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Assemblée nationale

Compte rendu
analytique officiel

Séance du jeudi 19 juin 2008

1ère séance
Séance de 9 heures 30
200ème séance de la session
Présidence de M. Jean-Marie Le Guen, Vice-Président

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La séance est ouverte à neuf heures trente.

DÉBAT SUR L’ORGANISATION DU SYSTÈME DE SANTÉ EN FRANCE

L'ordre du jour appelle un débat sur l'organisation du système de santé en France.

M. le président – Le groupe UMP étant à l’origine de ce débat, la parole sera d’abord à son premier orateur, M. Rolland.

M. Jean-Marie Rolland – Notre système de santé garantit à chaque Français un très haut niveau de protection sociale. Ce système original repose sur un équilibre unique entre une prise en charge collective du risque et le libre choix du médecin par le patient. Ce modèle dont nous sommes fiers est fondé sur la solidarité et assure à la très grande majorité de nos concitoyens l'accès à des soins de qualité mais aussi au progrès médical.

Ce système a fait la preuve de son efficacité : l'assurance-maladie prend en charge 78 % des dépenses, et même plus de 90 % pour les patients en affection de longue durée. C'est le taux le plus élevé d'Europe et l'un des plus élevés du monde. Notre pays dispose d’un taux de professionnels de santé par habitant très important et d’un réseau dense d'établissements hospitaliers. L'espérance de vie des Français est de 80,3 années, supérieure de deux ans à celle de la moyenne des pays de l'OCDE ; de 1960 à 2004, elle s'est accrue de dix ans.

Il ne faut pas pour autant s’arrêter à ce satisfecit. Notre système de santé connaît des fragilités croissantes : fragilités sanitaires, fragilités sociales et territoriales, fragilités financières.

Parmi les plus apparentes, je citerai l'apparition de « déserts médicaux » dans les zones rurales mais aussi périurbaines, l'augmentation des dépassements d'honoraires qui limitent l'accès aux soins pour certains de nos concitoyens, l’engorgement des urgences médicales qui désorganise toute la chaîne de soins, les faiblesses de notre système de prévention qui font par exemple que la mortalité prématurée reste en France l'une des plus élevées de l'Union européenne. Notre système de santé doit aussi répondre aux nouveaux besoins de la vieillesse et de la dépendance : d'ici à 2015, le nombre de personnes âgées de plus de 85 ans passera de 1,3 à 2 millions. Enfin, et malgré la réforme de 2004, le déficit de nos comptes sociaux reste d'autant plus préoccupant que la hausse des dépenses de santé est une tendance de fond, et que cette hausse est supérieure à la croissance du PIB.

Notre système de santé doit donc relever ces défis, et consolider et amplifier les résultats obtenus avec la réforme de 2004. C’est pourquoi le Président de la République a souhaité engager une réforme d'ensemble, dont il a défini les grandes orientations dans plusieurs discours fondateurs : en septembre 2007 devant l'Association des journalistes de l'information sociale, à Bordeaux en octobre 2007, ou encore à Neufchâteau en avril dernier, à propos de l’hôpital.

Sur ces bases, le Gouvernement a engagé une large concertation. Depuis un an, Madame la ministre, vous avez écouté, consulté, réfléchi pour et avec les acteurs de notre système de santé – professionnels, industriels, usagers. Les états généraux de l'organisation de la santé, tenus à Paris et en province, ont été un temps fort pour évoquer avec les personnels médicaux et paramédicaux leurs difficultés et leurs attentes.

De très nombreuses contributions, notamment de la part de nos collègues, sont aussi venues alimenter votre réflexion : le rapport de la mission d'information parlementaire sur les agences régionales de santé conduite par Yves Bur, le rapport d’André Flajolet sur les inégalités territoriales de santé en terme de prévention, mais aussi l’important rapport du Préfet Ritter sur les ARS et enfin celui, unanimement salué, de Gérard Larcher sur les missions de l'hôpital.

L'Assemblée nationale doit être pleinement associée à cette réforme très attendue. C'est pourquoi le groupe UMP a souhaité inscrire dans le cadre d'une de ses séances d'initiative parlementaire ce débat sur l'organisation de notre système de santé. Il doit nous permettre de préparer la coproduction législative, chère à notre président de groupe, mais aussi, je crois, à tous les membres de cette Assemblée. Comment assurer un égal accès de tous à des soins de qualité sur l'ensemble du territoire ? Cette question générale se traduit dans nos circonscriptions par d’autres, très concrètes : comment assurer la permanence des soins ? Comment remédier à la pénurie de médecins sur un territoire ? Comment résorber les files d'attente à l'hôpital ? Comment répondre à l'isolement, voire à l'épuisement des professionnels de santé ?

De cette réforme, Madame la ministre, vous avez déjà livré la philosophie générale et l’architecture en annonçant pour l’automne un projet de loi « patients, santé et territoires ». Ce texte comportera d’abord un volet « santé publique », afin d’organiser une véritable politique de prévention, notamment en direction des jeunes et des femmes, et de donner une traduction concrète aux excellentes propositions de notre collègue André Flajolet. Un volet « établissements de santé », ensuite, engagera la réforme de l'hôpital public afin de remédier au manque de pilotage et d’efficacité et de renforcer la coopération hospitalière grâce à la création des communautés hospitalières de territoire. Un volet « agences régionales de santé », clé de voûte du dispositif, a fait l'objet de développements importants lors du troisième conseil de modernisation des politiques publiques du 11 juin dernier : il mettra fin au cloisonnement actuel entre l'hôpital, les soins de ville et les soins médico-sociaux grâce à un pilotage unifié et responsabilisé de la politique de santé au niveau régional. Enfin, un volet essentiel, « accès de tous à des soins de qualité », sera consacré à l'indispensable réforme de l'offre de soins de premier recours.

À ce dernier propos, mon expérience de médecin généraliste de campagne m’enseigne combien il est urgent de réorganiser notre chaîne de soins et de proposer, en ville comme à l'hôpital, des réponses graduées à nos concitoyens. Ainsi, les urgences hospitalières constituent encore souvent un goulot d'étranglement dans la filière de soins. Le nombre de passages dans ces services a doublé entre 1990 et 2004. Or, ces passages ne correspondent pas toujours, bien s'en faut, à une situation d'urgence vitale ou grave : dans les trois quarts des cas, les patients retournent à domicile après consultation. Il y a à l'évidence une différence entre l'urgence ressentie par les patients – qui peut être bien réelle – et l'urgence médicale véritable. D’où la nécessité d’une réforme, qui devra s'articuler avec une meilleure reconnaissance des missions des généralistes : la réforme de 2004, qui en a fait un pivot du système de soins, a constitué une avancée mais insuffisante. J'espère, Madame la ministre, que vous pourrez nous préciser vos intentions sur ce sujet.

Sur un certain nombre d’autres questions, nous souhaiterions également connaître l’état d'avancement de votre réflexion, étant entendu que la concertation se poursuit et que les arbitrages ne sont pas encore rendus. Ainsi pourriez-vous nous éclairer sur la gouvernance des ARS, dont il a été beaucoup question au cours de ces derniers mois ? À qui en seront confiées la présidence et la direction générale ? Quelles garanties aura le secteur médico-social de ne pas être noyé dans le secteur sanitaire ? Comment rassurer aussi les fonctionnaires des actuelles DDASS et DRASS ? Envisagez-vous de procéder par ordonnances, en tout cas pour partie ? Et surtout quelles garanties pouvez-vous nous donner que la gestion du risque, conduite avec un certain succès par l’assurance maladie, sera accentuée, en particulier à l'hôpital, dont traitera M. Leonetti.

Pourriez-vous nous dire où en sont les négociations conventionnelles entre l’UNCAM et les syndicats de médecins sur la démographie médicale, sur les dépassements d'honoraires et sur le très attendu secteur optionnel ?

Enfin, il nous faudra réfléchir au financement de notre système de santé, problème qu’abordera tout à l’heure M. Morange. Le récent avis du comité d'alerte, selon lequel l’ONDAM aurait été dépassé de 500 à 900 millions d'euros, souligne l'urgence de cette réflexion, mais surtout l’urgence d’agir.

Cette réforme est attendue avec impatience par les acteurs de terrain, qu'ils soient professionnels de santé ou simples usagers. Elle devra libérer et encourager les initiatives innovantes, garantir à tous les soins de qualité et le respect des principes de solidarité et de responsabilité auxquels nous sommes attachés et, surtout, redonner confiance à ceux qui peuvent avoir des doutes (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. le Président – J’invite chacun à respecter strictement son temps de parole.

Mme Catherine Lemorton – Un tel débat ne saurait laisser de côté la question des franchises médicales qui, quoi qu’en dise le Gouvernement, constituent le symbole de sa volonté de démanteler notre système de solidarité nationale. Loin d’être isolées dans une masse de propositions positives et efficaces, elles s'inscrivent dans un plan déjà bien établi, qui, depuis 2004, fait en partie reposer sur les malades le financement de notre protection sociale : déremboursement des médicaments dits « de confort », participation forfaitaire pour chaque visite chez le médecin ou chaque acte paramédical, forfait de 18 euros pour tout acte supérieur à 91 euros, dossier médical personnalisé coûteux pour la collectivité et qui, jusqu'à maintenant, s'apparente surtout à une usine à gaz – encore une belle idée de M. Douste-Blazy ! C'est tout un inventaire à la Prévert de vos actes négatifs que nous pourrions établir !

Ces franchises injustes, inacceptables, irresponsables, aboutissent à l'exact négatif des propos tenus par les ministres. Ainsi, lorsqu'on entend « responsabilisation des assurés », « promotion de notre système par répartition », « renforcement du système de solidarité nationale », il faut en fait comprendre « démantèlement du système français », « instauration d'un modèle individualisé type anglo-saxon », « culpabilisation des malades et des assurés sociaux ».

La seule franchise justifiée, c’eût été bien plutôt, pour le Gouvernement, celle qui consisterait à avouer son véritable dessein ! Mais comment expliquer aux bénéficiaires du minimum vieillesse, aux personnes handicapées, aux accidentés du travail et des personnes atteintes de maladies professionnelles que ces dépenses supplémentaires s’imposaient ? D’ailleurs, en quoi cette mesure va-t-elle responsabiliser, puisque décidément ce terme vous est cher, les 13 % de Français qui se privent déjà de soins par manque d'argent ? L’exonération accordée aux bénéficiaires de la CMU constitue votre caution de justice sociale. C’est une bonne chose, mais comment ne pas parler de cynisme, quand on connaît les difficultés qu'ils éprouvent déjà face aux refus de prise en charge par certains médecins et. à l’impossibilité de payer les dépassements d'honoraires – 2 milliards d'euros tout de même sur les 19 milliards d'honoraires perçus ?

M. Gérard Bapt – Scandaleux !

Mme Catherine Lemorton – Ces franchises sont également impossibles à analyser, aucune étude crédible n'ayant pour le moment été menée. On croit rêver en entendant de hauts responsables évoquer, début mai, un « effet franchises » positif sur la consommation des médicaments ! La raison devrait les inciter à patienter plutôt que de pratiquer ainsi la méthode Coué…

De vraies questions pourraient d’ailleurs exciter leur sagacité : combien d'autres de nos concitoyens, en plus des 13 % déjà évoqués, vont de fait se priver de soins, faute de pouvoir payer ? Où est la responsabilité du patient dans la quantité et le coût des médicaments prescrits quand c'est bel et bien encore le médecin qui signe et prescrit les ordonnances ? Pourquoi renverser ainsi les responsabilités ?

L’automédication constitue un autre sujet sensible. La ministre invoque le principe – quasi mystique – de responsabilisation des patients, qui pourront accéder librement à des médicaments, mais on aboutit à un formidable paradoxe : alors qu’on dénonce la surconsommation de médicaments remboursés, on facilite l'accès aux médicaments déremboursés, donc leur surconsommation. Pour augmenter l’automédication, il faudrait d’abord mener dans notre pays une véritable politique d'information et d'éducation thérapeutique, indépendante et transparente, ce à quoi le Gouvernement ne semble pas disposé ! Qu’y a-t-il derrière tout cela ? Allons-nous voir le libre-accès se transformer rapidement en libre-service ? Des intérêts de grands groupes économiques privés viendraient-ils interférer ici, voire prendre le pas, sur les impératifs sanitaires ?

Ces questions méritent des réponses claires, franches, sans démagogie. Soyons honnêtes, la récente campagne d'une chaîne d'hypermarchés n'est pas de nature à nous rassurer sur le sujet.

M. Gérard Bapt – Exact !

Mme Catherine Lemorton – On risque d’accentuer les inégalités sociales et territoriales dans l'accès à cette automédication. Ainsi, est-il juste de dérembourser des classes thérapeutiques sans alternatives remboursables ?

Notre Président de la République, si prompt à regarder de l'autre côté de l'Atlantique, serait bien avisé de s'emparer des thèmes évoqués dans le débat présidentiel américain…

M. Philippe Boënnec – C’est une caricature !

Mme Catherine Lemorton – …en particulier de la question de l'accès aux soins, cruciale pour cinquante millions d'Américains sans couverture sociale, mais aussi de celle de l'automédication, sur laquelle les États-Unis s’interrogent au vu des centaines de milliers d'accidents iatrogéniques dont elle serait responsable. Au lieu de cela, le Gouvernement ne fonde sa politique que sur la réalisation d'économies, au détriment des assurés malades, et sans aucune visée de santé publique.

Cette politique va à rencontre de la bonne santé de nos concitoyens, comptez sur les députés du groupe SRC pour la dénoncer ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC)

M. le Président – Je vous demanderai à nouveau de bien vouloir respecter les temps de parole qui vous sont impartis.

Mme Jacqueline Fraysse – Lorsqu’on les interroge sur leurs préoccupations, les Français placent immédiatement après la lutte contre le chômage la préservation de leur système de santé. Hérité du Conseil national de la résistance, et révolutionnaire lors de sa création au lendemain de la Seconde guerre mondiale, ce système garde toute sa pertinence aujourd’hui, en termes de solidarité, d’équité ou d’efficacité. En termes de solidarité, puisque chacun cotise selon ses moyens et reçoit selon ses besoins ; en termes d’équité, puisque quels que soient leur région de résidence ou leur milieu social, les citoyens reçoivent des soins de qualité, sans condition de nationalité ; en termes d’efficacité, enfin, l’espérance de vie en France étant l’une des plus élevées au monde, et le taux de mortalité infantile l’un des plus bas, et ce pour un montant de dépenses de santé rapporté au PIB tout à fait raisonnable – autour de 11 % –, en tout cas nettement moins élevé qu’aux États-Unis, eldorado des assurances privées, où le ratio est de 14 %, pour des résultats très modestes : 42 millions d’Américains, soit 15 %, sont sans assurance maladie, l’espérance de vie y est inférieure à la nôtre, et le taux de mortalité infantile deux fois plus élevé.

Cela ne signifie pas, bien sûr, que notre système ne peut être amélioré. Tout en conservant ses principes fondamentaux, il convient de l’adapter à la société d’aujourd’hui. Or, avec les franchises médicales (« Ah ! » sur les bancs du groupe UMP), qui sont venues s’ajouter au forfait hospitalier, à la participation forfaitaire d’un euro, au ticket modérateur, au forfait de 18 euros pour les actes lourds, sans parler des déremboursements de médicaments, vous pénalisez les plus modestes au point de les empêcher d’accéder aux soins. Avec la tarification à l’activité et l’alignement sur le privé, vous aggravez en outre la situation financière des hôpitaux publics, dont les déficits cumulés ont atteint 800 millions l’an dernier…

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative  500 millions !

Mme Jacqueline Fraysse – Pendant ce temps, le chiffre d’affaires des cliniques privées augmente de 8 % par an, permettant à certaines d’entre elles, comme la Générale de santé, d’arroser leurs actionnaires de dividendes exceptionnels, tandis que vous fermez maternités et hôpitaux de proximité, créant de véritables déserts médicaux.

