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Commission des affaires sociales

Mercredi 21 juillet 2010

Séance de 9 heures 30

Compte rendu n° 72

Présidence de M. Pierre Méhaignerie, Président

– Suite de l’examen du projet de loi portant réforme des retraites (n° 2760) (M. Denis Jacquat, rapporteur)

– Amendements examinés par la commission (cf. lien ci-dessous)

– Présences en réunion

http://www.assemblee-nationale.fr/13/pdf/amendements_comm_soc_retraites.pdf

COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES

Mercredi 21 juillet 2010

La séance est ouverte à neuf heures trente-cinq.

(Présidence de M. Pierre Méhaignerie, président de la commission)

La Commission poursuit l’examen, sur le rapport de M. Denis Jacquat, du projet de loi portant réforme des retraites (n° 2760)

M. le président Pierre Méhaignerie. Nous poursuivons l’examen des articles du projet. Hier soir, la Commission s’est arrêtée à l’amendement AS 88 à l’article premier.

TITRE Ier
DISPOSITIONS GÉNÉRALES

Chapitre Ier
Pilotage des régimes de retraite

Article 1 : Création d’un comité de pilotage des régimes de retraite (suite)

La Commission examine l’amendement AS 88 de M. Roland Muzeau.

Mme Jacqueline Fraysse. Nous proposons de garantir à l’ensemble des retraités, quelle que soit leur durée de cotisation, un minimum de revenu « vital » égal à 75 % du SMIC, si tant est qu’il soit possible de vivre avec aussi peu dans notre société.

M. Denis Jacquat, rapporteur. Le Gouvernement a pris des mesures importantes en faveur de la revalorisation du minimum vieillesse, qui ont déjà permis d’augmenter son montant de 25 % en cinq ans. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement AS 88.

Elle examine ensuite l’amendement AS 368 de M. Jean-Luc Préel.

M. Jean-Luc Préel. Nous souhaitons une réforme complète et une remise à plat du système qui permette d’aller vers plus d’équité et de justice, donc vers un régime universel à points géré par les partenaires sociaux ou vers un régime en comptes notionnels, sans doute préférable, puisqu’il prend en compte l’espérance de vie, et donc indirectement la pénibilité. Un comité de pilotage a été mis en place ; cet amendement propose de lui assigner une mission supplémentaire : mettre en œuvre les conditions d’un régime universel à points ou en comptes notionnels.

M. le rapporteur. Je félicite Jean-Luc Préel pour sa constance… Mais cette réforme n’est pas une réforme systémique – choix que je soutiens – même si elle ne doit pas empêcher de multiplier les mesures de rapprochement entre les différents régimes. Le texte en propose d’ailleurs un certain nombre. 2010 est le rendez-vous de l’équilibre. Un autre rendez-vous est prévu en 2018. Nous pourrons rediscuter de votre proposition à ce moment-là. Avis défavorable, par conséquent.

M. Éric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique. Je vous sais très attaché à l’idée d’un régime en comptes notionnels. Celle-ci n’est pas forcément étrangère aux préoccupations du Gouvernement, mais pas dans le cadre de cette réforme. Nous pouvons encore décider, d’ici septembre, d’y réfléchir dans les années qui viennent. Pour l’heure, notre priorité est de préserver l’équilibre financier de nos retraites. Je suis donc également défavorable à cet amendement.

Mme Marisol Touraine. Nous sommes pour notre part résolument opposés à tout ce qui s’apparenterait à un régime par points. Le régime en comptes notionnels, en revanche, a l’intérêt de permettre l’unification des régimes existants, même s’il a aussi une certaine fragilité, comme le montre l’exemple de la Suède, où il a abouti à une baisse du niveau des pensions. Pour le Parti socialiste, il faut s’inspirer de ce qui a été fait dans ce pays pour créer un compte temps qui permette de construire la carrière de chaque salarié tout au long de sa vie et d’avoir une prise en compte de l’ensemble des périodes travaillées – y compris les stages ou les périodes cotisées comme les études. Nous romprions ainsi avec la rigidité d’aujourd’hui au profit d’une allocation du temps plus moderne – on peut en effet fort bien souhaiter prendre du temps entre 30 et 40 ans et travailler au-delà de 60 ou 65 ans. Nous sommes, en revanche, hostiles à tout dispositif qui aboutirait à réguler le système par une baisse du niveau des pensions.

M. le président Pierre Méhaignerie. Très peu d’organisations – hormis la CFDT – ont défendu le système à points ou en comptes notionnels lors des auditions.

La Commission rejette l’amendement AS 368.

Elle examine ensuite l’amendement AS 416 du rapporteur.

M. Le rapporteur. Compte tenu de l’extrême fragmentation de notre système de retraite, il est indispensable que le comité de pilotage ait pour mission de veiller au rapprochement des règles et des paramètres dans les différents régimes.

M. le ministre. Favorable.

La Commission adopte l’amendement AS 416.

Puis, elle est saisie de l’amendement AS 366 de M. Jean-Luc Préel.

M. Jean-Luc Préel. Puisque M. le ministre est favorable à une réflexion sur le sujet, cet amendement devrait connaître un sort meilleur que le précédent. Il s’agit de prévoir un rapport du Gouvernement au Parlement, avant le 31 décembre 2010, sur la possibilité d’une réforme systémique, pour faire évoluer le système de retraite par annuité vers un régime par points ou en comptes notionnels. Précisons que cette transformation demande du temps : la Suède a mis douze ou quinze ans à y parvenir. Il est donc urgent de commencer à réfléchir.

M. le rapporteur. Le COR a rendu il y a peu un excellent rapport sur ce thème. Avis défavorable.

M. Pascal Terrasse. Il est surprenant qu’un membre de la majorité laisse ainsi entendre que la présente réforme ne serait qu’une réforme paramétrique… Le projet socialiste comporte une partie paramétrique, dont nous avons longuement parlé hier, mais il pose aussi la question d’une réforme d’ensemble. La CFDT elle-même nous a rappelé qu’elle était très attachée à ce que l’on arrive à terme à un système unique – ce que le Parti communiste a appelé « la maison commune des retraites » – que l’on pourrait éventuellement faire évoluer par la suite.

S’agissant du système à points, il me semble intéressant de rappeler que les deux tiers des ressources des cadres retraités proviennent de régimes complémentaires à points. Personnellement, je tire d’une année de travaux dans le cadre du COR la conclusion que le régime en comptes notionnels n’a pas que des inconvénients – même si le système suédois est aujourd’hui déficitaire - et doit être regardé de près.

M. le ministre. Cette réforme est une réforme de structure. Je ne la qualifierais pas de réforme systémique, mais elle n’est pas uniquement paramétrique : il y a bien une prise en compte globale d’un certain nombre de situations avec, par exemple, l’intégration de la pénibilité.

Nous ne fermons pas la porte à une réflexion plus large, mais je ne pense pas qu’elle doive être conduite dans le cadre d’un rapport. Je suis donc défavorable à cet amendement.

La Commission rejette l’amendement AS 366.

Elle examine ensuite l’amendement AS 367 de M. Jean-Luc Préel.

M. Jean-Luc Préel. Parce que nous sommes particulièrement attachés à l’évolution vers un régime unique géré par les partenaires sociaux, nous sommes favorables à la mise en extinction des régimes spéciaux. Cette extinction serait progressive : ceux qui bénéficient du système actuel conserveraient leurs droits et seuls les nouveaux entrants relèveraient du régime unique universel.

M. le rapporteur. Une réforme des régimes spéciaux a été engagée en 2008, et la présente réforme leur sera appliquée à compter de 2017. Avis défavorable.

M. le ministre. Même avis : les régimes spéciaux ont déjà été réformés.

La Commission rejette l’amendement AS 367.

Puis, elle adopte l’amendement rédactionnel AS 429 du rapporteur.

Elle est ensuite saisie de l’amendement AS 89 de M. Roland Muzeau.

M. Roland Muzeau. Nous avons contesté hier que confier autant de missions au comité de pilotage revenait à dessaisir le Parlement. C’est bien au législateur, non au comité, de décider des modifications à venir.

M. le rapporteur. Je me suis exprimé à ce propos hier, avis défavorable.

M. le ministre. Même avis.

La Commission rejette l’amendement AS 89.

Elle examine ensuite l’amendement AS 417 du rapporteur.

M. le rapporteur. Il s’agit de faire en sorte que le comité de pilotage se réunisse au moins une fois par an.

La Commission adopte l’amendement AS 417, de même que l’amendement rédactionnel AS 430 du rapporteur.

Puis, elle est saisie de l’amendement AS 227 de Mme Marisol Touraine.

M. Christophe Sirugue. Alors que l’enjeu est d’assurer la pérennité de la réforme, vous ne proposez rien de concret au-delà de l’échéance de 2018. Il faut donc se fixer un horizon plus conforme aux perspectives financières et démographiques. Nous avons besoin de mesures financières à court terme, mais aussi de mesures systémiques à long terme. C’est pourquoi le groupe socialiste propose de remplacer l’échéance de 2018 par celle de 2025.

M. le rapporteur. Je suis bien d’accord : il faut des mesures financières à court terme. Il n’est donc ni raisonnable ni responsable de repousser le retour à l’équilibre des régimes de retraite à 2025. Avis défavorable.

M. le ministre. L’objectif du Gouvernement est d’arriver à l’équilibre le plus rapidement possible. Pourquoi donc retarder l’échéance ?

M. Michel Liebgott. Vous nous présentez cette réforme comme fondamentale pour assurer l’équilibre financier de nos régimes de retraite sur le long terme, mais c’était déjà le cas en 2003 ! Il s’agit donc simplement d’une réforme comptable – et faussement comptable comme l’a dit hier notre collègue Alain Vidalies. Or, il est très important de s’inscrire dans le temps. J’ai dénoncé pour ma part l’utilisation qui a été faite du Fonds de réserve pour les retraites. Tout cela ne règle en rien la situation à long terme. Les jeunes ont de vraies raisons de s’inquiéter, car la réforme n’assure qu’un financement à très court terme, alors même qu’ils vont avoir des carrières discontinues. Il faut donc au moins aller jusqu’en 2025. Dois-je rappeler que les études du COR parlaient de 2050 ? Fixer le retour à l’équilibre à 2018 ne permet pas d’assurer une réforme de fond.

Mme Valérie Rosso-Debord. Il est étonnant de vouloir différer de sept ans le retour à l’équilibre. Les jeunes ont besoin d’un espoir, et en repoussant l’échéance, vous ne leur donnez que de la désespérance.

M. le rapporteur. Monsieur Liebgott, il y a une différence entre prévisions et projections : lorsque le COR parle de 2050, il s’agit de projections. Ce qui importe, c’est de parvenir à l’équilibre le plus rapidement possible. Je vous rappelle que nous avons atteint en 2010 les chiffres que nous attendions en 2030 ! Je maintiens donc mon avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement AS 227.

La Commission examine ensuite l’amendement AS 90 de M. Roland Muzeau.

Mme Jacqueline Fraysse. De façon à exclure du suivi de la progression du taux d’emploi des seniors les emplois précaires, en intérim ou en temps partiel, nous proposons de substituer l’indicateur de « taux d’emploi en CDI » à celui de simple « taux d’emploi ».

Remplacer les mots « l’horizon 2030 » par « 2020 », permettrait, en outre, de tenir compte de l’urgence de la situation, du caractère modeste de l’objectif fixé, et du fait que le relèvement de l’âge du droit à la retraite va conduire mécaniquement à l’abaissement du montant des pensions.

M. le rapporteur. La rédaction actuelle de l’alinéa 10 est tout à fait satisfaisante. Avis défavorable.

M. le ministre. Même avis. Nous avons inscrit un objectif en matière d’emploi des seniors, ce qui constitue une belle avancée. La nature de l’emploi est une autre question.

M. Roland Muzeau. Notre rapporteur doit faire l’effort de répondre aux questions posées !

Il a, comme le Gouvernement, le tort de minimiser l’importance de cet amendement, qui aborde la question essentielle du montant des cotisations. Alors que le Gouvernement retient la démographie pour seul critère, nous estimons nécessaire de prendre en compte le rapport entre le nombre de salariés et le montant des cotisations perçues. En effet, ces dernières sont affectées par le sous-emploi et la précarité, ce qui entraîne une réduction considérable des recettes attendues par les régimes de retraite.

La question de l’emploi est donc déterminante pour la préservation de notre système de retraite.

M. le rapporteur. Nous ne minimisons rien ! Mais à l’occasion de la discussion d’une précédente loi de financement de la sécurité sociale, ainsi que lors de nombreuses réunions de notre commission, nous avons longuement évoqué le problème de l’emploi des seniors. La France s’est dotée d’un programme destiné à lui faire suivre l’exemple de la Finlande : ce pays qui, il y a vingt ans, connaissait les mêmes chiffres que nous en matière d’emploi des plus de 60 ans, a obtenu depuis d’excellents résultats.

La Commission rejette l’amendement AS 90.

Elle adopte ensuite l’amendement rédactionnel AS 431 du rapporteur.

Puis, elle est saisie de l’amendement AS 228 de Mme Marisol Touraine.

