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Assemblée nationale

Compte rendu
analytique officiel

Séance du mardi 18 décembre 2007

3ème séance
Séance de 21 heures 30
87ème séance de la session
Présidence de M. Bernard Accoyer

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La séance est ouverte à vingt et une heures trente.

POUVOIR D’ACHAT (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion, après déclaration d’urgence, du projet de loi pour le pouvoir d’achat.

EXCEPTION D’IRRECEVABILITÉ

M. le Président – J’ai reçu de M. Jean-Marc Ayrault et des membres du groupe SRC une exception d’irrecevabilité déposée en application de l’article 91, alinéa 4, du Règlement.

M. Jérôme Cahuzac – J’ignore si c’est l’étrange lueur qui tombe de cette coupole, ou bien si c’est la fin de l’année qui donne l’impression que les jours fuient en se dilatant, mais il me semble que cela fait déjà longtemps que nous avons voté une loi en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat. Présentée par Mme Lagarde comme un texte décisif, la loi TEPA devait régler toutes ces questions. Il s’agissait pour vous d’appliquer une promesse consentie à l’occasion de vos deux campagnes électorales victorieuses, mais aussi de susciter un choc de confiance et de croissance, tout en incitant les émigrés fiscaux à revenir. S’exprimant devant la commission des finances, Mme Lagarde avait poussé l’obligeance jusqu’à nous indiquer l’horaire des rames de l’Eurostar qui devaient ramener les intéressés dans notre pays par wagons entiers.

Nous avons apprécié la présence de Mme Lagarde au banc du Gouvernement cet après-midi, mais j’aimerais savoir où elle se trouve ce soir. Est-elle dans une entreprise, en train d’expliquer pourquoi le dispositif adopté en toute hâte cet été était le bon, quand bien même il ne produirait pas les résultats escomptés ? Qu’est donc devenue la confiance que vous prétendiez rétablir ? Pourquoi Mme Lagarde est-elle aujourd’hui dessaisie de ce texte, dont la paternité politique est visiblement assumée dans cette enceinte par M. Bertrand ?

Et où est la croissance dont on promettait le retour ? Alors qu’il était question de 2 % au moins pour cette année, nous devrons nous contenter de 1,9 %, si ce n’est de 1,8 %, en dépit des affirmations constantes du Gouvernement, et l’an prochain ne verra sans doute pas davantage se rétablir vos prédictions. D’ailleurs, j’ignore si c’était un lapsus, mais il m’a semblé que Mme Lagarde confirmait que nous n’atteindrions pas ces 2,25 %...

Ainsi, nous n’avons constaté le retour ni de la confiance, ni de la croissance, ni bien sûr celui des émigrés fiscaux – cela se saurait ! Le seul effet de la loi TEPA aura donc été de créer un nouveau poste : celui de Monsieur « heures supplémentaires. » Faut-il déduire de cette novation que les mesures adoptées étaient simples, compréhensibles et facilement applicables ? Le contraire me paraît plus vraisemblable : c’est quand un système fonctionne mal que l’on nomme des missi dominici pour prêcher la bonne parole.

J’en veux pour preuve les déclarations de Mme Parisot, que l’on ne peut guère suspecter d’être particulièrement hostile au Gouvernement : selon elle, si le dispositif portant sur les heures supplémentaires ne marche pas, c’est tout simplement parce que sa complexité est telle qu’il est incompréhensible pour les chefs d’entreprise, voire décourageant.

Dans le même temps, nous constatons tous dans nos circonscriptions que le peuple gronde. Comme l’a montré une étude récente, le coût des produits alimentaires de première nécessité a en effet augmenté de 40 %. N’oublions pas non plus que le prix du fioul s’est accru de 56 %, celui du « super » de 10,3 % et celui du gazole de 11,9 %... Pour ce qui est des loyers et des charges locatives, la hausse s’élève même à 30 %.

Le peuple gronde également parce que l’on annonce une hausse de 6 % du prix du gaz. Cette demande sera sans doute accordée par le Gouvernement puisqu’il faut bien garnir la corbeille du mariage entre Suez et Gaz de France. À lui seul, ce rapprochement permettra pourtant à ces deux entreprises de bénéficier d’une économie fiscale d’un milliard d’euros…

Dans le même temps, vous avez refusé de maintenir l’exonération de redevance audiovisuelle accordée aux plus de 65 ans, au prétexte qu’il en coûterait 50 millions d’euros. Mais que représente ce montant en comparaison du milliard accordé à Suez et Gaz de France sur le dos des contribuables ? (« Très juste » et applaudissements sur les bancs du groupe SRC)

M. Patrick Roy – Le peuple a faim !

M. Jérôme Cahuzac – C’est parce qu’il gronde, que nous avons appris, au détour d’un entretien télévisé, qu’un texte sur le pouvoir d’achat serait présenté au Parlement, et qu’il l’a effectivement été, avec une hâte suspecte. D’autres orateurs ont déjà rappelé les conditions inadmissibles qui ont prévalu : adopté en conseil des ministres le mercredi suivant cet entretien télévisé, le texte a été déposé au Parlement quelques heures plus tard, puis M. Bertrand est venu en commission présenter le projet alors que nous ne disposions pas encore d’une version écrite. Je mets au défi de trouver dans l’histoire de ce Parlement un autre exemple d’une telle précipitation, d’une telle désinvolture à l’égard de la représentation nationale.

M. Frédéric Lefebvre – Il y avait urgence !

M. Jérôme Cahuzac – Eh bien, parlons-en ! L’inflation des produits de première nécessité, dont l’achat est contraint, est effectivement là. Il faut bien que l’on continue à se déplacer, à se chauffer, à se loger, à se nourrir ! Ces dépenses destinées à satisfaire des besoins vitaux représentent entre 40 et 70 % du budget des ménages en fonction de leurs revenus. Six mois après l’adoption de la loi TEPA, on ne constatait aucun effet positif de ce texte sur la croissance, pas plus que sur le pouvoir d’achat. Face à cet échec patent, il fallait agir…

Qu’en est-il du texte qui nous est aujourd’hui soumis ? Son premier article nous a été présenté de façon tronquée, comme si vous cherchiez à faire illusion. Pourquoi ne pas dire clairement que la récupération des journées de réduction du temps de travail sera transformée en heures supplémentaires, qui donneront lieu, si elles sont effectuées, à un complément de revenu ? Pourquoi s’obstiner à parler de « rachat » quand il s’agit d’une simple transformation en heures supplémentaires, dont le paiement dépendra des accords en vigueur dans la branche ou l’entreprise concernée ? (« Très juste » sur plusieurs bancs du groupe SRC)

Le ministre a sans doute cru qu’il était un magicien, alors qu’il n’est qu’un illusionniste… Il est vrai que vous réussissez parfois à tromper votre monde, Monsieur Bertrand : il y a trois ans, vous nous avez ainsi fait croire que votre réforme de l’assurance maladie serait la « der des ders » et que l’équilibre des comptes sociaux serait atteint en 2007. Or, que s’est-il passé ? Nous connaissons aujourd’hui le plus grave déficit comptable depuis la création de l’assurance maladie. Grâce à vos talents d’illusionniste, vous avez tout de même fait accepter de grands sacrifices aux Français – non-remboursement d’un euro par consultation, augmentation de 15 % du forfait hospitalier, création d’une franchise sur les actes médicaux onéreux avec une avance de frais non remboursable. Alors que le dossier médical personnel, pierre angulaire de la réforme, devait être en place en 2007, nous savons qu’il faudra attendre au moins jusqu’en 2017.

