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Assemblée nationale

Compte rendu
analytique officiel

Séance du vendredi 16 novembre 2007

1ère séance
Séance de 9 heures 30
54ème séance de la session
Présidence de M. Jean-Marie Le Guen, Vice-Président

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La séance est ouverte à neuf heures trente.

LOI DE FINANCES POUR 2008 – SECONDE PARTIE – (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2008.

M. le Président – La discussion des missions examinées aujourd’hui a eu lieu à titre principal en commission élargie.

SÉCURITÉ

M. Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique – C'est la première fois que le ministre du budget est chargé de vous présenter dix missions, dont les crédits ont en effet été examinés en commission élargie. Cette innovation dans la procédure budgétaire préfigure ce qui se passera l’an prochain, où elle devrait être étendue à la totalité des missions de l'État.

La mission « Sécurité » rassemble les deux programmes « Police nationale » et « Gendarmerie nationale », pour lesquels les indicateurs de performance font état d'une baisse sensible de toutes les formes de délinquance, d'une amélioration des taux d'élucidation, et d'une diminution des accidents de la route. L'année 2008 sera marquée par plusieurs réformes importantes, au premier rang desquelles le regroupement, sous l'autorité du ministre de l'intérieur, des forces de police et de gendarmerie. Nous pourrons ainsi renforcer la mutualisation des fonctions dites « support » : systèmes d'information et de communication, immobilier, achats.

Ce projet de budget se caractérise par la recherche d'un équilibre entre l'effort entrepris dans le cadre de la loi d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure – LOPSI –, et l’effort de maîtrise des dépenses budgétaires. Les autorisations d’engagement s’élèvent à 16,26 milliards, et les crédits de paiement à 15,91 milliards. Près de 51 millions d’euros seront consacrés à des mesures catégorielles et indemnitaires : la quatrième tranche du protocole du 17 juin 2004 relatif aux corps et carrières de la police sera honorée, de même que la quatrième annuité du plan d'adaptation des grades aux responsabilités exercées. Nous améliorons ainsi la qualification des personnels et la récompense de la performance individuelle et collective.

En matière de dépenses d'équipement, l'accent sera mis sur la plus-value technologique. Par exemple, 50,2 millions en autorisations d'engagement et 118,5 millions en crédits de paiement sont prévus au titre du réseau ACROPOL de radiocommunication numérique de la police nationale. Celle-ci pourra également commencer d’élaborer, en commun avec la gendarmerie, un nouveau système d'analyse et de recherches criminelles, dans le cadre du programme ARIANE. S’agissant de la gendarmerie, sur les 25,5 millions consacrés aux équipements, six seront dédiés à la poursuite du programme de gestion opérationnelle départementale Athéna, et sept au système de télécommunication Rubis.

Enfin, 165 millions en autorisations d'engagement et 133 millions en crédits de paiement permettront le lancement des opérations immobilières du pôle scientifique en région parisienne, ainsi que la mise en chantier et la livraison de plusieurs hôtels de police. Pour la gendarmerie, 171 millions d'autorisations d'engagement permettront de lancer plus de 1 000 équivalents unité logement.

EXPLICATIONS DE VOTE

Mme Delphine Batho – Je regrette que la ministre de l’intérieur et le ministre de la défense ne se soient pas déplacés, en dépit d’une situation très préoccupante. Le week-end dernier, un principal de collège a été agressé dans l’enceinte de son établissement ; les semaines précédentes, des affrontements ont eu lieu avec la police à Aulnay-sous-Bois, Grigny et Corbeil, et des voyageurs ont été agressés dans le RER à Savigny-le-Temple ; un règlement de comptes a fait deux morts à Grenoble. Les violences urbaines continuent donc d’augmenter tandis que, selon une enquête de l’Observatoire national de la délinquance, les violences en général auraient fait plus de deux millions de victimes en 2006.

Alors que six mois se sont écoulés depuis les élections présidentielles, le Gouvernement n’a toujours pas présenté de doctrine ni d’orientations quant à sa politique de sécurité, notamment dans les zones urbaines sensibles où sévit une délinquance liée à l’économie souterraine. Or, un malaise croissant s’exprime parmi les forces de sécurité. Le précédent ministre de l’intérieur a laissé en héritage à son successeur un stock de plus de cinq millions d’heures supplémentaires. Les policiers, qui se demandent pourquoi ils seraient les seuls à ne pas bénéficier du fameux « travailler plus pour gagner plus », appellent à une manifestation le 8 décembre. Quant aux gendarmes, ils souffrent de leurs conditions de travail et de rémunération, au point que le Sénat a jugé bon de créer une mission d’information sur les problèmes spécifiques, cette semaine.

Il est urgent de répondre à ce malaise. Malheureusement, ce projet de budget n’y contribue en rien. En outre, la réunion prévue hier pour permettre au Président de la République de présenter ses orientations en matière de sécurité a été annulée, et la ministre de l’intérieur, qui nous a indiqué que la « LOPSI 2 » serait présentée en conseil des ministres au mois de novembre, ne semble pas se rendre compte que nous sommes déjà le 16. Pour ne pas rester dans l’expectative, nous ferons plusieurs propositions, notamment concernant la création d’une police de quartier.

La seule « réponse » de ce budget à la situation préoccupante de la sécurité consiste à réduire, pour la première fois depuis six ans, le nombre de policiers et de gendarmes, ainsi que les crédits d’investissement ! Notre groupe ne votera donc pas ces crédits (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC).

M. François Rochebloine – Ce budget pour la sécurité, le premier après l’exécution de la LOPSI du 29 août 2002, poursuit le financement des programmes prévus dans ce cadre, tout en annonçant la prochaine loi de programmation.

L’effort ne doit pas être relâché si l’on veut réduire la délinquance de 5 % en deux ans. Or, si des progrès ont été réalisés à cet égard, les résultats restent inégaux. Certes, la délinquance de voie publique et routière diminue fortement ; toutefois, les violences aux personnes augmentent de façon inquiétante. Et la solution ne passe pas uniquement par une meilleure organisation des services de police et de gendarmerie, ni par le seul durcissement des peines. Le développement des peines alternatives et des centres éducatifs est donc une bonne chose. Mais il faut également revoir notre politique d'urbanisme, notamment dans les banlieues, en élaborant un grand plan d'urbanisme qui redéfinisse le périmètre d'action de l'État et des partenaires sociaux. En outre, une politique de ressources humaines visant à récompenser et à fidéliser les forces de l’ordre est nécessaire : il faut coordonner et moderniser leur action, et fidéliser le personnel pour qu'un lien de confiance se tisse entre les services de l'État et la population.

Alors que, depuis 2002, l'État a consenti d'importants efforts pour augmenter les effectifs, pourquoi une diminution de 1 200 emplois cette année ? Monsieur le ministre, les adjoints de sécurité que vous entendez ne pas remplacer sont pourtant bien utiles dans les commissariats. Il faudra en tenir compte dans la future LOPSI 2 ; mieux vaudrait que les suppressions portent sur le personnel administratif plutôt que sur les fonctionnaires de terrain.

Il serait également nécessaire que les policiers exerçant dans des zones difficiles bénéficient de primes. L'accès à la propriété doit être facilité pour ceux qui s'engageraient à rester dans certaines zones. Il importe, en effet, que les policiers connaissent ceux avec qui ils ont à faire, pour réduire les tensions sur le terrain. Par ailleurs, il conviendrait de revoir la cohérence des zones de police, car les résultats dépendent pour beaucoup de la qualité de la collaboration entre l'État et les collectivités locales, entre la police nationale et la police municipale.

Le Nouveau Centre, convaincu de l'importance de la prévention, constate que les correspondants de nuit font un travail remarquable et souhaite que leur rôle de travailleurs sociaux soit reconnu.

Nonobstant ces remarques, ce budget est un bon budget, qui augure d'une future loi de programmation dont les objectifs pourront être encore plus ambitieux s’agissant des ressources humaines. Le Nouveau centre votera donc ces crédits (Applaudissements sur les bancs du groupe NC).

SÉCURITÉ

ARTICLE 33 ET ÉTAT B

M. le Président – Nous en arrivons à la discussion des amendements.

Mme Delphine Batho – Selon une note récemment rendue publique le Gouvernement envisagerait, dans le cadre de la révision générale des politiques publiques, de supprimer 8 000 à 10 000 emplois de policiers et de gendarmes, et de réduire de moitié le nombre de brigades de gendarmerie. Lorsque cette information a été connue, à la veille de la réunion de la commission élargie, j’ai interrogé les ministres concernés et ils l’ont démentie. Pourtant, un haut fonctionnaire a fait savoir par la suite que ce scénario était bien à l’étude dans le cadre de la RGPP. Quelles sont donc les intentions du Gouvernement en la matière ?

L’amendement 279 vise, en créant un nouveau programme, à mettre en œuvre les recommandations du rapport du Centre national de prospective de la gendarmerie de juillet 2006, en faveur d’une « gendarmerie de contact ».

M. Éric Woerth, ministre du budget – Avis défavorable. Le CNPG ne concluait pas à la nécessité de créer un programme pour développer la gendarmerie de contact…

Mme Delphine Batho – Mais si !

M. Éric Woerth, ministre du budget – En outre, la démarche novatrice de la RGPP implique que beaucoup de notes circulent, au ministère de l’intérieur comme à la défense ! Ce sont des documents de travail envisageant plusieurs scénarios et le temps de la décision politique n’est pas encore venu.

M. Pierre Gosnat – Je souhaite dire mon mot dans la discussion générale, ayant été retardé par certaines difficultés de circulation dont vous avez peut-être entendu parler… (Murmures sur les bancs du groupe NC et du groupe UMP)

Affichée comme la priorité nationale lors des présidentielles de 2002, la sécurité ne l’est manifestement plus ! Bien que les crédits de la mission interministérielle restent stables et qu’il ait été annoncé que – contrairement à ceux de l’éducation nationale ! – les effectifs de policiers ne baisseraient pas, le malaise de ces fonctionnaires persiste – ils appellent d’ailleurs à la mobilisation pour la journée de défense du pouvoir d’achat du 20 novembre prochain. Autant que les effectifs, c’est d’ailleurs le salaire des policiers qu’il conviendrait de préserver, en payant notamment les heures supplémentaires dues aux gradés.

Le Gouvernement se prévaut de ses résultats en matière de sécurité : sans entrer dans une guerre de chiffres, permettez-moi d’indiquer que l’Observatoire national de la délinquance fait état d’une réalité bien différente. Votre politique de stigmatisation systématique des jeunes de banlieues a eu pour effet de faire augmenter de 36 % les violences physiques contre des policiers et, au cours des douze derniers mois, les dégradations de locaux de police et de gendarmerie ont malheureusement crû de 79 % ! C’est à croire, Monsieur le ministre, que le choix du Kärcher n’était sans doute pas le plus pertinent… (Murmures sur les bancs du groupe NC)

L’efficacité policière commande moins de spectacle et plus de présence. Las, vous avez cassé la police de proximité. Dans ma ville d’Ivry-sur-Seine, dont la population est passée de 50 000 à 58 000 habitants, les policiers ne sont pas plus de cent, alors que M. Sarkozy en avait promis 130 lorsqu’il était ministre de l’intérieur.

La mission interministérielle relative à la sécurité ne peut se limiter au financement de la police et de la gendarmerie. Son examen doit être envisagé dans le cadre d’une réflexion globale sur notre société, au sein de laquelle l’insécurité sociale liée à la précarité tend malheureusement à s’étendre.

Monsieur le ministre, les événements de l’automne 2005 ont marqué l’échec de la politique de sécurité que soutient votre majorité. La grande pauvreté, le malaise de la jeunesse, la crise du logement et le fléau du chômage sont toujours là. Rien ne change, pas même la violence de votre politique à l’égard des jeunes les plus défavorisés (Protestations sur les bancs du groupe UMP).

