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Assemblée nationale

Compte rendu
analytique officiel

Séance du mardi 5 février 2008

2ème séance
Séance de 15 heures
116ème séance de la session
Présidence de M. Bernard Accoyer

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La séance est ouverte à quinze heures.

M. le Président – Je suis heureux de souhaiter la bienvenue à nos deux nouveaux collègues, élus députés dimanche dernier : Mme Françoise Vallet, dans la première circonscription d’Eure-et-Loir (Les membres du groupe SRC se lèvent et applaudissent longuement ; les membres du groupe GDR applaudissent également) ; M. Jean-Pierre Schosteck, dans la douzième circonscription des Hauts-de-Seine (Les membres des groupes UMP et NC se lèvent et applaudissent longuement).

QUESTIONS AU GOUVERNEMENT

L'ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.

TRAITÉ DE LISBONNE

Mme Jacqueline Irles – Le traité simplifié proposé par le Président de la République (Exclamations sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR) et accepté par l'ensemble de nos partenaires européens permettra à l'Europe de sortir de l'impasse et d’affronter les nouveaux défis internationaux. Il tient compte des inquiétudes exprimées par les Français lors du référendum… (Protestations sur les bancs du groupe GDR)

M. Maxime Gremetz – Comment pouvez-vous dire cela ?

Mme Jacqueline Irles – …et garantit, entre autres, de nombreux droits sociaux.

Le Congrès a adopté le projet de loi modifiant le titre XV de la Constitution. La révision a été ainsi acceptée par la droite, le centre et une partie de la gauche. Mais que de divergences au sein de l’opposition ! (Protestations sur les bancs du groupe SRC) Robert Badinter, sénateur socialiste, affirme que c’est une aberration que de ne pas voter « oui » ; Jean-Luc Mélenchon, sénateur socialiste, crie sa honte de voir la gauche empêcher le vote du peuple par voie de référendum ; quant à Pierre Moscovici, député socialiste, il annonce que le groupe SRC – qui s’est abstenu à Versailles – votera en faveur du projet de loi de ratification !

M. Guy Geoffroy – C’est le bazar !

Mme Jacqueline Irles – Toutefois, je tiens à saluer les membres du groupe SRC qui soutiennent ce traité et qui veulent donner à l'Europe un avenir (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP et du groupe NC ; protestations sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR).

M. Marcel Rogemont – C’est au Gouvernement que vous devez vous adresser !

Mme Jacqueline Irles – Monsieur le Premier ministre, quelles sont les perspectives qu’ouvre la fin de ce blocage institutionnel ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. François Fillon, Premier ministre  Le traité de Lisbonne est un traité de compromis et de réconciliation entre les Européens qui avaient dit « oui » et ceux qui avaient dit « non », entre les Français qui avaient dit « oui » et ceux qui avaient dit « non » (Protestations sur les bancs du groupe GDR et sur plusieurs bancs du groupe SRC).

Avec le Président de la République, nous avons écouté tous les points de vue et nous en avons tenu compte. Ce traité n’est pas une constitution, mais un instrument qui permet à l’Europe de reprendre sa marche en avant.

J’ai présidé ce matin un comité interministériel pour préparer la présidence française. Imaginez-vous un instant quelle aurait pu être notre situation si nous avions dû assumer cette présidence sans avoir sorti l’Europe de la crise ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe NC ; protestations sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR) ?

M. François Rochebloine – Très bien !

M. François Fillon, Premier ministre Nous entendons négocier un accord historique sur la lutte contre le réchauffement climatique ; nous prévoyons de négocier un accord sur une politique commune de l’immigration et sur l’accentuation des contrôles aux frontières de l’Union ; nous proposerons aux Vingt-Sept un accord sur le renforcement de la régulation des marchés financiers ; enfin, nous avons l’intention d’avancer sur la question de la sécurité européenne, dans un contexte d’exacerbation des tensions et des conflits internationaux.

Le traité de Lisbonne et les nouvelles institutions que vous avez décidé de donner à l’Europe nous permettront d’agir. Je suis convaincu que l’histoire condamnera ceux qui ont sacrifié l’intérêt national à leurs intérêts partisans (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe NC ; protestations sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR).

Mme Marie-George Buffet – C’est vous qui serez jugés !

POUVOIR D’ACHAT

Mme Françoise Vallet (Les membres du groupe SRC se lèvent et applaudissent longuement)Élue députée de la première circonscription d’Eure-et-Loir, j’étais il y a quelques heures encore sur le terrain. La déception y est si grande – nombre de nos concitoyens attendent de voir les promesses de Nicolas Sarkozy se réaliser – qu’après l’invalidation de mon prédécesseur, membre du parti majoritaire, les électeurs ont voulu adresser un signal au Gouvernement (Protestations sur les bancs du groupe UMP).

Lors de mes rencontres, sur les marchés, dans les hypermarchés, dans les campagnes ou dans les villes, tous évoquaient la question du pouvoir d’achat et témoignaient de leur angoisse face à son érosion (Interruptions sur les bancs du groupe UMP). Ainsi, une cliente retraitée, rencontrée à la caisse d’un magasin, se plaignait de ne plus pouvoir remplir son caddie avec son budget habituel. De même, bien des jeunes couples ne trouvent plus à se loger. De tels cas se multiplient, et l’attente est la même partout ! En tant qu’élue de ma circonscription, je me sens investie de la mission urgente de vous transmettre la question que se posent nos concitoyens… (Le brouhaha constant se transforme en huées sur les bancs du groupe UMP)

M. Charles de la Verpillière – Voudrait-elle sauver la France, comme Ségolène ?

Mme Françoise Vallet – Comment le Gouvernement répondra-t-il à leur angoisse ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR)

Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l’emploi Comme l’ensemble de vos collègues, Madame Vallet, vous représentez le peuple tout entier ! Et c’est aussi pour lui qu’agit le Gouvernement, car nous sommes tous ensemble sur le terrain, à l’écoute de nos concitoyens ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP) Vous chantez toujours la même chanson, mais nous resterons déterminés à mener nos réformes dans l’intérêt de tous ! Dois-je vous rappeler toutes les mesures que nous avons déjà prises pour améliorer le pouvoir d’achat des Français ? (Vives exclamations sur les bancs du groupe SRC)

MM. Jean-Yves Le Bouillonnec et Patrick Roy  – Zéro !

Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l’emploi Une entreprise sur deux a déjà recours aux nouvelles mesures sur les heures supplémentaires : ça marche ! Le crédit d’impôt sur les intérêts d’emprunt pour l’acquisition d’une résidence principale ? Ça marche ! (Huées sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR) L’exonération de droits sur les petites successions ? Ça marche ! La prime à la cuve de 150 euros pour les foyers modestes ? Ça marche ! La modération des prix liée à l’amélioration de la concurrence dans la grande distribution et la modification de l’indexation des loyers ? Ça marche ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP ; protestations sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR)

Plusieurs députés du groupe SRC – Et le bouclier fiscal ?

Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l’emploi Le Gouvernement réduit la charges publique et les prélèvements obligatoires autant que l’état des finances publiques le permet. Enfin, je recevrai demain un rapport sur les nouveaux indices qui, fondés sur la réalité quotidienne, permettront de mesurer précisément l’augmentation du coût de la vie. Contrairement à ce que vous semblez croire, ce n’est pas avec le même gâteau que nous agrandirons les parts : c’est en agrandissant le gâteau par le développement de l’emploi, de l’investissement et de la compétitivité ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

DROIT DE PRÉEMPTION DES SAFER

M. Alfred Marie-Jeanne – La loi du 8 août 1962 autorise les sociétés d’aménagement foncier et d’établissement rural à exercer leur droit de préemption sur des fonds agricoles et des terrains agricoles ou non bâtis afin d’encourager l’installation d’agriculteurs, la lutte contre la spéculation et la protection de l’environnement. Sauf dérogation ou fraude tardivement prouvée, ce droit est jugé illégal en cas de vente avec réserve d’usufruit ou de nue-propriété. Or, c’est pour cela que la surface agricole utile décroît d’environ mille hectares par an depuis dix ans, et avec elle le nombre d’exploitants, au point qu’ils représentent aujourd’hui moins de 2 % de la population active de l’île. J’ajoute que le prix de la terre est devenu prohibitif, et que la spéculation foncière ne cesse de s’étendre. Compte tenu de l’exiguïté de la Martinique, ne pourrait-on pas étendre le droit de préemption des SAFER aux cas de ventes avec réserve de nue-propriété ou d’usufruit ? (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR et du groupe SRC)

M. Michel Barnier, ministre de l'agriculture et de la pêche  Le contournement du droit de préemption des SAFER ne se développe pas qu’en Martinique. Vous l’avez dit : les SAFER ont pour vocation de préserver l’usage agricole des terres, mais aussi de protéger l’environnement et d’intervenir à la demande des collectivités. Pour satisfaire à votre souci, il faudrait étendre le droit de préemption des SAFER aux transactions portant sur des propriétés démembrées entre nue-propriété et usufruit. C’est une question importante qui m’a incité à créer une mission d’audit et d’expertise, dont les conclusions vous seront naturellement communiquées, ainsi qu’à l’ensemble de la représentation nationale (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP).

MALTRAITANCE

M. Francis Vercamer – Les trop nombreux cas de maltraitance envers des personnes âgées ou handicapées sont d’autant plus inacceptables qu’ils se produisent souvent dans un milieu censé les protéger, qu’il s’agisse de la famille ou d’une institution. Ils sont des plus variés, allant de la violence physique ou morale à la simple négligence, en passant par le vol ou l’escroquerie. De nombreux dispositifs de signalement ont été créés, au point que 13 600 appels de détresse ont été recensés en 2006. Pour autant, ces dispositifs restent complexes et insatisfaisants : songez par exemple que trente-six départements ne disposent pas encore de numéro d’appel. Que compte faire le Gouvernement pour garantir à toutes les victimes de maltraitance l’égalité d’accès aux services de signalement sur l’ensemble du territoire ? (Applaudissements sur les bancs du groupe NC)

Mme Valérie Létard, secrétaire d’État chargée de la solidarité – Quelle qu’en soit la forme, de la violence physique à la spoliation, et qu’elle soit perpétrée au domicile ou en établissement, la maltraitance des personnes âgées et handicapées est inacceptable. Pourtant, elle ne doit pas être une fatalité ! Ainsi, en 2006, 13 600 appels de détresse ont été reçus bien que 36 départements ne soient pas couverts.

Nous avons donc décidé de créer un numéro d’appel national unique de signalement des cas de maltraitance faites aux personnes âgées et handicapées. Ce numéro, le 3977, est ouvert depuis ce matin. Il permettra de mobiliser des centaines de professionnels et de bénévoles – dont je souhaite qu’ils soient rejoints par des centaines d’autres. Ainsi, toutes les victimes de manquement grave à leur dignité pourront être prises en charge puisque, grâce à une aide de 1,360 million d’euros de l’État, chaque département disposera d’une antenne locale. Le Gouvernement montre ainsi, une nouvelle fois, sa volonté de solidarité concrète avec les plus fragiles (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP et du groupe NC).

SITUATION AU TCHAD

Mme Geneviève Colot – Depuis longtemps, la France entretient des relations suivies avec le Tchad, où plus de 1 500 de nos compatriotes résident, contribuent au développement du pays, aident la population et honorent les contrats que nous avons passés ; ils font partie de ces quelque deux millions de Français qui font rayonner notre pays hors ses frontières.

Mais aujourd’hui, au Tchad, nos compatriotes sont en danger. Alors que des combats très durs ont lieu entre l'armée tchadienne et les rebelles au coeur de N’Djamena, les forces françaises présentes sur place assurent de manière exemplaire et souvent héroïque la sécurité des expatriés en s’attachant avec courage et dévouement à les mettre à l’abri du danger (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et sur quelques bancs du groupe SRC).

Pouvez-vous, Monsieur le ministre, nous préciser la situation de nos compatriotes à N'Djamena et dans le reste du pays, nous dire comment se déroule l’évacuation de nos compatriotes et des autres ressortissants étrangers, et nous indiquer quelles mesures sont prises pour l’accueil en métropole de ces familles traumatisées ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Bernard Kouchner, ministre des affaires étrangères et européennes  Quand les troubles ont commencé, il y avait à N’Djamena 1 262 ressortissants français et plus de 1 600 étrangers. Dès le premier jour des combats, nous leur avons demandé de se regrouper dans des centres – mais nous ne les y avons pas contraints, et certains ont préféré rester chez eux. Une fois ces regroupements effectués, quatorze vols ont eu lieu entre N’Djamena et Libreville, où 1 200 personnes ont trouvé refuge, accueillis par nos diplomates, nos militaires, les ONG et la Croix-Rouge. Deux vols vers Paris ont ensuite été organisés depuis Libreville, et un troisième arrivera demain. En tout, quelque mille personnes auront ainsi regagné notre capitale, grâce au courage de nos militaires, de nos diplomates et des bénévoles, que je remercie. Il n’y a eu aucun blessé, sinon deux militaires légèrement atteints. Nos soldats ont aussi prêté assistance aux blessés dans les rues – on en a dénombré 200 vendredi et encore 50 samedi ; il y a eu deux morts à l’ambassade d’Arabie saoudite, dont je salue la mémoire. Nos militaires ont fait sortir et protéger le personnel des ambassades d’Allemagne, des États-Unis, de Chine et de la représentation des Nations unies à N’Djamena.

Il faut maintenant que la paix se rétablisse. Le Gouvernement se félicite donc de la ferme déclaration du Conseil de sécurité des Nations unies et des encouragements reçus de l’Union africaine. La France, qui est favorable à un cessez-le-feu, ne fournit pas d’aide directe au combat. Elle est convaincue que le déploiement, dans quelques jours, de la mission de l’Eurofor au Tchad, est le meilleur moyen d’aider la population (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP).

PLAN ALZHEIMER

M. Jean Leonetti – Vendredi, le Président de la République a présenté à Sophia-Antipolis les grandes lignes du plan Alzheimer. La maladie d'Alzheimer touche quelque 860 000 personnes en France et l’on compte chaque année 65 000 nouveaux cas. Cette affection a des conséquences sociales, l'isolement des patients à eux-mêmes et aux autres ayant un très important retentissement sur leurs proches, qui doivent être aidés. Elle pose un problème médical, car il faut dépister plus précocement la maladie et encourager la recherche. Elle pose enfin un problème éthique, celui du respect de la dignité de toute personne, fût-elle diminuée. Quelles sont, madame la ministre de la santé, les orientations de ce plan d'une ampleur sans précédent, puisqu’il est doté de 1,6 milliard d'euros sur cinq ans ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé, de la jeunesse et des sports Vous avez rappelé le redoutable enjeu que représente la maladie d’Alzheimer en termes de santé publique, enjeu qui explique que le Président de la République ait fait une priorité de l’amélioration de la prise en charge des malades et de l’accélération de la recherche. Le plan décidé est ambitieux, vous l’avez souligné. Il comporte plusieurs volets. Je ne traiterai ni de son chapitre médico-social ni de celui qui concerne la recherche. Sans vous donner la liste exhaustive des vingt-deux mesures qui relèvent des compétences du ministère de la santé, j’insisterai sur l’amélioration du dispositif d’annonce de la maladie et sur la généralisation des « consultations mémoire » sur tout le territoire.

En outre, trois centres « mémoire » dédiés seront créés, dont un destiné aux personnes de moins de soixante ans atteintes d’Alzheimer – et qui sont au nombre de 6 000. En même temps, dans chaque centre de soins de suite et de réadaptation, une unité spécifique sera établie. Enfin, il faut mieux coordonner le sanitaire et le médico-social, et je tiens à saluer ce que vous avez accompli à Antibes, pour un centre d’accueil de jour, comme, plus généralement, l’action de M. Estrosi en tant que président du conseil général (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe NC ; exclamations sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR).

La recherche médicale sera confortée par le biais des plans hospitaliers de recherche clinique et d’une carte d’information destinée aux malades ; 15 % d’entre eux sont actuellement hospitalisés en service d’urgence, car les aidants ne savant souvent pas comment prendre en charge les phénomènes d’aggravation de cette maladie (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe NC).

PLAN ALZHEIMER ET FRANCHISES MÉDICALES

Mme Michèle Delaunay – Le plan Alzheimer vient enfin d’être présenté par le Président de la République. Attendu par tous eu égard à la gravité de la maladie et au nombre croissant de malades, il pose le problème de son financement. Les propositions correspondent exactement, en termes de créations de places et de renforcement du personnel, au plan de solidarité pour le grand âge annoncé en 2006. Deux ans se sont écoulés et ce plan n’a jamais été financé ; de la « maison de retraite de demain » que vous promettiez, nous n’avons pas vu la première pierre !

Vous prévoyez 1,5 milliard pour le plan Alzheimer ; cela n’est pas excessif et, après tout, ne représente que le dixième de ce que vous avez donné aux plus riches en juillet ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP et du groupe NC ; applaudissements sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR) Sur cette somme, 400 millions proviendront des franchises médicales ; ce sont donc les plus pauvres et les plus malades qui paieront pour les plus vieux et les plus vulnérables. Vous renversez le principe de la protection sociale (« C’est faux ! » sur les bancs du groupe UMP et du groupe NC), selon lequel chacun contribue selon ses moyens et reçoit selon ses besoins. Reste à trouver 1,1 milliard, qui n’apparaît pas dans le budget que nous avons voté ; qu’avez-vous donc prévu ?

