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Assemblée nationale

Compte rendu
analytique officiel

Séance du mercredi 2 juillet 2008

1ère séance
Séance de 15 heures
3ème séance de la session
Présidence de M. Marc Le Fur, Vice-Président

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La séance est ouverte à quinze heures.

DÉMOCRATIE SOCIALE (suite)

L’ordre du jour appelle la suite de la discussion, après déclaration d’urgence, du projet de loi portant rénovation de la démocratie sociale et réforme du temps de travail.

M. le Président – J’appelle, dans le texte du Gouvernement, les articles du projet de loi.

AVANT L’ARTICLE PREMIER

M. Francis Vercamer – L’amendement 214 est un amendement de principe. Dans sa seconde partie, concernant le temps de travail, le projet ne correspond pas tout à fait à la position commune signée par les partenaires sociaux. Il me paraît justifié de compléter la loi de modernisation du dialogue social du 31 janvier 2007 de façon à encadrer les discussions entre le Gouvernement et les partenaires sociaux lorsque les orientations des seconds ne sont pas conformes au souhait du premier, de façon à ce que les partenaires sociaux puissent donner leur avis sur les dispositions arrêtées par le Gouvernement. Nous avons pu constater que la polémique avait enflé après la présentation du projet de loi, que de nouvelles discussions avaient eu lieu, et c’est pourquoi il est important que de telles discussions soient encadrées.

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur de la commission des affaires culturelles Le Premier ministre a présenté, le 24 juin, une charte fixant les principes de méthode. Il a ainsi déclaré que des clauses de revoyure seraient prévues pour les cas où les orientations retenues par les partenaires sociaux ne prenaient pas le chemin souhaité par le Gouvernement. Je demande donc le retrait de l’amendement ; à défaut de quoi, j’émettrai un avis défavorable.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité – Un nouveau délai permettrait-il forcément de trouver une meilleure solution ? Je n’en suis pas persuadé. Ce qui s’est produit sur ce texte aurait pu se produire sur un autre. Nous l’avons toujours dit, et cela a été rappelé hier par M. Apparu, à propos du discours du Président de la République du 18 septembre 2007. L’amendement figeant les choses, le Gouvernement émet un avis défavorable.

M. Francis Vercamer – S’il fige les choses, c’est en définissant les voies d’un règlement des différends entre le Gouvernement et les partenaires sociaux. J’ai toute confiance en la parole du Premier ministre, mais il n’est pas certain que, demain, un autre gouvernement respecte le dialogue social (Exclamations sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR).

M. Roland Muzeau – Difficile de trouver pire que celui-là !

M. Francis Vercamer – On l’a vu avec la loi Aubry II. Cela étant, je retire l’amendement.

L’amendement 214 est retiré.

ARTICLE PREMIER

M. Jean Mallot – Lors de la transcription de l’accord national interprofessionnel, un point de ce dernier n’avait pas été repris par la loi, à savoir le droit pour le salarié auquel s’appliquerait la procédure de rupture conventionnelle, de bénéficier d’une indemnisation chômage dans les conditions du droit commun. Nous avions déposé un amendement reprenant cette disposition, et le rapporteur avait émis un avis favorable. M. Bertrand avait alors déclaré : « Le Gouvernement s’en remet à la sagesse de l’Assemblée, tout simplement parce qu’il y va du respect des partenaires sociaux ». Il est important de s’en souvenir, car il semble que le ministre ait pris aujourd’hui quelques distances avec cette formule.

L’article premier reprend le texte de la position commune concernant les sept critères cumulatifs de la représentativité syndicale. Or, les amendements que présentera le rapporteur s’éloignent de la position commune ! En outre, le rapporteur avait présenté en commission un amendement concernant la représentativité des organisations d’employeurs, avant de le retirer. Nous considérons, quant à nous, qu’il serait bon que des dispositions soient prévues pour ces organisations. Nous espérons pouvoir discuter plus longuement de ces différents points (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC).

M. Roland Muzeau – Des critères rénovés ne peuvent, à nos yeux, que renforcer la légitimité des acteurs de la négociation. Jusqu’à présent, la représentativité syndicale se fondait sur cinq critères : les effectifs, l’indépendance à l’égard de l’employeur, les cotisations, l’expérience et l’ancienneté, l’attitude patriotique pendant l’Occupation – critère devenu désuet. La jurisprudence en privilégiait toutefois deux autres : l’activité du syndicat et sa capacité à mobiliser.

En pratique, la représentativité de certains syndicats était présumée, en application d’un arrêté du 31 mars 1966 complétant une décision du 8 avril 1948. Les autres devaient en faire la preuve devant les tribunaux. Or, si le défaut d’indépendance d’un syndicat devait être établi par la partie qui l’alléguait, la charge de la preuve incombait, pour les autres critères, au syndicat dont la représentativité était contestée.

Il ne fait nul doute qu’en mettant fin à la présomption irréfragable et en redéfinissant les critères, le texte va permettre aux organisations syndicales de mieux exercer leur rôle. Cette évolution était d’ailleurs attendue, comme en témoigne un avis du Conseil économique et social de 2006. Demain, les organisations qui frappent à la porte longtemps se verront enfin reconnaître le droit de négocier des accords et d’intervenir dans les entreprises. Le MEDEF s’opposait de longue date à cette refonte, parce qu’il abusait des accords minoritaires, qui ont pesé négativement sur la vie des salariés, et redoutait l’émergence d’interlocuteurs moins conciliants, car renforcés dans leur légitimité.

Des questions subsistent néanmoins. À l’heure actuelle, les critères de représentativité s’apprécient de façon globale. Ainsi, le nombre d’adhérents – les effectifs – est considéré au regard du taux de syndicalisation dans l’entreprise ou le secteur. Par ailleurs, la jurisprudence admet que la faiblesse de l’effectif peut être compensée par le dynamisme du syndicat. En outre, si les cotisations constituent l’élément de preuve de l’indépendance, il s’agit de l’indépendance du syndicat, et non de la seule section, qui n’a pas de personnalité juridique ; c’est à dire que le syndicat devra prouver que sa trésorerie lui permet d’assurer l’activité de sa section. De même, si l’expérience du syndicat ou de ses membres est prise en compte, le défaut d’expérience ne peut suffire à priver un syndicat de représentativité, et la remarque vaut également pour l’ancienneté.

L’influence et l’activité d’un syndicat sont de plus en plus souvent retenues. Un syndicat justifie d’une activité réelle lorsqu’il a adressé des courriers à la direction et à l’inspecteur du travail, diffusé des tracts, publié des communiqués de presse, ou a défendu des salariés aux prud’hommes. Quant à l’influence, elle est plus difficile à prouver : elle peut s’attester par une grève, une pétition ou bien encore un très fort taux d’abstention aux élections du comité d’entreprise…

On peut s’interroger sur la raison de rendre ces critères cumulatifs, à rebours de la jurisprudence. Une telle restriction donnera lieu à de nombreux contentieux. En particulier, la position commune n’est pas exactement respectée sur ce point, puisque l’expression « examen dans un cadre global », non reprise, atténuait l’exigence de cumul.

Nous regrettons enfin que le projet de loi ne reprenne pas les précisions apportées par la position commune concernant les principes d’interprétation des critères, en particulier celui des « valeurs républicaines ». La position commune visait le respect de la liberté d’opinion politique, philosophique et religieuse, et rejetait toute forme de discrimination, d’intégrisme et d’intolérance.

Lors des travaux en commission, vous avez partiellement répondu à nos questions, Monsieur le ministre, mais nous souhaiterions des précisions complémentaires.

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – L’amendement 1 tend tout d’abord à modifier l’ordre dans lequel les critères de représentativité sont présentés. Compte tenu de la jurisprudence concernant l’organisation « Front national – Police », il semble que le respect des valeurs républicaines doit être une condition de licéité, et non pas seulement une condition d’exercice des activités syndicales. Il faut distinguer entre les critères de principe – respect des valeurs républicaines, transparence financière, indépendance – et les modalités pratiques.

Afin d’éviter les contentieux, l’amendement précise également que le critère d’ancienneté s’apprécie à compter du dépôt des statuts.

Par ailleurs, si l’activité et l’expérience sont deux indices de l’influence, ils ne sont pas forcément les seuls. En ajoutant l’adverbe « notamment », l’amendement 1 laissera une plus grande marge d’appréciation.

Sur le fond, la Cour de cassation a estimé, dans un arrêt du 16 décembre 1998, que si les effectifs étaient un critère légal de la représentativité, ce ne pouvait pas être le seul.

M. Alain Vidalies – J’aimerais savoir à quoi sert cette réécriture de l’article premier. L’amendement du rapporteur me semble au mieux inutile ; si ce n’est pas le cas, j’aimerais savoir quelles conséquences juridiques il emportera. Nous aimerions que le ministre nous éclaire.

Le sous-amendement 1685 précise que les effectifs et les cotisations sont une condition essentielle de la représentativité, qu’il convient d’inscrire en premier dans la liste des critères. Ce serait plus conforme à l’esprit de la position commune.

M. Benoist Apparu – Le sous-amendement 1674 a pour objet de rétablir la rédaction initialement retenue dans la position commune. Celle-ci faisait mention de l’ancienneté géographique « et » professionnelle – et non « ou ». Nous souhaitons restaurer le caractère cumulatif de ce critère. Les syndicats ont confirmé que telle était bien leur intention.

Nous éviterons ainsi certaines incohérences : il ne faudrait pas qu’un syndicat implanté en Bretagne dans un secteur donné puisse se développer dans un secteur d’activité radicalement nouveau, ou bien à Marseille.

M. Alain Vidalies – Nous sommes en désaccord sur de nombreux points, mais nous pouvons sans doute nous entendre sur un principe : moins on emploie l’adverbe « notamment », mieux cela vaut, sauf à vider de leur sens toutes les précisions que nous apportons.

En matière d’influence syndicale, vous allez ouvrir indéfiniment le champ des critères au-delà de l’activité ou de l’expérience. Si vous avez en tête d’autres critères, nous aimerions les connaître… En attendant, l’amendement 1686 vise à supprimer l’adverbe « notamment ».

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – S’agissant de l’ordre des critères, imaginons qu’un syndicat obtienne les 10 % nécessaires lors des élections, sans respecter pour autant les valeurs républicaines, ni les principes de transparence financière et d’indépendance. Accepteriez-vous qu’il soit considéré comme représentatif, Monsieur Vidalies ? Pour notre part, nous demandons que l’on distingue deux ordres de critères. Avis défavorable sur votre sous-amendement 1685.

En revanche, favorable au sous-amendement 1674. Je fais miens les arguments de M. Apparu.

Pour ce qui est du sous-amendement 1686, nous n’avons pas d’intentions cachées. Permettez-moi de faire quelques rappels : en 2007, un arrêt de la chambre sociale de la Cour de cassation a considéré que la CFE-CGC pouvait être considérée comme influente dans une entreprise, non au regard de son activité et de son expérience, mais de l’adhésion de personnels non cadres ; la même année, l’implantation géographique et professionnelle d’un syndicat a été estimée au regard des résultats obtenus aux élections prud’homales, critère auquel de nombreux collègues sont sensibles sur certains bancs…

Pour toutes ces raisons, il serait dommage de supprimer l’adverbe « notamment ». Avis défavorable sur le sous-amendement 1686.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – Avis favorable à l’amendement 1. Il est logique d’évoquer les conditions avant les critères. Quand une organisation ne respecte pas les valeurs républicaines, il faut s’arrêter là.

Même position sur le sous-amendement 1674, mais avis défavorable sur les sous-amendements 1685 et 1686. S’agissant de l’adverbe « notamment », il sert seulement à apporter quelques précisions.

M. Francis Vercamer – L’ordre des critères n’a rien d’anodin. Ne touchons pas à l’ordre établi par les partenaires sociaux. Ces derniers veulent favoriser le développement d’un syndicalisme d’adhésion, et non d’opinion. Comme si nous, partis politiques, nous préférions avoir des voix et pas de militants (Exclamations sur les bancs du groupe SRC). Ce n’est pas l’UMP ou le parti socialiste qui nous diront que les militants, ce n’est pas important !

M. Roland Muzeau – Vous, vous avez de l’argent, mais pas de militants ! (Sourires)

M. Francis Vercamer – Si on veut un syndicalisme d’adhésion, il faut mettre les militants au premier plan. En outre, n’oublions pas que les organisations syndicales sont d’abord financées par leurs adhérents et qu’elles doivent par conséquent susciter le plus d’adhésions possible. Enfin, si l’on veut éviter que ne prolifèrent les coordinations – comme on l’a vu récemment dans le secteur de la pêche –, il faut bien que les salariés adhèrent à des syndicats. On ne peut pas se contenter de se positionner tous les quatre ans par rapport à un syndicat national et, parce qu’on refuse par la suite d’adhérer, créer des coordinations en cas de conflit. Pour négocier dans l’entreprise, il est primordial d’avoir des syndicats forts, représentatifs et riches de nombreux adhérents. Voilà pourquoi le Nouveau centre ne votera aucun de ces sous-amendements, auxquels il préfère la rédaction initiale du Gouvernement, même s’il a soutenu à l’origine l’amendement de la commission.

