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Edition J.O. - débats de la séance

Assemblée nationale
XIIIe législature
Session ordinaire de 2009-2010

Compte rendu
intégral

Première séance du jeudi 5 novembre 2009

Première séance du jeudi 5 novembre 2009

Présidence de Mme Danielle Bousquet
vice-présidente

Mme la présidente . La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures trente.)

Projet de loi de finances pour 2010 Seconde partie (suite)

Mme la présidente. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2010 (n os 1946, 1967).

Travail et emploi

Mme la présidente. Nous abordons l’examen des crédits relatifs au travail et à l’emploi (n os 1967, annexes 45 et 46, 1971).

La parole est à Mme Chantal Brunel, rapporteure spéciale de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire pour les politiques du travail et de l’emploi.

Mme Chantal Brunel, rapporteure spéciale de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire pour les politiques du travail et de l’emploi . Madame la présidente, monsieur le ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville, monsieur le secrétaire d’État chargé de l’emploi, chers collègues, le projet de loi de finances pour 2010 offre à M. Eckert et à moi-même l’occasion de rapporter pour la première fois les crédits de la mission « Travail et emploi ».

Chacun est conscient qu’au premier semestre 2009 plus de 299500 emplois salariés marchands ont été détruits en France sous l’effet de la crise économique mondiale. La dégradation du marché du travail devrait encore se poursuivre au cours des prochains mois, à cause du décalage habituel entre les évolutions de l’activité et celles de l’emploi.

Les dernières prévisions d’emploi du Gouvernement demeurent prudentes et pratiquement inchangées par rapport à celles du mois de juin. Elles prévoient 451000 destructions d’emplois marchands en 2009. Une normalisation progressive devrait intervenir en 2010, où 90000 emplois seraient détruits dans l’ensemble des secteurs.

Toutefois, en France, la dégradation de l’emploi est moins intense que chez la plupart de nos voisins. Si le nombre de chômeurs en France, mesuré en données comparables au niveau international, est supérieur de 18 % en juillet2009 à son niveau de mai2007, on note que, sur la même période, il a doublé aux États-Unis, où l’on enregistre une progression de 114 %, et en Espagne, où il augmente de 144 %. La hausse est de 30 % dans la zone euro.

La mobilisation du chef de l’État et du Gouvernement en faveur de la relance explique de tels chiffres. Le plan de relance, tant de fois critiqué lors de son lancement, apparaît aujourd’hui comme particulièrement bien dosé. Néanmoins, derrière ces statistiques, se cache le drame de ceux qui ne parviennent pas à retrouver un emploi.

En raison de la crise, le budget consacré au travail et à l’emploi est bien sûr très sensible et l’heure n’est pas à la réduction des crédits. Sur cette mission, 11,2 milliards d’euros sont inscrits en autorisations d’engagement et en crédits de paiement, auxquels il faut ajouter des crédits supplémentaires à hauteur de 1,4 milliard d’euros inscrits pour 2010 sur la mission « Plan de relance de l’économie », dont Mme Grosskost est la rapporteure. Ces crédits supplémentaires abonderont, via le fonds d’investissement social créé au début de l’année, les politiques traditionnelles de l’emploi.

Au total, les crédits consacrés aux politiques de l’emploi atteignent 12,6 milliards d’euros, soit 2 milliards de plus que le plafond prévu l’an dernier dans le cadre de la loi de programmation des finances publiques pour 2009-2012. Cette augmentation se justifie par la crise.

Les crédits du programme n°102 « Accès et retour à l’emploi » atteignent 5,840 milliards d’euros en autorisations d’engagement et 5,885 milliards d’euros en crédits de paiement. Un léger repli, de 145 millions, s’explique par l’extinction de certains contrats aidés: le SEJE, soutien à l’emploi des jeunes en entreprise, les emplois jeunes et les contrats emploi solidarité.

La mise en place du contrat unique d’insertion prévu par la loi du 1 er  décembre 2008 généralisant le RSA a également des conséquences sur la présentation des crédits sur le programme n°102. À partir du 1 er  janvier 2010, ce nouveau contrat aidé se déclinera en deux versions: le contrat d’accompagnement dans l’emploi, le CUI-CAE, dans le secteur non marchand, en remplacement de l’ancien contrat d’accompagnement dans l’emploi et du contrat d’avenir; et le contrat initiative emploi, le CUI-CIE, dans le secteur marchand, en remplacement de l’ancien contrat initiative emploi et du contrat d’insertion revenu minimum d’activité. Je me réjouis de cette disposition, qui permettra de rationaliser l’ensemble des contrats aidés que ni les entreprises ni les publics concernés ne maîtrisaient complètement.

Deuxième poste budgétaire de la mission avec 1,360 milliard, la subvention à Pôle emploi traduit la participation de l’État au financement du service public de l’emploi. Cette subvention sera majorée, en exécution pour 2010, d’un montant correspondant au transfert d’environ 900 salariés de l’AFPA, l’Association nationale pour la formation professionnelle des adultes, chargée de l’orientation professionnelle des demandeurs d’emploi. Ce montant sera déduit de l’aide que l’État verse à l’AFPA. Les transferts de personnels s’ajouteront aux recrutements de 1340 collaborateurs en CDI et 1000 en CDD auxquels il a été procédé cette année. À une époque où l’État s’engage à ne pas remplacer un fonctionnaire sur deux, le recrutement et le transfert de 3240 collaborateurs à Pôle emploi doivent être provisoires. Une fois la crise passée et le chômage en diminution, de tels effectifs ne doivent plus trouver de justification. Pôle emploi, comme d’autres organismes, doit rechercher des sources d’économies.

À mon sens, une des voies qui permettrait d’y parvenir est la transmission électronique des données des entreprises en particulier vers Pôle emploi. Il est en effet surprenant que les attestations d’emploi – les fiches jaunes des Assedic – soient encore manuscrites et doivent être ressaisies par les services de Pôle emploi. Je regrette, à cet égard, que la CNIL se soit opposée à la déclaration nominative des assurés, qui aurait pu générer des économies importantes, en évitant toute ressaisie informatique. Cette déclaration aurait permis une pré-identification d’emploi par Pôle emploi des nouveaux demandeurs, ce qui aurait accéléré leur prise en charge.

Dans un contexte fortement marqué par la crise économique et ses conséquences sur l’emploi, Pôle emploi, neuf mois après sa création, et après d’inévitables difficultés au départ, trouve progressivement son efficacité. Cependant, comme j’ai pu le constater dans mon département, il reste encore à généraliser les sites mixtes ANPE et Assedic. Il faut aussi améliorer le suivi des demandeurs d’emploi, en réduisant notamment le nombre de chômeurs pris en charge par un même conseiller qui, d’un site à l’autre, va du simple au triple. Aujourd’hui, la fusion n’est effective qu’à Provins.

Pour terminer avec ce programme, il faut avoir le courage de rappeler que nous avons voté, au printemps 2008, une loi relative aux droits et aux devoirs des demandeurs d’emploi, dont une disposition précise que le refus, sans motif légitime, de deux offres raisonnables d’emploi entraîne la radiation et la suppression des allocations chômage pendant une période minimale de deux mois. À ma connaissance, cette disposition n’est pas appliquée, et je le déplore. Comment ferons-nous pour l’appliquer plus tard si nous n’avons pas le courage de le faire maintenant?