Le sujet est trop grave ; nous n’avons pas besoin d’annonces, mais de certitudes. Quel plan de rigueur sortirez-vous de vos cartons, après les élections municipales, pour financer la perte d’autonomie ?

M. le Président – Veuillez posez votre question.

Mme Michèle Delaunay – Quelle part ferez-vous aux assurances privées, que seuls les plus riches peuvent payer ?

Madame la ministre, poursuivrez-vous longtemps cette politique selon laquelle les malades doivent payer pour les plus malades d’entre eux et pour leur fin de vie ? Comment financerez-vous le plan Alzheimer ? Nous voulons une réponse précise (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR).

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé, de la jeunesse et des sports Il n’est pas inutile de rappeler l’enjeu de santé publique que représente la maladie d’Alzheimer, véritable drame pour les malades et leurs familles. C’est la raison pour laquelle le Président de la République a annoncé à Nice, le 1er février, un plan d’une ampleur, inégalée, de 1,6 milliard. La plus grande partie de ce plan, consacrée au secteur médico-social et pilotée par M. Bertrand et Mme Létard, est dotée de 1,2 milliard (Applaudissements sur les bancs du groupe NC), pour la création de places de toute nature. Par ailleurs, 200 millions seront confiés à Mme Pécresse pour le financement de programmes de recherche ambitieux. Enfin, comme je l’ai dit à M. Leonetti, 226 millions iront au secteur sanitaire – dont, pour ne donner qu’un seul exemple, 14,4 millions à une fondation pour la recherche clinique.

Il était temps de prendre nos responsabilités et de trouver des financements. Les franchises médicales…

M. Patrick Roy – Haro sur les malades ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP et du groupe NC)

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé ..., qui rapporteront 850 millions par an, y contribueront, avec les partenaires que sont l’État, l’assurance maladie et la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (Brouhaha sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR). Nous n’avons pas voulu jouer l’irresponsabilité, mais mettre les garde-fous qui, avec les franchises, vont protéger les plus faibles (Vives exclamations sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR), tout en assurant un financement pour ces nouveaux enjeux de santé publique. Chaque année, un rapport remis au Parlement indiquera l’utilisation des franchises et rendra compte de l’évolution du plan Alzheimer (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe NC).

MINIMUM VIEILLESSE

M. Jean-Pierre Dupont – Demain, le Président de la République réunira les partenaires sociaux pour fixer l’agenda des réformes dans le domaine de la protection sociale pour 2008. J’espère que le rendez-vous sur les retraites prévu par la loi du 21 août 2003 sera abordé, car il est important de garantir l’équilibre financier de notre système de retraites de façon pérenne. L’avenir de notre système de protection sociale en dépend !

Avec l’allongement de l’espérance de vie, les élus sont régulièrement saisis pour que le processus de réforme entrepris par notre majorité en 1993 et 2003 soit poursuivi. Les retraités les plus fragiles attendent un geste, qui leur permette de mieux vivre, ou tout simplement de vivre décemment ; ils l’attendent avec d’autant plus d’impatience que des engagements ont été pris durant la campagne électorale.

Même si la pauvreté a reculé parmi les retraités (Exclamations sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR), puisque le nombre de bénéficiaires du minimum vieillesse a diminué de près de 40 % en dix ans, il n’en reste pas moins que les plus âgés, particulièrement lorsqu’ils n’ont pour tout revenu qu’une pension de réversion, rencontrent de vraies difficultés au quotidien. La nation a un devoir de solidarité envers eux.

Monsieur le ministre, je souhaiterais savoir ce que le Gouvernement entend proposer pour les bénéficiaires du minimum vieillesse et ceux qui ne disposent que d’une petite pension de réversion pour vivre (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe NC ; « Rien ! » sur les bancs du groupe SRC).

M. Xavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité – Nous entendons avant tout tenir les engagements que nous avons pris devant les Français (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP ; interruptions sur les bancs du groupe SRC). Nous augmenterons donc le minimum vieillesse : 628 euros pour une personne seule, ce n’est pas assez pour vivre dans des conditions décentes (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP). La pension de réversion représente aujourd’hui 54% du montant de la pension du conjoint décédé : ce n’est pas non plus assez, le Président de la République l’a dit. Nous augmenterons donc aussi les pensions de réversion ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP ; interruptions sur les bancs du groupe SRC) Mais nous aurons également à cœur de garantir le pouvoir d’achat de l’ensemble des retraités : c’est une exigence légale, sociale, mais aussi morale. Ce sujet sera abordé lors du rendez-vous sur les retraites de 2008. Le Président de la République en fixera demain le calendrier avec les partenaires sociaux, de même qu’il fixera celui de la mise en place du risque dépendance. Notre société vieillit ; il importe d’en tirer toutes les conclusions en garantissant à nos aînés des conditions de vie décentes. Nous aurons également à déterminer le calendrier de notre politique familiale pour l’année 2008. Nous serons au rendez-vous des engagements pris sur tous ces sujets, dans le prolongement de la réforme Fillon de 2003. Plus encore que d’autres, les retraités ont droit à la solidarité nationale ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe NC)

AVENIR DE L’USINE DE GANDRANGE

M. Jean-Paul Anciaux – Le Président de la République s’est rendu hier à l'usine Arcelor Mittal de Gandrange en Moselle. Je suis très attentif à cette actualité : l’entreprise Industeel, composée d'une aciérie, d'un laminoir et d'une fonderie, filiale d'Arcelor Mittal qui compte près de 1000 salariés et est largement tournée vers l'exportation, est implantée sur ma circonscription d’Autun – le Creusot.

Quelque 600 emplois sur 1 100 sont aujourd’hui menacés en Moselle par un projet de fermeture de l'aciérie. Il semble que la direction du premier producteur mondial d'acier juge ses installations non rentables. Les syndicats dénoncent pour leur part le manque d'investissements et l'absence d'anticipation des départs à la retraite, qui conduit à une importante perte de savoir-faire.

Le PDG d'Arcelor Mittal a accepté le 28 janvier, au sortir d'un entretien avec le Président de la République, le plan de fermeture partielle de Gandrange jusqu'à la présentation début avril d'un contre-projet élaboré en partenariat avec l'intersyndicale.

Il ne serait pas acceptable qu'une décision soit anticipée ou que les contre-propositions des partenaires sociaux ne soient pas suffisamment prises en compte dès maintenant.

Le Président de la République a indiqué hier que l'État préférait investir dans la modernisation de l'outil industriel plutôt que de financer des préretraites et d’accompagner socialement des salariés privés d'emploi. Je l’approuve sans réserve. Vous connaissez mon attachement au dialogue social, et vous vous êtes entretenue avec le Premier ministre et le Président de la République. Quel regard portez-vous sur l'annonce de cette fermeture ? Quelles mesures immédiates prendrez-vous pour sauver ces emplois ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l’emploi Contrairement à un certain nombre de ses voisins – je pense notamment à la Grande-Bretagne –, la France est un grand pays industriel. Pour conserver une industrie sidérurgique, elle doit maintenir son infrastructure. Deux scénarios sont en présence : celui du groupe Arcelor Mittal, qui a acheté le site de Gandrange pour un euro symbolique en 1999 et qui estime qu’il n’est pas en mesure de consentir les investissements qui permettraient de maintenir l’intégralité du site, et celui des organisations syndicales, pour qui d’autres solutions sont possibles. Grâce à l’intervention du Président de la République, un délai supplémentaire de deux mois a été obtenu pour les examiner. Ce qui est certain, et le Président de la République l’a rappelé avec force à Gandrange, c’est que l’État consacrera tous les moyens dont il dispose à assurer la pérennité d’un site industriel qui est nécessaire au maintien d’une activité stratégique.

Deux enseignements sont à tirer de cette affaire. Il convient d’abord d’anticiper les mutations industrielles dans le cadre du dialogue social. Les maisons de l’emploi, auxquelles vous êtes très attaché, sont un des moyens pour cela (Exclamations sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR), de même que la gestion prévisionnelle de l’emploi. Ensuite, il nous faudra faire des efforts considérables sur le front de la formation professionnelle, que nous allons réformer en 2008.

Le groupe Arcelor Mittal s’est par ailleurs engagé à créer 800 emplois, dont 400 dans le bassin lorrain. Quoi qu’il en soit, le Gouvernement sera particulièrement attentif, dans les deux mois qui viennent, à l’examen des différents scénarios (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP).

RETRAITES

Mme Geneviève Gaillard – La semaine dernière, Monsieur le Premier ministre, une de nos collègues vous a interrogé sur la baisse du pouvoir d’achat, qui touche plus particulièrement les petites retraites et les retraites agricoles. Vous ne lui avez pas répondu précisément. Entre-temps, M. Guéant s’est engagé lors d’une interview à revaloriser les petites retraites et des pensions de réversion. Sa parole engage-t-elle le Gouvernement ? Notre collègue Dupont vient de poser une question sur le sujet ; M. Bertrand ne lui a pas répondu. Nous n’avons que faire de mots : nous voulons savoir quand et comment vous allez revaloriser les petites retraites et les pensions de réversion ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et sur quelques bancs du groupe GDR) Nos concitoyens qui sont dans la souffrance ont besoin de le savoir : vous devez nous répondre précisément ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et sur quelques bancs du groupe GDR)

M. François Fillon, Premier ministre  Xavier Bertrand vient de le dire (« Guéant ! » sur les bancs du groupe SRC) : les engagements du Président de la République seront intégralement tenus (« Guéant ! Guéant ! » sur les bancs du groupe SRC). Nous revaloriserons donc le minimum vieillesse de 25 % en cinq ans, en commençant dès 2008. Nous porterons également les pensions de réversion à 60 % d’ici la fin du quinquennat (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe NC) Nous veillerons enfin à ce que la loi de 2003 soit appliquée et à ce que les retraites suivent l’inflation. Mais il n’est pas anormal que nous voulions discuter avec les partenaires sociaux – gestionnaires du régime général et des régimes complémentaires - avant de lancer ces chantiers.

Pour parler des retraites, encore faut-il avoir pris ses responsabilités pour les sauvegarder dans le passé ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP) Vous n’avez jamais rien fait pour les retraites ! (« Six ans ! » sur les bancs du groupe SRC) En 1993, vous avez dit non à l’allongement de la durée de cotisation ; en 2003, vous vous êtes opposés à la loi sur les retraites, alors même que les partenaires sociaux y avaient donné leur accord ! (Huées sur les bancs du groupe UMP et du groupe NC) En 2007, vous vous êtes opposés à la réforme des régimes spéciaux ! Si vous aviez été au pouvoir, les régimes de retraite seraient aujourd’hui dans une situation intenable ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe NC) Je veux bien entendre les observations du parti socialiste sur les retraites, mais je préférerais qu’il fasse des propositions et qu’il agisse ! (Applaudissements prolongés sur les bancs du groupe UMP et du groupe NC ; protestations sur les bancs du groupe SRC)

VIOLENCES À L’ÉCOLE

M. Lionnel Luca – Je soumets à M. le ministre de l'éducation nationale une modeste fable intitulée Le professeur, le père et le juge.

« Un professeur en classe de sixième, excédé par le comportement d'un élève de onze ans qui le traitait délicieusement de « connard », lui admonesta une gifle. Un père, par ailleurs gendarme, connaissant bien le problème des adolescents ou préadolescents en rébellion, considéra que la meilleure façon d'enseigner le respect à son fils était de déposer plainte contre le professeur. Un juge, connaissant bien le problème des adolescents ou préadolescents en rébellion, considéra, lui, que la meilleure façon d’enseigner le respect à un enfant de onze ans était de mettre son professeur en examen après vingt-quatre heures de garde à vue, avant de le faire comparaître devant un tribunal pour violences aggravées. »

À une autre époque, pas si éloignée, le gamin aurait pu recevoir de son père une deuxième gifle pour avoir insulté son professeur (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP).

Cet événement a particulièrement choqué les enseignants, qui sont en première ligne sur le front de l'incivisme et parfois de la barbarie, mais aussi, fort heureusement, la très grande majorité des familles.

Quels sont les moyens utilisés par le ministère pour soutenir dans leur difficile mission les enseignants, contre lesquels on a recensé cette année 1 760 cas d'insultes, menaces et coups ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP, du groupe NC et de nombreux bancs du groupe SRC)

M. Xavier Darcos, ministre de l’éducation nationale – Hélas, ce que vous venez de décrire n’est pas une fable, mais la réalité. Dans notre société où les repères d’autorité disparaissent, l’on demande souvent à l’école de donner le sens de la hiérarchie et de la discipline, dont l’on ne trouve plus aucun signe dans bien des familles et dans bien des quartiers.

Plusieurs députés du groupe UMP – Bravo la gauche !

M. Jean Glavany – Exemplarité du Président !

M. Xavier Darcos, ministre de l’éducation nationale – Ce qui s’est produit n’est pas acceptable, et à travers ce fait divers tous les professeurs sont insultés et agressés (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe NC). Il ne suffit pas cependant de rappeler notre solidarité avec les enseignants ; le ministère a proposé diverses pistes.

La première, c’est l’établissement de règles claires : il faut un code de la paix scolaire, dont j’ai d’ailleurs entrepris la rédaction, afin que partout l’on connaisse les règles et les sanctions encourues et que l’on ne puisse pas dire « Selon que vous serez puissant ou misérable… ». Il faut faire apparaître clairement dans ces règlements intérieurs que l’élève qui insulte un professeur et le professeur qui tance un élève ne sont pas sur un pied d’égalité.

C’est la raison pour laquelle Rachida Dati et moi-même avons élaboré un texte (Exclamations sur les bancs du groupe SRC) visant à considérer comme une circonstance aggravante le fait d’agresser un enseignant – y compris en dehors de l’établissement scolaire.

D’autre part la commission Pochard, dans son rapport sur le métier d’enseignant, nous rappelle une promesse du Président de la République que nous tiendrons : les professeurs, qui affrontent souvent seuls les difficultés de notre société, méritent que nous soyons résolument derrière eux pour revaloriser leur métier et les faire respecter (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe NC).

ARCELOR MITTAL

M. Michel Liebgott – Le Premier ministre vient d’annoncer une augmentation des petites retraites, mais au bout de six ans, les petits retraités ne croient plus aux promesses gouvernementales ! Les Français ne croient pas davantage ce qu’ils viennent d’entendre dans la bouche de Mme la ministre de l’économie sur le reclassement des salariés d’Arcelor Mittal, et j’aimerais entendre le Premier ministre sur ce sujet.

M. Frédéric Cuvillier – Il est parti !

M. Michel Liebgott – Hier, à Gandrange, le Président de la République a fait des promesses tous azimuts ; mais alors pourquoi n’a-t-il pas convaincu M. Mittal lorsqu’il l’a rencontré il y a une semaine ? Et pourquoi, Madame la ministre de l’économie, tenez-vous des propos contraires, en disant que l’État ne peut pas forcer un industriel à investir et que M. Sarkozy n’a pas promis de chèque en blanc à M. Mittal ? S’agit-il simplement, en cette période préélectorale, d’une complicité tactique ? En tout cas, cette cacophonie est inquiétante. Les Français ne savent plus si le Premier ministre gouverne ce pays.

Plusieurs députés du groupe UMP – La question !

M. Michel Liebgott – L'intersyndicale et les salariés ont fait des propositions précises. Celles du Président de la République posent d’abord un problème économique : puisqu’on ne cesse de nous dire que les caisses de l'État sont vides, comment fera-t-on pour aider Arcelor Mittal ? Elles posent aussi un problème moral : comment demander au contribuable de payer pour un groupe qui va annoncer 8 milliards d'euros de bénéfice ?

Quelles sont les modalités techniques et financières des engagements pris ? Quelles sont les pistes de reprise ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC)

Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l’emploi L’on se préoccupe de la situation de Gandrange au plus haut niveau de l’État (Exclamations sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR). Le Président de la République, qui s’est rendu sur place hier accompagné de M. Xavier Bertrand, a dit qu’il était indispensable de maintenir un outil industriel dans le domaine de la sidérurgie. D’autre part, il a dit qu’il était plus efficace de mobiliser les ressources pour soutenir l’emploi que pour indemniser des gens qui restent chez eux ou cherchent un emploi. En évoquant les maisons de l’emploi, je parlais de la nécessité d’anticiper les mutations industrielles.

Le Président de la République a obtenu un délai supplémentaire de deux mois : deux mois, c’est important, et chaque jour va compter pour examiner tous les scénarios – celui proposé par l’industriel, qui manifestement ne convient pas, et ceux que proposent les organisations syndicales. J’espère que l’ensemble des responsables locaux sauront se mobiliser pour éviter une fermeture de site et faire en sorte qu’une solution puisse être trouvée avec le soutien de l’État (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP).

M. le Président – Nous en avons terminé avec les questions au Gouvernement.

La séance est suspendue à 16 heures.

La séance est reprise à 16 heures 20 sous la présidence de M. Salles.

RATIFICATION DE L’ORDONNANCE SUR LE MEDICAMENT

L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi, adopté par le Sénat, ratifiant l’ordonnance du 26 avril 2007 portant diverses dispositions d’adaptation au droit communautaire dans le domaine du médicament.

