), les filières industrielles et les PME (6,14 Md€), le développement durable (5,1 Md€) et l’économie numérique (4,5 Md€).

Ces crédits ouverts se répartissent selon cinq catégories de dépenses(29) : les dotations non consomptibles(30)(15,03 Md€), les subventions 9,775 Md€ ), les prises de participation (3,515 Md€), les avances remboursables (2,82 Md€) et les prêts (3,5 Md€).

Les crédits ouverts par la LFR sont regroupés au sein de treize nouveaux programmes(31), créés au sein des missions existantes du budget général correspondant aux politiques publiques visées, de manière à assurer la complémentarité et éviter la fongibilité avec les autres dépenses du budget général. Ils sont suivis en dehors de la norme de dépense à l’exception des dépenses correspondant à la rémunération des fonds non consomptibles.

L’intégralité des crédits doit être versée au cours de l’année 2010 aux différents organismes gestionnaires dans le cadre d’une gouvernance spécifique. Les nouveaux programmes ont ainsi vocation à être supprimés à la fin de l’année 2010. Le dispositif deviendra alors extra-budgétaire. Pour chaque action du programme d’investissement, les fonds seront versés à un opérateur32 par le biais d’une convention qui fixe leur cadre d’emploi. Ce dernier aura la responsabilité de mettre en œuvre, sous l’autorité de l’Etat, la sélection des projets et d’en assurer le suivi ainsi que l’évaluation.

Les tableaux suivants présentent les programmes et les opérateurs concernés ainsi que les montants de crédits dont la gestion leur sera confiée.

Source : CGI

Les 18,9 Md€ alloués à l’ANR comprennent 15 Md€ non consomptibles.

Les conventions conclues avec les opérateurs s’appuieront sur une architecture commune. Elles préciseront la nature de l’action financée et les objectifs poursuivis, le calendrier et les modalités d’instruction et de sélection des dossiers conformément à un cahier des charges, étant entendu que l’Etat conserve un pouvoir de décision en dernier ressort, la nature des interventions financières (fonds non consomptibles, subventions, avances remboursables, prêts ou prises de participation) ainsi que leurs modalités et leur calendrier d’octroi, le dispositif de suivi et d’évaluation des résultats ainsi que l’organisation comptable à mettre en place au sein de l’opérateur.

Ces conventions peuvent prévoir un engagement séquentiel des fonds par l’opérateur à deux niveaux et dont le rythme est contrôlé par l’Etat. Tout d’abord, les fonds consomptibles et non consomptibles pourront être distribués par tranche, chaque tranche faisant l’objet d’une vague d’appels à projet sous l’accord explicite de l’Etat. Ensuite, les projets sélectionnés pourront se voir attribuer leur dotation de manière fractionnée et conditionnelle à leur bonne exécution.

Une particularité est la place tout à fait importante qui a été réservée au suivi et à l’évaluation des investissements d’avenir, notamment pour compenser le caractère fortement dérogatoire de la gestion des crédits. Au-delà de l’évaluation ex ante des projets dans le cadre de la procédure d’instruction-sélection et des indicateurs de suivi qui devront être transmis à l’Etat sur une base trimestrielle, une évaluation économique ex post des actions financées devra être mise en place par les opérateurs. Ces derniers pourront y consacrer en moyenne 0,08 % des crédits issus de l’emprunt national(33), soit environ 30 M€ pour l’ensemble des actions.

Le Commissaire général à l’investissement, placé sous l’autorité du Premier ministre, joue un rôle central dans le pilotage et le suivi de l’exécution des investissements d’avenir34. Il est chargé de préparer la contractualisation avec les organismes gestionnaires et de coordonner l’élaboration des cahiers des charges qui serviront de base pour les appels à projet. Ceux-ci seront validés au niveau interministériel et feront l’objet d’un arrêté du Premier ministre.

Le Commissaire général à l’investissement coordonne également le processus d’instruction et de sélection des dossiers conduit par des jurys indépendants composés des « meilleurs experts des domaines concernés » et un comité de pilotage. A l’issue de ce processus, il est chargé d’élaborer la position de l’Etat, décideur en dernier ressort de l’attribution des fonds.

Dans le cas des fonds confiés à l’Agence nationale de la recherche (ANR), des conventions de second niveau sont conclues, dans les mêmes conditions, entre l’ANR et le bénéficiaire final.

La loi pose une obligation de dépôt sur le compte du Trésor des fonds consomptibles et non consomptibles ainsi alloués jusqu’au paiement effectif des dépenses. L’Etat devra être informé préalablement des paiements envisagés supérieurs à 1 M€, ce qui devrait faciliter la gestion de la trésorerie par l’Agence France Trésor.

Une partie des fonds attribués par l’Agence nationale de la recherche à leurs bénéficiaires est conservée pour produire des intérêts (fonds non consomptibles, 15,03 Md€). L’arrêté du 15 juin 2010 a fixé la rémunération à 3,413 %, soit le taux de l’échéance constante à 10 ans le jour de la publication au Journal officiel de la loi de finances rectificative du 9 mars.

Cette rémunération des fonds sera versée trimestriellement pendant dix ans, conformément à la durée prévue des conventions. Les intérêts pourront courir, selon les cas, dès attribution des fonds à l’opérateur, ou progressivement, par tranche, selon un calendrier fixé dans la convention, ou encore à partir de la sélection des projets.

A l’issue d’un deuxième comité interministériel qui s’est tenu le 21 juillet 2010, 34 des 35 conventions prévues représentant 33,64 Md€ de crédits ont été adoptées et transmises au Parlement. La dernière qui a trait à l’opération du plateau de Saclay, doit être finalisée en septembre 2010.

Les appels à projet qui découlent de ces conventions ont été lancés à partir du mois de juin, la sélection devant intervenir à partir du dernier trimestre de l’année. Pour certaines conventions, la mise en œuvre sera plus rapide, aucun appel à projet n’étant nécessaire. C’est notamment le cas des « prêts verts » à l’industrie, des aides à la rénovation thermique des logements ainsi que de la mise en chantier du réacteur Jules HOROWITZ.

C. Les interventions visant à garantir le financement de l’économie

1. Les interventions en faveur du financement externe des entreprises

Les mesures en faveur des entreprises relèvent pour une part de crédits budgétaires, à l’instar des dotations du fonds d’intervention pour les services, l’artisanat et le commerce (FISAC), qui ont représenté 100 M€ en AE et 90 M€ en CP en 200935. Créé en 1989, le FISAC était à l’origine un dispositif extra-budgétaire financé par un prélèvement sur l’excédent du produit de la taxe d’aide au commerce et acquittée par la grande distribution.

Depuis la loi de finances pour 2003, le produit de cette taxe est affecté au budget général de l’Etat. Si les dotations du fonds sont budgétaires, la gestion opérationnelle de celui-ci reste déléguée à la Caisse nationale du régime social des indépendants. L’article 100 de la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l’économie a donné une base législative à ce fonds.

D’autres dispositifs, gérés par des opérateurs de l’Etat, bénéficient de crédits budgétaires, parfois pour des montants modestes. Tel est le cas, par exemple, de la subvention de 4,6 M€ (en 2009) allouée à l’Agence pour la création d’entreprise pour soutenir le programme de développement du régime de l’auto-entrepreneur institué par la loi de modernisation de l’économie du 4 août 2008.

Ces dispositifs sont cependant sans commune mesure avec les mécanismes, en grande partie extra-budgétaires, destinés à favoriser l’accès des entreprises, et notamment des PME, aux financements bancaires.

a. La décentralisation de ressources du fonds d’épargne

La loi de modernisation de l’économie du 4 août 2008 a modifié, à compter du 1er janvier 2009, les règles de centralisation du livret A et du livret de développement durable (LDD) à la Caisse des dépôts et consignations, au sein du fonds d’épargne. Celui-ci se voit attribuer, jusqu’en 2012, un plancher de dépôt de 160 Md€ en 2009, majoré en 2010 et 2011 d’un « coefficient d’indexation ». A compter de 2012, les montants centralisés seront calculés par référence à un « taux de centralisation » unique, qui n’est pas encore arrêté. Toute la collecte excédentaire par rapport au plafond centralisé est répartie entre les banques qui doivent l’employer au financement des besoins de trésorerie et d’investissement des entreprises (micro et PME) et au financement de travaux d’économies d’énergie dans les bâtiments anciens.

En mai 2010, la collecte cumulée du livret A et du livret de développement durable (LDD) était de 256 Md€. Le plafond centralisé étant à 160 Md€, ce sont donc 96 Md€ qui restent à disposition des établissements de crédit.

Par ailleurs, dans le cadre des mesures de soutien au système bancaire prises en octobre 2008, 14,3 Md€ d’épargne réglementée (livret d’épargne populaire et LDD) ont également été laissés à disposition des banques, au lieu d’être centralisés au fonds d’épargne. Les banques devaient également consacrer ces ressources au financement des PME et des travaux d’économie d’énergie dans les bâtiments anciens.

b. La garantie de financements bancaires par l’intermédiaire d’Oséo et de l’AFD

Les pouvoirs publics disposent avec Oséo-garantie d’un instrument dédié au financement des petites et moyennes entreprises. Cette société anonyme a pour objet de faciliter le financement des PME, des TPE et des personnes physiques en prenant une part du risque dans les concours financiers qui leur sont accordés par des intermédiaires. Elle bénéficie de l’abondement par l’Etat de fonds de garantie destinés à compenser les sujétions particulières induites par la mission qui lui est confiée.

Les dotations de fonds publics (Etat et CDC) dont bénéficie Oséo-garantie font de cet organisme le principal intervenant en matière de garantie des crédits bancaires accordés aux PME. En 2008, il a accordé sa garantie à près de 60 000 entreprises et soutenu, selon ses chiffres, plus de 44 000 créations d’entreprises. Entre la fin 2000 et la fin 2008, plus de 123 000 prêts à la création d’entreprise ont été accordés pour un montant total de 699 M€.

Dans les départements d’outre-mer, l’AFD met à disposition des entreprises une large gamme de produits financiers destinés à soutenir la croissance des régions ultra-marines. L’Etat lui a confié la mise en œuvre du plan de relance économique Outre-mer, notamment en ce qui concerne le dispositif de soutien des entreprises face à la crise. Le plan de relance a donc été mis en œuvre à travers l’AFD qui a garanti, en 2009, 53 M€ de prêts aux entreprises (pour un objectif initial de 205 M€).

L’AFD a repris la responsabilité financière du fonds DOM (80 M€ en 2009), auparavant partagée avec Oséo. Elle assure le pilotage de ce fonds qui permet de garantir les concours à moyen et long terme accordés par les banques d’Outre-mer aux entreprises. Hors plan de relance et pour l’ensemble des DOM et des COM, l’AFD a accordé des garanties pour un montant de 138 M€.

c. Le financement de l’investissement des entreprises par Oséo et l’AFD

Au-delà de l’octroi de garanties aux banques prêteuses, Oséo et l’AFD contribuent aux investissements des entreprises en mettant en place des prêts au taux du marché en métropole et à des taux bonifiés Outre-mer.

En partenariat avec les établissements bancaires et financiers, Oséo contribue au financement des investissements corporels et incorporels des entreprises par des crédits à moyen ou long terme, des opérations de crédit-bail immobilier, matériel ou de location financement. Il finance également des investissements immatériels par des cofinancements réalisés sous forme de contrats de développement (création, transmission, innovation, international) et de prêts participatifs (de développement et d’amorçage).

Le financement des investissements immobiliers et incorporels a représenté en 2009 un montant de 1,479 Md€, dont 863 M€ de prêts à long terme et 177 M€ de prêts à moyen terme. D’une durée moyenne de 11 ans, ces prêts ont bénéficié prioritairement aux petites et moyennes entreprises employant moins de 50 salariés.

Les opérations de crédit-bail immobilier ont atteint 436 M€. Les financements d’investissements de maîtrise de l’énergie et de protection de l’environnement ont représenté un montant de plus de 300 M€, dont 68 % sous forme de prêts et 32 % en crédit-bail. Le financement des équipements a représenté un montant global de 435 M€ et celui des investissements immatériels 361 M€. Le montant des prêts à la création d’entreprise s’est élevé à 99 M€.

L’importance des contributions à l’investissement du groupe Oséo peut également être appréciée à partir des principaux postes à l’actif de son bilan. Les concours à la clientèle représentaient 10,3 Md€ en 2009, dont 4,1 Md€ de crédits à l’équipement et 3,6 Md€ d’activités de crédit-bail mobilier et immobilier, à comparer au 549 M€ de crédits de trésorerie. Les aides à l’innovation s’élèvent à 204,6 M€.

Dans les départements d’outre-mer, l’AFD a contribué au financement des investissements du secteur privé grâce à la mise en place, auprès des organismes de crédits, de prêts aidés à l’investissement (PAI) à hauteur de 78 M€ en 2009. Destinés aux investissements des PME/TPE ces prêts bonifiés réduisent la charge financière supportée par les investisseurs. Par ailleurs elle a participé au refinancement du secteur bancaire pour 15 M€. Elle a également mis en œuvre, pour le compte d’Oséo (activités en mandat de gestion), 360 M€ pour financer les PME/TPE.

d. Les financements au titre de l’aménagement du territoire

Le Fonds national de revitalisation du territoire (FNRT) a été mis en place en mars 2009 afin d’accompagner les mutations économiques sur des territoires non ou mal couverts par le dispositif des conventions de revitalisation. Ce fonds permet de soutenir, sous la forme d’un prêt accordé par Oséo et garanti par un fonds doté par l’Etat et la Caisse des dépôts et consignations, des projets de développement de l’emploi ou de maintien partiel en cas de reprise d’activité.

Les prêts pour la revitalisation du territoire s’inscrivent dans une gamme de « produits mezzanine », intermédiaires entre les fonds propres et les fonds d’emprunt. Ils sont en général accompagnés par un financement bancaire égal au moins au double du financement « mezzanine » Oséo.

Le crédit est subordonné au financement qu’il accompagne et comprend un différé de remboursement. Il permet de financer des dépenses immatérielles, du matériel à faible valeur de gage ou un besoin en fonds de roulement. Il offre des conditions de taux attractives pour les entreprises, car il est accordé sans garantie.

Les objectifs fixés lors de la création du FNRT étaient de 45 M€ de prêts pour 2009 sur une enveloppe totale de 135 M€ pour 3 ans. Ils ont été dépassés avec 62,5 M€ de prêts au bénéfice de 39 territoires éligibles.

Au-delà de son activité en direction des investissements du secteur privé, l’AFD joue outre-mer un rôle au titre de l’aménagement du territoire à travers les prêts qu’elle accorde aux collectivités territoriales. En 2009, elle a accordé 228 M€ de prêts bonifiés et 120 M€ aux conditions du marché.

2. Les garanties octroyées en faveur de l’exportation

Au regard du montant des exportations françaises (346 Md€ en valeur en 2009) et du déficit du commerce extérieur (55 Md€ en 2008 et 43 Md€ en 2009) le soutien financier à l’exportation représente peu de crédits budgétaires (455 M€ en 2009). Ces crédits regroupent la subvention pour charge de service public destinée à UBIFRANCE, les charges du réseau international de la direction générale du Trésor, soit au total 200 M€ pour la mission Economie, les appels en garantie au titre du développement international des entreprises (68 M€ en 2009), des prêts à des Etats étrangers (147 M€ en 2009) inscrits sur le programme 851 du compte de concours financiers et des aides économiques et financières au développement de la mission Aide publique au développement (pour 22,4 M€ en 2009).

Si ces montants sont bien des dépenses de nature budgétaire, une partie d’entre elles correspondent à la mise en œuvre de politiques publiques en dehors du budget de l’Etat, par l’intermédiaire d’UBIFRANCE et de la COFACE.

La Compagnie française d’assurance pour le commerce extérieur (COFACE) est une filiale à 100 % de NATIXIS qui agit, soit pour son propre compte dans les opérations dites de marché, soit pour le compte de l’État. Dans le premier cas, elle engage sa propre responsabilité financière. Dans le deuxième, elle est assureur-crédit pour le compte et avec la garantie de l’État, dans le cadre de la politique de soutien aux exportations françaises36.

La COFACE gère six procédures publiques de soutien financier aux exportations françaises : l’assurance crédit, la garantie des investissements, la garantie de change, l’assurance-prospection, la garantie du risque exportateur et la garantie du risque économique37.

Le rapport établi par la COFACE en 2009 sur les opérations effectuées pour le compte de l’Etat indique qu’en ce qui concerne l’assurance-crédit, le dispositif présente un solde de financement excédentaire depuis 1995, le résultat technique s’élevant fin 2009 à 1 139 M€ représentant un montant beaucoup plus faible qu’en 2008 (2,5 Md€). La baisse du résultat technique provient de la diminution marquée du montant des récupérations (973 M€ contre 2 307 M€ en 2008). En revanche, le montant des sinistres de 13 M€ est faible en 2009, rapporté à celui observé en 2008 (27 M€).

Le compte des procédures publiques gérées par la COFACE, qui est tenu selon le plan comptable des compagnies d’assurances et qui comprend un bilan, un compte de résultat et des engagements hors bilan, est désormais intégré dans les participations financières de l’Etat pour une valeur de 6,4 Md€.

L’appréciation du soutien financier à l’exportation nécessite de prendre en outre en compte les engagements hors bilan qui résultent de l’octroi de la garantie de l’Etat à la COFACE. Parmi ces engagements figurent principalement ceux qui se rattachent à l’assurance-crédit. Ils représentaient 67 Md€ en 2008 et atteignent 78 Md€ en 2009.

A côté de l’assurance crédit, les autres dispositifs, garantie de change, garantie du risque exportateur, garantie du risque économique et assurance prospection n’induisent qu’un nombre plus réduit d’engagements hors bilan (3 Md€ au total).

La période 2006-2009 a été marquée par un net élargissement du champ des garanties de l’Etat et par la recherche d’une plus grande prise en compte des besoins des entreprises. Cette tendance s’inscrit dans une démarche de soutien à l’action internationale des entreprises. Elle a ainsi étendu les garanties publiques à des financements en devises locales et à des émissions obligataires. Parallèlement la titrisation du crédit acheteur a été autorisée au cas par cas.

La loi de finances rectificative pour 2008 a mis en place une assurance-crédit pour les projets stratégiques déliés de la notion d’exportation et qui contribuent à l’approvisionnement de la France en ressources énergétiques et en matières premières présentes en quantité insuffisante sur le territoire national.

A ces dispositifs s’ajoutent deux instruments gérés par NATIXIS, la réserve pays émergents (RPE), qui permet de consentir au travers du programme 851 du compte de concours financiers des prêts pour le financement de projets dans le cadre de protocole intergouvernementaux, et le fonds d’études et d’aide au secteur privé (FASEP), qui finance, par des dons ou des aides remboursables, correspondant à 50 % du coût du programme, des contrats d’ingénierie et de préfiguration.

Ces aides peuvent être complétées par des interventions de l’AFD, également sous la forme de prêts, à la condition que cette part de l’aide ne soit pas subordonnée à la présence d’une entreprise française dans l’offre. Sur la période 1998 – 2008, l’aide RPE a représenté 2 Md€ de prêts. Actuellement, les remboursements excèdent les nouveaux prêts.

Si le soutien au commerce extérieur et l’aide au développement international des entreprises s’inscrivent dans une démarche concurrentielle structurante du tissu économique, leur renforcement, lors de l’éclatement de la crise financière, a clairement poursuivi des objectifs d’action contra-cyclique. Les garanties au titre de l’assurance-crédit pour les contrats conclus ont ainsi été triplées en 2009 par rapport à 2008, passant de 7,4 Md€ à 20,1 Md€. Cette évolution récente contraste avec la période 2002-2006 au cours de laquelle une forte diminution des encours avait été constatée, ceux-ci passant de 67,662 Md€ en 2002 à 42,475 Md€ en 2006. Les encours, qui se sont redressés, atteignent 52,683 Md€ en 2009.

II. Des objectifs specifiques

Le recours à des interventions extra-budgétaires vise à accroître la capacité de l’Etat à agir sur l’économie, dans le respect des règles posées par l’Organisation mondiale du commerce et par le droit communautaire, en évitant de mobiliser des ressources budgétaires et en démultipliant l’action de l’Etat. Ces interventions s’insèrent au sein des politiques publiques dont les objectifs généraux tendant à accroître la quantité de capital dont dispose l’économie par le développement et l’entretien des infrastructures, à renforcer la croissance potentielle de l’économie en contribuant aux efforts de recherche et à l’innovation et à pallier certaines défaillances de marché, notamment en matière de crédit lorsqu’il n’assure pas le financement de certains projets.

Les interventions extra-budgétaires se voient assigner de légitimes objectifs, dont certains sont permanents (A) et d’autres de nature plus conjoncturelle (B). Des raisons moins légitimes, liées au contexte budgétaire difficile, pourraient toutefois inciter à recourir à ce type d’intervention (C).

A. De legitimes objectifs permanents

La présentation qui a été faite précédemment des différents instruments extra-budgétaires montre que le recours à ces moyens d’intervention dans l’économie peut poursuivre des objectifs légitimes tels que la création de structures publiques appropriées, la recherche d’un plus grand effet de levier permettant de démultiplier l’action de l’Etat ou la mobilisation de financements privés pour financer des infrastructures.

1. La création de structures publiques dédiées

Ainsi que l’a montré la revue des dispositifs, le caractère extra-budgétaire d’une intervention repose souvent sur l’existence d’un organisme public ou privé par l’intermédiaire duquel celle-ci s’effectue. Le recours à une structure ad hoc se trouve justifié par la nature même de la mission qui rend nécessaire une séparation nette avec la sphère étatique. L’octroi de financements par le secteur public financier (Caisse des dépôts et consignations, Oséo) relève de façon peu contestable de cette catégorie.