M. le Président – Nous en revenons à l’amendement 279 (« Enfin ! » sur les bancs du groupe UMP).

M. Michel Diefenbacher, rapporteur spécial de la commission des finances La commission des finances n’a pas examiné cet amendement. À titre personnel, je n’y suis pas favorable car l’objectif de transférer à l’administration pénitentiaire les missions d’extraction et de transfèrement des détenus, en vue de libérer les gendarmes pour développer l’action au contact de la population, ne serait tenable que si des crédits équivalents avaient été ouverts dans la mission « Justice ».

L'amendement 279, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Delphine Batho – Il ne vous a pas échappé, Monsieur le rapporteur spécial, que tous les rapports relatifs à la sécurité dénonçaient les charges indues imposées aux gendarmes et policiers, au risque de les détourner de leurs missions prioritaires. S’agissant de l’extraction et du transfèrement des détenus, la réforme de la carte judiciaire va encore aggraver la situation : dans mon département, la suppression du TGI de Bressuire va contraindre les gendarmes à des temps de trajets bien supérieurs, au détriment des missions de contact avec la population.

Je rappelle qu’en 2002, nous avions voté l’article 2 de la LOPSI, relatif aux moyens. Or, si la loi d’orientation a été parfaitement exécutée dans la police, tel n’a pas été le cas dans la gendarmerie et, pour 2008, le rapporteur de la commission de la défense a même parlé d’un budget en régression. Le plan de sauvetage de l’immobilier, qui visait à améliorer les conditions de casernement, n’a pas été réalisé et la situation reste donc préoccupante.

Notre amendement 280 vise donc à achever l’exécution de la LOPSI, pour tenir les engagements pris en 2002.

M. Michel Diefenbacher, rapporteur spécialAvis personnel défavorable, la commission des finances ne l’ayant pas examiné. D’une part, la gendarmerie a besoin de ces 348 millions pour assurer ses missions de police judiciaire. D’autre part, l’effort en faveur de l’immobilier est resté soutenu, avec plus de 4 000 logements mis en chantier cette année, dont plus de 3 000 seront livrés dès l’an prochain.

M. Éric Woerth, ministre du budget – Même avis.

L'amendement 280, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Delphine Batho – La nécessité de déployer une nouvelle police urbaine dans les zones urbaines sensibles fait aujourd’hui consensus. Le dernier rapport de M. Bauer évoque cette piste et, lors d’un déplacement en Seine-Saint-Denis, Mme Alliot-Marie a admis qu’une police territoriale pourrait avoir une certaine utilité. Notre amendement 280 vise par conséquent à créer au sein de la mission « Sécurité » un nouveau programme pour renforcer la police dans les quartiers, afin notamment de combattre l’économie souterraine et les autres fléaux qui affectent ces territoires.

M. Michel Diefenbacher, rapporteur spécial – Même avis personnel défavorable que pour l’amendement 279, le présent amendement étant son symétrique pour ce qui concerne la police nationale.

M. Éric Woerth, ministre du budget – Même avis : l’adoption de cet amendement entraînerait le démembrement du programme « Police nationale ».

L'amendement 268, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Delphine Batho – L’amendement 267 pose le problème de la fidélisation des policiers dans les zones urbaines sensibles, compte tenu des conditions de travail extrêmement difficiles qui sont les leurs dans les quartiers. Plutôt que de consacrer 25 millions à une prime individuelle au mérite dont les effets pervers sont bien connus,…

M. François Rochebloine – Ah bon ?

Mme Delphine Batho – …nous proposons d’améliorer la rémunération des agents des forces de l’ordre confrontés aux conditions de travail les plus pénibles.

M. Michel Diefenbacher, rapporteur spécial – Avis personnel défavorable, la tendance générale étant plutôt à développer la prime au mérite individuel. Il est légitime de récompenser ceux qui travaillent plus et 40 000 agents en bénéficieront cette année, contre 36 000 en 2006. En outre, un effort important est accompli pour améliorer la vie quotidienne des personnels affectés dans les zones sensibles : construction de logements dédiés, 100 000 places de crèches, 2 millions pour le prêt à taux zéro et 3,6 millions au titre de l’action sociale en faveur des familles.

M. Guy Geoffroy, rapporteur pour avis de la commission des lois – La commission des lois n’est pas favorable à cet amendement. Les 25 millions qu’évoque Mme Batho ne concernent pas que des primes individuelles : il arrive aussi que des services entiers soient récompensés lorsqu’ils ont tenu un objectif ou réalisé une opération spéciale.

En 2006, 36 348 fonctionnaires en ont bénéficié, dont 19 970 agents au titre de la prime collective, soit 400 euros par personne – et on est allé jusqu’à 500 euros en 2007. Les 16 378 autres ont touché une prime individuelle, de 371 euros en moyenne ; en 2007, la prime individuelle était comprise entre 400 et 800 euros. Si les syndicats nous avaient fait part de certaines interrogations en 2006, cela n’a pas été du tout le cas cette année.

M. Éric Woerth, ministre du budget – Même position. Cette prime, très attendue par les fonctionnaires de police pour améliorer leur pouvoir d’achat, bénéficie notamment, et même surtout, à ceux qui exercent dans des quartiers difficiles.

J’en profite, en cette fin d’année, pour tirer un coup de chapeau aux fonctionnaires de police pour leurs résultats en 2007, particulièrement au cours du dernier mois, puisqu’on constate une diminution de la délinquance sur l’ensemble du territoire national et pour toutes les catégories de faits (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe NC).

L'amendement 267, mis aux voix, n'est pas adopté.

Les crédits de la mission « sécurité », mis aux voix, sont adoptés.

APRÈS L'ART. 48

M. Éric Woerth, ministre du budget L’amendement 19 rectifié prolonge d’un an – jusqu’au 31 décembre 2008 – un dispositif de la LOPSI autorisant les collectivités territoriales à contracter des baux emphytéotiques administratifs pour construire des bâtiments au profit de la gendarmerie nationale.

M. Michel Diefenbacher, rapporteur spécial – Avis favorable, afin de ne pas arrêter ces programmes.

L'amendement 19 rectifié, mis aux voix, est adopté.

M. le Président – Nous avons terminé l’examen des crédits relatifs à la sécurité.

MÉDIAS

M. Éric Woerth, ministre du budget L’essor de l’Internet, les évolutions de la presse écrite, le bouleversement du paysage audiovisuel généré par l’apparition de la TNT et l’arrivée prochaine de la télévision du futur, la vive concurrence des médias étrangers sont autant de défis à relever. Le budget de la mission « médias » pour 2008 vise donc à accompagner la modernisation de leurs technologies, de leurs usages et de leur économie.

512 millions sont inscrits, dont 283 pour la presse, soit une augmentation de 4 %. Les aides à la presse progressent, pour atteindre 173 millions, et les moyens de l’AFP sont consolidés à 109 millions.

L’effort en faveur de l’audiovisuel extérieur est confirmé à hauteur de 229 millions ; la réflexion en cours devrait déboucher sur une réorganisation du secteur. Les dotations en faveur de France 24, TV5 et Medi 1 sont également confirmées, tandis que celle de RFI progresse de 1,5 million et que celle de CFI diminue du même montant.

Les moyens de l’audiovisuel public – 2,89 milliards – croissent de 3,6 %, alors que la redevance est maintenue à 116 euros. Les différents contrats d’objectifs et de moyens conclus dans ce secteur seront respectés. Les moyens de France Télévisions progressent de 3,5 %, ceux d’Arte France de 4,2 %, ceux de Radio France de 4 % et ceux de l’INA de 3,6 %. Quant à RFI, dont le contrat est en cours de négociation, ses moyens devraient croître de près de 2 %. L’augmentation des crédits va permettre un effort en faveur du déploiement de la TNT, du développement de la télévision à haute définition, de l’enrichissement des grilles de programmes et du sous-titrage pour les personnes malentendantes ; elle permettra aussi de poursuivre la réhabilitation de la Maison de la radio et de mener à bien le plan de sauvegarde et de numérisation de l’INA.

M. Michel Françaix – Je regrette l’absence de la ministre de la culture et de la communication, quelles que soient les qualités éminentes du ministre du budget.

J'avais tellement entendu le mot « rupture » dans la bouche du Président de la République que je m'attendais à une présentation budgétaire « décoiffante »... Mme la ministre avait insisté sur sa volonté de moderniser le paysage audiovisuel et de promouvoir une télévision publique de qualité : on pouvait en rêver.

Or nous ne sommes pas dans le changement ni dans la remise à plat. On ne peut pas réaffirmer la mission culturelle des chaînes publiques sans renforcer les moyens qui leur sont attribués ; on ne peut parler de renouveau de la ligne éditoriale sans encourager l’effort engagé en ce sens par France Télévisions.

La rupture, cela aurait pu être de déconnecter clairement du secteur marchand l'offre audiovisuelle publique, de renoncer aux recettes de la publicité dans les plages horaires de grande écoute, et d’augmenter la redevance. Mais nous sommes dans la continuité, consistant à laisser le service public immobile et sans le sou, à affronter le virage technologique dans un sous-financement chronique, à prévoir une réforme de la réglementation dont le seul effet sera d'augmenter la valeur boursière de TF1, M6 et Canal Plus.

Comment favoriser la création audiovisuelle française et européenne, la montée en puissance de France 4, la grille de soirée de France 5 ? Comment poursuivre la valorisation des programmes culturels, développer le sous-titrage à destination du public malentendant, étendre la diffusion de la TNT, lancer les expérimentations pour la télévision mobile personnelle, déployer la stratégie haute définition, en particulier pour ARTE ?

La ministre veut-elle d’une chaîne France 2 qui serait la copie conforme de TF1 et d’une chaîne France 3 aux contours flous, France 5 et ARTE restant la bonne conscience du Gouvernement ? Je ne crois pas. À côté d'une télévision privée utile pour passer le temps, il faut un service public de qualité pour comprendre son temps.

S’agissant de la politique audiovisuelle extérieure, qualifiée de mécano abracadabrant par le Président de la République, où en sommes-nous ?

M. Patrice Martin-Lalande, rapporteur spécial de la commission des finances pour les médias – La réflexion avance.

M. Michel Françaix – Je souhaite que cette réforme nécessaire de l'audiovisuel extérieur ne se fasse pas dans la précipitation, même si elle est pilotée par un conseiller spécial de l'Elysée.

Concernant les aides à la presse, il aurait fallu beaucoup de courage pour mettre à plat un système à bout de souffle, mais c’est néanmoins ce que prônent tous les rapports.

Un fleuron de la presse, Les Échos, a encore été pris dans la terrible spirale française des acquisitions par les industriels héritiers liés au pouvoir. Ses salariés nous ont donné une belle leçon sur ce que devrait être un journal indépendant.

Quotidiens indépendants en crise, journaux fabriqués sans journalistes, journaux gratuits qui récupèrent la plus grande part de la masse publicitaire – et qui ne paraissent pas les jours de grève –, rédactions sous contrôle d'actionnaires marchands d'armes et de béton ou de financiers, moins concernés par le rôle démocratique de la presse que par l'influence politique qu'elle leur offre : rarement l'indépendance des journalistes n'a été autant bafouée.

Vous comprendrez que le groupe socialiste ne puisse approuver ce budget de misère (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC).

M. Pierre Gosnat – Depuis l’élection du Président de la République, la représentation nationale est privée de véritable de débat sur les enjeux de société, et notamment, donc, sur les médias. Je remarque moi aussi l’absence de la ministre…

M. Patrice Martin-Lalande, rapporteur spécial – Elle est restée trois heures en commission élargie il y a quinze jours.

M. Pierre Gosnat – Notre pays aurait besoin d’un plan d’urgence pour sauvegarder la presse écrite. Les pouvoirs publics ne peuvent laisser nos quotidiens régionaux et nationaux tomber les uns après les autres dans la logique du profit financier. Dernièrement, le rachat des Échos par Bernard Arnault, homme le plus riche de France, a confirmé la menace d’une mainmise des milieux économiques sur l’information ; il intervient alors que Libération est déjà détenu par le baron de Rothschild, que Lagardère médias contrôle de nombreux titres et que Dassault, notre collègue avionneur et marchand de canons, est lui-même à la tête d’un empire de presse. Faudrait-il continuer à suivre l’exemple donné outre-Atlantique, où M. Murdoch est devenu un magnat de la presse au pouvoir politique incontournable ?

