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Assemblée nationale

Compte rendu
analytique officiel

Séance du mardi 4 décembre 2007

3ème séance
Séance de 21 heures 30
73ème séance de la session
Présidence de Mme Catherine Génisson, Vice-Présidente

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La séance est ouverte à 21 heures 30.

RATIFICATION DE L’ORDONNANCE N° 2007-329 DU 12 MARS 2007
RELATIVE À LA PARTIE LÉGISLATIVE DU CODE DU TRAVAIL (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par le Sénat, ratifiant l’ordonnance n° 2007-329 du 12 mars 2007 relative à la partie législative du code du travail.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité – Veuillez excuser mon léger retard : je contactais mes homologues européens pour préparer le sommet qui nous réunira demain.

Mme la Présidente – Soit. Nous reprenons donc le fil de la discussion générale.

M. Francis Vercamer – La recodification qui nous est proposée est la bienvenue. Au fil des décennies, une foule de textes législatifs ou réglementaires s’est ajoutée à notre code du travail pour en faire un ensemble trop complexe. Les professionnels du droit ne sont pas seuls à le consulter : les salariés et les employeurs, notamment en petite entreprise, sont également concernés. Sa lisibilité est donc essentielle.

Vous dites vouloir le clarifier à droit constant : tant mieux. Aucune modification substantielle, en effet, ne saurait avoir lieu sans intervention du Parlement. On mesure la limite de l’exercice : cette réécriture n’entraîne pas une simplification de la législation, impensable sans négociation préalable entre les partenaires sociaux. Nous serons d’ailleurs attentifs aux résultats de la concertation sur la modernisation des règles du marché du travail.

M. Régis Juanico – Oui, nous les attendons avec impatience !

M. Francis Vercamer – Les propositions des partenaires sociaux auront en effet vocation à modifier le nouveau code du travail.

M. Marc Dolez – Voilà pourquoi il ne fallait pas se précipiter !

M. Francis Vercamer – De la sécurisation des parcours professionnels au financement des organisations, du contrat de travail à la formation professionnelle, de nombreuses questions resteront en suspens après la présente recodification. Un amendement du Gouvernement vise à repousser de deux mois la date de son entrée en vigueur, initialement prévue au 1er mars 2008. Le temps d’adaptation nécessaire aux praticiens, la concertation entre partenaires sociaux, l’élection de nouveaux conseils des prud’hommes et la réforme en cours de la carte judiciaire, tous ces éléments ne doivent-ils pas nous pousser à la décaler davantage, au 1er janvier 2009 par exemple, comme le propose la commission ? Certes, il en résulterait peut-être quelques incertitudes juridiques. C’est à débattre : l’efficacité du droit est en jeu.

Autres objectifs de cette ordonnance : débarrasser notre droit de ses dispositions obsolètes et veiller au respect de nos engagements internationaux. Fallait-il, dès lors, y intégrer les dispositions relatives au « contrat nouvelles embauches », que l’Organisation internationale du travail vient de déclarer non conforme au droit international ? Les petites entreprises risqueraient en effet d’y voir la confirmation de la légalité du CNE. Qu’en pense d’ailleurs le Gouvernement ?

Enfin, qu’en est-il du déclassement de plus de cinq cents dispositions législatives ramenées au domaine réglementaire ? Leur révision sera désormais plus aisée. Nous voulons être sûrs qu’il n’y aura pas là matière à une modification substantielle de notre droit du travail.

Quoi qu’il en soit, le groupe Nouveau Centre approuve cet effort de réécriture, sachant qu’il n’est que le préambule d’une vaste réforme de notre droit du travail, en concertation avec l’ensemble des partenaires sociaux. Les conclusions de la négociation sur la modernisation du marché du travail fourniront la meilleure occasion d’assouplir la législation tout en protégeant les salariés.

M. Denis Jacquat – Obscur et versatile, le droit du travail est peu ou mal appliqué. Critiqué par les juristes, des juges aux parlementaires, autant que par le monde du travail lui-même, il est d’une complexité qui reflète celle de la société actuelle. Il va de soi qu’une poignée de règles simples ne suffiraient pas à organiser des champs aussi vastes que la durée du travail, l’épargne salariale ou encore le licenciement économique. Pourtant, l’immense variété de normes en vigueur peut troubler. La présente recodification, soutenue par la majorité, y répond partiellement et, à ce titre, c’est presque un exploit. Elle était nécessaire, en effet, tant le code du travail est si souvent caricaturé pour sa confusion, alors qu’il devrait être un droit quotidien appliqué par tous, juristes ou non.

Le code du travail devrait être au salarié et à l'employeur ce que le code de la route est à l'automobiliste et à l'agent de la circulation ! Or le droit du travail est devenu presque plus complexe que le droit fiscal, d’autant plus qu’aux règles du code s’ajoutent des éléments contractuels comme le contrat de travail, l'accord d'entreprise ou la convention collective.

Alors que le droit du travail a une fonction de protection du salarié – et que celui-ci, comme l’employeur, le pratique quotidiennement, comme M. Jourdain faisait de la prose –, le Conseil constitutionnel peut considérer que du fait de la complexité des règles, l'égalité devant la loi, énoncée par l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, et la garantie des droits requise par son article 16 ne sont pas effectives. « Il n'existe pas à l'heure actuelle d'instrument fiable et facilement accessible regroupant l'ensemble des normes applicables ; le code du travail lui-même ne contient qu'une partie des dispositions législatives et réglementaires pertinentes », notait la commission de Virville dans son rapport. En outre, que ce soit en raison de la faiblesse du dialogue social ou de l’interventionnisme du législateur, les textes législatifs sont très nombreux, y compris sur des questions de détail.

Ainsi, quel directeur des ressources humaines saurait faire la liste des sujets sur lesquels il faut qu'il informe ou consulte le comité d'entreprise sans s’appuyer sur des documentations épaisses et faire appel à des avocats spécialisés ? Quel salarié connaît vraiment ses droits ?

Des membres de notre groupe ont été récemment mandatés pour étudier les freins à la mobilité professionnelle : quelle ne fut pas leur surprise en découvrant le nombre de droits à congé qui existent déjà dans la législation du travail, mais que beaucoup de salariés ignorent alors qu’ils pourraient s’en servir pour faire avancer un projet professionnel…

Puis-je refuser le nouveau poste qu'on me propose ? Ai-je le droit de prendre des congés par anticipation ? Qu'est-ce que je risque à ne pas respecter mon préavis ? Je suis en CDD et on m'offre un CDI, puis-je ne pas aller au bout de mon engagement en cours ? Telles sont quelques-unes des questions que les salariés se posent.

Les employeurs s’en posent d'autres. Par exemple : je souhaite déménager mes locaux dans un nouvel immeuble mais celui-ci n'est pas encore desservi par les transports en commun ; que dois-je faire vis-à-vis de mes salariés ? Ou encore : mon salarié vient de m'adresser une nouvelle prolongation de son arrêt maladie ; puis-je renouveler d'autant le salarié en CDD qui le remplace ?

Combien de personnes peuvent prétendre dominer le droit de la durée du travail, ou encore expliquer simplement le décompte des effectifs, exercice soudainement troublé par telle nouvelle interprétation de la Cour de cassation ?

Le juge intervient en effet massivement pour interpréter le droit du travail, du fait de la superposition de nombreux textes sur le même sujet, sans réévaluation d'ensemble. Cette situation accroît l'insécurité juridique. Un exemple, bien connu des juristes, de « libre interprétation » est le fait que le critère de majorité pour l'application de la loi du 4 mai 2004 sur le dialogue social découle du premier tour des élections professionnelles si et seulement si le quorum a été atteint… Cela peut se défendre, mais c’est ajouter une condition que la loi n’avait pas posée, au grand dam du DRH qui se croyait en règle !

La nouvelle codification privilégie des articles courts, chacun ne contenant qu’une seule idée ; elle distingue règles de forme et règles de fond, principes et dérogations.

La principale novation, très attendue, concerne le paiement du salaire : les dispositions de la loi du 18 janvier 1978, relative à la mensualisation, sont enfin codifiées. Les dispositions relatives aux salariés protégés, actuellement éparses, sont regroupées dans le livre IV. De nombreux articles définissent des notions ou situations juridiques complexes – le travail temporaire, par exemple. Par ailleurs, les dispositions devenues inutiles ou obsolètes disparaissent. Enfin, 500 reclassements sont effectués pour respecter le partage entre la loi et le règlement, en matière de désignation des autorités administratives et des juridictions compétentes, de règles de procédure et de mentions chiffrées.

En remerciant le ministère du travail titanesque qui a été accompli, le groupe UMP votera ce projet, avec la conviction qu'il rendra le droit du travail plus lisible et plus accessible (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Marc Dolez – Monsieur le ministre, j’aimerais entrer dans le vif du sujet en vous posant cette question simple : quelles sont les intentions réelles du Gouvernement ?

M. Xavier Bertrand, ministre du travail La lisibilité !

M. Marc Dolez – On ne peut pas avancer sérieusement l’argument de la simplification : là où il y avait 271 subdivisions, il y en a désormais 1 890 ; et au lieu de 1 891 articles, on en dénombre 3 652 ! Le tableau de concordance qui figure sur le site du ministère fait 350 pages ; et l’utilisateur devra en permanence consulter les deux parties – législative et réglementaire – du code.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail Ce n’est pas nouveau !

M. Marc Dolez – En vérité, les choix de réécriture ne sont pas anodins.

D’abord, le plan du code a été totalement remanié. Il n’est ni plus simple, ni moins simple ; mais les dispositions relatives au licenciement économique, par exemple, qui auraient dû figurer dans la cinquième partie consacrée à l’emploi, figurent dans la première, relative aux relations individuelles du travail : la consultation du comité d’entreprise et l’élaboration d’un plan de sauvegarde de l’emploi ont-ils pour finalité première la défense de l’emploi – comme nous le pensons –, ou le traitement social de licenciements déjà décidés ?

Quant à la décision de scinder les articles – afin, nous dit-on, qu’il n’y ait une idée par article –, elle aboutit à faire figurer la règle et l’exception dans deux articles différents, et donc à les mettre sur le même plan. Elle conduit aussi à un éclatement en six articles – pas tous consécutifs – des dispositions relatives aux indemnités dues en cas de non-respect de la procédure de licenciement !

Cette réécriture ne s’est pas faite à droit constant. Selon la formule du professeur Braibant, « à droit constant, on ne réforme pas, on reforme » : tel n’est pas le cas ici.

Tout d’abord, on choisit d’éclater le code du travail, en externalisant de nombreuses dispositions. C’est une orientation clairement assumée, qui figure en toutes lettres dans le rapport au Président de la République sur l’ordonnance du 12 mars 2007 : il y est indiqué que les dispositions générales figureront dans le code du travail, et les dispositions particulières dans des codes spécifiques. Alors que le code du travail devrait être le cadre unifié des relations salariales, on introduit une conception sectorielle qui ouvre la porte à un droit du travail variant selon les branches d’activité. On peut se demander s’il n’y aurait pas là les prémices d’un remplacement de dispositions nationales interprofessionnelles par des normes conventionnelles de branche.

Deuxième orientation particulièrement dangereuse : le déclassement de plus de cinq cents articles, qui passent du domaine législatif au réglementaire. Leur modification en sera facilitée. Elle se fera dans un grand silence…

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – Mais au Journal officiel !

M. Marc Dolez – …sans intervention du législateur, et pourrait même être opérée dès la recodification de la partie réglementaire. Surtout, ce déclassement revient à mettre employeurs et employés sur le même plan, alors que le code du travail régit un contrat par nature inégalitaire, impliquant la protection du plus faible. Si le législateur a pris le soin de faire figurer dans la partie législative des dispositions relatives aux autorités compétentes, c’est bien pour protéger ceux qui travaillent dans cet état de subordination.

Nous ne pouvons pas ne pas voir dans ces deux orientations dangereuses, l’externalisation et le déclassement, la forte influence du rapport de Virville de 2004 et des propositions que le Medef avait formulées quelques semaines plus tard, un Medef qui rêve d’un contrat de travail assimilable au contrat civil, plaçant l’employeur et le salarié sur le même plan, et qui aspire à l’individualisation des relations du travail et à la primauté du contrat sur la loi. Face à ce que d’aucuns appellent une décodification, à ce chaos imposé au corps social, pour reprendre l’expression du professeur Teyssié, qui prévoit qu’il faudra quatre à cinq ans aux acteurs du droit social pour s’approprier le nouveau code, la sagesse serait de rouvrir sérieusement le chantier.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – Du droit du travail ?

M. Marc Dolez – Toute recodification doit être basée sur la volonté de redonner au travail salarié un socle de protection clair, fondé sur le respect de la loi et la confiance des travailleurs. Ces deux conditions ne sont pas réunies. Parce que vous n’avez pas cette sagesse, parce que vous voulez mener cette ratification parlementaire au pas de charge…

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – Nous avons tout notre temps !

M. Marc Dolez – …et parce qu’à l’évidence, cette décodification prépare une destruction systématique, notre opposition à ce texte sera résolue (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC).

Mme Marie-Christine Dalloz – Au cours des trente dernières années, l'économie française s'est profondément modifiée. Elle est devenue plus tertiaire, plus internationale. Les grandes entreprises combinent organisation hiérarchique et organisation en réseau. Face à une concurrence permanente, elles privilégient des projets à échéance rapprochée. Ces évolutions ont à l'évidence des répercussions sur l'emploi : les entreprises veulent une main d'œuvre bien formée, flexible et adaptable. Elles n'hésitent pas à faire appel à des prestataires de services extérieurs pour des durées définies. Au sein d'une même entreprise, la communauté de travail est souvent à géométrie variable, et différents statuts coexistent. Le contenu des postes évolue, les lieux d'activité se déplacent. Les contraintes qui s'exercent sur les salariés sont donc toujours plus fortes et leur univers moins certain.

Ces mutations ont des implications juridiques. Le modèle d'emploi fondé sur des entreprises nationales exportatrices employant de nombreux salariés, ne correspond plus à la réalité. Les entreprises, qui évoluent de plus en plus en réseaux de partenaires et de sous-traitants, forment des « constellations » économiques. La législation du travail a évolué moins vite. Construite autour du travail salarié à durée indéterminée, elle n’a pris en compte qu'avec retard les nouvelles formes d'emploi, générant ainsi beaucoup de contentieux. D’où une judiciarisation des relations sociales qui ne peut satisfaire ni les salariés, ni les employeurs, ni le législateur.