D’autres pays ont d’ailleurs développé des structures poursuivant des finalités similaires. C’est le cas de l’Italie avec la Cassa dei Depositi e Prestiti, de l’Allemagne où la Kreditanstalt für Wiederaufbau (KfW) joue le rôle d’investisseur public de référence, ou encore de l’Espagne qui dispose d’un Institut de Crédit Officiel. Ces exemples ne sont pas exhaustifs, il existe également une Caisse des dépôts au Québec.

Le financement en fonds propres des entreprises par l’intermédiaire du FSI ou de CDC Entreprises a également des équivalents à l’étranger, en Allemagne où la KfW joue ce rôle et aux Etats-Unis avec les Small Business Investment Companies.

Le recours à des structures ad hoc peut découler d’un souci de spécialisation, à l’instar des dispositifs de soutien à l’exportation ou de soutien à la recherche et à l’innovation. Dans cette hypothèse, la recherche d’une plus grande efficacité et d’une plus grande réactivité, de même que celle d’une plus grande proximité avec les acteurs économiques seront volontiers revendiquées. Sous cet angle, la création de telles structures, y compris lorsqu’elles sont financées par une affectation de taxe, ne relève pas nécessairement d’un choix exercé à partir du prisme budgétaire.

Ces objectifs expliquent en partie la grande diversité des dispositifs et des structures, voire l’impression de maquis susceptible de résulter de leur présentation. Tant la direction du budget que la direction générale du Trésor ont fait valoir que le recours à des instruments de nature extra-budgétaire n’obéissait pas à une doctrine générale pré-établie mais s’appuyait sur des dispositifs souvent très anciens (Coface, CCR, FDES,…) ou plus récents créés en fonction des besoins.

2. La recherche d’un effet de levier

Les interventions dans l’économie par des moyens extra-budgétaires participent également de la recherche d’un effet de levier maximum de l’action de l’Etat. Il peut reposer sur la création de partenariats permettant des cofinancements publics ou des cofinancements publics et privés. Tout en évitant un flux financier, au moins immédiat, les garanties poursuivent également un objectif d’effet de levier.

Le graphique suivant illustre, de manière qualitative, la diversité des interventions de l’Etat dans l’économie décrites plus haut. Les modalités de mise en œuvre, extrêmement variées, couvrent une échelle très large d’interventions extra-budgétaires. Les dotations aux opérateurs constituent par exemple des dépenses budgétaires à part entière ; à l’autre bout du spectre, le mécanisme de délégation de service public n’implique aucun transfert financier et ne présente ainsi aucun lien avec le budget de l’Etat.

Selon les modalités retenues, ces interventions vont avoir un impact a priori et une portée variables, qu’il est possible d’ordonner de manière qualitative selon trois niveaux d’effet de levier. L’effet de levier mesure le rapport entre l’ensemble des moyens débloqués au profit d’une action et les montants financiers mobilisés par l’Etat. Les garanties qui ne mettent en jeu le budget de l’Etat que lorsqu’elles sont appelées, permettent en particulier d’avoir une action démultipliée comme l’a démontré l’exemple de la SFEF ou celui de la SPPE. Les dotations budgétaires aux opérateurs ont en revanche un effet de levier assez faible, y compris lorsque ceux-ci disposent de recettes propres. Ces dernières sont en effet indépendantes du montant de la dotation. Une même intervention peut recouvrir plusieurs modalités. C’est le cas notamment de l’emprunt national qui, on l’a vu, met en jeu des dotations et subventions, des prêts ou des prises de participation, dont les effets de levier peuvent être différents.

Source : Cour des comptes

En outre, la recherche d’un effet de levier s’accompagne, comme dans le cas de la création du FSI ou des investissements d’avenir, de la recherche d’un retour sur investissement. S’il convient d’éviter de financer des investissements improductifs, l’intervention extra-budgétaire doit se fixer, pour objectif complémentaire, de mesurer le plus précisément possible la rentabilité des dispositifs mis en place ou, lorsque cette mesure n’est pas réalisable, d’en évaluer le plus rigoureusement possible la portée.

3. Faire financer des infrastructures par l’usager

Une modalité ancienne d’intervention extra-budgétaire est de faire financer la réalisation d’infrastructures publiques par l’usager dans le cadre de concessions de service public. Outre l’absence de consommation de ressources budgétaires dès lors que le coût de l’investissement et les charges d’exploitation sont supportés par l’usager, le recours à la concession, qui s’accompagne normalement d’un transfert du risque au cocontractant privé, lequel doit supporter les aléas de l’exploitation, permet la valorisation d’un droit patrimonial.

D’une certaine manière, l’affectation d’une taxe à un opérateur présentant, telle la future taxe sur les poids lourds affectée à l’AFITF, un lien entre son objet et son utilisation, relève d’une logique similaire.

Les contrats de partenariat public-privé, qui ne reposent pas sur un financement par l’usager, ne relèvent pas de la même logique. Ils sont susceptibles toutefois de s’accompagner également, à certaines conditions, d’un transfert du risque au partenaire privé pendant la phase de réalisation de l’investissement.

B. Des objectifs de nature conjoncturelle, des mécanismes temporaires

Alors que l’utilisation de la politique budgétaire à des fins conjoncturelles a été très largement remise en cause par la théorie macroéconomique depuis le début des années 1980, la crise récente a conduit l’Etat à recourir davantage à des techniques d’intervention extra-budgétaire à des fins d’action conjoncturelle.

La mobilisation de ces instruments a répondu à deux motifs principaux :

- assurer la liquidité et la solvabilité du système bancaire et financier, grâce notamment à des mécanismes de garanties et à la création de véhicules dédiés (SFEF, SPPE) qui empruntent sur les marchés ;

- contribuer au soutien de l’activité en mobilisant le maximum de ressources disponibles dans le cadre du plan de relance.

1. Les concours financiers aux établissements de crédit

La crise économique et financière a montré que la liquidité était un bien public. Afin de maintenir la fluidité du financement de l’économie et de faire face à des risques de solvabilité, les pouvoirs publics ont mis en place un dispositif de soutien aux établissements de crédit, adopté par le Parlement et validé par la Commission européenne, qui reposait sur de nouvelles entités conçues pour avoir une durée de vie limitée :

- la société de financement de l’économie française (SFEF) dont le rôle était d’émettre sur le marché des titres garantis par l’Etat et d’accorder aux établissements de crédit en France des prêts d’une durée de quinze mois à cinq ans à des conditions nettement plus favorables que celles du marché de l’époque38 ;

- et la société de prise de participation de l’Etat (SPPE) dont l’objet était de faire bénéficier les établissements de crédit d’un renforcement de leurs fonds propres via la souscription de titres émis par ces derniers.

Les concours publics ainsi consentis ont permis de compenser la disparition brutale des refinancements de marché et des émissions de fonds propres et ainsi conforter la situation de liquidité des établissements de crédit et la solvabilité des grands groupes bancaires. En échange de ces concours publics, l’Etat a demandé aux établissements de crédit de poursuivre le financement des entreprises, des ménages et des collectivités territoriales, en fonction d’un objectif chiffré. Il a également imposé des engagements éthiques, portant sur la rémunération des dirigeants et des opérateurs de marché. Ces concours ont contribué à restaurer la confiance sur les marchés et à limiter les effets de la crise financière.

Parallèlement, l’Etat a contribué au plan de sauvetage de Dexia avec les Gouvernements belge et luxembourgeois au travers d’une augmentation de capital de 6 Md€ dont 3 Md€ pour la France (1 Md€ par la SPPE, 1,3 Md€ par la Caisse des dépôts et consignations, 445 M€ par le fonds d’épargne et 290 M€ par CNP Assurances) mais aussi de garanties sur les financements levés par la banque sur les marchés.

La Cour a eu l’occasion de porter une appréciation positive sur l’efficacité du dispositif ainsi mis en place en communiquant de premiers résultats dans un rapport publié dès la fin du mois de juin 2009 puis dans un rapport public thématique de mai 2010. En termes de finances publiques, elle a souligné le caractère encore incertain du bilan financier de l’opération. Si l’impact budgétaire net et le résultat patrimonial global, respectivement 864 M€ et 2,37 Md€ à la fin 2010, apparaissent positifs, divers coûts indirects impacteront le bilan final.

Au-delà du bilan financier, il convient de souligner le caractère très largement extra-budgétaire des solutions retenues par les pouvoirs publics pour assurer le refinancement du système bancaire.

a. La SFEF

Détenue à 34 % par l’Etat et à 66 % par les banques privées, la SFEF a reçu une dotation en capital de 17 M€. Levant des fonds sur les marchés avec la garantie de l’Etat, son intervention s’effectue sans consommation de crédits budgétaires. Entre sa mise en place à l’automne 2008 et l’arrêt de ses activités d’émission le 22 septembre 2009, la SFEF a procédé à vingt émissions de dette en euros et en devises pour un montant total de 76,857 Md€.

Ces émissions lui ont permis de consentir des prêts à treize établissements de crédit avec un taux moyen hors garantie de l’Etat de l’ordre de 2,72%. Les établissements devaient remettre en nantissement des créances destinées à garantir le prêt et appelées collatéraux. La SFEF n’ayant pas vocation à réaliser des bénéfices, le capital social apparaît improductif. Toutefois, celui-ci pourra être récupéré à la liquidation de la société.

b. La SPPE

Détenue à 100% par l’Etat, la SPPE n’a bénéficié que d’un montant limité de crédits budgétaires octroyés par l’intermédiaire du compte d’affectation spéciale « participations financières de l’Etat ». En 2008, elle a reçu une avance d’actionnaire de l’Etat d’un montant de 1,05 Md€ pour prendre une participation dans le capital de Dexia dont 600 M€ ont été remboursés et 450 M€ convertis en capital.

Au total, 20,75 Md€ de titres de fonds propres des six groupes bancaires ont été souscris par la SPPE : ces opérations ont été financées via la Caisse de la dette publique (CDP) qui bénéficiait elle-même d’un dépôt de liquidités de l’Agence France Trésor.

A l’automne 2009, 13,45 Md€ ont été rachetés par cinq des six groupes. A fin 2009, l’Etat détenait encore, via la SPPE, la participation de 1 Md€ au capital de Dexia, dépréciée dans les comptes sociaux de la SPPE à hauteur de 440 M€, et des titres super-subordonnés et actions de préférence émis par BPCE pour un montant de 6,3 Md€39.

Ainsi, via la CDP, l’Etat s’est endetté de 20,75 Md€ pour financer les interventions de la SPPE. Cette somme lui a toutefois été remboursée pour une partie par les remboursements des banques (13,45 Md€ à fin 2009), et pour le solde par le produit d’un emprunt lancé par la SPPE fin 2009 (7,3 Md€ de papier commercial multidevises).

Ce dernier mode d’intervention, effectué au moyen d’un emprunt obligataire garanti par l’Etat, sans que le produit de celui-ci soit utilisé pour ouvrir des dotations budgétaires, constitue une forme d’intervention extra-budgétaire de l’Etat. Il majore la dette publique sans que soit apparu de dépense budgétaire et sans que la dépense correspondante soit considérée comme une dépense publique au sens de la comptabilité nationale.

Au total, les montants effectivement apportés aux établissements de crédit ont atteint 120 Md€. Le caractère original et innovant du dispositif a permis de faire face à la crise de liquidités à laquelle le système bancaire se trouvait confronté en ne mobilisant comme crédits budgétaires que la dotation en capital de la SPPE et en rapportant 1,3 Md€ en recettes non fiscales40.

La Cour a eu l’occasion d’indiquer, dans le rapport de juin 2010 consacré aux concours financiers aux établissements de crédit, que le dispositif avait été efficace.

2. La mobilisation de ressources extra-budgétaires dans le cadre du plan de relance

Dans le cadre du plan de relance, la mobilisation de moyens de nature extra-budgétaire a été recherchée pour compléter les crédits budgétaires alloués à ce plan. Tel a été le cas, par exemple, de la mobilisation du groupe Caisse des dépôts et consignations41.

Ces interventions ont poursuivi une double finalité : l’accroissement de l’investissement public et le soutien aux entreprises.

a. L’accroissement de l’investissement public

Les investissements supplémentaires demandés aux opérateurs

Les opérateurs ont été associés au plan de relance. La convention entre l’Etat et l’AFITF relative à l’utilisation et à la gestion des crédits correspondants a ainsi prévu la mobilisation de financements pour l’entretien du réseau routier, la modernisation des itinéraires routiers, la régénération du réseau ferré, l’accélération des contrats de projets ferroviaires Etat-Régions, ainsi que pour des acquisitions foncières et des travaux préparatoires des grands projets ferroviaires et fluviaux.

Les crédits « plan de relance » ont été versés à l’AFITF en 2009 sous forme de subvention budgétaire en AE = CP pour un total de 324 M€ afin de permettre à l’établissement public d’engager dès 2009 un montant total de 655 M€ de conventions pluriannuelles nouvelles. Par ailleurs, 50 M€ ont été versés à l’AFITF au titre de contribution à ses ressources globales.

A l’instar de l’AFITF, VNF a été sollicité, pour une action plus conjoncturelle, dans le cadre du plan de relance. Un montant de 100 M€ de crédits lui a été attribué dont 50 ont été versés en 2009. Ces crédits étaient destinés à accélérer la réalisation d’investissements visant à améliorer la sécurité sur l’ensemble du réseau ou contribuant à la modernisation du réseau magistral.

Dans le cadre du plan de relance, l’ANRU a bénéficié de crédits budgétaires destinés à accélérer les travaux du PNRU. La convention entre l’Etat et l’ANRU relative aux crédits du Plan de relance, signée le 27 mars 2009, prévoyait de doter ces actions de 350 M€ dont 200 M€ de CP ont été versés en 2009. 

Les investissements supplémentaires demandés aux concessionnaires d’autoroute

Bien que la délégation de service public participe principalement d’une action économique structurante, l’Etat a voulu, à l’occasion de la crise économique, lui faire jouer un rôle de nature plus conjoncturelle. Dans le cadre du plan de relance, les sociétés concessionnaires d’autoroutes se sont engagées à réaliser de nouveaux investissements en contrepartie d’un allongement de la durée des contrats.

L’article 117 de la loi n° 2009-1674 du 30 décembre 2009 de finances rectificative pour 2009 permet de proroger par avenant, pour une durée maximale d’un an, la durée des concessions, en contrepartie de travaux portant sur l’insertion dans l’environnement, la sécurité et des aménagements améliorant les conditions de circulation et les échanges avec le réseau concédé.

Des avenants prolongeant d’un an la durée des concessions interurbaines ont effectivement été conclus avec les sociétés ASF, ESCOTA, COFIROUTE, SANEF et SAPN. Le montant total des travaux à réaliser en 36 mois s’élève à 1,023 Md€ dont 750 M€ pour Vinci et 273 M€ pour Sanef groupe.

Le projet d’allonger la durée des contrats en contrepartie de la réalisation d’investissements par les concessionnaires était en réalité antérieur à la genèse du plan de relance et avait pour origine le Grenelle de l’environnement en octobre 2007. Si, jusqu’alors, ce projet n’avait pas abouti, le contexte de la crise financière a conduit à le remettre à l’ordre du jour, à des fins de soutien du secteur du bâtiment et des travaux publics42.

L’accélération des investissements des entreprises publiques

Dans le cadre du plan de relance, l’Etat a également souhaité faire jouer aux investissements des entreprises publiques un rôle contra-cyclique en demandant à certaines d’entre elles d’accélérer leurs investissements, à hauteur de 456 M€ pour la RATP, de 384 M€ pour la SNCF, de 2,5 Md€ pour EDF et de 600 M€ pour La Poste43.

Les investissements supplémentaires annoncés dans le cadre du plan de relance étaient en réalité le plus souvent déjà programmés et les réalisations effectives ont pu, pour certaines entreprises, apparaître plus modestes que prévu44. L’investissement supplémentaire réel s’est situé entre 400 et 500 M€ pour EDF, 248 M€ pour la RATP, 200 M€ pour La Poste et 197 M€ pour la SNCF. En l’espèce, le volontarisme économique a trouvé une limite dans la forte contrainte d’endettement à laquelle sont soumises la plupart de ces entreprises.

b. Les soutiens conjoncturels aux entreprises

La garantie de financements bancaires par Oséo

Lors de la crise financière, les moyens d’intervention d’Oséo ont été renforcés afin de lui permettre d’augmenter les garanties de prêts bancaires accordées aux PME et d’étendre aux entreprises de taille intermédiaire le bénéfice de ces garanties. Une dotation de 561 M€ lui a été versée en 2009 afin de lui permettre d’accorder 4,78 Md€ de garanties supplémentaires45 dans le cadre d’un plan de 5 Md€.

Sur ce dernier montant, 2 Md€ de crédits garantis étaient destinés au renforcement de la trésorerie des PME, 2 Md€ de crédits garantis devaient permettre le maintien de lignes de crédit (lignes de crédit confirmé) et 1 Md€ de crédits garantis devaient bénéficier aux entreprises de taille intermédiaire (ETI), soit sous forme de renforcement de trésorerie, soit sous forme de lignes de crédit confirmé.

L’extension aux entreprises de taille intermédiaire du bénéfice des garanties d’Oséo est intervenue dans le cadre de deux conventions, en date du 11 mars 2009, visant à mettre en place une « sur-garantie Renforcement de la trésorerie des Entreprises » et une « Sur-garantie de lignes de Crédit Confirmé ». Ces deux conventions créent, pour les deux modes d’intervention, d’une part, un régime de sur-garantie pour les PME, d’autre part, un régime de garantie « classique » et un autre de « sur-garantie » pour les ETI. Les sur-garanties permettent de garantir des crédits pour des quotités inhabituelles pouvant aller jusqu’à 90 %.

Pour 2010, une dotation globale de 380 M€, dont 189 M€ dédiés au dispositif du plan de relance doit être apportée à Oséo-garantie. La dotation de 189 M€ lui permet de garantir un volume global de prêts de 2,4 Md€.

Dans le cadre du plan de relance, qui complète les actions traditionnelles d’Oséo, les dispositifs mis en place ont permis, pour la période 2008-2009, d’aider près de 17 000 entreprises pour un encours de prêts de 3,9 Md€ ( soit 82% de la prévision initiale). La dotation versée en 2009 a été consommée à près de 95 %, l’effet de levier moyen s’établissant à 7. Les engagements hors bilan d’Oséo fin 2009 s’élevaient à 10,66 Md€ au titre des seules garanties données à la clientèle.

A mi mai 2010, 3 555 entreprises ont été aidées et 672 M€ de prêts ont été garantis dans le cadre du plan de relance. Si Oséo-garantie a ainsi fortement contribué au financement des entreprises, le coût budgétaire final n’est pas encore connu dans la mesure où des incertitudes subsistent sur le niveau réel de consommation des dotations jusqu’à extinction des garanties accordées. La fragilité de la situation économique et l’extension du champ d’intervention d’Oséo aux entreprises de taille intermédiaire (qui peuvent bénéficier d’une garantie de 15 M€) renforcent l’incertitude.

La forte augmentation de l’activité d’Oséo accroît le besoin de fonds propres afin de respecter les ratios prudentiels auxquels la société est soumise en sa qualité d’institution financière spécialisée. Le ratio de fonds propres de base d’Oséo, qui était de 8 % au 31 décembre 2009, selon l’établissement, s’élevait à 7,3% au 30 juin 2010. Selon Oséo, l’Autorité de contrôle prudentiel a accepté que ce ratio demeure inférieur à 8 % jusqu’à la fin de l’année.

Une augmentation des capitaux propres est donc nécessaire tant pour respecter, un ratio de fonds propres de 8% minimum que pour faire face aux besoins de fonds propres que va générer le développement de l’activité en 2010. L’augmentation de capital est également nécessaire pour qu’Oséo bénéficie d’une bonne notation et dispose d’un statut solide de garant pour emprunter sur les marchés aux meilleures conditions.

Initialement, la dotation en capital versée par l’Etat devait être financée en totalité au moyen d’une fraction de l’emprunt national. Par amendement adopté en première lecture à l’Assemblée nationale, le Gouvernement a décidé d’affecter la taxe exceptionnelle sur les bonus attribués aux professionnels des marchés au titre de 2009 au renforcement des fonds propres d’Oséo à concurrence de 360 M€(46). Seul le solde de cette dotation sera financé par l’emprunt national. Le Trésor à indiqué que le rendement de la taxe a été inférieur aux attentes.

L’augmentation de capital, qui devait être décidée en juillet 2010 lors de l’Assemblée générale, est toujours en discussion. Elle devait s’effectuer par un apport de l’Etat, à hauteur de 500 M€, ramené à 440 M€(47). D’autres actionnaires, au premier rang desquels la CDC, devaient y participer pour un montant devant se situer entre 200 et 300 M€. Selon la direction générale du Trésor, la CDC ne participerait finalement pas à la recapitalisation.

Des dispositifs de prêts destinés à aider des entreprises

Dans le contexte spécifique de la crise financière et du plan de relance de l’économie, des prêts ont été accordés au secteur automobile. Si la plus grande part (6,5 Md€) a été consentie sous la forme de prêts participatifs au moyen de dépenses budgétaires imputées au compte de concours financiers « Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés », un montant de 2,2 Md€ de prêts a été accordé aux banques internes des constructeurs automobiles PSA et Renault par l’intermédiaire de la SFEF.

Les prêts participatifs contribuent en particulier au financement des grands programmes de développement de véhicules plus propres mais peuvent être utilisés dans le cadre du financement des besoins généraux des constructeurs. Le plan devait permettre l’octroi de prêts au bénéficie de PSA et Renault, pour 3 Md€ chacun, et au bénéfice de Renault Trucks et IVECO, pour 250 M€ chacun. Toutefois, cette dernière société y a renoncé.

