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Assemblée nationale

Compte rendu
analytique officiel

Séance du mardi 25 mars 2008

1ère séance
Séance de 9 heures 30
121ème séance de la session
Présidence de M. Rudy Salles, Vice-Président

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La séance est ouverte à neuf heures trente.

MISSIONS TEMPORAIRES DE DÉPUTÉS

M. le Président – M. le Président a reçu de M. le Premier ministre des lettres l’informant de sa décision de charger plusieurs députés de missions temporaires auprès de membres du Gouvernement.

DÉMISSION D’UN DÉPUTÉ

M. le Président – M. le Président a reçu de M. le président du Conseil constitutionnel communication d’une décision déclarant, en application de l’article L.O. 136-1 du code électoral, M. Joël Sarlot inéligible pendant un an à compter du 7 février 2008 et, en conséquence, démissionnaire d’office.

SOUHAITS DE BIENVENUE À UNE NOUVELLE DÉPUTÉE

M. le Président – J’ai reçu, en application des articles L.O. 176-1 et L.O. 179 du code électoral, une communication de Mme la ministre de l’intérieur, en date du 7 mars 2008, m’informant du remplacement de notre collègue Michel Debet, décédé il y a peu, par Mme Colette Langlade.

Je souhaite la bienvenue à Mme Colette Langlade, qui siège ce matin parmi nous pour la première fois.

QUESTIONS ORALES SANS DÉBAT

L’ordre du jour appelle les questions orales sans débat.

RÉFORME DU SYSTÈME D’IMMATRICULATION DES VÉHICULES

M. Louis Giscard d'Estaing – Je suis heureux d’adresser à M. Alain Marleix, que je félicite de ses nouvelles attributions, une question qui concerne tout particulièrement les collectivités territoriales, notamment la région d’Auvergne.

De nouvelles plaques d’immatriculation doivent être mises en service au 1er janvier 2009, en application d’une réforme du système d’immatriculation des véhicules, réforme devenue nécessaire du fait que la numérotation actuelle, qui date de 1950, arrive à son terme. Désormais, chaque véhicule se verra attribuer un numéro à vie, et la mention du département, pratiquée depuis les années 1950 deviendra facultative.

L’on ne peut que souscrire à la volonté de simplifier la vie des usagers, en leur épargnant un déplacement en préfecture et un changement de plaque lors de l’achat d’une voiture d’occasion ; de rendre les fichiers plus fiables en limitant le nombre de numéros et la fréquence des changements ; enfin de réduire les coûts de gestion. Mais la référence au département est particulièrement importante aux yeux de nos compatriotes, car elle exprime son appartenance à un terroir facilement identifiable. Je ne doute pas, Monsieur le ministre, que vous serez sensible à cet argument, qu’il s’agisse du département du Cantal – le 15 – ou du Puy-de-Dôme – le 63.

De fait, le ministère de l’intérieur a précisé en septembre dernier que les automobilistes pourront, s’ils le désirent, faire suivre le numéro d’une identification locale. Je propose donc que cette référence optionnelle puisse bénéficier de l’espace libéré par le passage de huit à sept caractères alphanumériques, prévu par la réforme, ce qui lui assurerait une plus grande visibilité, par exemple à droite de la plaque, si tel est le souhait du propriétaire du véhicule au moment de son acquisition ou de sa nouvelle affectation. Cela permettrait de consacrer à la référence locale, qui se compose de deux chiffres, un espace plus important que les 4,5 centimètres actuellement dévolus au sigle européen ou national – limité à la lettre « F » –, et de satisfaire les défenseurs de l’identité départementale, voire régionale.

M. le Président – Je vous félicite également de vos nouvelles attributions, Monsieur le secrétaire d’État.

M. Alain Marleix, secrétaire d’État à l’intérieur et aux collectivités territoriales – Je vous remercie, Monsieur le président. Monsieur Giscard d’Estaing, je suis moi aussi heureux de m’adresser, pour cette première réponse dans l’exercice de mes nouvelles fonctions, à un député issu de cette région d’Auvergne qui nous est chère.

Cette réforme, vous l’avez dit, permettra, conformément aux attentes de nos concitoyens, de simplifier leurs démarches administratives. Le numéro d'immatriculation sera attribué selon une série chronologique non plus départementale, mais nationale, qui ne fera toutefois pas disparaître toute référence au lieu d’origine ou de résidence du propriétaire du véhicule. En effet, la référence locale, optionnelle, se composera du numéro de département choisi par l'usager – qu’il s’agisse, au hasard, du 15 ou du 63… (Sourires)

M. Louis Giscard d'Estaing – Ou encore du 06 ! N’est-ce pas, Monsieur le président ? (Sourires)

M. Alain Marleix, secrétaire d’État – …et du logo de la région correspondante. Dictées par des considérations techniques, les caractéristiques de son emplacement ont été définies en concertation étroite avec les représentants de l'industrie de la plaque d'immatriculation et avec les services de chacune des vingt-six régions de métropole et d'outre-mer. Ainsi, l’espace libéré par le passage de huit caractères alphanumériques au maximum – et jusqu'à neuf outre-mer – à sept sera en réalité absorbé par les tirets séparant le bloc de chiffres médian des blocs de lettres latéraux, tirets qui permettront de distinguer les plaques françaises des plaques italiennes. Les dimensions de l'identifiant territorial facultatif ne pourront donc être supérieures à celles du symbole européen complété par la lettre « F », et qui figure dans la partie gauche de la plaque minéralogique. Il en va de même des plaques carrées utilisées sur certains deux-roues motorisés, véhicules tout terrain et remorques.

D’autre part, le réseau de distribution mettra des plaques dépourvues de tout identifiant local à la disposition des automobilistes qui ne souhaitent pas faire référence à un territoire donné. Dans ce cas, les caractères composant le numéro d'immatriculation seront décalés sur la droite, afin d'éviter des dérives liées à la possibilité de poser sur cette partie de la plaque des vignettes autocollantes dont le contenu ne serait pas strictement conforme aux dispositions qui en réglementeront l'usage.

Que l’on opte ou non pour la référence locale, la configuration prévue par la réforme permettra de garantir la lisibilité du numéro d'immatriculation, afin, notamment, d’assurer la sécurité routière.

M. Louis Giscard d'Estaing – Je vous remercie, Monsieur le ministre, de ces précisions propres à rassurer les nombreux partisans de la référence départementale. Il est en effet essentiel que le Gouvernement informe clairement de cette possibilité optionnelle ces citoyens qui, par leur attachement à l’histoire des plaques minéralogiques, expriment une forme de patriotisme. Peut-être pourrez-vous, dans vos nouvelles fonctions, faire valoir cet enjeu de la réforme.

CONDITIONS DE LOGEMENT DES GENDARMES

M. Nicolas Dhuicq – En appelant votre attention sur le logement de la gendarmerie, arme d’élite qui protège jour et nuit la sécurité de nos compatriotes sur l’ensemble du territoire, notamment en milieu rural, je ne doute pas, Monsieur le secrétaire d’État, que vous saurez mettre votre expérience du monde combattant au service de nos territoires. Loin de constituer un avantage acquis, les logements concédés aux brigades de gendarmerie par nécessité absolue de service, en vertu d’un décret de 1949, sont indispensables à l’efficacité de leur action : sinon, comment un gendarme pourrait-il réagir à un sinistre ou à un délit survenu loin de son domicile ou de sa brigade ?

Or, malgré les efforts consentis au cours des dernières années, l’équipement et la qualité de nombreux logements demeurent très en deçà des normes en vigueur. En outre, les brigades de gendarmerie s’inquiètent des rumeurs de suppression de ces logements. Quelles sont les intentions du Gouvernement ?

M. Alain Marleix, secrétaire d’État à l’intérieur et aux collectivités territoriales – Ayant occupé encore récemment des fonctions au ministère de la défense, je suis très sensible au problème du logement des gendarmes. Vous avez justement rappelé l’importance du principe de concession de logement par nécessité absolue de service qui, combiné avec le régime militaire de la gendarmerie, permet à celle-ci de remplir ses missions sur 95 % de notre territoire. En effet, la gendarmerie dispose de personnels logés sur leur lieu d’emploi et soumis à un régime d’astreinte qui leur permet d’intervenir à tout moment en tout point de leur zone de compétence dans des délais inférieurs à trente minutes, voire d’être rapidement épaulés pour faire face à des événements majeurs. Loin d’être remis en cause, ce principe essentiel sera réaffirmé par le projet de loi sur la gendarmerie que vous soumettra prochainement la ministre de l’intérieur. Cette obligation statutaire d’occuper le logement concédé concerne l’ensemble des officiers et des sous-officiers. En contrepartie, l’État est tenu de n’attribuer que des logements individuels décents, confortables, modernes et adaptés. Le Gouvernement est particulièrement attentif à la qualité du parc immobilier de la gendarmerie. Ainsi, depuis 2002, un effort majeur de construction a été entrepris et sera poursuivi : 3 158 logements neufs seront livrés en 2008, et 4 500 autres seront remis aux normes au cours des six prochaines années. Vous voyez que nous n’ignorons pas ce sujet essentiel au moral des fonctionnaires de la gendarmerie nationale et de leurs familles !

M. Nicolas Dhuicq – Je vous remercie. Nul doute que votre réponse satisfera les gendarmes du Puy-de-Dôme ou de l’Aube – au hasard – et notamment les jeunes recrues, si nombreuses, qu’attirent les missions variées de cette arme passionnante.

PROGRAMME EXCEPTIONNEL D’INVESTISSEMENT POUR LA CORSE

M. Paul Giacobbi – J’ai souvent évoqué ici même le fameux programme exceptionnel d’investissement – PEI – pour la Corse prévu par la loi du 22 janvier 2002, qui devait consacrer deux milliards d’euros, financés à 70 % par l’État, en supplément de ses programmes normaux tels que les contrats de plan. Hélas, après cinq années d’exécution, soit un tiers de la durée prévue, le bilan de ce PEI est insignifiant, bien que le Gouvernement se targue de bons résultats, non sans mauvaise foi, tout en s’ingéniant à bloquer l’exécution des rares projets sur lesquels il s’était engagé. Ainsi, fin 2007, l’État n’avait payé que 7,5 % du total attendu. Pire encore : une grande partie de ces versements sont abusivement attribués au PEI alors qu’ils proviennent de programmes qui, dans d’autres régions, n’ont rien d’exceptionnel, qu’il s’agisse de l’Agence de l’eau ou des infrastructures de transports. Malgré ce subterfuge, l’État a beaucoup promis : 487 millions de « crédits programmés » - une nouvelle nomenclature sans aucune valeur juridique – et 311 millions de crédits engagés. C’est d’autant plus inquiétant que les crédits de paiement prévus en loi de finance sont dérisoires au regard de ces sommes.

Pour sortir de l’impasse, l’État a trouvé une solution imparable : il manipule les calendriers afin de rendre l’exécution des travaux impossible. En effet, une demande de financement par le PEI doit faire l’objet d’un dossier complet assorti des autorisations nécessaires, dont certaines ont une validité limitée. Or, l’arrêté de subvention – exigeant que les travaux soient commencés dans les six mois – n’est parfois obtenu qu’après leur expiration, ce qui contraint le maître d’ouvrage à renouveler son autorisation d’effectuer les travaux – procédure qui, à son tour, s’achève alors que l’arrêté de subvention est déjà caduc. C’est kafkaïen ! Ainsi, s’agissant de la RD 81 au nord de Saint-Florent, l’arrêté préfectoral portant autorisation au titre de la loi sur l’eau et valide pour deux ans était daté du 29 novembre 2005, mais ce n’est que le 13 décembre 2007 que l’arrêté de subvention a été transmis, soit après expiration de l’arrêté d’autorisation. Naturellement, cette question ayant été annoncée, il n’a fallu que quelques jours au Gouvernement pour régler le problème : je remercie l’administration concernée de sa promptitude. Pour autant, des dizaines de situations semblables subsistent. Afin d’en obtenir une évaluation objective, je propose que la Cour des comptes soit saisie d’un rapport sur l’exécution du PEI.

M. Alain Marleix, secrétaire d’État à l’intérieur et aux collectivités territoriales – Vos affirmations sont en complet décalage avec la réalité, Monsieur le député, et le PEI pour la Corse est loin d’être « insignifiant ». La première convention d’application, signée en octobre 2002, s’est achevée le 31 décembre 2006. Le montant total des 186 opérations programmées dépassait 486 millions, soit cinq millions de plus que le montant initialement prévu. L’État s’est engagé avec la collectivité territoriale de Corse à en financer plus de 312 millions, soit 70 % – c’est-à-dire le maximum autorisé – et ce en sus des programmes ordinaires tels que le contrat de plan.