Par ailleurs, messieurs les ministres, pouvez-vous nous indiquer le nombre actuel d’offres d’emplois non pourvues? Sur le terrain, j’entends encore trop de professionnels de certains secteurs me dire qu’ils ne trouvent pas de candidats pour un poste.

Deux autres programmes participent aussi à l’effort en faveur de l’emploi, mais avec des crédits plus modestes. Le programme n°111, « Amélioration de la qualité de l’emploi et des relations du travail », se distingue par des autorisations d’engagement de 60 millions d’euros, ce qui représente une hausse. Je relève la mise en place sur quatre ans d’un outil de mesure de l’audience de la représentativité syndicale, dont le coût me paraît élevé. Je m’interroge en effet sur la pertinence de mesurer l’audience syndicale dans les entreprises de moins de onze salariés et de renforcer l’effectivité de la représentation collective du personnel dans ces petites entreprises. Les relations entre le chef d’entreprise et les salariés ne sont pas les mêmes dans une petite entreprise et dans un grand groupe. Il y a dans les premières une plus grande proximité et une dimension humaine, qui font que le dialogue social y est quotidien. Je crains que les dispositions de l’article 2 de la loi du 20 août 2008 n’accroissent la complexité administrative qui pèse sur les petites entreprises. Par ailleurs, le nombre important de types de contrats et leur inextricable complexité rendent l’ensemble du dispositif difficile à appréhender, tant pour les chefs de PME et que pour les salariés. Nous devons, une fois la crise passée, simplifier considérablement la palette des contrats.

En outre, la tragique vague de suicides chez France Télécom, au cours de ces dernières semaines, a rouvert le débat sur la prise en compte du mal-être des salariés et la prise en charge du stress par l’encadrement. Je trouve insuffisants les dispositifs existants et forme le vœu que le nouveau plan « Santé au travail » soit l’occasion de mettre en œuvre une véritable prise en charge des risques psychosociaux, jusqu’ici largement ignorés. Il me paraît important de procéder autant que faire se peut à une analyse de ces suicides et de prendre des mesures de prévention. Par ailleurs, il me semble que nous ne prêtons pas une attention suffisante au problème des addictions – à l’alcool, aux drogues, aux jeux – et à leur incidence sur la santé au travail. Ces phénomènes me paraissent mal mesurés et insuffisamment traités au stade de la prévention.

Les crédits de paiement, eux, enregistrent une légère baisse, conséquence de la fin des frais consécutifs à l’organisation des élections prud’homales en décembre2008.

Je salue l’amorce d’une fusion entre l’AFSSET, l’Agence française de sécurité sanitaire de l’environnement et du travail, et l’AFSSA, l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments, qui permettra, j’en suis sûre, de dégager des économies d’échelle.

Pour en terminer avec ce programme, j’en viens à un thème qui me tient à cœur: la promotion de l’égalité entre hommes et femmes dans l’entreprise. Le dispositif législatif en vigueur, déjà très coercitif, n’ayant pas produit les effets escomptés, il me semble qu’un effort supplémentaire de sensibilisation doit être mené à destination des employeurs et des salariés, par exemple sous la forme de campagnes d’information réalisées en association avec les partenaires sociaux et cofinancées par eux. Des spots télévisés pourraient s’inspirer du modèle des campagnes sociales de sensibilisation relatives à la prévention routière ou à la santé alimentaire. Il s’agit d’en faire une cause nationale.

Le programme n°155 « Conception, gestion et évaluation des politiques de l’emploi et du travail », qui regroupe les fonctions supports de la politique de l’emploi, avec 822 millions d’euros en autorisations d’engagement, et 812 millions d’euros en crédits de paiement, traduit une augmentation consécutive à la poursuite du plan pluriannuel de modernisation et de développement de l’inspection du travail.

Ce plan prévoit, cette année, le recrutement de cent soixante agents supplémentaires et le transfert de crédits de 3,7 milliards d’euros en provenance du programme n°215 « Conduite et pilotage des politiques de l’agriculture » de la mission « Agriculture ». Cette hausse est compensée, en partie, par une démarche volontariste de maîtrise de l’évolution des moyens et de leur utilisation.

En tant que rapporteur spécial, je veux saluer la poursuite de l’effort consenti en faveur de l’insertion par l’emploi des publics en difficulté, en particulier des personnes éloignées de l’emploi, dans le cadre des ateliers et chantiers d’insertion. Un article rattaché à la mission adapte d’ailleurs le cadre financier de ces structures à la mise en œuvre du contrat unique d’insertion.

Par ailleurs, nous examinerons deux amendements adoptés il y a deux semaines par la commission des finances, qui visent à supprimer les exonérations de cotisations patronales sur l’avantage en nature que constituent les repas des salariés des hôtels, des cafés et des restaurants. Le Gouvernement, en négociation avec la profession, s’était opposé, dans cet hémicycle, à des amendements identiques lors de la discussion du PLFSS.

Enfin, je veux saluer l’implication des services déconcentrés des ministères de l’emploi et du travail: en première ligne face à la crise économique, ils mettent en œuvre, jour après jour, les politiques de l’emploi.

J’ai la conviction que la situation de l’emploi bénéficiera de la mobilisation des moyens publics, notamment dans le cadre du plan de relance, et de l’amélioration progressive de la conjoncture. À ce titre, le projet de loi de finances pour 2010, avec les mesures du plan de relance qui ne font pas partie des articles discutés ce matin, constitue un budget de rupture, marqué par une mobilisation inédite en faveur de l’emploi.

Comme le montre mon rapport, les efforts à fournir dans le cadre de la mission « Travail et emploi » doivent se déployer de façon complète et assurer un accompagnement tout au long d’un parcours professionnel qui va de la recherche d’emploi à la vie au sein de l’entreprise.

Au-delà d’apports financiers indispensables dont nous avons vu les cibles prioritaires, il s’agit de permettre une prise de conscience sur des sujets de fond tels que la parité, les addictions ou le mal-être au travail. Il est effectivement temps de faire évoluer l’emploi en profondeur; ce rapport donne quelques clés pour y parvenir. Je vous invite donc à adopter les crédits et l’article 61 rattaché à la mission « Travail et emploi ».

Mme la présidente. La parole est à M. Christian Eckert, rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, pour l’accompagnement des mutations économiques et le développement de l’emploi.

M. Christian Eckert, rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, pour l’accompagnement des mutations économiques et le développement de l’emploi. Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, j’ai l’honneur de rapporter pour la première fois les crédits de la mission « Travail et emploi », succédant ainsi à Gaétan Gorce, et, comme lui, je dresse un constat alarmant.

La crise bancaire et financière a durement éprouvé l’économie mondiale. Si la situation des marchés financiers se redresse peu à peu, les conséquences les plus lourdes de cette crise sont toujours à venir. La dégradation du marché de l’emploi se poursuit, avec 580000 destructions d’emplois marchands en 2009, tandis que les outils de traitement conjoncturel de la crise sont fortement sollicités.

