Accueil > Travaux en séance > Les comptes rendus > Les comptes rendus analytiques de la session > Compte rendu analytique de la séance

Afficher en plus grand
Afficher en plus petit
Consulter le sommaire

Assemblée nationale

Compte rendu
analytique officiel

Séance du mercredi 5 décembre 2007

2ème séance
Séance de quinze heures
75ème séance de la session
Présidence de M. Bernard Accoyer

Consulter le sommaire

La séance est ouverte à quinze heures.

QUESTIONS AU GOUVERNEMENT

L’ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.

LOGEMENT

M. Jean-Pierre Abelin – Madame la ministre du logement et de la ville, le logement occupe une part croissante dans le budget des ménages. Dans le cadre des mesures en faveur du pouvoir d'achat des Français, le Président de la République a annoncé que les loyers allaient être indexés non plus, comme avant 2006, sur l’indice du coût de la construction – qui progresse de 5 % par an – ou, comme le prévoyait la loi de juillet 2005, sur l’indice de référence des loyers – qui progresse de 2,8 % – mais sur l'indice des prix à la consommation, ce qui limitera la hausse à 1,8 % ou 1,9 % au 1er janvier 2008.

Cette mesure est une bonne nouvelle pour les locataires, qui réaliseront ainsi des économies non négligeables. Nous souhaiterions savoir quand et comment elle se traduira dans le dispositif législatif et si sa date d'entrée en vigueur est confirmée.

Six millions de Français locataires bénéficient par ailleurs d'une aide personnelle au logement. Qu'adviendra-t-il dans ce contexte de la revalorisation des APL, indexées sur l'indice de référence des loyers depuis mars et qui devaient augmenter de 2,8 % au 1er janvier 2008 ? Les députés du Nouveau centre souhaitent ardemment que l’augmentation soit maintenue à ce niveau.

Enfin, le débat relatif au coût du logement est indissociable de la réflexion sur les charges, notamment celles de chauffage et d'énergie courante. Le budget 2008 prévoit à cet égard une augmentation du crédit d'impôt en faveur des dispositifs permettant de réaliser d'importantes économies d'énergie. Pouvez-vous nous indiquer les mesures d'accompagnement que vous envisagez dans le cadre du suivi du Grenelle de l’environnement pour encourager les économies d'énergie et la maîtrise des charges ? (Applaudissements sur les bancs du groupe NC)

Mme Christine Boutin, ministre du logement et de la ville – Cette question apparemment technique intéresse en réalité tous nos compatriotes. Le Gouvernement est déterminé à défendre le pouvoir d’achat des Français, notamment des plus fragiles. Les importantes hausses de loyers des dernières années ont grevé le pouvoir d’achat des ménages. Le Président de la République a annoncé une mesure de modération des loyers qui sera mise en œuvre dès le début de l’année 2008. La disposition prévue dans le projet de loi est simple : l’indice de révision des loyers sera désormais égal à l’indice des prix à la consommation. Les aides au logement sont indexées sur l’indice des loyers afin de garantir aux locataires que la part de leurs revenus consacrée aux loyers n’augmentera pas : ce principe demeure. Pour 2008, le budget prévoit une revalorisation de l’APL et de l’allocation logement de 2,76 %, égale à la progression sur un an de l’actuel indice des loyers avant réforme. Je vous confirme que cette augmentation est maintenue. Ce sera la plus importante depuis cinq ans. Elle prend en compte aussi bien le loyer que les charges. Elle permettra aussi un rattrapage du niveau des aides personnelles. En effet, c’est la quittance globale – et non le seul coût du loyer – qui importe pour les ménages. Le Grenelle de l’environnement a ouvert des pistes pour réduire les charges. Je veillerai à ce qu’elles ne créent pas une précarité énergétique qui aboutirait à pénaliser doublement les foyers modestes. Il faut combiner plusieurs mesures. Ma collègue Christine Lagarde a annoncé un doublement de l’aide à la cuve, portée à 150 euros (Applaudissements sur les bancs du groupe NC et sur plusieurs bancs du groupe UMP).

POUVOIR D’ACHAT

M. Jacques Kossowski – Le Président de la République a répondu jeudi dernier à l'une des principales attentes des Français en prenant en compte leur aspiration légitime à mieux faire face au coût de la vie. Il a annoncé lors de cet entretien télévisé un train de mesures visant à libérer à la fois le travail et le pouvoir d'achat. Il a en particulier souhaité que soient monétisées les heures de RTT, y compris dans la fonction publique. Il a demandé que les loyers soient désormais indexés sur l'indice des prix, et non plus sur celui des prix à la construction. Le Premier ministre a pour sa part évoqué hier le déblocage de la participation et la mise en place d'une prime de 1 000 euros dans les entreprises de moins de 50 salariés. Enfin, je rappelle que depuis le 1er octobre, les heures supplémentaires sont exonérées de CSG, de cotisations salariales et d'impôt sur le revenu. Toutes ces mesures s'inscrivent dans notre philosophie du « travailler plus pour gagner plus ».

Face à cela, le président Jean-Marc Ayrault nous donnait hier encore ses recettes qui alourdissent sensiblement le déficit budgétaire, c'est-à-dire la dette que nos enfants paieront demain. Incapable de définir un projet politique cohérent, le parti socialiste masque son vide idéologique par une cacophonie hebdomadaire sur le pouvoir d'achat (Protestations sur les bancs du groupe SRC). La ficelle est un peu grosse !

Le débat n’est pas là. La vraie question est celle de la mise en œuvre des mesures présidentielles. Les Français attendent la concrétisation rapide de ces nouvelles dispositions. Pouvez-vous, Madame la ministre de l’économie, des finances et de l’emploi, nous indiquer précisément quand ces mesures prioritaires entreront en vigueur ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP)

Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l’emploi La logique de notre démarche est la suivante : d’abord le travail et la création de richesses, et ensuite la répartition du pouvoir d’achat (Interruptions sur les bancs du groupe SRC). La première mesure, vous l’avez votée cet été, avec la loi du 21 août, qui permet de mieux rémunérer le travail : depuis le mois d’octobre, tous les salariés peuvent travailler plus pour gagner plus. Et cela marche ! Nous allons maintenant libérer le travail, avec toutes les mesures qui permettront de monétiser les RTT, de libérer de la participation sous un plafond de 10 000 euros et d’octroyer une prime exceptionnelle à des conditions fiscales et sociales avantageuses. Vous serez amenés à examiner une nouvelle mesure avant la fin de l’année, pour une entrée en vigueur au 1er janvier 2008 : l’indexation des loyers non plus sur le coût de la construction, mais sur l’indice des prix, c’est-à-dire sur le coût de la vie. Parce que nous mettons le travail au cœur de l’économie et que nous appliquons des méthodes modernes, le pouvoir d’achat des salariés sera gagnant ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP)

POUVOIR D’ACHAT

M. Jean-Louis Touraine – Monsieur le Premier ministre, bien plus que le Président de la République et le Gouvernement, une majorité de Français s‘inquiètent de la baisse de leur pouvoir d’achat. À nombre d’entre eux, vous n’avez apporté aucune réponse : retraités, chômeurs, travailleurs à temps partiel, salariés qui ne peuvent faire d’heures supplémentaires ont du mal à assumer même les dépenses essentielles d’alimentation, de santé, de logement. Mais ceux auxquels vous avez proposé une réponse partielle sont également inquiets. En effet, à quel taux seront rachetées les RTT ? À celui des heures supplémentaires ? Dans la fonction publique, on mentionne des taux bien inférieurs, en dessous même de celui de l’heure normale de travail.

Pour les heures au-delà des 35 heures, vous envisagez une négociation entreprise par entreprise. Cela signifie-t-il que la bonification de 25 % ne sera pas générale ? Est-ce une façon de contourner, voire de supprimer la durée légale du travail ?

Nous vous avons transmis une série de propositions plus justes, qui profiteraient à tous les Français et non à quelques happy few. C’est par exemple de geler la hausse du prix du gaz ou de procéder à des baisses de TVA ciblées sur des produits essentiels. Pouvez-vous sortir du dogmatisme, de l’autisme à notre égard, de l’arrogance, pour analyser avec objectivité et pragmatisme nos propositions qui soulageront tous nos concitoyens et permettront d’enrayer la dramatique évolution de plus de plus de Français vers la précarité ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC)

Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l’emploi Vos dix idées, nous les avons regardées, mais la plupart sont bien usées. Certaines ne font que reprendre nos propositions. Ainsi, rendre les allégements de charges conditionnels, c’est une proposition du Premier ministre, que nous avons reprise lors de la conférence du 23 octobre. D’autres ont fait leur temps, relèvent de l’économie administrée et n’ont jamais fait leurs preuves. Ainsi, on sait ce que la TIPP flottante a coûté à la France, on ne sait pas ce qu’elle a rapporté aux consommateurs (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP). En revanche, nous avons doublé la prime à la cuve, ce qui donnera 150 euros supplémentaires à 600 000 ménages quand ils achèteront du fuel. Pour cela, nous n’avons pas taxé ce que vous appelez les gros profits des sociétés pétrolières. C’est avec elles, dans la concertation, que nous avons négocié la prise en charge, par une taxe exceptionnelle, de ces 150 millions qui ne grèvent pas le budget de l’État.

Qu’il s’agisse de la loi du 21 août, du collectif budgétaire, du projet en faveur des consommateurs ou de celui qui vous sera soumis avant la fin de l’année, le but affirmé est de remettre le travail au cœur de l’économie et de distribuer du pouvoir d’achat aux consommateurs français. Ce n’est pas parce que le parti socialiste a perdu trois fois de suite l’élection présidentielle (Exclamations sur les bancs du groupe SRC) que nous devons payer le prix de sa dépression (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

DÉLOCALISATIONS EN ZONE DOLLAR

M. Roland Muzeau – Monsieur le Premier ministre, Serge Dassault et Louis Gallois, patrons de l'industrie aéronautique, déclarent : « nous allons devoir délocaliser » en zone dollar.

Ces menaces n'ont rien d'une fatalité, dans des activités en forte croissance. Airbus a déjà, avec le plan Power 8, supprimé 10 000 emplois et vendu des usines en France, à Méault et Saint-Nazaire, en Grande Bretagne, en Allemagne. C'est le prix payé par les travailleurs français et européens pour les erreurs et délits de leurs dirigeants.

Il fut un temps où les libéraux nous expliquaient qu'il fallait délocaliser les productions à faible valeur ajoutée, textile, automobile, électronique, téléphonie, sous prétexte que « les licenciements d'aujourd'hui feront les emplois qualifiés de demain ».

Qu'ont fait les gouvernements depuis 2002, moment où l'euro s'échangeait contre 0,90 dollar ? Qu'ont fait les entreprises qui, avec un euro fort, achètent les matières premières en dollars et n'ont pas anticipé les évolutions monétaires et couvert leurs échanges ?

L'indignation feinte de vos amis politiques, comme le président de la commission des finances du Sénat qui pourfend la politique monétaire européenne de l'euro fort, sonne faux.

Arrêtons de prendre prétexte de la faiblesse du dollar par rapport à l'euro comme s'il n'existait aucun levier pour assurer notre développement industriel. Exigeons la fin de l'indépendance de la BCE, et un vrai contrôle démocratique sur ses décisions qui doivent être réorientées en faveur de l'emploi. Acceptez la tenue d'un débat référendaire sur le traité européen. Monsieur le Premier ministre, allez-vous enfin agir pour mettre un terme au chantage aux délocalisations des grandes entreprises comme Dassault, EADS et SAFRAN ? (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR et quelques bancs groupe SRC)

Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l’emploi Monsieur Muzeau, vous avez raison, un euro fort peut présenter un certain nombre d’avantages, mais présente beaucoup d’inconvénients pour une entreprise industrielle dont les coûts, en France, sont en euros, tandis que pour ses concurrents ils sont en dollars, comme les prix de vente. C’est le cas d’Airbus et de Dassault, qui ont fait part de leurs projets à ce propos.

Face à cette situation, nous avons exprimé au G7, à l’Eurogroupe, au Fonds monétaire international, une parole forte de la France, que tout le monde n’a pas appréciée, pour défendre l’euro et nous assurer que les autres autorités monétaires fassent en sorte que leur monnaie reflète les fondamentaux de leur économie. Chaque fois que le Président de la République, le Premier ministre ou un membre du Gouvernement se déplace à l’étranger, ils portent le même message. Ensuite, nous menons un dialogue permanent avec les industriels. Le Premier ministre a mis en place un plan de soutien à la filière aéronautique doté de 1,5 milliard. Je reçois tout à l’heure M. Gallois pour lui demander comment va s’organiser le plan Power 8 en fonction de la hausse de l’euro, et comment, devant l’évolution considérable du marché de l’aéronautique, il entend déterminer sa stratégie et répartir ses coûts pour optimiser les ventes et les prises de marchés. Il va de soi que, si nous augmentons le crédit d’impôt recherche, nos partenaires industriels doivent aussi être très attentifs à la politique industrielle française. Comptez sur notre vigilance (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

CONFÉRENCE DE BALI

M. Gilles d’Ettore – Grâce au Grenelle de l’environnement, vous avez su, Monsieur le ministre, rassembler les Français autour des grands enjeux écologiques qui seront dès demain au cœur de la Conférence des Nations Unies à Bali, où vous porterez la voix de la France. Le réchauffement climatique s’accélère et menace la planète entière, comme le confirme le récent rapport du GIEC. Avec la montée des eaux, les plages méditerranéennes reculent au point que les risques qui pèsent sur les lagunes conchylicoles nous ont contraint d’engager une immense opération de sauvegarde du littoral entre Sète et Agde. Le Président de la République l’a dit : la politique environnementale de la France doit être exemplaire – ambition que partagent d’ailleurs nos partenaires européens. Hélas, le défi est mondial ! Quelle position défendrez-vous dans les négociations qui s’ouvrent, afin notamment d’inciter les pays émergents à s’engager avec nous dans ce combat universel pour l’avenir de la Terre et de ses habitants ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Jean-Louis Borloo, ministre d’État, ministre de l’écologie, du développement et de l’aménagement durables – Tous les pays du monde sont réunis à Bali. En matière d’environnement, il nous faut changer de langage et de regard. Les pays industriels – l’Europe en particulier – sont, pour la plupart, déjà bien engagés en faveur de la réduction des émissions de gaz à effet de serre. Parmi les pays émergents, il y a d’une part les victimes du changement climatique, qu’il s’agisse de désertification ou d’inondations, qu’il faut protéger avant d’en exiger un quelconque effort, notamment lorsque s’y trouvent des trésors écologiques tels que la forêt. D’autre part, il y a des pays industriels qui, si l’on ne peut en attendre la même mobilisation qu’en Europe, doivent cependant contenir comme ils le peuvent leurs émissions polluantes. Enfin, il y a quelques géants tels que l’Australie, dont la position a changé depuis la récente élection, et surtout les États-Unis, qui doivent prendre la tête de cette croisade universelle contre le changement climatique. À Bali, nous devrons trouver les mots pour les convaincre tous ; ensuite, à Poznan puis à Copenhague, nous aurons deux ans pour raviver l’héritage de Kyoto et sauver notre planète ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

UNION MÉDITERRANÉENNE

M. Renaud Muselier – En tant que président de la mission parlementaire sur l’Union méditerranéenne, je constate que le Président de la République est déterminé à donner à ce projet la plus grande lisibilité politique. Notre commission des affaires étrangères, en adoptant les propositions de la mission à l’unanimité, ne s’y est d’ailleurs pas trompée : nous avons voulu poser clairement cinq questions fondamentales concernant l’étendue géographique de cette Union, son architecture institutionnelle, ses relations avec l’Union européenne, son projet et son financement.

Mme Huguette Bello – C’est une nouvelle colonisation !