Plusieurs députés du groupe SRC – Belle réussite !

M. Jérôme Cahuzac – Il fallait de vrais talents d’illusionniste pour parvenir à tromper à ce point les Français… (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC)

Dans ces conditions, peut-on vous croire lorsque vous prétendez que l’article premier réglera la question du pouvoir d’achat ? Je crains que non. Outre la présentation tronquée qui nous a été faite, cet article souffre d’une malformation congénitale : sans l’amendement qui a été déposé sur ce sujet, les jours de récupération du temps de travail qui n’auraient pas été pris avant le 31 décembre 2007 se seraient trouvés de fait annulés. Il n’y aurait donc pas eu de jours à transformer en heures supplémentaires… On n’aurait donc pas pu appliquer la mesure qui devrait, selon vous, doper le pouvoir d’achat !

Cette malfaçon s’explique sans doute par l’urgence et la précipitation qui ont présidé à la rédaction de ce texte. Toutefois l’on peut s’interroger sur le fond. Mme Parisot trouve en effet « invraisemblable » que des jours de récupération du temps de travail qui n’auraient pas été pris en 2007 puissent être transformés, de manière rétroactive, en heures supplémentaires en 2008. Comment vous arrangerez-vous avec les entreprises ? Allez-vous nommer un Monsieur « rachat des jours de récupération du temps de travail » ? (Rires sur les bancs du groupe SRC) J’espère alors que vous veillerez à réaliser des économies en lui demandant de visiter les mêmes entreprises que Monsieur « heures supplémentaires »… De grâce, ne faites pas voyager séparément ces deux émissaires, car les entreprises ont déjà du mal à s’y retrouver aujourd’hui.

Mal conçue, cette mesure est en outre temporaire, puisqu’elle ne s’appliquera que pendant les six premiers mois de l’an prochain. Pourquoi, dès lors, une telle précipitation ? Beaucoup de bruit pour pas grand-chose !

Pis encore : c’est une mesure partielle. J’ai apprécié l’éventail de critères déployé par M. Bertrand pour déterminer ceux des salariés qui en bénéficieraient, mais à y regarder de plus près, j’ai remarqué qu’il parlait en millions lorsque les pourcentages étaient décevants, et vice-versa ! En fait, un salarié sur deux sera concerné, tout au plus. N’en profiteront pas ceux qui travaillent dans des entreprises où la mise en œuvre des trente-cinq heures a fait l’objet d’une véritable annualisation, ni ceux qui sont employés dans la majorité des très petites entreprises où les trente-cinq heures n’ont pas cours. Et quid des fonctions publiques ? Quand et comment leur sort sera-t-il réglé ? J’ai comme mes collègues entendu évoquer d’extravagantes statistiques, par M. Lefebvre notamment. À l’entendre, les milliards pleuvraient ! Et pourtant, le budget définitif – et déficitaire – pour 2008 que nous venons à peine d’adopter n’y consacre pas un centime… Ces mesures seront-elles donc financées par la dette ? Quant à la fonction publique hospitalière, la charge supplémentaire dépasserait le milliard d’euros, à supposer que toutes les journées de réduction du temps de travail soient transformées en heures supplémentaires, ce qui est déjà bien improbable. Or les hôpitaux ont un déficit cumulé de cinq à six cents millions ! Comment paieront-ils si le directeur ne peut s’opposer à la monétisation ? Ni eux ni même l’État n’ont les moyens de votre politique, pour une raison simple : les quinze milliards dilapidés cet été grèvent lourdement nos finances publiques.

Enfin, et surtout, vous rompez avec un principe fondateur de notre démocratie sociale : la négociation collective. Je m’étonne d’ailleurs que ce soit vous, Monsieur Bertrand, qui défendiez ce projet, puisque vous avez pu, ces dernières semaines, apprécier combien une négociation collective avec des syndicats représentatifs est toujours préférable à une négociation atomisée, au cas par cas. Hélas, en adoptant cette dernière méthode, vous ferez certainement plaisir à certains dans l’immédiat mais, à terme, c’est notre vie sociale que vous mettez en péril.

Pas plus que l’article premier, l’article 2 relatif au déblocage de la participation ne recueille pas notre assentiment. Ce n’est d’ailleurs que le duplicata d’une mesure déjà prise par la majorité précédente, à l’initiative d’un ministre de l’économie devenu depuis Président de la République. Ce n’est naturellement pas une augmentation de pouvoir d’achat, contrairement à ce que vous prétendez, mais une simple autorisation donnée aux salariés de bénéficier de leur propre épargne. Sur les sept milliards débloqués par les mesures Sarkozy en 2004, plus de cinq avaient été épargnés autrement que via la participation à l’entreprise. On ne peut donc pas attendre de regain de la consommation de cette nouvelle disposition. En revanche, comme l’ont rappelé MM. Cornut-Gentille et Godfrain dans leur rapport, elle présente plusieurs inconvénients. Tout d’abord, elle fragilise l’actionnariat d’entreprise. La participation est, de longue date, une habitude d’épargne qui consolide l’entreprise. Alors que fleurissent les OPA hostiles, ne vaudrait-il pas mieux stabiliser cet actionnariat ? Ensuite, l’impact de ce déblocage intempestif – dont certains ministres ignoraient même l’imminence il y a seulement quelques jours – est impossible à anticiper pour les entreprises, qui ont pourtant besoin de visibilité financière, et plus encore pour les organismes de gestion de la participation, qui opèrent à moyen ou long terme. Modifier les règles tous les trois ans ne leur rend pas service ! Enfin, il m’a semblé vous entendre dire, Monsieur le ministre, que vous ne souhaitiez pas que l’épargne consacrée à la retraite puisse être débloquée. N’allez-vous pas là à rebours de vos propres intentions ? Quelle est donc la part de l’épargne salariale qui, n’étant pas réservée, pourra être débloquée ?

La troisième mesure que vous nous proposez consiste en une prime exceptionnelle de mille euros, entièrement laissée à l’appréciation de l’entreprise qui sera libre de l’accorder si les conditions le permettent. Là encore, le cas par cas s’imposera. Votre élan, votre fougue même ne suffiront pas, je le crains, à nous dire combien de salariés pourront en bénéficier…

M. Patrick Roy – Un certain nombre, sans doute !

M. Jérôme Cahuzac – Je laisse à M. Le Bouillonnec le loisir de détailler les deux dernières mesures, qui concernent le logement et qui sont certainement aussi ambiguës, aussi aléatoires, voire aussi néfastes que les précédentes. Une question, toutefois : les contrats en cours seront-ils concernés ? Si c’est non, vous manquerez votre cible. Si c’est oui, vous courez le risque d’une censure du Conseil constitutionnel, qui jugera cette forme de rétroactivité non conforme à notre loi suprême.

Outre une partie des salariés et des fonctionnaires, vous oubliez aussi les retraités. Peut-être est-ce pour vous en occuper que vous nous quitterez demain après-midi ? Il eût pourtant mieux valu tenir cette réunion avant le vote du PLFSS, conformément à l’esprit de la loi Fillon ! Un tel embouteillage est en tout cas regrettable, car de nombreux retraités ont sincèrement cru que le Président de la République améliorerait leur pouvoir d’achat. Hélas, nous savons ce qu’il en sera ! M. Bertrand, pudique, ayant soigneusement évité tout chiffre quand il a évoqué la revalorisation du pouvoir d’achat des retraités, rappelons qu’elle sera de 1,1 %, c’est-à-dire à peine plus de six euros pour des retraités de l’agriculture ou du commerce. Or, on sait que l’augmentation des prix de première nécessité est bien supérieure !