Le Gouvernement se veut optimiste et parie, pour 2010, sur une normalisation progressive de l’activité économique, avec 190000 destructions d’emplois marchands – encore que le terme « normalisation » ne me semble pas le plus approprié. Dans un contexte aussi incertain, la plus élémentaire prudence voudrait que les moyens de la politique de l’emploi ne soient pas revus à la baisse.

J’en viens aux crédits. Les dotations de la mission « Travail et emploi » inscrites dans le projet de loi de finances pour 2010 trahissent une tout autre logique. Avec une diminution de ses crédits de l’ordre de 5 %, la politique de l’emploi paraît avoir été sacrifiée au dogme du « zéro volume ».

La création, dans la loi de finances rectificative pour 2008, d’une mission « Plan de relance », à la durée de vie forcément limitée, renforce encore le sentiment d’improvisation. Elle complique aussi le suivi de l’exécution 2009 et l’analyse des crédits demandés pour 2010. Il aurait été souhaitable, dans l’esprit de la LOLF, d’abonder des missions déjà existantes.

Je remarque d’ailleurs que ce plan de relance et ses déclinaisons multiples et successives – fonds d’investissement social, plan d’urgence pour l’emploi des jeunes, plan « Agir pour la jeunesse » – entretiennent la confusion: les effets d’annonce peuvent donner le sentiment que ces dispositifs s’ajoutent et que leurs financements s’additionnent, alors qu’ils se recoupent très largement.

Au sein de la mission « Travail et emploi », le programme n°103 « Anticipation des mutations économiques et développement de l’emploi » n’est pas ménagé, avec des crédits en baisse de 11,7 %, qui s’élèvent à 4,63 milliards d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement. Cette baisse est d’abord imputable aux variations de périmètre subies par le programme avec la suppression des aides directes à l’emploi dans le secteur des hôtels, cafés et restaurants, à hauteur de 538 millions d’euros, et le transfert de la subvention de l’Agence nationale des services à la personne, pour 20 millions d’euros, sur le programme n°134, suite à un changement de tutelle. Hors ces effets de périmètre, les crédits enregistrent encore une baisse de 60 millions d’euros qui s’explique par la diminution des stocks de bénéficiaires des mesures d’âge, telles que les AS-FNE, les allocations spéciales du fonds national de l’emploi ou les préretraites progressives, et par la limitation du financement du chômage partiel.

Le projet de loi de finances pour 2010 poursuit ainsi le mouvement de resserrement des conditions d’accès aux dispositifs de préretraites financés par l’État. Cette politique est censée poursuivre l’objectif de relever les taux d’emploi des salariés de plus de cinquante-cinq ans dans le cadre du plan national d’action concerté pour l’emploi des seniors 2006-2010. Force est de constater que nous n’en voyons pas les effets.

Très sensible depuis 2002, la baisse du nombre d’entrées dans les dispositifs de préretraites publiques du secteur privé – AS-FNE, conventions de cessation d’activité de certains travailleurs salariés, préretraites progressives – s’est poursuivie en 2008, selon une récente étude publiée par la direction de l’animation et de la recherche, des études et des statistiques. En effet, l’an dernier, seuls 8260 salariés sont entrés dans l’un de ces dispositifs, soit 21 % de moins qu’en 2007. Cette forte diminution des entrées s’accompagne depuis cinq ans d’une augmentation sensible du nombre d’entrées en chômage indemnisé de personnes de plus de cinquante-cinq ans.

Conséquence de la diminution continue des entrées, les effectifs des préretraites ne cessent de diminuer: fin 2008, 62400 salariés du secteur privé étaient en préretraite contre 222100 en 1998. Les crédits consacrés aux allocations de préretraite publiques s’élevaient à 450 millions d’euros en 2008; le projet de loi de finances pour 2010 les limite à 180 millions d’euros.

Il me semble regrettable que dans une situation aussi difficile que celle que nous connaissons le Gouvernement se soit privé d’un outil conjoncturel efficace pour contenir le chômage.

Sous l’effet de la crise économique, le nombre de journées de chômage partiel indemnisables, c’est-à-dire demandées par les entreprises et autorisées par les directions départementales du travail, de l’emploi et de la formation professionnelle, a fortement augmenté en 2008 et au premier semestre 2009 par rapport à 2007, atteignant, respectivement, 4,1 millions d’heures et 6,9 millions contre 2 millions.

La loi de finances initiale pour 2009 avait ouvert 39 millions d’euros au titre de l’allocation spécifique de chômage partiel sur le programme n°103. Par ailleurs, 258 millions d’euros avaient été ouverts sur le programme n°316 de la mission « Plan de relance » et transférés sur le programme n ° 103. Au 31 août, 170,1 millions d’euros en autorisations d’engagement et 141,2 millions d’euros en crédit de paiement ont déjà été consommés. De façon très surprenante, le projet de loi de finances pour 2010 ne prévoit à ce titre qu’une modeste enveloppe de 60 millions d’euros inscrite sur la mission « Travail et emploi », alors qu’aucune dotation complémentaire ne figure dans le PLF au titre du plan de relance.

Monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, je crains que cette somme ne soit largement insuffisante, vos services nous ayant par ailleurs indiqué que nombre de ces prestations sont payées avec un décalage non négligeable. Les crédits viendront forcément à manquer. Rien ne justifie cet excessif optimisme tant l’évolution de la conjoncture en 2010 paraît incertaine. Afin d’éviter de recourir à des mesures de fongibilité en cours d’exécution, je vous proposerai d’inscrire en loi de finances initiale des crédits supplémentaires pour financer le nouveau dispositif dit « d’activité partielle ».

Les politiques de l’emploi n’ont donc pas pris la mesure de la crise et ne sont pas adaptées à l’évolution prévisible du marché du travail. La porosité entre emploi et chômage s’accroît, c’est pourquoi il faut relancer la politique de l’emploi afin de contenir l’accélération du chômage.

Aujourd’hui, la formation professionnelle est concentrée sur ceux qui en ont le moins besoin, en dépit d’un investissement annuel de 22 milliards d’euros. En France, 74,3 % de salariés n’ont participé à aucune action de formation au cours des douze derniers mois.

L’année 2009 a été marquée par l’achèvement du transfert de la compétence générale aux régions, conformément à la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et aux responsabilités locales, et par une réforme d’ensemble du système de formation professionnelle continue afin de le rendre plus juste et plus efficace. Les années2010 et2011 seront consacrées à la finalisation juridique de cette réforme, avec la publication des décrets, et à sa mise en œuvre.

À titre personnel, je regrette que cette réforme n’ait pas permis de concrétiser son ambition affichée de donner davantage à ceux qui en ont le plus besoin dans leur parcours professionnel.

Je suis également préoccupé par l’avenir de l’AFPA, l’Association nationale pour la formation professionnelle des adultes. Parmi les trois scénarios qui étaient envisageables l’an dernier pour l’association, la fusion avec Pôle emploi ne semble plus avoir la faveur du Gouvernement, qui aurait également écarté définitivement l’hypothèse d’un éclatement de la structure en vingt-deux entités régionales. Reste la perspective d’une AFPA restructurée avec l’aide de l’État: une structure nationale indépendante serait maintenue, elle conserverait une personnalité juridique propre, et elle serait en mesure de dégager une marge afin de pouvoir se financer.