M. Alain Vidalies – C’est un peu compliqué ! (Sourires)

M. Roland Muzeau – Ce débat sur le nouvel ordonnancement des sept critères de représentativité – que nous avons déjà eu en commission – me donne à penser que la hiérarchisation de ces critères va dans le bon sens. Avant même de mesurer l’influence ou l’audience d’une organisation, il est sain de vérifier qu’elle respecte les valeurs républicaines et fait preuve d’indépendance. Si tel n’est pas le cas, il n’y a pas lieu d’examiner les critères suivants. Le compte rendu des débats publié au Journal officiel montrera bien l’intention du législateur à ce sujet.

S’agissant de l’emploi de l’adverbe « notamment », je veux dire très directement à notre rapporteur que cela n’est pas du tout anodin. Ce n’est pas sans raison que le Sénat – dont je viens – tire à boulets rouges contre le mot « notamment » ! C’est tout simplement parce que sa nocivité est désormais bien établie, et M. le ministre s’est du reste bien gardé de démontrer en quoi cela pouvait introduire une précision. La fonction du « notamment », c’est de diluer les obligations. La position commune évoque « l’influence, caractérisée par l’activité et l’expérience » : on ne saurait être plus clair. En parlant d’influence « notamment caractérisée par… », vous diluez les deux éléments introduits à la suite – l’activité et l’expérience – et vous en réduisez l’impact. Cet élément d’imprécision juridique va créer un contentieux qui aurait pu être évité.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – Dites-le aux syndicats !

M. Jean-Patrick Gille – On peut aisément comprendre la logique de l’amendement du rapporteur : il s’agit de distinguer quatre premières conditions de principe, sine qua non, de trois autres critères quantitatifs et mesurables – même si rien n’est dit sur les seuils à atteindre. Sans doute faudrait-il être plus explicite encore, en écrivant expressément dans la loi que telle est la démarche. Mais il faut bien être conscient que cette distinction conduit à hiérarchiser les critères de représentativité. Dès lors, si l’on compare cette hiérarchie avec celle initialement proposée par le Gouvernement, l’on ne peut que constater une inversion entre la mesure de l’audience et celle des effectifs. Faut-il y voir une intention non dite ? L’amendement vise-t-il à inverser l’ordre des critères quantitatifs ?

Le sous-amendement 1685, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n’est pas adopté.

Le sous-amendement 1674, accepté par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

Le sous-amendement 1686, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n’est pas adopté.

L’amendement 1, sous-amendé, mis aux voix, est adopté.

Mme Martine Billard – Notre rapporteur vient de faire adopter, en tête des critères de représentativité, le respect des valeurs républicaines : encore faudrait-il définir ce dernier, comme le fait l’article premier de la position commune, en précisant que « le respect des valeurs républicaines implique le respect de la liberté d’opinion, politique, philosophique ou religieuse, ainsi que le refus de toute discrimination, de tout intégrisme et de toute intolérance. » L’accord conclu dans la fonction publique sur la rénovation du dialogue social reprend cette même définition. Les organisations syndicales ont donc clairement manifesté leur volonté d’apporter ces précisions, et tel est l’objet de notre amendement 106.

Notre rapporteur a opportunément rappelé que, dans un passé récent, le respect des valeurs républicaines avait été opposé aux tentatives du Front national de créer des sections syndicales, en particulier dans la police et les transports. C’est sur ce fondement que la justice a refusé au Front national la possibilité de constituer de telles sections.

En commission, pour justifier le refus de notre amendement, le rapporteur a expliqué que la notion appartenait déjà au bloc de constitutionnalité et qu’il convenait d’éviter de lier le juge par une définition trop restrictive. Mais faut-il s’en remettre au juge pour définir ce que sont les valeurs républicaines ? N’est-ce pas au Parlement de le faire, pour éviter aussi que cette définition ne soit mouvante et varie d’une juridiction à une autre ? (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR et du groupe SRC)

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – Rejet pour le motif que vient de rappeler Mme Billard elle-même. Comme je l’ai dit la semaine dernière en commission, il ne me semble pas opportun de réduire la notion de « respect des valeurs républicaines » à l’inventaire dressé dans cet amendement. La Déclaration des droits de l’homme ne fait-elle pas aussi référence à la résistance à l’oppression et au respect de la propriété privée ? La définition que vous proposez n’est pas contestable sur le fond mais elle est limitative.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – Même avis défavorable. L’article premier de la Constitution et les principes fondamentaux du droit répondent à votre attente. En cas de nécessité, le juge pourra toujours se référer à la position commune et il ne me semble donc pas opportun d’enfermer la définition des valeurs républicaines dans des critères limitatifs.

Mme Martine Billard – Pourquoi ne pas reprendre la proposition précédente du rapporteur d’inscrire l’adverbe « notamment » en tête de l’énumération ? (Rires) Notre amendement serait donc rectifié de la façon suivante : « le respect des valeurs républicaines se comprend notamment comme le respect de la liberté d’opinion… » (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR et du groupe SRC)

L’amendement 106, mis aux voix, n’est pas adopté.

M. Alain Vidalies – Mme Billard a raison ! Nous irions beaucoup plus vite si vous acceptiez tous nos amendements pour peu que l’on rajoute « notamment » en tête de toutes les propositions, puisqu’il paraît que l’on peut faire du droit comme cela !

La question que pose notre amendement 183 est majeure. On passe beaucoup de temps à discuter de la représentativité des organisations syndicales de salariés. Mais pour négocier dans le cadre de la démocratie sociale, il faut être deux. Or il y a beaucoup d’incertitudes – et, il faut bien le dire, un certain désintérêt – quant à la représentativité des organisations d’employeurs. Au-delà du MEDEF, de la CGPME ou de l’UPA, des secteurs entiers ne sont pas représentés, à l’instar des chefs d’entreprises relevant de l’économie sociale et solidaire, qui constituent pourtant 15 % de l’activité industrielle et commerciale. L’Union nationale des professions libérales souhaiterait elle aussi pouvoir participer aux négociations. Il n’y a absolument aucune raison d’en rester à une représentativité de fait qui ne correspond pas à la réalité économique et commerciale de notre pays.

Il semble que les organisations d’employeurs, notamment le MEDEF et la CGPME, considèrent naturel de participer à la négociation sur la représentativité des organisations syndicales de salariés. Le parallélisme des formes – l’égalité des armes – exigerait que les organisations salariales soient associées à la détermination de la représentativité des organisations d’employeurs. Sinon, quelle conception singulière de la démocratie sociale ! Le rapporteur, après avoir manifesté un intérêt pour cette question, s’est montré plus timide, comme s’il avait pris conscience de la difficulté d’avancer dans cette voie.

Si notre amendement est refusé, nous nous interrogerons fortement sur votre conception singulière de la démocratie sociale, tendant à n’imposer de règles strictes qu’à une seule des parties à la négociation (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR).

M. Francis Vercamer – L’amendement 220 rectifié est de repli par rapport au précédent. Outre l’argument du parallélisme des formes, la loi prévoit désormais que les projets de loi ayant trait au code du travail doivent être soumis aux partenaires sociaux avant de l’être à l’Assemblée. Que seules les organisations d’employeurs soient consultées y serait contraire. Par ailleurs, une représentativité reconnue des organisations d’employeurs est indispensable pour éviter ce qui s’est produit par exemple avec le fameux accord signé par l’UPA puis contesté en justice. L’important est que les organisations d’employeurs soient représentatives et reconnues comme telles par les salariés – faute de quoi il serait difficile d’obtenir un dialogue social constructif.

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – La position que je vais défendre mérite quelques explications.

Je suis tout à fait conscient de la nécessité exposée par nos collègues Vidalies et Vercamer que le mouvement patronal réfléchisse sur sa propre représentativité. L’argument juridique du parallélisme des formes est en effet de poids. Il n’est pas normal non plus que tant d’employeurs et de salariés puissent demeurer à l’écart des négociations. Enfin, il faut savoir à quoi s’en tenir précisément en matière de représentativité sur les mouvements patronaux.

J’avais déposé la semaine dernière un amendement quasiment identique à celui de M. Vidalies et demandé, pour les raisons que je viens d’exposer, à la commission de l’adopter. Puis, ayant eu l’occasion d’auditionner de nouveau les partenaires sociaux, je me suis aperçu que des deux côtés, tant des salariés que du patronat, si on s’accordait sur la nécessité de négocier la représentativité patronale et on considérait qu’un délai de trois ans était convenable, on n’était pas favorable à ce que cela figure dans la loi (Exclamations sur les bancs du groupe SRC).

Je crois, moi aussi, cette négociation nécessaire, mais je ne souhaite pas que cette disposition figure dans la loi, puisque les partenaires sociaux eux-mêmes ne le souhaitent pas. Je suis donc défavorable aux deux amendements.

M. Marc Dolez – Les partenaires sociaux ont bon dos !

M. le Président – Je suis saisi sur l’amendement 183 d’une demande de scrutin public par le groupe SRC.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – Avis défavorable. J’ai cru comprendre que le sujet n’était pas tabou, mais dans la mesure où cette disposition ne figure pas dans la position commune, il n’est pas possible de la reprendre dans la loi.

M. Benoist Apparu – Les socialistes ne cessent de nous répéter qu’il faut respecter la position commune. Or, l’amendement qu’ils nous proposent ici ne faisait même pas partie de la négociation. Pourquoi être plus royaliste que le roi ? Nous souhaitons que ces amendements soient rejetés.

M. Christophe Sirugue – Lorsque cela l’arrange, le ministre nous explique qu’il ne faut absolument pas s’écarter de la position commune. Et lorsque c’est l’inverse qui l’arrange, il nous invite à prendre nos responsabilités, arguant qu’il est tout à fait possible de ne pas la suivre à la lettre.

Notre amendement vise à offrir à l’ensemble des partenaires les mêmes conditions dans le dialogue social. Comment redéfinir la représentativité des organisations syndicales de salariés, que chacun s’accorde à considérer comme pertinente et légitime, et refuser que la même réflexion ait lieu pour les organisations patronales ?

J’ignore ce que demandent les organisations syndicales et patronales sur le sujet. Ce que je sais, c’est que l’Assemblée peut légitimement demander, dans le cadre du présent projet de loi, cette clarification indispensable au nom même de l’équilibre entre partenaires sociaux.

M. Francis Vercamer – Certes, cette disposition ne figure pas dans la position commune. Mais quand des syndicats patronaux contestent les décisions d’autres syndicats patronaux, il appartient bien à la représentation nationale de s’interroger sur la représentativité de chacun. Je sais que le MEDEF n’y est pas favorable, mais il faudra bien un jour trancher la question. C’est d’ailleurs pourquoi on avait prévu un délai de trois ans. Le groupe Nouveau centre votera donc cet amendement socialiste – j’en suis désolé pour la majorité mais je ne peux pas me déjuger par rapport à mon propre amendement.

M. Régis Juanico – Ce débat illustre votre conception pour le moins singulière, et en tout cas à géométrie variable, du dialogue social. Il y a sur cette question de la représentativité deux poids et deux mesures, avec d’un côté, pour les organisations patronales, une représentativité de fait, présumée, et de l’autre, pour les organisations salariales, une batterie de critères cumulatifs. Cette dissymétrie m’amène à m’interroger : ne chercherait-on pas à dispenser les organisations patronales de critères de représentativité parce qu’elles seraient gênées d’être soumises par exemple à celui de transparence financière ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR) Cet amendement a donc toute sa place dans la loi, et nous ne devons pas nous en priver.

À la majorité de 95 voix contre 51 sur 146 votants et 146 suffrages exprimés, l’amendement 183 n’est pas adopté.

L’amendement 220 rectifié, mis aux voix, n’est pas adopté.

L’article premier modifié, mis aux voix, est adopté.

ART. 2

M. Jean Mallot – Cet article, qui reprend l’essentiel de la position commune sur les règles de représentativité, témoigne de l’incohérence du Gouvernement : ici il reprend la position commune, signée par deux syndicats représentatifs, qu’il n’hésite pas à trahir dans d’autres articles ; en revanche, le désormais célèbre accord UPA de 2001, qui avait été signé par tous les syndicats représentatifs, n’a pas été repris.

