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Assemblée nationale

Compte rendu
analytique officiel

Séance du mardi 27 novembre 2007

2ème séance
Séance de 15 heures
67ème séance de la session
Présidence de M. Bernard Accoyer

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La séance est ouverte à quinze heures.

QUESTIONS AU GOUVERNEMENT

L'ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.

VIOLENCES À VILLIERS-LE-BEL

M. Jérôme Chartier – Je souhaite revenir sur les événements qui ont lieu depuis 48 heures dans le Val-d’Oise, et particulièrement à Villiers-le-Bel. Le point de départ en a été le décès malheureux de deux jeunes habitants de la ville, âgés de quinze et seize ans, dans un accident routier. Leurs familles ont droit à nos pensées, car la perte d’un enfant est toujours un événement tragique.

Ce qui est également tragique, c’est l’exploitation qui en est faite : le décès de ces deux jeunes est devenu un prétexte pour ceux qui ont décidé de casser des écoles, des bibliothèques, des voitures et des vitrines, mais aussi de « casser du flic », comme ils disent. Les familles de Villiers-le-Bel ont peur. Elles ont droit à notre soutien, comme y ont droit les forces de l’ordre et les pompiers qui défendent et protègent ces familles, dans des conditions particulièrement difficiles, mettant en jeu jusqu’à leur vie pour faire respecter les valeurs républicaines de liberté, d’égalité et de fraternité.

Monsieur le Premier ministre, vous vous êtes rendu ce matin à Villiers-le-Bel. Pouvez-vous nous confirmer la détermination du Gouvernement à prendre toutes les mesures nécessaires pour que cesse cette situation, qui n’a rien à voir avec les deux décès, et pour que les personnes coupables de ces exactions soient poursuivies et punies ? (« Très bien ! » et applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe NC)

M. François Fillon, Premier ministre  Ce qui s’est produit dimanche soir, à Villiers-le-Bel, c’est d’abord un drame : la mort de deux adolescents, Mouhsin et Larami. Je me suis entretenu lundi matin avec leurs parents, à qui j’ai transmis les condoléances de la République. Je leur ai dit que nous partagions leur douleur, et qu’il fallait avoir confiance dans la justice de la République, car la démocratie, ce n’est pas la vengeance, mais la justice ; une justice indépendante, qui doit faire toute la lumière sur ce drame.

Les violences qui se sont produites dans la nuit de dimanche à lundi, puis la nuit dernière, sont intolérables. Comment accepter que soit brûlée une école, que soit brûlée une bibliothèque, qu’on détruise les entreprises où travaillent les habitants de la ville ? J’ai rencontré ce matin le concessionnaire dont le magasin a été incendié ; il se demande s’il va rester ! Nous allons bien sûr tout faire pour qu’il reste. Mais voilà le résultat de ces actes !

Les habitants de Villiers-le-Bel ont droit à la sécurité ; ils ont le droit d’emmener leurs enfants à l’école ; ils ont le droit d’accéder à la culture, comme cette magnifique bibliothèque le leur permettait.

Je veux rendre hommage aux policiers, qui ont travaillé dans des conditions extraordinairement difficiles. Ceux qui tirent sur des policiers, ceux qui ont battu un commissaire presque à mort sont des criminels (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe NC et sur de nombreux bancs du groupe SRC). Ils doivent être traités comme tels ; la justice doit pouvoir les juger. Je rends également hommage aux pompiers. Ceux qui empêchent les pompiers d’accéder aux personnes qui ont besoin de soins sont eux aussi, d’une certaine façon, des criminels.

Enfin, je rends hommage aux élus locaux, en particulier à ceux de Villiers-le-Bel, qui sont en première ligne pour rétablir la paix et le lien social dans la commune (Applaudissements sur tous les bancs). Je leur ai indiqué que l’État serait solidaire et qu’il les aiderait à reconstruire le plus rapidement possible l’école et la bibliothèque, car la meilleure réponse que nous puissions apporter à cette violence, c’est d’en effacer les traces ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP)

Avec Mme Alliot-Marie, nous allons tout faire pour que ce soir, à Villiers-le-Bel et dans les communes avoisinantes, soit déployé un maximum de moyens de sécurité, pour qu’il n’y ait pas une nouvelle nuit de violence. J’appelle la population, les associations, les acteurs de la vie sociale à travailler ensemble, aux côtés des élus locaux et des forces de l’ordre, pour que la légalité républicaine soit rétablie (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe NC).

POUVOIR D’ACHAT

M. Jean-Marc Ayrault – Avant de poser ma question, je souhaite, au nom du groupe socialiste, condamner avec la plus grande fermeté les violences qui ont lieu à Villiers-le-Bel, et en même temps dire notre exigence de vérité ; les familles y ont droit. J’exprime également notre solidarité totale avec les policiers et les pompiers – qui assurent leur mission au péril de leur vie (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR) comme avec une population qui souffre, à Villiers-le-Bel et dans d’autres banlieues, ainsi qu’avec les élus locaux, qui sont en première ligne (Même mouvement).

Monsieur le Premier ministre, dans la crise du pouvoir d’achat se joue le contrat social avec les Français. Depuis sept mois, « la France qui se lève tôt, qui travaille dur et qui gagne peu » supporte tout l’effort de rigueur. Elle constate que son travail n’est plus justement rémunéré, que son mérite n’est pas reconnu autrement que par des hymnes et des discours. Comment cette France ne serait-elle pas en colère, quand elle vous entend dire « qu’il n’y a plus d’argent à distribuer », alors que vous venez de donner 15 milliards aux plus fortunés ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR)

Le groupe socialiste défendra jeudi une proposition de loi pour améliorer le pouvoir d’achat. Accepterez-vous de conditionner les 25 milliards d’aides publiques aux entreprises à l’augmentation des salaires ? Accepterez-vous d’encadrer les loyers pendant un an pour négocier un « bouclier logement » qui limite la part du loyer et des charges au quart du revenu du locataire ? Accepterez-vous de financer un chèque transport financé par une taxe sur les profits des compagnies pétrolières ? Accepterez-vous d’abroger les marges arrière, pour que les consommateurs bénéficient d’une baisse des prix ? Ce sont quelques exemples de nos propositions, qui sont justes, simples, et financées !

Vous avez le devoir de dialoguer avec l’opposition. Irez-vous jusqu’au bout du débat ou bien avez-vous l’intention de l’interrompre, jeudi, par des artifices de procédure ? Vous ne pouvez plus échapper à cette question : le pouvoir d’achat, ce n’est plus un slogan ; c’est une exigence des citoyens ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR)

M. Patrick Roy – Des sous pour les Français !

M. François Fillon, Premier ministre  Je remercie M. Ayrault d’apporter au débat sur le pouvoir d’achat les propositions du parti socialiste. Il me demande si nous allons conditionner les 25 milliards d’allègements de charges à une politique salariale négociée dans les entreprises ? La réponse est oui : nous nous y sommes déjà engagés. Or, je note que jamais la gauche n’avait assorti les allègements de charge d’une telle condition ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR ; applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe NC)

M. Ayrault me demande si je suis d’accord pour encadrer les loyers. Mais c’est peut-être à cause des politiques conduites dans le passé que nous sommes arrivés là. En 2000, le nombre de constructions était le plus bas de la Cinquième République ! (Même mouvement) S’il y a un problème de hausse des loyers, c’est parce qu’on n’a pas assez construit, et nous avons donc engagé un effort considérable pour augmenter le nombre de mises en chantier (Même mouvement).

M. Ayrault me demande si nous allons mettre en place le chèque transport. Je rappelle que c’est notre majorité qui a créé ce dispositif l’an dernier, mais nous constatons qu’il ne fonctionne pas et ne constitue pas la réponse adéquate.

Enfin, M. Ayrault me demande si nous allons supprimer les marges arrière. Un texte sur la concurrence est actuellement en examen…

M. François Brottes – Justement !

M. François Fillon, Premier ministre  À ma connaissance, la gauche, lorsqu’elle était au pouvoir, n’a jamais rien proposé de tel. Ce texte permettra des améliorations sensibles en termes de transparence et modifiera les mécanismes de fixation des prix. Vous ne pouvez pas vous exonérer de vos propres responsabilités…

M. François Hollande – Mais c’est vous qui êtes au pouvoir !

M. François Fillon, Premier ministre  …ni des promesses que vous avez faites lors de la campagne. Nous menons d’abord une politique de croissance (Protestations sur les bancs du groupe SRC), car c’est de la croissance que découle le pouvoir d’achat des Français ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe NC)

POUVOIR D’ACHAT

M. Jean-Jacques Candelier – Le groupe GDR condamne les événements survenus à Villiers-le-Bel et demande à ce que toute la lumière soit faite sur cette affaire.

Monsieur le Premier ministre, si le Président de la République vous a remis les insignes de grand-croix de l'Ordre national du Mérite, ce n’est certainement pas pour vos résultats en matière de pouvoir d'achat ! (Protestations sur les bancs du groupe UMP) Celui qui vous a décoré pour services rendus s’est autoproclamé président « du pouvoir d'achat » : ne s’agirait-il pas plutôt de son propre pouvoir d'achat, lui qui a multiplié son salaire revalorisé par 2,7 ?

Les prix à la consommation continuent de flamber scandaleusement sans que votre gouvernement envisage rien de sérieux pour les faire baisser. Pourtant, des marges de manœuvre existent, comme la fiscalité des carburants – plus de 60 % des prix à la pompe. Mais vous comptez certainement sur cette manne pour compenser les 15 milliards offerts aux plus riches, avec le renforcement du bouclier fiscal et la suppression des droits de succession.

Vous refusez d'augmenter les salaires, le SMIC et les pensions, et vous annoncez des mesurettes sur les contrats de téléphonie ou sur les frais bancaires. Mais la communication a ses limites, et les Français en ont plus qu'assez !

Les marins-pêcheurs, les avocats, les magistrats, les routiers, les professionnels des transports, les cheminots, les électriciens, les gaziers, les enseignants, les gendarmes, les policiers, les buralistes, d’autres encore ont exprimé leur mécontentement et leurs inquiétudes (« La question ! » sur les bancs du groupe UMP).

J’espère que vous me répondrez, et sans chinoiseries : qu'attendez-vous pour revaloriser les traitements des fonctionnaires, les pensions, le SMIC et les minima sociaux ? Qu'attendez-vous pour engager des négociations salariales dans le privé ? Quand ouvrirez-vous les yeux sur l'échec de votre politique ? (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR et du groupe SRC)

M. Luc Chatel, secrétaire d’État chargé de la consommation et du tourisme – Depuis 2002, le SMIC a augmenté de 23,2 % alors qu’entre 1997 et 2002, il n’avait augmenté que de 10 % : voilà la cruelle réalité.

Mais il n’y a pas que le SMIC. Vous le savez, nous voulons favoriser le dynamisme des négociations salariales, et ce pour tous les niveaux de salaire. C’est ce qu’ont proposé Mme Lagarde et M. Bertrand lors de la conférence sur l’emploi et le pouvoir d’achat, le 23 octobre.

M. Patrick Roy – Le ministre ment !

M. Luc Chatel, secrétaire d’État chargé de la consommation M. Bertrand a proposé que ce soit désormais une commission indépendante qui fixe le niveau du SMIC, afin que cette question ne soit plus l’otage de débats politiques.

Nous voulons également conditionner les allègements de charges des entreprises à l’ouverture de négociations sur les salaires.

Enfin, ce sont les ouvriers et les jeunes salariés qui ont effectué le plus d’heures supplémentaires en 2006 : ce sont donc eux qui bénéficient actuellement de leur défiscalisation (Protestations sur les bancs du groupe GDR et du groupe SRC). Avec le RSA mis en place par M. Hirsch, nous tendons la main aux bénéficiaires des minima sociaux pour les sortir de l’assistance.

Les dépenses contraintes sont une plaie pour nos concitoyens : c’est la raison pour laquelle le Gouvernement a gelé les tarifs de GDF, contenu ceux d’EDF au-dessous de l’inflation, et doublé l’aide à la cuve de fioul. Vous le voyez, le pouvoir d’achat des plus modestes est bien la priorité du Gouvernement.

ÉTATS GÉNÉRAUX DE LA SANTÉ

M. Jean-Luc Préel – Le groupe Nouveau centre condamne les actes violents commis à Villiers-le-Bel, et il est solidaire des policiers, des pompiers et des élus locaux, qui sont en première ligne.

Madame la ministre de la santé, les Français sont inquiets. Nous venons de voter la loi de financement de la sécurité sociale, qui prévoit un déficit important et non financé. Toutefois, le ministre des comptes sociaux s’étant engagé à revoir le financement en 2008, nous sommes pleins d’espoir.

Des agences régionales de santé, avec un responsable unique par région, devraient voir le jour en 2008 et mettre fin à un système de santé morcelé où, bizarrement, la prévention et le soin, la médecine de ville et l’hôpital sont séparés. L’hôpital connaît de sérieux problèmes de financement et de gouvernance et ses missions sont mal définies. La mission Larcher fera des propositions à ce sujet.

Nos concitoyens connaissent des problèmes majeurs d’accès aux soins sur l’ensemble du territoire, dus à la répartition des professionnels, aux dépassements d’honoraires, au non-respect de la permanence des soins 24 heures sur 24. Ces problèmes devraient être étudiés lors des états généraux de la santé.

Quand ceux-ci seront-ils réunis ? Quels seront les thèmes abordés : formation initiale et continue, installation, accès aux soins, dépassement d’honoraires, rôle des complémentaires ? Les parlementaires y seront-ils associés ? Y aura-t-il un projet de loi reprenant les propositions ? (Applaudissements sur les bancs du groupe NC)

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé, de la jeunesse et des sports Je partage le diagnostic qu’en tant que médecin, vous venez de poser. Les réflexions que nous mènerons lors des états généraux de la santé rejoignent le chantier que nous avons lancé au travers de la transformation des agences régionales de l’hospitalisation et de la définition des missions de l’hôpital.

Un groupe de travail, réuni sous la présidence du professeur Berland et de Mme Podeur, directrice de l’hospitalisation et de l’organisation des soins, permettra de structurer les travaux des états généraux. Ceux-ci réuniront les syndicats représentatifs de médecins, les jeunes médecins, l’Ordre, les élus et les usagers de l’offre de soins. Un deuxième groupe de travail rassemblera les autres professionnels de santé.

Le travail étant ainsi préparé, une séance plénière de restitution aura lieu le 4 février. À l’initiative du président Méhaignerie, elle sera précédée de deux séances en province, l’une à Rennes, le 25 janvier, et l’autre à Châlons-en-Champagne, le 1er février. Nous y discuterons de tous les thèmes que vous avez évoqués…

M. Jacques Desallangre – Et du changement d’assiette des cotisations ?

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé Je souhaite que les parlementaires y soient étroitement associés, notamment l’office parlementaire d’évaluation des politiques de santé. Chacun d’entre-vous pourra être entendu, et nous souhaitons, Monsieur Préel, bénéficier de votre expérience particulière sur ces sujets (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Jacques Desallangre – Taratata !