Cette philosophie de la rentabilité à tout prix pousse les établissements à privatiser certaines prestations – comme si le ménage dans un hôpital ou la préparation de repas tenant compte des pathologies était un service banal ! L’absence de personnel formé à ces activités réduit la qualité de la prise en charge et conduit parfois à des erreurs graves.

Avec la pénurie de médecins, dont personne ne peut prétendre qu’elle n’était pas prévisible,…

M. Philippe Vitel – Elle était prévisible quand vous étiez au Gouvernement !

Mme Jacqueline Fraysse – …vous accentuez les inégalités territoriales d’accès aux soins, encore aggravées par le retard pris dans la filière de formation des médecins généralistes.

Face à cette situation, les « mesurettes » concoctées en petits comités sont inefficaces et cause de gâchis. Les 8,3 millions dépensés l’an dernier pour favoriser la démographie médicale dans certains secteurs sous-dotés ont abouti à l’installation de quinze nouveaux médecins seulement !

Vos mesures concernant le financement accentuent l’étatisation et amoindrissent l’équité du système. La CSG fait peser une charge égale sur tous, peu importe qu’ils soient retraités ou smicards. Portées de 28,7 à 32,4 milliards entre 2007 et 2008, les exonérations de cotisations sociales patronales n’ont, quant à elles, nullement démontré leur efficacité et ne sont donc rien d’autre que des cadeaux aux chefs d’entreprise. Et comme vous refusez de faire contribuer les revenus des placements financiers des plus aisés, il est à croire que ces derniers, contrairement aux patients, aux médecins et aux chômeurs, n’ont pas besoin d’être « responsabilisés » !

En plus d’être inéquitables, ces mesures privent les caisses de ressources. Vous cultivez le déficit des comptes sociaux pour mieux mettre à mal notre système !

M. Philippe Vitel – Quel culot !

Mme Jacqueline Fraysse – Ces déficits vous servent à légitimer aux yeux des Français le choix d’abandonner la santé aux assurances et au secteur privé.

Or, nous pourrions maintenir les principes fondamentaux de notre système, au lieu de les sacrifier sur l’autel de la finance. Cela implique, tout d’abord, d’en finir avec les exonérations de cotisations sociales patronales et de mettre à contribution les revenus des placements financiers. Si ceux-ci étaient taxés au même taux que les salaires, ils rapporteraient à la sécurité sociale près de 20 milliards chaque année. Cela permettrait également de revaloriser le travail, comme le souhaite le Président de la République. Une telle revalorisation pourrait être en outre obtenue par une modulation des cotisations patronales ; aujourd’hui, les entreprises qui créent de l’emploi paient davantage de cotisations que celles qui licencient pour accroître leur rentabilité ! Il faut inverser cette logique.

En ce qui concerne les hôpitaux, il est nécessaire de revenir sur la tarification à l’activité, qui incite au développement des seules activités lucratives et contribue à creuser davantage encore le déficit des établissements. En outre, alors que les hôpitaux publics sont soumis à des obligations de service public – urgences, permanence des soins, accueil de tous… –, celles-ci ne sont pas suffisamment prises en considération dans les enveloppes des missions d’intérêt général et d’aide à la contractualisation et des missions d’enseignement, de recherche, de références et d’innovation. La Fédération hospitalière de France est donc fondée à demander une revalorisation.

Enfin, il est urgent de revoir le contenu des activités, ainsi que les conditions de formation et le mode de rémunération des professionnels de santé. Les infirmières réclament depuis des années l’intégration de leurs études dans le cursus européen licence-master-doctorat. Lors de l’examen du projet de loi relatif aux libertés des universités, Mme Pécresse avait promis l’organisation d’une concertation sur ce point. Où en est-on aujourd’hui ?

De même, il convient de dégager des moyens pour placer l’enseignement de la médecine générale au même niveau que celui des spécialités. Les actes n’ont malheureusement pas été à la hauteur des promesses, puisque seuls huit nouveaux postes d’enseignant de médecine générale ont été créés en 2008.

M. Christian Paul – C’est dérisoire !

Mme Jacqueline Fraysse – Le médecin généraliste est le véritable coordinateur du parcours de soins. Son mode de rémunération devrait en tenir compte. Ainsi, plutôt que d’autoriser sans limite les dépassements d’honoraires – qui, selon un rapport de l’IGAS, ont doublé en quinze ans, pour atteindre, en 2007, deux milliards, sur les dix-neuf milliards d’honoraires perçus, alors que deux tiers de ces montants restent à la charge des patients après l’intervention des mutuelles –, il vaudrait mieux réfléchir à d’autres modalités de rémunération que le seul paiement à l’acte.

L’option du médecin-référent, dont je regrette la suppression,…

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé – Elle n’intéressait pas les médecins !

Mme Jacqueline Fraysse – …permettait, à côté du paiement à l’acte, de dédommager forfaitairement le médecin pour des activités non actuellement prises en considération.

Je me suis rendue, la semaine dernière, à un colloque organisé par « Espace généraliste ». J’y ai entendu des réflexions très intéressantes, et je regrette que le ministère de la santé et l’UNCAM n’aient pas jugé utile de participer à cette rencontre.

Le temps consacré par les médecins à l’élaboration des dossiers et au suivi des patients, ainsi qu’à la prévention et à l’éducation à la santé, doit être rémunéré, comme c’est le cas dans les autres pays développés. Ainsi, aux États-Unis, temple de la médecine libérale, le paiement à l’acte ne représente qu’un tiers de la rémunération des généralistes.

La modernisation de notre système de santé exige de l’audace et de la détermination. En dépit de tous vos beaux discours, votre politique ne tend pas à réduire les dépenses de santé. Au contraire, vous permettez peu à peu aux assurances privées et aux marchés financiers de faire main basse sur les 11 % du PIB que les Français consacrent à leur santé, au point que les médecins libéraux ont présenté une pétition visant à protéger le système de santé des appétits financiers. C’est dire combien eux aussi, malgré leurs différences, ont à cœur de respecter l’éthique de leur profession ! (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR et du groupe SRC)

M. Jean-Luc Préel – Notre système de santé est efficace dans le domaine curatif, mais demeure médiocre pour ce qui est de la prévention et de l'éducation. Or, son amélioration doit prendre en compte tous les éléments qui contribuent au bien-être des personnes.

Aujourd’hui, notre système de soins traverse une grave crise organisationnelle, morale et financière. Les inégalités dans l’accès aux soins sont inquiétantes. Il existe des territoires dépourvus de généralistes ou de certains spécialistes et, ailleurs, un bon carnet d’adresse est indispensable pour être traité. Nous devons garantir l’égalité d’accès et le financement solidaire de la santé.

À ce titre, le projet de réforme qui sera débattu à l’automne comprend des mesures relatives à l'organisation du système, aux établissements de santé, à la médecine ambulatoire et à la permanence des soins.

Afin d’améliorer l’organisation du système de santé, vous proposez de créer des Agences régionales de santé, ou ARS – une mesure que je préconise depuis de nombreuses années. Avec un responsable unique dans chaque région, nous mettrons fin à plusieurs distinctions absurdes – entre soin et prévention, entre ville et hôpital, entre services sanitaires et médico-sociaux – ainsi qu’à la non-fongibilité des enveloppes. Il ne s‘agit pas de créer une énième structure, mais de coordonner l’action sanitaire et de supprimer les instances redondantes ou obsolètes.

Ces agences coordonneront les financements et couvriront l’ensemble du soin, y compris la prévention et l’éducation à la santé, ainsi que les services médico-sociaux. S’agissant des filières gériatriques, il est urgent de garantir le financement de l’accueil aux urgences, des services spécialisés, des lits d'aval ou encore des cantous.

La formation des professionnels de santé doit, elle aussi, relever des ARS. Nos problèmes de démographie médicale sont dus à un manque d’anticipation des besoins de terrain, et la grande majorité des professionnels exercent là où ils ont été formés. Pourquoi ne pas instaurer un numerus clausus par région et par spécialité ?

D’autre part, le Parlement doit voter des ORDAM en privilégiant la fongibilité des enveloppes.

Quatre problèmes persistent malgré tout. Tout d’abord, l’assurance maladie reste marginale au sein de notre système de santé. L’ONDAM, dont se saisit le Parlement, ne couvre que les dépenses remboursables par le régime général. Or, depuis l’étatisation de l’assurance maladie en 2004, les partenaires sociaux ont cédé la place au directeur général qui a désormais tout pouvoir pour gérer l’ONDAM que lui fixe le Parlement – ou plutôt le Gouvernement. Quelle est donc la légitimité de l’assurance maladie ? C’est aux ARS que doit revenir le contrôle médical de la pratique de ville et de l’hôpital. Elles doivent également disposer des outils informatiques nécessaires à la connaissance statistique de l’activité sanitaire régionale. L’assurance maladie, quant à elle, conserverait son rôle en matière de remboursement – rôle qu’elle tient très bien.

Deuxième problème : la démocratie sanitaire. Loin d’être un préfet sanitaire, le directeur de l'ARS doit être contrôlé par un organisme démocratique. Les conférences régionales de santé ne sont pas davantage que des grand-messes. Préférons-leur des conseils régionaux de santé qui rassemblent tous les acteurs de la santé, y compris des associations de malades et d'anciens malades.

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales – Très juste !

M. Jean-Luc Préel – Leurs membres seront élus par collèges, afin d’assurer une représentation équitable des unions régionales des médecins libéraux et de celles des professionnels de santé.

Ces conseils auront pour mission de contrôler l'exécutif régional, de définir les besoins à partir des travaux des observatoires régionaux de santé et de gérer l'ONDAM régionalisé. Ils veilleront à la démocratie sanitaire, à l’adéquation entre offre et besoins, et à la maîtrise médicalisée des dépenses de santé. Ce dernier objectif ne sera atteint qu’en associant et en responsabilisant les professionnels eux-mêmes.

Ensuite, l’État doit coordonner l’action des ARS en veillant à la sécurité sanitaire et à l’égalité d’accès aux soins. Pour se charger de ce « bouclage » national, l’idéal serait de créer une agence nationale qui rassemblerait les différentes directions du ministère.

Pour souhaitable que soit la création des ARS, il faut éviter qu’elle n’aboutisse à une commande triple qui comprendrait la coordination nationale de leurs actions, l’UNCAM et le ministère. En outre, le maintien d’une distinction entre les enveloppes affectées à la ville, à l’hôpital et au secteur médico-social obérerait l’efficacité des ARS.

J’en viens au projet de réforme hospitalière. Notre système de santé repose sur un réseau public et un autre privé, tous deux financés par la collectivité nationale, qui connaissent non seulement des difficultés financières, mais aussi des difficultés à répondre aux besoins, en matière de soins d’urgence ou de soins gériatriques, par exemple. De nombreux postes hospitaliers sont vacants aux urgences, en hémodialyse ou encore en radiologie.

Hélas, le temps des praticiens est rongé par la réunionnite, et le statut ne favorise pas les meilleurs. Certes, une réforme de la gouvernance, avec la mise en place de pôles, est en route mais la remarquable mission de M. Larcher montre qu'il convient d’aller plus loin. Ses recommandations sont judicieuses : il faut les mettre en œuvre. Ainsi, la création de communautés hospitalières de territoire à direction et à investissements uniques est une idée féconde. Un établissement pourrait participer à deux territoires – l’un comprenant les hôpitaux locaux et l’autre, plus vaste, l'hôpital de référence. Pour que ces territoires soient compatibles, le dispositif devra être souple – et il en ira de même lorsque le plateau technique est commun à un établissement public et un autre privé. Pour ma part, je préfèrerais un fonctionnement en réseau entre les CHU, l'hôpital de référence du secteur et les hôpitaux locaux.

L’institution d'un directoire doté d’un véritable directeur est nécessaire. Tout établissement a besoin d'un chef à l’écoute des équipes médicales. Sans doute le conseil d'administration doit-il être renforcé et la collectivité doit-elle participer aux investissements, afin de responsabiliser les élus et d’offrir davantage d’autonomie aux établissements.

De même, l’évolution des statuts est indispensable. Les contrats des médecins, dont la généralisation devra intervenir dans les meilleurs délais, doivent prendre en compte la pénibilité, la responsabilité et la motivation. Les médecins, qu’ils soient libéraux ou hospitaliers, généralistes ou spécialistes, doivent être mobiles et pouvoir exercer dans les hôpitaux locaux.

Notre double réseau public et privé est sans doute une chance mais il faut veiller à son équilibre, et notamment à la pérennité du capital des cliniques rachetées par de grands groupes financiers. De même, il faut renforcer la place du projet médical et de la CME pour que l’acteur financier ne pousse pas à la sélection des médecins, des activités et des malades. Les acteurs institutionnels devront, eux aussi, s’investir.

Venons-en à la médecine ambulatoire, dont le principal problème concerne l’offre de soins de premier recours. Une mission parlementaire y est actuellement consacrée. En effet, il existe de grandes inégalités sur le territoire en termes de morbidité, de mortalité, de démographie des professionnels de santé mais aussi d'accessibilité financière.

Les dépassements d'honoraires posent aussi problème – et ne doivent pas être confondus avec les dessous-de-table inadmissibles, qu’il faut sanctionner. Les dépassements, en ville comme à l'hôpital, doivent être contrôlés, mais la seule solution est de rémunérer plus justement les actes remboursés par l'assurance maladie. J’ajoute qu’il est anormal que celle-ci ait à sa charge une partie des charges sociales. La rémunération du professionnel de santé devrait lui permettre de financer lui-même sa protection sociale. D’ailleurs, la plupart des jeunes médecins souhaitent rénover le mode d'exercice et de financement de leur activité. Ainsi, le médecin généraliste doit rester au cœur du système, mais certains spécialistes remplissent parfois la fonction de premier recours. D’autre part, la formation initiale doit être révisée en tenant compte des préconisations du rapport Bach. L’essentiel est d’aboutir à une adéquation entre les diplômes et les besoins.

Une régionalisation est souhaitable pour mieux prendre en compte les besoins des dix prochaines années. Je souhaite donc un numerus clausus régional établi à partir des éléments fournis par les observatoires régionaux de santé.

M. Gérard Bapt – Très bien !

M. Jean-Luc Préel – À l’échelle nationale, nous n’avons su anticiper ni les changements de mentalités et de mode d'exercice, ni la féminisation.

Il faut également veiller à l’adéquation des places de l'examen classant avec les postes proposés.

M. Gérard Bapt – Très bien !

M. Jean-Luc Préel – La mise en place de la filière généraliste devient urgente : le nombre de postes d'interne, de chef de clinique et de professeur est aujourd'hui ridiculement faible. Je plaide également pour un double stage obligatoire – trois mois en ville et trois mois en zone rurale – chez un généraliste.

Je ne reviens pas sur la nécessité de diminuer les tâches administratives, qui rebutent les professionnels de santé dont la vocation est de soigner.

Les mesures d’incitation à l'installation sont récentes et insuffisantes. Des expériences comme l’octroi d’une bourse contre l'engagement de s'installer en zone déficitaire sont en cours. La rémunération majorée de 20 % est peu utilisée et limitée aux cabinets de groupes en zone déficitaire. Elle devrait pouvoir être accessible à tous et complétée par une mesure inverse dans les zones excédentaires.

Les mentalités ont changé. Les jeunes ne veulent plus exercer seuls. Les maisons de santé pluridisciplinaires répondent donc à un besoin. Elles doivent être l'aboutissement d'un projet médical de territoire, et non une construction « clés en main ».

L'évolution du mode de rémunération vers un système mixte – forfait et rémunération à l'acte – semble également faire consensus.

Une nouvelle répartition des tâches – pour ne pas dire des compétences – entre les diverses professions de santé est nécessaire pour améliorer la qualité de la prise en charge. Nous avons besoin d'infirmières cliniciennes pour suivre les maladies chroniques – obésité, asthme, hypertension… Cela permettra de libérer du temps médical.

M. Gérard Bapt – Très bien !

M. Jean-Luc Préel – Le rôle du pharmacien dans la prévention et le suivi doit être reconnu. De même, nous avons besoin d'aides-soignantes libérales pour que les infirmières se consacrent aux soins et non à la toilette – mais cela nécessite de revoir la rémunération des actes.