Divers amendements vont être présentés – y compris par le Nouveau centre – pour corriger ces dispositions. Il s’agira notamment de contrer la tentation du Gouvernement d’écarter les entreprises de moins de 50 salariés. Nous comptons aussi demander des explications au Gouvernement sur certains critères de représentativité, notamment sur la notion d’implantation territoriale « équilibrée ». Enfin, nous aimerions savoir ce qui se passera si les résultats de la mesure de l’audience ne sont pas disponibles.

M. Roland Muzeau – Dans l’ensemble, la première partie du projet correspond aux préconisations de la position commune. Nous aurions pu l’adopter moyennant quelques aménagements et quelques engagements, Monsieur le ministre, si vous n’aviez jugé utile de lui adjoindre la funeste seconde partie sur le temps de travail.

Pour la première fois, en effet, le vote des salariés sera déterminant. La légitimité des syndicats en sera renforcée. Force est de constater néanmoins deux insuffisances majeures : l’absence de prise en compte des quatre millions de salariés des TPE dans la détermination de la représentativité des organisations syndicales, et la lenteur de la mise en place de la réforme.

Il est prévu qu’une négociation nationale interprofessionnelle examine les conditions permettant aux salariés des TPE de contribuer à la représentativité des syndicats en bénéficiant eux-mêmes d’une représentation collective. Nous proposerons, comme le rapporteur, de fixer une date butoir – juin 2009 – ; mais nous avons bien noté hier que l’on parlait d’un aboutissement de la négociation dès la fin de l’année.

Dans le même esprit, il serait bon que le Gouvernement se penche sur la question de l’extension de l’accord sur le dialogue social dans l’artisanat, sans considérer qu’il constitue la réponse au droit des salariés des TPE à contribuer à la représentativité des syndicats.

Par ailleurs, le Gouvernement propose dans cet article que l’audience des organisations syndicales soit mesurée tous les quatre ans. Ce délai est à nos yeux bien trop long ; il nous ramène à l’amendement cavalier à la loi d’août 2005 sur les PME, qui a porté de deux à quatre ans le délai légal entre deux élections professionnelles. Il n’est pas équitable qu’une nouvelle section syndicale doive attendre quatre ans pour pouvoir présenter des candidats aux élections et acquérir la représentativité.

Enfin, je m’étonne que le seuil de 8 % ne soit pas retenu « à titre transitoire » comme dans la position commune.

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – L’amendement 3 est de coordination avec l’amendement de clarification des critères de représentativité qui a été adopté à l’article1er

Je rappelle à nos collègues que le groupe socialiste n’avait pas voté le texte sur la modernisation du marché du travail.

M. Régis Juanico – Il s’est abstenu !

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – C’est bien cela, il ne l’a pas voté. Ne nous appelez donc pas sans cesse à respecter les accords syndicaux…

M. Régis Juanico – La suite nous a donné raison.

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – Par rapport à la position commune, nous avons les uns et les autres la même attitude : le Gouvernement et la majorité y prennent ce qui leur convient, l’opposition fait de même.

L’amendement 3, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Benoist Apparu – Mon amendement 204 est rédactionnel.

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – Avis favorable.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail Favorable.

M. Alain Vidalies – Cet amendement tend à supprimer le mot « valablement » entre les mots « suffrages » et « exprimés ». Cela signifie-t-il que l’on exclut du décompte les suffrages nuls et blancs ?

M. Xavier Bertrand, ministre du travail C’est bien cela.

L’amendement 204, mis aux voix, est adopté.

M. Alain Vidalies – Notre amendement 184 rectifié tend, dans ce même alinéa 6, à supprimer les mots « à défaut », afin qu’il n’y ait pas d’ambiguïté sur le champ d’application de la loi : il convient de viser clairement l’ensemble des entreprises de plus de onze salariés, et non pas seulement les entreprises de plus de 50 salariés – où les délégués du personnel se substituent au comité d’entreprise dans le cas où celui-ci n’est pas constitué.

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – La commission a repoussé cet amendement, considérant que cet article doit bien être lu comme M. Vidalies le souhaite.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail C’est bien cela en effet : on ne vise pas seulement les entreprises de plus de 50 salariés. Je comprends vos questions, même si elles relèvent plutôt de la discussion du texte en commission. Si, tout à l’heure, le mot « valablement » n’apportait rien au texte, il n’en va pas de même de l’expression « à défaut » ; la modification que vous proposez n’est donc pas rédactionnelle, mais substantielle. Avis défavorable.

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – Je précise que l’avis de la commission s’applique à tous les amendements similaires.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – De même que l’avis du Gouvernement.

M. Alain Vidalies – Étant donné les explications du rapporteur et du Gouvernement, qui confirment que le texte concerne les entreprises de plus de onze salariés et que les suffrages qui s’y sont exprimés seront pris en considération, j’accepte de retirer l’amendement, ainsi que tous les amendements similaires (Approbation sur quelques bancs du groupe UMP et du groupe NC).

L’amendement 184 rectifié est retiré.

Mme Martine Billard – À l’heure actuelle, comme le prévoit la deuxième partie du livre III, section 2, du code du travail, notamment dans son article L. 2314-8, les élections au sein des entreprises sont organisées par collèges ; les organisations syndicales ne peuvent donc présenter des listes que dans un collège, et non dans tous les collèges que compte l’entreprise – deux ou trois, selon sa taille et selon le résultat de la négociation préalable avec le chef d’entreprise. En mentionnant les « organisations syndicales catégorielles affiliées à une confédération syndicale catégorielle interprofessionnelle nationale », l’alinéa 7 de l’article 2 vise en réalité à permettre à la CGC de conserver sa représentativité, alors qu’il n’appartient pas à la loi de connaître de ce cas particulier.

Par l’amendement 172, nous proposons donc de substituer aux mots « confédération syndicale catégorielle » les mots « organisation syndicale ». En effet, des syndicats catégoriels – représentant par exemple les journalistes ou les pilotes de ligne –, qui ne présentent donc des listes que dans un seul collège, peuvent être par ailleurs affiliés à une organisation nationale interprofessionnelle non catégorielle. Pourquoi donner le droit au niveau de l’entreprise, à une organisation particulière de présenter des listes dans un seul des trois collèges, au détriment des autres organisations catégorielles issues de notre histoire, qui recueillent parfois la majorité des suffrages dans leur catégorie et sont affiliées à une organisation nationale considérée comme représentative ? Il y va de l’égalité entre syndicats catégoriels.

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – La commission a repoussé cet amendement, même si, à titre personnel – je l’ai dit à Mme Billard –, je suis conscient de la nécessité de résoudre le problème que posent les collèges électoraux. Dans sa rédaction actuelle, l’alinéa n’a de sens que si l’on y maintient la référence aux confédérations syndicales catégorielles.

Quant aux collèges, il me semble que l’appréciation de la représentativité des syndicats généralistes repose sur l’addition des résultats qu’ils ont obtenus dans chaque collège, celle des syndicats catégoriels dépendant quant à elle des résultats obtenus dans le collège catégoriel. La représentativité des syndicats non catégoriels est appréciée au niveau de l’entreprise tout entière. Le ministre pourra nous le confirmer.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – Même avis. L’extension de cette disposition serait contraire à la position commune.

Mme Martine Billard – M. le rapporteur ne m’a pas vraiment répondu : l’alinéa porte sur la représentativité syndicale au niveau de l’entreprise – et de l’établissement –, et non sur le cumul de l’audience au niveau national. Dans sa rédaction actuelle, il empêche de se présenter aux élections, donc de faire reconnaître leur représentativité, des syndicats majoritaires dans leur catégorie et affiliés à des confédérations nationales non catégorielles. On ne peut rayer ainsi d’un trait de plume l’histoire syndicale de notre pays ! Quoi que l’on pense de l’émiettement syndical, il appartient aux syndicats de se regrouper le cas échéant, et la loi les y incitera, mais ce n’est pas au Parlement d’empêcher par avance certains d’entre eux de se présenter, les exposant ainsi à disparaître même s’ils représentaient la majorité au sein de leur entreprise !

L’amendement 172, mis aux voix, n’est pas adopté.

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – L’amendement 4 est de coordination.

L’amendement 4, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – L’amendement 5 est rédactionnel.

L’amendement 5, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – Les amendements 6 et 7 sont rédactionnels.

L’amendement 6, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté, de même que l’amendement 7.

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – Afin d’éviter tout contentieux, l’amendement 8 précise que la représentativité d’un syndicat au niveau du groupe est appréciée par addition de l’ensemble des suffrages obtenus dans les entreprises ou établissements concernés, et non par pondération.

M. Jean-Paul Anciaux, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques – L’amendement 94 est identique.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – Avis favorable.

M. Alain Vidalies – Cet amendement pose un problème d’interprétation. Au nom de l’analogie entre entreprise et groupe, l’amendement s’écarte du texte gouvernemental, qui prévoyait une procédure spécifique d’appréciation de la représentativité au niveau du groupe.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail Il le précise et le complète !

M. Alain Vidalies – Au point que sa rédaction en diffère sensiblement… Vous étendez au groupe les critères applicables à l’entreprise, en précisant simplement que la représentativité y sera appréciée par addition des suffrages exprimés entreprise par entreprise, ce qui modifie quelque peu l’appréciation de la situation de chaque entreprise et de chaque établissement en lui conférant une fonction particulière. Cette précision est-elle indispensable ? Ne risque-t-elle pas de compliquer la situation et de donner lieu à des contentieux ?

Les amendements 8 et 94, mis aux voix, sont adoptés.

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – L’amendement 9 est de coordination.

M. Alain Vidalies – Par le sous-amendement 1689, nous proposons d’apprécier d’abord la représentativité en fonction des suffrages exprimés par les salariés, conformément à la position commune.

Mme Martine Billard – Depuis la loi de 2005 – à laquelle nous nous étions opposés –, les élections professionnelles, qui permettent de mesurer l’audience des syndicats, n’ont plus lieu tous les deux ans, mais tous les quatre ans. Cela a sans doute peu de conséquences sur les grandes entreprises, où les syndicats peuvent facilement remplacer les délégués du personnel ou les salariés qui siègent au comité d’entreprise en cas d’absence ou de départ de l’entreprise. Mais dans les petites entreprises, le nombre de délégués du personnel est restreint et le turn-over beaucoup plus élevé. Lorsque l’audience y était mesurée tous les deux ans, il était déjà fréquent que la représentation du personnel ne soit pas assurée pendant toute la période. Le passage à quatre ans n’a fait qu’aggraver ce phénomène : il a été particulièrement néfaste pour la représentativité syndicale dans les entreprises de 10 à 50 salariés. Au moment où on nous explique qu’il faut renforcer le dialogue social et le rôle des syndicats, il me semblerait donc intéressant de revenir à une mesure de l’audience tous les deux ans. Tel est l’objet du sous-amendement 160.

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – La commission n’a pas examiné le sous-amendement 1689, auquel je suis défavorable à titre personnel. Quant au 160, la commission l’a repoussé : il est important que les élections se déroulent partout au même rythme.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – Avis favorable à l’amendement 9 et défavorable aux deux sous-amendements.

Mme Danièle Hoffman-Rispal – Vous venez de rappeler, Monsieur le rapporteur, que nous nous étions abstenus sur le vote de la loi sur l’accord national interprofessionnel il y a quelques semaines – mais vous n’avez pas dit pourquoi. Nous avons participé pleinement au débat : nous n’avons cessé de vous expliquer que le texte ne transcrivait pas exactement l’accord. Nous sommes donc dans l’ambiguïté. Vous ne pouvez pas invoquer l’ANI ou la position commune quand cela avantage les employeurs et va dans le sens de la flexibilité, et vous en affranchir quand cela avantage les salariés ! C’est pourtant ce que vous faites depuis le début de ce débat !

M. Jean Mallot – Très bien.

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – Je ne reviens pas sur ce que j’ai dit hier à la tribune : le rôle du Parlement n’est pas de retranscrire telle quelle la position commune. Mettons-nous d’accord sur au moins un point : lorsqu’elle nous convient, nous l’adoptons ; dans le cas contraire, nous ne l’adoptons pas. Une position commune est une déclaration d’intention, dans laquelle se mêlent éléments de droit, de contexte et de tactique. Nous devons donc nous sentir relativement libres – et ce n’est injurieux pour personne.