Cette profonde transformation, qui est, paraît-il, imposée par l’Autorité de la concurrence, a un coût très élevé pour l’AFPA. Elle se traduit, dès 2010, par le transfert des services d’orientation à Pôle emploi sur le programme n°102. Elle impliquera, à court terme, le transfert de son patrimoine foncier. Pour l’heure, les locaux occupés par les 11000 salariés de l’AFPA sont la propriété de l’État. Selon les informations que nous avons recueillies, le Gouvernement aurait l’intention de confier ce patrimoine à l’association elle-même; celle-ci devrait alors faire face à des frais d’entretien et de rénovation considérables, qui pourraient dépasser les 100 millions d’euros.

J’estime donc indispensable de poursuivre le versement d’une dotation de l’État à l’AFPA au titre des dépenses d’investissement. Or le montant des subventions d’investissement allouées à l’AFPA est, pour l’heure, très insuffisant puisqu’il s’établit, en 2010, à 10 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement, dont la totalité est contractualisée avec les régions dans le cadre des contrats de projets États-régions.

Par ailleurs, l’anticipation et l’accompagnement des mutations économiques ne doivent pas être négligés. Les dotations consacrées à la prévision des suppressions d’emplois, à la création de cellules de reclassement et aux congés de reclassement devraient être relevées d’au moins 100 millions d’euros. En complément, les contrats de transition professionnelle pourraient être généralisés à tous les licenciés économiques dans les PME pour répondre aux situations dramatiques qui ne manqueront pas de surgir dans les bassins d’emploi les plus exposés.

Enfin, les dépenses fiscales me semblent considérables.

La baisse de la TVA pour le secteur des cafés, hôtels et restaurants coûtera environ 3 milliards d’euros. Cette dépense fiscale est retracée dans le programme n°134. Le contrat d’avenir signé par la profession devait permettre d’obtenir une baisse des prix: toutes les études et tous les indicateurs donnent, à ce titre, des résultats décevants. Concernant les embauches, la création de 20000 emplois directs était prévue, auxquels devaient s’ajouter 20000 postes d’apprentis. Le Conseil des prélèvements obligatoires, qui dépend de la Cour des comptes, constate aujourd’hui qu’au mieux 6000 emplois pourraient être créés dans les deux prochaines années.

Quant à l’augmentation des salaires dans la profession, il est peut-être encore un peu tôt pour l’évaluer.

Par ailleurs, la politique des services à la personne, qui coûte à notre budget près de 3 milliards en crédits ou réductions d’impôts – sans compter les compensations, à hauteur de plusieurs centaines de millions, de la réduction de quinze points de cotisations pour les employeurs décidant de travailler au réel plutôt qu’au forfait –, doit être évaluée. La croissance de l’emploi dans ce secteur connaît un fort ralentissement, probablement en raison des difficultés que connaissent nos concitoyens, qui ont moins de moyens pour devenir employeurs.

En ce qui concerne les contrats de transition professionnelle, dont nous soutenons la pertinence et l’efficacité, j’observe que 68 millions d’euros sont inscrits au programme 316 dans le plan de relance. Or il me semblerait plus utile d’affecter ces crédits à une politique pérenne en les incluant dans l’un des programmes 102 ou 103 – lesquels auraient du reste vocation à être eux-mêmes fusionnés, ainsi que cela a été recommandé à plusieurs reprises – et de les généraliser dans les PME des bassins d’emploi particulièrement touchés.

J’ai rappelé combien les crédits en faveur du chômage partiel étaient insuffisants. Les 47,4 millions d’euros prévus pour la CRP le sont également.

Mes chers collègues, les crédits de la mission « Travail et emploi » me paraissent, en l’état, insuffisants pour faire face aux conséquences de la crise. Aussi, je vous invite à ne pas les adopter ou, pour le moins, à modifier substantiellement un certain nombre de lignes budgétaires. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Perrut, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales, pour l’emploi.

M. Bernard Perru t, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales, pour l’emploi. Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, les crédits des programmes « Accès et retour à l’emploi » et « Accompagnement des mutations économiques et développement de l’emploi » de la mission « Travail et emploi » du projet de loi de finances pour 2010 s’élèvent respectivement, en autorisations d’engagement, à 5,84 milliards d’euros et 4, 64 milliards d’euros. On ne peut toutefois apprécier l’effort budgétaire en faveur de l’emploi pour l’année 2010 sans prendre en compte également les crédits du programme « Soutien exceptionnel à l’activité économique et à l’emploi » de la mission « Plan de relance de l’économie », mission destinée à mettre en œuvre le volet budgétaire du plan de relance annoncé par le Président de la République le 4 décembre 2008 à Douai. Les crédits de l’action « Politiques actives de l’emploi » de ce programme s’élèvent pour 2010 à 1,4 milliard d’euros en autorisations d’engagement comme en crédits de paiement. Le budget de l’emploi pour 2010 est donc en augmentation, puisqu’il atteint, au total, 11,92 milliards d’euros en crédits de paiement.

Cet effort très significatif est à la hauteur des enjeux liés au contexte de crise économique que traverse le pays, et il convient de le saluer. Il permettra de maintenir en 2010 le soutien exceptionnel engagé dès le début de la mise en œuvre du plan de relance, qui s’était traduit par l’inscription de 1,3 milliard d’euros supplémentaires dans les deux lois de finances rectificatives de février et avril2009.

L’examen détaillé des crédits de l’ensemble de ces programmes relevant avant tout de la compétence de la commission des finances, j’ai choisi de me concentrer sur la question de l’emploi des jeunes et, plus précisément, sur la manière, à la fois conjoncturelle et structurelle, dont le présent budget répond à cette question récurrente.

Le constat est en effet bien connu. Le niveau de chômage des jeunes est particulièrement élevé en France, relativement à celui de l’ensemble de la population et à la situation qui prévaut dans les pays voisins, européens ou, plus généralement, de l’OCDE. L’activité des jeunes est en outre extrêmement sensible aux fluctuations conjoncturelles, ainsi que la présente crise le met une nouvelle fois en évidence.

À la suite des interventions du Président de la République consacrées à l’emploi des jeunes, le 24 avril 2009, et à la jeunesse, le 29 septembre 2009, de multiples initiatives ont été prises. Le plan d’urgence pour l’emploi des jeunes fait ainsi l’objet d’un suivi régulier, et je veux à cet égard saluer, monsieur Wauquiez, votre détermination, qui est reconnue partout en France. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.) La publication, en juillet dernier, du Livre vert destiné à refonder la politique en faveur des 16-25 ans ainsi que la discussion du projet de loi relatif à l’orientation et à la formation professionnelle tout au long de la vie confirment la multiplicité des facettes de la politique en faveur de l’emploi des jeunes. L’avis budgétaire que j’ai rendu au nom de la commission des affaires sociales – dont je remercie l’ensemble des membres pour avoir participé à un débat fructueux qui nous a permis de dégager des lignes de force – rend compte de cette richesse et de cette diversité. Aucun effort ne doit être négligé: tel est bien le sens de l’ensemble de ces dispositifs.