M. Renaud Muselier – Que pense le Gouvernement du travail pragmatique de la mission parlementaire ? Consacrerez-vous les moyens suffisants à la réussite du sommet des chefs d’État de la Méditerranée qui aura lieu en juin prochain à Marseille, afin que cette belle idée d’Union méditerranéenne ne soit pas gâchée ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP, du groupe NC et quelques bancs du groupe SRC)

M. Jean-Pierre Jouyet, secrétaire d’État chargé des affaires européennes – Votre rapport, adopté par la commission des affaires étrangères unanime, nous sera d’autant plus utile qu’il pose trois questions essentielles : l’objectif de ce projet, son format et son contenu, et enfin son financement. La Méditerranée est, après l’Europe, notre deuxième aire de solidarité. C’est pourtant la seule zone au monde à ne pas disposer d’organisation multilatérale. Tous les États riverains ont vocation à participer à l’Union méditerranéenne, et d’autres pourront s’associer à certains projets. La Commission européenne en sera membre de droit. Les projets, à géométrie variable, solliciteront toujours l’appui des collectivités, des entreprises et des sociétés civiles et s’organiseront autour de quatre priorités : l’environnement et l’énergie, le dialogue des cultures, le développement économique et social et, enfin, la sécurité.

Mme Huguette Bello – Et les charters ?

M. Jean-Pierre Jouyet, secrétaire d’État Ils seront financés par les banques régionales, les États mais aussi l’Union européenne, dont les financements devront être utilisés dans le respect de ses règles. L’Union méditerranéenne sera inaugurée en juin 2008, lors du sommet des chefs d’État et de gouvernement. Elle suscite de fortes attentes. Évitons qu’elle se perde dans une inutile complexité institutionnelle, et rapprochons-la au plus près des gens pour qu’elle fasse œuvre de paix et de développement. Nous pouvons rassembler les États méditerranéens sans pour autant diviser l’Europe ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP, du groupe NC et quelques bancs du groupe SRC)

POLICE DE PROXIMITÉ

M. Bernard Lesterlin – Chacun s’accorde à dire que le malaise profond qui touche les quartiers populaires et qu’ont illustré les récentes violences en banlieue parisienne reste entier. Nous pensons tous, ici, que ceux qui ont tiré sur des policiers doivent être sanctionnés. Pour autant, ce n’est pas l’offre d’une prime à la délation qui résoudra le problème de fond. Jour après jour, les populations de ces quartiers demandent, comme nous le faisons depuis longtemps, la création d’une police de quartier.

Des initiatives citoyennes se multiplient, comme la pétition lancée par l’association Banlieue active, pour vous demander de mettre en place cette police de proximité. Celle-ci devra bien sûr disposer de moyens d’enquête judiciaire pour démanteler les réseaux d’économie souterraine.

On ne peut plus se contenter de dire que les policiers ne sont pas là pour organiser des matchs de foot : ils doivent être présents pour sécuriser les populations qui se sentent les plus abandonnées par la République. La police doit être installée dans les quartiers, et non venir uniquement pour contenir le désordre. Quand allez-vous accéder à cette demande des quartiers populaires ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC)

M. Christian Estrosi, secrétaire d’État chargé de l’outre-mer – Des délinquants ont tiré sur des policiers. Nous avons décidé de les poursuivre et de les punir parce que cela n’est pas tolérable (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP ; exclamations sur les bancs du groupe SRC). Mais qui peut imaginer qu’un policier ne soit pas, par définition, un policier de proximité ? (Exclamations sur les bancs du groupe SRC ; applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe NC) C’est le métier qu’il a choisi d’exercer, au service de la sécurité des personnes et des biens.

Mais il y a deux conceptions de la police de proximité. La vôtre consistait, avant 2002, à en faire une police de politesse aux heures et dans les lieux où l’on n’attendait pas la police ; la nôtre, qui s’est traduite par la loi de programmation et d’orientation pour la sécurité intérieure, laquelle a été respectée jusqu’à son terme, a conduit à mettre des policiers dans les lieux et aux heures où nos concitoyens comptaient sur eux pour assurer leur sécurité (Exclamations sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR ; applaudissements sur les bancs du groupe UMP). C’est d’ailleurs bien pour cela que, après avoir augmenté de 20 % entre 1997 et 2002, la délinquance a diminué de 10 % depuis 2002 (Mêmes mouvements).

Nous voulons renforcer encore le lien entre les policiers et la population, en trouvant un juste équilibre entre police opérationnelle et police relationnelle et en fidélisant les policiers sur leurs quartiers d’affectation. Voyez-vous, la différence qu’il y a entre vous et nous, c’est que nous sommes déterminés à éviter qu’une minorité de voyous pourrisse la vie d’une immense majorité d’honnêtes citoyens ! (Mêmes mouvements)

AIDE AUX JEUNES AGRICULTEURS

M. Paul Jeanneteau – Le dynamisme de la profession agricole et l'occupation équilibrée du territoire passent par un soutien à l’installation des jeunes agriculteurs –en particulier dans la région des Pays de la Loire et spécialement dans le Maine-et-Loire, cinquième département agricole –, notamment du fait de l’arrivée à la retraite de la génération du baby-boom.

L’apparition de listes d’attente pour obtenir les prêts bonifiés inquiète légitimement la profession. Alerté, le Gouvernement a fait du renouvellement des générations à la tête des exploitations une priorité qui s’est traduite en actes : vous avez annoncé le 25 octobre dernier, Monsieur le ministre de l’agriculture, la délégation de 2 millions à la région des Pays de la Loire pour honorer les demandes de prêts de jeunes agriculteurs dont les projets d'installation ont été validés ; et le 13 novembre, vous avez proposé un amendement au projet de loi de finances pour 2008, proche de celui de notre collègue Marc Le Fur auquel je m'étais associé, afin de redéployer 2 millions d'autorisations d’engagement au sein du programme 154 au bénéfice des prêts bonifiés.

Ces avancées sont très importantes, et les agriculteurs les accueillent avec soulagement. Quelles mesures complémentaires envisagez-vous de prendre ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et plusieurs bancs du groupe NC)

M. Michel Barnier, ministre de l'agriculture et de la pêche  Une agriculture durable, c’est une agriculture qui produit plus et mieux, en relevant les défis de l’environnement, mais c’est aussi une agriculture qui dure (Exclamations sur les bancs du groupe SRC), c’est-à-dire qui se transmet de génération en génération. C’est pourquoi le Gouvernement a fait de l’installation des jeunes l’une de ses priorités : 330 millions sont affectés à la dotation d’installation et aux prêts aux jeunes agriculteurs. Comme vous-même et beaucoup de vos collègues m’avez fait observer que cela ne suffisait pas, l’installation rencontrant un grand succès – on enregistre 16 000 nouvelles installations par an, dont 10 000 d’agriculteurs de moins de 40 ans –, je viens de dégager, en accord avec le Premier ministre, 20 millions de plus qui vont être répartis entre toutes les régions de France (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe NC). C’est la preuve que le Gouvernement respecte son contrat avec les jeunes agriculteurs et, plus important encore, que notre agriculture retrouve confiance en elle et veut continuer à occuper la première place dans l’économie agricole européenne (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

NUISANCES SONORES AÉROPORTUAIRES

M. Éric Diard – Le Grenelle de l’environnement a abordé la problématique du bruit et fait de la réduction des nuisances sonores une priorité. De nombreux Français subissent le bruit des avions. Or, outre qu’il est source d’un inconfort constant pour les riverains des aéroports, le bruit a un impact, actuellement sous-estimé, sur la santé. En octobre dernier, j'ai déposé une proposition de loi cosignée par soixante députés, tendant à donner à l'Autorité de contrôle des nuisances sonores aéroportuaires un pouvoir de mise en demeure et d'injonction, s’agissant notamment du bon fonctionnement des commissions consultatives de l'environnement ou des mesures administratives qui pourraient aggraver ces nuisances. Il est en effet urgent d'agir pour améliorer la qualité de vie des riverains. Madame la ministre, vous avez présenté hier, avec M. Bussereau, plusieurs mesures visant à réduire les nuisances aéroportuaires. Pourriez-vous les préciser ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d’État chargée de l’écologie – Vous avez raison, les nuisances sonores que subissent les riverains des aéroports ont aussi une incidence sur leur santé en ce qu’elles perturbent leur sommeil ; elles ont aussi des conséquences néfastes sur l’apprentissage des enfants à l’école. La lutte contre le bruit étant l’une des priorités affirmées au cours du Grenelle de l’environnement, la synergie opérée entre les administrations de l’environnement et des transports permettra l’application de la série de mesures que Dominique Bussereau et moi-même avons définies sous l’égide du ministre d’État. Notre plan prévoit en premier lieu que les aéronefs devront voler 300 mètres plus haut à leur arrivée en Île-de-France ; cela devrait diviser par deux le bruit au sol. Cette disposition sera appliquée à Orly dès 2008, puis étendue après que les contrôleurs aériens auront reçu la formation complémentaire nécessaire. Nous entendons d’autre part généraliser la procédure de descente libre en profil continu, que les pilotes devront désormais préférer à la descente par paliers. Nous instituerons aussi des surtaxes de décollage en soirée, dont le produit aidera les riverains à insonoriser leur logement, à hauteur de 95 %. La taxe sur les nuisances sonores sera doublée dès l’an prochain, ce qui permettra de financer, d’ici à deux ans, les dossiers en attente à Nantes et à Orly. Enfin, répondant pour partie à vos vœux, le Gouvernement a décidé de renforcer les sanctions prévues à l’endroit des pilotes qui ne respectent pas les procédures édictées pour réduire les nuisances sonores. Nous voulons, par ce train de mesures, améliorer la qualité de vie des très nombreux riverains des aéroports (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

SITUATION DE L’ENTREPRISE RIO TINTO

M. Jean-Paul Bacquet – Le pouvoir d'achat est la première préoccupation des Français. Or, le pouvoir d'achat c'est aussi l'emploi et l'on ne peut que s'inquiéter de voir des entreprises françaises disparaître les unes après les autres. Hier, sous le gouvernement dont vous étiez membre, Monsieur le Premier ministre, ce furent Metaleurop, Daewoo, Alcatel, Alstom, Giat Industries, d'autres encore ; aujourd'hui, plus de 10 000 emplois sont en péril à Issoire, Neuf-Brisach, Tarascon-sur-Ariège, Vorreppe et Luceney-les-Aix dans ce qui fut autrefois la prestigieuse entreprise Péchiney. Il y a moins de cinq ans, Péchiney a été vendu cinq milliards de dollars au groupe canadien Alcan. Celui-ci vient de le vendre 44 milliards de dollars au groupe anglo-australien Rio Tinto…

M. Michel Bouvard – Cette intervention est honteuse ! Si vous vous étiez battus en 1999, ce ne serait jamais arrivé !

M. Jean-Paul Bacquet – …qui fait lui-même l’objet d’une OPA. Rio Tinto s'engage à augmenter de 30 % les dividendes versés en 2007, et d'au moins 20 % les deux années suivantes, sans se préoccuper du pouvoir d'achat des salariés...

M. Michel Bouvard – Se permettre de donner des leçons dans pareil contexte est indécent !

M. Jean-Paul Bacquet – …De plus, le groupe vient d'annoncer la vente de 15 milliards de dollars d'actifs, en particulier les produits usinés fabriqués en France. Il est urgent d'agir pour trouver un repreneur qui assure la pérennité et des emplois et de l'entreprise, qui risque d'être vendue pour la quatrième fois en moins de cinq ans ! Ma question, que pourraient aussi bien vous poser mes collègues Frédérique Massat, André Vallini, Jean-Yves Le Déaut et Christian Paul est donc la suivante : quelles garanties pouvez-vous donner pour que le repreneur ne soit pas un financier qui, après avoir valorisé les actifs, braderait l'entreprise ? Après la deuxième mort de Péchiney et la vente de la technologie française, il ne serait pas tolérable de perdre la maîtrise de la filière aluminium dans l'aéronautique, l'automobile et l'emballage. Avez-vous, Monsieur le premier ministre, une quelconque politique industrielle pour la France ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC ; exclamations sur les bancs du groupe UMP)

M. Michel Bouvard – Il fallait y penser en 1999 !

Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l’emploi Le groupe Rio Tinto, anciennement Alcan, anciennement Péchiney, emploie quelque 15 000 salariés dans trois divisions : produits usinés, bauxite-aluminium et emballage. Nous avons appris qu’à l’heure où le rachat d’Alcan par Rio Tinto se clôturait, ce groupe était lui-même l’objet d’une OPA par un de ses concurrents. J’ai donc téléphoné au patron de Rio Tinto pour lui demander ses intentions à propos de l’activité « emballage ». Alcan avait en effet pris des engagements à ce sujet, et j’ai demandé que Rio Tinto prenne les mêmes. S’agissant de la branche « produits usinés », nous avons des moyens de pression car, étant donné l'intérêt stratégique de certaines activités de Rio Tinto, qui fournit des pièces pour l'industrie aéronautique et militaire, des engagements – assortis de sanctions s’ils ne sont pas respectés – ont été souscrits, qui devront l’être aussi par le repreneur éventuel de Rio Tinto. Le Gouvernement sera d’une extrême vigilance. J’ai aussi demandé au patron de Rio Tinto de rester en contact avec les acteurs locaux et de diffuser les informations aux représentants du personnel le plus en amont possible.

Sur un autre plan, les voyages que les membres du Gouvernement font à l’étranger se traduisent par des résultats. Je suis ainsi rentrée cette nuit rapportant quelque cinq milliards de contrats, qui représentent 3 500 emplois (Exclamations sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR). Notre action tend aussi à créer des emplois en France et à défendre ceux qui existent (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe NC).

MESURES DE SÉCURITÉ POUR LES NAVIRES DE PÊCHE

M. Daniel Fasquelle – Vendredi dernier, la pêche française vivait un nouveau drame avec la disparition d'un marin à la suite du naufrage d'un bateau de pêche au large du Touquet. Je ne doute pas que chacun, sur tous les bancs, s’associera à moi pour adresser nos plus sincères condoléances à l'épouse du marin disparu et à ses enfants et un message de sympathie aux marins qui ont été sauvés mais qui sont profondément marqués par ce qu'ils ont vécu. L'accident aurait pu être bien plus dramatique encore si les secours professionnels et bénévoles n'avaient pas été aussi efficaces et si la solidarité des gens de mer n'avait pas joué. En votre nom à tous, je voudrais remercier tous ceux qui ont risqué leur vie pour en sauver d'autres.

Monsieur le ministre, vous vous êtes rendu, dimanche, à Étaples et à Boulogne-sur-Mer ; les professionnels y ont été très sensibles. Vous avez pu constater une nouvelle fois à quel point les marins étaient fiers de leur métier, qui les expose pourtant aux plus grands dangers.

Alors que vous préparez un plan très attendu pour une pêche durable et responsable, quelles mesures proposerez-vous pour réduire les risques auxquels sont exposés les professionnels ? N’y a-t-il pas urgence à moderniser la flotte, quand on sait que le patron du M’Bijou venait d’acheter un bateau construit il y a vingt ans, pour en remplacer un vieux de 28 ans ? N’avons-nous pas tort de vouloir systématiquement limiter la puissance des bateaux, au risque de rendre ainsi impossibles certaines manœuvres d’urgence ? Une mesure simple et de bon sens ne serait-elle pas, par exemple, l’obligation du port permanent d’une combinaison ? Monsieur le ministre, le monde de la pêche attend des mesures fortes pour une pêche durable et responsable, mais aussi pour une pêche sûre, afin que Didier Fourrier ne soit pas mort en vain ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe NC)

M. Michel Barnier, ministre de l'agriculture et de la pêche  Le Gouvernement partage le deuil des gens de mer après la disparition de Didier Fourrier. De la même manière que le Président de la République avait tenu à exprimer sa solidarité avec les marins pêcheurs en se rendant aux obsèques de Bernard Jobard après le naufrage du Sokalique, je me suis rendu, avec vous, Monsieur le député, à Étaples ainsi qu’à Boulogne-sur-Mer, pour dire notre tristesse à l’équipage du M’Bijou et remercier tous ceux qui ont participé aux secours, comme les formidables bénévoles de la Société nationale de sauvetage en mer.