M. Patrick Roy – La ministre est contre les malades !

M. le Président – Monsieur Roy, je vous prie de vous calmer et de cesser de perturber le déroulement de la séance (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

CALENDRIER DE LA RÉFORME DES RÉGIMES SPÉCIAUX

M. Jean-Marc Roubaud – Le débat sur la réforme des régimes spéciaux qui vient d’avoir lieu dans le pays est important, et je tiens à saluer l’esprit de responsabilité dont ont fait preuve le Gouvernement et les partenaires sociaux. Des négociations d’entreprise tripartites ont été lancées, et je me réjouis qu’elles aient permis de mettre fin aux grèves car ni notre économie ni nos concitoyens ne peuvent plus les supporter. Si la durée de quarante ans de cotisation n’est pas remise en cause, plusieurs sujets doivent être abordés librement, qu’il s’agisse de la pénibilité particulière de certains métiers ou de l’évolution des rémunérations et des carrières. Monsieur le ministre du travail, quels seront les sujets abordés dans ces négociations, et quel sera le calendrier de mise en œuvre de la réforme des régimes spéciaux de retraite ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Xavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité – Depuis la semaine dernière, la grève est terminée…

M. Pierre Gosnat et M. Maxime Gremetz – Non, suspendue !

M. Xavier Bertrand, ministre du travail Après ces neuf jours de galère, le travail a repris et une étape décisive s’est engagée dans les entreprises : chacun peut s’en réjouir ! (Interruptions sur les bancs du groupe GDR) Pour autant, le Président de la République et le Gouvernement, toujours mobilisés, n’ont pas classé le dossier. Les négociations d’entreprise se sont ouvertes en présence d’un représentant de l’État. Tout est fait pour qu’elles aboutissent, chacun devant se fixer une obligation de résultat. C’est ce que j’ai rappelé aux présidents des entreprises publiques, lorsque je les ai reçus vendredi dernier. Les réunions concernant la RATP ont débuté hier…

M. Maxime Gremetz – Du concret !

M. Xavier Bertrand, ministre du travail Elles se poursuivront à partir de demain dans les IEG et à la SNCF. Les sujets abordés sont connus. Dès lors que l’on demande aux salariés de travailler plus longtemps, il est logique d’aménager les fins de carrière, en supprimant notamment les couperets qui obligent les agents à partir à 50 ou 55 ans, alors même qu’ils n’ont pas constitué tous leurs droits à pension. Les organisations syndicales doivent nous dire s’il faut supprimer ce type de disposition immédiatement ou progressivement.

S’agissant des évolutions salariales, il me semble logique de prévoir une revalorisation des fins de carrière pour inciter les gens à travailler plus longtemps.

Nous avons bien l’intention d’avancer dans la préparation du rendez-vous des retraites de 2008, car nombre de salariés seraient intéressés par une surcote pendant qu’ils sont encore en activité. Enfin, une nouvelle politique des ressources humaines doit être négociée. Les négociations se poursuivront jusqu’à la seconde quinzaine de décembre. Des avancées notables ont déjà eu lieu à la RATP. Chacun y met du sien…

M. Jean Glavany – Bla-bla !

M. Xavier Bertrand, ministre du travail  Les discussions ne visent pas à annuler le passage aux 40 années mais à tenir compte des aspirations de chacun. Dans la France de 2007, la preuve est désormais faite que la négociation est toujours préférable au conflit (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

POUVOIR D’ACHAT

M. Yves Jego – Depuis quelques semaines, la hausse continue des prix des matières premières alimentaires n’est pas sans conséquences sur le pouvoir d’achat des ménages, même si la consommation alimentaire ne représente en moyenne que 16 % des dépenses d’un foyer. En outre, la hausse des prix du lait ou de l’huile a naturellement une incidence particulière sur les budgets les plus modestes. Nous discutons en ce moment d’un projet de loi relatif à la consommation : Monsieur le ministre de la consommation, pouvez-vous nous en préciser les conséquences pour la vie quotidienne des Français ? Le dispositif que vous nous proposez permettra-t-il d’atténuer l’effet de la hausse des prix des matières premières ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Luc Chatel, secrétaire d’État chargé de la consommation et du tourisme – Le projet dont vous débattez permettra de redonner au consommateur le fruit des négociations entre industriels et distributeurs. En 2004, Nicolas Sarkozy avait été le premier à constater que les Français étaient, parmi les Européens, ceux qui payaient le plus cher leurs produits de grande consommation. Il avait alors engagé des négociations avec les industriels et les distributeurs, et le processus avait abouti, en 2005, au vote de la loi sur les PME. Moralité, depuis deux ans, les produits ont baissé de 3,4 % dans la grande distribution. À l’époque, nous avions veillé à ce que ces nouvelles dispositions n’aient pas d’impact négatif pour les PME, le petit commerce ou l’agriculture. De fait, la part des PME dans les fournisseurs des grands magasins a augmenté, cependant que le commerce créait 20 000 emplois l’année dernière. Nous proposons aujourd’hui une nouvelle étape, puisqu’à compter du 1er janvier, les consommateurs bénéficieront de la totalité des avantages commerciaux négociés entre industriels et distributeurs…

M. Philippe Vuilque – Comment pouvez-vous en être sûr ?

M. Luc Chatel, secrétaire d’État  Nous replaçons donc le consommateur au cœur de la négociation, ce qui est très prometteur pour l’évolution des prix.

Le deuxième volet du texte vise à installer davantage de concurrence dans la téléphonie mobile et dans le secteur bancaire, car plus de concurrence bénéficie toujours au consommateur. Au moins 30 % du budget des ménages sont concernés par ce projet de loi, sans que cela coûte un centime au budget de l’État. Vous le voyez, ce texte est essentiel pour le pouvoir d’achat de nos concitoyens ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Jacques Desallangre – Mais il n’introduit pas l’action de groupe !

POUVOIR D’ACHAT

Mme Sylvia Pinel – Monsieur le Premier ministre, la diminution du pouvoir d’achat oblige de plus en plus de Français à hiérarchiser leurs dépenses pour faire face aux besoins vitaux, se loger, se chauffer, se nourrir, se soigner. Votre politique économique appauvrit la majorité des Français, et l’urgence sociale s’étend pour les plus fragiles, petits retraités, demandeurs d’emploi, travailleurs modestes. Ils nous disent dans nos permanences qu’ils n’arrivent plus à se chauffer et doivent sauter des repas. Il y a six mois pourtant, M. Sarkozy se présentait comme le président du pouvoir d’achat pour tous, pas seulement pour ceux qui ont et le nécessaire et le superflu.

Si les Français s’inquiètent, c’est que les politiques menées ne répondent pas à leur difficulté. Monsieur le Premier ministre, qu’attendez-vous pour inverser vos priorités ? Quand allez-vous reprendre aux plus riches les 15 milliards que vous leur avez donnés cet été, pour aider les plus modestes à se loger et se chauffer ? Quand vous préoccuperez-vous des petites retraites, supprimerez-vous les franchises médicales ? Quand annoncerez-vous des choix qui rendent confiance en l’avenir ? Le choc de confiance se fait attendre. Pendant ce temps, tous les signaux économiques passent au rouge. Que vous faut-il de plus pour choisir la politique du pouvoir d’achat pour tous ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et plusieurs bancs du groupe GDR)

M. Luc Chatel, secrétaire d’État chargé de la consommation et du tourisme – Le groupe socialiste a la mémoire courte. Si le pouvoir d’achat est la première préoccupation des Français, c’est qu’en 1997 (Protestations sur les bancs du groupe SRC) vous leur avez infligé la double peine, avec les 35 heures. D’abord, elles ont bloqué les salaires, ensuite elles ont freiné durablement la croissance (« Six ans ! » sur les bancs du groupe SRC). Aucun autre pays n’a fait un tel choix. Pourtant, récemment encore, on trouvait dans le programme du parti socialiste ce rêve : généraliser les 35 heures aux PME.

M. Michel Sapin – Qu’est-ce que vous avez fait ?

M. Luc Chatel, secrétaire d’État  Et un second rêve, celui d’augmenter les impôts. Moins de travail, plus d’impôt, voilà votre programme. Il est certain que nous n’avons pas la même politique. Quand vous distribuez les cadeaux sans contrepartie (Exclamations sur les bancs du groupe SRC), nous disons aux Français : travaillez plus, vous gagnerez plus. Nous disons à ceux qui veulent devenir propriétaires : achetez un logement, vous paierez moins d’impôts. Nous disons aux fonctionnaires : faisons ensemble des gains de productivité et votre pouvoir d’achat augmentera. Nous disons aux entreprises : ouvrez des négociations salariales.

M. Jean Glavany – Et vous, ouvrez les yeux !

M. Luc Chatel, secrétaire d’État Nous ne partageons pas la démagogie qui veut faire croire que l’argent tombe du ciel.

Aujourd’hui, le parti socialiste va présenter dix mesures pour le pouvoir d’achat. Il fête aussi les dix ans de M. Hollande à sa tête (Exclamations sur les bancs du groupe SRC). Dix mesures en dix ans, quel beau bilan ! À ce rythme, peut-être le parti socialiste aura-t-il un programme pour 2017 ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP, vives protestations, huées et quelques claquements de pupitre sur les bancs du groupe SRC)

M. le Président – Un peu de calme !

LUTTE CONTRE LE SIDA

M. Alain Marty – Madame la ministre de la santé, bientôt se déroulera la journée mondiale de lutte contre le sida. Dans le monde, 33 millions de personnes en sont atteintes. Mais en France, l’épidémie semble régresser. D’après le directeur de l’institut national de veille sanitaire, 25 ans après l’identification du virus et 10 ans après l’introduction des multithérapies, l’infection semble marquer le pas. Il y a aussi une légère diminution du nombre de nouveaux cas parmi les populations migrantes, qui sont très affectées. Cependant la maladie ne régresse pas parmi les homosexuels et notamment les plus jeunes. Il faut donc poursuivre la lutte. Quelles sont vos intentions dans ce domaine ?

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé, de la jeunesse et des sports Effectivement, les nouveaux cas de sida déclarés sont passés de 7 000 en 2004 à 6 300 en 2006. Cette baisse de 10 % montre que les politiques de prévention ont un effet. Mais il existe deux groupes pour lesquels il y a simplement stabilisation : ce sont les homosexuels et les populations des départements français d’Amérique. 

J’ai lancé hier une campagne de prévention avec l’institut national de veille sanitaire et l’institut d’éducation à la santé, sous forme de messages adaptés à ces populations. Par exemple, dans les départements français d’Amérique, il y aura des messages télévisés explicites, et non « poétiques ».

D’autre part, nous attendons l’avis de la Haute autorité de santé pour mettre sur le marché les tests de dépistage rapide. Mais j’ai souhaité qu’une expérimentation ait lieu sans attendre. Je réunis un groupe de travail, avec l’agence nationale de recherche contre le sida et les hépatites, l’INVS et les groupes de lutte contre le sida qui sont nos premiers partenaires pour définir les modalités de l’expérimentation.

Enfin, l’accès au préservatif est capital, en particulier le préservatif à 20 centimes et celui que les DDASS distribuent aux populations les plus fragiles.

Voilà la politique que nous voulons mener ! La lutte contre le sida ne doit pas nous mobiliser que le 1er décembre, mais tous les jours de l’année. Je sais que vous y veillez tout particulièrement, vous qui avez été vice-président du groupe sur le sida, et je ne doute pas que vous continuerez (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

MISSION OLIVENNES

M. Christian Kert – La propriété intellectuelle fait partie de notre patrimoine, Madame la ministre de la culture et de la communication, et nous sommes tous attachés à la protection des droits d'auteur. La préservation de la création et le droit à une rémunération légitime de chaque auteur – qu’il soit musicien, cinéaste, graphiste, producteur ou éditeur – restent une priorité. Or le piratage numérique saborde cette création. En France, on pirate deux fois plus qu'en Allemagne et cinq fois plus qu'aux États-Unis ! Peut-être payons-nous le fait que notre pays est l'un des mieux équipés en haut débit. Après l'industrie musicale, pour laquelle des mesures d'urgence s’imposent, le monde du cinéma en subit à son tour les conséquences.

Le Parlement avait débattu des droits d’auteur il y a moins de deux ans, mais il a bien fallu y revenir. Vous avez donc confié à M. Olivennes une mission qui a débouché sur un accord, signé de l'ensemble des acteurs d'Internet et des professionnels de la culture – ce qui est déjà remarquable. Il reconnaît Internet comme une nouvelle frontière et un nouveau territoire à conquérir, mais précise les règles du jeu : ce n'est pas une zone de non-droit dans laquelle on pourrait piller en toute impunité les créations d’autrui.

Parce qu'il est solide et équilibré, parce que la démarche préconisée est pédagogique, avec des avertissements gradués précédant la sanction, cet accord nous paraît juste. D’aucuns craignent cependant qu’en mettant fin au piratage des œuvres, on ne porte atteinte à la capacité d'Internet de devenir un moyen privilégié d'accès à la culture. Êtes-vous consciente de ce danger ? Et que répondez-vous à ceux qui redoutent que l'autorité administrative indépendante en charge du dispositif devienne une juridiction d'exception ? (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP et du groupe NC)

Mme Christine Albanel, ministre de la culture et de la communication – Efficace pour lutter contre le piratage massif et ceux qui cassent les systèmes de protection à des fins frauduleuses, la loi sur le droit d’auteur l’était moins pour lutter contre le piratage ordinaire, qui a tout de même abouti à une baisse d’environ 50 % du chiffre d’affaires de l’industrie musicale, à une diminution de 40 % du nombre des jeunes artistes signant dans les maisons de production et à une chute de 30 % de l’emploi dans les industries culturelles. Il était donc temps d’agir, et c’était la volonté du Président de la République.

La mission Olivennes a abouti à un accord équilibré et prometteur, signé par 42 industries de tous les secteurs, qui permettra d’enrichir l’offre légale et de supprimer les verrous électroniques. Internet se voit ainsi conforter comme vecteur de culture. Une dissuasion raisonnable sera assurée par une autorité indépendante aux pouvoirs élargis, qui pourra envoyer des mails d’avertissement avant de procéder le cas échéant à une suspension temporaire de l’abonnement. Nous sommes loin d’une police d’Internet : la démarche est avant tout pratique et pédagogique. Elle intéresse d’ailleurs mes homologues allemand et anglais, avec qui j’ai eu l’occasion d’en parler. C’est une bonne chose que nous soyons ainsi précurseurs sur le terrain de la défense des auteurs, des créateurs et des artistes (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP).

VIOLENCES URBAINES

Mme Delphine Batho – Malgré les propos déplacés de M. Chatel (Interruptions sur les bancs du groupe UMP), je voudrais revenir sur un sujet grave et sérieux. Il y a eu un drame à Villiers-le-Bel, et deux adolescents sont morts. Je voudrais à nouveau exprimer notre émotion aux familles qui viennent de perdre un enfant. Je veux aussi condamner solennellement les violences et dire notre soutien aux policiers qui ont été blessés au cours des deux dernières nuits. Quelle que soit la vérité sur les circonstances de ce drame – et la nomination d'un juge d'instruction offrirait à cet égard une garantie – nous ne pouvons accepter qu’il soit utilisé pour brûler, détruire, agresser, tirer sur des policiers. Nous sommes aujourd'hui dans une situation de crise.

Ces violences, Madame la ministre de l’intérieur, font suite à d'autres qui se succèdent désormais à un rythme régulier. Comment se fait-il que nous en soyons là deux ans après les émeutes de novembre 2005, cinq ans après les engagements pris en 2002 ? Comment se fait-il qu’élus, associations, travailleurs sociaux et policiers, qui tirent depuis longtemps le signal d’alarme, n’aient pas été entendus ?

