Accueil > Travaux en commission > Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République > Les comptes rendus

Afficher en plus grand
Afficher en plus petit
Voir le compte rendu au format PDF

Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République

Mardi 16 juin 2009

Séance de 16 heures 15

Compte rendu n° 56

Présidence de M. Jean-Luc Warsmann, Président

– Examen de la proposition de loi de Mme Delphine Batho et M. Jacques Alain Bénisti relative aux fichiers de police (n° 1659) (Mme Delphine Batho et M. Jacques Alain Bénisti, rapporteurs).

– Amendements examinés parla Commission

– Examen de la proposition de loi de M. François Sauvadet visant à démocratiser le mode de fixation des rémunérations des mandataires sociaux dans les sociétés anonymes (n° 1671) (M. Charles de Courson, rapporteur)

– Amendements examinés par la Commission

– Informations relatives à la Commission

La séance est ouverte à 16 h 15.

Présidence de M. Jean-Luc Warsmann, président.

La Commission examine, sur le rapport de Mme Delphine Batho (pour les titres I, II et V) et M. Jacques Alain Bénisti (pour les titres III et IV), la proposition de loi de Mme Delphine Batho et M. Jacques Alain Bénisti relative aux fichiers de police (n° 1659).

M. le président Jean-Luc Warsmann. La proposition de loi relative aux fichiers de police que nous examinons aujourd’hui est l’aboutissement d’un processus lancé en septembre dernier par la Commission. C’est un exercice important pour la démocratie, puisqu’il s’agit de concilier ce qui est une nécessité pour toute société organisée et la protection des libertés publiques.

Mme Delphine Batho, rapporteure. Cette proposition de loi vise à donner une traduction concrète à 26 des 57 propositions que comporte le rapport d’information sur les fichiers de police, adopté à l’unanimité par la commission des lois le 24 mars 2009. Depuis le dépôt de ce texte, début mai, nous avons procédé à de nouvelles consultations, dont celle de représentants des ministères concernés, de M. Alain Bauer, qui préside le groupe de travail consacré aux fichiers de police, de la Ligue des droits de l’homme et du président de la CNIL.

Ce texte vise donc à refonder l’encadrement juridique des fichiers de police. Dans un esprit de consensus et afin d’aboutir à son adoption unanime par notre commission des lois, les deux rapporteurs ont cosigné les amendements qu’ils vous présenteront.

Nos propositions d’améliorations portent sur plusieurs points.

Au cœur du titre Ier, l’article 5 clarifie le cadre juridique de la création de fichiers de police, étant précisé que le pouvoir réglementaire reste intégralement compétent pour la création des fichiers classés secret défense. L’exécutif doit en effet pouvoir continuer recourir à des décrets non publiés, objet d’avis confidentiels de la CNIL. En revanche, les catégories de fichiers de police intéressant la sécurité publique seront désormais créées par voie législative. En pratique, le législateur a déjà créé des fichiers, tels que le fichier national automatisé des empreintes génétiques, le FNAEG, ou bien des catégories de fichiers, comme celle des fichiers d’antécédents, dans laquelle s’inscrivent le système de traitement des infractions constatées, le STIC, ou le système judiciaire de documentation et d’exploitation, le JUDEX. Mais la rédaction de l’article 26 de la loi relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés manquait de clarté en la matière, le Gouvernement pouvant, selon les occasions, choisir de passer, soit par la loi, soit par le décret.

Nos amendements visent à lever tout malentendu que la rédaction de cet article 5 pourrait susciter. Il s’agit ainsi de préciser, à partir de la notion de catégorie de traitements, le champ de l’autorisation législative. Il ne s’agit pas d’obliger l’exécutif à soumettre à l’examen parlementaire la création de tout fichier, mais seulement de ceux qui relèvent d’une catégorie nouvelle. Ainsi le STIC et JUDEX relèvent de la même catégorie de traitements autorisés par la loi, les fichiers d’antécédents judiciaires, et ont été créés par décret.

Nous proposons également de rétablir la possibilité de recourir à un acte réglementaire unique. Un autre de nos amendements tend à préciser le régime de l’expérimentation des fichiers de police, afin de mettre fin au dialogue de sourds qui s’est installé sur ce sujet entre le ministère de l’intérieur et la CNIL. Il s’agit d’ouvrir au ministère de l’intérieur des possibilités d’expérimentation sous le contrôle de la CNIL, qui sera associée, dans le cadre d’un dialogue constructif, à chaque étape de la mise en œuvre d’un fichier.

Nous demandons aussi la création, au sein de la CNIL, d’une formation spécialisée dans le suivi des fichiers de police.

Le titre II vise à renforcer le contrôle des fichiers d’antécédents judiciaires, le plus gros dysfonctionnement constaté concernant le STIC. Nous proposons donc deux modifications. La première vise à systématiser la saisine du procureur de la République pour la mise à jour des données lorsqu’un fichier d’antécédents est consulté dans le cadre d’une enquête administrative. La seconde concerne la faculté dont dispose le procureur de la République pour maintenir dans un fichier d’antécédents des données relatives à une personne ayant fait l’objet d’une décision de relaxe ou d’acquittement ; sur cette question les positions des deux rapporteurs restent divergentes. Nous avons cependant trouvé un accord sur l’obligation d’information de la personne concernée, afin de lui ouvrir au moins une possibilité de recours.

Je conclurai en soulignant les avancées que cette proposition de loi comporte en matière de protection des droits des citoyens et de transparence dans la création des fichiers de police. Il était important de dépasser les désaccords qui subsistent entre nous, afin d’aboutir à une adoption unanime de ce texte, conforme à l’esprit de consensus qui a inspiré notre rapport. Cette unanimité est en effet un moyen de sortir du blocage actuel.

M. le président Jean-Luc Warsmann. Je suspends la séance quelques instants afin de permettre à ceux d’entre nous qui le souhaitent de participer au scrutin en séance publique.

Suspendue à seize heures trente, la séance est reprise à seize heures trente-cinq.

M. le président Jean-Luc Warsmann. Je vous suggère de passer directement à l’examen des articles de la proposition de loi.

TITRE PREMIER

MODIFICATIONS DE LA LOI N° 78-17 DU 6 JANVIER 1978 RELATIVE À L’INFORMATIQUE, AUX FICHIERS ET AUX LIBERTÉS

Article 1er : Coordination

La Commission adopte l’article 1er sans modification.

Article 2 : Procédure contradictoire préalable à la publication du rapport public annuel de la CNIL

La Commission adopte l’article 2 sans modification.