Note société a besoin de pluralisme, illustré par le « J’accuse » de Zola, le « Non à la guerre » de Jaurès, et plus près de nous, du Figaro à L’Humanité, par cette confrontation idéologique, cette symbolique complicité entre Jean d’Ormesson et Louis Aragon. Les crédits inscrits alloués au programme 180 sont très insuffisants pour répondre à l’exigence du maintien de la presse d’opinion. L’Etat doit adopter une politique d’aide, notamment en supprimant totalement son assujettissement à la TVA. Les politiques de défiscalisation doivent être complétées par la promotion des sociétés de lecteurs et une aide accrue pour les journaux à faibles ressources publicitaires.

Or, ce budget ne ralentira en rien la crise de la presse.

Tout aussi contestable nous semble le programme 116, « Chaîne française d’information internationale » : nous ne pouvons accepter que le Gouvernement alloue 70 millions à France 24, société anonyme détenue à 50 % par TF1. Notre pays a certes besoin d’une grande chaîne d’information internationale, mais ce n’est pas une raison pour enrichir les actionnaires de TF1 !

Pour ces raisons, le groupe GDR votera contre ce budget (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR).

M. François Rochebloine – Nos débats sur l’audiovisuel extérieur se suivent et se ressemblent, avec toutefois une particularité cette année : nous allons devoir voter les crédits sans connaître les réformes que le Gouvernement s’apprête à présenter au sujet de l’architecture et du financement de l’audiovisuel extérieur. Pourtant, ce que l’on peut en deviner inquiète grandement nos partenaires francophones de TV5 Monde.

Je rappelle que notre assemblée a beaucoup travaillé sur ce sujet, tout d’abord avec une mission d’information commune aux commissions des affaires étrangères et des affaires sociales, cultures et familiales, puis avec la mission d’information constituée à la demande du président Édouard Balladur. Dans son rapport adopté à l’unanimité, cette dernière mission a fixé quatre objectifs : un financement pluriannuel et équitable des opérateurs concernés ; une meilleure coordination entre les autorités de tutelle ; de plus fortes synergies entre les opérateurs ; une dimension européenne plus affirmée. J’ajoute que neuf propositions ont été formulées pour y parvenir. Puissent les décisions bientôt adoptées remédier à l’iniquité de l’audiovisuel extérieur français !

Alors que France 24 disposera d’une subvention de 70 millions, à laquelle il faudra ajouter 18,5 millions d’euros dont la provenance nous est encore inconnue, TV5, RFI et CFI ne seront pas logés à la même enseigne. Il faudra réfléchir aux synergies entre France 24 et RFI, grâce à la mutualisation des moyens préconisée par la mission d’information, tout en envisageant d’adosser CFI à l’INA.

Le groupe Nouveau Centre votera les crédits de la mission « Médias », mais en formulant le souhait que le Parlement ne soit pas tenu à l’écart des réformes qui se préparent et que sa contribution à la réflexion soit prise en considération.

M. Élie Aboud – S’établissant à 3 845 millions, le budget de l’audiovisuel public progresse de 3,6 %. Compte tenu des contraintes budgétaires, c’est un effort considérable qui témoigne de notre volonté de soutenir les médias dans notre pays.

Cinq priorités ont été retenues : le soutien à la création française et européenne ; la réalisation des programmes culturels, civiques et éducatifs, en particulier à destination des jeunes ; l’essor du numérique terrestre et de la haute définition ; la sauvegarde de notre patrimoine ; l’optimisation des ressources publiques.

Parmi les différentes avancées, je relève que la dotation publique du groupe France Télévisions augmente de 3,5 %, soit 72 millions supplémentaires qui permettront de poursuivre son redéploiement. Cet effort doit s’inscrire dans la durée, comme c’est le cas depuis quelques années grâce à la signature de contrats d’objectif et de moyens, mais cela nécessite aussi une réflexion sur l’avenir et sur les missions de ce groupe, qui compte près de 8 800 collaborateurs permanents. Il serait fâcheux d’envisager une hausse de la redevance télévision sans une telle réflexion, le pouvoir d’achat des Français devant être une de nos priorités. Le Gouvernement l’a bien compris (Exclamations sur les bancs du groupe SRC).

Les crédits des autres opérateurs publics progressent également – de 4,2 % pour Arte, de 4 % pour Radio France, de 3,6 % pour l’INA. Cet effort notable illustre le volontarisme de notre majorité.

M. Michel Françaix – Personne n’y croit !

M. Élie Aboud – Il faut toutefois s’interroger : notre pays a-t-il réellement choisi l’outil permettant d’assurer au meilleur coût notre rayonnement culturel à l’étranger ? Nous n’avons que trop tendance à disperser nos efforts.

M. François Rochebloine – C’est malheureusement vrai !

M. Élie Aboud – Enfin, nous ne pourrons pas faire l’économie d’une réflexion sur les missions du secteur public audiovisuel – pluralisme, objectif de qualité, pédagogie et éveil en direction des jeunes doivent rester ses principes.

Tous ceux qui sont attachés au pluralisme de la presse salueront l’augmentation sans précédent de 5,8 % des aides à la presse. Le soutien à la modernisation de la distribution augmentera notamment de 50 %. Là encore, il faudra mener une réflexion approfondie en vue de garantir la pérennité de la presse d’information générale.

C’est donc un bon budget qui nous est présenté : soutien au pluralisme audiovisuel sans concessions aux lobbies ; maintien à son niveau actuel de la redevance audiovisuelle ; et enfin aide à la presse écrite, dont nous connaissons tous les difficultés. Avancer, c’est agir. Vous le faites, et c’est pourquoi le groupe UMP votera ce budget (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

MÉDIAS

ART. 33 ET ÉTAT B

Les crédits de la mission « Médias » mis aux voix, sont adoptés.

AVANCES À L’AUDIOVISUEL PUBLIC

ART. 35 ET ÉTAT D

Le compte spécial « Avances à l’audiovisuel public », mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 60

M. Christian Kert, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales – L’amendement 290 propose une très légère augmentation de la redevance audiovisuelle, qui serait portée de 116 à 118 euros.

Comme l’a clairement indiqué le Président de la République, l’audiovisuel public est sous-financé. Compte tenu de la révolution technologique actuelle, il faut lui donner des moyens supplémentaires si nous continuons à lui demander de respecter un cahier des charges exigeant, notamment en matière de qualité éditoriale. Or le montant de la redevance est resté bloqué depuis 2002 à un niveau très inférieur à celui de la plupart de nos partenaires européens.

J’ai bien conscience que cet amendement ne suscitera pas l’enthousiasme au moment ou l’État s’attache à contenir ses dépenses. Une augmentation de la redevance me choquerait toutefois moins qu’un effort insuffisant en faveur de l’audiovisuel public, dont nous avons besoin pour assurer l’équilibre du paysage audiovisuel français. Il faudra bien s’adapter au développement de la haute définition et de la télévision mobile personnelle, ce qui demande des moyens financiers. Deux euros par contribuable n’y suffiront sans doute pas, mais je note qu’un autre amendement tend à ajuster le montant de la redevance sur l’inflation.

Au cas où cet amendement ne serait pas adopté,…

M. François Rochebloine – Ce serait dommage !

M. Christian Kert, rapporteur pour avis – ... j’aimerais que le Gouvernement nous explique comment il envisage le financement de l’audiovisuel public dans les années à venir, et de quelle façon il compte associer le Parlement à la réflexion sur ses missions. Il a été question d’états généraux…

M. Patrick Bloche – Pourquoi pas un Grenelle de l’audiovisuel ? (Sourires)

M. Christian Kert, rapporteur pour avis – Il ne faudra pas oublier que la concurrence se renforce avec le développement de la TNT, les chaînes historiques voyant leur audience et leurs recettes publicitaires baisser.

M. Éric Woerth, ministre du budget M. Françaix ayant regretté l’absence de Mme Albanel, je dois rappeler que cette dernière a participé, des heures durant, aux travaux menés en commission élargie.

M. Patrick Bloche – Quel effort ! (Sourires)

M. Éric Woerth, ministre du budget – Elle a consacré le temps nécessaire pour répondre à toutes vos questions.

Au-delà de sa valeur réelle, la redevance fait partie de ces symboles auxquels il serait délicat de toucher à l’heure où les Français ont le sentiment de souffrir de l’inflation et de la baisse du pouvoir d’achat.

D’autre part, conformément aux contrats d’objectifs et de moyens – auxquels vous avez contribué, Monsieur Kert, comme l’ensemble des parlementaires –, l’apport de l’État à l’audiovisuel public augmentera fortement en 2008, dans un contexte budgétaire pourtant contraint. En outre, le Gouvernement a tenu à maintenir le dispositif de garanties de ressources que vous aviez proposé lors de l’examen du PLF pour 2005, puis pour 2006. Les dégrèvements de redevance pris en charge par le budget général seront donc ajustés à la hausse, à due concurrence, si les encaissements résultant de la redevance venaient à être moins élevés que prévu.

En outre, en concertation avec Christine Albanel, je propose que les parlementaires participent, comme les grands groupes audiovisuels, à la réforme de la réglementation de la publicité – seconde source de revenus –, qui a pour but d’améliorer la répartition du « gâteau publicitaire »…

M. Michel Françaix – Mais il diminue !

M. Éric Woerth, ministre du budget – … notamment afin d’accroître les ressources de France Télévisions et de Radio France.

Je vous demande donc de retirer votre amendement.

M. Patrice Martin-Lalande, rapporteur spécial de la commission des finances – Cet amendement n’a pu être examiné par la commission, mais, à titre personnel, j’y suis défavorable. Je comprends les arguments de M. Kert, mais sa proposition est quelque peu paradoxale puisqu’elle ne concerne que 2008, année où le montant actuel de la redevance suffira à assurer le financement de l’audiovisuel public, ce qui ne sera plus le cas au cours des années suivantes.

Je vous propose donc d’adopter plutôt tout à l’heure mon amendement 250, qui vise à indexer le montant de la redevance sur le coût de la vie à partir de 2009, ce qui permettrait de donner une traduction budgétaire au contrat d’objectifs et de moyens par lequel le Gouvernement s’est engagé à augmenter de près de 3 % par an les moyens consacrés à l’audiovisuel public.

M. François Rochebloine – Pardonnez-moi de vous contredire, mon cher collègue, mais, lors de l’examen en commission élargie, les commissions des affaires culturelles, des affaires étrangères et des finances ont bien eu à connaître de cet amendement.

Il s’agit – même si je comprends vos arguments, Monsieur le ministre – d’un bon amendement ; l’augmentation de deux euros qu’il propose est en tout cas bien plus raisonnable que la hausse de 3 % par an qu’évoque M. Martin-Lalande !

D’autre part, où trouvera-t-on les 18,5 millions qui manquent pour financer France 24 et que Mme Albanel s’est engagée en commission élargie à dégager, mais sans en indiquer clairement la provenance ?

M. Patrick Bloche – Monsieur le ministre, les propos de M. Françaix ne vous visaient pas personnellement. N’essayez pas de nous faire pleurer sur le sort des ministres de Nicolas Sarkozy : leurs obligations envers la représentation nationale ne sont pas ce qu’ils subissent de pire !

Vous parlez de symbole, mais le débat sur les moyens alloués à l’audiovisuel public est tout sauf symbolique aux yeux du groupe SRC, surtout quand la première fortune de France vient de s’offrir Les Échos et que l’incurie du Gouvernement, qui se refuse à saisir le Conseil de la concurrence, devrait en outre permettre à Bernard Arnault de choisir le racheteur de La Tribune ! Lorsque l’on évoque les moyens d’expression publique, la démocratie et le pluralisme sont en jeu ; il nous semble important de le rappeler devant cette Assemblée.