Quel dommage ! Nous vous avions proposé de nombreuses mesures, dont certaines pouvaient peut-être être critiquées, – et vous ne vous en êtes pas privés –, mais dont d’autres étaient susceptibles d’être admises par tous. Songez à la prime pour l’emploi – dont votre majorité ne peut revendiquer la création, contrairement à ce qu’affirme M. Lefebvre, mais que vous avez notablement augmentée, ce qui prouve que nous pouvons travailler ensemble. Nous pourrions recommencer : pourquoi refuser, par exemple, d’augmenter cette prime de 50 % ? Cela coûterait moins cher que beaucoup des mesures de cet été, et tous les salariés, à temps partiel ou à temps complet, seraient concernés. Voilà qui aurait un effet puissant sur le pouvoir d’achat. Nous pourrions aussi travailler à la baisse de la TVA, ou tout du moins nous aurions pu, si les finances publiques n’avaient pas été grevées par les dispositions déraisonnables de cet été. Mais tout n’est pas perdu : il y a plus d’honneur à reconnaître une erreur qu’à persévérer par fierté. Vous vous grandiriez à revenir sur ces dispositions pour prendre enfin des mesures qui bénéficient à tous les Français (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC). Enfin, nous aurions pu travailler ensemble sur le chèque transport, que vous avez créé et que nous vous proposons de financer par une taxe exceptionnelle sur les compagnies pétrolières.

Cette exception d’irrecevabilité, comme toute motion de procédure, est un moyen d’exposer les vues de l’opposition sur la politique économique et sociale du Gouvernement. J’ai l’intime conviction de n’avoir rien dit d’inexact. J’espère très sincèrement, sinon vous avoir convaincu, au moins vous avoir fait douter suffisamment pour examiner en conscience les dispositions que nous vous proposons, qui seraient beaucoup plus utiles aux Français que celles que vous leur suggérez ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR)

M. Patrick Roy – Voilà une démonstration ! Il est temps de voter…

M. Xavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité – Pour voter sur une démonstration, encore faut-il qu’elle soit talentueuse et convaincante (« Oh ! » sur les bancs du groupe SRC).

Monsieur Cahuzac, il est plus facile d’être procureur qu’avocat !

Plusieurs députés du groupe SRC – Surtout par les temps qui courent !

M. Xavier Bertrand, ministre du travail …Pour ce qui est de l’intérêt du présent texte, je rappelle que la loi TEPA du 21 août 2007 a assoupli un certain nombre des règles « malthusiennes » liées aux 35 heures. Or, en privé, la plupart d’entre vous ne sont pas tendres pour les 35 heures. Je ne sais pas s’il faut vous le reprocher, mais on peut en tout cas saluer ces accès de sincérité. Le présent projet de loi en faveur du pouvoir d’achat est un effort supplémentaire pour permettre à ceux qui le souhaitent de travailler davantage, et donc pour libérer des énergies emprisonnées dans le carcan des 35 heures.

M. Patrick Roy – Les chômeurs, les érémistes, les retraités !

M. le Président – Monsieur Roy, vous avez déjà utilisé tout votre temps de parole…

M. Xavier Bertrand, ministre du travail Pour ce qui est de la méthode, je me suis mis à l’entière disposition de la commission pour répondre aux questions des parlementaires. C’est en effet notre philosophie, la discussion et la concertation, bien loin des 35 heures qui sont venues d’en haut. Là où vous avez imposé, nous voulons rendre possible. C’est un vrai changement de philosophie et certainement ce qui garantit le succès de ce dispositif, à la différence des 35 heures (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP).

Merci d’avoir signalé que journées de RTT non prises étaient perdues et que notre projet de loi allait permettre de les payer, avec une majoration. Encore un aveu de votre part. Notre projet permet en effet aux salariés de percevoir une rémunération majorée, et bénéficie également, par le biais des exonérations de charges, aux employeurs. Vous avez aussi reconnu que la moitié des salariés du secteur concurrentiel étaient potentiellement concernés par cette monétarisation, soit près de neuf millions de personnes. Cela ne représente peut-être pas grand-chose à vos yeux, Monsieur Roy, mais pour eux, c’est une avancée bien plus importante que vos fausses propositions. Nous préférons les travaux pratiques aux grands discours et les salariés ont bien compris qu’il s’agissait d’une réelle amélioration de leur pouvoir d’achat.

Vous avez évoqué la question des 35 heures à l’hôpital et des heures supplémentaires non payées. Le Président de la République a demandé à Éric Woerth et à Roselyne Bachelot d’ouvrir la concertation avec les organisations syndicales.

M. Jérôme Cahuzac – Il n’y a pas d’argent !

M. Xavier Bertrand, ministre du travail Environ 3,3 millions de jours sont stockés sur les comptes épargne temps. La première réunion aura lieu dès le mois de janvier, pour définir un cadre national qui doit permettre d’établir le diagnostic et les règles applicables et des cadres locaux pour agir au plus près des attentes des agents.

Vous ne pensez pas que modifier les règles du jeu tous les deux ou trois ans permette de résoudre les problèmes. Vous parlez d’expérience ! C’était pourtant la logique des deux lois sur les 35 heures, distantes de deux ans…

M. François Hollande – Vous, c’est six mois !

M. Xavier Bertrand, ministre du travail …et qui ont créé le carcan à l’origine de toutes les difficultés que rencontrent dans les entreprises les employeurs, les organisations syndicales et les salariés.

Vous craignez que le déblocage de la participation ne déstabilise l’épargne salariale, tout en appelant de vos vœux – nous, nous le réalisons – le renforcement du dialogue social. Nous sommes sensibles à la nécessité d’une épargne longue, mais nous ne croyons pas que cela soit facteur de déstabilisation. En 2004, 7 milliards sont sortis des fonds de participation et les encours d’épargne salariale se sont quand même élevés à 57 milliards ! Fin 2007, ils atteignent 100 milliards : il y a donc de la marge. Les mesures prises en 2004 ont renforcé le pouvoir d’achat sans mettre en rien en péril les fonds de l’épargne salariale. Sur toutes ces questions, nous procéderons par accords, pour pouvoir bien prendre en compte la réalité du terrain.

Enfin, sur l’aspect constitutionnel, je rappelle que c’est à l’occasion des deux lois sur les 35 heures que la jurisprudence du Conseil constitutionnel sur les relations entre la loi et les accords collectifs a pu se développer. Nous y sommes particulièrement attentifs. Je suis sûr que vous aurez à cœur de poser nombre de questions au Conseil. Mais sur toutes ces questions, les Français sont plein de bon sens. Ce que nous leur proposons, c’est une société qui valorise davantage le travail (Exclamations sur les bancs du groupe SRC ; applaudissements sur les bancs du groupe UMP). Une société qui aide ceux qui n’en ont pas à en trouver un, et qui agit en permanence pour celles et ceux qui ne peuvent pas ou plus travailler.

M. Patrick Roy – Le travail n’est même pas valorisé !

M. Xavier Bertrand, ministre du travail En votant pour Nicolas Sarkozy, les Français ont fait le choix de cette société du travail (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Michel Ménard – Que faites-vous pour les retraités ?