Attardons-nous sur la mise en œuvre du plan d’urgence pour l’emploi des jeunes. Des crédits ont été inscrits dans la mission « Plan de relance de l’économie » par la première loi de finances rectificative pour 2009 à hauteur de 485 millions d’euros; ils sont gérés par le fonds d’investissement social, le FISO. C’est cet effort qu’amplifie le présent budget, avec des crédits d’un montant total de 733,8 millions d’euros. Au total, l’engagement qu’avait pris le Président de la République de consacrer 1,3 milliard d’euros aux jeunes a donc bien été tenu. C’est un point essentiel, qu’il convient de souligner.

Quelles sont ces mesures d’urgence? Sans insister sur leur description, bien connue, je m’attarderai plutôt sur leurs premiers résultats, qui sont encourageants.

Tout d’abord, la prime de 3000 euros pour l’embauche en contrat à durée indéterminée des jeunes stagiaires a été prolongée jusqu’au 30 juin 2010 au profit des stagiaires entrés en entreprise avant le 30 septembre 2009. Des crédits à hauteur de 30 millions d’euros sont prévus dans le présent budget pour le financement de cette mesure.

Une aide de l’État de 1800 euros a été créée au profit des employeurs de moins de cinquante salariés pour l’embauche d’apprentis supplémentaires. Le budget prévoit 36 millions d’euros, pour le versement de 20000 aides. J’ajoute que le dispositif « zéro charge » a été étendu aux embauches d’apprentis dans les entreprises de onze salariés et plus. Le coût total de la mesure est évalué, sur la base de 120000 recrutements en apprentissage dans des entreprises de plus de dix salariés entre avril2009 et juin2010, à 55,3 millions d’euros.

Selon les informations que j’ai pu recueillir auprès des services du secrétariat d’État chargé de l’emploi, le nombre d’apprentis était, fin juin2009, de 394000, contre 403000 en juin2008. Mais, depuis le mois d’août, les flux d’entrées en apprentissage sont en nette progression, avec 13015 entrées, contre 7533 au mois de juillet. Pour septembre2009, ce chiffre est de 36722. J’insiste sur ce chiffre significatif, qui démontre, monsieur le secrétaire d’État, que votre action porte ses fruits.

Autre mesure importante du plan d’urgence pour l’emploi des jeunes: la prime pour l’embauche d’un jeune en contrat de professionnalisation. Le montant de l’aide est de 1000 euros, porté à 2000 euros pour les embauches de jeunes ayant un niveau d’études inférieur au baccalauréat. Fin juin2009, le nombre de jeunes présents en contrats de professionnalisation était de 164000, contre 186000 en juin2008. On constate une progression significative des entrées en contrats de professionnalisation depuis le mois d’août. En septembre, on en dénombrait ainsi 17460.

Il convient de mentionner également les contrats d’accompagnement dans l’emploi « passerelles »: à durée déterminée, ces contrats sont destinés prioritairement aux recrutements par les collectivités territoriales, notamment les communes, en vue d’une intégration dans le secteur marchand. Des crédits à hauteur de 167,4 millions d’euros sont prévus pour leur financement. Le nombre de nouveaux CAE jeunes conclus dans les seules collectivités et associations entre le 1 er  juin et le 31 octobre est de 17061.

Par ailleurs, l’objectif est d’ouvrir 50000 contrats initiative emploi au cours du second semestre 2009 aux jeunes de moins de vingt-six ans. Au 31 octobre 2009, 19946 CIE avaient été signés depuis le lancement du programme. Quant aux contrats d’accompagnement formation, ils bénéficient de crédits s’élevant à 181,5 millions d’euros, fondés sur un flux d’entrées de 50000 jeunes d’ici à la fin 2009.

Cet ensemble de mesures très complet, aux premiers résultats prometteurs, est de nature à assurer la prise en compte de la diversité des parcours des jeunes concernés, tout en favorisant leur insertion, aussi pérenne que possible, dans l’emploi.

Au-delà des mesures d’urgence, le Gouvernement a décidé de mettre en œuvre des mesures structurelles, qui peuvent être regroupées autour de cinq axes thématiques.

Le premier est l’orientation. Le projet de loi relatif à l’orientation et à la formation professionnelle tout au long de la vie consacre en effet le droit, pour toute personne, d’être informée, conseillée, accompagnée. Toutefois, l’orientation n’étant pas toujours suffisante, la lutte active contre le décrochage scolaire est le corollaire nécessaire de ce dispositif. Faut-il en effet rappeler que l’on recense, chaque année, 120000 « décrocheurs »? En la matière, les missions locales ont été reconnues par le Président de la République comme le pivot de l’accompagnement des jeunes. Des crédits supplémentaires, à hauteur de 40 millions d’euros, sont ainsi prévus dans la mission « Plan de relance de l’économie ».

Je pourrais également évoquer les contrats d’insertion dans la vie sociale, les CIVIS, conclus avec les missions locales, qui profitent en moyenne chaque année à 270000 jeunes. Les crédits consacrés à ce dispositif s’élèvent à 55 millions d’euros, compte tenu d’une hypothèse de 150000 bénéficiaires en 2010. Bien entendu, nous attendons également beaucoup des plateformes régionales d’orientation.

Quant au droit à une deuxième chance, il constitue le troisième axe structurel de ces politiques: 17 millions d’euros sont prévus afin d’augmenter le nombre de places dans les écoles de la deuxième chance.

Je ne reviendrai pas sur la priorité que constitue l’alternance, sinon pour rappeler qu’au-delà des mesures d’urgence, on ne peut oublier le soutien quantitativement important que représente la compensation des exonérations de charges – plus d’un milliard d’euros –,…

Mme la présidente. Je vous demande de bien vouloir conclure, mon cher collègue.

M. Bernard Perrut, rapporteur pour avis . …ni l’amélioration qualitative du dispositif, désormais ouvert aux bénéficiaires de minima sociaux.

Enfin, la politique de la ville…

M. Maxime Gremetz. Oh là là!

M. Bernard Perrut, rapporteur pour avis . …est le cinquième axe de ces mesures structurelles. On peut citer, à ce propos, le développement du contrat d’autonomie, dont l’objectif est d’insérer 45000 jeunes dans l’emploi dans les trois prochaines années.

L’ensemble de ces mesures témoigne de la convergence des actions menées par les pouvoirs publics autour de quelques grands axes.

Je conclurai en faisant trois propositions principales, volontairement modestes car je crois que l’essentiel est, non pas de réformer une fois encore, mais plutôt d’appliquer et d’approfondir les mesures existantes.

Mme la présidente. Veuillez conclure, mon cher collègue.

M. Maxime Gremetz. Ah oui!

M. Bernard Perrut, rapporteur pour avis . Première piste: appliquer au plus vite le dispositif « anti-décrochage », qu’il s’agisse de l’affectation des moyens attribués ou de la mise en œuvre d’une nouvelle coopération entre les missions locales, Pôle emploi et l’État et l’AFPA.

Deuxième piste: poursuivre l’effort en faveur de l’apprentissage, qui est un véritable vecteur d’insertion professionnelle. Sur ce point, la réflexion n’est jamais achevée.

