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Commission des affaires sociales

Mercredi 12 octobre 2011

Séance de 11 heures 30

Compte rendu n° 03

Présidence de M. Pierre Méhaignerie, Président

– Audition, ouverte à la presse, de Mme Valérie Pécresse, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l’État, de M. Xavier Bertrand, ministre du travail, de l’emploi et de la santé, et de Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre des solidarités et de la cohésion sociale sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2012 (n° 3790) (MM. Yves Bur, Jean-Pierre Door, Mme Bérengère Poletti, M. Denis Jacquat et Mme Martine Pinville, rapporteurs) (suite) et sur l’application de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2011 (MM. Yves Bur, Jean-Pierre Door, Mme Bérengère Poletti, M. Denis Jacquat et Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteurs)

– Présences en réunion

COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES

Mercredi 12 octobre 2011

La séance est ouverte à onze heures trente.

(Présidence de M. Pierre Méhaignerie, président de la commission)

La Commission des affaires sociales entend Mme Valérie Pecresse, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l’État, de M. Xavier Bertrand, ministre de l’emploi et de la santé, et de Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre des solidarités et de la cohésion sociale sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2012 (n° 3790) (suite) et sur l’application de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2011 (MM. Yves Bur, Jean-Pierre Door, Mme Bérengère Poletti, M. Denis Jacquat et Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteurs).

M. le président Pierre Méhaigneri e. Nous accueillons M. Xavier Bertrand et Mme Roselyne Bachelot-Narquin. Mme Valérie Pecresse nous rejoindra à 12 heures 30. Nous examinerons alors le rapport d’information sur la mise en application de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2011.

Mais auparavant, en accord avec les responsables des groupes, je vais donner la parole à ceux de nos collègues qui n’ont pu poser leur question au cours de la réunion que nous avons tenue la semaine dernière dans le cadre de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2012.

M. Jean-Marie Rolland. Monsieur le ministre, ma question concerne la convergence tarifaire entre le secteur public et le secteur privé. Il semble qu’une démarche très dynamique soit engagée en ce domaine, mais je souhaiterais obtenir des précisions sur les éléments de transparence dans les modalités de calcul des tarifs pratiqués par ces deux secteurs, dont les missions sont définies par la loi dite « HPST » de 2009. Accepterez-vous des amendements visant à apporter plus de clarté dans l’établissement de ces tarifs ?

M. Xavier Bertrand, ministre du travail, de l’emploi et de la santé. La réponse est oui. Cessons de donner le sentiment que les choses manquent de clarté et qu’il ne nous est pas permis de tout dire.

M. Régis Juanico. Les différents ministres que nous avons auditionnés la semaine dernière ont souligné le haut niveau de prise en charge des dépenses de santé dans notre pays ainsi que la diminution du reste à charge pour les ménages.

Pourtant, deux chiffres contredisent cette affirmation. D’une part, selon le baromètre d’Europe Assistance, 30 % des Français reporteraient, voire renonceraient à leurs soins médicaux en raison de leurs difficultés financières – ils étaient 11 % l’année dernière. Ce taux de 30 % est l’un des plus élevés en Europe. D’autre part, une étude de UFC Que choisir montre que le coût des dépenses de santé, qui est passé de 571 euros en 2005 à 665 en 2010, a évolué deux fois plus vite que les revenus. Or la décision de doubler la taxation sur les contrats responsables et solidaires des assurances complémentaires santé va dégrader encore plus l’accès des Français aux soins. Déjà qu’entre 4 et 5 millions de nos compatriotes ne sont pas affiliés à une complémentaire santé, ce 1,2 milliard de ponctions supplémentaires vont peser sur leur porte-monnaie et obligeront un certain nombre d’entre eux à se désaffilier.

M. Xavier Bertrand nous citait la semaine dernière l’exemple de la GMF complémentaire santé qui n’a augmenté ses cotisations que de 2 % et non de 4, 5, voire de 8 % comme l’ont fait d’autres mutuelles. Je signale au ministre que la complémentaire santé représente 0,3 % de l’activité de la GMF et concerne seulement 20 000 adhérents. Les grandes mutuelles qui prennent en charge les complémentaires santé ne sont pas assises sur un tas d’or. Leurs importantes réserves financières ne représentent que 300 ou 400 euros par usager, ce qui correspond au coût d’une prothèse dentaire.

M. le ministre du travail, de l’emploi et de la santé. En effet, certaines mutuelles n’augmenteront pas leurs cotisations. Demandons-leur comment elles font ! Mais quel que soit le montant de l’augmentation, il faut instaurer une plus grande transparence.

Pourquoi l’augmentation moyenne des tarifs des complémentaires au cours des dernières années a-t-elle été beaucoup plus importante que l’augmentation de la fiscalité ? Les cotisations ont en effet augmenté en moyenne de 83 euros pendant que la fiscalité augmentait de 38. J’ai beau rechercher l’apaisement entre tous les acteurs de la santé, mais quand je vois les publicités qui paraissent pour critiquer l’augmentation de la taxe sur les complémentaires santé, je suis scandalisé. Il faut tout de même se souvenir qu’en 2004, lorsque nous avons mis en place les contrats responsables, le secteur a exprimé le besoin d’une fiscalité particulière pour « booster » le démarrage. Si bien qu’aujourd’hui, 95 % des contrats sont des contrats responsables !

Pourquoi, mesdames et messieurs les parlementaires de l’opposition, ne cessez-vous de dire que notre système de santé est dans un état déplorable tout en tenant un discours inverse dans votre circonscription en disant que vous avez un hôpital qui « tourne » bien ? Est-ce l’approche des élections qui vous rend schizophrènes ? Il faut tout dire aux Français ! Les difficultés d’accès aux soins que vous dénoncez correspondent avant tout aux soins optiques et dentaires, mais cela a toujours été le cas. Ne dites pas aux Français, comme Mme Royal, qu’il faut ouvrir en urgence des dispensaires parce que nos compatriotes n’ont pas les moyens de se faire soigner ! Je vous rappelle qu’en France, la carte que les patients doivent présenter pour se faire soigner est verte et non bleue, comme c’est le cas dans certains pays.

En revanche, le coût d’un bridge pour quatre dents est plus élevé qu’un salaire mensuel. Il appartient aux Français de prévoir le moment où ils pourront le faire. Cela a toujours été comme cela parce que les soins conservateurs n’ont jamais été suffisamment revalorisés, que le Gouvernement en place soit de gauche ou de droite. Nous avons laissé prospérer les dépassements.

Sur tous ces sujets, avez-vous des solutions ? Si vous voulez éviter que les dépassements soient à la seule charge des patients, je vous invite à vous prononcer sur le secteur optionnel.

Cessez de dire en permanence que notre système de santé va mal, car ce n’est pas la réalité. Le jour où il vous appartiendra de le gérer, vous aurez du mal à démontrer que les choses vont mieux simplement parce que vous êtes là. La santé est une affaire trop sérieuse pour la traiter avec démagogie !

Monsieur Juanico, pouvez-vous me citer un seul pays, en dehors de la France, où vous aimeriez, vous et votre famille, vous faire soigner ?

Si vous voulez limiter la charge des dépenses de santé, associez-vous à la démarche du président Méhaignerie, qui demande aux représentants des complémentaires santé de ne pas répercuter l’augmentation de la taxe sur leurs adhérents.

Mme Sandrine Hurel. Inadmissible !

M. Christian Hutin. Monsieur le président, nous attendons du respect de la part du ministre, or il nous provoque. Nous ne sommes pas dans l’hémicycle !

(Les députés du groupe SRC se lèvent et quittent la salle).

M. le président Pierre Méhaignerie. Je considère également que cette caricature de notre système de santé est lamentable. Je laisse nos collègues de l’opposition qui le souhaitent quitter la salle.

M. Roland Muzeau. Nous sommes à des années lumière de l’esprit qui a présidé la réforme de nos institutions. Il s’agissait de faire du travail en commission le véritable travail préparatoire servant à établir le contenu des textes qui seront examinés dans l’hémicycle. Autant il est normal dans l’hémicycle d’adopter un ton polémique, voire un peu incisif, autant j’aimerais qu’en commission nous puissions aller plus au fond des choses et ne pas en rester à l’écume des problèmes.