M. Jacques Desallangre – Ils n’ont rien fait !

Mme Delphine Batho – Il n'y a pas de fatalité à la montée de la violence. C'est un problème de volonté et de moyens. Quand donc allez-vous mettre en place une police de quartier affectée 24 heures sur 24 dans les zones les plus difficiles et dotée de policiers expérimentés et de moyens d’enquête renforcés ? (Exclamations sur les bancs du groupe UMP ; applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC) Allez-vous personnellement veiller à ce que le Gouvernement donne aux associations, aux travailleurs sociaux et aux éducateurs les moyens nécessaires pour conduire un travail qui est le complément indispensable de celui de la police ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et sur quelques bancs du groupe GDR)

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales Les évènements qui se sont produits depuis dimanche soir à Villiers-le-Bel, et qui ont conduit à blesser plusieurs dizaines de policiers, sont suffisamment importants pour qu’on ne tombe pas dans des polémiques stériles d’un autre âge (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP). Un dramatique accident s’est en effet produit : deux jeunes qui circulaient sur des mini-motos interdites sur la voie publique, à grande vitesse et sans casque, ont percuté un véhicule de police et ont été tués. La procureure saisie du dossier mène l’enquête. Elle s’est déjà exprimée (« Ce n’est pas la question ! » sur les bancs du groupe SRC) pour dire que tous les moyens qui pouvaient être mis en œuvre pour porter secours à ces deux jeunes l’avaient été.

Ces événements ont servi de prétexte à certains groupes pour commettre des vols, des dégradations et des pillages.

M. Henri Emmanuelli – C’est une caricature !

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l’intérieur Les auteurs de ces actes ne représentent qu’une infime minorité des habitants concernés, qui tous subissent directement ces exactions et souffriront aussi de la dégradation de l’image de leur quartier (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Julien Dray – Que fait le ministère de l’intérieur ?

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l’intérieur Face à cela, la première mission de la police est de garantir des conditions de vie normales.

M. Henri Emmanuelli – C’est votre responsabilité…

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l’intérieur Effectivement ! Les actions menées, qu’elles soient le fait des élus locaux ou des associations, forment un tout (Interruptions sur les bancs du groupe SRC). C’est le sens des conférences de cohésion engagées depuis mon arrivée au ministère (Même mouvement). Cependant, tout ne peut pas changer en quelques semaines... (« Six ans ! » sur les bancs du groupe SRC) Voulez-vous que nous parlions de votre bilan en matière de sécurité ? Je ne suis pas sûre que ce serait à votre avantage ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP ; protestations sur les bancs du groupe SRC)

Ce qui compte, c’est que la police exerce son véritable métier dans les quartiers, au lieu de faire du sport avec les jeunes – c’était le souhait de certains… (Mêmes mouvements) Tout aussi essentielle est l’action des GIR contre l’économie souterraine et le trafic de drogue, qui sont une des racines de ces violences. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

Si vous êtes attachés à l’autorité de l’État et à la sécurité (« Nous le sommes ! » sur plusieurs bancs du groupe SRC), soutenez plutôt nos pompiers et nos forces de l’ordre ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP ; protestations sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR)

M. Noël Mamère – C’est trop facile !

M. le Président – On se calme.

CLASSEMENT DES RÉCIFS CORALLIENS

M. Gaël Yanno – Sur les 851 sites inscrits par l'UNESCO au patrimoine mondial, 31 sont français, dont un seul site naturel : celui du golfe de Porto, qui figure à côté de sites culturels tels que Versailles ou le Mont-Saint-Michel. Chacun sait que l'inscription d’un site au patrimoine mondial consacre son caractère exceptionnel et universel.

En 2008, année internationale des récifs coralliens, il ne faudra pas manquer l’occasion d’ajouter aux 31 sites classés en France l’ensemble des récifs de Nouvelle-Calédonie, qui forment le second plus vaste ensemble corallien au monde après la « Grande barrière » australienne. Couvrant 15 000 kilomètres carrés, cet espace abrite la moitié des 700 variétés de coraux connues dans le monde et l’on y a recensé 1 700 des 3 000 espèces de poissons répertoriées dans l'océan Pacifique.

L’inscription de ce site au patrimoine mondial renforcerait l'image de la France dans cette région du monde et offrirait un exemple de développement durable et de protection de la biodiversité. Nous avons jusqu’au mois de juillet 2008 pour défendre la demande déposée par le Gouvernement le 31 janvier dernier.

Le Gouvernement peut-il nous indiquer quelle position il entend adopter dans ce dossier ? Nous aimerions savoir quelles actions il entend mener en vue d’obtenir le classement du site, qui serait un atout pour la Nouvelle Calédonie et pour la France dans le Pacifique (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Christian Estrosi, secrétaire d’État chargé de l’outre-mer – Vous connaissez mon attachement aux enjeux environnementaux, en métropole comme dans l’outre-mer. Avec mon collègue Borloo, j’ai veillé à ce que ce volet ne soit pas oublié dans le Grenelle de l’environnement, et l’action que vous évoquez est effectivement une de nos priorités. J’ajoute que j’ai personnellement visité certains sites en compagnie d’acteurs locaux et de scientifiques.

Déposé depuis le 31 janvier dernier, ce dossier sera soutenu par l’ensemble des administrations publiques, tant du ministère de l’environnement et de l’écologie que de mon propre département. Le massif corallien est en effet un espace remarquable, même si d’autres dossiers ont été également déposés – volcans de la Réunion, îles Marquises…

Les récifs néo-calédoniens seront défendus en 2008, année des récifs coralliens, mais nous soutiendrons aussi toutes les actions en faveur des énergies renouvelables, du traitement des déchets, de l’assainissement, de la gestion des ressources naturelles, de la prévention des risques et de la santé de tous nos concitoyens. Nous encouragerons tout ce qui participe du développement durable, notamment dans ses aspects économiques. Il faut que tous nos compatriotes de l’outre-mer en profitent ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

VIOLENCES URBAINES

M. Manuel Valls – Monsieur le Premier ministre, les scènes d'émeute de Villiers-le-Bel démontrent que la violence s’enracine et devient de plus en plus dure. Élus de ces quartiers, nous la vivons tous au quotidien, avec son cortège de voitures brûlées et son engrenage d'affrontements sporadiques.

Chaque jour, nous mesurons le sentiment d'abandon des ménages modestes face à la précarité, à l’économie parallèle et à l’échec scolaire. Nous avons parfois l’impression d’être seuls et de mener un combat à mains nues. Chacun sait pourtant le potentiel et la volonté de réussir de l’immense majorité de nos concitoyens. Notre jeunesse a soif d’apprendre et de se former !

Depuis 2005, vous n’avez malheureusement pas tiré les leçons de la ségrégation territoriale, sociale et ethnique qui mine notre pacte républicain (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe UMP). Ainsi la police de proximité n’a toujours pas été rétablie, alors qu’elle est si utile pour établir la confiance entre les forces de l'ordre et les habitants (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC ; exclamations sur les bancs du groupe UMP). Le rappeler, ce n’est pas engager une polémique stérile, Madame la ministre : les élus, sur tous les bancs, vous demandent de les écouter enfin. Il est temps de prendre la mesure de votre échec depuis cinq ans ! La morgue que vous affichez n’est plus de mise ! (Mêmes mouvements)

Les annonces de soutien financier, faites à chaud sous les projecteurs, n'ont rien changé non plus. Il y a moins d'un mois, les maires de l'association Ville et Banlieue vous ont alerté sur le fait que « les banlieues sont absentes de toutes les priorités du Gouvernement ». Et alors que vous annoncez un énième « plan Marshall » pour les banlieues, auquel vous nous demandez de participer par des rencontres territoriales – ce que nous faisons parce que nous sommes des républicains –, vous venez d'amputer discrètement de 30 millions la dotation versée aux quartiers les plus populaires !

Monsieur le Premier ministre, le rétablissement de l'ordre est votre devoir. La restauration du lien social et de l'espoir dans ces quartiers devrait être votre principale mission. Quand allez-vous passer aux actes ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC)

Mme Christine Boutin, ministre du logement et de la ville – Vous posez une question d’importance, mais je souhaite que nous arrivions à nous retrouver, tant la situation est tendue.

Ma première pensée va aux familles des deux jeunes qui ont perdu la vie et à leurs amis (« Quand même ! » sur plusieurs bancs du groupe SRC). Je leur dis mon émotion et ma tristesse. Je pense également aux policiers et aux pompiers blessés.

Je sais que les violences ne sont le fait que de quelques meneurs, et bien entendu je ne fais pas d’amalgame avec le reste de la population, qui les désapprouve ; mais qu’une réaction émotive débouche sur de tels débordements est le signe d’autre chose de beaucoup plus profond (Interruptions sur les bancs du groupe SRC).

Depuis 1994, la commune de Villiers-le-Bel a bénéficié de toutes les actions en direction des quartiers dits difficiles. Malgré le travail important des acteurs de terrain, force est de constater que cette politique n’a pas enrayé la spirale de ghettoïsation.

Il faut donner un avenir aux jeunes de ces quartiers, chacun d’eux doit pouvoir recevoir une formation qualifiante. Il faut pacifier les relations entre la police et ces jeunes ; c’est un travail de longue haleine, car il s’agit des représentations que les uns ont des autres. Il faut remettre en marche l’ascenseur social. Il faut également mieux répartir les logements sociaux et développer la mixité sociale dans les cités (« Oui ! » et applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC) : c’est l’un des objectifs du programme de rénovation urbaine.

Mme Amara et moi-même vous proposerons dans les prochaines semaines un plan pour refonder la politique de la ville ; mais je ne peux pas vous laisser dire, Monsieur Valls, que nous laisserions de côté les banlieues (Exclamations sur les bancs du groupe SRC) : ce n’est pas vrai ! Quand l’association Ville et banlieue prétend que le montant de la DSU a diminué, elle a tort ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC ; applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. le Président – Nous en avons terminé avec les questions au Gouvernement.

La séance est suspendue à 16 heures 5.

La séance est reprise à 16 heures 20.

PRÉSIDENCE de M. Marc LE FUR
vice-président

CONCURRENCE AU SERVICE DES CONSOMMATEURS (SUITE)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion, après déclaration d’urgence, du projet de loi pour le développement de la concurrence au service des consommateurs.

ART. 3

M. Michel Raison, rapporteur de la commission des affaires économiques – L’amendement 28 est défendu.

L'amendement 28, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

Les amendements 55 rectifié et 165 rectifié tombent.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques – L’amendement 29 est de précision.

M. Luc Chatel, secrétaire d’État chargé de la consommation et du tourisme – Le Gouvernement souhaite le modifier par le sous-amendement 323 rectifié.

Le sous-amendement 323 rectifié, accepté par la commission, mis aux voix, est adopté.

L'amendement 29 ainsi sous-amendé, mis aux voix, est adopté.

L'article 3 modifié, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 3

M. Jean Gaubert – L’amendement 238 vise à donner aux fournisseurs la possibilité de renégocier leurs prix en cas d’événements particuliers. Actuellement, un certain nombre d’entreprises françaises souffrent terriblement de la hausse des cours des matières premières, faute de disposer de cette possibilité.

M. Michel Raison, rapporteur – Avis défavorable.

M. Luc Chatel, secrétaire d’État Même avis. Les parties doivent rester libres de faire figurer ou non dans leurs contrats des clauses de renégociation des prix.

L'amendement 238, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean Gaubert – L’amendement 105 rectifié est défendu.

L'amendement 105 rectifié, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean Gaubert – La pratique qui consiste à différer la date de facturation à la demande du distributeur, rallonge les délais de paiement, déjà trop longs. L’amendement 265 rectifié vise à mettre fin à cette pratique, en faisant figurer la date de livraison sur la facture.

M. Michel Raison, rapporteur  Je suis d’accord sur le fond, mais l’amendement induirait une confusion juridique. Avis défavorable.

M. Luc Chatel, secrétaire d’État  La facture est établie dès que la vente est réalisée, quelle que soit la date de livraison. Faire figurer cette dernière sur la facture à côté de la date de règlement aboutirait à une confusion, comme l’a signalé le rapporteur. Avis défavorable.

M. Jean Gaubert – J’aimerais une explication. En commission, nous avions présenté un amendement qui s’était avéré trop peu précis ; Mme de La Raudière avait fait observer que, dans certaines PME, les factures ne sont pas établies tous les jours et qu’il peut donc y avoir des délais entre la livraison et la facturation. Notre nouvelle version règle ce problème, tout en évitant que les délais soient allongés par le temps couru jusqu’à l’établissement de la facture.

M. Michel Raison, rapporteur – L’amendement aurait des effets pervers, dans la mesure où il prévoit que la date de livraison portée sur la facture fait courir le délai de paiement, tout en laissant subsister dans le code de commerce d’autres critères pour l’appréciation du point de départ de ces délais. C’est introduire, comme je l’ai dit, de la confusion juridique.

En outre, l’amendement dit que, lorsque la facture est établie plus de quinze jours après la livraison, la date d’établissement de la facture constitue le point de départ du délai de paiement. Or, dans le code de commerce, les différents délais prévus sont calculés à partir de la date de livraison. L’amendement pourrait donc rallonger les délais, au lieu de les réduire.

M. Jean-Paul Charié – Il est vrai que les délais de paiement sont beaucoup trop longs en France, ce qui affecte la compétitivité de nos entreprises, donc le pouvoir d’achat. Mais, sur ce sujet, comme sur tous les autres sujets soulevés par l’opposition, dresser la liste des avantages qu’un fournisseur peut consentir à son client ne fait en rien avancer les choses, et l’UMP ne répondra donc pas systématiquement, pour ne pas allonger inutilement le débat. Ces sujets graves devront être abordés dans la réflexion globale qui sera menée en vue d’un changement des cultures et des pratiques en France.

M. Jean Gaubert – Nous sommes prêts à faire preuve de bonne volonté, mais il faut que l’effort soit réciproque. Je n’ai toujours pas compris en quoi cet amendement était gênant. Les factures différées sont aujourd’hui un élément de la négociation, ce qui est scandaleux. L’équilibre n’est jamais en faveur des petits fournisseurs.

M. Jean-Paul Charié – C’est vrai.

M. Jean Gaubert – Si nous laissons ces sujets à la négociation, on sait qui décidera des conditions générales de vente !

M. Jean-Paul Charié – Ce n’est pas comme cela que nous procéderons !

L'amendement 265 rectifié, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Michel Raison, rapporteur – L’amendement 30 vise à étendre la sanction de la pratique des prix abusivement bas aux situations de fortes variations du prix des matières premières.

M. Luc Chatel, secrétaire d’État  Le Gouvernement est favorable à l’amendement modifié par son sous-amendement 324 de précision.

Le sous-amendement 324, accepté par la commission, mis aux voix, est adopté.

L'amendement 30 ainsi sous-amendé, mis aux voix, est adopté.

Mme Muriel Marland-Militello – L’amendement 125, conformément aux engagements pris par le Président de la République en faveur du pouvoir d’achat, tend à encourager la baisse des prix dans le respect de la rentabilité des fournisseurs, en encadrant mieux les enchères inversées.