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé, de la jeunesse et des sports Afin de renforcer la qualité et la sécurité des produits de santé et d'assurer le dynamisme de la recherche thérapeutique, la Commission européenne a engagé en 2001 une réforme de fond afin d'instaurer un marché unique du médicament.

Dans ce cadre, ce projet vise à ratifier l'ordonnance du 26 avril 2007 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine du médicament.

Il s'inscrit dans la procédure prévue à l'article 38 de notre Constitution. Il s’agit d'intégrer au droit français cinq directives du Parlement et du Conseil européens, dont vous avez pu examiner le contenu lors des débats en vue de l'adoption de la loi du 26 février 2007.

L’ordonnance traite de produits très divers : produits d'origine humaine, aliments diététiques, produits cosmétiques, médicaments à usage humain et vétérinaire.

Je tiens en premier lieu à rendre hommage au remarquable travail de votre rapporteure, Cécile Gallez, et de la commission des affaires sociales.

M. Jean-Luc Préel – Très bien !

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé Ce texte comprend six articles. L'article 1er est celui de la ratification de l'ordonnance. L'article 1er bis sollicite une nouvelle habilitation de quatre mois pour légiférer par ordonnance, afin de mener à bien les travaux engagés sur deux projets d'ordonnance, l’un sur les sanctions pénales dans le domaine du médicament, l’autre pour compléter les dispositions législatives en matière d'assistance médicale à la procréation.

L'article 2 donne aux agents des douanes de nouvelles prérogatives de contrôle concernant les échantillons biologiques et les produits sanguins.

L'article 3 rectifie une erreur matérielle.

L'article 4 vise à corriger une ambiguïté dans le domaine des insecticides et acaricides à usage médical.

L'article 5 fait de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé l'unique autorité compétente en matière de recherche biomédicale.

L'article 6, introduit sur proposition du Sénat, prolonge de quelques mois le délai d'entrée en vigueur de la décision d'interdiction de l'utilisation à des fins humanitaires des médicaments non utilisés – les MNU – adoptée par l'article 32 de la loi du 26 février 2007. En effet le dispositif Cyclamed, malgré le dévouement des bénévoles et des associations, a soulevé plus de problèmes qu'il n'en a résolus. Les médicaments ainsi récupérés ne présentent pas de garanties suffisantes de conservation et de qualité, ils sont souvent inadaptés aux pathologies qu'ils sont censés soigner, et ont pu tomber dans des circuits parallèles de revente. Médecins du Monde et l'Ordre de Malte, ainsi que l'OMS, ont fait ce constat comme nous. Instaurer une période de transition, avec un encadrement strict, donnera aux associations humanitaires le temps de s'organiser.

Enfin, le Gouvernement propose cinq amendements.

Le premier, après l'article 1er bis, autorise à nouveau l'État à légiférer par ordonnance, pour étendre les dispositions de la loi du 26 février 2007 et celles de l'ordonnance du 26 avril 2007 aux territoires d'outre-mer.

Le deuxième amendement, qui tient compte du retard dans le calendrier parlementaire, vise à reporter du 1er avril au 1er juin 2008 l'entrée en vigueur de la disposition de l'article 5 instaurant à l’AFSSAPS un guichet unique « recherches biomédicales ».

Les troisième et quatrième amendements, après l'article 6, visent à instaurer une déclaration pour les dispositifs médicaux remboursés par la sécurité sociale et prévoient des sanctions en cas de non réalisation des études post-autorisation de mise sur le marché. Vous en aviez déjà discuté lorsque le Gouvernement les avait présentés dans le PLFSS. Le Conseil constitutionnel a considéré que les économies liées à ces mesures ne justifiaient pas leur rattachement à cette loi de financement.

Enfin, un amendement vise à ramener l'échéance de fin de récupération des médicaments non utilisés au 31 décembre 2008.

Il est urgent pour la France de se donner les moyens d'honorer ses obligations européennes. C’est pourquoi je ne doute pas de votre soutien à ce texte (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe NC).

Mme Cécile Gallez, rapporteure de la commission des affaires culturelles – Adopté par le Sénat en première lecture le 17 octobre 2007, ce texte a principalement pour objet de ratifier l'ordonnance du 26 avril 2007 prise sur le fondement de l'habilitation donnée au Gouvernement par la loi du 26 février 2007, pour transposer, non sans retard, un ensemble de directives européennes adoptées pour la plupart en mars 2004 et même début 2003 pour deux d'entre elles. Il s’agit notamment de prendre en compte l'émergence de nouvelles thérapies, de mieux garantir la protection de la santé et de promouvoir l'innovation et la compétitivité des entreprises.

La procédure par ordonnance paraissait nécessaire en raison des contraintes liées au calendrier parlementaire, de l'urgence de procéder à la transposition, alors que de nouvelles procédures en manquement risquaient d'être engagées contre la France, et du caractère assez technique et détaillé d'un certain nombre de prescriptions communautaires.

Il n'est pas interdit d'espérer qu'à l'avenir, la transposition de textes communautaires sera préparée plus en amont afin que la procédure de l'ordonnance n'apparaisse plus, de fait, comme la seule permettant à la France d'honorer ses engagements.

M. Jean-Luc Préel – Très bien !

Mme Cécile Gallez, rapporteure – Dans la perspective de la réforme de nos institutions, sans doute faut-il s'interroger également sur les raisons de l'engorgement du calendrier législatif, qui conduit à différer l'examen de textes pourtant prêts, comme ce projet en fournit de nouveau l'illustration.

L’ordonnance que ce projet ratifie comporte 53 articles, d'inégale importance et parfois très techniques. J’en mentionne les éléments les plus importants.

Des dispositions prévoient la désignation d'une personne responsable de la sécurité et de la qualité des tissus et cellules humains dans chaque établissement habilité à stocker et utiliser ces produits. D’autres étendent le contrôle des agents des douanes à certains produits sensibles, tels que les produits sanguins destinés à la recherche ou les échantillons biologiques.

Une procédure simplifiée d'enregistrement est également créée pour certains médicaments traditionnels à base de plantes. Par ailleurs, le principe de l'interdiction des expérimentations animales dans le domaine des cosmétiques est posé. En cas de non respect de la réglementation applicable aux activités transfusionnelles, le régime des sanctions pénales prévues au niveau communautaire est transposé. En outre, la classification des substances et préparations chimiques dangereuses est actualisée. Les articles 2 à 4 du projet de loi permettent de préciser ou de compléter certaines dispositions prévues par l'ordonnance.

La publication de l'ordonnance et le dépôt du projet de loi de ratification ont eu lieu avant l’échéance fixée par la loi du 26 février 2007. L'ordonnance s'inscrit dans les limites de l'habilitation accordée par le Parlement et est même légèrement en deçà, deux mesures n'ayant pu être prises dans les délais prescrits. Ce projet de loi permet d'assurer la sécurité juridique des mesures d'harmonisation, de simplification et d'amélioration de la sécurité et de la qualité des produits de santé contenues dans l'ordonnance.

Les nouvelles dispositions introduites par le Sénat contribuent à élargir la portée de ce texte, puisqu'il comporte désormais des mesures relatives aux recherches biomédicales et aux conditions de redistribution des MNU.

À l'article 1er bis, une nouvelle habilitation est demandée par le Gouvernement pour aménager le régime des sanctions pénales et administratives dans le domaine des produits de santé et pour poursuivre la transposition de la partie de la directive du 31 mars 2004 relative aux dons de gamètes et l’assistance médicale à la procréation. Ces projets d'ordonnance, engagés sur le fondement de la loi du 26 février 2007, n’ont pu être publiés dans les délais en raison du nombre de concertations requises et du caractère très technique de certaines de leurs dispositions.

À l’article 5, le Gouvernement propose de confier à l'AFSSAPS les responsabilités qui incombent au ministre chargé de la santé, s’agissant de certaines recherches biomédicales, notamment sur l'évaluation des stratégies thérapeutiques. Madame la Ministre, pourriez-vous nous dire pourquoi vous avez choisi l’AFSSAPS plutôt que l’Agence de la biomédecine, en particulier pour les recherches engagées dans le domaine de la génétique ?

Le dernier article traite des MNU, rapportés dans les officines dans le cadre de Cyclamed. Avec l'avis favorable du Gouvernement, le Sénat a reporté l'entrée en vigueur de l'interdiction de redistribution humanitaire des MNU au plus tôt au second semestre 2009, alors que la loi du 26 février 2007 prévoyait une application au plus tard fin août 2008.

Il s’agit pourtant là d’un problème majeur, dont le règlement ne saurait être reporté sine die. En dépit des principes généreux de Cyclamed et du travail remarquable des associations – qui ont fait part de leur inquiétude – la redistribution des MNU dans les pays en voie de développement présente des risques très importants : les médicaments peuvent être périmés, inutilisables pour des raisons de langue, mal stockés, inadaptés aux besoins locaux ; leur distribution peut fragiliser les politiques pharmaceutiques et alimenter certains trafics. À mon initiative, la commission a donc adopté un amendement prévoyant de maintenir la date fixée dans la loi du 26 février 2007 : fin août 2008.

Afin de maintenir cette échéance, ou à défaut de la reporter de quelques mois seulement, les décrets d'application de la loi du 26 février 2007 doivent être rapidement publiés, les associations doivent disposer des moyens nécessaires pour poursuivre leurs activités, le ministère et l’AFSSAPS doivent examiner dans les meilleurs délais les demandes d'agrément et les demandes d'autorisation d'ouverture d'établissements pharmaceutiques. Plus généralement, cette question doit être replacée dans le cadre de la politique de coopération, afin d’adapter notre aide aux besoins de ces pays, où la vie est un combat quotidien.

J’ai sollicité de la commission le retrait de mon amendement dans la mesure où le Gouvernement propose de fixer au 31 décembre 2008 l'entrée en vigueur de cette réforme, compte tenu du « bon avancement des travaux du groupe de travail mis en place en juin dernier ». Madame la Ministre, pourriez-vous préciser comment seront organisées et financées les nouvelles sources d’approvisionnement des associations en médicaments ?

Je partage la préoccupation exprimée par Mme Catherine Lemorton quant à l’importance de sensibiliser nos concitoyens – par le biais d’une campagne grand public – au fait de rapporter leurs médicaments dans les officines, pour des raisons de sécurité environnementale et sanitaire.

Par ailleurs, la commission a adopté cinq amendements visant à mieux encadrer le dispositif dérogatoire qui permettrait à des associations humanitaires de délivrer gratuitement des médicaments aux personnes en situation de grande précarité en France. Il est apparu nécessaire de préciser que ces médicaments seront délivrés par des centres gérés par des associations agréées par le ministère de la santé, sous la responsabilité d'un pharmacien ou d'un médecin.

Sous ces réserves, je vous invite à adopter ce projet de loi (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe NC).

Mme Catherine Lemorton – Je veux d’abord vous remercier, Madame la Ministre, pour votre présence sur ces bancs. J’espère que dans les prochains mois, vous continuerez de prêter la même attention à la politique du médicament.

Il n'est pas admissible que les délais de transposition des directives soient aussi longs. Alors que la France s’apprête à présider l'Union, nous envoyons à nos partenaires un signe pour le moins surprenant : il faut attendre que les instances européennes engagent des procédures, trois ans après les échéances, pour que le Parlement soit enfin saisi ! Mais nos partenaires ignorent peut-être que nous avons été pris d'une frénésie législative au début de cette législature, qui fait oublier à certains leurs responsabilités sous la précédente et aux autres leurs obligations communautaires.

Je souhaite aussi revenir sur la méthode, Madame la Ministre, qui consiste à aborder dans ce texte des sujets qui devraient être traités ailleurs. J'avais déjà demandé au moment du vote du PLFSS 2008 un débat sur la politique de santé que vous entendez mener ; je regrette que vous ayez choisi de procéder par ordonnance.

Notre rapporteure nous en a expliqué les raisons : « l'urgence tout d'abord, puisque les échéances prévues pour la transposition de ces textes avaient expiré depuis plusieurs années ; d'autre part, le caractère assez largement contraint de la transposition, lié au degré de précision atteint par un certain nombre de directives, sans doute nécessaire pour l'achèvement du marché intérieur dans le secteur pharmaceutique ; enfin, le caractère très technique d'une grande partie de ces dispositions ».

Mme Gallez fait preuve de lucidité quant à votre activité sous la précédente législature : voilà plusieurs années que vous faites dormir ce texte ; avec la même pertinence, elle qualifie de « sans doute nécessaire » l'achèvement du marché intérieur dans le secteur de la pharmacie. Le groupe SRC a compris que vous ne vouliez pas aborder ce sujet devant la représentation nationale : votre politique de santé consiste en effet à démanteler le système de soins, que vous trouvez sans doute trop protecteur pour les plus faibles et trop onéreux pour l'État, vous empêchant de faire davantage de cadeaux fiscaux à votre clientèle la plus aisée (Protestations sur les bancs du groupe UMP).

Les franchises médicales, qui devaient permettre la prise en charge des malades d’Alzheimer, ont été votées dans l’urgence du PLFSS. Aujourd’hui, les comptes sont toujours en déficit, et les Français souffrent davantage de ce système détestable.

M. Jean-Pierre Door – Hors sujet !

Mme Catherine Lemorton – L’attitude qui consiste à présenter un texte comportant six articles, alors que le projet de loi initial n’en comptait que trois, est regrettable. Le groupe SRC, qui partage l’économie générale du texte et salue le travail effectué en commission, attendra donc le terme de cette discussion pour se prononcer sur la nature de son vote.

L'article 6 vise à supprimer le dispositif consistant à récupérer les MNU retournés en pharmacie par les usagers. Ne faut-il pas craindre que ceux-ci soient désormais conduits à jeter les médicaments, sans mesurer toutes les conséquences de ce geste, notamment environnementales ? Je souhaite que le ministère de la santé engage une campagne de sensibilisation à l’importance de la collecte et qu’il rappelle les pharmaciens à leurs devoirs, certains refusant désormais de recueillir les médicaments qui leur sont rapportés. D’autre part, de nombreuses associations craignent de rencontrer des difficultés d’approvisionnement. J’espère que nous aurons l’occasion de les rassurer. Enfin, je souhaite que ne soit pas institutionnalisée la distribution de médicaments gratuits dans les centres d’hébergement et de réinsertion. En effet, cela permet d’éviter la question fondamentale : pourquoi des personnes se trouvent-elles encore aujourd’hui exclues de notre système de soins (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR) ?

Mme Jacqueline Fraysse – Ce projet de loi vise à transposer en droit français cinq directives d’apparence technique qui concernent en fait un sujet essentiel : la qualité et la sécurité des produits de santé. Si elles comportent certaines avancées, elles laissent en suspens plusieurs questions auxquelles notre débat, je l’espère, permettra de répondre.

En ratifiant cette ordonnance relative au médicament, la France rattrapera le retard accumulé sur ses partenaires et évitera un recours en manquement devant la Cour de justice des Communautés européennes. L’ordonnance en question comporte plusieurs mesures légitimes qui renforceront le contrôle des produits d’origine humaine et des établissements qui les gèrent, pour autant que les moyens adéquats y soient consacrés. Je me félicite également du renforcement des sanctions en cas de violation du droit relatif à la délivrance et à la conservation des produits sanguins labiles, ainsi que de la nouvelle classification des substances et préparations chimiques, qui tient davantage compte des risques d’allergie ou d’empoisonnement. Je me réjouis aussi que les critères de refus, de suspension ou de modification des autorisations de mise sur le marché soient clarifiés, intégrant notamment la mesure du rapport entre risque et bénéfice. Je déplore toutefois que ce rapport soit négligé lors de la délivrance initiale. En outre, les contrôles postérieurs à l’AMM demeurent trop rares. Lors du débat sur la loi du 26 février dernier, j’avais déjà manifesté mon inquiétude concernant l’assouplissement des conditions de délivrance initiale des AMM et l’habilitation du Gouvernement à légiférer par ordonnance dans ces domaines. Je ne suis pas rassurée : la délivrance d’une AMM échappe encore à certains critères, dont la valeur thérapeutique ajoutée, qui favorise la recherche et l’innovation.

J’en viens au fond de l’ordonnance. Plusieurs dispositions relatives à la délivrance des AMM posent problème. Ainsi, une AMM initiale est accordée pour cinq ans et renouvelable pour une durée illimitée, dans des conditions que nous ignorons, car elles seront fixées par décret en Conseil d’État. N’est-ce pas contradictoire avec l’effort visant à renforcer les normes de sécurité des médicaments ? L’AFSSAPS peut certes réévaluer les effets thérapeutiques du produit autorisé, mais ne vaudrait-il mieux pas que cette réévaluation soit systématique ou, à défaut, encadrée par un délai strict ? Personne ne peut imaginer qu’une entreprise procède d’elle-même au contrôle de ses médicaments alors qu’elle dispose d’une autorisation illimitée – et donc à mon sens inefficace. Par ailleurs, le contrôle des produits devrait inclure une étude comparative, afin d’éviter que trop de produits ne coexistent dans une même classe thérapeutique, ou que certains nouveaux produits ne présentent aucune nouvelle vertu. Avec une AMM illimitée, de nouveaux produits performants seront en concurrence avec d’autres, obsolètes.

Les médicaments ne sont pas des produits comme les autres, Madame la ministre.

