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Commission des affaires sociales

Mercredi 18 novembre 2009

Séance de 10 heures

Compte rendu n° 13

Présidence de M. Pierre Méhaignerie, Président

– Informations relatives à la Commission 2

– Examen du rapport d’information en conclusion des travaux de la mission d’information sur la prise en charge des victimes de l’amiante (M. Guy Lefrand, rapporteur) 4

– Présences en réunion 15

COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES

Mercredi 18 novembre 2009

La séance est ouverte à dix heures sept.

(Présidence de M. Pierre Méhaignerie, président de la Commission)

Informations relatives à la Commission

M. le président Pierre Méhaignerie. Chers collègues, je vous rappelle que la commission mixte paritaire relative au projet de loi de financement de la sécurité sociale se tiendra cet après-midi à 16 h 15.

M. Jean Mallot. Monsieur le président, avant d’aborder notre ordre du jour, je souhaiterais relever que la commission des lois examine actuellement la proposition de loi de M. Jean-Luc Warsmann de simplification et d’amélioration de la qualité du droit (n° 1890). Il s’agit de la troisième proposition de loi de ce genre. Curieusement, la simplification du droit engendre la production de nombreux textes. Nous espérons, qu’au final, ils contribuent réellement à simplifier la législation mais rappelons que la deuxième proposition de loi a connu quelques avatars, qui ont défrayé la chronique. Il me semble que nous devons être vigilants face à ce genre de textes, qui semblent simples au premier abord mais se révèlent en réalité plus compliquées qu’il n’y paraît.

La troisième proposition de loi contient en tout cas plusieurs articles relevant du domaine de compétence de la commission des affaires sociales, en matière de santé publique par exemple. On pourrait en établir toute une liste, monsieur le président a pu lui-même s’en rendre compte. Notre commission doit au moins se saisir pour avis et se prononcer sur cette proposition de loi.

M. le président Pierre Méhaignerie. Je partage votre opinion. La commission des finances est également concernée, en raison des interactions entre les propositions de la commission des lois et ses responsabilités. Il faut étudier ce texte avec attention.

La commission désigne ensuite les membres de la mission d’information sur les missions et l’action de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA) :

 

Groupe politique

Mme Laurence Dumont, présidente

SRC

    Mme Bérengère Poletti, rapporteure

UMP

M. Denis Jacquat

UMP

M. Paul Jeanneteau

UMP

M. Guy Malherbe

UMP

Mme Valérie Rosso-Debord

UMP

Mme Isabelle Vasseur

UMP

Mme Martine Carrillon-Couvreur

SRC

À désigner

SRC

À désigner

GDR

À désigner

NC

M. le président Pierre Méhaignerie. Trois postes restent encore à pourvoir, pour les groupes Socialiste, radical, citoyen et divers gauche (SRC), Gauche démocrate et républicaine (GDR) et Nouveau Centre (NC).

M. Jean-François Chossy. Je siège à la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA) en tant que représentant du Parlement. Pour cette raison, je n’ai pas postulé à la mission d’information. Mais, hier, je me trouvais à la CNSA et j’ignorais complètement l’existence de cette mission d’information.

M. le président Pierre Méhaignerie. La création de cette mission d’information a pourtant été abordée deux fois en réunion de commission. C’est regrettable.

Mme Danièle Hoffman-Rispal. Je souhaite présenter une requête de forme. Les missions d’information sur la prise en charge des personnes âgées dépendantes et sur la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA) vont être conduites à traiter des mêmes sujets et à entendre les mêmes personnes. Il me semble impératif de travailler ensemble, pour certaines auditions, comme je l’avais déjà souligné lors du l’examen du projet de loi de finances et du projet de loi de financement de la sécurité sociale. En effet, procéder, dans la même semaine, à l’audition des mêmes intervenants sur des sujets proches, parfois devant quelques députés présents, ne donne pas une image positive du Parlement.

M. le président Pierre Méhaignerie. Tout à fait. Dans le même ordre d’idées, hier en Conférence des présidents, le groupe GDR a demandé la création d’une commission d’enquête sur la santé au travail. Or, il existe déjà une mission d’information, de la commission des affaires sociales, sur les risques psychosociaux. Face à cette situation, priorité a été donnée à la commission d’enquête, et les travaux de la mission d’information sont donc suspendus en conséquence.

Je rappelle au passage que la plupart des groupes politiques ne voulaient pas que le nom de l’entreprise France Télécom apparaisse dans l’intitulé de la commission d’enquête, car certains concurrents pourraient profiter de la situation. Il n’est pas question que les salariés fassent les frais de cette initiative. La commission d’enquête doit avoir un objet plus global. Nous discuterons de son intitulé exact mercredi prochain.

M. Maxime Gremetz. C’est la proposition que j’avais faite. D’autres groupes que France Télécom sont concernés par les problèmes de santé au travail.

M. le président Pierre Méhaignerie. En effet, il ne faut pas les désigner nommément car cela reviendrait à les stigmatiser. Il y a eu un accord de tous les groupes à ce sujet.

M. Maxime Gremetz. Je vois que le président a bien repris ma remarque.

M. Christian Hutin. Je suis membre de la mission d’information sur les risques psychosociaux au travail, dont les travaux sont pour l’heure suspendus. Je suis donc candidat pour le groupe SRC pour la mission d’information sur la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie.

M. le président Pierre Méhaignerie. Un seul poste demeure vacant pour le groupe SRC. J’attends la liste de noms définitive du groupe.

M. Maxime Gremetz. Combien de postes sont attribués au groupe GDR ?

M. le président Pierre Méhaignerie. Trois postes demeurent vacants : un pour le groupe GDR, un pour le groupe SRC et un pour le groupe NC. Les groupes me transmettront les candidatures par écrit, pour éviter les contestations.

——fpfp——

La Commission des affaires sociales examine le rapport d’information de M. Guy Lefrand sur la prise en charge des victimes de l’amiante.