Le projet de loi que vous nous proposerez à l'automne, Madame la ministre, devrait permettre d’améliorer notre système de santé. Il s’agit d’assurer l'égal accès de tous à des soins de qualité dans un système de financement solidaire.

S’agissant justement du financement, deux points me paraissent importants : ne pas reporter les déficits sur les générations futures et continuer à cotiser en fonction de ses revenus et à être soigné en fonction de ses besoins. Il faut donc bien placer le curseur entre le régime de base, les complémentaires et le reste à charge.

Je serai attentif à ce que ce projet de loi permette de réels progrès et j’attends avec intérêt vos réponses (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP).

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission  Je voudrais d’abord remercier mes collègues pour l’important effort de réflexion engagé depuis quelques mois. Puisse cette réflexion et celle de votre ministère se rejoindre, Madame la ministre !

J’ai entendu deux mots-clés dans ce débat : démantèlement et adaptation. Nous n’irons pas loin si nous abordons ce débat sous le seul angle du démantèlement – c’est verser dans la caricature. Le vieillissement est un enjeu auquel nous devons tous faire face. Dans l’étude du CERC, Jacques Delors lui-même…

M. Gérard Bapt – Vous n’en avez pas voulu !

M. Jean Leonetti – C’est vous qui n’en avez pas voulu : vous avez préféré Jospin !

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission  …estime que, « dans les quinze dernières années, l’essentiel de l’effort de productivité de la nation a été absorbé par les dépenses socialisées, au détriment de l’amélioration du pouvoir d’achat direct et de la compétitivité de la France. » Nous sommes sur le point d’accéder au premier rang européen pour le poids de l’État providence (« Et les pays du Nord ?» sur les bancs du groupe SRC), au moment même où nous attendons une amélioration du salaire direct. Il nous faudra bien concilier nos différentes exigences !

M. Christian Paul – Mais la santé pèse très lourd sur le pouvoir d’achat !

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission  La santé est devenue la deuxième ou la troisième préoccupation des Français. Nos compatriotes ont confiance dans les professionnels de santé, mais ils nourrissent aussi des attentes en matière de qualité et d’égal accès aux soins – point sur lequel le rapport Flajolet apporte une intéressante contribution. En même temps, ils s’inquiètent du poids du déficit et des recettes du système.

Pour concilier ces trois exigences – qualité, égal accès aux soins et maîtrise financière –, des adaptations sont nécessaires.

Comment, d’abord, articuler les principes de solidarité et de responsabilité ? Depuis quinze ans, 77 % des dépenses collectives sont financées par la solidarité. Il est vrai qu’elles concernent principalement les affections de longue durée, au détriment peut-être d’autres aspects. Nous devons retenir un principe de stabilité : pourquoi la nation ne déciderait-elle pas de consacrer dans les prochaines années à la santé un point de plus que l’évolution de la richesse nationale ? À partir de là, il faut faire un effort de responsabilité pour affecter ce point supplémentaire. Nous devons veiller tout particulièrement à ne pas multiplier les exonérations de cotisations sociales, qui incitent les entreprises à préférer des salaires faibles qu’elles compensent par les tickets restaurant, l’intéressement ou la participation. Il faudra y penser lorsque nous débattrons de l’intéressement.

M. Gérard Bapt – Très bien.

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission En ce qui concerne le reste à charge, il faudra bien en passer par le bouclier sanitaire. L’aide aux complémentaires de santé pourrait être améliorée : il y a un défaut d’information, voire d’organisation.

Il faudra enfin réfléchir aux moyens de restreindre les dépassements d’honoraires.

La responsabilité doit être le corollaire de la solidarité. Ce principe doit s’appliquer à tous : assurés, patients, professionnels de santé, institutions – y compris l’hôpital. Il faut développer une culture de la responsabilité et l’implication de tous les acteurs. Certains territoires ont élaboré des projets territoriaux de santé…

M. Christian Paul – C’est très bien.

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission  …pour développer la prévention – notamment de l’obésité – et réfléchir sur les maisons pluridisciplinaires de santé, l’hospitalisation à domicile ou le respect de référentiels et de bonnes pratiques. C’est un bon moyen pour que chacun prenne conscience de ses responsabilités.

Ce principe de responsabilité et la nécessité d’introduire des efforts de performance dans notre système doivent nous conduire, comme l’a dit Jean-Luc Préel, à une réflexion sur les agences régionales de santé. Il faut fixer un objectif régional pour le niveau des dépenses de santé, un ORDAM, qui devrait pouvoir être modulé. Nous l’avions déjà demandé il y a quatre ou cinq ans. Pourquoi ne pas engager rapidement des expérimentations dans ce domaine ? Cela permettrait en outre d’alléger le poids des corporatismes, qui est grand à l’échelle nationale.

Si nous voulons un pilotage unifié et responsabilisé du système, il faut donner une place importante aux partenaires sociaux.

Mme Marisol Touraine – Ah !

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission  L’étatisation des agences régionales de santé ne permet pas nécessairement de le faire. Je ne suis pas convaincu que le conseil d’administration de l’ARS doive être présidé par le préfet de région.

M. Gérard Bapt – Nous non plus.

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission  Cette présidence pourrait être assurée par un représentant des partenaires sociaux ou une personnalité qualifiée. Je suis attaché à ce principe général : donnez des responsabilités aux gens, et vous les changez !

Selon nos voisins européens, les politiques publiques en France ne souffrent pas d’une insuffisance de moyens, mais de l’empilement des structures et de la confusion de leurs objectifs : la France est sur-administrée et sous-organisée.

Dans notre système de santé, il faut un système de responsabilité lisible, unifié et simplifié (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe NC).

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé  Le moment est venu de rénover en profondeur notre organisation sanitaire. Animée par la ferme conviction qu'il faut nous donner les moyens de relever les défis auxquels elle est confrontée, j'inscris mon action dans la perspective globale de la modernisation dont notre pays a besoin.

Il faut rénover notre système de soins pour préserver le pacte de 1945, pour ne pas léguer aux générations futures une dette impossible à acquitter et pour éloigner la perspective d'une médecine à plusieurs vitesses. Ma politique de santé, tout en tenant compte des contraintes, est avant tout une politique de justice. Ce n’est en aucun cas une politique utilitariste.

Le projet de réforme obéit à trois exigences, celles de l’égalité, de la responsabilité individuelle et de la responsabilité collective. Il nous faut relever quatre défis : un défi de plan de la santé publique, lié au poids croissant des pathologies chroniques et du vieillissement ; un défi économique, qui consiste à équilibrer les dépenses tout en assurant la solidarité entre les générations ; un défi de démocratie médicale, qui implique d’assurer l’égalité d’accès aux soins et de combattre l’avancée des déserts médicaux.

M. Gérard Bapt – Merci de le reconnaître.

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé  Sur le plan de l’organisation enfin, il s’agit de remédier à la balkanisation des structures et au gaspillage de moyens.

Les Français savent que la réforme est nécessaire. Ils sont fiers d’un système qui leur assure un très haut niveau de protection sociale, mais en connaissent les fragilités. Quand on attend des heures aux urgences, quand le généraliste du village ne trouve pas de successeur, on sent bien qu’il faut agir. Mais je ne veux pas faire une énième réforme, technocratique, imposée. J’ai voulu travailler avec vous, très en amont (Murmures sur les bancs du groupe SRC) pour répondre aux préoccupations concrètes de nos concitoyens que vous connaissez mieux que personne. J’ai donc voulu faire de la coproduction législative. Je remercie M. Rolland et M. Preel pour la qualité de leur intervention. Je regrette que les socialistes n’aient pas saisi cette occasion pour avancer ne serait-ce qu’une proposition…

Plusieurs députés du groupe SRC – Supprimez les franchises !

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé …Pas une seule proposition ! En critiquant, vous avez été dans votre rôle d’opposante, Madame Lemorton. Mais si au moins, vous aviez avancé une proposition ! Il n’y en avait pas une seule, et Mme Fraysse s’est inscrite dans le même registre.

Mme Jacqueline Fraysse – J’ai fait des propositions.

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé C’est dommage, car on peut reprendre des idées venant de tous les groupes.

Plusieurs députés du groupe SRC – Supprimez les franchises !

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé Nous faisons tous le même constat. Les difficultés ne sont pas passagères, mais structurelles. Nos dépenses pour l’hôpital sont bien supérieures à celles des autres pays de l’OCDE, les effectifs à l’hôpital ont augmenté de 10 % en dix ans, et pourtant, ceux que je rencontre, qui sont d’un extrême dévouement, expriment une grande lassitude. Question d’effectifs ou d’organisation ? De même, notre réseau hospitalier est l’un des plus denses du monde ; pourtant les usagers se plaignent de ne pas toujours disposer des structures nécessaires. Notre pays a l’une des plus fortes densités médicales de l’OCDE. Pourtant, dans les campagnes et les banlieues les moins favorisées, la désertification médicale progresse.

M. Christian Paul – Où sont les remèdes ?

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé – L’accès aux soins reste plus coûteux qu’il n’y paraît. En dépit de la CMU, de l’AME, d’un taux de prise en charge publique parmi les plus élevés au monde, il faut parfois encore payer 200 euros de sa poche pour accoucher. Beaucoup de médecins pratiquent des dépassements de tarifs, certains refusent de soigner les bénéficiaires de la CMU. Pierre Méhaignerie a aussi rappelé ce que sont les finances de la sécurité sociale : le déficit est installé depuis vingt ans. Faudra-t-il une génération pour en sortir ?

Mais ces contraintes ne sont pas synonymes de fatalité. Je veux mener une politique de santé responsable et, au-delà des incantations, une politique efficace. Telle est la réforme que les Français attendent, tel est le sens du projet que je présenterai.

Ainsi, pour assurer l’égalité aux soins, il faut considérer chaque patient comme un être social, dans toutes ses dimensions. Être égaux, ce n’est pas être identiques. C’est donc en tenant compte de la gradation des besoins, et donc de la gradation des soins, que nous pourrons opérer une gradation des structures afin d’en assurer une meilleure répartition sur tout le territoire. On ne fait pas appel au même hôpital pour des soins de suite et une prothèse de hanche. Distinguons donc les hôpitaux de proximité pour les soins courants et les séjours longs, des centres hospitaliers équipés de plateaux techniques efficaces et dotés d’équipes spécialisées pour les actes invasifs, des CHU pour les pathologies complexes et des centres de référence pour les pathologies rares.

Défendre de façon incantatoire une égalité abstraite dans l’accès à toutes les structures, c’est contribuer au maintien de l’inégalité de fait (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP). D’ailleurs, les gens les mieux informés n’hésitent pas à aller se faire soigner là où ils jugent que c’est le plus indiqué. En revanche, dans l’urgence, chacun est à égalité. Je veux donc favoriser l’accès de tous aux services d’urgence qui répondent à un vrai besoin de proximité. Oui, l’exigence d’aménagement du territoire est légitime. Je le répète, je ne fermerai aucun hôpital de proximité…

M. Christian Paul – Cela dépend de ce que vous y laissez.

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé – …mais je pratiquerai les adaptations nécessaires aux besoins de la population et aux exigences de la sécurité et de la qualité des soins (Quelques applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Philippe Vitel – La sécurité d’abord.

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé – Si nous voulons plus d’efficacité, c’est pour assurer une égalité réelle dans l’accès à des soins de qualité. Les plus démunis seraient les premières victimes de la dégradation du système. À cet égard, il faut tout faire pour mettre fin à la pratique scandaleuse du refus de soins. Le projet de loi s’y emploiera, comme il combattra certains dépassements d’honoraires illégitimes. Des mesures ont déjà été prises dans le cadre de la dernière loi de financement de la sécurité sociale. L’arrêté portant obligation d’information à partir du seuil de 80 euros sortira en juillet ; deux décrets d’application sur les sanctions pour refus d’affichage et pour absence de tact et de mesure dans la fixation des honoraires paraîtront l’un en juin, l’autre en juillet.

D’autre part, alors même que la densité de médecins par habitant est l’une des plus élevée de l’OCDE, plus de quatre millions de Français, dans les campagnes et à la périphérie des villes, ont des difficultés à trouver un médecin. Pour améliorer la situation, il faut mieux organiser le travail des professionnels de santé et libérer du temps pour soigner. Les jeunes généralistes veulent exercer en groupe et brasser moins de papier pour se concentrer sur leur vraie mission. Grâce à la loi, la création des maisons de santé le leur permettra. J’ai largement anticipé ces mesures dans la dernière loi de financement de la sécurité sociale. C’est par une meilleure organisation des ressources que nous créerons les conditions d’une égalité réelle, en même temps que nous rendrons son sens à la responsabilité individuelle.

La mauvaise gestion pénalise toujours en premier les plus vulnérables. C’est pourquoi je veux faire évoluer la tarification à l’activité instaurée en 2005. Certes, c’était déjà un progrès indéniable par rapport à une logique d’enveloppe.

M. Philippe Vitel – Absolument.

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé – Il ne s’agit absolument pas de restriction budgétaire : l’ONDAM hospitalier a augmenté de 3,2 % cette année, soit plus que le PIB. Sur les 625 établissements qui sont passés entièrement à la TAA pour les soins de court séjour, 380 ont enregistré une augmentation de leur budget et 230 une baisse. Tolérer les écarts qui existaient pour les mêmes actes pratiqués dans les mêmes conditions, c’était donner une prime aux établissements mal gérés (Assentiment sur les bancs du groupe UMP).

M. Gérard Bapt – Allez-y quand même en douceur.

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé – Mais je souhaite apporter au moins deux modifications pour prendre en compte la précarité de certains patients et la prise en charge des cas les plus lourds.

La durée de séjour des patients est aussi liée à leur situation sociale. Pour que certains établissements n’hésitent pas, pour des raisons financières, à accueillir certaines catégories de la population, ce qui serait contraire au principe de solidarité, je veux accroître les ressources allouées aux établissements où la proportion de patients en situation précaire est importante. De même, une nouvelle version des tarifications – dite version 11 – permettra de mieux rémunérer les prises en charge les plus lourdes.

Le retour à l’équilibre financier des hôpitaux est une priorité. Il ne répond pas à une stricte logique comptable, mais à une exigence de justice et de solidarité entre les générations.

L’architecture du projet « patients, santé et territoires » reflète nos priorités et notre objectif essentiel, qui est d’assurer à chacun sur tout le territoire l’accès effectif à des soins de qualité.

Le premier titre a pour objet de renforcer les politiques de prévention, en s’appuyant sur le rapport de M. Flajolet, que je remercie. Il s’agira ainsi de résoudre les problèmes concrets de santé publique auxquels sont confrontées les familles, notamment lorsqu’elles ont le sentiment que la prévention eût épargné à leur enfant bien des difficultés. D’où des dispositions permettant de lutter contre l’obésité, l’alcoolisme, le tabagisme, de favoriser l’accès à la contraception, à l’IVG et à un meilleur suivi gynécologique, de prévenir les maladies liées à l’habitat.

Vous avez raison, Madame Fraysse : nous devons développer d’autres modes de rémunération que le paiement à l’acte (Approbation sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR) ; après avoir commencé de nous y employer dans le cadre du PLFSS, nous élaborons actuellement les textes nécessaires…

M. Christian Paul – Cela va bousculer votre majorité !

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé  …mais nous devions d’abord résoudre le problème de la permanence des soins.

Afin d’assurer à tous l’accès à des soins de qualité, le titre II sera notamment consacré à la refondation de la médecine générale de premier recours, à la réforme de la formation continue et au développement de nouvelles modalités d'exercice. Il reprend en grande partie les travaux des états généraux de l'organisation de la santé, notamment s’agissant des maisons de santé pluridisciplinaires (Exclamations sur les bancs du groupe SRC).

M. Gérard Bapt – Nous en parlons depuis dix ans !

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé Nous revaloriserons la filière de médecine générale créée par la loi du 8 janvier 2008, sur laquelle plusieurs d’entre vous m’ont interrogée. Les décrets relatifs aux statuts universitaires sont en cours d’élaboration au ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche ; un décret relatif à la partie « soins » de l’activité est également en préparation ; enfin, un courrier cosigné par Mme Pecresse et moi-même précise l’objectif – soit l’installation en cinq ans d’une filière qui permettra de créer 200 postes.