M. Michel Issindou. En matière d’emploi des seniors, nous sommes beaucoup plus ambitieux que vous : nous souhaitons atteindre la moyenne des pays européens dès 2020, et non en 2030. Pour ce faire, le programme du Parti socialiste – que vous ne pouvez avoir lu, puisque vous niez son existence –, propose quatre mesures : accompagner les salariés en leur donnant rendez-vous tous les deux ou trois ans à partir de 45 ans ; rendre obligatoire la négociation triennale de la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences dans les entreprises de plus de 300 salariés ; généraliser le tutorat ou les binômes en entreprises et améliorer les conditions de travail des plus de 55 ans – par exemple en limitant, voire en supprimant le travail de nuit et les tâches physiques. Ces changements impliquent que des mesures draconiennes soient prises, sous la forme d’un mécanisme de bonus-malus. Un tel programme permettrait d’amener le taux d’emploi des seniors bien au-delà de 38 %.

M. le rapporteur. Le Gouvernement a déjà pris de nombreuses mesures en faveur de l’emploi des seniors : suppression des dispenses de recherche d’emploi et des préretraites, dispositions sur le cumul entre emploi et retraite, etc. Vous faites des propositions à ce sujet, mais celles du projet de loi me paraissent meilleures : avis défavorable.

M. le ministre. Tout le monde est d’accord pour augmenter le taux d’emploi des seniors. Nous avons déjà pris des mesures en ce sens et le projet de loi en contient de nouvelles. Je ne vois pas l’intérêt de changer la date de 2030.

M. Dominique Dord. Les auditions auxquelles nous avons procédé ont montré que le taux d’emploi des seniors était corrélé au niveau de l’âge légal de départ à la retraite. On peut se donner pour objectif d’atteindre la moyenne européenne en 2020 ou en 2030, mais cela sera difficile si les autres pays européens modifient l’âge légal. C’est pourquoi les deux rédactions me paraissent hasardeuses.

Mme Marisol Touraine. Le Rapporteur a indiqué que notre pays se donnait pour objectif le taux d’emploi des seniors observé en Finlande, mais à lire le texte, ce n’est pas le cas. Vous préconisez le relèvement de ce taux de seulement 10 points en vingt ans, quand la Suède l’a augmenté de 20 points en seulement dix ans ! Or, il est inimaginable que l’on parvienne à régler le problème des retraites sans apporter une réponse forte à la question de l’emploi des seniors. Si nous voulons mobiliser tous les acteurs concernés, nous devons fixer une échéance plus rapprochée, soit 2020. Sans chercher à faire aussi bien que la Finlande – où les habitudes culturelles sont différentes –, il me paraîtrait nécessaire de parvenir à relever le taux d’emploi des seniors de 10 points en dix ans.

M. Arnaud Robinet. Lorsque l’on compare le taux d’emploi des seniors en France et dans les autres pays européens, il n’est pas justifié de prendre pour référence le taux de 38 %, qui est calculé sur la tranche d’âge allant de 55 à 65 ans. En effet, si nous prenons en compte la tranche de 55 à 59 ans, nous nous situons dans la moyenne européenne – un résultat certes perfectible, mais dont nous n’avons pas à rougir. Le mauvais chiffre dans la tranche d’âge 55-65 ans s’explique par le fait qu’en France, l’âge légal de départ à la retraite est le plus bas d’Europe. C’est d’ailleurs pour cette raison qu’il tombe à 18 % dans la tranche 60-65 ans. Ainsi, l’élévation de l’âge légal, mesure phare du projet de loi, est le meilleur moyen d’augmenter le taux d’emploi des seniors.

La Commission rejette l’amendement AS 228.

Elle examine ensuite l’amendement AS 232 de Mme Marisol Touraine.

Mme Marie-Françoise Clergeau. Nous proposons de rédiger ainsi le 3° du II de l’article 1er : « La réduction des écarts de pensions, d’âge moyen de fin d’activité et d’âge moyen de départ à la retraite entre les hommes et les femmes ; ». En effet, s’il est légitime que le comité de pilotage s’attache à réduire les écarts de pensions entre les hommes et les femmes, ce seul critère ne saurait suffire. Alors que plus d’une salariée sur trois est aujourd’hui amenée à attendre l’âge de départ à taux plein, afin de ne pas subir les effets de la décote liés à une carrière incomplète, il semble important de s’assurer que le report à 67 ans de l’âge du taux plein ne conduise pas à accroître l’écart entre les âges de départ en retraite des hommes et des femmes.

De même, il convient de ne pas ignorer la dimension du genre dans l’objectif de progression du taux d’emploi des seniors, donc de recul de l’âge moyen de fin d’activité, afin de rapprocher les périodes pendant lesquelles ces derniers sont pris en charge par l’assurance chômage.

M. le rapporteur. La rédaction actuelle de l’alinéa 11 me semble suffisante. L’objectif de réduction de l’écart des pensions est prioritaire. Avis défavorable.

Mme Catherine Génisson. C’est l’inégalité de traitement entre hommes et femmes, tant dans l’activité professionnelle qu’en matière de retraite, qui est le sujet primordial. N’oublions pas qu’il y a environ 40 % de différence entre les niveaux de pension des hommes et des femmes, ni que le recul de l’âge légal de la retraite sera extrêmement pénalisant pour ces dernières. Aujourd’hui, déjà, pour bénéficier du taux plein, les femmes prennent leur retraite à 65 ans ; elles devront donc la prendre à 67 ans si le projet de loi est adopté.

J’ajoute qu’un membre de la majorité propose de maintenir à 60 ans l’âge légal pour les femmes.

M. le rapporteur. Le sujet est, en effet, primordial. Nous en reparlerons au moment de l’examen de l’article 31, qui fait l’objet d’un amendement que vous devriez pouvoir adopter.

M. le ministre. La rédaction du projet est très claire. La vraie question est celle de l’écart entre les pensions.

La Commission rejette l’amendement AS 232.

Puis, elle est saisie de l’amendement AS 91 de Mme Martine Billard.

Mme Martine Billard. Le projet fixe comme objectif « la réduction des écarts de pensions entre hommes et femmes ». Nous demandons pour notre part leur annulation, ce qui semble la moindre des ambitions. Notre législation ne vise-t-elle pas à l’égalité entre femmes et hommes ? Il convient de se donner un objectif clair, or se contenter de réduire les écarts revient à vouloir les maintenir.

M. le rapporteur. L’exposé des motifs de l’amendement qualifie de « préoccupation secondaire du Gouvernement » l’exigence d’égalité des pensions entre hommes et femmes, ce qui est tout à fait faux et excessif. Cela étant, je suis favorable à l’amendement.

M. le ministre. Il est vrai que parler d’une réduction des écarts peut laisser croire que l’on accepterait de les voir subsister. Avis favorable.

M. Pascal Terrasse. Une étude de l’Institut national des études démographiques montre que la loi de 2003 a eu un impact très négatif sur les pensions perçues par les femmes. Même si l’évolution de la sphère familiale, notamment du taux de divorce, a joué un rôle dans le phénomène, le système de décote a fortement contribué à la dégradation de leur montant. Mais, il ne faudrait pas que la question de l’égalité entre les hommes et les femmes en matière de retraite ne conduise à mettre au second plan le problème de l’égalité des salaires et des carrières professionnelles.

Quant à l’amendement, je me réjouis qu’il reçoive un avis favorable. Nous verrons dans la suite du débat quelle est la volonté du Gouvernement d’atteindre l’objectif fixé.

La Commission adopte l’amendement AS 91.

Elle examine ensuite l’amendement AS 92 de M. Roland Muzeau.

Mme Jacqueline Fraysse. Selon l’alinéa 12, le comité de pilotage « propose » l’ensemble des mesures correctrices justifiées par la situation des régimes de retraite. Le comité se voit ainsi confier des missions et des responsabilités qui sont en réalité celles du législateur.

Je rappelle, en outre, qu’il existe déjà une commission de garantie des retraites, créée par la loi de 2003 et chargée de rendre des avis sur les évolutions nécessaires en matière de retraite. De son côté, le COR dispose d’attributions du même ordre.

Enfin, dans la mesure où le comité de pilotage comprend parmi ses membres les ministres de la sécurité sociale, du budget et de la fonction publique, on peut juger qu’avec une telle structure le Gouvernement se donnera des conseils à lui-même.

Pour toutes ces raisons, cette disposition nous apparaît non seulement inutile, mais même dangereuse.

M. le rapporteur. Afin de garantir le retour à l’équilibre en 2018, il est essentiel que, chaque année, le comité de pilotage puisse proposer – j’insiste sur le mot – les mesures correctrices nécessaires en cas de dérapage financier. Avis défavorable.

M. le ministre. Même avis.

M. Dominique Dord. Les mêmes collègues nous ont proposé hier d’élargir les compétences du comité de pilotage en lui confiant le soin de faire des propositions au Parlement, je ne comprends pas bien.

Mme Catherine Génisson. Cet amendement illustre une fois de plus à quel point la mise en place de ce comité de pilotage serait dangereuse, parce qu’elle constituerait un déni de l’action politique et une méconnaissance des pouvoirs exécutif et législatif.

Mme Martine Billard. L’amendement auquel notre collègue a fait allusion correspondait à notre véritable souhait, mais il n’a pas été adopté. L’amendement AS 92 est donc de repli. Ce que nous refusons, c’est que le comité de pilotage ait un pouvoir de décision et cela vaut aussi pour le comité destiné à surveiller l’ONDAM : nous sommes opposés à ce type de structures. Il est d’ailleurs surprenant, à l’heure où la révision générale des politiques publiques conduit à la suppression de nombreuses instances, d’en créer une nouvelle. Mais, à défaut d’obtenir la suppression du comité, nous voulons que le Parlement ait toujours le dernier mot. C’est le sens de nos amendements de repli.

M. le ministre. Même s’il me paraît important de continuer à travailler sur les retraites avec les partenaires sociaux qui siégeront au sein du comité, il ne faut pas donner à ce dernier plus d’importance qu’il n’en a : il est destiné à coordonner les politiques et à faire des propositions à destination de l’exécutif comme du Parlement. Chacun est dans son rôle, et il ne s’agit pas d’ôter à quiconque une partie de ses prérogatives. En outre, il n’existe pas aujourd’hui d’instance de coordination des régimes de retraite.

La Commission rejette l’amendement AS 92.

Elle adopte ensuite l’amendement rédactionnel AS 432 du rapporteur.

Puis, elle est saisie de l’amendement AS 93 de Mme Martine Billard.

Mme Martine Billard. J’observe, monsieur le ministre, que le comité de pilotage pourra proposer des mesures de nature réglementaire, ce qui reviendrait à court-circuiter le Parlement.

Nouvel amendement de repli, l’amendement AS 93 porte sur la composition du comité de pilotage, car la seule présence des représentants des régimes de retraite ne nous satisfait pas. Nous proposons donc une composition proche de celle du COR, à la différence que les personnalités qualifiées seraient remplacées par des représentants des centrales syndicales non représentées aujourd’hui au COR, afin de donner une voix à des syndicats écartés par les nouvelles règles de représentativité.

Nous nous inquiétons de savoir si l’ensemble des syndicats de salariés ou d’employeurs seront représentés au sein du comité de pilotage, dont nous ignorons pour le moment le nombre de membres. Dans son état actuel, le texte du projet de loi donne au Gouvernement un blanc-seing pour déterminer la composition du comité. Au moins le ministre pourrait-il nous apporter plus de précisions.

M. le rapporteur. La définition détaillée de la composition du comité de pilotage est de nature réglementaire. Avis défavorable.

M. le ministre. Le comité sera composé, de façon classique, de représentants du Gouvernement, de représentants des régimes de retraite obligatoires et de personnalités qualifiées.

M. Roland Muzeau. Une fois de plus, le Rapporteur ne veut pas répondre. Quant au ministre, il vient de nous donner des indications sur la composition du comité, mais peut-il, a contrario, nous préciser quelles organisations ou institutions citées par notre amendement ne sauraient à ses yeux y être représentées ?

M. le ministre. Les syndicats qui siégeront au comité sont ceux représentés au niveau interprofessionnel, notamment ceux qui participent à la gestion des caisses de retraite. Mais, je ne suis pas hostile à ce que des parlementaires puissent par ailleurs y siéger.

La Commission rejette l’amendement AS 93.

Elle examine ensuite les amendements AS 229 et AS 230 de Mme Marisol Touraine.

M. Alain Vidalies. La question posée par cet amendement et par l’amendement AS 230 est celle de l’horizon de la réforme. Sur ce point, le débat politique et médiatique n’a pas eu lieu de façon acceptable : on se souvient des gros titres sur les perspectives en 2050, sur les milliards d’euros de déficit et sur la faillite généralisée du système. Pourtant, monsieur le ministre, lors de votre rencontre avec les responsables du Parti socialiste, vous n’étiez pas en mesure de préciser l’horizon de la réforme, tout en admettant que son contenu ne pourrait être le même selon que l’échéance serait 2050, 2030 ou un terme plus court. Nous avons donc été surpris qu’un projet de loi, comprenant des mesures systémiques comme l’allongement de la durée de cotisation, limite son horizon à l’année 2018.