Une nouvelle fois, le projet de loi de financement de la sécurité sociale est indigent en matière d’accidents du travail et maladies professionnelles (AT-MP). Je sais qu’un certain nombre de problématiques sérieuses sont renvoyées au cadre réglementaire, mais le débat sur les AT-MP n’interviendra qu’après que tous les autres points auront été examinés – c’est toujours la dernière roue du carrosse. Pour autant, monsieur le ministre, je reconnais que vous avez sur la question tenu des propos intéressants.

Cette année, la dernière de la législature, nous avons choisi de porter une question essentielle à nos yeux, celle de la réparation des victimes du travail. Je rappelle qu’en 2010, le Gouvernement a décidé de fiscaliser les indemnités journalières, décision que nous, députés de la gauche démocrate et républicaine, avions particulièrement condamnée. La question du réexamen de l’indemnisation des victimes du travail se pose avec encore plus d’acuité aujourd’hui. Le moins que l’on puisse dire est que ce gouvernement n’a pas profité de la législature pour mettre un terme au caractère inéquitable du régime de réparation des AT-MP, qui conduit à moins bien indemniser les victimes du travail que celles des accidents de la route, ce que vous avez vous-même reconnu.

Dans sa décision du 18 juin 2010, le Conseil constitutionnel a considéré, dans le cadre d’une question prioritaire de constitutionnalité, que le régime actuel est conforme à notre Constitution tout en émettant une réserve importante, estimant qu’ « en présence d’une faute inexcusable de l’employeur, les dispositions de ce texte ne sauraient toutefois, sans porter une atteinte disproportionnée au droit des victimes d’actes fautifs, faire obstacle à ce que ces mêmes personnes, devant les mêmes juridictions, puissent demander à l’employeur réparation de l’ensemble des dommages non couverts par le livre IV du code de la sécurité sociale ».

Le Gouvernement ne peut ignorer plus longtemps cette décision du Conseil constitutionnel. Ces dernières années, toutes les propositions des députés du front de gauche visant à réparer intégralement les victimes du travail ont été systématiquement rejetées pour des raisons de recevabilité financière. Aurez-vous enfin, le courage politique de laisser cette question venir en discussion en séance publique ?

Par ailleurs, le 24 août dernier, le Premier ministre a annoncé la révision du mode de calcul des prestations en espèces de l’assurance maladie maternité et accidents du travail, révision qui relève du domaine réglementaire. Pouvez-vous nous garantir que les méthodes de calcul retenues seront neutres pour les personnes victimes des AT-MP ? Je rappelle que les indemnités journalières au titre des AT-MP ne représentent que 60 % du salaire journalier jusqu’au 28ème jour d’arrêt de travail et 80 % à compter du 29ème jour. Autant dire que durant leur incapacité temporaire de travail, les salariés ne sont pas indemnisés intégralement, même si certains perçoivent un complément de salaire par le biais de conventions collectives ou d’accords d’entreprise ou de groupe. Monsieur le ministre, êtes-vous oui ou non favorable à ce que toute victime du travail bénéficie d’un revenu de remplacement égal à ce qu’elle percevait avant son arrêt de travail ?

Enfin, pour prétendre à la reconnaissance et à l’indemnisation d’une maladie professionnelle non référencée, la victime empruntant la voie dite complémentaire doit notamment justifier d’un taux d’incapacité d’au moins 25 %. Cette condition représente un obstacle énorme – nous avons eu l’occasion de le vérifier dans le cadre des travaux de la mission d’information sur les risques psychosociaux au travail – et rend impossible l’indemnisation par la branche AT-MP de victimes souffrant de pathologies psychiques graves dont le lien direct avec le travail est reconnu. Envisagez-vous de supprimer ce seuil, ou à défaut de l’abaisser ?

M. le ministre du travail, de l’emploi et de la santé. J’ai moi-même proposé en 2007, lorsque j’étais ministre du travail, de réfléchir à la reconnaissance du stress comme maladie professionnelle. Cela dit, l’enjeu de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale n’est pas de redéfinir la liste des maladies professionnelles.

S’agissant des AT-MP, vous savez bien que l’équilibre ne peut être garanti qu’en jouant sur les taux. Parmi les questions liées à la pénibilité qui font suite à la réforme des retraites figure la création d’un fonds destiné aux actions de prévention. Si la réparation et l’indemnisation sont des éléments importants, la prévention sera le principal enjeu dans les prochaines années.

Vous avez raison, monsieur Muzeau, de rappeler les garanties offertes par les conventions collectives et les accords de groupe. L’effort reposera en partie sur les entreprises car j’ai fait le choix, et je l’assume, de relever les cotisations versées par certaines entreprises pour garantir une couverture maximale aux salariés.

En outre, bien que cette question ne soit pas au cœur du projet de loi de financement de la sécurité sociale, nous vous présenterons deux amendements tendant à harmoniser les modalités de prise en charge des périodes d’exposition à l’amiante entre les différentes branches.

S’agissant des indemnités journalières, l’aménagement aura un effet légèrement positif – 10 millions d’euros – pour les accidents du travail entraînant un arrêt de travail court ; en revanche, pour les accidents du travail nécessitant un arrêt plus long, le différentiel de 13 millions d’euros sera réalisé sous forme d’économies.

M. Guy Malherbe. Mes collègues Jean-Paul Jeanneteau, Michel Heinrich, Gérard Cherpion, Jean-Marc Roubaud et moi-même avons déjà attiré votre attention sur la situation critique des officines de pharmacie, suggérant de déconnecter la rémunération des officinaux de la vente des médicaments. Il semble que nous ayons été entendus, puisque l’article 39 engage le processus. Nous serons attentifs au contenu des conventions qui seront passées avec l’assurance maladie.

Accepterez-vous, monsieur le ministre, d’autres amendements visant notamment à relever les quotas sur l’ensemble du territoire, à renforcer la protection, en cas de regroupement, en portant le délai actuel de cinq à douze ans, enfin à permettre les regroupements en tous points du territoire de façon à renforcer le réseau ?

Par ailleurs, le dispositif fiscal en vigueur pour les regroupements pose de nombreux problèmes. Serait-il possible de le revoir ?

Pourquoi ne pas envisager à l’article 39 la création d’un fonds de modernisation du réseau officinal, qui serait géré par l’assurance maladie ?

Ces mesures conforteraient celles que vous nous avez proposées afin de favoriser la restructuration et le maintien du réseau officinal sur l’ensemble de notre territoire.

M. le ministre du travail, de l’emploi et de la santé. Un certain nombre de parlementaires m’ont interrogé sur cette question. Bien entendu, en cette affaire, l’élément déterminant sera la tenue d’une négociation conventionnelle entre l’assurance maladie et les pharmaciens. Toutefois, tout le monde s’accorde à reconnaître que le revenu du pharmacien ne doit plus être aussi lié qu’il l’est aujourd’hui à la vente des médicaments. L’organisation du monde de la santé et les nouvelles tâches que doivent assumer les pharmaciens justifient cette évolution, que vous pourrez, par votre vote, asseoir législativement. Je ne peux m’empêcher d’être optimiste sur l’issue des négociations. Si les choses évoluent comme nous le pressentons, le système acté par ce projet de loi de financement de la sécurité sociale sera toujours en vigueur dans de nombreuses années.

Mme Anny Poursinoff. Monsieur le ministre, je vais vous poser des questions précises, qui exigent non pas des réponses de tribune mais des réponses telles que l’on peut en espérer en commission.

Vous affirmez que la qualité des soins est maintenue malgré les restrictions budgétaires. Sur quelle étude vous fondez-vous pour tenir ces propos ? Je connais pour ma part des études montrant que la satisfaction professionnelle des soignants, y compris des médecins, s’est beaucoup dégradée. Pensez-vous que des équipes qui souffrent puissent maintenir encore longtemps la qualité des soins ?

Seulement 2 % du budget de l’assurance maladie sont consacrés à la prévention, alors que les deux tiers des remboursements concernent des maladies chroniques. Comment expliquez-vous ce choix budgétaire ? Comment parvenir à un meilleur équilibre en faveur de la prévention ?