Une nouvelle codification du droit du travail, la dernière datant de 1973, était donc nécessaire pour améliorer, à droit constant, la lisibilité des textes. La jurisprudence constitue une source particulièrement importante du droit du travail. Plusieurs catégories de juridictions sont amenées à traiter de litiges qui y sont liés : dans l'ordre judiciaire, la juridiction prud'homale, le tribunal de grande instance, voire le juge d'instance ; le juge pénal aussi, puisque des sanctions sont prévues dans nombre de cas ; les juridictions administratives sont concernées lorsque le litige met en cause la légalité d'actes administratifs ; enfin, la Cour de justice des communautés européennes se prononce de plus en plus fréquemment sur la conformité des règles françaises au droit communautaire.

L’office du juge comporte nécessairement une part d'interprétation, et donc d'élaboration de la règle de droit, et il arrive régulièrement que le Parlement soit conduit à réajuster, voire à contrecarrer les effets d’une jurisprudence. En outre, celle-ci ne se fixe que lentement et réagit longtemps après l'entrée en vigueur de nouvelles normes. Les usagers demeurent dans l'incertitude plusieurs années, pendant lesquelles ils sont contraints de prendre des risques contentieux non négligeables – risques décuplés en cas de revirement de jurisprudence – alors qu’ils sont de parfaite bonne foi. Au cours des dernières années, la chambre sociale de la Cour de cassation est revenue en moyenne trois ou quatre fois par an, à droit constant, sur ses solutions antérieures, du fait en grande partie de la très grande complexité de la législation applicable.

Ce n'est évidemment pas une codification qui va régler d'un coup tous les problèmes de la judiciarisation des relations sociales. Le Président de la République a fait de la modernisation du marché du travail une condition impérative pour atteindre le plein emploi, et la réflexion autour de la modernisation du contrat de travail, en particulier, doit être poursuivie. En revanche, aucune avancée en la matière n'était possible sans une clarification de l'état de notre droit. C’est cet excellent travail que nous avons à entériner aujourd’hui, qui contribuera, en améliorant la lisibilité du droit, à limier le recours au juge (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

Mme Martine Pinville – Ce projet de loi qui vise à ratifier l'ordonnance du 12 mars dernier doit permettre la promulgation de la partie législative du nouveau code du travail. C'est dire l'importance du sujet. Le code du travail s’est construit progressivement, à travers des luttes sociales et politiques. Pour des millions de femmes et d'hommes, il constitue le droit le plus quotidien, l'outil essentiel du respect de leurs droits, le texte de référence dans leurs rapports avec leur employeur. Déjà révisé en 1973, il est devenu de plus en plus complexe et peut-être sa réécriture était-elle devenue nécessaire.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – Merci !

Mme Martine Pinville – Pourquoi, en effet, ne pas essayer de le rendre plus lisible et plus compréhensible – bref, de le mettre véritablement au service des salariés et des employeurs ? Mais pas, Monsieur le ministre, en allant très vite, pour aboutir coûte que coûte ! Après que votre prédécesseur eut tenté d'imposer, début mars, la promulgation concomitante de la partie législative et de la partie réglementaire, vous avez voulu aller très vite. Vous avez donc privé les partenaires sociaux d’une réelle négociation : vous les avez certes réunis, mais ils n’ont pas pu se faire entendre. Vous êtes resté sourd aux inquiétudes exprimées par les organisations syndicales et par d'éminents spécialistes du droit du travail.

Vous allez modifier le code du travail quelques mois avant le renouvellement des conseils de prud'hommes, ou tout du moins de ceux que Mme Dati voudra bien nous laisser. Nous proposerons donc de repousser l’entrée en vigueur du nouveau code au 1er janvier 2009, afin que les conseillers qui ne se représentent pas ne soient pas obligés de l’absorber pour quelques mois seulement. Notons au passage que ce nouveau code a déjà été publié… Les mauvais esprits, peut-être un peu plus éclairés que les autres, diront que vous avez voulu empêcher le Conseil d'État de se prononcer sur un recours en annulation de l'ordonnance dont il est saisi, en lui donnant valeur législative avant la fin de l'année…

Ce texte va bien plus loin que la seule simplification annoncée : le plan du code est radicalement remanié. Il passe de 271 à 1 890 subdivisions et compte 1 761 nouveaux articles. Cette inflation s'explique par la scission de certains articles, en toute méconnaissance du droit du travail. Celui-ci, du fait de son caractère jurisprudentiel, appelle à l’affirmation d’une règle générale suivie de ses exceptions. Affirmer la règle dans un article et l'exception dans un autre, c'est nier le lien juridique entre les deux, l'exception devenant aussi importante que la règle. En outre, des articles sont éclatés ou déplacés, de nouveaux chapitres sont créés. Ce que vous voulez, c’est segmenter le droit du travail et ainsi affaiblir les salariés dans leurs droits. L'année dernière, devant l'Assemblée, votre prédécesseur avait pourtant pris l'engagement que cette recodification se ferait à droit constant. Ce n’est hélas pas du tout le cas. Vous procédez en fait au démantèlement du droit du travail et à la libéralisation du marché du travail. Enfin, vous procédez à un déclassement important. En renvoyant au domaine réglementaire ce qui relevait de la loi, vous ne laissez plus dans celle-ci que quelques principes. Par exemple, le nouveau code réduit les pouvoirs des inspecteurs et des contrôleurs du travail et détourne leurs missions. En effet, dans le nouveau code, ils ne sont plus chargés de constater les infractions en matière de médecine du travail, de contrat d’apprentissage, de contrat de travail temporaire, d’égalité de salaire entre hommes et femmes, de rémunération mensuelle minimale. Avec la nouvelle répartition des compétences entre départements ministériels, l’existence d’une inspection du travail dans certains secteurs n’est plus assurée.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – C’est totalement faux.

Mme Martine Pinville – Les moyens de contrôle de l’inspection du travail sont démantelés. C’est l’individualisation des rapports entre le salarié et l’employeur.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail C’est tout le contraire.

Mme Martine Pinville – Vous ne recodifiez pas le code du travail, vous le décodifiez (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR).

Mme Annick Girardin – Cette ordonnance illustre l’abus qui est fait de la procédure d’habilitation. D’autres collègues ont dénoncé les nombreux risques qu’elle présente : déclassement d’articles dans le domaine réglementaire alors que le code du travail doit rester dans celui de la loi, transfert vers d’autres codes de dispositions présentées comme sectorielles, absence de dispositions sur les droits des personnes privées d’emploi.

J’insisterai plutôt sur l’utilisation abusive de la procédure d’habilitation, devenue aussi banale que la déclaration d’urgence sur les projets de loi, et empiétant tout autant sur le maigre pouvoir laissé au législatif. Ces ordonnances, dira-t-on, rien n’oblige le Parlement à les voter. Si, le fait majoritaire l’y oblige.

Cette ordonnance supprime le Fonds pour l’emploi dans les DOM et Saint-Pierre et Miquelon. Depuis 1994, le FEDOM permet d’associer les parlementaires à la définition de la politique de l’emploi et de la formation outre-mer, afin d’assurer qu’elle colle aux réalités du terrain. Le FEDOM trouve son fondement dans l’article L. 832-4 du code du travail. Or celui-ci est abrogé par l’article 12 de l’ordonnance. D’ailleurs, le site de Legifrance et celui du secrétariat d’État à l’outre-mer l’ont déjà fait disparaître. C’est dire ce que pèse le vote du législateur.

Cette suppression retire un droit de regard et une possibilité d’action au législateur. Il faut la refuser ou rétablir le fonds par amendement.

En outre, la procédure adoptée est scandaleuse. La suppression s’est opérée dans le secret, grâce à une formulation juridique opaque. Le Gouvernement se garde d’ailleurs de l’évoquer dans l’exposé des motifs et elle n’est pas mentionnée dans le rapport ou les débats au Sénat. Les sénateurs sont d’ailleurs consternés d’apprendre qu’ils ont supprimé le FEDOM. Selon vous, il y aurait eu concertation sur ce texte. Sur la suppression du FEDOM, certainement pas.

On se trouve ici devant une entorse grave à l’exercice du pouvoir législatif, qui plaide en faveur d’une VIe République. La mesure est infondée car l’habilitation n’autorise qu’une codification à droit constant et l’abrogation « de dispositions devenues sans objet ». Le Gouvernement a refusé de répondre sur ce point, déjà soulevé par Gérard Charasse à propos des crédits de l’outre-mer. Hier au Sénat, la réponse du secrétaire d’État à l’outre-mer était particulièrement fuyante. Et le transfert des crédits de l’outre-mer au ministère de l’emploi n’est pas une réponse non plus : rien n’empêche de conserver le fonds qui les gère quel que soit le ministère de rattachement.

C’est donc la compétence même du législateur qui est en jeu, et il faut avoir une certaine audace pour prétendre qu’on légifère à droit constant quand on supprime un dispositif aussi important que le FEDOM (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR).

M. Jean Mallot – Nous savions que vous aimiez les usines à gaz, Monsieur le ministre, pour vous avoir vu à l’œuvre cet été avec la loi sur le service minimum. Mais cette fois, vous faites très fort ! Et cela n’a rien d’innocent. Toutes les occasions vous sont bonnes pour démanteler le droit du travail.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – Vous ne pouvez pas dire cela !

M. Jean Mallot – Que si, car vous pratiquez la recodification à droit non constant, comme en attestent les amendements votés en commission. En outre, ce projet remet en cause le droit du travail dans de nombreux domaines. J’insisterai sur les modifications concernant les conseils de prud’hommes et l’inspection du travail.

S’agissant des premiers, leur intervention est considérablement réduite par cette loi nouvelle et pourra l’être plus encore par les textes réglementaires à venir, en ce qui concerne la fixation du nombre de sections, de chambres par section et de leur composition. Vous leur avez retiré la compétence sur les litiges relatifs à la durée du travail pour les salariés au forfait jour et à la contestation par l’employeur des heures de délégation syndicale, au profit du juge judiciaire, lequel est lui-même dessaisi au profit d’une autorité administrative pour ce qui concerne la reconnaissance du caractère distinct d’un établissement pour les élections de délégués du personnel. Nous déposerons un amendement pour rétablir le caractère exécutoire de la décision d’un conseil de prud’hommes relative à la requalification d’un CDD en CDI et d’un contrat de mission d’intérim.

On est amené à faire un rapprochement avec la réforme de la carte judiciaire menée à la hussarde par Mme Dati.

M. Jacques Lamblin – C’est faux (Rires sur les bancs du groupe SRC).

M. Jean Mallot – Pour faire des économies probablement, elle a annoncé la suppression de 63 conseils de prud’hommes sur 271. N’y en aura-t-il pas d’autres ensuite, notamment ceux qui sont liés à des tribunaux de grande instance dont la disparition est annoncée ?

M. Jacques Lamblin – Le nombre de conseillers prud’homaux reste inchangé.

M. Jean Mallot – Nous déposerons un amendement pour rétablir la consultation du conseil général, du conseil municipal, des conseils de prud’hommes intéressés, du premier président de la cour d’appel ainsi que des organisations professionnelles et des organisations syndicales avant toute création ou suppression d’un conseil de prud’hommes. Mme Dati a-t-elle respecté cette obligation ?

Plusieurs députés du groupe SRC – Non !

M. Jean Mallot – Si un conseil est supprimé, les affaires seront-elles traitées par les élus du conseil d’accueil, et dans ce cas avec quelle légitimité ? Vous créez une instabilité durable pour cette institution. Outre les suppressions, le nouveau code du travail sera plus complexe. Tout semble fait pour décourager les conseillers et les éventuels candidats aux élections de 2008. Il est vrai qu’avec votre projet d’un nouveau contrat de travail et la possibilité pour le salarié et l’employeur de se séparer « d’un commun accord », comme vous le souhaitez ainsi que le Medef,…

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – Ce sont les partenaires sociaux qui le demandent.

M. Jean Mallot – …Il n’y aura plus guère besoin de conseil de prud’hommes.

Le nouveau code réduit aussi les missions des inspecteurs et contrôleurs du travail. Ils n’auront plus à constater les infractions en matière de médecine du travail, de contrats d’apprentissage, de contrats de travail temporaire, d’égalité de salaire entre hommes et femmes et de rémunération mensuelle minimale. L’ordonnance leur confie par ailleurs des tâches sans rapport avec leur mission, et d’autres qui posent problème, telle que la constatation de certaines infractions commises…par des salariés ! Il renvoie enfin certaines attributions de l’inspection du travail à une « autorité administrative » alors que l’indépendance de ce corps est garantie par une convention de l’OIT.

Votre volonté de régression sociale est telle…

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – Vous vous trompez de Gouvernement !

M. Jean Mallot – … que vous vous attaquez à des institutions dont le rôle est déterminant pour le maintien de l’équilibre social. Dans ces conditions, comment pouvez-vous prétendre vouloir développer la démocratie sociale dans notre pays ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR)

La discussion générale est close.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – À vous, Madame le député Billard…

Mme Martine Billard – La députée, Monsieur le ministre !

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – Avec tout le respect que je vous dois, tel n’est pas l’avis de l’Académie française… (Exclamations sur les bancs du groupe GDR et du groupe SRC) Quoi qu’il en soit, je ne comprends pas votre interpellation relative aux entreprises de moins de 300 salariés, puisque la question a été réglée au Sénat, le Gouvernement ayant accepté un amendement porté par les organisations syndicales. Vous avez aussi évoqué l’inspection du travail, ce qui me donne l’occasion de souligner l’effort sans précédent consenti pour augmenter l’effectif de ce corps. Il n’était que temps, direz-vous à juste titre, mais il n’empêche que la création de 170 postes représente un effort d’une ampleur inédite, que chacun s’accorde à reconnaître, à gauche comme à droite.

À M. Vercamer et aux autres orateurs qui ont abordé ce sujet, je rappelle que la règle absolue pour le juge, administratif ou judiciaire, est qu’il ne peut se fonder sur la codification à droit constant pour modifier la jurisprudence. Le ferait-il que cette erreur de droit serait sanctionnée par la Cour de cassation ou le Conseil d’État. Voilà qui devrait mettre un terme à la querelle.

S’agissant des déclassements, 20 % seulement de ce qui aurait pu être fait l’a été, parce que nous avons écouté les remarques des partenaires sociaux.