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé Je le sais bien !

Mme Jacqueline Fraysse – C’est pourquoi je regrette que l’on signe un chèque en blanc aux grandes entreprises pharmaceutiques dont chacun sait que la santé publique n’est pas l’objectif premier. J’ai donc déposé un amendement visant à revoir les AMM tous les cinq ans.

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé Ce n’est pas le texte approprié !

Mme Jacqueline Fraysse – De même, l’article 32 de l’ordonnance permet l’attribution d’une AMM provisoire sous certaines conditions exceptionnelles. La dérogation n’est certes pas à exclure, mais voilà qui ouvre une brèche sérieuse en matière de sécurité et de qualité des produits, puisque certains médicaments pourront être commercialisés sans que l’ensemble des critères soient vérifiés. Ce cadeau aux grandes entreprises n’est assurément pas une avancée pour la santé publique !

Ensuite, l’article 1er bis du projet de loi autorise le Gouvernement à légiférer par ordonnance. Je comprends qu’il faille gagner du temps, compte tenu de l’agenda chargé du Parlement, mais la procédure n’en est pas moins contestable. Gardons-nous d’en faire une règle dès lors qu’il s’agit de transposer des directives européennes. Celles-ci affectent la vie quotidienne de nos concitoyens, qui le savent bien et regrettent souvent de ne pas pouvoir peser plus sur leur élaboration. Après avoir refusé d’organiser un référendum sur le traité européen, vous exigez maintenant du Parlement qu’il renonce à débattre en profondeur de directives pourtant très importantes !

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé Voilà qui est complètement hors sujet !

Mme Jacqueline Fraysse – C’est pourquoi nous voterons contre cet article 1er bis.

S’agissant de la récolte et de la redistribution des médicaments non utilisés via l’association Cyclamed, je rappelle que l’État s’est déchargé de leur financement et de leur fonctionnement sur des associations dont l’action n’est pas coordonnée et qui sont le plus souvent financées par des laboratoires privés. Faute d’une mission de service public, le système ne donne donc pas satisfaction. Selon l’OMS et le HCR, le tri des médicaments n’est pas toujours adéquat, et les produits redistribués sont souvent inadaptés aux pathologies existant dans les pays destinataires, qui disposent rarement des moyens nécessaires à leur incinération en toute sécurité. L’article 6 du projet de loi prolonge le délai prévu avant la suppression de ce dispositif. Bien qu’imparfait, on ne peut pourtant pas se contenter de sa suppression : mieux vaudrait travailler avec les associations mobilisées pour élaborer un nouveau système plus pertinent, qui tiendrait mieux compte des pathologies des populations ou des dates de péremption des produits.

Bien qu’il contienne d’indéniables avancées, ce texte demeure insuffisant. Nous déciderons donc de notre vote à la lumière du débat et du sort réservé à nos amendements (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC).

M. Jean-Luc Préel – Ce projet de loi vise à transposer un ensemble de directives européennes, dont la directive technique du 31 mars 2004, qu’il fallait adapter dans notre droit avant le 30 octobre 2005 : il était temps ! Comme souvent, hélas, la France traîne les pieds. Espérons qu’elle ne tardera pas à rejoindre les bons élèves de l’Europe !

Le Gouvernement, nous dit-on, a choisi la voie de l’ordonnance en raison de l’urgence. Urgence toute relative, puisque la directive, d’ordre technique, date de 2004, et que son caractère contraint ne permet de toute façon pas d’en changer le fond. Pourtant, la procédure de l’ordonnance court-circuite le Parlement, d’autant plus qu’aucun projet de ratification déposé par le Gouvernement ne risque d’être rejeté.

Nous avions certes déjà discuté de ce projet de loi en janvier 2007, mais le débat avait été détourné par un article choquant dans lequel le Gouvernement demandait de pouvoir légiférer par ordonnance dans le domaine de l’observance. C’est au médecin qu’il revient d’expliquer au patient pourquoi il lui prescrit telle ou telle molécule, comment le traitement doit être suivi et quels effets secondaires il peut entraîner. C’est au médecin et à l’ensemble des professionnels de santé qu’il revient d’instaurer une relation de confiance avec le patient. Si l’article en question a disparu, le problème demeure, et ne saurait être réglé par ordonnance. Quelles sont, Madame la ministre, vos intentions à ce sujet ?

De nombreux débats au Parlement européen ont abouti à la directive équilibrée et importante que nous transposons aujourd’hui. L’ordonnance de transposition comporte 53 articles regroupés en huit chapitres consacrés à différentes catégories de produits. Curieusement, elle comporte un article autorisant le Gouvernement à légiférer par ordonnance en matière de sanctions pénales et administratives applicables dans le domaine des produits de santé, ainsi que pour poursuivre la transposition de la directive de 2004 relative au don de gamètes et à l’assistance médicale à la procréation. Sur des sujets aussi sensibles, la prudence s’impose. Il serait dommageable que cette ordonnance comporte des dispositions que nous n’aurions pas discutées, alors que nous devons dès l’an prochain revoir les lois de bioéthique de 2009.

Je ne reviendrai ni sur la protection des brevets ni sur la nécessité de promouvoir la recherche : ces impératifs s’imposent, car nous attendons tous des médicaments efficaces. Il faut donc favoriser les coopérations publiques et privées, et donner à l'industrie les moyens de financer la recherche et le développement de molécules innovantes et des thérapies géniques qui sont de plus en plus coûteuses. Vous souhaitez, Madame la ministre, développer l’utilisation des médicaments génériques. Ils sont, certes, moins coûteux que le médicament princeps, mais ce ne sont pas les génériqueurs qui découvriront de nouvelles molécules. Il faut donc veiller à protéger l'industrie qui innove en protégeant les brevets et en payant à un prix suffisant les molécules réellement innovantes. Je souhaite d’autre part qu’on soit plus attentif à la biodisponibilité des molécules. Des neurologues ont signalé récemment le cas d’épileptiques équilibrés par le princeps et qui, sous générique, voyaient les crises revenir. Si la chose est confirmée, elle mérite réflexion.

J’en viens à l'article 6, qui concerne l'utilisation à des fins humanitaires des médicaments non utilisés. Il s'agit là d'un problème de santé publique complexe. Pour faire bénéficier des populations dans le besoin, souvent en Afrique, des médicaments non utilisés rapportés dans les officines, les pharmaciens avaient créé « Cyclamed » et des associations avaient organisé la collecte, la vérification et la redistribution. Mais, en février 2005, un rapport de l'IGAS a démontré l'existence de fraudes et l’organisation d’un circuit parallèle de médicaments. Il est en outre apparu que moins de 5 % des médicaments collectés sont redistribués à des fins humanitaires. Aussi, un délai de dix-huit mois avait été fixé pour mettre en place une nouvelle filière. Il prend fin le 31 août 2008, mais la création de la nouvelle filière rencontrant des difficultés, les sénateurs, à la demande d'associations humanitaires, ont voté le principe de la prolongation du délai jusqu'au 31 décembre 2009. Notre rapporteure n'est pas favorable à cette prolongation ; je me félicite donc qu’un accord ait finalement été trouvé avec le Gouvernement, et que la prolongation soit à présent envisagée jusqu’au 31 décembre 2008 car la création d'une nouvelle filière, dans le respect d’une démarche qualité, est indispensable. Il convient en tout cas que la délivrance à titre gratuit de médicaments aux personnes en situation précaire se fasse sous la responsabilité d'un médecin ou d'un pharmacien.

Le groupe Nouveau centre votera ce projet équilibré. Il examinera cependant avec vigilance l’ordonnance future concernant la PMA et il souhaite la création rapide d’une nouvelle filière pour les médicaments non utilisés (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Jean-Pierre Door – Je me réjouis que ce texte puisse, enfin, être inscrit à notre ordre du jour car son aspect technique ne doit pas faire oublier son importance majeure pour la politique du médicament. Le projet nous permettra de parachever la transposition en droit interne de réformes adoptées en 2004 par l’Union européenne dans le domaine du médicament et destinées à intégrer les champs ouverts par la découverte de nouvelles thérapies, l'existence de nouveaux produits de santé et les impératifs de sécurité sanitaire.

Le projet vise avant tout à ratifier l’ordonnance prise le 26 avril 2007 sur le fondement de l'habilitation donnée au Gouvernement par la loi du 26 février 2007 afin de permettre à la France de transposer six directives adoptées en 2004. La loi du 26 février 2007 avait transposé la directive relative aux médicaments à usage humain. Pour les cinq autres, qui concernent le sang humain, les produits cosmétiques, les cellules et les tissus humains, les médicaments à base de plantes et enfin les médicaments vétérinaires, le Gouvernement avait souhaité pouvoir procéder par ordonnance. Je n'avais pas caché mes réserves sur la procédure. Il faut toutefois connaître qu’elle se justifie par l’urgence, car la France a déjà pris trop de retard dans cette transposition, et par la technicité des dispositions envisagées.

Cela étant, si le chantier est bien engagé, il n’est pas encore abouti, puisque le projet qui nous est soumis prévoit une nouvelle habilitation. Elle permettra de mener à bien deux projets d'ordonnance visant pour le premier à aménager le régime des sanctions pénales et administratives dans le domaine des produits de santé et pour le second à poursuivre la transposition de la directive du 31 mars 2004 dans sa partie relative aux dons de gamètes et à l'assistance médicale à la procréation.

Je ne reviendrai pas sur l'ordonnance du 26 avril 2007, remarquablement exposée par notre rapporteure, sinon pour constater avec satisfaction que le projet de loi de ratification a été déposé dans les délais requis et que son texte est contenu dans les limites de l’habilitation. L'examen du projet de loi d'habilitation, en février 2007, ayant été l’occasion d’un débat nourri, je n’y reviendrai pas, mais je dirai un mot des autres dispositions du texte, dont certaines ont été ajoutées par le Sénat.

À propos de l'article 5, je m’interroge, comme notre rapporteure : pourquoi transférer à l’AFSSAPS des missions concernant la recherche biomédicale qui incombent actuellement au ministre chargé de la santé et non pas, plutôt, à l'Agence de la biomédecine ? Je ne doute pas, Madame la ministre, que vous nous apporterez des précisions utiles.

Je regrette par ailleurs que nous soyons contraints de revenir, à l’article 6, sur la question de la redistribution humanitaire des médicaments non utilisés, alors que nous avions trouvé une solution toute de sagesse. La loi du 26 février 2007 prévoit la suppression du dispositif actuel d’ici fin août 2008 car, nul ne l’ignore et l’IGAS l’a confirmé, il ne donne pas satisfaction. Dans un esprit de responsabilité, notre assemblée, en votant la suppression du dispositif, avait souhaité laisser aux associations humanitaires et aux pouvoirs publics le délai nécessaire à la constitution d’une nouvelle filière. En dépit du laps de temps ainsi consenti, la nouvelle filière peine à se créer et, à la demande de certaines associations humanitaires, le Sénat a cru utile d’allonger le délai jusqu’à la fin 2009. Je ne pense pas que ce soit une bonne solution.

Dans un esprit de compromis, notre rapporteure a retiré un amendement tendant à maintenir l’échéance fixée par la loi du 26 février 2007 pour l’entrée en vigueur de l’interdiction de la redistribution des médicaments non utilisés. Je comprends les difficultés rencontrées, mais nous devons aussi envoyer un signal aux acteurs de la filière ; je me réjouis donc de la proposition de compromis du Gouvernement tendant à permettre l’entrée en vigueur de la réforme au 31 décembre 2008.

Je constate enfin que nombre de nos concitoyens ne savent plus s’ils doivent continuer de rapporter à leur pharmacien les médicaments non utilisés. Une campagne de sensibilisation à l'importance de la collecte pour la sauvegarde de l’environnement serait donc utile. Quelles initiatives entendez-vous prendre à ce sujet, Madame la ministre ?

Le groupe UMP constate l'absolue nécessité de l’adoption de ce texte pour parachever la transposition du « paquet médicament ». Je vous remercie donc, Madame la ministre, de votre implication dans l’aboutissement de la procédure en dépit des difficultés liées à la technicité du sujet et à un calendrier parlementaire chargé. J’espère que, comme en commission, ce projet sera adopté bien au-delà des bancs de l’UMP (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

Mme Dominique Orliac – Ce projet nous rappelle l'importance croissante de la législation européenne dans ce secteur stratégique. Dans le domaine du médicament comme en d’autres, l'Europe doit mener une politique ambitieuse, innovante et harmonisée, et le besoin d'une réglementation adaptée à l'échelle européenne s'est imposé il y a une dizaine d'années avec la découverte de nouveaux produits de santé, parallèlement à l'émergence de nouvelles exigences en matière de sécurité sanitaire. C'est dans cette optique que se sont inscrites les dernières directives européennes adoptées par le Parlement.

À l'occasion de l'examen du projet sur le médicament, le Gouvernement a demandé au Parlement l'autorisation d'assurer la transposition de plusieurs directives par voie d'ordonnances, et c’est l’aboutissement de cette habilitation qu’il nous est demandé d'examiner aujourd'hui. Nous ne pouvons que regretter le recours à une ordonnance, singulièrement lorsqu’elle soulève, comme c’est le cas, des questions de santé publique et de bioéthique. Mais il semble que le recours aux ordonnances est le seul moyen pour notre pays de tenir les délais quand il s’agit de transposer des directives…

Cela étant dit, les nouvelles dispositions, tendant à clarifier les rôles et à renforcer les sanctions en cas de non-respect de la réglementation applicable aux produits sanguins, apaiseront certaines craintes. L'ordonnance du 26 avril 2007 respecte le périmètre de l'habilitation délivrée par le Parlement et se situe même en deçà, puisque les dispositions relatives à l'harmonisation des sanctions pénales n’y figurent pas, la concertation entre les différents acteurs de la santé et du monde judiciaire n’ayant pu être achevée dans les délais impartis.

Ce projet de ratification comporte six articles. L'article premier concerne la ratification. L'article 2 rétablit certaines prérogatives des agents douaniers concernant les produits biologiques et sanguins. L'article 3 rectifie une erreur matérielle. Les trois derniers, introduits au Sénat, concernent respectivement les insecticides, la recherche biomédicale et la question délicate de la collecte des médicaments non utilisés et de leur redistribution à vocation humanitaire. Sur ce dernier sujet, je fais miennes les réflexions de Mme Lemorton.

Ce texte contribuant à une plus grande sécurisation des échanges de ces produits, les députés radicaux de gauche n’entendent pas s'opposer à son adoption. C’est néanmoins la discussion des amendements qui déterminera notre position finale.

Enfin, Madame la ministre, je souhaiterais vous poser une question. Le ministère de la santé ayant récemment annoncé la parution d'une liste de médicaments qui seront disponibles sans ordonnance dans les pharmacies, quand cette liste sera-t-elle rendue publique ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR)

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé Vous m’avez posé des questions pertinentes et techniques, auxquelles je vais essayer de répondre de la manière la plus précise possible.

Une salve de questions a été posée concernant l’avancement des travaux du groupe sur les médicaments non utilisés. Ce groupe de travail, placé sous l’égide de la direction générale de la santé et travaillant en liaison avec l’AFSSAPS, le regroupement des entreprises du médicament – le LEEM –, le ministère des affaires étrangères, la direction générale des affaires sociales, les représentants des industries pharmaceutiques, l’ordre des pharmaciens et les ONG, a pour but d’accompagner les organisations humanitaires du dispositif Cyclamed vers de nouvelles sources d’approvisionnement, sécurisées et pérennes. Il doit évaluer les besoins en médicaments des organisations non lucratives ainsi que les coûts induits par la création de nouveaux systèmes d’approvisionnement. Il s’agit de sécuriser juridiquement la distribution de médicaments aux populations démunies ainsi que la récupération des médicaments non utilisés au terme de la période transitoire en vue de leur incinération. Des textes sont en préparation. L’échéance du 28 août paraissant trop rapprochée, j’ai souhaité permettre aux associations de continuer à bénéficier d’un approvisionnement en MNU.

Mme Lemorton et M. Door m’ont interrogé sur le circuit de collecte des médicaments non utilisés dans les officines. Un décret sera pris pour maintenir un système de collecte distinct du circuit normal des déchets ménagers, mesure pleinement justifiée par les risques spécifiques des déchets issus de médicaments, qui rendent une incinération nécessaire. Préserver la collecte dans les pharmacies d’officine permet en outre de conférer sa portée sanitaire au dispositif, par l’information et la responsabilisation des usagers. Il est également fait obligation aux entreprises de prendre en charge l’élimination des médicaments non utilisés, au prorata du nombre de médicaments qu’elles mettent sur le marché au cours de l’année. Les entreprises pourront adhérer à un éco-organisme agréé par les pouvoirs publics sur la base d’un cahier des charges.

C’est une fois que ce texte sera finalisé qu’il sera opportun de mener une campagne de communication auprès de la population. Dans l’attente, il importe que nos concitoyens gardent le réflexe de rapporter les médicaments non utilisés à leur pharmacien et que ces derniers, ainsi que les grossistes, continuent de jouer leur rôle dans la redistribution humanitaire.