Accordé pour une durée de cinq années, le capital est remboursable en une fois au terme de la durée du prêt, mais des remboursements par anticipation sont possibles. La rémunération des prêts comporte une partie fixe, de 6 %, et une partie variable indexée sur le taux de marge opérationnelle de la société pour l’exercice clos précédant l’échéance annuelle d’intérêt, dans la limite de 9 %.

Un autre dispositif de prêts concerne spécifiquement les entreprises qui rencontrent des difficultés de financement. Ces prêts du fonds de développement économique et social (FDES) sont accordés de manière subsidiaire et exceptionnelle, dans le cadre d’une procédure spécifique48 de suivi d’entreprises en difficulté. Les prêts FDES ne sont accordés que s’ils sont jugés déterminants pour finaliser un tour de table permettant de financer un plan de redressement crédible de l’entreprise. Ces prêts ne peuvent constituer qu’une part minoritaire du total des apports de nouveaux financements et sont consentis dans les mêmes conditions que les crédits bancaires accordés dans le cadre du tour de table.

Entre 2006 et 2009, 22 sociétés ou groupes ont bénéficié de prêts FDES dans plusieurs secteurs industriels (sous-traitance automobile, industrie agroalimentaire, biens d’équipement, logistique, BTP). Cependant, alors que le total des prêts accordés est longtemps resté limité (4,68 M€ en 2008), le total des prêts accordés en 2009 a atteint 52 M€ en raison de la crise financière.

Les dispositifs de complément d’assurance-crédit public

Dans le contexte très particulier de la crise financière et économique internationale, le risque client s’est considérablement accru et la couverture des polices d’assurance-crédit s’est rapidement resserrée. Pour pallier les défaillances du marché, l’Etat a dû successivement créer plusieurs dispositifs de garanties publiques :

- deux dispositifs « domestiques » : CAP et CAP+ gérés par la CCR49, créés par les lois de finances rectificatives n°2008-1143 du 30 décembre 2008 pour 200850 et n°2009-431 du 20 avril 2009 pour 2009 ;

- deux dispositifs « export » : CAP export et CAP+ Export gérés par la Coface.

Le complément d’assurance-crédit public (CAP) est une garantie complémentaire distribuée par les assureurs-crédit et réassurée en totalité auprès de la CCR. Le dispositif est ouvert aux opérations de réassurance intervenant avant le 31 décembre 2009, mais la durée du dispositif a été allongée d’un an. Le montant de l’exposition maximale totale était de 20 Md€, réduit en cours d’année à 10 Md€.

Sont concernés par ce dispositif tous les assureurs-crédit autorisés à opérer sur le marché français. Dans les faits, les trois plus importants acteurs que sont Euler Hermès, COFACE et Atradius51, qui représentent la quasi-totalité du marché français, ont signé des traités de réassurance ainsi qu’un acteur plus spécialisé, Groupama assurance-crédit.

Afin d’éviter la mise en jeu de la garantie de l’Etat à première demande, l’allocation de fonds propres par la CCR à la gestion du risque d’assurance-crédit est apparue nécessaire52. Elle a été opérée non par un apport de l’Etat mais par un prélèvement des fonds propres provenant de la réserve spéciale relative au risque spatial de la CCR, qui ne fait plus l’objet depuis 2009 d’une gestion séparée.

Le dispositif CAP a démarré lentement (317 M€ d’encours garantis fin mai 2009, soit 1,2 M€ de primes) et n’a pas pris l’ampleur prévue initialement par la direction générale du Trésor. Il apparaît plus comme une mesure d’accompagnement de sortie de crise, qui permettra aux assureurs-crédit de suivre l’évolution des besoins de leurs assurés lors du rebond d’activité et d’assurer à de nombreuses entreprises des encours de crédit de niveau élevé sur le fondement de résultats publiés dégradés53.

Au 31 décembre 2009, les encours sont estimés à 485 M€, au profit de 3 491 assurés.

Ce dispositif a été conçu pour être financièrement équilibré. L’intervention de l’Etat, en tant que garant en dernier ressort, ne sera requise que dans l’éventualité d’un appel de sa garantie. Le total de la réserve spéciale et de la provision d’égalisation s’élevait à un montant de 16,7 M€ pour 2009.

Le dispositif CAP + permet la couverture par l’Etat, à travers un fonds spécifique, de certains risques de crédit considérés comme non-assurables par les assureurs crédit. Une exposition maximale de 5 Md€ est ainsi mise à leur disposition pour garantir les fournisseurs contre le risque de défaut de paiement de leur client lorsque les garanties données sur un acheteur ont été résiliées par les assureurs-crédit ou que les demandes de garantie sur un acheteur ont fait l’objet d’un refus d’assurance.

Le dispositif a été instauré initialement jusqu’au 31 décembre 2009, puis prolongé jusque fin 2010 au même titre que le dispositif CAP.

Selon les estimations de la direction générale du Trésor, la probabilité de défaut à 1 an est comprise entre 2 et 6 % des encours. Il existe cependant des conditions pour limiter l’exposition de l’Etat au risque de défaillance des acheteurs (limite d’indemnisation par assuré fixée à 3 M€, franchise de 20 % de quotité non garantie restant à la charge de l’assuré). La convention prévoit que l’assureur-crédit révise régulièrement l’évaluation des risques faisant l’objet du CAP+ avec les mêmes diligences que pour les risques qu’il a en portefeuille et tire toutes les conséquences résultant de cette évaluation.

Un premier versement de 10 M€ a été effectué au profit du fonds en date du 31 décembre 2009. A cette même date, les encours en risque sont estimés à 653 M€, au profit de 4 764 assurés.

Bien que les premiers sinistres soient inférieurs aux prévisions, le dispositif CAP + n’en fait pas moins peser des risques significatifs sur les finances publiques du fait que l’Etat, via le FSCI, se place en position d’assureur direct.

Les dispositifs CAP et CAP+ ont également eu leur pendant à l’exportation, avec CAP export et CAP+ Export. Gérés par la COFACE, ils représentaient respectivement, au début de 2010, un encours de 66 M€ (419 assurés et 842 acheteurs concernés) et de 71 M€ (667 assurés et 1 471 acheteurs concernés).

C. L’éventuel contournement de la norme de dépense

Le caractère légitime du recours à des moyens extra-budgétaires pour intervenir dans l’économie, en visant des objectifs pérennes ou à des fins plus conjoncturelles, ne doit pas masquer les risques de contournement de la norme de dépenses qui peuvent accompagner la mise en place de tels instruments.

Le caractère négatif de la capacité d’autofinancement de l’Etat, les caractéristiques du plan de relance et les spécificités de l’emprunt national mettent en évidence les difficultés que rencontre l’Etat pour investir (1). Les déséquilibres de grande ampleur qui affectent le budget de l’Etat pourraient inciter à rechercher de nouvelles formes de débudgétisation (2)

1. Une faible capacité d’investissement

a. Un autofinancement négatif

L’article 51 de la loi organique relative aux lois de finances prévoit une présentation en annexe des recettes et des dépenses budgétaires en une section de fonctionnement et une section d’investissement. Cette présentation met en évidence le fait que l’endettement finance, au-delà de l’investissement de l’Etat, une grande partie de ses dépenses courantes.

Si la règle d’or, selon laquelle l’endettement ne doit servir qu’à financer des investissements, n’est pas en vigueur en France et s’il convient de ne pas méconnaître le rôle de soutien conjoncturel que le budget de l’Etat peut être appelé à jouer, l’impact des déficits de fonctionnement sur la section d’investissement est de nature à affecter, toutes choses égales par ailleurs, la capacité d’investissement de l’Etat.

Source : PLF 2010

Le déficit de la section de fonctionnement, qui s’apparente à un autofinancement négatif, accroît le besoin de financement de l’Etat. Toutes choses égales par ailleurs, il limite la capacité de l’Etat à financer ses investissements.

Si le déficit de fonctionnement, et donc l’autofinancement négatif, est particulièrement important pour l’année 2010, en raison de la dégradation de la situation des finances publiques, il n’en était pas moins réel les années précédentes. Les montants d’investissements civils et militaires sont restés du même ordre (aux alentours de 19 Md€ par an).

Source : PLF des années 2007, 2008, 2009 et 2010

Cette tendance se confirme en exécution par la dégradation de la capacité d’autofinancement de l’Etat (CAF) :

Source : Cour des comptes

Le tableau des flux de trésorerie, qui est l’un des états financiers certifiés par la Cour, donne un éclairage complémentaire sur la capacité de l’Etat à générer de la trésorerie et à l’utiliser pour son activité propre, ses opérations d’investissement et de financement. Il fait en particulier ressortir que les flux dégagés par les cessions d’actifs immobiliers et de participations financières sont loin de compenser les investissements (solde net de -24,7 Md€).

Source : Compte général de l’Etat 2009

Pour mémoire, les flux liés aux acquisitions d'immobilisations (45 Md€ en 2009) comprennent en premier lieu l’acquisition d’immobilisations financières (à hauteur de 30 Md€) pouvant par exemple correspondre à des prises de participation ou encore à l’octroi de prêts à des tiers. La différence entre le montant des flux liés à l’acquisition d’autres immobilisations (environ 15 Md€) et celui des investissements civils et militaires (19 Md€), s’explique par le fait que la totalité des flux « d’investissement » (au sens de la comptabilité des dépenses et des recettes budgétaires de l’Etat) ne sont pas « activées » (au sens de la comptabilité générale) : une part est comptabilisée en charges et n’entre donc pas en ligne de compte dans le montant des immobilisations acquises.

Le rapport entre l’excédent brut d’exploitation (EBE) et les produits fiscaux bruts permet par ailleurs d’apprécier le surplus de ressources générés par l’activité de l’Etat pour faire face à ses investissements et aux charges de sa dette. Son évolution marque une dégradation depuis 2006 :

Source : Cour des comptes

b. Un plan de relance en partie débudgétisé

Dans son rapport public sur la situation et les perspectives des finances publiques publié en juin 2010, la Cour a souligné que, retraité du poids des mesures ayant un simple impact de trésorerie (mesures fiscales de remboursement anticipé, avances sur marchés publics,…), et si l’on met à part le jeu des stabilisateurs automatiques, particulièrement important dans notre pays, le plan de relance de la France était de moindre ampleur que dans la plupart des autres pays développés54.

Les crédits ouverts en 2009 dans le cadre du plan de relance ont représenté 10,6 Md€ en AE et 9,6 Md€ en CP55 auxquels se sont ajoutés 3 Md€ en AE et en CP pour la dotation en capital du FSI. A ces crédits s’ajoutent les mesures fiscales dont le coût a été de 16,3 Md€ (pour une estimation initiale de 10,5 Md€) et le remboursement anticipé du FCTVA aux collectivités territoriales, pour leurs opérations nouvelles d’investissement, qui s’est élevé à 3,8 Md€. Au total, le coût budgétaire du plan de relance aura été d’environ 35 Md€ sur l’ensemble des deux années 2009-2010 (29,5 Md€ en 2009 et 5,3 Md€ en 2010).

Ce plan, qui était centré sur l’investissement, a également fait appel à des moyens extra-budgétaires, les entreprises publiques étant invitées à réaliser un volume d’investissements supplémentaires. Par ailleurs, les sociétés concessionnaires d’autoroutes se sont engagées à réaliser des investissements en contrepartie d’un allongement d’une année de la durée des contrats.

En outre, la mobilisation du secteur public financier a constitué un volet essentiel du plan. La capacité de prêts d’Oséo a été accrue par la Caisse des dépôts et consignations sur ressources du fonds d’épargne. Une dotation de 561 M€ lui a été versée par l’Etat sur crédits du budget général pour lui permettre d’accroître le volume des garanties accordées au titre du crédit interentreprises. Le fonds d’épargne a été mobilisé sur décision du ministre de l’économie, de l’industrie et de l’emploi à hauteur de 38,5 Md€ pour le financement d’investissements et pour une part de la recapitalisation de Dexia (445 M€). Le groupe Caisse des Dépôts a, pour sa part, apporté une contribution de 5,5 Md€ au titre du plan de relance (si on y inclut la création du FSI) et participé sur ses fonds propres à la recapitalisation de Dexia à hauteur de 1,59 Md€.

c. Un emprunt national visant un surcroît d’investissement

Le mécanisme de l’emprunt national illustre à sa façon la contrainte budgétaire sous l’angle de la limitation de l’endettement supplémentaire y afférent.

Alors même que l’emprunt national est présenté comme constitutif d’un effort budgétaire significatif pour financer des investissements d’avenir, la technique retenue pour sa mise en œuvre a été conçue pour conduire à un impact minimal sur la dette de l’Etat tout en affichant une dépense budgétaire de 35 Md€ en 2010 et un appel au marché de 22 Md€. Toutefois, la puissance publique ne dépensera pas 35 Md€ en 2010, ni même en cumulé sur les dix prochaines années, au titre des priorités d’avenir identifiées par le Gouvernement à la suite des travaux de la commission conduite par MM. Alain Juppé et Michel Rocard, anciens Premiers ministres.

L’augmentation de la dette de l’Etat serait, selon les hypothèses du Gouvernement, d’environ 5 Md€ en 2010 et de l’ordre de 19 Md€ à terme, hors coût de financement. C’est un résultat éminemment appréciable pour la maîtrise de l’endettement de la France et la qualité de sa signature auquel l’AFT n’est pas étrangère, même si les discussions qui ont précédé la décision annoncée mi décembre, ont pu susciter de l’inquiétude des marchés et des investisseurs.

En réalité, l’emprunt national se résume au final à deux séries de flux financiers :

− des versements d’intérêts aux organismes attributaires des fonds non consomptibles dans le cadre des priorités « enseignement supérieur » et « recherche », à hauteur de 513 M€ par an56, qui constituent une dépense budgétaire rattachée au programme « charge de la dette et trésorerie de l’Etat » intégrée à la norme de dépense ;

− des décaissements progressifs, de l’ordre de 4 à 5 Md€ par an entre 2010 et 2014, qui correspondent au versement par les gestionnaires des fonds consomptibles aux bénéficiaires finaux ; ces versements n’affectent pas le solde budgétaire et n’entrent pas dans la norme de dépense.

Seules les secondes seront en principe financées par de l’emprunt supplémentaire. La dette négociable de l’Etat n’augmentera donc que progressivement, au rythme du décaissement des fonds consomptibles, d’environ 19 Md€ à terme, soit l’équivalent de 1 point de PIB, sous réserve que les intérêts de l’emprunt national (charges d’intérêts liés aux emprunts nouveaux et rémunération des fonds non consomptibles déposés au Trésor) soient effectivement gagés comme cela est prévu par le Gouvernement. Par nature, ce surcroît d’endettement n’est pas identifiable au sein du programme de financement de l’Etat.

Ces intérêts annuels vont progressivement augmenter jusqu’à 1,2 Md€ d’ici environ cinq ans (sous l’hypothèse conventionnelle de taux d’intérêt prêteur et emprunteur de 3,4 %), et exercer une pression supplémentaire sur le respect de la norme de dépense. Le principe de neutralité budgétaire sur lequel le Gouvernement s’est engagé est donc ambitieux, les dépenses d’investissement devant se substituer en partie à des dépenses existantes. La charge cumulée de ces intérêts pourrait atteindre près de 10 Md€ au bout de dix ans.

2. La tentation du recours à la débudgétisation

a. L’inéluctable ajustement budgétaire

Les déséquilibres budgétaires de grande ampleur auxquels la France se trouve actuellement confrontée procèdent, au-delà des effets de la crise financière sur les finances publiques, d’une insuffisante maîtrise des comptes publics. Dans ce contexte, la qualité du contrôle de l’évolution des dépenses apparaît cruciale.

Dans le rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques de juin 2010, la Cour a souligné le caractère très incertain de l’évolution des recettes dans les prochaines années et le risque d’une perte durable de recettes sociales, ainsi que le caractère très ambitieux des derniers objectifs de croissance des dépenses retenus par l’Etat. Elle a conclu à la nécessité d’une réduction d’au moins 1 point de PIB par an du déficit structurel pour viser un équilibre des comptes en termes structurels en 2016 et ramener la dette publique de 89 % du PIB en 2012 à 82 % du PIB en 2020.

Quelle que soit la position du curseur entre la réduction des dépenses et l’accroissement des recettes, l’effort sur la dépense demeurera indispensable. Le gel en valeur des dépenses des ministères pour trois ans, annoncé par le Premier ministre, et confirmée dans les lettres plafond adressées aux ordonnateurs principaux s’inscrit dans cette perspective.

Cette problématique renvoie à celle de la fixation de la norme d’évolution des dépenses de l’Etat. L’augmentation annuelle de celles-ci est, depuis le projet de loi de finances pour 2004, soumise à une norme d’évolution limitée à l’inflation anticipée qui correspond à une stabilité en volume de ces dépenses. Cette norme de dépenses s’applique actuellement aux dépenses du budget général (nettes des remboursements et dégrèvements), considérées à périmètre constant, aux prélèvements sur recettes au profit de l’Union européenne et des collectivités territoriales ainsi qu’à certaines nouvelles affectations de recettes. La loi de programmation des finances publiques a fixé les limites de l’évolution des dépenses de l’Etat par mission pour les années 2009 à 2012.

Dans le rapport public annuel de février 2010 la Cour a estimé que la norme de dépenses devait être durcie et étendue aux contrats d’objectifs et de moyens passés avec les principaux opérateurs. Dans le rapport sur les résultats et la gestion budgétaire de l’Etat de mai 2010, elle a souligné les limites du calcul actuel de cette norme qui exclut une part importante des dépenses, en particulier celles imputées aux comptes spéciaux, et qui prend en compte, de façon parfois inappropriée, certains changements de périmètre. En outre, si l’objectif visé par l’adoption de cette norme reste de soumettre les gestionnaires à une certaine discipline lors de la préparation, puis au cours de la gestion infra-annuelle du budget, la Cour a recommandé que soit également conçu un outil spécifique élargi fixant un niveau maximum de dépenses et mesurant a posteriori la réalité des dépenses opérées.

Dans ce contexte, l’identification du champ des interventions extra-budgétaires et la prise en compte des variations de celui-ci prennent une importance accrue. Dans un contexte de pression à la baisse sur les dépenses en raison de difficultés budgétaires durables, la tentation de la débudgétisation peut se trouver renforcée.

Néanmoins, la portée des différents modes de débudgétisation n’est pas identique dans tous les cas. Certains peuvent s’avérer peu risqués, à l’instar du recours à la délégation de service public qui, au contraire, peut être un mode de valorisation patrimoniale pour l’Etat dès lors que les risques de constitution de rentes de situation pour le délégataire sont prévenus. D’autres sont plus risqués, lorsqu’il s’agit de transférer l’endettement à des organismes tiers.

b. La débudgétisation « dans l’espace » et « dans le temps »

L’affectation de recettes à un opérateur, ou à tout autre organisme tiers, auquel est transférée la responsabilité de l’exécution de dépenses, en lieu et place de ressources d’origine budgétaire destinées à couvrir ces dépenses, constitue, en pratique, un moyen de réduire de façon nominale les dépenses de l’Etat. La possibilité ouverte à certains des organismes en question de recourir à l’emprunt est en outre susceptible d’accroître l’ampleur de la débudgétisation.

L’affectation de recettes fiscales ou non fiscales à un organisme tiers constitue un appauvrissement de l’Etat. Si la capacité de lever l’impôt est parfois présentée comme équivalant à un actif immatériel57, toute affectation par l’Etat d’une recette fiscale à un opérateur s’apparente à une réduction d’actif de l’Etat. Il en va de même de tout transfert de droits, d’actifs ou de créances.

En tout état de cause, la réduction des dépenses ainsi obtenue apparaît artificielle. Par ailleurs, l’affectation de ressources peut induire un déséquilibre financier pour l’organisme, si ces ressources sont insuffisantes ou, à l’inverse, source de gaspillage si celles-ci excèdent le montant nécessaire à la couverture des dépenses.

De la même manière, le financement de l’organisme par l’emprunt n’allège que de façon apparente et transitoire les charges de l’Etat qui seront impactées, soit par l’accroissement de la dette publique qui en résulte, soit par l’obligation de couvrir à terme les déficits cumulés de l’organisme.

La débudgétisation peut également prendre l’aspect d’un décalage des charges de l’Etat dans le temps, lorsque celui-ci fait préfinancer ses dépenses par des partenaires privés, dans le cadre de financements qualifiés d’innovants. Le recours à un partenariat public-privé permet de lisser la charge d’un investissement sur toute la durée du contrat et ainsi de reporter la comptabilisation de la charge budgétaire. A certaines conditions, le PPP est également « déconsolidant » en ce qu’il n’impacte pas immédiatement la dette publique.

La réduction des dépenses lors de la conclusion du contrat est toutefois largement factice. Elle ne prend en compte ni le coût final actualisé de l’opération, souvent supérieur à moyen ou long terme, ni d’éventuels coûts cachés résultant notamment de l’évolution du contrat dans le temps.

conclusion de la première partie

L’intervention de l’Etat dans l’économie par des moyens extra-budgétaires n’est pas nouvelle. Qu’il s’agisse de financer des infrastructures, d’agir en faveur du développement des entreprises et de la diffusion de l’innovation ou, plus globalement, d’assurer le financement de l’économie en cas de défaillance du marché, ces interventions se caractérisent par l’extrême diversité des modalités, des acteurs concernés et des moyens mobilisés.

La crise économique a conduit à recourir de façon massive au mécanisme de la garantie qui, précédemment, était devenu résiduel, mais aussi à d’autres types d’intervention extra-budgétaire (PPP, concessions, investissements par des entreprises publiques). Cette crise a contribué à donner l’impression d’un fort accroissement de l’extra-budgétaire au détriment du budgétaire. Cette impression a en outre pu être renforcée par les dispositifs mis en place pour l’utilisation du produit de l’emprunt national.