Le Président de la République a abandonné le grand plan de dépendance qu’il avait promis. Certes, ce projet de loi de financement de la sécurité sociale prévoit certaines actions. Vous indiquez notamment vouloir développer les services de soins infirmiers à domicile (SSIAD), dont les objectifs ne sont pourtant pas atteints car le secteur n’est pas attractif pour les professionnels. Comment envisagez-vous d’améliorer l’attractivité du secteur des services infirmiers et de l’aide à domicile en général ?

Ce texte prévoit également la généralisation des maisons pour l’autonomie et l’intégration des malades d’Alzheimer (MAIA), dont le contenu reste flou et fait craindre un double emploi avec les centres locaux d’information et de coordination (CLIC). Quels sont les objectifs poursuivis par les MAIA qui ne pourraient pas être atteints par les CLIC ?

M. le ministre du travail, de l’emploi et de la santé. Les conclusions de la Commission des comptes de la santé sont on ne peut plus claires quant à la qualité de la prise en charge et au montant du reste à charge.

En ce qui concerne le rationnement des soins, le budget qui sera voté par la majorité prévoit 4 milliards d’euros de dépenses supplémentaires à la fin de l’année 2012 par rapport à l’année dernière. Où voyez-vous un rationnement ? Je sais bien que certains souhaitent toujours plus. Je préfère demander des efforts en augmentant de 2,8 % les dépenses de l’objectif national des dépenses d’assurance maladie (ONDAM) plutôt que d’imposer des sacrifices en baissant de 2,8 % les dépenses de soins. D’autres pays sur notre continent ont fait ce choix. Je ne veux pas qu’une réduction des dépenses de santé se produise en France.

J’en viens aux personnels de santé. Selon l’enquête menée par Mme Danielle Toupillier, ce dont souffrent le plus durement les professionnels, c’est la charge que représente la « paperasse » administrative et la réunionite à l’hôpital. Nous sommes loin du tableau apocalyptique que certains veulent bien nous peindre. Je ne dis pas que tout va bien et je suis attentif au stress engendré par l’organisation interne des hôpitaux.

Vous ne souhaitez pas une réponse de tribune, madame, eh bien je vous pose la question : pensez-vous que les 35 heures ont fait du bien à l’hôpital ? Je ne le crois pas. Elles sont incompatibles avec le bon fonctionnement d’un établissement ouvert 365 jours sur 365, 24 heures sur 24. Et on ne peut en sortir qu’en utilisant les heures supplémentaires. Vous allez me rétorquer qu’il suffit de recruter. Or, au moment où je vous parle, l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris ne parvient pas à recruter les 600 infirmières dont elle a besoin. Et pourtant les crédits existent.

La santé est complexe et ne peut se réduire à une simple question de financement. L’hôpital souffre de problèmes d’attractivité. Il existe une concurrence entre la province et la région parisienne, liée aux conditions de transport et de logement. J’ai étudié la question en 2006 et je l’étudie à nouveau. Il faut regarder les choses avec précision parce qu’il est de notre intérêt d’établir le bon diagnostic, d’apporter les bons remèdes et d’éviter les amalgames qui ne rendent service à personne.

La France n’a jamais vraiment négocié le virage de la prévention. Si notre système de santé est considéré comme l’un des meilleurs au monde sur le plan curatif, nous avons encore des marges de progression sur le plan préventif. Dans la loi dite « HPST », Mme Roselyne Bachelot a misé sur le renforcement de la prévention. Lorsque j’ai lancé l’opération « M’T dents » sur la prévention bucco-dentaire des jeunes, j’ai rencontré des difficultés. Lorsque j’ai mis en place la prise en charge par la sécurité sociale de l’examen d’ostéodensitométrie, on m’a dit que cela coûterait cher mais ne rapporterait rien. La prévention n’apporte pas réellement d’économies, mais elle responsabilise les patients sur leur état de santé et leur permet de vivre plus longtemps en meilleure santé. Il est vrai que le virage de la prévention serait plus facile à négocier si nos comptes étaient équilibrés ou excédentaires, mais je continuerai à développer la prévention dans notre pays car le rééquilibrage entre curatif et prévention constitue l’un des grands défis que doit relever notre système de santé.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre des solidarités et de la cohésion sociale. Il n’est pas inutile, madame Poursinoff, de faire le point sur l’avancement du plan grand âge (PSGA) par rapport aux objectifs qui avaient été fixés. Ce plan impliquait la création de 90 500 places nouvelles, dont 59 % pour faciliter le maintien à domicile – 40 % pour les services de soins infirmiers à domicile et 19 % pour les formules de répit – et 40 % dans les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD). Le calibrage du plan a été révisé à plusieurs reprises. En 2008, nous avons augmenté la cible annuelle des EHPAD, ce qui correspondait à une demande du terrain, en passant de 5 000 à 7 500 places par an au cours des années 2008-2010. Cette cadence a été tenue. En 2010, le développement des services de soins infirmiers à domicile a été revu en faveur d’une tranche annuelle de 6 000 places par an au lieu des 7 500 initialement prévues à compter de 2010.

Ces différences s’expliquent aisément par les délais, dont la durée varie entre quatre et cinq ans selon les types de places : si 100 % des places de services de soins infirmiers à domicile sont installées après quatre années de notification, le taux de réalisation des places d’EHPAD dans les meilleurs délais n’est que de 70 %.

Pour assurer une mise en œuvre cohérente du plan, le solde des enveloppes anticipées à notifier en 2012 s’établit à 20,35 millions d’euros et devra être essentiellement consacré à l’installation de services de soins infirmiers à domicile afin de rééquilibrer dans le plan la proportion entre établissements et services.

Au titre du plan, nous financerons 2 100 places d’EHPAD et 1 200 places de services de soins infirmiers à domicile, étant entendu que 85 000 places sur les 93 000 prévues dans le plan ont déjà été autorisées.

La réforme de la tarification dans ces services nous oblige à déterminer un coût de fonctionnement correspondant aux services rendus afin de garantir une allocation plus juste de ressources et d’objectiver le lien entre la qualité des soins et les moyens alloués par l’assurance maladie. Cette démarche traduit notre volonté de renforcer la prise en charge des soins à domicile, ce qui va dans le sens souhaité par Mme Bérengère Poletti, afin de diminuer le recours à l’hospitalisation. Le Haut conseil pour l’avenir de l’assurance maladie a avancé le chiffre de 2 milliards de prestations indues au titre de l’assurance maladie du fait des difficultés de prise en charge à domicile, étant entendu que le maintien à domicile correspond à la volonté des personnes âgées.

Ce chantier avance bien. Je maintiens le principe de la réforme, mais, je le dis très clairement, si nous constatons que nous n’avons pas suffisamment d’éléments ou si nous ne sommes pas prêts techniquement en 2012, je n’appliquerai la réforme que lorsque je serai certaine qu’elle ne déstabilise pas les services de soins infirmiers à domicile. Je tiens donc à rassurer les acteurs de terrain sur ce point.

Vous avez évoqué les MAIA et les CLIC : il est utile de rappeler qu’au titre du plan Alzheimer, en 2011, nous avons financé 600 pôles d’activité de soins adaptés, 170 équipes mobiles de services de soins infirmiers à domicile renforcées, 75 plateformes de répit, 35 MAIA, auxquels s’ajoutent 17 structures expérimentales. Nous mobilisons les agences régionales de santé pour aboutir fin 2012 à la création de 150 MAIA.

Les CLIC et les MAIA n’ont pas la même finalité. La seule question qui se pose est celle de l’information des personnes. À cet égard, les guichets se sont multipliés. En plus des CLIC, des MAIA, des maisons départementales des personnes handicapées (MDPH), quelques conseils généraux ont également ouvert un guichet, sans parler de l’assurance maladie et des caisses d’assurance vieillesse… L’enjeu de la réforme de la dépendance passe par une clarification des questions qui se posent. Cela dit, la mise en réseau de la prise en charge des malades atteints d’Alzheimer et de leur famille par les maisons ne se superpose pas avec les CLIC : les deux structures conservent leur utilité propre.

M. Michel Heinrich. Il est vrai, monsieur le ministre, que notre système de santé est exceptionnel et supporte la comparaison avec celui des autres pays d’Europe. Les Français ne trouveraient pas mieux dans n’importe quel autre pays européen.