M. Christian Paul – Après 2012 ? (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe UMP)

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé  Le deuxième titre intègre en outre la réforme de la biologie médicale, qui fait depuis plusieurs mois, vous le savez, l’objet d’une concertation coordonnée par M. Ballereau.

Le troisième titre, relatif à la modernisation des établissements de santé, prend acte des conclusions du rapport que j’avais confié à Gérard Larcher. Il concerne d’abord la gouvernance de l’hôpital, évoquée par plusieurs orateurs : il n’est pas normal qu’à l’hôpital, comme a coutume de le dire le Président de la République, tout le monde puisse dire non, mais personne ne puisse dire oui !

M. Jean Leonetti – C’est vrai !

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé  Désormais, chaque établissement sera doté d’un patron, chargé d’en appliquer le projet médical, et d’un conseil de surveillance dont le vice-président sera le président de la commission médicale d’établissement, afin de concilier l’exigence d’une bonne gestion et la mission de soin.

Ce titre crée en outre les communautés hospitalières de territoire, afin d’organiser la répartition des soins hospitaliers entre les quatre niveaux que je viens d’évoquer.

Enfin, pour renforcer l’attractivité des métiers de l’hôpital, le texte permettra aux médecins qui veulent travailler plus et différemment de bénéficier de modes de rémunération contractuels – sans empêcher ceux qui le souhaitent de rester dans la fonction publique hospitalière – et inclura des dispositions relatives au LMD, qui concernent, outre les infirmiers, tous les métiers paramédicaux et exigeront concertation et dialogue social.

Le quatrième titre sera dévolu à la création des ARS, qui apporteront enfin clarté et efficacité à notre système de soins. À ce propos, je remercie MM. Rolland, Préel et Méhaignerie de leurs questions et de leurs propositions. Il s’agit là d’un choix stratégique fondamental, qui vise à renforcer le pilotage territorial et à le rapprocher de la population en l’unifiant – les ARS réuniront les services de l'État et ceux de l'assurance maladie – et en responsabilisant tous les acteurs. Comme l’a dit M. Méhaignerie, cette réforme structurelle vise à adapter les politiques de santé aux besoins locaux et à mieux répartir l’offre de soins, afin de lutter contre les déserts médicaux.

À cet égard, Messieurs Préel et Méhaignerie, même si votre proposition de créer un ORDAM n’est pas sans intérêt, la maîtrise des dépenses de santé me paraît exiger le pilotage au niveau national des ONDAM sectoriels.

M. Pierre Morange – Très bien !

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé  Parce que nos concitoyens ne sont pas également armés pour affronter des parcours de soins à la cohérence incertaine, les ARS contribueront à mettre fin au cloisonnement. Enfin, elles permettront de simplifier un système complexe, éclaté entre de nombreux organismes, afin d’offrir un interlocuteur unique aux acteurs du système et à nos concitoyens.

En somme, il s’agit d’une stratégie « gagnant-gagnant », propre à bénéficier tant aux malades, au cœur de notre système de santé, qu’aux professionnels et aux personnels chargés d’appliquer la réforme, qu’ils viennent de l’assurance maladie ou de l’administration d’État. Je le répète : aucune mobilité ne sera imposée à ces derniers, mais de nouvelles possibilités de carrière s’offriront à eux ; tel est l’objet du dialogue social que le secrétaire général du ministère, M. Jean-Marie Bertrand, et moi-même avons noué avec eux.

Quant au calendrier, s’il s’agit pour l’heure de recueillir des contributions – toutes bienvenues –, et sans préempter l'agenda des assemblées et les décisions du gouvernement, je souhaite que le texte soit soumis au Parlement à la mi-septembre. La question du recours aux ordonnances n’est pas tranchée.

M. Christian Paul – Des ordonnances pour la santé ? (Sourires)

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé  S’il n’est pas question de priver la représentation nationale de son libre arbitre et de l’examen des articles de principe, la création des ARS suppose plusieurs centaines d'articles de coordination technique ; il pourrait donc être plus simple de recourir à une ordonnance unique… (Exclamations sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR)

M. Marc Dolez – Ben voyons !

M. Christian Paul – C’est scandaleux !

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé  …à la rédaction de laquelle vous serez naturellement étroitement associés (« Très bien ! » sur les bancs du groupe UMP).

Monsieur Méhaignerie, il s’agira d’une loi d’organisation, et non d’une loi financière (Exclamations sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR) ; l’examen du PLFSS pour 2009 nous permettra de débattre des questions que M. Rolland, M. Préel et vous-même avez soulevées. Quant à Mmes Lemorton et Fraysse, elles n’ont formulé aucune proposition ! (Protestations sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR)

La santé exige une réforme globale et ambitieuse, car nos concitoyens craignent que la fragilité du système ne mette en péril la qualité et la sécurité des soins. C’est pour leur santé, et pour celle de leurs enfants, que nous construirons ensemble la loi « Patients, santé et territoires » (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe NC).

M. Christian Paul – C’est mal parti !

M. Laffineur remplace M. Le Guen au fauteuil présidentiel.

PRÉSIDENCE de M. Marc LAFFINEUR
vice-président

M. Yves Bur – Je souhaite apporter une brève contribution au débat préalable à la loi « Patients, santé et territoires » et au prochain PLFSS. Après avoir longtemps cru que les difficultés de notre système de santé étaient essentiellement, voire exclusivement financières – ce qui a conduit les majorités successives à proposer des solutions partielles, visant à contenir les dépenses ou à accroître les recettes –, nous avons pris conscience de leur caractère structurel. Ainsi le mythe du meilleur système de santé au monde, qui nous dispensait de tout diagnostic lucide, a-t-il été mis à bas par la découverte de la crise de l’offre, de la rareté du temps médical et de la moindre attractivité de l’hôpital public.

Face à ces difficultés, il nous appartient de mieux organiser l’offre de soins afin de tenir compte de la rareté du temps médical et de développer l’offre paramédicale, car le désert médical menace, y compris aux portes des grandes agglomérations. Les maisons médicales tant vantées – comme pour conjurer le spectre d’une autre forme de régulation, encore obscure et réservée aux seuls jeunes professionnels – ne sauront y suffire. Et les urgences hospitalières publiques ne sauraient plus longtemps assurer seules la permanence des soins.

En outre, malgré les progrès accomplis en la matière, la qualité des soins continue de poser problème et n’est pas encore garantie à tous les assurés quelle que soit leur condition sociale. Il y va également de la santé publique, car la santé de nos concitoyens, surtout les plus fragiles, ne pourra qu’en pâtir. De plus, le vieillissement de la population entraîne de nouvelles missions pour l’hôpital, aujourd’hui engorgé par des malades âgés dont les besoins ne sont pas pris en charge.

Il s’agit également d’un problème de gouvernance – nous devons substituer à un pilotage inadapté et illisible le décloisonnement et la coordination des acteurs autour d’un parcours thérapeutique plus cohérent et plus efficient – et d’un défi financier – car la solidarité doit permettre de venir en aide aux malades. De ce point de vue, le débat que j’ai lancé, sur la gestion du risque et la nécessité d’optimiser les dépenses collectives, n’aura pas été inutile.

Quelle méthode et quels objectifs permettront d’accomplir cette tâche digne d’Hercule ? La réponse ne peut être uniquement technocratique : afin de faciliter l’accès du malade, sur tout le territoire, à un système plus cohérent, de meilleure qualité et plus sûr, il faut associer les acteurs territoriaux à la construction de cette démocratie sanitaire, dont le dynamisme ne pourra qu’y gagner.

En outre, loin de se réduire à un changement d’organisation, une nouvelle gouvernance requiert une nouvelle culture de la responsabilité, fondée sur la détermination d’objectifs, sur l’engagement par contrat et sur une évaluation dont il faudra tirer toutes les conséquences pour les acteurs concernés – sans quoi l’administration de la santé demeurerait inefficace, réduite à une sorte de Gosplan sanitaire d’un autre âge !

Cette nouvelle culture devra également impliquer le Parlement, au moyen de rendez-vous annuels non seulement financiers – tel le PLFSS – mais également organisationnels, comme cette année, afin d’adapter en permanence notre système aux besoins.

Enfin, Madame la ministre, nous devons trouver le courage de bousculer les conservatismes et les corporatismes qui n’ont que trop paralysé notre système de santé. Pour relever les défis auquel celui-ci est déjà confronté, il faut substituer aux grands principes qui ont fait la preuve de leur inefficacité, un renouvellement profond des modes d’exercice et de prise en charge des patients, à la ville comme à l’hôpital. Pour nos concitoyens, et au risque de déplaire, nous devons réussir cette réforme : vous pouvez compter sur nous, Madame la ministre ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Jean-Marie Le Guen – Notre débat est un peu surréaliste ! Tels les hallebardiers de l’Opéra, nous disons « Marchons, marchons ! » tout en restant sur place…

M. Jean Leonetti – N’est-ce pas votre habitude ?

M. Jean-Marie Le Guen – Et n’est-il pas ahurissant de voir tous les collègues qui se sont impliqués dans la réforme Bertrand et Douste-Blazy de 2004, alors présentée comme la mère de toutes les réformes, venir quatre ans plus tard dresser un constat d’échec ? Notre système s’essouffle et la majorité ne fait rien depuis cinq ans !

M. Christian Paul – Quel naufrage !

M. Jean-Marie Le Guen – Au fil du temps, la mobilisation des acteurs de santé s’est émoussée mais le diagnostic est sans appel : vous n’avez pas su arrêter l’hémorragie financière de la sécurité sociale.

Pourtant le diagnostic est clair : les inégalités liées à la santé continuent de progresser et la dégradation de l’accès aux soins est désormais évidente, avec le problème non réglé des dépassements d’honoraires, le recul de la couverture sociale et les inégalités territoriales dont tous les élus s’alarment. Parallèlement – et cet élément n’est pas assez mis en avant –, les inégalités progressent aussi dans l’accès aux informations sur la bonne utilisation de notre système de santé. Nous constatons aussi un choc démographique, et, plus largement, le malaise de toutes les professions de santé.

Tous les ingrédients d’une crise profonde sont donc réunis et nous ne devons pas détourner le regard face à la situation d’urgence sanitaire qui s’est installée dans le pays. À moyen terme, votre inaction prolongée va aboutir à une crise sanitaire profonde, d’autant que les pouvoirs publics s’obstinent à sous-estimer les différents éléments que je viens de décrire.

Quelles sont les causes de cette crise ? La plus fondamentale tient sans doute au fait que nous n’avons pas pris la mesure des bouleversements intervenus dans la conception de la médecine et de l’exercice médical. Nous sommes encore accrochés à une vision de l’acte médical profondément dépassée et à des pratiques anachroniques…

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé – C’est vrai.

M. Jean-Marie Le Guen – Beaucoup, ici, connaissent les raisons profondes de ce retard : aujourd’hui, la plupart des pathologies sont devenues chroniques alors que nous avions l’habitude de fonctionner sur des modes prévus pour les pathologies aiguës et aléatoires. Nous sommes aussi confrontés à des patients dont le niveau d’éducation et d’exigence a progressé, ainsi qu’à une véritable révolution des sciences du vivant. Au final, le système n’est plus en phase avec la réalité.

Pour y remédier, la réforme doit être globale. Appliquez donc, chers collègues de la majorité, la doctrine du Président de la République : toutes les réformes doivent être menées de front car l’ensemble du système est à refonder…

M. Jacques Domergue – Le Guen-Sarkozy, même combat ! (Sourires)

M. Jean-Marie Le Guen – Pour autant, il convient de fixer des priorités. Globale, la réforme ne saurait être simplement comptable. Ne refaisons pas une énième réforme de l’assurance maladie et n’aggravons pas celle de 2004. Réformons là où cela s’impose. Il faut remettre au cœur du dispositif la santé avant les soins et les soins avant la comptabilité.

M. Jean Leonetti – C’est à croire qu’il est plus proche de M. Sarkozy que de Mme Royal ! (Même mouvement)

M. Jean-Marie Le Guen – Dès lors, ne disons pas que le mur des prélèvements obligatoires est infranchissable. Ne disons pas non plus que nous ne demanderons pas des efforts supplémentaires à nos concitoyens, d’autant qu’ils sont les premiers à vouloir investir dans leur santé et ils ont bien raison ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC) La santé est en effet un élément majeur du développement humain et du potentiel économique d’une société moderne.

Quelles sont les réformes à conduire ? Elles sont relativement simples mais il faut avoir le courage de les engager. La première est d’ordre technique et consiste à opérer un transfert de charges et de compétences entre les professionnels de santé. C’est la priorité des priorités ! Il faut y procéder en s’appuyant sur une véritable politique de ressources humaines. Il convient de valoriser les parcours professionnels, ainsi que de requalifier et réinvestir un certain nombre d’acteurs.

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé – On le fait déjà !

M. Jean-Marie Le Guen – Qu’il s’agisse des infirmières ou des pharmaciens, beaucoup reste à faire !

M. Jean Leonetti – N’oubliez pas les pharmaciennes ! (Sourires)

M. Jean-Marie Le Guen – Arrêtons de traiter les pharmaciens comme des commerçants et reconnaissons les enfin comme des professionnels de santé à part entière.

La deuxième réforme urgente concerne l’exercice médical. Mettez fin, Madame la ministre, à la convention médicale actuelle : elle est dispendieuse et archaïque et elle ne fonctionne pas ! Elle est complètement à côté de la plaque ! Elle a été élaborée sous l’emprise de pressions corporatistes et clientélistes. Il faut que cela cesse car c’est du temps et de l’argent perdus. Parallèlement, interrogeons-nous sur ce que doit être une politique conventionnelle moderne. Vous tireriez grand profit, Madame la ministre, d’une relecture attentive des dispositions de la loi du 4 mars 2002 relatives aux relations entre l’assurance maladie et les professionnels de santé. Il faut en revenir à ce type d’organisation.

Troisième axe de réforme : enrichir la loi relative aux droits des malades d’un nouveau volet. Ce texte peut servir de base à la modernisation de notre système de santé. Si les droits individuels sont fondamentaux, il convient désormais d’introduire des droits collectifs et je suis pour ma part favorable à la reconnaissance d’un droit opposable à la santé. Il est temps de reconnaître que l’ensemble de nos concitoyens doivent disposer du droit d’accéder rapidement à des soins de qualité mais financièrement abordables, quel que soit leur lieu de résidence. La loi « droits des malades » doit être complétée en ce sens.

Enfin, tout cela ne se fera pas sans une volonté affirmée d’investir dans les moyens financiers nécessaires à la rénovation du système. À cet égard, j’insiste sur le fait que la « responsabilisation » des malades ne doit pas conduire à les culpabiliser ou à les pénaliser. On ne peut pas leur dire systématiquement qu’ils consomment trop, car s’il existe bien quelques poches d’hyper-consommation – du reste rarement imputables aux malades ! –, il y a surtout des poches massives de sous-consommation, trop de nos concitoyens parmi les plus fragiles renonçant désormais à se soigner. Au final, c’est l’état de santé général de la population qui risque de se dégrader encore ! Il faut cesser de galvauder la notion de responsabilité en reprochant globalement aux Français de se soigner trop. Par contre, il faut, par une pédagogie adaptée, les aider à mieux utiliser notre système de soin (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC).

M. Le Guen remplace M. Laffineur au fauteuil présidentiel.

PRÉSIDENCE de M. Jean-Marie LE GUEN
vice-président

M. Jean-Pierre Door – Voulue par l’UMP, cette séance d’initiative parlementaire est extrêmement utile.

D’abord, elle survient après la remise de rapports sur la réforme hospitalière, sur les inégalités territoriales et sur les agences régionales de santé, mais aussi après les États généraux de l’organisation des soins que Mme la ministre vient d’évoquer de manière détaillée. Ensuite, sans doute faut-il considérer cette réflexion comme le point de départ d’une réforme plus profonde, conforme au vœu du Président de la République et qui nous sera présentée dans quelques semaines.

