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Commission des Finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

Mission d’évaluation et de contrôle

Crédit d’impôt recherche

Mardi 23 février 2010

Séance de 17 heures 15

Compte rendu n° 7

Présidence de M. Alain Claeys, Rapporteur

– Audition, ouverte à la presse, de M. Patrick Schmitt, directeur de la Recherche, de l’innovation et des nouvelles technologies au MEDEF, de M. Laurent Gouzènes, président du comité Développement et innovation, de M. Franck Debauge, membre de la commission Recherche-innovation et nouvelles technologies, et de Mme Miriana Clerc, chargée de mission à la direction des Affaires publiques

M. Alain Claeys, Rapporteur. Je vous souhaite la bienvenue.

Nous avons souhaité vous entendre dans le cadre de nos auditions sur le crédit d’impôt recherche, dispositif qui a fait l’objet d’observations dans un rapport de la Cour des comptes et auquel notre rapporteur général, Gilles Carrez, a consacré une partie de son rapport d’information sur l’application de la loi fiscale à la fin de l’année dernière. Enfin, des évaluations sont en cours au ministère de l’Enseignement supérieur et de la recherche : le rapport sur les données 2008 devrait être disponible en octobre de cette année. L’organisation patronale que vous représentez a, pour sa part, récemment publié un Livre blanc sur ce dispositif qui comporte diverses propositions. Je vous laisse la parole.

M. Patrick Schmitt, directeur de la Recherche, de l’innovation et des nouvelles technologies au MEDEF. Je vous remercie de cette invitation. Nous avons publié ce Livre blanc avec le concours de plusieurs partenaires, dont le cabinet ACIES, membre de notre commission Recherche-innovation et nouvelles technologies depuis une dizaine d’années déjà, mais aussi diverses associations représentatives du monde de la recherche, publique et privée, en France comme le Comité Richelieu, l’Association des Instituts Carnot, le réseau C.U.R.I.E – Coopération des services Universitaires de Relations Industrielles et Économiques – et l’Association nationale de la recherche technique (ANRT) qui mène un travail considérable, au travers de la plate-forme FutuRIS, pour rapprocher recherche publique et privée.

Ce Livre blanc comporte trois volets. Le premier intitulé « Que disent les chiffres ?» évalue l’impact économique du crédit d’impôt recherche, du moins ce que l’on peut en savoir au travers des statistiques officielles, les seules dont nous disposions, et qui, hélas, ne sont pas toujours interprétées de la même façon par toutes les parties. Nous avons voulu apporter notre propre éclairage. Le deuxième, intitulé « Que dit le terrain ? » est, lui, fondé sur le témoignage d’entreprises et a trait aux aspects qualitatifs du dispositif. Nous avons ainsi constaté que le crédit d’impôt recherche a permis d’accroître non seulement le volume mais aussi la qualité de la recherche-développement dans les entreprises. Enfin, le troisième volet recense nos dix propositions pour rendre le dispositif encore plus efficace. Convaincus de son caractère stratégique et de son rôle-clé de catalyseur pour les entreprises de toutes tailles, aussi bien en amont qu’en aval, nous souhaiterions notamment que sa sécurité soit mieux établie, de façon que les entreprises aient toute la visibilité nécessaire pour investir, que les dépenses éligibles soient plus clairement définies et les coopérations plus fortement encouragées.

M. Laurent Gouzènes, Président du comité Développement de l’innovation du MEDEF. Pour les données chiffrées, nous ne disposons que de quelques statistiques fournies par le ministère de la recherche, avec retard puisque toutes les données 2008 ne sont pas encore disponibles. Ce n’est pas l’idéal pour pouvoir bien juger du dispositif. De toute façon, il ne suffit pas de connaître le montant de l’aide ainsi apportée aux entreprises. Il faut aussi savoir comment elles l’utilisent concrètement – dépôts de brevets, embauches de docteurs,… D’où notre enquête qualitative, conduite en lien avec le cabinet ACIES, auprès de grandes entreprises, d’entreprises intermédiaires (ETI) et de PME.