Article 3 : Prise en compte du pluralisme politique pour les nominations des députés et sénateurs membres de la CNIL

La Commission rejette l’amendement CL 46 de M. Gérard Charasse.

Elle adopte l’article 3 sans modification.

Après l’article 3 : Création au sein de la CNIL d’une formation spécialisée chargée des fichiers de police

La Commission adopte l’amendement CL 8 de la rapporteure portant article additionnel après l’article 3.

Article 4 : Extension des compétences du bureau de la CNIL

La Commission adopte l’article 4 sans modification.

Article 5 : Autorisation par la loi des traitements ou catégories de traitements intéressant la sécurité publique ou la lutte contre la délinquance et la criminalité

La Commission rejette l’amendement CL 1 de M. Éric Ciotti,

Elle adopte ensuite successivement les amendements CL 9 et CL 10 de la rapporteure.

Elle adopte les amendements identiques CL 11 de la rapporteure et CL 2 de M. Éric Ciotti.

Puis elle adopte les amendements identiques CL 12 de la rapporteure et CL 3 de M. Éric Ciotti.

Elle rejette ensuite successivement les amendements CL 47 de M. Gérard Charasse et CL 4 de M. Éric Ciotti.

La Commission adopte successivement les amendements CL 13 à CL 19 de la rapporteure.

Puis elle adopte l’article 5 ainsi modifié.

Article 6 : Maintien de la faculté d’autorisation par un acte réglementaire unique pour les traitements régis par l’article 27 de la loi de 1978

La Commission adopte l’amendement CL 20 de la rapporteure.

Puis elle adopte l’article 6 ainsi modifié.

Article 7 : Coordination

La Commission adopte l’article 7 sans modification.

Article 8 : Liste des précisions devant figurer dans les actes réglementaires portant création de traitements automatisés

La Commission adopte successivement les amendements CL 21 à CL 24.

Elle adopte ensuite l’article 8 ainsi modifié.

Article 9 : Coordination

La Commission adopte l’article 9 sans modification.

Article 10 : Coordination

La Commission adopte l’article 10 sans modification.

Article 11 : Coordination

La Commission adopte l’article 11 sans modification.

Article 12 : Coordination

La Commission adopte l’article 12 sans modification.

Article 13 : Information systématique de la délégation parlementaire au renseignement sur les traitements dispensés de la publication des actes réglementaires les créant

La Commission adopte l’article 13 sans modification.

TITRE II

CONTRÔLE DES FICHIERS D’ANTÉCÉDENTS JUDICIAIRES

Article 14 : Traitement en temps réel par un magistrat référent des demandes urgentes de mise à jour de données figurant dans un fichier d’antécédents judiciaires

La Commission adopte l’amendement CL 25 de la rapporteure.

Puis elle adopte l’article 14 ainsi modifié.

Article 15 : Amélioration du contrôle des fichiers d’antécédents judiciaires par le procureur de la République et création d’un droit d’accès direct pour les victimes

La Commission adopte l’amendement CL 26 de la rapporteure.

Puis elle rejette l’amendement CL 5 de M. Éric Ciotti.

Elle adopte l’amendement ensuite CL 27 de la rapporteure.

Elle adopte ensuite l’article 15, ainsi modifié.

Après l’article 15 : Saisine systématique du procureur de la République en cas d’utilisation des fichiers d’antécédents dans le cadre d’enquêtes administratives

La Commission adopte l’amendement CL 28 de la rapporteure portant article additionnel après l’article 15.

Article 16 : Utilisation par le ministère public des fichiers d’antécédents judiciaires dans le cadre des procédures de comparution immédiate

La Commission adopte l’article 16 sans modification.

TITRE III

FICHIERS D’INFORMATION GÉNÉRALE ET D’ENQUÊTES ADMINISTRATIVES

Article 17 : Fichiers d’information générale

La Commission adopte l’amendement CL 29 du rapporteur.

Puis elle rejette l’amendement CL 6 de M. Éric Ciotti.

Elle adopte ensuite successivement les amendements CL 30 à CL 32 du rapporteur.

Elle rejette ensuite l’amendement CL 7 de M. Éric Ciotti.

La Commission adopte successivement les amendements CL 33 à CL 37 du rapporteur.

Puis elle adopte l’article 17 ainsi modifié.

Article 18 : Fichiers des enquêtes administratives

La Commission adopte successivement les amendements CL 38 à CL 40 du rapporteur.

Elle adopte ensuite l’article 18 ainsi modifié.

TITRE IV

FICHIERS DE RAPPROCHEMENT EN MATIÈRE DÉLICTUELLE

Avant l’article 19 : Extension du champ des données pouvant être exploitées dans les fichiers d’analyse sérielle

La Commission adopte l’amendement CL 45 du rapporteur portant article additionnel avant l’article 19.

Article 19 : Encadrement des fichiers de rapprochement en matière de délinquance sérielle

La Commission adopte les amendements CL 41 à CL 44 du rapporteur.

Puis elle adopte l’article 19 ainsi modifié.

TITRE V

FICHIER NATIONAL AUTOMATISÉ DES EMPREINTES GÉNÉTIQUES

Article 20 : Conditions de réalisation d’un prélèvement biologique à des fins de comparaison

La Commission adopte l’article 20 sans modification.

Elle adopte ensuite à l’unanimité l’ensemble de la proposition de loi.

*

* *

Amendements examinés par la Commission

Amendement CL1 présenté par M. Éric Ciotti :

Article 5

Rédiger ainsi l’alinéa 2 :

« Art. 26. – I. – Sont autorisés par la loi les principales catégories de traitements de données à caractère personnel mis en œuvre pour le compte de l’État et : »

Amendement CL2 présenté par M. Éric Ciotti :

Article 5

À l’alinéa 6, supprimer les mots : « d’un tel traitement ou ».

Amendement CL3 présenté par M. Éric Ciotti :

Article 5

À l’alinéa 7, supprimer les mots : « un traitement ou ».

Amendement CL4 présenté par M. Éric Ciotti :

Article 5

Supprimer l’alinéa 15.

Amendement CL5 présenté par M. Éric Ciotti :

Article 15

Supprimer l’alinéa 4.

Amendement CL6 présenté par M. Éric Ciotti :

Article 17

À l’alinéa 1, supprimer les mots: « par le recours ou le soutien actif apporté à la violence ».

Amendement CL7 présenté par M. Éric Ciotti :

Article 17

À l’alinéa 17, supprimer les mots: « par le recours ou le soutien actif apporté à la violence ».