Quant aux paiements de 111,7 millions effectués à la fin 2007, c’est aux engagements de l’État, et non au coût total des opérations, qu’il faut les rapporter. Dès lors, le taux de couverture n’est pas de 7,5 %, comme vous le prétendez, mais de 35,7 %, et toutes les factures déposées avant la clôture de l’exercice ont été honorées.

Une deuxième convention d’application du PEI a été signée le 4 mai dernier. Elle porte sur sept ans et, avec 1 051 millions d’investissements prévus, marque une nette accélération du rythme de programmation. À ce jour, 66 opérations ont déjà été programmées. Par ailleurs, les moyens consacrés au PEI pour la Corse en 2008 s’élèvent à 95 millions en autorisations d’engagement et 43 millions en crédits de paiement.

S’agissant des infrastructures de transport, je vous rappelle que la loi prévoit un versement de l’AFITF au titre du PEI, puisque le législateur a souhaité le transfert à cette agence du financement des projets concernant les transports compris dans les contrats de plan et autres dispositifs tels que le PEI. Ainsi, sans le PEI, l’AFITF n’interviendrait pas en Corse. Quant à l’Agence de l’eau, que vous avez également évoquée, vous savez bien que les crédits du PEI comprennent la différence entre le niveau habituel d’intervention de l’Agence de l’eau et celui d’un programme exceptionnel.

Enfin, vous accusez les services de l’État de rendre l’exécution des travaux impossible. Outre que les taux d’exécution démentent cette affirmation, je ne peux que vous inviter à relire le courrier que le préfet de Haute-Corse vous a adressé à ce sujet : il y précise que, s’agissant de la RD 81, le conseil général ne l’a saisi que le 21 décembre 2007 d’une demande de prorogation de l’arrêté d’autorisation de 2005 – alors qu’elle aurait pu être transmise avant – et qu’il y donnera une réponse favorable dans les prochains jours, si elle ne vous est pas déjà parvenue.

M. Paul Giacobbi – La teneur de votre réponse est sans surprise. Permettez-moi néanmoins de rappeler que les opérations « programmées » n’ont, en droit français, aucune valeur : mon voisin M. Dolez et moi-même pourrions aussi bien nous asseoir dans un coin et programmer un milliard de crédits sur un bout de papier, cela n’engage à rien. L’État a certes engagé 312 millions, mais les crédits de paiement sont insuffisants. Comment voulez-vous qu’avec 111 millions, soit 7,5 % du total, ou 35 % selon vous, le financement moyen soit de 70 % ? Quant aux factures déposées fin 2007, elles ont en effet toutes été honorées – je suis assez intervenu ici même pour faire accélérer les choses, mais avec six mois, voire un an de retard en moyenne. S’agissant enfin des transports, pourquoi l’AFITF a-t-elle besoin d’un PEI en Corse pour y faire ce qu’elle fait ailleurs dans un cadre ordinaire ?

Au fond, ma demande est simple : je souhaite que les engagements publics soient tenus grâce à une meilleure discipline budgétaire. Pourquoi ne pas saisir la Cour des comptes ? Elle nous mettrait tous d’accord !

CONSÉQUENCES DE L’INTERDICTION DE FUMER DANS LES LIEUX PUBLICS

M. Jacques Remiller – Le presse mentionne ce matin un net recul du tabagisme chez les adolescents. Pour ma part, je souhaite appeler l’attention du Gouvernement sur les conséquences de l'interdiction de fumer dans les lieux à usage collectif. Cette réglementation est appréciée par nombre de nos concitoyens, et même par des fumeurs, et il n'est pas question de revenir sur l'interdiction. Néanmoins, trois mois après l'entrée en vigueur du décret, qui semble globalement respecté, les patrons de bars-tabac et de discothèques se plaignent d'un fort recul de leur chiffre d'affaires. La relative désaffection de la clientèle met en péril la survie de certains établissements, particulièrement ceux qui ne peuvent aménager des terrasses. La confédération des buralistes fait état d’une baisse d'activité qu’elle estime être de 20 à 25 % sur les consommations, 10 % sur les jeux et 12 % sur les tabacs. Enfin, l'Union des métiers et industries de l'hôtellerie évoque une baisse de recettes d'environ 20 % pour les discothèques et de 15 % à 20 % pour les bars-tabac, en particulier dans les zones rurales. Si cette tendance, que j’ai constatée dans ma circonscription, se confirmait, la seule perspective de ces commerces qui favorisent le maintien du lien social serait, à terme, la fermeture. De fait, si les professionnels qui exercent leur activité dans les grandes villes ou dans les régions méridionales s'en sortent à peu près, de nombreux lieux de convivialité sont en péril dans les campagnes françaises.

Je souhaite donc savoir, Madame la ministre, si des mesures de compensation ou d'assouplissement sont envisagées pour les professionnels les plus touchés par l'application du décret du 15 novembre 2006.

M. le Président – Avant de donner la parle à Mme Nadine Morano, qui répondra à M. Remiller, je tiens à la féliciter pour sa nomination au Gouvernement. Mes félicitations vont aussi, pour les mêmes raisons, à M. Falco, qui siège à son côté.

Mme Nadine Morano, secrétaire d’État chargée de la famille – Je vous remercie, Monsieur le Président, de vos aimables propos, et je remercie M. Remiller d’avoir évoqué le recul du tabagisme chez les lycéens, constat qui encourage le Gouvernement à poursuivre la politique engagée. Le tabagisme est la première cause de mortalité évitable en France, puisque le tabac est responsable de 66 000 décès par an, dont 5 000 environ sont causés par le tabagisme passif.

Étant donné cet enjeu majeur de santé publique, le décret du 15 novembre 2006 constitue un progrès indéniable. Mais je rappelle qu’avant même sa publication, un arrêt du 29 juin 2005 de la Cour de cassation imposait à l'employeur « une obligation de sécurité de résultat vis-à-vis de ses salariés en ce qui concerne leur protection contre le tabagisme dans l'entreprise ». Les concentrations en toxiques dans l'air des bars et des discothèques sont particulièrement élevées et, en raison de cette exposition importante, les salariés du secteur sont très vulnérables au tabagisme passif et présentent, en particulier, un risque accru de pathologies respiratoires, de maladies cardio-vasculaires et de cancers du poumon. L'interdiction totale de fumer dans les lieux collectifs leur apportera un bénéfice rapide. En effet, plusieurs études réalisées aux États-Unis et en Italie ont mis en évidence une diminution de la fréquence des infarctus du myocarde au sein de la population quelques mois seulement après la mise en place de cette interdiction, et d’autres études menées en Écosse et en Irlande ont montré que l'application de cette législation s'était accompagnée d'une amélioration des symptômes de gêne respiratoire affectant les employés de bars. Les premiers éléments dont nous disposons suggèrent des résultats semblables en France. Cette tendance encourageante doit naturellement être confirmée.

Certains professionnels souhaitent des aménagements au décret. Le Gouvernement n'y est pas favorable car des dérogations empêcheraient que nous obtenions les résultats positifs attendus. En effet, tous les aménagements proposés, ont été expertisés par les services du ministère de la santé ; ceux-ci ont conclu que leur application ne permettrait plus de prémunir suffisamment les non-fumeurs contre les méfaits du tabagisme passif. En outre, une étude réalisée à la demande du service d'information du Gouvernement auprès des professionnels montre leur refus de toute dérogation pour un type spécifique d'établissement ; ils considèrent, à juste titre, que cela constituerait une atteinte injustifiée au principe d'égalité. Je souligne enfin que la population approuve le décret.

J’ajoute que le tabagisme a aussi un coût pour les lieux de convivialité. L’employeur doit faire face aux dégâts provoqués par les cigarettes, aux coûts supplémentaires de nettoyage engendrés par le tabagisme et aux absences plus nombreuses, pour cause de maladie, des salariés exposés.

Par ailleurs, les données en provenance des États étrangers qui appliquent ces mesures montrent qu’elles n’ont pas eu d'effet global défavorable sur l'emploi et le chiffre d'affaires du secteur. En attestent de nombreuses études non financées par l'industrie du tabac et fondées sur les statistiques relatives aux taxes proportionnelles au chiffre d'affaire et à l'emploi. Elles concluent à l'absence d'effet économique péjoratif notable consécutif à l'interdiction de fumer dans les lieux de convivialité. Mieux : en Écosse, l'activité de restauration du groupe de pubs Mitchells & Butlers marquait une hausse de plus de 10 % six mois après l’entrée en vigueur de l'interdiction de fumer. Il s'exerce en effet un transfert de clientèle, une partie des fumeurs étant remplacée par des non-fumeurs, même si ce transfert n'est pas nécessairement immédiat.

Le Gouvernement a souhaité limiter les éventuels effets défavorables en signant, le 21 décembre 2006, un nouveau contrat d'avenir avec la confédération des buralistes. Il vient d'entrer en vigueur. Prévu pour la période 2008-2011, ce contrat renforce la politique de diversification des activités des buralistes. Il maintient par ailleurs le principe de la compensation partielle de la baisse de chiffre d'affaires de l'activité « tabac ». Il institue également, pour les débitants de tabac, et pour la première fois depuis 1976, une progression de la rémunération sur la vente des tabacs de 0,5 point pendant les quatre ans du contrat. L'enveloppe budgétaire prévue est d'environ 160 millions par an, somme à laquelle s’ajoute la progression de la rémunération sur la vente du tabac.

Pour les hôtels, cafés et restaurants, des aides fiscales pour la mise aux normes sont prévues dans le contrat de croissance signé entre les ministères chargés des PME et du tourisme et les organisations professionnelles. Il s’agit notamment d’aider à la création des emplacements réservés aux fumeurs.

Il est beaucoup trop tôt pour valider la baisse du chiffre d'affaire annoncée par l'UMIH et la confédération des buralistes, qui va être analysée. En ce qui concerne les bars-tabac, un groupe de travail réunissant le ministère de la santé , le ministère du budget et la confédération des buralistes tentera de préciser les pertes déclarées depuis le début de l'année en les comparant au chiffre d'affaires des années précédentes à la même période. Les conclusions de ce groupe de travail, qui permettront de définir un diagnostic partagé de l'impact réel de l'interdiction de fumer sur le chiffre d'affaires de la bars-tabac, seront rendues dans les prochaines semaines.

M. Jacques Remiller – Je m’associe aux félicitations de notre Président, Madame la ministre. Il ne faudrait pas que le recul de la consommation du tabac dont nous avons tous deux fait état se traduise par l’augmentation corrélative de la consommation d’autres substances (Mouvements divers). Je sais, pour l’avoir entendu de la bouche des pneumologues de l’hôpital de ma circonscription, l’effet bénéfique incontestable du décret sur le plan sanitaire. Pour autant, il faudrait réagir sans attendre 2011, sinon certains établissements auront cessé d’exister avant cette échéance. J’espère, Madame la ministre, que M. Woerth et vous-même serez vigilants.

M. le Président – Chers collègues, je vous invite à la concision.

M. Jacques Remiller - Le sujet est grave, Monsieur le président, il y va de l’emploi et de notre économie.

M. le Président – Je ne l’ignore pas mais si nous prenons ce pli nous ne pourrons épuiser l’ordre du jour de la matinée.

ORGANISMES DE SÉCURITÉ SOCIALE DANS L’ARRONDISSEMENT DE DOUAI

M. Marc Dolez – Je souhaite, une nouvelle fois, appeler l’attention du Gouvernement sur les graves répercussions que risque d’entraîner la restructuration des organismes de sécurité sociale dans le Douaisis. Ainsi, la fusion des URSSAF d'Arras, de Douai et de Calais sera effective le 1er juin 2008. La CNAF en dépit de l’opposition des principales organisations syndicales, a annoncé son projet de ne maintenir qu’une caisse par département à l'horizon 2011 ; cette décision, qui ne concerne que quatorze départements – les plus peuplés –, signifierait pour le Nord, où vivent deux millions d’habitants, la suppression de sept caisses sur huit. La présidence de la CNAF a certes annoncé une concertation avec les élus locaux pour examiner la situation spécifique du Nord, mais nous ne la voyons pas venir et nous éprouvons les plus grandes craintes pour l’avenir de la caisse de Douai. Enfin, la caisse primaire de Douai attend depuis deux ans la nomination d’un directeur et elle n’a pas non plus d’agent comptable : l’intérim est assuré par celui de Lens, lequel assure également celui de la caisse de Calais. Étant donné les distances et la circulation, il doit être bien disponible !

Je me fais donc l’interprète de nombreux autres parlementaires de la région pour condamner ces projets de regroupement ou ces décisions – pour la CPAM, hélas, nous craignons qu’elle n’intervienne dans les prochaines semaines. Ils vont en effet à l’encontre de l’exigence de proximité pour beaucoup d’allocataires, souvent en grande difficulté – la CAF de Douai est parmi celles qui comptent le plus grand nombre de bénéficiaires du RMI – et pour les municipalités et associations qui gèrent des équipements.