Je souhaite témoigner ce matin de l’ampleur de la crise démographique ou, plus concrètement, de la crise de la médecine ambulatoire qui rend parfois difficile l’accès à un médecin. Nous devons relever le défi de la désorganisation démographique. L’enjeu est de faire reculer les déserts médicaux en apportant, partout sur le territoire, une réponse médicale de qualité à l’ensemble de la population. Chacun doit pouvoir bénéficier de soins adaptés, qu’il habite le centre d’Orléans ou Briare, chef-lieu de canton !

Plébiscitée pour la qualité de son système de santé, la France présente les plus fortes inégalités territoriales d’Europe. Notre collègue André Flajolet l’a du reste excellemment relevé dans son rapport. Parmi les régions les plus défavorisées, je peux témoigner du cas de la région Centre, que vous avez, Madame la ministre, récemment honorée de votre visite.

À ce jour, dans le Loiret, la densité en médecine générale est de 73,7 praticiens pour 100 000 habitants, contre 90 en moyenne nationale ; pour les spécialistes, la densité locale est de 66,3 contre 88. Nombre de bassins de vie recensés comme tels par la mission régionale de santé sont ainsi dépourvus de médecins, mais aussi de dentistes, d’infirmiers et de kinésithérapeutes. Je rappelle au passage un autre chiffre choc : en région PACA, il y a 194 médecins pour 100 000 habitants, et 137 dans le Loiret…

Nombre d’élus locaux s’arrachent les cheveux pour attirer d’hypothétiques médecins généralistes, souvent originaires d’Europe centrale ou d’Afrique. Même les cabinets de recrutement sont mobilisés, cependant que les conseils généraux proposent des aides financières à l’installation. Las, les résultats ne sont pas à la hauteur des espérances : dans la belle commune de Nogent-sur-Vernisson, quatre médecins en provenance de Roumanie, de Pologne et des Carpates se sont désistés au dernier moment.

On évoque parfois le manque d’attractivité des territoires. Je m’en étonne : le Loiret est proche de la région parisienne, des facultés ; il est sociologiquement, économiquement et géographiquement privilégié. Ses richesses touristiques et paysagères sont appréciées. Malgré cela, les professionnels de santé voient leurs conditions de travail se dégrader, non pas financièrement, mais du fait de l’anxiété, liée au surmenage, et de l’absence de vision de l’avenir, tant le leur que celui de leurs patients. La question de la couverture des besoins de soins auxquels il devront répondre demain est posée ; les attentes sont fortes, tant pour les soins de premier recours que pour les nombreuses activités que l’on propose de transférer aux médecins généralistes : prévention, dépistage, suivi des pathologies chroniques, intégration dans des réseau, permanence des soins.

Celle-ci s’est d’ailleurs effondrée, ce qui reporte les usagers vers les urgences ; toutefois certains médecins ont su s’organiser en « maisons médicales de garde » – nous leur en savons gré. Lors d’une visite que vous avez faite à Montargis, Madame la ministre, vous avez pu voir qu’une cinquantaine de médecins généraux ont organisé une permanence des soins dans un lieu unique, proche de l’établissement hospitalier. Ce n’est donc pas l’attractivité des territoires qui est en cause, mais bien la mutation subie par la médecine libérale généraliste de ville depuis vingt ans, sous la pression d’évolutions sociétales : disponibilité, rôle des médias, défiance vis-à-vis des médecins, recherche de temps libre et de vie familiale, tropisme vers les villes facilité par la liberté d’installation. La médecine – et je suis médecin – est un métier prestigieux, placé en tête par 58 % des Français. Mais la médecine généraliste est menacée et peine à se renouveler : en 2006, 40 % des places de médecins généralistes n’ont pas été pourvues.

Oui, il est indispensable de trouver les voies et les moyens de donner aux jeunes générations l’envie d’exercer la médecine générale, dès l’enseignement. Aujourd’hui, les difficultés ressenties d’accès au soin, le cloisonnement entre ville et hôpital, les carcans administratifs, le manque d’attractivité de la médecine générale, sans oublier surtout les difficultés des infirmières libérales : tout cela doit être réformé.

Vous avez raison de définir les missions du médecin de premier recours, et sa place dans la chaîne continue des soins, dans le dépistage, la prévention, l’éducation sanitaires. Vous avez raison de moderniser le système de santé ; le cadre d’une organisation fonctionnelle entre disciplines des professionnels de santé de proximité dans des pôles apparaît comme une avancée réelle. Il faut valoriser l’exercice de ces professions. Enfin, il ne faut plus ignorer qu’aucun bénéfice ne sera possible à moyen et à long terme sans une meilleure répartition sur notre territoire.

J’approuve votre volonté d’ouvrir ces chantiers, car notre système de santé est bien malade. Votre démarche sera sous les feux de l’actualité car il s’agit là d’une grande préoccupation des Français (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Jean-Claude Flory – Le sujet qui nous réunit aujourd’hui est une préoccupation majeure des Français, car nous sommes confrontés à de profondes évolutions démographiques et thérapeutiques.

La nécessité d’une performance accrue sur certaines pathologies, associée à une nécessaire sécurité médicale qu’il faut conforter sur tous les territoires, donnent toute sa légitimité à la réflexion engagée : les approches nationales, certes globales, doivent aussi tenir compte des particularités territoriales. Chaque territoire de santé, chaque bassin de vie doit faire l'objet d'une analyse spécifique en terme d'organisation de l'offre de soins. Certains critères doivent être pris en compte pour définir le type de services à apporter pour garantir un accès aux soins optimal à tous les femmes et hommes de nos territoires : si des critères quantitatifs, de densité d'offre et de population couverte, ont une certaine pertinence en zone urbaine, ils méritent d'être complétés par des critères plus qualitatifs, en particulier, en zone rurale et périurbaine.

En effet, certains territoires cumulent des caractéristiques qui influent sur le niveau d'offre de soins nécessaire ; je pense notamment à des espaces ruraux, enclavés, dont la population est âgée, où le tissu économique et social est parfois fragilisé, et où l’intensité des risques sanitaires est plus forte. Il est donc nécessaire d’intégrer les notions de temps d'accès aux premiers secours et aux premiers soins à domicile avant une éventuelle orientation vers les services hospitaliers adaptés.

Journées à rallonge, gardes à répétition, vacances sporadiques : le quotidien des médecins et des professionnels de santé dans certains territoires en voie de désertification médicale doit également être pris en considération. À cet égard, l'impulsion donnée par l'État et par vous-même, Madame la ministre, aux structures communes telles que les Maisons de Santé mérite d'être soulignée et amplifiée, même s’il s’agit d’une réponse encore partielle.

De surcroît, il est impératif de tenir compte du temps d'accès au plateau technique de soins le plus proche. Certains experts ont évoqué un temps maximal d’accès aux services d’urgences de 45 à 50 minutes. Vous avez vous-même parlé de 20 à 25 minutes pour 80 à 90 % de la population. La classification et donc l'offre de soins apportées sur chaque plateau technique doivent être analysées au plus près, suivant les particularités locales.

Pour prendre l’exemple – central et sensible – des services de soins critiques, trois niveaux généralistes existaient avant 2002 : la réanimation, les soins intensifs et la surveillance continue ; le niveau « soins intensifs » pouvait correspondre à certains établissements hospitaliers de taille intermédiaire. Or, le décret du 5 avril 2002 a limité à deux niveaux généralistes, réanimation et surveillance continue, la classification des services et donc l'offre de soins correspondante, avec à la clef des contraintes beaucoup plus lourdes pour les établissements concernés.

Ainsi, aujourd'hui, certains établissements hospitaliers de taille moyenne, éloignés d'autres centres référents, doivent assurer des soins qui excèdent les missions accordées aux seules unités de surveillance continue. Avant 2002, certains de ces établissements auraient pu relever d'une classification en soins intensifs généralistes ; aujourd'hui, ils ne peuvent pas relever de la seule classification en surveillance continue. Les risques que j’ai évoqués, et qui se cumulent parfois, motivent une classification adaptée en réanimation dans le cadre du texte réglementaire actuellement applicable. Afin de faire face à des données démographiques, géographiques et sociologiques spécifiques, ils devraient donc pouvoir bénéficier d’un niveau de soins correspondant à leurs contraintes, et donc aux besoins de santé publique de la population.

Parmi les 1 100 établissements publics de santé que compte notre pays, quelques dizaines d'établissements, probablement moins, entrent dans ce cadre. Ils ont été identifiés par des études récentes. Sur le plan budgétaire, et afin de conforter les plateaux techniques de ces établissements, une bonification de la tarification qui leur est appliquée me paraît opportune afin qu'ils remplissent convenablement leurs missions.

La recomposition de l'offre de soins en cours doit ainsi tenir compte des particularités des territoires, en particulier lorsque ceux-ci cumulent les contraintes.

Vous avez, Madame la ministre, exprimé à plusieurs reprises votre attachement au maillage hospitalier de proximité qui existe en France. Ensemble, il nous appartient de garantir l'égalité devant la santé, pour tous, et en tout point du territoire national (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Daniel Boisserie – Le rôle de l'école, c'est l’éducation ; cependant, parce qu'il existe un lien réel entre santé et éducation, et parce que les établissements scolaires sont fréquentés quotidiennement par tous les enfants, il appartient aussi à l'école, espace de socialisation et de pratique de la citoyenneté, de veiller à leur santé et de les aider à adopter des comportements qui la préservent. Santé et éducation constituent ensemble le socle sur lequel s'appuie une dynamique de la réussite.

La prise en compte de la santé des élèves ne peut être l'affaire de quelques spécialistes ; elle concerne bien au contraire l'ensemble de la communauté éducative. Il est impératif que le Gouvernement se donne les moyens, tant sur le plan financier que sur celui du personnel, de mener à l'école une véritable politique de santé.

Or nous constatons aujourd'hui – et ce n'est pas nouveau – un certain nombre de problèmes. Les syndicats d'enseignants, les associations de parents d'élèves, les services de l'Éducation nationale nous alertent : le déficit de médecins scolaires mais aussi d'infirmières, est considérable.

Permettez-moi de vous rappeler, Madame la ministre, les visites obligatoires à l'entrée en CP, en CE2 pour le poids et la taille, en sixième, ainsi qu'en première année de lycée professionnel. Dans de nombreux établissements, ces visites sont inexistantes ou largement décalées dans le temps. Il y a pourtant des cas particulièrement sensibles qui mériteraient d'être décelés très tôt, car le manque de soins peut engager l’avenir de ces enfants.

L'Éducation nationale manque de praticiens, et ce sont souvent les infirmières qui acceptent d'assurer certaines missions qui ne sont pas les leurs ; elles transmettent aux médecins les cas les plus graves et les plus urgents. L’offre n’est pas attractive : certains médecins sont recrutés comme vacataires, dans une situation de précarité. Il est aussi nécessaire d'offrir une rémunération acceptable, et je comprends parfaitement que certains préfèrent faire leur carrière ailleurs !

Et puis, Madame la ministre, vous qui êtes une élue de terrain, vous savez bien ce qui se passe pour les poux à l'école : rien ou presque rien !

En outre, les communes doivent souvent se substituer à l'État défaillant, afin d'éduquer les enfants. C’est le cas dans ma commune comme dans beaucoup d'autres : elle s'est engagée dans le programme « Ensemble Prévenons l’Obésité Des Enfants »…

Mme Roselyne Bachelot, Ministre – C’est très bien !

M. Daniel Boisserie – Merci (Sourires). Ce programme propose des actions concrètes et visibles de prévention, mises en place à l'échelle locale. Il s’agit de sensibiliser la collectivité, d’informer et de mobiliser les médecins, les enseignants et les parents afin de favoriser le dépistage précoce et proposer un outil d'aide à la prise en charge. Nous avons déjà des résultats extrêmement positifs.

M. Gérard Bapt – Très bien !

M. Daniel Boisserie – L'objectif est d'encourager la pratique d'activités physiques régulières et de sensibiliser la population à une alimentation diversifiée, conformément aux recommandations du programme national « nutrition santé ».

L'école doit assurer, tout au long de la scolarité, une éducation à la santé. Certes, il y a eu des avancées, comme le contrat-cadre conclu en 2003 entre les ministères de l'éducation et de la santé, qui a établi un programme quinquennal de prévention et d'éducation, ou encore, en 2006, le décret inscrivant le comité d'éducation à la santé et à la citoyenneté dans le pilotage de chaque établissement du second degré. Mais cela n'est pas suffisant. Le nombre d'actions pérennes reste limité et leur efficacité difficilement évaluable. Une approche globale de la santé scolaire doit être privilégiée, en lieu et place des actuelles interventions fragmentaires.

Plusieurs députés du groupe SRC – Très bien !

M. Daniel Boisserie – Il est nécessaire de créer des équipes pérennes en milieu scolaire, pour que les médecins scolaires ne soient plus des médecins volants ». Une politique de santé scolaire est un investissement sur l'avenir.

Permettez-moi également, en tant que président de conseil d'administration d'un centre hospitalier rural, d’appeler de nouveau votre attention, Madame la ministre, sur nos inquiétudes et nos attentes. Enfin, en ce qui concerne la carte de garde des médecins, je vous demande de ne pas retenir le seul critère de population, mais de tenir compte des distances et, par conséquent, des temps d'intervention des médecins. Ce n’est pas le cas dans les hypothèses étudiées actuellement, et nous comptons sur vous pour donner des instructions à cet égard (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC).

M. André Flajolet – Faut-il de nouvelles réponses pour redonner sens à notre démocratie sanitaire ? Comment répondre à la complexité des problèmes de prévention et d'accès aux soins, et réduire les inégalités culturelles et sociétales ? Ces questions sont au coeur du projet de loi « santé, patient et territoires », dont notre débat d’aujourd’hui constitue une étape préparatoire. Dans ce débat, je souhaite insister sur l'indispensable organisation de la prévention comportementale et nutritionnelle.

Je suis convaincu de la nécessité d’une politique dynamique de la prévention à tous les niveaux, dès la petite enfance, conduite en collaboration avec le tissu associatif et les collectivités. Cette politique doit être menée dans le cadre scolaire, pour un réel dépistage des difficultés d'origine buccodentaire, auditive ou visuelle et la promotion des bonnes pratiques sportives et nutritionnelles – car l'obésité est un fléau –, mais aussi au coeur des entreprises, pour lutter contre le stress, les troubles musculo-squelettiques ou le bruit, ou encore dans les réseaux de gérontologie, pour reculer le plus loin possible le recours à l'institution.

Parce que notre système de santé est lui-même malade, il nous faut construire de nouvelles infrastructures sanitaires, en créant des communautés de santé, en particulier dans les secteurs sous-denses, en inventant une gouvernance alliant l'État et les collectivités au sein des groupements régionaux de santé publique, en lançant des projets partagés pour gagner en efficacité et lisibilité, et réduire les coûts de réparation par une meilleure coordination des niveaux de prévention et de connaissance. C’est ainsi que nous nous conformerons à la définition de l'OMS, qui définit la santé comme « un état de complet bien-être physique, mental, social, qui ne consiste pas seulement en l'absence de maladie ou d'infirmité ».

Madame la ministre, votre administration comprend la santé et le sport ; je vous propose donc de créer un véritable métier de préventionniste ou d'éducateur médico-sportif, acteur de santé publique, de recréation du lien social et de sensibilisation aux règles sociétales. Le monde de la santé en a besoin, de nombreux étudiants ainsi que les collectivités et associations l'attendent, et le budget de la sécurité sociale s'en portera mieux à court terme.

La région Nord-Pas-de-Calais subit plus que d'autres les inégalités territoriales de santé.

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé – C’est vrai.