Troisième piste: assurer la diffusion et le suivi des mesures expérimentales au profit d’une meilleure insertion des jeunes, dans le respect de leur diversité. Notre collègue Gérard Cherpion avait, du reste, beaucoup insisté sur ce point…

Mme la présidente. Merci, monsieur Perrut.

M. Bernard Perrut, rapporteur pour avis . …lors de l’examen du projet de loi sur l’orientation et la formation professionnelle tout au long de la vie.

En conclusion, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, je veux vous dire qu’il nous faut aller auprès des jeunes.

M. Maxime Gremetz. Oh là là!

Mme la présidente. Je vous remercie, monsieur Perrut.

M. Maxime Gremetz. Le règlement doit être le même pour tout le monde. Pas de privilèges! Regardez l’heure!

M. Bernard Perrut, rapporteur pour avis . Au-delà des actions que nous mettons en œuvre, nous devons accompagner ceux qui galèrent dans les quartiers; ils attendent beaucoup de nous.

La commission des affaires sociales a émis un avis favorable à l’adoption de ces crédits. Nous connaissons votre détermination et nous espérons que vous ferez souffler un vent de confiance pour l’avenir. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. Maxime Gremetz. Eh bien!

Mme la présidente. Mes chers collègues, je vous demande de bien vouloir respecter votre temps de parole, car de nombreux orateurs sont inscrits dans la discussion.

M. Maxime Gremetz. Les rapporteurs ne montrent pas l’exemple!

La parole est à M. Francis Vercamer, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales, pour le travail.

M. Francis Vercamer, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales, pour le travail. Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, en tant que rapporteur pour avis, au nom de la commission des affaires sociales, pour les crédits des programmes relevant du ministère du travail, au sein de la mission « Travail et emploi » du projet de loi de finances pour 2010, je souhaite partager quelques réflexions sur le thème que j’ai choisi, dès juillet dernier, pour mon rapport: la santé au travail, qui bénéficie d’une action dédiée dans le programme n°111.

Je ne reviendrai pas sur les crédits de la mission budgétaire, déjà commentés par nos collègues de la commission des finances. J’avais choisi d’étudier la santé au travail, en juillet, car le premier plan Santé au travail 2005-2009, ou PST 1, arrive à terme à la fin de l’année. Il me semblait donc intéressant d’en dresser un bilan. Au fil des auditions – j’ai entendu 43 intervenants – et au vu de l’actualité, en particulier de la dramatique série de suicides de salariés chez France Télécom, j’ai élargi ma réflexion à trois thèmes. Premièrement, l’amélioration de la gouvernance de la prévention des risques professionnels – un thème très important si l’on veut être en mesure de faire face aux risques; deuxièmement, la lutte contre les risques psychosociaux; troisièmement, l’avenir des services de santé au travail.

M. Maxime Gremetz. Ah!

M. Francis Vercamer, rapporteur pour avis, pour le travail. La santé au travail constitue un défi central de l’avenir proche du marché du travail français, en raison notamment du phéno mène de vieillissement de la population. Elle affecte directement la qualité de vie de millions de salariés et a des répercussions importantes sur la compétitivité des entreprises et sur l’économie générale de la France.

En 2008, les accidents du travail ont occasionné plus de 37,4 millions de journées perdues, qui ont entraîné le versement de 1,6 milliard d’euros d’indemnités journalières. Les accidents de trajet ont représenté 5,7 millions de journées perdues, pour un coût en indemnités journalières de 241 millions d’euros. Enfin, les maladies professionnelles ont causé la perte de plus de 8,7 millions de journées, et ce sont plus de 380 millions d’euros d’indemnités journalières qui ont été attribués pour les compenser.

M. Maxime Gremetz. Des journées de travail perdues! Et les gens, ça ne compte pas?

M. Francis Vercamer, rapporteur pour avis, pour le travail. Au total, pour l’ensemble de ces trois risques, ce sont 51,9 millions de journées perdues, pour un coût en indemnités journalières de 2,2 milliards d’euros.

Le premier plan Santé au travail, le PST 1, a accompli un changement d’échelle dans le traitement de la santé au travail. Il a, en premier lieu, contribué à développer la recherche et la connaissance sur les risques professionnels, grâce à la création de l’Agence française de sécurité sanitaire de l’environnement et du travail, l’AFSSET, mais aussi par la sensibilisation du monde du travail à la question des risques professionnels; ainsi, selon un sondage européen de juin2009, 15 % des Français se considèrent comme « très bien informés » sur les risques liés à la santé et à la sécurité sur leurs lieux de travail…

M. Maxime Gremetz. Tant que ça?

M. Francis Vercamer, rapporteur pour avis, pour le travail. …et 54 % comme « plutôt bien informés ». Ce sont donc, au total, près de 70 % des gens qui estiment être bien informés.

Le PST 1, qui est avant tout un plan institutionnel, visait à fédérer tous les acteurs de la santé au travail. À cette fin, en deuxième lieu, le pilotage du système de prévention des risques professionnels a été réorganisé. Au niveau national a été créé, en novembre2008, le Conseil d’orientation sur les conditions de travail, le COCT; au niveau régional a été mise en place une déclinaison du COCT, les comités régionaux de prévention des risques professionnels, ou CRPRP.

Quant à l’impact concret du PST 1 sur l’évolution des accidents du travail et des maladies professionnelles, il demeure difficile de le mesurer exactement. De plus, il faut se garder d’adopter une logique exclusivement comptable en matière de santé au travail, et sans doute M. Gremetz sera-t-il d’accord avec moi sur ce point.

M. Maxime Gremetz. France Télécom, ça marche!

M. Francis Vercamer, rapporteur pour avis, pour le travail. Au fil des auditions, je me suis rendu compte que la prévention de nouveaux risques professionnels peut se trouver freinée par la peur de faire jurisprudence et de créer un nouveau poste d’indemnisation, dans l’idée que prévenir implique en soi la reconnaissance du caractère réparable d’un risque.

Si le PST 1 a conduit à créer de nouvelles instances de santé au travail, la gouvernance du système de prévention des risques professionnels demeure perfectible, car elle est encore trop complexe. Le deuxième plan Santé au travail 2010-2014 doit donc impérativement donner des objectifs communs aux structures opérationnelles nationales. La coordination des structures devrait être assurée par le nouveau Conseil d’orientation sur les conditions de travail – que vous présidez, monsieur le ministre –, mais il ne dispose pas, à mon sens, de moyens suffisants pour l’accomplir: il n’a pas de budget propre et trois personnes seulement ont été mises à sa disposition.

Par ailleurs, le COCT n’a pas encore établi de contact avec son réseau régional, et l’Observatoire de la pénibilité, chargé, au sein du COCT, d’apprécier la nature des activités pénibles, n’a pas été mis en place. Or il me paraît essentiel que cet observatoire soit très rapidement installé, au plus tard en janvier2010, eu égard au rendez-vous mi-2010 sur les retraites au sein du Conseil d’orientation des retraites. En effet, la question de la pénibilité ne concerne pas seulement les retraites, mais touche d’une manière globale les conditions de travail et la santé au travail.

Le COCT doit d’abord définir la notion de pénibilité, avant que celle-ci soit abordée dans les discussions sur la réforme de l’assurance vieillesse, ce qui permettrait d’ailleurs de réfléchir à d’autres formes de compensation et d’éviter ainsi d’accentuer encore le déséquilibre du régime des retraites.