Je souhaite donc entendre le point de vue du gouvernement et je vous demande avec insistance d’agir pour que l’arrondissement de Douai, plus peuplé que bien des départements, conserve son réseau de caisses, qui a fait ses preuves.

Mme Nadine Morano, secrétaire d’État – M. Xavier Bertrand vous prie d’excuser son absence.

Vous craignez que les rapprochements, effectifs ou potentiels, entre organismes de sécurité sociale, ne pénalisent la qualité du service de proximité dans l’arrondissement de Douai.

Je ne partage pas vos craintes, et je voudrais vous convaincre que ces rapprochements contribueront à améliorer le service aux usagers et peut-être même à renforcer l’activité de ces caisses.

L’évolution des réseaux de caisses, dans les différentes branches, est indispensable pour que la sécurité sociale soit plus efficace, au meilleur coût. Le Parlement, toutes tendances confondues, s’est fait l’écho de cette préoccupation. Ainsi la mission d’évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale souligne dans son rapport de 2005 que le caractère pléthorique du réseau du régime général pouvait entraîner une déperdition de ressources et demande une évolution.

En juin dernier, les partenaires sociaux membres du conseil d’administration de la CNAF ont fixé pour objectif de parvenir en 2011 à une entité juridique unique dans les départements, comme le Nord, où existent plusieurs organismes. Cependant, la création d’une caisse unique ne remet nullement en cause l’implantation des lieux de production et des points d’accueil gérés par les différentes caisses. Pour les allocataires, la proximité sera préservée, et on n’imposera pas de mobilité géographique au personnel. Ces garanties figurent dans le protocole d’accord national négocié avec l’ensemble des organisations syndicales. En outre, la départementalisation n’interdit nullement de prendre en compte les réalités locales, notamment dans la définition du schéma directeur d’action sociale. En ayant un interlocuteur unique par département, les collectivités locales seront d’ailleurs mieux à même de construire un schéma cohérent.

Enfin, les rapprochements qui ont déjà eu lieu, par exemple pour le recouvrement, ont permis de renforcer l’activité de certains organismes. C’est ainsi que l’URSSAF d’Arras-Douai héberge désormais le centre national de gestion du chèque emploi associatif, qui connaît un succès croissant.

La départementalisation des organismes de sécurité sociale, voulue par l’État et par les partenaires sociaux, ne va donc pas à l’encontre de la proximité, de la qualité du service aux usagers, et du maintien de l’activité.

M. Marc Dolez – Je regrette de devoir vous dire, puisqu’il s’agit de votre première intervention pour le Gouvernement dans cette assemblée, que vous ne m’avez pas convaincu.

Je répète quelques remarques de bon sens. D’abord, les élus locaux n’ont en rien été consultés sur ces questions de regroupement, et c’est inacceptable. Ensuite, vous faites état d’un protocole d’accord sur la CAF ; mais la plupart des organisations syndicales étaient contre cette départementalisation, qui ne concerne de toute façon qu’un petit nombre de départements. Et comment dire que la proximité n’en sera pas affectée ? Grâce à la présence de plusieurs caisses, dans un grand département, les conseils d’administration de chacune d’elles pouvait mettre en place des actions spécifiques avec des crédits affectés qu’ils négociaient avec les élus locaux. Ce ne sera plus possible avec un seul échelon, départemental. Quant à la CPAM de Douai, la décision s’applique de façon insidieuse : on ne remplace pas le directeur, puis l’agent comptable, et un jour les élus sont devant le fait accompli. Je regrette de constater que le Gouvernement n’est pas à nos côtés pour offrir aux citoyens des services de sécurité sociale de proximité.

LIGNE À TRÈS HAUTE TENSION « COTENTIN-MAINE »

M. Guénhaël Huet – La construction pour 2012 de l’EPR de Flamanville est essentielle pour le renouvellement de notre parc de réacteurs nucléaires, et chacun dans la Manche l’a bien compris. La ligne à très haute tension « Cotentin-Maine », qui le raccordera au réseau national, va traverser de part en part le département, vers la Mayenne. Depuis plusieurs mois, les représentants de RTE, le réseau de transport d’électricité, sont venus donner des explications et proposer – imposer ? – des solutions. Pour des communes de faible superficie, notamment dans les cantons de Percy, de Saint-Pois ou de Saint-Hilaire-du-Harcouët, cela pose un vrai problème. Celle de Chévreville par exemple, qui a 450 hectares, n’aurait plus aucune possibilité de développement si la ligne à très haute tension la traversait. Elle vient d’ailleurs de refuser d’élire son conseil municipal.

L’enfouissement de la ligne est la bonne solution, mais RTE reste sourd à cette demande, se réfugiant derrière des considérations technocratiques. Dans son rapport de 2001, M. Kert montre pourtant que cet enfouissement est tout à fait possible techniquement et que le surcoût ne serait pas trop élevé, surtout si l’on réduit les coûts en y procédant sur une certaine distance. Mais le dialogue avec RTE est difficile, voire impossible. Ses représentants nous opposent des certitudes techniques, dont on sait pourtant qu’elles sont bien relatives sur le moyen et le long terme. La réponse ne peut donc être que politique. Le Grenelle de l’environnement, et la récente prise de position de Mme la secrétaire d’État à l’environnement, suite à l’enquête de santé publique du Centre de recherche et d’informations indépendantes sur les rayonnements électromagnétiques, militent dans ce sens. Quelle est la position du Gouvernement sur ce sujet très délicat ?

M. Hubert Falco, secrétaire d’État chargé de l’aménagement du territoireM. Borloo vous prie d’excuser son absence.

Vous soulevez le problème de l’enfouissement, dans certaines zones, de la ligne à très haute tension « Cotentin-Maine ». La construction de ces lignes est toujours précédée de procédures visant à assurer leur meilleure insertion dans l’environnement. Dans un premier temps, préfecture et sous-préfectures organisent une concertation préalable à laquelle élus locaux et associations représentatives sont associés, afin de déterminer l’emplacement du fuseau dit « de moindre impact ». Pour le projet Cotentin-Maine, cette concertation a eu lieu d’octobre 2006 à décembre 2007. Après une analyse complète de la zone et le recensement des problèmes qui pourraient se poser pour l’environnement, plusieurs fuseaux possibles ont été comparés, ce qui a permis d’aboutir à une proposition de fuseau « de moindre impact ».

Les modalités d’enfouissement diffèrent selon le niveau de tension des ouvrages. L’enfouissement des lignes à haute tension représente un surcoût réduit par rapport à la technique aérienne, et RTE s’est engagé, dans le contrat de service public du 24 octobre 2005, à enfouir au moins 30 % de ces lignes ; en 2006, le taux moyen d’enfouissement a été supérieur à 35 %.

En revanche, l’enfouissement des lignes à très haute tension, au-delà de quelques kilomètres, présentant des contraintes techniques et financières très lourdes, reste exceptionnel. L’enfouissement n’est cependant pas la seule solution pour améliorer l’insertion environnementale de ces projets. Des mesures adaptées à chaque commune doivent ainsi être prises dans le plan d’accompagnement pour la ligne Cotentin-Maine : RTE proposera aux habitants situés à proximité de l’ouvrage de limiter la gêne visuelle, par exemple par des plantations végétales, et le préjudice visuel sera indemnisé.

Monsieur le député, je suis naturellement prêt à vous recevoir pour discuter plus en détail des spécificités de cette ligne et voir sur quelles nouvelles bases nous pourrions discuter avec RTE.

M. Guénhaël Huet – Je vous remercie de cette réponse, qui ne me satisfait cependant pas entièrement, même si je prends acte de votre invitation. Je déplore l’attitude technocratique de RTE, qui reste sourd à toute demande d’explication. La présence du préfet lors de la phase de concertation préalable est d’ailleurs purement formelle, car en réalité, c’est RTE qui décide de tout, sans écouter ni les uns ni les autres ; j’aimerais que le Gouvernement l’invite à davantage de modestie.

TRACÉ DE LA LGV SUD EUROPE ATLANTIQUE EN INDRE-ET-LOIRE

Mme Marisol Touraine – La ligne à grande vitesse Sud Europe Atlantique doit traverser le département de l’Indre-et-Loire, ce qui occasionnera de fortes nuisances sonores, alors même que les avantages pour le département – sans nier que le projet soit d’intérêt général – sont presque nuls, puisque nous ne bénéficierons ni d’une réduction du temps de trajet sur Bordeaux, ni de création de gares.

La ligne devant traverser des zones urbaines fortement peuplées, comme à Chambray-lès-Tours, l’ensemble des élus et des associations de riverains souhaite qu’elle soit construite dans ces zones en déblai profond. RFF affirme que cette solution, techniquement possible, a été écartée pour des considérations financières, ce qui nous paraît inacceptable, le surcoût qu’elle induirait étant infime par rapport au coût total du projet. En outre, nous souhaitons des aménagements de ce type pour la vallée de l’Indre également, comme à Monts, Veigné ou Sorigny.

Les mesures de protection sonique nous paraissent par ailleurs insuffisantes. La prise en compte de la moyenne des pics sonores sur une plage horaire minore les nuisances effectives ; en toute rigueur, il faudrait tenir compte des infrastructures déjà existantes, comme l’A 85 ou l’A 28, et donc du cumul des pics sonores. Le seuil réglementaire de 60 décibels est alors dépassé, alors que l’Organisation mondiale de la santé recommande des niveaux inférieurs à 30 décibels la nuit. Un décret suffirait pour abaisser le seuil de référence, trop important. Des progrès en matière environnementale ayant été réalisés lors de la construction de la ligne à grande vitesse Marseille, il vous est possible, Monsieur le ministre, de marquer de votre empreinte le projet de LGV, en vous engageant contre le bruit.

Enfin, pour la première fois, les travaux ont été confiés à une entreprise concessionnaire. Je souhaiterais que celle-ci, au même titre que les sociétés concessionnaires d’infrastructures autoroutières, soit assujettie au versement de la taxe professionnelle aux communes traversées, afin de compenser les pertes fiscales induites pour celles-ci par le passage de la LGV. J’espère que M. Bussereau recevra les élus et les associations sur ce projet.

M. Hubert Falco, secrétaire d’État chargé de l’aménagement du territoire – Je vous prie tout d’abord d’excuser M. Bussereau, qui s’est rendu, suite au drame de ce week-end, auprès des familles des victimes.

Au terme de la phase de concertation approfondie sur le projet de LGV Tours-Bordeaux, un dossier d’avant-projet sommaire a été approuvé par une décision ministérielle du 16 avril 2007. Certaines variantes ont dû être écartées, compte tenu de leur impossibilité technique ou de leur caractère disproportionné au regard des avantages attendus. Le projet ainsi défini a fait l’objet d’une enquête publique, qui s’est déroulée du 25 octobre au 19 décembre 2007. Son rapport est attendu pour la fin du mois d’avril.

En ce qui concerne la commune de Chambray-lès-Tours, l’abaissement du profil en long de la LGV s’avère techniquement très complexe, en raison notamment du volume des dépôts de matériaux ou de l’évacuation des eaux. Une solution alternative a donc été retenue : il y aura un déblai sur les deux tiers du linéaire traversant la commune et un remblai sur un tiers, accompagné d’aménagements paysagers.

En ce qui concerne Veigné, la présence de l’A 10 et de l’A 85 sur le territoire de la commune a conduit à proposer un passage de la LGV en fort déblai sous les infrastructures autoroutières. RFF a de plus travaillé à l’insertion des infrastructures dans le cadre de vie commun et a veillé à la qualité architecturale des ouvrages, en collaboration avec un paysagiste.

La réglementation imposant une obligation de résultat en matière de nuisances sonores, le respect des seuils réglementaires est un impératif absolu. Dans le cas de la LGV, des dispositifs de protection à la source sont prévus, dont 9 400 mètres d’écrans acoustiques et 20 500 mètres de merlons acoustiques. Lorsque ces protections ne seront pas suffisantes ou bien guère envisageables, une isolation de façade sera mise en œuvre, après concertation avec les riverains. En cas de difficulté de réalisation, l’acquisition des habitations exposées au-delà du seuil réglementaire sera proposée aux riverains.

Suite au Grenelle de l’environnement, un comité opérationnel est chargé de conduire une réflexion sur le bruit. Ses propositions permettront d’éclairer le Gouvernement sur les mesures à prendre.

Enfin, le versement d’une taxe professionnelle aux communes traversées me paraît très complexe : non seulement parce qu’il faudrait déterminer quelle entreprise serait taxée – le gestionnaire d’infrastructures ? Les entreprises ferroviaires utilisant les voies ? –, mais aussi parce qu’un tel versement serait répercuté sur les collectivités publiques – État, régions, communes – appelées à cofinancer cette opération.