Mme Martine Billard – La position commune n’est pas un accord, soit. Mais pour qu’il y ait accord, il faut qu’il y ait majorité des organisations syndicales en nombre. Il ne peut donc y avoir d’accord si les organisations syndicales qui ont la majorité sont minoritaires en nombre. Il y a cependant eu des précédents – je pense à la loi sur le droit à la formation professionnelle ou à celle sur la modernisation du marché du travail : dans les deux cas, on nous a dit qu’il ne fallait pas toucher à l’accord… sauf quelques exceptions. Quand cela arrange le Gouvernement, il respecte les accords ; quand cela ne l’arrange pas, il les modifie. Cela ne date pas d’aujourd’hui ! Dans le cas présent, la position commune ne l’arrange pas : il tire donc prétexte du fait que la position commune n’est pas un accord pour ne pas la reprendre in extenso. Mais si le texte s’était limité à sa première partie, le Parlement aurait été unanime pour faire passer la représentativité des organisations syndicales d’une représentativité en nombre à une représentativité démocratique, mesurée par les élections. Il ne faut pas oublier de le dire !

Les sous-amendements 1689 et 160, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.

L’amendement 9, mis aux voix, est adopté.

Les amendements 1683, 1679, 107, 186 et 240 tombent.

M. Francis Vercamer – L’amendement 218 vise à garantir le pluralisme dans les branches et au niveau interprofessionnel. Dans l’entreprise, des organisations syndicales peuvent se regrouper pour devenir représentatives, à condition qu’elles obtiennent ensemble plus de 10 % des voix. Mais dans les branches et au niveau interprofessionnel, les organisations sont prises indépendamment. Des organisations syndicales représentatives lorsqu’elles sont regroupées dans l’entreprise peuvent donc perdre cette qualité au niveau des branches ou au niveau interprofessionnel. Le Conseil économique et social a fixé le seuil de représentativité à 5 %. Je propose de permettre aux organisations syndicales qui n’ont obtenu que 5 % dans l’entreprise, mais qui sont représentatives – puisqu’elles se sont regroupées avec d’autres – d’être aussi reconnues comme telles lorsqu’elles se regroupent au niveau des branches ou au niveau interprofessionnel. On m’opposera que le scrutin de liste existe. Mais si le pluralisme est garanti dans l’entreprise, il ne l’est pas au niveau de la branche ou de l’interprofession. Les petits syndicats risquent donc de perdre leur audience et, à terme, de ne plus être représentatifs dans l’entreprise – ce qui serait préjudiciable à la démocratie sociale.

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur  La commission a repoussé cet amendement. La notion d’intersyndicale pose en effet problème sur le plan juridique. Surtout, le texte permet aux listes de fusionner dès le premier tour. Il n’a donc pas paru opportun de les autoriser à le faire après : ce serait accepter de voir « corriger » le scrutin par une alliance électorale.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – Même avis, pour des raisons de lisibilité. Se mettre d’accord avant, oui ; se mettre d’accord après, non.

M. Roland Muzeau – L’amendement du Nouveau centre ne me surprend pas : c’est sa pratique politique que de se mettre d’accord après les élections bien qu’il ait dit le contraire avant ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe SRC ; exclamations et rires sur divers bancs)

M. Francis Vercamer – Et avec les Verts, qu’avez-vous fait ?

M. Roland Muzeau – Ne le prenez pas mal : je dis simplement la vérité ! Cette pratique politique – ou politicienne – ne doit pas être transposée dans les entreprises. Lorsque c’est le premier tour qui compte, quel que soit le nombre de suffrages exprimés, il ne peut y avoir d’addition des scores après l’élection pour tenter de dépasser un seuil. En vérité, vous proposez que rien ne change.

M. François Rochebloine – Avec ce raisonnement, vous n’auriez pas votre groupe !

M. Roland Muzeau – Nous n’avons pas passé un accord politique : nous constituons un groupe parce que vous êtes tous des réactionnaires et que vous nous empêchez d’en constituer un avec notre famille politique ! Vous nous obligez à marier la carpe et le lapin ! (Rires et exclamations sur plusieurs bancs)

J’en reviens à l’amendement : il ne peut à notre sens être soutenu.

M. Francis Vercamer – Je ne suis pas d’accord avec le rapporteur et le Gouvernement. Il ne s’agit pas de fusionner après le premier ou le deuxième tour. Nous observons simplement que la loi ne permet pas aux listes représentatives ensemble dans l’entreprise au premier tour de l’être aussi au niveau de la branche. Dans la loi, on décompte, dans les entreprises, le nombre de voix à l’intérieur de chaque liste avant de les consolider au niveau supérieur, si bien que, si des organisations peuvent être représentatives ensemble au niveau de l’entreprise, elles ne peuvent jamais l’être au niveau de la branche, puisqu’elles ne dépasseront jamais le seuil. Il ne s’agit pas de recomposer a posteriori, comme l’a fait le parti communiste avec les Verts, mais de permettre à ceux qui se sont rassemblés au niveau de l’entreprise de pouvoir le faire au niveau de la branche. Je maintiens l’amendement.

L’amendement 218, mis aux voix, n’est pas adopté.

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – L’amendement 10 est rédactionnel.

L’amendement 10, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Christophe Sirugue – L’amendement 187 est identique à l’amendement 11 de la commission. Il s’agit de clarifier la représentation collective des quelque quatre millions de salariés des petites entreprises dans lesquelles des accords d’entreprise ne sont pas possibles. L’amendement vise à compléter le projet de loi en fixant au 30 juin 2009 la date à laquelle le législateur devra se substituer à la négociation sur la représentativité dans ces entreprises.

M. Roland Muzeau – L’amendement 241 est identique. Un peu plus de quatre millions de salariés n’ont pas l’assurance d’être représentés. Des négociations sur la pénibilité du travail ont été lancées il y a trois ans et demi, et ce n’est que récemment que le Gouvernement a annoncé qu’il légiférerait. Ici il est indispensable de fixer une date butoir. J’ai cru comprendre qu’une position serait dégagée avant la fin de l’année. Si c’est le cas, tant mieux ; sinon, la date du 30 juin 2009 offre un délai raisonnable.

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – L’amendement 11 est identique ; il s’agit de clarifier le plus rapidement possible la situation des entreprises de moins de onze salariés, en fixant une date butoir au-delà de laquelle il ne serait pas raisonnable que les salariés concernés restent dans l’incertitude. Un délai d’un an nous a paru pertinent, s’agissant d’un sujet sur lequel les partenaires sociaux ont déjà négocié, dans le cadre de la position commune, et savent ce qu’ils veulent. J’ai cru comprendre que le Nouveau centre se rallierait à cette proposition. L’unanimité de l’Assemblée serait un signal fort pour débloquer la situation.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – Avis favorable.

M. Benoist Apparu – Le groupe UMP est très favorable à cette proposition, qui vient combler le vide juridique pour ces quelque quatre millions de salariés.

M. Francis Vercamer – Il y aura l’unanimité, car le Nouveau centre y est également très favorable.

Les amendements 11, 187 et 241, mis aux voix, sont adoptés.

M. le Président – À l’unanimité.

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – L’amendement 12 est défendu.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – Avis favorable.

M. Alain Vidalies – Nous nous interrogeons sur la portée de cet amendement, qui concerne les branches dont plus de la moitié des salariés travaille dans des entreprises dépourvues d’élections professionnelles. Dans l’attente du résultat de la négociation que nous venons d’évoquer, il est clair qu’il doit y avoir, pour ces entreprises, des interlocuteurs au niveau de la branche. Si ceux-ci sont présumés représentatifs dans le texte du Gouvernement, l’amendement précise qu’ils le sont « sans préjudice de la preuve du contraire ». Inutile, cette précision comporte un danger eu égard à la présomption irréfragable de représentativité dont l’exposé des motifs du projet de loi précise pourtant qu’elle est maintenue. L’amendement du rapporteur introduit une ambiguïté et nous souhaiterions donc connaître l’avis du Gouvernement sur les conséquences possibles d’une telle rédaction. Si cela ne sert à rien, et qu’il s’agit seulement de faire plaisir à M. Poisson, nous prendrons acte que nous sommes en train de faire de la poésie législative (Exclamations sur les bancs du groupe UMP). Mais ceux qui interprètent l’intention du législateur ont à se poser la question : « Pourquoi le texte a-t-il été modifié ? », et le juge présume en général que les modifications ont un sens… Or, depuis le début, vous faites des modifications qui n’ont aucun sens, et nous sommes donc bien obligés de le faire expliquer par le Gouvernement, pour que l’intention du législateur ne soit pas mal comprise.

Mme Martine Billard – Je partage ces interrogations. Les alinéas 18, 19 et 20 portent sur les entreprises dépourvues d’élections professionnelles. L’alinéa 18 concerne les organisations considérées comme représentatives aux termes de l’arrêté de 1966. L’amendement remet en cause la présomption irréfragable de représentativité qui leur est reconnue, et qui devient ainsi une présomption simple. C’est un coup de canif dans la position commune, d’autant plus étrange que cette présomption n’est valable que jusqu’aux élections, à savoir dans quatre ans. Ensuite, alors que l’alinéa 19 laisse la porte ouverte à la reconnaissance d’une organisation autre que les cinq traditionnelles, l’amendement ne prévoit pas pour celle-ci une représentativité « sans préjudice de la preuve du contraire », et il ne le prévoit pas non plus pour la CGC, qui est visée de fait à l’alinéa 20. Il est donc surprenant que cette disposition ne concerne que quatre organisations.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – J’ai apprécié la notion de « poésie législative », Monsieur Vidalies. On voit que vous ne faites pas que de la politique, mais aussi de la poésie !

M. Alain Vidalies – Ce n’est pas vous qui m’avez inspiré cette remarque !

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – L’amendement apporte une précision juridique, dans un souci d’efficacité pratique.

M. Alain Vidalies – Qu’est-ce que cela précise ?

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – Cher collègue, je vous remercie pour cet hommage à mon sens esthétique. Je voudrais cependant vous répondre deux choses. Tout d’abord, vous avez voté certains amendements que j’avais déposés ; c’est donc qu’ils n’étaient pas seulement de la « poésie ». Ensuite, je vous renvoie à la position commune, la note en bas de page à l’article 8 étant ainsi rédigée : « Les organisations syndicales affiliées aux confédérations représentatives au niveau national interprofessionnel sont réputées, sauf preuve contraire, remplir ces conditions. » L’amendement reprend exactement le texte de la position commune. Il ne s’agit pas de poésie, mais de musique, ou plutôt d’un problème d’oreille…

M. Alain Vidalies – Nous n’avons décidément pas les mêmes goûts…

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – Ce n’est pas une fatalité !

M. Alain Vidalies – Votre interprétation, qui suppose la possibilité, dans ce contexte, d’une preuve contraire contre les organisations qui bénéficient d’une présomption irréfragable de représentativité, est une violation délibérée de la position commune et créera une grande surprise dans le monde syndical. C’est la raison pour laquelle je demande un scrutin public sur le vote de cet amendement, et j’invite ceux de nos collègues qui sont attachés à la position commune à repousser ce dernier.

Mme Martine Billard – Il y a aura une rupture d’égalité entre les organisations syndicales. Quatre d’entre elles pourront être déclarées non représentatives, mais pas la CGC.

En attendant la signature des accords prévus, le chef d’une petite entreprise pourra estimer qu’une organisation syndicale considérée comme représentative au niveau national ne l’est pas chez lui ; il faudra aller en justice pour démontrer le contraire, et pendant ce temps, les sections syndicales concernées ne bénéficieront pas de la représentativité.

Ce que vous nous proposez suscitera des ruptures si importantes qu’elles pourraient être inconstitutionnelles.

À la majorité de 57 voix contre 23 sur 80 votants et 80 suffrages exprimés, l’amendement 12 est adopté.

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – Les amendements 13, 14 et 15 sont rédactionnels.

Les amendements 13, 14 et 15, acceptés par le Gouvernement, successivement mis aux voix, sont adoptés.

M. Francis Vercamer – L’amendement 213 fera sans doute plaisir au président de la commission des affaires sociales, qui regrette la panne du dialogue social dans certaines branches. Nous demandons que les organisations syndicales et patronales élaborent des « agendas sociaux » dès que la représentativité des premières est établie.

M. Jean-Frédéric Poisson – La commission a repoussé cet amendement, considérant que ce type de disposition n’est pas de niveau législatif. Il faut par ailleurs préserver la liberté du dialogue social au niveau des branches professionnelles.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – Une fois n’est pas coutume, le Gouvernement va légèrement s’éloigner de la position du rapporteur. Pour moi, cette proposition a sa place dans la loi, et elle me semble utile au bon déroulement de la négociation sociale. Avis favorable.

L’amendement 213, mis aux voix, est adopté.

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – L’amendement 16 est de coordination.

M. Alain Vidalies – Le sous-amendement 1690 renvoie à un débat que nous avons déjà eu.

Le sous-amendement 1690, repoussé par la commission et par le Gouvernement, n’est pas adopté.

L’amendement 16, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Président – Les amendements 1684 et 1680 tombent.

M. Francis Vercamer – L’amendement 219 est défendu.

L’amendement 219, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n’est pas adopté.