Les marins pêcheurs exercent le métier le plus dangereux de tous : un métier où l’on compte un mort pour 1 000 chaque année – 20 morts par an –, mais aussi 10 % d’accidents du travail. Ces chiffres ne sont pas acceptables. C’est pourquoi, avec MM. Borloo et Bussereau, nous continuerons de travailler à des mesures concrètes. Parmi elles, il y a l’obligation, désormais effective, de porter un vêtement de flottabilité intégré ; il y a le système d’identification automatique obligatoire sur les bateaux de plus de 15 mètres ; il y a l’alarme permanente pour les bateaux qui restent plus de 24 heures en mer ; il y a la formation. Mais cela n’est pas suffisant. C’est un marin, dimanche, qui m’a rappelé cette proposition originale : celle d’une balise individuelle obligatoire sur le vêtement de chaque marin, comme pour les professionnels de la montagne.

Ce programme pour la sécurité des gens de mer participe du plan auquel je travaille et qui comportera également des volets économique – sur le prix du gazole –, social – sur le salaire minimum –, écologique et halieutique – sur la gestion de la ressource. De la même manière que l'Assemblée nationale est unanime pour partager le deuil des gens de mer, j’espère qu’elle sera unanime pour nous donner les moyens de mettre en place ce programme pour une pêche durable et responsable (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe NC et sur quelques bancs du groupe SRC et du groupe GDR).

POUVOIR D’ACHAT DES FONCTIONNAIRES

Mme Annick Girardin – Alors que le Gouvernement accumule les effets d’annonce, sans prendre aucune mesure concrète, la mobilisation massive des fonctionnaires vous a mis face à vos responsabilités concernant leur perte de pouvoir d’achat. Aujourd’hui encore, nous apprenons que le prix du gaz augmentera de 6 à 10 % à partir de janvier. Dans ce contexte, comment accepter que la revalorisation du traitement des fonctionnaires soit systématiquement inférieure à l’inflation ?

M. le Président – Madame Girardin, je vous demande un instant. Mes chers collègues, merci de ne pas quitter l’hémicycle en masse (Exclamations et rires sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR).

Mme Annick Girardin – Et ce ne sont pas les mesures annoncées par le Président de la République, quand bien même elles se réaliseraient, qui leur rendront du pouvoir d’achat ! À coté des retraités, des chômeurs et des travailleurs à temps partiel, les fonctionnaires sont les autres grands oubliés des ambitions présidentielles. Il n’est donc pas étonnant que leur mouvement soit relayé partout en France, et même amplifié dans certains territoires isolés, où l’inflation est plus forte qu’ailleurs. Les fonctionnaires demandent, en urgence, la refonte des outils de calcul du coût de la vie, pour que soit enfin réellement pris en considération le panier de la ménagère ; ne pas y consentir serait poursuivre dans la voie du mépris, des conditions de vie réelles de nos concitoyens.

À quoi s’ajoutent les inquiétudes quant au non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux. L’application de cette politique de rigueur, qui relève d’un parti pris idéologique, serait inacceptable, et même inconcevable, dans les territoires isolés, où la présence de l’État est déjà problématique.

Monsieur le ministre du budget, quand répondrez-vous aux revendications légitimes des fonctionnaires concernant leur pouvoir d’achat ? De quelle manière, enfin, adapterez-vous le principe du non-renouvellement de fonctionnaires dans les territoires où le nombre d’agents est déjà faible ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR)

M. Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique – Madame la députée, je souhaite vous rassurer : les fonctionnaires ne seront pas oubliés (« Ah ! » sur les bancs du groupe GDR). Je les ai reçus il y a quelques jours pour lancer des réunions de négociation sur leurs traitements. Par ailleurs, au cœur de notre pacte républicain, figure le principe d’une répartition cohérente des services publics, respectueuse de tous les territoires.

M. Patrick Roy – C’est mal parti !

M. Éric Woerth, ministre du budget Je souhaite tordre le cou à l’idée que les fonctionnaires auraient perdu du pouvoir d’achat (Exclamations sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR). Selon une étude de l’INSEE, celui-ci a au contraire augmenté de 2,4 %, en moyenne, ces dernières années. Les organisations syndicales qui évoquent une baisse ne s’appuient que sur le point d’indice, lequel ne correspond pas à l’intégralité du traitement (Même mouvement).

Le Gouvernement souhaite se doter de mécanismes d’augmentation du pouvoir d’achat. Cela passera par la rémunération au mérite (« Ah ! » sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR), mais aussi par la diminution du nombre de fonctionnaires, à l’occasion de laquelle nous affecterons à la fonction publique la moitié des économies générées (Exclamations sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR). La réduction du nombre de fonctionnaires est donc une bonne nouvelle pour la fonction publique ; elle rendra possibles des parcours professionnels enrichis et un service public réformé et renouvelé (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe NC).

M. le Président – Nous en avons terminé avec les questions au Gouvernement.

La séance est suspendue à 16 heures.

La séance est reprise à 16 heures 20 sous la présidence de M. Le Fur.

PRÉSIDENCE de M. Marc LE FUR
vice-président

MODIFICATION DE L’ORDRE DU JOUR

M. le Président – J’ai reçu de M. le secrétaire d’État chargé des relations avec le Parlement une lettre modifiant l’ordre du jour du mardi 11 décembre après-midi. Après le débat préalable au Conseil européen, l’Assemblée poursuivra la discussion du projet de loi ratifiant l’ordonnance n° 2007-329 du 12 mars 2007 relative au code du travail.

PROJET DE LOI DE FINANCES RECTIFICATIVE POUR 2007

L’ordre du jour appelle la discussion du projet de loi de finances rectificative pour 2007.

M. Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique – La dénomination de « collectif budgétaire » est cette année particulièrement appropriée à un texte issu d’une fructueuse collaboration, entre la majorité actuelle et la précédente comme au sein du Gouvernement. En effet, ce premier projet de loi de finances rectificative de la nouvelle législature, le dernier à concerner l’ancienne, prend appui sur les acquis des cinq dernières années tout en poursuivant l’effort de rénovation entrepris depuis six mois. En outre, chaque ministère s’est plié aux règles de bonne gouvernance précédemment définies et que le projet de loi de finances pour 2008 a encore renforcées.

Ce texte de bon augure se conforme tout d’abord aux règles de stricte maîtrise des dépenses, dans le respect de l'autorisation parlementaire, et à l’objectif de réduction du déficit. En vertu de ces règles, que votre rapporteur général a contribué à définir et dont il s'est fait le gardien prudent et avisé, l’évolution des dépenses est strictement encadrée, la mise en réserve de crédits obéit à de nouvelles modalités issues de la LOLF et les ouvertures de crédits en fin d’année sont limitées autant que possible, afin d'éviter que s’accumulent les reports.

Ainsi, les ouvertures de crédits que propose le texte, et qui s’élèvent à 1,4 milliard – au-delà de la ratification des ouvertures opérées par décret d'avance –, visent uniquement à solder la gestion. Il s’agit par exemple des 280 millions alloués à la prime de Noël des bénéficiaires du RMI et de l'allocation spécifique de solidarité, conformément aux engagements du Président de la République ; des quelque 320 millions destinés à compléter les crédits insuffisants consacrés à l'allocation adulte handicapés, à l'allocation parent isolé et à l'hébergement d'urgence ; des 117 millions qui nous permettront d’acquitter dans les délais prévus nos contributions aux organisations internationales et aux opérations de maintien de la paix.

En outre, ces ouvertures sont entièrement compensées par des annulations de crédits d'un montant équivalent, réparties sur l'ensemble des missions du budget général, annulations qui correspondent à la part résiduelle des crédits initialement mis en réserve ou à des crédits devenus sans objet.

Quant au solde budgétaire, il connaît une amélioration de 3,7 milliards par rapport à la loi de finances initiale, conformément à nos prévisions réactualisées lors de la présentation du projet de loi de finances pour 2008. En nous fondant en début d’année sur des hypothèses prudentes, nous espérons faire mieux que prévu, en 2008 comme en 2007. Ainsi, hors mesures nouvelles du collectif, les recettes fiscales sont réévaluées de 2,9 milliards par rapport aux prévisions initiales, atteignant 1,5 milliard déduction faite des transferts de recettes au profit de la sécurité sociale et des collectivités territoriales.

Cette évolution résulte principalement de l’augmentation, depuis le début de l’année, des recettes de l'impôt sur les sociétés, qui pourraient ajouter 5,2 milliards aux prévisions inscrites dans la loi de finances initiale – mais nous ne le saurons qu’à la fin du mois de décembre. En revanche, les recettes de la TVA, même si elles l’emportent sur celles de l’année précédente, sont inférieures de 2,4 milliards à ce qui était prévu.

Quant aux recettes non fiscales, elles progressent de 500 millions par rapport à la loi de finances initiale, compte tenu du versement d'un acompte sur dividende de 923 millions décidé par le conseil d'administration d’EDF le 7 novembre dernier.

Enfin, les prélèvements sur recettes sont inférieurs de près de 2 milliards à ce qui était prévu ; c’est surtout le prélèvement sur recettes au profit du budget communautaire qui avait été sous-évalué.

D’autre part, le texte témoigne d’une volonté de rendre plus transparents les rapports entre l’État et ses partenaires financiers. Ainsi, dès mon entrée en fonctions, j'ai souhaité clarifier et pacifier les relations financières qui unissent l'État et la sécurité sociale, afin de maîtriser les dépenses – objectif prioritaire – plutôt que transférer les déficits.

M. André Wojciechowski – C’est important !

M. Éric Woerth, ministre du budget – Ainsi, le projet de loi complète les dispositions antérieures ayant permis d’apurer le 5 octobre dernier la dette de l'État envers la sécurité sociale, qui s'élevait à 5,1 milliards fin 2006.

En outre, afin de compenser les pertes de recettes dues aux allègements de charges destinés à favoriser l’emploi par la réduction du coût du travail, nous transférons à la sécurité sociale un milliard d’euros de recettes fiscales supplémentaires au titre des allégements généraux de cotisations patronales, sans attendre la clause de révision prévue par la loi de finances pour 2007, et 270 millions au titre de la réduction de cotisations sociales sur les heures supplémentaires et complémentaires résultant de la loi TEPA. Enfin, l’État reprend, à hauteur de 620 millions environ, la dette résiduelle du Fonds de financement des prestations sociales agricoles, héritée de l’ancien Budget annexe des prestations sociales agricoles.

La même transparence doit présider aux relations entre l’État et les collectivités territoriales. Les transferts de compétences nous conduisent ainsi à majorer d'un peu plus de 140 millions la part de la TIPP et de la taxe sur les conventions d'assurance affectée aux départements et aux régions, afin d'assurer une compensation à l'euro près, comme le prévoit la loi.

Les relations financières avec la SNCF sont elles aussi clarifiées. Nous reprenons, par l'intermédiaire de la Caisse de la dette publique, la dette de la SNCF logée au sein du service annexe d'amortissement de la dette, qui s'élevait à 8,2 milliards au 31 décembre 2006. Nous tirons ainsi les conséquences de la requalification en dette publique de l'engagement de l'État vis-à-vis de l'entreprise, en apportant une solution définitive au devenir de cette dette dans des conditions plus avantageuses pour l'État.

Au-delà de ces mesures budgétaires, ce collectif poursuit l’effort de modernisation de notre fiscalité. Il ajoute une pierre supplémentaire à l'édifice du plan renforcé de lutte contre la fraude voté dans le cadre du PLFSS, en créant notamment une procédure de « flagrant délit fiscal » qui permettra à l’administration de corriger plus rapidement une situation manifestement frauduleuse, en prenant les fraudeurs de vitesse. Grâce à cette nouvelle procédure, l’administration pourra opérer des saisies conservatoires et appliquer immédiatement une amende comprise entre 5 000 et 20 000 euros selon le chiffre d'affaires.

Nous entendons en revanche être davantage à l'écoute des contribuables respectueux de la loi : nous portons d’un à deux mois le délai de réponse du contribuable vérifié, et instaurons un délai de trois mois pour la réponse de l'administration aux observations des très petites entreprises. Un amendement a été déposé afin d'aller plus loin en réduisant ce délai à deux mois. Le Gouvernement y est favorable, car la procédure fiscale gagnera aussi en équité.

M. Jérôme Chartier – Très bien !

M. Éric Woerth, ministre du budget – Nous faisons également un effort en direction des personnes à revenus modestes. Le Gouvernement vous présentera prochainement un projet de loi mettant en œuvre les mesures annoncées par le Président de la République en faveur du pouvoir d'achat. Mais cette préoccupation se traduit déjà dans ce collectif. Ainsi, les personnes âgées qui s'installent en maison de retraite pourront continuer à bénéficier des allégements de taxe d'habitation et de taxe foncière auxquels elles ont droit au titre de leur résidence principale (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP). De même, l'extension de la garantie universelle des risques locatifs aux personnes modestes non éligibles au 1 % logement permettra l'accès au logement de ménages qui en étaient jusqu'à présent exclus faute de garanties suffisantes.

Les amendements déposés sur la prime à la cuve ou la redevance télévision permettront d'accentuer cet effort en faveur des ménages les plus modestes.

Par ailleurs, nous élargissons le régime fiscal du mécénat et du patrimoine historique. Le texte autorise la déduction du revenu des dépenses de conservation ou de restauration du mobilier classé au titre des monuments historiques.

Pour soutenir le spectacle vivant, nous étendons le bénéfice de la réduction d'impôt prévue pour les dons réalisés par des particuliers aux sommes versées aux organismes chargés de la présentation au public de ces manifestations.

Nous vous proposons également d'étendre le régime fiscal du mécénat d'entreprise aux versements effectués à des sociétés commerciales, lorsqu'elles sont intégralement détenues par des personnes publiques et à gestion désintéressée. Ce sont des mesures fortes qui renforcent la loi Malraux et notre politique culturelle.

Nous entendons enfin moderniser notre fiscalité dans un sens plus favorable à l'environnement. Le Grenelle de l'environnement a mis en évidence les avantages d'une taxe écologique sur les véhicules neufs les plus polluants, dont le produit permettrait de récompenser l'achat automobile éco-responsable et de financer le retrait des véhicules les plus anciens, plus polluants. Nous vous proposerons donc un amendement instituant un malus sur l'acquisition de ces véhicules. Le mécanisme incitatif sera quant à lui instauré par décret. L'ensemble du dispositif ne devrait entraîner aucun prélèvement supplémentaire.

Les autres dispositions de ce projet s'inscrivent dans une logique de modernisation de notre législation. Je pense aux mesures de simplification, parmi lesquelles la modernisation du système d'immatriculation des véhicules, la transposition de la directive énergie, ou encore l’augmentation de la rémunération nette des débitants de tabac prévue dans le contrat d'avenir signé avec la profession.

Ce projet met donc en œuvre les engagements que nous avons pris devant les Français. Il s'inscrit résolument dans une perspective de réforme de nos politiques publiques et d'assainissement des finances de l'État (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe NC).

M. Gilles Carrez, rapporteur général de la commission des finances, de l’économie générale et du plan – Ce premier collectif de la législature obéit aux mêmes règles de bonne gestion budgétaire que les collectifs des dernières années. Nous allons en effet constater que l’enveloppe de dépenses votée il y a un an est strictement respectée, à l’euro près. De même, la prévision de recettes votée l’an dernier était bien prudente, puisqu’elle se trouve dépassée. À ce stade, le déficit est donc inférieur de près de 4 milliards à celui que nous avions voté – 38,3 milliards au lieu de 42 milliards (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Jean Launay – Merci EDF !

M. Gilles Carrez, rapporteur général – Cette performance mérite en effet d’être saluée, même si le déficit reste élevé.

Le plafond de dépenses de 266,9 milliards est strictement respecté, grâce à l’utilisation de la réserve de précaution adoptée en loi de finances initiale, qui porte sur 5 % des crédits hors crédits de personnel et sur 0,15 % des crédits de personnel. Cette réserve de précaution nous a en effet permis d’ouvrir les crédits nécessaires dans le cadre de décrets d’avances sans dépassement des dépenses. Comme les années précédentes, il a fallu ouvrir des crédits pour des dépenses imprévues en matière de logement social, d’hébergement d’urgence, d’opérations extérieures, ou encore pour venir en aide à la Martinique après le passage du cyclone Dean : 1,6 milliard ont ainsi été ouverts par trois décrets d’avances en mars, en octobre et tout récemment. Ces nouveaux crédits ouverts sont équilibrés par des annulations. Je me félicite d’ailleurs que pour la première fois, les crédits ouverts au titre de la prime de Noël des allocataires du RMI le soient dès le collectif.