M. Guy Lefrand, rapporteur. La mission d’information a adopté, il y a trois semaines, ce rapport intitulé « Les victimes de l’amiante : une prise en charge originale mais perfectible ». Les différentes auditions auxquelles elle a procédé ont permis de constater un consensus sur l’apport indéniable que représentent le Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante (FIVA) et le fonds de cessation anticipée des travailleurs de l’amiante (FCAATA), lesquels ont placé la France parmi les pays les plus avancés en matière de prise en charge des victimes de l’amiante. Cependant, les fonds montrent aujourd’hui certaines limites.

En premier lieu, le dispositif de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante, conçu pour permettre de répondre rapidement et simplement à la situation des salariés exposés à l’amiante en leur permettant de bénéficier d’une préretraite, fonctionne, en partie, sur le principe d’une liste d’établissements. Or, ce système n’est pas exempt de faiblesses car il exclut de nombreux salariés pourtant exposés à l’amiante, tout en ouvrant le dispositif à des travailleurs qui n’ont pas été au contact de l’amiante. La mission propose donc d’établir une liste de bénéficiaires du FCAATA croisant une liste de métiers à risque et de secteurs d’activité, sur la base de travaux d’experts, notamment de l’Agence française de sécurité sanitaire de l’environnement et du travail. Un amendement a été déposé en ce sens dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2010. Par ailleurs, il serait opportun étudier la possibilité de mettre en place une voie d’accès individuelle au FCAATA. L’exemple de l’Italie qui a mis en place une voie d’accès individuelle, qui est aujourd’hui complètement engorgée, avec plus de 240 000 demandes déposées, doit nous inciter cependant à la prudence. Un amendement au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2010 demandant au Gouvernement une étude de l’impact de cette voie a donc été déposé et il a été adopté. L’élargissement de la liste des bénéficiaires du FCAATA pourrait être financée par une augmentation des droits sur les tabacs. De plus, sur une proposition du groupe Gauche démocrate et républicaine (GDR), la mission a acté le principe d’une participation financière des grands groupes responsables, dont les modalités pratiques doivent être étudiées sans retard. Par ailleurs, les règles régissant les différents dispositifs de « préretraite amiante » varient selon les régimes de sécurité sociale, ce qui provoque des situations particulièrement inéquitables pour les personnes pourtant exposées et exclues de l’accès à la préretraite. La mission propose donc d’uniformiser les règles en matière de cessation anticipée d’activité entre les différents régimes de sécurité sociale. Enfin, il est suggéré d’augmenter le montant plancher de l’allocation de cessation anticipée d’activité (ACCATA). Le Gouvernement travaille actuellement sur ce sujet et pourrait faire des propositions prochainement.

Le Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante (FIVA) a dû faire face à une croissance exponentielle des demandes d’indemnisation et se trouve dans l’impossibilité de verser des indemnisations dans les délais qui lui sont pourtant imposés par la loi. Cette situation est apparue très préoccupante à l’ensemble des membres de la mission dans la mesure où les victimes touchées par les pathologies les plus graves ont malheureusement une espérance de vie très courte. Une mission commune à l’Inspection générale des finances et à l’Inspection générale des affaires sociales a fait plusieurs préconisations pour résoudre ces problèmes. Le Gouvernement a commencé à les mettre en œuvre, notamment par la création de vingt postes, permettant de créer une « cellule d’urgence » chargée d’apurer le stock des dossiers les plus simples, c’est-à-dire relatifs aux plaques pleurales, par la nomination d’une nouvelle directrice et par la réforme des systèmes d’information. La mission fait les préconisations suivantes : le FIVA doit poursuivre la mise en œuvre des préconisations de la mission commune à l’Inspection générale des finances et à l’Inspection générale des affaires sociales en matière d’organisation et de redéploiement des effectifs et doit engager plus systématiquement des actions subrogatoires, au moyen notamment d’une réorganisation du service chargé de ce contentieux. La mission suggère aussi de créer un référentiel indicatif national d’indemnisation combiné à une base de données jurisprudentielles en matière de dommage corporel afin de corriger les disparités de jurisprudence entre les différentes cours d’appel concernant les recours contre les décisions du FIVA. Il apparaît, en effet, que certaines cours sont plus généreuses que d’autres et qu’elles connaissent un accroissement important des recours. Enfin, le mission propose de mettre en place un suivi des mesures mises en œuvre.

Les personnes exposées à l’amiante bénéficient rarement d’un suivi médical postprofessionnel. Moins de 5 000 personnes seraient concernées. Le certificat d’exposition à l’amiante, qui ouvre droit à ce suivi et qui doit être cosigné par l’employeur et le médecin du travail au moment du départ à la retraite, est, dans les faits, très rarement délivré. Par ailleurs, le dépistage précoce reste peu développé et les programmes expérimentaux de dépistage « SPIRALE » et « ESPRi » sont aujourd’hui gelés. Par conséquent, la mission préconise de mettre en place un suivi médical postexposition généralisé pour l’ensemble des salariés exposés à des substances cancérogènes, mutagènes et toxiques pour la reproduction sur la base de données obligatoirement transmises par les employeurs aux caisses régionales d’assurance-maladie sur les matières nocives présentes sur le lieu de travail. Elle propose aussi de généraliser les programmes expérimentaux de suivi postprofessionnel « SPIRALE » et « ESPRi », en suivant les préconisations de la Haute Autorité de santé (HAS). Enfin, elle demande que la Haute Autorité de santé actualise, dans un délai de six mois, la conférence de consensus de 1999 sur le protocole de suivi médical et se prononce sur le bilan de la politique de dépistage, son impact psychologique et le rapport entre les inconvénients et les bénéfices d’une généralisation des politiques de dépistage.