Quant au reste à charge, il a tendance à se stabiliser, voire à diminuer en pourcentage. Toutefois, ce n’est pas la perception qu’en ont les Français, pour une raison simple : le secteur 2 n’est pas toujours pratiqué avec tact et mesure, et certains praticiens, même s’il n’y a pas eu de revalorisation depuis fort longtemps, pratiquent le dépassement d’honoraires d’une façon très excessive. Où en est la mise en place du secteur optionnel ?

M. le ministre du travail, de l’emploi et de la santé. En ce qui concerne le tact et la mesure, il appartient au Conseil de l’ordre de les faire respecter. Chacun doit prendre ses responsabilités. L’une des solutions pour éviter que le reste à charge ne pèse sur les assurés sociaux, c’est le secteur optionnel. Nous en parlons depuis longtemps. Je demande simplement que tous ceux qui doivent signer le fassent, suivant des modalités qui ont d’ores et déjà été arrêtées : l’assurance maladie, les syndicats de médecins, les assurances complémentaires santé, le Centre technique des institutions de prévoyance, la Fédération française des sociétés d’assurances (FFSA), la Mutualité française.

On me dit que la Mutualité serait de mauvaise humeur à cause de l’augmentation de la taxe sur les contrats d’assurance. Dans la mesure où, comme elles l’ont indiqué, les mutuelles répercuteront cette augmentation sur les assurés, leur capacité à faire face à la mise en place du secteur optionnel ne sera donc pas amputée.

De nombreuses complémentaires, même si elles sont adhérentes de la Mutualité, prennent en charge les dépassements, certaines au niveau fixé dans le protocole d’accord, d’autres en deçà, d’autres au-dessus. L’avantage du secteur optionnel est de donner une vraie visibilité aux assurés sociaux sur tout le territoire. La signature de l’accord sur le secteur optionnel n’a pas pour but de me faire plaisir, mais de permettre aux patients de bénéficier d’une vraie prise en charge dans les trois spécialités visées par l’accord.

À mes yeux, le secteur optionnel n’est pas une option. Si la mutualité refuse de signer cet accord – qui, je le rappelle, a été préparé avec elle –, le pouvoir politique prendra ses responsabilités, par le biais d’une disposition législative ou réglementaire. J’attends de connaître la position de l’ensemble des adhérents de la mutualité, dont certains m’ont dit être favorables à l’accord. Les institutions de prévoyance et les sociétés d’assurances semblent avoir adopté la même position.

S’agissant du secteur 2, si nous avions procédé aux revalorisations des honoraires au fur et à mesure, sans passion, nous ne serions pas aujourd’hui confrontés à des dépassements difficiles à prendre en charge. Le secteur optionnel n’est pas la solution miracle, mais si l’un d’entre vous en connaît une meilleure, qu’il le dise. L’argument selon lequel il faudrait interdire les dépassements est contraire à l’exercice libéral de la médecine.

Mme Martine Billard. Ma première question s’adresse à Mme la ministre des solidarités et porte sur la dépendance. Si l’on en croit le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2012, le nombre de places dans les établissements spécialisés serait suffisant. Pourtant nous recevons tous des personnes qui rencontrent des difficultés pour obtenir une place. C’est vrai, les personnes âgées souhaitent souvent rester chez elles, mais il ne faut pas nier les difficultés qui existent dans les maisons destinées à accueillir des personnes dépendantes, liées au stress et au manque de personnel, sachant qu’en France le quota de personnels obligatoires dans ces maisons est plus faible que dans d’autres pays. Une autre difficulté tient au prix de l’accueil, qui avoisine les 2 500 euros par mois. Considérez-vous vraiment que le nombre de places dans les maisons d’accueil des personnes dépendantes est suffisant ?

Monsieur le ministre, le reste à charge est calculé après la prise en charge par l’assurance complémentaire, mais 12 % des personnes à faible revenu et 3 % des personnes à hauts revenus ne sont pas affiliés à une complémentaire, ce qui fait que pour elles le reste à charge est élevé.

Enfin, la question des dépassements d’honoraires revient chaque année dans nos débats. Je connais un parlementaire qui a subi une opération du dos. Les honoraires de l’anesthésie étaient fixés à initialement 500 euros. Lorsqu’il a indiqué au chirurgien le nom de sa complémentaire, à savoir la Mutuelle de l’Assemblée nationale, notre collègue a vu le montant du dépassement d’honoraires passer à 5 000 euros ! Les spécialistes adaptent le niveau du dépassement d’honoraires en fonction des remboursements des mutuelles de leurs patients, ce qui assèche les fonds de ces mutuelles. Avez-vous une solution pour mettre fin à ces abus ?

M. le président Pierre Méhaignerie. Le remboursement du Fonds de sécurité sociale de l’Assemblée nationale n’atteindra certainement pas ce montant.

Mme Martine Billard. Pour ce qui est de l’ostéodensitométrie, le premier examen est remboursé, mais dans les cas où un problème est signalé après le début d’un traitement hormonal, l’examen de contrôle, lui, n’est pas pris en charge – on considère que le traitement hormonal doit systématiquement rétablir l’équilibre, or ce n’est pas toujours le cas. Par ailleurs, un grand nombre de traitements hormonaux ne sont pas remboursés, malgré leur coût très élevé. Les femmes rencontrent le même problème lorsqu’elles sont jeunes, avec la pilule, et après la ménopause avec les traitements hormonaux. Je demande donc au Gouvernement de faire en sorte que les traitements hormonaux soient pris en charge par la sécurité sociale.

M. le ministre du travail, de l’emploi et de la santé. Votre exemple est frappant : l’ostéodensitométrie est désormais remboursée, ce qui n’était pas le cas auparavant. Pourtant vous insistez sur le fait que la deuxième, qui n’est que très rarement prescrite, n’est pas remboursée.

Mme Martine Billard. Je pose une question concrète, sur un problème auquel les femmes sont confrontées !

M. le ministre du travail, de l’emploi et de la santé. J’estime avoir le droit de vous répondre comme je le fais. Au reste, dans combien de cas un deuxième examen est-il prescrit ?

Par ailleurs, dans notre pays, c’est la Haute Autorité de santé qui établit les recommandations. Vous êtes-vous émue de ce problème auprès de cette institution ? En réalité, si le deuxième examen est justifié médicalement, le médecin peut demander une prise en charge. En outre, lorsqu’une personne est dans l’incapacité de faire face à une dépense de santé, les caisses disposent d’un fonds d’action sociale. Cela aussi doit être dit !

Mme Martine Billard. Pourquoi êtes-vous agressif, monsieur le ministre ?

M. le ministre du travail, de l’emploi et de la santé. C’est l’opposition qui est agressive, nous le constatons régulièrement. Moi, je ne danse pas au bal de l’hypocrisie comme ceux qui ont quitté cette salle. Je m’en expliquerai avec eux, où ils veulent et quand ils veulent.

En termes de communication, utiliser un focus fonctionne toujours très bien. Mais je ne peux vous laisser dire que les dépassements concernent 65 millions de Français. Il n’est pas bon de fonder une démonstration à partir d’un seul exemple.

J’ai personnellement fait le choix de l’assurance complémentaire de l’Assemblée nationale, mais vous savez bien qu’aucune mutuelle ne prend en charge 5 000 euros de dépassement d’honoraires. Je le sais pour avoir été assureur avant d’entrer dans un gouvernement, il y a huit ans. Et si, à une certaine époque, quelques mutuelles remboursaient très bien les dépassements, notamment pour les frais dentaires, elles ont depuis revu leur position. En tout cas, le montant des dépassements, qui va de 250 à 350 % du tarif de responsabilité, n’a rien à voir avec 5 000 euros. Et si des cas ne semblent pas normaux, il existe des voies de recours.

Enfin, si vous voulez que tous les Français aient accès à une complémentaire santé, je vous invite à voter l’élargissement de l’aide à la complémentaire santé que nous proposerons dans le cadre de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale.

M. le président Pierre Méhaignerie. Je comprends, et partage quelque peu, l’exaspération du ministre de la santé face à un pessimisme destructeur et sans rapport avec la réalité. Yves Bur, Gilles Carrez et moi-même, en visite en Allemagne, nous sommes entendu demander par la présidente SPD de la commission des affaires sociales du Bundestag si la France allait parvenir à maîtriser son système de santé, tant notre niveau de dépenses risque d’étouffer l’emploi.