Mme Marisol Touraine – Cette réponse ne satisfera ni les élus ni les riverains. Certes, j’ai bien entendu qu’un groupe de travail existait depuis le Grenelle de l’environnement, mais j’insiste sur le fait que la fixation des seuils de nuisance sonore relève exclusivement du Gouvernement. Je regrette qu’il y ait si peu d’efforts pour construire en déblai.

Je m’étonne en outre qu’il soit impossible de taxer l’entreprise concessionnaire de RFF : le procédé est couramment employé pour les entreprises concessionnaires d’autoroutes et, à ma connaissance, il ne génère pas de surcoûts. Ce serait aussi une façon de dédommager les communes traversées et de leur permettre d’investir dans des projets d’aménagement et de développement durable.

PERSPECTIVES DE LA POLITIQUE DES TRANSPORTS EN ILE-DE-FRANCE

M. Yves Cochet – Un projet de métro automatique, qui constituerait une sorte de rocade structurante autour de Paris, est dans l’air depuis près d’un an. Appelé Métrophérique, ou encore Orbital, il permettrait de répondre au problème de l’engorgement des transports de banlieue à banlieue. Je souhaiterais avoir quelques précisions à son sujet. Techniquement faisable, il répondrait à des besoins aussi bien sociaux qu’environnementaux. Dans ma circonscription, la onzième de Paris, il existe déjà des lignes de métro ou de RER radiales entre Paris et la banlieue. Je me réjouis aussi que le projet de tramway des Maréchaux ait pu être mené à bien et qu’il soit question de l’étendre entre la Porte d'Ivry et la Porte de la Chapelle, voire jusqu’à la Porte d'Asnières. Néanmoins, cela n’est pas suffisant, puisque 70 % des déplacements en Ile-de-France se font de banlieue à banlieue. L'aménagement d'un métro en rocade serait donc une bonne solution.

Le contrat de projet du Métrophérique a été signé au printemps 2007. Au mois de juin, le président Sarkozy s'y est déclaré favorable. Demeure cependant la question du financement, puisque seuls des crédits d'études sont prévus. Or, un tel aménagement nécessite un engagement fort de l'État, qui pour le moment fait défaut.

Le coût du projet a été estimé à environ 8 milliards d'euros – la moitié des cadeaux fiscaux consentis aux riches pour chaque année depuis le vote du paquet fiscal. À l'heure où l'on nous parle du Grand Paris et du rayonnement international de notre capitale, l'État va-t-il enfin donner à l'Île-de-France les moyens de promouvoir une éco-région ? À titre d'exemple, Madrid a achevé en 2003, après seulement cinq ans de travaux, un métro en rocade qui permet de structurer tout le développement du sud de la ville. Paris et l'Île-de-France souffrent encore pour leur part d'une carence importante dans le réseau de transport public. Ainsi, le Val-de-Marne ne bénéficie d'aucune liaison en rocade : pour aller de Créteil à Orly, il faut repasser par Paris, ce qui réclame une heure et demie.

Élus régionaux de tous bords et acteurs locaux s'accordent à reconnaître la nécessité de ce métro en rocade. La route représente aujourd’hui 90 % des émissions de dioxyde de carbone du secteur des transports et 83 % des déplacements de personnes. Cette proportion doit être diminuée.

Un comité interministériel d'aménagement du territoire est prévu en octobre. Le président Sarkozy devrait s’y prononcer sur le Grand Paris et le Métrophérique. Pouvez-vous nous donner des précisions sur les engagements financiers que l’État est prêt à prendre en faveur de ce projet ?

M. Hubert Falco, secrétaire d’État chargé de l’aménagement du territoire – Le Gouvernement fait de la réalisation d'une rocade métro automatique en Île-de-France une priorité. Plusieurs projets de ce type – « Arc Express », « Métrophérique » – ont déjà fait l'objet d'études. Cette nouvelle desserte offrira une alternative attractive à la route pour les déplacements de banlieue à banlieue. Elle représente donc un véritable enjeu en termes d’offre de transports collectifs et d'aménagement des territoires. L'importance du projet a d'ailleurs été confirmée dans les conclusions du Grenelle de l'environnement, compte tenu de son effet positif sur l'environnement.

Un premier programme de travail a été finalisé entre l'État et la Région. Il a pour objet le lancement d'une première série d'études sur deux arcs : l'un au nord-ouest de la région, entre La Défense et Saint-Denis, et l'autre au sud-est, entre le RER B au sud et le RER A à l'est. Le STIF a été missionné pour piloter les études correspondantes. Convaincu de l'intérêt du projet, je serai très attentif à leurs conclusions. Le choix de la première section à réaliser pourrait être arrêté après l'organisation d'un débat public sur l'ensemble du projet.

Le projet « Arc Express » est inscrit au contrat de projet État-Région 2007-2013 pour un montant d'études de 25,5 millions d’euros, dont 7,5 à la charge de l’État. Les premiers financements, alloués sur l'enveloppe budgétaire 2007, permettent d'initier la première phase des études, d'un montant global de 4 millions d’euros. La convention de financement correspondante a été approuvée par le conseil d'administration du STIF le 12 décembre 2007.

Le coût global du projet est estimé à ce stade de 5 à 7,5 milliards d'euros, sur la base d'un scénario de type métro automatique, comparable au système utilisé sur la ligne 14 du métro.

Le mode de financement n'est pas encore arrêté. Une étude sur les montages financiers envisageables, dont le cahier des charges est en cours de finalisation, sera prochainement lancée pour définir le mode de réalisation le plus approprié.

M. Yves Cochet – Cette réponse ne me satisfait pas. Certes, les études sont nécessaires. Mais ma question portait sur les financements que l’État est prêt à consentir pour le métro automatique lui-même. J’espère que le président Sarkozy, dont on connaît le volontarisme, pourra faire des annonces en ce sens lors du CIAT du mois d’octobre. Pour le moment, j’attends…

NUISANCES SONORES CAUSÉES PAR LES AÉRODROMES MILITAIRES

M. Jacques Le Guen – Dans le prolongement du Grenelle de l'environnement et des conclusions de l'atelier « santé-environnement », le Gouvernement a proposé le 4 décembre dernier différentes mesures pour réduire les nuisances sonores autour des aéroports parisiens et de nouveaux moyens financiers pour l'aide à l'insonorisation. Si ces dispositions contribuent à améliorer la qualité de vie des riverains des aérodromes civils, ce dont il faut se féliciter, la situation de ceux des aérodromes militaires demeure hélas insuffisamment prise en considération.

Saisi par l'Association des riverains de la base aéronavale de Landivisiau, qui déplorent en particulier l'exclusion des communes riveraines des aéroports militaires du bénéfice des dispositions de la loi du 31 décembre 1992 relative à la lutte contre le bruit, le Président de la République a reconnu dans un courrier du 3 avril 2007 qu’il était « insupportable de constater que les nuisances aériennes, aussi bien sonores que sanitaires au sens large, peuvent être vécues comme une fatalité » et qu’il faudrait « probablement envisager, comme pour le cas des aérodromes civils, un renforcement des aides à l'insonorisation et d'autres mesures qui permettraient au moins de concilier la vie des riverains avec la nécessité pour nos forces armées de conduire tous types d'exercices ».

Il faut désormais aller au-delà de la simple poursuite de la concertation au plan local entre les autorités militaires, les élus et la population ou de la réunion de la Commission mixte défense – environnement : les populations riveraines attendent depuis trop longtemps des aides financières spécifiques à l'insonorisation. Il ne s'agit pas de remettre en cause la présence des forces aériennes, élément majeur de notre dispositif de défense et d'intervention, mais d’assurer une égalité de traitement entre populations riveraines des aérodromes civils et militaires.

Ce dossier pâtit par ailleurs de l’absence d'interlocuteur ministériel clairement identifié. La navette entre les ministères en charge de la défense et de l'écologie empêche de parvenir à des solutions satisfaisantes. Qu'il soit d'origine civile ou militaire, le bruit provoqué par les décollages et les atterrissages des aéronefs constitue une gêne réelle qu'il convient d'atténuer au maximum : il serait cohérent que ce soit le même ministère, celui en charge de la lutte contre le bruit, qui soit compétent.

Quelles mesures l'État entend-il prendre en faveur des communes riveraines des aéroports militaires pour insonoriser les bâtiments publics et compenser, entre autres, les restrictions existantes en matière d'aménagement et de construction ? Quelles dispositions envisage-t-il pour aider les riverains à réaliser des travaux d'isolation phonique de leurs logements ?

M. Hubert Falco, secrétaire d’État chargé de l’aménagement du territoire – Comme vous le savez, le dispositif d'aide à l'insonorisation institué par la loi du 31 décembre 1992 et prévu aux articles L. 571-14 à L. 571-16 du code de l'environnement ne s'applique qu'aux aérodromes dont le nombre annuel de décollages d'aéronefs de plus de 20 tonnes dépasse 20 000. Il ne concerne donc que 10 aérodromes civils, aucune plateforme militaire ne satisfaisant à ce critère.

Il nous faut cependant concilier la poursuite des activités militaires et le maintien de la qualité de vie des populations riveraines.

C’est pourquoi les ministères de l’écologie et de la défense vont travailler conjointement au renforcement des instances locales de concertation instituées en vertu du protocole défense-environnement du 14 février 2001. Enfin, s’il n'existe pas d'aide à l'insonorisation pour les riverains de plates-formes militaires, je rappelle que la réhabilitation énergétique des bâtiments anciens est une des priorités issues du Grenelle de l'environnement. Dans cet esprit, les modalités techniques et financières des travaux visant à améliorer la qualité de l'air intérieur et l'isolation acoustique de ces bâtiments sont en cours de définition. Le cabinet du ministre d'État ne manquera pas, Monsieur le député, de vous tenir informé de l'évolution de ces travaux.

M. Jacques Le Guen – Il faudra aussi trouver un bon équilibre entre le plan d’exposition au bruit, qui est en cours de révision et ne doit pas pénaliser les collectivités concernées, et le souci de la santé et de la protection de nos concitoyens. Ce sera difficile, mais la base de Landivisiau est loin d’être la seule en cause et il faut trouver des solutions.

VENTE À DISTANCE

M. Bernard Gérard – Permettez-moi d’abord d’adresser au ministre Luc Chatel mes très sincères félicitations pour ses nouvelles fonctions ; car on n’a jamais rien trouvé de mieux que l’industrie pour créer de l’emploi, et que l’emploi pour stimuler la consommation. Nous avons justement adopté depuis l'été dernier plusieurs textes en faveur des consommateurs et du pouvoir d'achat, dont la loi Chatel pour le renforcement de la concurrence au service du consommateur. Mais ce texte porteur d'avancées majeures contient aussi plusieurs mesures qui risquent de pénaliser la vente à distance, si chère à ma région du Nord, berceau historique de cette activité et qui rassemble 47 % des effectifs totaux du secteur. Les entreprises de la vente par correspondance, en pleine phase de mutation, doivent procéder à de lourdes restructurations pour s’adapter à la nouvelle donne Internet. Nombre d'entre elles éprouvent de sérieuses difficultés. Or la loi du 3 janvier 2008 les oblige à recourir, à compter 1er juin prochain, à des développements informatiques lourds et coûteux qui n’étaient pas prévus dans les budgets. La profession craint donc de ne pas être en mesure de les mettre en œuvre dans le délai fixé, à moins de fragiliser encore l'emploi.

Les professionnels de ce secteur ont conscience que la relation de confiance avec le consommateur est pour eux essentielle et ils sont prêts à œuvrer pour le maintien de leur compétitivité face à nos voisins européens. Néanmoins, les mesures de la loi du 3 janvier ne doivent pas être contreproductives et pénaliser un secteur en pleine restructuration. Un juste équilibre doit être trouvé. Serait-il possible d’en assouplir certaines, notamment celle qui dispose qu'en cas de rétractation du fait du client, la totalité des sommes versées lui seront remboursées, y compris les frais initiaux d'envoi ? Cette mesure qui ne paraît pas très équitable représente un coût considérable. Par ailleurs, l’entrée en vigueur de ces mesures ne pourrait-elle être reportée, afin de laisser aux entreprises le temps de procéder aux adaptations nécessaires ?