Les dispositifs mentionnés précédemment constituent toutefois un ensemble hétérogène qui ne présente pas de cohérence interne et dont le champ ne peut être saisi que de manière analytique. La diversité des modes d’intervention et la multiplication des acteurs rendent particulièrement difficile la mise en place d’un pilotage d’ensemble. Chacun des mécanismes participe d’une politique donnée et leur mise en cohérence doit sans doute être principalement recherchée au regard des objectifs de cette politique et non en fonction du critère commun que représente leur caractère extra-budgétaire. Tant la direction du budget que la direction générale du Trésor indiquent d’ailleurs que ces dispositifs ne relèvent pas d’une politique globale.

Cette diversité donne une impression d’éparpillement des actions et des moyens d’autant plus susceptible d’être exposée à la critique qu’elle s’accompagne dans la plupart des cas d’une absence d’évaluation ex ante et ex post. Si ces interventions visent toutes, d’une manière ou d’une autre, à améliorer la performance de l’économie française, l’absence de réflexion sur une possible rationalisation de l’utilisation de ces différents instruments peut être regrettée. Dans bien des cas, par exemple dans le domaine des aides aux entreprises, les pouvoirs publics peuvent combiner un financement budgétaire, des interventions extra-budgétaires et une politique fiscale. Cependant, en l’absence d’une réflexion globale, le caractère optimal de la combinaison de ces trois modes d’action économique n’est pas assuré.

Toutefois, le développement de certains mécanismes revêt fréquemment un caractère circonstanciel à l’instar des dispositifs de garantie sur lesquels ont reposé les concours financiers publics aux établissements de crédit ou la création du fonds de stabilisation financière de la zone euro et des modalités d’intervention extra-budgétaire auxquelles il a été recouru dans le cadre du plan de relance de l’économie en 2009 et 2010.

Comme l’illustrent les exemples de l’ADEME et de l’ANRU, un défaut de cohérence est également susceptible d’être relevé avec le changement fréquent et aléatoire du mode de financement de certains opérateurs dont les ressources passent, au gré des circonstances, de crédits budgétaires à des taxes affectées, sans qu’une logique économique soit pleinement discernable. Les pouvoirs publics ne disposent d’aucune ligne directrice qui leur permette de guider leurs décisions.

La multiplicité des dispositifs et des acteurs ne favorise pas la lisibilité des actions conduites. Si la direction du budget estime disposer d’une visibilité suffisante sur l’ensemble des modes d’intervention extra-budgétaire, celle-ci reste largement confidentielle dans la mesure où les documents mis à la disposition du Parlement ne rendent qu’imparfaitement compte de l’efficacité desdits dispositifs. D’une manière plus générale, la lisibilité ne saurait être totale en l’absence d’instruments de mesure de cette efficacité.

A titre d’exemple, le jaune qui retrace l’effort de l’Etat en faveur des PME ne dresse qu’un catalogue de dispositifs sans présenter d’évaluation de l’efficacité des mesures décrites. De la même manière, la présentation des résultats du programme 134 au sein de la Mission Economie ne contient que deux indicateurs dédiés à l’efficacité des aides aux entreprises qui ne peuvent favoriser une appréciation globale de l’efficacité de ces aides.

Le premier mesure l’écart entre le taux de croissance des entreprises aidées par Oséo-garantie et celui des entreprises comparables. Le second porte sur le taux de survie des entreprises aidées par Oséo-garantie. Ces deux indicateurs ne sauraient, à eux seuls, synthétiser l’évaluation de l’ensemble des actions en faveur des entreprises.

Compte tenu de la multiplication des acteurs, la lisibilité des politiques poursuivies n’est pas assurée. Chacune d’entre elles est conduite indépendamment des autres, sans prendre en compte les redondances éventuelles, les interférences, voire les contradictions. La débudgétisation, notamment lorsqu’elle repose sur l’affectation de taxes, risque d’entraîner un gaspillage de ressources, peu compatible avec l’efficience économique recherchée, et d’affaiblir l’attention portée aux coûts des dispositifs.

PARTIE II : UN BILAN NUANCé, UNE GOUVERNANCE A PRECISER

En raison de la grande diversité des dispositifs et des intervenants, conjuguée aux difficultés méthodologiques déjà mentionnées, il est difficile de dresser un bilan quantitatif global de l’ensemble des interventions de l’Etat dans l’économie par des moyens extra-budgétaires.

Il est toutefois possible d’apprécier les poids respectifs des différents types d’intervention (I), d’en dresser une typologie au regard des règles budgétaires et comptables (II) et d’en apprécier la portée globale, notamment en termes de gouvernance (III).

I. des poids relatifs inegaux et des risques en apparence limités

Les difficultés d’ordre méthodologique déjà signalées justifient qu’il ne soit pas tenté de construire un agrégat unique représentatif de l’ensemble des interventions économiques extra-budgétaires de l’Etat. Pour autant, il reste possible d’apprécier les différents modes d’intervention en fonction de leur poids relatif et de leur impact respectif sur les finances publiques.

L’intervention de l’Etat dans l’économie, au moyen de l’octroi de garanties, s’est affirmée comme un instrument essentiel pour le financement des activités. Si le procédé est ancien58, la place qu’il a tenue dans la gestion de la crise financière lui a donné un intérêt renouvelé.

A. Des poids relatifs très inégaux

1. Les garanties

a. Un mécanisme économe en crédits budgétaires

Destinée à faciliter l’activité et le financement d’agents économiques publics ou privés, la garantie de l’Etat apparaît toutefois comme un instrument complexe pouvant produire des effets variables selon le contexte dans lequel il est mis en œuvre. Cet engagement, qui est par nature porteur de risques, est susceptible de se révéler à terme constituer une lourde charge pour les finances publiques.

L’octroi d’une garantie, qui ne se traduit par aucun décaissement, ne constitue pas une dépense publique. Elle doit même procurer une recette si, comme cela est normal au regard du droit de la concurrence, elle est rémunérée. Néanmoins, certaines dépenses « annexes » du type dotation en capital pour la constitution d’un fonds de garantie peuvent être constatées.

Il est d’ailleurs possible d’y voir une économie : l’Etat ne s’endettera pas directement car il ne financera pas l’activité concernée : en accordant sa garantie à une autre entité, c’est cette dernière qui s’endettera avec une prime de risque proche de celle qu’obtient l’Etat en empruntant sur les marchés. Les garanties octroyées dans le cadre de la crise financière manifestent, par leur montant, l’intérêt de ce procédé. Les montants effectivement mobilisés dans le cadre du plan de soutien aux établissements de crédit sous forme de refinancements SFEF, de soutien en fonds propres SPPE et de garanties directes (120 Md€ au total) n’aurait pu être financé sur crédits budgétaires sans dommages graves pour les finances publiques.

Les garanties se caractérisent par leur aspect aléatoire et « indolore » au moment où elles sont accordées. La garantie de l’Etat n’est généralement pas appelée et les sommes déboursées sont d’une manière générale très inférieures aux engagements. En comptabilité budgétaire, les garanties non appelées n’ont pas vocation à être intégrées à la dette publique, le principe étant que la dette garantie reste celle de l’émetteur, aussi longtemps que celui-ci n’appelle pas la garantie de l’Etat. Toutefois, les garanties sont recensées en « hors bilan » et mentionnées en annexe du compte général de l’Etat.

L’Etat peut, soit accorder lui-même sa garantie, cas le plus fréquent, soit confier cette responsabilité à un tiers. Afin d’éviter d’être appelé dès la première défaillance, il a accepté de limiter ses prélèvements sur les ressources disponibles afin que se constituent des réserves ou des provisions à caractère de réserve qui dérogent aux principes d’unité et d’universalité budgétaire et qui sont destinées à s’intercaler entre les personnes garanties et lui-même. Son intervention devient alors subsidiaire et son exposition au risque se trouve limitée à due concurrence.

Si l’Etat dispose sur ces fonds de réels pouvoirs de contrôle, en retire les avantages et en supporte les risques, une intégration dans les comptes de l’Etat doit être envisagée à l’instar du compte des procédures publiques gérées par la Coface et des fonds de garantie Oséo qui sont enregistrés dans les comptes de l’Etat pour une valeur de 2,8 Md€ correspondant à la somme des versements effectués par l’Etat à ces fonds nette des mises en jeu de garanties et du montant des risques de défaut avérés au 31 décembre 2009. La question se pose dans les mêmes termes pour les fonds de garantie gérés par la Caisse Centrale de Réassurance pour le compte de l’Etat et non intégrés à ses propres comptes59.

La grande majorité des garanties accordées par l'Etat le sont à titre gratuit, les principales étant celles accordées à CDC-Eurodisney (1,2 Md€), Oséo (1 Md€)60 et AFD-FRPC (1 Md€)(61).

Certaines des garanties accordées par l’Etat font cependant l’objet d’une rémunération. Il s’agit pour l’essentiel de celles accordées dans le cadre de la crise financière : envers la SFEF, le groupe Dexia et Dexia FSA.

Source : Comptabilité générale de l’Etat

Les montants ci-dessus sont des montants bruts qui ne prennent pas en compte les coûts indirects.

Concernant la SFEF, il s’agit de montants payés d’avance, portant sur des périodes postérieures à l’exercice 2009, immédiatement encaissés par l’Etat. Le projet de loi de finances précisait que le montant de cette rémunération serait proche des conditions de marché et traduirait de manière réaliste la prise de risque de l’Etat. La mise en œuvre d’une rémunération des garanties accordées constitue d’ailleurs une condition de la légalité de l’aide ainsi octroyée aux agents économiques publics ou privés au regard des dispositions des articles 107 et 108 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (ex articles 87 et 88 du traité instituant la Communauté européenne) relatifs aux aides d’Etat.

Les garanties accordées à titre gratuit ou lorsque la rémunération est insuffisante peuvent être considérés comme une renonciation de l’Etat à la prime de risque qui devrait lui revenir et procurent ainsi un avantage à l’entreprise qui en bénéficie. Au moment où la garantie est offerte, il peut être considéré que cette intervention constitue une aide d’Etat au sens de l’article 107.

Le risque supporté par l’Etat peut être limité par la constitution de sûretés sous la forme de contreparties fournies par le bénéficiaire de la garantie. Dans le cas de la garantie apportée à la SFEF, les établissements de crédit bénéficiaires ont apporté en nantissement des titres de créances « collatéralisés », c'est-à-dire des sûretés ayant vocation à être mises en œuvre au profit de l’Etat au cas où celui-ci serait appelé en garantie. Le montant de ces collatéraux doit être au moins équivalent à l’encours de prêts dont ils bénéficient, après décotes prévues par arrêté ministériel.

Le risque de défaut d’un collatéral remis en garantie n’est pas nul, mais paraît très faible : les 77 Md€ de prêts consentis aux établissements sont « couverts » par des collatéraux d’une valeur de 84 Md€.

L’ensemble des engagements de l’Etat doivent être recensés dans la comptabilité générale de l’Etat, qui comprend, selon l’article 54 7° de la LOLF « la balance générale des comptes, le compte de résultat, le bilan et ses annexes, et une évaluation des engagements hors bilan de l’Etat ». Les normes comptables de l’Etat prévoient de retranscrire les éventuels risques attachés aux garanties qu’il a consenties par le biais de provisions. A la fin de chaque exercice comptable, l’ensemble des garanties font l’objet d’un examen individuel qui peut aboutir à la constitution d’une provision ou à une modification de la provision déjà constatée. L’incertitude et la difficulté d’évaluation du risque compliquent sensiblement le traitement comptable de ces provisions.

Les appels en garantie de l’Etat ont diminué de 43 M€ entre 2008 et 2009, malgré un contexte défavorable et la mise en place d’amples dispositifs de garantie financière à la fin de 2008, atteignant un total de 189,9 M€ à fin 2009.

b. Les différentes catégories de garanties

Ces engagements, pris dans le cadre d’accords bien définis, sont de deux types.

La dette garantie

La dette garantie s’inscrivait en diminution depuis plusieurs exercices jusqu’à la reprise, en 2006, des engagements souscrits par la société gestionnaire du fonds de garantie à l’accession sociale à la propriété (FGAS) et la survenance de la crise financière internationale en 2008. Son montant est passé de 25 Md€ au 31 décembre 2005 à 150 Md€ au 31 décembre 2009.

Source : Compte général de l’Etat 2009

L’augmentation intervenue en 2009 résulte principalement des mesures adoptées dans le contexte de la crise financière.

Au 31 décembre 2009, les principales lignes de prêts garantis reprises dans le tableau ci-dessous montrent que la SFEF, le FGAS, Dexia et l'UNEDIC représentent à eux seuls, 92% de la dette garantie en euros.

Source : Comptabilité générale de l’Etat

La garantie de l’Etat sur les émissions de dettes lancées par Dexia a été plafonnée à 55 Md€. Ce plafond a été ramené à 36,55 Md€ lors de la prorogation de la garantie jusqu’au 31 octobre 2010 qui a été approuvée par la Commission européenne et autorisée par l’article 118 de la LFI pour 2010.

La dette garantie en devises a très fortement augmenté et atteint désormais 42 Md€, soit plus de 28 % de l’encours total de la dette garantie.

Source : Comptabilité générale de l’Etat

Les principaux facteurs d’explication de cette évolution sont la poursuite de la garantie sur les émissions de titres de la SFEF (26 Md€), la garantie Dexia FSA (4,5 Md€, soit 6,39 Md$)62 et la garantie du programme de papier commercial multidevises lancé par la SPPE pour 7,3 Md€.

Sur l’exercice 2010, une nouvelle garantie conséquente devrait être enregistrée dans les comptes de l’Etat suite à la mise en œuvre du plan d’aide à la Grèce. La création d’un fonds de stabilisation financière de la zone euro a été décidée le 7 mai 2010 par les chefs d’Etat et de Gouvernement des 16 pays de la zone euro Sa fonction est d’apporter des financements aux Etats fragilisés sous forme de prêts ou de lignes de crédit, voire d’achats de dette publique. Il bénéficiera de la garantie conjointe mais non solidaire des Etats participants.

La France devrait apporter une garantie de 111 Md€ à ce fonds correspondant à sa quote-part dans le capital de la Banque centrale européenne, majorée de 20 %.

La composition de la dette garantie a été fortement affectée par les conséquences de la crise financière, comme cela ressort du tableau ci-dessous. Ce tableau met en outre en évidence la rupture dans la série que représenterait l’activation du fonds de stabilisation de la zone euro et l’impact très important qu’il aurait sur l’encours de la dette garantie.

Source : Cour des comptes

Les garanties explicites liées à des missions d’intérêt général

En plus de la dette garantie, un certain nombre de garanties sont liées à l’exercice de missions d’intérêt général, telles celles confiées à la CCR et à la COFACE. A ce titre, les engagements hors bilan de l’Etat s’élèvent à près de 83,5 Md€ au 31 décembre 2009.

Source : Compte général de l’Etat 2009

Il convient de prendre également en compte les garanties de protection des épargnants. En application des articles L. 221-8 en vigueur jusqu’au 31 décembre 2008 et L. 518-26 du code monétaire et financier, et de la loi de finances pour 1983 du 29 décembre 1982, l’Etat garantissait la Caisse nationale d’épargne (désormais dans les comptes de la Banque postale), les dépôts collectés sur le livret A par les caisses d’épargne et les fonds collectés sur le livret d’épargne populaire par les établissements qui le distribuent.

Conformément à la loi de modernisation de l’économie et à l’article 120 de la loi n° 2008-1443 du 30 décembre 2008 de finances rectificative pour 2008, la garantie de l’Etat porte, depuis le 1er janvier 2009, sur l’ensemble des dépôts effectués par les épargnants sur le livret A, les livrets bleus, les livrets de développement durable et les livrets d’épargne populaire, centralisés en tout ou partie dans le fonds d’épargne, ainsi que sur les créances détenues par les établissements de crédit sur le fonds d’épargne.

Pour les livrets d’épargne réglementée centralisés dans le fonds d’épargne, des règles prudentielles spécifiques ont été mises en place. Les résultats de la gestion des encours sont versés dans ces fonds de réserve. Pour les trois principaux d’entre eux, les réserves doivent représenter 2 % des encours. Au 31 décembre 2008, le montant total des garanties au titre de ces dépôts et de ces fonds de réserve s’élevait à près de 307 Md€ dont 207 Md€ centralisés au fonds d’épargne.

Dans le cadre du plan de relance, plusieurs mesures ont fait intervenir Oséo garantie afin de soutenir l’offre de crédit aux PME et aux entreprises intermédiaires. Le montant total des prêts garantis s’élève à 3,7 Md€ à fin 2009.

Les appels en garantie

Au regard de l’importance des garanties accordées, les appels en garantie correspondant aux dépenses du programme 114 « Appels en garantie de l’Etat » de la mission « Engagements financiers de l’Etat » sont relativement peu élevés. Ils ont représenté 189,9 M€ en 2009 dont 69,7 M€ pour les dispositifs de développement international de l’économie française, mais la part la plus importante (83 M€) correspond aux appels en garantie de l’Agence française de développement (AFD) qui peuvent être considérés comme extérieurs au champ des interventions économiques de l’Etat. Ces appels en garantie correspondent aux sinistres enregistrés par l’AFD au titre des prêts souverains (qui bénéficient d’une garantie de l’Etat).

2. Les dispositifs d’apports de fonds propres et de soutien à l’innovation

a. Les dispositifs d’apport de fonds propres

Les dispositifs extra-budgétaires d’apport en fonds propres aux entreprises, et notamment aux PME, ont représenté environ 2,1 Md€ en 2009, si l’on prend en compte les investissements du FSI (1,3 Md€), ceux de la CDC dans le cadre de ses missions d’intérêt général (750 M€) et les contributions de l’Etat au capital risque, par l’intermédiaire du fonds de fonds technologique 3 (50 M€). A ce montant peuvent s’ajouter les contrats de développement participatifs d’Oséo (accordés sur une enveloppe d’1 Md€ refinancée par le programme d’investissement d’avenir).

Au sein du programme d’investissements d’avenir, plusieurs actions prévoient un investissement en fonds propres ou en quasi-fonds propres dans les entreprises :

− au titre du programme « croissance des petites et moyennes entreprises », 140 M€ sont destinés à une augmentation du capital d’Oséo (auxquels s’ajoutent les 360 M€ de la taxe exceptionnelle sur les bonus), 400 M€ à la création de fonds d’amorçage pour les entreprises innovantes (CDC), 100 M€ aux acteurs de l’économie sociale et solidaire (CDC), 100 M€ pour des prises de participation dans des plateformes mutualisées d’innovation dans les pôles de compétitivité (CDC) ; le milliard d’euros dédié aux mesures des états généraux de l’industrie sera distribué sous forme de prêts, d’abondement de fonds de garantie et, à titre marginal, sous forme de fonds propres dans le cadre des projets de filières ;

− au titre des actions de valorisation, 850 M€ seront engagés dans les fonds propres et quasi-fonds propres d’une dizaine de sociétés d’accélération du transfert de technologies locales, et 50 M€ dans un opérateur national de gestion des brevets « France brevets » ;

− au titre du fonds pour la société numérique, le programme prévoit un investissement de l’ordre de 1,3 Md€ pour des prises de participations dans les sociétés du secteur ;

− enfin, les actions gérées par l’ADEME (fonds démonstrateurs, véhicules) prévoient la possibilité d’intervenir en prise de participation lorsque cela est pertinent.

Au total, les prises de participation financées par l’emprunt national ne représentent qu’une part limitée du programme, de l’ordre de 3,5 Md€ au total, avec un ciblage particulier sur le secteur du numérique et des entreprises innovantes.

Les dispositifs extra-budgétaires d’apports en fonds propres entendent apporter des éléments de réponse au constat selon lequel les investisseurs de long terme sont peu nombreux. Un récent rapport du conseil d’analyse économique de juin 2010 a souligné la « rareté » de ces derniers dans les pays membres de l’OCDE et particulièrement en France où l’Etat, qui dispose en théorie de l’horizon le plus long, n’a plus guère les moyens d’investir.

Les ressources ainsi mobilisées restent cependant limitées au regard de ce qui serait nécessaire pour dynamiser l’appareil productif et l’orienter vers une croissance plus durable. Le rapport précité, qui estime à 30 ou 40 Md€ les besoins en la matière, suggère à cet égard de favoriser l’offre de capitaux longs en réorientant l’épargne des ménages vers l’investissement de long terme, par un basculement d’une partie de l’assurance-vie vers l’épargne retraite sous forme de rente. Il propose notamment de mettre en place des partenariats entre le public et le privé sur des projets ciblés d’investissement à long terme. Dans une certaine mesure la création du FSI répond à cette recommandation.

Outre qu’ils auraient l’avantage de partager les risques entre les investisseurs privés et l’Etat auquel il reviendrait d’en supporter les plus longs, ces partenariats permettraient de limiter l’impact budgétaire des mesures de soutien à l’accroissement des fonds propres. Pour importants et utiles qu’ils soient en eux-mêmes, ces dispositifs représentent cependant une faible part de l’ensemble des aides aux entreprises.

Pour 2009, la direction du budget évalue l’ensemble des aides aux entreprises à 78 Md€ hors plan de relance. Si l’on retire les subventions accordées par les collectivités territoriales (5,3 Md€) et les fonds communautaires (0,6 Md€), ainsi que les allègements de charges (27,2 Md€) qui figurent dans l’agrégat, les aides aux entreprises supportées directement par le budget de l’Etat, sous forme de subventions (6,4 Md€), de dépenses fiscales (37,5 Md€) ou de taxes affectées (1,3 Md€), représentent un total de 45,2 Md€.

b. Le soutien à l’innovation

Les interventions d’Oséo innovation et de l’ex-Agence de l’innovation industrielle (AII) financées par l’Etat ont atteint 627 M€ en 2007, 661 M€ en 2008 et 450 M€ en 2009. Les financements apportées par l’ANR aux entreprises s’élèvent à environ 100 M€ chaque année depuis 2007. L’intervention de l’ADEME dans le cadre du fonds démonstrateur de recherche a représenté 173 M€ en 2009, année de sa création.