Nul n’ignore que la campagne menée depuis septembre par Patrick de Carolis, président de France Télévisions, afin d’obtenir soit une coupure publicitaire dans les programmes dits de flux, soit une redevance, a échoué sur les deux fronts. Quoi qu’il en soit, vous ne manquez pas de culot lorsque vous invoquez le pouvoir d’achat des citoyens pour justifier votre refus d’augmenter de deux euros le montant d’une redevance qui n’a pas progressé depuis 2002 et qui a même baissé de 50 centimes d’euro lors de la réforme de 2004 - comme le rappelle M. Martin-Lalande dans l’exposé des motifs de l’amendement 250 -, surtout après les mesures fiscales que vous avez fait voter l’été dernier ! Vous ne vous en tirerez pas à si bon compte !

L’audiovisuel public doit bénéficier de moyens supplémentaires, car il ne pourra plus compter indéfiniment sur les recettes publicitaires, lesquelles alimentent de plus en plus Internet, qui est en passe de devenir le plus important des médias. Dans ce contexte, vous ne pouvez vous contenter de vous targuer de respecter les contrats d’objectifs et de moyens, conclus du reste à la veille de l’élection présidentielle…

N’oublions pas non plus celles et ceux qui travaillent au service de l’audiovisuel public, par exemple les petits producteurs indépendants, qui contribuent à la richesse des programmes et à la diversification de la diffusion, et qui s’inquiètent de la réforme qu’envisage Mme Albanel afin de favoriser les diffuseurs comme des conclusions de la mission qu’elle a confiée à MM. Kessler et Richard.

Le groupe SRC votera donc l’amendement 290. La commission des affaires culturelles – j’y insiste – l’a adopté ; l’Assemblée devrait faire de même.

M. Patrice Martin-Lalande, rapporteur spécial – Monsieur Rochebloine, à la suite de la commission élargie que vous avez évoquée, les commissions des affaires culturelles et des affaires étrangères se sont réunies, mais je confirme que la commission des finances n’a pu quant à elle examiner l’amendement.

M. le Président – Monsieur Kert, vous avez la parole, mais soyez bref.

M. Christian Kert, rapporteur pour avisIl me semble difficile de retirer un amendement que la commission des affaires culturelles a adopté…

M. Michel Françaix – En effet !

M. Christian Kert, rapporteur pour avis… même si je m’aperçois qu’il était, comme l’a montré M. Martin-Lalande, quelque peu prématuré. Je souhaiterais donc, Monsieur le ministre, que nous convenions de prendre le problème en considération au cours de l’année à venir, notamment à l’occasion des états généraux de l’audiovisuel.

Plusieurs collègues ici présents sont spécialistes de l’audiovisuel : associez-les à cette réflexion. On ne peut se permettre de passer à côté d’un enjeu aussi important. Monsieur le ministre, mon tempérament, hérité d’un père breton, est quelque peu… granitique (Sourires). Je ne retirerai donc pas cet amendement adopté par la commission et l’année prochaine, au lieu de déposer à un amendement à deux euros, j’en déposerai un à quatre euros !

L’amendement 290, mis aux voix, n’est pas adopté.

M. Patrice Martin-Lalande, rapporteur spécialComme je l’ai expliqué, l’amendement 250 traduit budgétairement l’engagement pris par le Gouvernement d’apporter des financements dans le cadre des contrats d’objectifs et de moyens. Pour répondre à M. Bloche, si l’évolution des recettes publicitaires constitue un élément nouveau, les contrats pourront et devront faire l’objet d’un avenant.

M. Éric Woerth, ministre du budget – Je veux remercier M. Kert et lui assurer que je veillerai au respect de nos engagements… car mon tempérament d’alpiniste me fait apprécier le granit (Sourires). Monsieur le rapporteur spécial, je pense que les indexations rigidifient le budget ; or les parlementaires doivent pouvoir garder leur liberté de faire évoluer les prestations. Il existe bien un problème pour 2009. Mais compte tenu des engagements que j’ai pris et de l’obligation que nous aurons de redéfinir le mode et la répartition des financements, je vous serais reconnaissant de bien vouloir retirer cet amendement.

M. Michel Françaix – J’ai pris acte que le Gouvernement veille au renforcement du rôle du Parlement en estimant qu’il n’est pas nécessaire que les ministres concernés se déplacent pour l’examen de leurs crédits.

M. Patrice Martin-Lalande, rapporteur spécialMme Albanel a été entendue pendant trois heures en commission élargie !

M. Michel Françaix – Je ne crois pas non plus que nous ayons obtenu une réponse concernant l’origine des 18,5 millions d’euros.

Nous devons faire face à trois problèmes. D’abord, les recettes de l’audiovisuel public français atteignent la moitié seulement des recettes des services publics d’autres pays comme la Grande-Bretagne ou l’Allemagne. Cela empêche nos créateurs de s’exprimer ; songez que la part de la France dans la coproduction européenne Guerre et Paix n’a été que de 15 % !

Ensuite, le décalage entre l’audiovisuel public et l’audiovisuel privé est de plus en plus important. Seuls TF1 et M6 peuvent encore s’aligner pour la rediffusion des compétitions sportives, dont le coût augmente de 15 % chaque année ! L’inflation et l’évolution des moyens technologiques sont telles que pour réussir à faire les mêmes choses que l’année précédente, il faut en moyenne 8 à 9 % de moyens supplémentaires ! Enfin, France 2 et France 3 ne réaliseront pas – de loin – leurs recettes publicitaires sur le dernier trimestre et nous aurons beau réfléchir ensemble sur la publicité, cela ne règlera rien !

Si nous voulons donner davantage d’argent pour la création, si nous voulons combattre le formatage des programmes, nous devons adopter cet excellent amendement qui, j’espère, sera défendu jusqu’au bout et avec ardeur par son auteur !

M. François Rochebloine – Je repose à mon tour la question : d’où seront prélevés les 18,5 millions supplémentaires destinés à France 24 ?

M. Éric Woerth, ministre du budget – Nous avons stabilisé les ressources de France 24 autour de 70 millions. La convention prévoit 88 millions. Nous attendons que la réflexion engagée sur la réforme de l’audiovisuel public extérieur aboutisse pour nous préoccuper de trouver ces moyens supplémentaires. La représentation nationale sera informée en temps et en heure.

M. Patrice Martin-Lalande, rapporteur spécialNul n’étant prophète en son pays, l’amendement que j’avais déposé en mon nom a été rejeté par la commission des finances. La question est de savoir comment les contrats d’objectifs et de moyens seront honorés : la redevance doit demeurer l’élément essentiel de financement, puisque nous ne voulons pas voir croître les crédits budgétaires ni la place de la publicité. Rappelons que la réforme de la collecte de la redevance a tout de même permis des économies s’élevant chaque année à une centaine de millions d’euros. J’ai bien compris que le problème était réglé pour 2008 et que nous devrons travailler ensemble pour 2009. Cet amendement avait surtout pour objectif d’ouvrir le débat…

M. Michel Françaix – Et de le fermer !

M. Patrice Martin-Lalande, rapporteur spécial – Je le retire.

M. Michel Françaix – Je le reprends !

L'amendement 250, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Patrice Martin-Lalande, rapporteur spécial – L’amendement 23 rectifié vise à maintenir l’exonération de la redevance pour les personnes handicapées. Cela concerne 27 868 foyers, pour un coût de trois millions d’euros. Compte tenu du rôle que joue l’audiovisuel pour ces personnes, il serait judicieux d’adopter cet amendement.

M. Éric Woerth, ministre du budget Avis favorable. La réforme de la collecte de la redevance, couplée à celle de la taxe d’habitation, a permis des économies et a rendu nécessaire l’harmonisation des règles d’exonération de chaque impôt. Nous sommes arrivés au terme de la période de transition de trois ans que le Parlement avait décidé d’accorder aux bénéficiaires. Ceux-ci se répartissent en deux catégories : les invalides et les personnes âgées de plus de 65 ans. Je pense que, pour ces derniers, l’exonération de redevance ne s’impose pas, le dispositif actuel étant suffisant. Je suis en revanche favorable à la pérennisation du dégrèvement pour les personnes mutilées, invalides ou atteintes d’une incapacité d’au moins 80 % – et je lève le gage.

M. Patrick Bloche – Puis-je me permettre de réveiller un peu notre hémicycle ? Cet amendement soulève un problème que nous avions annoncé dès la réforme de la redevance audiovisuelle de 2004. Nous avions parlé alors de bombe à retardement : eh bien cette bombe va exploser l’année prochaine !

En 2004, le Parlement a voulu amortir les conséquences de l’adossement de la redevance à la taxe d’habitation, car il avait conscience que les contribuables exonérés de la taxe d’habitation n’étaient pas nécessairement les mêmes que ceux exonérés de la redevance : beaucoup de personnes âgées, notamment, acquittaient la première sans être soumises à la seconde. Afin de ménager une transition pour ces contribuables, nous avons prolongé de trois ans l’exonération de la redevance, et cela concernait encore 800 000 foyers fin 2006. Mais l’année prochaine, de très nombreux foyers vont se voir soumis du jour au lendemain à la redevance dont ils étaient exonérés jusqu’à présent. M. Martin-Lalande essaye d’amortir le choc pour les plus fragiles. Non seulement il faut voter son amendement, chers collègues de la majorité, mais il faut penser dès maintenant aux conséquences de la fin de la période transitoire.

L'amendement 23 rectifié, mis aux voix, est adopté.

La séance, suspendue à 11 heures 5, est reprise à 11 heures 20.

VILLE ET LOGEMENT

M. Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique – Avec plus de 7 milliards de crédits en 2008, le budget de la mission « Ville et logement » est au rendez-vous des engagements pris depuis 2002, en faveur de la rénovation urbaine, de la cohésion sociale et de l’égalité des chances. Il traduit la priorité accordée par le Gouvernement à la mise en œuvre de la loi relative au droit de logement opposable. En consacrant 1,1 milliard à la construction de nouveaux logements sociaux et à l’amélioration du parc existant, nous respectons l’objectif de 142 000 logements sociaux introduit par la loi DALO – ce qui signifie un effort important, comparé aux 100 000 logements financés en 2006, et aux 117 000 financés en 2007.

Cela se double d’un effort en direction des ménages les plus modestes : 70 % des crédits destinés à favoriser l’accès au logement – 5 milliards – sont consacrés aux aides personnelles. L’APL sera revalorisée sur la base de l’indice de référence des loyers ; c’est un progrès important.

Ce projet poursuit également l’œuvre entreprise depuis 2008 pour la politique de la ville, dans le cadre du plan en faveur des banlieues. Plus de 400 millions seront consacrés au soutien aux actions de proximité menées par les collectivités locales et les associations, dans le cadre notamment des contrats urbains de solidarité et de cohésion sociale, et 400 autres millions aux exonérations de charges pour les entreprises implantées en zone franche urbaine élargie.

Enfin, plus de 280 projets de rénovation urbaine ont déjà été validés, pour un montant de 32 milliards d’investissements, auxquels l’ANRU contribue à hauteur de 9,4 milliards. Ces chiffres montrent l’effet de levier de la politique de rénovation urbaine (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Pierre Gosnat – Monsieur le ministre d’astreinte,… (Protestations sur les bancs du groupe UMP et du groupe NC)

M. François Rochebloine – Vous aussi, vous êtes d’astreinte !

M. Pierre Gosnat – …si les objectifs annuels de performance sont ambitieux, ce budget n’est pas à la hauteur. Le programme « Rénovation urbaine », dont la présentation indique que les objectifs sont de renouveler l’offre de logements sociaux, d’améliorer les conditions de vie dans les quartiers et de renforcer la mixité sociale dans les zones « sensibles », ne bénéficie que de 385 millions d’euros, une somme dérisoire au regard des 15 milliards de cadeaux fiscaux que vous avez fait voter cet été. Un article du Monde du 13 novembre dénonce la pénurie de logements que pourrait créer votre politique. Par ailleurs, 5 milliards sont consacrés à l’aide à l’accès au logement, pour 6 millions de personnes, dont 90 % ont des revenus égaux ou inférieurs au SMIC. Si ces aides sont nécessaires, la politique du logement ne peut en rester à de telles actions, dont l’efficacité est limitée.