Ce collectif ouvre également des crédits au titre des primes d’épargne logement et des aides à l’agriculture.

Autre point important, que j’aurais dû évoquer hier en commission : pour compléter les crédits des OPEX, nous procédons en général par redéploiement à partir des crédits d’équipement du ministère de la défense. Nous sommes donc contraints d’ouvrir de nouveaux crédits d’équipement au moment du collectif, lesquels sont automatiquement reportés sur l’année suivante. Ce n’est pas de bonne gestion. C’est pourquoi je me réjouis que les reports de crédits sur 2008 restent limités.

Puisse ce souci d’équilibre budgétaire perdurer jusqu’à la fin de notre discussion !

J’en viens aux recettes. Elles sont supérieures de 2 milliards à ce qui était prévu, mais c’est principalement dû à une plus-value sur l’impôt sur les sociétés. Or, c’est l’acompte de décembre – en particulier celui versé par les grandes entreprises pétrolières ou les banques – qui est déterminant en la matière. Nous avons quelques incertitudes sur ce dernier acompte, mais le Gouvernement a maintenu sa prévision. J’espère donc que nous n’aurons pas de mauvaise surprise…

Pour la première fois, le produit de l’impôt sur le revenu se trouve inférieur à la prévision. Cela tient sans doute à une multiplication des niches fiscales, dont nous avons tendance à sous-estimer l’incidence (« Très bien ! » sur plusieurs bancs du groupe SRC).

Nous avons une autre inquiétude, relative à la TVA. La diminution de plus de 2 milliards des recettes par rapport à la prévision est paradoxale alors que la consommation se maintient. Il faudrait que vos services se penchent sur la question. L’an dernier, nous avions voté un dispositif pour limiter les « carrousels », mais la TVA reste l’impôt le plus fraudé, ce qui doit nous inciter à la plus grande vigilance.

Les recettes de TIPP diminuent également, et il faudra être attentif à leur considérable « élasticité négative » par rapport aux prix. Or la consommation est en forte baisse depuis trois mois notamment pour le fuel domestique, en raison de la hausse des prix. Les recettes de TIPP s’en ressentent, mais aussi pour la première fois, celles de la TVA sur les produits pétroliers.

M. Daniel Paul – Dites-le clairement : la consommation baisse !

M. Gilles Carrez, rapporteur général – Évidemment, c’est le cas quand les prix augmentent rapidement. Mais le Gouvernement a doublé l’aide à la cuve.

Les recettes non fiscales augmentent grâce aux 900 millions de dividendes de EDF.

Enfin, les mesures de la loi TEPA ont, sur 2007, une incidence de 135 millions, dont la moitié pour les exonérations pour heures supplémentaires et allégements de charges et la moitié par diminution des droits de mutation.

Le déficit est ramené à 38,3 milliards. C’est moins que les frais financiers, et nous obtenons donc un excédent primaire, c'est-à-dire que, si l’on fait abstraction de la dette, nos recettes sont supérieures à nos dépenses. Il faut essayer d’approcher le plus vite possible du déficit stabilisant, soit 35 milliards, c'est-à-dire permettant le maintien du pourcentage de la dette de l’État par rapport au PIB.

Sur le plan fiscal, nous transposons un certain nombre de directives : sur l’énergie, la TVA, la directive de minimis, la simplification des aides régionales. Le contrôle fiscal est amélioré, grâce au flagrant délit fiscal ; en contrepartie, le contribuable concerné peut saisir en référé le juge administratif.

D’autres dispositions améliorent la situation des plus modestes. Ainsi les personnes âgées qui partent en établissement de soins ou en maison de retraite conserveront les exonérations de taxe d’habitation et de foncier bâti pour leur habitation principale. Les avantages fiscaux sont renforcés pour le mécénat et le patrimoine historique, notamment pour ce qui est du mobilier classé. La commission des finances, à l’initiative de son président et de moi-même, a transformé ce dispositif en réduction d’impôt plafonnée. On ne peut tolérer des niches fiscales qui ne soient pas plafonnées.

M. Charles de Courson – Très bien !

M. Gilles Carrez, rapporteur général  Nous avons bien noté votre souci d’incorporer clairement dans la dette de l’État les 620 millions de dette du FFIPSA et les 8,2 milliards du service annexe d’amortissement de la dette de la SNCF.

Enfin, vous avez évoqué l’amendement « écopastille » et celui sur l’aide à la cuve déposés par le Gouvernement. J’aimerais en dire du bien, mais lors de la réunion de la commission il y a une heure, nous ne les avions pas… Je salue néanmoins la grande qualité du travail du Gouvernement et je propose à l’Assemblée d’adopter, comme l’a fait la commission, ce projet de loi de finances rectificative (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Didier Migaud, président de la commission des finances, de l’économie générale et du plan – Ce collectif s’inscrit dans le fil de la réactualisation que vous nous avez présenté il y a peu, et donc dans la continuité de la politique menée depuis quelques années plus qu’il n’illustre la rupture annoncée il y a quelques mois.

Je salue quelques dispositions qui vont dans le bon sens.

M. Gilles Carrez, rapporteur général – Très bien !

M. Didier Migaud, président de la commissionC’est le cas des mesures sur le contrôle fiscal, en ce qui concerne les délais de réponse des contribuables et de l’administration. J’approuve également tout à fait la procédure de flagrant délit fiscal. Les allégements de fiscalité locale au profit des personnes hébergées en maison de retraite sont aussi positifs, de même que l’actualisation des dispositifs fiscaux au regard de la directive de minimis, même si l’addition des aides à différents niveaux territoriaux conduit à atteindre rapidement le montant fixé par la directive.

En revanche, sur bien des points, il y a encore beaucoup à faire. Je salue votre initiative pour apurer les dettes de l’État envers la sécurité sociale, mais il serait intéressant d’avoir un bilan des dettes résiduelles au 31 décembre 2007. Dans son rapport annexé au rapport du rapporteur général, la Cour des comptes critique le fait de traiter cette opération en trésorerie plutôt que de l’incorporer dans le solde budgétaire, ce qui aurait un impact sur la norme de dépenses. Nous aimerions recevoir des explications à ce sujet.

Certaines inscriptions budgétaires restent insuffisantes, même si un effort de sincérité a été fait en loi de finances initiale, ainsi que des mouvements contraires d’ouverture et d’annulation de crédits à quelques mois d’intervalles dans des domaines prioritaires comme la politique urbaine, la justice, les transports, l’enseignement supérieur et la recherche. Il faudrait plus de cohérence.

Les préoccupations que nous avons déjà exprimées à propos du paquet fiscal ou dans le débat budgétaire se confirment. Il y a quelques mois, vous évoquiez 3 à 5 milliards de recettes fiscales supplémentaires. Nous sommes plutôt dans le bas de la fourchette, soit 3 milliards, malgré une estimation optimiste des recettes de l’impôt sur les sociétés. Néanmoins, la réduction de 1,86 milliard de la contribution de la France au budget de l’Union européenne et le versement en avance de la contribution d’EDF, soit au total 2,7 milliards, vous aident à tenir, à un milliard près, le déficit annoncé il y a quelques mois. S’il y a rupture, c’est ici qu’elle se trouve : c’est la première fois depuis cinq ans que le déficit en exécution diminue aussi peu par rapport à celui prévu en loi de finances initiale. L’explication tient à des dépenses supérieures ou des recettes moindres que prévu.

S’agissant de la TVA, vous prévoyez une moins-value de recettes de 2,4 milliards. Or, à vous entendre, la consommation se porte bien et le pouvoir d’achat est en augmentation. Comment, dès lors, expliquez-vous que le produit de la TVA, certes supérieur à celui de l’an dernier, soit inférieur à la prévision retenue en loi de finances initiale ? Voilà qui augure mal de l’avenir…

Quelles sont par ailleurs, pour 2008 mais aussi pour 2007, vos prévisions de croissance ? Je suis surpris que le programme de stabilité que Mme Lagarde, dont chacun connaît l’optimisme résolu, a adressé à la Commission européenne, reprenne les mêmes hypothèses de croissance qu’il y a quelques mois, alors que la parité entre euro et dollar, la crise financière, la révision à la baisse des prévisions de croissance du FMI et de la Commission elle-même ont quelque peu changé la donne depuis. La fable de septembre devient conte de Noël… Ce décalage ne constitue-t-il pas un risque pour notre croissance et, partant, pour nos comptes publics ? Le Premier ministre partageait lui-même, hier encore cette préoccupation lorsqu’il annonçait aux sénateurs du groupe UMP que la France dépasserait bientôt les 42 milliards de déficit ! Quant à la réserve de précaution, que l’on invoque bien souvent, je ne suis pas sûr qu’elle suffise. Il faudra d’ailleurs, comme vous l’a demandé le rapporteur général, satisfaire à votre engagement de transmettre à la commission des finances un rapport d’information régulier sur cette réserve, car ce n’est pas encore le cas.

La LOLF prévoit que le surplus des recettes fiscales soit intégralement affecté en loi de finances initiale à la réduction du déficit. Le rapporteur général a pourtant éprouvé le besoin de déposer un amendement visant à retrancher 735 millions de ce surplus pour l’affecter au financement…

M. Gilles Carrez, rapporteur général – Du travail !

M. Didier Migaud, président de la commission Non, au financement d’une partie du paquet fiscal voté cet été. Comment justifier cet oubli, Monsieur le ministre ? Qu’en est-il de la règle selon laquelle ces surplus doivent être affectés à la réduction du déficit, que l’un de vos prédécesseurs voulait même, en 2004, ériger en véritable dogme ? Il semble que vous rompiez avec ce principe de bonne gestion…

Ensuite, qu’en est-il de la vente d’action EDF – dont l’annonce prématurée en a d’ailleurs affecté le cours ? Je comprends que vous souhaitez lancer un programme d’investissement massif pour nos universités – à hauteur de 5 milliards, dites-vous – mais pourquoi y affecter le produit de cette vente alors que vous ne disposez pas par ailleurs du premier euro à lui consacrer, au point que les crédits de l’enseignement supérieur baissent encore davantage dans le présent collectif ?

M. Jean-Paul Lecoq – Opposer les Français : voilà la méthode Sarkozy !

M. Didier Migaud, président de la commission Enfin, quel sera l’impact budgétaire des mesures que vous annoncez concernant le pouvoir d’achat ou la fonction publique, alors même que l’exécution du budget de l’année prochaine pose déjà problème ? Répondez-nous : il y va de la sincérité du budget dont nous débattons ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC)

EXCEPTION D’IRRECEVABILITÉ

M. le Président – J’ai reçu de M. Jean-Marc Ayrault et des membres du groupe SRC une exception d’irrecevabilité déposée en application de l’article 91, alinéa 4, du Règlement.

M. Pierre-Alain Muet – Après les promesses électorales du printemps, les cadeaux fiscaux de l’été et l’illusion budgétaire de l’automne, voici venu l’hiver et sa dure réalité. Alors même que nous discutons d’un projet qui n’en a pas pris la mesure, se dessine déjà un autre texte, porteur du verbe présidentiel. Dès lors, à quoi bon discuter ?

Le choc de confiance a tourné court : voilà la réalité. Le profond malaise qui touche la plupart des Français tient au fait que le pouvoir d’achat est le grand oublié de vos premiers mois de gouvernement. L’opinion s’inquiète à juste titre : plusieurs études, émanant notamment de l’INSEE et de l’École d’économie de Paris, confirment que les inégalités n’ont cessé de se creuser depuis 2002 et que les Français les plus modestes, salariés ou bénéficiaires de minima sociaux, ont vu leur pouvoir d’achat dégringoler. Un profond sentiment d’injustice saisit nos concitoyens qui constatent comme nous que le « Président du pouvoir d’achat » s’est surtout occupé de celui des plus fortunés.

M. Jean Launay – Et du sien propre, accessoirement !

M. Pierre-Alain Muet – Quant à la France qui se lève tôt, qui travaille dur et qui gagne peu, elle a supporté tout l’effort de rigueur et reçu pour seule récompense quelques incantations. Oubliés, les salariés qui touchent un SMIC jamais revalorisé, les chômeurs à qui vous tournez le dos ! Oubliées, les petites retraites sous-indexées, d’autant plus insuffisantes que vous refusez d’exonérer les seniors de la redevance audiovisuelle ! Oubliés, les salariés modestes à qui l’on refuse l’augmentation réelle de la PPL, de même que les salariés à temps partiel, des femmes pour l’essentiel, qui ne sont pas libres de décider de leur temps de travail !

Dans une économie de marché, la confiance est le fondement de la performance. Elle est la clef du succès des pays égalitaires du Nord de l’Europe, de la Suède aux Pays-Bas. Or, l’effondrement actuel de la confiance en France provient d’un profond sentiment d’injustice.

L’indicateur de confiance des ménages établi par l’INSEE est retombé à son plus bas niveau des quinze dernières années, ce qui est inquiétant pour la croissance. Au lieu du cercle vertueux promis par Mme Lagarde lorsqu’elle vantait le « choc de croissance » – dont vous ne parlez plus aujourd’hui –, nous constatons un cercle vicieux : montée des inquiétudes et croissance en berne. La croissance française est inférieure d’un demi-point à vos prévisions cette année, et il en ira vraisemblablement de même l’année prochaine ; et elle est inférieure d’un point à celle de nos partenaires européens ! Vous aviez prévu qu’elle se situerait entre 2 et 2,7 % : elle devrait s’établir autour de 1,8 % – cela malgré le rebond du troisième trimestre, jugé « formidable » par Mme Lagarde mais qui en fait correspond très exactement à la prévision qu’avait faite l’INSEE deux mois plus tôt, laquelle conduisait en prévision annuelle à un taux de 1,8 %...

Les autres indicateurs de conjoncture, par exemple la consommation des ménages en produits manufacturés, sont en forte chute ; l’année prochaine, la croissance devrait être de l’ordre de 2 %. Il n’y a donc ni choc de croissance, ni rupture, mais continuité dans la croissance molle depuis 2002. Entre le discours volontariste du Président de la République, qui voulait aller chercher la croissance « avec les dents », et la réalité, le fossé est considérable !

Ce serait, nous disent certains, la conséquence de la conjoncture internationale. Il est vrai que la croissance française suit le cycle économique européen, mais entre 1997 et 2002, la croissance française a été entre un demi-point et un point au-dessus de celle de ses partenaires européens, alors que depuis 2002, elle est presque systématiquement plus faible que la croissance européenne ! C’est ainsi qu’en 2007, notre croissance aura été de 1,8 %, contre 2,6 % dans la zone euro et 2,8 % dans l’ensemble de l’Europe.

L’explication est simple : ce qui détermine la croissance, c’est essentiellement la progression du pouvoir d’achat du revenu disponible des ménages. Or entre 1997 et 2002, cette progression a toujours été comprise entre 3,2 et 3,5 %, en conséquence d’une part de nombreuses créations d’emplois – 400 000 par an –, et d’autre part de la hausse du revenu individuel ; et après 2002, on a assisté à un effondrement – avec des fluctuations entre 1 et 2 %.

Vous avez longuement évoqué les heures supplémentaires, et à ce sujet le Président n’a pas précisé à quel taux il proposait un rachat des RTT : est-ce au taux normal ou au taux des heures supplémentaires ? M. Fillon n’ayant pas répondu à cette question, on peut se demander si ce rachat n’a pas pour véritable objectif de remettre en cause la durée légale du travail.

Quoi qu’il en soit, quand vous parlez de « travailler plus pour gagner plus », vous faites l’erreur de ne pas vous adresser à ceux qui en auraient besoin, et qui sont les chômeurs et les salariés à temps partiel. En encourageant les heures supplémentaires, vous tournez le dos à la création d’emplois.