M. le Président – Je m’associe aux félicitations qui vous sont adressées, Monsieur le ministre.

M. Luc Chatel, secrétaire d’État chargé de l’industrie et de la consommation – Je vous en remercie tous deux.

Monsieur Gérard, je sais combien vous êtes attaché au secteur de la vente à distance et je connais l’intérêt qu’elle représente pour nos concitoyens, en permettant aux habitants des départements les plus reculés d’accéder à toutes sortes de biens et services, et ce souvent à un moindre coût que dans les autres circuits de distribution. Mais, pour se développer, ce secteur a besoin de retrouver la confiance des consommateurs. En effet, 36 % des 65 000 réclamations reçues par la DGCCRF au second semestre 2007 faisaient suite à une vente à distance, et leur nombre ne cesse d’augmenter. Les associations de consommateurs ont donc entrepris un travail approfondi de réflexion et de concertation, dans le cadre du Forum des droits de l'Internet, et ont émis des recommandations qui ont été reprises par des amendements d’origine parlementaire à la loi du 3 janvier. Ainsi ont été adoptées des mesures telles que l’obligation de communiquer la date de livraison, l’interdiction de surtaxer les consommateurs qui appellent pour résoudre un incident intervenu lors de la commande ou le remboursement effectif de toutes les sommes versées en cas de rétractation. Ces progrès importants devraient permettre de renforcer la confiance des consommateurs et donc profiter à l’ensemble des acteurs.

Reste qu’il faut aussi veiller au dynamisme de ces entreprises. Vous souhaiteriez retarder l’entrée en application de ces mesures, que la loi avait déjà reportée au 1er juin. J’ai donné instruction à la DGCCRF de se montrer très souple, afin notamment que les entreprises qui travaillent à long terme et qui éditent par exemple des catalogues annuels ne soient pas prises au dépourvu. Il est en effet indispensable de trouver un juste équilibre, de manière à protéger les consommateurs sans entraver la liberté d’entreprendre.

M. Bernard Gérard – Je voudrais insister sur la réelle inquiétude des entreprises du secteur qui travaillent sur catalogue, et non exclusivement sur Internet. Elles sont en pleine mutation et ont besoin de temps. Je crois que nous nous sommes compris : nous poursuivrons le travail avec elles.

LYCÉE AGRICOLE D’ORANGE

M. Thierry Mariani – Je voudrais appeler l’attention du Gouvernement, une nouvelle fois, sur les difficultés rencontrées par le lycée viticole d'Orange, dont la survie ou en tout cas la qualité est menacée. Les heures supplémentaires du premier trimestre des enseignants titulaires n'ont pas été payées. Elles devraient l’être avec celles du deuxième trimestre, soit avec neuf mois de retard. Six enseignants sont concernés. Les heures des contrats précaires ne seront, elles, réglées que fin mars ou fin avril, ce qui met quatre familles en difficulté. Faute de crédits, certains enseignements ne pourront être conduits à leur terme : la fin des cours de commerce et d’informatique interviendra dès le 15 mai. Enfin, certains postes ne seront plus pourvus à la rentrée de septembre, le ministère ne voulant plus recruter de contractuels. Or les besoins horaires s'élèvent à 1 500 heures, soit l'équivalent de deux postes et demi, ce qui ne peut être couvert par le recours aux heures supplémentaires. Ces enseignements vont-ils être réduits, ou disparaître ?

Une sérieuse menace pèse donc sur ce fleuron de l'enseignement professionnel agricole. La fermeture de classes et la réduction des effectifs aurait des répercussions très préoccupantes au regard du travail remarquable effectué par l'équipe pédagogique, surtout compte tenu de l'importance dans notre région de la viticulture, qui traverse la crise que l’on connaît. Cet enseignement joue un véritable rôle d'insertion sociale pour de jeunes élèves qui n'ont pas trouvé leur place dans l'enseignement général et qui apparaissaient donc aux yeux de beaucoup comme perdus : le lycée viticole d'Orange leur offre une seconde chance et leur permet de concrétiser un projet personnel dans un contexte mieux adapté à leurs besoins. Ses résultats sont là pour le prouver.

Notre pays est attaché à son terroir et à ses traditions. Alors que le Président souhaite la reconnaissance par l'UNESCO du patrimoine gastronomique de la France, auquel contribue évidemment la filière viticole, je vous demande, Monsieur le ministre, de bien vouloir rassurer les équipes pédagogiques, les élèves et les instances professionnelles du lycée viticole d'Orange.

M. Michel Barnier, ministre de l'agriculture et de la pêche  Je vous sais gré de l’intérêt que vous manifestez depuis longtemps, comme en témoignent vos interventions au cours de la précédente législature, à un enseignement agricole dont tous reconnaissent l'efficacité pédagogique, mais aussi la capacité à innover et à s'adapter aux mutations de l'agriculture et du monde rural comme aux attentes de notre société.

Au niveau secondaire, cet enseignement regroupe 847 établissements publics et privés – des maisons familiales et rurales aux collèges et lycées – qui accueillent 175 000 élèves, sous la responsabilité d’excellentes équipes pédagogiques et administratives. S’y ajoutent 22 établissements d’enseignement supérieur, publics et privés, qui forment 13 000 étudiants à l’ingénierie, à l’agronomie, au paysage ou à la médecine vétérinaire.

Je souhaite permettre à cet enseignement d’évoluer en en réaffirmant les missions, les priorités et la place singulière au sein du vaste ministère dont j’ai la charge, là où confluent toutes mes préoccupations : l’avenir de l’agriculture, de la forêt et de la pêche, mais aussi le développement rural, et l’alimentation et la nutrition.

S’agissant du lycée viticole d'Orange, que je souhaite visiter au cours des prochains mois, je tiens à saluer les actions qui y ont été menées, en concertation avec les professionnels du secteur, afin d’en faire un centre de référence. L’hommage n’est pas seulement symbolique : à chaque visite officielle, j’offre à mes hôtes des produits de nos établissements d’enseignement, afin de les mettre pleinement en valeur.

Le paiement des heures supplémentaires assurées au premier trimestre par les enseignants titulaires est en cours et des avances ont été consenties aux agents concernés. Le directeur régional de l'agriculture et de la forêt en a informé le directeur et les représentants du personnel. Quant aux enseignants contractuels, je m’appuierai sur les conclusions d’une expertise confiée au conseil général de l'agriculture et de l'espace rural pour leur proposer, comme à l’ensemble des agents contractuels du ministère, des perspectives claires en termes de parcours professionnel, de métier et de rémunération.

M. Thierry Mariani – Je vous remercie de ces précisions, et je me réjouis de votre prochaine visite, qui vous permettra de découvrir l’un des produits du lycée, un excellent Châteauneuf du Pape ! (Sourires) Je vous y donne donc rendez-vous avant les vendanges. Vous pourrez également visiter, à proximité immédiate de l’établissement, un remarquable centre de recherches consacré à l’œnologie et à la viticulture, auquel l’ensemble des professionnels de la vallée du Rhône apportent une importante contribution financière.

CRISE DE L’ÉLEVAGE OVIN DANS LA VIENNE

M. Jean-Michel Clément – Monsieur le ministre, le département de la Vienne – notamment sa troisième circonscription, dont je suis l'élu –, est l’un des premiers de France pour ce qui est de l’élevage ovin. Toute une filière s'est organisée et développée autour de cette activité et un marché mensuel, au cœur du bassin de production et au carrefour de trois régions, lui assure une cotation nationale. En outre, la production ovine contribue à l'identité territoriale du pays montmorillonnais, bassin historique de cette production. Mais les périls auxquels est désormais exposé cet élevage, dans la Vienne comme dans l’ensemble du pays, menace d’un véritable sinistre économique une région déjà victime des fermetures successives des usines Domoform – dans le secteur de l’ameublement – et Aubade – dans celui du textile.

Malgré leurs efforts pour s’adapter à l’évolution technique et aux demandes du consommateur, les éleveurs français d’ovins n'ont plus aucun revenu. Leur part dans la consommation nationale est tombée à moins de 40 % et, pour en rester au cas de la Vienne, le cheptel est tombé en 25 ans de 600 000 à 250 000 brebis et on s’attend à ce qu’il diminue encore de 10 à 15 000 têtes cette année. Le nombre d'éleveurs, qui a diminué de 63 % au cours de la même période, est tombé à moins de mille, dont seulement 500 éleveurs ont plus de 150 brebis.

En un mot, la crise est là ! Faute de revenu, les éleveurs se tournent vers d'autres productions quand ils le peuvent ; dans les autres cas, c'est la cessation des paiements qui menace. Cette crise ne peut que s'étendre à l'ensemble du territoire rural et des entreprises qui vivaient de cette activité.

« Réagir maintenant pour continuer à manger de l'agneau français demain » : tel est le cri d’alarme que lancent les sénateurs Bailly et Fortassin dans un rapport sur l'avenir de la filière ovine – le plus récent d’une longue série – rendu public le 24 janvier dernier. Ils soulignent la grande précarité du secteur, que révèlent la diminution du cheptel et du nombre d'exploitations – comme en témoigne mon département –, la faiblesse des revenus des éleveurs et le recours massif à des importations à bas prix de pays tiers.

En outre, le secteur est victime de la répartition inéquitable des soutiens de la PAC selon les productions. Ainsi, d’après les informations fournies par le réseau d’information comptable agricole – RICA –, l’élevage ovin bénéficie d’un montant par travailleur deux fois moins élevé que l'élevage de bovins pour la viande et trois fois et demie plus faible que les grandes cultures. « Il est urgent de rééquilibrer les soutiens publics afin de tenter d’enrayer la baisse d'activité de ce secteur d'élevage, qui pourrait s'accélérer dans les mois et les années à venir », concluaient dès juillet 2007 les rédacteurs de l'étude INRA.

Monsieur le ministre, des mesures urgentes s'imposent – avant le 11 mai prochain, date limite de maintien du troupeau pour l’octroi de la prime compensatrice ovine – afin d’éviter en 2008 un abandon massif de la production, notamment dans le département de la Vienne. En outre, des dispositions nouvelles et durables doivent êtres prises en accord avec nos partenaires européens dans le cadre des négociations sur la PAC pour la période 2009-2013.

M. le Président – Veuillez conclure.

M. Jean-Michel Clément – En effet, comme en témoigne le bilan à mi-parcours de la PAC, certains choix français pénalisent les productions qui requièrent le travail le plus exigeant et qui sont intimement liées à l'aménagement du territoire. Un prélèvement significatif à l'intérieur du premier pilier ne permettrait-il pas de restaurer durablement l’espoir au sein de la filière, notamment dans l'est du département de la Vienne ? Deux mesures simples y contribueraient : l’élévation de la prime compensatrice ovine à 30 euros par brebis, soit l'équivalent de 200 euros par unité de gros bétail, sans plancher ; l’institution d’une prime à l'herbe s’élevant à 100 euros par hectare, modulable dans les territoires défavorisés tels l'Est de la Vienne et les zones de montagne.

M. le Président – Il faut conclure.

M. Jean-Michel Clément – Monsieur le ministre, par quelles mesures le Gouvernement entend-il, à court terme, venir en aide aux éleveurs d’ovins, afin de préserver cette activité sur le territoire national ?

M. Michel Barnier, ministre de l'agriculture et de la pêche  Longtemps élu d’un département de montagne, je suis particulièrement attaché à cette agriculture extensive, notamment à l’élevage caprin et ovin. Or la crise est là, vous l’avez dit ; elle n’est pas nouvelle, et elle est particulièrement grave. En effet, le cheptel est en diminution constante, en raison principalement de la faiblesse des revenus perçus par les éleveurs, et ces difficultés touchent, au-delà de votre département – l’un des premiers du secteur –l'ensemble du territoire national, ainsi que de nombreux autres pays européens.

Or la préservation de cet élevage, respectueux de l'environnement et essentiel au maintien d’une activité agricole dans de nombreuses zones fragiles, constitue à mes yeux une priorité ; je l’ai fait savoir dès mon entrée en fonctions. Voilà pourquoi, dès le 30 août 2007, j’ai annoncé un plan de soutien à la filière ovine, qui allie des mesures conjoncturelles destinées aux éleveurs les plus menacés et des mesures structurelles visant à vivifier et à soutenir durablement les élevages ovins sur le territoire national. Les crédits destinés aux éleveurs d'ovins allaitants les plus exposés s’élèvent à 15 millions d’euros, ce qui, dans un contexte budgétaire difficile, représente un effort important. Les aides gérées par l'office de l'élevage seront versées aux éleveurs courant avril, précédant de peu celles qui émaneront du fonds d'allégement des charges.

Au-delà des mesures conjoncturelles, il s’agit, comme y invitent les rapports parlementaires que vous avez cités, de redonner durablement espoir aux éleveurs d’ovins et de caprins. Voilà pourquoi j’ai ouvert, dans la perspective du bilan de santé de la PAC – qui devrait faire l’objet d’un accord en novembre, sous la présidence française de l’Union – , un débat communautaire sur l'avenir des filières ovines et sur le régime de soutien au secteur, initiative soutenue par les États membres les plus concernés. De fait, le conseil des ministres du 17 mars a confirmé la modification de l'article 69, qui devrait vous satisfaire car elle permettra de répartir plus équitablement les aides directes du premier pilier, dont bénéficieront ainsi certaines productions ou territoires fragiles. Comme je le confirmerai cet après-midi à votre délégation pour l’Union européenne et à votre commission des affaires économiques, je compte utiliser cet article rénové pour apporter durablement au secteur ovin un soutien supplémentaire. En outre, en septembre, dans le cadre de la présidence française, je vous associerai à une vaste conférence européenne sur la filière ovine.