L’une des questions récurrentes est de savoir si le crédit d’impôt recherche profite davantage à une catégorie particulière d’entreprises. Les grandes entreprises réalisent 30 % de la recherche-développement alors qu’elles ne bénéficient que de 17 % de l’enveloppe totale du crédit d’impôt recherche, les ETI en réalisent 46 % pour 52 % et les PME 23 % pour 28 %. Si on mesure l’efficacité du dispositif en prenant pour base un ratio de 1 pour les grandes entreprises, le ratio des ETI est de 1,8 et celui des PME de 1,92. Le dispositif bénéficie donc bien en priorité aux ETI et PME.

M. Alain Claeys, Rapporteur. À quelle année se rapportent ces chiffres et sur quel échantillon d’entreprises ont-ils été établis ?

M. Franck Debauge, membre de la commission Nouvelles technologies du MEDEF. Ce sont les statistiques nationales fournies par le ministère de la recherche après ses premières évaluations. S’agissant de la répartition du montant du crédit d’impôt recherche par taille d’entreprises, il faut corriger les données parues dans Les Échos. Je vous invite pour ce faire à vous reporter à la page 14 de notre Livre blanc.

M. Alain Claeys, Rapporteur. Le directeur général pour la recherche et l’innovation au ministère de l’Enseignement supérieur et de la recherche, que nous avons auditionné avant vous, nous a indiqué que les données définitives pour 2008 n’étaient pas encore connues. Les chiffres actuellement disponibles ne porteraient que sur un échantillon de 6 865 entreprises.

M. Patrick Schmitt. Une question est de savoir si la recherche-développement des ETI et PME est à ce point plus performante qu’elle mérite d’être davantage soutenue. Il existe une volonté politique claire de favoriser cette catégorie d’entreprises, que ne contestent d’ailleurs pas les grandes entreprises. Le dispositif nous semble aujourd’hui globalement équilibré.

M. Laurent Gouzènes. Le MEDEF a vocation à dynamiser les entreprises. C’est d’ailleurs pourquoi ces statistiques nous intéressent autant car elles nous permettent de mieux connaître ce que font les entreprises en matière de recherche-développement et quelles peuvent être leurs difficultés. Le problème principal de la France est sa capacité à exporter, qui a beaucoup fléchi. Le seul remède passe par l’innovation, notamment technologique, laquelle exige une forte recherche-développement, que le crédit d’impôt recherche permet justement de soutenir.

M. Jean-Pierre Gorges, Rapporteur. La réforme intervenue en 2008 a-t-elle pu constituer un effet d’aubaine pour certaines grandes entreprises qui auraient de toute façon investi en recherche-développement ?

M. Laurent Gouzènes. Il m’est difficile de répondre. En effet, la réforme du crédit d’impôt recherche a eu lieu en plein milieu de la crise. Les grandes entreprises exportatrices, particulièrement exposées à la concurrence internationale, ont beaucoup souffert de l’appréciation de l’euro par rapport au dollar et du ralentissement de l’activité économique, qui a pu atteindre jusqu’à 50 % dans certains secteurs. Or, que je sache, aucune entreprise n’a réduit de moitié ses efforts de recherche-développement. Le crédit d’impôt recherche les a donc incontestablement aidées à traverser cette passe difficile, leur permettant de ne pas réduire leur effort de recherche ni leurs effectifs en ce domaine. Je ne vois pas là d’effet d’aubaine, plutôt un effet salvateur durant la crise. Le crédit d’impôt recherche a aussi favorisé l’implantation ou le renforcement de centres de recherche-développement de grands groupes en France. Cela a été le cas pour Microsoft, Nestlé… IBM a renforcé ses équipes de recherche à Grenoble, STMicroelectronics a lancé ses grands programmes de recherche sur cinq ans grâce à ce dispositif.

M. Alain Claeys, Rapporteur. Venons-en à vos propositions. Vous demandez une définition plus claire et plus précise de la recherche-développement. Qu’est-ce qui pose problème dans la définition retenue en 2008 ?

M. Laurent Gouzènes. Les dépenses éligibles au crédit d’impôt recherche ne le sont pas par nature, mais par destination. Un même acte, par exemple un prélèvement sanguin dans un laboratoire pharmaceutique, est éligible s’il est destiné à une activité de recherche stricte, mais ne l’est pas s’il ne vise qu’à l’amélioration ou une nouvelle validation d’un produit existant. Or, la distinction est parfois difficile à opérer. Les directeurs des services de recherche-développement font ce tri du mieux qu’ils peuvent à un instant donné. Puis le ministère de la recherche mandate ses experts qui parfois, c’est rare, mais cela est arrivé, ne connaissent même pas le manuel de Frascati, référence méthodologique internationale pour l’étude statistique des activités de recherche-développement, et se fondent sur des critères académiques, qui les conduisent à exclure du bénéfice du crédit d’impôt recherche des dépenses que les entreprises ont en toute bonne foi classées en recherche-développement. Ne pourrait-on pas décider une fois pour toutes que le manuel de Frascati, publié par l’OCDE, sera la référence ?