Au niveau national, les moyens de la recherche doivent aussi être rassemblés. À cet égard, la fusion entre l’AFSSET et l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments, l’AFSSA, appelle quelques commentaires. Je m’interroge en effet sur la capacité de la nouvelle agence à traiter des problématiques spécifiques au milieu du travail, tels les risques psychosociaux ou les troubles musculo-squelettiques, les TMS, qui n’ont pas vraiment de lien avec la sécurité sanitaire et alimentaire. Un fléchage des crédits dédiés aux investigations sur les risques professionnels me paraît indispensable. On aurait également pu envisager, avant de choisir de fusionner l’AFSSA et I’AFSSET, de regrouper autrement les organismes de recherche sur la santé au travail, pour créer un pôle national de recherche sur les risques professionnels.

Au niveau régional, la coordination des acteurs peut également être améliorée. On pourrait, par exemple, étudier le rapprochement entre les observatoires régionaux de santé au travail, les ORST, gérés par les partenaires sociaux, et les comités régionaux de prévention des risques professionnels, les CRPRP, qui viennent d’être créés. Des représentants des services de santé au travail devraient, de plus, être intégrés aux structures de concertation. Au final, la multiplicité des acteurs en présence et leur manque de coordination ne permettent pas une diffusion suffisante des politiques de prévention jusqu’aux entreprises, qui sont pourtant le niveau concret d’application des mesures visant à réduire les accidents du travail et les maladies professionnelles. C’est le reproche principal que l’on peut formuler contre le PST 1: son opérationnalité a été limitée. Il faut toutefois relever que vous avez, monsieur le ministre, mis en place un plan d’urgence dans le cadre du dernier Conseil d’orientation sur les conditions de travail; je vous en félicite et vous en remercie au nom des salariés des entreprises, qui en ont bien besoin.

M. François Rochebloine. Très bien!

M. Francis Vercamer, rapporteur pour avis, pour le travail. Le développement de la recherche ne s’est pas assez traduit par la diffusion d’outils innovants aux entreprises.

Outre l’amélioration de la gouvernance du système de prévention des risques professionnels, l’un des défis majeurs du futur PST 2 réside dans le traitement et la prévention des risques psychosociaux. Selon le modèle de Karasek, le risque psychosocial résulte de la combinaison, dénommée jobstrain , d’une forte charge mentale au travail et de faibles marges de manœuvre. Cette situation peut être aggravée par le manque de soutien de sa hiérarchie ou de ses collègues.

En 2003, selon la DARES, 23 % des salariés français se trouvent dans une situation de jobstrain , mais l’exposition aux risques psychosociaux est inégalement répartie entre les sexes, les catégories socioprofessionnelles ou les métiers. Parmi les secteurs d’activité, l’hôtellerie-restauration, les transports et les activités financières connaissent les proportions les plus élevées de salariés soumis au jobstrain . Les risques psychosociaux mettent en jeu l’intégrité physique et la santé mentale des salariés. Impactant le bon fonctionnement des entreprises, ils représenteraient, selon les experts du Bureau international du travail ou du Gouvernement, un coût économique s’élevant entre 1 % et 4 % du produit intérieur brut, soit entre 19,5 et 78 milliards d’euros pour la France en 2008.

La connaissance des risques psychosociaux demeure cependant encore parcellaire. En effet, le modèle de M. Karasek ne rend pas totalement compte du ressenti des salariés: seuls 23 % des salariés sont considérés en situation de jobstrain , alors que 34 % jugent que leur travail est « très stressant ». D’autres éléments jouent en effet, sur le développement de ces risques: la crainte de la perte d’emploi ou la taille de l’entreprise, les salariés des petites structures étant, selon les personnes auditionnées, moins soumis au stress. La création d’un indicateur national des risques psychosociaux est aujourd’hui à l’étude, suite au rapport de M. Nasse et M. Légeron.

Le dernier axe de mes travaux a porté sur l’avenir des services de santé au travail, après l’échec de la négociation menée par les partenaires sociaux, en septembre dernier. La médecine du travail se trouve dans une situation critique, en particulier en termes d’effectifs.

Mme la présidente. Il faut conclure, monsieur Vercamer.

M. Francis Vercamer, rapporteur pour avis, pour le travail. En 2008, la diminution du nombre de médecins du travail s’est poursuivie: on en recensait 6915 pour toute la France, contre plus de 7300 en 2004.

M. Maxime Gremetz. Scandaleux!

M. Francis Vercamer, rapporteur pour avis, pour le travail. Cette tendance devrait s’accentuer dans les prochaines années, 75 % des médecins du travail ayant plus de 50 ans.

M. Maxime Gremetz. Absolument!

M. Francis Vercamer, rapporteur pour avis, pour le travail. Or, dans le même temps, le nombre de places ouvertes à l’internat pour la médecine du travail n’a pas été relevé: entre2008 et2012 ne seront formés que 370 nouveaux médecins du travail.

M. Maxime Gremetz. Exactement! Et c’est pourquoi les patrons s’achètent des médecins du travail!

M. Francis Vercamer, rapporteur pour avis, pour le travail. La réforme entamée en 2000 a tout de même permis deux avancées de taille: elle a introduit une pluridisciplinarité des équipes de santé au travail et a revalorisé leur action dans les entreprises. Cependant, cette réforme se trouve encore inégalement appliquée. Il me semble que l’on pourrait étudier une évolution du statut des services de santé au travail vers un système davantage fondé sur la mutualisation, qui garantirait l’indépendance des médecins et des équipes pluridisciplinaires.

M. Maxime Gremetz. Oui!

M. Francis Vercamer, rapporteur pour avis, pour le travail. Ces organismes pourraient se développer à une échelle territoriale, ou par secteurs d’activité.

Mme la présidente. Il faut vraiment conclure, monsieur Vercamer.

M. Francis Vercamer, rapporteur pour avis, pour le travail. Par ailleurs, au vu de la démographie médicale, la question de la réforme de la procédure d’aptitude se pose. Deux options sont en débat: soit le transfert aux médecins généralistes de la charge de la visite individuelle, mais cela suppose qu’ils soient formés au droit du travail, soit l’espacement des visites individuelles accomplies par les médecins du travail, qui leur permettrait de se consacrer pleinement à leur tâche de prévention. En tout état de cause, une coordination accrue de leur action avec l’inspection du travail me semble fondamentale.

La commission ayant émis un avis favorable à l’adoption des crédits pour 2010 de la mission « Travail et emploi », je vous invite, mes chers collègues, à les approuver également.

M. François Rochebloine. Très bien!

M. Maxime Gremetz. Les rapporteurs exagèrent: ils dépassent leur temps de parole!

Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz.

M. Maxime Gremetz. J’espère que les orateurs bénéficieront de la même indulgence que les rapporteurs!

Mme la présidente. Allons, monsieur Gremetz!

Vous avez la parole, madame Dalloz.

Mme Marie-Christine Dalloz. Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, au regard des chiffres du premier semestre, les derniers chiffres du chômage sont une moins mauvaise nouvelle que prévu. Pour septembre, le nombre de chômeurs de catégorie A a augmenté de 21600, ce qui représente une hausse de 0,8 %, pour atteindre 2,5749 millions selon les statistiques publiées par Pôle emploi.