M. le Président – Je prie les orateurs suivants de limiter la durée des questions et des réponses.

FINANCEMENT DE LA RESTAURATION DES MONUMENTS HISTORIQUES EN PICARDIE

M. Jean-Pierre Balligand – Je souhaite alerter Madame la ministre de la culture et de la communication sur l’insuffisance des crédits destinés à la restauration des monuments historiques. En effet, d’après la loi de finances, les crédits de paiement consacrés à notre patrimoine monumental et archéologique – si l’on prend en considération les crédits alloués en 2007 au centre des monuments nationaux au titre de ses nouvelles fonctions de maîtrise d'ouvrage – devraient baisser de 18 % en 2008, passant de 385 à 316 millions.

Or, parce que la protection du patrimoine exige des moyens importants et stables, il est indispensable, en Picardie comme ailleurs, d’en assurer l’augmentation immédiate et le maintien au cours des années à venir. En effet, en repoussant des travaux nécessaires, on commet une erreur de calcul économique, non seulement parce que la dégradation des bâtiments s’accélère, mais aussi parce que les coûts augmentent dans le BTP. Il est au contraire indispensable de programmer correctement les travaux et de respecter l’échéancier fixé.

Cela vaut pour la vaste entreprise de réhabilitation et d’aménagement qui a été engagée au familistère Godin de Guise, où s’est déroulée la première expérience d’association du capital et du travail, assortie d’une réalisation d’habitat collectif de grande ampleur. Ces travaux ne pourront être poursuivis que si les crédits accordés par la DRAC de Picardie au titre de la protection du patrimoine augmentent. Dans le cas contraire, la réhabilitation s’interromprait, de même que l’aménagement du musée, car les financements des conseils général et régional seraient à leur tour perdus. L’État est-il donc disposé à prendre toute sa part de l’effort en faveur de ce monument exceptionnel ?

Mme Christine Albanel, ministre de la culture et de la communication – Les monuments de l’État ont l’an dernier bénéficié de 70 millions d’euros, reversés au titre de la taxe sur les droits de mutation et, cette affectation rétroactive concernant également 2006, ce sont plus de 380 millions – somme exceptionnelle – qui ont été consacrés au monuments historiques au cours de cet exercice budgétaire. En 2008, les 70 millions de la taxe sont intégrés dans le budget du ministère de la culture, permettant aux crédits des monuments historiques de se maintenir au-dessus de leur niveau de 2006, pour s’établir en effet à 316 millions.

Divers rapports parlementaires ou provenant de mon ministère confirment que l’entretien et la restauration de nos monuments historiques exigent 350 à 400 millions. Plusieurs options sont aujourd’hui à l’étude : une réflexion est notamment engagée avec divers acteurs, dont la Caisse des dépôts et consignations, et toutes les pistes doivent être examinées, y compris un prélèvement sur les jeux de loterie, une contribution des casinos ou une taxe sur les nuits d’hôtel de grand luxe, outre le mécénat particulier. Par ailleurs, j’ai demandé à mes services de réserver cette année 20 millions d’euros au patrimoine des collectivités locales et des particuliers.

La réhabilitation du familistère Godin à Guise, haut lieu du patrimoine social et industriel européen, est l’un des grands projets régionaux que soutient le ministère. Il comprend non seulement la réhabilitation de l’habitat et la restauration de l’ensemble des édifices, mais aussi la réalisation d’un musée – ce dernier projet étant déjà inscrit au contrat de plan État-région pour six millions. Cet engagement fort de l’État implique une concertation technique approfondie entre le syndicat mixte du familistère de Guise et la DRAC. La programmation commune des travaux peut d’ores et déjà intégrer l’échelonnement de la participation de l’État sur les six années à venir.

M. Jean-Pierre Balligand – Je vous remercie. En tant que président du syndicat mixte, je rappelle qu’il est essentiel de ne perdre aucun des financements croisés de l’État et des collectivités. Ce chantier titanesque, engagé depuis cinq ans déjà, devra donc faire l’objet d’une vigilance particulière de la part de vos services.

PRÉSERVATION DE LA GROTTE DE LASCAUX

M. Germinal Peiro - Comme la grotte d’Altamira ou la grotte de Chauvet, la grotte de Lascaux est un trésor de l’humanité. Découverte le 12 septembre 1940 et immédiatement classée monument historique, elle fut ouverte au public en juillet 1948 et inscrite au patrimoine mondial de l’UNESCO en 1979. Hélas, les premiers signes d’altération due à l’importante fréquentation apparurent dès 1955. Une commission d’étude scientifique et de sauvegarde identifia d’abord une « maladie blanche » due à la calcite, puis une « maladie verte » provoquée par des algues, si bien qu’en 1963, le ministre de la culture, André Malraux, décida d’interdire la visite de la grotte. Pour satisfaire l’engouement du public, le conseil général de la Dordogne ouvrit en 1983 un fac-similé baptisé « Lascaux II », qui reproduit fidèlement la salle des Taureaux et le diverticule axial. Chaque année, 300 000 visiteurs s’y rendent.

En 2001, des taches blanches sont apparues dans la grotte, vraisemblablement suite au remplacement du système de gestion climatique. Un champignon, le fusarium solani, a été identifié. Depuis, ce sont des taches noires qui colonisent les voûtes et de nombreux passages, recouvrant même certaines peintures dont celle de la vache noire. Où en sont les travaux de conservation ? Comment l’État garantira-t-il une gestion transparente de ce trésor universel ?

Mme Christine Albanel, ministre de la culture et de la communication – Pour la troisième fois depuis sa découverte, la grotte de Lascaux subit un dérèglement bioclimatique favorable à la prolifération de micro-organismes – ainsi, en 2001, celle d’une moisissure blanche due au champignon fusanium solani associé à une bactérie très présente dans les sols environnants. Les mesures prises ont permis de faire reculer l’invasion de sorte que les traces de moisissure ont en grande partie disparu. En revanche, des taches noires liées à l’expansion d’un autre champignon, l’ulocladium, apparaissent à leur tour.

La grotte est sous la surveillance constante des services de la DRAC. Par ailleurs, un comité scientifique international, créé en 2002 et renouvelé en 2006, évalue les traitements curatifs. À l’issue du conseil scientifique du 20 novembre dernier, j’ai décidé l’application d’un traitement biocide sur les zones concernées par les taches noires, la mise au repos de la grotte pour une durée de trois mois et le remplacement du dispositif d’assistance climatique, ainsi que la mise à l’étude de nouveaux modes de régulation de l’air afin de mieux maintenir l’équilibre interne de la cavité.

Dans un souci de transparence, ces informations ont fait l’objet de deux communiqués de presse. La prochaine réunion du comité scientifique international se tiendra en avril prochain à Bordeaux : les premiers résultats des mesures décidées y seront communiqués, et une conférence de presse se tiendra à l’issue de la réunion.

M. Germinal Peiro - Je vous remercie, et j’insiste sur la nécessaire transparence du processus, afin d’éviter toute polémique. Le monde nous regarde !

MENTION DE LA LIBÉRATION DE LA CORSE DANS LES MANUELS SCOLAIRES

M. Sauveur Gandolfi-Scheit – Transmettre aux plus jeunes la mémoire de ceux qui ont combattu pour la France jusqu’à lui sacrifier leur vie est essentiel. Ce devoir de mémoire doit s’accompagner d’une rigoureuse honnêteté intellectuelle : nul ne peut s’accommoder de contrevérités historiques. Or, lacune incompréhensible, les manuels scolaires et les programmes officiels ne mentionnent pas le fait que la Corse fut le premier département libéré de France, dès octobre 1943, et ce grâce au soulèvement de ses propres habitants, avec l’aide des Forces françaises libres mais sans l’intervention des troupes alliées. Le général de Gaulle déclarait lui-même à Ajaccio, le 8 octobre 1943, que les patriotes corses, loin d’attendre que leur sort soit réglé par d’autres, voulurent être eux-mêmes des vainqueurs et firent de la Corse « le premier morceau libéré de France ».

Pour honorer nos anciens combattants et par respect de la vérité historique, vous devez aujourd’hui, Madame la ministre, faire connaître et reconnaître ces faits en les inscrivant dans les programmes scolaires, afin que les éditeurs de manuels en tiennent compte.

Mme Valérie Pecresse, ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche – Je vous prie d’excuser M. Darcos qui est en déplacement en République tchèque. La Corse, Monsieur le député, tient en effet une place importante et spécifique dans l’histoire de la Résistance et de la Libération. Dès septembre 1943, à l’annonce de la capitulation italienne, les résistants de l’île se soulevèrent et neutralisèrent une partie des forces italiennes – qui les rejoignirent – avant d’être épaulés par des bataillons de choc de l’armée d’Afrique envoyés par le général Giraud. L’île servit ensuite de base stratégique aux forces alliées. Vous avez justement rappelé que le général de Gaulle salua les sacrifices des Corses à Ajaccio, le 8 septembre 1943, disant sa fierté d’être parmi « les premiers Français qui se soient soulevés ».

Dans le cadre des programmes officiels, les professeurs des collèges et des lycées ont aujourd’hui la lourde tâche d’enseigner la Seconde Guerre mondiale en présentant son caractère global et en insistant notamment sur les catastrophes provoquées par la domination nazie et la politique d’extermination. L’étude de la France dans la guerre doit conduire à analyser le gouvernement de Vichy, les différentes formes de collaboration ainsi que l’action de la Résistance intérieure et de la France libre.

Les professeurs peuvent, dans ce cadre, se référer aux événements survenus en Corse en septembre et octobre 1943. J’appelle d’autre part votre attention sur le fait que la série de cédéroms « la résistance en régions », mise à la disposition par le ministère, a été inaugurée par un cédérom consacré à la Corse, auquel les enseignants peuvent se rapporter.

RÉHABILITATION DE LA RÉSIDENCE JEAN-ZAY À ANTONY

Mme Marie-Hélène Amiable – Après qu’en février M. Anciaux vous a remis son rapport sur le logement étudiant, vous avez indiqué, Madame la ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche, avoir décidé d'atteindre les objectifs qu’il fixe en matière de rénovation et de construction, en y consacrant 620 millions en quatre ans au logement étudiant.

Je souhaite appeler votre attention sur le cas la résidence universitaire Jean-Zay située à Antony, dans les Hauts-de-Seine. Édifiée en 1955 par Eugène Beaudouin, élève du Corbusier, elle a été qualifiée à l’époque de « cité modèle » au regard des nombreux services proposés aux étudiants. Le rapport Anciaux souligne que la taille et la localisation de cette résidence sont garantes de son utilité à l’échelle de la région. Il signale toutefois que les bâtiments continuent de se dégrader et auraient dû déjà être réhabilités. Il invite à se préoccuper rapidement de l'avenir de ce qui est, avec 2 100 chambres, la plus grande cité universitaire d'Europe, « afin de proposer des solutions de réhabilitation conformes aux normes et standards de confort actuels ».

Madame la ministre, comment comptez-vous organiser le financement de cette réhabilitation urgente, dont le montant est estimé à quelque 50 millions, alors que la compétence du logement étudiant a récemment été transférée à la communauté d'agglomération des Hauts-de-Bièvres et que le maire d'Antony a dit son intention d'engager la destruction de la résidence Jean-Zay pour construire de petites unités dont rien ne garantit le caractère social ?

La situation du logement étudiant a été qualifiée de « dramatique » par la ministre du logement et de la ville, ce que l'Observatoire de la vie étudiante a confirmé, en évaluant à un tiers la proportion des étudiants qui peinent à trouver un logement. Vous avez vous-même signalé l'urgence, soulignant que la qualité des campus est facteur de réussite et d'ascension sociale. Sachant que la cité universitaire d'Antony représente 16 % des logements sociaux étudiants en Île-de-France, quel plan de réhabilitation comptez-vous conduire pour la sauver de la destruction et permettre aux étudiants de se loger dans des conditions de sécurité et de confort décentes ?

Mme Valérie Pecresse, ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche – Le rapport Anciaux qui m'a été remis en février a d'abord été l'occasion d'un constat partagé entre tous les acteurs du logement étudiant : il existe 154 000 chambres en cité universitaire CROUS, et 40 000 chambres supplémentaires sont nécessaires dans les grandes villes universitaires, dont un tiers en Ile-de-France. Nous devons mobiliser tous les moyens disponibles pour confirmer les objectifs assignés par le premier rapport Anciaux – la réhabilitation de 7 000 chambres et la construction de 5 000 autres chaque année.