Amendement CL8 présenté par Mme Delphine Batho, rapporteure, et M. Jacques Alain Bénisti :

Après l’article 3

Insérer l’article suivant :

« Le I de l’article 13 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« La commission élit en son sein trois de ses membres, dont deux parmi les membres mentionnés au 3°, au 4° ou au 5°. Ils composent une formation spécialisée de la commission chargée d’instruire les demandes d’avis formulées conformément aux I, III et IV de l’article 26. Cette formation est également chargée du suivi de la mise en œuvre expérimentale de traitements de données prévue au V de l’article 26. Elle organise, en accord avec les responsables de traitements, les modalités d’exercice du droit d’accès indirect, défini aux articles 41et 42. »

Amendement CL9 présenté par Mme Delphine Batho, rapporteure, et M. Jacques Alain Bénisti :

Article 5

À l’alinéa 2, substituer aux mots : « Sont autorisés par la loi les traitements ou », les mots : « Sont autorisées par la loi les ».

Amendement CL10 présenté par Mme Delphine Batho, rapporteure, et M. Jacques Alain Bénisti :

Article 5

Rédiger ainsi l’alinéa 5 :

« Les catégories de traitements de données à caractère personnel sont constituées par les traitements qui répondent aux mêmes finalités, peuvent comporter tout ou partie d’un ensemble commun de données, concernent les mêmes catégories de personnes et obéissent aux mêmes règles générales de fonctionnement. »

Amendement CL11 présenté par Mme Delphine Batho, rapporteure, et M. Jacques Alain Bénisti :

Article 5

À l’alinéa 6, supprimer les mots : « d’un tel traitement ou ».

Amendement CL12 présenté par Mme Delphine Batho, rapporteure, et M. Jacques Alain Bénisti :

Article 5

À l’alinéa 7, supprimer les mots : « un traitement ou ».

Amendement CL13 présenté par Mme Delphine Batho, rapporteure, et M. Jacques Alain Bénisti :

Article 5

À l’alinéa 16, supprimer les mots : « du ou des ministres compétents ».

Amendement CL14 présenté par Mme Delphine Batho, rapporteure, et M. Jacques Alain Bénisti :

Article 5

Compléter l’alinéa 19 par les mots : « et à la commission ».

Amendement CL15 présenté par Mme Delphine Batho, rapporteure, et M. Jacques Alain Bénisti :

Article 5

À la première phrase de l’alinéa 20, supprimer les mots : « du ou des ministres compétents ».

Amendement CL16 présenté par Mme Delphine Batho, rapporteure, et M. Jacques Alain Bénisti :

Article 5

À l’alinéa 21, supprimer les mots : « par le ou les ministres concernés ».

Amendement CL17 présenté par Mme Delphine Batho, rapporteure, et M. Jacques Alain Bénisti :

Article 5

À l’alinéa 21, supprimer les mots : « un traitement ou ».

Amendement CL18 présenté par Mme Delphine Batho, rapporteure, et M. Jacques Alain Bénisti :

Article 5

Après l’alinéa 21, insérer l’alinéa suivant :

« IV bis. – Pour l’application du présent article, les traitements qui répondent à une même finalité, portent sur des catégories de données identiques et ont les mêmes destinataires ou catégories de destinataires peuvent être autorisés par un acte réglementaire unique. Dans ce cas, le responsable de chaque traitement adresse à la commission un engagement de conformité de celui-ci à la description figurant dans l’autorisation. »

Amendement CL19 présenté par Mme Delphine Batho, rapporteure, et M. Jacques Alain Bénisti :

Article 5

Rédiger ainsi les alinéas 22 et 23 :

« V. – Par dérogation aux III et IV, lorsque sa mise au point technique nécessite une exploitation en situation réelle de fonctionnement, un traitement peut être mis en œuvre à titre expérimental pour une durée de dix-huit mois, après déclaration auprès de la commission.

« Un décret en Conseil d’État, pris après avis de la commission, détermine les modalités selon lesquelles la commission est informée de l’évolution technique d’un tel projet de traitement et fait part de ses recommandations au seul responsable de ce projet. »

Amendement CL20 présenté par Mme Delphine Batho, rapporteure, et M. Jacques Alain Bénisti :

Article 6

Rédiger ainsi cet article :

« Au III de l’article 27 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés, la référence : « IV », est remplacée par la référence : « IV bis ».

Amendement CL21 présenté par Mme Delphine Batho, rapporteure, et M. Jacques Alain Bénisti :

Article 8

Après l’alinéa 3, insérer l’alinéa suivant :

« 1° bis Au troisième alinéa, les mots : « au chapitre VII », sont remplacés par les mots : « à la section 2 du chapitre V » ; ».

Amendement CL22 présenté par Mme Delphine Batho, rapporteure, et M. Jacques Alain Bénisti :

Article 8

À l’alinéa 5, supprimer les mots : « un traitement ou ».

Amendement CL23 présenté par Mme Delphine Batho, rapporteure, et M. Jacques Alain Bénisti :

Article 8

À l’alinéa 7, substituer aux mots : « au chapitre VII », les mots : « à la section 2 du chapitre V ».

Amendement CL24 présenté par Mme Delphine Batho, rapporteure, et M. Jacques Alain Bénisti :

Article 8

À l’alinéa 9, substituer au mot : « prévue », le mot : « prévues ».

Amendement CL25 présenté par Mme Delphine Batho, rapporteure, et M. Jacques Alain Bénisti :

Article 14

Compléter l’alinéa 1 par les mots : « , sans préjudice du III du même article ou des missions de la Commission nationale de l’informatique et des libertés ».

Amendement CL26 présenté par Mme Delphine Batho, rapporteure, et M. Jacques Alain Bénisti :

Article 15

Après l’alinéa 3, insérer les deux alinéas suivants :

« 1° bis Après la troisième phrase, il est inséré une phrase ainsi rédigée :

« Lorsque le procureur de la République prescrit le maintien des données personnelles d’une personne ayant bénéficié d’une décision d’acquittement ou de relaxe devenue définitive, il en avise la personne concernée. » ; »

Amendement CL27 présenté par Mme Delphine Batho, rapporteure, et M. Jacques Alain Bénisti :

Article 15

Compléter l’alinéa 10 par les mots : « , sous réserve de ne pas figurer également dans ledit traitement au titre du premier alinéa du II ».