Celles-ci consistent en la mise à prix, en temps réel et de manière transparente sur une plateforme de l’Internet, d’un besoin prédéfini par l’acheteur. Le fournisseur répondant en tous points à ce besoin et proposant le prix le plus compétitif est retenu. Cet outil de négociation moderne réduit les délais d’achat et permet de répercuter les économies réalisées sur le prix final du produit. Grâce à ce mécanisme, les participants peuvent connaître leur positionnement sur le marché et réagir en cas d’écart trop important. Les enchères inversées sont utilisées pour les produits standardisés, à faible coût d’innovation ; elles sont interdites au commerce des produits alimentaires.

Toutefois, cette pratique peut mettre en danger tant l’acheteur que le fournisseur en incitant celui-ci à négliger la rentabilité pour remporter le marché. La concurrence ne vaut que si elle est pérenne… C’est pourquoi l’amendement comporte trois dispositions propres à sécuriser les enchères inversées, sans en alourdir le mécanisme.

Le fournisseur devra formaliser par écrit sa capacité à répondre en tous points au cahier des charges ; l’acheteur, quant à lui, devra s’assurer que les offres des fournisseurs sont en tous points comparables ; enfin, l’anonymat du fournisseur ayant remporté l’enchère pourra être respecté afin de mieux préserver les stratégies commerciales, voire de le protéger contre un éventuel espionnage industriel.

M. Michel Raison, rapporteur – À partir du moment où le fournisseur participe aux enchères, il me paraît aller de soi qu’il entend répondre au cahier des charges. La disposition que vous prévoyez se retournera contre le fournisseur, puisque l’acheteur pourra demander que lui soient infligées des pénalités au titre du non-respect de l’engagement préalable. Par ailleurs, il peut arriver que les fournisseurs proposent des prix inférieurs au coût de revient, sous la pression de l’acheteur. Leur responsabilité ne peut donc pas être engagée.

Sur le deuxième volet de votre proposition, il me semble impossible de trouver des offres en tous points comparables. Par ailleurs, l’acheteur doit pouvoir choisir en fonction de critères autres que le prix. Enfin, il pose problème si deux fournisseurs proposent le même prix.

L’inconvénient des enchères inversées est qu’elles peuvent être faussées par la participation fictive d’un fournisseur. La préservation de l’anonymat, que vous appelez de vos vœux, ne pourrait qu’encourager de telles dérives. Pour toutes ces raisons, la commission a émis un avis défavorable.

M. Luc Chatel, secrétaire d’État – Si l’amendement 125 était adopté, il encouragerait, par la préservation de l’anonymat d’un éventuel « lièvre », les enchères fictives. Par ailleurs, il contraindrait les fournisseurs à signer en blanc un engagement à ne pas descendre au-dessous du prix de revient. C’est pourquoi je vous invite à retirer cet amendement.

Mme Muriel Marland-Militello – Si tous les fournisseurs s’engagent au même moment sur l’Internet, ils seront logés à la même enseigne et ce sera le gage d’une négociation transparente. En outre, le fait qu’ils le fassent par écrit élimine, de fait, les propositions fictives. Enfin, à quoi bon édicter des règles si l’on a peur des sanctions que pourrait encourir un fournisseur ? Je maintiens cet amendement.

M. Jean-Paul Charié – Je ne peux accepter que l’on contraigne des fournisseurs à prendre un tel engagement car il est normal qu’une entreprise ne soit pas en équilibre budgétaire durant les premières années de lancement d’un produit. Je ne craindrai pas de le répéter lors des prochains débats : obliger les entreprises à vendre au-dessus du coût de revient, c’est condamner la recherche, l’investissement et l’innovation !

L'amendement 125, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Michel Raison, rapporteur – L’amendement 31 tend à fixer par décret la liste des produits agricoles visés par l’interdiction des enchères inversées.

M. Luc Chatel, secrétaire d’État  Avis favorable.

M. François Brottes – Afin d’éclairer la représentation nationale, le ministre pourrait-il nous donner une idée des produits qui figureront dans ce décret ?

M. Luc Chatel, secrétaire d’État – Il s’agira de matières premières agricoles.

M. François Brottes – Et les produits sylvicoles ?

Mme Catherine Coutelle – Silence éloquent !

L'amendement 31, mis aux voix, est adopté.

ARTICLE 4

M. Patrick Roy – Le Gouvernement a mis la lutte contre la délinquance au cœur de son action. Mais il s’attache surtout à combattre les petits – comme les fraudeurs au RMI – lorsqu’il faudrait attraper les gros – comme les responsables d’EADS. L’article 4 vise le même objectif : plus on est petit, plus on est soumis aux sanctions.

M. Patrick Ollier, président de la commission – La loi est la même pour tous, mais il est vrai que vous ne la connaissez pas !

M. Patrick Roy – De la même manière, le Gouvernement tient un double langage sur le pouvoir d’achat. Alors que les coûts de l’énergie, des produits alimentaires ou des loyers explosent, il refuse de revaloriser les petites retraites, supprime l’exonération de redevance audiovisuelle et instaure les franchises médicales. Les petits continuent de souffrir, tandis que les gros sont à l’abri et reçoivent des cadeaux !

M. Luc Chatel, secrétaire d’État – Cet article bénéficiera aux petits fournisseurs de la grande distribution. Nous voulons substituer à une sanction pénale des sanctions civiles, plus efficaces car elles permettent le recours au référé.

Enfin, nous nous attachons à rechercher les meilleures sanctions alternatives possibles.

M. Michel Raison, rapporteur – L’amendement 32 est de coordination.

L'amendement 32, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Lionel Tardy – L’amendement 160 vise à réaffirmer le principe de la primauté des conditions générales de vente – CGV – sur les conditions d’achat, en l’inscrivant dans la loi.

M. Michel Raison, rapporteur – Sur le fond, votre amendement me fait plaisir mais la rédaction actuelle de l’article le satisfait déjà, en présentant les CGV comme le socle de la négociation. Défavorable.

M. Luc Chatel, secrétaire d’État  Même analyse. J’invite M. Tardy à retirer son amendement.

L'amendement 160 est retiré.

M. Jean Dionis du Séjour – Je vais retirer mon amendement 219, car il traitait de la négociabilité des CGV, au sujet de laquelle nous avons déjà longuement échangé. Je reste convaincu que la réforme ne portera tous ses fruits que lorsque les CGV seront effectivement négociables.

L'amendement 219 est retiré.

M. André Chassaigne – L’amendement 289 rectifié vise à mettre fin à certains abus manifestes des grands distributeurs, lorsqu’ils renvoient aux fournisseurs des produits frais périssables au motif qu’ils auraient été endommagés dans leur transport, alors qu’il s’agit en fait d’invendus.

M. Michel Raison, rapporteur – Avis défavorable, dans la mesure où la loi Jacob-Dutreil traite le problème de manière équilibrée. Toutefois, vous avez eu raison, cher collègue, de poser à nouveau le problème.

L'amendement 289 rectifié, repoussé par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Lionel Tardy – L’amendement 161 tend à inclure parmi les éléments composant les CGV les services liés à l’achat-vente, dans la mesure où ceux-ci relèvent de la fonction même du distributeur – transport, référencement, stockage. Assurés de toute façon, ces services sont rémunérés par des réductions de prix apparaissant sur facture.

M. Michel Raison, rapporteur – L’amendement est déjà satisfait. Avis défavorable.

L'amendement 161, repoussé par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Lionel Tardy – Par l’amendement 156 rectifié, nous demandons au Gouvernement pourquoi le décret d’application de la loi du 2 août 2005 visant à déterminer les conditions dans lesquelles sont définies les catégories d’acheteurs pouvant donner lieu à des différences de tarification n’a pas été pris. Deux ans pour prendre un décret, cela paraît bien long ! Au surplus, un décret est-il vraiment indispensable ? Le fournisseur ne peut-il déterminer librement, sous sa responsabilité, les conditions selon lesquelles il détermine ses catégories d’acheteurs ?

M. Michel Raison, rapporteur – Défavorable, mais je suis curieux d’entendre la réponse du Gouvernement sur les motifs qui justifient le retard pris par ce décret.

M. Luc Chatel, secrétaire d’État  Le décret dont vous parlez n’a pas été pris suite à un avis défavorable de la commission d’examen des pratiques commerciales – CEPC –, rendu en juin dernier.

M. François Brottes – Ce ne sont pas les membres de la CEPC qui font la loi !

M. Luc Chatel, secrétaire d’État  S’agissant de l’amendement 156 rectifié, le Gouvernement s’en remet à la sagesse de votre Assemblée.

M. Jean-Paul Charié – Je ne soutiens pas cet amendement, car il n’y pas lieu d’inscrire dans la loi ce qu’il propose. Cependant, Monsieur le ministre, en tant que membre assidu de la CEPC, je réfute votre interprétation et je trouve inadmissible que le Gouvernement demande au législateur de se plier aux avis d’une commission, quelle qu’elle soit ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC et du groupe GDR)

M. François Brottes – Absolument !

M. Michel Raison, rapporteur – Mes chers collègues, je me dois de vous mettre en garde car adopter cet amendement risquerait de nous faire faire un pas décisif dans la voie de la négociabilité des CGV, dont nous sommes convenus qu’elle n’était pas à l’ordre du jour.

M. Lionel Tardy – Ayant obtenu des éléments de réponse intéressants sur cet amendement, je le retire.

L'amendement 156 rectifié est retiré.

M. Jean Gaubert – Notre amendement 127 rectifié traite des délais de paiement, dont M. Leclerc a bien voulu admettre en commission qu’ils représentaient, avec des taux d’intérêt à 3 %, un encours de 11 milliards ; avec des taux à 5 %, on ne doit pas être loin de 17 ou 18 milliards ! Dans ces conditions, on comprend que la tentation soit forte pour les distributeurs de ne pas les réduire autant que cela serait possible. Nous proposons par conséquent de supprimer la référence à d’éventuelles « dispositions contraires figurant aux conditions de vente », de manière à ce que celles-ci ne soient pas invoquées pour allonger à l’excès les délais de paiement imposés aux fournisseurs.

M. Michel Raison, rapporteur – Défavorable.

M. Luc Chatel, secrétaire d’État  Même avis.

M. André Chassaigne – J’apporte tout mon soutien à cet amendement. Tous les fournisseurs dont nous nous sommes rapprochés nous ont confirmé qu’il existait des abus terribles en matière de délais de paiement, souvent fondés – ce qui est un comble ! – sur la loi, car celle-ci ouvre trop de possibilités de dérogation. Et je ne parle pas des pressions exercées pour différer l’encaissement d’un chèque ou des autres pratiques de même acabit. La réalité, c’est que la grande distribution, non contente de réaliser des profits faramineux, place l’argent des fournisseurs pour servir toujours plus de dividendes à ses actionnaires. Dès lors, il est déplorable que tous nos amendements tendant à porter atteinte au pouvoir exorbitant des grands distributeurs soient systématiquement repoussés. Je n’hésite pas à dire que la majorité et le Gouvernement cautionnent ainsi une forme de racket dont nul, ici, n’ignore les mécanismes (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR et du groupe SRC).

L'amendement 127 rectifié, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Michel Raison, rapporteur – L’amendement 33 est rédactionnel.

L'amendement 33, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Lionel Tardy – L’amendement 159 vise, en l’attente d’une réforme globale des systèmes de paiement, à sanctionner d’une amende de 75 000 euros le débiteur qui n’acquitte pas les pénalité de retard normalement exigibles, en application de l’article L. 441-6 du code de commerce. Il faut tenir compte de l’asymétrie foncière de la relation commerciale entre une PME et un gros distributeur, le petit fournisseur renonçant le plus souvent à faire valoir ses droits pour éviter de perdre un gros client.

M. Michel Raison, rapporteur – M. Tardy a tellement bien travaillé que la plupart de ses amendements sont déjà satisfaits : tel est le cas pour le 159, la rédaction actuelle de l’article 4 reprenant l’article L. 441-6 du code, auquel il s’est référé.

M. Luc Chatel, secrétaire d’État  Même analyse. Puis-je inviter M. Tardy à retirer son amendement ?

L'amendement 159 est retiré.

M. François Brottes – Notre amendement 82 porte sur la dépénalisation du non-respect des CGV, au sujet de laquelle le ministre s’est déjà exprimé à plusieurs reprises. Je le retirerai si M. Chatel nous confirme que l’intention du Gouvernement n’est pas d’alléger les sanctions mais bien plutôt de requalifier les délits.

M. Michel Raison, rapporteurLa commission a repoussé l’amendement 82 car elle l’a trouvé peu cohérent.

M. Luc Chatel, secrétaire d’État  Monsieur Brottes, comme je l’ai déjà indiqué, nous proposons de dépénaliser la non-communication des CGV parce que nous considérons qu’appliquer une sanction civile à ce manquement sera plus efficace, et permettra notamment de prendre une décision en référé. Aux termes de l’article L. 442-6 du code de commerce, les amendes civiles prévues dans ce cas peuvent atteindre 2 millions d’euros, ce qui n’est pas négligeable !

L'amendement 82 est retiré.

L'article 4 modifié, mis aux voix, est adopté.

ART. 5

M. Jean Gaubert – Nous aurions pu gagner du temps. Il suffisait que le rapporteur indique dès le début qu’il donnait un avis défavorable à tous les amendements du groupe SRC.

L’amendement 83 est retiré.

M. Michel Raison, rapporteur – Nous gagnerions encore plus de temps si vous les retiriez tous (Sourires).

Les amendements 34 et 35 sont défendus.

Les amendements 34 et 35, acceptés par le Gouvernement, successivement mis aux voix, sont adoptés.

M. le Président – L’amendement 141 de M. Fasquelle n’est pas défendu.

M. François Brottes – J’observe que M. Fasquelle qui, la semaine dernière, nous donnait des leçons, ne défend aucun de ses amendements.

M. Jean-Paul Charié – C’est trop facile de dire cela en son absence.

L'article 5, modifié, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 5

M. Bertrand Pancher, rapporteur pour avis de la commission des lois – L’amendement 3 procède à un toilettage du code de commerce pour tirer toutes les conséquences de la généralisation de la responsabilité pénale des personnes morales opérée par l’article 54 de la loi du 9 mars 2004.

M. Michel Raison, rapporteur – La commission des lois est engagée dans un gros travail de simplification. C’en est un des éléments. Avis favorable.

M. Luc Chatel, secrétaire d’État  Il s’agit en effet d’un amendement de coordination et de toilettage. Avis favorable.

M. Jean Gaubert – On exagère un peu. En réalité, on est en train de faire passer la responsabilité pénale de l’entrepreneur à l’entreprise, en permettant à celle-ci de la provisionner comme n’importe quel autre risque.

M. Jean-Paul Charié – Je veux être sûr que l’on procède à cette simplification à droit constant. Sinon, il faut en débattre.

M. Jean Gaubert – On modifie le droit.

M. Michel Raison, rapporteur – C’est bien à droit constant.

M. Luc Chatel, secrétaire d’État  Je le confirme.

L'amendement 3, mis aux voix, est adopté.

M. Jean Dionis du Séjour – L’article L. 442-8 interdit d’offrir à la vente des produits en utilisant le domaine public dans des conditions irrégulières. Mon amendement 220 le complète, d’une part en réduisant de un mois à 15 jours le délai de consignation pour les denrées périssables et d’autre part, en donnant la possibilité à la DGCCRF de joindre à l’inventaire annexé au procès-verbal des photos numériques des marchandises. Cela semble raisonnable.