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur L’amendement 17 est de coordination.

M. Benoist Apparu – Le sous-amendement 1675 est de cohérence.

Le sous-amendement 1675, accepté par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Roland Muzeau – La position commune fait référence à un seuil de 8 % des suffrages, mais seulement à titre transitoire, en attendant que l’on passe à 10 %. Or, l’amendement 17 est rédigé de telle façon que le critère de 8 % semble définitif.

L’amendement 17, sous-amendé, mis aux voix, est adopté.

M. Roland Muzeau – L’amendement 242 a pour objet de supprimer les alinéas 30 à 35 de l’article. En effet, nous ne sommes pas favorables à la création d’une énième Haute autorité, et je rappelle que la position commune confiait les tâches visées aux services compétents du ministère, ce qui me semble effectivement plus raisonnable.

En commission, le ministre a expliqué que cette rédaction de l’article correspondait aux souhaits des organisations syndicales. Nous les avons donc consultées : il apparaît que seule la CFDT est d’accord pour modifier le rôle confié au ministère…

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – La commission a repoussé l’amendement 242. Ni la position commune, ni ce projet de loi ne reviennent sur les missions du ministère. Le Haut conseil du dialogue social rendra seulement un avis, afin d’éclairer l’exécutif.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – Même position.

L’amendement 242, mis aux voix, n’est pas adopté.

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – L’amendement 18 est rédactionnel.

L’amendement 18, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Jean-Paul Anciaux, rapporteur pour avis – Dans la rédaction actuelle du texte, le Haut conseil comprendra des représentants des organisations nationales interprofessionnelles d’employeurs et de salariés, des représentants du ministre chargé du travail ainsi que des personnalités qualifiés. Le Parlement étant de plus en plus attaché à suivre l’application des dispositions qu’il adopte, il serait bon qu’un député et un sénateur siègent également dans cette instance. Tel est l’objet de l’amendement 95.

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – L’amendement 19 est identique.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – Avis favorable.

Les amendements 19 et 95, mis aux voix, sont adoptés.

M. Alain Vidalies – Au nom de mon groupe, je demande une suspension de séance.

M. le Président – Elle est de droit.

La séance, suspendue à 17 heures 15, est reprise à 17 heures 30.

Mme Martine Billard – J’ai relevé précédemment que nous allions nous retrouver dans une situation où certaines professions organisées au plan syndical ne disposeraient plus à l’avenir d’aucune représentation. Pour y remédier, notre amendement 173 demande qu’un décret détermine les dispositions dérogatoires relatives à la représentativité syndicale dans les professions définies à la septième partie du code du travail, comme les journalistes et autres métiers de l’information. Ainsi le statut professionnel des journalistes est organisé par une loi du 29 mars 1935 qui a institué une commission de la carte. Huit syndicats professionnels présentent des listes pour les élections à cette commission, et un recueille, à lui seul, quasiment la majorité des voix. Cette profession, dont la représentativité est organisée au niveau de la profession, n’entre donc pas dans le champ de la présente loi, celle-ci n’ayant pas retenu le niveau de la profession pour l’appréciation de la représentativité.

Il faut donc impérativement trouver une solution, car on ne peut ainsi balayer d’un revers de main ce qui existe – à moins que l’UMP ne soit subitement devenue adepte du slogan « Du passé faisons table rase »… Les syndicats représentatifs de ces professions ne peuvent disparaître du jour au lendemain. Il en irait de la démocratie et de l’ordre public social.

Le cabinet du ministre, saisi du sujet, a fait savoir aux syndicats concernés qu’un amendement parlementaire serait nécessaire. Le mien – qui ne prétend pas apporter la seule solution –, vise simplement à ouvrir le débat.

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – La commission l’a repoussé, non qu’elle ne soit pas sensible à la question posée, sur laquelle le Gouvernement pourra apporter des précisions, mais parce qu’il est difficile de prévoir dans la loi des dispositions générales sur la représentativité, auxquelles un décret puisse ensuite déroger. C’est à la loi de fixer elle-même les conditions dans lesquelles il peut y être dérogé. Cet amendement risquerait d’être inconstitutionnel.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – Cet amendement poserait en effet des problèmes juridiques, constitutionnels même par incompétence négative, puisqu’il renvoie à un décret le soin de définir dans quelles conditions il peut être dérogé à la loi. Il poserait également un problème pratique avec une appréciation croisée de la représentativité dans le champ de la profession et dans celui de la branche. Il existe en effet un problème, mais tel que rédigé, cet amendement ne permet pas de le résoudre. Avis défavorable donc.

Mme Martine Billard – Je vais le retirer mais il fallait poser la question. J’espère qu’une solution aura pu être trouvée d’ici l’examen du texte au Sénat. Un syndicat qui recueille aujourd’hui 46 % des voix dans sa profession risquerait sinon d’être considéré du jour au lendemain comme non représentatif.

L’amendement 173 est retiré.

Mme Martine Billard – L’amendement 196 concerne lui aussi une situation spécifique qui n’a pas été envisagée dans la loi. Si celle-ci était appliquée telle que prévu, des syndicats aujourd’hui considérés comme représentatifs en Martinique et en Guadeloupe pourraient ne plus l’être à terme. Il faudrait prévoir une adaptation à l’échelon territorial : tel est le sens de cet amendement que j’ai cosigné avec notre collègue Marie-Jeanne. Des syndicats comme la CTU en Guadeloupe et la CDMP en Martinique doivent pouvoir continuer d’être considérés comme représentatifs. La CTU a saisi le ministère de l’outre-mer sur cette question mais n’a toujours pas reçu de réponse.

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – La commission a repoussé cet amendement. En effet, compte tenu de l’organisation spécifique des branches professionnelles aux Antilles, où elles sont dans la très grande majorité des cas départementales, il est probable qu’il soit satisfait par les articles 1er et 2 de ce texte.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – Je crois en effet que cet amendement est sans objet. Les règles aujourd’hui fixées pour la représentativité répondent à la question des départements d’outre-mer.

L’amendement 196, mis aux voix, n’ est pas adopté.

L’ article 2 modifié, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L’ART. 2

M. Christian Vanneste – La moindre qualité du dialogue social en France tient, entre autres, au trop faible taux de syndicalisation des salariés. C’est pourquoi il faut réfléchir aux moyens de l’accroître. Tel est l’objet de mon amendement 159.

Il est impossible d’obliger les salariés à se syndiquer. La Cour européenne des droits de l’homme, dans un arrêt du 11 janvier 2005, a expressément reconnu le droit de tout salarié à ne pas se syndiquer. C’est pourquoi on ne peut qu’inciter les salariés à le faire, comme cela se pratique déjà dans les pays où précisément on compte un grand nombre de syndiqués – trois millions en Belgique contre deux seulement en France ! Appartenir à un syndicat en Belgique permet d’obtenir certaines prestations comme le bénéfice des allocations chômage ou bien encore une prime versée par l’employeur couvrant plus de la moitié du coût de l’adhésion au syndicat. De même, en Suède, les conventions collectives ne sont applicables qu’aux salariés appartenant à une organisation syndicale qui les a signées.

On m’objectera certainement qu’un tel dispositif serait discriminatoire. Je ne le pense pas dans la mesure où, d’ores et déjà dans une même entreprise, des salariés peuvent bénéficier d’avantages obtenus après la signature d’un accord qui, dénoncé par la suite, ne bénéficie plus aux salariés embauchés plus tard. La jurisprudence va dans le même sens. La Cour de cassation a ainsi donné raison à l’entreprise Michelin qui refusait d’appliquer un accord national interprofessionnel signé par le MEDEF, auquel elle n’adhère pas.

En réalité, ce qui créerait une discrimination est que l’employeur oblige le salarié à se syndiquer. Mais tel ne serait pas le cas avec cet amendement, le salarié restant libre d’adhérer ou non à l’organisation syndicale de son choix et, ayant librement adhéré, recueille les avantages liés à cette adhésion. Cela serait de nature, me semble-t-il, à lutter contre l’extrême faiblesse du taux de syndicalisation dans notre pays, véritable mal français par rapport aux autres grands pays industrialisés.

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – La commission a repoussé cet amendement, non qu’elle ne l’estime pas fondé. D’ailleurs, l’article 12.2 de la position commune indique que « la réservation de certains avantages conventionnels aux adhérents des organisations syndicales de salariés constitue, sous des formes différentes, une piste à explorer de nature à développer les adhésions syndicales. Sans en négliger l’extrême complexité, elle ne saurait être écartée par principe. »

Toutefois, cet amendement ne règle pas tous les problèmes qui découleraient de son adoption, notamment en matière de contrat de travail.

En outre, de l’avis de tous les signataires de la position commune et même des organisations syndicales non signataires, ce sujet est si complexe que du temps est nécessaire pour y réfléchir.

La commission vous invite donc à retirer cet amendement.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – Il y a là un vrai débat. Les syndicats doivent-ils ou peuvent-ils proposer des services aux salariés pour les inciter à adhérer ? Cela se pratique dans un pays voisin de votre circonscription, Monsieur le député. Certains, comme vous, pensent qu’il faudrait même réserver les avantages négociés par les syndicats à leurs seuls adhérents. Mais cela pose un véritable problème juridique. Les accords collectifs constituent en effet une exception à l’effet des contrats. Dans notre pays, ceux-ci ne produisent leurs effets qu’entre les parties signataires. En revanche, l’accord collectif produit des effets en dehors des seules parties signataires. Votre amendement dérogeant à ce principe fondamental, je vous demande de bien vouloir le retirer.

S’agissant de l’évolution des syndicats, le débat reste ouvert.

M. Christian Vanneste – C’est volontairement que j’ai remis en cause un principe fondamental français, mais en cette période de réformes, on pourrait aussi imaginer de réformer ce type de principes… Je souhaite qu’on y réfléchisse, mais j’admets qu’il faille se donner le temps de la réflexion.

L’amendement 159 est retiré.

ART. 3

Mme Martine Billard – Je retire l’amendement 108 au profit de l’amendement 20 de la commission, qui remédie à une ambiguïté de l’alinéa 2.

M. Roland Muzeau – Je retire l’amendement 243, qui est identique.

Les amendements 108 et 243 sont retirés.

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – L’amendement 20 tend à clarifier la rédaction de l’alinéa 2 en l’harmonisant avec les dispositions adoptées à l’article 1er.

M. Benoist Apparu – Mon sous-amendement 1676 est défendu.

Le sous-amendement 1676, accepté par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

L’amendement 20 ainsi sous-amendé, accepté par le Gouvernement, est adopté.

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – L’amendement 21 est rédactionnel.

L’amendement 21, accepté par le Gouvernement, est adopté.

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – L’amendement 22 reprend l’amendement 20.

M. Benoist Apparu – Et le sous-amendement 1677 reprend le 1676.

Le sous-amendement 1677, accepté par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

L’amendement 22 ainsi sous-amendé, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – Les amendements 23 et 24 sont rédactionnels.

Les amendements 23 et 24, acceptés par le Gouvernement, successivement mis aux voix, sont adoptés.

M. Benoist Apparu – L’amendement 205 est défendu.

L’amendement 205, accepté par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – L’amendement 25 est rédactionnel.

L’amendement 25, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Benoist Apparu – L’amendement 1673 est défendu.

L’amendement 1673, accepté par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – L’amendement 26 rectifié a pour objectif de préciser les conditions dans lesquelles les salariés d’une entreprise mis à disposition d’une autre sont intégrés dans le décompte des effectifs de l’entreprise utilisatrice et obtiennent dans celle-ci la qualité d’électeur ou de salarié éligible.

Dans le droit commun, la condition d’ancienneté est de trois mois pour être électeur et douze mois pour être éligible ; nous proposons de la fixer, pour les salariés mis à disposition, à douze mois pour être électeur et à vingt-quatre mois pour être éligible dans l’entreprise utilisatrice. La formulation retenue dans cet amendement limite le risque d’inconstitutionnalité.

M. Pierre Morange – J’ai cosigné avec mon collègue Dominique Tian les sous-amendements 230, 232 et 233, qui visent à bien préciser le dispositif afin d’éviter une double comptabilisation ou un double vote. De nouvelles améliorations pourront être apportées à l’occasion de la navette, afin d’éviter tout risque de contentieux.

Mme Martine Billard – Les délais proposés dans cet amendement conduiraient certains salariés à n’être plus jamais ni électeurs ni éligibles ; nous proposons de les réduire à six et douze mois. Cela ne règle pas le problème de l’effet du décompte retenu sur le calcul des seuils dans les entreprises d’origine et d’arrivée. Un problème se pose aussi pour les élections prud’homales : les salariés voteront-ils en fonction de leur entreprise d’origine ou de celle où ils sont détachés ?