Amendement CL28 présenté par Mme Delphine Batho, rapporteure, et M. Jacques Alain Bénisti :

Après l’article 15

Insérer l’article suivant :

« L’article 17-1 de la loi n° 95-73 du 11 janvier 1995 d’orientation et de programmation relative à la sécurité est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Toute consultation d’un traitement automatisé de données personnelles mentionné à l’article 21 de la loi n° 2003-239 du 18 mars 2003 précitée réalisée au titre des trois premiers alinéas du présent article donne lieu à une demande d’actualisation des données adressée par le responsable du traitement au procureur de la République, en vue de l’exercice par ce dernier des pouvoirs de contrôle qui lui sont confiés par le III de l’article 21 de la même loi. »

Amendement CL29 présenté par M. Jacques Alain Bénisti, rapporteur, et Mme Delphine Batho :

Article 17

À l’alinéa 1, substituer au mot : « assurant », les mots : « en charge de » et, après les mots : « concernant les personnes », insérer le mot : « physiques ».

Amendement CL30 présenté par M. Jacques Alain Bénisti, rapporteur, et Mme Delphine Batho :

Article 17

À l’alinéa 2, substituer au mot : « fins », le mot : « finalités » et au mot : « précités », les mots : « mentionnés au I ».

Amendement CL31 présenté par M. Jacques Alain Bénisti, rapporteur, et Mme Delphine Batho :

Article 17

À l’alinéa 5, substituer au mot : « précités », les mots : « mentionnés au I ».

Amendement CL32 présenté par M. Jacques Alain Bénisti, rapporteur, et Mme Delphine Batho :

Article 17

À l’alinéa 15, substituer par deux fois au mot : « informations », le mot : « données ».

Amendement CL33 présenté par M. Jacques Alain Bénisti, rapporteur, et Mme Delphine Batho :

Article 17

Compléter la première phrase de l’alinéa 18 par les mots : « désigné à cet effet par le ministre de la justice ».

Amendement CL34 présenté par M. Jacques Alain Bénisti, rapporteur, et Mme Delphine Batho :

Article 17

À la première phrase de l’alinéa 19, substituer aux mots : « l’absence de », les mots : « l’absence d’un » et aux mots : « précité de trois ans », les mots : « de trois ans mentionné au VI ».

Amendement CL35 présenté par M. Jacques Alain Bénisti, rapporteur, et Mme Delphine Batho :

Article 17

À l’alinéa 22, substituer au mot : « prévus », le mot : « mentionnés ».

Amendement CL36 présenté par M. Jacques Alain Bénisti, rapporteur, et Mme Delphine Batho :

Article 17

À la première phrase de l’alinéa 24, substituer au mot : « publication », le mot : « promulgation ».

Amendement CL37 présenté par M. Jacques Alain Bénisti, rapporteur, et Mme Delphine Batho :

Article 17

Après le mot : « application », rédiger ainsi la fin de la seconde phrase de l’alinéa 24 : « du présent article trois mois avant l’expiration de ce délai ».

Amendement CL38 présenté par M. Jacques Alain Bénisti, rapporteur, et Mme Delphine Batho :

Article 18

À l’alinéa 2, substituer aux mots : « les seules fins mentionnées », les mots : « la seule finalité mentionnée ».

Amendement CL39 présenté par M. Jacques Alain Bénisti, rapporteur, et Mme Delphine Batho :

Article 18

À la première phrase de l’alinéa 17, substituer au mot : « publication », le mot : « promulgation ».

Amendement CL40 présenté par M. Jacques Alain Bénisti, rapporteur, et Mme Delphine Batho :

Article 18

Après le mot : « application », rédiger ainsi la fin de la seconde phrase de l’alinéa 17 : « du présent article trois mois avant l’expiration de ce délai ».

Amendement CL41 présenté par M. Jacques Alain Bénisti, rapporteur, et Mme Delphine Batho :

Article 19

À l’alinéa 2, substituer au mot : « peuvent », les mots : « sont autorisés à ».

Amendement CL42 présenté par M. Jacques Alain Bénisti, rapporteur, et Mme Delphine Batho :

Article 19

Rédiger ainsi l’alinéa 3 :

« – par le rapprochement des indices recueillis et des constatations réalisées sur les lieux des infractions ; »

Amendement CL43 présenté par M. Jacques Alain Bénisti, rapporteur, et Mme Delphine Batho :

Article 19

Rédiger ainsi l’alinéa 4 :

« – à partir des informations transmises entre officiers de police judiciaire s’avisant réciproquement dans les meilleurs délais de tout fait paraissant constituer un crime ou délit d’un caractère particulier en raison de son objet, des circonstances de sa commission ou de son auteur présumé, dès lors qu’il est susceptible d’être mis en rapprochement avec des faits de même nature qui auraient déjà été constatés ou qui pourraient être imputés aux personnes mises en cause dans des affaires similaires ; »

Amendement CL44 présenté par M. Jacques Alain Bénisti, rapporteur, et Mme Delphine Batho :

Article 19

Rédiger ainsi l’alinéa 22 :

« II. – Le I est applicable pendant trois années à compter de la promulgation de la présente loi. Le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur l’application du présent article trois mois avant l’expiration de ce délai. »

Amendement CL45 présenté par M. Jacques Alain Bénisti, rapporteur, et Mme Delphine Batho :

Avant l’article 19

Insérer l’article suivant :

« Après le 4° du II de l’article 21-1 de la loi n° 2003-239 du 18 mars 2003 pour la sécurité intérieure, il est inséré un 4° bis ainsi rédigé :

« "4° bis Dont l’identité est citée dans un procès-verbal concernant une infraction mentionnée au premier alinéa du I ;" ».

Amendement CL46 présenté par M. Gérard Charasse :

Article 3

Compléter cet article par les mots : « , ouverte à l’ensemble des membres du Parlement ».

Amendement CL47 présenté par M. Gérard Charasse :

Article 5

Compléter l’alinéa 10 par les mots : « ou qu’un motif d’intérêt général le justifie. »

*

* *

La Commission examine, sur le rapport de M. Charles de Courson, la proposition de loi de M. François Sauvadet visant à démocratiser le mode de fixation des rémunérations des mandataires sociaux dans les sociétés anonymes (n° 1671).

M. Charles de Courson, rapporteur. La succession de révélations sur les rémunérations excessives accordées à certains dirigeants mandataires sociaux de grandes sociétés cotées françaises, ces derniers mois, a ému, à juste titre, les Français qui subissent de plein fouet la plus grave récession de notre économie depuis la Grande Dépression de 1929.