M. Alain Claeys, Rapporteur. Les critères retenus aujourd’hui sont plus restrictifs que ceux du manuel de Frascati ?

M. Laurent Gouzènes. C’est surtout l’application qui en est faite dans la pratique qui pose problème.

M. Franck Debauge. Tant qu’elle ne figure pas expressément dans la loi, une définition du manuel de Frascati n’est pas opposable à l’administration. Or, aujourd’hui, l’administration a édicté des instructions fiscales, et le ministère de la Recherche et de l’enseignement supérieur a élaboré un guide, qui s’écartent des définitions internationales.

M. Jean-Pierre Gorges, Rapporteur. Les PME souhaiteraient que les frais financiers liés aux avances remboursables puissent être intégrés dans les dépenses éligibles au crédit d’impôt recherche, point sur lequel la Cour des comptes a formulé des observations. Qu’en pensez-vous ?

M. Laurent Gouzènes. Les avances remboursables, comme celles d’Oseo, qui ne sont jamais que des prêts bancaires figurant au passif, ne peuvent pas être traitées de la même façon que d’éventuelles subventions, donc il est normal qu’elles soient déduites des dépenses engagées.

M. Franck Debauge. Une avance remboursable n’est pas une aide à proprement parler, contrairement à un crédit d’impôt. Suite à la proposition de la Cour des comptes qui avait signalé une problématique de suivi des avances devenues non remboursables, il a été mis fin à compter de 2008 à un dispositif ancien et économiquement justifié. Il aurait été plus efficient d’envisager les moyens d’en sécuriser le contrôle que de pénaliser les entreprises.

M. Jean-Pierre Gorges, Rapporteur. Le remboursement anticipé du crédit d’impôt recherche, décidé dans le cadre du plan de relance l’an passé, a-t-il eu un effet positif ?

M. Laurent Gouzènes. Incontestablement : il a apporté une bouffée d’oxygène en trésorerie. Ce sont les entreprises industrielles qui effectuent plus de 90 % de la recherche-développement – 70 % pour l’industrie lourde et 20 % pour celle du logiciel. Or, c’est le secteur industriel qui a le plus souffert de la crise. Si l’on revenait à un remboursement à l’année n+3, et non n+1 comme aujourd’hui, s’ensuivraient de grosses difficultés de trésorerie. Ce remboursement anticipé n’est pas un cadeau fait aux entreprises. C’est le remboursement avec un décalage de trois ans qui constituait une anomalie.

M. Patrick Schmitt. La conjugaison de tous les éléments de la réforme de 2008, y compris le remboursement anticipé, ont modifié le mode même d’utilisation du crédit d’impôt recherche. Celui-ci n’est plus un outil d’optimisation fiscale comme il a pu l’être parfois, aux mains des directeurs financiers, mais, comme il est normal, un outil stratégique de gestion de la recherche-développement, aux mains des directeurs de la recherche qui utilisent au mieux la trésorerie disponible pour accélérer les programmes, ce qui est déterminant à l’exportation.

M. Franck Debauge. Le remboursement sans délai du crédit d’impôt recherche est crucial pour les PME et les ETI, qui ne disposent pas toujours des financements nécessaires, a fortiori pour la recherche-développement qui n’est pas finançable auprès des banques.

M. Jean-Pierre Gorges, Rapporteur. Le crédit d’impôt recherche servirait plutôt dans les phases amont de la recherche. Or, plus une entreprise est petite, plus elle a besoin d’être aidée longtemps, quasiment jusqu’au stade de la mise en production. Ne serait-il pas judicieux de mieux cibler le crédit d’impôt recherche par taille d’entreprises et d’en élargir l’assiette, jusqu’au prototypage par exemple ?