Mme Gallez et M. Door m’ont interrogé sur la pertinence de faire de l’Agence de la biomédecine l’autorité compétente sur les recherches actuellement gérées par le ministre de la santé. Cela ne nous paraît pas opportun à ce stade, pour deux raisons. Tout d’abord, la création d’un guichet unique pour toutes les recherches biomédicales répond à un souci de simplification, qui serait contrecarré par l’ouverture d’un autre guichet au sein de l’ABM. Ensuite, l’Agence remplit des missions spécifiques qui ne correspondent pas à ces recherches. Il est néanmoins prévu de modifier le décret d’avril 2006 relatif aux recherches biomédicales pour que l’AFSSAPS s’appuie sur un avis obligatoire de l’ABM.

Mme Gallez m’a également interrogée sur les cellules embryonnaires. Les textes européens ne portent pas atteinte aux décisions des États membres en la matière. Les cellules embryonnaires ne sont pas soumises aux dispositions relatives aux tissus et cellules, mais uniquement à celles relatives à leur conservation et utilisation. Certaines mesures de l’ordonnance concernent bien ce domaine, mais ne remettent pas en cause la position du législateur français. En tout état de cause, il sera de nouveau débattu de ce sujet au moment de la révision de la loi de bioéthique.

M. Préel a évoqué l’observance et, par là même, les programmes d’accompagnement des patients, qui sont un aspect important de l’éducation thérapeutique. Un rapport que m’a remis l’IGAS montre que les besoins en éducation thérapeutique sont importants et insuffisamment couverts. Les services du ministère de la santé et d’autres institutions, comme l’AFSSAPS, travaillent actuellement, sur la base de ce rapport, à une évolution de la réglementation. De tels programmes permettraient une meilleure prise en charge des patients, à condition de respecter les droits de ces derniers. Une autorisation réglementaire devra clarifier le rôle des différents intervenants, notamment pour lever toute ambiguïté entre information et promotion. Même si ces programmes ne sont pas assimilables à de la publicité, un encadrement prévoyant une autorisation préalable, un contrôle de l’AFSSAPS, des sanctions, ainsi que la désignation des opérateurs intervenant pour le compte des laboratoires, est nécessaire.

M. Préel m’a également interpellé sur le fait que certains médicaments génériques auraient une efficacité moindre que les princeps. Nous ne disposons d’aucune étude le démontrant. Peut-être y a-t-il un problème de biodisponibilité lié au conditionnement des médicaments, ou bien s’agit-il d’un phénomène d’auto-suggestion, certains croyant à tort que les génériques sont moins efficaces.

M. Door a évoqué les dispositions du paquet médicament qui restaient à transposer. Sur les six décrets relatifs au médicament humain, deux ont été pris, l’un sur la reconnaissance mutuelle et la procédure décentralisée d’AMM, l’autre sur la pharmacovigilance. Il en reste donc quatre à prendre : un sur l’AMM et les génériques, un autre sur les établissements – sur ces deux textes, les consultations ont été menées –, un troisième concernant l’enregistrement des médicaments à base de plantes et de médicaments homéopathiques, et le dernier, enfin, sur la publicité médicale. La publication de ces quatre textes est prévue avant la fin du premier semestre 2008.

M. Jean-Pierre Door – Très bien !

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé En ce qui concerne le paquet vétérinaire, un décret relatif à l’AMM et aux génériques est prévu pour mai 2008. Deux arrêtés sont élaborés parallèlement par l’AFSSAPS concernant les établissements pharmaceutiques, dont la publication est prévue en août 2008. Ces textes achèveront la transposition de la directive 2004-28-CE.

En ce qui concerne enfin les gamètes utilisés à des fins d’assistance médicale à la procréation, deux textes restent à prendre : une ordonnance relative aux dons de gamètes et à l’AMP – pour la finalisation de laquelle l’article premier bis accorde une nouvelle habilitation de quatre mois au Gouvernement – et un décret relatif aux dons de gamètes et à l’AMP, sur lequel planche depuis novembre un groupe de travail associant l’Agence de biomédecine et le ministère de la justice. La consultation sera effectuée en mars, et les deux textes devraient être publiés en juin.

Je profiterai bien sûr de l’examen des articles pour compléter mes réponses sur tel ou tel point particulier (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe NC).

M. le Président – J’appelle maintenant les articles du projet de loi dans le texte du Sénat.

ARTICLES PREMIER ET PREMIER BIS

L’article premier, mis aux voix, est adopté, de même que l’article premier bis.

APRÈS L’ARTICLE PREMIER BIS

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé L’amendement 9 vise à vous demander d’accorder une nouvelle habilitation législative au Gouvernement pour une durée de dix mois, afin de lui permettre de finaliser un projet d’ordonnance relatif à l’extension et à l’adaptation des dispositions de la loi du 26 février 2007 aux territoires et collectivités d’outre-mer. Le délai d’habilitation accordé par cette loi arrivera en effet à échéance le 27 février. Or la finalisation de cette ordonnance est subordonnée à la publication d’une autre ordonnance, relative à l’extension et l’adaptation des dispositions portant sur la protection des droits et de la dignité des personnes à l’égard des applications de la biologie et de la médecine et modifiant le code de la santé publique, qui est toujours en cours d’élaboration.

L'amendement 9, accepté par la commission, mis aux voix, est adopté.

ARTICLE 2

L'article 2, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L’ARTICLE 2

Mme Jacqueline Fraysse – L’amendement 7 vise à supprimer la disposition qui autorise la délivrance d’une autorisation de mise sur le marché illimitée dans le temps. Comme je l’ai dit, elle ne permet pas de réévaluation régulière de la pertinence de la mise sur le marché des médicaments.

Mme Cécile Gallez, rapporteure – Avis défavorable. Cet amendement est contraire à l’article 28 du code communautaire relatif aux médicaments vétérinaires. L’AMM est certes valable pour une durée illimitée, mais son renouvellement peut être demandé pour des raisons tenant à la pharmaco-vigilance.

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé Cécile Gallez a fait référence à l’article 28 de la directive du 31 mars 2004, qui prévoit que l’AMM d’un médicament vétérinaire après un premier renouvellement peut être valable pour une durée illimitée. Cette nouvelle règle s’impose à l’ensemble des États membres de l’Union européenne. On ne peut cependant délivrer d’emblée une AMM pour une durée illimitée : les AMM doivent obligatoirement être renouvelées au bout de cinq ans, et c’est l’occasion de réévaluer le rapport entre les bénéfices et les risques du médicament vétérinaire. C’est seulement à ce moment-là que l’AMM peut être reconduite sans limitation de durée. L’AFSSA peut en outre procéder à un renouvellement supplémentaire de l’AMM – ce qui implique une nouvelle évaluation du médicament – pour des raisons ayant trait à la pharmaco-vigilance. Ce dispositif vise à garantir une bonne évaluation du médicament vétérinaire, en assurant une protection de la santé animale et humaine. Il faut donc le transposer tel quel, d’autant qu’il est identique pour les médicaments à usage humain. Je vous demande donc de retirer cet amendement, faute de quoi j’y donnerai un avis défavorable.

Mme Jacqueline Fraysse – Je maintiens mon amendement, mais je remercie Mme la ministre pour la clarté de sa réponse.

L'amendement 7, mis aux voix, n'est pas adopté.

ARTICLES 3 ET 4

L'article 3, mis aux voix, est adopté, de même que l’article 4.

ARTICLE 5

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé L’article 5 transfère à l’AFSSAPS le rôle d’autorité compétente en matière de recherche biomédicale, aujourd’hui dévolu au ministre chargé de la santé, pour les recherches ne portant pas sur les produits de santé ou les cosmétiques. Compte tenu du report de l’examen du présent texte, la mise en place d’un guichet unique à l’AFSSAPS pour l’ensemble des recherches biomédicales doit cependant être reportée du 1er avril au 1er juin 2008. Tel est l’objet de l’amendement 12.

Mme Cécile Gallez, rapporteure – Avis favorable. Je remercie en outre Mme la ministre de sa réponse sur le choix de l’AFSSAPS.

L'amendement 12, mis aux voix, est adopté.

L'article 5 ainsi modifié, mis aux voix, est adopté.

ARTICLE 6

Mme Jacqueline Fraysse – Il y a certes lieu de supprimer le système Cyclamed, mais nous ne pouvons pas le faire sans mettre en place un autre système de collecte, de tri et de redistribution des médicaments permettant de garantir la sécurité environnementale et de s’adapter aux pathologies des pays concernés. Le débat doit nous permettre d’avancer sur ce point.

Mme Catherine Lemorton – Nous devons en effet réfléchir au dispositif qui doit être mis en place. M. Bertrand assurait le 24 janvier 2007 devant le Sénat que les pouvoirs publics répondraient à la demande en la matière. L’association Tulipe – contrôlée par les entreprises du médicament – m’assure que les dons ne représentent actuellement qu’un million d’euros, alors que les besoins équivaudraient à 14 millions d’euros. Ces chiffres sont-ils exacts ? Les pouvoirs publics peuvent-ils s’engager à combler la différence ?

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé Il y a un débat sur le montant des dons des entreprises pharmaceutiques et les besoins réels des organisations humanitaires. J’ai reçu les unes et les autres. Il faut affiner l’évaluation – sans doute la vérité est-elle entre les deux. J’y travaille activement. C’est un problème de financement, mais aussi d’organisation. Je vous donnerai des réponses précises dès que je serai en mesure de le faire.

Mme Cécile Gallez, rapporteure – L’amendement 1 vise à préciser que les médicaments non utilisés et collectés dans les pharmacies pendant la période transitoire ne pourront être mis à la disposition d’organismes non lucratifs que sous la responsabilité d’un pharmacien.

L'amendement 1, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

Mme Cécile Gallez, rapporteure – L’amendement 2 est un amendement de clarification.

L'amendement 2, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé L’amendement 13 vise à fixer le délai d’entrée en vigueur de l’interdiction de la redistribution des médicaments non utilisés à visée humanitaire au 31 décembre 2008. Si une prolongation de la période transitoire apparaît nécessaire, les dix-huit mois prévus par le Sénat ne sont pas justifiés. Un délai intermédiaire doit suffire pour permettre la réorganisation de la distribution de médicaments à visée humanitaire dans des conditions satisfaisantes. Je vous propose donc que l’échéance soit fixée au 31 décembre 2008.

Mme Cécile Gallez, rapporteure – Après avoir demandé à la commission de retirer mon propre amendement, je me rallie en son nom à celui du Gouvernement.

M. Jacques Alain Benisti – Nous sommes un certain nombre à avoir été interpellés dans nos circonscriptions par les organisations humanitaires, qui certes considèrent, bien sûr, qu’il faut arrêter de distribuer des médicaments périmés, mais demandent un peu plus de temps pour se retourner. Je vous propose d’aller jusqu’à juin 2009.

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé Je suis au regret de ne pas accepter cette prolongation. La distribution de médicaments non utilisés dans des pays en voie de développement ne pose pas seulement des problèmes de santé publique : elle passe par des filières criminelles que les organisations humanitaires dénoncent de façon récurrente ; par ailleurs, elle empêche la création d’industries pharmaceutiques dans ces pays, procédant d’une démarche post-colonialiste qui les maintient dans une dépendance profondément perverse. Il nous faut donc faire preuve de volontarisme ; un délai d’un an, c’est un aiguillon fort, mais c’est suffisant.

M. Jean-Pierre Door – Permettez-moi de répondre moi aussi à mon collègue Benisti : nous avons voté l’an dernier à l’unanimité le principe de traçabilité des médicaments ; s’agissant d’un problème de sécurité et de responsabilité, nous ne pouvons pas reporter indéfiniment les délais. Tenons-nous-en à celui que propose le Gouvernement.

L'amendement 13, mis aux voix, est adopté.

Mme Cécile Gallez, rapporteure – Je souhaite que les organismes à but non lucratif qui en France distribuent gratuitement des médicaments aux personnes en situation de précarité soient agréées par le ministre de la santé : c’est l’objet de l’amendement 4 de la commission.

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé Pour une fois, je ne suis pas d’accord… Un processus d’agrément serait très lourd. Une déclaration préalable d’activité des structures de soins gérées par ces associations permet tout autant de s’assurer de toutes les garanties de sécurité nécessaires. En outre, le décret d’application de la loi précisera d’une part que la détention, le contrôle, la gestion et la distribution des médicaments doivent être assurés par un pharmacien inscrit au tableau de la section compétente de l’ordre national des pharmaciens ; d’autre part, à titre dérogatoire, que le préfet peut, après avis du pharmacien inspecteur régional de santé publique, autoriser un médecin nommément désigné à jouer ce rôle.

Avis défavorable, donc, mais je défendrai un amendement répondant à l’objectif poursuivi.

Mme Catherine Lemorton – En inscrivant dans le marbre ce mécanisme de délivrance de médicaments à des personnes en situation de précarité, on évite de se demander pourquoi, sur notre territoire, des gens n’accèdent pas au système de soins habituel, et on risque de justifier des restrictions supplémentaires à l’accession à l’aide médicale d’État.

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé J’ai eu l’occasion de montrer mon attachement aux dispositifs CMU et AME : on ne peut à ce sujet me faire de procès d’intention. Mais il ne s’agit pas seulement ici de l’accès aux soins : on s’adresse là à des personnes tellement désocialisées qu’elles ont besoin d’un véritable accompagnement, qui ne peut être assuré que par des associations spécialisées.

L'amendement 4 est retiré.

Mme Cécile Gallez, rapporteure L’amendement 5 vise à préciser que la délivrance gratuite de médicaments par ces associations se fera sous la responsabilité d’un médecin ou d’un pharmacien.

L'amendement 5, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé L’amendement 14 du Gouvernement impose une procédure de déclaration préalable d’activité à ces structures, afin de s’assurer qu’elles présentent toutes les garanties nécessaires en termes de sécurité et de qualité des soins aux personnes en situation de précarité ; il répond au souci qu’avait exprimé Mme Gallez tout à l’heure.

Mme Cécile Gallez, rapporteure La commission avait repoussé cet amendement, faute de précisions suffisantes sur cette déclaration préalable : auprès de qui sera-t-elle faite ?

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé Je vous propose de préciser que ce sera « auprès du représentant de l’État dans le département ».

Mme Cécile Gallez, rapporteure Je suis d’accord.

L'amendement 14 ainsi rectifié, mis aux voix, est adopté.

Mme Cécile Gallez, rapporteure – L’amendement 6 est de coordination.

L'amendement 6, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

L'article 6 modifié, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 6

M. Jean Ueberschlag – L’amendement 15, que je remercie Mme la rapporteure d’avoir accepté de cosigner, apporte une clarification au sujet des préparations magistrales. La directive européenne n’avait pas retenu la notion d’extemporanéité, afin de ne pas risquer de conduire à des situations de blocage ; il convient donc d’introduire une certaine souplesse, afin de ne pas pénaliser les établissements pharmaceutiques qui sont à même de réaliser certaines préparations magistrales dans de bonnes conditions et d’éviter tout contournement de la procédure d’AMM. S’agissant de la loi comme du médicament, le remède ne doit pas être pire que le mal. Suivons le principe de Paracelse : primum non nocere.

Mme Cécile Gallez, rapporteure – La commission est favorable. L’établissement pharmaceutique doit bien sûr être agréé par l’AFSSAPS et peut sous-traiter certaines préparations.

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé J’y suis favorable sous réserve de l’adoption du sous-amendement 16. L’article L. 5125-1-1 n’étant pas la référence adéquate, il convient plutôt de créer un 6°.

Mme Cécile Gallez, rapporteure – Avis favorable au sous-amendement.

Le sous-amendement 16, mis aux voix, est adopté, de même que l'amendement 15, ainsi sous-amendé.

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé Les conventions entre le Comité Économique des Produits de Santé et les laboratoires pourront prévoir des sanctions en cas de non-réalisation ou de retard dans la réalisation d’une étude pharmaco-épidémiologique postérieure à l’autorisation de mise sur le marché. Une disposition en ce sens dans le PLFSS en a été disjointe par le Conseil constitutionnel.

Ces études sont nécessaires pour une évaluation correcte des médicaments dans la vie réelle et il me paraît indispensable qu’elles soient réalisées correctement et dans les délais impartis. Or, selon la Haute Autorité de Santé, seules 7 % des études demandées depuis 1997 ont été menées à terme, 54 % n’ont pas commencé et pour 30 % d’entre elles, aucun document n’a été adressé par les laboratoires pharmaceutiques concernés à la Haute Autorité de Santé. Ces études sont pourtant indispensables si le Comité Économique des Produits de Santé souhaite réévaluer les prix accordés au vu de l’impact d’un médicament dans ses conditions réelles d’utilisation. C’est pourquoi l’amendement 11 dispose que des sanctions, dont des baisses de prix, doivent être prises en cas de non-réalisation ou de retard de ces études.

Mme Cécile Gallez, rapporteure – Avis favorable.

L'amendement 11, mis aux voix, est adopté.

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé Avant de présenter l’amendement 10, je voudrais répondre à une question de Mme Orliac. La liste des médicaments concernés par la vente devant le comptoir de l’officine, sur laquelle nous avons déjà beaucoup travaillé, devrait paraître en avril.

Par l’amendement 10, il est proposé de remplacer la déclaration obligatoire des ventes par une déclaration obligatoire du code relatif à la liste des produits et prestations pour tout produit commercialisé et remboursé par l’assurance maladie.