Mme Christine Boutin, ministre du logement et de la ville – Il n’y a que peu de choses qui concernent le logement dans cette motion, mais je voudrais saluer le talent de M. Cahuzac. En ce qui concerne l’efficacité des mesures, vous affirmez qu’elles seront insuffisantes si elles ne touchent que les logement en flux et censurées par le Conseil constitutionnel si nous touchons au stock. Je ne partage pas ce point de vue. L’article 4 vise à une modération des loyers, augmentés suivant l’indice des prix à la consommation. L’article 5 porte sur la réduction à un mois du dépôt de garantie. Dans le domaine du logement, les flux, ce sont les nouvelles constructions – or, nous en serons cette année à 429 000 mises en chantier, ce qui n’est pas arrivé depuis trente ans – et le stock, les logements disponibles – or les mesures porteront sur l’ensemble des logements. Tous les locataires bénéficieront de la modération de la hausse des loyers, tous les nouveaux baux du dépôt de garantie d’un mois. Ce projet de loi va donc, excusez du peu, bénéficier à un million de foyers et redonner 500 millions aux locataires.

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales  M. Migaud m’ayant interpellé, je me sens obligé de répondre.

Comme lui, j’aime les choses simples, économiquement efficaces et socialement justes. Je n’ai donc jamais aimé la rigidité des 35 heures.

Plusieurs députés du groupe SRC – Supprimez-les !

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission  Nous ne voulons pas faire preuve du même dogmatisme que vous !

M. Patrick Roy – Autrement dit, elles ne sont pas si nuisibles !

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission  Il y a des gens qui souhaitent travailler trente heures, trente-cinq ou quarante-deux. Avec les textes actuels, ils ne le peuvent pas !

Mais nous aurions pu réduire la complexité du système. C’était le sens de notre proposition de loi, à laquelle M. Cahuzac était d’ailleurs favorable.

M. Jérôme Cahuzac – Ah, non ! Ce n’est pas correct !

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission – Sans doute ai-je mal compris… Quoi qu’il en soit, cette proposition aurait permis de laisser les salariés…

M. François Hollande – Allons au fait !

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission …libres d’aller jusqu’à 220 heures, dès lors que les délégués du personnel ne s’y opposaient pas (Brouhaha sur les bancs du groupe SRC). Certains disent que les salariés peuvent déjà faire des heures supplémentaires. Je regrette : dans de nombreuses branches, le nombre d’heures supplémentaires reste limité à 40 ou 80 heures (Plusieurs députés UMP entrent dans l’hémicycle, salués par des « Ah ! » sur les bancs du groupe SRC). Ce texte répond donc à la diversité des attentes. Certes, c’est une mesure conjoncturelle. Mais nous constatons aujourd’hui une angoisse nouvelle devant l’augmentation des prix de l’alimentation ou de l’essence. C’est par respect pour les salariés et les négociations salariales, et parce que la loi de janvier 2007 ne permet pas de négocier librement les heures supplémentaires, que le Gouvernement a proposé ce projet. Je n’aime pas les 35 heures et la rigidité qu’elles ont imposée à la société française, Monsieur Migaud ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Pierre-Alain Muet – Je vais être bref : mon collègue Cahuzac a brillamment exposé toutes les raisons qui nous ont conduits à soulever cette exception d’irrecevabilité. Nous sommes d’abord choqués par la méthode. Nous venons à peine d’achever l’examen d’un projet de loi de finances qui a été vidé de son contenu par la loi TEPA, et voilà que vous nous proposez une nouvelle loi sur le pouvoir d’achat, sans la moindre étude d’impact. La presse parle de 30 ou 35 milliards d’euros de pouvoir d’achat injectés dans l’économie. Ce n’est pas sérieux ! Ces chiffres que Mme Lagarde a repris ne s’appuient sur aucune étude de ses services. Votre politique n’aura aucun effet sur le pouvoir d’achat, pour une raison simple : la plupart des mesures de ce projet se substituent à des hausses de salaires. Les mesures que vous avez prises cet été conduiront peut-être certains salariés à toucher plus, mais ce sera au détriment de l’emploi, et la masse salariale n’augmentera pas (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC).

M. Jean-Claude Sandrier – Faut-il hâter l’heure de l’expression démocratique de l’Assemblée, chers collègues socialistes ? (« Oui ! » sur les bancs du groupe SRC) Bien : le groupe GDR votera cette exception d’irrecevabilité (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR et du groupe SRC).

M. Philippe Vigier – Le groupe Nouveau Centre…

Un député du groupe SRC – Ça court dans les couloirs !

M. Alain Néri – Le bateau UMP coule !

M. Philippe Vigier – …ne s’associera pas à cette exception d’irrecevabilité (Brouhaha sur les bancs du groupe SRC). Ce débat est parfois irréaliste. M. Cahuzac nous disait qu’il labourait sa circonscription. Sans doute n’avons-nous pas les mêmes électeurs : les miens me demandent tous les jours ce que nous faisons pour le pouvoir d’achat ! Ce texte est une avancée incontestable de ce point de vue – j’y reviendrai. On y reconnaît enfin – ce qui est essentiel à nos yeux – la valeur travail dans notre pays. Enfin, l’accord signé ce matin chez Continental – publié dans Les Echos – montre bien que le projet répond à une attente.

M. Frédéric Lefebvre – (« Cinq minutes ! » sur les bancs du groupe SRC) J’espère que le groupe socialiste va faire preuve d’un peu d’écoute, même s’il n’a pas pris la peine de le faire avec Jérôme Cahuzac (Protestations sur les bancs du groupe SRC). Le premier secrétaire du parti socialiste a dit il y a quelques jours qu’il entendait aborder ce débat de manière constructive.

M. François Hollande – On peut même le raccourcir ! (Rires sur les bancs du groupe SRC)

M. Frédéric Lefebvre – Nous souhaitons tous que cela se passe de manière constructive. Commencez donc par écouter vos amis quand ils parlent !

Moi qui ai écouté Jérôme Cahuzac, j’ai envie de lui répondre que cette exception d’irrecevabilité n’est pas fondée en droit. Mais il le sait bien, et c’est d’ailleurs pourquoi il ne s’est pas beaucoup attardé sur la question. Il a en revanche évoqué un certain nombre d’autres sujets, à partir des amendements de son groupe. Permettez-moi de vous dire, Monsieur Cahuzac, que la majorité également travaille. Ce texte comporte des mesures d’urgence sur le logement, les RTT ou la participation, mais le groupe UMP est bien décidé à déposer des amendements sur les textes qui viendront en discussion dans les prochains mois. Jean-François Copé nous a demandé de constituer un groupe « pouvoir d’achat ». Mon collègue Jérôme Chartier, rapporteur pour avis, et moi-même travaillons sur le sujet avec une trentaine de députés du groupe UMP.

Permettez-moi de donner notre avis sur les amendements que vous avez déposés (Protestations sur les bancs du groupe SRC). La question des salaires minimum est soumise à la négociation sociale. Respectons celle-ci : attendons-en le résultat. S’agissant du rachat des RTT, les amendements que nous avons déposés devraient vous rassurer : vous allez pouvoir les voter ! Vous savez d’ailleurs que ce rachat concerne beaucoup de Français – entre 7 et 9 millions, a dit le ministre. Ne l’oubliez pas ! (Plusieurs députés UMP entrent dans l’Hémicycle ; « Ah ! » sur les bancs du groupe SRC) L’idée du bonus-malus que nous avons défendue est également soumise à la négociation sociale. Attendez donc !