M. Michel Raison, rapporteur – Raisonnable, certes. Pour autant, le délai de consignation n’est pas lié à la nature des marchandises mais au temps nécessaire à la DGCCRF pour exercer son contrôle. Je donne donc un avis défavorable sur ce point, ainsi que sur le second, non sur le fond, mais parce que cela relève du domaine réglementaire.

M. Luc Chatel, secrétaire d’État  Avis défavorable. La première disposition n’est pas nécessaire, car le délai d’un mois fixé par la loi est un maximum. En second lieu, il n’est ni nécessaire ni opportun de nous prononcer sur les modalités d’établissement de l’inventaire joint au procès-verbal, car le juge doit conserver toute maîtrise pour apprécier la force probante des éléments qui lui sont soumis.

M. Jean Gaubert – La DGCCRF a également un pouvoir de consignation, indépendant du juge. J’observe que vos services insistent beaucoup sur la rapidité de dédouanement des cargaisons importées – en 15 minutes au Havre par exemple – mais qu’un délai de consignation de 15 jours n’est pas assez long. C’est un bien mauvais message pour les entrepreneurs locaux.

L'amendement 220, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Michel Piron – Il y a un délai important entre la date à laquelle le distributeur vend un produit périssable au consommateur et celle où il paye le fournisseur. L’amendement 166 réduit le délai de paiement pour ces produits.

M. Lionel Tardy – Seuls certains types de produits alimentaires sont soumis à des délais de paiement fixés par voie réglementaire. Pour les autres, ils le sont par voie contractuelle, et dans la pratique, sont souvent supérieurs à 30 jours. Notre amendement 162 tend à fixer ces délais à 30 jours pour l’ensemble des produits alimentaires. Les délais de paiement réglementés sont mieux respectés que les délais contractuels.

M. Michel Raison, rapporteur – La commission a émis un avis défavorable sur ces amendements, non sur le fond, mais parce qu’elle a considéré que ce dossier très important pour l’ensemble des entreprises devait être traité au cours des discussions à venir sur le prochain projet.

M. Luc Chatel, secrétaire d’État  Il s’agit en effet d’un sujet important, notamment pour les PME, qui n’ont pas la même solidité financière que les grandes entreprises, et plus de mal à obtenir un crédit bancaire. Mais il s’agit d’un problème global à traiter par filière. Le Gouvernement a privilégié la voie contractuelle, conformément à l’avis de la commission des pratiques commerciales. Un groupe de travail sur les délais de paiement dans la sous-traitance industrielle a débouché sur un accord pour la filière automobile qui permettra de réduire les délais de paiement pour les PME. Mais il ne faut pas en rester là. En effet, les délais de paiement s’établissent, en moyenne, à 66 jours en France contre 35 jours au Danemark, 47 jours en Allemagne, 52 jours en Grande-Bretagne et 59 jours dans l’Union européenne. M. Novelli a demandé un bilan à Jean-Paul Betbèze, le directeur de l’observatoire des délais de paiement, et j’ai chargé Mme Marie-Dominique Hagelsteen, ancienne présidente du Conseil de la concurrence de faire des propositions à ce sujet pour accompagner la mise en œuvre de la négociabilité des tarifs fournisseur. Les enjeux financiers sont très importants. En attendant, je demande le retrait de ces amendements.

M. Jean Gaubert – Nous ne pouvons tout de même pas accepter tout et n’importe quoi sous prétexte qu’il faut aller vite ! On nous répond systématiquement depuis une semaine que nous avons raison, mais qu’il faut encore y réfléchir. À quoi sert-il de faire une loi qui ne réglera qu’une partie du problème de M. Leclerc et n’en réglera aucun autre ? L’équilibre entre la petite PME qui a besoin de vendre et le grand distributeur qui peut s’approvisionner ailleurs n’existe pas : vous savez bien que la première acceptera les délais de paiement exigés par le second. Vous savez aussi l’importance des enjeux financiers – 11 milliards selon M. Leclerc. 11 milliards à 3 %, cela fait tout de même une belle somme ! Il y a véritablement urgence : votre immobilisme risque en effet de permettre au secteur bancaire et à la grande distribution de consommer ce qui reste de marge aux PME. Ne nous dites pas que ce n’est pas le moment, sinon ce n’était pas la peine de faire cette loi !

M. Philippe Folliot – Ces amendements sont de bons amendements. Les relations entre les PME et les grandes centrales d’achat s’apparentent bien souvent à la lutte du pot de terre contre le pot de fer : qu’il s’agisse des délais de paiement ou d’autres sujets, les relations contractuelles seront toujours défavorables aux PME. On sait que la grande distribution paye souvent les produits à ses fournisseurs longtemps après les avoir vendus : autrement dit, elle fait des produits financiers sur leur dos. Tout ce qui contribue à rééquilibrer cette relation doit donc être regardé d’un œil favorable.

M. André Chassaigne – Cela suffit ! Vous répondez certes de manière précise à tous les amendements qui sont défendus, mais c’est pour conclure qu’il faut encore consulter et finalement attendre la prochaine loi. En défendant ma question préalable la semaine dernière, j’avais justement attiré l’attention sur le fait que cette loi risquait de n’être qu’une coquille vide puisqu’un autre texte était attendu pour le printemps. Vous m’aviez alors répondu que cette loi était urgente !

Je voudrais m’adresser solennellement aux députés de la majorité. Vous défendez l’un après l’autre des amendements de bon sens qui permettraient de remédier aux difficultés des PME ou des producteurs agricoles. À chaque fois, ils sont repoussés ou retirés. Chacun se donne peut-être bonne conscience, mais aucun de ces amendements ne passe alors que nous savons tous qu’ils sont parfaitement justifiés : non seulement la grande distribution impose aux PME des délais de paiement qui les étranglent, mais elle se permet de faire de l’escompte en leur prêtant de l’argent ! Il y a de quoi être en colère ! J’ai participé à de nombreuses discussions sous la précédente législature : il y avait un minimum d’écoute. Il est inacceptable que la représentation nationale n’ait plus droit à la parole aujourd’hui !

M. François Brottes – Il faut soutenir ces amendements pour exclure la question des délais de paiement de la négociation qui aura lieu entre les pouvoirs publics et les grandes surfaces d’ici au prochain texte. Au nom de quoi payerais-je ma boulangère dans trois mois plutôt qu’aujourd’hui ? Les fournisseurs jouent en fait le rôle de banquier pour la grande distribution, qui gagne plus d’argent en faisant traîner les paiements qu’en faisant de la marge sur les produits vendus. C’est tout de même le comble dans une économie qui prétend reconnaître le travail de chacun !

M. Michel Piron – Ces amendements auront au moins eu trois mérites. Ils ont permis de rappeler que nous détenons le triste record des délais de paiement les plus longs d’Europe. Encore le chiffre que vous avez donné ne constitue-t-il qu’une moyenne : en réalité, cela peut aller jusqu’à 90 jours. Ces amendements ont aussi rappelé le déséquilibre qui prévaut dans la relation commerciale entre distributeur et fournisseur : des délais de paiement très longs permettent au premier de faire des placements avantageux, mais il signifient pour le second une augmentation du besoin de fonds de roulement. Nous avons enfin pu vous entendre dire, Monsieur le ministre, que vous ne récusiez pas ces amendements et que vous entendiez même fixer une limite aux délais de paiement dans le prochain texte. Je vous saurais gré de me le confirmer : c’est à cette seule condition que je retirerai mon amendement.

M. André Chassaigne – Chapeau ! C’est incroyable !

M. Lionel Tardy – Je partage l’analyse de M. Gaubert et de M. Brottes : le crédit interentreprises est certainement la plus importante banque de France, et c’est un scandale.

M. Philippe Folliot – Agissons !

M. Lionel Tardy – Je souhaite que vous apportiez au plus vite les solutions qui s’imposent, Monsieur le ministre. Dans cette attente, je maintiens mon amendement.

M. Michel Raison, rapporteur – À entendre certains orateurs, on pourrait croire qu’en matière de délais de paiement, c’est la jungle.

M. André Chassaigne – C’est le cas !

M. Michel Raison, rapporteur – Mais nos collègues proposent en réalité d’améliorer des dispositions du code de commerce qui sont déjà rigoureuses. Ne laissons pas croire que les délais de paiement seraient au bon vouloir des distributeurs !

M. Patrick Ollier, président de la commission – Très bien !

M. Luc Chatel, secrétaire d’État  Je confirme aux auteurs des amendements – en particulier à M. Piron, qui me l’a demandé – que le Gouvernement a la volonté d’avancer sur ce sujet. Ce n’est pas un vain mot : les travaux de l’observatoire des délais de paiement présidé par Jean-Paul Betbèze aboutiront d’ici à la fin de l’année ; d’autres travaux vont être entamés par Mme Hagelsteen. Ces travaux préalables sont importants pour mesurer l’impact de la mesure. Faut-il la réserver – comme vous le proposez – aux seuls produits alimentaires ou l’étendre à d’autres produits ? Faut-il en faire bénéficier les seules PME ou l’ensemble des entreprises ? N’oublions pas non plus que le raccourcissement des délais de paiement pourrait provoquer une hausse des prix. Le Gouvernement s’engage à aboutir sur ce sujet, mais il veut le faire dans le cadre de la remise à plat des conditions générales de vente. Il maintient donc son avis défavorable.

M. Jean-Paul Charié – Si nous avons tant de chômage en France, tant d’entreprises en faillite et si peu de recherche et développement, ce n’est pas parce que nos chefs d’entreprise seraient moins bons qu’ailleurs. C’est en partie parce que les crédits interentreprises sont trop élevés.

Les donneurs d’ordre, que ce soit dans la grande distribution, dans l’automobile ou dans d’autres secteurs, manquent également de solidarité envers les sous-traitants. Chacun sait combien la situation est différente en Allemagne, où les délais de paiement ne dépassent pas 30 jours.

Sur le fond, j’approuve ces amendements et j’ajoute que bien des problèmes d’urbanisme commercial seraient résolus si certaines pratiques étaient davantage maîtrisées.

Cela dit, une réduction brutale des délais de paiement serait une catastrophe économique. Étant donné que le ministre s’est engagé à agir dans un avenir proche, mieux vaudrait retirer ces amendements.

L'amendement 166 est retiré.

L'amendement 162 mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Philippe Armand Martin – L’amendement 195 vise à étendre à toutes les interprofessions les modalités de paiement actuellement applicables dans certaines régions.

M. Michel Raison, rapporteur – Cet amendement d’harmonisation est bienvenu.

M. Luc Chatel, secrétaire d’État – Étant un élu de Champagne-Ardenne, j’espère qu’on ne me soupçonnera pas d’être juge et partie (Sourires). Sur cet amendement qui tend à aligner les régimes juridiques en vigueur, je m’en remets à la sagesse de l’Assemblée.

M. François Brottes – Je n’ai pas d’objection particulière contre cet amendement, mais je m’étonne de ce traitement à géométrie variable : pourquoi différer les dispositions concernant les PME et accepter celles qui concernent le vin de champagne ? Il y a deux poids et deux mesures ! C’est un peu méprisant pour les PME et les autres fournisseurs.

M. Jean Dionis du Séjour – On ne déplacera pas sans conséquences près de 11 milliards d’euros : il faudra bien que quelqu’un finisse par payer la facture – soit les producteurs, soit les consommateurs… Une réflexion étant engagée sur ce sujet, il n’est pas aberrant d’attendre encore un peu. C’est pourquoi je me suis abstenu sur l’amendement précédent.

Cependant, M. Brottes n’a pas tort : ne faisons pas une chose et son contraire ! Le champagne est une cause nationale (Sourires), mais il n’y pas d’urgence. La situation financière est excellente dans cette filière…

M. Serge Poignant – Il faudra effectivement revoir les délais de paiement dans tous les domaines, au-delà du secteur alimentaire, et le ministre a raison d’insister sur la nécessité d’une étude d’impact.

Toutefois, ne nous égarons pas : cet amendement ne tend pas à modifier les délais de paiement, mais seulement à sécuriser les dispositions en vigueur.

L'amendement 195, mis aux voix, est adopté.

M. Philippe Armand Martin – L’amendement 194 tend à harmoniser le régime applicable à l’ensemble des produits viticoles, qu’il s’agisse des vins, mais aussi des raisins et des moûts. Il serait souhaitable que tous les producteurs bénéficient des mêmes délais.

M. Michel Raison, rapporteur – Avis favorable.

M. Luc Chatel, secrétaire d’État – Même position que sur l’amendement précédent : sagesse.

M. Serge Poignant – Je regrette que l’amendement s’oriente vers un délai de paiement de 75 jours. 30 jours seraient préférables… Je m’abstiendrai donc.

M. Jean Gaubert – Je constate que les débats sur les moûts sont assez vifs (Sourires). Je le répète : il est étonnant qu’il y ait deux poids et deux mesures. Vous vous inquiétez de certaines situations particulières, mais vous laissez de côté les PME alors qu’elles vont souffrir de la hausse des taux d’intérêt – deux points de plus, cela représente parfois plus que leurs marges !

Je n’accepte pas non plus l’idée que toutes ces mesures désorganiseraient le système : seules les marges de la grande distribution seraient affectées. Pourquoi les conforter dans leurs pratiques ?

M. Luc Chatel, secrétaire d’État – Il n’y pas deux poids et deux mesures : ces amendements ne tendent pas à prendre des mesures spécifiques pour le vin de champagne ou pour les moûts. Il s’agit au contraire d’un alignement sur le droit commun.

L'amendement 194, mis aux voix, est adopté.

M. Jean Gaubert – Rappel au Règlement. Nous avons appris, par une dépêche de presse, que Nicolas Sarkozy devrait s’exprimer jeudi sur le pouvoir d’achat. Ne vaudrait-il pas mieux attendre jusqu’à cette date ?

Si tous nos amendements sont repoussés, c’est peut-être parce que vous craignez un décalage avec ce que devrait annoncer le Président de la République. Nous ne sommes pas à quelques jours près !

M. Michel Piron – L’amendement 167 concerne toujours les délais de paiement. Je vais le retirer mais j’insiste sur le fait qu’il faudra fixer des règles plus contraignantes, y compris peut-être par filière et par produit.

L'amendement 167 est retiré.

M. André Chassaigne – L’amendement 295 revient sur une forme de racket pratiquée par la grande distribution, le référencement. Celui-ci consiste à faire payer au fournisseur un droit d’entrée – non prévu par le code de commerce – qui peut atteindre, par type de produit, 150 euros pour un supermarché et 350 euros pour un hypermarché. La somme étant multipliée par le nombre de magasins distributeurs, cette pratique aboutit à exclure les petits fournisseurs. Nous proposons qu’elle soit très sévèrement sanctionnée.

M. Michel Raison, rapporteur  La facturation du référencement est d’ores et déjà sanctionnée en application de l’article L. 442-6 du code de commerce, et la sanction peut dépasser, me semble-t-il, les 100 000 euros d’amende que vous proposez. En revanche, vous proposez d’y associer une peine de quatre ans d’emprisonnement, ce qui est assez inédit en matière de relations commerciales… Pourquoi appliquerait-on une sanction différente de celles applicables à d’autres pratiques déloyales ? Avis défavorable.