M. André Flajolet – Elle est disponible pour être un partenaire de votre projet d’avenir, pour l'expérimentation d'une vraie politique de prévention comportementale et nutritionnelle, le soutien aux communautés de santé dans les territoires confrontés à une insuffisante présence de soignants, la constitution de communautés hospitalières publiques, qui s’associeraient ensuite les secteurs privés non lucratif et lucratif, l'expérimentation de nouveaux métiers, comme les orthoptistes et les infirmières spécialisées, en particulier en santé mentale, la reconnaissance d’un statut pour les animateurs des plans territoriaux de santé, de nouvelles pratiques préventives en médecine du travail…

Nous manquons de spécialistes, qui ne restent pas en région : il nous faut une régulation en fonction des besoins. Nous manquons de généralistes dans certains secteurs géographiques : une prise de conscience, lors des études, de la nécessité d'assumer des missions de santé publique est nécessaire. Nos indicateurs de cancer ne sont pas bons : il faut renforcer les campagnes de dépistage. Ces constats supposent un projet partagé pour que l'État soit garant d'un égal accès aux soins, et les élus locaux attendent un soutien financier exceptionnel et durable afin d'effacer ces injustices. Je vous remercie de conclure avec nous ce contrat de confiance (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Pierre Morange – Les ordonnances de 1945 ont eu pour objectif de concrétiser la solidarité républicaine par la mise en place d'une sécurité sociale à vocation universelle où chacun cotise selon ses moyens et reçoit selon ses besoins.

Cette époque était marquée par une croissance forte, un taux de chômage faible, une entrée précoce dans le monde du travail, un départ à la retraite plus tardif, une espérance de vie moins élevée et un nombre de bénéficiaires plus limité. Depuis, la croissance a diminué de moitié, le taux de chômage a doublé, l'entrée dans le monde du travail est plus tardive, le départ à la retraite plus précoce, l'espérance de vie a augmenté de près de quinze ans, et le nombre des bénéficiaires s'est accru. Si le déficit chronique de l'assurance maladie a pu être réduit de moitié grâce à l'action du Gouvernement, le retour à l'équilibre s'impose cependant, pour préserver notre système de solidarité et éviter de transmettre une dette aux générations suivantes. La mondialisation de l'économie, avec le transfert des centres de production, la flambée des prix des matières premières et l'instabilité financière, fait peser un risque de récession sur nos sociétés développées. Le retour à l'équilibre de nos comptes sanitaires et sociaux n'en est que plus urgent.

La complexité de notre système de soins, son cloisonnement, son défaut de coordination, le vieillissement démographique, l'accroissement du coût de la technologie ont été maintes fois soulignés, mais les nombreux plans de sauvetage proposés n'ont pu que très partiellement répondre à ces défis.

Face à cette situation le texte qui nous sera présenté à l'automne ambitionne d’apporter une solution durable. Il proposera ainsi un dispositif de santé publique cohérent afin que la prévention ne soit plus le parent pauvre du système ; une coordination réelle entre les soins ambulatoires et hospitaliers permettant une gradation du parcours de soins, associé à un décloisonnement des secteurs sanitaire et médico-social ; une clarification de la gouvernance hospitalière ; une « protocolisation » effective des stratégies diagnostiques et thérapeutiques, avec la responsabilisation des prescripteurs, associée à une prise en considération de la formation ainsi qu’à une meilleure répartition des tâches, pour remédier à la désertification médicale ; enfin, une régionalisation de l'organisation de notre système de soins afin de rendre possible une meilleure coordination des acteurs. La vision globale de ce projet est un gage de succès. Toutefois, sa mise en oeuvre nécessitera du temps et la rationalisation des moyens humains, techniques et financiers qui la sous-tend ne contribuera à l'équilibre des comptes qu'à moyen terme. Il conviendra donc que le projet de loi de financement pour 2009 propose des mesures de court terme.

De nombreux rapports ont souligné la prise en charge remarquable de l'assurance maladie obligatoire, à hauteur de 77 % – les complémentaires assurant près de 13 % des dépenses –, et en même temps l'importance du reste à charge pour les patients, notamment pour les frais d'optique et les soins dentaires. Une réflexion s'impose donc, à mon sens, sur la possibilité de transférer quelques points de l'assurance maladie obligatoire vers les complémentaires, d’augmenter la prise en charge en matière dentaire et optique, ou de renforcer la complémentaire santé – sur ce dernier point, le risque d'une majoration des primes d'assurance complémentaire pourrait être relativisé à la lumière du récent rapport de la Cour des comptes. C'est ainsi que nous pourrons assurer l'égal accès à des soins de qualité pour tous les Français (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Christian Paul – La qualité d'un système de santé qui se prétend l'un des meilleurs au monde peut se briser net quand les inégalités se creusent. Le système de santé craque de toutes parts. Il faut le réformer en profondeur.

Les crises frappent toujours les plus faibles. Devant la santé, la prévention et les soins, les Français sont inégaux, et ce pour trois raisons. Pour des raisons financières, tout d’abord : sur la liste noire de cette législature, figureront les franchises, les tarifs sans limites quand le privé devient le seul recours, les écarts d'honoraires et de rémunération les plus indécents, signes d'un système qui a perdu son gouvernail et son éthique. Pour des raisons culturelles, ensuite, parce que le maillage de la prévention, de la médecine scolaire, de la médecine du travail ont régressé. Enfin, pour des raisons géographiques : la désertification s’accentue dans les campagnes mais aussi dans les villes.

Vous demandez des propositions, Madame la ministre : nous en avons. Le groupe socialiste aborde ce débat avec un plan de bataille contre le désert médical. La formation, l'organisation, les rémunérations, le financement : ce doit être un chantier global.

L'État doit prendre au moins sept engagements devant les Français, avec le concours de l’assurance maladie. Tout d’abord, créer des normes de délai d'accès aux soins est vital. La loi est muette sur ce point. Les Français réclament à juste titre qu’elle dise clairement qu'on ne saurait être à plus de 30 minutes d'un service d’urgence ou à plus de 45 minutes d'une maternité. Et cela vaut pour l'ensemble de l'offre de soins.

Le second engagement doit porter sur un pilotage régional qui tourne le dos à l'impuissance et à l'autocratie. Que les agences régionales mettent fin à l'empilement des structures est une bonne chose, mais ce ne doit pas être pour lui substituer un pouvoir sans partage et « bunkerisé ». Les collectivités locales et les usagers y ont leur place ; nous en débattrons.

Troisièmement, il est urgent d’élaborer une stratégie des formations en assouplissant les numerus clausus pour mieux les adapter aux besoins des régions, et non aux seuls besoins des CHU. Je me réjouis de la création d’une filière universitaire de médecine générale, longtemps maltraitée à l’université, au point que plusieurs générations d’étudiants l’ont fuie. Mais, les étudiants devraient effectuer des stages de plus longue durée en services ambulatoires et il faut accroître le nombre d’enseignants titulaires, car nous sommes encore loin du compte. Hélas, j’ai cru comprendre que Mme Pecresse s’y opposait.

Ensuite, priorité doit être donnée aux installations dans les zones déficitaires, à condition de proposer des projets de zonage équilibrés, contrairement au vôtre, Madame la ministre. En outre, l’aide que vous consacrez aux maisons de santé est dérisoire : elle ne couvre même pas la TVA, que les collectivités qui les construisent reversent à l’État ! Il faut inciter, mais contraindre aussi si nécessaire. La liberté d’installation n’est pas un dogme. Le recours à la coercition ne peut concerner que le secteur 2 là où il est exclusif, ainsi que les cas de dépassements d’honoraires et les disciplines où le nombre d’étudiants dépasse les besoins. Voilà qui serait faire preuve de courage, plutôt que de dissuader du choix de la médecine générale les jeunes qui doutent.

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé Pourquoi ne l’ont-ils pas dit pendant la grève des internes ?

M. Christian Paul – Cinquièmement, les généralistes, hussards abandonnés de notre système de santé, attendent davantage de reconnaissance. C’est en revalorisant leur statut, leurs missions et leur rémunération que la médecine de premier recours redeviendra attractive.

Sixième engagement à prendre : la mutation radicale des conditions d’exercice des professions de santé. L’heure est aux regroupements et aux réseaux, aux délégations et au partage des tâches. La rémunération doit évoluer vers une forme mixte associant au paiement à l’acte un forfait permettant de remplir des missions d’intérêt général…

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé Nous sommes donc d’accord !

M. Christian Paul – …telles que la prévention, le dépistage ou la permanence de soins – que M. Mattei a rendue facultative en 2003, contribuant ainsi à la création des déserts médicaux.

Plusieurs députés du groupe SRC – Très juste !

M. Christian Paul – Enfin, septième engagement nécessaire : l’hôpital doit reprendre confiance. Aujourd’hui, il est asphyxié sur les plans humain et financier. Chaque hôpital public déstabilisé enfonce un peu plus nos territoires dans le désert, car les médecins s’en détournent. Trouvons le juste équilibre entre proximité et sécurité, plutôt que de restructurer à l’aveugle comme vous le faites ! Les Français n’acceptent plus les coupes à la hache que vous pratiquez avec beaucoup d’amateurisme technocratique, en organisant une concertation de façade et en faisant le mal au nom du mieux. Les restructurations brutales cassent des équipes médicales pourtant plébiscitées par la population, sans que leur savoir-faire ait été loyalement évalué. Des dizaines de petits hôpitaux, de Carhaix à Lannemezan, de Châtillon-sur-Seine à Clamecy, souvent fragilisés, sont portés par la qualité et les compétences de leurs personnels qui n’ont pas à rougir de la comparaison avec les plus grands hôpitaux.

L’honneur de la politique, Madame la ministre, est de se rendre sur le terrain et d’y affronter les difficultés sans se protéger derrière les paravents d’un pouvoir que comme moi vous savez éphémère. Votre mission est certes difficile, mais vous seriez davantage respectée si vous saviez échapper à la pensée unique qui nous impose la concentration hospitalière et le poids des clientélismes. Les Français attendent une action énergique pour lutter contre le désert médical ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC)

M. Jacques Domergue – Je me réjouis que Mme la ministre repousse toute idée de nouvelle réforme, car celle de 2004 n’est pas encore entièrement mise en œuvre – je pense au dossier médical partagé, par exemple.

Notre système de santé coûte cher, et pourtant il ne répond plus aux besoins sanitaires de nos concitoyens. Le projet de loi qui nous sera soumis doit aboutir à la maîtrise médicalisée des dépenses de santé, tout en garantissant l’accès à des soins de qualité pour tous, y compris les plus modestes de nos concitoyens.

Pour ce faire, certaines dérives graves sont à corriger, en matière de démographie médicale, par exemple. Il n’y a jamais eu autant de médecins, et pourtant les déserts sanitaires progressent ! Et pour cause : il n’existe pas de gestion territoriale des effectifs médicaux. La liberté d’installation à laquelle chacun est attaché ne justifie pas que les médecins puissent s’installer n’importe où, et je rejoins sur ce point, avec plus de modération, M. Le Guen. Le conventionnement collectif montre ses limites : comment l’assurance maladie peut-elle autoriser des médecins à s’installer dans des zones déjà saturées, alors que les incitations ne portent pas leurs fruits dans les zones lacunaires ? Une gestion des effectifs à l’échelle nationale est indispensable.

Dès lors que le médecin généraliste est la plaque tournante de notre système de soins, il faut en définir les missions. Il ne sera jamais compétent dans tous les domaines, cela va de soi, mais son rôle est primordial, en particulier parce qu’il oriente les patients vers les médecins spécialistes. À ce titre, il faut renforcer la formation et les stages de terrain.

Ensuite, il faut encourager les transferts de compétences pour utiliser au mieux les ressources disponibles. Les ophtalmologistes, par exemple, sont débordés ; pourquoi ne pas solliciter les compétences des optométristes ? De tels transferts permettraient de dégager du temps médical et, ce faisant, raccourciraient le temps d’accès aux soins.

En matière d’organisation territoriale des hôpitaux, il me semble que M. Paul a tort : la technicité des matériels interdit de tout faire partout.

M. Christian Paul – Personne ne demande cela !

M. Jacques Domergue – Il vaut mieux investir dans la construction de routes ou dans les rotations d’hélicoptères, plutôt que de maintenir artificiellement une maternité comme celle de Clamecy dont certains des médecins vivent à l’étranger.

M. Christian Paul – C’est faux ! Quelle incompétence !

M. Jacques Domergue – Non : vous défendez l’indéfendable !

Enfin, il faut rapprocher les cultures respectives des secteurs public et privé. Toutes deux ont des atouts comme des faiblesses : utilisons les uns pour mieux vaincre les autres ! Le décloisonnement est indispensable, en matière de rémunération, de financement et d’activité. Si l’activité à l’acte est, par nature, inflationniste, l’activité salariée, quant à elle, n’incite pas au dépassement de soi.

M. Christian Paul – Dangereux idéologue !

M. Jacques Domergue – Voilà pourquoi il faut mélanger les deux systèmes de rémunération sur une base contractuelle et régionale.

M. Christian Paul – Nous diffuserons votre intervention dans tous les territoires ! C’est incroyable !

M. Jacques Domergue – Je suis convaincu que l’on peut améliorer la qualité et l’accès aux soins pour tous sans augmenter les prélèvements sociaux, mais en réorganisant avec courage notre système de santé ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Marc Bernier – Ce débat témoigne de l’urgence qu’il y a à réorganiser notre système de santé. L’équité de l’offre de soins est au cœur de mon action de parlementaire. Au nom du groupe d’études sur les professions de santé, j’ai publié un rapport sur le sujet, dont plusieurs propositions ont été reprises dans le projet de loi de développement des territoires ruraux.

En avril dernier, les états généraux que vous avez organisés, Madame la ministre, furent un succès. Le constat est partagé par l’ensemble des acteurs de terrain : notre population vieillissante requiert davantage de soins mais l’offre est mal répartie sur le territoire et les professionnels, particulièrement les généralistes, éprouvent un malaise à force d’être soumis à d’excessives contraintes administratives et de ne pouvoir mener de front leur vie professionnelle, leur vie familiale et, le cas échéant, leur formation. En outre, la médecine générale est mal perçue par les étudiants, qui ne choisissent souvent cette spécialité que par défaut.

Les Français doivent pouvoir consulter les praticiens à proximité de leur domicile et dans les meilleurs délais. Songez qu’il faut parfois plusieurs mois avant de consulter un ophtalmologiste, et plusieurs jours pour un généraliste, sans parler des visites à domicile, devenues une denrée rare ! Enfin, à quoi bon négocier âprement les tarifs de base de l’assurance maladie si aucun médecin ne les applique ? (Approbations sur plusieurs bancs du groupe SRC)

En mars dernier, j’ai été nommé rapporteur de la mission d’information sur l’offre de soins sur l’ensemble du territoire, qui est chargée de formuler des propositions opérationnelles en vue de la loi « santé, patients, territoires ». Nous travaillons de manière constructive avec son président, M. Paul, par-delà les clivages politiques. Les auditions passionnantes que nous menons – et qui ont suggéré à M. Paul certaines des propositions qu’il a faites pendant son intervention – illustrent l’urgence d’agir.

Sans vous livrer le détail de nos réflexions, je peux vous donner – à titre personnel – certaines des grandes orientations sur lesquelles nous travaillons. Il faut impérativement revaloriser la spécialité de médecine générale. Vous l’avez d’ailleurs dit lors des États généraux de la santé, Madame la ministre : vous envisagez d'inscrire dans le code de la santé publique une définition de la « médecine générale de premier recours », du métier de généraliste et du SROS ambulatoire.

On pourrait aussi proposer aux médecins généralistes des « contrats » ou des « mandats de santé publique ». Nous avons constaté lors des auditions que les étudiants en médecine étaient beaucoup moins attachés que leurs aînés au paiement à l'acte.

M. Gérard Bapt – C’est nouveau.

M. Marc Bernier – Il faut encore modifier la formation des professionnels de santé, pour les rapprocher le plus tôt possible des zones déficitaires. et pour leur faire découvrir la médecine générale. Pour cela, on pourrait développer les stages de deuxième et de troisième cycle auprès des médecins libéraux, mais aussi des maisons de santé pluridisciplinaires, des réseaux de santé et des structures d'hospitalisation à domicile.