Sur le plan de la responsabilité des employeurs et de l’État, le juge administratif a reconnu la responsabilité pour faute de l’État en 2004 et la Cour de cassation a affirmé, en 2002, le principe d’une « obligation de sécurité de résultat de l’employeur » sur le plan civil. De leur côté, les cours d’appel de Paris et de Bordeaux ont posé le principe d’une responsabilité contractuelle de l’employeur et ont condamné des employeurs à indemniser leurs salariés pour le préjudice direct et certain correspondant à la différence entre l’allocation de cessation anticipée des travailleurs de l’amiante et le salaire moyen en vigueur dans l’entreprise. Cependant, aucun procès pénal ne s’est pour l’instant encore tenu concernant une contamination ancienne à l’amiante. Je tiens à souligner à cet égard qu’il n’y aura pas, en France, de « grand procès de l’amiante », car de multiples affaires sont en cours d’instruction et elles sont très diverses tant sur le plan des faits que sur le plan des personnes impliquées et du contexte. Les instructions se heurtent cependant aujourd’hui à la complexité des dossiers et au nombre considérable de documents à étudier. Elles se heurtent aussi au fait que les expositions sont anciennes : les entreprises ont parfois disparu et les faits sont souvent prescrits. C’est pourquoi la mission considère qu’il faut faire évoluer la loi en fonction de la position finale de la Cour de cassation sur les arrêts des cours d’appel de Paris et de Bordeaux sur la responsabilité contractuelle de l’employeur et la réparation du préjudice économique des salariés. Elle préconise de permettre, dans le cadre de la réforme de la procédure pénale, aux associations reconnues légitimes à agir, de se pourvoir en cassation contre les arrêts de la chambre d’instruction, en absence de pourvoi du ministère public. Il s’agit d’une demande importante des associations de défense des victimes de l’amiante. Il convient aussi de renforcer les moyens de l’instruction des affaires de santé publique, notamment les effectifs de l’Office central de lutte contre les atteintes à l’environnement et à la santé publique. Une réunion s’est tenue au ministère de la justice avec le secrétaire d’État à la justice, M. Jean-Marie Bockel : celui-ci a pris des engagements. Il conviendra d’assurer le suivi des mesures effectivement prises afin de responsabiliser davantage les entreprises. Il est proposé d’augmenter les sanctions qu’elles encourent en cas de non-respect des règles de sécurité et d’hygiène au travail et de mettre en place une modulation des amendes en fonction du chiffre d’affaires des entreprises ou du groupe auxquelles elles appartiennent.

Enfin, sur le sujet plus général de l’exposition à l’amiante, la mission suggère de mettre en œuvre les préconisations de l’AFSSET notamment sur l’actualisation des valeurs limites d’exposition professionnelle. La pollution de l’air par l’amiante étant dix fois moins importante que dans les années soixante-dix, il convient de tenir compte de cette évolution. La mission propose aussi de faire des études complémentaires sur la présence des fibres courtes et fines dans les bâtiments publics datant des années soixante et soixante-dix, de mettre en place une mission d’information sur les éthers de glycol et de renforcer le rôle du comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail en en faisant le destinataire de l’ensemble des informations sur l’exposition des salariés aux substances dangereuses. De plus, il semble primordial de poursuivre les mesures de dépollution entamées en Corse et en Nouvelle-Calédonie et de mettre en place un suivi épidémiologique des populations concernées.

Dans le cadre des travaux de la mission, comme je l’ai rappelé précédemment, j’ai déposé deux amendements au projet de loi de financement de la sécurité sociale. Le premier visait à changer les critères d’éligibilité au FCAATA et à retenir une liste combinée de métiers à risques et de secteurs d’activité. Il n’a cependant pas été adopté, le Gouvernement préférant attendre les conclusions des études actuellement en cours, notamment de l’Agence française de sécurité sanitaire de l’environnement et du travail. J’insiste néanmoins sur le fait que cette réforme du FCAATA est attendue depuis longtemps. Le médiateur de la République en faisait déjà état dans son rapport public de 2005. Cette réforme devra donc intervenir rapidement et se faire en concertation avec les associations de victimes. Le second amendement demandant une étude de l’impact de la mise en place d’une voie d’accès individuelle a en revanche été adopté. Cette étude devrait permettre de connaître le nombre de personnes potentiellement concernées et la faisabilité d’un tel dispositif. Il serait, en effet, fâcheux de mettre en place une telle voie individuelle et de se rendre compte ensuite, au bout de quelques années, qu’il est impossible d’examiner tous les dossiers.

Plusieurs réformes sont actuellement étudiées par le Gouvernement, touchant notamment à la liste des bénéficiaires du FCAATA et au suivi médical postprofessionnel. Elles sont urgentes car les victimes de l’amiante sont souvent des personnes fragilisées. Les dysfonctionnements et les inégalités dans leur prise en charge ne sont en effet plus acceptables.

M. Patrick Roy. Je ne vais pas revenir sur tout ce qui vient d’être dit. Je souhaite simplement insister sur quelques points extrêmement importants et qui continuent de poser de vrais problèmes, c’est un euphémisme. Le premier, certainement le principal, qui a conduit à l’abstention de mon groupe lors du vote sur le rapport de mission d’information, concerne le procès pénal.

Rappelons brièvement que les premières plaintes ont été déposées il y a maintenant treize ans. Et depuis treize ans, pour de nombreuses raisons, le procès de l’amiante n’a toujours pas eu lieu. Aujourd’hui, aucune date précise n’a été arrêtée, et, plus grave encore, il n’existe aucune certitude sur la tenue de ce procès, ou de plusieurs procès, car il semble techniquement difficile de ne prévoir qu’un seul grand procès. Il ne s’agit pourtant pas d’accidents. Depuis six décennies, et surtout après la Seconde guerre mondiale, il n’existe plus de doutes scientifiques sur la dangerosité de l’amiante et sur son caractère cancérigène. Or, l’on a continué à exposer des travailleurs à l’amiante ou à les laisser exposés. La conséquence aujourd’hui, c’est dix morts par jour.