En outre, les études montrent que la France est un pays d’immigration beaucoup plus attirant que les autres en raison de son système de santé, de ses remboursements et de ses prestations sociales. La plupart des pays étrangers nous envient, c’est pourquoi je trouve injuste cette schématisation pessimiste et caricaturale.

En matière de prévention, madame Poursinoff, les collectivités peuvent désormais signer des contrats locaux de santé – c’est d’ailleurs ce que j’ai fait pour le Pays de Vitré – qui leur donnent les outils pour mener des politiques efficaces, comme nous l’avons montré avec Valérie Boyer au sujet de l’obésité. Tout ne dépend pas de l’État : une mobilisation locale est également nécessaire.

S’agissant enfin voies de recours contre les dépassements, monsieur Heinrich, un travail de pédagogie reste à faire car, dans certains cas, on peut comprendre l’exaspération des malades.

Mme la ministre des solidarités et de la cohésion sociale. Vos remarques sur notre système de santé, monsieur le président, sont également pertinentes pour notre secteur médico-social. Pour avoir visité de nombreux pays étrangers dont on vante pourtant les politiques sociales en direction des personnes âgées, j’affirme que notre pays n’a pas à rougir de la façon dont il prend en charge cette catégorie de la population et du taux d’équipement et de rénovation de ses établissements médico-sociaux.

Alors que les 670 000 places qu’offre l’ensemble des structures collectives françaises devraient couvrir les besoins, madame Billard, je constate comme vous les difficultés rencontrées par de nombreuses personnes. Nous avons d’abord besoin d’une programmation. Si j’ai créé les agences régionales de santé et si je leur ai confié la charge du médico-social, c’est précisément parce que ce secteur voit fleurir des initiatives locales qui ne sont pas toujours coordonnées. En région parisienne, les files d’attente sont longues, mais ailleurs des directeurs généraux d’agences régionales de santé m’indiquent que le taux de remplissage de certaines maisons est inférieur à 50 %. Il est grand temps d’organiser la dépense publique !

En outre, la demande des publics accueillis est de plus en plus lourde. C’est pourquoi le plan de médicalisation des EHPAD se poursuit à un rythme soutenu : 80 000 places auront été médicalisées en 2011 et 83 000 autres le seront en 2012. Au total, l’ONDAM médico-social concernant les personnes âgées augmentera de 6,3 % en 2012. Nous allons injecter plus de 300 millions d’euros supplémentaires dans ce secteur, et la médicalisation des EHPAD représente 140 millions.

J’ai demandé aux agences régionales de santé de mettre l’accent sur les structures intermédiaires. Le maintien à domicile, plébiscité par nos concitoyens, n’est possible que si l’on dispose de certaines structures d’accueil temporaire dont on manque cruellement aujourd’hui. Nous ferons donc un effort particulier d’investissement.

Bref, malgré un nombre de places apparemment suffisant, il nous faut prendre de bonnes orientations en matière de programmation, de médicalisation, d’amélioration de la qualité, d’indicateurs de qualité, d’information des familles sur les prestations offertes par les établissements, et enfin de structures intermédiaires.

M. le président Pierre Méhaignerie. Mme Valérie Pécresse nous ayant rejoint, nous allons en venir à l’examen du rapport d’information sur l’application de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2011.

M. Denis Jacquat. Je souhaite intervenir au préalable sur une question d’ordre. L’incident auquel nous avons assisté tout à l’heure est inédit dans notre commission. Sans doute faut-il y voir un des premiers symptômes d’une nouvelle pathologie, l’hyperexcitabilité socialiste en période de primaires. Il est néanmoins intolérable que nos collègues aient répandu ensuite le bruit que le ministre les avait agressés. Jean-Pierre Door et moi-même avons bien entendu démenti.

En outre, la meneuse de cette fronde est une députée qui vient d’arriver dans cette commission. Il serait opportun, je crois, que l’on rappelle aux nouveaux membres les règles qui prévalent ici : nous faisons de la politique sociale, pas de la politique politicienne.

Mme Marie-Françoise Clergeau. Je suis revenue en commission pour présenter le rapport d’information sur la mise en application de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2011 et je trouve inadmissible l’intervention de Denis Jacquat. Peut-être sous l’effet de la fatigue, le ministre a tenu des propos qui excèdent ce que l’on peut dire dans une commission de l’Assemblée nationale. Nous ne sommes ni dans l’hémicycle ni dans un meeting de l’UMP, mais dans un lieu d’échanges et de discussions. Je souhaite un peu plus de respect mutuel.

M. le président Pierre Méhaignerie. Comme le ministre, je suis parfois exaspéré par la répétition de certaines caricatures. Chacun doit y mettre du sien.

La Commission procède à l’examen du rapport d’information sur l’application de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2011.

M. Yves Bur, rapporteur pour les recettes et l’équilibre général. En juin et juillet derniers, l’ordre du jour de notre commission et des séances publiques ne nous a pas permis de nous conformer à l’obligation qui nous incombe de procéder à un bilan de l’application des lois six mois après leur promulgation. Mais, alors que le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2012 est déjà d’actualité, nous ne perdons pas de vue la nécessité de veiller à la bonne exécution de la loi de financement précédente.

La loi de financement pour 2011 comportait des dispositions importantes, destinées pour l’essentiel à déterminer les conditions générales de l’équilibre financier de la sécurité sociale. Elles le sont d’autant plus dans le contexte économique actuel, car il faut éviter que les retards dans l’application de certaines dispositions puissent avoir des incidences sur l’équilibre et les comptes.

Le contrôle de l’application des lois de financement est d’autant plus justifié que celles-ci sont adoptées selon des règles spécifiques, notamment le recours à la procédure accélérée. À cet égard, la parution tardive de certains textes d’application ne peut que susciter de notre part, une fois de plus, des interrogations au regard de l’urgence et des délais très tendus qui président chaque année à la discussion de la loi de financement par notre Assemblée.

À l’automne, la préparation d’un tel rapport d’application se déroule dans des conditions quelque peu différentes des périodes ordinaires – c’est-à-dire à la fin du printemps ou au début de l’été. En effet, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2012 est déjà déposé, il sera très prochainement examiné ici même, et nous disposons donc de son annexe 3 dont la fonction est de rendre compte de la mise en œuvre des dispositions de la loi de financement de l’année précédente. Cela est d’ailleurs heureux : jusqu’à la publication de cette annexe, l’information dispensée par le Gouvernement sur l’application de la loi de financement ne s’est pas améliorée.

D’une part, comme par le passé, la disposition de la loi de 2004 de simplification du droit obligeant le Gouvernement à présenter, six mois après l’entrée en vigueur d’une loi, un rapport sur sa mise en application, n’a pas été respectée – bien que l’on puisse estimer qu’elle a été satisfaite quelques semaines plus tard par l’annexe au projet de loi de financement de la sécurité sociale.

D’autre part et surtout, aucun « échéancier des décrets d’application » n’a été mis en ligne sur le site Internet Légifrance. Ce document n’était pas nécessairement très à jour mais il a désormais complètement disparu. La loi de financement n’apparaît plus que dans le tableau semestriel d’application des lois promulguées durant la présente législature, qui se contente de donner trois chiffres : au 30 juin dernier, c’est-à-dire plus de six mois après la promulgation de la loi, les décrets d’application n’avaient été publiés que pour un peu moins d’un tiers des articles concernés. Quelques semaines plus tard, les choses ont un peu progressé puisque ce taux, si l’on considère les seuls décrets, atteint désormais 57 %.

Sur les 125 articles de la loi de financement adoptée par le Parlement, 18 ont été censurés par le Conseil constitutionnel. Parmi les 107 articles restants, 72 étaient d’application directe, de telle sorte que seuls 35 articles appelaient la publication d’au moins un texte d’application. Ce chiffre est assez peu élevé, rapporté aux 56 articles de 2009 ou même aux 39 de 2010, alors même que le nombre total d’articles promulgués est supérieur en 2011.

Pourtant, à ce jour, treize de ces 35 articles n’ont fait l’objet d’aucun des textes d’application qu’ils prévoient. Le taux d’exécution s’élève globalement à 61 %, mais il recouvre des situations très différentes selon la nature des textes. Ainsi, sur les dix décrets en Conseil d’État attendus, seuls quatre ont été publiés, ce qui peut sans doute s’expliquer en partie par une procédure d’élaboration plus longue que celle d’un décret simple ou d’une circulaire.