Je vais faire plaisir à François Hollande. Lors de la discussion de la proposition de loi socialiste, M. Cochet et la majorité vous ont dit que la TIPP flottante n’était pas une bonne idée (Les députés socialistes entament un compte à rebours). Nous avons donc été heureux de constater que vous l’aviez abandonnée dans vos amendements ! (Plusieurs députés UMP entrent dans l’Hémicycle ; « Ah ! » et applaudissements sur les bancs du groupe SRC)

M. le Président – Il faut conclure.

M. Frédéric Lefebvre – Sur la réversibilité totale, votre ami le sénateur Bel est plus constructif que vous : comme nous, il la veut !

Pour toutes ces raisons, le groupe UMP repoussera cette exception d’irrecevabilité – ce qui ne veut pas dire qu’il ne se montrera pas constructif dans la discussion des amendements : nous, nous respectons le débat ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

L'exception d’irrecevabilité, mise aux voix, n'est pas adoptée (Violentes protestations sur les bancs du groupe SRC).

M. Julien Dray – Donnez-nous le score !

M. le Président – Il y a plus de dix voix d’écart (Les protestations continuent sur les bancs du groupe SRC)

Je suspends la séance !

La séance, suspendue à 22 heures 25, est reprise à 22 heures 35.

QUESTION PRÉALABLE

M. le Président – J’ai reçu de M. Jean-Marc Ayrault et des membres du groupe SRC une question préalable déposée en application de l’article 91, alinéa 4, du Règlement.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec – En 2002, on a promis aux Français la fin de la fracture sociale ; en 2007, on leur a annoncé l’augmentation de leur pouvoir d’achat. Dure sera la désillusion de ceux dont le pouvoir d’achat est la préoccupation majeure, parce qu’il en va de leur vie, voire, pour certains, de leur survie.

M. Jean-François Copé – Mais où sont les socialistes ?

M. Jean-Yves Le Bouillonnec – Comment en effet éviter cette désillusion après que le président de l’amélioration du pouvoir d’achat et sa majorité se sont empressés de dilapider 5 milliards en faisant adopter, dès le mois de juillet, un « paquet fiscal » à mille lieues des attentes de la majorité des Français, auxquels il n’était de fait pas destiné ?

Ni le « choc de confiance » promis par le Président de la République ni le « choc de croissance » n’ont eu lieu. Au contraire, le moral des Français n’a jamais été aussi bas ; la consommation des ménages a fortement reculé au cours des derniers mois, de même que la croissance ; le taux d’inflation a atteint en novembre son niveau le plus élevé depuis trois ans – 2,4 %. Quant aux prix de l’énergie, ils ont connu une hausse de 4,1 % le même mois et de 10,2 % au cours des douze derniers mois, ceux des produits alimentaires ne cessant pour leur part d’augmenter dans des proportions alarmantes. Autant de menaces sur les conditions de vie quotidienne.

Mais, fidèles à votre idéologie libérale, vous n’avez fait qu’aggraver la situation, en instaurant les franchises médicales et en refusant tout « coup de pouce » aux salariés payés au SMIC ou aux retraités, dont les plus modestes devront désormais acquitter la redevance audiovisuelle. Et ce n’est sans doute qu’un début : bientôt – après les élections municipales – viendront l’instauration d’une franchise sur l’aide juridictionnelle et d’une taxe sociale, et l’obligation de restituer, au détriment des petites successions, les sommes versées au titre de l’APA !

Avec ce projet de loi, vous feignez de prendre en compte les doléances de nos concitoyens, dans les conditions proprement ubuesques qu’a dénoncées à juste titre M. Cahuzac. Pourquoi avoir attendu la fin de l’année pour le déposer ? N’auriez-vous jusqu’à présent pas prêté autant d’attention que vous le prétendez à la situation des Français ? (Protestations sur les bancs du groupe UMP) Et pourquoi n’avez-vous pas voté nos amendements au PLF ? Pourquoi avez-vous refusé avec mépris d’examiner notre proposition de loi destinée à soutenir le pouvoir d’achat des ménages – augmentation de 50 % de la PPE, revalorisation des petites retraites, baisse de la TVA, chèque transport, instauration d’un « bouclier logement » plafonnant à 25 % de leurs revenus les dépenses de logement des ménages ?

Ainsi, c’est dans l’urgence – selon une méthode désormais éprouvée – que vous nous soumettez un projet qui ne coûtera rien au budget de l’État, un projet fait de mesures aléatoires, approximatives, dont la finalité demeure incertaine, et qui excluent les retraités, les chômeurs, les travailleurs précaires, voire de nombreux salariés – ceux-là même dont le pouvoir d’achat demeure insuffisant. Quel marché de dupes !

S’agissant du logement, sur lequel portent les articles 4 et 5 du texte, les mesures que vous annoncez – indexation des loyers sur le coût de la vie et abaissement du montant du dépôt de garantie de deux à un mois de loyer – semblent ridicules au regard de la politique libérale et du véritable travail de sape auquel vous vous livrez depuis 2002 : exonération d’impôt pour les sociétés d’investissement immobilier qui se livrent aux ventes à la découpe, déductions fiscales considérables accordées aux investisseurs, sans contrepartie sociale, par le dispositif Robien – pour ne rien dire de la déduction des intérêts d’emprunt immobilier, qui n’avait rien d’urgent ! Mais le pire reste à venir, comme le montre l’annonce de la libéralisation du livret A. En somme, à une véritable politique d’aide à la construction de logements destinés au plus grand nombre, vous avez préféré un écran de fumée, un saupoudrage de « mesurettes » !

Ces deux mesures n’auront aucun effet sur le pouvoir d’achat. Vous reprenez, un peu tard, notre proposition d’indexer les loyers, afin d’en juguler la flambée, sur l’évolution des prix à la consommation…

Mme Christine Boutin, ministre du logement Vous devriez donc être contents ! (« Alors ? » sur les bancs du groupe UMP)

M. Jean-Yves Le Bouillonnec – …oubliant qu’elle ne peut être efficace que dans le cadre d’un dispositif plus vaste et plus cohérent !

M. Bernard Deflesselles – Arrêtez de donner des leçons !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec – Vous avez attendu janvier 2006 pour cesser d’indexer les loyers sur le coût de la construction ; mais le nouvel indice de référence des loyers, que vous nous aviez présenté comme la panacée, comme la garantie d’une revalorisation équilibrée des loyers, s’est révélé tout aussi désastreux, progressant de 2,76 % – contre 2,4 % pour l’indice des prix à la consommation que vous souhaitez lui substituer, différence bien trop dérisoire pour entraîner un véritable gain de pouvoir d’achat !

Mme Christine Boutin, ministre du logement Mais c’est vous qui l’avez proposé !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec – Contrairement aux promesses grandiloquentes du Président de la République, les loyers ne seront donc pas divisés par deux ! En outre, limitée à la revalorisation annuelle des loyers s’appliquant aux baux en cours, la mesure ne saurait protéger le locataire au moment du renouvellement du bail et l’emménagement d’un nouveau locataire restera propice à une revalorisation excessive. Le fait que le Président de la République n’en tienne pas compte au moment de prononcer une déclaration portant sur le logement – qui ne fait certes pas partie de ses sujets de prédilection – témoigne du peu d’intérêt que le Gouvernement porte aux locataires, sinon pour les instrumentaliser à des fins de pur affichage !