Contrairement en effet à ce qu’a toujours prétendu la droite, la réduction du temps de travail a eu un effet massif sur la création d’emplois : un rapport publié par le ministère de l’emploi lorsque M. Fillon en était à la tête montrait que les 35 heures avaient créé entre 300 000 et 400 000 emplois, et cela sans nuire à la compétitivité de notre pays : à l’époque, notre commerce extérieur dégageait des excédents, alors que nous en sommes maintenant à un déficit record de 30 milliards !

Si les 35 heures ont créé des emplois, c’est que l’emploi a été mis au cœur des négociations : ce que vous appelez le « coût des 35 heures », ce sont des allégements de cotisations que nous avons conditionnés à des créations d’emplois – contrairement à ceux accordés par la majorité précédente. De même, nous plaidons depuis six mois pour que les allégements de charges soient conditionnés à une négociation sur le pouvoir d’achat – et sur ce point au moins, le Président de la République nous a entendus.

Mais vous avez fait sur les 35 heures une erreur historique. Depuis un peu plus d’un siècle, la durée annuelle du travail a été divisée par deux, pendant que la productivité horaire était multipliée par vingt ! Le progrès économique s’est toujours caractérisé par un double mouvement de conquête de temps libéré et d’augmentation du pouvoir d’achat. Votre discours sur le temps de travail, il est fort ancien dans cet hémicycle, où la droite expliquait que les 40 heures étaient la cause de la défaite de 1940 ; et en 1841, quand on a voulu limiter le travail des enfants à 8 heures au lieu de 12, il s’est trouvé des députés pour expliquer que ce serait une catastrophe économique !

M. François Rochebloine – Ces comparaisons sont scandaleuses !

Mme Marie-Anne Montchamp – Absolument !

M. Pierre-Alain Muet – J’en viens au déficit. Ce collectif ne le réduit pas, puisqu’il s’établit à 38,3 milliards contre 39 milliards en exécution en 2006, en dépit du versement anticipé d’un dividende de 923 millions par EDF et de la diminution de 1,9 milliard de la contribution au budget communautaire. Et avec le ralentissement de la croissance, le risque est grand que, l’an prochain, le déficit des finances publiques passe la barre des 3 % du PIB : je me réfère à l’hypothèse « pessimiste » envisagée par le rapporteur général, à savoir 1,8 % de croissance en 2007 et 2 % en 2008, c’est-à-dire très exactement la prévision que font aujourd’hui tous les conjoncturistes…

Or vous reportez la contrainte sur les collectivités locales, en leur imposant une sous-indexation des dotations. C’est profondément choquant car contrairement à l’État, ces collectivités ne s’endettent pas pour financer des dépenses courantes, mais seulement pour financer leurs investissements – et ce sont elles qui réalisent l’essentiel de l’investissement public.

En ce qui concerne les niches fiscales, Monsieur Carrez, j’observe qu’on en propose encore deux nouvelles avec les articles 18 et 20 ! Ces niches sont un vrai problème.

Non seulement la fiscalité française est trop peu redistributive mais elle est ainsi conçue que, s’agissant de l’impôt sur le revenu, le taux de prélèvement marginal le plus élevé ne pèse pas sur les ménages les plus riches mais sur les revenus les plus faibles, ce pour quoi les allocataires d’un RMI qui reprennent un emploi n’y trouvent guère avantage. C’est cette constatation qui nous a conduits à créer la prime pour l’emploi, et qui explique que nous soyons favorables, comme vous, au revenu de solidarité active. Si vous aviez réellement voulu instituer la justice fiscale, vous auriez fortement augmenté la prime pour l’emploi ou réduit le taux de TVA, deux solutions que nous proposerons par amendements.

Comment croire votre discours alors que les priorités affichées dans la loi de finances initiale sont démenties dans ce collectif ? Voici 197 millions de crédits destinés aux retraites anticipées, dont nous avions cru comprendre qu’il n’y en aurait plus ; voilà des annulations de crédits en pagaille, et dans quels domaines ! La politique de la ville perd 315 millions, la recherche et l’enseignement supérieur – dont vous avez pourtant dit et redit qu’elles sont parmi vos priorités – 216 millions, la justice 66 millions, les transports 390 millions ! Quant à la préoccupation, si démonstrativement exprimée, de développement durable, elle se traduit par une petite mesure, mais on est loin du compte. Il y a, me direz-vous, le Grenelle de l’environnement – qui se traduira, peut-être, un jour, par des mesures fiscales… Que ne proposez-vous de revenir immédiatement sur cette aberration qu’est le maintien de l’exonération de TIPP dont bénéficient les transporteurs aériens, qui sont au nombre des plus gros émetteurs de gaz à effet de serre ? Une action européenne conjointe est nécessaire pour que les compagnies aériennes payent cette taxe.

C’est peu dire que la cohérence de votre politique se perçoit mal. Tout au plus peut-on en dire que c’est une énième version de l’inusable dogme conservateur selon lequel il suffit de donner aux plus riches pour que la croissance se renforce et que, par ruissellement, les autres en profitent. Malheureusement, l’expérience montre que le prétendu ruissellement n’a jamais créé de croissance, mais qu’il a bel et bien accru le déficit – qui n’est jamais revenu à son niveau initial – et renforcé les inégalités. Nous avons pu en juger sur le vif entre 2002 et 2007, M. Chirac ayant commencé son quinquennat par 5 milliards d’allégements fiscaux, provoquant un creusement du déficit qui ne s’est jamais comblé. De même, le péché originel de votre Gouvernement a été le paquet fiscal de l’été 2007, que vous traînerez comme un boulet pendant toute la mandature.

Il est encore temps, collègues de la majorité, de rectifier le tir et de réorienter la politique économique du Gouvernement d’une manière propre à répondre aux préoccupations des Français. Pour cela, il vous faut voter, comme nous, cette exception d’irrecevabilité (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR).

M. Éric Woerth, ministre du budget – Vous ne serez pas surpris, Monsieur Muet, de m’entendre vous dire que je ne partage pas vos convictions. À dire vrai, les exemples que vous avez cités ne sont guère pertinents. Ainsi, les 5,1 milliards d’allégements décidés par M. Chirac en 2002 avaient été accordés sans contrepartie. Ce n’est pas ce que nous avons choisi, puisque les exonérations de cotisations prévues dans la loi TEPA compensent un volume nouveau d’heures supplémentaires, elles-mêmes à l’origine de création de richesse. La même logique est à l’œuvre dans les mesures annoncées par le Président de la République. Il n’y a donc pas lieu de comparer ce qui n’est pas comparable. Marteler que nous traînerons comme un boulet la politique que nous avons décidée et mise en œuvre cet été, c’est oublier un peu vite qu’il s’agissait de l’acte fondateur d’une nouvelle politique économique visant à remettre le travail au cœur de notre économie. La confiance est l’un des moteurs de la croissance mais elle ne se décrète pas ; elle s’instaurera à mesure que les dispositifs que nous avons définis produiront leurs effets.

L’autre condition d’une croissance durable, c’est un surcroît de travail. Vous avez évoqué les 35 heures. Nos conceptions sur ce point sont on ne peut plus divergentes car nous estimons que la RTT a puissamment et durablement affaibli notre pays en lui faisant perdre de sa compétitivité. La réduction du nombre d’heures de travail hebdomadaires ne participe-t-elle pas de la réduction du temps de travail global ? Toutes les études le montrent, la France se caractérise par un déficit considérable du temps de travail par personne, ce qui ne peut se concevoir dans une économie mondialisée. Il convient donc d’aider les entreprises par des incitations fiscales et des allègements de charge au lieu d’alourdir leur barque ; c’est ce que nous faisons.

J’observe que le moral des chefs d’entreprises est bon, que les intentions d’investissement par secteur sont satisfaisantes et que la conjoncture au troisième trimestre l’a été aussi, contrairement à vous qui voyez tout en noir, je suis heureux de ce rayon de soleil et je considère qu’il n’y a aucune raison de revoir les prévisions de croissance. S’agissant des prévisions de déficit, on ne peut que se réjouir d’une exécution meilleure que prévue, qui montre que la loi de finances initiale a été fondée sur des hypothèses prudentes. Nous continuerons dans cette voie en 2008.

Je ne vois donc rien qui justifie le vote de cette exception d’irrecevabilité (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Jérôme Chartier – Je partage votre point de vue, Monsieur le ministre, cette exception d’irrecevabilité n’en était pas une, mais l’occasion pour M. Muet d’exposer brillamment sa vision des conditions de la croissance, qui n’est pas celle du groupe UMP. J’observe que les objectifs fixés dans la loi de finances initiale ont été plutôt bien tenus, ce qui montre que les prévisions étaient sérieuses. Pourtant, plusieurs fois, nos collègues du groupe SRC nous avaient mis en garde, affirmant que la croissance ne serait pas au rendez-vous au troisième trimestre. Il n’en a rien été, on le sait maintenant, et on peut raisonnablement penser que la croissance, en 2008, sera finalement supérieure aux 1,8 % initialement prévus…

M. Pierre-Alain Muet – L’hypothèse retenue était de 2,25 % !

M. Jérôme Chartier – …et probablement comprise entre 1,8 % et 2 %.

Ce collectif est plus qu’un texte de régulation budgétaire. Il réaffirme la volonté, fortement exprimée pendant la campagne électorale et qui s’est déjà traduit dans la loi TEPA, d’améliorer le pouvoir d’achat des Français.

Il y a une autre manière d’envisager les mesures en faveur du pouvoir d’achat : c’est la confiance. Car ces mesures seront utiles à tous les Français, et pas seulement aux plus riches d’entre eux ; c’est le cas de l’exonération des heures supplémentaires, mais aussi de la suppression des droits de succession, ou encore de l’exonération des emprunts pour la résidence principale. Quant au bouclier fiscal, il peut fonctionner par le haut – pour les revenus les plus élevés – mais aussi par le bas – pour les revenus les plus faibles. J’ai ainsi appris que, dans un département d’outre-mer, 5 000 foyers à bas revenus avaient sollicité ce bouclier fiscal par le bas. Ces mesures concernent donc tous les niveaux de revenu.

M. Jean-Claude Sandrier – Ce sont les moins riches parmi les plus riches !

M. Jérôme Chartier – Comme vous l’avez dit, Monsieur Muet, la confiance est la clé de la croissance. Il est temps pour vous d’opérer une révolution culturelle.

M. Michel Vergnier – Pas de leçon, s’il vous plaît !

M. Jérôme Chartier – Il faut que vous parveniez à avoir confiance. La majorité dit ce qu’elle fait et fait ce qu’elle dit. Ces mesures vont produire des effets très rapidement ; dès les six premiers mois de 2008, nous pourrons mesurer l’efficacité de cette politique très volontariste en faveur du pouvoir d’achat.

Mes chers collègues de l’opposition, je vous invite à rejeter cette exception d’irrecevabilité et à rejoindre la position de la majorité pour augmenter le pouvoir d’achat des Français (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe NC).

M. Daniel Paul – Je suis tenté de répondre à notre collègue M. Chartier qu’il a raison : oui, la droite fait ce qu’elle avait promis de faire. Le problème, c’est que les Français avaient compris autre chose (Exclamations sur les bancs du groupe UMP).

M. Fréderic Lefebvre – Quand vous vous trompez, ce sont les autres qui ne comprennent pas !

M. Daniel Paul – Le pouvoir d’achat est bien arrivé au cœur des préoccupations de tous, mais vos réponses ne sont pas les bonnes. Rappelez-vous : pendant des mois, les ministres ne cessaient de dire, dans les médias, que le pouvoir d’achat avait augmenté, contrairement à ce que montraient les statistiques et à ce que percevaient les Français eux-mêmes. Mais au bout du compte, comme toujours, la réalité a fini par s’imposer, en montrant que la précarité s’était accentuée. À ignorer la précarité, on oublie un élément essentiel, car l’évolution du pouvoir d’achat n’est alors évidemment plus du tout la même. C’est ce qu’explique d’ailleurs la dernière enquête de l’INSEE, qui montre que les « précaires » – les salariés à temps partiel, les retraités – sont privés de toute perspective d’amélioration du pouvoir d’achat, dans le cadre de votre politique. On ne peut pas en même temps servir les nantis et la majorité des Français. Le journal Marianne (Exclamations sur les bancs du groupe UMP), qui n’est quand même pas L’Humanité

Un député du groupe UMP – C’est un torchon !

M. Daniel Paul – …, titre sur « ces grands patrons qui barbotent dans une opulence toujours plus spectaculaire » ; dix patrons français figurent dans le top 20 des PDG européens les mieux payés. Ils savent que les dividendes ont particulièrement augmenté dans la dernière période : jusqu’à 40 % de plus en une année. En même temps, ils refusent les revendications de leurs salariés. Et ce n’est pas la taxation de stock-options à 2,25 % qui va les effrayer, même si cela fait pousser des hauts cris à Mme Parisot.

Comme disait Coluche, certains sont plus égaux que d’autres. Alors que nous fêtons ces jours-ci l’anniversaire des Restos du cœur, ces derniers battent un record d’affluence : le nombre de gens qu’ils aident ne cesse d’augmenter, y compris des salariés, qui commencent à devenir pauvres.

Une publicité qui passe en ce moment à la télévision vante les mérites des fruits et légumes, en recommandant d’en manger cinq par jour. Comment faire, lorsque l’on a du mal à boucler ses fins de mois ? J’ai rencontré, il y a quelques jours, des détaillants de fruits et légumes, qui m’ont soumis une proposition : faire bénéficier à ceux qui s’approvisionnent auprès de producteurs locaux des mêmes conditions qui sont faites aux producteurs vendant directement aux consommateurs. Le Gouvernement serait bien inspiré de prendre de telles mesures, qui viendraient en aide aux millions de nos concitoyens qui regardent cette publicité et constatent que le Gouvernement ne leur permet pas de suivre ses conseils (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR et du groupe SRC).

M. Jean Launay – M. Muet a fait une belle analyse macro-économique montrant la tendance de fond de la réduction du temps de travail. Vous ne cessez, depuis six ans, de nous infliger votre rengaine sur les 35 heures, comme si cela vous servait d’exutoire pour masquer les insuffisances de vos politiques. Nous assumons ce choix et les 400 000 emplois qu’il a permis de créer, et nous en dénonçons la mise en pièces progressive.

M. Michel Vergnier – C’est une bombe à retardement !

M. Jean Launay – La conjoncture est particulièrement difficile pour les Français ; le débat sur le pouvoir d’achat que nous vous avons imposé le démontre. Il est difficile également pour les collectivités locales, que vous asphyxiez par des transferts non financés et la remise en cause du pacte de croissance.

M. Muet a également souligné le déficit budgétaire, masqué par des recettes supplémentaires, en particulier le prélèvement sur EDF, ainsi que les diminutions de crédits dans des domaines vitaux pour nos concitoyens, comme le transport, le logement, les hôpitaux, la recherche. Il a relevé la prévision de croissance optimiste, et je m’étonne que M. Chartier se satisfasse aujourd’hui du 1,8 % de croissance affiché alors que les prévisions initiales étaient de 2,25 %. Enfin, il a montré que les inégalités s’accroissaient et qu’à cet égard, le projet de loi TEPA de cet été était votre péché originel. Pour toutes ces raisons, et parce qu’il est plus honorable de reconnaître son erreur plutôt que de persister dedans, je vous invite à voter cette exception d’irrecevabilité (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR).

M. Charles de Courson – Notre groupe ne votera pas cette exception d’irrecevabilité pour trois raisons. Tout d’abord – et c’est classique –, j’ai eu beau chercher dans la présentation de notre collègue le début du commencement d’un motif d’inconstitutionnalité, je n’ai rien trouvé de tel.