M. Jean-Paul Anciaux, rapporteur pour avis La commission des affaires économiques a adopté l’amendement 96, qui est identique à celui de la commission des affaires culturelles et que je lui ai proposé après avoir entendu les représentants syndicaux.

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – Le sous-amendement de Mme Billard ne règle pas tout, comme elle l’a reconnu. Toutefois notre amendement, qui ne concerne que la possibilité de participer aux élections au sein de l’entreprise sous-traitante, n’entraînera donc aucune conséquence pour l’entreprise d’origine, où le salarié mis à disposition continuera d’être comptabilisé. Il en va de même s’agissant des élections prud’homales.

Enfin, j’appelle votre attention, et c’est aussi une réponse à M. Morange, sur l’un des motifs de la décision rendue par le Conseil constitutionnel le 28 décembre 2006 : « Le droit de participer par l’intermédiaire de leurs délégués à la détermination collective des conditions de travail ainsi qu’à la gestion des entreprises a pour bénéficiaires sinon la totalité des travailleurs employés à un moment donné dans une entreprise, du moins tous ceux qui sont intégrés de façon étroite et permanente à la communauté de travail qu’elle constitue, même s’ils n’en sont pas les salariés ». Même s’ils ne résolvent pas entièrement le problème, les délais de douze et vingt-quatre mois permettent, mieux que ceux de trois et six mois, de tenir compte de cette décision, notamment de l’exigence de permanence.

Avis défavorable donc à ces sous-amendements.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – Avis favorable aux amendements 26 rectifié et 96, qui permettent de résoudre une difficulté réelle.

Les sous-amendements de MM. Tian et Morange soulèvent eux aussi un véritable problème, mais dans leur rédaction actuelle, comme l’ont souligné les rapporteurs, ils comportent un risque constitutionnel. J’en suggère donc le retrait, et je vous propose de travailler, avec les sénateurs, à leur amélioration. Le texte constitue déjà un progrès ; à cette condition, ensemble, nous pouvons faire mieux encore.

Enfin, le Gouvernement est défavorable au sous-amendement 161, qui tend à restreindre le champ des amendements 26 rectifié et 96.

M. Alain Vidalies – Cessons de tourner autour du pot : en réalité, il s’agit, à la faveur d’un texte sur la démocratie sociale, de modifier les conditions de calcul des effectifs dont dépend, aux termes du code du travail, l’instauration des institutions représentatives – rien de moins ! Ce calcul décide en effet de l’existence de délégués du personnel, si l’entreprise compte onze salariés, ou d’un comité d’entreprise, si ses effectifs atteignent 50 salariés.

Si je défends le droit positif, c’est qu’il permet seul d’éviter toute manipulation : ainsi, le code du travail prévoit depuis longtemps que la présence dans l’entreprise de chaque salarié mis à disposition fait l’objet d’un cumul, à due concurrence. En d’autres termes, la présence au sein de l’entreprise de douze salariés pendant un mois équivaut à un an de présence.

Vous proposez au contraire de ne comptabiliser les salariés qu’au bout d’un an ; autrement dit, il suffit de limiter leur présence dans l’entreprise d’accueil à onze mois pour demeurer en deçà des seuils d’instauration des institutions représentatives. Ainsi, loin de simplifier le dispositif, vous ouvrez la voie à toutes les manipulations !

Rien de tout cela ne figure dans la position commune. Nous attendons donc vos explications.

M. Roland Muzeau – M. Vidalies et Mme Billard ont raison d’appeler l’attention de notre assemblée sur ces points. Le problème principal est celui de la détermination des seuils. Vous avez également soulevé cette question, Monsieur Morange, même si vous n’y apportez pas la même réponse. Mais vous ne proposez rien de moins qu’une régression par rapport au code du travail.

Monsieur le ministre, vous affirmez que la navette permettra de régler le problème ; mais sur une question aussi importante et aussi ancienne – et même si elle ne figure pas dans la position commune –, les partenaires sociaux et les organisations syndicales de salariés doivent être consultés, comme le prévoit la loi s’agissant d’une modification majeure du code du travail. Au contraire, les amendements des rapporteurs reviennent à trancher sans avoir consulté personne !

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – Je ne peux vous laisser dire cela, Monsieur Muzeau : M. Anciaux, qui a assisté aux auditions préparatoires, vous confirmera que toutes les organisations syndicales y ont soulevé ce problème.

M. Jean-Paul Anciaux, rapporteur pour avis – Je confirme !

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – Il est vrai qu’il n’est pas abordé dans la position commune, Monsieur Vidalies ; mais il en va de même du financement du dialogue social dans les petites entreprises, ou des conditions d’aménagement de la transparence financière. Le système contenu dans le projet de loi n’en appelle pas moins, pour être efficace, quelques précisions.

Le double décompte pose un problème que nous autres élus connaissons bien : celui de la liste électorale. Qui a le droit de vote, et à quelle élection ? Lorsque les représentants syndicaux sont désignés par gravitation – le mot est éloquent – à partir des centrales syndicales, l’imprécision des listes ne pose guère problème, puisque les effets de l’élection sont limités. Mais il n’en va pas de même lorsque les résultats de l’élection permettent d’apprécier la représentativité selon des seuils de 10 % ou 8 %, à une voix près, puis, une fois consolidés au niveau de la branche professionnelle, de déterminer de la même manière le pouvoir de négociation des organisations syndicales.

Dans les entreprises qui ne sous-traitent pas, seuls les salariés sont concernés et le code du travail indique clairement leurs droits lorsqu’ils bénéficient d’un CDD ou d’un contrat de travail temporaire. Mais dans le cas qui nous occupe, Messieurs Vidalies et Muzeau, des précisions supplémentaires sont indispensables, comme nous l’ont dit les organisations de salariés.

M. Alain Vidalies – Pas s’agissant des seuils !

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – Mais je parle de la constitution de la liste électorale.

M. Alain Vidalies – Cela revient au même !

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – Non, même si cela entraîne des conséquences s’agissant des seuils.

M. Alain Vidalies – Ce n’est pas rien !

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – Soit ; je l’ai dit, nos amendements ne suffisent pas à résoudre le problème. M. le ministre a du reste proposé d’améliorer le dispositif à la faveur de la navette. Mais si nous n’entreprenons rien, nous n’avancerons pas sur cette question récurrente. Tel est le sens de nos amendements.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – Messieurs Vidalies et Muzeau, ces amendements ont trait à la démocratie sociale, puisque le calcul de la représentativité au moyen du résultat des élections exige de rompre avec le double décompte.

En outre, il est aujourd’hui difficile, voire impossible, de prendre en considération des effectifs que l’on ne connaît pas précisément. Monsieur Vidalies, en cas de faute, est-ce l’employeur ou le prestataire qui demande le licenciement des salariés élus dans l’entreprise d’accueil et protégés à ce titre ? Qui paye les heures de délégation ? En la matière, la jurisprudence nous incite à faire preuve de clarté. De même, s’agissant de l’organisation des élections dans l’entreprise d’accueil, qu’en est-il lorsque la fonction des salariés ne correspond pas aux collèges électoraux de celle-ci ? Je pense par exemple au cas d’un informaticien mis à disposition par une SSII.

M. Roland Muzeau – Il n’y a pas que les SSII !

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – C’est bien ce que je disais.

Je tiens à préciser que cet amendement n’a aucun effet sur les seuils, qui feront l’objet d’une autre discussion. Tous les personnels détachés ou mis à disposition sont en effet comptabilisés dans l’entreprise d’origine pour les élections.

M. Alain Vidalies – Vous affirmez donc que ce texte n’aura aucune conséquence sur les seuils : cela dépasse l’entendement ! Dans l’ancien code, la disposition qui pose problème – l’article L. 620-10 – figurait dans une partie intitulée « Obligations des employeurs ». Dans le nouveau, elle figure dans le titre « Champ d’application et calcul des seuils d’effectifs ». Est-elle applicable ou non à l’élection des représentants du personnel ?

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – Qu’est-ce qui laisserait penser que c’est pour les élections prud’homales ?

M. Alain Vidalies – Ce n’est pas la question !

Savoir qui va voter – en fonction du statut personnel de chacun – est un réel problème, j’en conviens. Mais par incidence – et le rapporteur vient de reconnaître que j’ai raison –, cette disposition a une conséquence sur les seuils. En voulant régler un vrai problème, vous ouvrez la porte à des « arrangements » qui feront qu’il pourra y avoir moins d’institutions représentatives du personnel. Il y a là une vraie difficulté, et je remercie le rapporteur de l’avoir reconnu.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – Je vous ai bien parlé des élections prud’homales, Monsieur Vidalies.

N’oubliez pas que certains amendements à la loi de modernisation de l’économie relatifs aux seuils n’ont pas été discutés parce qu’une négociation est prévue sur cette question. Cet amendement ne vise donc pas à contourner la réglementation sur les seuils : c’est aux partenaires sociaux de nous dire ce qu’ils envisagent – et j’ai le sentiment qu’un certain nombre de tabous vont être brisés.

Les sous-amendements 230, 232 et 233 sont retirés.

Le sous-amendement 161, mis aux voix, n’est pas adopté.

Les amendements 26 rectifié et 96, mis aux voix, sont adoptés.

M. Roland Muzeau – L’article 6 de la loi de modernisation du marché du travail a créé les contrats à objet défini, dont la durée peut aller de 18 à 36 mois. Cette disposition – que nous avons combattue – risque de créer une nouvelle catégorie de salariés, qui pourront être électeurs, mais presque jamais éligibles en raison des 24 mois exigés. L’amendement 1658 lève toute ambiguïté : il intègre les titulaires de ces contrats – qui pourraient devenir les contrats de droit commun dans certains secteurs – dans le décompte des effectifs de l’entreprise. Ils retrouveront ainsi des droits normaux.

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – La commission a repoussé cet amendement. Le contrat de travail à objet défini est un contrat à durée déterminée. Votre amendement est donc déjà satisfait par le code du travail. Je vous renvoie notamment à son article 1111-2.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – Je crains que vous ne soyez pas satisfait, Monsieur Muzeau, mais votre amendement l’est… Avis défavorable.

L’amendement 1658, mis aux voix, n’est pas adopté.

L’article 3 modifié, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L’ARTICLE 3

M. Benoist Apparu – Le protocole pré-électoral, comme d’ailleurs d’autres accords pour lesquels prévaut aujourd’hui la règle de l’unanimité, est appelé à évoluer puisqu’il va être négocié par des organisations syndicales plus nombreuses. Dans un souci de simplification, l’amendement 207 propose d’instituer des conditions particulières de majorité pour cet accord spécifique, ainsi que – par exemple – pour la répartition du personnel entre les différents collèges ou la détermination des établissements distincts pour l’élection des délégués du personnel.

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – Le louable souci de simplification de notre collègue a été salué par la commission, qui a donné un avis favorable à cet amendement.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – Même avis.

M. Alain Vidalies – L’application des dispositions du code du travail relatives au protocole pré-électoral ne soulève pas de problème particulier. La position commune n’en parle pas. Et comme tout à l’heure sur les effectifs, vous nous présentez un amendement d’une grande complexité – vous ajoutez au calcul en nombre d’organisations un calcul en nombre de voix – et vous inventez des concepts ! Personne ne vous demande de régler un problème qui ne se pose pas ! Bref, votre démarche n’est guère sérieuse.

M. Régis Juanico – Stop aux usines à gaz !

M. Roland Muzeau – Contre l’amendement.

L’amendement 207, mis aux voix, est adopté.

L’amendement 208 est retiré.

ARTICLE 4

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – Les amendements 27 et 28 sont rédactionnels. Le 29 est de correction grammaticale.

Les amendements 27, 28 et 29, acceptés par le Gouvernement, successivement mis aux voix, sont adoptés.

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – La disposition de l’amendement 30 a déjà été présentée.

M. Alain Vidalies – Le 1657 est identique.

Les amendements 30 et 1657, acceptés par le Gouvernement, mis aux voix, sont adoptés.

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – L’amendement 31 est rédactionnel.

L’amendement 31, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

L’article 4 modifié, mis aux voix, est adopté.

ARTICLE 5

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – L’amendement 32 rectifié est défendu.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – Favorable.

Mme Martine Billard – J’interviens sur cet amendement, car son adoption ferait tomber le mien – qui porte le numéro 109.