Ces abus ne sont pas nouveaux. La décennie passée a été émaillée de scandales retentissants concernant, le plus souvent, les avantages consentis au moment du départ des dirigeants de sociétés de renommée internationale dont le bilan n'était pourtant pas flatteur. Rappelons les 20,5 millions d'euros de parachute doré consentis à M. Messier lors de son éviction de Vivendi Universal, suite à l'éclatement de la bulle internet ; les 1,2 million d'euros annuels de retraite chapeau attribués à M. Bernard à son départ forcé du groupe Carrefour ; les quelque 8,2 millions d'euros d'indemnités de départ et de non-concurrence alloués à M. Forgeard, à un moment où le groupe EADS avait pris beaucoup de retard dans le développement de l'A 380 et licenciait 10 000 personnes ; les 5 et 6 millions d'euros d'indemnités consentis à M. Tchuruk et Mme Russo, respectivement président du conseil d'administration et directrice générale d'Alcatel-Lucent, à l'issue d'une fusion peu probante ; ou encore, plus près de nous, les 3,2 millions d'euros de retraite chapeau alloués à M. Morin, lorsqu’il a quitté Valeo.

A chaque fois, le législateur et les organisations professionnelles patronales, MEDEF et AFEP, ont institué de nouvelles règles visant à ce que de tels comportements abusifs ne se reproduisent pas. C'est ainsi que, dans le prolongement des rapports Viénot, en 1995 et 1999, puis Bouton, en 2002, ces organisations ont préconisé un ensemble de principes éthiques et de règles de contrôle interne. Le code de bonne gouvernance de 2003, qui consolidait ces principes, a été complété à deux reprises sur le volet des rémunérations en janvier 2007 tout d'abord, puis le 6 octobre 2008, à la demande insistante des pouvoirs publics.

Le Parlement lui-même a adopté pas moins de cinq lois entre 2001 et 2007 puis plusieurs dispositions spécifiques dans les lois de financement de la sécurité sociale et les lois de finances, entre 2007 et 2009. Il a notamment posé certaines exigences de transparence sur les rémunérations, lié l'octroi de stock-options à l’attribution d’actions gratuites ainsi qu’au versement de primes de participation ou d'intéressement dans les entreprises, conditionné les parachutes dorés à des critères de performance et, plus récemment, décidé de soumettre davantage à l’impôt les éléments de rémunération variable ou exceptionnelle tout en interdisant, le temps de la crise, les rémunérations variables des dirigeants mandataires sociaux d'entreprises aidées par l'État.

Pour les plus anciennes, ces initiatives n'ont pas permis de mettre un terme aux abus, même si elles ont eu le mérite de favoriser une transparence salutaire. Continuer d’appliquer les recettes d'hier, ce qui est pourtant la solution qui prévaut à l'heure actuelle, ne marchera pas davantage. Les nouvelles recommandations du MEDEF et de l'AFEP, en date du 6 octobre 2008, ainsi que l'installation d'un comité des sages chargé de rendre des avis sur les rémunérations des dirigeants de sociétés qui licencient ou se trouvent en difficulté, ne peuvent à elles seules garantir que les errements du passé ne se reproduiront pas. Le législateur, quant à lui, ne peut pas davantage élaborer une législation technique de circonstance, qu’il serait au demeurant possible de contourner sur le plan fiscal. La situation de chaque grande entreprise est par nature particulière, de sorte qu'il est très difficile d'encadrer, par des règles de portée générale, les 700 sociétés cotées sur la place de Paris. La véritable solution est de changer la logique du processus décisionnel dans les sociétés anonymes.

Tel est l'objet de la présente proposition de loi, que j'ai déposée avec le président du groupe Nouveau centre, François Sauvadet, le 13 mai dernier. Alors que les rémunérations des mandataires sociaux sont actuellement déterminées par les conseils d'administration ou de surveillance, cénacles au fonctionnement opaque et parfois insuffisamment indépendants des dirigeants, nous souhaitons conférer cette responsabilité aux propriétaires du capital des entreprises, à savoir les assemblées générales des actionnaires, garantes de l'intérêt social.

Certes, en application du régime des conventions réglementées, les assemblées générales votent déjà sur certains éléments de rémunération des dirigeants mandataires sociaux. Leur consultation est toutefois partielle en ce qu'elle ne concerne que les indemnités de départ et les retraites complémentaires ; en outre, elle n’intervient qu’a posteriori, les conseils d’administration ou de surveillance gardant la haute main sur la fixation des rémunérations.

L'article unique de notre proposition de loi laisse les conseils d'administration et les conseils de surveillance proposer l'ensemble des éléments de rémunération fixes, variables et exceptionnels, ainsi que les avantages en nature consentis, tout en confiant aux assemblées générales d'actionnaires le pouvoir décisionnel en la matière. Pour le reste, les prérogatives des conseils s'agissant de la supervision ou du contrôle de la gestion courante demeurent, de sorte que l'équilibre des pouvoirs au sein des sociétés commerciales ne serait pas fondamentalement bouleversé. Afin de ne bloquer ni le recrutement ni la rétribution des nouveaux dirigeants dès leur prise de fonction, il est prévu que les rémunérations proposées par les conseils sont versées à titre temporaire jusqu'à ce que les assemblées générales se prononcent définitivement à leur sujet.

La solution que nous proposons serait bien plus efficace que toute tentative de plafonnement des rémunérations ou d'interdiction de tel ou tel avantage, stock-options ou actions gratuites, entre autres. En outre, elle s'inscrit dans un mouvement plus général amorcé dans d'autres pays développés. Je rappellerai pour mémoire que l’aval des assemblées générales est requis en matière de rémunération des dirigeants d'entreprises en Belgique, en Suède, au Danemark et aux Pays-Bas, sans que l'économie de ces pays n’en ait été pénalisée. Au Royaume-Uni, également, les assemblées générales sont consultées depuis 2002. Il nous semble important de tenir compte des choix faits par d’autres pays de l'Union européenne, à un moment où l'on cherche légitimement à moraliser le capitalisme.

En confiant aux assemblées générales d'actionnaires le pouvoir de fixer les rémunérations des mandataires sociaux, nous espérons rendre ceux-ci davantage comptables de leurs choix et de leurs résultats, en un mot renforcer la démocratie économique. Il en va à la fois de la crédibilité de leur action et de « l'acceptabilité » des avantages auxquels ils peuvent prétendre.

Cette proposition de loi répond de manière pragmatique et efficace à un problème éthique fondamental pour l'avenir du capitalisme. Je souhaite donc qu’elle puisse recueillir votre approbation.

M. Philippe Houillon. Je comprends certes l’intention des auteurs de cette proposition de loi. Mais ils n’ignorent pas que la commission des Lois a créé une mission d’information sur cette question en effet importante de la rémunération des mandataires sociaux. Cette mission, qui doit rendre son rapport début juillet, formulera des propositions plus larges, lesquelles ne seront peut-être pas très éloignées de celles de cette proposition de loi, qui ne recueille pas totalement notre adhésion. Ce serait, je crois, un leurre que de demander aux assemblées générales, dont les conseils d’administration ou de surveillance sont l’émanation, de voter les rémunérations sur leur proposition. La souveraineté de l’assemblée générale déresponsabiliserait en fait le conseil d’administration ou de surveillance, notamment au regard de la notion d’intérêt général de l’entreprise auquel les rémunérations doivent correspondre, conformément aux dispositions de la charte du MEDEF et de l’AFEP, opposable aux entreprises adhérentes sachant que la loi du 3 juillet 2008 fait obligation aux sociétés cotées d’adhérer à un code de déontologie.