Ensuite, il a dénoncé un déficit excessif ; c’est reprendre nos arguments, avec cette différence que nous avons formulé des propositions de réduction des dépenses…

M. Michel Vergnier – Vous voterez pourtant ce collectif, et pas nous !

M. Charles de Courson – …tandis que les vôtres ne feraient qu’aggraver le déficit. Le doublement de la prime pour l’emploi coûterait 3 milliards. La TIPP flottante est devenue inadaptée, compte tenu de la chute de la consommation du fioul domestique – 20 % – ou de l’essence – 4 %. Cela n’a rien d’étonnant, compte tenu de l’élasticité-prix de la consommation. On a donc une chute des rentrées de la TVA sur les carburants – 600 millions –, soit au total, avec la TIPP, environ un milliard de perte. Le « modèle Migaud », selon lequel l’instauration de la TIPP flottante était compensée par l’enrichissement de l’État grâce à la TVA, n’est donc plus d’actualité.

En outre, vous escomptez des recettes supplémentaires de la taxation du kérosène, alors que la convention de Chicago l’interdit, sauf pour les vols intérieurs ! Nous en avons déjà abondamment discuté au sein de la commission des finances. Êtes-vous prêts, pour quelque cent millions de plus, à accroître le prix de revient des carburants pour les vols à destination de l’outre-mer ? Je doute que M. Lurel vous suive dans cette voie ! Soyons raisonnables. La seule solution consiste à soumettre l’émission de CO2 à des quotas, comme le souhaitent nos voisins, notamment au Parlement européen, quelle que soit leur sensibilité politique (« Très bien ! » et applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

L’exception d’irrecevabilité, mise aux voix, n’est pas adoptée.

QUESTION PRÉALABLE

M. le Président - J’ai reçu de M. Jean-Claude Sandrier et des membres du groupe de la Gauche démocrate et républicaine une question préalable déposée en application de l’article 91, alinéa 4, du Règlement.

M. Jean-Claude Sandrier – Il est pour le moins cocasse que ce collectif budgétaire se contente de proposer des recettes éculées auxquelles nos concitoyens ne croient plus en lieu et place des mesures relatives au pouvoir d’achat – principale préoccupation des Français – annoncées par le Président de la République, mais dont l’examen est reporté à la fin du mois ! Ce seul argument devrait suffire à montrer que ce texte n’a pas lieu d’être débattu.

En outre, nous constatons dans nos circonscriptions que la vie est de plus en plus difficile pour la majorité des Français, victimes de l’inflation, du recul des services publics, du dépeçage organisé des dispositifs garantissant la solidarité, notamment la protection sociale, au détriment des couches modestes mais aussi, de plus en plus, des classes moyennes. « Les espoirs d'amélioration du niveau de vie se sont évanouis en six mois », titraient ainsi Les Echos vendredi dernier. L’indicateur de mesure du moral des ménages est tombé à l’un de ses niveaux les plus bas en vingt ans. Pourtant, si les Français ont élu le Président de la République, ce n’est pas, comme vous ne cessez de le répéter, pour qu’il applique toutes ses propositions mais bien parce qu’ils l’ont cru lorsqu’il leur a promis de mettre fin à la précarité et de leur donner du pouvoir d’achat !

Pourtant, alors que la France, que vous gouvernez depuis plus de cinq ans, est, à en croire le Premier ministre, en faillite, et alors que le Président de la République confirme que les caisses sont vides, vous vous êtes empressés, dès le mois de juillet, de priver le budget de l’État de 15 milliards de recettes, dont 70 % ne bénéficieront, selon tous les économistes, qu’à 20 % des Français, aggravant donc le déficit sans profiter à la croissance, à l’emploi ni à la valorisation du travail.

Voilà pourquoi, lorsque l’on demande qui payera la facture, notre rapporteur général s’empresse de répondre qu’il faudra certes continuer de maîtriser la dépense publique, mais surtout entreprendre la réforme de l’assurance maladie et des régimes de retraite. De fait, vous accordez aux plus riches, grâce au bouclier fiscal, 800 millions, soit exactement le montant des recettes que vous escomptez des franchises médicales, c’est-à-dire de la taxation des malades et des personnes âgées ! Quelle conception de classe caricaturale ! Si vous vouliez financer les soins destinés aux personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer, il suffisait de ne pas baisser l’ISF !

De même, la remise en cause de l’exonération de redevance audiovisuelle dont bénéficiaient les personnes âgées est scandaleuse et la mesure destinée aux résidents des maisons de retraite que vous vous êtes empressés d’adopter face au tollé général ne la compense que très partiellement.

Ainsi, votre politique expose le pays à une régression sociale inédite : en cinq ans, la précarité a augmenté de 20 % ; les emplois précaires ou à temps partiel concernent désormais 31 % des salariés, qui aimeraient, eux, travailler plus pour gagner plus ; le nombre de retraités qui vivent en dessous du seuil de pauvreté a augmenté de 63 % et le nombre de ménages surendettés a augmenté de 15 %. Martin Hirsch lui-même le dit : dans l’indifférence générale, la France vient d’atteindre un taux de pauvreté inégalé en trente ans, soit 12,1 %, heureusement en-deçà du chiffre britannique ! L'augmentation de la fréquentation des Restos du Cœur et du nombre d’appels adressés au Secours Catholique et au Secours Populaire en témoigne. Et vous prétendez moderniser et réformer, par des mesures qui ne sont que la pâle copie d'un modèle anglo-saxon qui s'est fait le champion de l'explosion des inégalités !

« Le grave déséquilibre de la répartition de la richesse s’accroît chaque jour », écrit Susan George dans La Pensée enchaînée. « Le sommet de la pyramide est fait d’or pur, la base de fer blanc ! » En 2005, les revenus du PDG le mieux payé des États-Unis égalait celui de 7 443 travailleurs moyens – contre 127 en 1968 –, ou de 23 282 ouvriers percevant le salaire minimal – contre 239. La France comme l’Union européenne connaissent la même spoliation des richesses, mise au jour par plusieurs études.

Or, en déclarant hier, lors des questions au Gouvernement, que le pouvoir d'achat des Français dépend de la croissance, le Premier ministre a oublié l’essentiel : c’est d’abord de la répartition des fruits de la croissance qu’il résulte ! Ainsi Camille Landais, de l'École d’économie de Paris, a-t-il montré qu'entre 1998 et 2005 les salaires ont progressé de 5,3 %, les revenus fonciers de 13,2 %, les revenus des capitaux de 30,7 % et ceux des capitaux des entreprises du CAC 40 de plus de 80 %. En somme, vous avez choisi de consacrer l’essentiel des richesses produites à la rémunération du capital et non du travail ! Ayez au moins le courage d'assumer ce choix.

Comment peut-on prétendre revaloriser le travail tout en refusant de modifier les modalités de partage de la valeur ajoutée ? Car c'est à l’aune du rapport entre les salaires et les profits ou la rémunération des dividendes que se mesure la valeur véritablement accordée au travail. Ce mot, comme celui de compétitivité, vous sert simplement d'alibi pour faire battre de nouveaux records à la rentabilité des capitaux. Les orientations budgétaires de la précédente législature, comme le « paquet fiscal », comme les mesures annoncées sur le pouvoir d’achat, le confirment : entre les actionnaires et les salariés, entre les rentiers et les travailleurs, vous avez choisi les premiers !

À nos yeux, la richesse de notre pays, comme de l’ensemble de l'Union Européenne, devrait être mieux employée, au service des besoins humains et sociaux, car c’est dans les capacités des hommes et des femmes que réside la richesse, et non dans l'exigence de rentabilité démesurée du capital.

Mais, face à l’échec de votre Gouvernement – le même depuis plus de cinq ans, mais dans le désordre – et à la dégradation du pouvoir d'achat de la majorité de nos concitoyens, vous vous contentez de proposer une série de mesures ponctuelles, partielles, donc inefficaces, tentant un extraordinaire tour de passe-passe : faire croire aux Français qu’ils vont toucher davantage d'argent, s’agissant de celui qu'ils ont acquis grâce à la participation ou aux RTT ou de celui qu’ils gagneront en travaillant le dimanche – au détriment des sans-emploi et des salariés à temps partiel !

Au point où vous en êtes, pourquoi ne pas aller jusqu’à remettre en cause le décret de Louis Blanc instituant en 1848 la journée de travail de 10 heures ? Mme Parisot n’en est pas loin, elle qui veut se défaire de la durée légale du travail pour que les salariés puissent travailler plus en gagnant moins ! Ou pourquoi ne pas supprimer purement et simplement une ou deux de ces semaines de congés payés qui posaient tant de problèmes aux organisations patronales en 1936 ? En la matière, l’inventivité est sans limites !

Quant aux sanctions qui menaceraient les exonérations de cotisations sociales des entreprises qui n’ouvriraient pas de négociations salariales pour 2008, elle sont purement virtuelles : ouvrir une discussion ne coûte pas cher !

Mais les Français ne se laisseront pas prendre au tour de passe-passe par lequel vous cherchez à leur faire croire que vous leur restituez une part de richesse, comme vous pourriez effectivement le faire en augmentant les salaires et en rééquilibrant la répartition des richesses en faveur du travail et au détriment du capital.

Nous rentrerions alors dans un cercle vertueux de croissance, d’emploi et de pouvoir d’achat. Vous préférez que les Français se payent eux-mêmes un mince et temporaire rattrapage de pouvoir d’achat, avec les effets pervers que l’on connaît. Ils payeront en plus les conséquences de la vente de notre patrimoine et les allègements supplémentaires de cotisations sociales, qui devront bien être compensés à la sécurité sociale. Ce collectif intègre du reste déjà des dépenses liées à l’exonération de cotisations sociales sur les heures supplémentaires. Cette mesure est profondément injuste : elle tend à opposer les salariés entre eux et jette la suspicion sur ceux qui sont privés d’emploi. Quant à la fusion de l’ANPE et de l’UNEDIC, elle pourrait remettre en cause le paritarisme et accentuer la répression des chômeurs, en les obligeant à accepter un emploi à mille lieues de leurs qualifications. Rappelons que le nouveau mode de calcul des sans-emploi a déjà fait baisser d’un point le taux de chômage ! Et pendant que la chasse aux chômeurs bat son plein, des cercles avisés s’agitent pour trouver le moyen de dépénaliser la délinquance en col blanc. Quel symbole !

Il y a pourtant des mesures d'urgence à prendre : bloquer les loyers et contrôler les prix de l'immobilier et du foncier ; baisser de 10 % les prix de l’essence et du fioul en taxant les profits faramineux de Total – 12 milliards de bénéfice net en 2006, 10 milliards de janvier à septembre 2007 – et en baissant de 8 centimes la taxe d'État pour la ramener à la moyenne de l'Union européenne ; augmenter les salaires – une augmentation de 1 % des salaires, représente 9 milliards pour la sécurité sociale ; stopper la spéculation sur l'énergie et l'alimentation.

Pour financer ces mesures et bien d’autres, nous proposons de taxer les revenus boursiers au même taux que les salaires – ce qui rapporterait 13 milliards, soit l’équivalent du déficit de la sécurité sociale –, de prélever 0,5 % sur les actifs financiers – 17 milliards – de supprimer les exonérations de cotisations sociales qui ne servent pas à créer des emplois – 17 milliards selon la Cour des comptes –, d’annuler la partie du paquet fiscal réservée aux plus riches – 12 milliards – et de doubler l’ISF – 4 milliards.

Pour financer la sécurité sociale, nous proposons de taxer les stocks options – 3 milliards – et de rembourser la dette de l'État – ce qui est en cours. Rappelons que la dette patronale s’élève à un milliard, et que la création d’un million d'emplois – objectif à cinq ans du Président de la République – procurerait 15 milliards de recettes à la sécurité sociale.

Oui, l'argent coule à flots, pour reprendre la formule de Patrick Artus. En vingt ans, l'État a fait 450 milliards de cadeaux fiscaux – presque la moitié de la dette de la France ! Pendant ce temps-là, les dividendes ont été multipliés par neuf et le SMIC par deux !

Votre bouclier fiscal permet par exemple à Mme Meyer, héritière et actionnaire des Galeries Lafayette, de toucher un chèque de remboursement du Trésor Public de 7,7 millions. C'est indécent ! Cette somme, c’est 80 % de ce que l'État doit au conseil général du Cher au titre des dépenses du RMI !

Vous bradez les biens de la nation, avec le scandale du siège de l'Imprimerie nationale : vendu en 2003 à un fonds de pension américain dont M. Bush père est actionnaire pour 85 millions, ce bâtiment a été racheté par l'État en 2007 pour 376 millions… Et non contents de diminuer les recettes de l'État, vous vendez le patrimoine national à tour de bras : 16 milliards en 2006, aujourd’hui 4 milliards d'actions EDF. Chacun sait qu’il s'agit de remplir en urgence des caisses qui ont été vidées !

Oui, il y a de l'argent, beaucoup d'argent ! Il paraît que nos propositions le feraient fuir. Ce ne peut être que dans les paradis fiscaux, scandale de ce monde de prédateurs où la plupart des États laissent une « voyoucratie » financière agir à sa guise et blanchir l'argent de la drogue. Un tiers du PIB mondial passe chaque année dans ces paradis ; cet argent parasite nous coûte cher à tous. Et pendant ce temps, le Président de la République, qui s'est augmenté de 172 %, demande que l'on dépénalise les fraudeurs en col blanc ! Quel mépris I

La richesse de quelques-uns ne peut plus se faire au détriment du plus grand nombre. C'est le cœur même de notre organisation économique et sociale qui produit ces inégalités. Si le PIB mondial a doublé en valeur en seize ans, le montant des titres financiers, lui, a été multiplié par 4,5 ! Cette financiarisation du capitalisme a créé une véritable oligarchie financière qui dirige la plupart des groupes transnationaux. Ne pas lui mettre d'entraves, diviser les salariés dans une guerre économique où meurent les fantassins mais pas les officiers, c'est l'objectif du mini-traité européen. Si la démocratie était respectée, si le pouvoir n'avait pas peur du débat, ce mini-traité serait soumis à référendum. Chacun constaterait alors que les dispositions essentielles du traité constitutionnel rejeté le 29 mai 2005 y figurent encore. C'est ce que confirment Valéry Giscard d'Estaing et Angela Merkel.

C’est cette logique qui inspire ce projet et que nous entendons combattre. Et c’est malheureusement encore elle qui a inspiré les annonces faites la semaine dernière par le Président de la République. Elle aura les conséquences que l’on sait pour la majorité de nos concitoyens. Il n’empêche que nous allons discuter pendant trois jours de tout, sauf de cela. C’est pourquoi nous vous demandons de voter la question préalable, pour permettre un vrai débat sur les vraies questions que se posent les Français en matière de justice sociale, de pouvoir d'achat et de partage de la valeur ajoutée (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR et du groupe SRC).

M. Éric Woerth, ministre du budget – Nous n’avons pas la même vision des choses, Monsieur Sandrier… Vous avez employé des termes très forts, pour ne pas dire excessifs, et votre discours est passablement usé : c’est le même depuis quarante ans…

M. Jean-Claude Sandrier – Le vôtre a 150 ans !

M. Éric Woerth, ministre du budget – …Je le respecte, mais il a tout de même un goût de réchauffé…

Vous parlez des inégalités sociales. Il me semble que nous y apportons des remèdes – c’est pour cela que Martin Hirsch est entré au Gouvernement. Le revenu de solidarité active – RSA – qui va être expérimenté à partir de 2008 dans près de trente départements est à cet égard particulièrement intéressant. C’est peut-être plus compliqué comme approche, mais c’est aussi plus juste.

Je ne reviens pas sur vos propos sur l’emploi, le travail et le pouvoir d’achat : nous avons déjà eu ce débat à maintes reprises depuis le mois de juillet. La politique du Gouvernement a le mérite de la clarté et de la nouveauté : il s’agit d’accroître le volume de travail en France.

M. Jean-Claude Sandrier – Cela ne s’appelle pas nouveauté, mais régression !

M. Éric Woerth, ministre du budget – C’est dans cet esprit que nous nous sommes attaqués dans le PLFSS aux dispositifs de préretraite et de mise à la retraite d’office. Que ce soit sur les universités, le droit du travail ou la fusion de l’ANPE et de l’UNEDIC, notre objectif est toujours le même : permettre à la France de rattraper son retard de compétitivité. Il faut recréer un cercle vertueux. C’est ce que nous voulons faire, et je pense que vous pourriez adhérer à cette démarche (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Jérôme Chartier – Nous sommes habitués aux vieilles antiennes du parti communiste. Reconnaissons que M. Sandrier a fait son travail ! Le groupe UMP repoussera cependant la question préalable.