En matière de recettes, de trésorerie, de gestion du risque et de lutte contre les fraudes, l’application de la loi de financement pour 2011 peut être tenue pour satisfaisante, mais il est vrai que beaucoup de dispositions de nature financière sont ici d’application directe.

Qu’en est-il, toutefois, du régime introduit par l’article 21, à savoir l’assujettissement des sommes ou avantages reçus de tierces personnes dans le cadre de l’exercice d’une activité professionnelle ?

Par ailleurs, l’article 117 prévoyait que les travailleurs indépendants bénéficiant du statut d’auto-entrepreneur devraient déclarer leur chiffre d’affaires ou leurs recettes même lorsque ceux-ci sont nuls. Aucun décret n’est paru à ce jour et nous ne connaissons pas les intentions du Gouvernement. Pourriez-vous nous en dire davantage ?

Enfin, quels sont les effets de l’article 120 sur les pénalités financières appliquées aux établissements de santé ? Disposez-vous d’un bilan de ces pénalités pour 2010 et 2011 ?

S’intéresser à l’application de la loi de financement de l’année précédente est une bonne chose, mais il faut aussi continuer à surveiller celle des lois de financement des années antérieures : certaines de leurs dispositions, pourtant très pertinentes, ne sont pas encore en application. C’est le cas de l’article 24 de la loi de financement pour 2009, qui prévoit une cotisation d’assurance maladie majorée sur les revenus imposables des non-salariés à l’étranger. Cette mesure de justice était aussi une mesure de recettes, même modestes – 5 millions d’euros. Mais voilà, le diable va parfois se nicher dans les détails, puisque les non-salariés déclarent leurs revenus sur la base d’un document CERFA, la déclaration commune de revenus, dont le modèle est établi par un arrêté qui n’a pas été modifié depuis 2009. Quand un arrêté viendra-t-il adapter ce document afin que la disposition votée en 2008 soit enfin réellement appliquée ?

M. Jean-Pierre Door, rapporteur pour l’assurance maladie et les accidents du travail. L’article 52 de la loi de financement pour 2011, qui définit un régime de pénalités financières dues par les exploitants de dispositifs médicaux en cas de manquement à leurs obligations, renvoie à un décret en Conseil d’État qui doit en fixer les modalités d’application. Quand ce décret sera-t-il pris ?

Par ailleurs, les rapports concernant les franchises et leurs conséquences sur l’accès aux soins, l’évaluation du dispositif de régulation des dépenses par le recours aux centres de soins de suite et de réadaptation, le bilan de l’expérimentation de la facturation directe avec des établissements de santé volontaires et le bilan financier du Fonds d’intervention pour la qualité et la coordination des soins (FIQCS) et du Fonds pour la modernisation des établissements de santé publics et privés (FMESPP), prévus respectivement aux articles 62, 63, 64 et 87, n’ont toujours pas été transmis au Parlement. Ces informations nous manquent pour l’examen du projet de loi de financement pour 2012.

Mme Bérengère Poletti, rapporteure pour le secteur médico-social. L’article 79, issu d’un amendement de Dominique Tian adopté en première lecture par l’Assemblée nationale, vise à faire précéder la correction de fin d’année de l’objectif global de dépenses médico-sociales par la remise par le Gouvernement d’un rapport public au Parlement, qui doit notamment faire état des opérations de fongibilité entre l’objectif global de dépenses et les autres enveloppes constitutives de l’ONDAM. Ce rapport devait être transmis avant le 1er octobre, mais nous ne l’avons pas reçu à ce jour.

S’agissant de la loi de financement pour 2009 et de l’article 81 de la loi de financement pour 2011, le décret sur la mise en œuvre de la réforme de la tarification des établissements médico-sociaux a été plusieurs fois reporté, en raison notamment de l’hostilité de certaines fédérations d’établissements. Comptez-vous le publier avant la fin de l’année 2011, comme il est indiqué dans l’annexe 3 au projet de loi de financement pour 2012, ou le reporter encore en attendant les résultats de l’expérimentation concernant l’introduction d’une part liée à la performance dans le forfait soins, prévue à l’article 37 du projet de loi de financement de la sécurité sociale ?

M. Denis Jacquat rapporteur pour l’assurance vieillesse. Du fait de la discussion en parallèle de la loi portant réforme des retraites, la loi de financement pour 2011 a comporté très peu de dispositions relatives à l’assurance vieillesses. Les quatre articles étaient d’application directe et ils ont été appliqués : cela doit être porté au crédit du Gouvernement.

L’article 109 prévoit le transfert au Fonds de solidarité vieillesse (FSV) du financement d’une fraction du minimum contributif versé par le régime général, la caisse centrale de la Mutualité sociale agricole (MSA) et le Régime social des indépendants (RSI). Il ne nécessite pas de texte réglementaire d’application, mais le montant du transfert doit être fixé tous les ans par la loi de financement de la sécurité sociale. L’article 12 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2012 établit ce montant à 3,4 milliards d’euros pour le régime général – contre 3 milliards en 2011 –, 400 millions pour la MSA et 100 millions pour le RSI.

Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure pour la famille. En ce qui concerne la branche famille, seul l’article 104, relatif aux prêts destinés à l’amélioration du lieu d’accueil de l’enfant par les assistants maternels, nécessitait un décret d’application. Ce décret a été publié le 16 août 2011, soit dix mois après le vote de la loi.

Parallèlement, l’article 103 a supprimé la rétroactivité de l’effet des aides au logement. À l’automne dernier, le Gouvernement escomptait une économie de 240 millions d’euros, dont 120 millions pour la branche famille. Or, selon une première évaluation, l’économie ne serait que de 175 millions d’euros en 2011. Ce montant est-il susceptible de se réduire encore ?

La loi de financement pour 2011 a également transféré 0,28 point de CSG de la branche famille vers la Caisse d’amortissement de la dette sociale (CADES). Je tiens à dénoncer la fragilisation de la structure des recettes de la branche qui en résulte. En effet, deux ressources non pérennes lui ont été affectées en compensation, ce qui rend nécessaire une nouvelle modification, dès 2013, du montage financier : on prévoit d’attribuer à la branche le produit de la taxe sur les véhicules terrestres à moteur, mais a-t-on évalué à combien s’élèverait ce produit ?

M. le président Pierre Méhaignerie. Je le dis souvent à la Conférence des présidents : la multiplication des lois, des réglementations et des rapports ne facilite pas la compréhension de la vie publique par nos compatriotes. Nous devons y réfléchir !

Mme Valérie Pécresse, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l’État. Cette audition est pour nous un aiguillon qui nous rappelle à notre devoir d’efficacité et de responsabilité.

Sur les cent sept articles que comporte la loi de financement pour 2011, trente appelaient la publication d’un décret d’application et douze de ces décrets sont encore en attente de publication. En d’autres termes, 89 % des articles sont aujourd’hui appliqués. Cela peut paraître insuffisant, mais certains textes ont nécessité une concertation approfondie avec les acteurs pour que leur mise en œuvre se fasse dans les meilleures conditions. En tout état de cause, tous les décrets seront publiés d’ici à la fin de l’année.

Dans le champ dont j’ai la charge, à savoir les recettes, l’équilibre général, la trésorerie et la lutte contre la fraude, seize textes d’application étaient nécessaires. Nous en avons pris onze à ce jour. Les cinq restants sont finalisés et paraîtront avant la fin de l’année.

En matière de recettes, nous avons publié très rapidement les textes nécessaires à la mise en œuvre des mesures les plus urgentes. Ont été ainsi publiés, le 31 décembre 2011 pour le décret et le 27 janvier 2011 pour la circulaire, les textes d’application de l’annualisation des allégements généraux de cotisations sociales. Le décret d’application de l’article 9, relatif à la reprise de dette par la CADES, a été pris le 5 janvier 2011.

Quant aux textes restant à prendre dans ce domaine, le fait qu’ils ne soient pas encore parus n’occasionnera pas de perte de recettes pour la sécurité sociale.