En vue de la mise en place d’une politique de régulation du secteur, la création d’une base pour la connaissance et le suivi des dépenses des dispositifs médicaux, en particulier ceux commercialisés sous ligne générique, permettra à la commission d’évaluation des produits et prestations de la Haute Autorité de Santé, dans le cadre de la révision de ces lignes génériques, de mieux connaître les produits inscrits de la propre initiative des fabricants.

Le secteur des dispositifs médicaux, en pleine expansion, a connu une croissance de 7 % en 2006. Pourtant il est mal encadré ; en particulier il n’y a aucune régulation de la croissance des dépenses. Ainsi sont pris en charge des produits inscrits sur la LPP par les fabricants eux-mêmes comme génériques, sans autre obligation. On imagine les dérives possibles. Cette disposition avait été discutée dans le cadre du PLFSS et disjointe par le Conseil constitutionnel.

Mme Cécile Gallez, rapporteure – Avis favorable.

L'amendement 10, mis aux voix, est adopté.

M. le Président – Nous en venons aux explications de vote.

Mme Jacqueline Fraysse – L’ordonnance ratifiée à l’article 1er contient d’indiscutables avancées pour la qualité des produits de santé. Par ailleurs la prolongation de Cyclamed jusqu’en décembre 2008 laissera aux organisations le temps de s’organiser. Il faudrait surtout faire vite pour mettre en place dans ce délai un nouveau système plus adapté.

S’agissant des AMM, je suis sensible à l’argument de Mme la ministre selon lequel on peut renouveler après cinq ans un AMM provisoire. Mais qui prendra la décision de mettre un terme à une AMM qui ne peut durer toujours ?

En revanche, nous n’apprécions pas que le Gouvernement légifère encore par ordonnance.

Compte tenu de ces différents aspects de la question, le groupe GDR, qui ne souhaite pas voter contre des dispositions positives, s’abstiendra.

M. Jean-Pierre Door – Mme la ministre a répondu aux questions, en particulier sur les articles 5 et 6. Il est important de prévoir des sanctions lorsque les études après AMM ne sont pas fournies. Le Gouvernement s’est également engagé à mettre en place une filière sécurisée pour les médicaments non utilisés. Il est plus que temps de transposer la directive, et nous voterons ce texte avec grand plaisir (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

Mme Catherine Lemorton – Le groupe SRC est favorable à ce texte. Je présenterai simplement quelques remarques. D’abord, il ne faudra pas, à l’avenir, confondre l’observance d’un traitement avec un suivi post AMM. J’aimerais d’ailleurs qu’on se penche enfin sur le problème de l’hépatite B.

Je regrette que les difficultés à faire pénétrer le générique en France aient pu conduire à le remettre en cause. Je remercie Mme Bachelot d’avoir répondu clairement sur ce sujet.

Enfin, je voudrais que l’article 6 sur les MNU soit bien encadré et que, après les propos tenus par M. Bertrand au Sénat en janvier 2007, le Gouvernement tienne bien ses engagements financiers.

Notre groupe votera ce texte.

L’ensemble du projet, mis aux voix, est adopté.

COMMERCIALISATION ET UTILISATION D’ENGINS MOTORISES

L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi de MM. Patrice Calméjane, Gérard Gaudron, Sébastien Huyghe et Jean-Philippe Maurer, relative aux conditions de commercialisation et d’utilisation de certains engins motorisés. Le rapport de la commission des lois porte également sur la proposition de loi de Mme Elizabeth Guigou et de plusieurs de ses collègues visant au contrôle de la vente et de l’utilisation des mini-quads, mini-motos et engins assimilables.

M. Guy Geoffroy, suppléant M. Sébastien Huyghe, rapporteur de la commission des lois – C’est avec plaisir que je supplée M. Huyghe, empêché, mais qui a travaillé depuis un certain temps sur cette question sensible de la prolifération et de l’utilisation anarchique des mini-motos et mini-quads. Cette proposition vise à mieux prévenir et pénaliser ces abus, et je me réjouis qu’elle n’ait pas eu à attendre une « niche » parlementaire. Le Gouvernement l’a rapidement inscrite à l’ordre du jour, et je tiens à vous en remercier, Monsieur le ministre.

Ce texte est le fruit d’un travail de synthèse, rassemblant les propositions issues de divers bancs de cette assemblée. Je veux féliciter Sébastien Huyghe et le groupe UMP, ainsi qu’Élisabeth Guigou et le groupe SRC, qui ont mis en commun leurs réflexions sous l’égide de la commission des lois et de son président, Jean-Luc Warsmann.

L’utilisation des véhicules en cause a fait l’objet de nombreuses réflexions et de décisions, prises par les élus locaux en accord avec les autorités préfectorales. La loi du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance a permis quelques avancées, qui se sont toutefois révélées insuffisantes. Malgré l’interdiction de l’utilisation des véhicules non réceptionnés, la prolifération de ces engins s’est poursuivie, encouragée par de nouveaux réseaux de vente – notamment par Internet –, en provenance de pays où les critères de sécurité sont pour le moins éloignés des nôtres. Ce sont 40 000 véhicules de ce type qui seraient aujourd’hui en circulation. Il faut mettre un terme à une telle évolution.

L’article premier, inspiré d’une disposition de la proposition de loi du groupe SRC, concerne aussi bien les vendeurs que les utilisateurs. La vente est réservée aux professionnels ayant signé une charte de qualité, qui sera définie par décret. La vente ou la cession à titre gratuit aux mineurs sont interdites. Un amendement du groupe SRC, accepté par la commission, étend ces dispositions à la location.

L’article 2 prévoit que ces véhicules, dont l’usage est interdit dans le domaine public, ne peuvent circuler que sur des terrains adaptés à leur pratique, dans des conditions fixées par décret. Les mineurs de moins de 14 ans ne pourront conduire ces véhicules que sur des terrains adaptés, dans le cadre d’associations sportives ayant reçu un agrément. Les poursuites pénales en matière de récidive sont aggravées : le véhicule sera automatiquement confisqué, sauf décision motivée du magistrat.

Ce texte n’est pas anodin. Fruit d’un travail approfondi, il est pragmatique et donne aux maires des moyens pertinents et efficaces pour lutter contre ce phénomène. Toutefois, il conviendra d’accompagner l’application de cette loi d’une campagne de sensibilisation. Les 36 000 maires pourraient utiliser les colonnes de leur bulletin municipal pour commenter l’adoption de cette loi, et l’éducation nationale – notamment par l’intermédiaire des responsables d’établissements du secondaire – pourrait s’appliquer à exposer auprès des élèves les dangers des mini-motos. J’invite l’Assemblée nationale à approuver cette proposition, car il y va de la sécurité des jeunes, de la qualité de l’environnement et de la tranquillité de nos territoires (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe NC).

M. Luc Chatel, secrétaire d’État chargé de la consommation et du tourisme – Je veux d’abord vous remercier de cette initiative, qui concerne la vie quotidienne de nos concitoyens. Cette proposition de loi permettra de mieux les protéger de l’usage abusif de ces engins. En effet, malgré l’interdiction des mini-motos sur la voie publique, le problème reste entier, comme l’actualité, hélas, nous l’a rappelé récemment.

Conscient de cette lacune, le groupe UMP a constitué un groupe de travail dont sont sorties des propositions concrètes et constructives. Je veux féliciter MM. les députés Calméjane, Gaudron et Maurer pour la qualité de leur travail, ainsi que M. Huyghe, rapporteur. Je salue aussi le travail effectué par la commission des lois, qui a permis d’intégrer les dispositions de la proposition de loi de Mme Guigou.

Mme Élisabeth Guigou – Et de M. Goldberg !

M. Luc Chatel, secrétaire d’État – Les données collectées dans le cadre de l’enquête permanente sur les accidents de la vie courante montrent qu’une trentaine d’accidents impliquant des mini-motos surviennent chaque année.

Compte tenu de l’usage inapproprié qui en est fait, ainsi que des caractéristiques qui leur sont propres – petite dimension alliée à une vitesse importante – ces véhicules doivent être utilisés dans un cadre strictement défini. Des mesures appropriées s’imposent donc, dans le respect du cadre juridique communautaire. La Commission a précisé dans un courrier du 6 juillet 2006 que les États membres pouvaient réglementer l’utilisation de ces engins conformément à leur droit national.

La présente proposition de loi va dans le sens que souhaite le Gouvernement, puisqu’elle limite la pratique de la mini-moto aux terrains spécialement aménagés et en interdit l’usage aux enfants de moins de quatorze ans en dehors d’une pratique encadrée.

S’agissant de la commercialisation de ces engins, l’interdiction de la vente aux mineurs va de soi, et son inscription dans la loi permettra de sensibiliser les vendeurs, qui devront par ailleurs adhérer à une charte de qualité. Pour réduire encore mieux le risque d’accident, notamment chez les jeunes, il faut assortir ces mesures de sanctions pénales fortes. Enfin, le Gouvernement s’engage à renforcer la sécurité de ces véhicules, que les pouvoirs publics vérifient d’ailleurs déjà. Ainsi, les contrôles à l’importation menés en 2006 ayant révélé que quatre lots sur cinq étaient non conformes ou dangereux, la direction générale des douanes et droits indirects a demandé à la Commission européenne de renforcer le contrôle de ces produits. La DGCCRF, quant à elle, vérifie auprès des vendeurs l’application du code du travail, ainsi que la présence du marquage CE sur les véhicules et l’absence de tout défaut de conception – deux règles dont la violation ne concernait que 2,5 % des véhicules en 2007 – et l’inclusion d’une information pertinente et loyale à l’attention de l’acheteur, bien communiquée dans presque tous les cas l’an dernier. Le Gouvernement entend également normaliser ces produits afin de mieux équilibrer leur poids, leur taille ainsi que l’âge et la puissance de leur moteur. Les professionnels disposeront alors d’un référentiel complet. Enfin, nous prévoyons de règlementer l’information donnée au public. Il va de soi que toutes ces mesures règlementaires devront s’accompagner d’une campagne d’information du public.

Le Gouvernement est donc favorable à cette proposition de loi équilibrée, qui renforce la protection et les devoirs des consommateurs autant que des professionnels (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Maxime Gremetz – Que n’a-t-on pas vu un tel consensus hier à Versailles ! Hélas, si nous sommes tous d’accord sur le texte en débat aujourd’hui, ce ne fut pas le cas au Congrès…

M. Jean-Michel Couve – À cause de vous !

M. Maxime Gremetz – Contrairement à vous, Messieurs de la majorité, nous savons le reconnaître lorsque nos opposants font de bonnes choses, car notre seule priorité, c’est l’intérêt de nos concitoyens !

Nous sommes ici confrontés à un problème nouveau : celui de véhicules dangereux que l’on offre comme des jouets, mais qui peuvent tuer. Dès lors, le consensus est aisé, et le groupe GDR approuvera cette proposition bien faite.

Selon la réglementation actuelle, les mini-motos et les quads construits pour la route doivent faire l’objet d’une réception communautaire validée par le centre national de réception des véhicules, et doivent être immatriculés ensuite en fonction de leur cylindrée. En outre, l’importation, l’exposition, la vente, l’achat, la location ou l’incitation à utiliser de tels engins non conformes peuvent être punis de six mois d’emprisonnement et de 7 500 euros d’amende, voire de deux ans de prison et 30 000 euros d’amende lorsque ces infractions sont commises par des professionnels. De plus, les véhicules peuvent être saisis.

Transformer ces règles en loi est une occasion bienvenue de parler du problème, car il y a déjà 30 000 de ces véhicules en circulation, et la tendance est à la hausse ! Il ne s’agit certes pas d’une grande loi, mais elle est utile, responsabilise les utilisateurs et renforce les normes de sécurité. Rappelons à ceux qui craignent une interdiction totale que l’on pourra toujours utiliser ces engins dans des associations sportives et sur des terrains agréés. Le groupe GDR votera donc cette proposition de loi et s’associera même aux amendements de certains de nos collègues (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR et sur certains bancs du groupe UMP).

M. André Chassaigne – Très bien !

M. Marc Vampa – Les drames provoqués l’été dernier par l’usage de mini-motos ont marqué l’actualité. En novembre dernier, la mort par collision de deux jeunes utilisateurs et les émeutes qui ont suivi ont révélé les difficultés des forces de l’ordre à faire appliquer une réglementation désormais inadaptée à un phénomène de mode. Les mini-motos et les mini-quads doivent respecter des normes européennes de sécurité et être immatriculées pour pouvoir circuler sur la voie publique. Or, nombreux sont les engins de cette catégorie qui sont importés par Internet ou par le biais de filières non identifiées qui les vendent comme des jouets.

En l’état, notre législation n’interdit pas le commerce d’engins à moteur non destinés à l’utilisation sur la voie publique. Or, il s’agit bien de véhicules à moteur rapides, et non de jouets ! Utilisés par des publics de tous âges et parfois même débridés malgré la règlementation, ils peuvent atteindre la vitesse de 80 kilomètres par heure sur la voie publique. Même s’ils ne sont pas réceptionnés, ils peuvent être utilisés sur des terrains privés ou des circuits aménagés. Hélas, trop nombreux sont les utilisateurs qui enfreignent les règles et circulent sur la voie publique, au risque de provoquer des accidents parfois très graves.

Compte tenu de l’engouement actuel pour ce type de véhicules, il fallait agir sans tarder. Le développement de leur vente sur Internet et leur difficile contrôle aux douanes impose de revoir la réglementation qui leur est applicable.

La saisie par les douanes, en janvier 2008, de 280 mini-motos importées de Chine et non conformes aux normes communautaires a démontré l'ampleur du phénomène. Or, les contrôles sont encore insuffisants. La situation est d'autant plus préoccupante que, la législation n'imposant aucune condition d'âge pour l'achat de ces engins, ils sont très souvent acquis par des mineurs. Il fallait donc en réglementer à la fois la commercialisation et l'usage, et je salue, au nom du groupe Nouveau centre, une proposition efficace et concertée, qui reprend des suggestions du groupe UMP et du groupe SRC.

Ce texte complet renforce l'encadrement juridique de la commercialisation des véhicules non réceptionnés. En effet, la vente ou la cession de quads ou mini-motos aux mineurs sera interdite et les professionnels qui n'adhéreront pas à une charte de qualité définie par décret n’auront pas le droit de commercialiser de tels engins. Cette dernière disposition, judicieuse, responsabilise les professionnels sans pénaliser les revendeurs qui assurent un service de qualité. D’autre part, l'utilisation des mini-motos sera interdite hors lieux adaptés, et les mineurs de quatorze ans ne seront plus autorisés à en faire usage sinon dans le cadre d'une activité sportive agréée.

La force publique pourra agir rapidement et prévenir les dangers inhérents à l'usage de ces véhicules, puisqu’elle pourra les confisquer en cas d'infraction sans qu'il soit nécessaire de procéder par voie judiciaire.

Ce texte équilibré répond aux problèmes soulevés par l’extension d'un phénomène de mode, et le groupe Nouveau centre le votera. Il reste toutefois à renforcer les contrôles, notamment sur l’Internet, afin d'enrayer la commercialisation de véhicules dangereux qui ne respectent pas les normes de sécurité européennes (Applaudissements sur les bancs du groupe NC).

M. Patrice Calméjane – La proposition présentée en mon nom et celui de mes collègues Gaudron, Huyghe et Maurer, résulte d’un constat : celui du développement de la commercialisation des mini-motos et des conséquences fâcheuses de leur utilisation. La nouvelle façon de fonctionner du groupe UMP, qui a créé un groupe de travail à ce sujet, nous a permis de nous saisir de ce sujet, qui concerne tous nos concitoyens, avec l’objectif de parvenir rapidement au texte qui s'impose.

Depuis de longues années, des engins non immatriculés sont fabriqués, destinés à l'initiation des jeunes au sport motocycliste. Dans la grande majorité des cas, cela ne posait aucun problème, car ils étaient achetés par des adultes qui les mettaient à disposition de leurs enfants sur des circuits adaptés à l'usage. Mais, il y a moins de trois ans, des répliques de motos à petite échelle ont commencé d’être commercialisées par des grandes surfaces, l’Internet et quelques importateurs directs. Ces filières de diffusion ont échappé à tout contrôle et n’ont fourni à leurs clients aucune information sur les dangers de l'usage de ces engins. Très vite, quelque 40 000 engins de ce type ont été vendus, et leur utilisation par de jeunes mineurs sans encadrement ni formation a provoqué des drames pour eux-mêmes et pour les piétons qui se sont trouvés sur leur parcours. On a ainsi recensé vingt-huit accidents sur la voie publique ayant donné lieu à hospitalisations en 2004 et 2005, et 61 % des personnes accidentées étaient des enfants de moins de dix ans. De plus, des événements récents, à Villiers-le-Bel notamment, ont provoqué des débuts d'émeutes urbaines ; chaque accident dégénère très vite, les conducteurs, se sachant en infraction, prenant la fuite au péril de leur vie.

Le groupe de travail de l’UMP a rencontré les ministères concernés, les fédérations sportives et un représentant des grands constructeurs. Tous ont été à notre écoute pour nous permettre de vous présenter rapidement ce texte.

Par l'article 2, qui interdit la vente ou la cession à titre gratuit de ces engins aux mineurs, nous voulons qu'un adulte soit responsable de l'achat et que celui-ci s’assortisse d’une véritable information. Nous souhaitons aussi qu'il ne soit plus possible d’offrir ce type d'engin comme lot. La violation de ces règles est sanctionnée par une amende pouvant aller jusqu'à 1 500 euros.