Mme Boutin et moi-même avons donc annoncé une série de mesures à cet effet. Il s'agit par exemple de développer de nouvelles formes de logement étudiant ; nous allons donc travailler sur la colocation et le logement intergénérationnel, pour lequel nous créerons un cadre législatif spécifique. Nous voulons aussi faciliter l'accès au logement pour tous les étudiants en mettant en œuvre les annonces du Président de la République sur la réduction du dépôt de garantie et son paiement échelonné ou sur la suppression progressive de la caution.

J'ai par ailleurs lancé la semaine dernière une étude sur deux sites tests – Marseille et Villetaneuse – afin de mesurer l'intérêt de recourir aux partenariats public-privé pour financer la construction de logements étudiants.

S’agissant des constructions et des réhabilitations nouvelles, nous nous donnons aussi les moyens de remplir les objectifs du plan Anciaux d'ici à 2014, usant pour cela de différents outils, dont l’augmentation du budget – de 11 %, ce qui permettra de tripler le nombre des constructions en 2008 par rapport à 2007 –, et l’extension à tout le territoire de l'accès au « prêt à taux très avantageux ».

De fait, le logement étudiant est un problème aigu en Île-de-France. Aussi, pour prolonger les États généraux du logement, nous organiserons dans les mois qui viennent une grande conférence sur le logement étudiant dans cette région, conférence qui réunira tous les acteurs : régions, villes, intercommunalité, rectorats, préfets, CROUS, bailleurs sociaux, offices HLM, représentants des bailleurs privés.... Cette conférence sera précédée par une large concertation dans chaque département. La question du logement étudiant en Île-de-France doit être abordée de manière globale et il faut notamment tenir compte des transports en commun ; c’est dans ce cadre que doit être traité le cas particulier de la résidence d'Antony. Nous travaillons déjà avec les différents acteurs locaux à identifier les pistes possibles. Quelle que soit la solution qui sera retenue, il est indispensable de ne pas diminuer la capacité d'accueil de l'académie, mais au contraire, de l’augmenter. Ce travail complexe est engagé, et nous espérons pouvoir bientôt présenter des propositions pour la région.

Mme Marie-Hélène Amiable – Je me réjouis de l’annonce d’une conférence sur le logement étudiant en Ile-de-France, mais j’aurais aussi aimé entendre des propositions précises sur le financement de la réhabilitation de la résidence Jean-Zay.

RECONDUCTION DU PLAN « MALADIES RARES »

M. François Rochebloine – Ma question, à laquelle s’associe mon collègue Olivier Jardé, porte sur la fin prochaine du plan « maladies rares ». Adopté en 2005, ce plan a eu des effets positifs en améliorant l’information sur les maladies dites orphelines et, ce faisant, leur dépistage. Il faut continuer de favoriser la prise en charge de ces pathologies en fonction des progrès de la recherche. Comme le relève la Fédération des maladies orphelines, aussi perfectible que soit le plan « maladies rares », il aura permis à des millions de personnes « de briser le huis clos de l'invisibilité » et, pour nombre d'entre eux, « d'entrevoir l'espoir ». Or la fin de ce plan, le 31 décembre 2008, suscite une profonde inquiétude dans le pays, comme en témoignent tous les parlementaires qui vous ont alerté à ce sujet, Madame la ministre de la santé. Une pétition circule actuellement sur l’Internet en faveur d'une reconduction du dispositif ; elle a déjà recueilli plus de 20 000 signatures. Vous avez vous-même laissé entendre dans un entretien à la presse que vous n'étiez pas hostile à cette hypothèse.

Il me paraît donc nécessaire que le Gouvernement précise ses intentions quant à la poursuite de ce plan et à ses éventuelles améliorations. Je ne doute pas que, consciente des enjeux, vous aurez à cœur de le faire.

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative Comme vous l’avez souligné, le plan « maladies rares », en dix axes, a suscité de considérables progrès ; il donne à la France une position de premier plan sur ce thème, que saluent mes homologues européens. Il est aujourd'hui indispensable de procéder à une évaluation pour déterminer s’il faut prendre d’autres mesures ou renforcer certaines de celles qui existent déjà. Aussi ai-je confié une mission en ce sens au Haut conseil de la santé publique, qui me rendra son rapport en septembre. J'ai en outre demandé que le comité de suivi du plan se réunisse en mai. Lorsque je serai en possession de tous ces éléments, je prendrai sereinement la décision sur un éventuel nouveau plan et ses modalités d’application.

Vous me donnez l'occasion de redire fermement qu'il n'est aucunement question de renoncer aux efforts que nous avons entrepris avec le plan « maladies rares ». A titre d'exemple, le plan 2007-2011 sur la qualité de vie des patients atteints de maladies chroniques concerne la plupart des aspects médico-sociaux des maladies. Les axes majeurs de ce plan sont la meilleure connaissance de la maladie par le malade, afin qu'il la gère mieux ; l’accentuation de la prévention ; une réflexion accrue sur la qualité de vie des malades ; une meilleure définition de leurs besoins.

Vous le voyez, ce sujet mobilise le Gouvernement et je le redis avec force, la fin du plan en 2008 ne signifiera en aucun cas que les victimes de maladies rares et leurs familles seront abandonnées. Nous allons au contraire tirer les enseignements de ce plan et pérenniser les formidables progrès que vous avez bien voulu souligner.

M. François Rochebloine – Je vous remercie, Madame la ministre, et je suis persuadé qu’un nouveau plan sera mis au point, dans l’intérêt des malades et de leurs proches.

FINANCEMENT DE LA MÉDECINE LÉGALE

M. Olivier Jardé – Madame la ministre de la santé, le financement de la médecine légale m’inquiète. La médecine légale, ce n’est pas seulement la thanatologie, c’est aussi l'examen des victimes et des gardés à vue, sur réquisition judiciaire. Cette activité relevant des missions régaliennes de l'État, son financement est assuré par les frais de justice selon des modalités précisées dans le code de procédure pénale. Or, un rapport IGAS-IGSJ de 2006 dénonçait des dysfonctionnements, tant sur le plan de l’organisation que des finances, l'assurance maladie prenant indûment en charge des actes réalisés dans les hôpitaux au bénéfice de la chancellerie. Cela ne se peut plus car, depuis le passage à la tarification à l'activité, les établissements de santé ne peuvent plus assumer de tels frais.

Un groupe de travail associant les ministères chargés respectivement de la santé, de la justice, de l'intérieur et de la défense, ainsi que trois médecins légistes représentants du Conseil supérieur de médecine légale, a élaboré un nouveau schéma d'organisation de la médecine légale. Le problème du financement demeure. Quand comptez-vous mettre en place ce nouveau schéma, et comment sera-t-il financé ? D’autre part, comment va-t-on payer tous les arriérés dus depuis trois ans aux hôpitaux qui prennent en charge ces activités ?

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé, de la jeunesse et des sports Le rapport commun de l’IGAS et de l’inspection générale des services judiciaires de janvier 2006 a souligné les dysfonctionnements des activités de médecine légale, notamment le manque de financement. Les tarifs fixés par le code de procédure pénale n’ayant pas été revalorisés régulièrement, les déficits ont pesé sur les budgets des hôpitaux. Or l’assurance maladie n’a pas vocation à financer la médecine légale.

À la demande des deux ministres concernés, un groupe de travail a été installé en juin 2006 pour mettre au point un nouveau schéma d’organisation avec un financement pérenne. Alors qu’on demande des efforts importants aux hôpitaux pour revenir à l’équilibre budgétaire, leurs recettes doivent être mobilisées pour assumer leurs missions de soins, et la médecine légale n’en relève pas.

Le nouveau schéma est en cours d’arbitrage. Le regroupement des activités de thanatologie améliorera leur expertise. Mais la médecine légale doit aussi prendre en charge les victimes, et c’est la préoccupation essentielle qui m’a guidée dans l’élaboration du nouveau schéma d’organisation. Nous veillerons à ce que son nouveau plan de financement tienne compte de l’ensemble des missions de la médecine légale. Le travail est en cours sur le schéma et l’arbitrage financier nécessaire. Nous aurons dans quelques semaines les réponses que vous attendez.

M. Olivier Jardé – Le ministère de la Justice doit au vôtre environ 50 millions pour la médecine légale…

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé – Cela ne m’a pas échappé.

M. Olivier Jardé – Mais vous lui devez 53 millions au titre de la médecine pénitentiaire. Ne pourrait-on effacer les dettes et accorder les budgets souhaitables à la médecine légale ?

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé – C’est plus compliqué.

URGENCES MÉDICALES DANS LE MÉDOC

Mme Pascale Got – Les soins d'urgence à la personne en Gironde, en particulier dans la presqu'île du Médoc, fonctionnent mal. Sans remettre en cause toute la régulation médicale, il est nécessaire de lui apporter des ajustements dans les territoires ruraux et même périurbains tout particulièrement ceux qui sont dépourvus comme le Médoc.

En effet, là, nous sommes à la limite de la rupture de la permanence de soins : manque d'ambulanciers privés, un seul axe routier principal, ce qui met le CHU de Bordeaux à deux heures de route, une seule petite polyclinique… bref, la régulation médicale classique par le 15 dysfonctionne, avec un délai d'intervention très souvent supérieur à une trentaine de minutes, ce qui a déjà eu des conséquences dramatiques.

Ce constat est partagé par les responsables du SDIS 33, du SAMU 33 et par tous les acteurs locaux. Il devient donc urgent de mener une expérimentation sur ce territoire, en donnant la priorité d'intervention aux pompiers.

Je vous le demande, d’autant que le président de la République, lors du dernier congrès de la Fédération nationale des sapeurs pompiers, a reconnu qu’il y a rupture de la permanence des soins en milieu rural. Il avait aussi préconisé que, dès 2008, on recoure, à titre expérimental dans quelques départements, aux pompiers en premier secours d'urgence. Un comité de suivi vérifierait l'efficacité du système, pour une extension possible en 2009.

Choisir la Gironde, plus grand département de France, et en particulier le Médoc, pour cette expérimentation serait un signe fort pour répondre à l’inquiétude des responsables et des usagers.

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé, de la jeunesse et des sports Lors des états généraux de l'organisation de la santé, et en partenariat avec les élus et les professionnels, nous avons réfléchi à une organisation de la santé qui tienne compte de la complémentarité entre la ville et l'hôpital, entre le secteur sanitaire et le secteur médico-social, entre la santé publique et les soins, ainsi qu’aux solutions propres à maintenir l'égalité de l'accès aux soins sur l'ensemble du territoire. C’est pourquoi j’ai créé une mission d’appui pour permettre aux organisateurs de la permanence des soins de trouver les solutions adaptées. On ne peut régler le problème depuis Paris. Je tiens donc beaucoup à ce que les responsables locaux s’impliquent, et à leur apporter toute l’aide nécessaire.

C'est dans cet état d'esprit que la direction de l'agence régionale de l'hospitalisation d'Aquitaine, en lien avec la DDASS de la Gironde, s’occupe actuellement de l'accès aux soins d'urgence dans la presqu'île du Médoc. Je suis particulièrement attentive à cette situation. J'insiste sur le fait que les partenariats entre tous les acteurs des urgences médicales et des secours doivent être renforcés pour assurer la sécurité des patients.

Par ailleurs, la DDASS de la Gironde se mobilise afin de maintenir une prise en charge des urgences de qualité à la polyclinique de Lesparre. En outre, le service mobile d'urgence et de réanimation, le SMUR, continuera à couvrir l'accès aux soins d'urgence. Avec la ministre de l’Intérieur, nous avons réuni un groupe de travail qui inclut les responsables de la sécurité civile afin d’assurer la meilleure coordination possible dans la prise en charge médicale de l’urgence. Nous connaîtrons le résultat de ses travaux dans quelques semaines.

Les usagers peuvent donc être rassurés sur le soin qui est apporté à trouver les meilleures solutions possibles concernant la coordination des dispositifs d'urgence pour la presqu'île du Médoc.

Mme Pascale Got – J’aimerais être associée à cette mission d’appui ou en avoir les conclusions rapidement. Il serait bon que les promesses du président Sarkozy se traduisent rapidement dans les faits, car le problème du 15 dans le Médoc et en général dans les territoires ruraux est crucial, avec des cas dramatiques lorsque les interventions sont tardives. Il faut se montrer offensifs dans ce domaine.

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé – Cette mission d’appui, qui sera à la disposition des préfets au début d’avril, regroupe les représentants des syndicats médicaux, de l’Ordre des médecins et des personnels qualifiés du ministère de la santé. Elle a donc un caractère professionnel et doit aider les préfets à organiser les schémas de permanence des soins. Je tiendrai compte des conclusions de ces missions d’appui et du rapport de M. Jean-Yves Graal dans l’élaboration de la loi de modernisation de l’organisation de la santé.