Nous considérons, Monsieur Jacquat, le code du travail comme le code du quotidien ; il n’a donc de sens que s’il est compris, accessible et effectif. Je vous remercie d’avoir souligné le travail accompli par le ministère.

Oui, Monsieur Dolez, les articles du nouveau code seront deux fois plus nombreux mais ils seront aussi plus courts et plus simples, et le volume du code sera réduit de 10 %. Il est préférable, me semble-t-il, de permettre à chacun de trouver, regroupées en un seul code, toutes les règles qui le concernent et qui jusqu’à présent étaient éparpillées. On y gagne en compréhension ce que l’on perd en confusion.

Les strates successives des attributions du comité d’entreprises les avaient rendues incompréhensibles. Nous avons donc tenu à les clarifier en séparant nettement ce qui tient à ses attributions consultatives. Quant aux dispositions relatives aux licenciements économiques, elles étaient éclatées en trois livres ; nous plaçant du point de vue de l’utilisateur, nous avons estimé préférable de regrouper en un seul tout ce qui a trait aux différentes formes de licenciement.

Mme Dalloz a souligné le risque de judiciarisation supplémentaire des relations du travail. Nous n’y remédierons pas par la recodification mais par un renforcement de la légitimité des règles obtenu grâce à la négociation collective. Des modalités de règlement des conflits existent qui sont peu ou pas utilisées ; il existe aussi des modes de conciliation et d’arbitrage qui ne figurent pas dans le code du travail. Je m’en tiendrai là, car ce n’est pas l’objet de notre discussion.

Je vous remercie, Madame Pinville, d’avoir souligné que la réécriture était nécessaire. Mais vous ne pouvez ajouter qu’elle a été faite très vite, alors que le travail a duré plus de deux ans. S’agissant des conseillers prud’homaux, j’appelle votre attention sur l’importante disposition adoptée par le Sénat, qui leur permettra de se former. Je précise par ailleurs que le nouveau code ne réduit en rien les pouvoirs de l’inspection du travail.

Madame Girardin, le FEDOM n’est pas supprimé mais figurera dans la partie réglementaire du code.

M. Mallot a parlé d’« usine à gaz » en expert qu’il est (Protestations sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR) puisque membre d’un groupe qui a créé le dispositif des 35 heures imposées… (Exclamations sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR) une des plus belles usines à gaz qu’on ait vues !

Un député du groupe SRC – Et la loi TEPA ?

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – Les attributions des inspecteurs du travail ne changent pas, vous le savez parfaitement. D’autre part, comment prétendre simplifier le code sans offrir au lecteur un tableau de concordances ? S’agissant des créations ou suppressions de conseils de prud’hommes, la consultation des conseils généraux et des conseils municipaux n’est pas supprimée et, contrairement à ce que certains ont voulu croire, il n’y a aucune malice dans la date choisie pour l’application du nouveau code (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe NC).

MOTION DE RENVOI EN COMMISSION

M. le Président – J’ai reçu de M. Jean-Claude Sandrier et des membres du groupe GDR une motion de renvoi en commission déposée en application de l’article 91, alinéa 7, du Règlement.

M. Roland Muzeau – Le Gouvernement nous propose de ratifier la partie législative du nouveau code du travail. La refonte du texte est si complète que certains parlent à son propos d'une véritable « décodification du droit du travail ». Le rapport est plus direct, qui parle du « considérable travail abattu ». On ne saurait mieux dire ce que l’on est en train de faire : abattre le code du travail ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP)

Mme Valérie Rosso-Debord – Quel théâtre !

M. Roland Muzeau – Pour cela, le Gouvernement nous demande de ratifier un texte élaboré en coulisses, hors de tout débat parlementaire, simplement parce que le gouvernement précédent a jugé bon d'abuser des ordonnances avec l'appui d'une majorité complaisante. Cette banalisation des ordonnances pose question. Nous l’avons dénoncée maintes fois, car cette procédure contribue à l'abaissement du Parlement. La sagesse voudrait qu’on réserve le recours aux ordonnances aux seules dispositions que motive la plus extrême urgence. On ne peut par ailleurs soutenir sérieusement l'idée selon laquelle la recodification d'un texte législatif tient du simple toilettage administratif. Le législateur ne peut s'exonérer de ses responsabilités. Sans doute personne ne sait-il précisément ce que recouvre la notion de droit constant. On sait, en revanche, qu’une « recodification » n'est jamais neutre, qu'elle modifie toujours l'état du droit. Se pose alors la question centrale de l'étendue des pouvoirs conférés au Gouvernement dans cette entreprise.

La recodification du droit du travail nous offre une parfaite illustration de ces dérives. Au départ, il s’agissait d’une habilitation de portée limitée. À l’arrivée, on nous soumet un texte dont les articles ont été réécrits, disloqués, déplacés dans des sections ou des chapitres distincts, un texte profondément remanié qui crée une insécurité juridique manifeste mais qui porte en outre, de manière plus préoccupante encore, la marque d'un programme politique – le vôtre (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe UMP).

Nous condamnons avec la plus grande fermeté le tour de passe-passe qui a consisté à instrumentaliser la recodification pour modifier en profondeur notre code du travail, texte fondamental cher aux salariés de notre pays qui y ont vu s'inscrire le fruit de leurs luttes.

Il est inacceptable que la rédaction d’un code dépende du fait du prince, que d’obscurs rédacteurs bénéficient de l’extraordinaire privilège de faire prévaloir leurs préférences personnelles sur la volonté du législateur ou sur la jurisprudence, comme l’a dénoncé le professeur Bernard Teyssié. En effet, ces pratiques, sans préjuger de l’orientation politique de ceux qui les autorisent, échappent à tout contrôle démocratique – que le débat parlementaire, en quelques heures, sur la ratification d’une ordonnance s’appliquant à un code entier, ne permet guère d’exercer !

Nous demandons par conséquent, a minima, le renvoi en commission d’un texte que nous aurions eu bien du mal à étudier sans le travail considérable fourni pendant des mois par les inspecteurs du travail, toutes organisations syndicales confondues, et par le syndicat de la magistrature, car nous ne connaissons pas tout, contrairement à vous, Monsieur le ministre – quant à la droite, elle ne se préoccupe guère de ces questions ! (Protestations sur les bancs du groupe UMP)

Le nouveau code souffre de nombreuses anomalies et malfaçons rédactionnelles, qui montrent que les rédacteurs n’ont guère tenu compte de l’objectif de recodification à droit constant que leur fixait le texte d’habilitation. Si le plan du code actuellement en vigueur, empilement désordonné des modifications successives apportées au texte, ne simplifie guère la lecture, il ne présente aucune incohérence majeure, à la différence du nouveau plan, qu’a critiqué à juste titre M. Vidalies et dont Emmanuel Dockès attribue non sans humour l’inspiration à l’inventaire à la Prévert ou à la fameuse encyclopédie chinoise de Borges – faut-il y voir à l’œuvre les pulsions iconoclastes de ses auteurs ?

La première partie compte quatre livres, dont la longueur va de moins de 10 000 à 240 000 signes, les titres comptant quant à eux de 400 à 78 000 signes ! Cette disproportion considérable révèle l'échec des rédacteurs à opérer la classification rigoureuse de l'appareil normatif que l'on peut légitimement attendre d’un code. Déséquilibré, ce plan est en outre dépourvu de sens puisque les intitulés des parties ne correspondent en rien à leur contenu. Ainsi, celle qui porte sur les « relations individuelles de travail » ne traite pas des dispositions relatives au salaire, aux heures supplémentaires, aux horaires individualisés, au contrat d'apprentissage ou au travail, renvoyées à d’autres parties ; le titre « Droits et obligations du demandeur d'emploi » ne contient que les secondes, les premiers étant classés sous le titre « Indemnisation des travailleurs involontairement privés d'emploi » ; la sous-section intitulée « congés pour événements familiaux » n’évoque pas les congés de maternité, de paternité ou liés à l'adoption ou à l'éducation des enfants, renvoyés au titre « Formation et exécution des contrats de travail ». De manière générale, les dispositions relatives aux congés, notamment aux congés pour maladie ou formation, sont éclatées au lieu d’être regroupées dans une seule partie. Bel effort de clarification !

Mais la palme des incohérences et des titres erronés revient sans doute à la partie consacrée à la santé et à la sécurité au travail, dont vous connaissez l’importance à mes yeux – à ce propos, je ne doute pas, Monsieur le ministre, que vous répondrez à la lettre que je vous ai adressée au sujet de l’utilisation par le patronat des fonds de la médecine du travail.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – J’ai saisi la direction générale du travail.

M. Roland Muzeau – Le titre 1 du livre 2 de cette partie, « Obligations du maître d'ouvrage pour la conception des lieux de travail », est subdivisé en plusieurs chapitres : « Dispositions générales », « Aération et assainissement », « Éclairage, insonorisation et ambiance thermique », « Sécurité des lieux de travail », « Installations électriques », etc. Le chapitre intitulé « Dispositions particulières en cas de danger grave et imminent et droit de retrait » ne traite que de l’obligation d'information des autorités de contrôle, et non du droit de retrait.

Il ne s’agit pas là de hasard ou d’erreurs d’appréciation, mais bien d’un projet politique que confirme l’examen du texte au fond. Ainsi, les déclassements de 500 lois en décrets – qui touchent 61 articles entiers et des fragments de 439 autres articles – permettront à l’exécutif de modifier facilement, au gré des circonstances et dans la plus grande discrétion, les dispositions concernées. Il s’agit par exemple de la désignation des autorités ou des juridictions compétentes, des règles de procédure ou du chiffrage des indemnités de licenciement, que l’on renvoie au domaine réglementaire en tirant profit d’une définition constitutionnelle stricte mais abusive du domaine de la loi et en oubliant que leur inclusion dans la partie législative du code était directement liée à leur fonction de protection du salarié face à l’employeur.

En outre, loin de simplifier le code du travail et de le rendre plus cohérent, l'ordonnance le segmente en multipliant les externalisations vers d’autres codes, en dessaisissant de certains contentieux le juge prud'homal au profit du tribunal de grande instance, ou en externalisant les salariés agricoles, les assistants maternels et familiaux, les éducateurs et aides familiaux, les salariés des entreprises de transport, les salariés d'EDF et de GDF et des entreprises concurrentes, ceux de la fonction publique, les marins, les dockers ou les enseignants non permanents des établissements d'enseignement supérieur privé. Comme le notait l’inspecteur du travail Gérard Filoche au cours d’une conférence de presse que nous avons tenue hier ensemble, « à la lumière des différences entre les salariés agricoles et les autres salariés et de la dégradation des conditions de travail des chauffeurs routiers, des marins et des dockers du fait de l'alignement de l’Europe par le bas, on comprend mieux l'intérêt que présente le fait d’inscrire leur statut respectif dans des codes différents… » Ainsi, aux termes de l’article 8 de l’ordonnance, l’affichage des horaires de travail ne s'applique plus aux salariés agricoles.

Il s'agit de toute évidence d'ouvrir la voie à la création d'autant de codes du travail qu'il existe de branches professionnelles, et sans doute de substituer à terme au droit du travail le droit commun des contrats, rompant ainsi avec la reconnaissance de droits véritablement collectifs et du caractère inégalitaire de la relation entre le salarié et l’employeur.

De même, les scissions d'articles séparent désormais les dispositions dérogatoires des articles affirmant la règle générale. Ainsi, le contrat d'apprentissage, qui figurait au début du code, dans la partie « Conventions relatives au travail », au côté des dispositions relatives au contrat de travail, aux conventions collectives et au salaire, est désormais classé dans la partie « Formation professionnelle », ce qui revient à supprimer l’applicabilité aux apprentis des dispositions applicables aux salariés et aux jeunes travailleurs de moins de 18 ans, les articles rappelant que les apprentis sont des salariés titulaires d'un contrat de travail et celui qui interdit le travail des apprentis de moins de 18 ans les jours de fête reconnus par la loi.

Le nouveau code facilitera également le prêt de main-d'œuvre, en autorisant plus clairement les opérations de prêt de main-d'œuvre à but non lucratif et en élargissant les opérations à but lucratif, jusqu'ici interdites sauf dans les entreprises de travail temporaire, par l'autorisation explicite des nouvelles « entreprises de travail à temps partagé », qui revient à un contrat d’intérim permanent dans plusieurs entreprises.

Quant aux contrats à durée indéterminée, le nouveau texte annonce des décrets d'application que le texte actuellement en vigueur ne prévoyait pas, sur la démission des salariés, sur la procédure de licenciement économique de plus de 10 salariés dans une même période de 30 jours, sur le point de départ du préavis de licenciement et le contenu du certificat de travail. Qu’en sera-t-il du montant de l'indemnité de licenciement, renvoyé à un futur décret ?

Désormais regroupées dans la partie du code relative aux relations individuelles de travail, les dispositions concernant le licenciement économique sont donc désormais rapprochées du régime du licenciement ordinaire, sans lien avec la partie « Politique de l'emploi » ; la question du temps de travail est renvoyée à la partie « salaires ». En somme, sous couvert de réorganisation et de rationalisation, on prépare la libéralisation du marché du travail.

Quant aux conditions de travail, l’employeur des 9 à 10 % de salariés, de plus en plus nombreux, soumis au « forfait jours », qui échappent désormais aux dispositions sur la durée légale du travail, sur les heures supplémentaires et sur la durée maximale du travail, n’est plus tenu de conserver pendant trois ans les documents permettant de comptabiliser le nombre de jours de travail effectués. En outre, en cas de litige, les salariés ne peuvent plus saisir les prud'hommes, remplacés par le juge judiciaire !

De même, l’employeur n’est plus obligé de remettre au salarié, à la fin du mois, un document rappelant le nombre d'heures d'astreinte effectuées et la compensation correspondante. Disparues également, les modalités de demande de passage du temps partiel au temps complet – et inversement –, comme l’avis de la commission nationale de la négociation collective sur les décrets de dérogation aux durées maximales de travail, comme aussi la possibilité, lorsqu’une convention ou un accord collectif le prévoit, de faire varier la durée hebdomadaire ou mensuelle du travail à condition que la durée fixée au contrat ne soit pas dépassée en moyenne sur l’année.