M. Luc Chatel, secrétaire d’État  Même position.

M. André Chassaigne – Monsieur le rapporteur, ne nous dites pas que le code de commerce ne prévoit pas de peine d’emprisonnement : l’article L. 443-2, par exemple, en prévoit une de deux ans !

M. Daniel Fasquelle – Le référencement abusif est déjà sanctionné, mais cet amendement pose la question plus générale de la nature – pénale ou civile – des sanctions. Je partage l’idée que parfois, les sanctions ne sont pas assez sévères, mais mieux vaudrait renforcer les sanctions civiles.

L'amendement 295, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean Gaubert – Sur notre amendement 263, peut-être allons-nous avoir pour une fois gain de cause… Il s’agit cette fois des retours au fournisseur – non pas au moment de la livraison, ce qui est parfois justifié même s’il y a des abus –, mais pour cause d’invendus : nous proposons de les interdire. Le distributeur doit en effet assumer son achat ; la France est le seul pays que je connaisse où l’on pratique le retour des invendus.

M. Michel Raison, rapporteur Avis défavorable. Grâce à vous, Monsieur Gaubert, une disposition avait été introduite dans la loi Dutreil sur ce sujet ; mais ce que vous proposez aujourd’hui risquerait de se retourner contre le fournisseur : si on interdit tout retour, les distributeurs se montreront très tatillons et refuseront la marchandise au moindre doute.

M. Jean Gaubert – C’est déjà le cas…

M. Luc Chatel, secrétaire d’État Monsieur Gaubert, l’adoption de votre amendement aurait pour effet de supprimer les accords non abusifs de retour qui existent aujourd’hui entre des fournisseurs et des distributeurs, par exemple dans le secteur des produits frais ou pour les journaux, et qui visent à présenter le produit dans le magasin en quantité suffisante pour répondre à la demande. C’est la raison pour laquelle j’émets un avis défavorable.

M. André Chassaigne – Il arrive qu’à l’occasion d’une promotion, par exemple, le fournisseur réalise un conditionnement particulier, avec un étiquetage spécifique ; le retour des invendus va l’obliger à défaire ce conditionnement, ce qui représentera encore un travail de manutention important, avant de finalement brader le produit : voilà à quoi les PME dont nous recevons les témoignages en sont réduites, avec à la clé un risque de faillite !

M. François Brottes – Nous avons collectivement inventé des magasins d’État privés : les règles d’urbanisme mettent des grandes surfaces dans une situation de monopole de fait ; de ce fait, des PME, des agriculteurs sont obligés de passer par elles pour écouler leurs produits, ce qui les amène à accepter toutes leurs conditions, des délais de paiement jusqu’à la récupération des invendus. Tout est lié ! Le ministre aurait pu, s’il avait voulu, déposer un sous-amendement précisant « sauf accord explicite du fournisseur »…

M. Philippe Folliot – Nous sommes tous – ou presque – partisans de l’économie de marché, qui ne va pas sans les principes de responsabilité et d’équilibre. La responsabilité est, par définition, celle du distributeur, qui subit le risque inhérent à son activité commerciale ; on ne conçoit pas le métier de commerçant sans risque. En outre, les relations entre les PME et les centrales d’achat ne sont pas équilibrées. L’amendement allant dans le bon sens, il conviendrait de le sous-amender de la manière proposée par M. Brottes, pour parvenir à un équilibre.

M. Jean Dionis du Séjour – Monsieur le Président, ayant la délégation du groupe Nouveau centre, je souhaite déposer un sous-amendement dans les termes exprimés par notre collègue M. Folliot.

M. Jean-Paul Charié – Cela ne va rien changer, en raison du rapport de force !

M. le Président – Je suis saisi d’un sous-amendement 329 : « Compléter l’alinéa 2 de cet amendement par les mots : sauf accord explicite de ce dernier. »

M. Michel Raison, rapporteur – Avis défavorable, à titre personnel, à une disposition qui, figurant déjà dans le code de commerce, ne sert à rien.

M. Luc Chatel, secrétaire d’État  Même avis.

M. Jean-Paul Charié – J’ai dit, au nom du groupe UMP, que l’actualité nous conduirait sans doute à envisager la négociabilité des tarifs, mais à condition qu’il y ait un engagement des acheteurs pour ne pas être « en dépôt vente », pour reprendre une expression de M. Gaubert que j’ai beaucoup aimée. Il y a en effet de gros problèmes de retours d’invendus. En tout état de cause, on ne peut pas traiter des problèmes qu’en vingt ans aucun gouvernement n’a été capable de résoudre, en adoptant un amendement à la sauvette ! Car, à côté de la loi que nous faisons, il y a aussi la loi du marché : tant qu’on n’aura pas trouvé des solutions au rapport de force, au chantage, au racket, aux abus de position dominante, tout ce que nous ferons ici ne servira à rien. J’approuve donc pleinement le Gouvernement, qui souhaite remettre à plat l’ensemble de ces questions ; la solution ne passe pas par la « sur-régulation », mais par le changement des pratiques.

M. le Président – Sur le vote de l’amendement 263, je suis saisi par le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche d’une demande de scrutin public.

M. Jean Gaubert – Chaque fois que l’opposition soulève un problème, on nous répond, soit que la proposition est satisfaite, soit que le moment n’est pas venu. Pourquoi présenter une loi si le moment n’est pas venu ou si tout est déjà dans le code ? Au fond, ce texte n’est-il pas fait uniquement pour rendre service à M. Leclerc, devenu le porte-parole de l’Élysée sur les questions de consommation ? (Protestations sur les bancs du groupe UMP)

Mme Claude Greff – N’importe quoi !

M. Michel Raison, rapporteur  Monsieur le député, nous sommes à l'Assemblée nationale, et non à l’Élysée.

M. François Brottes – On en doute parfois !

M. Michel Raison, rapporteur – Quand nous répondons que le moment n’est pas venu, c’est que le texte repose sur un équilibre réfléchi, et qu’il ne convient pas d’adopter, sans réflexion préalable, des propositions qui viendraient le bouleverser. Et quand nous répondons qu’une proposition est satisfaite, c’est que nous mettons les mots sur la réalité telle qu’elle est ; qu’y puis-je, si cela ne vous plaît pas ? La présente proposition figure à l’article L. 442-6 du code de commerce : « De procéder au refus ou retour de marchandises (…) sans même que le fournisseur n’ait été en mesure de contrôler la réalité du grief correspondant. »

MM. François Brottes et André Chassaigne – Hors sujet !

Le sous-amendement 329, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean Gaubert – Nous opposer systématiquement des articles du code qui ne répondent pas aux questions que nous posons ou qui ne sont pas appliqués, ne fait pas honneur au Parlement ! Hier soir, lorsque j’ai demandé quand quelqu’un était allé voir les centrales d’achat, qui continuent de pratiquer le référencement alors que la loi l’interdit, j’ai bien vu comment se décomposaient les figures de vos conseillers ; car personne ne l’a jamais fait !

M. Patrick Ollier, président de la commission – C’est faux !

Mme Claude Greff – C’est l’argument de trop !

M. Jean Gaubert – Le rôle des députés est aussi de veiller à ce que la loi soit appliquée.

À la majorité de 52 voix contre 31 sur 83 votants et 83 suffrages exprimés, l’amendement 263 n’est pas adopté.

M. André Chassaigne – L’article L. 462-3 du code de commerce dispose : « Le conseil peut être consulté par les juridictions sur les pratiques anticoncurrentielles. » Notre amendement 306 prévoit une consultation obligatoire du Conseil de la concurrence lorsqu’il y a un risque de pratique anticoncurrentielle, notamment pour le renouvellement de contrats de délégation de service public ou la passation d’appels d’offre relatifs à la distribution et à l’assainissement de l’eau. Cette obligation ne concernerait que les communes de plus de 100 000 habitants.

M. Michel Raison, rapporteur – Avis défavorable, ne serait-ce que parce que l’amendement est hors sujet.

M. André Chassaigne – Tout est hors sujet, avec vous !

M. Michel Raison, rapporteur – Sur le fond, si les collectivités de plus de 100 000 habitants, qui possèdent les moyens et l’expertise nécessaires pour organiser leurs délégations de service public, doivent saisir le Conseil de la concurrence, ce dernier ne pourra plus venir en aide aux collectivités plus faibles, en raison de l’encombrement de son agenda ; ce serait contre-productif.

M. Luc Chatel, secrétaire d’État  Les collectivités locales qui le souhaitent peuvent déjà solliciter l’avis du Conseil de la concurrence, en vertu de l’article L. 462-1 du code de commerce. Rendre cette consultation obligatoire serait porter atteinte au principe d’autonomie des collectivités territoriales. À défaut d’un retrait de l’amendement, le Gouvernement émettra un avis défavorable.

M. André Chassaigne – Je ne vois pas pourquoi cet amendement serait hors sujet ! Si la question de la transparence et de la concurrence se pose dans le domaine de la consommation, c’est bien pour l’assainissement et la distribution de l’eau. Je trouve cette réponse surréaliste.

M. Michel Raison, rapporteur – Ce texte concerne les consommateurs, pas les communes !

M. André Chassaigne – Notre proposition de résolution visant à créer une commission d’enquête chargée d’étudier l’impact des délégations des services publics de l’eau sur les prix et la transparence du service rendu est restée lettre morte, comme celle, semblable, des socialistes, malgré l’approbation de nombreux députés de la majorité. Lorsqu’il s’agit de transparence et de concurrence dans le domaine de l’eau, on tire le rideau – comme sur bien des sujets…

M. Jean Dionis du Séjour – Nos débats deviennent un peu tendus, et nous le comprenons, car un certain nombre d’amendements, qui résultaient d’un travail parlementaire arrivé à maturité, auraient pu être adoptés. J’espère que le ministre saura faire preuve ce soir de l’ouverture qui d’ordinaire le caractérise et que le rapporteur sera au diapason.

S’agissant de l’amendement 306, nous y sommes opposés car le contrôle de légalité est effectué par la préfecture. D’autre part, le Nouveau centre, respectueux du principe de libre administration des collectivités territoriales, n’aime pas qu’on impose aux communes des obligations.

M. André Flajolet – La demande de M. Chassaigne est satisfaite par la création – dans la loi sur l’eau – de l’Office national de l’eau et des milieux aquatiques, chargé de faire les vérifications générales concernant le prix de l’eau et d’analyser objectivement les situations.

L'amendement 306, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. André Chassaigne – L’intervention de M. Flajolet, qui prend ce débat en cours, pourrait paraître pertinente, si l’on ne savait que le contrôle de l’ONEMA n’est pas obligatoire.

M. le rapporteur et M. le ministre s’appuient souvent sur la législation et la réglementation existantes pour rejeter les amendements. Pourtant, bien des lacunes existent dans leur application et les moyens de coercition ne sont pas suffisants pour faire cesser les pratiques de racket pourtant avérées.

Par l’amendement 290, nous proposons donc de créer un observatoire national du commerce, qui aurait pour mission d’analyser les écarts de prix entre produits et de constater les pressions exercées par les distributeurs sur les fournisseurs. Ses conclusions, par ailleurs, pourraient nous éclairer dans l’élaboration de la prochaine loi – qui semble devoir, d’un coup de baguette magique, résoudre les problèmes soi-disant insolubles aujourd’hui…

M. Michel Raison, rapporteurC’est une idée si bonne que Mme Lagarde l’a déjà eue, en créant l’observatoire des coûts et des prix. Vous pourriez d’ailleurs en rejoindre, au titre de l’ouverture, la direction… (Sourires)

M. Jean Gaubert – Il le mérite !

M. Luc Chatel, secrétaire d’État – Avis défavorable, pour la même raison.

M. André Chassaigne – Je considère que mon amendement est satisfait. Mais j’attends de voir quels seront les moyens mis à la disposition de cet observatoire, et si, véritablement, il dénoncera les abus et les rackets pratiqués dans la grande distribution.

L’amendement 290 est retiré.

M. Jean Gaubert – L’un des principaux problèmes auxquels se heurte l’organisation du commerce dans les centres-villes tient à la difficulté, pour les unions de commerçants, de recouvrer les cotisations. L’amendement 257, inspiré des cotisations volontaires obligatoires du monde agricole, vise à imposer la cotisation à tous les commerçants du périmètre concerné par une union commerciale dès lors que la moitié d’entre eux au moins en auraient ainsi décidé.

M. Patrick Ollier, président de la commission – Et la liberté ?

M. Jean Gaubert – C’est ainsi que les organisations agricoles ont réussi à peser dans le débat politique et dans les négociations commerciales. Le président de la chambre de commerce de mon département, ainsi que celui de la chambre des métiers, m’ont suggéré cette proposition.

M. Michel Raison, rapporteur – Je suis sensible à cet amendement, comme à beaucoup d’autres présentés par l’opposition. Mais peut-on comparer ce qui existe dans l’agriculture et ce qui se fait dans le commerce ? Cet amendement, par ailleurs, ne correspond pas au sujet de ce texte, qui est, je le rappelle, la concurrence au service du consommateur.

En tant que rapporteur, j’ai travaillé sur ce texte et auditionné l’ensemble des acteurs qu’il concernait. Je considérerais de mauvaise pratique que d’adopter un tel amendement sans avoir, au préalable, entendu les commerçants à ce sujet.

M. Luc Chatel, secrétaire d’État – Les commerçants doivent conserver la liberté d’adhérer ou non à une union. Avis défavorable.

M. Jean Gaubert – On en revient à l’image du renard libre dans le poulailler libre…

M. Michel Raison, rapporteur – Ça n’a rien à voir !

M. Jean Gaubert – Beaucoup de maires, quelle que soit leur couleur politique, veulent dynamiser leur centre-ville face aux zones commerciales périphériques. Les unions de commerçants peuvent y participer, si tant est qu’elles soient en mesure de recouvrer leurs cotisations. Avouez que vous ne voulez pas agir en faveur des centres-villes, mais n’ajoutez pas à votre bonhomie un zeste de mauvaise foi, cela ne constitue en rien une bonne réponse.

M. Jean-Paul Charié – Nous aurons besoin de réfléchir à cette question dans les mois qui viennent. Mais il est aussi important de faire évoluer les comportements – beaucoup de commerces de centre-ville, par exemple, ferment pendant la pause du déjeuner – que de modifier la loi. S’il est vrai que les unions commerciales peuvent participer à la redynamisation des centres-villes, obliger les commerçants à y participer ne changerait rien. Il faudrait plutôt les convaincre de l’intérêt qu’ils ont à travailler ensemble. C’est donc, une fois encore, un vrai sujet, mais il n’y a pas lieu de le traiter dans une loi. À la différence des socialistes, nous savons qu’il faut faire évoluer les comportements autrement que par la loi, en profitant notamment de la capacité d’entraînement du Président de la République actuel.

M. Patrick Ollier, président de la commission – Lorsque la municipalité entretient de bonnes relations avec ses commerçants de centre-ville, l’organisation d’unions de commerçants ne pose pas de problème particulier. Plus fondamentalement, si nous refusons cet amendement, c’est parce qu’il propose de créer un objet juridique non identifié,…

M. Jean Gaubert – Cela existe en agriculture !

M. Patrick Ollier, président de la commission – …avec le « groupement d’intérêt commercial et artisanal », qui n’est ni une association loi 1901, ni un GIP, ni une union syndicale… Revenez avec une proposition qui tienne au plan juridique et nous pourrons en débattre de manière constructive !