D’autres problèmes de santé publique ont débouché sur des procès mais ils étaient d’une ampleur sans rapport avec la tragédie de l’amiante, en termes de nombre de décès même si chaque décès est un drame de trop. L’idée de la tenue d’un procès ne progresse pas ; j’ai la conviction qu’il ne s’agit pas d’une priorité pour le Gouvernement.

J’en veux pour preuve mon expérience personnelle. J’avais posé une question précise à ce sujet à Mme Rachida Dati, alors ministre de la justice, qui m’avait répondu, la main sur le cœur, qu’il s’agissait d’une priorité de son ministère et que des moyens allaient être donnés pour accélérer les procédures d’instruction. En termes financiers, les moyens nécessaires sont dérisoires : dix enquêteurs et six assistants de justice, dont la rémunération est faible, suffiraient à débloquer les dossiers. Mme Rachida Dati ne s’en est jamais occupée. Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d’État, ministre de la justice et des libertés, a promis, la main sur le cœur aussi, des efforts et de nous recevoir, car il s’agissait selon elle d’un dossier prioritaire pour son ministère. En fin de compte, elle a refusé de nous rencontrer et a délégué ce dossier à M. Jean-Marie Bockel, secrétaire d’État.

Or, une fois encore, le dossier de l’amiante représente dix morts par jour, non accidentelles… M. Jean-Marie Bockel nous a très bien reçus en octobre dernier ; il a pris de nouveaux engagements, cependant aucune avancée concrète n’a eu lieu. Dix enquêteurs supplémentaires ne constituaient pourtant pas une charge financière remettant en cause l’équilibre budgétaire du pays. Malgré les promesses, je ne vois rien venir. Cela est inquiétant car la magistrate concrètement chargée des instructions se trouve relativement proche de la retraite, et la réforme des juges d’instruction ne va pas favoriser la résolution des affaires. J’attends donc. L’abstention de mon groupe lors du vote sur le rapport de la mission d’information constitue le signe d’une attente déçue.

On étudie actuellement dans l’hémicycle le projet de loi tendant à amoindrir le risque de récidive criminelle et portant diverses dispositions de procédure pénale (n° 1237). Or, un grand procès pénal dans une affaire comme celle de l’amiante permettrait d’éviter les récidives dont il est question. Certains membres de la majorité doivent partager mon opinion.

J’ai entendu, au sujet de ce procès pénal, lors des travaux de la mission d’information les propos suivants : « Les victimes sont indemnisées, que veulent-elles de plus ? » et « L’important, c’est de soigner ». Ces deux réflexions ne doivent pourtant pas conduire à écarter le procès pénal attendu par les victimes. Les victimes désespèrent ; elles ne croient plus aux belles promesses. Je serais le premier à applaudir la création des postes d’enquêteurs attendus.

Par ailleurs, une réforme des conditions d’attribution de l’allocation de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l'amiante s’impose. Elle doit impérativement être négociée avec les associations de victimes. Elle ne doit pas laisser sans indemnisation de nouvelles catégories de personnes exposées. Mais je suis partisan de l’abandon du système de listes, extrêmement injuste.

Deux remarques enfin. Tout d’abord, il faut espérer que le rapport de la mission d’information ne terminera pas dans un placard, comme les précédents. Ensuite, la mission d’information a peu étudié les dégâts causés par l’amiante environnemental, car ce n’était pas son objet principal. Ce thème mériterait d’être repris dans le cadre d’autres missions. Le rapporteur, M. Guy Lefrand, a cité l’exemple de la Corse. Mais il y a aussi l’amiante présent dans les constructions. Tant d’années après, le problème de la faculté de Jussieu n’est toujours pas réglé et j’ai cru comprendre que se faire soigner au Centre hospitalier universitaire de Caen n’était pas sans risque.

M. Claude Leteurtre. N’importe quoi !

M. Patrick Roy. Dans le domaine des bâtiments, il faut un plan d’ensemble pour ne pas exposer nos populations à l’amiante, dont les fibres légères sont en constante suspension dans l’air.

M. Maxime Gremetz. Il ne faut pas jouer avec le grave problème de l’amiante et de ses victimes qui concerne des dizaines de milliers de personnes. Aussi, moi qui suis personnellement « amianté » et qui ai participé à toutes les missions d’information menées à l’Assemblée nationale sur ce thème, notamment à celle qui a été conduite par M. Jean Le Garrec, lors de la précédente législature, je félicite le rapporteur pour la qualité de son travail, qui reprend et complète l’ensemble des conclusions des travaux passés. Je félicite, en particulier, le rapporteur pour la grande capacité d’écoute des victimes dont il a fait preuve, tout au long de nos travaux. Je souhaite moi aussi qu’un grand procès soit mené sur l’affaire de l’amiante. On peut d’ailleurs se demander pour quelle raison il n’a pas encore eu lieu, sachant qu’il ne faut pas jouer avec la santé des personnes, notamment pour des raisons politiques. Je remercie le rapporteur d’avoir repris dans ses conclusions les propositions que j’avais formulées et qui ont d’ailleurs fait l’objet d’une concertation avec des salariés de Valéo, à Amiens et à Abbeville. Sans attendre le grand procès pour l’Histoire, qui sera peut-être fait dans cent ans, il convient d’avancer tout de suite dans la prise en charge des préjudices causés aux salariés amiantés et à leurs familles. J’insiste notamment sur la proposition du rapport qui appelle à la création d’une mission d’information sur les éthers de glycol dont l’incidence pourrait être encore plus grave que celle de l’amiante. Nous avons une responsabilité historique en ce domaine ; il faut agir sans attendre, d’autant qu’il existe des produits de substitution. Par ailleurs, il faudra suivre avec attention la position de la Cour de cassation qui a été saisie des jugements des cours d’appel de Paris et de Bordeaux qui ont condamné des entreprises à l’indemnisation du préjudice économique résultant de la différence entre le montant de l’ACAATA et le salaire en vigueur dans l’entreprise. Si la Cour de cassation confirme ces décisions, il conviendra de reprendre dans la loi cette position. Enfin, je souhaiterais que soit reprise dans le rapport l’observation que j’ai formulée dans ma contribution visant à reprendre l’avis du 2 novembre 2009 de la Cour de cassation concernant l’application rétroactive par les régimes spéciaux de sécurité sociale de l’indemnisation pour les affaires non définitivement jugées.