Il faut dynamiser la politique de recrutement dans les zones sous-dotées. Qu'entend-on par zones déficitaires ? Le nombre de médecins par habitant n'est pas un critère suffisant (« C’est vrai ! » sur les bancs du groupe SRC). Il faut tenir compte de l'âge des médecins de plus de 55 ans, du nombre d'actes par praticien, de l'âge de la population, notamment des plus de 75 ans…

M. Michel Vergnier – Très bien !

M. Marc Bernier – …de l’éloignement du centre hospitalier structurant…

M. le Président – Concluez, cher collègue.

M. Marc Bernier – Nous sommes sur un sujet majeur : cela mérite bien quelques minutes de plus.

M. le Président – Il fallait le dire à votre groupe.

M. Jean Leonetti – Monsieur le Président, vous avez dépassé votre temps de parole ! Soyez indulgent !

M. Marc Bernier – Il faut dissocier le fait de venir exercer et celui de s'installer et développer les statuts alternatifs à l'installation. Nous pourrions généraliser ce que nous avons fait en Mayenne, où la mission doit se rendre cet après-midi. Grâce à un plan départemental associant élus et professionnels, nous avons pu briser les tabous et innover. L'essentiel de ce plan n'est pas dans la construction des structures, mais dans le projet médical qui le fonde, avec trois axes principaux : couvrir les besoins de santé à l'échelle d’un bassin de vie, autour d’un hôpital local – c’est ce qu’on appelle un pôle de santé ; une politique en faveur de l'accueil des stagiaires ; une stratégie de communication qui passe par l’instauration d’un guichet unique.

Je n’ai pas parlé des mesures contraignantes, car j’estime qu’il ne faut pas en arriver là.

La future loi santé, patients et territoires - que beaucoup nomment déjà loi Bachelot - s’attachera à moderniser notre système de soins pour garantir l’égal accès de tous à des soins de qualité tout en offrant de meilleures conditions de vie et de travail à nos médecins. C’est une chance historique. Je serai à vos côtés pour la défendre à l'automne prochain (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et sur quelques bancs du groupe SRC).

M. le Président – J’invite à nouveau instamment chacun à respecter son temps de parole.

M. Simon Renucci – Je serai dans les temps, Monsieur le président.

L'hôpital public vit un paradoxe. Il jouit d'une grande confiance de la population – dans un sondage de juin 2007, 81 % des sondés s’en disaient satisfaits. Et pourtant, la situation n'a jamais été aussi grave – baisse de moral, difficultés de fonctionnement, crise financière. Ce paradoxe s'explique en grande partie par le dévouement exceptionnel des personnels hospitaliers. Mais leur sens aigu du service public ne suffit plus à masquer la crise.

Il est donc plus qu'urgent de prendre les dispositions nécessaires pour relever les défis et engager la modernisation de l'hôpital, en sachant que les réformes ont un coût financier.

Disons-le tout net : si l'hôpital public demeure un pilier de l'offre de soins de qualité dans notre pays, il ne se sauvera pas tout seul. C’est l'offre de soins dans son ensemble qui est à repenser. L’hôpital doit aller plus loin en matière de réorganisation. Mais il y a des conditions préalables au succès de sa démarche. Il faut que les pouvoirs publics assument leurs missions de régulation – et d’abord en réglant la question de la démographie médicale. Ensuite, l'hôpital a besoin de coordination et de cohérence territoriales. Les futures agences régionales de santé doivent s'attacher à rendre efficientes les communautés hospitalières de territoire. Le dispositif doit permettre de regrouper les forces, de mutualiser les compétences et d'apporter une réponse aux besoins de la population : permanence des soins et tarifs opposables.

Les ARS doivent assurer une réelle coopération entre l’assurance maladie et l’État, l’hôpital et les médecins libéraux et le secteur médico-social.

Il faut également que les perspectives financières permettent à l’hôpital public d'assurer ses missions de service public. Il est dramatiquement sous-financé. Le déficit programmé est évalué à 800 millions et l'ONDAM hospitalier est très en deçà des besoins. Nous espérons que la préparation du PLFSS pour 2009 marquera une évolution sur ce point. La santé a un coût : nos concitoyens doivent le comprendre et notre système de protection l'assumer. Mais ce coût doit être réparti équitablement entre secteur privé et secteur public.

Prenons l’exemple de la T2A. L’hôpital assume seul les missions d'intérêt général, quand le secteur privé se trouve libre de contraintes. Cette réforme a plongé les établissements dans des situations indescriptibles. La convergence avec le secteur lucratif est un leurre. Je propose une piste : financer sur une base forfaire les missions de service public.

L’hôpital public doit aller plus loin dans la rénovation de son organisation. Depuis une dizaine d'années, ses personnels sont confrontés à un déferlement de réformes structurelles : mise en place des ARH, accréditation, certification, lois de sécurité sanitaire, T2A, réforme de la gouvernance…

Pour assurer le succès de la réforme, il faut engager celle de l'offre de soins et assumer le coût financier de la santé devant l'opinion publique.

Si elles sont remplies, ces conditions aboutiront à la restructuration de l'offre hospitalière. Bien des aspects stratégiques du système de soins sont concernés.

Seules ces réformes permettront l'allocation optimale effective des ressources de l’assurance maladie. Cette restructuration devra tenir compte des contraintes techniques, mais aussi des aspirations de nos concitoyens, qui attendent des soins de qualité sur l'ensemble du territoire.

En ce qui concerne l’amélioration de la gestion interne, le rapport Larcher ouvre des pistes intéressantes.

Nous sommes favorables à la simplification du fonctionnement administratif des établissements, qui doit déboucher sur plus d'autonomie donc de responsabilité des différents acteurs. On doit par exemple pouvoir rapprocher les investissements publics et privés dans le cadre des groupements d'intérêts lorsque cela est nécessaire. Il faut simplifier et clarifier les structures de fonctionnement de l'hôpital, dans la concertation avec les partenaires sociaux.

M. le Président – Il faut conclure.

M. Simon Renucci – Plus d’autonomie implique plus de responsabilités. C’est dans cette direction qu'il faut engager l'hôpital.

C’est avec beaucoup d’humilité que j’aborde ce sujet : avant d’être de gauche ou de droite, les malades ont surtout besoin d’être soignés ! (Applaudissements sur plusieurs bancs)

M. Philippe Vitel – Gérard Larcher a récemment remis au Président de la République son rapport sur les missions de l’hôpital. « L’hôpital public a de vrais atouts, estime-t-il : une activité diversifiée, des pôles d’excellence, un personnel investi et motivé par les valeurs du service public. Son rôle dans l’offre de soins est majeur. Il rencontre toutefois de réelles difficultés : une situation de concurrence de fait avec les autres offreurs de soins, accrue par la convergence des modes de financement, exige de veiller au maintien de son dynamisme et de renforcer sa capacité d’adaptation. » Il évoque également des craintes quant à l’attractivité de l’hôpital public, des difficultés de gestion et des rigidités en matière de ressources humaines. Il propose de faire évoluer les règles de gouvernance interne ; d’assouplir les règles de gestion en responsabilisant davantage les gestionnaires et en renforçant les exigences en matière de sincérité des comptes ; d’améliorer l’attractivité des métiers de l’hôpital en permettant aux hôpitaux de développer une gestion dynamique des ressources humaines.

Dans son rapport sur la sécurité sociale de septembre 2007, la Cour des comptes a dénoncé le manque de fiabilité des comptes des hôpitaux, évoquant des déficits masqués, des excédents occultés, des actifs et des passifs méconnus et surtout une insuffisance des outils de comptabilité analytique, alors même que la réforme de la tarification suppose une connaissance fine des coûts internes.

Elle a également épinglé la politique d’achat du médicament, les écarts de prix entre établissement allant de 1 à 3, voire 10, révélant des modalités de négociation insatisfaisantes. Elle note que les comportements d’achat sont souvent plus professionnels dans le secteur privé.

En mai 2006, la même Cour des comptes dénonçait déjà l’opacité et la lourdeur de la gestion des ressources humaines, révélant que l’hôpital public était incapable de comptabiliser précisément ses effectifs et que les 35 heures avaient conduit à la création de 38 000 postes non médicaux.

M. Christian Paul – Quelle obsession !

M. Philippe Vitel – C’est la réalité, cher collègue.

Malgré cela, certains établissements manquent de personnels : les disparités sont énormes selon les hôpitaux et les régions, voire les services d’un même établissement. Les dépenses de personnel, qui représentent plus de 70 % des dépenses dans le public contre 50 % dans le privé, représentent plus du quart des charges de l’assurance maladie.

Une profonde réforme de l’hôpital public est nécessaire. Aucune convergence ne sera possible s’il ne réalise pas d’importantes économies, qui passent par une rationalisation de la gestion des personnels.

En ce qui concerne les recettes, les principes de la T2A sont conditionnés par des préalables méthodologiques : une plus grande médicalisation de la mise en œuvre du financement, une meilleure équité du traitement des établissements, une plus grande responsabilisation des acteurs, un développement des outils de pilotage médico-économiques.

Tous les hôpitaux publics ne sont pas inflationnistes, et toutes les cliniques privées ne sont pas vertueuses. Mais l’analyse des données de 30 groupes homogènes de séjours qui totalisent le plus de dépenses – 33 % des séjours et 24 % de la facture – montre que l’échelle publique coûte en moyenne 60 % de plus que l’échelle privée. Une convergence « intelligente » peut donc avoir un impact significatif sur les dépenses de santé, à condition qu’elle permette une diminution des dépenses et non une simple redistribution des cartes à budget constant.

L’IGAS retient l’hypothèse de la convergence vers le secteur le plus efficace, à ses yeux le secteur privé. Mais il faut tempérer cette affirmation, et ne pas oublier de revaloriser certains actes pratiqués dans le secteur privé pour éviter leur abandon et le transfert vers le public à un coût plus élevé. La vraie convergence tarifaire nécessite d’étudier pour chaque groupe homogène de séjours le prix de revient réel des actes, ce qu’on n’a jamais fait, et de définir la marge nécessaire à un établissement, privé ou public, pour couvrir ses charges et financer ses investissements. Cela n’exclut pas des dotations spécifiques pour faciliter l’égalité d’accès aux soins sur tout le territoire.

Nous avons besoin à la fois d’un hôpital public efficace et de qualité et d’un secteur privé qui assure l’équilibre entre la qualité du service et l’efficacité économique. De nombreux hôpitaux publics sont prêts à relever le défi de l’efficacité et de nombreuses cliniques privées à accepter l’égalité de missions, en contrepartie d’une égalité de moyens. Une saine concurrence permettra d’utiliser au mieux les deniers publics. Nous donnerons ainsi tout son sens à l’article 15 de la déclaration des droits de l’homme, selon lequel la société a le droit de demander compte à tout agent public de son administration (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Philippe Boënnec – La permanence des soins inquiète beaucoup de Français et d’élus locaux – inquiétude justifiée ici, excessive ailleurs. Mais à l’évidence, il existe des zones noires de blouses blanches, dans les campagnes et les périphéries des villes.

M. Gérard Bapt – Dites-le à M. Mattei.

M. Philippe Boënnec – Pour la permanence des soins, il y a bien une médecine des villes et une médecine des champs, et on juge souvent cette permanence fragile, coûteuse et peu fiable. La médecine de premier secours souffre d’une grande désaffection, parce qu’elle est exigeante peut-être, mais aussi parce que le corps médical s’est féminisé, et en raison de nouvelles habitudes et d’un manque de reconnaissance.

L’instauration des agences régionales de santé doit clarifier les relations entre l’État et l’assurance maladie. Regroupant les différents acteurs, les agences définiront un schéma régional avec une enveloppe financière et un souci de l’évaluation et des résultats.

Dans cette optique, je suggère de favoriser le contrat, et de l’élargir de façon pragmatique à tous les professionnels sur un territoire : médecins libéraux, mais aussi de SOS médecins, du SDIS, ou correspondant du SAMU, jeunes retraités, praticiens hospitaliers en complément, internes des urgences pendant la nuit ou pour les actes médicaux de nature administrative.

Mais j’ai aussi un certain nombre d’interrogations. Une fois les agences créées, comment se fera l’articulation avec le préfet qui exerce des responsabilités concernant la sécurité sanitaire et les réquisitions ? Faut-il un numéro d’appel unique, et lequel ? Pour assurer la régulation, faut-il associer au libéral un urgentiste ? Le conseil de l’ordre des médecins doit-il établir une liste des médecins assurant la permanence ? Envisagera-t-on de déléguer des tâches, par exemple aux infirmières ? Et n’oublions pas qu’une pédagogie adaptée et une bonne information permettraient de mieux associer le patient.

Je vous remercie pour les précisions que vous voudrez bien nous donner, Madame la ministre, et je salue votre franchise intellectuelle.

Mme Marie-Odile Bouillé – Franchise, c’est le mot !

M. Philippe Boënnec – Députés et sénateurs, qui ont déjà apporté leur contribution, seront à vos côtés. Connaissant votre compétence et votre détermination, je vous fais toute confiance pour améliorer notre système de santé (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Gérard Bapt – Le médecin généraliste, qui est pourtant le pivot du parcours de soins, fait partie de la catégorie des chefs d’œuvre en péril. Il faut promouvoir et favoriser l’exercice de cette médecine, grâce à l’exercice de groupe, la diversification des modes de rémunération, le transfert de compétences, la télémédecine, la continuité des soins avec l’hôpital.

Mais il faut aussi la considérer comme une spécialité à part entière, ce qui n’est pas acquis. Par exemple, l’épreuve de force en cours à la CNAM pour faire passer la consultation de C en CS n’améliore pas le climat. S’agissant des études, on nous avait annoncé en 2006 la mise en place du stage de médecine générale en deuxième cycle. Le Quotidien du médecin annonçait récemment que cette mise en place serait impossible. En raison du faible nombre d’enseignants associés, cela paraît évident. Nous avons voté il y a quelques mois en faveur de la mise en place de la filière universitaire de médecine générale, et à l’unanimité – car l’opposition peut être constructive. Mme Pecresse a annoncé la création en 2008 de 8 postes d’enseignants associés, soit 3,5 équivalents temps plein, et aucune création de poste de chef de clinique de médecine générale, alors qu’ils ne sont que 12 actuellement. Au rythme de 8 créations par an, il faudrait deux siècles pour amener l’encadrement de la médecine générale au niveau des autres spécialités.

M. Jean Leonetti – Ce n’est pas le sujet !

M. Gérard Bapt – Vous parlez de 50 postes en quatre ans. Il ne faudrait plus que 25 ans pour la remise à niveau. Mais j’imagine que cela se ferait par redéploiement. Il faudra vraiment avoir la volonté de l’imposer.

Sur le plan de la démographie médicale, la discipline est sinistrée, on l’a dit. Les généralistes ont en moyenne 52 ans. Ils sont encore 50 000, mais leur nombre diminue depuis trois ans et 5 % d’entre eux, soit 2 500, prendront leur retraite chaque année au cours des dix ans à venir. Or en 2004, 370 jeunes seulement se sont installés. On a bien porté le numerus clausus à 3 500 pour le diplôme d’études supérieures de médecin générale, mais un tiers seulement s’installeront vraiment en médecine générale, soit au mieux 1 100 médecins dans six ans. Pour parer à la catastrophe annoncée, il faut prendre des mesures pour que 80 % de cette cohorte d’étudiants en médecine générale s’installent.

Ce n’est pas le chemin qu’on prend. Les collectivités locales font des efforts pour attirer les jeunes médecins. Cela ne suffira pas. Il faut valoriser l’exercice de la médecine générale pour le rendre plus attractif. Pour cela, il faut faire du médecin généraliste l’acteur de base de la politique de la santé, en réorientant celle-ci d’une logique de soins vers une approche de « santé durable » faisant plus de place à la prévention, à l’éducation sanitaire, à la santé au travail – je n’aborde pas le problème de la santé à l’école. Dans toutes ces approches nouvelles, le généraliste est un élément décisif.

Nous avions voté pour la création de la filière universitaire de médecine générale. Malheureusement, les moyens ne sont pas au rendez-vous. Néanmoins, chaque fois que vous proposerez des mesures positives, nous les voterons (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC).

Mme Isabelle Vasseur – Les Français se préoccupent de la pérennité du système de santé. Celui-ci n’assure plus vraiment une réponse solidaire et équitable en ce qui concerne l’accès aux soins. La croissance exponentielle de ses dépenses devient insoutenable pour le budget. De plus, la gestion partagée entre l’État, l’assurance maladie et les collectivités territoriales est inefficace.