La seule solution viable, dans le contexte de crise que nous connaissons, ce serait la construction massive de logements sociaux, et l’application par tous de la loi SRU et du quota de 20 % de logements sociaux dans chaque commune. Aujourd’hui, 1,3 million de foyers sont en attente de logement, et avec la loi relative au droit au logement opposable, le nombre de requêtes va exploser. Ce budget ne tient pas les promesses du Gouvernement en la matière. Les associations pour la défense du droit au logement évaluent le manque à 1 milliard. Le Gouvernement ne sera pas en mesure d’appliquer la loi DALO, ni les recommandations du comité de suivi. Ne soyez donc pas étonné des manifestations de détresse qui se multiplient en cette période de grand froid ! Dans ce contexte, notre groupe dénonce l’annonce par le Gouvernement de la vente de 40 000 logement sociaux.

Nous œuvrons, quant à nous, pour un véritable service public du logement, auquel je suis, en tant que maire d’Ivry-sur-Seine – qui compte 37 % de logements sociaux –, particulièrement attaché. Mais je conçois que cette majorité, fervente de l’Europe libérale, pense différemment, la Commission européenne ayant introduit le secteur du logement dans le champ de la concurrence.

Enfin, en commission élargie, la ministre, outre le fait qu’elle a éludé nombre de nos questions, a déclaré que la date de décembre 2008 pour l’application de la loi DALO ne serait pas respectée. Pour toutes ces raisons, notre groupe votera contre ce budget.

M. Philippe Pemezec – Quelle surprise !

M. François Rochebloine – Le rapport de la Cour des Comptes pour le Sénat relève les insuffisances de la politique de la ville. Les griefs exposés dans ce rapport doivent retenir toute l’attention du Gouvernement. La politique de la ville est indispensable à nos quartiers en difficulté ; nous soutenons donc le programme national de rénovation urbaine, dont les opérations doivent être simplifiées. Il est en outre impératif de sécuriser le financement des associations et des centres sociaux ; nous partageons donc la volonté de développer les conventions pluriannuelles et d’attribuer plus rapidement des financements, en début d'année.

Nous nous félicitons de la poursuite de l'effort de l'État en matière de logements sociaux, avec le financement de 142 000 logements en 2008, dont 20 000 très sociaux. Il existe, toutefois, un décalage entre le nombre de logements financés et ceux effectivement mis en chantier ; le taux de réalisation doit être amélioré.

Le groupe Nouveau Centre rappelle son attachement au respect de la règle des 20 % de logements sociaux et partage la détermination de la ministre à encourager les maires bâtisseurs. Comme elle, nous souhaitons que l’échéance pour l’application de la loi DALO, au 1er décembre 2008, soit tenue, et nous appelons à ce que les propositions du comité de suivi soient suivies d’effet. Enfin, nous partageons le souhait de voir cette loi appliquée au-delà des seuls quartiers dits sensibles, de manière à casser la logique des ghettos.

C'est donc avec la volonté de voir l'ensemble des dispositifs visant la politique de la ville et du logement gagner en efficacité que nous donnerons un avis favorable aux crédits de cette mission.

M. Michel Piron – Cette année encore, le débat budgétaire donne l’occasion de rappeler que toute politique du logement requiert des réponses de court, moyen et long termes.

S’agissant du court terme, 5 664 places d’hébergement sont ouvertes depuis le 15 septembre, les crédits affectés aux CHRS augmentent de 11% et ceux des maisons de stabilisation de 33 %.

Pour répondre aux besoins du moyen terme, 425 000 logements ont été construits en 2006 et 415 000 le seront cette année. Le Président de la République a fixé l’objectif très ambitieux de 500 000 logements par an pendant le quinquennat, dont 120 000 à 140 000 logements sociaux. Las, nous sommes toujours confrontés à un très fort déficit de l’offre, avec au moins 900 000 logements manquants, malgré un effort d’incitation fiscale sans précédent. Toute mesure tendant à relancer l’offre de logement est bienvenue et nous saluons, cette année encore, l’effort consenti pour le prêt à taux zéro et le Pass foncier. Le programme national de rénovation urbaine concernera les 2,9 millions d’habitants de quelque 500 quartiers : il nous reste à relever un immense défi qualitatif pour mettre encore un peu plus d’urbanité dans l’urbain.

Envisager le long terme conduit à s’interroger sur le devenir des grandes métropoles et de leur conurbation, qu’il s’agisse de l’Île-de-France, de Rhône-Alpes et du Genevois ou de la région PACA. Rien n’aboutira si l’on ne résout pas ensemble les questions du foncier, de la réglementation et de la gouvernance.

Le foncier reste l’obstacle majeur, dans la mesure où il reste rare et cher : à Paris, 20 000 logements sortent de terre alors qu’il en faudrait au moins 60 000. Il est urgent d’envisager un dispositif fiscal réellement susceptible d’améliorer la disponibilité foncière dans les régions sous tension.

Autres impératifs : simplifier la réglementation et rendre plus cohérente la gouvernance des opérations. Aujourd’hui, toutes les collectivités veulent intervenir…

M. Jean-Paul Lecoq – Pas Neuilly !

M. Michel Piron – …et chacun se pose les mêmes questions : lieu d’habitation, lieu de travail, organisation des déplacements entre les deux, etc. Souvenons-nous que Paris n’est pas l’Ariège ni Lyon la Corrèze, et tâchons de concevoir des politiques territoriales qui permettent aux différentes entités de s’intégrer harmonieusement.

C’est la durée qui donne du sens à la politique du logement et nous apprécions, Monsieur le ministre, que l’action du Gouvernement tende précisément à s’inscrire dans la durée. C’est pourquoi nous voterons ces crédits (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Jean-Yves Le Bouillonnec – Il est temps, Monsieur le ministre, de dresser un constat de la réalité vécue par un nombre croissant de Français : le « mal-logement » gangrène notre société, et il ajoute à la dureté de leurs conditions de vie le sentiment d’être sacrifiés sur l’autel du libéralisme qui, s’il n’a pas toujours été voulu, n’a jamais été combattu (Murmures sur les bancs du groupe UMP). Malgré la communication exacerbée et indécente des gouvernements successifs, la crise du logement s’aggrave, au point de toucher aujourd’hui l’ensemble des Français : 1,5 million de demandes de logements sociaux restent en souffrance, 90 000 personnes sont SDF et 900 000 sans domicile personnel, 2 millions survivent dans un logement sans confort.

M. Philippe Pemezec – Qu’avez-vous fait entre 1997 et 2002 ?

M. Jean-Yves Le Bouillonnec – Alors oui, vous pouvez dire que la construction progresse… (Exclamations sur les bancs du groupe UMP) Mais les programmes livrés ne correspondent absolument pas aux besoins des demandeurs et les moyens financiers mobilisés sont donc inadaptés.

Mme Annick Lepetit – Eh oui, hélas !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec – Égoïsme, ségrégation et clientélisme se répandent, sans que l’État en prenne la mesure, châtie les responsables ou corrige les effets (Protestations sur les bancs du groupe UMP), en réaffirmant notamment la nécessité de respecter l’article 55 de la loi SRU. Depuis 2002, vous vous êtes employés à ravaler le logement au rang de produit fiscal et de marchandise ordinaire. Pis, en juillet dernier, vous n’avez eu de cesse de prendre une mesure – la déduction des intérêts d’emprunts – dont tous les spécialistes s’accordent à reconnaître que le premier effet sera de renchérir le prix des logements !

Il me faut à présent décevoir ceux qui pouvaient encore attendre que le présent budget soit à la hauteur des enjeux : scandaleusement dépourvu d’ambition, il frise le ridicule en se fixant pour ambition ultime de stabiliser une situation désastreuse ! (Même mouvement) Et alors qu’il est déjà en dessous de tout, gageons que les errements de son exécution – de gels en annulations de crédits – le rendront plus minable encore…

Mme Marie-Hélène des Esgaulx – Cela suffit !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec – Mardi dernier, en commission élargie, Christine Boutin nous a fait comprendre que ce budget n’était que très peu le sien et qu’il fallait attendre 2009…

M. Philippe Pemezec – N’importe quoi !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec – Attendre, Monsieur le ministre ? Le peuvent-ils, les demandeurs de places d’urgence et les mal logés ? C’est aujourd’hui qu’il faut agir, en corrigeant ce budget de défausse et d’irresponsabilité. (Protestations sur les bancs du groupe UMP)

Monsieur le ministre, la réalité, c’est qu’en 2006, seulement 17 000 logements sociaux de plus qu’en 2000 ont été mis en chantier… (Exclamations sur les bancs du groupe UMP) Combien faudrait-il construire de PLA insertion – destinés aux plus modestes – pour résorber les listes d’attente, et, a fortiori accélérer les sorties définitives de dispositifs d’urgence ? Au moins 40 000, là où vous n’en proposez que 20 000 !

M. Philippe Pemezec – Débranchez-le !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec – Autre constat amer : les opérations de renouvellement urbain et la loi DALO risquent d’aggraver encore la crise du logement et de l’hébergement.

Le logement, chers collègues de la majorité, ne doit pas être considéré seulement comme un produit fiscal, et notre groupe dénoncera sans relâche votre politique fiscale, ruineuse pour l’État et sans effet pour le logement social. En 2008, la déduction des intérêts d’emprunt coûtera 440 millions – soit autant que le PTZ ; en 2013, la dépense afférente pourrait atteindre 4,5 milliards ! Le « Robien » – qui crée des logements vacants ! – coûtera 400 millions et nous défendrons un amendement demandant sa suppression, en vue d’augmenter la part de logements très sociaux dans le présent budget. Au total, les avantages fiscaux liés à l’investissement locatif – « Borloo populaire », « Robien », etc. – représentent 836 millions, soit une progression de 26 % par rapport à l’an dernier (Interruptions sur les bancs du groupe UMP).

L’indécence de ces cadeaux fiscaux est d’autant plus flagrante que la dotation de solidarité urbaine, destinée à la péréquation, subit une coupe de 30 millions ! Votre budget, Monsieur le ministre, est en total décalage avec la réalité que vivent les Français…

Mme Marie-Hélène des Esgaulx – C’est vous qui êtes décalé ! (Rires sur les bancs du groupe UMP)

M. Jean-Yves Le Bouillonnec – Alors que le logement est devenu la première dépense des ménages – 24,7 % de leur budget –, devant l’alimentation, et que le pouvoir d’achat baisse, la part de l’État ne progresse pas suffisamment dans l’aide à la solvabilisation des ménages : selon l’INSEE, entre 2002 et 2006, la contribution des aides à la solvabilité des ménages a diminué de 10,3%.

M. le Président – Veuillez conclure.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec – Nous déposerons un amendement pour corriger la tendance (Rires et exclamations sur les bancs du groupe UMP).

Ultime mesquinerie de votre part : la participation d’un euro demandé aux six millions de bénéficiaires des aides, soit une économie de 72 millions réalisée sur le dos des locataires. Compte tenu des avantages fiscaux que votre budget octroie à d’autres, une telle mesure est proprement indécente (Bruit sur les bancs du groupe UMP).

Le Gouvernement feint d’ignorer qu’il est le garant du droit au logement et il mène une politique odieuse. Bien entendu, le groupe SRC votera contre l’adoption de ces crédits (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC).