M. Bernard Perrut. Je remercie le rapporteur pour la qualité de son travail sur un sujet complexe qui engage la responsabilité de tous. Il serait irresponsable de reporter la responsabilité sur certains plutôt que sur l’ensemble des acteurs. L’amiante a, partout dans le monde, été utilisée de manière très large et depuis longtemps et a provoqué de nombreuses pathologies bénignes ou malignes. J’aimerais que le rapporteur nous indique si la France est le pays le plus avancé en matière de prise en charge et d’indemnisation des victimes de l’amiante. Il ne faut pas prendre de retard en ce domaine. Par ailleurs, il conviendrait de développer le dépistage précoce et la formation des professionnels de santé à la prise en charge des victimes de l’amiante. Je souhaiterais également avoir des précisions concernant la fréquence des examens de dépistage à effectuer par les personnes qui ont été exposées au risque de l’amiante et notamment les prescriptions de la Haute Autorité de santé en matière de scanners, certaines études soulignant le caractère anxiogène du dépistage. Je regrette les retards qui ont été pris dans la réforme du FCAATA qui provoquent de l’exaspération chez les personnes concernées. Par ailleurs, il conviendrait de préciser les conditions d’actualisation de la liste des établissements concernés et des personnes exclues. Il faudrait aussi préciser dans quelles conditions peut être mise en place une voie d’accès individuelle. Je souhaiterais en outre obtenir des données sur les prescriptions de l’Agence française de sécurité sanitaire de l’environnement et du travail, annoncées pour 2010, et relatives à l’actualisation des valeurs limites d’exposition professionnelle et du taux limite de fibres dans l’air, qui doivent prendre en compte les progrès effectués en matière d’analyse fine de l’air au moyen de microscopes électroniques. Il conviendrait de se pencher sur les conditions d’application de ces nouvelles valeurs par les entreprises et les collectivités publiques. Je souhaiterais également obtenir des informations sur l’augmentation du montant plancher de l’ACAATA à 1 000 euros bruts et les travaux menés par le ministère du travail sur ce point.

M. Georges Colombier. Je félicite le rapporteur pour la qualité de son travail et l’intérêt des vingt et une propositions formulées. Ayant moi-même siégé plus de vingt ans dans un comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT), je suis tout particulièrement favorable à la proposition n° 4 qui vise à étendre les pouvoirs du CHSCT en matière de contrôle des risques liés aux matières dangereuses. Je soutiens aussi la proposition n° 21 qui vise à renforcer les sanctions et il me semble que les grands groupes qui disposent de moyens importants peuvent contribuer davantage à l’indemnisation des victimes de l’amiante.

L’action qui a été engagée en matière de prise en charge et d’indemnisation des victimes de l’amiante doit être poursuivie avec constance et la mise en œuvre des propositions de la mission mérite un suivi attentif. Enfin, j’apprécie tout particulièrement les propos de M. Maxime Gremetz et le vote favorable qu’il a exprimé sur les conclusions du rapport.

M. Christian Hutin. Je félicite le rapporteur pour son travail très complet qui prolonge l’ensemble des travaux antérieurement effectués. Moi qui suis élu du Dunkerquois, je veux rappeler que, dans la semaine qui vient de s’écouler, six à huit personnes victimes de l’amiante y sont décédées, comme en témoigne la rubrique nécrologique de La Voix du Nord. En rappelant ce fait, je veux insister sur les très graves inégalités territoriales en matière d’exposition à l’amiante. Cette question mériterait d’ailleurs d’être davantage étudiée. La plupart des victimes perçoivent de faibles rémunérations et donc bénéficient d’allocations limitées. À cet égard, il faut regretter que le décret qui vient d’être publié ait pour effet de réduire d’environ 10 % le montant des indemnisations. Cette décision gouvernementale s’oppose au souhait des associations de défense des victimes et aux conclusions du rapport. Or, rappelons que, bien souvent, les victimes indemnisées de l’amiante sont relativement jeunes, puisque la moyenne d’âge est de cinquante-cinq ans, mais que, compte tenu de leur brève espérance de vie, elles ne pourront bénéficier que très peu de temps de l’indemnisation. J’ai été amené ainsi à ouvrir des banquets d’anciens à des victimes de l’amiante. Il ne faut donc pas tarder à améliorer les conditions de prise en charge, faute de quoi le combat cessera faute de combattants. Il faut espérer que l’action du secrétariat d’État à la justice, qui a été chargé du dossier de l’indemnisation des victimes de l’amiante, permettra des progrès, mais il convient de regretter la faiblesse des moyens accordés au pôle d’instruction. Les procès ne doivent pas constituer une chasse aux patrons ; nombre d’entre eux sont d’ailleurs de petits patrons qui ont eux-mêmes été aussi victimes de l’amiante dans les ateliers. Mais les grands groupes industriels doivent assumer pleinement leurs responsabilités. Les procès engagés doivent être menés à leur terme. Il y a là une dette morale de l’ensemble de la société alors que les associations de défense des victimes de l’amiante expriment leurs craintes que la suppression envisagée du juge d’instruction ne permette pas de mener tous les contentieux à leur terme.