Comparons avec ce que disait, en 2003, M. Fillon à la tribune de l’Assemblée : « Nous proposons d’assurer l’équilibre du régime général par une augmentation des cotisations à partir de 2008 et jusqu’en 2020. » Il ajoutait que les recettes disponibles étaient largement supérieures aux milliards nécessaires, avant de conclure que la réforme permettrait de couvrir l’intégralité des déficits de nos régimes tels qu’ils étaient alors prévus, et ce jusqu’en 2020. Quelques années plus tard, on comprend que, loin de proposer une réforme sur les retraites, on nous fait payer le prix de la crise.

Il y a deux sortes de Français : ceux qui se sentent concernés par la réforme en cours, et les plus jeunes, ceux de 20 ou 30 ans, pour qui la retraite n’est pas une préoccupation immédiate. Or on peut craindre une crise de confiance dans cette dernière catégorie si le système de retraite est de nature à subir, dans une période aussi courte – six ans –, des changements aussi importants que l’allongement de la durée de cotisation. Il en résulte une incertitude, non seulement sur la sincérité du discours politique, mais aussi sur la viabilité du système, de nature à perturber les jeunes générations.

À lire certaines propositions, nous en venons à douter que tous les membres de la majorité soient aussi attachés qu’ils le prétendent au système par répartition. Or, le fait d’annoncer en permanence des réformes portant sur des paramètres fondamentaux est justement une façon de le fragiliser – avant de prendre prétexte de cette fragilité pour préconiser la capitalisation.

M. le rapporteur. Avis défavorable aux deux amendements. Dans notre dispositif, le rendez-vous de 2018 est essentiel. Une fois que l’équilibre financier sera établi, il reviendra au pouvoir politique, c’est-à-dire au Gouvernement et au Parlement, éclairés par le COR et le comité de pilotage, de prendre les décisions nécessaires pour assurer la pérennité du système par répartition.

M. le ministre. Monsieur Vidalies, nous ne définissons pas de la même manière l’horizon de la réforme. Le Gouvernement aurait pu fixer un rendez-vous en 2030, mais cette date paraît trop éloignée pour permettre de tester l’équilibre financier du système, qui est au cœur de notre projet. On pouvait aussi fixer un terme plus proche et prévoir ensuite la manière de maintenir l’équilibre pendant les vingt années suivantes. Mais, là encore, la prévision restait fragile.

Notre objectif est plus pragmatique : nous prévoyons un équilibre pendant huit à dix ans, pendant lesquels la réforme monte progressivement en puissance. Et nous prenons rendez-vous pour 2018, date à laquelle elle s’appliquera. Il faudra faire le point à ce moment-là, car nul ne peut savoir aujourd’hui ce que sera l’économie à cette date. Ce rendez-vous dans dix ans – que les Allemands, les Anglais et les Espagnols ont pris, eux aussi – sera préparé par des rendez-vous annuels. Vous n’êtes pas obligés d’approuver la réforme, mais contester cet horizon ne me semble pas pertinent.

M. Arnaud Robinet. Proposer un rendez-vous plus éloigné ne pourrait qu’inquiéter davantage les jeunes générations. La réforme proposée va dans le bon sens, puisqu’elle vise à sauver le système par répartition auquel nous sommes tous attachés. Il y a un an et demi, comme beaucoup de jeunes actifs, je pensais moi-même que je risquais de ne jamais percevoir de retraite, alors même que je cotisais… La date de 2018 rassurera pleinement la jeune génération, puisqu’elle lui permettra de croire en l’avenir du système par répartition.

Mme Marisol Touraine. Nous sommes évidemment convaincus de la nécessité de prévoir des rendez-vous réguliers, afin de faire le point de l’évolution du financement des régimes de retraite ou de l’assurance maladie. Les travaux du COR visent à préparer ces rendez-vous, de même que les projets de loi de financement de la sécurité sociale permettent aux parlementaires de reconsidérer régulièrement la situation.

Reste à savoir quelle place vous assignez à ce rendez-vous dans votre projet. Si, pour atteindre l’équilibre en 2018, vous ponctionnez le Fonds de réserve pour les retraites, vous ne disposerez plus d’aucune ressource après cette date. Dès lors, comment financerez-vous les régimes de retraite ? Cette inconnue peut créer une inquiétude dans les jeunes générations. La seule perspective dont vous disposerez sera de relever encore l’âge légal de départ en retraite.

D’autre part, quoi que laisse entendre l’exposé sommaire de l’amendement AS 230, nous nous fixons la date de 2025 non pour assurer le financement des régimes, mais pour vérifier si, étant parvenus à l’assurer, nous pouvons poursuivre dans la même voie. Le projet socialiste prévoit un financement à beaucoup plus court terme en faisant appel à des ressources nouvelles. Il prévoit aussi des mesures démographiques structurelles, sur lesquelles nous reviendrons. Pour nous, 2025 sera un point d’étape à mi-parcours par rapport à l’échéance de 2050. Mais, nous serons parvenus à l’équilibre beaucoup plus tôt.

J’insiste pour savoir comment vous considérez la date de 2018 : prévoyez-vous d’aller plus loin à cette occasion, par exemple en retardant l’âge légal de départ en retraite de 62 à 65 ans ?

M. le ministre. Nous n’avons pas dit cela. Pour nous, 2018 sera l’occasion de faire le point au moment où le régime s’autofinancera. L’utilisation du fonds de réserve, que vous contestez, permettra de ne pas aggraver l’endettement avant cette date. En 2018, lorsque le dispositif sera peu à peu monté en puissance, l’enjeu sera de maintenir l’équilibre pour les années suivantes. Puisque l’univers dans lequel nous vivons n’est pas stable, et que la situation économique peut changer, nous regarderons comment prolonger l’équilibre des régimes de retraite, compte tenu des circonstances. Tous les gouvernements agissent ainsi. La date de 2018 n’a pas été choisie en fonction de l’épuisement du fonds de réserve.

La Commission rejette successivement les amendements AS 229 et AS 230.

Puis, elle examine l’amendement AS 415 du rapporteur

M. le rapporteur. Il s’agit de préciser le champ du rapport du COR prévu à l’alinéa 13.

La Commission adopte l’amendement AS 415.

Elle est ensuite saisie de l’amendement AS 94 de M. Roland Muzeau.

Mme Jacqueline Fraysse. L’amendement propose de supprimer l’alinéa 14, qui, de manière scandaleuse, assigne au comité de pilotage un rôle qui incombe au législateur. En outre, ce rôle est déjà assumé par le COR, plus représentatif et pluraliste que ne l’est le comité, dont nous ignorons toujours la composition. Nous savons seulement que le Gouvernement aura tout loisir d’y nommer qui il veut !

M. le rapporteur. Ce sera de toute façon au Parlement de prendre les décisions nécessaires.

M. le ministre. Même avis que le Rapporteur.

La Commission rejette l’amendement AS 94.

Puis, elle adopte l’amendement rédactionnel AS 433 du rapporteur.

Elle est ensuite saisie de l’amendement AS 231 de Mme Marisol Touraine.

Mme Marisol Touraine. En 2003, M François Fillon annonçait déjà un financement à 100 % à l’horizon de 2020, objectif qu’il n’a pas tenu. Comment ceux qui ont entre 30 et 45 ans auraient-ils confiance dans le système, quand ils ont le sentiment que l’on change constamment les règles du jeu et ignorent quelles mesures le Gouvernement envisage encore de prendre. Au cas où il faudrait reconsidérer la situation en 2018, quels paramètres modifierez-vous ? Pour notre part, si la situation l’exige en 2025, nous n’excluons pas d’allonger encore la durée de cotisation. Il faut répondre honnêtement à cette question, si l’on veut gagner la confiance des jeunes générations.

M. le rapporteur. Avis défavorable. J’ai déjà répondu sur ce point.

M. le ministre. Avis défavorable. Pour 2018, nous n’écartons, par définition, aucun paramètre. Pourquoi ne pas envisager des recettes nouvelles ? Il faut laisser la porte ouverte. Au reste, s’il est toujours angoissant de prévoir le financement des retraites avec dix ans d’avance, on peut aussi avoir de bonnes nouvelles : reprise de la croissance, augmentation de la masse salariale, meilleures rentrées de cotisations…

M. Alain Vidalies. Le 10 juin 2003, M. Fillon déclarait que son objectif était de consolider la répartition pour les deux décennies suivantes. C’est dire que sa conviction n’était pas moins forte que la vôtre. Voyez pourtant où l’on en est. Je n’ignore rien des modifications induites par la crise, mais nous sommes face à un problème de fond. Une situation conjoncturelle peut créer un problème de financement, mais à crise conjoncturelle, solutions conjoncturelles. Vous auriez pu prévoir des mesures transitoires, sans remettre en cause l’évolution globale ni les objectifs du système. Ce que vous faites est d’une autre nature, puisque vous tirez des conséquences structurelles d’une crise conjoncturelle. C’est ce qui explique notre inquiétude pour les rendez-vous à venir. À chaque nouvelle échéance, vous réglez la facture par des mesures structurelles : en 2003, vous avez allongé la durée de cotisation ; aujourd’hui, vous retardez la date légale de départ et celle de l’accession à la retraite à taux plein.

M. le président Pierre Méhaignerie. En novembre 2007, quand nous avons examiné le projet de loi de financement de la sécurité sociale, le débat sur la branche vieillesse n’était pas à l’ordre du jour, puisque nous pensions transférer vers elle un point et demi de cotisation UNEDIC. Quant à la branche maladie, je rappelle que l’ONDAM avait augmenté moins vite que la richesse nationale. Il est nécessaire d’adapter de manière permanente le financement à la conjoncture.

M. Alain Vidalies. Je ne dis rien d’autre !

M. le ministre. Dans le domaine social – à la différence du domaine économique –, le conjoncturel est durable. Quand on perd de la masse salariale, parce que le chômage augmente, on met du temps, sept ou huit ans parfois, à remonter la pente. En outre, les dépenses sont très importantes, alors qu’elles sont plus faciles à maîtriser ou à piloter dans le domaine budgétaire. Sur une période de dix ans, le conjoncturel s’associe donc nécessairement au structurel.

La Commission rejette l’amendement AS 231.

Elle examine ensuite l’amendement AS 67 de M. Dominique Tian.

M. Dominique Tian. Il me paraît indispensable que les partenaires sociaux fassent partie du comité de pilotage, surtout s’il est créé pour leur faire plaisir…

M. le rapporteur. Avis favorable. Il sera très utile que les organisations représentatives des employeurs et des salariés participent au comité de pilotage. La précision étant générale, elle a sa place dans le texte.

M. le ministre. Avis favorable à ce très bon amendement.

M. Roland Muzeau. J’appelle votre attention sur le fait que l’adoption de l’amendement ferait tomber nos amendements AS 95 et AS 96 qui prévoient la présence au sein du comité de pilotage de représentants de chacun des groupes parlementaires de l’Assemblée nationale et du Sénat.

M. le rapporteur. En effet.

M. le président Pierre Méhaignerie. Je vous propose donc de modifier la rédaction de l’amendement AS 67 afin d’y faire figurer les mots : « des parlementaires ».

M. Jean-Luc Préel. En tant que membre d’un groupe minoritaire, je préférerais que l’on fasse référence à la présence « de parlementaires représentant chacun des groupes parlementaires de l’Assemblée nationale et du Sénat ». Je crains, par ailleurs, que le comité de pilotage et le COR ne deviennent très proches, puisqu’ils auront les mêmes représentants et quasiment les mêmes missions.

M. le rapporteur. Nous avons rappelé hier que les missions de ces organismes seront très différentes. Par ailleurs, je suis très favorable à ce que des représentants de tous les groupes parlementaires siègent au comité.

M. le président Pierre Méhaignerie. Faut-il retenir cette rédaction ou le Gouvernement est-il disposé à prendre un engagement qui nous permettrait d’alléger le texte, ce qui, à mon sens, serait préférable ?

M. le ministre. Je m’engage à ce que des membres de tous les groupes parlementaires siègent dans le comité de pilotage. J’ajoute, pour répondre à M. Préel, que le Gouvernement y sera représenté, alors qu’il ne l’est pas dans le COR. Par ailleurs, les missions des deux organismes sont différentes.

M. Roland Muzeau. Nous aimerions disposer des projets de décrets lorsque l’examen du texte commencera en séance publique. Faute de quoi, nous risquons de parler dans le vide. En outre, nous pourrons ainsi vérifier que le ministre a tenu ses engagements.

M. Jean-Luc Préel. J’ai toute confiance dans la parole du ministre, mais son engagement devant la commission n’a pas valeur législative. Pourquoi ne pas reprendre dans l’amendement AS 67 la formule de l’amendement AS 95 ?

M. le président Pierre Méhaignerie. Compte tenu de cette intervention et de l’avis favorable du Rapporteur, je vous propose de rédiger ainsi le quinzième alinéa de l’article : « Le comité de pilotage de régimes de retraite est composé de représentants de l’État, de représentants de chacun des groupes parlementaires de l’Assemblée nationale et du Sénat, de représentants des régimes de retraite légalement obligatoires, etc. »

La Commission adopte l’amendement AS 67 ainsi rectifié.

Les amendements AS 95 de Mme Martine Billard et AS 96 de M. Roland Muzeau deviennent ainsi sans objet.

La Commission examine l’amendement AS 97 de Mme Martine Billard.