Pour ce qui est de l’article 10, qui prévoit un renforcement des prélèvements sur les retraites « chapeau », un décret en Conseil d’État doit préciser les modalités de recouvrement. Il sera complété par un arrêté ayant le même objet. Après une longue concertation avec les assureurs et les entreprises, le conseil d’administration de l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS) et le Conseil d’État seront saisis dans les prochains jours. La publication est prévue cet automne mais le délai de parution, j’y insiste, ne provoquera aucune perte de rendement car, si le décret tend à mettre en conformité avec la loi les échanges d’information et les modalités de recouvrement, la loi est d’application directe pour ce qui est des taux de contribution.

En ce qui concerne l’article 17, le Parlement a souhaité sécuriser le dispositif de protection sociale complémentaire en entreprise. Un décret en Conseil d’État est nécessaire pour définir les critères objectifs permettant de déterminer une catégorie de salariés. Après une longue concertation, Xavier Bertrand et moi-même venons de finaliser un projet de texte qui sera soumis dans les prochains jours à l’avis des conseils d’administration des caisses de sécurité sociale. La publication interviendra également cet automne.

L’article 21, enfin, porte sur les rémunérations versées par les tiers. Un décret simple est nécessaire pour définir les contenus des échanges entre l’entreprise tierce et l’employeur du salarié. L’article prévoit, en effet, l’assimilation à des rémunérations et l’assujettissement aux prélèvements sociaux des sommes ou avantages reçus de tierces personnes dans le cadre de l’exercice d’une activité professionnelle. Le décret sera accompagné de deux arrêtés et d’une circulaire. L’ensemble a fait l’objet d’une longue concertation avec les représentants des entreprises afin de simplifier au maximum le dispositif. Ces textes seront publiés ce mois-ci. Il n’y aura pas non plus de perte de recettes puisque les entreprises ayant versé des sommes ou avantages acquitteront la contribution ou les cotisations au début de 2012.

J’en viens aux dispositions relatives au recouvrement et à la trésorerie, pour lesquelles il ne manque que le texte d’application de l’article 40. Cet article, introduit par un amendement du sénateur Alain Vasselle, vise à améliorer le dispositif de délivrance des attestations dans le cadre de la sous-traitance : il s’agit, pour le donneur d’ordres, de vérifier que le sous-traitant est à jour de ses obligations de déclaration et de paiement. Ces dispositions ont été modifiées depuis par la loi du 16 juin 2011 relative à l’immigration, à l’intégration et à la nationalité. Le champ d’application en a été élargi au régime agricole, et les conditions de délivrance des attestations ont été précisées dans le code de la sécurité sociale. Le décret d’application a été soumis aux conseils d’administration des caisses de sécurité sociale concernée durant l’été 2011. Il est en cours de contreseing.

Les dispositions relatives au contrôle et à la lutte contre la fraude correspondent à un engagement fort du Gouvernement. Un seul texte d’application n’a pas encore été publié. Les textes d’application concernant les sanctions et les pénalités dans le champ de l’assurance maladie l’ont été après avoir fait l’objet d’une concertation approfondie. Le dernier texte à prendre concerne l’article 117, qui prévoit une obligation de déclaration de revenus pour les auto-entrepreneurs, même en l’absence de chiffre d’affaires. Cette disposition importante, dont il ne faut plus différer la mise en œuvre, a fait l’objet de nombreux échanges entre les administrations et les ministères du budget et de l’économie. Le décret en Conseil d’État pour fixer les pénalités et majorations à appliquer en cas de retard ou de défaut de déclaration est en cours de finalisation. Je m’engage à ce qu’il soit publié avant la fin de l’année.

Enfin, plusieurs textes réglementaires qui ne sont pas directement des textes d’application sont néanmoins indispensables à la réalisation des économies prévues dans la construction de l’ONDAM. La création du comité de pilotage de l’ONDAM permet de suivre tous les mois l’avancement des économies et de tirer le signal d’alarme dès qu’un retard est pris. Les textes permettant de réaliser des économies, comme ceux qui prévoient la baisse du taux de remboursement de certains médicaments ou de certains dispositifs médicaux, ont donc été publiés rapidement. Par ce moyen, nous pouvons anticiper un respect de l’ONDAM en 2011, comme cela a déjà été le cas en 2010.

Nous serons encore plus réactifs l’année prochaine. Le projet de décret en Conseil d’État modifiant le calcul des indemnités journalières a d’ores et déjà été adressé aux caisses de sécurité sociale en vue d’une publication avant la fin de l’année, ce qui démontre notre détermination à respecter l’ONDAM en 2012, pour la troisième année consécutive.

S’agissant de l’article 120 de la loi de financement pour 2011, monsieur Bur, la procédure d’avis conforme du directeur général de l’Union nationale des caisses d’assurance maladie (UNCAM) n’est en vigueur que depuis juillet 2011. Il est donc difficile d’en mesurer dès maintenant les effets. Au cours de l’exercice 2010, l’assurance maladie a prononcé 1 132 pénalités financières – contre 560 en 2009 –, dont 378 à l’encontre de professionnels de santé, 722 d’assurés et 32 d’employeurs, pour un montant global de 1,4 million d’euros.

Quant à l’article 24 de la loi de financement pour 2009, qui tend à faire acquitter aux personnes qui exercent une activité professionnelle à la fois en France et à l’étranger, sur la partie de leurs revenus non imposables en France, une cotisation d’assurance maladie d’un taux particulier, il est d’application directe. Ce taux – 12 % pour les travailleurs indépendants et 18,3 % pour les salariés – est fixé par les articles D. 612-4 et D. 242-3 du code de la sécurité sociale.

M. le ministre du travail, de l’emploi et de la santé. C’est le droit du Parlement de demander des rapports mais, je le dis franchement, il est très compliqué de répondre à toutes les demandes en temps et en heure. Le rapport d’activité du FIQCS, par exemple, a été validé par le comité national de gestion le 14 septembre, mais on n’a pu le présenter au Conseil national de la qualité et de la coordination des soins que le 6 octobre. Il est normal que le Gouvernement rendre compte au Parlement, mais il faut être conscient de la masse considérable de travail que cela représente.

J’en viens au bilan des pénalités en 2010 et 2011.

En 2010, les contentieux à l’encontre des établissements se sont traduits par 367 notifications d’indus et 213 notifications de sanctions financières, à la suite des contrôles de la campagne 2009 pour l’essentiel. Toutes campagnes confondues, le taux de recouvrement global des indus notifiés est de 75,5 %. Cela représente 127,4 millions d’euros notifiés.

Nous avons également travaillé avec la direction de la sécurité sociale sur le contrôle de la T2A et mandaté une mission de l’INSEE pour valider la méthodologie de contrôle par échantillonnage. Un décret en Conseil d’État, en date du 1er octobre 2011, révise le barème de sanctions, notamment pour garantir la proportionnalité entre indus et sanction et éviter des situations comme celle où s’est retrouvé l’hôpital de Dijon.

Nous menons également une concertation pour préparer une circulaire d’application visant à réduire l’hétérogénéité des pratiques. Le contrôle de la T2A doit se fonder sur des bases saines garantissant le respect du quota et reflétant la véritable activité des établissements. On corrigera par ce moyen tant la sous-facturation que la surfacturation.

Mme la ministre des solidarités et de la cohésion sociale. Mme Clergeau m’interroge sur l’article 104, qui prévoit que les assistants maternels puissent bénéficier, en remplacement du prêt à l’amélioration à l’habitat (PAH), d’un prêt à l’amélioration du lieu d’accueil (PALA), quel que soit le lieu d’exercice de leur activité, à domicile ou au sein d’une maison d’assistants maternels.

La loi de financement pour 2010 avait constitué un précédent en prévoyant d’ouvrir le prêt à l’amélioration à l’habitat aux assistants maternels exerçant à domicile. Dans le prolongement de cette mesure et pour tenir compte de la création des maisons d’assistants maternels, l’article 104 a élargi le prêt à l’amélioration du lieu d’accueil à l’ensemble de cette profession.

Il s’agit d’un prêt à taux zéro financé par la branche famille, remboursable en 120 mensualités maximum, qui permet de financer 80 % des travaux visant à améliorer l’accueil, la santé ou la sécurité des enfants dans la limite d’un montant plafond de 10 000 euros, contre un peu plus de 1 000 euros pour le prêt à l’amélioration de l’habitat. Lorsque l’assistant maternel exerce à son domicile, le prêt peut également faciliter l’obtention, le renouvellement ou l’extension de son agrément.