Mme Frédérique Massat – Avec les opérations de modernisation du pôle commercial et artisanal, nous disposons d’outils financiers – hélas non pérennes – qui nous permettent de mettre les différents acteurs autour de la table et de trouver des solutions adaptées. Comme l’a excellemment démontré M. Gaubert, nous avons besoin de dispositifs analogues pour dynamiser de manière durable nos commerces de proximité en centre-ville.

L'amendement 257, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Delphine Batho – Alors que les consommateurs sont très régulièrement incités à consommer au moins cinq fruits et légumes par jour, notre amendement 259 vise à rendre plus présente l’offre de vente de fruits et légumes frais dans les grandes surfaces.

M. Michel Raison, rapporteur – Le même amendement avait été déposé dans le cadre de la loi Dutreil et l’excellent rapporteur de l’époque (Sourires) en avait demandé le retrait pour des raisons de cohérence juridique et parce qu’il faut veiller à ne pas attenter à la liberté du commerce. On imagine mal d’imposer à une grande surface spécialisée dans le commerce de viande de consacrer 10 % de son activité à la vente de fruits et légumes. J’invite donc au retrait de cet amendement.

M. Luc Chatel, secrétaire d’État  Cet amendement est sympathique, mais comme l’a indiqué votre rapporteur, il va à l’encontre de la liberté du commerce. Mieux vaut favoriser la coopération entre filières et soutenir les campagnes conjointes des ministères de la santé, de l’éducation nationale et de l’agriculture tendant à encourager les jeunes à consommer davantage de fruits et légumes. Je vous invite, Madame Batho, à retirer votre amendement.

M. Jean Dionis du Séjour – En Lot-et-Garonne, les fruits, ça nous parle ! (Sourires) Mais force est d’admettre que nos enfants consomment quatre fois moins de fruits et légumes que nos grand-mères, et que l’on rame pour les faire changer ! En outre, il faudrait faire un gros travail sur la qualité de l’offre car il est loin d’être évident de conserver dans de bonnes conditions une pomme ou une poire dans un appartement parisien surchauffé. Bref, ce n’est pas par une mesure d’économie administrée – pour sympathique qu’elle soit – que l’on agira efficacement sur les comportements de nos compatriotes.

L'amendement 259, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Delphine Batho – S’agissant de l’amendement précédent, je reçois avec bienveillance le qualificatif de « sympathique » mais j’avoue que les arguments ne m’ont guère convaincue ! À vous entendre, ce n’est jamais le moment d’agir : laissons faire, laissons aller et tout ira mieux !

Parce que nous sommes convaincus qu’il est possible de faire évoluer les choses, notre amendement 260 vise à ce que les commerces alimentaires consacrent au moins 10 % de leurs investissements publicitaires à la promotion des fruits et légumes et à l’information nutritionnelle.

M. Michel Raison, rapporteur – Défavorable. Respectons la liberté du commerce et incitons plutôt les organisations professionnelles à agir de manière concertée pour mettre en valeur les qualités de leurs productions.

M. Luc Chatel, secrétaire d’État  Votre Assemblée s’est saisie de ce dossier au cours de la précédente législature et elle a tranché en faveur d’une position équilibrée. Désormais, les entreprises qui assurent la promotion de produits alimentaires par le biais de campagnes audiovisuelles doivent assortir leurs messages d’informations nutritionnelles. Le Gouvernement reprend à son compte cette approche du problème et invite au retrait de cet amendement.

M. François Brottes – M. Dionis du Séjour rejette avec hauteur notre proposition d’ « économie administrée » : je ne l’ai pas entendu tenir le même discours lorsqu’ont été débattues ici-même des mesures tendant à prévenir l’alcoolisme ou le tabagisme…

M. Jean Dionis du Séjour – Les enjeux sont autres.

M. François Brottes – Pour nous, la promotion d’une nouvelle approche nutritionnelle constitue un enjeu de santé publique suffisamment important pour qu’il puisse être envisagé de prendre des mesures un peu coercitives. M. le ministre nous dit qu’il ne nous revient pas d’intervenir sur les règles régissant le domaine de la publicité…

M. Luc Chatel, secrétaire d’État Je n’ai pas dit cela.

M. François Brottes – Ayant participé au groupe de travail numéro 6 du Grenelle de l’environnement, je crois pourtant me souvenir qu’il est envisagé de moraliser la publicité, et qu’à cet effet, la loi cadre découlant du Grenelle tendra à rendre les investissements publicitaires plus vertueux. Il est donc particulièrement regrettable que notre rapporteur se braque aujourd’hui contre une proposition qui ne fait qu’anticiper la suite des événements !

L'amendement 260, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Delphine Batho – Il y a pour nous une grande différence entre le fait de délivrer quelques informations nutritionnelles et l’ambition d’organiser la promotion de toute la filière des fruits et légumes.

Notre amendement 261 vise à ce que 20 % de la superficie promotionnelle des grandes surfaces soient réservés à des messages d’éducation sanitaire et nutritionnelle.

L'amendement 261, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean Gaubert – L’amendement 262 est défendu.

L'amendement 262, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean Gaubert – Dans de nombreux pays européens, les restaurateurs ont adopté une signalétique précisant aux convives s’ils consomment des produits frais, surgelés ou en conserve. Par l’amendement 208, nous demandons au Gouvernement de remettre un rapport au Parlement sur la possibilité d’adopter un tel dispositif en France. Pour nous, faire passer pour frais des produits surgelés – y compris dans des grands restaurants – relève de la tromperie sur la marchandise. Il faut y mettre bon ordre. D’autres pays, parfois plus libéraux que nous – encore que cela va devenir difficile – le font, pour mieux informer le consommateur. Ma circonscription est la première productrice de coquilles Saint-Jacques. Or beaucoup de restaurateurs vendent de la coquille Saint-Jacques d’Erquy « fraîche » alors que la pêche est fermée. Est-ce normal ?

M. Michel Raison, rapporteur – Avis défavorable. Notre pays est parmi les premiers pour la qualité de sa restauration. Pourquoi faire peser la suspicion sur nos établissements, et pourquoi leur imposer une charge supplémentaire, sans vraiment rendre service au consommateur ?

M. Luc Chatel, secrétaire d’État  Cet amendement instaure une obligation contraignante sans améliorer la garantie pour le consommateur. Aujourd’hui la chaîne du froid est très bien maîtrisée et permet de préparer des mets de qualité. En second lieu, là où vous préférez la coercition, nous choisissons l’incitation. Cet été, Mme Lagarde et moi-même avons signé un décret concernant les maîtres restaurateurs, dans le cadre du plan d’accompagnement de l’hôtellerie-restauration. Il valorise par un label certaines pratiques professionnelles, comme le fait de ne pas recourir à des produits surgelés ou qui ne seraient pas préparés sur place. Ceux qui obtiendront cette distinction seront valorisés aux yeux du public. Avis défavorable sur l’amendement.

M. Jean Gaubert – Vos arguments ne m’ont pas convaincu. La question n’est pas de savoir si les produits surgelés sont bons ou mauvais – la coquille Saint-Jacques surgelée peut être bonne – mais d’être honnête avec le client. On peut toujours inciter. Mais les automobilistes n’ont pas réduit leur vitesse tant qu’on s’est contenté de les y inciter.

M. Michel Raison, rapporteur – Ils l’ont fait quand la droite est arrivée au pouvoir.

M. Jean Gaubert – On aurait peut-être dû agir avant.

En tant que rapporteur des crédits de la consommation, j’ai entendu à Roissy des agents de la DGCCRF, qui contrôlent les importations, dire qu’ils avaient une liste de restaurants à Paris qu’ils ne fréquenteraient jamais. Il n’est pas anormal que les autres consommateurs soient informés de pratiques qui portent tort à la grande majorité des restaurateurs, qui sont des professionnels sérieux.

Mme Catherine Coutelle – La réponse du ministre m’étonne un peu. Nous demandons une information des consommateurs, ce qui est bien l’objet de la loi, et il nous parle de coercition. Demander qu’ils sachent ce qu’il y a dans leur assiette, ce n’est pas jeter l’opprobre sur la profession. C’est aller dans le sens de la protection du consommateur. C’est un excellent amendement.

L'amendement 208, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. André Chassaigne – Peut-être allons-nous vivre un moment historique dans ce débat : l’adoption d’un amendement de l’opposition. Je vais donc présenter avec délicatesse notre amendement 311 qui demande au Gouvernement un rapport sur les conséquences pour la santé des produits alimentaires à bas prix. Je suis tout fait convaincu que nous avons fait de réels progrès sanitaires, et il n’est donc pas question de jeter l’anathème sur l’agroalimentaire. Cependant des études scientifiques démontrent la possible nocivité des produits alimentaires à bas prix qui ne sont pas soumis à suffisamment de contrôles de qualité. Les magasins de hard discount se sont développés, avec la grande pauvreté. Certains produits bio ou de terroir ne donnent lieu qu’à des contrôles limités. La pression des distributeurs sur les producteurs va s’accentuer. Ainsi, selon la présidente de Nutrimarketing, on peut faire beaucoup pour remplacer les matières nobles, des yaourts sans lait aux steaks avec 50 % de soja. Faisons donc la transparence, en votant un premier amendement de l’opposition.

M. Michel Raison, rapporteur – Cela part d’un bon sentiment. Mais pourquoi faire un rapport seulement sur les produits à bas prix ?

M. André Chassaigne – Pour savoir !

M. Michel Raison, rapporteur – À quel seuil commencer ? Et il y a des produits chers qui posent des problèmes pour la santé, y compris des produits bio. D’autre part, l’étiquetage donne tous les renseignements nécessaires sur la composition. Enfin, l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments donne, sur son site, des informations nutritionnelles. Elle participe au programme national « nutrition santé », et elle publie des rapports – cela devrait vous plaire – par exemple sur la restauration scolaire. Adopter un tel amendement ne ferait que jeter le trouble.

M. Luc Chatel, secrétaire d’État  Les pouvoirs publics sont très attentifs aux questions d’alimentation. Ainsi le programme national « nutrition santé » comporte des actions sur la nutrition pour les personnes les plus défavorisées sur le plan socioéconomique ou éducatif. Dans le cadre du programme de santé publique, des travaux sont en cours pour améliorer la composition nutritionnelle de l’ensemble de l’offre alimentaire. La révision en cours de la directive sur l’étiquetage des denrées alimentaires préemballées améliorera également l’information des consommateurs. Enfin, il serait difficile de traiter spécifiquement des produits alimentaires à bas prix. Avis défavorable.

L'amendement 311, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. André Chassaigne – Nous constatons depuis le début de ce débat que de nombreuses dispositions législatives ou réglementaires ne sont pas appliquées faute de contrôle suffisant. Il semble ainsi qu’il manque des fonctionnaires à la DGCCRF, puisqu’elle ne peut pas effectuer tous les contrôles qui s’imposent. Dans un souci de transparence, l’amendement 312 propose donc que le Gouvernement dépose devant le Parlement, avant le 31 janvier 2008, un rapport – encore un, Monsieur le rapporteur – sur les moyens de la DGCCRF, afin de savoir s’ils sont suffisants pour lui permettre de remplir ses fonctions.

M. Michel Raison, rapporteur – Mais nous aimons aussi les rapports, Monsieur Chassaigne ! (Sourires) Nous disposons d’ailleurs déjà d’un rapport sur les moyens de la DGCCRF, dont vous ne suspecterez pas l’impartialité : celui de Jean Gaubert sur les crédits de la consommation pour 2008. Je vous invite donc à retirer cet amendement.

M. Luc Chatel, secrétaire d’État  Au-delà de l’excellent rapport de M. Gaubert, vous trouverez la réponse à votre question dans le projet de loi de finances pour 2008. Vous constaterez d’ailleurs que les moyens affectés à la DGCCRF sont équivalents à ceux qui étaient prévus pour 2007. L’action en faveur de la consommation et de la protection des consommateurs est donc une priorité pour le Gouvernement.

M. Jean Gaubert – Je ne résiste pas au plaisir de rappeler ce qu’il y a dans mon excellent rapport, Monsieur le ministre ! Certes, la situation est « moins pire » qu’ailleurs. Mais vous élargissez considérablement les compétences de la DGCCRF – ce qui est nécessaire. Vous supprimez pourtant dix-sept de ses emplois cette année, et vous n’augmentez pas ses crédits, alors que les traitements et les coûts de transport des agents, eux, vont augmenter. Ne nous dites donc pas que c’est un bon budget ! Il est simplement moins mauvais que d’autres.

L'amendement 312, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean Gaubert – Je pense enfin tenir le bon bout avec l’amendement 209 rectifié (Sourires). Il s’agit en effet de créer un poste de médiateur de la consommation. Permettez-moi de vous lire quelques passages de l’excellent rapport rédigé en son temps par un excellent parlementaire, M. Chatel. La multiplication des médiateurs dans les grandes entreprises et en particulier dans les services publics, disait-il, est problématique car « le risque de développement d’une médiation sauvage ne peut être écarté. On a en effet ouvert un véritable marché de la médiation sans se donner les moyens de l’encadrer. De ce fait, le système peut jouer au détriment d’un consommateur ne disposant pas des outils nécessaires concernant l’accès à une véritable médiation, la lisibilité des dispositifs qui lui sont proposés et la réalité des garanties censées lui être apportées. » Il proposait donc d’instituer un médiateur national de la consommation, à l’image de ce qui existe par exemple en Suède. Vous aviez parfaitement raison, Monsieur le ministre : un médiateur d’entreprise ne peut avoir aux yeux du public la même indépendance que celle qu’aurait ce médiateur de la consommation.

M. Michel Raison, rapporteur – Avis défavorable.

M. Luc Chatel, secrétaire d’État Vous ne me prendrez pas en défaut sur ce terrain. Je reste favorable à la médiation, dernière étape non judiciaire et facultative du processus de traitement des litiges. Elle porte déjà ses fruits dans certains secteurs – je pense à la Poste, aux nouvelles technologies, à l’énergie, à la banque – même si les consommateurs peuvent s’interroger sur l’impartialité du médiateur en question. Reste que nombre de secteurs ne sont pas couverts. C’est donc le Médiateur de la République, M. Delevoye, qui traite les recours dans les domaines – par exemple – du crédit ou du surendettement. Il nous faudra discuter avec lui pour mettre en place cette médiation de la consommation. Le Gouvernement souhaite d’autre part mettre en place d’ici quelques mois une action de groupe dans notre pays. Mais avant cette phase ultime, il faudra en passer par une médiation de la consommation. Pour ces deux raisons, je vous invite à retirer cet amendement.

M. Jean Gaubert – Vous êtes peut-être favorable à cette médiation de la consommation dans l’esprit, mais dans les faits, vous ne l’êtes pas ! Nous avons soulevé de multiples problèmes depuis le début de ce débat : à chaque fois, on nous a répondu que ce n’était pas le moment ! Nous pourrions dès lors retirer tous nos amendements, mais ce n’est pas le rôle des députés de l’opposition. Je pense d’ailleurs que c’est parce que nos propositions sont bonnes que vous ne voulez pas les accepter : vous espérez les reprendre à votre compte dans quelques semaines. J’ai défendu tout à l’heure un amendement qui reprenait une question écrite de M. Raoult : vous l’avez repoussé !