Outre les 500 M€ déjà mentionnés, l’emprunt national apportera des financements au titre du développement durable (4,6 Md€ dont 3,85 Md€ de dotations consomptibles) et au titre du développement de l’économie numérique (4,5 Md€). Le secteur de l’enseignement supérieur et de la recherche recevra également 21,9 Md€ de dotations dont la majeure partie sera non consomptible et apportera des recettes annuelles de l’ordre de 500 M€.

Hors emprunt national, les dispositifs extra-budgétaires de soutien à l’innovation (pôles de compétitivité et intervention d’Oséo Innovation, ex AII, ANR et ADEME) représentent un montant annuel moyen compris entre 700 et 800 M€ par an. Ce montant peut être rapproché, à titre de comparaison, du dispositif fiscal du crédit impôt recherche. En volume, l’incitation fiscale apparaît beaucoup plus massive que les interventions extra-budgétaires. En 2009, plus de 13 000 établissements ont bénéficié du CIR. Les entreprises concernées ont déclaré un peu plus de 15 Md€ de dépenses et reçu en retour 4,2 Md€ de réduction d’impôt.

La réforme du CIR intervenue à compter de 2008, qui applique un taux de 30 % à l’ensemble des dépenses déclarées et non plus au différentiel de dépenses par rapport à l’année précédente63, a fortement accru son coût qui est cinq fois plus élevé que celui des aides ciblées sur appels à projet. Sans entrer dans le débat sur l’efficacité du mécanisme actuel du CIR64, il convient de constater la relative modestie des interventions extra-budgétaires65 en faveur de l’innovation par rapport à la dépense fiscale correspondante.

3. Les investissements publics par des moyens extra-budgétaires

Les investissements civils, qui représentent 30 % environ de l’effort d’investissement total de l’Etat (titre 5), sont en montant peu importants, de l’ordre de 4 Md€ par an en moyenne, contre 11,1 Md€ pour le ministère de la défense.

Source : Extraction du système INDIA des CP consommés par année de gestion pour le titre 5

Par comparaison, les investissements réalisés par l’AFITF, les Agences de l’eau, VNF, l’ADEME, l’ANAH et l’ANRU ont ainsi représenté 6,4 Md€ en 2008, comme l’indique le tableau ci-dessous réalisé sur la base des documents budgétaires et des rapports d’activité des organismes.

Source : Cour des comptes, à partir des données issues de documents budgétaires et des rapports d’activité des organismes

Ces investissements réalisés ne peuvent être qualifiés à proprement parler d’extra-budgétaires dans la mesure où des dotations budgétaires ont contribué à leur financement.

Dans le contexte particulier du plan de relance, le montant des investissements directs de l’Etat a augmenté de 2,5 Md€ par rapport à la moyenne des trois années précédentes. L’essentiel des investissements supplémentaires a été recherché par des moyens extra-budgétaires, tels les 1,4 Md€ engagés par la SNI pour l’achat d’immeubles en « vente en l’état futur d’achèvement » (VEFA). En montant, le financement d’infrastructures par le Fonds d’épargne est ainsi équivalent (2,4 Md€ engagés au 31 décembre 2009 sur une enveloppe de 8 Md€) à l’effort supplémentaire d’investissement consenti par l’Etat en 2009.

Si l’on élargit la notion d’investissement aux immobilisations financières (dotations en fonds propres et participations financières), le constat apparaît similaire. Les dotations en fonds propres et participations financières, qui avaient représenté des montants importants dans le passé, ont été faibles au cours des dernières années.

Comme la Cour l’a montré dans une insertion au rapport public annuel sur l’Etat actionnaire66, la visibilité du Parlement sur le compte d’affectation spéciale « participations financières de l’Etat » demeure limitée. La performance budgétaire ne peut être valablement appréciée à travers les seuls programmes budgétaires correspondant à ce compte d’affectation spéciale, exclusivement centré sur les cessions et le désendettement. Ce compte se caractérise, en outre, par un écart très important entre les prévisions de la loi de finances initiale et l’exécution budgétaire que l’administration estime justifié par le souhait de ne pas donner un signal aux marchés sur les intentions de l’Etat en matière de cessions, le détail des opérations étant fourni, a posteriori, dans le rapport annuel de performance.

L’impératif de transparence se heurte ainsi aux exigences de la défense des intérêts patrimoniaux de l’Etat.

Le tableau suivant reprend l’ensemble des recettes et dépenses importantes (supérieures à 30 M€) du CAS PFE (Participations financières de l’Etat) liées à des opérations en capital depuis 2006 :

Source : Direction du budget

Par ailleurs, le tableau suivant met en évidence la faiblesse des dotations en fonds propres opérées par l’Etat au cours des dernières années.

Source : Extraction du système INDIA des CP consommés par année de gestion pour le titre 7

Le montant de 16,9 Md€ en 2006 correspondait pour l’essentiel à des opérations de désendettement de l’Etat ou d’établissements publics de l’Etat et en l’espèce au bénéfice de la Caisse de la dette publique, de Charbonnages de France et de l’Etablissement public de financement et de restructuration (EPFR). Depuis lors, la dette de l’EPFR vis-à-vis du Crédit Lyonnais n’a plus été amortie faute de dotation du CAS PFE et a même augmenté pour financer le paiement de la somme de 152,9 M€ au CDR le 4 septembre 2008 au titre du risque non chiffrable ADIDAS/Tapie. Elle atteint à fin 2009 4,25 Md€, alors que l’échéance du prêt est 2014.

Ces montants illustrent les faibles disponibilités de l’Etat pour investir de façon directe et mettent en évidence l’importance relative du relais constitué par la Caisse des dépôts et consignations, à l’instar, par exemple, des 1,5 Md€ apportés pour la recapitalisation de Dexia ou de sa contribution au FSI.

D’une manière générale, le groupe Caisse des dépôts contribue aux investissements publics, en prolongeant et parfois en suppléant l’action de l’Etat. En prenant en compte les estimations 2009 et les prévisions 2010, la CDC aura apporté un montant d’investissements de 3 485 M€ sur la période 2006-2010 au titre de ses missions d’intérêt général (soit 700 M€ par an en moyenne).

Source : Cour des comptes d’après les données CDC

Les interventions économiques extra-budgétaires constituent ainsi pour l’Etat un moyen de financer des investissements pour lesquels la ressource budgétaire apparaît insuffisante. Mais elles sont aussi et surtout le moyen de démultiplier son action en recherchant des effets de levier, en comblant les déficiences du marché et en favorisant les cofinancements.

B. Des risques en apparence limités

1. Des risques différenciés pour des effets d’ampleur variable

a. Des risques différenciés

- Les garanties

Les structures mises en place à l’occasion de la crise financière pour garantir le financement de l’économie ont permis de limiter drastiquement le montant des crédits budgétaires alloués au refinancement du système bancaire, tout en recouvrant des recettes non fiscales significatives et en escomptant un fort rebond des recettes fiscales en sortie de crise. En contrepartie, les mécanismes retenus ont contribué à une très forte augmentation des garanties accordées par l’Etat.

Jusqu’en 2006, l’encours de la dette d’autres entités garantie par l’Etat tendait à diminuer. Depuis cette année-là, marquée, on l’a vu, par la reprise par l’Etat des engagements souscrits par la société gestionnaire du fonds de garantie à l’accession sociale à la propriété (FGAS), le volume de garanties accordées par l’Etat a augmenté.

Les garanties effectivement accordées aux établissements de crédit sont cependant restées très inférieures au montant maximal (360 Md€), fixé par la loi, n’atteignant que 106 Md€ à fin 2009. En outre, s’agissant de la SFEF, le risque de défaut des prêts consentis est limité par le collatéral apporté par chaque établissement. En ce qui concerne la SPPE, à fin 2009, ayant remboursé la CDP, la garantie de l’Etat ne porte plus que sur le programme de papier commercial d’un montant de 7,7 Md€.

Si les garanties à l’exportation représentent des montants importants, leur gestion à l’équilibre67 paraît de nature à limiter l’exposition de l’Etat.

Depuis 15 ans, l’assurance-crédit, principale procédure publique gérée par la COFACE, dégage un excédent. En 2009, son résultat cumulé représente 13,2 Md€. Toutefois, l’ampleur des risques pris sur la période récente reste difficile à mesurer.

- Les autres modes d’intervention extra-budgétaire

Les autres modes d’intervention présentent des degrés différenciés de risque pour l’Etat.

Les interventions passant par des organismes recevant des dotations en capital, qu’il s’agisse d’entreprises publiques ou de tout autre entité contrôlée, peuvent faire courir un risque financier à l’Etat. Il existe ainsi dans les comptes de l’Etat un nombre significatif d’entités contrôlées, opérateurs ou non, qui présentent une situation nette négative. Ces situations sont susceptibles de se traduire à terme par des charges budgétaires ou des affectations de recettes fiscales préjudiciables à l’équilibre financier de l’Etat.

Les principales entités présentant des situations nettes négatives au 31 décembre 2009 sont les suivantes : RFF (Réseau Ferré de France), EPFR (Etablissement Public de Financement et de Restructuration), Charbonnages de France et EMC (Entreprise Minière et Chimique)68.

L’utilisation des ressources du fonds d’épargne, pour apporter des financements en soutien de l’économie, n’est pas extensible à l’infini. Le directeur général de la Caisse des dépôts et consignations a fait valoir à cet égard le risque de liquidité qu’il y aurait à utiliser ces ressources pour des projets de financement de crédits à l’exportation. Un cadre de gestion signé prochainement par le ministre chargé de l’économie et le directeur général de la CDC aura toutefois vocation à encadrer la création de nouveaux emplois du fonds d’épargne.

D’autres dispositifs, comme les concessions, apparaissent pas ou peu risqués, dès lors que le risque économique est réellement transféré sur le concessionnaire. Ce mode d’intervention nécessite cependant une vigilance sur le contenu du contrat et sur tous les avenants susceptibles de lui être apportés. Il soulève en outre la question de la bonne valorisation des concessions par l’Etat.

Bien qu’ils soient économiquement proches des délégations de service public, en ce qu’ils sont également censés transférer le risque au cocontractant de l’administration, les partenariats public-privé n’offrent pas le même degré de tranquillité dans la mesure où la charge budgétaire, qui est transférée dans le temps, contribue à rigidifier sur une longue période le budget de l’Etat.

L’annexe au compte général de l’Etat précise le montant des engagements que représentent les PPP signés. Les principaux biens du parc immobilier contrôlés par l’Etat et déjà réceptionnés au cours de l’année 2009 représentent un montant total de loyers futurs de 1,193 Md€ (698 M€ après actualisation) dont 976 M€ avec un paiement prévu dans plus de 5 ans.

Cependant, les PPP sont encore peu importants et font l’objet d’un suivi particulier de la part de la direction du Budget. Par ailleurs, l’évolution de la jurisprudence EUROSTAT, qui tend maintenant à comptabiliser l’intégralité de l’investissement à la date de la livraison du bien, a fortement contribué à freiner leur développement.

b. Des effets d’ampleur variable

Chacun de ces dispositifs mériterait une évaluation minutieuse selon une méthodologie adaptée.

Dans son rapport de mai 2010 sur les concours financiers aux établissements de crédit, la Cour a souligné l’utilité des concours publics au sein d’un ensemble plus vaste de mesures. Le refinancement de ces établissements par la SFEF a ainsi amélioré l’accès à la liquidité pendant la phase la plus délicate, en leur fournissant des ressources moins coûteuses que celles offertes par les conditions de marché de l’époque. La Cour a cependant souligné que les engagements pris par les établissements bancaires en termes de financement de l’économie n’ont pas été totalement respectés.

S’agissant des autres modes d’intervention, un référé du Premier président a souligné les limites du dispositif des pôles de compétitivité, dont la performance n’a pas été réellement mesurée dans le cadre de la LOLF, sur la période 2004-2008.

La Cour a engagé des travaux d’évaluation de la politique en faveur du commerce extérieur et sur les conditions dans lesquelles l’augmentation de la durée des concessions autoroutières a été négociée en contrepartie des investissements attendus dans le cadre du plan de relance de l’économie.

2. Un risque en apparence limité compte tenu des volumes en jeu et des mécanismes utilisés

En dépit de l’importante augmentation des garanties octroyées dans le cadre de la crise financière, et compte tenu des sûretés constituées en l’espèce par des contre-garanties, le risque financier lié à cette augmentation ne s’est pas fortement aggravé. L’octroi massif de nouvelles garanties ne pourrait toutefois être envisagé sans veiller tout autant à la qualité des collatéraux obtenus.

Se trouve ainsi souligné le fait que le fort développement des interventions économiques par des moyens extra-budgétaires a résulté de facteurs conjoncturels (plan de relance, sauvetage du système bancaire, création du fonds de stabilisation de la zone euro). En conséquence, cet accroissement ne devrait pas avoir vocation à se poursuivre, les dispositifs spécifiques mis en place à titre temporaire ayant vocation à disparaître progressivement.

Au regard des montants financiers en jeu, les autres dispositifs d’intervention de l’Etat dans l’économie par des moyens extra-budgétaires (dotations en fonds propres des entreprises, soutien de l’innovation hors dépenses fiscales et investissements via des opérateurs), qui représentent un montant annuel d’une dizaine de milliards d’euros, ne semblent pas porteurs de risques financiers particuliers, au regard de leur utilité, sinon de leur performance qui resterait à évaluer.

Il convient toutefois de relever que certains modes d’intervention (les PPP en particulier) grèvent les marges de manœuvre budgétaires ultérieures et que leur développement excessif tendrait à aggraver le déficit public. Par ailleurs, nombre des dispositifs mis en place récemment reposent sur une mécanique d’endettement qui, si elle devait être démultipliée, pourrait s’avérer dangereuse.

Comme l’a montré la Cour dans son rapport public de mai 2010, le plan de soutien aux établissements de crédit a été financé par endettement. En décidant d’affecter les remboursements à la SPPE au financement de l’emprunt national, l’Etat a choisi d’en faire une dette supplémentaire et une charge d’intérêt permanente. Il en résulte un risque dont l’ampleur dépend du retour sur investissement attendu des opérations sélectionnées. En autorisant les agences de l’eau et l’ANRU à s’endetter, l’Etat prend un risque similaire vis-à-vis de ces opérateurs.

Le problème est plus complexe en ce qui concerne la mobilisation du fonds d’épargne. La Cour a conduit dans l’année 2009 des vérifications sur la gestion et l’utilisation de celui-ci par la Caisse des dépôts et consignations sur la période 2005 à 2009. D’une manière générale, l’équilibre de moyen terme du fonds d’épargne est susceptible d’être compromis par le double effet du plafonnement du montant du livret A centralisé à la CDC et de la multiplication de l’engagement du fonds dans de nouveaux projets (transports collectifs en site propre et infrastructures, plan hôpital 2012, contribution au plan de relance de l’économie). Fin 2008, une insuffisance de fonds propres au titre du risque de taux était constatée au regard des règles prudentielles de Bâle II.

Sur la base des projections réalisées par la direction du fonds d’épargne, un accroissement du montant centralisé serait nécessaire à moyen terme pour respecter le ratio légal minimal de 125 % entre l’encours des dépôts centralisés (livret A et LDD) et celui des prêts au logement social et à la politique de la ville69. La CDC souligne que toute nouvelle décision d’emploi devrait être assortie d’une mesure d’augmentation de la ressource permettant de la financer.

La multiplication de nouveaux emplois participe d’un processus de débudgétisation préjudiciable au financement du logement social, d’ailleurs peu assuré au plan juridique (70) :

- financement de grands projets d’infrastructures dans le cadre de l’initiative européenne de croissance (grandes infrastructures interurbaines, transports en commun en site propre) pour un montant de 8 Md€ pour la période 2009-2013(71) dont une partie pourra être utilisée dans le cadre de partenariat public privé ;

- financement des investissements du secteur hospitalier (2 Md€ prélevés sur le fonds d’épargne) ;

- participation à des partenariats publics privés (décision d’utiliser une enveloppe de 8 Md€ prise en 2009 dont 1 Md€ dédié au financement de l’investissement public) ;

- recours au fonds d’épargne, dans le contexte de la crise de liquidité du secteur bancaire, pour permettre aux collectivités territoriales de faire face à d’éventuelles difficultés de liquidités (enveloppe de 5 Md€ décidée en 2008 sur laquelle 1,7 Md€ ont été mobilisés) ;

- mobilisation au service de l’environnement (enveloppe de 1,5 Md€) pour la mise à niveau des installations de traitement des eaux usées.

La crise financière a également été l’occasion de solliciter le fonds d’épargne :

- pour la participation à la recapitalisation de Dexia (445 M€) ;

- pour l’affectation de ressources centralisées au fonds d’épargne directement aux banques pour le soutien aux PME (16,7 Md€).

La croissance continue des nouveaux emplois s’accompagne d’une augmentation des risques financiers liée à l’utilisation d’une ressource liquide pour financer des emplois très longs (jusqu’à 40 ans).

Il ne faudrait pas que pour définir, à l’expiration du régime transitoire fin 2011, le nouvel équilibre entre les ressources et les emplois du fonds d’épargne l’Etat choisisse la facilité ouverte par la loi de modernisation de l’économie du 4 août 2008 d’autoriser le fonds d’épargne à emprunter sur les marchés financiers.

II. Un impact differencie sur les normes de depenses et de dette publique

L’adoption de la loi organique n°2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances visait notamment deux objectifs: rationaliser la dépense publique d’une part, rénover le pouvoir financier du Parlement, d’autre part. Au titre du second de ces objectifs, figurait notamment l’amélioration de la lisibilité et de la sincérité des documents budgétaires destinée à permettre à la représentation nationale d’exercer plus pleinement ses fonctions de contrôle, tant lors de l’adoption des lois de finances que lors du vote des lois de règlement.

Les interventions extra-budgétaires ont un impact différencié sur la norme de dépense et le solde budgétaire (A), sur le solde des administrations et sur la dette au sens du Traité de Maastricht (B) et sur la situation nette de l’Etat (C).

Le panorama des interventions économiques extra-budgétaires de l’Etat peut faire l’objet d’une typologie présentée sous forme de tableau, destinée à mettre en évidence, pour chacun des modes d’intervention, l’impact susceptible d’en résulter au bilan et au compte de résultat.

L’intervention peut accroître la dette. Dans certains cas cependant, des actifs sont constitués en contrepartie, neutralisant son impact en termes de situation nette. Elle peut aussi procurer des recettes, soit fiscales, soit non fiscales sous forme de dividendes, de produits financiers ou de remboursements de prêts et avances. Dans certaines hypothèses, l’intervention induit des charges futures à raison des coûts de fonctionnement à venir, de dépréciations d’actifs ou de mise en jeu des garanties accordées. A l’inverse, les actifs peuvent prendre de la valeur et améliorer, toutes choses égales par ailleurs, la situation nette.

Source : Cour des comptes

A. L’impact au regard de la norme de dépense et du solde budgétaire

La charte de budgétisation prévoit que les mouvements de dépenses et les affectations de recettes ayant pour effet d’accroître ou de diminuer le niveau de la dépense publique sont pris en compte dans le calcul de la norme d’évolution des dépenses affiché depuis le projet de loi de finances pour 2004. A contrario, les mouvements constituant une simple réimputation au sein du budget ou un transfert entre l’Etat et une autre entité, appelés mesures de périmètre, ne doivent pas être comptabilisées dans ce calcul.

Les mesures de périmètre recouvrent les situations dans lesquelles l’Etat :

- reporte sur une autre entité une dépense qu’il assumait auparavant, en transférant parallèlement les ressources permettant de la financer ;

- inscrit à son budget une dépense nouvelle auparavant financée par un autre acteur, ainsi que les recettes correspondantes ;

- prend en charge une dépense financée auparavant par dotation en capital ou par une entité supprimée.

Ainsi, la modification des modalités de financement d’un opérateur, en substituant une affectation de ressources à un financement budgétaire, constitue une mesure de périmètre qui n’est pas prise en compte dans le calcul de la norme. Cette neutralisation, qui ne vaut que pour un exercice, n’est en tout état de cause pas certaine. En effet, si les ressources transférées se révèlent insuffisantes, l’opérateur peut être conduit à enregistrer un déficit que l’Etat pourra avoir à combler ultérieurement, voire à le financer par une avance du Trésor ou par recours à l’emprunt. A l’inverse, si elles sont supérieures aux dotations budgétaires auxquelles elles se substituent, ces ressources transférées peuvent induire des accroissements de dépenses tout en augmentant, toutes choses égales par ailleurs, le déficit budgétaire.

Cette forme d’intervention extra-budgétaire constitue une véritable débudgétisation qui tend à réduire les recettes de l’Etat sans véritablement permettre le contrôle de la dépense. Les transferts de ressources, qui affectent durablement le solde budgétaire, n’ont véritablement de sens que si l’on anticipe à la fois une dynamique similaire des recettes et des dépenses. Dans toute autre hypothèse, elles affectent négativement soit la situation financière de l’Etat, soit celle de l’organisme, voire celle des deux.

Les interventions extra-budgétaires financées sur les ressources propres d’une entité publique ou privée (la CDC par exemple ou un concessionnaire) échappent à la contrainte de la norme de dépense. Du point de vue de l’intérêt général, elles supposent que l’intérêt de l’organisme public soit préservé et que l’équilibre du contrat passé avec le partenaire privé ne soit pas rompu à l’avantage de celui-ci.