Les agences régionales de santé, que vous défendez avec détermination, devraient assurer un pilotage unifié et plus responsable du système, en structurant mieux l’offre ambulatoire et en réorientant l’offre hospitalière au profit du médico-social.

Il me semble en effet indispensable de donner à ces ARS un large périmètre, incluant tout le champ de la santé, y compris la médecine de ville et surtout le médico-social.

M. Jean Leonetti – Tout à fait.

Mme Isabelle Vasseur – Ce serait un moyen d’apporter aux hospitaliers un savoir-faire utile pour prendre en charge les personnes âgées et les personnes handicapées. Cette meilleure organisation des parcours de soins éviterait l’engorgement des services d’urgence, et les hospitalisations inutiles, faute de places dans les structures médico-sociales.

Ces problèmes résultent notamment d’un manque d’articulation entre les secteurs sanitaire et médico-social. Voilà pourquoi, comme de nombreux acteurs, je suis convaincue qu'un pilotage conjoint de l'hôpital et des structures médico-sociales d'aval rendrait le parcours des patients plus fluide et permettrait des économies substantielles. Ces deux secteurs – sanitaire et médico-social – doivent constituer un champ professionnel cohérent, reflétant une conception globale de la santé publique.

À cette fin, il faudrait orienter les personnes âgées vers le court séjour, le soin de suite, les unités de soins de longue durée, la géronto-psychiatrie, les établissements pour personnes âgées dépendantes ou les accueils de jour pour malades d’Alzheimer ; en outre, afin de mieux prendre en charge le handicap psychique, nous devons mieux articuler psychiatrie, maisons d’accueil spécialisées et foyers d'accueil médicalisés.

La création de ce pôle sectoriel médico-social au sein des ARS n’est pas sans conséquences financières, car le secteur social et médico-social compte quelque 35 000 établissements et services, des plus lourds – dont les EHPAD – aux plus légers, proches des structures de services à la personne. Comme le propose M. Philippe Ritter dans son rapport, on pourrait placer sous la tutelle des ARS ceux d’entre eux qui sont entièrement ou partiellement financés par l'assurance maladie, c’est-à-dire, pour l’essentiel, les établissements et services de prise en charge des personnes âgées et handicapées.

En outre, on pourrait différer l’intégration du secteur médico-social au périmètre des ARS afin de lui laisser le temps de se restructurer, notamment par la réforme de la tarification, la professionnalisation des acteurs ou la restructuration autour de la caisse nationale de solidarité pour l'autonomie.

Enfin – vous l’avez dit, Madame la ministre –, il est essentiel de valoriser les professionnels paramédicaux, de les former à la prise en charge des malades et de restituer à leurs métiers leur attractivité. Cela suppose de recruter des personnels qualifiés, mais également de réformer les formations initiales – vous avez mentionné le LMD – et continues, et d'œuvrer à la professionnalisation de tous les personnels salariés. À cette fin, il faudrait notamment réduire le coût des études préparant aux métiers d'aide-soignante ou de masseur-kinésithérapeute ; promouvoir l'apprentissage pour les plus jeunes et la formation en alternance pour les adultes ; développer la validation des acquis de l'expérience ; enfin, valoriser par des campagnes de communication la richesse et la diversité de ces métiers, et leur apport essentiel à la collectivité nationale.

Nous devons également redonner confiance à ces personnels en les protégeant des difficultés inhérentes à leur métier, notamment le stress et l’épuisement, grâce à la concertation, au soutien et à la création d'organisations du travail et de parcours professionnels. Membre de la mission d'information sur la pénibilité au travail conduite par l’excellent M. Poisson, dont le rapport vient d'être rendu public, je suis particulièrement attentive à ces questions. Enfin, nous devons fidéliser les personnels afin de pérenniser la qualité des services sanitaires et sociaux.

Parce que la recomposition de l'offre hospitalière au profit du secteur médico-social est essentielle à l'avenir de notre système de santé, j’espère que le débat relatif à la création des ARS permettra de donner suite à ces propositions (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Patrice Debray – La qualité des services de santé est une priorité pour les citoyens de l’Union européenne, dont la Charte des droits fondamentaux proclame le droit aux soins ; en outre, les systèmes de santé et les politiques sanitaires de chaque État membre sont désormais indissociables. Cette évolution s’explique notamment par la libre circulation des patients et des professionnels de santé, par les attentes du grand public dans toute l'Europe et par la diffusion de nouvelles pratiques et techniques médicales grâce aux technologies de l'information.

Voilà pourquoi la Commission européenne a invité des ministres des États membres et des représentants de la société civile à réfléchir à la mobilité des patients et à l'évolution des soins de santé au sein de l'Union. Dans cet esprit, je suggérerai plusieurs réformes inspirées des réussites de nos voisins en matière de chirurgie ambulatoire, d’une part, et d'interaction entre médecine publique et privée, d’autre part.

La chirurgie ambulatoire constitue une alternative à l'hospitalisation dite traditionnelle, qui fait suite à une anesthésie et nécessite un hébergement. Selon des études menées en 2004 par l'assurance maladie et plusieurs établissements de santé, quelques changements d’organisation pourraient permettre de l’étendre à 80 % des interventions chirurgicales dans notre pays. En 2003, la France était l'avant-dernier pays de l'OCDE en la matière : la chirurgie ambulatoire y concernait 40 % des actes susceptibles d’être ainsi effectués, contre 94 % aux États-Unis, 61 % en Allemagne et 78 % au Danemark. Le Royaume-Uni l’a pourtant développée dès les années 1970, rejoint à partir du milieu des années 1980, ou dans les années 1990, par les Pays-Bas, le Danemark, l’Espagne et le Portugal. En outre, notre secteur public est en retard par rapport au privé : sur dix-huit actes suivis, le taux de chirurgie ambulatoire y atteignait en 2003 33 % en moyenne nationale, contre 46 % pour les cliniques privées.

Les pouvoirs publics et l'assurance maladie ont donc entrepris d’encourager le développement de la chirurgie ambulatoire, présenté par la CNAM, dans son plan d’action pour 2007, comme une priorité absolue. En effet, en limitant la durée du séjour hospitalier, ce mode d’intervention divise par cinq le risque d'infections nosocomiales. En outre, il satisfait 90 % des patients, qu’il place au cœur du système – à tel point que 81 % des Français se déclarent disposés à y recourir. De plus, la chirurgie ambulatoire est économiquement avantageuse parce qu’elle réduit, outre la durée du séjour, le besoin en ressources humaines et matérielles, la prescription de médicaments et les frais d'hébergement. Enfin, la limitation de l'incapacité post-opératoire réduit également la durée de l'arrêt de travail, favorisant une meilleure réinsertion familiale et scolaire.

Quant à l'interaction entre médecine publique et privée, elle permettra de soulager l'hôpital – grâce à une meilleure prise en charge des patients dont l’état ne justifie pas nécessairement une hospitalisation – et les services d’urgence, auxquels de nombreux patients ne recourent que pour soigner une pathologie bénigne. À cette fin, nous devrons développer des maisons médicalisées pluridisciplinaires privées, surtout dans les secteurs ruraux et semi-ruraux, touchés par la désertification médicale.

M. Jean Leonetti – Très bien !

M. Patrice Debray - Ces maisons médicalisées contribueront aux gardes de nuit et de fin de semaine, en collaboration avec le 15 et les associations de coordination et de régulation libérale. Ainsi, selon les cas, le patient sera orienté vers les services d’urgence hospitaliers, vers les maisons médicalisées ou vers le médecin de garde libéral, lequel pourra en outre bénéficier des standardistes ou du matériel de ces dernières afin d’assurer le service de garde sans se déplacer. Comme dans les pays scandinaves, les maisons médicalisées regrouperont différentes catégories professionnelles – médecins, kinésithérapeutes, infirmières – chargées de coordonner l'accès aux soins, et dont le travail d’équipe permettra au service des urgences de se consacrer à ses missions fondamentales.

M. Jean-Claude Flory – Excellent !

M. Patrice Debray - Madame la ministre, vous pouvez compter sur ma détermination, ma force et mon énergie : je défendrai à vos côtés le projet de loi que vous nous présenterez en octobre, afin, comme le souhaite le Président de la République, de pérenniser notre système de santé, de garantir à nos concitoyens l’égal accès à des services de soins de qualité sur tout le territoire et de maîtriser nos dépenses de santé (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Jean Leonetti – Au terme d’un débat riche et constructif, je souhaite évoquer la réforme des hôpitaux publics, qui, loin d’entraîner des fermetures d’hôpitaux – vous l’avez dit, Madame la ministre –, permettra seule de les empêcher, et que le secteur hospitalier appelle donc de ses vœux plus qu’il ne la craint.

L’hôpital est ouvert à tous, partout et en permanence : il ne sélectionne ni les malades…

M. Christian Paul – Mais la géographie, elle, les sélectionne…

M. Jean Leonetti – …ni les pathologies ; il accueille toutes les détresses – physiques, morales ou sociales.

Mais l'hôpital est en crise, sans doute du fait même de l'ampleur et de la complexité de sa mission. Son attractivité est fragilisée, car les jeunes médecins lui préfèrent un exercice privé parfois moins contraignant, et bien plus rémunérateur – dans le privé, le revenu des radiologues est de 350 % plus élevé !

M. Christian Paul – Vous savez donc ce qu’il reste à faire…

M. Jean Leonetti – Dans ces conditions, il faudrait avoir le sens du service public chevillé au corps pour continuer d’exercer à l’hôpital…

Voilà pourquoi il faut, comme vous l’avez proposé, rémunérer à l’activité, sous certaines conditions, les agents hospitaliers et les personnels soignants ; on ne saurait imposer à l’hôpital les règles du financement à l’activité sans en faire bénéficier ceux qui travaillent le plus et incarnent la mission de l’hôpital. Un intéressement à l’activité hospitalière devrait même remplacer progressivement le système archaïque en vigueur dans le secteur privé. En la matière, la concurrence doit céder la place à la complémentarité – entre hôpitaux publics, grâce aux communautés hospitalières de territoire, qui éviteront à des établissements proches de se livrer une concurrence absurde et néfaste aux malades comme à l’équilibre financier ; au sein d’un seul établissement, grâce à l’action d’un pilote unique, le directeur ; enfin, entre public et privé, car le financement de tous les soins est public et tous les malades, qui ne sont ni privés ni publics, doivent bénéficier de soins de qualité sur tout le territoire. Or les monopoles privés à but lucratif presque exclusivement financés par des fonds de pension sont contraires à l’exigence de répartition égale du service public de santé.

MM. Gérard Bapt et Christian Paul – Bravo !

M. Jean Leonetti – Nous devons donc créer un bouclier géographique de santé publique, gage d’une stabilisation durable.

Il convient aussi de clarifier les missions et les financements de l’hôpital. La tarification à l’activité obéit à une certaine logique car ceux dont l’activité est la plus forte doivent être les plus soutenus. N’oublions pas que c’est à l’hôpital que sont accueillies les populations les plus précaires, ainsi que les pathologies les plus lourdes et les plus complexes à traiter. Dans le cadre des missions d’intérêt général, la surcharge hospitalière doit donc être mieux prise en compte.

Le corollaire aux nouvelles contraintes, c’est d’introduire plus de souplesse et d’autonomie dans la gestion du système. Peut-on accepter qu’un scanner s’implante en quatre mois dans le privé contre vingt-quatre dans le public ?

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission  C’est exact.

M. Jean Leonetti – S’il convient de mieux évaluer les missions d’enseignement et de recherche, il faut surtout relever les grands défis posés à notre société par la dépendance, le grand âge, le handicap, les soins palliatifs – que Mme la ministre a présentés à Bourges avec le Président de la République il y a quelques jours.

En médecine, tout ce qui est possible n’est pas obligatoirement nécessaire et tout ce qui est possible n’est pas forcément utile. En médecine, on peut faire moins et mieux. Parfois, traiter de manière plus humaine permet de traiter de manière moins technique. Si la tarification à l’activité est un bon outil, elle ne doit en aucun cas conduire à financer l’acharnement thérapeutique que nous condamnons par ailleurs. Veillons à ne pas favoriser l’inflation des soins.

Madame la ministre, la réforme que vous nous proposez permettra de répondre à l’exigence de qualité et d’égalité des soins. Ce n’est pas un texte de plus que vous nous proposez mais une véritable évolution des mentalités. Nous avons confiance dans l’efficacité de votre projet (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé – Merci, Monsieur le président, d’avoir laissé les parlementaires parler quarante-cinq minutes de plus que ce qui avait été prévu. Ce temps supplémentaire a été précieux. À l’issue de ce débat, les différents orateurs comprendront que je ne puisse pas leur répondre de manière détaillée mais je voudrais faire une observation, un constat, une interpellation et rappeler une exigence.

L’observation, c’est que lorsqu’on quitte le champ de la polémique et de la critique systématique, il y a une très grande synergie entre les préconisations qui émanent de tous vos bancs. Soyez sûrs que j’en tiendrai le plus grand compte dans l’élaboration, que je souhaite conduire avec vous, de la réforme.

Le constat, c’est que – contrairement à ce que certains ont dit ce matin – la France peut se prévaloir d’un taux de prise en charge solidaire des dépenses de santé parmi les plus élevés au monde. L’assurance maladie couvre 78 % des dépenses et les organismes complémentaires 12 % ; au final, seulement 8 % de nos concitoyens ne bénéficient pas d’un organisme complémentaire et nous atteignons par conséquent le taux record de 92 % de couverture solidaire de nos dépenses d’assurance maladie. Je souhaite que ce haut niveau de prise en charge solidaire soit non seulement maintenu mais aussi amélioré. Je pense évidemment aux 8 % de Français non couverts par une complémentaire et je m’emploie à ce que l’accès à la complémentaire et le niveau de prise en charge soient encore améliorés.

Mon interpellation porte sur le point de savoir si la part de la richesse nationale consacrée à la santé doit augmenter. Je suis persuadée que oui. Mais cela ne nous dispense pas d’une réflexion préalable. Il ne faut pas que cette prise en charge supplémentaire soit utilisée comme un moyen de masquer nos insuffisances ou d’éviter les réformes nécessaires. Le système doit être amélioré, quantitativement et qualitativement. Menons d’abord ces réformes. Ensuite, à l’issue d’un débat national avec les Français, nous verrons quelle part de la richesse doit être dévolue aux dépenses de santé. Il faut être lucide et dire la vérité aux Français : l’argent consacré à la santé, c’est autant que l’on n’affecte pas au logement, à la voiture, aux loisirs ou aux vacances ! Le débat doit être posé avec beaucoup de clarté et en toute transparence.

Une exigence, enfin, qui, je le crois, nous réunira tous. La politique de santé et les réformes qu’appelle la sauvegarde de notre système ne sauraient être traitées « par appartements ». Comment se satisfaire que les lits de court séjour ne soient occupés qu’à 30 % alors qu’on ne trouve pas de place pour héberger un proche atteint de la maladie d’Alzheimer ? Comment accepter que l’on ne trouve pas un médecin de permanence en ville lorsque les urgences hospitalières sont encombrées ? La question doit être traitée de façon globale. J’ai écouté toutes vos interventions avec la plus grande attention. Il va maintenant falloir, dans nos groupes de travail, rassembler cette brassée de propositions pour mener à bien une réforme globale, dans l’esprit de 1945 auquel je suis profondément attachée, dans un souci de justice, d’équité, de solidarité et d’efficacité (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

Prochaine séance cet après-midi à 15 heures.

La séance est levée à 12 heures 55.

La Directrice du service
du compte rendu analytique,

Marie-Christine CHESNAIS

Le Compte rendu analytique
est disponible sur Internet
en moyenne deux heures après la fin de séance.

Le compte rendu analytique des questions au Gouvernement
est également disponible, sur Internet et sous la forme d’un fascicule spécial,
dès dix-huit heures

Préalablement,
est consultable une version incomplète,
actualisée au fur et à mesure du déroulement de la séance.

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