En outre, les rédacteurs, avec la complicité du Gouvernement, ouvrent la porte au « travail le dimanche pour tous » : des établissements où étaient mises en oeuvre des « matières susceptibles d'altération très rapide » ou dans lesquels « toute interruption du travail entraînerait la perte ou la dépréciation du produit en cours de fabrication », la possibilité de déroger au repos hebdomadaire accordé par roulement en vertu d’un décret s’étend à tous ceux « dont le fonctionnement ou l'ouverture est rendu nécessaire par les contraintes de la production, de l'activité ou les besoins du public », critères indéfiniment extensibles… De même, la possibilité de droit de donner le « repos hebdomadaire le dimanche à partir de midi » est étendue à tous les « commerces de détail alimentaire », supermarchés compris, et non plus aux seuls établissements définis par décret, ceux qui ont pour « activité exclusive ou principale » « la vente de denrées alimentaires au détail ». Quant aux autres commerces de détail, le maire peut désormais autoriser la suppression du repos hebdomadaire cinq dimanches par an sans consulter les syndicats d'employeurs et de travailleurs.

Quant aux règles d'hygiène et de sécurité, le texte renforce les responsabilités des salariés au détriment de celles des employeurs, alors même que, de l’avis de tous, de nombreux employeurs sous-déclarent les accidents du travail et les maladies professionnelles ! Ainsi, les dispositions en matière de « santé et sécurité au travail », auparavant applicables « aux établissements », le sont désormais « aux employeurs de droit privé ainsi qu'aux travailleurs », et les principes généraux de prévention comprennent un chapitre intitulé « Obligations des travailleurs », symétrique du chapitre « Obligations des employeurs ». En outre, si, comme l'ancien texte, le nouveau prévoit que le salarié doit prendre soin de sa santé et de sa sécurité comme de celles des autres salariés, disposition « sans incidence sur le principe de responsabilité de l'employeur », il ajoute que « les instructions de l'employeur précisent les conditions d'utilisation des équipements de travail, des moyens de protection, des substances et préparations dangereuses », ce qui revient à soustraire l’employeur à ses responsabilités. S’agissant de la mise sur le marché et de l'utilisation des substances et préparations dangereuses, le nouveau texte ne précise plus que les décrets d'application « peuvent prévoir les modalités d'indemnisation des travailleurs atteints d'affection causés par ces produits ». Enfin, alors que les inspecteurs et contrôleurs du travail pouvaient jusqu’alors procéder à une mise en demeure en cas de risque dû à une substance chimique de concentration supérieure à une « valeur limite fixée par décret », le nouveau texte ne parle que de « valeur limite », sans aucune précision ; or la directive européenne de 2000, déjà partiellement appliquée en France en 2004, remplace les valeurs limites d'exposition qui s’imposaient aux employeurs par des valeurs limites indicatives.

Partant du principe qu’une femme vaut un homme, y compris pour le pire, vous vous contentez d’appliquer des directives européennes qui ne laissent subsister qu'une simple protection pour les femmes enceintes. Certains travaux dangereux autrefois interdits aux femmes, notamment parce qu’ils excèdent leurs forces, sont ainsi autorisés. Les femmes pourront notamment transporter de façon régulière des charges supérieures à 25 kilos ou bien travailler dans les locaux insalubres et dangereux, où l'ouvrier est exposé à des manipulations ou à des émanations préjudiciables à sa santé.

Plus symboliquement encore, ce texte supprime des formulations valant pour l'employeur, tout en les maintenant pour les salariés, et remplace systématiquement des termes considérés comme infamants : délinquant est par exemple remplacé par « personne condamnée ».

Pis encore, tout est fait pour transférer de l’employeur au salarié les infractions relatives à la santé et à la sécurité, et les peines complémentaires sont allégées : l'insertion des jugements dans les journaux pourra se réduire à des extraits et les frais ainsi exposés ne devront pas dépasser le montant de l'amende.

Les sanctions punissant la récidive seront en outre supprimées dans un grand nombre de domaines. Alors que le précédent code prévoyait un doublement des peines pour les récidivistes, il n’en est plus fait mention. Ont également disparu les sanctions pénales en cas de violation des accords collectifs étendus et dérogatoires à la loi, notamment pour ce qui est des heures supplémentaires et du repos compensateur ; plus de sanction non plus pour les abus de confiance commis par les entreprises de travail temporaire qui détourneraient les sommes remises à titre de caution, ni pour les dirigeants d'une entreprise qui omettraient de déclarer les salariés temporairement détachés en France.

Vous avez également fait un grand ménage pour ce qui est du rôle et des modalités de désignation des différents représentants du personnel, désormais renvoyés à un simple décret. Autres régressions, l’élection des délégués du personnel et des membres du comité d'entreprise auront lieu à la même date et les procédures judiciaires seront ralenties avec la disparition des référés.

Vous supprimez également l’obligation d’informer les membres du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail de la venue d’un inspecteur du travail, ainsi que la possibilité de faire appel à titre consultatif à toute personne de l'établissement. Vous réduisez enfin les informations qui doivent être adressées au comité d'entreprise et au comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail.

Bien que la majorité s’efforce de minimiser le jeu de « chamboule tout » auquel s’est livrée la commission chargée de recodifier le droit du travail, ce texte ne tend nullement à toiletter le droit du travail, mais au contraire à le récrire en ignorant les mises en garde doctrinales et les protestations des nombreux syndicalistes, inspecteurs du travail, juristes, avocats, et magistrats, qui se sont élevés contre ce texte. Tous y ont vu un affaiblissement de l'ordre public social.

On ne peut en effet ignorer que le nouveau code du travail, qui ne concerne pas moins de 21 millions de salariés, se traduira par des conditions de travail dégradées, une souffrance accrue, une protection réduite et des droits syndicaux moindres. Pour commette ce forfait, vous profitez du silence des médias, qui jugent sans doute la question trop complexe pour intéresser ceux qu'ils nomment souvent, avec une touche de mépris ou de dédain, « les gens ». Ceux-ci ne souhaitent pas que leurs représentants se dessaisissent de leurs responsabilités en se contentant de contresigner des textes élaborés par d'obscurs comités d'experts, qui ne font que traduire les exigences du Medef.

C'est pour cette raison que je vous invite à voter la motion de renvoi en commission. Nous devons débattre de nos différends et nous pencher plus en détail sur les décrets à venir. Un texte aussi crucial que le code du travail, élaboré en 130 ans et touchant à l'histoire du mouvement ouvrier et des mouvements sociaux, mérite mieux qu’un tel passage en force du Gouvernement (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR et du groupe SRC).

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales  Je rappelle que la commission a tenu deux réunions sur ce projet de loi, et examiné 169 amendements, ce qui n’est pas rien compte tenu du nombre limité d’articles – 6 au total !

J’observe également que 37 amendements ont été adoptés au terme de débats passionnants malgré l’aridité du sujet. Tout cela est d’autant plus remarquable qu’il s’agit d’une simple ratification de dispositions prises par voie d’ordonnance… Les questions de fond ont été largement abordées et je note que quatre amendements de l’opposition ont été adoptés. On ne peut que se féliciter de cette contribution, qui témoigne d’un intérêt partagé pour les dispositions en discussion.

Je veux enfin saluer le travail remarquable effectué par notre rapporteure, qui a mené de nombreuses auditions – syndicats, administrations, professeurs de droit, les multiples intervenants ont permis d’éclairer les débats par leur diversité. Il me semble donc que l’examen en commission a été plus que fructueux.

Pour toutes ces raisons, le moment est venu de passer à la discussion des articles. Je vous invite à rejeter la motion de renvoi en commission.

Mme la Présidente – Sur le vote de la motion, je suis saisie par le groupe GDR d’une demande de scrutin public. Nous en venons aux explications de vote.

M. Régis Juanico – Oui, nous sommes inquiets, car nous ignorons les intentions réelles de la majorité en matière de droit du travail ; nous les redoutons donc. Vous parlez de recodification, mais cela suppose un texte plus lisible et plus accessible pour les salariés concernés. Bien au contraire, c’est une véritable usine à gaz que vous nous proposez : sept fois plus de subdivisions dans le texte et deux fois plus d’articles de loi !

Puisque, en fait d’usine à gaz, il a été question des 35 heures, le Gouvernement ferait bien de faire le ménage dans ses propres textes – je pense notamment à la loi TEPA sur les heures supplémentaires, que bien des chefs d’entreprise ont aujourd’hui du mal à comprendre.

Je regrette également que certains entretiennent volontairement la confusion entre la complexité des textes et les supposées « rigidités » que vous souhaitez faire disparaître. Que visez-vous sous ce nom sinon les protections élémentaires auxquelles ont droit les salariés ? Sous couvert de simplification, vous ouvrez la voie à un démantèlement du code du travail, dernier verrou que vous rêvez de faire sauter en même temps que le SMIC.

Comme le faisait observer Mme Billard, ce texte vient en débat dans un contexte très particulier – je pense aux récentes annonces du Président de la République, notamment sur le travail du dimanche, mais aussi aux négociations en cours sur la modernisation du marché du travail. Qu’il s’agisse de la nature des contrats, des périodes d’essai, des licenciements et des ruptures à l’amiable, de multiples reculs se préparent.

La notion de recodification implique en outre d’agir à droit constant. Avec vous, celui-ci est malheureusement très mouvant, car les modifications rédactionnelles qui nous sont proposées entraîneront des changements de jurisprudence. Chacun sait également qu’il faudra négocier des avenants aux conventions collectives qui font expressément référence aux articles du code du travail. J’ajoute que 500 articles, devenant réglementaires, disparaîtront de la partie législative ; certaines compétences aujourd’hui reconnues à l’inspection du travail disparaîtront et celles des conseils de prud’hommes seront modifiées ; en matière d’hygiène, de sécurité et de conditions du travail, les obligations mises à la charge des employeurs seront enfin placées sur le même plan que celles des salariés.

Pour toutes ces raisons, le groupe SRC votera la motion de renvoi en commission (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR).

M. Frédéric Reiss – Tous ces propos sont bien affligeants. Ce projet de loi parachevant un processus engagé depuis près de trois ans, il n’y a en effet nulle précipitation en la matière ! À la fin de l’année 2004, le Gouvernement a été habilité à procéder à la réécriture du code du travail à droit constant, puis l’habilitation a été renouvelée en 2006. Les délais ayant été fort longs, une véritable réflexion a pu avoir lieu sur tous ces sujets.

Au fil du temps, le code du travail est devenu de moins en moins lisible pour ses utilisateurs, qui sont loin d’être tous des juristes… Afin de rendre le droit en vigueur plus lisible, nous allons donc scinder certains articles, qui seront désormais plus courts et plus clairs ; la terminologie utilisée a été harmonisée ; de nouveaux articles ont été introduits, dans un souci de pédagogie, afin de définir certaines notions, comme le travail temporaire ; nous intégrons enfin certains textes qui avaient échappé à toute codification, notamment la mensualisation prévue par la loi de 1978.

Plus complet et plus actuel, le nouveau code sera également allégé grâce à la suppression de dispositions tombées en désuétude ou contraires à des règles de droit communautaire et international. J’ajoute que le risque de changements jurisprudentiels sera limité grâce au principe de codification à droit constant, qui guidera l’interprétation des nouvelles dispositions par les tribunaux.

C’est pourquoi le groupe UMP estime que le renvoi en commission n’a pas lieu d’être (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

Mme Martine Billard – Vous l’avez reconnu, Monsieur le ministre : c’est en toute bonne foi que nous vous interrogeons sur ce texte. Hélas, nous n’avons pas eu le temps de travailler au fond en commission, d’où certaines erreurs – j’admets volontiers la mienne concernant le rapport relatif au travail à temps partiel. Si la plupart des amendements ont été examinés au pas de charge par la commission au titre de l’article 88, c’est parce que nous n’avons pu les déposer à temps, faute d’avoir eu celui de vérifier article par article que la codification se faisait à droit constant. C’était pourtant nécessaire, Monsieur le ministre : sachez que nous ne vous croyons pas sur parole ! Mieux vaudrait donc renvoyer ce texte en commission afin de ne pas avoir à examiner en séance des amendements qui sont peut-être encore à préciser. Le législateur doit être en mesure de faire son travail de la meilleure des manières ! (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR et du groupe SRC)

À la majorité de 66 voix contre 28 sur 94 votants et 94 suffrages exprimés, la motion de renvoi en commission n’est pas adoptée.

Mme la Présidente - J’appelle maintenant la discussion des articles dans le texte du Sénat.

ARTICLE PREMIER

Mme Huguette Bello – Parmi les mesures prétendument obsolètes que vous nous proposez d’abroger figure l’article 832-4, portant création du FEDOM, dont le maintien est néanmoins indispensable. Créé en 1994 – peu après les émeutes du Chaudron qui ont endeuillé tant de familles réunionnaises – par la loi Perben pour résorber le chômage outre-mer, le FEDOM regroupe les financements pour l’économie solidaire et permet aux élus locaux et aux représentant de l’État de disposer d’un outil de pilotage en matière de politique sociale. Sa suppression menace l’efficacité des contrats aidés et écarte les élus des décisions en matière de solidarité. C’est nager contre le courant des institutions nationales et communautaires, qui vont dans le sens de la proximité ! Cette mesure est d’autant plus inquiétante que la gestion des contrats aidés est désormais confiée au ministère de l’économie, et que leurs financements ne cessent de diminuer. Le FEDOM est-il vraiment si obsolète ? Le chômage outre-mer – bien plus élevé qu’en métropole – ne mérite-t-il plus, aux yeux du Gouvernement, qu’on lui accorde une attention particulière ? (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR et du groupe SRC)

M. Roland Muzeau – Les ordonnances ne sont pas autre chose qu’un aveu de faiblesse de nos institutions. Dans un domaine aussi essentiel que le droit du travail, le choix d’une voie si peu démocratique tranche avec la volonté affichée par le Président de la République de faire procéder toute réforme sociale d’une large concertation. On dessaisit par la même occasion le Parlement d’un projet qui affectera le quotidien de 21 millions de salariés.

C’est à votre majorité que l’on doit la complexification récente du droit du travail. N’oublions pas que M. Fillon, ancien ministre du travail, a torpillé la hiérarchie des normes et multiplié les dérogations à la loi. Comment défendre la sécurité juridique lorsque l’on propose plusieurs lois par an pour revenir sur tel ou tel point de jurisprudence ?