L’indexation des loyers sur l’inflation aura un impact d’autant plus limité que celle-ci reprend. Dans le même temps, vous ne prévoyez aucune mesure de rattrapage s’agissant de l’aide personnalisée au logement, dont la trop faible revalorisation contribue à l’érosion permanente du pouvoir d’achat. C’est pourtant par là qu’il aurait fallu commencer, puisque plus de six millions de ménages sont allocataires, dont les trois quarts ont des revenus inférieurs au SMIC. Mais, alors que les loyers ont augmenté de 25 % en cinq ans, l’APL a augmenté de 4 % seulement entre 2002 et 2005, et elle a même diminué en 2005. On comprend que, pendant la même période, la part de leur budget que les titulaires des minima sociaux consacrent au logement soit passée de 16 à 20 % ! Là est la perte du pouvoir d’achat, pour eux, pour les étudiants boursiers et pour les salariés aussi ! Et encore, je ne parle pas des charges ! Or, le collectif budgétaire a réduit de 76,2 millions la ligne « aide à l’accès au logement »…

Mme Élisabeth Guigou – C’est scandaleux !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec – Comment justifier un tel choix dans un tel contexte ? Comment prétendre, dans ces conditions, améliorer le pouvoir d’achat des ménages ? Pourquoi ne pas élargir les critères d’attribution de l’APL, dont on connaît l’éminent rôle social ? Ne contribue-t-elle pas, en solvabilisant les allocataires, à prévenir les expulsions ? Faut-il rappeler que les impayés sont de plus en plus fréquents et que la progression des expulsions, ces cinq dernières années, a connu une brusque accélération les dernières semaines précédant la trêve hivernale ? Mais cela ne va pas encore assez vite pour le Président de la République ! L’État ne doit pas être défaillant, a-t-il dit…

M. Richard Mallié – Nous sommes dans un État de droit !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec – Que ferez-vous, Madame la ministre, des personnes remises à la rue? Allez-vous les orienter vers les centres d'hébergement d'urgence déjà saturés (Mme la ministre proteste) ou dans des hôtels hors de prix ? Dois-je rappeler qu'elles pourront invoquer le droit opposable au logement ?

Vous prétendez vouloir améliorer le pouvoir d'achat des ménages. Pourquoi, alors, avoir augmenté d’un euro la participation minimale des bénéficiaires des aides au logement, réalisant ainsi une économie au détriment des plus modestes ?

Mme Élisabeth Guigou – C’est inadmissible !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec – Pourquoi persistez-vous à refuser de revenir sur le dispositif consistant à ne pas verser les droits lorsque ceux-ci sont inférieurs à quinze euros, en alléguant « la difficulté et la lourdeur administrative d'effectuer un paiement aussi modique ». Modique pour vous, peut-être, mais certainement pas pour les ménages concernés ! Le principe devrait pourtant être simple : ce à quoi peuvent prétendre les bénéficiaires doit leur être versé. Voilà ce que devrait être une politique favorisant réellement le pouvoir d’achat !

Mme Élisabeth Guigou – Exactement !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec – On regrettera aussi que rien ne soit fait à propos des charges locatives, qui ont progressé de près de 5,7 %. Je tiens à mettre le Gouvernement en garde contre toute tentative d'alourdir le poids de ces charges par le biais de décrets qui en modifieraient l’imputation.

Pour faciliter l'accès au logement, vous envisagez de réduire à un mois de loyer le montant du dépôt de garantie que peut exiger le bailleur. Une fois encore, le dispositif n'ayant pas d’effet rétroactif, cette mesure n’aura qu’un effet limité sur le pouvoir d'achat. Ces mesures imposées sans concertation avec tous les acteurs concernés empêchent d'envisager un dispositif plus complet rendant compatible l'accès à un logement pour les locataires et la garantie du risque locatif pour les propriétaires. Conscient de la nécessité de concilier les intérêts du propriétaire et du locataire, nous avons proposé la création d’un service public de la caution. Nous n’avons pas été entendus, et la mesure que vous proposez, parce qu’elle ne participe pas d’une politique d'ensemble, ne produira pas les effets escomptés – faire que les ménages dépensent moins pour se loger. La crise est d'une ampleur telle qu'il faudrait une pause. Nous avons donc proposé le gel des loyers pendant un an dans certaines zones, ce qui redonnerait du souffle aux ménages asphyxiés et laisserait le temps nécessaire à une vaste réflexion sur la solvabilisation des ménages.

Ainsi, ces mesures, a priori séduisantes, sont décevantes car elle ne s'attaquent pas au cœur du problème : la pénurie de logements aux loyers accessibles. C'est sur ce terrain qu'il aurait fallu agir pour améliorer durablement le pouvoir d'achat des ménages, mais les orientations politiques de la majorité au pouvoir depuis 2002 démentent la volonté affichée. Comment remédier à la pénurie de logement qui entretient la hausse des loyers et, en corollaire, la baisse du pouvoir d'achat, sinon en construisant des logements adaptés aux besoins, à des prix abordables et en nombre suffisant ? Il faut donc d'abord promouvoir la construction des logements sociaux et très sociaux en les subventionnant largement. Vous faites référence, Madame la ministre, aux 420 000 logements mis en chantier en 2006. Mais s’agit-il de logements sociaux et très sociaux ? Bien sûr que non, et vous ne l’ignorez pas.

Comment faire baisser les loyers ? En cessant de considérer le logement comme une marchandise banale, un bien comme un autre (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR). Or, depuis 2002, le pouvoir d'achat des ménages n'étant pas la première de vos préoccupations, vous avez considéré le logement comme un produit fiscal, un objet de spéculation. Depuis 2002, nous n'avons cessé de vous alerter sur les effets dévastateurs de cette politique, qui a aggravé la pénurie de l'offre locative, mais vous êtes restés sourds à nos interpellations. Aujourd'hui, il vous faut reconnaître que des dispositions fiscales inappropriées, au premier rang desquelles l'amortissement « de Robien », expliquent l'emballement du marché immobilier.

Ce dispositif Robien est symptomatique de la marchandisation du logement : c’est un pur produit financier, qui ne sert donc pas l'intérêt général. Satisfaisant pour les investisseurs, il a un coût disproportionné pour la collectivité. Visant prétendument à améliorer l'offre locative, il fait surtout le bonheur des promoteurs et des investisseurs, dont l'avantage fiscal peut aller jusqu’à 25 000 euros. Il favorise ceux qui sont suffisamment aisés pour acheter un logement qu'ils n'habitent pas, au détriment de ces propriétaires occupants, dont vous prétendez aujourd’hui vous préoccuper. Ainsi, l'État donne en moyenne 33 000 euros à chaque propriétaire pour construire un logement et le louer – sans imposer un plafond réel de loyer – ce qui représente une dépense publique de 675 millions par an. Dans le même temps, le Gouvernement ne consacre que de 10 000 à 15 000 euros à la construction d'un logement social, alors que les loyers sont plus contraints et rendent le logement accessible à tous !