L’amendement est certes mieux rédigé que le texte du Gouvernement, puisqu’il pose d’emblée la nécessité d’une pluralité d’adhérents dans l’entreprise. Cependant, il ne faut pas écarter un problème. Jusqu’ici, une section syndicale n’avait pas à prouver qu’elle comptait plusieurs syndiqués dans l’entreprise. Or, cette rédaction pourrait conduire l’employeur à demander la vérification du nombre d’adhérents. Autant il est de bon sens d’écrire qu’une section peut exister dès lors qu’elle possède plusieurs membres, autant il ne faudrait pas que cette disposition crée pour l’employeur, en cas de conflit, un droit à demander la liste des adhérents, comme cela se produit en ce moment même dans plusieurs affaires. Il y a là le risque d’une dérive très dangereuse. Dans certaines entreprises, les syndiqués sont victimes d’une répression systématique. Il y a des cas, même s’ils sont exceptionnels, où nul ne peut se présenter aux élections professionnelles, tout salarié souhaitant devenir représentant syndical étant licencié. Je souhaiterais donc que le ministre nous rassure sur ce point.

M. Jean-Pierre Soisson – Grotesque !

Mme Martine Billard – Comment cela ? Il y a des affaires en cours devant la justice !

M. Alain Vidalies – Cette disposition est lourde de conséquences. Monsieur le ministre, l’exposé sommaire ne peut vous permettre de recourir aux arguments que vous avez utilisés tout à l’heure. Le rapporteur souhaite clairement étendre aux confédérations nationales représentatives les exigences dont le texte du Gouvernement les avait exonérées. Le choix du Gouvernement répondait à une logique, celle du rapporteur est différente ; et vous ne pouvez pas nous dire que l’écart entre les deux rédactions est que l’une précise l’autre !

Ensuite, il y a un problème de clarté, l’amendement rectifié mentionnant toute organisation syndicale « légalement constituée depuis au moins deux ans dans l’entreprise ou dans son champ professionnel ou géographique ». Cette rédaction revient à dire que pour pouvoir constituer une section syndicale au sein de l’entreprise, il faut y être légalement constitué depuis deux ans ! Cela échappe à mes capacités de compréhension, et je crois en tout cas que l’Assemblée gagnerait à être éclairée.

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur  Je ne suis pas, moi non plus, certain de vous comprendre. L’amendement reprend simplement l’ordre que nous avons adopté à l’article premier. Quant à la condition de pluralité des membres pour la constitution d’une section syndicale au sein d’une entreprise, même si elle ne figure pas dans la position commune, les cinq organisations représentatives l’ont demandée en faisant valoir qu’il s’agissait d’une nécessité opérationnelle : il semble en effet légitime de demander à celui qui représente de ne pas être identique à celui qui est représenté. Enfin, il n’est pas question, dans mon esprit, d’ouvrir de cette manière à l’employeur le droit d’obtenir la liste des adhérents. Les situations que décrit Mme Billard sont marginales, bien qu’encore trop nombreuses. En cas de contestation, il existe d’autres moyens pour dresser l’état des adhérents d’un syndicat au sein d’une entreprise, des moyens « confidentiels et certains » reconnus par notre droit.

Monsieur Vidalies, la loi adopte une définition de l’ancienneté différente de celle en vigueur dans le cadre des élections professionnelles. Dans ce dernier cas, est retenue l’ancienneté dans l’entreprise ; ici, l’ancienneté dans la branche ou le secteur, ce qui est plus souple. L’amendement harmonise les deux rédactions.

L’amendement 32 rectifié, mis aux voix, est adopté.

M. le Président – Par conséquent, l’amendement 109 tombe.

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – Les amendements 33 et 34 sont rédactionnels.

Les amendements 33 et 34, acceptés par le Gouvernement, successivement mis aux voix, sont adoptés.

M. Benoist Apparu – L’amendement 35 vise à préciser les conditions de reconduction du représentant de la section syndicale dès lors qu’il n’a pas acquis la représentativité aux élections. Il nous paraît logique qu’il ne puisse être renommé dans la foulée d’une élection perdue. Dans la position commune, les syndicats ont souhaité apporter une protection à un syndicaliste n’appartenant pas à un syndicat représentatif dans l’attente de la mesure de la représentativité. À partir du moment où l’élection se déroule et que le représentant n’est pas reconnu représentatif, il faut prévoir un dispositif de sortie, et empêcher qu’il puisse être reconduit jusqu’aux prochaines élections.

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – Avis favorable. Dans le cadre d’un système qui veut favoriser la représentativité, et donc la légitimité, des personnes qui se présentent aux élections professionnelles, cet amendement nous paraît de bon sens, dès lors que la personne est contestée par le résultat même de l’élection.

Mme Isabelle Vasseur – Le représentant qui n’a pas été élu doit tout de même pouvoir se présenter à des élections ultérieures avec un délai raisonnable pour s’y préparer. Le sous-amendement 1692 précise donc que le représentant ne pourra être renommé, non jusqu’aux élections suivantes, mais « jusqu’aux six mois précédant » celles-ci.

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – S’il est plus facile de concourir aux élections en tant que représentant, je suis, à titre personnel, favorable à l’amendement, que la commission n’a pas examiné.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – Je suis favorable à l’amendement, tel que sous-amendé de façon à modifier le délai de carence.

Le sous-amendement 1692, mis aux voix, est adopté.

L’amendement 35 ainsi sous-amendé, mis aux voix, est adopté.

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur L’amendement 36 précise que les règles applicables à la publicité, à la contestation, à l’exercice et à la suppression du mandat de délégué syndical valent également pour les représentants des sections syndicales.

L’amendement 36, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Roland Muzeau – Aux termes de l’article L. 2143-13 du code du travail, les délégués syndicaux disposent de dix heures par mois dans les entreprises ou les établissements comptant entre 50 et 150 salariés, de quinze heures lorsqu’il y a entre 151 et 500 salariés, et de vingt heures au-delà de ce dernier seuil. J’ajoute que le nombre d’heures légal peut être dépassé en cas de circonstances exceptionnelles.

Or, le texte prévoit un volume d’heures bien inférieur pour les représentants de sections syndicales, ce qui ne se justifie en rien. L’amendement 244 tend à fixer le nombre d’heures disponibles à dix au minimum. C’est une question de bon sens.

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – La commission a repoussé cet amendement. Les charges des délégués syndicaux et des représentants de section ne sont pas équivalentes. Nous avons considéré que quatre heures suffisaient pour ces derniers.

L’amendement 244, repoussé par le Gouvernement, mis aux voix, n’est pas adopté.

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – L’amendement 37 est rédactionnel.

L’amendement 37, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Jean-Paul Anciaux, rapporteur pour avis – Par parallélisme avec les dispositions applicables aux délégués du personnel faisant office de délégué syndical dans les entreprises de moins de 50 salariés, l’amendement 97 dispose que le mandat de représentant de la section syndicale confié à un délégué du personnel n’ouvre pas droit à un crédit d’heures spécifique.

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – Notre amendement 38 est identique. Alors que le code du travail est pour l’heure muet à ce sujet, il permettra à des dispositions conventionnelles d’ouvrir un crédit d’heures pour les représentants de sections syndicales.

M. Roland Muzeau – L’amendement 245 est défendu. Il a le même objet que le 244.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – Avis défavorable sur l’amendement 245, mais favorable sur le 97 et le 38.

M. Roland Muzeau – Pourquoi ne pas rédiger ce dernier amendement de façon plus positive, en précisant que, « par disposition conventionnelle, le mandat de représentant peut ouvrir droit à un crédit d’heures » ? L’UMP réclame que les organisations syndicales jouent un rôle plus actif. Si vous nous suiviez sur ce point, nous finirions presque par croire en votre détermination ! (Sourires)

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – À titre personnel, je ne vois pas d’objection.

M. le Président - Je mets donc aux voix cet amendement 38 rectifié, le 97 étant retiré.

L’amendement 38 rectifié, mis aux voix, est adopté.

M. le Président – À l’unanimité. L’amendement 245 tombe.

M. Jean-Paul Anciaux, rapporteur pour avis – L’amendement 271 permet à une organisation syndicale représentative au niveau national et interprofessionnel de désigner, entre deux élections, un représentant de la section syndicale ayant pouvoir de négocier des accords dans les entreprises où il n’existe aucun délégué syndical et où aucune autre solution n’est juridiquement possible.

Je précise que cette dérogation est strictement encadrée, car elle ne s’appliquera que dans les situations d’urgence – conflits ou autre difficulté particulière – et pendant deux ans seulement. Pour être valables, les accords conclus devront en outre être approuvés par les salariés à la faveur d’un référendum.

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – La commission a accepté cet amendement. Dans certains cas, il est effectivement impossible de signer des accords faute d’intermédiaire chez les salariés.

Je rappelle que la désignation aura lieu dans le seul but de mettre fin à une situation de blocage, qu’un référendum sera organisé afin de vérifier que les décisions sont prises avec l’accord des salariés, et enfin que le mandat sera limité dans le temps.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – Avis favorable. C’est une disposition utile et juridiquement sécurisée : cette possibilité ne sera ouverte qu’aux représentants d’une organisation représentative au niveau national et interprofessionnel.

M. Roland Muzeau – J’aimerais savoir si les organisations syndicales de salariés ont été consultées sur cette question. Si c’est le cas, quel est leur avis ?

M. Jean-Paul Anciaux, rapporteur pour avis – Cette disposition ne figure pas dans la position commune, mais je vous confirme que cette solution a été suggérée par certains syndicats.

M. Roland Muzeau – Étaient-ils signataires de la position commune ?

M. Jean-Paul Anciaux, rapporteur pour avis Non.

M. Alain Vidalies – Merci, Monsieur le rapporteur pour avis, pour votre sincérité. On voit très bien de qui il s’agit… Certains syndicats non signataires de la position commune semblent avoir pris goût au mandatement, et voudraient donc rentrer par la fenêtre après être sortis par la porte.

Il est vrai qu’il existe objectivement un vide juridique, mais je note que cette solution arrange précisément ceux qui l’ont proposée. Par ailleurs, j’avais cru comprendre que le Gouvernement voulait soutenir le syndicalisme d’engagement ; si c’est vrai, pourquoi ne pas commencer par respecter ceux qui se sont engagés sur la position commune ? Ces derniers ne vous ont jamais suggéré de prendre cette initiative.

M. Jean-Paul Anciaux, rapporteur pour avis – Cela n’exclut pas d’entendre les autres, et certains représentants régionaux des organisations signataires sont favorables à cette solution. N’instruisez pas de faux procès, Monsieur Vidalies !

L’amendement 271, mis aux voix, est adopté.

L’article 5 modifié, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L’ART. 5

M. Francis Vercamer – Je défendrai ensemble mes amendements 237 et 215, lesquels visent à encourager le syndicalisme d’adhésion. L’article 13 de la position commune, intitulé « Reconnaissance des acteurs », vise à encourager ceux qui prennent des responsabilités syndicales. Le projet de loi ne le reprenant pas, mes amendements tendent à le faire, au moins pour partie.

L’amendement 237 demande qu’un accord d’entreprise puisse déterminer les mesures à prendre pour concilier la vie professionnelle avec la carrière syndicale et pour reconnaître l’expérience acquise dans l’exercice de mandats. Il tend aussi à ce que le déroulement de carrière des salariés exerçant des responsabilités syndicales soit pris en compte dans la négociation sur la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences.

L’amendement 215 demande que le fait d’exercer des responsabilités syndicales puisse donner lieu à validation des acquis de l’expérience.

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – L’amendement 237 a été accepté par la commission, elle aussi soucieuse de la bonne conciliation entre vie professionnelle et engagement syndical. Elle a par contre repoussé l’amendement 215…

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – Dommage !

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – …non pour des raisons de fond mais parce que la proposition mérite selon nous une expertise complémentaire.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – Le Gouvernement est favorable à ces deux amendements. Connaissant l’expertise de Francis Vercamer sur ces questions, nous avons pensé qu’il était possible de satisfaire sa proposition dès à présent.

L’amendement 237, mis aux voix, est adopté.

M. le Président – À l’unanimité.

L’amendement 215, mis aux voix, est adopté.

ART. 6

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – L’amendement 39 rectifié demande que, pour ce qui concerne la validité des accords interprofessionnels, les seuils de 30 % et 50 % soient vérifiés par rapport aux suffrages exprimés en faveur des seules organisations représentatives, plutôt que par rapport à tous les suffrages exprimés. Cela permettrait, en particulier dans les entreprises qui présentent un fort émiettement syndical, que seuls les suffrages exprimés en faveur des syndicats représentatifs soient pris en compte dans le calcul des seuils.

Pour répondre par anticipation aux objections éventuelles, je précise que si ce point ne figure pas dans la position commune, il a recueilli l’accord formel de ses quatre signataires.