Par ailleurs, ne confondons pas lisibilité et simplification. Voici plusieurs années que juristes et économistes, sous l’œil attentif du Medef, dénoncent la complexité du droit du travail. À propos de votre texte, le professeur Lyon-Caen parle d’une recodification assortie d’un espoir à peine perceptible d’amorcer des révisions substantielles. Qui peut encore prétendre qu’il s’agisse d’un projet à droit constant ? Mme Grévy, universitaire, a bien compris l’incompatibilité entre une recodification uniforme et mécanique et un secteur très spécifique du droit – celui du travail – dont l’épaisseur historique et symbolique pourrait bien pâtir. Vous êtes bien les derniers à refuser d’admettre que les résultats de la recodification seront bien différents de ses objectifs. Quant à la lisibilité du code, elle ne progresse guère, nous dit le professeur Teyssié. Ce serait même plutôt le contraire… Tous ces arguments nous contraignent à refuser de valider la copie du Gouvernement ! (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR et sur les bancs du groupe SRC)

L'article premier, mis aux voix, est adopté.

ART. 2

M. Roland Muzeau – M. Redé, corédacteur de la partie législative du nouveau code du travail, a reconnu qu’il faudrait sans doute plusieurs années avant d’en découvrir tous les secrets. Ce n’est pas ce texte – dont nous allons débattre moins longtemps que des chiens dangereux ! – qui permettra de le clarifier. Pour autant, une lecture rapide de l’ordonnance suffit à constater l’atomisation en cours de notre code du travail. Des agriculteurs aux dockers, les salariés dans leur grande variété ont tous un point commun : leur subordination à l’employeur. Pourquoi les exclure du droit commun du travail ? Pourquoi segmenter leurs droits, sauf à vouloir les réduire au nom de la rentabilité économique ?

Comme nous l’avons déploré à l’occasion notamment de la transcription de directives européennes en matière d'aménagement du temps de travail dans les transports, le souci d’« équilibre » entre l’exigence de compétitivité et la protection des salariés fait des ravages. L’inscription de l'ensemble des règles concernant une profession dans un code spécifique risque de légitimer les régimes d'exception et d’ouvrir la porte à de nouveaux reculs. Cette segmentation de la population salariée va également à rebours de la fusion de l'inspection du travail généraliste avec l’inspection spécifique à l'agriculture.

C’est pourquoi nos amendements 114, 160 159 et 161 tendent à réintégrer dans le code du travail des dispositions qui n'auraient jamais dû en sortir, en particulier celles applicables aux salariés agricoles et aux salariés des transports.

Mme Jacqueline Irles, rapporteure – La commission les a rejetés, car la réécriture du code a pour objectif son recentrage ; le fait de transférer des dispositions sectorielles dans d’autres codes ne change rien à leur valeur juridique.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail Avis défavorable car ces amendements remettent en cause le périmètre du nouveau code du travail.

M. Roland Muzeau – C’est bien le but !

M. Alain Vidalies – Le texte qui nous est présenté correspond-il à la loi d’habilitation ? S’agit-il d’une réécriture à droit constant ? Les exigences de lisibilité et d’intelligibilité de la loi sont-elles satisfaites ? À chacune de ces questions, la réponse est « non ».

Le Gouvernement était-il habilité à externaliser des dispositions figurant antérieurement dans le code ? Assurément pas ! Le Parlement n’en ayant pas débattu, il y a là un motif d’inconstitutionnalité. Si, quoi que vous en disiez, certains de nos concitoyens estiment que leur situation s’en trouve changée, ils seront fondés à contester. Votre objectif est en fait de fragmenter le droit du travail pour pouvoir mieux le modifier demain ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR)

L'amendement 114, mis aux voix, n'est pas adopté, non plus que les amendements 160,159 et 161.

Mme Jacqueline Irles, rapporteure – L’amendement 1 vise à ne pas abroger une disposition qui servira de base légale à un décret à venir.

L'amendement 1, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

Mme Huguette Bello – Mon amendement 67 vise à maintenir le FEDOM, que le Gouvernement s'apprête à supprimer sans aucune concertation préalable.

Copiloté par des parlementaires d'outre-mer, ce fonds spécifique est indispensable, d’abord parce que le transfert des crédits correspondants vers le ministère de l'économie rendra extrêmement difficile l'identification des contrats aidés de l’outre-mer, ensuite parce que la politique générale en matière de contrats aidés est totalement inadaptée à la situation de l'outre-mer – qui devra encore faire face de longues années à un chômage massif.

Le maintien du FEDOM permettrait au moins de ne pas oublier que la situation de l'emploi n'est pas la même partout et qu’il convient de mener des politiques différenciées (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR et du groupe SRC).

Mme Annick Girardin – L’amendement 74 a le même objet. La suppression du FEDOM est une atteinte aux prérogatives de la représentation nationale ; il serait donc de l’intérêt de tous les parlementaires, toutes tendances confondues, d’adopter ces amendements. Au demeurant, comment accepter que le Gouvernement ait fait adopter ce projet par le Sénat sans signaler que l’ordonnance supprimait le FEDOM ?

Avec mes collègues radicaux, je demanderai à notre groupe de déposer un recours devant le Conseil constitutionnel, la suppression du FEDOM allant manifestement au-delà de l’habilitation donnée par le Parlement et nous éloignant fortement d’une codification à droit constant.

On nous dit que le FEDOM réapparaîtra dans la partie réglementaire du code, mais comment justifier ce déclassement, si ce n’est en y voyant l’ultime étape avant la suppression pure et simple du FEDOM ? Il est de notre responsabilité de tout faire pour éviter la disparition de cet outil indispensable à la politique de l’emploi outre-mer (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR et du groupe SRC).

Mme Jacqueline Irles, rapporteure – La commission n’a pas examiné ces amendements, qui sont arrivés trop tard. Peut-être pourront-ils être retirés si le Gouvernement nous donne des assurances quant au maintien du FEDOM (Exclamations sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR).

M. Xavier Bertrand, ministre du travail Le Gouvernement vous les donne, et c’est pourquoi il émet un avis défavorable : le FEDOM relève bien de la partie réglementaire, et il sera codifié à l’article R. 5524-2.

Mme Huguette Bello – Les populations d’outre-mer s’en souviendront !

M. Xavier Bertrand, ministre du travail Pourquoi cette agressivité ?

M. Alain Vidalies – Monsieur le ministre, ce déclassement mériterait des explications car d’autres fonds, tel le Fonds pour l’insertion professionnelle des handicapés et les fonds de formation professionnelle, demeurent dans le domaine législatif. Pourquoi celui-ci serait-il par nature d’ordre réglementaire ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR)

M. Xavier Bertrand, ministre du travail Il ne s’agit pas des principes généraux du droit du travail ; nous ne sommes donc pas dans le cadre de l’article 34 de la Constitution.

M. Alain Vidalies – Et pour les autres fonds ?

M. Xavier Bertrand, ministre du travail La recodification à droit constant ne veut pas dire le statu quo. Certains sujets relèvent davantage du domaine réglementaire. Vous semblez considérer qu’il y a d’un côté la loi, et qu’il y a de l’autre le décret, qui serait un acte unilatéral et pourrait être modifié subrepticement. Moi qui ai été parlementaire avant d’être ministre, et qui le serai peut-être à nouveau, je voudrais mettre les choses au point.

Un amendement peut être voté de façon assez subreptice, sans débat de fond, et un décret, publié au Journal officiel et obéissant à des règles de concertation précises, n’offre pas forcément une garantie juridique inférieure ! C’est la Constitution qui a fixé les domaines respectifs de l’article 34 et de l’article 37. Je vous assure que nous gardons cette répartition en permanence à l’esprit et que nous ne faisons pas n’importe quoi.

M. Alain Vidalies – Voilà une première qui figurera au Journal officiel : un ministre de la République vient d’expliquer qu’un amendement issu de la représentation nationale peut présenter moins de garanties que le travail effectué par l’exécutif, d’une manière par définition unilatérale, dans le cadre d’un décret ! Rarement un ministre aura prononcé des mots aussi déraisonnables. Ce n’est pas une bonne chose pour les relations entre le Gouvernement et le Parlement, y compris du point de vue de la majorité.

Mais sur le fond, Monsieur le ministre, vous n’avez toujours pas répondu. Un fonds ne peut être placé dans le domaine réglementaire uniquement parce que vous pensez que c’est mieux ainsi. Quelle est la spécificité qui justifie ce déclassement, alors que les autres fonds restent du domaine législatif ? Si l’on ne comprend pas les raisons qui ont présidé à ce choix, la suspicion demeurera (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC).

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – On n’est jamais déçu lorsqu’on joue le jeu du débat parlementaire avec vous, Monsieur Vidalies ! Cette discussion me ramène à cet été, lors du débat sur le service minimum, alors que vous réclamiez sans répit des réponses détaillées de la part du Gouvernement, sous la menace de suspensions de séance et en proclamant que les propos du ministre, publiés au Journal officiel, allaient servir au Conseil constitutionnel pour censurer le texte – on sait le résultat ! Ce n’est peut-être pas moi qui dis le droit, mais ce n’est pas vous non plus : c’est le Conseil constitutionnel qui statuera, si tant est qu’il soit saisi.

Pour autant je ne vous permets pas de travestir mes propos. J’ai suffisamment de respect pour l’opposition pour ne pas laisser jouer ce jeu-là. On en connaît, des lois fondées sur le dialogue social : les 35 heures imposées, quel beau symbole ! Un vrai modèle de dialogue social pour le pays ! Et je peux ajouter que le CPE était issu d’un amendement, et qu’il n’était pas non plus un modèle de dialogue social. Un autre exemple ? Cet amendement de M. Gremetz dans un texte censuré par le Conseil constitutionnel… En revanche, je peux vous parler du décret sur le tabac, qui a donné lieu à une très large concertation – et c’est d’ailleurs pour cela qu’il est largement accepté aujourd’hui. Il n’y a jamais de garantie absolue, mais lorsqu’on croit au dialogue social, on peut le pratiquer. Et lorsqu’on veut donner des leçons, il est préférable d’avoir des références ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

Les amendements 67 et 74, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

Mme Huguette Bello – Vous ne connaissez vraiment rien à l’outre-mer ! Il est scandaleux de vouloir supprimer le FEDOM ! (Protestations sur les bancs du groupe UMP)

Mme Jacqueline Irles, rapporteure – L’amendement 2 a été adopté par la commission contre mon avis. Je suggère que les auteurs de cette proposition la défendent.

M. Alain Vidalies – Ce n’est pas très correct : c’est un amendement de la commission !

M. Michel Liebgott – Notre amendement 73 est identique. Il est la preuve de l’utilité des réunions de commission, puisque le bon sens a fini par prévaloir…

Le fait est qu’il va falloir former les conseillers prud’homaux, et que cela va coûter de l‘argent. Faut-il le faire pour tous les conseillers maintenant, alors qu’une moitié d’entre eux ne siégeront peut-être plus après l’élection de décembre 2008 ? Nous sommes comptables de l’emploi des deniers publics. Repousser la date d’entrée en vigueur de la loi est donc une mesure de bon sens, d’autant que nous avons tous convenu que ses dispositions s’appliqueraient progressivement et feraient sans doute l’objet encore de bien des débats, en attendant les nouveaux textes qui sont prévus. La position de la commission est parfaitement raisonnable et il n’y a aucune raison d’en changer. Je souhaite que le Parlement montre, au-delà des divergences de fond, le respect qu’il porte à ceux de nos concitoyens qui veulent défendre les intérêts des salariés et des entreprises, en leur donnant le temps et la formation nécessaires pour le faire dans les meilleures conditions possibles.

M. Roland Muzeau – L’amendement 115 est identique. La date d'entrée en vigueur de la partie législative du nouveau code du travail avait à l’origine été fixée au 1er mars 2008, afin de coïncider avec celle de la partie réglementaire. Les critiques ayant fusé, y compris chez les défenseurs du travail de recodification, le Gouvernement a accepté, au Sénat, de le reporter au 1er mai. Mais peut-on raisonnablement penser que ces deux mois supplémentaires suffiront à ce que les salariés et leurs représentants, les organisations syndicales, les inspecteurs du travail, les conseillers prud'homaux et les juristes digèrent les quelque 3 652 articles du nouveau code, s'en approprient l’architecture, confrontent les interprétations possibles ? Vous savez bien que non. Autant les grandes entreprises, les fédérations patronales bardées de juristes et les cabinets spécialisés auront les moyens d’analyser ces nouvelles règles – surtout s’ils les ont rédigés eux-mêmes –, autant les salariés en seront incapables, aucun moyen de formation supplémentaire n'ayant été consenti aux organisations syndicales et la formation des conseillers prud'homaux n’étant pas garantie.

Vous parlez d’accessibilité du droit, mais notre rapporteure peine à cacher son scepticisme, s'interrogeant sur « le respect des principes de clarté et d'effectivité du droit » et considérant que, compte tenu des bouleversements du plan des codes et des scissions d'articles, la substitution, qui devrait en l'état être effectuée sans tableau officiel de correspondance, ne manquera pas de créer des difficultés.

Faites preuve de réalisme, confirmez en séance publique le vote de la commission demandant le report de la date d'entrée en vigueur du nouveau code !

Mme Martine Billard – L’amendement 163 est identique. Il est prévu que l’ensemble législatif et réglementaire soit publié au 1er mars 2008, pour une entrée en vigueur au 1er mai. Cela fait deux mois pour s’approprier la nouvelle partie législative – dont une partie, il est vrai, est déjà connue. Une chose est sûre, c’est que les délégués du personnel non syndiqués n’y parviendront pas. Les grandes entreprises auront les moyens d’anticiper – que ce soit du côté des employeurs ou des syndicats. Mais dans les petites, ce sera très difficile, et ce des deux côtés. Pour les salariés, cela se fera généralement en-dehors de leur temps de travail. Sachant en outre qu’un nouveau texte comportant des modifications fondamentales du code, concernant par exemple le temps de travail et le travail du dimanche, est annoncé d’ici fin décembre, il est à craindre qu’ils ne laissent de côté le nouveau code pour s’y consacrer. Reporter l’entrée en vigueur au 1er janvier 2008 est donc une disposition de bon sens, favorable aux employeurs et aux élus du personnel des petites entreprises. Il y a dans ce pays suffisamment de différences entre petites et grandes entreprises pour ne pas en ajouter une nouvelle.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – Avis défavorable. À mon avis, il n’est pas pensable de reporter l’application de ce texte au 1er janvier 2008 : il n’est pas possible de gérer deux codes en même temps pendant sept mois ! Chaque nouveau texte devrait les prendre les deux en considération, avec une double référence à chaque fois. Par ailleurs, les partenaires sociaux ont reconnu que les outils mis en place permettent une appropriation simple et rapide du nouveau code. Tous ceux qui ont expérimenté la formation prévue ont reconnu qu’une journée suffisait. C’est normal, car c’est la vocation même de ce nouveau code que d’être beaucoup plus lisible ! Nous avons accepté au Sénat un report de deux mois, mais dépasser le 1er mai serait une erreur et créerait beaucoup plus de difficultés qu’il n’y paraît.