On peut aussi mentionner, dans les interventions extra-budgétaires tendant à une débudgétisation, l’avance de trésorerie consentie par le Crédit foncier qui atteignait encore, à fin 2009, malgré un effort de rattrapage, 719 M€ et qui était destinée à pallier un manque de crédits budgétaires face à une hausse massive des versements de primes d’épargne logement aux détenteurs de plans ou de comptes d’épargne logement.

Le cas particulier de l’emprunt national mérite attention et soulève une interrogation au regard de l’application différenciée de la norme de dépense pour les dotations consomptibles et pour les dotations non consomptibles. Les mécanismes retenus pour l’utilisation du produit de cet emprunt se traduisent en effet par des versements d’intérêts aux organismes attributaires des fonds non consomptibles dans le cadre des priorités « enseignement supérieur » et « recherche », à hauteur d’environ 600 M€ par an, et des décaissements progressifs, de l’ordre de 4 à 5 Md€ par an entre 2010 et 2014, pour financer les dépenses liées aux autres priorités. Les premiers sont intégrés à la norme de dépense, tandis que les seconds sont suivis en dehors.

Le financement d’une part des investissements à l’intérieur de la norme budgétaire entraîne une substitution bienvenue à des dépenses de fonctionnement courantes, de nature à pallier la baisse de la part de l’investissement dans les dépenses de l’Etat. Pour autant, c’est à la plus faible part des investissements d’avenir que sera appliqué ce mécanisme vertueux.

Intégrer ces investissements dans la norme aurait conduit à réduire chaque année d’environ 1,5 point la croissance des autres dépenses (pour une norme donnée). Une autre option consisterait à laisser ces investissements hors de la norme mais à fixer en contrepartie une norme plus exigeante (baisse en volume, voire en valeur).

B. L’impact sur le solde des administrations et sur la dette publique au sens du Traité de Maastricht

L’impact des interventions économiques extra-budgétaires de l’Etat varie selon la nature de celles-ci. Lorsque l’intervention s’effectue par l’intermédiaire d’un partenaire privé ou d’une entreprise publique classée dans la catégorie des sociétés non financières, l’endettement de l’entité n’est pas inclus dans la dette publique telle qu’elle est mesurée par la comptabilité nationale et notifiée à la Commission européenne. Les dépenses de l’entité ne sont pas davantage comptabilisées dans le solde public.

Dans le cas particulier des partenariats public-privé, la charge budgétaire correspondant aux loyers impactera le déficit public. En revanche, l’endettement ne sera pas comptabilisé dans la dette publique au sens du traité de Maastricht dès lors que les risques du contrat auront bien été transférés aux partenaires privés. A cet égard, l’octroi de garanties publiques au financement privé de l’opération pourrait remettre en cause le caractère « déconsolidant » de ce mode de financement.

En ce qui concerne les opérations en capital, la situation est sensiblement plus complexe au regard de l’impact tant sur le solde public que sur la dette publique notifiée.

1. L’impact sur le solde public d’une opération en capital dépend de sa contrepartie financière

L’impact d’une opération sur le solde public est mesuré comme la variation de l’actif financier net des administrations publiques qui en résulte.

En règle générale, si une opération en capital conduit à l'acquisition d'un actif financier à sa valeur de marché, l'opération sera considérée comme une opération financière et n'aura pas d’impact sur le déficit public. En ce cas, l'Etat ne fait rien d’autre que recomposer son patrimoine financier en échangeant du numéraire contre des actifs financiers de même valeur, sans modifier ainsi sa richesse financière nette. Dans le cas contraire, une opération réelle est enregistrée qui s’accompagne d’une dégradation du déficit public.

Ainsi, une prise de participation dans une entreprise privée, par exemple via l’achat d'actions, dans des conditions similaires à celles du marché, sera en général considérée comme une opération financière. De même, un prêt ou la souscription d'obligations privées sera considéré comme une opération financière dans la mesure où l'Etat acquiert une créance du même montant qui portera intérêt.

En revanche, une subvention ou un transfert en capital, c'est-à-dire une opération sans contrepartie financière, sera considérée comme une dépense et impactera le déficit. Par exemple, un versement à une société en dehors des administrations publiques effectué à la condition qu’elle utilise les fonds pour acquérir un actif fixe, constitue une aide à l’investissement et aura un impact sur le déficit de l'Etat. Si l'organisme concerné est une administration publique (par exemple une université), la subvention est consolidée entre les administrations publiques mais le déficit public serait in fine affecté à hauteur des dépenses nouvelles engagées par cet organisme suite à la subvention.

2. Le classement en opération financière dépend des caractéristiques économiques de l'opération

Ce sont les caractéristiques économiques de l'opération qui déterminent le classement en comptabilité nationale et non sa forme juridique (augmentation de capital, prêt...).

Même si les prêts ou les prises de participation sont le plus souvent traités en opérations financières, ils peuvent dans certaines circonstances être classés en dépense. Par exemple :

un prêt bonifié peut être assimilé en partie à une subvention et donc être considéré comme une dépense publique à hauteur de la subvention, c’est-à-dire le montant de la bonification d’intérêt accordée ;

un apport en capital à une entreprise publique structurellement déficitaire sera considéré comme une dépense, qu'elle prenne la forme de subvention, d’augmentation de capital ou d’achat d'obligations émises par l'entreprise.

Le critère déterminant pour la classification en opération financière sera donc de savoir si l'Etat se comporte en investisseur avisé ou s'il agit à des fins de politique générale sans contrepartie financière. Les dotations du CAS PFE à l’EPFR ne peuvent entrer dans cette catégorie, car le financement d’une structure de défaisance ne peut être considéré comme une opération conduite par un investisseur avisé.

Une opération financière, c'est-à-dire avec une contrepartie financière et une rémunération à hauteur des capitaux investis et des risques pris par l'Etat, n’a pas d’effet sur le déficit public au sens du Traité de Maastricht.

Dans le cas d'une prise de participation dans une entreprise, si l'Etat reste minoritaire au capital à l'issue de l'opération aux côtés d'acteurs privés majoritaires, la présomption est que l'Etat se comporte comme un investisseur « normal » et n’agit donc pas à des fins de politique générale.

3. L’impact des opérations en capital sur la dette publique au sens de Maastricht

La dette au sens de Maastricht est une dette brute de laquelle les actifs financiers ne sont pas déduits. Elle est toutefois consolidée : les éléments de dette d’une administration publique détenus par une autre administration publique ne sont pas pris en compte (comme par exemple le placement sur le compte du Trésor de la trésorerie d’autres administrations publiques). Ainsi, l'impact d’une opération sur la dette peut être sans lien avec son impact sur le déficit.

Tout apport en capital à des entités non publiques conduira, toutes choses égales par ailleurs, à une augmentation de la dette au sens de Maastricht dès lors qu'elle devra être financée par augmentation du passif financier des administrations publiques.

Si le capital est mis à disposition d'une administration publique, l’impact pourra être nul sur la dette publique si par exemple cette dernière se désendette ou contracte une créance auprès d'autres administrations publiques à hauteur du capital reçu.

Dans le cas de la constitution d’un fonds non consomptible au bénéfice d’une entité publique qui bénéficierait du produit des intérêts du placement du capital, l’opération constitue toutefois pour l’Etat une charge de trésorerie, à hauteur du montant des intérêts versés, retracée dans le compte de commerce « gestion de la dette et de la trésorerie de l’Etat ». Toutes choses égales par ailleurs, cela alourdirait la charge nette de la dette.

L’augmentation de la dette de l’Etat liée à l’emprunt national ne serait, selon les hypothèses du Gouvernement, que d’environ 5 Md€ en 2010 et de l’ordre de 19 Md€ à terme, hors coût de financement.

C. L’impact sur la situation nette de l’Etat

Certaines modalités d’interventions économiques extra-budgétaires ont un impact immédiat sur la situation nette de l’Etat, d’autres un impact différé.

1. L’impact immédiat sur la situation nette

Le financement de subventions par l’endettement a un impact négatif sur la situation nette de l’Etat, sous réserve de l’effet recettes qui réduit à due concurrence le besoin de financement de celui-ci.

L’effet est a priori neutre en ce qui concerne les avances remboursables, les prêts, les participations financières, les dotations en capital, les prêts participatifs. Dans chacune de ces hypothèses, la contrepartie du financement par la dette est un actif d’une valeur équivalente.

S’agissant des garanties octroyées par l’Etat, il convient de distinguer celles pour lesquelles un fonds de garantie fait l’objet de dotations de celles qui sont accordées sans création d’un tel fonds. Dans le premier cas, le fonds constitue un patrimoine affecté sur lequel l’Etat dispose d’un pouvoir de contrôle. Ce patrimoine affecté apparaît comme un actif financier qui doit être comptabilisé comme tel dans la comptabilité de l’Etat.

La Cour a en conséquence obtenu, à l’occasion de la certification des comptes de l’Etat de l’exercice 2008, que soit comptabilisé à ce titre un actif financier distinct de la participation financière dans Oséo (il se montait à 2,8 Md€ au 31 décembre 2009). Il en a été de même pour le compte des procédures publiques de la COFACE (6,4 Md€ au 31 décembre 2009), et pour le fonds d’épargne (7,7 Md€) qui a été ajouté au coût d’acquisition de la Caisse des dépôts et consignations. A l’inverse, l’octroi d’une garantie sans constitution d’un fonds ne donne pas lieu à un enregistrement au bilan. Cette garantie est mentionnée comme engagement hors bilan dans l’annexe.

Les biens remis en concession doivent être comptabilisés à l’actif du bilan afin de permettre une juste appréciation de l’impact économique de ces délégations de service public. La comptabilisation a vocation à concerner l’ensemble des actifs sous-jacents des contrats. L’ensemble des concessions actuellement valorisées à l’actif du bilan de l’Etat représente un montant total de 135,6 Md€ dont 125,4 Md€ pour les concessions autoroutières, 4,76 Md€ pour les concessions ferroviaires antérieures à 2006 et 1,27 Md€ pour les concessions aéroportuaires. Un passif non financier d’un montant de 38,5 Md€ traduit en contrepartie les obligations résiduelles de l’Etat au titre des droits octroyés aux concessionnaires.

En matière de partenariat public-privé, l’investissement réalisé doit être inscrit à l’actif en contrepartie d’une dette équivalente au passif selon le principe suivant : le bien est inscrit au coût figurant dans le contrat ou, à défaut, à la valeur de marché du bien à la date de conclusion du contrat ou à la valeur actualisée des paiements minimaux relatifs au bien, si cette dernière est inférieure à la valeur de marché.

Au total, les moyens d’intervention extra-budgétaire de l’Etat représentent une part très importante de son bilan tel qu’il est désormais décrit par la comptabilité générale.

2. L’impact ultérieur

L’impact sur la situation nette peut être différé. Pour les entités contrôlées, les participations sont évaluées à la valeur d’équivalence, correspondant à la quote-part des capitaux propres détenus directement par l’Etat. L’écart d’équivalence correspond à la différence entre la valeur d’équivalence à la clôture et la valeur initiale de la participation. Il peut ainsi être constaté un accroissement de valeur ou, à l’inverse, une dépréciation de la participation. Pour les entités non contrôlées, les participations sont évaluées au coût d’acquisition, la variation de valeur sera constatée au moment de la cession.

Les actifs correspondant à des créances (prêts, avances) peuvent faire l’objet d’une dépréciation en cas de défaut de la contrepartie.

A ces variations possibles de la valeur des actifs s’ajoute la nécessité de rembourser l’emprunt qui a assuré le financement de l’investissement initial. S’agissant de l’Etat, l’amortissement des emprunts, qui s’effectue par la souscription d’emprunts nouveaux, aura un effet négatif, toutes choses égales par ailleurs, sur la situation nette.

3. Le cas particulier des dotations non consomptibles

Dans le cadre de l’opération Campus, qui est destinée à financer un effort exceptionnel en faveur de l’immobilier universitaire, l’Etat a mis en place un dispositif particulier de financement des loyers des partenariats public-privé envisagés pour la restructuration des douze sites concernés. Des dispositifs similaires sont mis en place dans le cadre de certains projets liés à l’utilisation de « l’emprunt national ».

Le principe général du financement de cette opération repose sur des dotations de l’Etat qui ne peuvent être consommées mais dont les revenus de placement devraient assurer le financement des loyers annuels des contrats de partenariat. Ces dotations proviennent du produit de la cession de 2,5 % du capital d’EDF (3,7 Md€) réalisée fin 2007, qui sera complété par une fraction de l’emprunt national (1,3 Md€).

Les modalités de gestion de l’enveloppe financière globale restent à déterminer. A ce jour, le produit de la cession d’une fraction du capital d’EDF a été comptabilisé en recettes du compte d’affectation spéciale « participations financières de l’Etat » (en 2007).

Sans préjudice d’observations que la Cour pourrait formuler à l’avenir sur cette importante opération, quelques remarques peuvent être faites sous l’angle patrimonial. La cession d’actifs d’EDF et son placement sur le CAS représentent une substitution d’actifs dont la rentabilité repose sur la différence entre le rendement du capital cédé et le coût de la ressource de trésorerie correspondante. De la même manière, le financement des loyers de PPP sur la durée du contrat ne paraît avantageux que si le taux net du placement (après prise en compte de la perte de dividendes et du coût de l’emprunt complémentaire) est supérieur au taux d’intérêt implicite du contrat.

III. une gouvernance a preciser

En termes d’appréciation générale des dispositifs d’intervention extra-budgétaire de l’Etat dans l’économie, le risque d’atteinte aux principes budgétaires (A) appelle une réflexion sur les modes de gouvernance associés à ces interventions (B).

A. un risque d’atteinte aux principes budgétaires

D’une manière générale, les interventions économiques extra-budgétaires de l’Etat.portent en elles-mêmes un risque d’atteinte aux principes budgétaires notamment ceux d’unité, d’universalité et d’annualité. Elles sont aussi susceptibles d’amoindrir la portée des avancées que la LOLF a introduites en termes de rénovation du pouvoir financier du Parlement, et leur développement tend à réduire la capacité de contrôle du Parlement.

1. Les réponses de la LOLF au risque de débudgétisation

La loi organique s’attache à renforcer la portée de l’autorisation parlementaire et à faciliter le contrôle du Parlement.

a. Le renforcement de l’autorisation parlementaire

L’affectation de ressources

L’affectation de ressources à une personne morale distincte de l’Etat, qui déroge aux principes d’unité et d’universalité, constitue un des moyens principaux de la débudgétisation dans la mesure où les opérations de dépenses et de recettes ne seront plus retracées dans le budget de l’Etat. Sous l’empire de l’ordonnance organique du 2 janvier 1959, celle-ci intervenait notamment par l’intermédiaire de la création de taxes parafiscales par le pouvoir réglementaire qui disposait de la compétence en la matière, en contradiction avec les dispositions de l’article 34 de la Constitution. Seule la perception de ces taxes au-delà du 31 décembre de l’année de leur création nécessitait une autorisation parlementaire.

La LOLF a modifié le régime juridique de la création de ces taxes. Aux termes de son article 2, « les impositions et taxes de toute nature ne peuvent être directement affectées à un tiers qu’à raison des missions de service public confiées à lui et sous les réserves prévues par les articles 34, 36 et 51. » L’article 34 dispose notamment que  « la loi de finances de l’année autorise, pour l’année, la perception des ressources de l’Etat et des impositions de toute nature affectées à des personnes morales autres que l’Etat. » L’article 36 prévoit que « l’affectation totale ou partielle, à une autre personne morale d’une ressource établie au profit de l’Etat ne peut résulter que d’une disposition de loi de finances. » Enfin, l’article 51 impose au Gouvernement de joindre au projet de loi de finances de l’année « une annexe explicative comportant la liste et l’évaluation par bénéficiaire ou catégorie de bénéficiaires, des impositions de toute nature affectées à des personnes morales autres que l’Etat ».

C’est donc désormais le Parlement qui peut seul affecter des taxes et impositions de toute nature, mais cette disposition n’a pas suffi à assurer la cohérence globale de ces transferts et leur maîtrise face aux enjeux des finances publiques, et notamment à la nécessaire préservation des recettes de l’Etat.

L’octroi de garanties

L’octroi de garanties, qui tend à devenir un moyen essentiel d’intervention économique extra-budgétaire, notamment en période de « rareté » de ressources budgétaires, appartient désormais, aux termes de l’article 34 de la LOLF, au domaine exclusif des lois de finances qui seules en autorisent l’octroi et en fixent le régime.

A l’occasion de la crise financière, qui a vu croître fortement le montant des garanties octroyées par l’Etat, le Parlement a ainsi été saisi sur l’ensemble des dispositifs.

L’effet de cette disposition se trouve renforcé par les apports de la comptabilité générale, qui fournit une information sur les engagements hors bilan dans l’annexe du compte général de l’Etat.

En comptabilité budgétaire, les appels en garantie sont des « crédits évaluatifs » au sens de la LOLF72, en raison du caractère aléatoire et obligatoire de cet engagement. L’article 10 de la LOLF prévoit que le ministre chargé des finances informe les commissions des finances de l’Assemblée nationale et du Sénat des motifs du dépassement et des perspectives d’exécution jusqu’à la fin de l’année.

b. Le contrôle parlementaire

La LOLF renforce le pouvoir de contrôle du Parlement en instaurant des documents budgétaires qui se veulent plus lisibles et plus sincères et en facilitant un meilleur contrôle de l’exécution budgétaire à l’occasion de l’examen de la loi de règlement.

La présentation du budget par missions et programmes

Présenté par missions, elles-mêmes déclinées en programmes, le budget de l’Etat est établi en fonction de politiques publiques. L’allocation des ressources à chacune d’entre elles est en principe clairement effectuée, sur la base d’objectifs auxquels sont associés des indicateurs de résultats.

Ceux-ci sont destinés à favoriser l’évaluation des performances de l’activité administrative encadrée par trois niveaux de responsabilité, les responsables de programme, les gestionnaires de BOP et les chefs d’unité opérationnelle.

Le renforcement du contrôle a posteriori

La LOLF entend également renforcer la portée du contrôle a posteriori en revalorisant l’examen et le vote de la loi de règlement.

L’examen des rapports annuels de performances et la confrontation des résultats atteints avec les objectifs doivent permettre au Parlement de comparer les écarts et d’en rechercher les causes. Il devrait également permettre d’analyser de façon rétrospective la qualité de la justification des crédits au premier euro.

La mise en œuvre de certains volets des politiques publiques s’effectue par l’intermédiaire de nombreux opérateurs73. Leur intégration dans les PAP qui détaillent leurs missions, non prévue par la loi organique, les actions auxquelles ils se rattachent et qui leur associent des objectifs et des indicateurs doit néanmoins permettre de les inclure dans la démarche de performance. La récapitulation et la justification par programme des crédits qui leur sont destinés, ainsi que la présentation des emplois des opérateurs qui contribuent aux programmes, concourent également à cette intégration.

Depuis le PLF 2007, un document budgétaire spécifique aux opérateurs est préparé chaque année, conformément à l’article 14 de la loi n° 2006-888 du 19 juillet 2006 portant règlement définitif du budget de 2005. Avec ce « jaune » budgétaire annexé au projet de loi de finances, il est prévu que le Parlement dispose d’un « rapport récapitulant, par mission et programme, l’ensemble des opérateurs ou catégories d’opérateurs, les crédits ou les impositions affectées qui leur sont destinées, ainsi qu’une présentation indicative du total des emplois rémunérés par eux ou mis à disposition par des tiers ».

Les progrès accomplis restent toutefois encore insuffisants.

Tant les travaux de la Cour que ceux de la Mission d’information relative à la mise en œuvre de la LOLF (Milolf) ont souligné que l’intégration des opérateurs dans la stratégie de performance voulue par la LOLF n’était « qu’embryonnaire ». Dans un rapport de 2008, la Milolf a notamment souligné que ceux-ci étaient « encore trop peu associés à la procédure budgétaire ».

Le même rapport contenait des recommandations concernant l’amélioration des informations à transmettre au Parlement :

- « Informer de façon motivée le Parlement de la création de chaque nouvel opérateur et évaluer préalablement la valeur ajoutée et les inconvénients de cette création.

- Fournir chaque année au Parlement un recensement et une évaluation des ressources fiscales affectées à chacun des opérateurs de l’État dans une annexe au projet de loi de finances, avec indication du montant total des sommes ainsi perçues. Envisager la possibilité d’intégrer l’ensemble des taxes affectées – et non seulement les affectations nouvelles – dans la norme de dépense.

- Présenter au Parlement un récapitulatif annuel de l’endettement des opérateurs de l’État, avec indication pour chacun du texte réglementaire autorisant son endettement, sa dette et le taux correspondant. Définir des règles encadrant le recours des opérateurs à l’emprunt.

- Intégrer pleinement les opérateurs dans la stratégie de performance des programmes de rattachement. Accompagner leur association à la définition de la stratégie de performance de l’obligation de rendre des comptes, au moyen d’indicateurs chiffrés, sur leur contribution aux résultats.

- Améliorer le niveau et de la qualité de l’information budgétaire et comptable par l’enrichissement du volet opérateurs des projets et rapports annuels de performances. »

Si ces recommandations présentent un caractère général, elles revêtent une importance toute particulière dans le cas d’un financement extra-budgétaire des opérateurs.

En 2009, la MILOLF est revenue sur le pilotage des opérateurs en mode LOLF pour souligner deux sources de progrès importantes, à savoir l'obligation depuis 2009 de présenter un document de performance au conseil d'administration lors du vote prévisionnel du budget de l'opérateur (document qui recense les objectifs, indicateurs et plans d’action pour l’année à venir) ainsi que la généralisation des contrats d'objectifs et de moyens entre l'Etat et ses opérateurs.