M. Alain Vidalies – Mon sous-amendement 1696 me semble plus fidèle à la position commune. Au reste, je ne comprends pas bien le but poursuivi. Faisons attention ! En disant que l’engagement démarre à 30 %, on est encore loin de l’accord majoritaire. Il faut donc comprendre : 30 % et absence d’opposition majoritaire. Par cet amendement, la commission propose de retenir le seuil de 30 % des votes de ceux qui auront franchi la barre des 10 %. Imaginez un instant ce que donnerait l’application d’un tel calcul à une élection politique !

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – Je n’ai jamais dit que démocraties politique et sociale étaient identiques.

M. Alain Vidalies – Vous invoquez l’éparpillement syndical mais pourquoi le combattre par principe ? Si l’on veut que la représentativité reflète fidèlement le vote des salariés, il faut accepter le fait que l’émiettement syndical que l’on constate dans certains cas exprime soit un très grand pluralisme, soit une forme de désordre dans l’entreprise. En outre, votre système est dangereux s’il conduit, au nom de la lutte contre l’éparpillement, à reconnaître comme représentative une organisation qui, même à 30 %, ne représente en fait que 10 à 12 % des suffrages, pour lui permettre de prendre des engagements au nom de tous les salariés. Honnêtement, vous allez beaucoup trop loin et il serait plus sage de s’en tenir à la position commune.

Monsieur le rapporteur, les signataires de celle-ci ne m’ont pas alerté pour ou contre votre amendement et je prends donc acte de ce que avez dit, mais on vérifiera et on en débattra à nouveau. En tout cas, je ne pense pas qu’il serait bon de s’engager dans cette voie. C’est pourquoi notre sous-amendement 1696 rétablit le texte d’origine.

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – Avis personnel défavorable sur ce sous-amendement, la commission ne l’ayant pas examiné. Cher collègue Vidalies, je ne suis pas en train de vous mentir et je préférerais que vous demandiez à vos interlocuteurs syndicaux de « confirmer » mes propos plutôt que de les « vérifier ».

M. Alain Vidalies – Dont acte. Vous avez raison.

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – Merci.

Comme vous l’avez dit, il pourra arriver que des organisations engagent les salariés alors qu’elles n’en représentent qu’une proportion pas très importante – bien que sans doute supérieure à 10 ou 12 %. Notre objectif, c’est de fluidifier le système dans quelques cas limités, lorsque l’éparpillement syndical est particulièrement fort.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – Avis favorable à l’amendement, car il est tout de même plus logique de comptabiliser les syndicats représentatifs, notamment pour lutter contre le morcellement. Contre le sous-amendement, donc.

Mme Martine Billard – Vous êtes en train de déraper ! Nous sommes partis d’une position commune qui, bien que prônant l’accord majoritaire, a accepté un compromis à 30 % dans une période transitoire, avant d’arriver à la majorité. L’amendement du rapporteur vise à faire tomber le seuil des 30 % au nom de la lutte contre l’éparpillement syndical, que chacun constate en effet. Mais l’adoption du présent texte va déjà tendre à le réduire de façon significative ; dès lors, il est surprenant d’ajouter une telle disposition. Ne prendre en compte que les organisations représentatives dans les 30 % ou dans l’opposition majoritaire reviendrait à exclure de la démocratie sociale toute une partie du syndicalisme. Qu’à moyen terme, la loi puisse entraîner un certain regroupement syndical, nul ne le conteste, puisque la position commune y tendait déjà. Mais il me semble invraisemblable que le Parlement réintroduise l’accord minoritaire ! Avec cet amendement, on a l’impression que certains se sont aperçus que l’accord minoritaire allait tomber et qu’il fallait tout faire pour le réintroduire. Cela rompt avec la philosophie de la position commune. C’est très grave, et ce n’était pas la peine de modifier les critères de la représentativité syndicale pour en arriver là.

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – L’accord majoritaire est bien l’objectif visé par tout le monde dans cet hémicycle. Las, la lecture de la position commune et nos contacts réguliers avec les organisations syndicales montrent que l’on en est encore assez loin. Il convient donc de ménager une phase de transition pour y arriver progressivement et le seuil de 30 % doit être envisagé comme une étape.

Pas plus que les seuils, la représentativité n’est une fin en soi. Le présent texte ne vise qu’à permettre de signer plus aisément des accords et je me rallie à l’argument du Gouvernement : dans le souci d’éviter de bloquer le système, seuls les suffrages obtenus par les organisations représentatives doivent être pris en compte, en particulier dans les situations d’éparpillement syndical structurel.

M. Alain Vidalies – Je suis un peu désolé car ces amendements traitent en réalité de deux questions et nous n’avons jusqu’à présent débattu que de l’une d’entre elles. J’en suis du reste un peu responsable avec mes sous-amendements.

Le premier aspect concerne la validation des accords et le fait que les 30 % ne seraient calculés qu’en prenant en compte les suffrages qui se sont portés sur les organisations représentatives.

Le deuxième aspect, sur lequel vous n’avez pas donné beaucoup d’explications, Monsieur le rapporteur, concerne le calcul de l’opposition. Les signataires de la position commune mesurent l’opposition majoritaire en prenant en compte les voix qui se sont portées sur toutes les organisations syndicales, alors que vous la calculez, vous, à partir des seules voix qui sont allées aux organisations syndicales représentatives. C’est de fait interdire l’émergence d’une majorité d’opposition qui devrait pourtant être respectée comme telle, le cas échéant. Cela est contraire à la lettre et à l’esprit de la position commune.

M. Roland Muzeau – Monsieur le rapporteur, cet amendement a-t-il été discuté avec les deux organisations syndicales de salariés signataires de la position commune ? Quelle est leur opinion ?

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – Les deux y sont favorables.

Le sous-amendement 1696, mis aux voix, n’est pas adopté.

L’amendement 39 rectifié, mis aux voix, est adopté.

M. le Président – Les amendements 247, 188, 189 et 246 tombent.

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – L’amendement 40 rectifié fixe les règles applicables aux accords catégoriels au niveau interprofessionnel. Il ne fait que reprendre le texte de la position commune.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – Avis favorable.

M. Alain Vidalies – Le sous-amendement 1697 est défendu.

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – Avis défavorable à titre personnel, la commission ne l’ayant pas examiné.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail Même avis.

Le sous-amendement 1697, mis aux voix, n’est pas adopté.

L’amendement 40 rectifié, mis aux voix, est adopté.

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur Cet amendement a le même objet que le précédent, mais au niveau des branches cette fois.

M. Alain Vidalies – Le sous-amendement 1698 est défendu.

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – Avis défavorable au sous-amendement.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – Avis favorable à l’amendement et défavorable au sous-amendement.

Le sous-amendement 1698, mis aux voix, n’est pas adopté.

L’amendement 41 rectifié, mis aux voix, est adopté.

M. le Président – Les amendements 248 et 251 tombent.

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur L’amendement 42 est rédactionnel.

L’amendement 42, accepté par le Gouvernement, est adopté.

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – L’amendement 43 rectifié prévoit les règles applicables aux accords catégoriels au niveau des branches.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – Avis favorable.

M. Alain Vidalies – Le sous-amendement 1699 est défendu.

Le sous-amendement 1699, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n’est pas adopté.

L’amendement 43 rectifié, mis aux voix, est adopté.

M. Roland Muzeau – L’amendement 249 est défendu.

L’amendement 249, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n’est pas adopté.

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – L’amendement 44 supprime un terme inutile.

L’amendement 44, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Roland Muzeau – L’amendement 252 est défendu.

M. Alain Vidalies – L’amendement 1695 est identique.

Les amendements 252 et 1695, repoussés par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur Les amendements 45 et 46 sont de précision.

Les amendement 45 et 46, acceptés par le Gouvernement, sont successivement adoptés.

M. Roland Muzeau – L’amendement 250 est défendu.

L’amendement 250, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n’est pas adopté.

Mme Martine Billard – L’amendement 110 est défendu.

M. Alain Vidalies – L’amendement 190 est identique.

M. Roland Muzeau – L’amendement 253 également.

Les amendements 110, 190 et 253, repoussés par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. Jean-Frédéric Poisson – L’amendement 47 est de précision.

L’amendement 47, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Jean-Paul Anciaux, rapporteur pour avis – L’amendement 272 est défendu avec les mêmes arguments que le 271 précédemment.

L’amendement 272, accepté par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – L’amendement 48 précise que les conditions de majorité sont à vérifier dans le périmètre de l’accord, celui-ci pouvant concerner tout ou partie du groupe.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – Avis favorable.

M. Alain Vidalies – Le sous-amendement 1700 est défendu.

Le sous-amendement 1700, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n’est pas adopté.

L’amendement 48, mis aux voix, est adopté.

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – L’amendement 49 concerne la répartition des compétences de gestion des œuvres sociales entre les comités d’établissement et le comité central d’entreprise : prévaudront désormais en la matière les règles de droit commun que nous venons d’adopter concernant la représentation syndicale. C’est par souci de cohérence que nous avons présenté cet amendement.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – Avis favorable.

M. Roland Muzeau – Je ne comprends absolument pas ce que cet amendement vient faire là ! Ce n’est plus une entorse que vous faites à la position commune, mais une double fracture ouverte. Dans un texte traitant de la représentativité syndicale et de la démocratie sociale, vous rajoutez à votre gré des dispositions n’ayant rien à y faire, avec des objectifs inavoués. Dites-nous précisément à quoi vous pensez – nous en avons une petite idée. Soyez francs. Ne faites pas comme si cela allait de soi car tel n’est pas le cas. Peut-on régler par la loi des situations particulières ?

M. Alain Vidalies – Tous les spécialistes de ces questions savent que vous n’avez pas été amenés à traiter de ce sujet, à savoir la répartition des compétences de gestion des œuvres sociales entre le groupe et les établissements, de manière spontanée. Chacun est au fait des conflits qui ont eu lieu concernant la gestion des œuvres sociales dans certains grands groupes. Nous ne voulons pas être instrumentalisés. Si cet amendement a été réclamé ici ou là, nous ne sommes pas là pour répondre à ce type de demande. D’une part, cette disposition n’a en effet rien à voir avec le texte qui nous occupe. D’autre part, elle revient sur une rédaction qui avait été adoptée il y a quelques années sous la responsabilité de M. Larcher, alors ministre du travail, avec notre soutien. Sa remise en cause est donc assez étonnante, et je pense que cet amendement mériterait d’être retiré. Nous attendons en tout cas les explications du rapporteur et du ministre car ce n’est pas une affaire anodine.

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – Nous venons de décider que la validité d’un accord d’entreprise serait subordonnée à une double condition, d’une part sa signature par une ou plusieurs organisations syndicales représentatives ayant recueilli au moins 30 % des suffrages exprimés aux élections professionnelles, d’autre part l’absence d’opposition d’organisations syndicales majoritaires ; pour la répartition des compétences de gestion des œuvres sociales entre les comités d’établissement et le comité central d’entreprise, il n’est pas anormal de tenir compte de la même façon de l’avis exprimé par les salariés dans les urnes, et donc d’appliquer ces règles qui deviennent le droit commun ! Peut-être que cela gêne certains…

M. Roland Muzeau – Dites-nous clairement quelles situations vous visez !

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – Je vous en prie, pas de procès d’intention. Il s’agit simplement d’une exigence démocratique. Si vous-même vous pensez à des situations particulières, dites-le.

M. Roland Muzeau – Ce n’est pas moi qui ai déposé l’amendement ! C’est à vous de nous dire pourquoi vous l’avez déposé et qui vous l’a demandé. J’observe que vous n’appliquez pas le même raisonnement aux caisses de sécurité sociale, où les syndicats majoritaires sont écartés des responsabilités ! Je sais ce qui vous a motivé ; je ne le dirai pas ici, mais ne vous inquiétez pas, je le dirai ailleurs !

M. Xavier Bertrand, ministre du travail Pourquoi pensez-vous qu’il y a malice ?

M. Roland Muzeau – Je ne parle pas de malice, mais de ce qui a motivé le dépôt de cet amendement.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail Si le Gouvernement est favorable à cet amendement, c’est simplement parce qu’il met en cohérence les textes.

M. Christian Eckert – Ce sera dans le Canard enchaîné la semaine prochaine !

M. Xavier Bertrand, ministre du travail Bel aveu…

L’amendement 49, mis aux voix, est adopté.

L’article 6 modifié, mis aux voix, est adopté.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance, qui aura lieu ce soir, à 21 heures 30.

La séance est levée à 19 heures 40.

Le Directeur du service
du compte rendu analytique,

Michel KERAUTRET

Le Compte rendu analytique
est disponible sur Internet
en moyenne deux heures après la fin de séance.

Le compte rendu analytique des questions au Gouvernement
est également disponible, sur Internet et sous la forme d’un fascicule spécial,
dès dix-huit heures

Préalablement,
est consultable une version incomplète,
actualisée au fur et à mesure du déroulement de la séance.

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