ARTICLE 33 ET ÉTAT B

M. François Scellier, rapporteur spécial de la commission des finances – Pour l’application de la loi DALO, l’État est tenu, à compter du 1er décembre 2008, de garantir un logement stable aux publics prioritaires. Le Gouvernement a donc lancé une politique volontariste de développement du parc d’hébergement d’urgence, dans le cadre notamment du plan d’action renforcée pour les sans-abri. Toutefois, il nous est apparu essentiel de développer rapidement des places d’hébergement stables, permettant aux personnes concernées de retrouver leur autonomie.

C’est pourquoi la commission des finances a adopté l’amendement 225, lequel tend à doubler la dotation destinée à l’hébergement d’urgence, en la portant à 30 millions. A cet effet, nous proposons que soient diminués de 15 millions les crédits du titre II.

Je comprends que cette proposition puisse poser problème, et j’écouterai avec une particulière attention le point de vue du Gouvernement avant de me prononcer personnellement sur l’amendement de la commission des finances.

M. Éric Woerth, ministre du budget Tout à l’heure, M. Gosnat m’a traité de « ministre d’astreinte » : lui-même ne l’est sans doute pas, puisque nous avons à regretter qu’il soit déjà parti ! Quoi qu’il en soit, il ne me semble pas extravagant que le ministre du budget participe à la discussion budgétaire et je rappelle que les ministres concernés par les différentes missions que nous examinons ce matin se sont longuement exprimés en commissions élargies. Enfin, je rappelle que la loi de règlement revêt désormais une importance particulière puisqu’elle permet aux ministres de venir présenter aux assemblées l’exécution de leurs crédits.

Monsieur Scellier, je comprends bien votre amendement, mais je vous invite à la retirer : le Gouvernement est comme vous sensible à la situation des personnes qui doivent recourir à un hébergement d’urgence – et 15 millions sont inscrits pour financer les travaux dans les centres –, mais la contrepartie que vous proposez revient à réduire le nombre d’emplois de près de 300 ETPT ; or, si le budget de Mme Boutin est l’un des rares dont le plafond d’emplois augmente, c’est pour permettre l’application de la loi DALO.

M. Michel Piron – Je suis la plupart du temps en parfait accord avec mon collègue François Scellier, mais je voudrais ici appuyer le ministre. Si l’on peut évidemment souhaiter l’augmentation des moyens destinés à l’hébergement d’urgence, gager cet amendement sur une réduction des ressources humaines affectées à la gestion du dispositif mis en place par la loi DALO paraît bien difficile. On pourrait certes imaginer des redéploiements d’effectifs ; mais nous sommes bridés par la LOLF, qui ne nous permet pas, par exemple, d’opérer des transferts entre les effectifs de l’urbanisme – 17 000 personnes – et ceux de la ville et le logement – 3 000 personnes.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec – Nous approuvons l’amendement de M. Scellier, qui signifie simplement que la ligne relative à l’hébergement d’urgence est insuffisamment dotée – ce dont tout le monde peut convenir au vu de ce qui se passe dans nos villes. Certes, je concède à M. Piron que la loi DALO suppose des moyens pour être applicable ; cela prouve qu’ils n’étaient pas prévus dès l’origine ! Il va donc falloir en prélever ailleurs…

M. François Scellier, rapporteur spécial – Dans la mesure où l’adoption de cet amendement pourrait rendre difficile l’application de la loi DALO, il me paraît beaucoup moins pertinent, mais je ne peux retirer un amendement de la commission des finances.

L'amendement 225, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec – Notre amendement 258 vise à augmenter de 15 millions la ligne « aide à l’accès au logement ». Ce montant correspond aux aides qui ne sont pas versées aux bénéficiaires en application de la règle selon laquelle on ne verse pas cette aide si elle est inférieure à 15 euros par mois. L’argument est d’ordre matériel, mais c’est le seul exemple d’un droit non respecté pour un tel motif ; et l’on pourrait très bien, comme nous-mêmes et certains collègues de la majorité l’avions suggéré, alléger les coûts de gestion en adoptant le versement par trimestre.

La commission des affaires économiques, tous groupes confondus, avait déjà obtenu de haute lutte de ramener le seuil de 24 à 15 euros. On ne peut ainsi priver certains de nos concitoyens de ce à quoi ils ont droit – et qui n’est pas rien : 15 euros par mois, cela correspond à peu près à une mensualité de loyer sur l’année.

Nous sommes contraints de prendre ces 15 millions sur une autre ligne ; nous avons choisi de réduire, sur la ligne « développement et amélioration de l’offre de logement », les crédits du titre 2, concernant en particulier les programmes de communication.

M. François Scellier, rapporteur spécial – La commission des finances n’a pas examiné cet amendement, mais à titre personnel j’y suis défavorable. Un effort très important est déjà consenti en faveur des aides au logement, les barèmes devant, en application de la loi DALO, être indexés sur le nouvel indice de référence des loyers, et donc augmentés de 2,65 % – soit un effort budgétaire de 220 millions. Cela permet de garantir le maintien du pouvoir d’achat des bénéficiaires, malgré la hausse des loyers.

Par ailleurs, une réflexion est en cours sur la réforme des aides au logement..

M. Éric Woerth, ministre du budget Ce seuil de 15 euros n’a pas changé depuis 1988.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec – Mais si ! Il a été ramené à ce niveau l’an dernier !

M. Éric Woerth, ministre du budget Certes, il y a eu une petite parenthèse. La fixation d’un tel seuil est normale, elle correspond au coût de gestion. Un versement par trimestre ou par année ne serait pas opportun, car la situation des personnes peut changer, et elles auraient alors le désagrément de se voir demander le remboursement des sommes indûment perçues.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec – Monsieur le ministre, je ne vous fais pas du tout grief de ne pas connaître cela dans le détail – c’est l’inconvénient d’un débat avec le ministre du budget plutôt qu’avec le ministre en charge de la mission –, mais je tiens à rappeler que le seuil avait été relevé à 24 euros il y a trois ans et que la commission des affaires économiques unanime a mené combat pour le ramener à 15, ce qui s’est fait l’année dernière – et j’en rends hommage au président Ollier.

N’oublions pas non plus qu’une participation d’un euro par mois est demandée à chaque bénéficiaire de l’APL. Sur qui l’État réalise-t-il ainsi une économie de 72 millions d’euros. Sur les plus nantis ? Non, sur ceux qui sont le plus en difficulté !

La durée des préavis étant généralement de trois mois, il arrive fréquemment que l’allocation versée ne corresponde plus à la situation du bénéficiaire. Des remboursements sont alors demandés sans que cela pose de problème. Votre argument ne tient donc pas.

L'amendement 258 mis aux voix, n'est pas adopté.

Les crédits de la mission « Ville et logement », mis aux voix, sont adoptés.

ART. 60

L'article 60 mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 60

M. Éric Woerth, ministre du budget – Dans l’état actuel de la législation, les communes et les établissements publics intercommunaux cesseront de bénéficier d’une aide financière de l’État pour la réalisation des aires d’accueil destinées aux gens du voyage à compter du 31 décembre.

Afin de ne pas gêner les projets en cours, l’amendement 67 rectifié tend à accorder un délai supplémentaire d’une année. Mais par souci d’équité vis-à-vis des collectivités qui se sont mises en conformité avec la loi dans les délais impartis, la part des dépenses subventionnée par l’État serait alors ramenée de 70 à 50 %.

M. François Scellier, rapporteur spécial – Avis favorable. Il est utile d’accorder un supplémentaire, et juste de réduire le financement de l’État dans ce cas.

M. Jean-Pierre Gorges – J’aimerais déposer un sous-amendement tendant à maintenir le taux de participation de l’État à 70 %.

M. le Président – Votre demande est irrecevable.

L'amendement 67 rectifié, mis aux voix, est adopté.

M. le Président – Nous en avons terminé avec l’examen des crédits de la ville et du logement.

CULTURE

M. Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique – En 2008, les crédits destinés à la culture s’élèveront respectivement à 2,89 et 2,77 milliards d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement.

L’effort en faveur du patrimoine sera ainsi maintenu : les moyens alloués aux monuments historiques atteindront 304 millions d’euros, dont près de 200 millions pour les travaux d’entretien et de restauration dans les régions. Un effort particulier portera sur le patrimoine appartenant aux collectivités locales et aux propriétaires privés – 123 millions sont prévus à ce titre, soit 20 millions de plus que l’an dernier. Les grands projets d’investissement seront également poursuivis, notamment le schéma directeur de Versailles, la rénovation du quadrilatère Richelieu et la construction du centre national des archives de Pierrefitte-sur-Seine, qui bénéficiera d’une création de 60 postes en 2008.

Ce budget consolide également les moyens alloués à la création, qui avaient déjà beaucoup progressé au cours des dernières années. En 2008, ces crédits s’élèveront à 739 millions en crédits de paiement. Les arts vivants bénéficieront d’environ 640 millions, affectés en priorité aux institutions en région, notamment en faveur du développement du réseau des salles de musique et des auditoriums. Avec 8 millions d’euros de crédits supplémentaires, les arts plastiques font également l’objet d’un effort particulier. Le ministère de la culture entend notamment soutenir la création contemporaine.

J’en viens au programme « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture » : priorité sera donnée à l’éducation artistique et culturelle, aux politiques d’accès à la culture, au développement de réseaux d’enseignement supérieur, aux efforts de numérisation et à l’organisation de l’année du dialogue interculturel.

J’ajoute que le processus d’optimisation des moyens de fonctionnement du ministère, déjà engagé depuis déjà plusieurs années, se poursuivra cette année encore : les crédits de fonctionnement diminueront ainsi de 5% hors loyers.

Enfin, grâce au dynamisme des taxes affectées, les crédits destinés à soutenir les industries cinématographiques et audiovisuelles ainsi que l’expression radiophonique locale progressent respectivement de 4,5% et 4%.

M. Nicolas Perruchot Le groupe Nouveau Centre appréciera ce budget à l’aune du décret du 24 juillet 1959, qui fixait au ministère de la culture l’objectif de rendre accessible les œuvres capitales de l'humanité – et d'abord de la France – au plus grand nombre possible de Français, d’assurer la plus vaste audience à notre patrimoine culturel et de favoriser la création des œuvres de l'art et de l'esprit qui l'enrichissent.

Outre ses aspects purement créatifs, la culture est également une richesse économique. C’est pourquoi nous saluons la hausse de 3 % des crédits alloués à cette mission.

Compte tenu du programme « Recherche », 43 % des crédits sont alloués à la valorisation et la préservation du patrimoine, ce qui en fait une priorité de l’action culturelle. Témoignage de notre histoire, notre patrimoine participe au rayonnement culturel de la France, et possède une valeur touristique dont l’impact économique est considérable. Parce que la préservation de ce patrimoine nécessite à l’évidence un soutien aux collectivités locales et aux propriétaires privés, la hausse de 20 millions d'euros des crédits accordés aux monuments historiques n'appartenant pas à l'Etat va dans le bon sens. La restauration historique exigeant un véritable savoir-faire, objet de recherche, nous nous félicitons également que les crédits du programme « Recherche culturelle et culture scientifique » augmentent de 4,7 %.

Expression et outil du lien social, la culture doit être valorisée et appréciée le plus possible à l'échelle locale et individuelle grâce à un maillage territorial riche et actif. Mais la démocratisation culturelle ne se résume pas à la recherche d'une plus grande accessibilité à notre patrimoine : elle dépend aussi de notre capacité à valoriser les potentiels créatifs. L’augmentation de 6 % des crédits alloués à l'éducation artistique et culturelle vient ainsi renforcer une dynamique d'animation culturelle de « terrain » reposant sur les aides aux associations.

J’observe également que l'effort en faveur du spectacle vivant se poursuit – 1 % de crédits supplémentaires cette année ! N’oublions pas toute la contribution de ces activités culturelles à la cohésion sociale et à l’animation des territoires... Le mouvement de décentralisation dans ce domaine devra toutefois se poursuivre en faveur des régions, auxquelles devrait revenir une part du travail encore à la charge des départements et des communes.