Mme Martine Billard. Nous souhaitons que la composition du comité figure dans le texte, même si l’amendement AS 67 rectifié l’a un peu précisée. Toutes les confédérations syndicales ne siègent pas au COR. En outre, puisque les critères de représentativité ont été modifiés, le texte doit en tenir compte. À quoi bon avoir prévu une nouvelle forme de représentativité syndicale au niveau des branches et de l’interprofessionnel si nous n’en tirons pas les conséquences dans les nouveaux textes de loi ?

M. le rapporteur. Avis défavorable. La mesure relève du domaine réglementaire.

M. le ministre. Même avis.

La Commission rejette l’amendement AS 97.

La Commission adopte successivement les amendements rédactionnels AS 434 et AS 435 du rapporteur.

Elle est ensuite saisie de l’amendement AS 371 de M. Francis Vercamer.

M. Francis Vercamer. Je propose que le comité de pilotage s’appuie non seulement sur les travaux du COR mais aussi sur ceux de l’Observatoire de la pénibilité du Conseil d’orientation sur les conditions de travail (COCT), créé par décret dans le cadre du plan santé au travail 2005-2009. Le problème de la pénibilité concerne certes les retraites mais surtout les conditions de travail, le Gouvernement en a convenu.

Je suppose que cette proposition recevra un avis favorable du Rapporteur, car le dernier amendement examiné hier par notre commission a été rejeté au motif qu’une référence à l’Observatoire de la pénibilité serait ajoutée au projet de loi.

Enfin, le Conseil d’orientation sur les conditions de travail étant présidé par le ministre, il n’y a pas lieu de craindre de dérive de ce côté.

M. le rapporteur. Je confirme les propos de notre collègue Francis Vercamer et je suis extrêmement favorable à son amendement.

M. le ministre. Le Gouvernement y est également favorable. Il conviendra cependant que l’Observatoire de la pénibilité soit reconnu au niveau législatif ; jusqu’à présent, il ne l’était qu’au niveau réglementaire.

La Commission adopte l’amendement AS 379.

Puis, elle examine l’amendement AS 372 de M. Francis Vercamer.

M. Francis Vercamer. Dans la même logique, il importe de préciser par décret les missions de l’Observatoire de la pénibilité.

M. le rapporteur. Avis favorable, en dépit d’un petit problème rédactionnel.

M. le ministre. Avis favorable.

La Commission adopte l’amendement AS 372.

Elle adopte ensuite l’article 1er modifié.

Après l’article 1er

La Commission est saisie de l’amendement AS 369 de M. Jean-Luc Préel.

M. Jean-Luc Préel. Même si j’ai cru comprendre que le ministre serait favorable à une avancée concernant le régime unique universel, je crains que cet amendement, qui prévoit qu’un rapport parlementaire prévoyant un système unique de retraite par points ou en comptes notionnels soit déposé sur le bureau de l’Assemblée nationale avant le 30 septembre 2011, n’emporte pas le même succès que les deux précédents.

Marisol Touraine, notamment, s’est dite défavorable à tel système. Les régimes complémentaires fonctionnent pourtant déjà par points et les partenaires sociaux, copilotes de ces régimes, savent définir chaque année la valeur d’achat et de liquidation du point, ce qui permet d’atteindre l’équilibre financier. La retraite étant liée au travail, il conviendrait que la gestion de ce régime unique incombe aux partenaires sociaux.

M. le rapporteur. Le diagnostic du docteur Préel est excellent : le sujet a déjà été abordé et j’avais donné un avis défavorable.

M. le ministre. Même avis.

Mme Martine Billard. Je tiens à réaffirmer l’opposition du Parti communiste français et du Parti de gauche à cette tentative de modification du régime de retraite. C’est un vieux débat, qui, je l’imagine, va se poursuivre.

D’abord, le COR a rendu un rapport relatif aux systèmes en comptes notionnels. Un système par points ou en comptes notionnels ne saurait être plus équitable, car les pensions seraient alors complètement individualisées, ce qui casserait le système par répartition, solidaire et intergénérationnel. Le principe de notre système de retraite, c’est que les actifs d’aujourd’hui paient les pensions de ceux qui sont déjà en retraite. Un système par points ou en comptes notionnels signifierait, au contraire, que la pension de chacun serait fonction de ses propres cotisations. De surcroît, les systèmes de ce type sont fragiles, nous l’avons vu dans les pays qui les ont mis en œuvre : au moment de la crise, ils n’ont pas davantage garanti les pensions de retraite que nous ; nous les avons même mieux garanties, et surtout de manière plus solidaire et équitable.

Le seul système solidaire et équitable est le système actuel, à condition que nous le renforcions. Pour notre part, nous pensons que les richesses existent, en France, à cet effet. Il faut simplement cesser de réduire les impôts de ceux qui gagnent le plus, cesser de pratiquer des exonérations de cotisations sociales. Ce sont les orientations que nous avons défendues dans notre proposition de loi.

M. Arnaud Robinet. Martine Billard confond tout : un système par points ou en comptes notionnels n’équivaut pas à un système par capitalisation, cela reste de la répartition.

M. Gaëtan Gorce. Je regrette vivement la confusion qui prévaut en permanence entre points et comptes notionnels. Si ces deux systèmes s’inspirent de philosophies proches, ils sont distincts, notamment dans leurs effets. Le système par points soulève le problème de la valeur du point et de sa revalorisation régulière. Quant au système en comptes notionnels, c’est un système par répartition, jouant pour l’essentiel sur l’espérance de vie.

À l’instar de Pascal Terrasse, je considère que le système en comptes notionnels présente un intérêt réel et mérite réflexion. Nous gagnerions à distinguer clairement les deux systèmes. Je regrette que le Rapporteur, en les mélangeant, hypothèque un peu la qualité du débat.

M. Jean-Luc Préel. Une réforme systémique retenant la formule des points ou des comptes notionnels me paraît indispensable et porteuse d’équité. Le système par points reste un système par répartition. Si j’ai un peu mélangé les deux notions, c’est qu’il est très compliqué d’expliquer au public ce qu’est un compte notionnel. Je suis plutôt favorable à cette dernière formule, car elle prend en compte l’espérance de vie, ce qui permet de régler en partie le problème de la pénibilité. Cette réforme est difficile et longue à mettre en œuvre, mais elle est inévitable. C’est pourquoi, il serait souhaitable de ne pas perdre trop de temps.

M. le rapporteur. Le COR, aux travaux duquel je participe en compagnie de Pascal Terrasse et de Jean-Luc Préel, a rendu un rapport décrivant les différences énoncées à l’instant. Votre rapporteur est donc très à l’aise sur la question.

La Commission rejette l’amendement AS 369.

Elle est ensuite saisie de l’amendement AS 1 de M. Gérard Charasse.

M. Gérard Charasse. Il convient que le Conseil économique, social et environnemental remette, tous les cinq ans, au Parlement et au Gouvernement un rapport relatif aux perspectives et à l’évolution du système de retraite. Face à la précipitation dans laquelle ce projet de loi est examiné et à l’insuffisance des consultations, il est essentiel, pour les futures échéances, de créer les conditions d’une concertation élargie à l’ensemble des partenaires, notamment les institutions de retraite et les mutuelles, et planifiée de façon à aboutir à un consensus.

M. le rapporteur. Avis défavorable. D’après le texte portant création du COR, celui-ci a pour mission « de décrire les évolutions et les perspectives à moyen et long termes des régimes de retraite légalement obligatoires, au regard des évolutions économiques, sociales et démographiques, et d’élaborer, au moins tous les cinq ans, des projections de leur situation financière ». Le COR joue donc déjà ce rôle d’éclairage et d’expertise.

M. le ministre. Défavorable.

La Commission rejette l’amendement AS 1.

Article 2 : Indexation des pensions

La Commission examine les amendements identiques AS 98 de Mme Martine Billard et AS 233 de Mme Martine Carrillon-Couvreur, visant à supprimer l’article 2.

M. Roland Muzeau. Nous souhaitons la suppression de l’article 2, qui transfère au comité de pilotage la mission de la commission tripartite. La Commission de garantie des retraites, créée par l’article 5 de la loi du 21 août 2003 portant réforme des retraites et dont les règles de fonctionnement ont été fixées par décret, est chargée de rendre des avis à propos de l’évolution nécessaire des durées d’assurance ou de service et bonifications. Elle n’a d’ailleurs rendu qu’un avis public, en octobre 2007. Nous ne voyons pas pourquoi le comité de pilotage serait surchargé d’une mission, qui, au demeurant, ne semble pas nécessiter beaucoup de travail.

Mme Martine Carrillon-Couvreur. Aux termes de l’article L 161-23-1 du code de la sécurité sociale le coefficient annuel de revalorisation des pensions de vieillesse est fixé, au 1er avril de chaque année, conformément à l’évolution prévisionnelle en moyenne annuelle des prix à la consommation hors tabac, puis ajusté le 1er avril suivant si cette évolution n’est pas conforme aux prévisions. Une correction peut également être proposée au Parlement dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale, sur proposition d’une conférence présidée par les ministres chargés de la sécurité sociale, de la fonction publique et du budget et réunissant les organisations syndicales et professionnelles représentatives au plan national.

Or, l’article 2 du projet de loi prévoit que la correction du taux de revalorisation s’effectuera désormais sur proposition du comité de pilotage. Notre amendement de suppression vise à maintenir les modalités de revalorisation en vigueur.

M. le rapporteur. Avis défavorable. L’article 2 remplace un organisme qui ne s’est jamais réuni, par le comité de pilotage, qui, lui, sera opérationnel, et dans lequel siégeront les partenaires sociaux.

M. le ministre. Même avis.

La Commission rejette les amendements AS 98 et 233.

Puis, elle adopte l’article 2 sans modification.

Article 3 : Amélioration du droit à l’information des assurés

La Commission est saisie de l’amendement AS 234 de Mme Marisol Touraine.

Mme Michèle Delaunay. Les carrières, de nos jours, sont mouvementées, aléatoires, incertaines et risquent de le devenir davantage encore. Il est important que les salariés se sentent soutenus et informés. C’est pourquoi, à la formule « Dans un délai déterminé », qui n’est guère rassurante, nous préférerions les mots « Dans un délai de deux ans » après le premier emploi.

M. le rapporteur. Avis favorable à cette précision utile.

M. le ministre. Même avis.

La Commission adopte l’amendement AS 243.

Elle adopte ensuite l’amendement rédactionnel AS 459 du rapporteur.

Puis, elle examine l’amendement AS 418 du rapporteur.

M. le rapporteur. Il est nécessaire d’informer les salariés des conséquences sur la constitution de leurs droits à la retraite de l’exercice d’une activité à temps partiel et de la possibilité de surcotiser à l’assurance vieillesse pour le régime général et les régimes complémentaires.

M. le ministre. Avis favorable.

La Commission adopte l’amendement AS 418.

Elle est ensuite saisie de l’amendement AS 235 de Mme Marisol Touraine.

M. Christophe Sirugue. Sur la question des retraites, les évolutions sont relativement fréquentes, avec des incidences importantes pour nos concitoyens. Par cet amendement, nous proposons que soit dispensée une information publique à chaque modification législative, réglementaire ou conventionnelle, portant notamment sur les conditions de constitution des droits à la retraite. Chacun se sent concerné et a besoin d’évaluer par lui-même le montant de sa future retraite. Ce souci d’information devrait tous nous rassembler.

M. le rapporteur. Avis défavorable. Une information générale est d’ores et déjà assurée par le site internet du GIP Info Retraite. De plus, les personnels de tous les régimes sont à la disposition des assurés pour répondre à leurs questions. La proposition contenue dans cet amendement est impossible à mettre en œuvre du point de vue logistique et par surcroît inutile, car le relevé de situation individuelle et l’estimation du montant de la retraite prennent en compte les évolutions législatives les plus récentes. Mieux vaut une information individualisée qu’une information générale coûteuse. Je fais partie de ceux qui ont poussé à la création du GIP Info Retraite et je tiens à dire qu’il fonctionne bien, avec peu de personnel et des moyens budgétaires faibles.

M. le ministre. Même avis. Une information très individualisée est préférable à une avalanche d’informations très difficiles à comprendre. Chacun est intéressé par son propre niveau de retraite.

La Commission rejette l’amendement AS 235.

Puis, elle est saisie de l’amendement AS 236 de Mme Marisol Touraine.

M. Michel Issindou. Dans le même esprit, nous souhaitons donner un caractère obligatoire à l’entretien avec les salariés à propos de leurs droits. Les jeunes sont assez éloignés de leur retraite et ils perdront de l’information si ce passage n’est pas obligatoire, d’autant que nous n’y voyons pas très clair au-delà de 2018, M. le ministre l’a répété plusieurs fois. Des entretiens d’évaluation sont bien organisés dans les entreprises et l’administration !

M. le rapporteur. Avis défavorable. L’entretien individuel doit rester une liberté accordée à chaque assuré. Le relevé de situation individuelle envoyé aux assurés dès l’âge de 35 ans les invite, si nécessaire, à prendre contact avec leur régime pour organiser un entretien.

M. le ministre. Défavorable. Il faut tout faire pour que nos concitoyens se rendent à un entretien individuel, mais nous ne pouvons pas les y obliger. Tout dépendra de la qualité de ces rendez-vous.