Néanmoins, la MILOLF soulignait encore la nécessité de mettre en cohérence les objectifs propres aux opérateurs avec ceux des programmes auxquels ils sont associés et de fiabiliser les indicateurs renseignés par les opérateurs. En outre, les grandes lignes de la mise en œuvre des contrats d’objectifs devraient être présentées dans les RAP, en les replaçant dans le contexte plus général de la contribution de l’opérateur à la performance du programme.

Les mêmes exigences de transparence et d’efficacité de la dépense doivent être appliquées aux dispositifs gérés par les opérateurs. En ce sens, l’information fournie dans les documents budgétaires doit être encore enrichie.

L’article 107 de la LFI pour 2010, introduit sur proposition de la commission des Finances de l’Assemblée nationale, va dans ce sens. Il prévoit en effet que l'annexe au PLF relative aux opérateurs de l'Etat présente « le montant des dettes des opérateurs de l'Etat, le fondement juridique du recours à l'emprunt et les principales caractéristiques des emprunts contractés, ainsi que le montant et la nature de leurs engagements hors bilan ».

Un dispositif de renforcement de la gouvernance des opérateurs a été présenté par le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l’Etat, le 3 décembre 2009. Ce dispositif repose sur la mise en place d’un pilotage stratégique par l’Etat, la fixation de règles de gestion transversales, notamment en termes de transparence comptable et financière. Des objectifs de qualité des comptes seront fixés dans la lettre de mission du dirigeant et la publication d’un rapport annuel (type entreprise publique) sur une base normée sera généralisée. Des règles de maîtrise des dépenses seront posées, notamment l’extension de la règle du 1 sur 2 à tous les opérateurs.

Les apports de la comptabilité générale

Aux termes de l’article 27 de la LOLF, les comptes de l’Etat doivent être réguliers, sincères et donner une image fidèle de son patrimoine et de sa situation financière. Conformément à l’article 58 de la même loi organique, la certification des comptes de l’Etat est annexée au projet de loi de règlement. Le principe de régularité, de sincérité et de fidélité a été étendu à l’ensemble des comptes des administrations publiques par le nouvel article 47-2 de la Constitution.

La tenue d’une comptabilité de droits et d’obligations complète les données de la comptabilité budgétaire qui ne peut rendre compte de la totalité des évènements affectant la gestion et le patrimoine de l’Etat. Cette comptabilité générale permet de mettre en regard des dettes les actifs constitués et de mieux apprécier les risques auxquels l’Etat est exposé. Elément de transparence financière indispensable à une vision de long terme des perspectives des finances publiques, elle représente une source d’informations essentielles pour mieux apprécier la portée des choix de gestion des pouvoirs publics.

La variation de la situation nette, différence entre les actifs et les passifs, d’un exercice sur l’autre, indique une amélioration ou, à l’inverse, une dégradation de la situation financière de l’Etat. Sous cet angle, tout supplément de dette dont la contrepartie n’est pas la constitution d’un actif de même valeur induit une dégradation de la situation financière.

La comptabilité patrimoniale produit des états financiers qui comprennent le bilan, le compte de résultat et l’annexe. Cette dernière apporte des explications sur le bilan et le compte de résultat et des informations sur les engagements hors bilan, en particulier les garanties octroyées. L’information sur les risques auquel l’Etat est exposé constitue un élément essentiel d’appréciation de la capacité de celui-ci à faire face à ses engagements futurs.

Enrichie notamment à la demande de la Cour, dans le cadre de sa mission de certification, l’annexe des états financiers relative aux comptes 2008 a ainsi revêtu une importance particulière dans le contexte de la crise économique et financière. Il en a été de même en ce qui concerne les comptes 2009 qui intègrent davantage l’effet des mesures du plan de relance.

D’une manière générale, les états financiers fournissent des données qui n’ont pas d’équivalent dans les documents budgétaires, qu’il s’agisse notamment de la valorisation des actifs immobiliers de l’Etat et de ses participations financières, ou des données relatives aux impôts et taxes affectés. Pour imparfaits que soient encore les états financiers présentés par le producteur des comptes, ainsi qu’en témoignent les réserves émises par la Cour des comptes dans chacun des actes de certification des comptes 2006 à 2009, l’information délivrée par ces états financiers permet une meilleure compréhension des enjeux de long terme attachés au pilotage des finances publiques.

Il faut aussi signaler le recensement, qui n’est pas encore achevé, des patrimoines affectés qui correspondent à des fonds dont l’Etat confie la gestion à des intermédiaires publics ou privés (Caisse des dépôts et consignations, Oséo, Natixis, Coface, Crédit foncier) dans le cadre de missions d’intérêt économique général. Leurs opérations sont regroupées au sein d’entités sans personnalité morale que l’Etat dote d’une trésorerie initiale, au besoin abondée ultérieurement. En contrepartie, il conserve le contrôle de ces actifs. Les droits dont il dispose à ce titre doivent être retranscrits dans ses comptes. Des progrès substantiels ont été accomplis à partir de 2008, en particulier avec la comptabilisation du compte des procédures publiques gérées par la Coface, du fonds d’épargne et des fonds de garantie Oséo. De nouveaux progrès sont attendus en 2010, notamment pour les 250 fonds gérés par la Caisse des dépôts et consignations et les fonds de garantie gérés par la CCR.

En termes d’information, le bilan de l’Etat doit comprendre les actifs de concession qui n’y sont pas encore comptabilisés.

2. Un risque d’atteinte aux principes budgétaires

Le respect de l’autorisation parlementaire et des principes essentiels du droit budgétaire que sont l’annualité, l’unité, l’universalité, la spécialité et, depuis la LOLF, la sincérité, est inséparable des prérogatives du Parlement en matière budgétaire. Le principe d’annualité se situe au cœur du pouvoir de contrôle de celui-ci, tandis que les principes d’unité et d’universalité ont pour finalité d’éviter les gaspillages de deniers publics et d’assurer la mise en commun des ressources de l’Etat afin d’en permettre la meilleure allocation possible.

Le principe d’unité requiert la présentation d’un document budgétaire unique tandis que le principe d’universalité suppose la présentation intégrale des recettes et des dépenses de l’Etat. A ce titre, il prohibe la contraction des recettes et des dépenses et s’oppose à l’affectation de recettes à certaines dépenses.

Si la LOLF prévoit des aménagements à ces principes pour les prélèvements sur recettes, les budgets annexes dont l’usage a été strictement limité, les comptes spéciaux74, les fonds de concours et les rétablissements de crédits, elle contient peu de dispositions de nature à véritablement restreindre les possibilités de débudgétisation qui portent atteinte aux grands principes du droit budgétaire.

Tel est notamment le cas de la constitution de patrimoines d’affectation gérés en dehors du budget de l’Etat (procédures COFACE, AFD, Fonds d’épargne par exemple) qui permettent de contourner au moyen de ces « comptes réservoirs » la nécessité de recourir à l’autorisation parlementaire.

Outre qu’elle contrevient à la règle de la justification au premier euro, l’affectation de taxes, qui se substituent à des crédits budgétaires, n’est pas sans soulever des questions au regard du principe d’annualité. Le Parlement a certes récupéré le pouvoir d’autoriser cette affectation à un tiers. Mais le simple changement de régime juridique ne résout pas totalement la question. Par ailleurs, la multiplication des affectations de taxes tend à relativiser la notion d’universalité des recettes.

Par construction, la LOLF ne permet pas d’avoir une vision consolidée des interventions extra-budgétaires. Alors qu’elle entend définir l’action de l’Etat en termes de politiques publiques, la multiplication des dispositifs d’intervention extra-budgétaire ne permet pas au Parlement de disposer d’une vision consolidée de ceux-ci. Si des informations, souvent assez complètes, sont disponibles dans diverses annexes budgétaires, elles sont en quelque sorte diluées et ne permettent pas d’en apprécier pleinement la portée.

Bien qu’apportant un complément précieux d’information financière, la comptabilité générale de l’Etat ne décrit encore qu’imparfaitement l’impact pour l’Etat de ses interventions extra-budgétaires. En outre, tant que n’existera pas une consolidation des comptes de l’Etat et des organismes qui lui sont liés, la vision comptable ne pourra pas pleinement rendre compte de la situation financière globale de la sphère étatique. Enfin, il subsistera nécessairement des interventions d’entités extérieures au périmètre de consolidation.

3. Des modalités de contrôles différentes

Le contrôle parlementaire des différentes interventions extra-budgétaires est rendu plus complexe par le foisonnement des dispositifs et l’absence de vision globale qui en résulte.

a. Une perte relative de maîtrise pour le Parlement

L’intervention économique de l’Etat par des moyens extra-budgétaires est largement le fait de l’exécutif et de l’administration. Le pilotage de ces interventions échappe aux modalités de contrôle telles que définies par la loi organique.

En dépit des efforts consentis pour intégrer l’action des opérateurs dans la logique de performance propre à la LOLF, celle-ci apparaît encore trop souvent formelle et peu aboutie. En outre, l’Etat dispose, au-delà des opérateurs, de relais divers de son action, notamment par l’intermédiaire du secteur public financier (Crédit foncier, CCR, CDC), qui ne s’inscrivent pas, par nature, dans cette logique.

De fait, les modalités de contrôle parlementaire sont nécessairement différentes à l’égard de ce type d’intervention. S’agissant du groupe de la Caisse des dépôts et consignations, le contrôle parlementaire repose sur la Commission de surveillance et le Parlement ne saurait être considéré comme manquant d’informations sur la gestion du groupe.

La présence de parlementaires au conseil d’administration de nombre d’organismes constituant des vecteurs d’intervention extra-budgétaire assure également une information et un contrôle sur l’action de ces organismes. De façon paradoxale, ce contrôle peut être parfois plus approfondi que celui qui peut être exercé en matière budgétaire.

Le foisonnement des dispositifs et la création de nouveaux instruments appellent toutefois une attention particulière afin de permettre au Parlement de conserver suffisamment de maîtrise en ce qui concerne l’affectation de ressources aux politiques publiques.

b. L’exemple significatif de l’emprunt national

En principe, l’intégralité des crédits ouverts au titre de l’emprunt national sera versée au cours de l’année 2010 aux différents organismes gestionnaires dans le cadre d’une gouvernance spécifique. Les nouveaux programmes ont donc vocation à être supprimés à la fin de l’année. Cette disparition marquera la fin du contrôle parlementaire au titre de la LOLF.

Elle constitue également un aménagement, non prévu par la LOLF, du principe d’annualité dans la mesure où les crédits, qui ont été ouverts en AE = CP, seront budgétairement consommés sur un seul exercice, alors même que leur consommation réelle s’étalera dans le temps, au fur et à mesure des décisions d’octroi des financements aux projets retenus.

Plusieurs amendements parlementaires75 adoptés avec l’accord du Gouvernement sont toutefois venus renforcer, par rapport au projet présenté par ce dernier, la gouvernance ainsi que l’information et le contrôle du Parlement sur la mise en œuvre des investissements d’avenir. Ce souci est notamment motivé par le fait que tous les crédits ouverts dans le budget de l’Etat seront consommés dès 2010 par leur transfert aux organismes attributaires alors que l’utilisation concrète des fonds s’étalera sur plusieurs années.

Les présidents de l’Assemblée nationale et du Sénat avaient adressé au Premier ministre, le 3 février, une lettre commune indiquant leur souhait d’une étroite association du Parlement à la gouvernance des investissements d’avenir, et notamment la transmission préalable des projets de conventions. En application de ce principe, les 34 projets de conventions validés (cf. infra) ont été transmis aux commissions compétentes des deux assemblées. Ils confirmaient également l’intention du Parlement d’évaluer périodiquement et systématiquement les investissements retenus.

La durée de ces conventions a été limitée à dix ans. Les fonds non consomptibles seront reversés au budget de l’Etat à l’exception des 7,7 Md€ qui, dans le cadre des initiatives d’excellence, seront acquis aux fondations universitaires après une période probatoire. Il s’agit ainsi, pour ces dernières, d’une rente perpétuelle.

Ensuite, la loi institue le comité de surveillance des investissements d’avenir, comprenant notamment quatre députés et quatre sénateurs76 et chargé du suivi et de l’évaluation ex post du programme d’investissements. Son rapport annuel est remis au Premier ministre ainsi qu’à chaque assemblée parlementaire.

Enfin, le Gouvernement doit présenter chaque année, en annexe du projet de loi de finances initiale, deux rapports.

Le premier qui sera intégré au rapport économique, social et financier (RESF) décrit les conséquences sur les finances publiques (recettes, dépenses, déficit et dette) de la mise en œuvre des investissements d’avenir. Cette information du Parlement est apparue nécessaire compte tenu des montants en jeu, de l’étalement des dépenses sur plusieurs années, de la complexité des modalités de financement (participation de nombreux organismes tiers aux statuts divers), de la multiplicité des formes d’intervention dans l’économie (subventions, dotations en capital, prêts, avances remboursables, etc.) ainsi que des retours sur investissement attendus (dividendes, redevances).

Le second rapport, nouveau « jaune » budgétaire, sera consacré à la mise en œuvre par les opérateurs et l’évaluation des programmes d’investissement. Il devra présenter, chaque année jusqu’en 2020, pour chaque mission concernée, les investissements prévus ou en cours de réalisation, les modalités de financement mises en œuvre, les objectifs poursuivis et les résultats obtenus ainsi que le rôle des organismes gestionnaires, la mise en œuvre des conventions et le contrôle par l’Etat de la qualité de gestion de ces organismes. La création de cette annexe budgétaire revêt un enjeu essentiel pour l’information du Parlement puisque les nouveaux programmes ont vocation à disparaître à la fin de 2010, les crédits devant être décaissés dans leur intégralité par l’Etat avant la fin de l’année. A compter de 2011, les documents budgétaires ne porteront plus trace des 35 Md€ des crédits ouverts en LFR(77) alors même que l’utilisation concrète des fonds par les opérateurs se poursuivra.

Nonobstant ces dispositions particulières, une très grande latitude de gestion des crédits pluriannuels, particulièrement en ce qui concerne l’allocation des ressources aux différents projets, est laissée au Commissaire général à l’investissement. Il contrôle ainsi le calendrier d’ouverture de chaque tranche de crédit ainsi que leur affectation. Il peut proposer au Premier ministre, après information du Parlement, de redéployer des crédits dédiés à une action vers une autre action du même opérateur, voire vers un autre opérateur, en cas d’emploi sous-optimal ou partiel de ceux-ci. Cette modalité de gestion des crédits budgétaires constitue une dérogation inédite aux principes de la LOLF après celle de l’affectation de ressources d’emprunt levées par l’Etat à des opérateurs.

B. Des modes d’intervention qui appellent une reflexion sur les dispositifs de gouvernance

1. Un mode de gouvernance centré sur l’évaluation économique

La mécanique d’endettement à l’œuvre pour les modes d’intervention extra-budgétaire les plus récents pose de façon aiguë la question de la gouvernance et de l’évaluation de ces dispositifs. Tous ces nouveaux mécanismes nécessitent une organisation spécifique du contrôle budgétaire et du contrôle de la performance.

Le caractère bénéfique ou non de ces interventions dépend de la nature du retour sur investissement obtenu à terme. Il implique un mode efficace de sélection des investissements et une mesure rigoureuse de leur rentabilité. L’exemple de l’emprunt national est à cet égard significatif.

La place importante réservée au suivi et à l’évaluation des investissements d’avenir est à noter. Au-delà de l’évaluation ex ante des projets dans le cadre de la procédure d’instruction-sélection et des indicateurs de suivi qui devront être transmis à l’Etat sur une base trimestrielle, une évaluation économique des actions financées devra être mise en place par les opérateurs.

Si ces dispositions relatives à l’évaluation paraissent vertueuses, sous réserve de l’examen des conditions dans lesquelles elles seront mises en œuvre, elles mettent en évidence la portée de la délégation consentie par le Parlement en termes de contrôle. Circonscrite au cas d’espèce, cette délégation revêt un caractère dérogatoire. Si elle devait être étendue, elle pourrait conduire à terme à une régression du pouvoir de contrôle du Parlement.

Par ailleurs, le dispositif d’évaluation mis en place pour l’emprunt national n’a pas d’équivalent pour les autres types d’intervention extra-budgétaire.

2. Une approche consolidée

Plus l’Etat crée dans sa mouvance de structures publiques auxquelles il affecte des ressources fiscales, voire des ressources d’emprunt, ou qu’il autorise à emprunter avec ou sans sa garantie sur les marchés, plus la nécessité d’avoir une vision consolidée de ses actifs et de ses passifs se fait sentir.

C’est pour cette raison que la Cour a présenté, dans son rapport de mai 2010 sur les concours publics aux banques, un bilan financier en comptabilité budgétaire et un bilan patrimonial78.

C’est pour la même raison que dans l’acte de certification des comptes de l’Etat existe depuis 2006 une réserve sur la valeur immobilisée des opérateurs dans ses participations financières et que la Cour plaide pour que ne soit pas abandonnée la perspective d’établir des comptes consolidés de l’Etat, une fois que les comptes annuels de l’Etat auront atteint une qualité comptable suffisante. Comme le souligne le cadre conceptuel du recueil des normes comptables de l’Etat, l’Etat utilise indirectement les ressources des entités dotées de la personnalité juridique et placé sous son contrôle et se trouve en fait ou en droit indirectement responsable de leurs obligations. Seuls des comptes consolidés ou combinés permettraient d’obtenir une image plus complète de l’ensemble des droits et obligations de l’Etat et des entités qu’il contrôle.

Cette approche paraît plus pertinente que celle consistant pour l’Etat à développer une approche actif / passif lui permettant de mieux évaluer la pertinence et la portée de ses choix. De par la structure déséquilibrée de son bilan, il pourra tout au plus externaliser ses interventions dans des structures plus adaptées pour mettre en œuvre une gestion actif-passif. Telle est, par exemple, la vocation du FSI. Telle est aussi l’ambition de l’emprunt national

Selon cette approche, les choix d’investissement, tout particulièrement lorsqu’ils sont financés par de la dette, doivent être appréhendés en fonction de la qualité des actifs qui en sont la contrepartie, des recettes que ceux-ci sont susceptibles de générer et des risques dont ils peuvent être porteurs. Le bilan des allocations stratégiques de placement sur les marchés du FRR doit cependant inciter à la prudence quant à la capacité de trouver des projets d’investissement dans la sphère publique non marchande susceptibles de dégager un taux de rendement interne sans risque qui permette d’amortir la dette.

conclusion de la deuxieme partie

Les dispositifs d’intervention dans l’économie par des moyens extra-budgétaires sont de poids inégal mais aussi de nature hétérogène. Il est dès lors impossible d’en constituer un agrégat unique ou d’établir des comparaisons rigoureuses entre eux.

L’impression d’une forte progression de ce type d’interventions est tout particulièrement liée à la mobilisation des garanties dans le cadre du dispositif de concours financiers aux établissements de crédit. Si le recours à ce procédé ancien tendait à diminuer jusqu’à la crise financière, l’année 2009 a marqué une rupture avec, notamment, un fort accroissement du montant des dettes garanties.

D’une manière générale, les éléments conjoncturels, liés au plan de relance de l’économie, ont également contribué à accroître, de façon en principe temporaire, le recours à des dispositifs extra-budgétaires, en particulier dans le but d’accroître le volume des investissements publics, de garantir le financement des petites et moyennes entreprises et de soutenir les exportations. La direction du budget estime que, corrigé de ces éléments conjoncturels à caractère transitoire, le recours à ces interventions n’a pas progressé.

La création du FSI s’inscrit dans l’action déjà ancienne que conduit le groupe CDC en direction des entreprises. Il participe également de l’action de l’Etat en faveur des petites et moyennes entreprises et des entreprises de taille intermédiaire, notamment en matière de soutien à l’innovation. Pour autant, l’ensemble des mesures extra-budgétaires ne représente qu’une part relativement faible des aides d’Etat aux entreprises.

La prise en compte de l’emprunt national peut cependant conduire à nuancer l’appréciation portée par la direction du budget sur l’absence de progression des interventions extra-budgétaires, dès lors que les dispositifs retenus pour en utiliser le produit, qui ne relèvent pas d’une action ou d’une logique conjoncturelle, se traduiront par des décaissements de l’ordre de 4 à 5 Md€ par an entre 2010 et 2014. D’un niveau légèrement supérieur au montant des investissements civils de l’État financés sur ressources budgétaires, les investissements d’avenir permettront de doubler le montant de ces investissements sur la période.

Si les risques associés aux dispositifs extra-budgétaires en vigueur apparaissent limités, notamment en raison des collatéraux associés aux dettes garanties, le recours à ces modes d’intervention mérite une attention particulière compte tenu de l’impact différencié qu’ils peuvent avoir sur la norme de dépenses et l’évolution de la dette publique. La typologie de leur impact budgétaire et comptable met en évidence l’intérêt que peuvent présenter des modes d’intervention fondés sur des actifs créateurs de valeur. Toutefois certains d’entre eux s’accompagneront de charges futures ou se traduiront par un surcroît d’endettement.

Le développement de dispositifs extra-budgétaires soulève la question de leur gouvernance. Si la LOLF contient des dispositions qui préservent les pouvoirs du Parlement en matière d’octroi de garanties et d’affectation de recettes, le foisonnement de dispositifs dérogeant aux grands principes budgétaires appelle de nouvelles modalités de contrôle afin de préserver la maîtrise du Parlement sur l’affectation des ressources aux politiques publiques.