L'expression radiophonique locale est un ferment non négligeable de démocratie et de pluralisme. Le groupe Nouveau Centre souhaite donc que les structures associatives concernées bénéficient d'une attention renouvelée de la part du ministère de la culture. Enfin, la réflexion sur la place du livre et de la lecture dans la transmission du savoir devra se poursuivre et porter davantage sur la nécessaire valorisation des supports numériques.

Le groupe Nouveau Centre partage les priorités retenues par ce budget, qui fait un usage rationalisé de la dépense publique. Nous saluons donc l’action du ministère et voterons les crédits de la mission « Culture ».

M. Michel Herbillon – Compte tenu de la révision générale des politiques publiques qui a été engagée et de notre ardente obligation de maîtriser la dépense publique, ce budget est plus qu’estimable. Avec plus de 3,77 milliards d’euros de crédits, le ministère de la culture disposera en effet de moyens pour agir.

On pourrait certes souhaiter un effort encore plus grand en faveur de l’entretien et de la restauration des monuments historiques, mais avec un peu plus de 303 millions de crédits en 2008, et compte tenu du coup de pouce donné aux monuments appartenant aux collectivités locales et aux particuliers, nul ne peut nier que le Gouvernement fasse du patrimoine une priorité.

M. Michel Françaix – Eh bien, si ! Nous le nions ! (Sourires).

M. Michel Herbillon – Par ailleurs, nous avons pris bonne note des engagements souscrits par la ministre en commission élargie : une ressource extrabudgétaire pérenne pourrait être accordée au patrimoine afin que les crédits disponibles augmentent conformément aux vœux formulés par le Président de la République à la Cité de l'architecture. Vous pouvez également compter sur notre soutien à tout assouplissement des règles applicables aux propriétaires privés en matière de mécénat.

Les crédits alloués au spectacle vivant, qui dépassent 640 millions, sont donc consolidés à un bon niveau…

M. Michel Françaix – Non !

M. Michel Herbillon – …qui permet de faire vivre le réseau de compagnies conventionnées, de scènes nationales, d'orchestres, d'opéras et de centres dramatiques le plus dense d'Europe. Certains directeurs d'opéras de région, qui s’inquiètent des menaces de réduction, voire de suppression de leurs subventions, auraient toutefois besoin d’être rassurés.

Quant aux grands projets, même si la revue générale des politiques publiques doit conduire à réexaminer certains d’entre eux, on ne peut que se réjouir de la rénovation du quadrilatère Richelieu, de la poursuite du schéma directeur de Versailles ou des projets du grand auditorium de Paris et du centre des archives de Pierrefitte.

M. Michel Françaix – Et l’île Seguin ?

M. Michel Herbillon – En outre, les grands projets d’investissement en faveur des régions sont rééquilibrés, notamment au profit de musées ou de salles destinées au spectacle vivant.

D’autre part, les crédits consacrés à l’industrie du cinéma et à l'éducation culturelle et artistique progressent fortement, comme les moyens alloués aux arts plastiques, qui augmentent de plus de 8 % ?

Au-delà du budget, le groupe UMP tient à exprimer la confiance qu’il porte à une ministre et à un Gouvernement décidés à repenser et à renouveler notre politique culturelle, conformément à la lettre de mission adressée par le Président de la République à Mme Albanel. Parce que la culture est vivante, parce que les attentes du public changent, parce que les évolutions technologiques, qui ouvrent à la culture des possibilités précieuses, menacent aussi certains secteurs, le Gouvernement a fait à juste titre de l’adaptation et de la modernisation de notre politique culturelle une priorité. Ainsi a-t-il ouvert en quelques mois de nombreux chantiers : plan de sauvetage de l'industrie du disque, amélioration de la protection des droits d'auteur contre le piratage sur internet, plan en faveur du livre et des librairies indépendantes – annoncé mercredi dernier en Conseil des ministres – ou expérimentation de la gratuité dans les musées, avant sa généralisation. Vous pouvez compter sur le soutien actif du groupe UMP dans cette tâche, Monsieur le ministre (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP).

Mme Marie-Odile Bouillé – Dans la lettre de mission qu’il a adressée à Mme Albanel, le Président de la République précise qu’un bon ministre ne se reconnaîtra pas à la progression de ses crédits… Je ne doute pas que Mme la ministre ne soit une excellente comptable au regard des critères financiers définis par M. Sarkozy, mais son budget est très en deçà des ambitions culturelles que l’on est en droit d’attendre de son ministère…

M. Michel Françaix – Eh oui !

Mme Marie-Odile Bouillé – …surtout dans un pays qui a souvent donné l’exemple en la matière.

Le groupe SRC s’inquiète donc, comme les acteurs culturels, d’une stagnation que votre maîtrise de la magie des chiffres ne suffira pas à masquer.

M. Michel Françaix – Un vrai tour de passe-passe ! (Sourires)

Mme Marie-Odile Bouillé – Exactement. La hausse de 3,2 % en crédits de paiement que vous invoquez tombe à 0,25 % si l’on tient compte de la rebudgétisation de la taxe affectée au centre des monuments nationaux. Le budget de la culture augmente moins que l'inflation prévue pour 2008.

Au nom d'une vision étriquée de la place de l'État et du service public de la culture, vous remettez en cause de grands travaux déjà lancés ou annoncés : le musée des civilisations de l'Europe et de la Méditerranée, le Palais de Tokyo et l'île Seguin.

M. Michel Françaix – Hélas !

Mme Marie-Odile Bouillé – Comment assurerez-vous aux jeunes la gratuité des musées et des monuments, sauf à en faire peser le coût sur les collectivités locales, comme vous en avez pris l’habitude ?

Depuis 2002, les baisses et les gels des crédits affectés à la sauvegarde du patrimoine monumental et archéologique ont plongé dans une situation catastrophique un secteur qui contribue pourtant à attirer les touristes étrangers et constitue, grâce à la restauration, un vivier d'emplois à la fois qualifiés et non délocalisables. Comme les professionnels, nous nous inquiétons de voir sa dotation stagner, voire diminuer à nouveau.

Quant au soutien à la création, à la production et à la diffusion du spectacle vivant, qui devrait constituer l’une de vos priorités, la « consolidation » dont vous parlez signifie tout simplement que les crédits n’augmentent pas ! C’est pourtant en diversifiant l’offre culturelle et en sachant prendre des risques que l’on démocratise la culture, et non en aidant, comme le souhaite M. Sarkozy, les seules créations qui correspondent aux attentes du public, car c'est l'offre qui crée la demande, et non l'inverse. Pourquoi ne pas faire confiance aux professionnels au lieu de chercher, au nom d’objectifs purement comptables, à les transformer en simples promoteurs de la téléréalité, qui plaît tant au public ?

L'enseignement artistique n'est pas mieux doté : les aides aux établissements d'enseignement spécialisé de la musique, de la danse et du théâtre, qui relèvent des collectivités locales, subissent une baisse de 2 millions !

Quant aux actions qui favorisent l'accès à la culture, malgré vos ambitions affichées, vous les amputez de 12 millions indispensables aux associations, aux fédérations d'éducation populaire et à tous les acteurs de terrain qui incitent les publics les plus éloignés de la culture à fréquenter les lieux de diffusion et d'échange, notamment dans les zones rurales, les zones prioritaires, ou les cités. Quel cynisme ! La démocratie culturelle est pourtant aussi essentielle que la démocratie politique et sociale à la formation des citoyens de demain.

Dans ce budget dépourvu de l’ambition à long terme dont la culture a besoin, on reconnaît le budget d’austérité, « contraint », auquel Mme Albanel a elle-même avoué, devant la commission des affaires culturelles, être réduite. Nous ne pouvons que porter cette franchise à son crédit, mais, quant aux crédits de son ministère, le groupe SRC ne saurait les voter ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC).

M. Jean-Paul Lecoq – Monsieur le ministre intermittent de la culture (Sourires sur les bancs du groupe GDR et du groupe SRC), vous vous félicitez des crédits alloués à la culture. Regardons cela de plus près.

En matière de gestion du patrimoine – responsabilité régalienne –, la hausse ne doit pas masquer, au nom de la décentralisation qu’invoque le Gouvernement, un transfert des charges aux collectivités. La préservation de l’égalité territoriale incombe elle aussi à l’État. N’oublions pas que le patrimoine est national ! De même, l’augmentation des crédits attribués au CNC peut être une bonne chose si elle permet à l’État de faire œuvre de régulation sur Internet ou dans les grands médias afin de venir en aide aux industries culturelles et d’en favoriser le développement.

En revanche, nous déplorons la réduction des crédits alloués aux DRAC au titre du spectacle vivant, qui risque de pénaliser les structures les plus décentralisées, c’est-à-dire celles qui assurent une diffusion culturelle de proximité, les grandes scènes étant quant à elles plutôt épargnées. Ainsi, la DRAC Île-de-France a déjà annoncé la diminution de ses aides au spectacle vivant. Or, la réforme des annexes 8 et 10 de l’assurance chômage continue d’exclure de la profession des milliers d'artistes et de techniciens du spectacle vivant, menaçant le cœur même de la création.

Le texte parle fort peu de création, réservant l’aide publique aux grandes structures ou à la diffusion, notamment dans les médias, des produits culturels chers aux industries et garants de profits. Pour éviter que l’audimat ne continue de dicter leurs programmes à des médias, audiovisuels ou électroniques, financés par la publicité, un fonds de péréquation des rentrées publicitaires de tous les médias est indispensable. Ainsi l'audiovisuel public et les télévisions associatives retrouveraient-ils une véritable liberté de programmation et la chaîne culturelle Synapse, dirigée par Antoine Spire, ne serait-elle plus réduite à solliciter le privé et les collectivités pour se constituer un budget…

L'explosion numérique constitue un autre défi. Si le privé maîtrise seul l'équipement permettant la diffusion numérique des films en salle, il privilégiera les films les plus rentables. Une intervention publique, notamment par l’intermédiaire du CNC, doit permettre aux salles indépendantes de s’équiper et définir un cahier des charges préservant la diversité des films programmés.

En énumérant dans sa lettre de mission les fonctions que Malraux attribuait au ministère des affaires culturelles, le Président de la République oublie la deuxième priorité : « favoriser la création des œuvres de l'art et de l'esprit qui enrichissent notre patrimoine culturel » – et non les industries culturelles ou les annonceurs à la Coca-Cola ! La sauvegarde des droits d'auteur sert de cache-sexe à une répartition toujours plus favorable à ceux qui tirent profit de la vente des biens culturels : n’oublions pas que l’immatériel leur assure des taux de profits six à neuf fois plus élevés que les autres secteurs de l’industrie ! Voilà la philosophie de ce budget. Mais la culture se partage, elle ne se consomme pas !

Dans sa fameuse missive, le Président de la République évoque en outre l’échec d’une démocratisation culturelle qui, sans être achevée, a permis un maillage territorial sans précédent ! Il oppose perfidement la demande à une offre qu’il faudrait réduire à tout prix – ce qui explique le véritable harcèlement auquel certaines administrations soumettent les intermittents, qui ne sont pourtant pas des délinquants ! Mais de quelle demande parle-t-on ? des jeux vidéos ? d’un matraquage prétendument conforme au goût du public ? En réalité, on a sacrifié la médiation culturelle, oubliant que le ministère de Malraux était chargé non seulement de la culture, mais aussi de l'éducation populaire. Ce budget ne fait que poursuivre l’amputation des crédits alloués aux structures de spectacle vivant. Enfin la lettre évoque l’enseignement artistique et culturel à l’école. De quels moyens disposez-vous pour honorer ces promesses ?

Ce budget, comme le reste de la politique du Gouvernement, est soumis aux règles du marché : il ne favorise pas la création, n’affiche ni moyens ni outils nouveaux pour une médiation culturelle. Pour toutes ces raisons, le groupe GDR votera contre (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR et du groupe socialiste).

Les crédits de la mission « Culture », mis aux voix, sont adoptés.

Le compte spécial « Cinéma, audiovisuel et expression radiophonique locale », mis aux voix, est adopté.