La Commission rejette l’amendement AS 236.

Elle examine ensuite l’amendement AS 238 de Mme Marisol Touraine.

M. Michel Liebgott. Nous ne sommes manifestement pas tout à fait sur la même longueur d’onde. Nous avons le sentiment que la population est dans une situation d’angoisse et d’incertitude, et pas seulement à propos des retraites. Vous avez contraint les demandeurs d’emploi à être régulièrement entendus, ce qui n’est d’ailleurs pas toujours possible compte tenu des effectifs de Pôle emploi. Ce que vous exigez des demandeurs d’emploi, nous l’exigeons pour les salariés en activité.

Rien ne dit que tous les salariés de France iront chercher l’information les concernant, car ils ne disposeront pas de la même information générale. Il existe, en effet, une grande différence entre celui qui a un plan de carrière et celui qui va de petit boulot en petit boulot. Il est absolument indispensable de ne pas laisser dans la nature les salariés les plus fragiles, en leur permettant d’accéder à un entretien obligatoire tous les cinq ans. Il s’agit d’un amendement de bon sens, car, comme l’a dit le ministre, nous ne savons pas ce que l’avenir nous réserve, si la crise va s’aggraver ou se résorber.

M. le rapporteur. Je vous rassure, monsieur Liebgott, nous sommes sur la même longueur d’onde, mais la loi prévoit d’ores et déjà, à 35  ans puis tous les cinq ans, l’envoi à chaque assuré d’un relevé de situation individuelle faisant le point sur la constitution de ses droits. S’y ajoutent, à partir de 55 ans et tous les cinq ans, une estimation globale du montant de retraite, et, maintenant, un entretien à 45 ans. Enfin, tout assuré peut contacter son régime pour obtenir des informations sur l’état de ses droits à pension. Des sondages effectués par les différents régimes font apparaître un taux de satisfaction de 85 %. Le droit à l’information me semble suffisamment satisfait pour que nous n’ayons pas à ajouter un entretien tous les cinq ans. La plupart des régimes seraient au demeurant incapables de l’assurer et il transformerait le personnel des caisses en conseillers, ce pour quoi ils ne sont pas formés et, surtout, ce qu’ils ne souhaitent pas. J’émets par conséquent un avis défavorable.

M. le ministre. La fixation de l’âge ressort d’une mesure réglementaire. Avis défavorable.

M. Régis Juanico. Je décèle une contradiction de la part du Rapporteur et du ministre. Sur les retraites, il n’y a pas seulement un droit à l’information mais un devoir d’information de la part des pouvoirs publics. Dans l’entreprise, il existe déjà des entretiens obligatoires entre l’employeur et les salariés de l’entreprise, notamment pour la formation professionnelle, les secondes carrières et les bilans professionnels. Pourquoi un tel dispositif obligatoire ne serait-il pas mis en place pour les retraites, sujet au moins aussi importante ?

M. le ministre. Je vous entends, mais nous ne souhaitons pas que cet entretien soit obligatoire. Je serais prêt à donner un avis favorable à un amendement prévoyant la possibilité d’un entretien à partir de 45 ans – jouons la transparence – puis tous les cinq ans. Mais, je ne souhaite pas que cet entretien soit obligatoire. Comment pourrait-il l’être d’ailleurs ? Comment obliger les gens à s’y rendre ? Il faut laisser « à leur demande » dans le texte.

Mme Marisol Touraine. Nous pouvons nous rallier à votre proposition, même si elle ne répond pas à notre préoccupation de sécurisation des salariés les plus fragiles, qui ne solliciteront pas l’entretien. Qu’adviendra-t-il de ceux qui ont des carrières hachées et qui travaillent à temps partiel ? Si vous imaginez d’autres solutions, nous sommes évidemment prêts à les entendre.

M. le rapporteur. Compte tenu de la rectification proposée par le ministre, j’émets un avis favorable.

M. le président Pierre Méhaignerie. L’alinéa 4 se lirait ainsi : « les assurés bénéficient à leur demande, à partir de 45 ans, puis tous les cinq ans et dans des conditions fixées par décret, d’un entretien… ».

La Commission adopte l’amendement AS 238 rectifié.

La Commission examine ensuite l’amendement AS 100 de Mme Martine Billard.

Mme Jacqueline Fraysse. Cet amendement tend à mieux informer les assurés en précisant que les droits sur lesquels portera l’entretien sont notamment ceux acquis au titre des années d’études et de formation, de chômage, de travail pénible, d’emploi à temps partiel et de congé maternité. Ces différents aspects, qui suscitent de graves inquiétudes chez de nombreux assurés, car ils sont très pénalisants, méritent d’être abordés de façon spécifique dans chaque cas individuel.

M. le rapporteur. Avis favorable à cet excellent amendement.

M. le ministre. Même avis.

M. Christian Hutin. Ne pourrait-on pas faire référence non seulement au travail pénible, mais aussi au travail exposé ? Certaines victimes de l’amiante, par exemple, ne sont pas encore complètement informées de leurs droits. Sans l’action menée par les associations de défense des victimes de l’amiante, certains de nos concitoyens n’auraient jamais pu se faire connaître et les faire valoir.

M. Francis Vercamer. Je trouve délicat de faire référence au travail pénible sans définir précisément ce qu’est la pénibilité. Le ministre a indiqué hier qu’on ne pouvait le faire au plan législatif, ce qui pose un problème de fond.

M. le rapporteur. Je préférerais qu’on en reste à la rédaction actuelle de l’amendement.

La Commission adopte l’amendement AS 100.

Elle est ensuite saisie de l’amendement AS 237 de Mme Marisol Touraine.

Mme Michèle Delaunay. Par cet amendement, nous demandons que les assurés bénéficient également d’une information sur les dispositifs d’incitation à la prolongation d’activité ainsi que sur les dispositifs qui leur permettraient d’améliorer le montant futur de leur retraite. Cette précision serait tout à fait conforme à l’esprit général du projet de loi.

M. le rapporteur. Avis favorable

M. le ministre. Même avis.

La Commission adopte l’amendement AS 237.

La Commission examine ensuite l’amendement AS 239 de Mme Marisol Touraine.

M. Christophe Sirugue. Dans la rédaction actuelle du texte, seuls les assurés appartenant à une certaine catégorie d’âge et remplissant des conditions fixées par décret peuvent bénéficier de l’entretien. Nous demandons que tous puissent y accéder s’ils en font la demande

M. le rapporteur. Le code de la sécurité sociale permet déjà à chaque assuré de demander au régime dont il relève des informations générales sur ses droits à pension ainsi que des informatives relatives à sa propre situation. En outre, cette proposition a déjà été satisfaite par l’adoption d’un autre amendement.

L’amendement AS 237 est retiré.

La Commission est saisie de l’amendement AS 240 de Mme Marisol Touraine.

Mme Danièle Hoffman-Rispal. À l’image de ce qui existe déjà en Suède, nous proposons que les salariés reçoivent, chaque année, un courrier leur permettant de connaître leurs droits à la retraite, et que tous les régimes leur fournissent une estimation indicative globale du montant des pensions auxquelles leur durée d’assurance et de service ou leur nombre de points ouvriront droit, lorsque leur retraite pourra être liquidée. Cela devrait faciliter les choix de carrière, conformément à l’objectif formulé dans l’exposé des motifs de ce texte.

M. le rapporteur. Je suis d’accord avec vous sur le fond. Comme je l’indiquais dans un rapport de 2008, nous pourrions utilement nous inspirer du modèle allemand, qui fournit très tôt aux assurés une estimation indicative de leurs pensions futures, et qui leur transmet des informations actualisées chaque année. Il reste qu’une telle solution sera sans doute difficile à appliquer en France, car nous n’avons pas un régime par points et le système de retraite est plus fragmenté dans notre pays.

En ce qui concerne l’information annuelle des assurés, je rappelle que le relevé de situation mis en ligne a pour vocation de se transformer en un récapitulatif actualisé, et que le GIP Info retraite prépare un portail commun grâce auquel nos concitoyens pourront prendre connaissance, chaque année, d’une estimation de leur pension – il faudra pour cela réaliser d’ailleurs une véritable prouesse technique.

Je rappelle, en outre, que les régimes de retraite travaillent à la réalisation d’une estimation globale qui serait communiquée aux assurés à l’âge de 45 ans. La CNAV nous a indiqué qu’elle ne pouvait pas produire de calculs fiables à l’heure actuelle, et il faut être conscient que l’évolution de la législation ne facilite pas la tâche. Pour toutes ces raisons, l’amendement me semble en avance de quelques années. Avis défavorable.

M. le ministre. Même position. Le système français de retraite étant ce qu’il est, il serait très compliqué de fournir une estimation fiable à l’âge de 45 ans. Il ne faudrait pas tromper les assurés. Nous devons veiller à ce que seules soient communiquées des informations solides, qui leur permettent de faire évoluer leur carrière – on est loin, aujourd’hui, d’avoir terminé son parcours professionnel à 45 ans. L’amendement sert une belle ambition, mais il risquerait de fausser la donne dans les conditions actuelles.

Mme Catherine Génisson. Par cet amendement, nous souhaitons améliorer l’information des assurés qui en ont le moins, c’est-à-dire ceux qui se trouvent dans les situations les plus précaires. Il s’agit également de faire en sorte que chacun puisse être maître de sa carrière professionnelle et de l’ouverture de ses droits à pension, afin d’être en mesure de bénéficier éventuellement de congés sabbatiques ou, au contraire, de prolonger sa carrière au-delà de 62 ou 65 ans – c’est, en effet, le cœur du projet alternatif que nous défendons : un système de retraite universelle, mais choisie. Pour cela, il faut que chacun puisse bénéficier d’une information très régulière sur les droits qu’il se constitue.

La Commission rejette l’amendement AS 240.

L’amendement AS 101 de M. Roland Muzeau est retiré.

La Commission examine ensuite l’amendement AS 102 de Mme Martine Billard.

Mme Martine Billard. Le code de la sécurité sociale fait obligation aux régimes de retraite d’envoyer à chaque assuré un relevé de situation. Aux termes du projet de loi, ils « communiquent ce relevé, à la demande de l’assuré, par voie électronique ». Notre amendement ajoute : « ou par courrier postal ».

Il y a, en effet, de plus en plus souvent une pression pour que les relations avec les administrés passent par la voie électronique. Or, tous nos concitoyens ne sont pas connectés à internet. Une fracture se creuse entre ceux qui y ont accès, soit à leur domicile, soit au travail – sachant que de nombreuses entreprises limitent fortement l’utilisation personnelle de l’accès professionnel à Internet. Dans certaines villes, comme Paris, on peut bénéficier d’un accès public à Internet, mais cette possibilité est encore assez limitée. C’est pourquoi, il nous semble important de préciser que les informations relatives aux retraites peuvent être obtenues par courrier postal. Sans cette précision, les assurés risquent de ne pouvoir les obtenir par courrier postal qu’en dernier ressort et après réclamation.

M. le rapporteur. Il est évident que la mise en ligne du relevé de situation individuelle ne remplacera pas un envoi par courrier. À mon sens, cet amendement est sans objet. Avis défavorable.

M. le ministre. Même avis. L’assuré ne recevra le relevé par la voie électronique qu’à sa demande. Sinon, il lui sera adressé par courrier.

La Commission rejette l’amendement AS 102.

La Commission examine ensuite l’amendement AS 373 de M. Jean-Luc Préel.

M. Jean-Luc Préel. Je vais présenter ensemble les amendements AS 373, AS 374 et AS 375. Nous souhaitons la mise en place d’un véritable dossier informatisé unique, qui permettrait à chacun de s’informer, de façon très simple, à chaque fois qu’il le souhaite.

Le GIP Info retraite fonctionne assez bien aujourd’hui, mais il faudrait aller plus loin. Nous proposons que les régimes de base, obligatoires, complémentaires et supplémentaires, ainsi que les gestionnaires de produits d’épargne fournissent régulièrement des informations au GIP Info retraite, de façon à ce que chacun puisse consulter un dossier « retraite » informatisé.

M. le rapporteur. C’est une bonne idée, mais l’information délivrée en matière de retraite est déjà très complète : elle regroupe les régimes de base et les régimes complémentaires. À titre personnel, il me paraît difficile que le calcul réalisé prenne en compte la retraite supplémentaire : le GIP Info retraite ne dispose pas des informations nécessaires, et il serait hasardeux d’évaluer les pensions avant le déblocage des fonds. Par conséquent, avis défavorable.

M. le ministre. Même avis. Il faut certainement aller dans ce sens, mais il est beaucoup trop tôt pour légiférer.

M. Alain Vidalies. L’amendement n’a rien d’anodin, car il vise les produits de l’épargne – c’est une première ! Si le GIP Info retraite regroupait des informations relatives à la retraite par répartition, à la retraite complémentaire, à la retraite supplémentaire et aux produits de l’épargne, on changerait de monde. Je tiens à exprimer notre hostilité absolue à ce mélange des genres.

La Commission rejette successivement les amendements AS 373 à AS 375.

Puis, elle adopte l’amendement rédactionnel AS 460 du rapporteur.

La Commission adopte ensuite l’article 3 modifié.