L'amendement 209 rectifié, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. André Chassaigne – Je vais vous démontrer que Jean Gaubert est de mauvaise foi : un amendement de l’opposition peut être adopté !

J’avais posé en septembre 2005 une question sur les enchères électroniques – dites à distance – inversées. Je rappelais qu’elles bénéficient surtout aux grandes entreprises et pénalisent en général les PME, qui ne sont pas en mesure d’y répondre. Le ministre de l’époque m’avait répondu de manière précise, en me rappelant les progrès permis par la loi du 2 août 2005 et le nouvel article L. 442-10 du code de commerce. Il concluait que l’élaboration de codes de déontologie entre fournisseurs et distributeurs devait être encouragée, car elle permettait de fixer les conditions d’un fonctionnement transparent et équilibré de ce mode d’achat. Certains acteurs économiques avaient déjà initié de telles démarches, qui reposaient cependant sur les opérateurs eux-mêmes. L’amendement 287 vise à prévoir dans la loi la création de ce code de déontologie afin de promouvoir de bonnes pratiques.

M. Michel Raison, rapporteur – La commission a donné un avis défavorable à cet amendement. Elle craint en effet que ce code de déontologie soit plus rédigé par l’acheteur que par le vendeur.

M. Luc Chatel, secrétaire d’État Même avis.

L'amendement 287, mis aux voix, n'est pas adopté.

AVANT L’ARTICLE 6

Mme Marie-Jo Zimmermann – L’amendement 16 fait suite à une proposition de loi que j’avais déposée, et qui a recueilli près de 190 signatures. La multiplication des numéros de téléphone surtaxés – ceux qui commencent par 08 – est très coûteuse pour nos concitoyens. Notre amendement tend donc à interdire la surfacturation des délais d’attente et de mise en relation avec une personne physique. Le pouvoir d’achat des consommateurs y gagnerait…

M. Michel Raison, rapporteur Cette mesure me semble justifiée, mais j’observe que l’article 7 va plus loin que l’amendement de notre collègue.

Mme Marie-Jo Zimmermann – Ce n’est pas exact : ces dispositifs sont très différents…

M. Luc Chatel, secrétaire d’État – L’instauration de la gratuité des temps d’attente se heurte à des difficultés techniques : d’après un rapport du conseil général des technologies de l’information, en date de 2006, il faudrait près deux ans de travail avant de pouvoir appliquer cette mesure. Il est en effet nécessaire d’identifier le passage de la phase d’attente à la réponse, ce qui ne se fait pour le moment dans un aucun autre pays. C’est un dispositif très coûteux à élaborer, qu’il faudra bien répercuter sur le consommateur.

Pour toutes ces raisons, le Gouvernement a préféré s’en tenir à la question des hotlines, qui concentre le plus grand nombre de litiges. Il vous sera ainsi proposé à l’article 7 d’instaurer non seulement la gratuité du temps d’attente quand l’appel est passé depuis une ligne fournie par l’opérateur sollicité, mais aussi de ne pas surtaxer les appels. Nous pourrons également revenir sur la question des appels passés depuis les téléphones portables.

Je vous invite donc à retirer votre amendement, Madame Zimmermann.

Mme Frédérique Massat – J’observe que l’article 7 se cantonne aux opérateurs téléphoniques et aux prestataires d’accès à l’Internet, ce qui exclut d’autres opérateurs. Or, dans bien d’autres cas, notamment la vente à distance, il faut parfois quinze minutes d’attente avant que la demande soit traitée par un opérateur !

Mme Laure de La Raudière – Je reconnais que c’est un amendement de bon sens. Toutefois, il est aujourd’hui impossible de facturer différemment l’attente et la réponse à la demande si l’appel ne transite pas par les moyens mis à disposition par l’opérateur. Ce que vous proposez n’est pas applicable pour le moment.

Mme Catherine Coutelle – Le groupe SRC est favorable à cet amendement, mais j’entends bien l’argument de nature technique. Si ce que vous dites est vrai, il faudrait au moins que les administrations n’utilisent pas les numéros commençant par 08 !

M. Philippe Folliot – Comment accepter que les consommateurs paient pour un service qu’ils n’obtiennent pas ? C’est ubuesque ! Compte tenu de la rapidité des progrès techniques, je m’étonne également des délais invoqués pour l’application de cette mesure.

Quoi qu’il en soit, nous devons adopter cet amendement afin d’envoyer un message aux opérateurs. Vous verrez que la technique suivra ! (« Très bien ! » sur divers bancs)

M. Jean-Paul Charié – On se plaint souvent que les dispositions législatives ne soient pas appliquées. Mais ce n’est pas étonnant si on oublie les contraintes techniques, comme le fait cet amendement.

Certains collègues vous ont demandé un rapport sur les produits congelés, Monsieur le ministre. Pour ma part, je vous suggère de nous remettre un rapport sur les modalités permettant de répondre à cette attente légitime des consommateurs. En attendant, ne votons pas une disposition inapplicable. Ce serait discréditer le Parlement.

M. André Chassaigne – On peut toujours trouver des solutions aux obstacles pratiques ! Pour une fois que nous pouvons voter un amendement déposé par le groupe UMP, nous ne bouderons pas notre plaisir… (Sourires)

M. François Brottes – Ne nous égarons pas : ce n’est pas un débat technique, mais de principe. Il est certes normal de payer les communications, mais pas de surpayer le temps d’attente. Puisque le consommateur paiera de toute façon le produit qui lui sera livré ou la prestation rendue, il est possible de facturer autrement l’appel.

M. Jean-Paul Charié – C’est vrai, mais c’est un autre débat !

M. François Brottes – Mettons un terme à la surfacturation par le biais des numéros commençant par 08. Qui accepterait de payer avant même d’entrer dans un magasin ?

Mme Laure de La Raudière – Est-ce que les consommateurs attendent systématiquement quand ils appellent ce type de numéros ? Nous n’en savons rien, car il n’y a pas de statistiques à ce sujet. Avant de supprimer les numéros commençant par 08, il faut disposer d’une étude d’impact.

J’ajoute que parmi ces numéros il y a aussi des numéros gratuits. Voulez-vous les supprimer ? Enfin, s’il y a des abus, ils sont collectifs. Mieux vaudrait donc traiter de ce sujet à la faveur de la future loi sur les actions de groupe.

M. Jean Gaubert – Et voilà, il faudrait encore attendre six mois avant d’agir !

Mme Laure de La Raudière – J’ajoute que certains prestataires répondent à ces appels dans des délais très corrects. Ne l’oublions pas !

M. Philippe Folliot – Il ne s’agit pas de supprimer les numéros 08, mais de supprimer les abus. Je ne vois pas pourquoi cet amendement serait inapplicable : il suffirait, si le service ne peut être fourni, qu’une sonnerie indique que le numéro est occupé, comme quand on appelle un particulier.

M. le Président – Sur cet amendement 16, je suis saisi par le groupe SRC d’une demande de scrutin public.

M. Luc Chatel, secrétaire d’État  Monsieur Charié, je réponds favorablement à votre demande : je m’engage à produire dans les six mois un rapport sur la mise en œuvre technique d’une telle disposition. Je répète qu’elle nécessiterait au moins deux ans et que son coût serait considérable, alors qu’aucune étude d’impact n’a été faite. De plus, la disparition des numéros 08 entraînerait de facto celle de numéros qui sont gratuits, ainsi que celle de services à valeur ajoutée comme ceux de la SNCF ou de la météo.

Le Gouvernement vous propose de choisir le pragmatisme, en légiférant sur le secteur dans lequel on rencontre le plus grand nombre de litiges, qui est celui des communications électroniques : nous vous proposons que le temps d’attente soit gratuit et que la mise en relation ne soit pas surfacturée.

Puisque cet amendement n’est pas retiré, j’émets un avis défavorable.

M. Jean Gaubert – Mme de La Raudière a beaucoup de chance si elle n’a jamais subi de longs temps d’attente sur ces numéros… Il est normal de payer pour un service, mais pas pour attendre ! Un petit opérateur Internet m’a d’ailleurs dit que si nous votions cette disposition, il perdrait 15 millions : voyez l’enjeu ! Si cette loi vise à protéger le consommateur, il faut adopter cet amendement.

À la majorité de 64 voix contre 21 sur 87 votants et 85 suffrages exprimés, l’amendement 16 est adopté.

M. Jean Gaubert – L’amendement 119 est défendu.

L’amendement 119, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n’est pas adopté.

M. Jean Gaubert – L’amendement 106 permet aux consommateurs de bénéficier d’informations détenues par les opérateurs téléphoniques et propres à éclairer leurs choix.

M. André Chassaigne – Dans le même but, notre amendement 281, identique, demande aux opérateurs d’adresser chaque mois à leurs clients une information détaillée sur leurs consommations : cela permettrait à chacun de savoir, par exemple, s’il a intérêt à choisir Orange ou SFR, qui proposent des formules d’appels illimités vers leur réseau, ou Bouygues Télécom, qui propose des appels illimités vers tous les opérateurs de 20 heures à minuit ; ou encore, à partir de sa consommation de SMS, de savoir s’il vaut mieux pour lui les acheter au détail ou en lot.

M. Michel Lezeau – L’amendement 57 rectifié a le même objet.

M. Jean Dionis du Séjour – L’amendement 230 est identique au 57 rectifié.

M. Michel Raison, rapporteur – Ces amendements sont satisfaits par l’arrêté du 1er février 2002, qui prévoit la production gratuite de factures détaillées – même si elles ne sont pas très faciles à lire… J’invite donc leurs auteurs à les retirer.

M. Luc Chatel, secrétaire d’État En vertu de cet arrêté, en effet, une facture détaillée doit être remise gratuitement à tout consommateur qui en fait la demande. Je souhaite donc le retrait de ces amendements ; à défaut, j’en demande le rejet.

Les amendements 106 et 281, mis aux voix, ne sont pas adoptés, non plus que les amendements 57 rectifié et 230.

M. Jean Gaubert – Les amendements 101 et 99 sont défendus.

Les amendements 101 et 99, repoussés par la commission et par le Gouvernement, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.

Mme Corinne Erhel – Notre amendement 98, qui répond à une demande des consommateurs, tend à limiter à 12 mois la durée d’engagement, qui actuellement est généralement de 24 ou 36 mois – alors que le consommateur ne peut évidemment savoir si l’offre sera encore intéressante pour lui à cet horizon.

M. André Chassaigne – L’amendement 280 rectifié a le même objet.

M. Michel Raison, rapporteur – Avis défavorable.

M. Luc Chatel, secrétaire d’État Avis défavorable également, l’amendement 42 adopté par la commission étant plus adéquat.

M. François Brottes – J’avais cru comprendre, au vu de vos annonces préalables à la présentation de ce projet, que vous teniez particulièrement à la durée de 12 mois. Or, vous nous renvoyez à présent à un amendement qui limite considérablement la portée de votre engagement. Qu’est-ce qui justifie un tel changement de votre part ?

M. Luc Chatel, secrétaire d’État En France, 75 % des forfaits de téléphonie mobile sont souscrits pour une durée minimum de 24 mois ; la concurrence ne joue en fait qu’une fois tous les deux ans. L’autorité de régulation a appelé notre attention sur cette situation, en formulant des propositions de façon à rendre le consommateur moins captif. La première hypothèse que nous avons envisagée consistait à interdire les abonnements d’une durée supérieure à 12 mois. Or, le Gouvernement, à partir de l’examen d’un amendement présenté en commission, a été amené à considérer que cette interdiction aurait un effet négatif sur les prix car, aujourd’hui, les abonnements de 24 mois offrent des tarifs plus intéressants que ceux de 12 mois. Notre texte visant l’intérêt du consommateur, nous préférons donc la solution préconisée par le rapporteur dans son amendement 42, à savoir l’introduction, dans des abonnements de 24 mois, de clauses de sortie à partir du treizième mois.

M. Jean Dionis du Séjour – La plupart des opérateurs offrent déjà des abonnements de 12 mois, avec, en moyenne, des tarifs de 4 euros 50 de plus par mois par rapport aux contrats de 24 mois ; ce n’est pas une petite somme ! Si nous interdisons les durées supérieures à 12 mois, nous allons non seulement renchérir le prix des abonnements, mais aussi mettre un terme au modèle français de diffusion du portable. Car ce modèle, qui a tout de même conduit à ce qu’il y ait aujourd’hui 53 millions de portables en France, repose sur un subventionnement de l’appareil grâce à la contrepartie de forfaits raisonnables. Il faut donc laisser le choix aux gens ; sinon, il ne s’agit plus d’une loi en faveur des consommateurs !

M. Jean Gaubert – Les abonnements de 24 mois permettent à l’opérateur de rendre l’achat du terminal indolore ; ces terminaux de plus en plus sophistiqués étant fabriqués à l’étranger, voilà qui n’arrange pas notre balance commerciale !

En outre, nous savons que le terminal est souvent usé avant 24 mois. C’est un moyen de tenir le client, car on lui propose alors un nouveau terminal assorti d’un nouvel engagement. Au bout du compte, il n’y a pas de concurrence. C’est pourquoi nous proposons 12 mois. Nous sommes allé voir chez nos voisins européens, qui ont presque tous adopté cette durée…

Mme Laure de La Raudière et M. Jean Dionis du Séjour – Non !

M. Jean Gaubert – …, sans constater la moindre augmentation des prix, car les terminaux sont amortis en moins de douze mois. La vérité, c’est que certains groupes sont montés au créneau pour défendre leurs marges ! Acceptez les propositions qui rendent du pouvoir d’achat aux consommateurs !

L'amendement 98, mis aux voix, n'est pas adopté, non plus que l’amendement 280 rectifié.

M. André Chassaigne – L’amendement 278 est défendu.

L'amendement 278, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean Gaubert – Dans certains cas, si le consommateur ne refuse pas explicitement une offre gratuite, il est lié par celle-ci, qui devient payante après un temps. L’amendement 203 vise à inverser la charge de la preuve : il faudra l’accord explicite du consommateur pour que l’offre soit valable.

M. François Brottes – Est-ce déjà dans la loi, Monsieur le rapporteur ?

M. Michel Raison, rapporteur – Non, mais l’amendement 183 de Mme de La Raudière, qui viendra par la suite et dont la commission préfère la rédaction, vous donne satisfaction. Sur cette question comme sur celle de la durée des abonnements, nous sommes dans le même état d’esprit : nous souhaitons apporter une solution à un problème patent ; ne dites pas le contraire !

M. Luc Chatel, secrétaire d’État Même avis.

M. Jean Dionis du Séjour – Je tiens à dire qu’il s’agit d’un bon amendement, mais puisque la commission lui en préfère un autre, semblable au fond, nous la suivrons.

L'amendement 203, mis aux voix, n'est pas adopté.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance, qui aura lieu ce soir à 21 heures 30.

La séance est levée à 19 heures 55.

La Directrice du service
du compte rendu analytique,

Marie-Christine CHESNAIS

Le Compte rendu analytique
est disponible sur Internet
en moyenne deux heures après la fin de séance.

Le compte rendu analytique des questions au Gouvernement
est également disponible, sur Internet et sous la forme d’un fascicule spécial,
dès dix-huit heures

Préalablement,
est consultable une version incomplète,
actualisée au fur et à mesure du déroulement de la séance.

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