M. Dominique Dord. Je félicite le rapporteur pour la qualité du rapport et le président pour son souci d’éviter toute polémique sur un sujet de cette importance. M. Gremetz a raison de souligner qu’il est très regrettable que la mission d’information ne se soit penchée que sur la prise en charge des victimes de l’amiante et qu’elle n’ait pas eu lieu bien plus tôt, sur l’utilisation de l’amiante elle-même.

Il convient de prendre ce type de problèmes très en amont. Prenons le cas du radon. Ce gaz radioactif est, semble-t-il, présent dans les territoires comportant des roches karstiques ; j’y suis confronté comme maire d’Aix-les-Bains. Il est la deuxième source de cancer du poumon en France, autour de 20 % des cas. Il faut s’attaquer à la question, dès maintenant. On sait par exemple que la contamination par le radon est évitable par des mesures simples et bon marché comme la ventilation des lieux habités. Je ne sais pas si une mission d’information est la formule la mieux adaptée pour traiter les questions posées par le radon qui touche principalement la partie Est du pays, mais il faut que nous soyons, cette fois, des précurseurs et des pédagogues.

M. le président Pierre Méhaignerie. C’est une bonne suggestion.

M. Michel Liebgott. En matière de radon, les causes sont identifiées. C’est, par exemple, les mines de fer fermées, où du gaz s’accumule puis se répand. Le gaz inhalé se solidifie après ingestion et se fixe dans le corps définitivement. En matière d’amiante, on parle de responsabilité des pouvoirs publics, mais il serait préférable d’insister sur la responsabilité des entreprises qui dirigeaient, en fait, la politique menée dans les régions industrielles, conjuguant paternalisme et absence de prise en compte des conséquences de leurs activités sur la santé. Il est établi que les régions industrielles ont des taux de maladies cardio-vasculaires ou de cancers nettement supérieurs à la moyenne. L’espérance de vie des ouvriers y est aussi inférieure à celle des cadres. L’amiante est la partie émergée de l’iceberg des conséquences sanitaires de nombreuses activités industrielles.

Parmi les propositions de la mission, celles permettant d’engager un procès pénal rendraient justice à ceux qui ont souffert. Un procès médiatisé, comme celui de l’affaire du sang contaminé, permettrait de montrer toute l’ampleur du drame et révèlerait ses causes. À cet égard, on peut craindre que la réforme, en cours, de l’instruction pénale, qui tend à supprimer le juge d’instruction, ne remette en cause le déroulement des procédures.

Mme Catherine Génisson. J’insiste sur la nécessité du procès pénal. Il faut prendre en compte les risques professionnels, mais aussi les risques environnementaux, alors que 350 000 cas de cancers apparaissent chaque année, la guérison, plus fréquente chez les hommes que les femmes, intervenant dans 50 % des cas.

La prévention doit concerner le lieu de travail mais aussi, plus largement, la façon de vivre. L’impact des éthers de glycol est à prendre en compte, mais il ne faut pas oublier les expositions professionnelles anciennes, comme celles subies par les mineurs de fond se traduisant par la silicose ou l’anthracose. Le volet santé de la prévention doit prendre en compte le niveau d’information des personnes concernées, tout en n’étant pas anxiogène. Sa qualité technique est donc très importante. Enfin, le scanner doit être systématiquement utilisé, les examens cliniques et radiographiques standards ne pouvant suffire en matière d’amiante.

M. Claude Leteurtre. Le rapport est remarquable parce qu’il est précis, mais je regrette les provocations du président de la mission : le Centre hospitalier universitaire de Caen n’est pas dangereux. Caen a suffisamment souffert de l’asbestose pour qu’il soit inutile de faire état de contrevérités patentes. La deuxième proposition de la mission doit permettre d’arbitrer entre un désamiantage qui risque de disséminer les fibres et une isolation ou un confinement des parties amiantées. Il convient de mesurer l’incidence de chaque solution, en évaluant risques, coût et efficacité.

La vingtième proposition répond à un véritable scandale en matière de santé publique. Les mises en cause individuelles doivent rendre plus vigilants tant les directeurs des ressources humaines que les chefs d’entreprise.

M. Roland Muzeau. Le rapport de la mission d’information est intéressant comme tout ce qui a été publié sur la question par les différents experts de la santé au travail, syndicats, dont la CGT, associations, dont la Fédération nationale des accidentés du travail et des handicapés ou juristes. Les données ne sont pas nouvelles et ce rapport, comme les précédents, fait un certain nombre de préconisations sachant que les suggestions antérieures n’ont pas toujours été mises en œuvre. Souhaitons qu’il soit inutile que de futurs rapports reprennent les propositions de celui-ci. Il est déjà très regrettable qu’il faille à nouveau étudier la question de l’amiante.

Il n’est pas possible d’exonérer les pouvoirs publics de leur responsabilité en la matière. Ils ont oscillé entre action insuffisante et surdité absolue. Alors que l’accès au scanner est une exigence absolue, sa nécessité est encore contestée par certains services. Le plan « Santé au travail » de M. Gérard Larcher a été abandonné par ses successeurs. Les pouvoirs publics se montrent ainsi incapables d’assurer le suivi d’une question fondamentale comme celle de l’amiante. Législateurs, nous ne pouvons rester indifférents.

Les drames n’ont pas lieu dans n’importe quel cadre, mais dans celui de l’exploitation des salariés. Lors des travaux de la mission commune d’information sur le bilan et les conséquences de la contamination par l’amiante du Sénat, il nous a été montré comment une société comme Arkema formait ses cadres, comme ses dirigeants, à agir face aux salariés disant avoir été exposés à l’amiante, en leur présentant comme une victoire la mise en échec des actions menées par les salariés. Il y a des entreprises qui agissent mal et beaucoup continuent à nier le problème, en particulier parmi les membres de la Confédération générale du patronat des petites et moyennes entreprises, comme à l’époque où l’on promouvait l’usage de l’amiante…

Le rapport est utile mais il faut espérer qu’on ait pas à en faire d’autres.