M. Laurent Gouzènes. Le soutien apporté aux entreprises en matière de recherche-développement se justifie par les incertitudes scientifiques et technologiques que celle-ci comporte et qui ne peuvent être levées que par l’expérimentation. Alors même que c’est dans cette phase de recherche en amont que se joue la compétitivité future des entreprises, c’est là qu’elles ont toujours du mal à trouver des financements, et ce quelle que soit leur taille. Comment convaincre une banque de vous prêter de l’argent quand vous ne pouvez lui fournir aucun business plan, pas même lui dire à quel produit exact vos recherches aboutiront, ni à quel horizon, encore moins combien et à qui il sera vendu ?

M. Alain Claeys, Rapporteur. Êtes-vous favorable au développement des partenariats avec la recherche publique ?

M. Laurent Gouzènes. Bien sûr. La réforme du crédit d’impôt recherche les a considérablement renforcés, comme notre Livre blanc en est la preuve, fruit d’une collaboration entre le MEDEF, les Instituts Carnot, le réseau C.U.R.I.E… Une véritable révolution culturelle a eu lieu, que le crédit d’impôt recherche n’explique pas à lui seul – la création des pôles de compétitivité y a sa part – mais à laquelle il a largement contribué.

M. Patrick Schmitt. En dépit de la crise, les coopérations entre le CNRS et les PME ont augmenté de 30 % en 2008 quand d’ordinaire, elles ne progressaient pas de plus de 3 % à 5 % par an.

M. Alain Claeys, Rapporteur. Y a-t-il moins de problèmes dans le secteur aval que dans le secteur amont ?

M. Patrick Schmitt. Pour nous, l’amont va jusqu’au prototypage technique. D’ailleurs, les prototypes techniques figurent dans le manuel de Frascati.

M. Jean-Pierre Gorges, Rapporteur. Les PME demandent l’intégration des prototypes dans les dépenses de recherche-développement.

M. Alain Claeys, Rapporteur. Les représentants de la CGPME, que nous avons auditionnés ce matin, ont soulevé le problème.

M. Franck Debauge. Pour nous, il est clair que la mise au point des prototypes doit être intégrée dans les dépenses éligibles. Toutes les phases jusqu’au test du produit final doivent l’être. En réalité, le débat sur l’intégration ou non des prototypes est né de la non-application ou de la mauvaise application des définitions internationales.

M. Patrick Schmitt. Un autre problème est celui de l’éligibilité des dépenses de design au crédit d’impôt recherche. Nous estimons qu’elles devraient l’être plus systématiquement, alors qu’elles ne le sont que si elles prennent place dans le cadre d’un projet technologique. Lors des États généraux de l’industrie, la création d’un crédit d’impôt innovation a été évoquée. Mais l’innovation, elle, relève du manuel d’Oslo et dans ce cadre, le design ne peut pas être pris en compte. Un débat a été ouvert au MEDEF, qui n’est pas encore tranché, sur l’éventualité d’un crédit d’impôt design-création, analogue au crédit d’impôt recherche, et qui fusionnerait les trois crédits d’impôt existant pour les métiers d’art, les collections des secteurs du textile, de l’habillement, du cuir et le secteur des jeux vidéo. Alors même que le design apporte une forte valeur ajoutée aux produits, déterminante à l’exportation, sa filière demeure encore fragmentée en France, très loin de la structuration qu’elle a acquise en Italie par exemple. Pourquoi ne pas envisager un tel crédit d’impôt complémentaire, en veillant toutefois à ce qu’il ne siphonne pas les sommes aujourd’hui dévolues au crédit d’impôt recherche ? Il a fallu près de 25 ans pour disposer en France d’un crédit d’impôt recherche efficace. Ne détricotons surtout pas le dispositif actuel pour un autre, flou et incertain, qui serait encore plus difficile à appliquer !

M. Laurent Gouzènes. Une autre difficulté tient au fait que l’État exige pour que les dépenses de recherche-développement soient éligibles qu’il y ait un saut qualitatif dans la performance attendue du produit. Or, et cela vaut pour toutes les entreprises, quelle que soit leur taille, les progrès dans la recherche sont de nature incrémentale et c’est le plus souvent une suite de petits progrès qui finit par permettre un saut technologique. Reste à en convaincre le ministère de la recherche !

M. Jean-Pierre Gorges, Rapporteur. Les PME, qui travaillent plutôt dans le prototypage, donc en aval, souhaiteraient que les phases aval puissent bénéficier des mêmes aides que les phases amont.