J’aimerais revenir sur le sujet de la redevance, qui pose le problème de fond des exonérations. La LOLF prévoit que celles-ci doivent être gagées. Dans la pratique, on a recours aux gages habituels tels que les droits sur le tabac, à moins que le Gouvernement ne lève purement et simplement le gage.

Toute exonération nouvelle est une contrainte budgétaire supplémentaire qui, à périmètre constant, aggravera le déficit. Il serait donc vraiment souhaitable qu’à l’avenir toute proposition d’exonération s’accompagne d’une proposition de réduction des dépenses à due concurrence. Il est en effet un peu démagogique de proposer des diminutions de recettes publiques, sans dire quelle mission de l’État on veut supprimer en contrepartie. Le Parlement ferait preuve de responsabilité et accomplirait un travail budgétaire de meilleure qualité s’il participait à l’effort du Gouvernement pour contraindre les dépenses et ne pas augmenter les prélèvements obligatoires. Il est un peu facile de proposer, comme par réflexe, des exonérations nouvelles gagées sur une augmentation des droits sur le tabac. Prenons toute la mesure des critères de convergence et de ce qu’implique la LOLF pour progresser. Le groupe UMP votera contre cette question préalable. C’est le meilleur moyen d’engager le débat comme vous le souhaitez (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Michel Vergnier – N’ayant pas voté la loi de finances initiale, nous ne voterons pas la loi de finance rectificative qui la complète, d’autant que votre logique est toujours la même depuis 2002, gouvernement après gouvernement, premier ministre après premier ministre. La loi de finances pour 2007 n’avait rien d’enthousiasmant. À vous entendre, elle allait relancer la croissance et le pouvoir d’achat. On voit ce qu’il en est aujourd’hui. Pour 2008, vous avez d’ailleurs dit qu’on ferait le point sur les six premiers mois. Personne ne souhaite votre échec : ce sont les Français qui en souffriraient. Cela ne nous empêche pas de défendre ce en quoi nous croyons, Monsieur Chartier. Nous répétons la même chose depuis 40 ans, dites-vous. Mais dans vos propos, je retrouve ceux des opposants à Martin Nadaud lorsqu’il défendait la loi sur les accidents du travail en 1891. Donc, pratiquons plutôt le respect mutuel.

Par ailleurs, la méthode utilisée est un peu curieuse. Nous votons une loi de finances rectificative, sachant qu’avant la fin de l’année nous voterons une nouvelle loi sur le pouvoir d’achat. Mais au fait, la fameuse loi TEPA de juillet ne portait-elle pas justement sur… le pouvoir d’achat ? À l’époque, après six ans de gouvernement, vous deviez quand même avoir pris la mesure du problème. Qu’est-ce qui vous a échappé ? Sans vouloir vous donner de leçon, il aurait mieux valu le traiter en une seule fois, cet été, avant la loi de finances initiale plutôt qu’après. Pour ces raisons, mieux vaut voter la question préalable. Mais si le débat se poursuit, j’espère que nous pourrons progresser.

La question préalable, mise aux voix, n'est pas adoptée.

M. Charles de Courson – Le Nouveau centre fera quatre remarques sur ce projet de loi de finances rectificative : nous approuvons une série de mesures qu’il contient ; mais la situation de nos finances publiques reste difficile ; de plus, un certain nombre de propositions faites par le Gouvernement peuvent être améliorées ; surtout, il est nécessaire d’aller plus loin dans la réduction des déficits.

Parmi les mesures que nous approuvons, il y a la clarification des relations entre l’État et d’une part la sécurité sociale, d’autre part la SNCF, que nous attendions depuis longtemps. En matière environnementale, citons aussi la pastille verte. Nous regrettons seulement que le dispositif ait été annoncé trop tardivement, et il faut prendre garde au traitement des voitures familiales et des véhicules utilisant des biocarburants ; nous apprécions également l’instauration d’une taxe sur les sacs en plastique et les sacs poubelles, défendue par le Nouveau centre. D’autre part, je salue la création d’un délit de flagrance fiscale et l’amélioration des relations entre l’administration et le contribuable. Sans doute faut-il fixer des délais de réponse identiques pour que ce dernier n’ait pas le sentiment que l’administration dispose de plus de temps que lui. Le texte a également le mérite de simplifier et d’harmoniser le régime fiscal du mécénat d’entreprise notamment en ce qui concerne le spectacle vivant.

Mais la situation des finances publiques demeure fragile. La réduction du déficit public n’est pas structurelle, elle est le fruit de quatre opérations non reconductibles : une diminution de 1,9 milliard de la contribution française au budget de l’Union européenne ; l’acompte de 923 millions sur les dividendes à verser par EDF pour 2007 ; 197 millions sur les passifs ferroviaires ; 100 millions pour les caisses de pension. Ces quatre éléments représentent 3,1 milliards, soit 80 % de la réduction affichée de 3,7 milliards du déficit.

Cette réduction pourrait être plus forte, en raison de deux opérations qui ne sont pas budgétisées. Il s’agit d’abord du versement de la soulte du service annexe d’amortissement de la dette de la SNCF. Les négociations sont en cours ; on peut en attendre entre 0,5 et 1,5 milliard. Ce montant doit aller intégralement au désendettement. Ensuite, la vente d’une petite partie du capital d’EDF a rapporté 3,7 milliards qui doivent être consacrés à l’investissement immobilier dans les universités. Mais aucun montage juridique précis ne permet de garantir qu’ils ne serviront pas à réduire le déficit de l’État. Il faut instituer d’urgence un tel montage, car ces sommes ne seront pas investies avant deux ou trois ans, étant donné la lenteur des opérations de construction et de rénovation.

Le Gouvernement a fait preuve de réalisme dans l’évaluation des recettes fiscales, sauf en ce qui concerne l’impôt sur les sociétés. La diminution de 538 millions du produit de la TIPP correspond bien à une baisse de consommation qui, sur les neuf premiers mois de l’année, atteint en volume 19 % pour le fuel domestique, 4 % pour l’essence et 2 % pour le gasoil. De même, la diminution de 193 millions sur le produit de l’impôt sur le revenu tient à l’augmentation de 250 millions de la PPE et pour 100 millions aux déductions pour les emplois à domicile. Quant à la TVA, sa diminution de 2,3 milliards est due pour un quart à la TVA sur les produits pétroliers, en baisse pour la première fois.

Reste le problème de l’impôt sur les sociétés. N’en espérez pas les 5,2 milliards qui figurent dans le projet, car les bénéfices des banques vont chuter à cause de la crise immobilière. En outre, nous ne verrons jamais la couleur du produit attendu de la hausse des prix pétroliers : une entreprise comme Total, par exemple, ne réalise que 5 % de ses bénéfices en France, où l’impôt sur les sociétés est de 33 %, alors que ses bénéfices mondiaux sont taxés à 55 %, les pays producteurs voulant naturellement capter la rente pétrolière. Tout au plus faut-il en espérer un milliard, et la baisse est à prévoir. En somme, il faut s’attendre à une baisse du produit de l’IS d’un à deux milliards.

J’en viens aux propositions du Gouvernement qu’il faut améliorer. Tout d’abord, la reprise du solde du budget annexe des prestations sociales agricoles prend en compte le déficit de 600 millions constaté à la fin 2004. Or, près de six milliards de dettes se sont accumulés depuis ! Comme d’autres, je propose l’intégration financière de la branche maladie – comme c’est déjà le cas depuis longtemps de la branche famille. Cette mesure n’aurait aucun impact sur les prestations et les cotisations. Il va de soi qu’elle ne ferait que transférer le déficit au régime général, mais elle aurait le mérite de ramener le déficit de la Mutualité sociale agricole à 1,4 milliard. Je sais que vous y êtes favorable ; il suffirait de mieux expliquer qu’elle ne remet pas en cause l’organisation administrative de la MSA.

Ensuite, le PASS foncier est, en l’état, une véritable usine à gaz. On ne peut pas, s’agissant du logement collectif, distinguer ainsi entre nue propriété et usufruit !

M. Gilles Carrez, rapporteur général – En effet : à terme, ce sera ingérable.

M. Charles de Courson – Oui, et très coûteux.

En matière de défiscalisation des biocarburants, je regrette qu’un amendement malvenu ait été voté en loi de finances initiale au Sénat alors que, l’Assemblée ayant la priorité institutionnelle, nous aurions dû nous en saisir d’abord et le repousser.

S’agissant du tabagisme, chacun sait que ce sont les petits bars-tabac qui posent problème. Pourquoi ne pas imiter l’Espagne, qui distingue entre établissements de plus ou moins 100 mètres carrés, au lieu d’appliquer à tous la même mesure au risque d’en déstabiliser certains ?

Par ailleurs, il me semble plus prudent de reconduire le plafonnement de la taxe ADAR en 2008, afin de mieux prendre en compte les recommandations du rapport Bourdin.

Nous proposerons aussi un amendement assimilant les associations d’utilité publique aux fondations pour ce qui est de leur éligibilité au système du mécénat.

Le groupe Nouveau centre déplore qu’une nouvelle niche concernant les objets classés soit créée, sans être plafonnée, de surcroît. Son montant est certes négligeable, mais le principe déroge à la logique générale de notre effort.

Enfin, notre groupe souhaite faire davantage en matière de réduction des déficits. Ainsi, le groupe de travail sur les niches fiscales vous présentera bientôt ses propositions auxquelles, je l’espère, vous adhèrerez tous, tant on ne peut défendre la progressivité de l’impôt tout en préservant de telles anomalies.

M. Didier Migaud, président de la commission Tout à fait !

M. Charles de Courson – On pourra également faire des économies via la régulation de certaines exonérations de charges patronales excessives. Enfin, nous proposons la mise en place d’un pacte de stabilité avec les collectivités locales, car on ne peut demander de gros efforts à l’État tout en continuant à imposer de tels transferts de charges aux collectivités.

Le groupe Nouveau centre votera donc en faveur de cette loi de finances rectificative, tout en donnant rendez-vous au Gouvernement pour l’orientation budgétaire de 2009, car le ministre l’a dit en commission : le plus dur reste à faire !

M. Jérôme Chartier – Ce projet de loi de finances rectificative n’est pas classique, en ce qu’il ne se contente pas de valider les orientations de la loi de finances initiale, mais comporte de nouvelles mesures qui illustrent le volontarisme budgétaire du Gouvernement. Réhabiliter la valeur travail, comme s’y est engagé le Président de la République, passe notamment par la lutte contre la fraude. En effet, il est inadmissible que certains s’affranchissent de leurs obligations vis-à-vis de la collectivité !

M. Patrick Roy – Surtout les plus pauvres, selon vous !

M. Jérôme Chartier – Le présent texte prévoit donc de constater et de sanctionner la fraude dès qu’elle se réalise en créant un procès-verbal de flagrance fiscale pour bénéfice dissimulé, assortie d’une possibilité de saisie conservatoire et d’une amende de 5 000 à 20 000 euros. Il prévoit également de proroger la durée du contrôle effectué dans les PME en cas de comptabilité irrégulière. Voilà des mesures d’égalité !

L’opposition ne cesse de faire accroire que nous ne favorisons que les plus riches – sans préciser ce que cet adjectif signifie, d’ailleurs. Au contraire, jour après jour, nous prouvons l’inverse à nos concitoyens, qui ne sont pas dupes ! Ainsi, le présent projet instaure un allégement de fiscalité locale sur les résidences principales de personnes choisissant de s’installer en maison de retraite. Vous voyez que le Gouvernement est attentif à réduire les charges qui pèsent sur les personnes âgées pour augmenter leur pouvoir d’achat !

Dans un souci d'équité, il nous est proposé, d'une part, de maintenir les allègements de taxe foncière et de taxe d'habitation en faveur des personnes de condition modeste qui, contraintes d’aller en maison de retraite, conservent néanmoins la jouissance exclusive de leur ancienne résidence principale et remplissent toujours les conditions requises ; d'autre part, d'ouvrir ces allègements aux personnes qui entrent en maison de retraite et subissent une baisse importante de leur revenu. Par ailleurs nous reviendrons à l’occasion de la discussion des amendements sur le problème de la redevance audiovisuelle.

Mais l’État se doit aussi d'être aux côtés de ceux qui accèdent à la propriété de leur logement. C’est pourquoi il nous est proposé d'étendre aux constructions de logements bénéficiant d'un Pass-foncier les avantages fiscaux dont bénéficient les opérations d'accession à la propriété financées par un prêt social location accession – PSLA.

Enfin, ce texte contient diverses mesures pragmatiques, notamment la création d’un taux forfaitaire de remboursement de la TIPP pour les transporteurs routiers de marchandises et de voyageurs et l’adaptation du dispositif de reprise sur stocks à la régionalisation de la TIPP. D’autres mesures visent à faciliter la vie des PME, comme le transfert du recouvrement de la cotisation minimale de taxe professionnelle à la direction générale des impôts.

Bref, ce projet s'inscrit dans la logique de la politique du Gouvernement pour libérer le travail et soutenir le pouvoir d'achat. Je ne doute pas que les amendements dont nous allons débattre vont l’enrichir encore, et le groupe UMP, bien entendu, le votera ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Thierry Carcenac – Je centrerai mon propos sur les dispositions relatives à la lutte contre la fraude fiscale.

Nous ne pouvons que les approuver, mais l'amplification de la fraude et l'évasion fiscales, liées à l'internationalisation et à la dématérialisation des échanges commerciaux et financiers – et qui sont tout aussi attentatoires à notre pacte social que les fraudes aux prestations et aux cotisations sociales – conduit à s’interroger sur les instruments dont dispose l’administration. Les derniers travaux parlementaires sur la fraude fiscale sont ceux de MM. Courson et Léonard en 1996 et de M. Brard en 1998 et en 1999 ; ils avaient ouvert des pistes, mais depuis, l'administration s'est modernisée tant dans ses structures que dans ses méthodes. Nous devrions nous intéresser davantage aux conséquences de la mondialisation, plutôt que de simplement penser à baisser les impôts pour s'aligner sur le moins-disant fiscal. Il y a d’ailleurs un décalage entre le discours sur la fatalité de la concurrence fiscale et la volonté d'harmonisation fiscale, notamment au niveau européen.

La fraude à la TVA représenterait, selon le Conseil des prélèvements obligatoires, entre 7 et 12 milliards. Plus d'un tiers des remboursements concerneraient des entreprises exportatrices, et ces remboursements augmentent d'année en année : il sont passés de 36 milliards, soit 22 % de la TVA brute collectée en 2005, à 42 milliards en loi de finances rectificative pour 2007, soit plus de 24 % de la TVA brute. Ne pourrait-on engager un contrôle plus ciblé au niveau de la Direction générale des entreprises, qui collecte près de 36 % de la TVA et traite 43 % des remboursements ?

Enfin, la notion d'évasion fiscale étant encore plus incertaine que celle de fraude fiscale, ne serait-il pas possible de profiter des travaux d'informatisation en cours aux douanes pour établir une coordination avec les autres directions du ministère, à commencer par la direction générale des impôts ? Le contrôle fiscal des opérations internationales et intracommunautaires est en effet plus que jamais nécessaire.

Pour conclure, je veux souligner que si la maîtrise des coûts est sous-jacente dans les opérations de restructuration des services, tout emploi réaffecté au contrôle fiscal « rapporte » : dans les futurs contrats pluriannuels de performances, une partie des gains d'efficacité devrait se traduire par des redéploiements de personnel en faveur des opérations de contrôle fiscal (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR).