Mme Valérie Boyer. Le Parlement, par amendements au projet de loi portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires, a mis en place, à la charge des propriétaires et exploitants, une obligation de surveillance du radon dans certaines zones géographiques, une obligation d’un diagnostic de présence de plomb en cas de travaux subventionnés pour la sortie de l’habitat insalubre ainsi qu’une obligation renforcée de recherche d’amiante dans les immeubles.

Ce sont ces actions qu’il faut amplifier. Les vingt et une propositions du rapport d’information qui nous est soumis s’inscrivent dans cette perspective de prévention, et je m’en félicite.

M. le rapporteur. S’agissant du procès pénal, unique ou non, je resterai attentif, comme le président de la mission ou M. Jean-Yves Cousin, vice-président du groupe d’études sur l’amiante, au suivi des engagements pris par M. Jean-Marie Bockel, lors de la réunion qui a rassemblé députés et associations. Nous demandons la création d’une dizaine de postes pour l’Office central de lutte contre les atteintes à l’environnement et à la santé publique. Il me semble que l’on pourrait avoir satisfaction sur ce point.

Quant au Centre hospitalier universitaire de Caen, j’approuve les propos tenus par M. Claude Leteurtre : j’ai en ma possession la liste des douze personnes contaminées par l’amiante ; il s’agit en fait d’ouvriers, de chauffagistes ou d’électriciens. Dès lors, dire qu’on se fait « amianter » en allant au CHU de Caen est clairement une contrevérité.

Sur la réforme des conditions d’attribution de l’allocation de cessation anticipée d’activité, j’ai effectivement proposé un amendement au projet de loi de financement de la sécurité sociale visant à ce que soit retenu dans le champ des bénéficiaires les personnes relevant de métiers à risques et de certains secteurs d’activité. Le sujet a fait l’objet de multiples études, notamment de l’Agence française de sécurité sanitaire de l’environnement et du travail, de la Caisse nationale d’assurance maladie des travailleurs salariés et de l’Institut national de la prévention et de l’éducation à la santé. Il m’a semblé que l’on avait avancé sur cette question, néanmoins l’amendement n’a pas été adopté et je dois prochainement m’en entretenir avec le ministre en charge de cette question.

Je remercie M. Maxime Gremetz de ses observations. Nous avons en effet tenté de travailler dans un bon esprit afin d’améliorer la situation actuelle. Concernant la question des éthers de glycol et de toutes les substances cancérigènes, mutagènes et toxiques pour la reproduction, il y a en effet un gros travail à faire pour ne pas être en retard sur ces questions dans quelques années. Concernant les propositions avancées par M. Maxime Gremetz, j’indique que sa contribution ainsi que le compte rendu de la présente réunion seront bien évidemment intégrés dans le rapport adopté par la mission d’information.

M. Maxime Gremetz. J’ai proposé de mentionner directement dans le rapport même la décision intervenue le 2 novembre dernier, après la fin des travaux de la mission. Pourquoi ne pas prendre en compte la décision de la Cour de cassation et ne pas la faire figurer dans le rapport comme une recommandation supplémentaire, de sorte que le rapport de la mission colle à l’actualité ? Il ne s’agirait au fond que de prendre en compte la décision de la Cour de cassation.

M. le rapporteur. Je ne suis pas opposé à cette prise en compte sous forme d’une note dans le rapport, mais j’attire votre attention sur le fait que celui-ci a déjà été adopté par la mission d’information et que la commission se prononce aujourd’hui sur sa publication.

Concernant la prévention, les dernières recommandations de l’Agence nationale pour l’accréditation et l’évaluation en santé résultent d’une conférence de consensus de 1999. Ses préconisations sont anciennes et le Gouvernement a demandé en 2006 à la Haute Autorité de santé de les actualiser. Elle doit maintenant se prononcer mais la mission demande qu’elle intervienne dans les six mois.

Le scanner constitue l’examen de référence mais l’avis de la Haute Autorité de santé est primordial sur ce point : un suivi trop rapproché de personnes non malades peut en effet générer un sentiment d’anxiété. C’est pourquoi nous avons demandé qu’elle se prononce également sur les répercussions psychologiques possibles de d’utilisation du scanner.

Si plusieurs pays ont mis en place l’équivalent du Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante, la France est aujourd’hui un des seuls pays à instituer un dispositif de préretraite spécifique. Si l’on peut faire des progrès concernant les conditions de cessation anticipée d’activité, il convient de garder ce point présent à l’esprit. Pour déterminer les bénéficiaires du FCAATA, il apparaît notamment nécessaire d’abandonner le recours à une liste d’établissements et de retenir plutôt une liste combinant métiers à risques et secteurs d’activités exposés. La mise en place d’une voie d’accès individuelle au FCAATA apparaît assez lourde et soulève plusieurs difficultés, concernant notamment la preuve d’une exposition à l’amiante. À l’avenir, le carnet de travail du salarié permettra sans doute de remédier à ces difficultés.

M. Maxime Gremetz. Le rôle des comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail est également important.

M. le rapporteur. En effet, il conviendrait de les revaloriser et d’améliorer la formation de leurs membres…

M. Maxime Gremetz. …ainsi que leur information.

M. le rapporteur. M. Bernard Perrut a évoqué la définition des valeurs limites d’exposition, qui sont définies par l’Agence française de sécurité sanitaire de l’environnement et du travail. Le seuil est actuellement de 5 fibres par litre, ce qui correspond à ce qu’on appelle un « bruit de fond » qui a vocation à décroître avec la diminution progressive du taux d’exposition ambiant. Il pourra donc être réactualisé pour être fixé à 0,5 fibre par litre mais l’on ne peut pas fixer la limite à zéro car cette valeur est liée à l’environnement.