Après l’article 3

La Commission examine l’amendement AS 490 de la Commission des finances.

M. Laurent Hénart, rapporteur pour avis de la Commission des finances. Le répertoire national commun de la protection sociale, instauré par les lois de financement de la sécurité sociale pour 2007 et 2008, ne concerne que les régimes de base. L’amendement a pour objet de l’ouvrir aux régimes complémentaires, ce qui permettra de sécuriser l’échange des données, d’améliorer leur qualité et d’éviter les fraudes.

M. le rapporteur. Il s’agit d’une demande formulée par l’AGIRC-ARRCO pour sécuriser sa participation au répertoire commun au regard des exigences de la CNIL. Avis favorable à cet excellent amendement.

M. le ministre. Même avis.

La Commission adopte l’amendement AS 490.

Puis, elle examine ensuite l’amendement AS 408 du rapporteur.

M. le rapporteur. Dans la continuité de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2009, l’amendement vise à multiplier les échanges entre les différents régimes, afin de faciliter la liquidation des pensions de réversion. Cet amendement, de nature technique, favorisera la convergence des régimes et simplifiera la vie des assurés.

M. le ministre. Avis favorable.

La Commission adopte l’amendement AS 408.

Elle examine ensuite l’amendement AS 409 du rapporteur.

M. le rapporteur. Cet amendement, en apparence très technique, prévoit une innovation très importante qui consiste à instaurer un répertoire unique de gestion des carrières, confié à la CNAV. Cette mesure facilitera en particulier la liquidation des retraites des polypensionnés.

M. le ministre. Avis favorable.

M. Pascal Terrasse. Le président du conseil de surveillance de la CNAV soutient cet amendement relatif aux polypensionnés, dont nous devrons examiner la situation de très près : la proratisation du temps passé dans chaque régime est une véritable catastrophe pour de nombreux bénéficiaires, qui tombent des nues, lorsqu’ils découvrent le montant de leur pension. La proratisation n’a pas de sens, car elle pénalise considérablement ceux qui relèvent de régimes différents, en particulier les régimes alignés. Nous avons déposé des amendements à destination des futurs polypensionnés, mais il faudra aussi s’intéresser à ceux qui ont déjà subi les effets de la réforme de 2003 – il pourrait être nécessaire d’opérer un retour en arrière.

La Commission adopte l’amendement AS 409.

Puis elle examine l’amendement AS 491 de la Commission des finances.

M. Laurent Hénart, rapporteur pour avis. Dans un but de simplification et de sécurisation, l’amendement propose de modifier la base de référence utilisée pour les pensions de réversion. Sur proposition de la CNAV, il s’agirait de reprendre les mêmes nomenclatures que celles des caisses d’allocations familiales.

M. le rapporteur. Cette solution permettrait sans doute de simplifier les processus, mais je vois mal comment elle pourrait s’appliquer aux pensions de réversion. On se heurte, dans ce domaine, à de sérieux obstacles techniques. Le ministre pourrait-il nous indiquer où en sont les travaux engagés sur cette question ?

M. le ministre. L’idée est bonne, mais il y a un problème de décalage dans le temps de l’information transmise à l’administration en matière fiscale ; en outre, on ne connaît pas nécessairement les ressources des foyers non imposables. Je suggère de retirer l’amendement pour continuer le travail sur ce sujet.

M. Alain Vidalies. Cette proposition est peut-être sympathique, mais elle manque de réalisme. Par ailleurs, elle n’est pas à la hauteur des problèmes qu’a provoqués la loi de 2003. Vous disiez hier, monsieur le président, que la majorité avait amélioré les pensions de réversion. Or, elle a surtout changé leur nature : elles ne constituent plus un droit, mais une allocation différentielle, ce qui change tout.

Au plan technique, la référence à des données fiscales ne correspond pas nécessairement au champ du décret nécessaire : le calcul du montant de la pension de réversion impose de prendre en compte un certain nombre de données qui n’entrent pas toutes dans le champ fiscal. Les sommes à déduire ont d’ailleurs fait l’objet de vifs débats : le champ très large du décret initialement prévu a suscité une telle mobilisation qu’il a fallu adopter un autre texte.

En tout cas, ce que vous proposez n’est pas compatible avec le système instauré en 2003.

M. Laurent Hénart, rapporteur pour avis. Je retire l’amendement, quitte à ce qu’il soit redéposé dans le cadre de l’article 88 si nous parvenons à trouver une solution adaptée.

L’amendement AS 491 est retiré.

La Commission examine ensuite l’amendement AS 492 rectifié de la Commission des finances.

M. Laurent Hénart, rapporteur pour avis. Cet amendement tend à mensualiser les pensions aujourd’hui versées par certains régimes de façon trimestrielle, ce qui permettra notamment de prévenir le surendettement. Pour éviter les problèmes de trésorerie, il faut mensualiser aussi bien les dépenses que les recettes. Afin de passer le cap de l’article 40, l’amendement ne porte que sur les pensions à échoir, mais on pourrait utilement aller plus loin en le retravaillant avec le Gouvernement.

M. le rapporteur. Avis très favorable. Cet amendement faciliterait la vie de nombreuses personnes.

M. le ministre. Avis favorable, étant entendu que seules les pensions à échoir sont concernées.

La Commission adopte l’amendement AS 492 rectifié.

Elle est ensuite saisie de l’amendement AS 493 de la Commission des finances.

M. Laurent Hénart, rapporteur pour avis. Pour faire suite au rapport présenté en janvier dernier par le COR, la Commission des finances a adopté à l’unanimité cet amendement, qui demande au Gouvernement de présenter un rapport sur un passage éventuel d’un système de répartition à un système en comptes notionnels ou par points. Je crois savoir que d’autres amendements de même nature ont été déposés.

M. le rapporteur. Il me semble que le rapport du COR était suffisamment précis et approfondi. Nous disposons aujourd’hui de tous les éléments techniques nécessaires pour prendre éventuellement une décision politique dans ce domaine. Pour le moment, la majorité a préféré se concentrer sur le rétablissement de l’équilibre financier. Avis défavorable.

M. le ministre. Nous avons déjà abordé cette question, lorsque nous avons examiné les amendements déposés par M. Préel. Avis défavorable.

M. Jean-Marie Le Guen. Ce n’est pas une simple question de détail. Le passage à un système en comptes notionnels ou par points ne pourra pas se décider en un jour. C’est un processus très compliqué et très long qui nécessitera une véritable volonté politique.

On ne cesse de nous expliquer que les parcours professionnels sont de plus en plus changeants et les statuts de plus en plus divers. Nous avons, par ailleurs, adopté des amendements tendant à améliorer l’information des assurés. Or, il n’y aura pas d’information vraiment claire et lisible en l’absence d’un système par points ou en comptes notionnels. Il faut donc ouvrir le débat. Ce projet de loi ne propose malheureusement pas d’orientations à moyen et à long termes : il se concentre sur un prétendu équilibrage qu’il faudrait réaliser, alors que nous ne disposons même pas des comptes financiers. C’est une non-réforme et un cache-misère !

La Commission rejette l’amendement AS 493.

La Commission examine l’amendement AS 39 de M. Dominique Tian.

M. Dominique Tian. Cet amendement de bon sens précise que pour siéger au conseil d’administration d’un régime, il faut y être affilié.

M. le rapporteur. La présence des organisations syndicales au sein des conseils d’administration est non seulement légitime, elle est indispensable. Avis défavorable.

M. le ministre. Il revient aux partenaires sociaux de désigner, comme ils l’entendent, leurs représentants.

M. Dominique Tian. Certes, mais il est préférable qu’ils appartiennent au régime.

La Commission rejette l’amendement AS 39.

Elle examine ensuite l’amendement AS 68 de M. Dominique Tian.

M. Dominique Tian. Cet amendement vise à instituer un « rendez-vous Assurance maladie 2013 », à l’instar des « rendez-vous Retraite ».

M. le rapporteur. Nul ne conteste la nécessité de rétablir les comptes de l’assurance maladie parallèlement à ceux de l’assurance vieillesse, mais cet amendement n’entre pas dans le cadre du projet de loi que nous étudions. En outre, on ne peut comparer le pilotage de la branche maladie avec celui de la branche vieillesse, dont les paramètres sont de nature très différente. Enfin, il existe déjà plusieurs dispositifs permettant de faire le point chaque année de la situation de l’assurance maladie et de prendre, le cas échéant, des mesures correctrices, dispositifs que le Gouvernement entend renforcer, conformément aux recommandations du récent rapport de M. Raoul Briet.

M. le ministre. Ce rendez-vous n’est pas le sujet du projet de loi.

M. Roland Muzeau. Nous avons rendez-vous en 2012 avec les Français !

M. Jean-Marie Le Guen. On nous explique que le sujet du projet de loi est essentiellement l’équilibre des comptes sociaux, en l’occurrence des retraites. J’ai déjà indiqué qu’il ne contenait pas les éléments d’une réforme globale. Si nous allons vers un équilibre des comptes sociaux, l’amendement de Dominique Tian est recevable. Pour ma part, je pense qu’il n’y a pas de raison particulière d’attendre 2013 et je propose de fixer ce rendez-vous à 2011.

La Commission rejette l’amendement AS 68.

L’amendement AS 209 n’est pas soutenu.

Elle examine ensuite l’amendement AS 214 de M. Lionel Luca.

Mme Gabrielle Louis-Carabin. La complexité et la multitude des régimes de retraite créent chez nos concitoyens un sentiment d’incompréhension, d’inquiétude et d’inégalité. Pour y remédier, il convient d’uniformiser de façon progressive les durées de cotisation, les taux et l’âge des départs en retraite dans les régimes du secteur privé et de la fonction publique, en créant un consortium de gestion unique.

M. le rapporteur. L’article 1er crée un comité de pilotage qui répond parfaitement aux préoccupations exprimées par cet amendement. Celui-ci est donc satisfait.

M. le ministre. Nous avons en effet adopté un amendement visant à rapprocher les règles et des paramètres cités.

L’amendement AS 214 est retiré.

Chapitre II
Durée d’assurance ou de services et bonifications

Article 4 Modalité d’allongement de la durée d’assurance jusqu’en 2020

La Commission examine l’amendement AS 103 de M. Roland Muzeau.

M. Roland Muzeau. Je rappelle que l’effort prévu par la réforme reposera à 85 % sur les épaules des salariés. Cet article est particulièrement discriminant pour les personnes nées en 1953 et 1954, dans la mesure où il permet de déroger aux dispositions qui imposent de prévoir quatre ans à l’avance la durée d’assurance ou de services et les bonifications qui fixent les conditions du départ en retraite, ainsi qu’à l’information des agents concernés. Nous proposons donc de le supprimer.

M. le rapporteur. L’article 4 simplifie le dispositif d’allongement de la durée de cotisation prévu par la loi Fillon pour le rendre plus lisible et permettre aux assurés de connaître leurs droits le plus tôt possible. Avis défavorable.

M. le ministre. Même avis.

La Commission rejette l’amendement AS 103.

Elle est ensuite saisie de l’amendement AS 69 de M. Dominique Tian.

M. Dominique Tian. Je regrette que l’application stricte de l’article 40 nous prive d’un beau débat sur les régimes spéciaux, les départs à la retraite anticipée, l’équilibre entre les sédentaires et les actifs, débat qui nous aurait permis d’apporter de l’équité à notre système de retraite.

M. Roland Muzeau. Comme le bouclier fiscal !

M. Dominique Tian. Il convient de s’assurer que l’avis du COR n’est qu’un avis technique. Tel est l’objet de cet amendement.

M. le rapporteur. Je partage l’esprit de cet amendement, mais je suggère à Dominique Tian de le retirer, car il est satisfait par l’amendement AS 419 que nous examinerons dans quelques instants et dont il pourrait être cosignataire.

L’amendement AS 69 est retiré.

La Commission adopte l’amendement rédactionnel AS 436 du rapporteur.

Puis, elle examine l’amendement AS 419 du rapporteur.

M. le rapporteur. L’article 5 de la loi du 21 août 2003 pose le principe d’un allongement de la durée d’assurance en fonction des gains d’espérance de vie à 60 ans.

Le projet de loi prévoit de simplifier la procédure. Pour les générations nées à compter du 1er janvier 1955, la durée d’assurance permettant de maintenir constant le rapport entre le temps de travail et le temps de retraite est fixée par décret « pris après avis du Conseil d’orientation des retraites ».

Pour éviter toute ambiguïté, il faut s’assurer que l’avis du COR ne soit qu’un avis technique portant sur l’évolution des durées d’assurance et de la durée moyenne de retraite calculée, aux termes du 3ème alinéa du I de l’article 5 de la loi de 2003, à partir de l’espérance de vie.

M. le ministre. Avis favorable.

Mme Martine Billard. Je suis impressionnée par une telle innovation ! Qu’est-ce qu’un avis « technique » s’agissant de « durée d’assurance ou de services et bonifications » ? En clair, vous privez le COR du droit d’émettre des avis.

M. le rapporteur. Non, il n’y a aucun changement.

Mme Martine Billard. Si vous ajoutez « technique », ce n’est pas un hasard !

M. le rapporteur. Son rôle consiste à poser une question.

Mme Martine Billard. Hier, M. Woerth nous expliquait que le COR n’était qu’un conseil technique, ce qui suppose que le comité de pilotage, lui, peut être politique. En bref, vous interdisez au COR de faire de la politique.