L’intention est louable mais peut-être vaudrait-il mieux une solution intermédiaire s’apparentant à celle des conventions réglementées, dont le vote est soumis aux assemblées générales.

M. Christian Estrosi. J’ai une observation à faire qui n’a rien à voir avec ce texte mais porte sur les conditions de travail de notre Commission.

Vous avez, Monsieur le président, suspendu nos travaux pour que nous puissions aller voter en séance publique sur le projet de loi de programmation militaire. Le temps que certains collègues et moi-même revenions ici, la proposition de loi précédente avait été mise aux voix, sans que nous ayons eu le temps de répondre aux rapporteurs ni bien entendu de voter, alors même que ce texte suscite de vives inquiétudes parmi les forces de l’ordre. Je m’étonne de cette rapidité.

M. le président Jean-Luc Warsmann. Je suis moi-même allé voter en séance publique et, bien que n’ayant pas la réputation d’être un grand sportif, j’ai eu le temps de remonter ; je n’étais d’ailleurs pas le premier ici revenu… Pour le reste, donnons acte aux deux rapporteurs de la précédente proposition de loi que plusieurs des auditions préalables à l’élaboration de leur texte, notamment celle du directeur général de la police nationale, ont conduit à présenter des amendements qui satisfaisaient ceux par exemple déposés par votre collègue Eric Ciotti.

M. Eric Ciotti. Je ferai les mêmes observations que mon collègue sur la méthode employée. Aucun débat n’a pu avoir lieu, alors que vous saviez pertinemment que nous étions présents et avions des amendements à défendre. Si j’en avais eu le loisir, comme cela eût été légitime, j’aurais voté contre cette proposition de loi vu les inquiétudes qu’elle suscite. J’ai assisté à l’audition du directeur général de la police nationale qui, contrairement à ce qui est affirmé, a fait part de ses plus expresses réserves quant au dispositif prévu, qui risque d’entraver le travail des forces de police.

M. le président Jean-Luc Warsmann. Je ne peux pas vous laisser parler de « méthode » employée. Lorsqu’on a des amendements à défendre en commission, on est présent pour ce faire. Comme je l’ai dit, je suis moi-même allé voter en séance publique et étais revenu, de même que les deux rapporteurs du texte, et de nombreux autres collègues. Notre commission a travaillé plusieurs mois sur le sujet, de nombreuses auditions ont eu lieu… Peut-être certains sont-ils toujours tenants d’une conception qui n’a prévalu, et encore à peine, qu’entre 1958 et 1960, selon laquelle les fichiers ne sauraient relever de la loi ! Puisque vous êtes rapporteur de la LOPPSI, cher collègue, je vous invite à être cohérent avec vous-même et à proposer, par voie d’amendement, de disjoindre tous les articles de cette loi ayant trait aux fichiers… La bataille que mènent peut-être encore un ou deux hauts fonctionnaires est d’autant plus dépassée que depuis les années quatre-vingt-dix, tous les gouvernements successifs, notamment depuis 2002 tous les ministres de l’intérieur, ont toujours eu recours à la loi pour ce qui concerne les fichiers – à une seule exception, le fichier EDVIGE, dont je ne suis pas sûr que le pouvoir exécutif ait parfaitement agi en recourant au décret… Pour le reste, si des améliorations doivent encore être apportées à cette proposition de loi, elles le seront avant son examen en séance publique. Personne ici, ni dans la majorité ni dans l’opposition, ne souhaite entraver le travail des forces de police.

M. François Vannson. Pour ma part, je tiens à saluer le travail de nos collègues François Sauvadet et Charles de Courson. Il était en effet indispensable que l'Assemblée nationale réagisse face aux rémunérations excessives de certains chefs d’entreprise. Pour autant, la commission des Lois ayant créé une mission d’information sur le sujet, ne serait-il pas plus opportun d’en attendre les conclusions ?

M. le rapporteur. Les travaux de la mission d’information, conduite par notre collègue Philippe Houillon, ne sont pas incompatibles avec notre proposition de loi que, pour notre part, nous ne pouvions présenter que dans l’ordre du jour qui nous était réservé, à savoir le 25 juin prochain. Pour que ces difficultés de forme soient levées, il aurait suffi que la mission d’information termine ses travaux un peu plus tôt…

Sur le fond, notre collègue juge que notre proposition, qui pourrait paraître séduisante, est un leurre. Je ne le pense pas car l’assemblée générale se prononcera en toute souveraineté : si elle refuse les propositions qui lui sont soumises, il faudra lui en soumettre d’autres.

Notre proposition aurait par ailleurs un effet fortement dissuasif. Il ne revient pas du tout au même de faire fixer la rémunération des mandataires sociaux par les assemblées générales que, comme c’est actuellement le cas, par un comité des rémunérations le plus souvent composé de trois à cinq membres. Or, à lire la liste des membres de ces comités pour les entreprises du CAC 40, on comprend mieux les dérives observées, la rémunération des mandataires sociaux ayant augmenté de quelque 70 % ces huit dernières années quand, dans le même temps, la moyenne des salaires ne progressait que de 1 %. La France, qui avait longtemps été en retard s’agissant de la rémunération des mandataires sociaux, s’est, si j’ose dire, bien rattrapée, se classant aujourd’hui au quatrième rang mondial, certes loin derrière les Etats-Unis, mais assez près des deuxième et troisième, et devant l’Allemagne. En assemblée générale, où sont représentés les actionnaires minoritaires et les petits porteurs, les décisions ont une publicité qu’elles n’ont absolument pas dans les comités des rémunérations.

Il n’y a pas lieu de craindre que notre proposition déresponsabilise les conseils d’administration. Notre collègue Philippe Houillon ne propose, lui, rien d’autre qu’une convention réglementée généralisée, puisqu’il en est déjà prévu pour les parachutes dorés ou les retraites chapeau. Mais une convention réglementée n’a aucune portée juridique : d’une part, le vote de l’assemblée générale est strictement consultatif ; d’autre part, il n’intervient qu’a posteriori. Dans des cas d’abus manifeste, le seul recours qu’ont eu des actionnaires minoritaires a été de saisir la justice pour que soit reconnu le caractère manifestement disproportionné de la rémunération d’un mandataire social au regard de la situation de l’entreprise et de l’intérêt général. Et des décisions de justice sont en effet intervenues, mais bien plus tard. Le dispositif actuel ne permet aucune régulation effective.