L’autre objectif de notre proposition est d'encadrer l’utilisation des mini-motos en en interdisant l’usage en dehors des terrains adaptés et aux mineurs de 14 ans, sauf dans le cadre d'une activité sportive agréée, ce qui mettra un terme à d’innombrables nuisances sonores. L'obligation d'encadrement par une association sportive, avec possibilité de dérogation pour les moins de 14 ans, ramènera les motos d'initiation dans des lieux qu’elles n’auraient jamais dû quitter, ces clubs structurés qui ont permis à de jeunes Français de décrocher des titres internationaux – un ministre du Gouvernement en est un exemple éclatant (Sourires).

Je salue le fait que nos collègues du groupe socialiste nous aient rejoints… (Exclamations sur les bancs du groupe SRC)

M. Daniel Goldberg – Notre proposition de loi avait cinq mois d’avance sur la vôtre !

M. Patrice Calméjane – Ils ont déposé quelques amendements. À mon sens, le premier ne devrait pas poser de difficultés particulières, mais les autres me semblent d’application plus compliquée.

Je remercie tous ceux qui ont contribué à l’élaboration d’une proposition conçue pour renforcer la sécurité de nos concitoyens, et je vous remercie, Monsieur le ministre, pour votre écoute (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Daniel Goldberg – Avant d'en venir au fond, je souhaite faire le point sur ce qui restera un exemple de ce qu'il ne faut pas faire pour permettre à notre assemblée de fonctionner correctement et d'être considérée à sa juste valeur.

Chacun sait les accidents causés par les mini-motos et la gêne qu’elles constituent. L'été dernier, à l'initiative de mon ami Gilbert Roger, maire de Bondy, vingt-trois maires de Seine-Saint-Denis ont sollicité le préfet afin qu’il organise à ce sujet des échanges approfondis dans les plus brefs délais entre les élus locaux et les services de l'État. J'ai ainsi participé, avec certains des députés du département présents aujourd'hui, à la création, le 1er octobre, d'une instance de suivi coordonnée par le préfet.

Par ailleurs, personnellement sensibilisé à cette question pour avoir été témoin d'un accident, j'ai déposé le 7 août, peu de temps après mon élection, deux questions écrites au Gouvernement. Les députés du groupe SRC se sont ainsi saisis du sujet et, avec Élisabeth Guigou et d'autres collègues, nous avons déposé la proposition de loi n° 371, enregistrée par la présidence de l'Assemblée le 7 novembre 2007. Elle vise à mieux encadrer les conditions de vente en introduisant une obligation de conseil et d'information aux utilisateurs, à permettre de mieux interpeller les contrevenants et à engager des actions préventives.

M. Jean-Luc Warsmann, président de la commission des lois – Je vous rappelle qu’à titre exceptionnel, la commission des lois a accepté d’associer les deux propositions.

M. Daniel Goldberg – Je ne l’ignore pas, Monsieur le président de la commission, mais j’y reviendrai plus avant. Nous avions aussi écrit en octobre aux responsables des nombreux centres commerciaux de Seine-Saint-Denis susceptibles de vendre de tels objets au moment des fêtes de fin d’année pour leur demander d’arrêter cette commercialisation, dans une démarche citoyenne. Je remercie ceux qui nous ont répondu positivement.

Nous estimons donc avoir joué pleinement notre rôle de parlementaires. Nous avons constamment cherché à réunir le consensus sur un sujet qui ne mérite, à nos yeux, ni polémiques ni surenchères. Nous avons également voulu que notre assemblée remplisse pleinement son rôle et, dans ce but, nous avons demandé plusieurs fois l'inscription de cette question sensible à notre ordre du jour.

C'est donc avec surprise et consternation que nous avons observé l'attitude, peu compréhensible étant donné l'importance du sujet – du Gouvernement, qui n'a pas fait preuve, loin s'en faut, du même sens de l'écoute. Quelle dissonance avec les propos tenus hier encore, à Versailles, par le Premier ministre, sur l'importance du rôle des parlementaires dans notre démocratie !

Résumons les étapes. À la mi-octobre, un groupe de travail de députés UMP est annoncé à grand renfort de publicité, mais aucune proposition n'est déposée. À la mi-décembre, le Gouvernement choisit de communiquer, par votre intermédiaire, Monsieur Chatel, sur des points relevant de la seule réflexion de nos collègues de l’UMP, ignorant délibérément notre travail. On me dira que c'est la règle de cette maison, mais je maintiens que ce n'est pas une bonne pratique, d’autant que le sujet appelait le consensus. C’est d’autant plus choquant, Monsieur le ministre, que vous n'avez pas pris la peine de répondre au courrier que je vous ai envoyé le 13 décembre, vous rappelant, si c’était nécessaire, l'existence de notre proposition et vous demandant de permettre son examen par l'Assemblée. Dans l’intervalle, nos collègues de l'UMP n’avaient toujours pas déposé de proposition.

Mais le meilleur est à venir. Mardi dernier, 29 janvier, lors de la Conférence des présidents, le Gouvernement décide d’inscrire à notre ordre du jour prioritaire le sujet qui nous occupe... sur la base d'une proposition déposée la veille par nos collègues de l'UMP. Comme je cherchais à consulter le texte de cette proposition, les services de l'Assemblée me font savoir qu'elle n'est pas disponible à la distribution – alors qu'un numéro lui est bien attribué – mais qu'elle sera discutée le lendemain matin, soit le 30 janvier, par la commission des lois. Comment les commissaires ont-ils pu discuter d'un texte dont ils ne pouvaient avoir connaissance, puisque la fameuse proposition n° 632 n’a été mise en distribution que le 30 janvier après-midi, après la réunion de la commission ?

Mais précipitation n'est pas raison, et nous avons constaté – quand nous avons pu enfin lire votre proposition, qu'elle ne cerne pas le problème. Elle se borne en effet à restreindre la vente aux mineurs et l'utilisation par les mineurs de 14 ans, et ne parle que de contravention, non de délit, ce qui empêche les poursuites pour aide à la commission de délit.

Après que le groupe SRC eut protesté, il a fallu tout votre sens de l'équilibre, Monsieur le président de la commission, pour que les propositions n° 371 et n° 632, puissent être examinés conjointement. Je tiens à vous en remercier.

Néanmoins, une telle précipitation, à quelques jours de la suspension de nos travaux et à quelques semaines des élections municipales, pourrait être interprétée comme une opération de communication à visée électorale (Protestations sur les bancs du groupe UMP). Et si ce n'est pas cela, Monsieur le ministre, quelle mauvaise image des travaux de l'Assemblée le Gouvernement a-t-il donnée !

J'en viens maintenant au fond, en soulignant que nous ne discutons pas de la proposition n° 632 mais bien du texte issu de la commission, qui s’est efforcé de faire une synthèse entre les propositions n° 371 et n° 632.

C'est un cadre raisonnable, mais non suffisant. Chacun connaît l'ampleur du phénomène : environ 40 000 mini-motos circulent en France, la plupart sans homologation. Seules celles vendues en magasin spécialisé sont conformes aux normes de sécurité ; elles sont destinées à une pratique sportive qu’il convient de préserver, car ce ne sont pas ces engins qui posent problème. Ce que nous voulons, c’est mettre fin à la circulation des engins vendus moins de 200 euros, sur internet ou dans des hypermarchés, sans conseil aux utilisateurs et sans service après-vente. Ces véhicules, vendus comme des jouets, provenant souvent de Chine, ne subissent aucun contrôle et ne répondent à aucune norme de qualité. Ils présentent des risques graves pour leurs utilisateurs en termes de brûlures par des pots d'échappement ou des systèmes de freinage défaillants. Ils sont aussi trop souvent une source d'accidents, qui peuvent être mortels. En outre, ces objets entraînent des troubles quotidiens pour nombre d'habitants de nos quartiers populaires : nuisances sonores et risques d'accidents.

L'intervention du législateur répond donc à un double impératif : sécurité pour nos enfants et les plus jeunes utilisateurs, tranquillité pour les habitants de nos quartiers. Malgré la loi votée en mars 2007, à l'unanimité, le phénomène n'a pas été enrayé. Il est donc impératif de compléter ce dispositif en cherchant à maintenir un équilibre entre répression et prévention. C’est la recherche de cet équilibre qui nous a guidés dans la rédaction de la proposition de loi que nous avons déposée en novembre.

Le présent texte suscite donc de la satisfaction, car il est impératif que la vente des mini-motos soit plus strictement contrôlée. On peut d’ailleurs regretter que le texte ne prévoie pas, comme nous l'avions proposé, de former des équipes spécialisées au sein de la police et de la gendarmerie, qui sauraient prendre en considération la spécificité de ces machines au moment des interventions. Nous avions souhaité également que les véhicules confisqués soient détruits, afin de rendre la mesure plus dissuasive, mais aussi plus éducative, en offrant aux contrevenants non récidivistes la possibilité de récupérer leur véhicule s’ils acceptent de se soumettre à une formation dans un club sportif. Ces deux points feront l'objet d’amendements.

Mais ce texte suscite également des regrets, eu égard à l'insuffisance du volet préventif et éducatif. Vous me permettrez de rappeler le nom de Gilbert Bonnemaison, auquel des hommages unanimes sont rendus ces jours-ci ; il aura été l'un des premiers à théoriser et à mettre en pratique le couple prévention-répression. De nombreux utilisateurs de mini-motos ne sont pas informés des risques de ces engins pour eux-mêmes ni pour les autres. L'objectif est bien sûr de responsabiliser les vendeurs, mais aussi de favoriser un usage raisonné de ces véhicules ; c’est pourquoi nous demandons que des campagnes soient menées en ce sens.

Enfin, il nous a semblé utile d'apporter quelques précisions. Nous proposons ainsi d'élargir le champ du texte à la location, et nous souhaitons opérer une distinction entre un usage intempestif et dangereux de ces engins et un usage professionnel en milieu rural.

Notre volonté est bien de lutter contre les dangers des mini-motos. C’est une question qui doit être également posée au niveau européen. Nous aurions souhaité pourvoir discuter sereinement, sans précipitation, mais votre choix ne le permet pas. Soyez donc, maintenant, à l'écoute de nos amendements ! Et espérons que le débat ne sera pas bruyant, rapide et fuyant, comme le sont souvent les mini-motos dans nos quartiers ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR)

M. Gérard Gaudron – Nous discutons de la proposition de loi à laquelle j'ai contribué avec MM. Calméjane, Huyghe et Maurer, complétée par celle du groupe SRC. Je me réjouis de son inscription à l'ordre du jour de notre assemblée et vous remercie, Monsieur le ministre, de votre soutien.

Comme nous l’ont rappelé les événements de Villiers-le-Bel, en novembre, les mini-motos posent de graves problèmes de sécurité. Ces engins n’étant pas homologués, leur utilisation est normalement interdite sur la route. Elle représente un réel danger pour ceux qui les conduisent et pour les autres, et provoque d’importantes nuisances sonores que nos concitoyens ont de plus en plus de mal à supporter, d’autant que ces engins sont souvent trafiqués avec des pots d’échappement qui les rendent encore plus bruyants. Il n'est pas rare de croiser ces véhicules sur les esplanades des quartiers, dans les centres-villes ou les parcs, roulant au maximum de leur vitesse, au mépris de la sécurité des piétons, notamment des enfants.

On trouve de tout : une mini-moto à monter soi-même, de fabrication chinoise, coûte environ 300 euros. Il est possible d’en acquérir sur internet ou dans les grandes surfaces, sans information, ni formation, alors que ces véhicules peuvent atteindre plus de cinquante kilomètres à l’heure.

Le 10 juillet 2006, la Commission européenne a demandé aux États membres de renforcer leurs contrôles. Un dispositif législatif existe depuis la loi du 5 mars 2007, mais force est de constater que celui-ci n'a pas n'a pas réglé le problème. Dans un avis du 24 mai 2007, la commission de la sécurité des consommateurs a relevé plusieurs problèmes concernant les systèmes de freinage, moins efficaces que ceux d'une motocyclette classique, ou encore le montage, les engins les moins chers étant souvent vendus en kit, parfois sans notice. Il en résulte des risques de chute et de blessure importants pour les utilisateurs.

Afin d'endiguer la prolifération de ces dangereux bolides, à l'initiative du maire de Bondy et avec 22 autres maires de Seine-Saint-Denis, nous avons interpellé le préfet, en juin, pour lui demander de prendre des mesures d’urgence. À Aulnay-sous-Bois, au cours du premier semestre 2007, nous avons effectué cent interventions sur des deux-roues, dont un quart concernait des mini-motos. Une dizaine ont été détruites au bout d'un mois, n’ayant pas été réclamées en fourrière. J'ai préconisé de ne plus considérer ces engins comme des jouets et d’empêcher l’importation incontrôlée de ces véhicules à des prix dérisoires. Notre but est de réglementer le marché afin, à terme, de l’assécher.

Les mesures que nous sommes appelés à voter aujourd'hui, qui vont dans le bon sens, responsabilisent aussi bien les vendeurs que les acheteurs. La vente de mini-motos sera réservée à des professionnels identifiés adhérant à une charte de qualité. Il sera impossible d’en vendre ou céder à titre gratuit à des mineurs de moins de quatorze ans, lesquels ne pourront les conduire que sur des terrains adaptés et dans le cadre d'une pratique sportive. En cas de récidive, les véhicules seront confisqués.

Nous soutiendrons l'adoption de cette proposition et nous comptons sur le Gouvernement pour l'inscrire au Sénat dans les plus brefs délais, afin de permettre une adoption rapide, avant l'été, saison où l'utilisation de ces engins explose. En outre, la France présidant bientôt l’Union européenne, nous serons attentifs à ce qu'une réglementation européenne soit mise en place (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe NC).

Mme Élisabeth Guigou – Les nuisances et les accidents occasionnés par les mini-motos n'ont cessé de prendre de l'ampleur ces dernières années et continueront à le faire tant que la vente et la location de ces engins ne seront pas strictement encadrées. Si leur utilisation est interdite sur la voie publique, cette interdiction n'est pas respectée. Dans ma circonscription, à Bondy, Noisy-le-Sec et Romainville, j'ai vu de jeunes enfants de cinq ou six ans conduire ces mini-motos en bas de leur immeuble, parfois sans surveillance de leurs parents. Mais il ne suffit pas de dénoncer l'inconscience et l'irresponsabilité de certains parents ; il faut que l'État adapte sa réglementation et mène une véritable politique de prévention.

Ces engins représentent un danger pour leurs utilisateurs comme pour les passants. Pouvant dépasser les 50 kilomètres-heure, ce ne sont pas des jouets, et la mauvaise qualité des matériels utilisés pour leur fabrication rendent leur usage particulièrement dangereux. Ils sont à l'origine de nombreux accidents graves, voire mortels, comme à Gonesse, Évry ou Villiers-le-Bel. En outre, le bruit qu'ils occasionnent gêne considérablement les riverains. En zone rurale, les quads provoquent de sérieux dommages à l'environnement.

À l'initiative du maire socialiste de Bondy, M. Roger, vingt-trois maires de Seine- Saint-Denis se sont mobilisés et ont organisé en septembre 2007 une réunion avec le préfet. J'ai adressé en octobre une question écrite au ministre des transports à ce sujet. Je vous ai ensuite adressé une seconde question écrite. Puis, avec M. Goldberg, nous avons déposé, le 7 novembre, une proposition de loi visant à responsabiliser les distributeurs et à limiter la vente de ces mini-motos aux professionnels capables de prodiguer les conseils nécessaires. Nous avons par ailleurs adressé une lettre à tous les directeurs de supermarchés du département pour les avertir de la dangerosité de leurs produits.

Par la suite, le groupe UMP a déposé, à la fin du mois de janvier, une proposition de loi sur le même thème. À la demande expresse du groupe socialiste, les deux propositions ont été étudiées en même temps par la commission des lois. C'est ce texte de synthèse que nous examinons, et je me réjouis que nous puissions, sur ce sujet de sécurité et de tranquillité publique, trouver un consensus qui dépasse les clivages politiques, et ce, à quelques semaines des élections municipales.

Le projet qui nous est soumis recueille l'approbation du groupe socialiste, mais il peut encore être amélioré. Nous avons donc déposé des amendements visant à permettre une meilleure prise en compte de la réalité des situations et à garantir l'efficacité du dispositif par des mesures préventives.

Le texte prévoit de limiter la vente des mini-motos et mini-quads aux professionnels qui ont pris un certain nombre d'engagements en adhérant à une charte de qualité définie par décret. Ces produits n'ont évidement rien à faire dans les rayons des supermarchés.

Nous proposons que les règles qui régissent la vente des mini-motos et des mini-quads s'appliquent aussi à leur location et à leur location-vente : le danger est le même, que l'engin soit acheté ou loué. Il faut surtout créer pour le vendeur une obligation de conseil et d'information aux utilisateurs. Cela responsabilisera aussi bien celui-ci que les parents. Nous avons donc déposé un amendement en ce sens.