En aidant à guichets ouverts les investisseurs privés, l’État favorise la hausse des prix fonciers et immobiliers et celle des loyers, contribuant ainsi à augmenter la part du logement dans la dépense des ménages, au détriment du pouvoir d'achat et de la croissance. De plus, le dispositif Robien renforce les obstacles, déjà nombreux, que rencontrent les bailleurs sociaux en rendant les terrains plus coûteux et en occupant les entreprises, ce qui rend les appels d'offre infructueux. Enfin, l'État n’ayant pas ciblé les territoires où existe une forte pénurie, les logements « Robien » se sont multipliés sur les marchés les plus chers, et ils sont proposés à des loyers inaccessibles aux populations locales. Il en résulte ce scandale que des logements ainsi financés restent vides.

Nous avons à maintes reprises demandé la suppression de ce dispositif, mais vous vous entêtez à le maintenir sans réellement contester ses effets pernicieux. Supprimez-le, Madame la ministre, réintégrez dans le PLF 2008 les crédits correspondants, et votre nom restera en lettres de feu dans l’histoire de la République.

Mme Christine Boutin, ministre du logement – Peu m’importe !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec – De façon générale, toutes les exonérations fiscales alimentent la hausse des prix, qui appauvrit fortement les ménages souhaitant acheter. On fait miroiter le rêve de la propriété, mais la réalité est moins enchanteresse car si les loyers ont explosé, les prix d'achat ont également progressé. En clair, il est presque impossible à une famille moyenne d'acheter un logement dans les centres des villes. Devenir propriétaire, certes – mais à quel prix ?

En matière d'accession sociale à la propriété, les résultats obtenus par la droite depuis 2002 sont très mauvais. En 2005, sur les 753 000 accédants à la propriété, 25 % seulement appartenaient à la moitié la moins riche de la population française, et ce pourcentage est en baisse.

M. Patrick Roy – Eh oui !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec – D'autre part, le prêt à taux zéro a été dévoyé de son objectif premier, qui était de permettre aux foyers modestes ne disposant pas de ressources suffisantes d'accéder à la propriété. La réforme de ce dispositif ne leur a nullement bénéficié. En ouvrant la possibilité de prêts gratuits à des ménages pouvant gagner jusqu'à 7 000 euros par mois,elle a d'abord profité aux tranches supérieures de la classe moyenne. Nous proposons donc de recentrer l'attribution de ce prêt au bénéfice des ménages les plus modestes.

M. Patrick Roy – Ils ne savent pas le faire !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec – Il y avait indéniablement matière à favoriser le pouvoir d'achat dans le domaine du logement, et j’ai évoqué quelques-unes des pistes possibles pour aller outre les effets d'annonce et les mesures d'affichage. Votre dispositif inconsistant sera sans effet sur le pouvoir d’achat. Ce qui vous intéresse, ce n’est pas le logement ou le niveau de vie des Français, mais les économies que vous pouvez faire sur leur dos. Loin de les aider, vous prenez le risque d’aggraver encore leurs difficultés ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR)

Mme Christine Boutin, ministre du logement Monsieur Le Bouillonnec, j’ai été inquiète. J’ai eu peur que vous ne soyez frappé d’apoplexie. Nous avons l’habitude de nous opposer sur la politique du logement, mais ce que vous avez dit ce soir, je ne puis l’accepter.

M. Michel Ménard – Il connaît très bien la question du logement.

Mme Christine Boutin, ministre du logement N’oubliez pas la responsabilité qui est aussi la vôtre, pour avoir construit si peu de logements en vingt ans ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP) De ce retard de la construction, la gauche est même particulièrement responsable.

M. Patrick Roy – Vous avez eu six ans.

Mme Christine Boutin, ministre du logement – Mais je refuse la polémique stérile, car il nous faut loger des hommes, des femmes et des enfants. La chaîne du logement est une chaîne solidaire, dans laquelle on ne peut s’occuper d’une catégorie : c’est l’ensemble de la chaîne qu’il faut fluidifier, en raison de l’incurie qui a régné dans la construction. Pour avancer dans la vie, ce qui compte, c’est le travail – une valeur que nous défendons avec le Président de la République – et c’est aussi le logement. S’il est si difficile de se loger, c’est que l’offre n’est pas suffisante, ce qui entraîne une hausse des prix sur toute la chaîne.

M. Michel Ménard – Et pourquoi ?

Mme Christine Boutin, ministre du logement – Parce qu’on n’a pas suffisamment construit, et vous y avez votre part de responsabilité ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP) Sans logement, pas de travail, sans logement, pas de famille.

Vous avez parlé de la vente à la découpe, du régime fiscal de l’investissement locatif social, de nombreuses mesures. Mais vous avez oublié de citer le droit au logement opposable, que notre majorité a fait voter ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP) Selon vous, nous ne saurons pas financer le logement social et très social. Mais alors qu’en 2000, on finançait 38 000 PLAI, il y en a 67 000 cette année, et 100 000 sont budgétés pour 2008 (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP). Vous n’avez pas de leçon à nous donner ! Un doublement de la production de logements sociaux est prévu. Le Président de la République a, de plus, annoncé une refonte de l’ensemble des dispositifs l’an prochain.

La mesure concernant le dépôt de garantie permettra de mieux assurer l’équilibre entre locataires et bailleurs. Nous ne montrons personne du doigt, mais nous ne pouvons faire porter toute la charge sur les petits propriétaires privés, pour lesquels le patrimoine est un élément de la retraite. Nous avons négocié ce dispositif avec les partenaires sociaux. Non, nous ne souhaitons pas mettre les gens dehors ! Avec la garantie du risque locatif, qui évitera les impayés et permettra de recouvrer des locaux en l’état initial, il y aura beaucoup moins d’expulsions. Cette mesure sera proposée dans le courant du premier trimestre.

Nous soutenons les locataires. Mais notre priorité, c’est de construire, et c’est toute la chaîne du logement qu’il faut dynamiser, du plus social au haut de gamme. Aujourd’hui, elle est victime d’une véritable embolie. Réduire les avantages fiscaux pour certains types de logements ne fera que réduire la production de logements. S’agissant du dispositif Robien, nous réfléchissons à sa suppression pour la zone C, afin d’utiliser les crédits ainsi récupérés en faveur d’autres actions de soutien au logement.

C’est avec passion que vous nous avez mis en accusation. Pourtant, vous savez mieux que personne qu’on ne peut faire surgir du jour au lendemain les centaines de milliers de logements qui n’ont pas été construits, et vous savez quelle est votre responsabilité. Mais c’est une autre politique que nous menons ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. le Président – Nous en venons aux explications de vote.

M. Michel Issindou – M. Le Bouillonnec vient de démontrer qu’il peut exister une politique plus courageuse et plus efficace pour régler la crise du logement qui grève si lourdement le budget des ménages les plus modestes. Hélas, votre projet bien peu ambitieux ne concernera au mieux que le million de personnes qui déménage chaque année, sans atténuer le mal déjà provoqué, en raison d’une augmentation de loyers de 30 % en six ans, conjuguée avec une baisse de 10 % de l’APL.

Depuis juillet, vous avez mené une politique incohérente. Où est le choc de confiance, le choc de croissance que devaient entraîner les 15 milliards donnés aux plus favorisés cet été ? L’augmentation du PIB sera, péniblement, de 1,8 % cette année.

Tout l’automne vous avez joué de malchance, avec la hausse du pétrole, des prix du lait et du blé, la surévaluation de l’euro. Mais vous en avez rajouté, en instaurant les franchises médicales, en imposant la redevance à 800 000 foyers modestes, en augmentant au 1er janvier les tarifs de GDF.