Regardons aussi ce qui se fait à l’étranger, notamment en Suisse, pays qui n’est tout de même pas réputé pour être gauchiste ! Les statuts des sociétés peuvent y prévoir que c’est l’assemblée générale qui fixe la rémunération des mandataires sociaux. Dans les autres pays que j’ai cités, le droit le prévoit désormais expressément pour éviter les dérives. Les conventions réglementées, elles, n’ayant aucune portée juridique, ne peuvent rien réguler. Si votre mission d’information proposait cette solution, ce serait une erreur.

Pour le démocrate que je suis, la démocratie économique consiste à ce que les propriétaires d’une entreprise, à savoir ses actionnaires réunis en assemblée générale, assument leurs responsabilités de propriétaires. D’ailleurs, pourquoi existerait-il un dispositif à géométrie variable selon les éléments de rémunération des mandataires sociaux –rémunération fixe, retraite chapeau, stock-options, attribution d’actions gratuites, parachutes dorés… ? Ce puzzle ne permet d’ailleurs pas aux actionnaires d’avoir une vision d’ensemble de la rémunération globale des mandataires sociaux. Or, c’est la rémunération variable des mandataires sociaux qui a explosé ces dernières années dans notre pays. Voilà pourquoi j’espère que la mission d’information retiendra notre proposition dans son rapport.

M. Philippe Houillon. Présenter une proposition de loi ayant trait à un sujet sur lequel notre Commission a décidé de créer une mission d’information, et ce de surcroît quelques jours seulement avant que cette mission ne rende ses conclusions, c’est faire un pied de nez à la Commission ! Pourquoi ne pas attendre les conclusions de cette mission ?

Si votre intention est louable, votre proposition est une fausse bonne idée. Oui, la rémunération des mandataires sociaux doit correspondre à l’intérêt général de l’entreprise et oui, l’assemblée générale a un rôle à jouer. Elle est d’ailleurs informée par le biais des rapports annuels. On peut aller plus loin en explorant la piste de nouvelles conventions réglementées. L’important est d’instituer une responsabilité et de permettre que le non-respect de l’intérêt général et des prescriptions déontologiques, notamment de l’AFEP et du MEDEF, puisse être sanctionné. Au contraire, dès lors que l’Assemblée générale aurait fixé une rémunération, il ne pourrait plus y avoir de sanction car précisément sa décision serait souveraine. Votre proposition déresponsabiliserait les instances dirigeantes et donnerait au final moins de possibilités aux actionnaires de contester certaines décisions.

M. Philippe Vuilque. Je suis d’accord avec Philippe Houillon, avec lequel je travaille dans le cadre de la mission d’information. Comme lui, je crois souhaitable de laisser la mission achever ses travaux, d’autant que la proposition de loi qui nous est soumise reste partielle : elle n’évoque ni les règles de rémunération, ni les parachutes dorés, par exemple. À mes yeux, il s’agit plus d’un coup médiatique que d’autre chose. Mieux vaut laisser la mission d’information élaborer des propositions d’ensemble plutôt que d’aborder ainsi le sujet par le petit bout de la lorgnette.

M. le rapporteur. J’ai déjà répondu à l’argument de la déresponsabilisation. Le texte propose que les éléments de rémunération soient fixés par l’assemblée générale sur proposition du conseil d’administration ou du conseil de surveillance. Le conseil n’est donc pas déresponsabilisé, il est contrôlé, comme doit l’être tout pouvoir délégué. En effet, le drame du système actuel, c’est que le pouvoir de fixer le niveau de rémunération est délégué, tandis que, s’agissant des autres éléments de rémunération – dont une partie est déjà soumise au système des conventions réglementées –, le pouvoir de l’assemblée est vidé de son contenu. La seule sanction possible passe par un recours devant les tribunaux au motif que le niveau ou les modalités de la rémunération ne seraient pas conformes à l’intérêt général de l’entreprise. Mais pour un groupe qui gagne 17 milliards par an, une rémunération de 1 ou 2 millions n’est pas contraire à l’intérêt général ! C’est pourquoi la jurisprudence, en matière d’annulation, concerne surtout les petites et moyennes entreprises.

Par ailleurs, comme je l’indique dans l’exposé des motifs, ma proposition concerne bien l’ensemble des éléments évoqués par M. Vuilque.

Reste un argument de forme, celui de l’existence de la mission d’information de la commission des Lois. Mais le Nouveau Centre n’est pour rien dans le choix de la date d’examen de cette proposition. Nous sommes un groupe minoritaire et nos séances réservées ne sont guère nombreuses !

Jusqu’à présent, on n’a fait que chercher à apaiser l’opinion publique avec des dispositions qui, de toute façon, ne peuvent pas fonctionner, pour des raisons tenant à la composition sociologique des comités de rémunération. La convention réglementée ne résoudra pas le problème. Mieux vaut s’en remettre à l’assemblée générale, laquelle n’est pas composée de présidents de grandes sociétés ou de figures du capitalisme français.

Car le drame de ce dernier, c’est justement que la plupart de ceux qui l’animent ne sont pas des capitalistes. Le niveau de rémunération des mandataires sociaux chez Dassault n’a aucune importance, car ces mandataires sont propriétaires de l’entreprise. Cela relève seulement d’un choix entre rémunération et distribution de dividendes. Mais il n’en est pas de même pour les entreprises dont les mandataires sociaux ne possèdent quasiment aucune part.

L’explosion des rémunérations, qui choque tant les hommes politiques de tous les bords, est liée au mécanisme de fixation. Si l’assemblée générale avait le pouvoir de décision, jamais, par exemple, des dirigeants d’entreprises dont la cote a chuté n’auraient pu obtenir un parachute doré. Aucun conseil d’administration n’aurait osé faire une telle proposition. D’où le caractère dissuasif de la disposition proposée. Aujourd’hui, la démocratie économique fonctionne mal, voire très mal. Notre proposition vise à améliorer ce fonctionnement, en donnant aux citoyens propriétaires des actions de la société le pouvoir de décision concernant la rémunération des dirigeants.

M. Philippe Vuilque. Puisque M. de Courson est plein de bonne volonté, je l’invite à participer aux travaux de la mission d’information. Autant faire cause commune et aboutir à un rapport global intégrant toutes les réflexions.