Mme Jacqueline Irles, rapporteure – Il faut aussi tenir compte de l’impatience qui s’est exprimée lors de nos auditions pour la mise en place de ce nouveau code, et des moyens qu’ont mis en place les services pour faciliter les choses. Des moteurs de recherche sont en fin d’élaboration, ainsi qu’un tableau de concordance très pratique. Faisons confiance aux utilisateurs du nouveau code ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

Mme Valérie Rosso-Debord – Tous ceux qui s’inquiètent de la capacité des conseillers prud’hommes et autres praticiens du droit à se familiariser avec la nouvelle organisation du code peuvent être rassurés. Il y a en effet deux tables de concordance : l’une permet de savoir où un article de l’ancien code se trouve dans le nouveau, l’autre de retrouver l’origine d’un article du nouveau code dans l’ancien ou dans une loi qui n’était pas encore codifiée. Un logiciel en ligne permettra aussi de faire la recherche d’après la numérotation nouvelle et ancienne. Il n’y a donc pas de raison de ne pas appliquer la loi au 1er mai, date symbolique d’ailleurs.

Mme Martine Billard – Si cela peut modérer votre enthousiasme, il y des erreurs dans les tables de concordance. Je respecte tout à fait les partenaire sociaux, mais ils n’ont pas forcément à l’esprit ce qu’est la pratique dans les petites entreprises, où l’on ne bénéficiera pas des mêmes aides que dans les grandes. Quant aux journées de formation, elles seront réservées aux conseillers prud’hommes.

On a regroupé, en attente en quelque sorte, un certain nombre de dispositions dans l’article 13 pour les transférer dans d’autres codes ou les abroger. On pourrait faire de même avec les dispositions nouvelles. Cela freinerait peut-être la propension du Gouvernement à modifier tous les six mois des lois dont les décrets ne sont même pas parus.

M. Roland Muzeau – Très bien !

M. Jean Mallot – S’agissant d’un amendement adopté par la commission, la rapporteure aurait pu présenter les arguments en sa faveur. Une partie même de la droite a compris l’intérêt de repousser l’application du texte, notamment pour les PME. Ajoutons le fait que la carte des conseils de prud’hommes va être bouleversée et qu’il y aura des élections prud’homales fin 2008, ce qui, en cas d’application du texte au 1er mai, conduira à former des conseillers pour sept mois.

Le problème d’avoir deux législations en parallèle n’en est pas un : ce sera le cas de toute façon entre la date de promulgation de la loi et le 1er mai. En outre, les juristes devront aussi prendre connaissance des textes réglementaires qu’on a annoncés. Si l’on recodifiait à droit constant, la date du 1er mai ne ferait pas problème, et c’est d’ailleurs parce qu’il prétend accréditer cette fiction que le Gouvernement refuse l’amendement de la commission. Mais comme nous ne légiférons pas à droit constant, il faut laisser aux praticiens le temps de se former.

M. Régis Juanico – Ce n’est pas parce que le 1er mai est la fête du travail qu’il faut faire leur fête aux travailleurs ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP) Cela me rappelle d’ailleurs que le 4 décembre, on fête sainte Barbe, patronne des mineurs, pour qui ce jour était autrefois chômé et payé.

Le bon sens commande de repousser la date d’application au 1er janvier afin de laisser le temps aux représentants des salariés d’assimiler ces changements et ceux, pires encore, que nous pressentons.

M. Francis Vercamer – Il est difficile de dire quelle est la bonne date pour appliquer un nouveau texte. Les praticiens ont besoin de temps pour se former, la carte des conseils de prud’hommes va évoluer : ce sont des arguments valables. Mais pensons d’abord aux principaux utilisateurs de ce code, c’est-à-dire les 20 millions de salariés, avant de penser à leurs représentants et aux juristes. C’est pourquoi, si j’ai voté cet amendement en commission, je ne le voterai pas ce soir (Exclamations sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR). Je ne crois pas qu’il soit dans l’intérêt des salariés et des employeurs de retarder l’application et de laisser subsister deux codes en parallèle.

Les amendements 2, 73, 115 et 163, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

L'article 2, modifié, mis aux voix, est adopté.

ART. 3

Mme Martine Billard – Mon amendement 34 rétablit un article relatif à l’affichage, dans les établissements employant du personnel féminin, des textes relatifs à l’égalité entre hommes et femmes. Dans l’ancien code, cette disposition se trouvait à la fin du chapitre consacré à l’égalité professionnelle. Dans le nouveau code, elle se trouve au milieu de ces dispositions, car ce chapitre a été scindé en deux. De ce fait, mon amendement 34 n’a plus lieu d’être et je le retire donc, de même que l’amendement 35. Je suis convaincue qu’il est plus efficace de placer les dispositions conservant l’affichage en fin de chapitre, comme c’était le cas jusqu’ici.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail L’amendement 66 du Gouvernement est défendu.

L'amendement 66, accepté par la commission, mis aux voix, est adopté.

M. Roland Muzeau – Nous soupçonnons que le déplacement des dispositions relatives au contrat d'apprentissage dans la partie relative à la formation professionnelle privera les titulaires de ces contrats de la protection que leur donne le contrat de travail. Nous proposons donc par l’amendement 133 de replacer ces dispositions dans la partie du code consacrée au contrat de travail, aux conventions collectives et au salaire. Il ne nous paraît pas qu’en l’espèce la recodification ait été faite à droit constant.

Mme Jacqueline Irles, rapporteure – Avis défavorable car le rapprochement opéré est logique.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – Avis également défavorable. Il est plus judicieux de faire figurer ces dispositions là où sont décrites les finalités du contrat.

M. Roland Muzeau – Ce déplacement introduit-il ou non une modification de droit, comme nous en avons le sentiment ?

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – Ce déplacement n’entraîne pas de modification de fond.

M. Roland Muzeau – Même de contenu ?

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – Il n’y a pas de problème.

L'amendement 133, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Martine Billard – Par l’amendement 36 rectifié, nous proposons de rétablir le droit constant, modifié par un déplacement qui n’a rien d‘anodin. En effet, le deuxième alinéa de l'article L. 1231-1 prévoit la non-application des dispositions du titre III aux salariés en période d'essai, y compris celles relatives au licenciement économique collectif. Le champ d'exclusion est donc plus large que celui de l'article L. 122-4 du code du travail en vigueur dans lequel ces dispositions figurent actuellement. Pour nous, l’emplacement choisi signifie que les salariés en période d’essai ne seront pas pris en compte dans les procédures de licenciement économique.

M. Alain Vidalies – L’amendement 70 et la préoccupation qu’il traduit sont identiques. Dans le code du travail en vigueur, en cas de licenciement économique collectif, un salarié en période d’essai bénéficie de l’application de dispositions propres. Les dispositions prévues à l’article L. 1231-1 semblent identiques à celles de l’actuel article L. 122-4 mais étant donné le déplacement opéré, la seule conclusion possible est que ceux qui, hier, étaient inclus dans la procédure de licenciement collectif en seront demain tenus à l’écart. Il n’y a donc pas droit constant.

M. Roland Muzeau – L’amendement 134, identique, vise également à rétablir le droit constant. Cette appétence particulière pour le détricotage des dispositions relatives au licenciement économique préfigure peut-être les futures séparations amiables que M. Sarkozy et Mme Parisot veulent imposer. C’est en tout cas ce que redoutent les organisations syndicales. D’évidence, les modifications proposées ne sont pas aussi anodines que le Gouvernement veut bien le dire.

Mme Jacqueline Irles, rapporteure – La commission a rejeté ces amendements qui, s’ils étaient adoptés, modifieraient le droit constant puisque les dispositions de l’article L. 122-4 en vigueur ne s’appliquent pas en période d’essai dans le cas de licenciement économique.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – Même avis, pour la même raison.

Les amendements 36 rectifié, 70 et 134, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. Michel Liebgott – Le Gouvernement a exclu de l’ordonnance de codification du code du travail les dispositions relatives à la clause de non-concurrence qui sont particulières à l’Alsace et à la Moselle. J’espère qu’il ne s’agit pas de l’amorce d’une révolution tendant à exiger des Alsaciens et des Mosellans qu’ils renoncent à leur droit local, à ce jour non contesté et hérité d’une histoire douloureuse, qui n’a pas fini de laisser des traces. C’est en tout cas ce qu’ils ressentiraient si l’amendement 187 n’était pas adopté.

Mme Jacqueline Irles, rapporteure – Comme l’avait fait le Sénat, la commission a rejeté l’amendement, qui porte sur une question de droit local relative à un problème particulier pour une profession particulière et qui conduirait à alourdir passablement le code. Je souligne que le nouveau code contient de nombreuses dispositions relatives au droit d’Alsace et de Moselle, et que le Sénat a adopté plusieurs amendements à ce sujet.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – Même avis.

L'amendement 187, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Alain Vidalies – Par l’amendement 76, nous proposons de rétablir le droit constant concernant la notification par l’employeur des critères retenus pour fixer l’ordre des licenciements.

En effet, la mention des critères retenus pour fixer l’ordre de licenciement ne fait plus référence à l’article qui en fixe les conditions de définition, alors que la règle du droit constant exigerait que le nouvel article L. 1233-17 fasse référence au nouvel article L. 1233-5, tout comme l’ancien article L. 122-14-2 mentionnait l’ancien article L. 321-1.

Mme Jacqueline Irles, rapporteure – Avis défavorable : les critères d’ordre de licenciement étant obligatoirement définis au terme de l’article L. 1233-5, il est inutile de le rappeler à l’article L. 1233-17.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – Même avis.

L'amendement 76, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Jacqueline Irles, rapporteure – L’amendement 3 rectifié a été adopté par la commission. Je laisserai à ses auteurs le soin de le défendre…

M. Michel Liebgott – Il s’agit là encore d’une question de bon sens. Je regrette que Mme la rapporteure n’ait pas été d’accord avec nous tout à l’heure, et que le groupe Nouveau Centre ait changé d’avis…

M. Francis Vercamer – N’a-t-on plus le droit de changer d’avis ? (Sourires)

M. Michel Liebgott – Si, mais il est dommage de le faire pour des raisons tactiques plutôt que pour faire progresser le droit du travail…

Si notre amendement 71, identique et qui vise à protéger les salariés contre des licenciements économiques en masse, rectifie bien une simple erreur matérielle, cela explique que Mme la rapporteure s’y rallie, mais cela montre aussi que le texte aurait pu être amélioré par un examen en commission en lieu et place de cette discussion hâtive ; en revanche, si nous sommes d’accord sur le fond, pourquoi ne pas approuver l’ensemble de nos amendements visant à faire respecter la règle du droit constant ?

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – Je m’en remets à la sagesse de l’Assemblée (Sourires), parce que le principe du droit constant est en jeu mais que l’amendement aurait pu être plus clair.

Les amendements 3 rectifié et 71, mis aux voix, sont adoptés.

Mme Martine Billard – L’amendement 38 vise à maintenir dans la partie législative du nouveau code la disposition selon laquelle le certificat de travail reçu par le salarié qui quitte l’entreprise, en raison d’une démission ou d’un licenciement, ne mentionne que les dates d’entrée et de sortie et la nature de l’emploi ou, le cas échéant, des emplois successivement occupés et des périodes durant lesquelles ils l’ont été. C’est en effet au terme d’une longue bataille que les syndicats ont obtenu que le certificat de travail soit neutre, afin d’éviter que des appréciations sur le salarié, par exemple sur sa tenue, ne l’empêchent de retrouver un emploi, en particulier en cas de licenciement et dans des bassins d’emploi restreints. Cette disposition, si abstraite puisse-t-elle paraître à ceux qui n’ont jamais travaillé en entreprise ou dans d’autres régions que l’Île-de-France, où il est plus facile qu’ailleurs de retrouver un emploi, est décisive pour de nombreux salariés.

Bien entendu, rien n’empêche un chef d’entreprise de téléphoner à l’ancien employeur du salarié qu’il envisage d’embaucher, mais cette pratique n’équivaut pas à la remise d’un certificat écrit. Il est donc essentiel, Monsieur le ministre, de maintenir dans la partie législative du code cette disposition plutôt que de la renvoyer à un décret, par définition modifiable à tout moment, ce qui constituerait une régression en matière de droit du travail.

Mme Jacqueline Irles, rapporteure – Avis défavorable : le détail du contenu du certificat de travail relève typiquement du domaine règlementaire ; il sera donc précisé, dans le nouveau texte, à l’article R. 1234-1.

Mme Martine Billard – J’insiste : si, au terme d’un long combat, le législateur a inscrit cette disposition dans la partie législative, c’est bien afin d’obliger tous les chefs d’entreprise à la respecter (« Bien sûr ! » sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR).

M. Alain Vidalies – Monsieur le ministre, contesterez-vous que cet amendement concerne la protection d’une liberté publique ? Car c’est bien pour protéger le salarié que menacerait la mention dans le certificat de certaines précisions, et non du fait de la nature de ces dernières, que la disposition a été inscrite dans la loi. Le point de vue administratif qui vient d’être invoqué repose sur une erreur d’appréciation.

M. Jean-Patrick Gille – Très bien !

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – Nous pourrions prolonger indéfiniment ce débat de fond. L’invocation d’une liberté publique doit être maniée avec prudence. L’inscription de cette mesure dans un décret, qui en amoindrirait selon vous la force protectrice (« Non ! » sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR), ne vise naturellement pas à remettre en cause l’exclusion de mentions qui pourraient empêcher le salarié de retrouver un emploi ; loin d’émaner du seul Gouvernement, elle résulte des travaux et des discussions qui ont présidé au dépôt du texte d’habilitation. Ce déclassement, qui ne ressortit pas aux erreurs matérielles que je suis prêt à assumer devant l’Assemblée comme je l’ai fait devant le Sénat, est donc voulu. Vous n’êtes pas obligés d’être d’accord, mais rien ne vous empêche d’évoluer…

L'amendement 38, mis aux voix, repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.

Mme Jacqueline Irles, rapporteure – L’amendement 4 propose que la nullité de la procédure de licenciement comme dans l’ancien code ne s’applique pas aux entreprises en situation de redressement ou de liquidation judiciaire.