M. le rapporteur. Le COR n’a pas vocation à faire de la politique !

Mme Martine Billard. Tout est politique, monsieur le Rapporteur ! Quand le COR remet un avis sur l’évolution des systèmes de retraite, cela ne peut être uniquement technique, même si ses avis s’appuient sur des supports techniques émanant de l’INSEE, de l’INED ou des différents régimes. Si ses conclusions sont uniquement techniques, il n’est pas en mesure de présenter au Parlement et au Gouvernement des estimations contradictoires. Vous voulez corseter le COR, et sur ce point, nous sommes en désaccord… Il y a bien une volonté politique derrière cet amendement, sans laquelle il ne présente aucun intérêt.

Mme Marisol Touraine. Je ne comprends pas la portée de cet amendement. Qu’entend-il clarifier ? Existe-t-il une ambiguïté quant au rôle du COR ? Il n’a jamais été dit que le Gouvernement était tenu de suivre ses avis. Le COR réalise des études dont le Gouvernement se sert pour faire des propositions. Si nous adoptons cet amendement, qu’est-ce qui était possible hier et ne le sera plus demain ?

M. le rapporteur. Le COR assumera désormais les tâches de la Commission de garantie des retraites, qui est supprimée. Cet amendement a pour objet de protéger le COR, qui n’a pas pour mission de valider des éléments comme la durée de cotisation, mais de donner un avis technique sur l’évolution des durées d’assurance et de retraite.

M. Roland Muzeau. Ne soyons pas naïfs, ces amendements ne sont pas anodins. N’y a-t-il pas un lien de cause à effet entre eux et ce qui s’est passé il y a quelques mois, lorsque le MEDEF a commandé au COR une étude avec des objectifs précis – demande qui n’a pas été couronnée de succès ? Je pense sincèrement que la modification que vous proposez n’est pas anodine et qu’elle vise à rendre possible ce qui ne l’était pas hier.

M. le rapporteur. La suppression de la Commission de garantie des retraites donne de nouvelles missions au COR. Loin de nous l’idée de le corseter. Nous sommes trois ici à siéger au COR : Jean-Luc Préel, Pascal Terrasse et moi-même. Tout membre constituant le COR peut l’autosaisir sur une question qu’il souhaite voir examiner, mais toutes les demandes ne peuvent être satisfaites. J’ajoute que le COR fait un excellent travail de fond. Je rappelle que son renouvellement, en 2003, fut la seule disposition votée à l’unanimité par l’Assemblée nationale.

La Commission adopte l’amendement AS 419.

Puis, elle adopte l’amendement rédactionnel AS 437 du rapporteur.

Elle est ensuite saisie de l’amendement AS 104 de Mme Martine Billard.

Mme Martine Billard. Cet amendement vise à supprimer la dérogation pour les personnes nées en 1953 et 1954. Il n’y a pas de raison de déroger d’emblée à des règles que nous venons d’adopter.

M. le rapporteur. Les personnes nées en 1953 et 1954 ne pourront connaître la durée d’assurance qui leur est nécessaire que fin 2012. La réforme leur permettra de la connaître dès la fin de cette année. Avis défavorable.

M. le ministre. Même avis.

La Commission rejette l’amendement AS 104.

La Commission adopte successivement les amendements rédactionnels AS 438, AS 439 et AS 440 du rapporteur, ainsi que l’amendement AS 420 de cohérence rédactionnelle.

Puis, elle adopte l’article 4 ainsi modifié.

Après l’article 4

La Commission examine l’amendement AS 242 de Mme Marisol Touraine.

Mme Marisol Touraine. Contrairement à ce qu’affirment le Gouvernement et la majorité, les socialistes préconisent des mesures démographiques, car nous ne pouvons pas ne pas tenir compte de l’allongement de l’espérance de vie. Cet amendement illustre l’esprit dans lequel nous avons choisi ces mesures.

Mme Valérie Rosso-Debord. Quel virage !

Mme Marisol Touraine. Votre remarque prouve que vous n’avez pas lu le document que nous avons diffusé. Je vais donc vous expliquer notre position.

L’allongement de la durée de cotisation n’est pas la seule mesure démographique que nous proposons. D’ailleurs, elle ne nous paraît pas suffisante et atteindra vite ses limites – on ne peut pas allonger à l’infini une durée de cotisation. Nous acceptons l’allongement de la durée de cotisation jusqu’en 2020 à partir du moment où il s’inscrit dans le cadre d’une réforme globale comprenant la recherche de ressources nouvelles et la mise à contribution des revenus du capital. Nous ne donnons pas pour autant un blanc-seing à la réforme de 2003.

La réforme que nous proposons est équilibrée jusqu’en 2025, mais nous n’excluons pas la possibilité de poursuivre au-delà l’allongement de la durée de cotisation. C’est la raison pour laquelle, par cet amendement, nous proposons de prévoir un rendez-vous en 2025.

Considérant que la règle de répartition « deux tiers/un tiers » – deux tiers consacrés à la vie active, un tiers à la retraite – est trop stricte, nous préconisons de la porter à 50/50 – la moitié du temps gagné par l’espérance de vie consacré au travail, la moitié à la retraite.

M. le rapporteur. Avis défavorable. Cet amendement est cohérent avec le souhait du groupe SRC de reporter le retour à l’équilibre de 2018 à 2025. Nous refusons ce report.

M. le ministre. Nous sommes tout aussi cohérents, préférant l’année 2018.

Mme Valérie Rosso-Debord. Avec sept années de retard, le groupe socialiste donne raison à François Fillon et admet qu’il ne faut pas revenir sur la réforme de 2003 !

La Commission rejette l’amendement AS 242.

Puis, elle examine les amendements AS 243 et AS 363 de Mme Marisol Touraine.

Mme Marisol Touraine. Nous avons déposé une série d’amendements visant à inscrire dans la loi un nouveau titre : « Droit à la retraite choisie », dont beaucoup ont été écartés au titre de l’article 40. Il en reste toutefois quelques-uns, que je vais vous présenter. Contrairement à ce que pense la majorité, nous ne préconisons pas que tous les Français cessent de travailler à 60 ans, et nous ne nions pas la valeur du travail. Nous le considérons au contraire comme l’un des éléments constitutifs de l’utilité sociale de chacun.

Il va de soi que nos concitoyens devront travailler plus longtemps, et il est souhaitable qu’un nombre important d’entre eux travaille au-delà de l’âge légal de départ. Mais nous préférons proposer, et non pas imposer. Tel est le sens de la « retraite choisie » que nous déclinons par une série de mécanismes – surcotes, incitations…

Vous dites que notre seul horizon en matière de retraite est l’âge légal de départ à la retraite à 60 ans. C’est faux, nous disons simplement que le maintien de l’âge légal est une protection et une liberté. Nous souhaitons que tous ceux qui peuvent ou qui souhaitent travailler plus longtemps, parce qu’ils n’ont pas effectué de travaux pénibles, puissent poursuivre leur activité.

Vous affirmez que les socialistes ne proposent pas de mesures démographiques. C’est faux, mais elles reposent sur le libre choix et l’arbitrage. Et je n’accepte pas les critiques d’un groupe politique qui n’a que le mot « liberté » à la bouche et qui accuse les socialistes de faire de l’égalitarisme systématique !

M. le rapporteur. J’avoue que je comprends mal l’expression « retraite choisie ». Dans le système actuel, les assurés peuvent choisir de partir à 60 ans – 62 ans en 2016. Dans l’attente de quelques éclaircissements, j’émets un avis défavorable.

M. le ministre. La « retraite choisie » existe déjà dans le système français. Chacun a le droit de partir à la retraite à 60 ans, à partir du moment où il en remplit les conditions, ou, plus tard, si son parcours personnel le lui permet.

Instaurer la retraite choisie mettrait fin aux retraites d’office, auxquelles d’ailleurs vous n’étiez pas favorables. La surcote est également une forme de retraite choisie.

Quant à la décote, elle accompagne inévitablement la possibilité de partir plus tôt. Dans les pays qui l’ont instaurée, elle atteint parfois des niveaux très importants. Le Gouvernement considère que ce dispositif augmenterait le nombre des petites pensions. Il ne saurait faire un tel choix. Même si le terme de « retraite choisie » nous convient, nous ne sommes pas favorables à vos amendements.

M. Arnaud Robinet. J’ai du mal à comprendre cette notion de « retraite choisie », ou retraite « à la carte », qui met à mal notre système par répartition et la notion de solidarité intergénérationnelle. Ce que vous proposez, chère collègue, c’est purement et simplement un système individuel, par capitalisation, dans lequel chacun prend sa retraite quand il le souhaite.

M. Roland Muzeau. Votre majorité a déjà beaucoup contribué à faire sauter tous les verrous. Dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2009, vous nous avez imposé le report de 65 à 70 ans de la mise à la retraite d’office.

M. le ministre. Dans le secteur privé !

M. Roland Muzeau. Je me souviens fort bien des arguments que vous aviez avancés, en particulier ceux de notre collègue Yves Bur, qui n’est pas innocent en la matière. Ce sont les mêmes qui justifient la surcote, la décote et le fait de gagner plus à partir d’un certain âge. Cela n’a rien à voir avec un système solidaire et intergénérationnel ! C’est une avancée résolue vers un système totalement individualisé, dans lequel chacun perçoit selon ce qu’il a payé. Cette réforme aboutira à une individualisation totale, sous le vocable de solidarité, de notre système de retraite.

M. Jean Leonetti. J’écoute toujours avec un grand intérêt ce que dit Marisol Touraine. J’ai compris deux choses : d’une part, elle découvre ce qui existe et elle y est favorable ; d’autre part, si jusqu’à présent le Parti socialiste était attaché à la retraite à 60 ans pour tous et à taux plein, il semble qu’il soit passé à autre chose…

Marisol Touraine constate que la retraite choisie existe déjà dans notre pays. Elle interpelle Arnaud Robinet, qui défend pourtant notre système par répartition, donc solidaire. En prônant la retraite choisie, le groupe socialiste accepte l’idée selon laquelle on peut travailler au-delà de 60 ans, considérant que c’est la meilleure façon d’allier souplesse et solidarité. J’en prends acte. Le groupe UMP est très satisfait de cette évolution.

M. Michel Issindou. Nous ne demandons pas la retraite à 60 ans à taux plein. La retraite choisie est beaucoup plus moderne que votre système. Elle permet, en effet, à ceux qui ont cotisé quarante-deux annuités de s’arrêter de travailler à 60 ans, ce qui représente une compensation pour les carrières longues. Elle est ainsi une garantie contre un système que vous refusez de faire évoluer. En outre, elle laisse un choix et permet d’estimer qu’il y a, à 60 ans, un temps pour autre chose. Nous avons accepté le principe de quarante-et-une annuités en 2012 posé par la réforme Fillon. Ainsi, ceux qui auront commencé tard leur carrière continueront de travailler au-delà de 60 ans. Cependant, si cela semble possible pour les cadres, les salariés qui effectuent des travaux pénibles et les ouvriers devraient pouvoir partir à 60 ans. Par ailleurs, nous considérons que l’emploi des seniors est important et nous voulons améliorer le taux d’emploi entre 60 et 65 ans. Notre système est plus souple et, je le répète, plus moderne que le vôtre.

M. Alain Vidalies. Ne nous laissons pas enfermer dans un débat caricatural qui opposerait avancées sociales et liberté individuelle. Nous aborderons la vraie question de la solidarité intergénérationnelle, lorsque nous évoquerons le cumul emploi-retraite. Vous avez commis en la matière des erreurs très importantes, même si votre système présente une certaine cohérence.

Nous ne sommes pas favorables à un système qui fait payer le prix de la réforme par ceux qui sont le plus en difficulté – ceux qui n’ont pas de travail à 57-58 ans et ceux qui n’ont pas de travail à 63-64 ans, dont vous voulez repousser l’âge du départ à 62 ans pour les premiers et à 67 ans pour les seconds. Rien n’exclut qu’il y ait des formes de choix individuel dans ces parcours.

Il faudra trouver une solution équitable pour la valorisation des années d’études. Ceux qui entrent dans la vie active à 18 ans doivent pouvoir continuer à partir à 60 ans et ceux qui étudient tard doivent pouvoir opter pour des surcotisations volontaires durant leurs années d’activité. Il s’agit là d’un système souple, qui résulte d’une décision individuelle et peut s’étaler sur quinze ou vingt ans. Il s’inscrit dans le cadre de la retraite à la carte et ne s’oppose aucunement à la solidarité qu’incarne un système par répartition prévoyant le maintien de la retraite à 60 ans et l’absence de décote à 65 ans.

M. Francis Vercamer. C’est un monde renversé ! La retraite à la carte revient à permettre à ceux qui en ont les moyens de partir plus tôt, tandis que les autres doivent cotiser le plus longtemps possible. Il est curieux que ce soit une proposition du Parti socialiste…

Je ne suis certes pas opposé à la prise en compte de la pénibilité du travail, mais il est très antisocial de dire que chacun peut partir quand il veut.