M. François de Rugy – Ce projet est une nouvelle occasion de débattre de la politique budgétaire et fiscale de ce gouvernement, et plus généralement de s’interroger sur sa politique économique – si tant est qu’il en ait une ! Nous en examinerons les principales dispositions demain, jour de la Saint-Nicolas. Peut-être aurait-il fallu attendre cette date pour décider la fameuse augmentation de 172 % du salaire du Président de la République ! Quoi qu’il en soit, l’économie française, elle, n’est vraiment pas à la fête. Tous les indicateurs sont au rouge, et au lieu de répéter sans cesse la même chose depuis le mois de juillet, vous auriez dû adapter votre politique au contexte mondial et européen car beaucoup d’ingrédients sont réunis pour que la France s’enfonce dans la stagnation, voire entre en récession.

La croissance est plus faible que vous ne l’aviez prévu, et ce sera sans aucun doute également le cas l’année prochaine. À la crise financière américaine s’ajoute l’évolution du cours de l’euro par rapport au dollar : fallait-il attendre qu’on atteigne 1,50 dollar pour 1 euro pour reconnaître qu’il y avait un problème, comme la ministre de l’économie l’a fait pour la première fois cet après-midi ?

À la hausse continue et prévisible du prix du pétrole s’ajoute celle du prix des matières premières, à celle des taux d'intérêt la hausse du déficit de l'État. Plus inquiétante encore est la hausse continue du déficit du commerce extérieur depuis que vous gouvernez, mais on ne vous entend guère sur ce sujet. Il aurait pourtant été intéressant de connaître l’opinion de Mme Lagarde, précédemment chargée de ce secteur. Et que dire des délocalisations, qui touchent maintenant des entreprises de haute technologie comme Alcatel ou Airbus, sans parler de l'industrie automobile, qui délocalise de façon rampante, en faisant appel à des fournisseurs de pays à bas coûts de main d’œuvre, ou en y fabriquant certains modèles ? Ces délocalisations se développent parallèlement à l'ouverture incontrôlée des marchés européens aux produits en provenance de pays qui ne respectent pas les critères minimaux d'une concurrence loyale.

Face à cette situation qui inquiète et qui finit par détériorer le moral des entrepreneurs et des salariés, vous n’avez rien trouvé d'autre que de désarmer l'État par des largesses fiscales aussi injustes qu'inefficaces. J'ai lu ce matin dans un journal de toute confiance – Le Figaro – que Mme Lagarde serait la ministre préférée de la mère du Président de la République ; je doute que la politique qu’elle mène fasse d’elle la ministre préférée des Français !

Le déficit du budget de l'État baisse certes de 3,7 milliards par rapport à la prévision faite en loi de finances initiale, mais il n'y a vraiment pas de quoi s'enthousiasmer quand on voit que cette réduction est due principalement à la diminution du prélèvement des recettes au profit de l'Union européenne et à l'acompte versé par EDF sur les dividendes. De plus, annulant ce léger mieux, le déficit se creusera à nouveau en 2008 sous l’effet du bouclier fiscal, qui consiste à rendre de l'argent aux contribuables qui ont les plus gros revenus et les plus gros patrimoines. Et qu'en sera-t-il si la croissance est en baisse en 2008, et les recettes moins bonnes que prévu ? Rien de tout cela ne semble avoir été anticipé.

Je connais votre réponse : « Nous remettons la France au travail »… comme si elle était en vacances depuis plusieurs années, comme si les salariés se tournaient les pouces dans les entreprises !

M. Jean-Claude Sandrier – Quel mépris pour les salariés !

M. François de Rugy – En effet ! Pourtant, les salariés français sont les plus compétitifs d’Europe – ce qui n’est pas sans conséquence sur leur santé.

Vos propositions ne touchent en réalité qu'une part infime des salariés et des entreprises, parce que la défiscalisation des heures supplémentaires ne profitera qu’aux salariés ayant de hauts revenus et parce que seules les entreprises dont l’activité s’accroît peuvent proposer à leurs salariés de faire des heures supplémentaires. De plus, le dispositif est si complexe que les entreprises s'en méfient. La circulaire d'application est, m’a-t-on dit, longue de vingt-six pages, ce qui crée de l'insécurité juridique dans les rapports entre les entreprises et leurs salariés. Alors, à quoi bon dépenser tant d'argent pour un effet d'aubaine qui, loin d’induire des créations d'emplois, différera les embauches – tout comme la suppression des jours de RTT annoncée par le Président de la République.

L’heure de vérité approche. On voit que le Gouvernement est dans une impasse et qu’il ne sait plus comment financer les quinze milliards de cadeaux fiscaux promis cet été aux plus riches. Le rapporteur général et M. de Courson ont eu beau multiplier les mises en garde, elles ont été ignorées dans la torpeur de l’été. Le résultat en est que l’on en arrive à faire payer la redevance audiovisuelle à partir de 2008 aux personnes âgées de plus de 65 ans qui ne payent pas l’impôt sur le revenu, alors qu'elles en étaient jusqu'à présent exonérées. Je sais que cette mesure a été votée il y a plusieurs années par votre majorité. Mais M. Carrez le reconnaît lui-même : dans le contexte de tension sur le budget de l'État, on en est à 100 millions près, que l’on trouve dans la poche de nos concitoyens les plus modestes après avoir décidé d'accorder près d'un milliard aux plus riches, par le biais du bouclier fiscal. C’est véritablement choquant.

M. Jean-Claude Sandrier – C’est ce que l’on appelle la droite !

M. François de Rugy – Le temps me manque pour aborder la question des collectivités territoriales, sinon pour dire que les mesures prévues ne sont pas à la hauteur des problèmes recensés.

J’en viens, en conclusion, à la proposition de création d’un système de bonus-malus pour les véhicules selon leur niveau de pollution. Sur la forme, il est assez surprenant d’apprendre par la presse que la disposition sera soumise au Parlement par un amendement gouvernemental de dernière minute. Sur le fond, c’est un petit pas intéressant, mais il faudra aller beaucoup plus loin, puisque il a été prévu lors du Grenelle de l’environnement que la taxe sur les véhicules polluants comme la prime pour les véhicules les plus sobres seraient perçues ou versées tous les ans. J'espère que nous y reviendrons dans un autre texte, comme pour le pouvoir d'achat, car nous avons beaucoup d'autres mesures à proposer. Les idées ne manquent pas – ce qui manque, ce sont de bonnes décisions de la part de la majorité (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR et du groupe SRC).

M. Victorin Lurel – Il y a peu, la terre a encore tremblé en Martinique et en Guadeloupe – nouvelle réplique de la grande secousse sismique ressentie jeudi dernier. À la suite de ce séisme, M. Estrosi a annoncé, il y a deux jours, l’application du plan séisme aux Antilles, que le précédent gouvernement avait adopté, et proposé d’y allouer une première tranche de crédits de 350 millions. Fort bien, mais sur quel budget ces crédits seront-ils prélevés ? En Guadeloupe seulement, 1,5 milliard serait nécessaire, sur dix ans, pour mettre nos 370 bâtiments publics aux normes antisismiques, et sans faire d’excès, le coût – considérable – des études étant exclu. Évidemment, il serait déjà bien de pouvoir disposer de 350 millions, mais des précisions sont nécessaires sur ce plan, son application et son financement. J’aimerais en effet savoir ce que le Gouvernement entend par « solidarité nationale ».

Pourquoi cela ? On s’en souvient, le cyclone Dean a durement frappé les Antilles le 17 août dernier, faisant des dégâts évalués à 500 millions par le Gouvernement, qui a annoncé, en octobre, le déblocage de 61 millions. Mais l’analyse attentive du décret d'avance que l'article 13 de ce projet nous propose de ratifier indique que les 61  millions en question sont, en fait, des autorisations d'engagement, et que les crédits de paiement ne sont en réalité que de cinquante millions. Plus grave, cette ouverture de cinquante millions de crédits sur le budget 2007 de l'outre-mer est compensée par une annulation de 61 millions des crédits du programme « Condition de vie outre-mer » et du programme « Emploi outre-mer ». Au total, pas un euro supplémentaire n'est donc affecté aux Antilles pour réparer ces dégâts. Autrement dit, on prend aux plus démunis pour donner aux sinistrés ! C’est une bien curieuse conception de la solidarité nationale.

À titre de comparaison, je rappellerai que pour faire face aux crises sanitaires du chikungunya à La Réunion et de la grippe aviaire en métropole, 140 millions avaient été débloqués, qui avaient été prélevés sur les crédits alloués à quatre-vingt-sept programmes différents ! Dans ces cas, c’est bien la solidarité nationale qui s’est exercée. Dans son rapport spécial consacré à la régulation budgétaire en 2007, la Cour des comptes a estimé que les crédits alloués aux îles sinistrées après le passage du cyclone Dean auraient dû être imputés sur la dotation prévue pour les dépenses exceptionnelles et accidentelles. Au lieu de cela, le Gouvernement a choisi une voie qui affectera la conduite des politiques publiques en Guadeloupe et en Martinique : aider à réparer les dégâts causés par le cyclone conduira à supprimer 4 300 contrats aidés !

Nous sommes très déçus, surtout après la visite – fort appréciée – de M. Estrosi, et surtout celle du Premier ministre. Le secrétaire d’État m’a reçu ce matin en me disant que 40 millions figuraient dans le budget ; mais il ne s’agit là que d’arriérés dus par l’État. On est loin du compte.

Enfin, je voudrais formuler quelques propositions pour améliorer le pouvoir d’achat en outre-mer. Rien n’y est fait pour ramener à un niveau raisonnable les taux d’intérêt pratiqués par les banques, lesquels ne peuvent nullement s’expliquer par la prime de risque. En ce qui concerne les prêts bonifiés, par exemple, les banques, alors qu’elles ne sont que les mandataires de l’État, pratiquent malgré tout des taux exorbitants.

En ce qui concerne le prix des carburants, j’ai interpellé Mme Lagarde sur les pratiques asymétriques de la société anonyme de la raffinerie des Antilles, qui détient chez nous un monopole et bénéficie de prix administrés : si l’augmentation des cours sur les marchés internationaux est immédiatement répercutée sur les consommateurs, leur diminution ne se traduit en revanche par aucun effet tangible pour ceux-ci, alors même que cette société a vu ses marges augmenter de 12 % l’an dernier. Son prix de vente est fixé dans un face-à-face opaque entre Bercy et les services de l’État, sans que les collectivités locales, ni les associations de consommateurs, ne soient présentes.

J’évoquerai également la ristourne de fin d’année, une autre forme de marge arrière. Dans ma région, nous avons permis aux grossistes, en baissant le droit de mer de 7 % à 5 %, d’encaisser 5 millions. Sans demander à revenir à une économie administrée, j’aimerais davantage de contrôle.

Enfin, il y a une véritable urgence à combler la fracture numérique en outre-mer. Le pouvoir d’achat, ici comme chez nous, il ne faut pas en parler ; il faut l’augmenter ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR)

M. Hervé Mariton – Il convient d’approuver ce projet de loi de finances rectificative en raison tant de son contenu que de la clarté des signaux qu’il envoie. J’ai eu l’occasion de dire, dans la discussion sur le projet de loi de finances pour 2008, à l’unisson avec le rapporteur général, combien il était dommage que l’effort de réduction du déficit ne soit pas plus important, et qu’il faudrait améliorer cela en exécution. Aussi nous félicitons-nous de la qualité de l’exécution en 2007 : le déficit est de 3,7 milliards inférieur au montant prévu par la loi de finances initiale ; c’est un progrès, même si les résultats sont légèrement inférieurs à ceux de l’exécution de 2006, où le gain de gestion était de près de 5 milliards. En tout état de cause, ces chiffres sont de bon augure et doivent nous encourager à persévérer vers l’objectif de déficit stabilisant. Telle est la première vertu de ce collectif.

Sa seconde vertu est qu’il nous rappelle un certain nombre de réalités budgétaires. Il nous montre, en premier lieu, que les estimations de la loi de finances initiale pour 2007 étaient solides, contrairement à ce que prétendait l’opposition.

M. Michel Vergnier – On a vu le résultat !

M. Hervé Mariton – Les critiques de l’opposition étaient infondées.

M. Patrick Roy – Elles étaient justifiées !

M. Hervé Mariton – L’opposition avait tort, et 2008 lui donnera tort à nouveau.

En revanche, ce collectif montre aussi la fragilité de certaines recettes, comme la fiscalité des produits pétroliers. Au 30 septembre, une perte de 654 millions était enregistrée par rapport aux prévisions initiales…

M. Henri Emmanuelli – Ce n’est pas bon signe !

M. Hervé Mariton – …et une perte de 400 millions par rapport aux estimations de TVA. Ceci nous donne toutefois l’occasion de montrer que l’État ne fait pas de l’argent sur le dos de nos concitoyens, qu’il n’y a pas de cagnotte, et que s’il y a matière à agir, ce n’est pas en distribuant des recettes supplémentaires dont l’État ne dispose pas. Nous ne sommes pas dans une logique de cadeaux de Noël.

M. Patrick Roy – Le bouclier fiscal, c’est Noël en été !

M. Hervé Mariton – Nous sommes dans une logique de croissance et d’enrichissement de la France, pour tous les Français.

Ce collectif nous rappelle aussi la nécessité d’inscrire les dettes. Eurostat a confirmé ce que nous disions au sein de la Mission d’évaluation et de contrôle, à savoir qu’une dette, même si elle n’est ni tout à fait de la SNCF, ni tout à fait de l’État, doit bien être inscrite quelque part. Le collectif en prend acte, avec un service annexe de l’aménagement de la dette ferroviaire à hauteur de 8,2 milliards. Cela facilite d’ailleurs l’écriture du budget 2008, puisque s’il y a, dans l’affaire, un peu plus de dettes, c’est au bout du compte un peu moins de dépenses.

M. Henri Emmanuelli – Tout va très bien !

M. Hervé Mariton – Ce collectif nous rappelle également la nécessité de la prudence dans l’évolution des dépenses. Le rapporteur général, avec le tact qui le caractérise, a souligné qu’autant nous étions attachés au principe selon lequel les recettes supplémentaires doivent être affectées à la réduction du déficit, autant ce principe pouvait connaître des aménagements dans le cas de dépenses justifiées, comme celles qui encouragent nos concitoyens à travailler plus pour gagner plus (« Ah ! » sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR). C’est pourquoi le principe n’a finalement pas été inscrit dans la loi organique. Cependant, il ne faut pas que cette souplesse encourage de mauvaises habitudes. Dans le « Dialogue des Carmélites », la mère supérieure dit : « Ce n’est pas la règle qui nous garde, c’est nous qui la gardons ». Il est important de garder cette règle de bonne affectation des recettes supplémentaires, en faisant preuve de discipline.

La ministre de l’économie a évoqué en commission l’idée d’affecter l’intégralité des cessions de participations de l’État au désendettement de l’État. D’un autre côté, les cessions des parts de sociétés concessionnaires d’autoroutes avaient permis de financer des infrastructures qui n’auraient pu l’être autrement. Aussi, le principe d’affecter au désendettement les recettes de cession des parts d’EDF pourrait être aménagé lui aussi, à condition que ce soit pour financer des dépenses d’avenir, comme des infrastructures, comme je l’avais suggéré, ou comme la recherche. En Finlande, j’ai demandé à mes interlocuteurs quelle était la clé du redressement de leurs finances publiques. Ils évoquèrent deux raisons : la connaissance des causes des difficultés vécues par la Finlande et la poursuite, pour y remédier, d’un petit nombre de politiques publiques, très concentré, dont la recherche, en distinguant celle-ci – ce qui n’est guère politiquement correct, ni démagogue – de l’enseignement supérieur.

S’il est légitime de consacrer davantage d’efforts à l’enseignement supérieur, nous devons veiller à ce que la cession d’une partie de notre patrimoine public permette effectivement de véritables dépenses d’avenir dans ce domaine, mais aussi dans celui de la recherche ou des infrastructures.

M. Henri Emmanuelli – Alors, c’est l’absolution ?

M. Hervé Mariton – En somme, le texte témoigne d’une bonne exécution et nous rappelle aux règles de bon sens que nous nous sommes données (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Henri Emmanuelli – C’est l’absolution !

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance, qui aura lieu ce soir, à 21 heures 30.

La séance est levée à 19 heures 45.

La Directrice du service
du compte rendu analytique,

Marie-Christine CHESNAIS

© Assemblée nationale