RECONNAISSANCE DES DEUILS ANTÉNATAUX

M. Jean Proriol – Le cas de parents d’un enfant né sans vie, sans être fréquent, est très douloureux. Pour ces familles, ces mamans en particulier, un accompagnement par les pouvoirs publics est une nécessité cruciale. En effet, l’absence de mesures d'accompagnement moral ou social et de statut juridique pour les enfants nés sans vie rend leur deuil particulièrement difficile.

La Cour de cassation a rendu le 6 février dernier, trois arrêts qui reconnaissent à des parents le droit de nommer, de déclarer à l'état civil et d'inhumer les fœtus mort-nés qui ne répondaient pas aux critères établis par la circulaire interministérielle du 30 novembre 2001, laquelle reprend les seuils fixés par l’OMS.

Sans vouloir aucunement engager de polémique sur ce sujet sensible ni remettre en cause le statut du fœtus et de l'embryon, ces arrêts prennent en compte la souffrance réelle de milliers de mères d'enfants nés sans vie. Nombre de parents concernés ont d'ailleurs déclaré être prêts à renoncer aux droits sociaux associés à la maternité, car ce qui compte pour eux, c'est la reconnaissance par la société de l'existence des enfants perdus.

Conjointement avec le ministre chargé de la sécurité sociale, vous avez pris un décret et un arrêté le 9 janvier dernier afin de permettre l'octroi d'un congé paternité aux pères d'enfants nés sans vie. Le médiateur en avait fait la proposition, puisque, dans ce cas, la femme a droit au maintien de son congé de maternité. Madame la ministre, pouvez-vous nous indiquer comment le Gouvernement entend aller plus loin pour accompagner ces parents, et avec quels moyens ?

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative  Ces situations sont particulièrement douloureuses, et les parents frappés par cette épreuve doivent bénéficier d’un accompagnement de qualité, fondé sur le respect. Nous devons à cet effet créer les conditions d’un suivi personnalisé, depuis l’annonce éventuelle d’une maladie ou d’une malformation jusqu’au décès. Les principes fondamentaux qui doivent guider les professionnels de santé dans cet accompagnement sont : l’information des parents ; la coordination entre les différents partenaires et ces derniers ; l’écoute, la disponibilité et le soutien ; l’accompagnement dans les démarches administratives. À cet égard, la présence d’associations spécialisées, qu’elles soient internes ou extérieures aux établissements, constitue une aide précieuse, pour les parents comme pour les professionnels qui les entourent.

Je souhaite que les établissements aient les moyens d’accompagner dans les meilleures conditions le deuil anténatal, afin de rendre plus humaine la prise en charge de ces situations. J’ai ainsi pensé qu’il serait bon que les professionnels bénéficient d’un outil de référence : une circulaire est en cours de rédaction, qui comportera des recommandations précises. Il faut que les professionnels reçoivent une formation spécifique, que les parents trouvent facilement les réponses à leurs questions et que, par exemple, les documents des associations soient systématiquement mis à leur disposition ; il convient en outre d’impliquer les services d’assistance sociale.

J’attends en particulier de cette circulaire – qui sera, je l’espère, publiée d’ici trois mois – qu’elle précise les modalités de prise en charge du corps de l’enfant décédé ; il faut que, dans tous les cas, les parents reçoivent une information complète sur le devenir de ce corps. En outre, il me paraît souhaitable de favoriser l’expression de rituels funéraires, qui permettent d’enclencher le processus de deuil ; il faut donc, dans la mesure du possible, ouvrir des espaces dédiés. Enfin, la formation continue devra être développée pour l’ensemble du personnel soignant et administratif, et des assistants sociaux. Soyez assuré que je veillerai avec la plus grande attention à favoriser une évolution positive des pratiques.

M. Jean Proriol – J’ai noté les mesures que vous allez prendre et vous remercie.

CONDITIONS D’EXERCICE DE LA PROFESSION DE PHARMACIEN

M. Philippe Armand Martin – La profession de pharmacien a, au cours des dernières semaines, été au cœur du débat public. Si je comprends la volonté de réforme du Président de la République, il ne faut pas que celle-ci remette en cause les équilibres de santé publique, auxquels les pharmaciens contribuent : ils participent en effet aux efforts de réduction du déficit de la sécurité sociale, par le biais de l’incitation à l’usage des génériques, assurent des gardes de nuit et une présence les week-ends et jours fériés, et contribuent à l’aménagement du territoire.

Alors qu’au cours de la campagne présidentielle, M. Sarkozy avait rappelé son attachement au monopole des officines pour la distribution de médicaments, il ressort de récentes déclarations et des propositions du rapport Attali que ce monopole pourrait être remis en cause. La distribution de médicaments par les grandes surfaces ne contribuera guère au maintien de notre système de santé publique en milieu rural !

Certaines déclarations gouvernementales ont en outre évoqué la possibilité d’un libre accès à certains médicaments. Or, l’automédication peut être la cause de graves pathologies ; ses effets néfastes ont d’ailleurs été mis en évidence aux États-Unis, où le libre accès a créé de graves problèmes de santé publique.

Aussi souhaiterais-je connaître les orientations du Gouvernement sur ces points, en particulier sur le maintien ou non du monopole de la distribution de médicaments.

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative  Le monopole pharmaceutique est un maillon indispensable de ma politique concernant le médicament, pour lequel j’ai exprimé mon attachement à plusieurs reprises. Le médicament n’est et ne sera jamais un produit de consommation ordinaire ; on ne peut attendre de bénéfices d’un médicament que s’il est correctement utilisé, et son usage comporte toujours des risques. Aussi, les conseils d’un professionnel spécialisé, indépendant et dont la responsabilité personnelle est pleinement engagée, sont indispensables. En outre, le maintien d’une chaîne allant de la fabrication à la distribution permet de garantir la traçabilité des produits, rempart efficace contre la contrefaçon, auquel notre pays doit d’avoir été épargné par ce mal qui touche de nombreux pays européens. Il me paraît nécessaire que les pharmaciens continuent à jouer leur rôle spécifique, protecteur et responsable.

C’est pourquoi j’ai proposé un plan d’action visant à optimiser le service pharmaceutique en le rendant plus concurrentiel. Le premier axe de ce plan a été de permettre aux officines de « grossir », par des regroupements ou par des transferts vers des zones faiblement denses, afin de garantir un niveau d’activité suffisant ; c’est l’objet de l’article 59 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2008. Le deuxième volet de ce plan est l’autorisation de mise à disposition de médicaments non soumis à prescription devant le comptoir des pharmacies. Cette possibilité ouverte aux pharmaciens répond aux attentes des patients, en termes de transparence, de choix, d’information. Des travaux ont été réalisés sous l’égide de mon ministère avec l’ensemble des acteurs, pour garantir la sécurité de cette mesure, dont le monopole pharmaceutique est d’ailleurs en soi un élément. Le troisième axe consiste en la création d’un statut de centrale d’achat, pour permettre aux pharmaciens de disposer des mêmes atouts commerciaux que les autres circuits de distribution. Ce statut leur permettra d’accéder à des prix d’achat concurrentiels pour la majorité des médicaments non remboursables.

Enfin, je souhaite valoriser et moderniser le réseau des pharmacies d’officine et lui assigner de nouvelles missions, dans la mise en œuvre des plans de santé publique – cancer, Alzheimer, canicule, grippe aviaire… –, de la veille et les alertes sanitaires, de l’éducation thérapeutique, de la prévention.

Dès la présentation du rapport Attali, le Président de la République a indiqué qu’il n’était pas favorable à la mise en vente de médicaments dans les grandes surfaces ; je me suis moi-même exprimée à de nombreuses reprises sans ambiguïté. Une étude récente indique que l’organisation de la santé en France était celle qui donnait les meilleurs résultats au monde, s’agissant de la prise en charge des maladies curables. Modifier cette organisation ne se justifierait que s’il était prouvé qu’un modèle alternatif conduirait à de meilleurs résultats, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui.

M. Philippe Armand Martin – Je vous remercie de vous exprimer en faveur du maintien du monopole pharmaceutique. Cette réponse est de nature à apaiser les craintes des pharmaciens.

HÔPITAUX DE PROXIMITÉ

M. Jean-Paul Dupré – Madame la ministre, vous connaissez l’attachement de nos concitoyens ruraux à un service de santé de proximité. Or, en sept ans, pas moins de 78 services de chirurgie et de maternité ont été fermés ; et depuis 2004, le mouvement s’est amplifié, au point de faire surgir le spectre du désert médical.

Les hôpitaux de proximité coûteraient trop cher, ne permettraient pas d'assurer la sécurité des patients et ne parviendraient plus à recruter les professionnels indispensables à leur bon fonctionnement : autant de prétextes pour justifier l'injustifiable. En effet, ces arguments ne résistent pas à l'analyse. Les hôpitaux de proximité ne sont ni plus chers ni moins sûrs que les grandes structures. Quant à leurs difficultés de recrutement, elles pourraient être levées pour peu que les incertitudes quant à leur devenir le soient. Les seules motivations qui inspirent ces mesures de fermeture ou de restructuration sont en réalité d'inspiration comptable. Cette politique contribue à créer de véritables déserts médicaux : en éloignant les plateaux techniques des territoires ruraux, elle décourage l'installation des médecins généralistes, qui craignent de ne pouvoir assumer la charge de milliers de patients. Elle remet donc gravement en cause le principe constitutionnel d'égalité d'accès à l'offre de soins.

C'est pourquoi nous demandons solennellement l'instauration d'un moratoire sur les fermetures de services hospitaliers et l'organisation d'une large concertation, ouverte à l'ensemble des acteurs de terrain, sur le devenir des hôpitaux de proximité. Nous attendons que vous fassiez droit à cette demande légitime.

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative  Votre question souligne la nécessité de redonner confiance aux acteurs de notre système de santé, à ses usagers, aux organisations hospitalières et aux élus.

Mon objectif est de maintenir, au plus près de chacun, des points d'accès aux soins jouant pleinement leur rôle de proximité et d'orientation vers les plateaux techniques adaptés. C'est le sens du travail conduit depuis cinq ans pour les structures d'urgence et l'aide médicale urgente. Notre pays compte aujourd'hui plus de 625 structures d'urgence et plus de 800 services mobiles d'urgence et de réanimation – SMUR. La mise en place du répertoire des ressources sanitaires disponibles permettra bientôt de recenser dans chaque région l'ensemble des structures de soins et leurs spécialités médico-chirurgicales. Il est essentiel que les hôpitaux soient en mesure de répondre, en proximité, aux demandes urgentes de nos concitoyens.

Je maintiens donc que les hôpitaux de proximité et les services d'urgence sont maintenus, et même renforcés. J'ai souhaité permettre à l'hôpital de proximité de répondre aux nouveaux défis – vieillissement, dépendance, accompagnement de la fin de vie… Ces restructurations sont un renouveau pour l'hôpital. Selon une récente étude de la conférence des commissions médicales d’établissement, elles ont créé de l'emploi sans appauvrir les établissements. La prise en charge des personnes âgées et l'accompagnement de la fin de vie réclament beaucoup d'énergie et de soins techniques. Il n’y a pas une médecine noble et une autre qui le serait moins : les soins de suite et de réadaptation mobilisent des plateaux techniques médicaux exigeants – matériel de réadaptation, appareillages – et nécessitent la présence de spécialistes de la nutrition, de kinésithérapeutes…

Ces réorganisations ne sont donc nullement motivées par une prétendue « inspiration comptable ». Par ailleurs, elles n'ont concerné qu'un petit nombre de plateaux techniques développant les activités de chirurgie et d'obstétrique. Je ne vous apprendrai pas que la sécurité d'un plateau technique dépend du nombre de médecins et de celui des actes réalisés. Dans ce contexte, la réorganisation hospitalière vise à assurer non seulement le maintien de l'hôpital, mais aussi son développement, et à renforcer la qualité et la sécurité des soins donnés à nos concitoyens. Ce sont, je n’en doute pas, des préoccupations que nous partageons.

Nos dépenses hospitalières par habitant sont les plus élevées au monde. Nous avons défini un objectif national de dépenses d’assurance maladie qui progresse presque deux fois plus que la richesse nationale. Suis-je vraiment animée par des motivations comptables ? Mon seul souci est d’assurer à nos concitoyens la meilleure qualité des soins possible. Cela passe par la restructuration d’un certain nombre de plateaux techniques. Je ne fermerai aucun hôpital de proximité, mais j’y assurerai un service de santé à la hauteur des attentes de nos concitoyens.

M. Jean-Paul Dupré – Je vous remercie de cette réponse. Je suis ici le porte-parole d’un large secteur rural du Languedoc-Roussillon. Nous demeurerons attentifs au bien-être et à l’accès aux soins de nos concitoyens.

M. le Président – Nous en avons terminé avec les questions orales sans débat.

Prochaine séance cet après-midi à 15 heures.

La séance est levée à 12 heures 35.

La Directrice du service
du compte rendu analytique,

Marie-Christine CHESNAIS

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