Mme Marisol Touraine. À l’extérieur de cette salle, certains députés UMP déclarent que nous renonçons à l’âge légal de départ en retraite à 60 ans. C’est travestir la réalité. Sur les retraites comme sur l’ensemble des sujets sociaux, compte tenu de l’évolution de la société, de l’évolution du rapport au travail et de la diversification des modes d’exercice des carrières professionnelles, l’articulation entre le socle des droits collectifs et les droits individuels doit être redéfinie. Il n’est cependant pas question de renoncer au socle des droits collectifs. Nous restons donc fortement attachés à l’âge légal de départ en retraite à 60 ans, qui est une protection et une liberté. Nous n’avons pas dit pour autant que tout le monde doit partir en retraite à 60 ans. L’articulation que nous défendons est porteuse d’une véritable modernité.

Lorsque nous nous exprimons, vous faites preuve d’un spectaculaire manque de respect. Nous pourrons au moins dire que, lorsque les socialistes proposent, la majorité n’écoute pas.

M. Guy Lefrand. La majorité dispose !

Mme Marisol Touraine. Belle formule, monsieur Lefrand, qui illustre bien l’état d’esprit de la majorité actuelle.

M. le président Pierre Méhaignerie. Madame Touraine, vous ne pouvez pas dire que la majorité n’a pas écouté les arguments exposés ce matin.

Mme Marisol Touraine. La formule de Guy Lefrand est scandaleuse.

M. le ministre. Il faudrait entrer dans le détail de vos propositions. La surcote que vous proposez à partir de 60 ans devrait s’accompagner d’une décote, autour d’un âge pivot. Pour financer ce dispositif, vous prévoyez de lever massivement une fiscalité supplémentaire, ce qui ne nous semble pas une bonne idée. À l’inverse, le système par répartition est financé, non par la fiscalité, mais par les cotisations. Ce n’est pas du tout le même projet.

M. le président Pierre Méhaignerie. Certains de nos voisins européens ont mis en place des systèmes de décotes très lourdes, qui ne vont pas dans le sens de l’égalité des retraités. Yves Bur et moi-même avons vu, notamment avec le président SPD de la Commission des affaires sociales du Bundestag, le poids de ces décotes. La dégressivité qui accompagne le départ après trente-cinq ans de cotisation est telle qu’elle est loin de garantir un minimum de sécurité. Les courbes de la classification internationale montrent que la France est le pays où le taux de remplacement est le plus proche du pouvoir d’achat des actifs.

La Commission rejette les amendements AS 243 et AS 363.

Elle est ensuite saisie de l’amendement AS 245 de Mme Marisol Touraine.

M. Pascal Terrasse. Cet amendement s’inscrit lui aussi dans la perspective d’une retraite à la carte. Vous avez décidé à la fois d’allonger la durée de cotisation et de reculer l’âge de départ à la retraite – c’est, pour faire écho à Arnaud Robinet, « fromage et dessert ».

D’abord, la retraite à taux plein à 60 ans n’a jamais existé – et il n’est pas question pour les socialistes de la réclamer. Par ailleurs, le nouveau dispositif conduira des femmes qui ont connu des interruptions de carrière à reculer leur départ à 67 ans. En outre, certains assurés sociaux qui auront commencé tôt seront obligés de cotiser quarante-quatre annuités, ce qui aura un impact sur le travail des salariés, notamment de ceux dont les carrières ont été interrompues. Il importe donc de donner à tout salarié qui le souhaite la possibilité de partir à l’âge de 60 ans. Pour ceux qui souhaitent aller au-delà, il conviendrait de créer des surcotes.

En revanche, les personnes souhaitant partir à 60 ans doivent pouvoir le faire avec des retraites pro rata temporis, mais sans décote. Nous ne voulons pas ajouter, comme vous le préconisez, de la misère à la misère. Le départ à 60 ans est pour les socialistes un marqueur très fort, sur lequel nous insisterons lors des débats en séance publique.

M. le rapporteur. La surcote a déjà été augmentée par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2009, ce qui semble suffisant. Avis défavorable.

M. le ministre. Avis défavorable. La surcote de 5 % est équilibrée, car elle incite à continuer à travailler sans se traduire pour autant par des coûts trop élevés. De fait, cette mesure, qui s’inscrit dans la durée, aura des répercussions sur les régimes. Contrairement à ce qu’indique le texte proposé par les socialistes, une année de prolongation dans le cadre d’un mécanisme incitatif ne rapporterait pas une dizaine de milliards d’euros, compte tenu du niveau auquel il faudrait fixer la surcote. Le mécanisme doit être compatible avec l’équilibre général des retraites.

La Commission rejette l’amendement AS 245.

Elle examine ensuite l’amendement AS 246 de Mme Marisol Touraine.

M. Gaëtan Gorce. L’attitude de nos collègues de la majorité vis-à-vis des interventions de Marisol Touraine m’amène à rappeler les usages de respect mutuel qui devraient présider à nos travaux. Il est inadmissible de se comporter de cette façon, en faisant des remarques incessantes lorsque notre collègue s’exprime, et, lorsqu’elle quitte la salle pour s’exprimer à l’extérieur, des remarques directes pour caricaturer la position du groupe socialiste. Je compte sur vous, monsieur le président, pour faire assurer à l’avenir le respect dû à la porte-parole de notre groupe.

M. le président Pierre Méhaignerie. Un respect réciproque…

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l’amendement AS 246.

Elle est ensuite saisie de l’amendement AS 248 de Mme Marisol Touraine.

M. Alain Vidalies. L’objectif de cet amendement est de revenir au dispositif relatif aux carrières longues qui figurait dans la loi de 2003. D’une manière presque clandestine, en plein été, vous avez modifié ce dispositif et porté de quarante-deux à quarante-trois ans la durée de cotisation nécessaire, faisant chuter le nombre potentiel de bénéficiaires. Pour une fois que vous auriez pu revendiquer la paternité d’une avancée, vous vous êtes fait peur et êtes revenus en arrière, sans débat et sans négociation. Vous avez raboté le dispositif, au point que le nombre de bénéficiaires potentiels se limitait à 25 000 au début de l’année 2010.

Ayant voté pour les articles relatifs à ce dispositif dans la loi de 2003, nous souhaitons revenir à ce texte qui avait fait l’objet d’un consensus.

Le Gouvernement devrait peut-être nous indiquer les difficultés qui ont motivé cette modification. Il semble que les bénéficiaires se soient révélés beaucoup plus nombreux que prévu, et ce non pas uniquement à cause d’erreurs de calcul, mais aussi du fait des conditions d’application de la loi dans certains contextes. Selon la presse, en effet, ces conditions ont été interprétées si largement que des détournements ont pu avoir lieu et que des enquêtes ont donné lieu à des rectifications. Un tel débat ne doit pas se tenir seulement dans la presse et notre commission doit pouvoir s’en saisir. De fait, la validation de trimestres acquise, voilà quelques années, sur la base d’attestations évoquant des activités agricoles a probablement privé de ce droit ceux qui en avaient véritablement besoin.

Je ne confonds pas pénibilité et carrières longues. Nous souhaitons revenir au texte d’origine. Le passage à quarante-trois ans de cotisation a réduit la portée de ce qui était une démarche commune. Nous attendons du Gouvernement qu’il nous indique quels sont les dispositifs mis en œuvre pour éviter les interprétations larges, voire les détournements, dont la presse se fait régulièrement l’écho.

M. le rapporteur. Le dispositif applicable aux carrières longues, créé par la loi de 2003, a permis à près de 700 000 personnes, souvent des ouvriers, de partir avant 60 ans, certains même à 56 ans. Il s’agit d’une avancée sociale considérable que, si ma mémoire est bonne, le Gouvernement Jospin avait refusée en 2001, malgré le souhait de certains membres éminents de la majorité d’alors. Le Gouvernement a aujourd’hui la ferme intention de proroger ce dispositif et de l’étendre : désormais, les personnes ayant commencé à travailler avant 18 ans pourront en bénéficier. Les modalités d’application de ce dispositif vont évoluer, pour tenir compte du relèvement de l’âgé légal et de l’augmentation de la durée d’assurance. À l’horizon 2015, près de 90 000 personnes pourront ainsi partir avant l’âge légal.

Le dispositif proposé par l’amendement étant moins favorable que celui qui est proposé par le Gouvernement, j’émets un avis défavorable.

M. le ministre. Il ne s’agit pas d’un durcissement du dispositif, mais de l’application aux carrières longues de la prolongation de la durée d’assurance, qui s’applique à tous.

Le texte du Gouvernement prévoit l’extension d’une année de ce dispositif, qui sera désormais ouvert aux personnes ayant commencé à travailler à 17 ans, et non plus seulement à 18 ans. Je ne suis donc pas favorable à votre amendement.

M. Pascal Terrasse. En 2003, nous avons voté l’article relatif au dispositif « carrières longues », auquel nous ne reprochons – comme d’ailleurs l’ensemble des organisations syndicales et le COR – que de n’être pas financé.

Le déficit de la CNAV est certes dû pour partie à la crise économique, mais aussi à ce non-financement du dispositif des carrières longues. Je rappelle, par ailleurs, que nous avons créé en 2000 l’allocation équivalent retraite qui, si elle s’adressait à d’autres types de salariés, permettait de faire bénéficier ces retraités d’une pension supérieure au minimum contributif.

L’allongement à quarante-trois ans de la durée de cotisation est un véritable sujet de désaccord et les organisations syndicales vous attendent sur ce point. Nous acceptons, je le rappelle, que la durée de cotisation soit portée à quarante-et-une annuités en 2012 et 41,5 annuités en 2020. Or, les carrières longues ne bénéficieraient pas de ce dispositif. Pourquoi un salarié, quel que soit l’âge de son entrée dans la vie active, ne pourrait-il pas partir à la retraite, lorsqu’il a atteint le nombre d’annuités de cotisation nécessaires ?

Monsieur le ministre, pour pouvoir affirmer que les dispositions de votre circulaire ne sont pas un recul, vous ne recevez sans doute pas les courriers de salariés qui pensent qu’après avoir cotisé quarante ou quarante-et-une annuités, ils peuvent bénéficier du dispositif des carrières longues – ce qui n’est pas le cas.

La Commission rejette l’amendement AS 248.

M. le président Pierre Méhaignerie. On peut réfléchir à l’âge légal du départ en retraite, mais le rabaisser suppose soit une décote très élevée, soit des prélèvements obligatoires en forte augmentation. Je suis ouvert sur le recours à l’impôt sur le revenu, mais, dans le contexte de la mondialisation, l’augmentation des prélèvements obligatoires serait suicidaire pour l’emploi. La fixation de l’âge légal de départ à 62 ans était le moins mauvais des systèmes.

La séance est levée à treize heures.

——fpfp——

Présences en réunion

Réunion du mercredi 21 juillet 2010 à 9 heures 30

Présents. – M. Élie Aboud, M. Jean Bardet, Mme Gisèle Biémouret, M. Jérôme Bignon, Mme Martine Billard, M. Yves Bur, M. Gérard Cherpion, Mme Marie-Françoise Clergeau, M. Georges Colombier, Mme Marie-Christine Dalloz, M. Rémi Delatte, Mme Michèle Delaunay, M. Jacques Domergue, M. Jean-Pierre Door, M. Dominique Dord, Mme Cécile Dumoulin, M. Yves Durand, Mme Odette Duriez, Mme Jacqueline Fraysse, Mme Cécile Gallez, Mme Catherine Génisson, M. Jean-Patrick Gille, M. Gaëtan Gorce, Mme Anne Grommerch, M. Michel Heinrich, Mme Danièle Hoffman-Rispal, M. Christian Hutin, M. Michel Issindou, M. Denis Jacquat, M. Paul Jeanneteau, M. Yves Jégo, M. Régis Juanico, M. Patrick Lebreton, M. Guy Lefrand, M. Jean-Marie Le Guen, M. Jean Leonetti, M. Jean-Claude Leroy, M. Claude Leteurtre, M. Céleste Lett, M. Michel Liebgott, Mme Gabrielle Louis-Carabin, M. Guy Malherbe, M. Jean Mallot, M. Pierre Méhaignerie, M. Pierre Morange, M. Philippe Morenvillier, M. Roland Muzeau, Mme Marie-Renée Oget, M. Christian Paul, M. Bernard Perrut, Mme Martine Pinville, Mme Bérengère Poletti, M. Jean-Luc Préel, Mme Sophie Primas, M. Simon Renucci, M. Arnaud Richard, M. Arnaud Robinet, M. Jean-Marie Rolland, Mme Valérie Rosso-Debord, M. Fernand Siré, M. Christophe Sirugue, M. Dominique Tian, Mme Marisol Touraine, M. Francis Vercamer, M. Alain Vidalies

Excusé. – M. Vincent Descoeur

Assistaient également à la réunion. – Mme Patricia Adam, M. Jean-Marc Ayrault, M. Christian Bataille, M. François Bayrou, M. Émile Blessig, Mme Martine Carrillon-Couvreur, M. Gérard Charasse, M. Tony Dreyfus, M. Christian Eckert, M. Jean-Louis Gagnaire, M. Laurent Hénart, Mme Marietta Karamanli, Mme Colette Langlade, M. Victorin Lurel, M. Michel Pajon, M. Yanick Paternotte, M. Jean-Luc Pérat, M. Pascal Terrasse