Il n’y a pas que la rémunération des dirigeants. Vous évoquez les mandataires sociaux, mais ces derniers, par exemple, peuvent être salariés ou non salariés de l’entreprise. La proposition de loi ne couvre pas tous les cas de figure.

M. le rapporteur. Nombreux sont en effet les mandataires sociaux titulaires d’un contrat de travail – lequel peut être suspendu ou non, ou concerner une filiale, y compris étrangère. Cela leur donne un pseudo-statut de salarié qui, en cas de renvoi, justifie d’énormes indemnités. C’est extrêmement choquant et c’est pourquoi nous avons toujours affirmé que le cumul entre le statut de salarié au sein du groupe et la fonction de mandataire social devait être interdit. Mais de nombreuses entreprises ont pris de mauvaises habitudes en ce domaine.

Le Président de la République a dit – et je partage sa position – qu’il fallait réformer le capitalisme dans un sens éthique. Dans ce but, nous devons cesser d’écouter les représentants du MEDEF et de l’AFEP qui nous demandent de ne pas légiférer en nous promettant l’adoption de règles déontologiques. Celles-ci ne changent rien : s’il existait une véritable autorégulation, nous n’en serions pas là aujourd’hui. Je ne crois pas à l’autorégulation quand les personnes concernées sont toutes issues du même milieu, et alors que la plupart d’entre elles ne sont pas propriétaires de l’entreprise mais s’octroient une partie de son patrimoine sans que les actionnaires aient leur mot à dire. Et cette remarque vaut pour les conventions réglementées – ou alors, il faudrait en modifier le régime en précisant que le vote n’est pas seulement consultatif, mais que se passera-t-il si ce vote est négatif ?

M. Philippe Vuilque. Votre proposition est axée sur la rémunération des dirigeants d’entreprise, mais il n’y a pas que cela. La mission d’information a auditionné M. Pauget, président de la Fédération bancaire française et directeur général du Crédit agricole. Il nous disait que si la rémunération des dirigeants pouvait poser un problème, c’était aussi le cas de la rémunération des traders ou de la distribution des stock-options. C’est pourquoi il serait réducteur de se cantonner au seul sujet de la rémunération des dirigeants d’entreprise.

Votre vision des choses est intéressante et elle servira à la réflexion. Par ailleurs, nous sommes d’accord avec vous sur le caractère indécent, inacceptable du système actuel. Mais nous devons aller plus loin, et ne pas nous contenter de traiter un seul aspect du sujet.

M. le rapporteur. L’argument de la rémunération des traders, je le connais par cœur. Daniel Bouton est un de mes amis – je ne le renie pas, même si nous sommes parfois en désaccord – : quand il était à la tête de la Société générale, il affirmait que sa rémunération – trois millions d’euros – était médiocre, parce que son salaire n’était que le quarante-quatrième au sein du groupe. Les traders, eux, étaient en tête, avec des rémunérations allant de un à trente millions par an ! Mais qui fixe la rémunération des traders, sinon la direction générale ? Si elle était moins élevée ils iraient, nous dit-on, chez la concurrence. Mais le résultat, c’est qu’ils abandonnent le métier de banquier au profit de la spéculation, au point de « planter » le système bancaire : en 2006 et 2007, 30 à 40 % des bénéfices de la Société générale provenaient de la spéculation pratiquée dans des salles de marché situées à Londres – car, pour des raisons fiscales, les traders ne voulaient plus travailler à Paris. Quoi qu’il en soit, tout cela relève de la responsabilité de la direction générale, à qui il appartient de faire le ménage. S’attaquer à ce sujet serait se mêler de la politique salariale des entreprises.

La Commission passe ensuite à l’examen de l’article unique.

Article unique : Fixation de la rémunération des dirigeants mandataires sociaux par les assemblées générales d’actionnaires

La Commission est saisie de l’amendement CL 1 du rapporteur.

M. le rapporteur. Il s’agit d’un amendement rédactionnel.

M. Philippe Houillon. Pour les raisons que j’ai indiquées, je suggère que cette proposition de loi ne soit pas adoptée. C’est pourquoi je voterai contre les amendements présentés, même si j’aurais pu les approuver dans d’autres circonstances.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement CL 2 du rapporteur.

M. le rapporteur. Il s’agit d’un amendement de précision sur l’étendue des éléments de rémunération fixés par l’assemblée générale des actionnaires, qui s’aligne sur les distinctions opérées à l’article L. 225-102 du code de commerce s’agissant des éléments de rémunération des dirigeants mandataires sociaux devant figurer dans le document de référence annuel des sociétés anonymes cotées.

La Commission rejette l’amendement.

Puis, elle est saisie de l’amendement CL 3 du même auteur.

M. le rapporteur. C’est un amendement de conséquence : dès lors que l’ensemble des éléments de la rémunération des dirigeants mandataires sociaux des sociétés anonymes sont fixés par les assemblées générales d’actionnaires, il n’y a plus lieu de soumettre les indemnités de départ et les retraites complémentaires au régime des conventions réglementées, qui supposent un vote a posteriori de l’assemblée générale.

La Commission rejette l’amendement, de même que l’amendement de conséquence CL 4 du rapporteur.

Elle rejette enfin l’article unique de la proposition de loi.

La séance est levée à 17 h 25.

——fpfp——

Amendements examinés par la Commission

Amendement CL1 présenté par M. Charles de Courson, rapporteur :

Article unique

À l’alinéa 1, substituer aux mots : « du dernier », les mots : « le dernier ».

Amendement CL2 présenté par M. Charles de Courson, rapporteur :

Article unique

À la première phrase de l’alinéa 3, après le mot : « rémunération », insérer les mots : « ainsi que les engagements de toutes natures correspondant à des indemnités ou à des avantages dus ou susceptibles d’être dus à raison de la prise, de la cessation ou du changement de fonctions ».

Amendement CL3 présenté par M. Charles de Courson, rapporteur :

Article unique

Compléter cet article par l’alinéa suivant :

« III. – À compter du 1er janvier 2010, les articles L. 225-42-1 et L. 225-90-1 du code de commerce sont abrogés. »

Amendement CL4 présenté par M. Charles de Courson, rapporteur :

Article unique

Compléter cet article par l’alinéa suivant :

« IV. – À la première phrase du II de l’article L. 228-65 du code de commerce, le mot : « deuxième » est remplacé par le mot : « troisième ». »

Informations relatives à la Commission

La Commission a désigné M. Étienne Blanc, rapporteur pour avis un rapporteur pour avis sur le projet de loi relatif à l’ouverture à la concurrence et à la régulation du secteur des jeux d’argent et de hasard en ligne (n° 1549).