L'amendement 4, approuvé par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

Mme Jacqueline Irles, rapporteure – L’amendement 5 adapte le texte aux dispositions du PLFSS pour respecter la règle du droit constant.

M. Roland Muzeau – Ainsi, avant même que nous ne les examinions, les dispositions du texte étaient déjà intégrées au PLFSS ! Quelle prouesse ! (Sourires sur les bancs du groupe UMP)

Mme Marie-Christine Dalloz – C’est ce que l’on appelle l’anticipation ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR)

Mme Jacqueline Irles, rapporteure – C’est une question de cohérence !

L'amendement 5, approuvé par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

Mme Martine Billard – L’amendement 39 est défendu. Je rappelle que le groupe GDR a demandé à deux reprises, lors de la conférence des présidents, que nous disposions de plus de temps pour étudier sérieusement le texte. Soulever des questions et chercher à obtenir des réponses relève de notre devoir !

L’amendement 39 vise à rétablir l’obligation de consultation du comité d’entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel lorsque la durée d’un CDD est portée à vingt-quatre mois, comme le prévoyait l’article L. 121-1-2. En effet, contrairement à la règle du droit constant, cette disposition n’a pas été totalement transposée dans le nouveau texte, où la mention du comité d’entreprise a disparu – à moins qu’elle n’ait été déplacée, ce que l’éclatement des dispositions de l’ancien code et les erreurs que comporte le tableau de comparaison empêchent de vérifier.

Or les représentants du personnel doivent être tenus informés des reconductions des CDD, dont les conditions de conclusion sont strictement encadrées.

Un employeur ne peut choisir de recourir à sa guise tantôt à un CDD, tantôt à un CDI. Il est normal que le comité d’entreprise soit informé des conditions d’emploi, et prenne ainsi connaissance du renouvellement des CDD.

Mme Jacqueline Irles, rapporteure – Avis défavorable. L’amendement 39 ne respecte pas le principe de codification à droit constant : cette obligation ne figurait pas à l’article L. 122-1-2. La commission est en revanche favorable à l’amendement 77 rectifié.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – Je suggère à Mme Billard de retirer l’amendement 39 au profit de l’amendement 7 rectifié, auquel le Gouvernement est, lui aussi, favorable.

M. Michel Liebgott – L’amendement 77 rectifié tend à rétablir la référence à une consultation préalable du comité d’entreprise et, à défaut, des délégués du personnel. Je suis heureux que la commission et le Gouvernement soient favorables à cette proposition.

L'amendement 39 est retiré.

Mme Martine Billard – Les employeurs sont aujourd’hui tenus de communiquer les contrats de travail aux salariés dans un délai de deux jours. Préciser qu’il s’agit de jours ouvrables, comme le fait le projet de loi, aurait des conséquences défavorables pour ceux qui travailleraient un dimanche : ce jour n’étant pas considéré comme ouvrable, ces derniers pourraient être licenciés avant d’avoir eu communication de leur contrat, ce qui rendrait une contestation ultérieure plus difficile.

Pour cette raison, l’amendement 40 tend à ce que nous en restions au droit constant. J’ajoute que cette obligation ne vaut pas dans les cas où un contrat écrit n’est pas nécessaire, notamment en cas d’utilisation d’un chèque « emploi service ».

Mme Jacqueline Irles, rapporteure – Avis défavorable. Le projet de loi tend à harmoniser le droit en vigueur, la notion de jours ouvrables s’appliquant déjà aux contrats de travail temporaire. J’observe en outre, Madame Billard, qu’il serait bien difficile à une entreprise de remettre, le dimanche, un contrat de travail à tout salarié embauché le vendredi.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – Même avis.

Mme Martine Billard – Si l’on n’étendait pas les possibilités de travailler le dimanche, le problème serait moins grave... Or, c’est votre intention. De plus en plus de salariés travailleront momentanément sans avoir eu connaissance de leur contrat.

L'amendement 40, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'amendement 77 rectifié, mis aux voix, est adopté.

M. Alain Vidalies – L’amendement 59 est relatif à une autre modification du droit constant, concernant cette fois la requalification d’une succession de contrats à durée déterminée en contrats à durée indéterminée. Le texte qui nous est présenté codifie la procédure particulière applicable dans ce cas, à savoir la saisine directe du bureau de jugement des conseils de prud’hommes, mais laisse de côté le caractère exécutoire de cette décision à titre provisoire.

Pourquoi laisser de côté cette disposition qui permet d’éviter les procédures dilatoires ? Nul n’y a touché depuis 1990. Qu’on ne nous réponde pas – je le précise par anticipation – qu’il s’agit d’une mesure réglementaire : vous maintenez la procédure applicable en partie législative !

M. Roland Muzeau – L’amendement 135 est identique. Quant à l’amendement 183, il tend également à maintenir le caractère exécutoire à titre provisoire des requalifications de CDD ou de contrats de mission en CDI. Je m’étonne que ce texte ne reprenne pas une telle disposition.

Mme Martine Billard – L’amendement 41 a le même objet. Pourquoi ne pas refuser cette codification à droit constant ?

Mme Jacqueline Irles, rapporteure – Avis défavorable à tous ces amendements. La règle visée est en effet renvoyée à la partie réglementaire du code.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – Même avis. C’est sur la recommandation du Conseil d’État que ces dispositions passeront dans le champ réglementaire.

M. Alain Vidalies – J’ai beaucoup de respect pour le Conseil d’État, mais j’en ai encore plus pour le Gouvernement (Sourires). Or, si j’ai compris les propos de M. Bertrand, son intention était de laisser cette mesure dans la partie législative du code…

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – Vous interprétez mal !

M. Alain Vidalies – Mais non ! Le seul argument que vous opposez, c’est l’avis du Conseil d’État. Ce ne serait pas un crime de lèse-majesté de passer outre, même si cela devait causer un déplaisir à la haute juridiction. Il serait incohérent de réserver un sort différent à la procédure applicable en la matière et à la décision qui en résulte.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – Je ne suis pas sûr que je me tournerais vers vous, Monsieur Vidalies, si je souhaitais que l’on interprète mes pensées.

M. Alain Vidalies – Vous n’auriez peut-être pas tort… (Sourires)

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – Eh bien, tout est dit ! Je n’ai jamais laissé entendre que mon idée initiale était de maintenir cette mesure dans la partie législative du code.

M. Alain Vidalies – C’est pourtant ce que nous avons tous compris !

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – J’ai fait mention de la recommandation du Conseil d’État, rien de plus.

Les amendements 59, 135 et 41, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. Alain Vidalies – L’amendement 60 a été défendu.

M. Roland Muzeau – L’amendement183 également.

Mme Martine Billard – Ainsi que l’amendement 42.

Les amendements 60, 183 et 42, repoussés par la commission et par le Gouvernement, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. Alain Vidalies – L’amendement 155 vise à réintégrer le volet relatif à la surveillance médicale à la version transposée, dont il a étrangement disparu.

Mme Jacqueline Irles, rapporteure – Avis défavorable : la notion de santé au travail inclut naturellement la surveillance médicale.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail Même avis.

M. Alain Vidalies – Pourquoi assimiler ces deux notions dans la transposition alors que le législateur les distingue depuis si longtemps ? Votre avis est tout à fait déraisonnable ! Vous qui ne cessez de nous rabâcher la recodification « à droit constant » devriez saisir cette occasion de ne rien changer au code !

L'amendement 155, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Michel Liebgott – L’amendement 103 précise que toute entreprise détachant temporairement un salarié sur le territoire français est tenue de le déclarer, ainsi que tout accident du travail. Élu d’une région frontalière, je sais combien les contentieux peuvent être nombreux et préjudiciables, tant aux salariés qu’aux entreprises. Il s’agit là d’une question de civisme !

M. Roland Muzeau – La présente ordonnance ne transpose que partiellement les dispositions du code du travail relatives à l’emploi transnational. Les employeurs détachant temporairement des salariés sur notre territoire étaient jusqu’ici soumis à la législation applicable à leur branche d’activité en France. Or, vous en écartez les entreprises de transport, de même que vous venez d’écarter le secteur de la surveillance médicale. Est-ce un oubli ? Qu’en est-il de l’article imposant à tout employeur de déclarer les salariés qu’il détache en France ainsi que tout accident dont ils seraient les victimes, que vous avez également omis de transposer ? Certes, l’heure est à la dépénalisation de la vie des affaires et du droit du travail. C’est bien dans ce sens que va votre « recodification » ! À droit constant, l’amendement 126 vise donc à réparer cette omission en maintenant les sanctions pénales à l’endroit des employeurs qui ne déclarent pas leurs salariés détachés en France.

Mme Jacqueline Irles, rapporteure – Avis défavorable : les peines contraventionnelles relèvent du domaine règlementaire.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail Même avis.

M. Patrick Roy – Une fois de plus, votre acharnement à instaurer une justice à deux vitesses m’étonne. Vous êtes toujours prompts à pourchasser les fraudeurs au RMI ou aux arrêts maladie, mais dès qu’il s’agit des plus fortunés, plus rien ! Quel mauvais signe vous enverriez à l’ensemble des entrepreneurs intervenant en France si vous refusiez cet amendement à un article qui est déjà antisocial !

Les amendements 103 et 126, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. Marc Dolez – L’amendement 78 vise à rétablir le droit constant s’agissant des instructions que doit comporter le règlement intérieur.

Mme Jacqueline Irles, rapporteure – Avis défavorable : cette précision figure déjà à l’article L. 4122-1. Inutile de la répéter, au risque de produire une loi bavarde.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail Même avis.

L'amendement 78, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Martine Billard – L’amendement 56 précise que la consultation d’un certain nombre d’instances, des collectivités locales aux syndicats et aux chambres consulaires, constitue un préalable nécessaire à toute création, suppression ou modification d’un conseil de prud’hommes. Vous prétendez n’avoir aucun dessein précis en ne transposant pas cette disposition, mais Mme Dati a d’ores et déjà annoncé la suppression de 63 conseils – que suivront d’autres, sans doute. C’est la preuve que les décisions prises dans un bureau parisien ont souvent des conséquences néfastes, et que la consultation des acteurs de terrain ne peut qu’être bénéfique, qu’il s’agisse d’aménagement du territoire, d’équité sociale ou même d’environnement.

M. Jean Mallot – De même, l’amendement 61 rétablit le droit constant s’agissant de la consultation des acteurs locaux pour toute décision touchant à l’organisation des conseils des prud’hommes. Le démantèlement de la carte judiciaire illustre la pertinence de cette mesure : si la concertation avait eu lieu, les difficultés auraient été moindres pour la garde des Sceaux.

Ne pas prévoir la concertation dans les textes, c’est encore pire… Faire disparaître cette disposition, c’est confirmer que la recodification ne se fait pas à droit constant, et c’est ajouter au traumatisme provoqué par l’annonce de la suppression de 63 conseils de prud’hommes et à la menace qui pèse sur d’autres.

M. Roland Muzeau – Notre amendement 139 vise également à rétablir le principe de consultations avant toute création ou suppression d’un conseil de prud’hommes. Comment ne pas faire le lien entre la suppression de ces consultations et la suppression de 63 conseils sur 271, censée être effective d’ici au mois d’avril 2008 ? L’objectif est évidemment de limiter le recours au juge en matière sociale, d’autant que des jugements récents des conseils de prud’hommes, notamment sur le CNE, ont fortement déplu au Gouvernement.

Mme Jacqueline Irles, rapporteure – Avis défavorable à ces trois amendements. Les règles relatives à la simple consultation d’autorités sont de nature réglementaire. En l’espèce, elles figureront aux articles R 1422-1 et 1422-2.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail Même avis.

L'amendement 56, mis aux voix, n'est pas adopté, non plus que les amendements 61 et 139.

La séance, suspendue le mercredi 5 décembre à 1 h 20, est reprise à 1 h 35.

M. Roland Muzeau – L’amendement 140 précise que les sections des conseils de prud’hommes, conformément à l’article L. 512-2 de l’actuel code du travail, comprennent au moins trois conseillers employeurs et trois conseillers salariés.

Mme Jacqueline Irles, rapporteure – Cet amendement n’a pas été examiné par la commission. À titre personnel, j’y suis défavorable car cette précision est de nature réglementaire.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – Même avis. Si le principe de la division en section ressort bien de la loi, le nombre de conseillers est du domaine réglementaire.

L'amendement 140, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Roland Muzeau – Vous avez beau affirmer que la recodification s’est faite à droit constant, le champ de compétences des prud’hommes a été modifié. Ainsi ne pourront-ils plus connaître de la contestation par l’employeur de l’utilisation des heures de délégation par les représentants du personnel. Cela témoigne d’une curieuse défiance à l’encontre des décisions des conseils de prud’hommes et traduit une conception assez nouvelle du rapport entre employeurs et employés. En consacrant le rôle du juge judiciaire, vous niez le lien de subordination qui fait la spécificité de la relation de travail et tentez de reverser le contrat de travail au droit commun des contrats. L’amendement 138 propose donc de rétablir la compétence des prud’hommes en la matière.

Mme Jacqueline Irles, rapporteure – Avis défavorable. Le code actuel renvoie à la juridiction compétente. Les termes de « juge judiciaire », qui peuvent couvrir aussi bien les conseils de prud’hommes que le tribunal d’instance, sont plus prudents, car il semble que les deux cas de figure existent dans le droit en vigueur.

L'amendement 138, repoussé par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Martine Billard – L’amendement 167 a le même objet. C’est un point important. La recodification a pour objectif de rendre le code plus compréhensible par les simples salariés. Or, si l’on peut penser que les termes de « juridiction compétente » n’étaient effectivement pas très clairs, je ne crois pas que beaucoup de salariés sachent mieux ce qu’est le « juge judiciaire » ! Puisque, d’après la jurisprudence, il s’agit du conseil des prud’hommes, autant l’inscrire dans la loi. J’ajoute qu’il s’agit d’une juridiction devant laquelle le salarié peut se présenter sans défenseur et qui est gratuite – en tout cas à droit constant. Cette modification de la rédaction nous laisse perplexe : puisqu’il ne s’agit pas d’une simplification, quel en est le but ?

Mme Jacqueline Irles, rapporteure – Avis défavorable, pour les mêmes raisons que pour l’amendement précédent.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – Le but est de désigner simplement l’ordre de juridiction compétent sans entrer dans le détail, ce qui est l’enjeu de la recodification.