Alors la France gronde. Le « Président du pouvoir d’achat » s’inquiète et propose ces mesures, qui ne coûtent d’ailleurs pas un centime – et pour cause, les caisses sont vides après les 15 milliards de la loi TEPA. Il renvoie donc les acteurs à la négociation, qui risque de tourner à la confrontation, entre employeurs et employés sur les RTT et la participation, et entre propriétaires et locataires, comme ce sera encore le cas entre commerçants et consommateurs avec la libéralisation de la concurrence – merci pour les petits commerçants – et l’ouverture le dimanche.

Tout cela n’aura que peu d’impact. Sur les RTT, les employeurs auront le dernier mot et de toute façon travailleurs en CDD ou à temps partiel, chômeurs et retraités, dont le niveau de vie est indécent, ne verront rien venir. L’inefficacité de vos mesures réveillera la grogne dès le printemps.

Il aurait fallu utiliser les 15 milliards à des mesures plus justes, telles celles que nous proposons et qui auraient un effet immédiat : majoration de 50 % de la prime pour l’emploi, réintroduction de la TIPP flottante, baisse de la TVA sur les produits de première nécessité, généralisation du chèque transport. Mais vous n’entendez rien. Vous avez certes réussi à améliorer le pouvoir d’achat, mais pour les plus riches. Pour le reste, le pays s’enfonce dans la précarité et l’exclusion.

M. Richard Mallié – Alors, vous votez comment ?

M. Michel Issindou – Vous l’avez compris, je vous demande de voter la question préalable ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR)

M. Jean-François Lamour – Monsieur Le Bouillonnec, demander qu’on ne discute pas de ce projet sur le pouvoir d’achat est une bizarre façon de soutenir le président de la commission des finances qui déclarait ce matin sur LCI ne pas souhaiter d’obstruction, mais une attitude constructive du groupe socialiste. Cela correspond mal aux déclarations de votre groupe lors du débat sur le pouvoir d’achat la semaine dernière. Bref, parler oui, agir jamais ! Nous, nous agissons.

Vous nous reprochez le caractère non reconductible de ce texte, mais c’est ignorer la volonté très ferme de la majorité et du Gouvernement : dès le premier trimestre 2008, nous engagerons un débat sur la durée et les conditions de travail afin d’explorer toutes les pistes permettant d’augmenter le pouvoir d’achat des Français. Faut-il également rappeler que ce texte concerne déjà un salarié sur deux et qu’il ouvre des perspectives sans précédent en matière de logement ?

Contrairement à vous, qui n’avez rien à proposer, nous sommes prêts à enrichir ce texte comme nous l’avons déjà fait à l’occasion de la loi TEPA, qui commence d’ailleurs à produire ses effets en dépit de vos affirmations péremptoires. Les députés UMP ont fait la preuve de leur attachement aux attentes des Français.

Que faites-vous, de votre côté, sinon démontrer vos propres contradictions ? À l’occasion de la niche parlementaire réservée par le groupe UMP, la semaine dernière, à la question du pouvoir d’achat, vous déclariez que l’on ne saurait se contenter du texte d’un seul jour dans ce domaine, expliquant que c’est une politique au long cours que les Français auront à juger sur pièces et sur place. Or, nos concitoyens ont déjà tranché par deux fois : ils ont estimé que votre politique des 35 heures avait plombé leur pouvoir d’achat ! (Protestations sur les bancs du groupe SRC)

Au reste, il est apparu au cours du débat sur le pouvoir d’achat que l’indexation des loyers sur l’inflation et la suppression d’une partie des cautions, mesures aujourd’hui proposées le Gouvernement, vous semblaient parfaitement recevables : vous prétendez réclamer l’adoption de ces dispositions depuis des années (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR). Si c’est le cas, j’ai moi aussi une question préalable à poser : allez-vous enfin être cohérents, en votant ce texte, ou bien vous contenterez-vous de continuer à hurler au feu depuis votre balcon ? (Protestations sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR)

Pour sa part, le groupe UMP ira jusqu’au bout de sa démarche en votant contre la question préalable (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Jean-Claude Sandrier – Permettez-moi de citer le Premier ministre (« Saine lecture ! » sur plusieurs bancs du groupe UMP) : le pouvoir d’achat dépend de la croissance, expliquait-il la semaine dernière. C’est exact dans une certaine mesure, mais on peut inverser les termes, car la croissance dépend aussi du pouvoir d’achat : n’oublions pas que 75 % de la croissance repose sur la consommation dans notre pays. C’est dire l’effort qu’il faudrait consentir en matière de pouvoir d’achat, et que vous refusez malheureusement.

En outre, le pouvoir d’achat du plus grand nombre ne dépend pas seulement de la croissance, mais aussi de la répartition de ses fruits. Je rappelle qu’en cinq ans le pouvoir d’achat des 10 % des Français les plus pauvres a baissé chaque année de 0,1 %, quand celui des 5 % les plus riches augmentait de 1 %. Les profits des entreprises cotées au CAC 40 ont également augmenté de 250 % en quatre ans alors que les revenus de leurs salariés n’ont progressé que de 6,6 % dans le même temps (Murmures sur les bancs du groupe UMP).

Tout cela, vous voulez l’ignorer, et pourtant nos choix économiques et politiques en découlent : si le pouvoir d’achat ne compte pas, ou peu, dans la croissance, comme le prétend le Premier ministre, pourquoi chercher à l’augmenter par l’intermédiaire des salaires ? Pourquoi ne voulez-vous pas entendre parler de la répartition des richesses ? Il faut reconnaître que le partage de la valeur ajoutée se déforme au profit au profit des détenteurs de capital et au détriment des salariés.

M. Richard Mallié – C’est surtout vrai en Chine !

M. Jean-Claude Sandrier – Que proposez-vous donc sinon des mesurettes sans lendemain, qui ne seront pas appliquées ou bien qui ne produiront que peu d’effets ? C’est pourquoi nous voterons la question préalable (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR et du groupe SRC).

M. Philippe Vigier – Le groupe Nouveau centre ne souscrit pas aux propos de M. Le Bouillonnec, ce qui ne vous surprendra certainement pas.

M. Patrick Roy – On a l’habitude !

M. Philippe Vigier – J’ai été surpris par certains propos, dont l’excès tendait à la caricature (Protestations sur les bancs du groupe GDR). Pour avoir une certaine expérience du logement social, je sais combien la situation était difficile de 1997 à 2002 (Interruptions sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR). Tout n’est pas encore parfait aujourd’hui, mais cela va déjà mieux ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP ; exclamations sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR)

Je suis par ailleurs surpris que vous ne reconnaissiez pas les avancées contenues dans ce texte, notamment en matière de garanties et de loyers. Votre vision caricaturale de la situation dessert la cause du logement, qui nécessite des réponses inscrites dans la durée. Nous ne voterons donc pas la question préalable (Applaudissements sur les bancs du groupe NC et du groupe UMP).

La question préalable, mise aux voix, n'est pas adoptée.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance, qui aura lieu demain, mercredi 19 décembre, à 15 heures.

La séance est levée à 23 heures 25.

La Directrice du service
du compte rendu analytique,

Marie-Christine CHESNAIS

Le Compte rendu analytique
est disponible sur Internet
en moyenne deux heures après la fin de séance.

Le compte rendu analytique des questions au Gouvernement
est également disponible, sur Internet et sous la forme d’un fascicule spécial,
dès dix-huit heures

Préalablement,
est consultable une version incomplète,
actualisée au fur et à mesure du déroulement de la séance.

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