M. Franck Debauge. La question-clé est moins la distinction entre amont et aval – il est clair que la recherche-développement va bien jusqu’au prototypage – qu’entre projets comportant ou non des incertitudes de développement futur. Sur les vingt-quatre milliards d’euros dépensés par les entreprises en recherche-développement, seuls quinze sont éligibles au crédit d’impôt recherche. D’où notre demande d’une parfaite clarification des critères pris en compte, afin de garantir toute sécurité fiscale.

M. Alain Claeys, Rapporteur. L’un de nos problèmes en France est que les jeunes docteurs ne se dirigent pas naturellement vers les entreprises privées. Y a-t-il eu une amélioration sur ce point ? Que faudrait-il faire, selon vous, pour optimiser le dispositif actuel d’embauche ?

M. Laurent Gouzènes. La situation s’est nettement améliorée. L’ignorance mutuelle dans laquelle vivaient le monde de l’entreprise et celui de la recherche se dissipe peu à peu. La mise en place du système européen de LMD (licence-mastère-doctorat) y a contribué, poussant les ingénieurs à faire de nouveau des thèses, dans la mesure où il est désormais clair pour tous que le plus haut niveau est bien le doctorat. La thèse est une excellente formation intellectuelle supplémentaire pour les ingénieurs, dans la mesure où elle les oblige à connaître ce qui se fait de mieux dans leur domaine et à se tenir informés des dernières évolutions. Embaucher de jeunes docteurs est pour une entreprise, outre l’assurance de recruter des personnes excellemment formées, un moyen de tisser des liens durables avec des laboratoires de recherche, car ces liens se tissent d’abord par les hommes. L’ANRT a également consenti de gros efforts, augmentant notamment son budget pour qu’il y ait davantage de docteurs formés en entreprise ou au contact de l’entreprise.

Là où pèche le dispositif actuel, c’est que l’attribution d’un crédit d’impôt recherche pour l’embauche d’un doctorant est subordonnée au fait que l’effectif global de l’entreprise augmente.

M. Franck Debauge. Il faudrait ne tenir compte que des seuls effectifs que maîtrisent les directeurs de la recherche. En effet, aujourd’hui, ils peuvent recruter un jeune doctorant pensant avoir droit à un crédit d’impôt recherche puis s’en voir refuser le bénéfice, parce que l’effectif global de l’entreprise aura diminué du fait de réductions de postes au service commercial !

M. Laurent Gouzènes. De très nombreux départs à la retraite vont avoir lieu prochainement dans la recherche publique. Cela va créer un énorme appel d’air et il n’est pas impossible que les entreprises privées soient confrontées à une pénurie, la plupart des jeunes docteurs ayant été « aspirés » par les organismes publics de recherche. Il serait d’ailleurs utile que le ministère de la recherche nous communique les statistiques démographiques dont il peut disposer sur les docteurs en entreprise.

M. Alain Claeys, Rapporteur. Nous alertons depuis longtemps sur la pénurie à venir de docteurs. Dans tous les grands laboratoires, le nombre de thésards diminue dangereusement, sans parler même du fait que nombre de directeurs de recherche partant en retraite ne sont pas remplacés.

M. Jean-Pierre Gorges, Rapporteur. Pour pallier la pénurie de docteurs dans les entreprises, une solution ne consisterait-elle pas à faciliter la mobilité des chercheurs entre public et privé ?

Les entreprises sont demandeuses de telles passerelles permettant des allers-retours le temps d’un projet. La difficulté est moins d’ordre financier que statutaire.

M. Laurent Gouzènes. Tout à fait. Mais d’une manière générale, le nombre de docteurs décline et le contexte démographique est mauvais. Il faut donc faire mieux connaître encore les formations doctorales et attirer les étudiants dans ces filières.

M. Franck Debauge. Selon les prévisions d’embauches de jeunes docteurs, un recrutement sur trois en France s’y ferait dans la recherche – contre seulement 6 % en Allemagne et 8 % en moyenne dans l’Union européenne. C’est dire la dynamique enclenchée grâce au crédit d’impôt recherche, dont l’efficacité tient bien sûr au volume de l’enveloppe qui y est affectée mais aussi à la stabilité du dispositif sans laquelle aucune efficacité durable n’est possible.

M. Alain Claeys, Rapporteur. Il me reste, Madame, Messieurs, à vous remercier.