L'amendement 167, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Roland Muzeau – Dans sa rédaction actuelle, le code du travail prévoit, en cas de récidive, de multiplier par deux les sanctions pénales qui peuvent être prononcées à l’encontre de l’employeur en cas d’entrave au droit syndical. Ces dispositions n’ont pas été reprises dans l’article L. 2146-1 du nouveau code. L’amendement 137 rectifié vise à réparer cet oubli. Les amendements 132 et 181 feront de même pour les cas de récidive de manquement de l’employeur à ses obligations de négociation.

Mme Jacqueline Irles, rapporteure – Avis défavorable à ces trois amendements. L’article L. 132-10 du code pénal pose le principe du doublement de la peine, pour tous les délits, en cas de récidive. C’est une règle de portée générale qu’il est inutile de rappeler partout dans le code du travail. Et si elle n’était mentionnée qu’à certains endroits, cela laisserait supposer que, dans les autres cas, le doublement de la peine pourrait ne pas s’appliquer.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – Même avis. Nous n’avons fait qu’appliquer le droit commun du droit pénal.

L'amendement 137 rectifié, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Alain Vidalies – L’article L. 153-1 du code actuel prévoit que lorsque, en vertu d’une disposition législative expresse, une convention ou un accord collectif étendu déroge à des dispositions législative ou réglementaires, les infractions à ses stipulations dérogatoires sont passibles des mêmes sanctions que la violation des dispositions en cause. Il existe donc une infraction et une sanction spécifiques, que nous n’avons retrouvées nulle part dans le nouveau code. L’amendement 104 rectifié vise à les rétablir. Et qu’on ne me renvoie pas cette fois au domaine réglementaire : si les sanctions, la procédure et la définition même des infractions deviennent des dispositions d’ordre réglementaire, nous n’avons plus qu’à rendre les clefs de l'Assemblée nationale !

Mme Jacqueline Irles, rapporteure – Avis défavorable. Cet amendement est satisfait par l’alinéa 49 de l’article 3, introduit au Sénat.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – Ne rendez pas les clefs de l’Assemblée, même pour ouvrir les portes du Sénat ! Votre préoccupation a en effet été satisfaite par un amendement sénatorial. Avis donc défavorable.

M. Alain Vidalies – J’avais donc raison !

L'amendement 104 rectifié, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Martine Billard – L’article 132-10 actuel du code du travail prévoit que les conventions et accords collectifs de travail ainsi que leurs avenants et annexes sont déposés par la partie la plus diligente auprès des services du ministre chargé du travail, et pour les professions agricoles auprès de ceux du ministre chargé de l'agriculture. Il semble que cet alinéa ait disparu lors de la transposition dans l’article L. 2231-6 du nouveau code. L’amendement 165 propose de le rétablir.

Mme Jacqueline Irles, rapporteure – Avis défavorable. Les règles et formalités des procédures relèvent du domaine réglementaire. À cet égard, je rappelle que l’intégralité du code de procédure civile est défini par décret. Il est donc normal que la partie législative du nouveau code du travail renvoie en l’espèce à une mesure réglementaire – qui sera prise à droit constant.

L'amendement 165, repoussé par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'amendement 132, mis aux voix, n'est pas adopté, non plus que l’amendement 181.

M. Roland Muzeau – L’amendement 141 propose de rétablir les conditions d'information minimales des salariés sur le droit conventionnel applicable dans l'entreprise ou l'établissement, telles que définies à l'article L. 135-7 du code du travail.

Mme Jacqueline Irles, rapporteure – Avis défavorable. Les règles de procédure sont du domaine du règlement et le nouveau code y renvoie.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail Même avis.

L'amendement 141, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Martine Billard – Le droit d’affichage et d’information sur les textes applicables est peut-être réglementaire, mais il est fondamental. Pendant la législature précédente, je me suis battue, en vain, pour obtenir que l’on affiche dans les entreprises les dispositions relatives à la lutte contre la discrimination. Faute de les connaître, beaucoup de salariés ne sont pas à même de se défendre. Par l’amendement 168, j’insiste pour que le droit d’information soit maintenu dans la partie législative.

Mme Jacqueline Irles, rapporteure – Avis défavorable pour les mêmes raisons que précédemment.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail Même avis. L’amendement est satisfait.

L'amendement 168, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Michel Liebgott – Notre amendement 149 rétablit les termes « inspecteur du travail » que l’on a cru devoir remplacer par « autorité administrative ». Nomme-t-on des « autorités administratives » dans les ministères ? Il semblerait qu’une ordonnance de décembre 2005 prise dans le cadre de la loi d’habilitation de 2004 ait déjà introduit le terme. Mais cette ordonnance n’a jamais été ratifiée. Il s’agirait aujourd’hui d’une ratification implicite. Finalement, avec ce glissement de terme, on pourra mieux noyer le poisson : au lieu de supprimer des fonctionnaires, on fera seulement disparaître des autorités administratives…

Mme Jacqueline Irles, rapporteure – Avis défavorable. Depuis l’ordonnance du 1er décembre 2005, la répartition du personnel entre collèges électoraux, en l’absence d’accord entre employeur et salariés relève, aux termes de l’article L. 423-3 du code en vigueur, de « l’autorité administrative », qui est, en l’occurrence, le directeur départemental du travail, et non l’inspecteur du travail.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail Même avis.

M. Alain Vidalies – On nous fait valoir que l’ordonnance de décembre 2005 en a disposé. Mais elle n’a jamais été ratifiée. L’article 54 de la présente loi d’habilitation ne vise pas cette ordonnance. La faire ratifier dans ce cadre est un exercice assez délicat.

M. Patrick Roy – Je sais ce qu’est un inspecteur du travail, je ne sais pas ce qu’est une autorité administrative. J’aimerais que l’on m’explique.

Mme Jacqueline Irles, rapporteure – En l’espèce, c’est le directeur départemental du travail.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail Monsieur Roy, si je dis que les députés sont des parlementaires, vous n’allez tout de même pas me le reprocher ! (Sourires) De la même façon, les inspecteurs du travail sont englobés dans les autorités administratives.

Monsieur Vidalies, la loi d’habilitation donne au Gouvernement compétence entière pour intervenir dans tout le champ du code du travail. C’est un exercice délicat, dites-vous ? Je vous connais assez pour savoir que si vous aviez voulu me prendre en défaut, vous l’auriez qualifié d’impossible…

L'amendement 149, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Michel Liebgott – L’amendement 179 précise, car cela n’apparaît pas clairement dans la rédaction actuelle, que les délégués du personnel bénéficient d’un crédit de 20 heures supplémentaires par mois s’ils exercent les attributions économiques du comité d’entreprise.

M. Roland Muzeau – Au titre des dispositions de l'article 424-1 du code du travail, les délégués du personnel bénéficient actuellement, en cas de carence du comité d'entreprise, d'un crédit supplémentaire de 20 heures par mois pour exercer les attributions économiques de celui-ci. Pour lever toute ambiguïté, notre amendement 136 précise que ces heures s'ajoutent et ne substituent donc pas aux heures de délégation prévues à l'article 2315-1.

Mme Jacqueline Irles, rapporteure – La commission a repoussé ces amendements, la précision ne semblant pas utile. Mais sans doute M. le ministre peut-il nous éclairer ? (Exclamations sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR)

M. Xavier Bertrand, ministre du travail Avis favorable (« Ah ! » sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR).

Les amendements 79 et 136, mis aux voix, sont adoptés.

Mme Martine Billard – L’amendement 164 est défendu.

L'amendement 164, repoussé par par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Jacqueline Irles, rapporteure – L’amendement 6 est rédactionnel.

L'amendement 6, accepté par le Gouvernement , mis aux voix, est adopté.

M. Michel Liebgott – Notre amendement 80 corrige ce qui est sans doute une erreur. La procédure d’information et de consultation du comité d’entreprise vaut pour toutes les entreprises et pas seulement celles qui ont plus de 300 salariés.

M. Roland Muzeau – L’amendement 142 est identique.

Mme Jacqueline Irles, rapporteure – Avis défavorable.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail Défavorable également.

M. Alain Vidalies – Ne voulez-vous pas plutôt dire que l’amendement est satisfait, pour les mêmes raisons que vous avez évoquées à propos des amendements de Mme Billard ? Si vous introduisez une différence entre entreprises de plus et de moins de 300 salariés qui n’existe pas dans l’ancien code, comment parler de droit constant ?

M. Xavier Bertrand, ministre du travail C’est en étendant comme vous le demandez l’obligation de consultation annuelle du comité d’entreprise aux entreprises de moins de 300 salariés, ce qui n’est pas le cas actuellement, que l’on s’écarterait du droit constant. J’ai apporté au Sénat les clarifications nécessaires sur la distinction entre entreprises de plus et de moins de 300 salariés. Mais je précise que le comité d’entreprise doit se prononcer sur le rapport économique annuel dans toutes les entreprises de moins de 300 salariés.

Les amendements 80 et 142, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

Mme Martine Billard – Les amendements 44 et 45 sont défendus. 

Les amendements 44 et 45, repoussés par la commission et par le Gouvernement, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. Alain Vidalies – L’amendement 150 vise à rétablir le droit constant en substituant aux mots « l’autorité administrative » les mots « l’inspecteur du travail ». Ce n’est pas la même chose, et vous le savez fort bien, Monsieur le ministre, puisque le statut de l’inspection du travail est protégé par une convention de l’OIT qui garantit son indépendance. Au contraire, qui dit « autorité administrative » dit lien hiérarchique avec le Gouvernement. La différence est de taille, et il y a là une vraie modification du droit constant.

Mme Jacqueline Irles, rapporteure – Avis défavorable pour les raisons déjà dites.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – je le redis, rien n’est changé aux compétences de l’inspection du travail.

L'amendement 150, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Michel Liebgott – L’amendement 81 a pour objet de rétablir le droit constant, qui veut que le secrétaire du comité d’entreprise soit toujours désigné parmi ses membres titulaires.

Mme Martine Billard – L’amendement 170 est identique. La précision est d’autant plus impérieuse que certains souhaitent qu’il n’en soit plus ainsi. La modification envisagée laisse donc perplexe.

Mme Jacqueline Irles, rapporteure – Avis défavorable ; la question relève du domaine règlementaire.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – Même avis, pour la même raison.

Mme Martine Billard – Avons-nous l’assurance que le décret transposera cette disposition à droit constant ?

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – La transposition se fera dans le cadre de l’article R. 2325-1 de la partie réglementaire du code.

Les articles 81 et 170, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. Roland Muzeau – Dans sa rédaction actuelle, le code du travail prévoit, lorsqu'il y a récidive, de doubler les sanctions pénales qui peuvent être prononcées à l'encontre de l'employeur en cas d'entrave à la désignation et au libre exercice des fonctions de membre du comité d'entreprise. Ces dispositions n'ont pas été reprises dans la rédaction du nouveau code. L’amendement 143 tend à les rétablir. Le 182 a le même objet.

Mme Jacqueline Irles, rapporteure – Avis défavorable, de même qu’à l’amendement 182.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – Même avis.

M. Patrick Roy – Si ce n’est pas la politique du « deux poids, deux mesures » ! Je ne peux admettre que le Gouvernement s’en prenne constamment aux plus faibles et qu’il épargne systématiquement les puissants. La même justice doit valoir pour tous.

Les amendements 143 et 182, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. Alain Vidalies – L’amendement 158 a pour objet de rétablir le droit constant tel que l’écrit l’article L. 212-4 bis du code actuel, de manière qu’en fin de mois, l’employeur continue d’être tenu de remettre à chaque salarié concerné un document récapitulant le nombre d’heures d’astreinte effectuées au cours du mois écoulé ainsi que la compensation correspondante. Cette disposition est d’une grande importance, car c’est un moyen de preuve pour les salariés.

Mme Jacqueline Irles, rapporteure Avis défavorable. La disposition, qui relève du domaine règlementaire, sera transposée à l’article R. 3171-1 de la partie réglementaire du code.

L'amendement 158, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Roland Muzeau – Par l’amendement 124, nous proposons de rétablir la compétence des prud’hommes pour les litiges portant sur la durée du travail des salariés au forfait jour, dont l’ordonnance les dessaisit. L’antienne actuelle étant « travailler plus pour gagner plus », cette entorse à la répartition des compétences entre prud’hommes et juges judiciaires n’est pas pour nous surprendre.

Mme Jacqueline Irles, rapporteure – Avis défavorable, pour les raisons déjà dites.

L'amendement 124, repoussé par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Roland Muzeau – L’amendement 123 est défendu.

L'amendement 123, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Michel Liebgott – L’amendement 62 tend à rétablir le droit constant concernant, en l’absence d’accord collectif, une obligation de transmission de l’avis du comité d’entreprise sur les horaires de travail à temps partiel à l’inspecteur du travail – et je dis bien à l’inspecteur du travail –, conformément à l’article L. 212-4-2 alinéa 1 du code actuel.

Mme Jacqueline Irles, rapporteure – Avis défavorable, la question relève du domaine règlementaire.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – Même avis.

L'amendement 62, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Alain Vidalies – L’amendement 105 a pour objet de rétablir le droit constant concernant le principe d’application des mêmes sanctions pénales en cas de non-respect par l’employeur des dispositions sur les heures supplémentaires et les repos compensateurs, prévues par un accord dérogatoire à la loi, conformément à l’article L. 212-10 du code actuel. C’est un autre exemple d’infraction existant dans le texte en vigueur et que l’on ne retrouve pas dans le nouveau code.

Mme Jacqueline Irles, rapporteure – Il s’agit d’une contravention. La disposition est donc d’ordre réglementaire, et elle sera transposée dans la partie réglementaire du code.

L'amendement 105, repoussé par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – Ce matin, c’est Mme Létard qui représentera le Gouvernement. Je serai en effet à Bruxelles pour un sommet européen, où il sera notamment question du temps de travail et du travail intérimaire.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance, qui aura lieu ce matin, mercredi 5 décembre, à 10 heures 30.

La séance est levée à 2 heures 15.

La Directrice du service
du compte rendu analytique,

Marie-Christine CHESNAIS

Le Compte rendu analytique
est disponible sur Internet
en moyenne deux heures après la fin de séance.

Le compte rendu analytique des questions au Gouvernement
est également disponible, sur Internet et sous la forme d’un fascicule spécial,
dès dix-huit heures

Préalablement,
est consultable une version incomplète,
actualisée au fur et à mesure du déroulement de la séance.

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