M. le Président – Nous avons terminé l’examen des crédits relatifs à la culture.

POLITIQUE DES TERRITOIRES

L'ordre du jour appelle l’examen des crédits de la politique des territoires.

M. Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique – Le PLF 2008 recentre la mission « Politique des territoires » sur deux programmes - « Aménagement du territoire » et « Intervention territoriale de l’État » - qui visent à favoriser l’évolution de nos territoires dans le cadre d’un développement durable, solidaire et équilibré.

Avec le programme « Aménagement du territoire » – doté de 288 millions – l’État poursuivra en 2008 ses engagements en faveur de l’attractivité et du développement des territoires, avec des moyens renforcés pour la prime à l’aménagement du territoire ; et en faveur de la cohésion nationale avec les pôles d’excellence rurale et la mise en œuvre des contrats de projets État-région 2007-2013. L’effort consenti sur les crédits de paiement – 378 millions – devrait permettre de revenir en 2009 à des délais de paiement normaux sur le Fonds national pour l’aménagement et le développement du territoire.

L’année 2008 sera la troisième année de la mise en œuvre du programme expérimental « Intervention territoriale de l’État », qui permet aux préfets de région de disposer d’une enveloppe unique de crédits en provenance de divers programmes ministériels : 69 millions d’autorisations d’engagement et 43 millions de crédits de paiement sont inscrits, et si l’on y ajoute les contributions des différents opérateurs, ce programme bénéficiera au total de 158 millions en autorisations d’engagement et 85 millions en crédits de paiement. L’accent sera mis sur la mise en œuvre du plan « Nitrates » en Bretagne – doté de 30 millions – et sur la poursuite – grâce à un effort financier de 96 millions – du plan exceptionnel d’investissement en Corse.

M. Jean-Claude Flory – Cette mission retient tout particulièrement l'attention des élus locaux. Limitée à deux programmes, elle ne retrace qu'une partie de l'action stratégique de l'État dans ce domaine. Il conviendrait d’ailleurs, Monsieur le ministre, de garantir une plus grande stabilité dans le rattachement des programmes du budget général afin que l’action de l’État soit plus lisible. En revanche, le premier document de politique transversale présente un intérêt tout particulier puisqu’il donne une vision d’ensemble.

L’aménagement du territoire est fondé sur la compétitivité, la solidarité territoriale et, bien sûr, le développement durable. Certes, le contexte n'est plus celui de la déprise rurale, puisque les territoires ruraux ont renoué avec l’attractivité. Mais les mutations économiques rapides mettent en difficulté certains bassins de vie, qu’ils soient ruraux ou urbains.

Le Gouvernement a intégré ces enjeux, aidé en cela par la Délégation à l’aménagement et à la compétitivité des territoires – anciennement DATAR – dont je veux souligner ici l’importance. Cette volonté nationale s’exerce selon plusieurs axes. Le lancement des pôles de compétitivité a mobilisé 1,5 milliard – dont 831 millions de l'État. Si le succès est au rendez-vous, la pleine implication des PME et le rayonnement international des pôles, cependant, doivent être renforcés. Les acteurs du monde rural se sont mobilisés pour la mise en place des pôles d’excellence rurale, qui repose également sur des partenariats public/privé. Enfin, trente-quatre contrats de sites ont été signés en faveur de territoires qui ont dû faire face à des mutations économiques profondes. Là encore, l’État a été présent.

L’année 2008 confirmera cette tendance : les crédits, en autorisations d'engagement atteignent 288 millions et 378 millions en crédits de paiement. Nous avons pris bonne note que vous vous êtes engagé à résorber, d'ici à 2009, l'écart entre autorisations d'engagement et crédits de paiement, particulièrement sur les crédits du FNADT. En tant que rapporteur, j’y serai attentif.

Le programme « Interventions territoriales de l'État » connaît une nette progression de ses dotations. Avec le plan « Nitrates », le plan exceptionnel d'investissement en faveur de la Corse, le plan Loire Grandeur Nature, ceux de la filière bois en Auvergne ou du marais poitevin, aménagement du territoire se conjugue avec développement durable. Ce programme, qui fera l’objet d’une évaluation en 2008, a pour intérêt de mettre en exergue des priorités nationales et d'identifier un responsable régional, gestionnaire d’une enveloppe fongible.

En outre, la politique de contractualisation s’est engagée à un rythme plus satisfaisant que lors de la mise en place des précédents contrats de plan État-région en 2000-2001. Parallèlement, la programmation des fonds structurels européens est lancée, ainsi que le nouveau régime de prime à l’aménagement du territoire.

Partout les territoires s'engagent pour renforcer leur attractivité, dans le cadre du développement durable. Des résultats concrets ont été obtenus – téléphonie mobile, internet haut débit, TNT – mais nous devons rester mobilisés. Ce budget déploie un effort particulier en faveur de l'attractivité des zones géographiques en mutation. Les députés du groupe UMP adopteront les crédits de cette mission (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Philippe Duron – S'il est une politique qui intéresse et rassemble la représentation nationale, c'est bien celle de l’aménagement du territoire. Si la Datar et ses délégués successifs ont démontré que volonté politique et solidarité nationale pouvaient combattre les déterminismes économiques et territoriaux, votre budget et les décisions récentes tournent le dos à cette originalité française.

La mission « Politique des territoires » est caractéristique de ce renoncement. Vous n’avez conservé que deux programmes sur les cinq précédents et les crédits ne sont pas à la hauteur des ambitions : les autorisations d'engagement baissent de 10 millions et les crédits de paiement de 16 millions.

Voici trois exemples qui illustreront nos critiques et nos désaccords. Le gouvernement de M. de Villepin a substitué les contrats de projets aux contrats de plan initiés par le gouvernement de M. Rocard. À raison, il a mis en phase les CPER et les programmes opérationnels européens. Mais il a réduit fortement la participation de l'État qui, avec 12,7 milliards, est aujourd'hui inférieure à la contribution européenne sur les territoires, – 18 milliards. L'argument qui consistait à dire qu'un affichage plus réaliste permettrait une meilleure exécution du contrat ne tient plus. Au vu des prévisions budgétaires, nous ne pourrons pas atteindre les 14 % d'engagement prévus pour la première année de contractualisation. Ces contrats privilégient les villes les plus importantes, et ce ne sont pas les pôles d’excellence rurale qui répondront aux besoins des territoires ruraux et des petites villes. Des thématiques importantes ont été abandonnées : l’effort est resté très modeste pour le tourisme par exemple.

Vous avez fait le choix de la compétition au détriment de la solidarité entre territoires. Nous pourrions adhérer – comme les régions d’ailleurs – à cette politique de la compétitivité. Mais vous n’avez pas fait les choix stratégiques qui s'imposent. Certains des 54 pôles peinent à s’affirmer. Les moyens ne sont pas à la hauteur et les projets des grands groupes sont satisfaits au détriment de ceux des PME. Les critères d’éligibilité sont opaques. Quant à la gouvernance, elle a été mal conçue : les collectivités territoriales sont reléguées dans les conseils de financeurs et exclues des comités stratégiques.

Nous connaissons tous l’utilité de la prime à l’aménagement du territoire pour boucler les projets industriels ou tertiaires. Mais votre décision d'élever les critères d'éligibilité de 15 à 20 emplois pour une création et de 35 à 40 emplois pour une extension favorisera les projets des grandes entreprises au détriment des projets endogènes, plus nombreux et plus structurants pour les territoires.

Enfin, la création d’une Agence de financement des infrastructures de transport de France était une bonne idée de M. de Robien, mais elle a été vidée de son sens et de ses moyens par la privatisation des SEMCA – critiquée par le rapport préliminaire de la Cour des comptes. On lui a confié l’achèvement du financement des infrastructures prévu au CPER 2000/2006. Si la dotation de privatisation lui permettra cette année de faire face à ses principaux engagements, elle n’aura plus en 2009 les moyens de financer les projets du CIADT de 2003. Or, ce pays a encore besoin de grandes infrastructures : il faudrait mobiliser 173 milliards dans les trente ans qui viennent.

Le groupe socialiste déplore que ce projet de budget n'ouvre pas de perspectives aux territoires soumis aux restructurations industrielles, pas plus qu'aux villes petites et moyennes – mises à mal par la réforme de la carte judiciaire. Le manque d'ambition de la politique pour les territoires s’ajoute à la réduction des concours de l’État aux collectivités – responsables pourtant de 72 % des investissements publics. La politique des territoires est en panne, comme la décentralisation. Le groupe socialiste n’adoptera donc pas ces crédits (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC).

Mme Martine Billard – La mission « Politique des territoires » est inquiétante à plusieurs titres. Son périmètre a été réduit et son contenu allégé, notamment par le rattachement des programmes « Aménagement, urbanisme et ingénierie publique » et « Information géographique et cartographique » à la mission « Écologie, développement et aménagement durables ». Le programme « Tourisme », quant à lui, a été rattaché en tant que simple action à la mission « Développement et régulation économique ». La mission ne comporte donc plus que deux des six programmes initiaux.

On constate en outre un déséquilibre flagrant entre ces deux programmes. Le programme «Aménagement du territoire», catégorie fourre-tout, bénéficie de la majorité écrasante des crédits – 377,5 millions – tandis que le programme « Interventions de l'État », avec 42,9 millions, se réduit à quelques opérations phares. De nombreux territoires sont ainsi laissés de côté. Comme l'a dit M. Duron en commission élargie, c'est bien le signe d’une remise en cause de la notion de péréquation au profit de celle de compétitivité.

Avec 0,1% des autorisations d’engagement et 0,3 % des crédits de paiement, la mission figure parmi les plus petites du budget. Nous avons pourtant une crise des territoires à tous les niveaux : local, avec la désertification des zones rurales, économique, avec la faillite des commerces de proximité et la fuite des services publics ; social, avec la crise urbaine, durable, avec la dégradation de l'environnement et l'empiétement de l'urbain sur les zones rurales, qui fait des campagnes des zones hybrides « rurbanisées » ; et culturel, avec une fracture entre les ruraux et les citadins, mais aussi entre les Parisiens et les autres. Las, les dotations du programme « Aménagement du territoire » régressent de 400,4 à 377,5 millions.

Le programme « Interventions territoriales de l'État » voit en revanche ses dotations augmenter. Ses grands projets régionaux – Plan eau et agriculture en Bretagne, Plan filière bois en Auvergne Limousin – seront soumis à évaluation en 2008. Son avenir est donc incertain. La hausse de ses crédits est surtout due au plan d'urgence pour le traitement des eaux en Bretagne et au plan exceptionnel d'investissement pour la Corse, les autres projets n’étant soutenus que de manière symbolique.

Se pencher sur la politique des territoires revient à se demander ce qui fait leur attractivité. Il existe un antagonisme profond entre deux visions de la politique territoriale. Celle du Gouvernement repose sur un assujettissement des politiques économiques aux dogmes libéraux. Nous voulons au contraire privilégier la garantie d'un cadre de vie équilibré. L'opposition de l’UMP au schéma directeur d'Île de France est d’ailleurs significative : il s’agit de priver la région de la maîtrise de l'aménagement de son territoire.

Dans son rapport, M. Carrez décrit cette mission comme une « politique offensive illustrée par les pôles de compétitivité ». Tout est dit. Mais mettre les territoires en compétition, ce n'est pas encourager le lien social et environnemental entre les espaces. Ce budget n'a pas pour objectif le rééquilibrage, la solidarité et le respect de l'environnement. Notre groupe votera donc contre (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR et sur plusieurs bancs du groupe SRC).

Les crédits de la mission « politique des territoires », mis aux voix, sont adoptés.

M. le Président - Nous avons terminé l’examen des crédits relatifs à la politique des territoires.

La suite de la discussion de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2008 est renvoyée à la prochaine séance, qui aura lieu cet après-midi, à 15 heures.

La séance est levée à 12 heures 50.

La Directrice du service
du compte rendu analytique,

Marie-Christine CHESNAIS

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