A cet égard, l’exemple de l’emprunt national, pour lequel des modalités de contrôle inédites ont été mises en place, doit retenir l’attention. A l’importance des dérogations aux principes d’unité, d’universalité et d’annualité budgétaires correspond un dispositif original destiné à rendre compte de façon précise de l’utilisation des fonds et des évaluations qui seront réalisées, notamment en termes de retour sur investissement. La portée concrète de ce dispositif devra, le moment venu, être appréciée.

conclusion generale

Les interventions de l’Etat dans l’économie par des moyens extra-budgétaires se caractérisent par leur grande diversité et la multiplicité des intervenants. Certains dispositifs, tels ceux gérés par la Caisse des dépôts et consignations, sont anciens. Il en va de même des dispositifs de soutien financier des exportations, mis en place depuis plusieurs décennies, de la réassurance de la Caisse centrale de réassurance avec la garantie de l’Etat ou du mécanisme des concessions auquel l’Etat a eu recours depuis plusieurs siècles. D’autres sont plus récents et originaux à l’instar des véhicules créés à l’occasion de la crise financière pour apporter des concours financiers aux établissements de crédit ou des dispositifs retenus dans le cadre de l’utilisation du produit de l’emprunt national.

Le recours à ces modes d’intervention peut poursuivre des objectifs légitimes, qu’il s’agisse de créer des structures publiques dédiées à une mission spécifique, de rechercher un effet de levier au moyen de garanties ou de partenariats ou de faire financer des infrastructures par l’usager. Leur utilisation dans une finalité conjoncturelle n’a rien de critiquable dès lors qu’il s’agit d’accroître le potentiel d’intervention de la puissance publique dans des circonstances de crise.

La crise économique et financière a ainsi conduit l’Etat à mobiliser fortement l’instrument des garanties, de façon directe ou par l’intermédiaire d’Oséo ou de la CCR, pour assurer le financement de l’économie. Les instruments extra-budgétaires ont également été largement utilisés dans le cadre du plan de relance. Conjuguée avec la mise en place de dispositifs exorbitants du droit commun pour l’utilisation du produit de l’emprunt national, cette action conjoncturelle a contribué à donner l’impression d’une tendance à l’accroissement du champ des interventions extra-budgétaires.

A cet égard, l’enquête conduit à souligner particulièrement les points suivants :

1. La notion d’interventions extra-budgétaires n’est en elle-même pas très facile à cerner. La multiplicité des dispositifs et la grande variété des intervenants rendent difficile d’en donner une définition générale. Toutefois l’intervention extra-budgétaire peut être entendue comme ne s’accompagnant pas d’un flux de crédits budgétaires ou, en dépit de l’existence de flux budgétaires, comme permettant de s’affranchir des principes d’annualité, d’unité et d’universalité, à l’instar du mécanisme retenu pour l’emprunt national.

2. Les dispositifs évoqués dans le rapport, qui se rapportent aux mesures visant à développer l’investissement public, à stimuler l’investissement privé par des dispositifs en faveur des entreprises, à encourager l’innovation et à garantir le financement de l’économie, constituent un ensemble hétérogène dont la cohérence n’apparaît pas de manière évidente. En conséquence, il ne peut être aisément analysé sous un angle quantitatif, en l’absence d’un compteur unique permettant d’agréger les données et de mesurer la progression ou la régression des interventions dans le temps. Il est nécessaire de recourir à une pluralité de compteurs.

3. Les interventions extra-budgétaires dans l’économie ne font pas l’objet d’une politique globale conduite par l’Etat. Le recours aux divers modes d’intervention apparaît très largement circonstanciel et ne semble pas relever d’une doctrine ou d’un dessein particuliers.

4. Bien que la direction du budget estime avoir une visibilité sur l’ensemble des moyens d’interventions mentionnés, les interventions extra-budgétaires dans l’économie manquent de lisibilité et font l’objet d’une évaluation insuffisante.

5. En faisant abstraction du recours massif aux garanties lors de la crise financière et de la mobilisation de dispositifs d’interventions extra-budgétaires dans le cadre non pérenne du plan de relance, les éléments réunis au cours de l’enquête ne conduisent pas à penser qu’il y ait une tendance avérée à l’accroissement du champ des interventions extra-budgétaires dans l’économie.

6. Ce jugement doit cependant être doublement nuancé. D’une part, en l’absence d’un instrument unique de mesure pour l’ensemble des modes d’intervention extra-budgétaire, cette appréciation est davantage qualitative que quantitative. D’autre part, le caractère conjoncturel de l’accroissement des dispositifs extra-budgétaires ne sera pleinement avéré que si l’on assiste bien à un reflux à brève échéance.

7. Les enjeux financiers attachés à ces interventions sont par ailleurs très inégaux, de même que les risques qui leur sont associés. La constitution de sûretés en contrepartie des nouvelles garanties accordées, la gestion à l’équilibre des procédures COFACE paraissent limiter les risques en la matière. Les soutiens aux entreprises accordés par des moyens extra-budgétaires (2 Md€ d’apports de fonds propres et 800 M€ d’aide à l’innovation en 2009) représentent une part très minime de l’ensemble des aides de l’Etat aux entreprises évaluées à 45 Md€ par la direction du budget et constituées principalement par des allègements de charges et de fiscalité.

8. Un défaut majeur des interventions extra-budgétaires de l’Etat est de déroger aux grands principes du droit budgétaire, notamment ceux de l’annualité, de l’unité et de l’universalité. Si la mise en place de ces dispositifs résulte, en règle générale, de décisions soumises à l’approbation du Parlement, ces interventions permettent de s’affranchir en partie de toute autorisation parlementaire postérieurement à cette approbation.

Dans ces conditions, la question de la gouvernance et de l’évaluation de ces dispositifs est centrale. Des progrès majeurs ont certes été accomplis ces dernières années notamment avec l’adoption d’une comptabilité patrimoniale permettant une meilleure connaissance des actifs et des passifs et avec les dispositions de la LOLF relatives aux garanties, pour lesquelles une autorisation préalable par le Parlement est désormais requise.

Une approche consolidée est indispensable. Sur le plan comptable, elle est assurée par la comptabilité nationale. Elle doit s’étendre à l’harmonisation des méthodes utilisées pour la sélection des investissements et la mesure de leur rentabilité. Les dispositifs d’évaluation et de contrôle revêtent une importance cardinale. C’est notamment le cas pour les modes d’intervention extra-budgétaire les plus récents (SPPE, dispositifs associés à l’emprunt national), qui se sont traduits par un endettement important, et ne pourront être appréciés qu’en fonction de l’effet de levier et du retour sur investissement obtenus. Les procédures mises en place dans le cadre de l’emprunt national fournissent à cet égard un exemple intéressant. Leur portée devra être examinée le moment venu.

9. Le développement éventuel de nouveaux dispositifs appelle une vigilance particulière quant aux risques de contournement de la norme de dépenses et de création de véhicules présentant un caractère déconsolidant vis-à-vis de la dette publique. Dans les circonstances actuelles, il ne faudrait pas que la mécanique extra-budgétaire conduise à accroître l’endettement de l’Etat. Face à ces risques, l’engagement d’une réflexion sur l’articulation des différents modes d’intervention budgétaires, extra-budgétaires et fiscaux paraît le meilleur moyen de se prémunir contre leur réalisation. Plus l’Etat développe des mécanismes déconsolidants ayant pour effet de sortir des dispositifs du budget de l’Etat ou de s’affranchir de règles budgétaires, plus il doit avoir une vision consolidée de ses risques.

1 Source : comptabilité générale de l’Etat.

2 L’AFITF a été créée en 2004.

3 La Cour a critiqué ce circuit de financement et a recommandé la suppression de l’Agence.

4 VNF a été créé par l’article 124 de la loi de finances n°90-1168 pour 1991.

5 Source : rapport financier 2009.

6 Instaurée par l’article 124 de la loi de finances pour 1991.

7 Cette subvention a été abondée d’une enveloppe « Plan de relance » de 50 M€.

8 Source : le « jaune » budgétaire consacré aux Agences de l’eau annexé au projet de loi de finances pour 2010.

9 La jurisprudence du Conseil constitutionnel les identifie comme des taxes fiscales et non comme des redevances administratives.

10 Source : Jaune « opérateurs » annexé au PLF 2010.

11 Voir tableau page 9

12 L’Agence a été créée par la loi n° 2003-710 du 1er août 2003 d’orientation de programmation pour la ville et la rénovation urbaine.

13 Les paiements pourront perdurer jusqu’en 2018.

14 Engagement résultant de la loi du 5 mars 2007 sur le droit au logement opposable

15 Application de l’avenant du 27 juin 2007 à la convention du 10 septembre 2003

16 Dans le cadre du plan de relance, l’agence a bénéficié de crédits additionnels afin de favoriser la rénovation de logements de propriétaires occupants modestes, de copropriétés dégradées, et de logements locatifs faisant l’objet d’opérations programmées de lutte contre l’habitat indigne dans les quartiers anciens dégradés. Ces crédits s’élevaient à 200M€ dont 133M€ ont été versés en 2009. 

17 Hors l’hypothèse d’une participation publique partielle aux investissements.

18 Le recours à la concession est bien moindre dans les domaines ferroviaire et aéroportuaire que dans le domaine autoroutier.

19 Le contrat s’accompagne de la prise en charge d’une mission globale incluant l’entretien, la maintenance, l’exploitation ou la gestion voire, le cas échéant, d’autres prestations de services concourant à l’exercice, par la personne publique, de la mission de service public dont elle est chargée.

20 Pour les collectivités locales, ils représentaient 217 M€ en 2009 contre 430,9 M€ en 2008.

21 Pour un total de 12,37 Md€ d’investissements opérationnels pour l’ensemble du groupe (source rapport de gestion 2009).

22 Voir infra.

23 Il s’agit d’Allianz, d’AXA, du groupe Caisse d’Epargne, de Groupama, de Natixis et de la Société générale.

24 Le traité d’apport au FSI des participations de l’Etat et de la CDC, qui en précise le contenu et les modalités, a été ratifié par l’Assemblée générale des actionnaires du 15 juillet 2009.

25 50 % du FEMEA rang 2 sont apportés par le FEMEA, les autres 50% étant souscrits par les 5 équipementiers automobiles et le FSI.

26 Qualium est une société de gestion qui gère plus de 1,5 Md€ pour 10 fonds communs de placement à risques et le portefeuille résiduel de CDC Entreprises Capital Investissement. Elle prend des participations allant de 20 M€ à 75 M€ dans des entreprises françaises non cotées, valorisés entre 40 et 250 M€ et présentant un fort potentiel de développement en France et à l’international. En 2008, les investissements se sont élevés à 216 M€. Le montant global du portefeuille atteint 750 M€, concerne 18 entreprises et représente un chiffre d’affaires de 4 Md€ et plus de 40 000 emplois.

27 L’ensemble du dispositif est suivi dans le cadre du programme 190 « recherche dans les domaines de l’énergie, du développement et de l’aménagement durables ».

28 Le FUI est également dénommé  « fonds de compétitivité des entreprises ». Le fonds de compétitivité des entreprises n’intervient pas uniquement dans le cadre des pôles de compétitivité. Ses interventions s’effectuent sous forme de subventions, à un taux de 30 % pour les entreprises et couvrant au maximum les coûts marginaux pour les laboratoires publics.

29 Source : Commissariat général à l’investissement. Cette décomposition a été affinée par rapport à celle présentée lors du dépôt du PLFR.

30 La dotation ne peut être consommée ; seuls les éventuels revenus tirés de son placement peuvent être dépensés par l’organisme attributaire.

31 Auxquels s’ajoute un nouveau programme au sein du compte de concours financier « Prêts et avances à des particuliers et à des organismes privés » ; la LFR procède également à une augmentation des dépenses et recettes du compte d’affectation spéciale « Participation financière de l’Etat ».

32 ANR, CDC, ADEME, OSEO, CEA, ONERA, ANAH, CNES, ANRU, ANDRA.

33 La part des crédits consacrés à l’évaluation pourra varier, selon l’importance de l’action concernée, de 0,03 % à 0,5 %.

34 Cf. décret 2010-80 du 22 janvier 2010 relatif au commissaire général à l’investissement.

35 Source : annexe au projet de loi de finances pour 2010 relative à l’effort financier de l’Etat en faveur des petites et moyennes entreprises.

36 Le cadre juridique des opérations effectuées par la Coface avec la garantie de l’État est défini par un ensemble de dispositions législatives et réglementaires codifiées dans le code des assurances.

37 Cette dernière n’a cependant pas été utilisée depuis plusieurs années et est en voie d’extinction.

38 Le différentiel de taux a atteint 100 points de base à la fin de 2008 et est demeuré, au moins jusqu’à la fin du 1er semestre 2009, à un niveau moyen de 40 points de base par rapport au taux des émissions non sécurisées que les banques pouvaient effectuer sur le marché. Cette différence a représenté un avantage de financement pour les établissements concernés de plusieurs centaines de millions d’euros.

39 Les remboursements intervenus depuis le début de l’année 2010 s'élèvent à 2,8 Md€ (1,6 Md€ de titres supersubordonnés et 1,2 Md€ d'actions de préférence). Un remboursement de 0,6 Md€ d'actions de préférence est prévu pour le 15 octobre 2010.

40 Hors manques à gagner liés à la déductibilité fiscale des titres super-subordonnés, à la réduction du prélèvement sur le fonds d’épargne et au coût complet de la Médiation du crédit.

41 Voir sur ce point le rapport relatif à la mise en œuvre du plan de relance réalisé par la Cour au titre de l’article 58-2 de la LOLF, transmis à la commission des finances en juillet 2010.

42 Dans son rapport sur la mise en œuvre du plan de relance (juillet 2010), la Cour a relevé que l’effet relance était en réalité décalé dans le temps.

43 En outre, 200 M€ étaient prévue pour GDF-Suez, classée, pour la présentation du plan de relance, parmi les entreprises publiques malgré sa privatisation de juillet 2008.

44 Voir sur ce point le rapport relatif à la mise en œuvre du plan de relance réalisé par la Cour des comptes au titre de l’article 58-2 de la LOLF.

45 Une dotation de 25,8 M€ a été versée à l’Agence française de développement au bénéfice de l’Outre-mer, avec un objectif d’encours garanti de 220 M€.

46 Inspirée par un projet britannique similaire, la France a décidé d’introduire, à titre exceptionnel, un prélèvement fiscal sur les bonus versés en 2010 au titre de 2009. La taxe s’élève à 50% du montant attribué au-delà de 27 500 €. Dans le projet de loi de finances rectificative, le produit net de cette taxe était affecté dans la limite de 270 M€ au fonds de garantie des dépôts en vue de financer le relèvement du niveau de couverture des dépôts de 70 000 à 100 000 € d’ici le 31 décembre 2010, le solde (90 M€) étant versé au budget général afin de couvrir la perte de recettes pour l’Etat résultant de la déductibilité de cette taxe du résultat imposable des établissements de crédit et entreprises d’investissements concernés.

47 En raison du moindre rendement de la taxe sur les bonus (voir infra).

48 Ces entreprises en difficultés sont suivies dans le cadre du Comité Interministériel de Restructuration Industrielle piloté par la DGT ou par les Comités Départementaux d’Examen des problèmes de Financement des entreprises-CODEFI, en fonction des enjeux économiques.

49 La Caisse centrale de réassurance (CCR) est une société anonyme détenue à 100 % par l’Etat qui, à côté d’activités concurrentielles représentant environ un tiers de son chiffre d’affaires, gère des opérations avec garantie de l’Etat (des « gestions »). La garantie de l’Etat fait l’objet d’une rémunération et ne peut être mise en jeu que lorsque, au cours d’une année, le montant des indemnités pour sinistres restant à la charge de la CCR dépasse 90 % de la réserve spéciale et de la provision d’égalisation constituée dans ses comptes au titre du risque concerné.

50 Dans son article 125 dont les modalités d’application sont décrites dans le décret n°2009-246 du 3 mars 2009 « en vue de définir les modalités d’octroi de la garantie de l’Etat aux opérations de réassurance de certains risques d’assurance-crédit effectuées par la Caisse Centrale de réassurance ».

51 Axa Assurcrédit et CESCE participent également aux dispositifs pour de petits montants en ligne avec leur part de marché.

52 Cf. la note de la DGTPE pour le ministre en date du 15 janvier 2009 portant sur le « décret et avenant à la convention Etat-CCR, fixant les modalités d’octroi de la garantie de l’Etat à la CCR pour certains risques d’assurance-crédit. »

53 Source : M. Eric Lenoir, directeur des risques pour l’Europe du Sud d’Atradius – commission des finances du Sénat – séance du 8 avril 2009.

54 Voir sur ce point le rapport relatif à la mise en œuvre du plan de relance réalisé par la Cour des comptes au titre de l’article 58-2 de la LOLF.

55 Un montant de 2,3 Md€ d’AE et de 4,1 Md€ de CP sera par ailleurs ouvert en 2010 au titre du plan de relance.

56 Lorsque l’intégralité des fonds aura été affectée aux lauréats (taux d’intérêt de 3,413 %).

57 Bien qu’il ne s’agisse pas d’un actif au sens des normes comptables de l’Etat.

58 La loi du 11 juin 1842 relative à l’établissement des grandes lignes de chemin de fer prévoyait que l'Etat achète les terrains et procède aux expropriations d'utilité publique, construise le ballast et toute l'infrastructure (ponts, tunnels...) et que les compagnies concessionnaires posent les rails, exploitent les lignes pour. 99 ans au bout desquels tout doit devenir propriété nationale.

59 Ce sont le fonds national de garantie des calamités agricoles (FNGCA) des articles L. 431-11, R. 431-33 et suivants du code des assurances, depuis 1964 ; le fonds de compensation des risques de l’assurance construction (FCAC) des articles L. 431-14, R. 431-48 et suivants du code des assurances, depuis 1982 ; le fonds de prévention des risques naturels majeurs (FPRNM) des articles L. 561-1 et suivants du code de l’environnement, depuis 1995 ; le fonds de garantie des risques liées à l’épandage agricole des boues d’épuration urbaines ou industrielles (FGRE) des articles L. 425-1, R. 424-1 et suivants du code des assurances, instauré fin 2006 ; enfin, le fonds de sécurisation du crédit interentreprises (FSCI) instauré par l’article 21 de la LFR du 20 avril 2009 et son décret d’application n° 2009-527 du 12 mai 2009, instituant le dispositif CAP + de couverture par l’Etat de risques d’assurance-crédit en France qui ne sont pas assurés par le marché.

60 Cette garantie s'éteindra avec le remboursement du prêt qui aura lieu pour l'essentiel en avril 2011.

61 D'autres garanties significatives non rémunérées ont été accordées par l'Etat dans le domaine social : par exemple, le fonds de garantie de l’accession sociale à la propriété (FGAS) pour 34 Md€ et l’UNEDIC pour 2,2 Md€.  

62 La garantie donnée par la dernière LFR pour 2008 à hauteur de 6,30Md$ sur le portefeuille de produits financiers que détenait sa filiale de rehaussement de crédits, Financial Security Assurance (FSA) n’est pas comptabilisée sous le plafond des refinancements garantis.

63 Le taux atteint 60 % si l’entreprise sous-traite à un laboratoire public.

64 Un rapport du Conseil des prélèvements obligatoires a estimé que le CIR coûtait cher sans atteindre véritablement son objectif qui est d’accroître efficacement l’investissement en R&D des entreprises françaises.

65 Les soutiens budgétaires apportés par le fonds de compétitivité des entreprises et la direction générale de l’aviation civile ont représenté quant à eux 620 M€ en 2009.

66 Février 2008.

67 A l’exception de l’assurance prospection pour laquelle les entreprises paient une prime annuelle.

68 Les autres sont : Société produits chimiques Ugine Kuhlmann, Etablissement Public d'Aménagement de la Défense – EPAD, Société imprimerie nationale, Société Immobilière de la Guyane – SIGUY, Centre d'Information et de Documentation sur le Bruit - CIDB, Société Française du Tunnel Routier du Fréjus – SFTRF.

69 Dans une hypothèse médiane, le respect de cette norme imposerait une croissance de la ressource de dépôts du fonds d’épargne de 12 Md€ à l’horizon 2014 et de 48 Md€ à l’horizon 2020.

70 En dépit de l’existence du ratio précité et des dispositions de l’article L. 221-7 III du code monétaire et financier qui confèrent un caractère « prioritaire » à l’emploi des sommes centralisées pour le financement du logement social.

71 Cette enveloppe porte pour 7 Md€ sur des infrastructures de transport et pour 1 Md€ sur la modernisation de l’immobilier universitaire. Les dossiers validés par le comité des engagements du fonds d’épargne s’élevaient à plus de 2,4 Md€ fin 2009.

72 Seule exception au caractère limitatif des crédits

73 En 2010, 643 organismes, de taille et de statut très variés, en charge de missions de service public sont considérés comme opérateurs de l’Etat.

74 Le Conseil constitutionnel a estimé que les comptes spéciaux n’ont ni pour objet ni pour effet de faire échapper des recettes et des dépenses de l’Etat à l’approbation du Parlement dans le cadre de la loi de finances. (CC 30 décembre 1997, loi de finances pour 1998, 395 DC)

75 Notamment des rapporteurs généraux Gilles Carrez et Philippe Marini.

76 Au lieu de deux pour chacune des assemblées dans le projet initial du Gouvernement, cf. le décret 2010-360 du 8 avril 2010. Le comité comprend en outre 8 personnalités qualifiées. Sa composition a été annoncée le 3 mai.

77 Les 13 programmes créés pour l’occasion feront toutefois l’objet de rapports annuel de performance annexés au projet de loi de règlement du budget de l’année 2010.

78 C’est pour la même raison que le Gouvernement s’apprête à soumettre au Parlement un projet de modification de la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale qui prévoit l’établissement d’un tableau patrimonial permettant d’avoir une approche consolidée des actifs et des passifs des différentes branches du régime général, de la CADES et des fonds de financement.