Le dispositif doit en outre s’accompagner d'une action volontaire de l'État en direction des utilisateurs et de leurs proches. Une campagne de sensibilisation est le meilleur moyen de faire prendre conscience des dangers liés à une mauvaise utilisation de ces véhicules. Si cet amendement ne peut être retenu, j'attends de votre part un engagement sur ce point, Monsieur le ministre. Il me semble d’ailleurs que vous l’avez pris tout à l’heure.

L'article 2 interdit l’utilisation des mini-motos et mini-quads sur des terrains non conformes aux conditions de sécurité fixées par décret, que ce soit la voie publique ou un terrain privé. Comme pour les mobylettes et les scooters, l'utilisation n'est autorisée qu'à partir de 14 ans. Les infractions seront punies d’une contravention de cinquième classe, le véhicule étant confisqué en cas de récidive. Nous souhaitons que l'on rende possible la destruction de l'objet, bien plus dissuasive que sa confiscation. Cette destruction devrait être prévue, sauf lorsque le contrevenant accepte de suivre une formation dans un club sportif. Cette mesure aurait pour avantage de favoriser la prise de conscience et de former à une conduite plus sûre ceux qui en ont besoin.

Nous proposons aussi d'autoriser l'utilisation de ces véhicules, sous certaines conditions, dans des zones autres que réglementaires. Je pense à un usage professionnel dans des zones de montagne ou encore dans certaines exploitations agricoles ou forestières.

Je souhaite enfin appeler votre attention sur les difficultés que rencontrent les forces de police et de gendarmerie pour interpeller les utilisateurs, souvent très jeunes, de mini-motos. Ces interpellations sont délicates. Il faut donc organiser et former des équipes spécialisées pour intercepter les contrevenants dans de bonnes conditions.

Si nos amendements sont acceptés, le texte associera comme l’aurait voulu Gilbert Bonnemaison – à qui je rends moi aussi hommage – l’information, la prévention et la sanction. Nous aurons alors répondu à un problème qui met en danger beaucoup de nos jeunes et empoisonne la vie quotidienne de nombre de nos concitoyens (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC).

M. Gérard Gaudron – Très bien !

M. Jean-Philippe Maurer – Le rapport sur cette proposition de loi aurait pu s’intituler « mini-motos et maxi-nuisances ». Un moteur thermique, deux roues, la vitesse et le bruit : tous les attributs d’une moto sont ici au service d’une petite cylindrée. Les mini-motos se caractérisent par un prix accessible – à partir de 100 euros – et une pratique tout à fait illégale, hélas répandue. Nos concitoyens perdent donc patience face à l’invasion de ces engins et au comportement de leurs pilotes, qui réduit à néant le travail d’éducation à la sécurité routière des familles, de l’éducation nationale et des associations. Ce constat est amplifié par la diffusion massive de ces engins : 40 000 seraient en circulation.

Les différents acteurs publics et privés concernés n’ont cependant pas tardé à prendre conscience du danger. Je salue ainsi la grande distribution, dont les principales enseignes ont renoncé à commercialiser ce type de produits. Si elles ont fait ce choix, c’est parce que les mini-motos connaissent un usage qui excède leurs limites et met en danger leurs utilisateurs et les résidents de nos quartiers et communes. Hélas, d’autres circuits de distribution ont pris la relève. Les services douaniers n’ont pourtant pas ménagé leurs efforts : des centaines d’engins ont été bloqués aux frontières en raison de leurs carences techniques ou de leur dangerosité. Mais comme les contraintes ne peuvent excéder celles prévues par les dispositions applicables, le phénomène persiste. Bien entendu, la police et la gendarmerie s’emploient à sanctionner les auteurs d‘infractions. Mais comment endiguer la diffusion des mini-motos avec des moyens juridiques limités et sans mettre en danger ceux qui ne défèrent pas aux injonctions qui leur sont adressées ?

Si j’ai insisté sur l’engagement des principaux acteurs qui se sont sentis concernés par le problème, c’est pour mettre en exergue la nécessité de modifier les textes en vigueur. Il est temps de reprendre le contrôle de la situation et d’adapter notre arsenal législatif en réponse aux dérives qui sont constatées. Ce texte se veut protecteur pour les mineurs, leurs familles et les résidents de nos quartiers et communes. Il remet les adultes à leur juste place en interdisant la vente ou la cession à titre gratuit aux mineurs. Il responsabilise les vendeurs et cessionnaires par une professionnalisation que confirme leur adhésion à une charte de qualité. Elle protège les mineurs, plus particulièrement ceux de moins de 14 ans, qui se voient interdire leur utilisation en-dehors des terrains sportifs destinés à cet usage et gérés par une association dûment identifiée. La confiscation de ces deux-roues permettra de les mettre hors circuit – c’est le cas de le dire – en cas d’infraction.

Ce texte a valeur d’étape. Il témoigne de notre volonté de combler le vide législatif qui s’est créé au fil des années, au grand désarroi de nos concitoyens. Il est donc bienvenu : il donnera aux différents acteurs les outils juridiques qui leur permettront de restaurer des conditions de circulation compatibles avec le droit de chacun à vivre paisiblement dans son quartier ou sa commune.

« Mini-motos mais maxi-garanties » : tel est donc l’objectif de ce texte. Je ne doute pas qu’il trouvera un écho favorable, car il répond à une véritable attente (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. François Pupponi – Permettez-moi de vous dire mon émotion de m’exprimer pour la première fois à cette tribune et sur ce sujet, à quelques semaines du drame qui a coûté la vie à deux adolescents de Villiers-le-Bel. J’ai en cet instant une pensée pour eux et pour leurs familles, mais aussi pour les policiers, qui ont été traumatisés par cet accident, au point que certains n’ont toujours pas repris leur travail. J’ai aussi une pensée pour la population de Villiers-le-Bel. Il n’y a pas eu un début d’émeute – comme l’a dit mon collègue Calméjane – après cet accident, mais des événements sans précédent dans notre pays. J’étais moi-même à Villiers-le-Bel, avec le Premier ministre et la ministre de l’intérieur, le lundi soir : 180 policiers essayaient de rétablir l’ordre ; 54 sont rentrés au centre de secours de Villiers-le-Bel avec du plomb dans la peau, un avec une balle de chasse dans le bras – tout cela après la mort de deux adolescents qui conduisaient illégalement une moto interdite sur la voie publique. Cela faisait plusieurs jours qu’ils le faisaient, que les habitants de Villiers-le-Bel téléphonaient à la police et que celle-ci essayait de mettre un terme aux nuisances suscitées par cette moto et toutes les autres.

Permettez-moi de vous faire part de mon inquiétude : ce texte va dans le bon sens, mais il ne réglera pas le problème. Certains adultes n’auront aucun scrupule à acheter une moto et à la mettre à la disposition d’un certain nombre de mineurs, quitte à être condamnés. Par ailleurs, le texte ne règle pas le problème des 30 ou 40 000 véhicules de ce type qui sont déjà en circulation. Enfin, la police n’a pas les moyens d’intervenir. Elle sait de toute façon qu’en intervenant, elle met en danger les jeunes conducteurs comme les fonctionnaires de police. Il faudra donc trouver des solutions pérennes. Sur un tel sujet, nous devons pouvoir travailler dans la durée pour éradiquer définitivement le phénomène.

Bien entendu nous voterons ce texte, qui est un premier pas ; mais il en faudra beaucoup d’autres (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC).

La discussion générale est close.

M. le Président – J’appelle maintenant les articles de la proposition de loi dans le texte de la commission.

ARTICLE PREMIER

M. Guy Geoffroy, rapporteur suppléant – L’amendement 9 est rédactionnel.

L'amendement 9, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

Mme Élisabeth Guigou – Notre amendement 1 rectifié vise à étendre le dispositif aux véhicules loués, le danger étant le même. Son adoption permettrait en outre d’éviter le contournement de la loi au moyen de la location-vente.

M. Jean-Luc Warsmann, président de la commission Il ne faudrait pas empêcher la pratique de certains sports, en particulier le karting ; c’est le sens de mon sous-amendement 11.

M. Luc Chatel, secrétaire d’État Je m’apprêtais à émettre un avis favorable à l’amendement mais je suis sensible à l’argument du président Warsmann ; je m’en remets à la sagesse de l’Assemblée sur l’amendement sous-amendé.

M. Guy Geoffroy, rapporteur suppléant – Le sous-amendement précise l’amendement sans le restreindre ; la commission ne l’a pas examiné, mais il est de bonne logique de l’adopter, comme l’amendement de Mme Guigou – que la commission a approuvé en début d’après-midi.

Le sous-amendement 11, mis aux voix, est adopté, de même que l'amendement 1 ainsi sous-amendé.

L'article premier modifié, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ARTICLE PREMIER

M. François Pupponi – Notre amendement 5 tend à doter les forces de police et de gendarmerie de chaque département de moyens d’intervention spécialisés.

M. Guy Geoffroy, rapporteur suppléant – L’intention est louable, mais la commission l’a repoussé pour deux raisons : d’une part, l’organisation interne de la police ou de la gendarmerie ne relève évidemment pas de la loi ; d’autre part, on voit mal l’intérêt de mettre en place des groupes spécialisés dans tous les départements – qui sont diversement concernés.

M. Luc Chatel, secrétaire d’État Les forces de l’ordre sont évidemment très sensibilisés à ces problèmes, et Mme Alliot-Marie leur a adressé à plusieurs reprises des recommandations ; mais leur organisation ne relève pas de la loi. Avis défavorable donc.

L'amendement 5 est retiré.

ART. 2

M. Guy Geoffroy, rapporteur suppléant – L’amendement 10 vise à mieux encadrer l’exception pour pratique sportive au principe d’interdiction de l’utilisation de mini-motos par les mineurs de moins de 14 ans, en renvoyant à un décret.

L'amendement 10, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Daniel Goldberg – Notre amendement 2 tend à prévoir, outre la confiscation, la possibilité de destruction de ces engins ; mais nous proposons également par notre amendement 6 que, hors cas de récidive, ces sanctions puissent être suspendues si le contrevenant accepte de se soumettre à une formation. Par ailleurs, cet amendement évoque, outre les contraventions de cinquième classe, l’éventualité de la commission d’un délit – terme plus dissuasif.

M. Guy Geoffroy, rapporteur suppléant Avis défavorable à l’amendement 6 car la confiscation n’est pas automatique – même dans le cas d’une récidive, pour laquelle le magistrat conserve la possibilité d’une décision contraire motivée. Avis défavorable également à l’amendement 2 : après confiscation, le véhicule est remis aux domaines, qui décident alors de l’éventualité de la destruction – laquelle est d’ailleurs le plus souvent prononcée, du fait de la mauvaise qualité des engins.

M. Luc Chatel, secrétaire d’État Les sanctions alternatives proposées par l’amendement 6 risqueraient d’atténuer la portée du dispositif. Avis défavorable donc. Quant à l’amendement 2, le Gouvernement adhère pleinement à son objectif, mais il est déjà satisfait par l’article L. 325-1 du code de la route : j’invite donc ses auteurs à le retirer ; à défaut, avis défavorable.

M. Daniel Goldberg – Nous maintenons les deux.

L'amendement 6, mis aux voix, n'est pas adopté, non plus que l’amendement 2.

M. François Pupponi – Notre amendement 7 rectifié a pour but de ne pas pénaliser ceux qui utilisent ces engins dans le cadre d’une exploitation agricole ou en montagne.

M. Guy Geoffroy, rapporteur suppléant – La commission a repoussé cet amendement, mais demande au Gouvernement de prendre bonne note du souhait qu’il exprime car il faudrait régler cette question dans le décret.

M. Luc Chatel, secrétaire d’État Les véhicules visés sont destinés à être réceptionnés et immatriculés. Or, les véhicules visés ici ne sont pas immatriculés, ou de façon facultative. L’amendement est donc sans objet.

L’amendement 7 rectifié est retiré.

L'article 2, modifié, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 2

Mme Élisabeth Guigou – Notre amendement 4 propose que le vendeur délivre à l’acheteur les informations adaptées, en tenant compte de son âge et de l’engin choisi ; il en est dispensé lorsque l’acheteur est un club affilié à une fédération sportive agréée par le ministère de la jeunesse et des sports.

La loi ne résout jamais tous les problèmes, mais il faut toujours un accompagnement pour la rendre efficace. Cet amendement se veut préventif.

M. Guy Geoffroy, rapporteur suppléant – La commission a repoussé cet amendement. Elle n’est pas en désaccord sur le fond, et je laisse de côté le fait qu’on n’y définit pas à quel type d’engin il s’applique. Mais ces dispositions sont d’ordre réglementaire et c’est la charte de qualité qui définira les informations que le vendeur devra donner. Le décret relatif à cette charte le précisera certainement.

M. Jean-Luc Warsmann, président de la commission – Au passage, dans quel délai sera pris ce décret ?

M. Luc Chatel, secrétaire d’État L’amendement crée une obligation de conseil déjà prévue par l’article L. 221-1 du code de la consommation. En outre les professionnels s’engageront, en signant la charte, à informer, conseiller et mettre en garde les acheteurs. Le décret qui définira le contenu de la charte est en préparation. Enfin, les prescriptions normatives concernant la taille, le poids, l’âge du conducteur et la puissance de l’engin sont en cours d’élaboration au niveau communautaire.

M. Daniel Goldberg – Certes, il existe déjà une législation. Mais si elle était efficace, nous ne serions pas ici. Il faut la renforcer et adresser aux utilisateurs le message le plus clair possible.

L'amendement 4, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Daniel Goldberg – Notre amendement 8 prévoit une campagne annuelle de sensibilisation sur ce sujet en direction des familles et des jeunes.

M. Guy Geoffroy, rapporteur suppléant – La commission est favorable au principe d’une sensibilisation. Elle a cependant repoussé cet amendement qui est une sorte d’injonction au Gouvernement. Différentes campagnes sont déjà engagées, dont une, très bien faite, dans le Val-de-Marne. Et le Gouvernement aura certainement à cœur de mettre en œuvre tout ce qui lui incombe.

M. Luc Chatel, secrétaire d’État – Le Gouvernement est effectivement favorable à des opérations de sensibilisation sur ce sujet, qui est d’actualité et que votre proposition met en lumière. Je l’évoquerai devant le conseil national de la consommation le 13 février, pour que tous les acteurs, en particulier la commission de sécurité des consommateurs, diffusent l’information. Le ministère de l’intérieur tiendra certainement aussi à sensibiliser le public. Mais ces dispositions sont d’ordre réglementaire. Je ne peux donc pas être favorable à l’amendement.

M. Daniel Goldberg – Nous le retirons. Mais nous espérons que la volonté manifestée par le Gouvernement sera suivie d’effet, et que le groupe socialiste, s’il n’a pas été associé en amont, le sera en aval pour la mise en place de ces dispositions.

L’amendement 8 est retiré.

M. le Président – Nous en venons aux explications de vote.

Mme Élisabeth Guigou – Si nous regrettons que la plupart de nos amendements n’aient pas été retenus, nous sommes satisfaits que celui qui concerne l’encadrement de la location-vente l’ait été en partie. J’espère aussi que la dérogation concernant les karts n’ouvrira pas une brèche trop importante dans le dispositif. Nous pourrons voir ce qu’il en est à l’usage, puisque la commission et le Gouvernement ont manifesté de bonnes intentions pour nous permettre de suivre l’application du texte. Comme tout dispositif législatif, il aura besoin d’un accompagnement.

Ce texte est un progrès, et il sera bien accueilli. Sans entraver la pratique sportive et des utilisations professionnelles, il ramènera un peu de tranquillité dans certains quartiers et évitera à des jeunes de se mettre en danger. Le groupe SRC le votera (Applaudissements sur tous les bancs).

M. Patrice Calméjane – Face à un phénomène de société récent, il nous fallait agir rapidement. Ce texte ne règlera pas tout mais améliorera les choses. Nous nous félicitons qu’il fasse l’objet d’un large consensus, puisqu’il sera, apparemment, voté à l’unanimité. Nous ne pouvons que souhaiter qu’il passe bientôt devant le Sénat pour être appliqué au plus vite. Bien entendu, il ne remet pas en cause l’utilité ni l’intérêt des deux-roues pour l’apprentissage des jeunes, s’ils sont bien utilisés (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. le Président – M. Vampa me fait signe que le groupe du Nouveau centre votera ce texte.

L'ensemble de la proposition, mis aux voix, est adopté.

M. Luc Chatel, secrétaire d’État – Je remercie les auteurs de la proposition et tous les parlementaires qui ont travaillé sur cette question. Ce texte améliorera la sécurité, et il sera complété par des dispositions réglementaires et communautaires, ainsi que par les actions qu’organiseront les services de police et de prévention. Je remercie enfin le président de la commission, le rapporteur et son suppléant d’avoir su regrouper deux initiatives en une, de sorte que ce texte soit adopté à l’unanimité par l’Assemblée (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

Prochaine séance demain, mercredi 6 février, à 15 heures.

La séance est levée à 20 heures.

La Directrice du service
du compte rendu analytique,

Marie-Christine CHESNAIS

Le Compte rendu analytique
est disponible sur Internet
en moyenne deux heures après la fin de séance.

Le compte rendu analytique des questions au Gouvernement
est également disponible, sur Internet et sous la forme d’un fascicule spécial,
dès dix-huit heures

Préalablement,
est consultable une version incomplète,
actualisée au fur et à mesure du déroulement de la séance.

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