Concernant les manquements aux obligations de sécurité, il est important de moduler les sanctions en fonction de la taille et du chiffre d’affaires de l’entreprise et du groupe.

M. Maxime Gremetz. Il doit en effet y avoir une modulation des sanctions selon la taille du groupe et non de l’entreprise.

M. le rapporteur. Concernant les inégalités territoriales, il est vrai que certaines cours d’appel sont plus généreuses que d’autres, par exemple la cour d’appel de Douai. C’est la raison pour laquelle il apparaît nécessaire de fixer un barème global. J’ai récemment déposé une proposition de loi en ce sens concernant les personnes victimes de dommages corporels, étant précisé que la justice reste bien évidemment indépendante : ce barème constituerait une base pour les juges.

S’agissant du FCAATA, il y a un vrai problème en effet concernant la situation des artisans qui en sont exclus. Il convient de les intégrer dans le régime actuel. La question se pose d’ailleurs également pour des fonctionnaires.

M. Christian Hutin. Notamment de l’Éducation nationale.

M. le rapporteur. Bien que cela ne relevait pas stricto sensu du champ de la mission d’information, la question des fibres fines et courtes a été aussi abordée. Selon l’Agence française de sécurité sanitaire de l’environnement et du travail, le caractère cancérigène de ces fibres fines serait au moins égal à celui des fibres longues. Les nuages d’amiante dans le cadre de travaux de désamiantage comporteraient ainsi 20 % de fibres fines. Nous proposons en conséquence de les mesurer par microscope électronique et pas seulement par extrapolation comme c’est le cas actuellement. Concernant les fibres courtes, il convient de rappeler que l’agence a considéré que leur caractère toxique et cancérigène ne pouvait pas être écarté. Il convient donc de rester vigilant concernant la preuve ou non de leur toxicité. Le cas échéant, la France serait le premier pays au monde à prendre position sur cette question des fibres courtes et, éventuellement, le premier pays à adopter une réglementation en la matière.

Mais nous avons également travaillé sur les expositions environnementales, par exemple en Corse ou en Nouvelle-Calédonie.

M. Pierre Cardo. Il y en a également dans les Alpes.

M. le rapporteur. Un travail de végétalisation des sites doit être conduit pour éviter les expositions à l’amiante mais celui-ci se heurte à des obstacles d’ordre culturel. Ainsi, en Nouvelle-Calédonie, certaines habitations sont traditionnellement recouvertes d’un enduit, le « pö », contenant de l’amiante.

S’agissant du radon, je rappellerai que la loi portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires comporte des dispositions qui constituent une première étape.

Il est indéniable qu’il convient, comme l’a souligné Mme Catherine Génisson, de valider le scanner comme examen de référence mais il faut aussi examiner attentivement la question de la fréquence des examens et du sentiment d’anxiété qu’ils sont susceptibles de générer.

Au total, nous avons tenu compte des travaux conduits en vue des précédents rapports, lesquels n’ont été malheureusement que peu suivis d’effets. M. Xavier Darcos a accepté de poursuivre le travail engagé sur la réforme du dispositif de cessation anticipée d’activité et nous veillerons pour notre part à la suivre attentivement. Enfin, les questions de l’amiante et du radon, qui ont été évoquées lors de l’examen du projet de loi portant réforme de l’hôpital, devront sans doute être de nouveau évoquées, notamment dans le cadre des débats sur le financement de la sécurité sociale pour 2011.

M. le président Pierre Méhaignerie. Je remercie le président, le rapporteur ainsi que les membres de la mission d’information pour leur travail.

Les problèmes évoqués dans le cadre du rapport, l’amiante mais aussi le radon n’étant pas sans conséquences pour les populations, en particulier dans certains bassins d’emplois, je vous propose la mise en place d’un comité de suivi constitué d’un membre de chaque groupe politique.

La Commission, consultée, autorise, en application de l’article 145 du Règlement, le dépôt du rapport d’information en vue de sa publication.

La séance est levée à 11 h 40.

——fpfp——

Présences en réunion

Réunion du mercredi 18 novembre 2009 à 10 heures

Présents. - M. Élie Aboud, Mme Edwige Antier, M. Jean Bardet, Mme Véronique Besse, Mme Gisèle Biémouret, Mme Valérie Boyer, M. Pierre Cardo, Mme Martine Carrillon-Couvreur, M. Jean-François Chossy, Mme Marie-Françoise Clergeau, M. Georges Colombier, Mme Marie-Christine Dalloz, M. Rémi Delatte, M. Vincent Descoeur, M. Jacques Domergue, M. Dominique Dord, Mme Laurence Dumont, Mme Cécile Dumoulin, Mme Cécile Gallez, Mme Catherine Génisson, M. Jean-Patrick Gille, M. Maxime Gremetz, Mme Anne Grommerch, Mme Danièle Hoffman-Rispal, M. Christian Hutin, Mme Monique Iborra, M. Michel Issindou, M. Denis Jacquat, M. Yves Jego, M. Guy Lefrand, Mme Catherine Lemorton, M. Jean-Claude Leroy, M. Claude Leteurtre, M. Céleste Lett, M. Michel Liebgott, Mme Gabrielle Louis-Carabin, M. Guy Malherbe, M. Jean Mallot, M. Pierre Méhaignerie, M. Pierre Morange, M. Roland Muzeau, Mme Dominique Orliac, M. Bernard Perrut, M. Étienne Pinte, M. Jean-Frédéric Poisson, Mme Bérengère Poletti, M. Jean-Luc Préel, M. Simon Renucci, M. Arnaud Robinet, M. Jean-Marie Rolland, M. Patrick Roy, M. Jean Ueberschlag, Mme Isabelle Vasseur

Excusés. - M. Yves Bur, M. Gérard Cherpion, M. Jean-Marie Le Guen, M. Christophe Sirugue, M. Dominique Tian, Mme Marisol Touraine

Assistait également à la réunion. - M. Gérard Gaudron