Le décret d’application ayant été publié le 18 août 2011, le prêt à l’amélioration du lieu d’accueil est d’ores et déjà entré en vigueur depuis le 1er septembre 2011. Une circulaire destinée à rappeler les modalités de versement de ce prêt est sur le point d’être transmise aux caisses d’allocations familiales, en charge de l’instruction des demandes et du versement.

Au sein d’une maison d’assistants maternels, seuls les travaux destinés à améliorer le lieu d’accueil des enfants ouvriront droit au prêt à l’amélioration du lieu d’accueil. Les travaux de mise aux normes nécessaires pour l’ouverture de la maison ne pourront être financés par ce dispositif. Il a semblé, en effet, préférable que de tels travaux soient supportés prioritairement par les collectivités locales, dont la compétence en matière d’agrément des assistants maternels est pleine et entière. J’ai souhaité prévenir les situations dans lesquelles l’assistant maternel qui voudrait poursuivre ou reprendre son activité à son domicile resterait alors personnellement débiteur d’un prêt sans bénéfice pour son activité. J’ai en effet tout à fait conscience que les travaux de mise aux normes sont onéreux, alors même que les revenus des assistants maternels sont, en règle générale, modestes.

Bref, madame la députée, il est trop tôt pour mesurer l’impact de l’ouverture de ce prêt aux assistants maternels exerçant en maisons d’assistants maternels.

S’agissant de l’article 103, l’estimation à 240 millions d’euros en 2011, dont 120 millions pour la branche famille, des économies résultant de la limitation à trois mois de la rétroactivité du versement des aides personnelles au logement a été ramenée à 175 millions, dont 87,5 millions pour la branche famille. Il n’y a pas lieu de réviser ce nouveau chiffrage.

Madame Poletti, vous m’avez interrogée sur l’article 79, qui institue le principe d’un rapport public annuel fourni au Parlement avant le 1er octobre. Pour les raisons fort bien soulignées par M. Xavier Bertrand, nous avons un peu de retard et je vous prie de m’en excuser.

Voici néanmoins quelques éléments du contenu de ce rapport concernant les mouvements de fongibilité entre sous-objectifs de l’ONDAM affectant les dépenses médico-sociales.

Hors opérations de fongibilité consécutives à la transformation juridique et financière d’établissements et aux mouvements de périmètre entre sous-objectifs de l’ONDAM, on peut constater des variations élevées dans le montant transféré, liées principalement au fort impact du processus de partition des capacités des unités de soins de longue durée (USLD). Sur les trois années de réalisation de cette partition, 726 millions d’euros ont été transférés au profit du secteur médico-social.

Par ailleurs, 86 % des montants transférés au profit du secteur des personnes handicapées proviennent de l’objectif sanitaire relatif aux activités de psychiatrie, soit environ 80 millions d’euros depuis 2006.

Nous voulons que les opérations de transformation s’inscrivent désormais de manière plus affirmée dans une démarche de structuration de l’offre de soins. L’année 2011 n’a connu aucune nouvelle modification de périmètre des sous-objectifs liée à des changements de règles de tarification. Des mouvements avaient auparavant touché le sous-objectif « soins de ville » et, principalement, le sous-objectif « personnes âgées » pour le financement des établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD).

D’ici à 2013, nous devrons étudier une éventuelle réintroduction des médicaments dans la dotation soins des EHPAD. Est également en perspective le passage à l’option tarifaire globale des EHPAD, qui correspond à la réintégration dans la dotation soins des postes de dépenses relatifs aux rémunérations des médecins généralistes, des auxiliaires médicaux et des actes de radiologie et de laboratoire.

Telle est l’architecture de ce rapport qui vous sera remis très prochainement.

Les articles 80 et 82 de la loi de financement pour 2011, qui prévoient respectivement le prolongement pour deux ans de l’expérimentation de la réintégration des médicaments et la possibilité de constituer un unique groupement de coopération sociale et médico-sociale pour disposer d’une pharmacie à usage intérieur partagée, sont d’application directe et ne nécessitent aucun texte réglementaire.

Sur ce sujet, la mission de l’inspection générale des affaires sociales va installer un comité de pilotage et s’applique à organiser une remontée des données des établissements expérimentateurs pour l’année 2011 – 260 sur 276, à l’origine.

L’agence régionale de santé de Haute-Normandie a par ailleurs transmis un dossier de demande d’expérimentation d’une pharmacie à usage intérieur partagée entre quatre établissements de Rouen.

J’en viens à la publication du décret relatif à la tarification en EHPAD. Cette tarification est aujourd’hui déterminée en fonction d’une valeur de point fixée nationalement, ainsi que du niveau de dépendance des résidents et de leurs besoins en soins, évalués à partir des référentiels AGGIR et PATHOS. Elle présente de ce fait un caractère quasi automatique, ce qui ne permet ni de refléter la réalité ni d’adapter les ressources allouées en fonction de la qualité de la prise en charge dispensée. C’est pourquoi nous continuons de travailler sur ce sujet en expérimentant une meilleure prise en compte de la qualité dans la détermination de la ressource des établissements. Pour l’instant, ces expérimentations sont circonscrites à trois à cinq agences régionales de santé et ciblées sur des établissements en tarif partiel. L’incitation à y participer, et donc à adhérer au principe d’une modulation de la dotation soins, se traduira par la possibilité d’octroyer un financement complémentaire dans des conditions fixées par un cahier des charges national, en parallèle d’une étude nationale de coûts relative aux EHPAD. Une fois ce travail accompli, nous pourrons faire paraître le décret.

M. le président Pierre Méhaignerie. Pour conclure, je vous invite, mes chers collègues, à consulter le rapport intitulé « Panorama de la société 2011 – Les indicateurs sociaux de l’OCDE ». Il ressort de ce document que c’est en France que les dépenses sociales publiques sont le plus élevées. En vingt-cinq ans, nous avons consacré à ces dépenses 6,1 points de PIB de plus alors que cette augmentation se limitait à 2 points dans la majorité des pays. Une partie de la dette provient de cette forte progression. Plutôt que de demander plus, nous devrions nous consacrer à faire mieux. La différence entre les régions peut s’élever à 40 % une fois corrigé l’effet vieillissement. Le travail du Parlement serait d’une bien plus grande qualité s’il était centré sur l’efficience des dépenses et sur l’effort de justice plutôt que sur l’accroissement permanent des dépenses.

La séance est levée à treize heures cinq.

——fpfp——

Présences en réunion

Réunion du mercredi 12 octobre 2011 à 11 heures 30

Présents. - M. Élie Aboud, Mme Edwige Antier, Mme Martine Billard, M. Jean-Louis Borloo, Mme Valérie Boyer, M. Yves Bur, Mme Martine Carrillon-Couvreur, M. Gérard Cherpion, Mme Marie-Françoise Clergeau, M. Georges Colombier, M. Rémi Delatte, M. Vincent Descoeur, M. Jacques Domergue, M. Jean-Pierre Door, M. Dominique Dord, Mme Laurence Dumont, Mme Cécile Dumoulin, M. Michel Heinrich, Mme Danièle Hoffman-Rispal, Mme Sandrine Hurel, M. Christian Hutin, Mme Monique Iborra, M. Michel Issindou, M. Denis Jacquat, M. Paul Jeanneteau, M. Raymond Lancelin, Mme Catherine Lemorton, M. Claude Leteurtre, Mme Gabrielle Louis-Carabin, M. Guy Malherbe, M. Jean Mallot, M. Pierre Méhaignerie, M. Pierre Morange, M. Philippe Morenvillier, M. Roland Muzeau, Mme Dominique Orliac, M. Christian Paul, M. Bernard Perrut, M. Étienne Pinte, Mme Martine Pinville, Mme Bérengère Poletti, Mme Anny Poursinoff, M. Jean-Luc Préel, M. Arnaud Richard, M. Arnaud Robinet, M. Jean-Marie Rolland, M. Michel Rossi, Mme Valérie Rosso-Debord, M. Fernand Siré, M. Christophe Sirugue, Mme Marisol Touraine

Excusés. - Mme Michèle Delaunay, M. Céleste Lett, M. Francis Vercamer

Assistait également à la réunion. - M. Régis Juanico