La hausse est bien en deçà des envolées du début d’année et conforte l’idée que la mise en œuvre des différentes mesures de lutte contre le chômage ou du moins de soutien à l’économie commence à produire ses effets. Cette tendance vient en outre appuyer l’analyse du bureau de l’UNEDIC, qui a dernièrement revu ses prévisions à la baisse et table désormais sur 456000 chômeurs de catégorie A de plus en 2009, contre 591000 annoncés au printemps dernier. Toutefois, nous restons réalistes: des prévisions moins mauvaises ne sont pas de bonnes prévisions, et nous savons bien que la croissance actuelle est trop faible pour créer des emplois.

La lutte contre le chômage, qui passe par le soutien aux demandeurs d’emploi et l’accompagnement des mutations économiques – les deux premiers programmes de cette mission – reste la priorité absolue, pour 10,521 milliards de crédits de paiement au titre du budget 2010.

En premier lieu, je tiens à saluer au nom de tous mes collègues du groupe UMP, le personnel de Pôle Emploi, qui mène de front cette grande réforme qu’est la fusion et la création du nouvel opérateur, avec les efforts d’adaptation que cela demande, alors que parallèlement il doit faire face à l’afflux massif de personnes en recherche d’emploi. L’État continue à accompagner cette mutation en renouvelant sa subvention principale de fonctionnement à hauteur de 1,36 milliard d’euros.

Nous sommes derrière vous, monsieur le ministre, dans votre volonté de ne pas rester au milieu du gué, et d’avancer pour la mise en place de sites mixtes.

M. Jean Roatta. C’est vrai!

Mme Marie-Christine Dalloz. Cette mesure est vivement attendue par les demandeurs d’emploi, qui verront ainsi leurs parcours facilité.

Je sais que vous êtes à l’écoute des inquiétudes des agents et que vous travaillez, dans ce cadre, sur la formation et sur l’amélioration du portefeuille des dossiers à traiter pour de meilleures conditions de travail au profit des personnels de Pôle Emploi; nous souhaiterions avoir des précisions sur ce sujet.

Nous souhaiterions avoir des précisions sur ce point. Je sais que, ce matin, chaque salarié de Pôle emploi a reçu un questionnaire lui permettant d’évoquer ses conditions de travail. La prise en compte des difficultés devrait aboutir à une nette amélioration du climat social.

L’État se doit d’être exemplaire quant aux conditions de travail de ces agents. Nous reviendrons plus largement au cours de l’année 2010 à cette question de la santé au travail et des risques psychosociaux, sur laquelle la commission des affaires sociales va travailler grâce à la création d’une mission d’information. Les députés des groupes UMP et NC approfondissent plus particulièrement leur réflexion sur la souffrance au travail – une séance plénière se tient cet après midi sur ce sujet.

Le programme 111 est doté de 78 millions d’euros et concerne l’amélioration du droit, sa diffusion, le contrôle de sa mise en œuvre, le conseil et le dialogue social. Ce n’est pas un sujet que la droite occulte.

Sur le programme « Accès et retour à l’emploi », je me réjouis de l’attention qui est donnée à la coordination du service public de l’emploi et notamment du financement prévu pour 2010 de 205 maisons de l’emploi. Nous attendons donc rapidement la publication du nouveau cahier des charges. Il pérennise enfin ces structures dont le rôle fédérateur, et adapté au plus près des difficultés de chaque bassin d’emploi, apporte des réponses concrètes aux demandeurs d’emploi et aux entreprises. En juin2008, après de nombreuses auditions, dans un rapport d’information concernant l’avenir des maisons de l’emploi, j’avais préconisé trois axes de réflexion: monsieur le ministre, je constate avec satisfaction que le nouveau cahier des charges les retient.

Plusieurs députés du groupe de l’Union pour un mouvement populaire . Bravo!

M. Christian Eckert, rapporteur spécial . Quelle solidarité!

Mme Marie-Christine Dalloz. Pour ce qui concerne la dotation spécifique inscrite sur la mission « Plan de relance de l’économie », le budget reconduit un certain nombre de mesures décidées en 2009. Je veux souligner l’indispensable poursuite de l’indemnisation du chômage partiel et les politiques de formation qui l’accompagnent, l’enveloppe de 360000 contrats aidés, et les mesures favorisant les contrats d’apprentissage.

Je tiens à saluer également la poursuite et l’amplification de l’expérimentation du contrat de transition professionnelles, qui donne de bons résultats. Actuellement déployé sur 21 bassins d’emploi, les plus touchés par les difficultés économiques, ce dispositif doit être implanté sur 40 bassins au total et, nous l’espérons, ouvert à de nouveaux publics, notamment les personnes en fin de CDD et en mission d’intérim. Je sais, monsieur le ministre, que vous menez une concertation sur ce sujet; pouvez-vous nous apporter quelques précisions?

Enfin, nous assisterons malheureusement au cours de l’année 2010 à une augmentation mathématique du nombre de chômeurs en fin de droits. Une ligne budgétaire est prévue puisque le fonds de solidarité est abondé de 1,519 milliard d’euros, soit 66 millions d’euros de plus qu’en 2009. Je sais que les partenaires sociaux ont ouvert récemment la seconde phase de leurs discussions entamées au printemps sur les mesures d’urgence pour l’emploi. Au sein du groupe UMP, nous suivrons de près les travaux du groupe de travail qui a été créé à ce sujet.

Il n’y a, à mon sens, pas plus de triomphalisme que de catastrophisme à faire. Nous disposons d’outils nombreux et diversifiés pour répondre de manière adaptée aux difficultés, un service public de l’emploi qui se modernise comme jamais. Je souhaiterais que, tous ensemble, nous diffusions largement ces mesures afin que la mobilisation derrière le Gouvernement soit totale. C’est le message que nous voulons adresser à tous nos concitoyens inquiets, qui ont perdu leur travail ou vivent des périodes de chômage partiel.

Les résultats commencent à être au rendez-vous et nous donnons dès à présent les moyens aux entreprises de se préparer à la sortie de crise. C’est pourquoi les membres du groupe UMP voteront les crédits de la mission « Travail et emploi ». (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Liebgott.

M. Michel Liebgott. Chacun comprendra que l’analyse que je vais présenter est assez différente de celle de notre collègue de l’UMP. La crise est profonde et nous sommes encore dans le rouge. C’est plus particulièrement vrai en France. J’en veux pour preuve le chiffre du chômage du mois dernier: il est en progression de 1,3 % sur un mois et de 16,6 % par rapport à septembre2008.

En commission des affaires sociales, vous nous avez laissé croire que la situation était meilleure en France. Je veux réaffirmer ici qu’en Allemagne le taux de chômage est aujourd’hui équivalent à celui que nous avions en France voilà un an. Les chiffres du dernier mois montrent chez nos voisins une diminution de 118000 du nombre des chômeurs, soit 0,3 % de moins. Le taux de chômage en Allemagne est de 7,7 %: il était de 7,8 % en France à la fin de l’année dernière, contre 9,5 % environ aujourd’hui et 10 % voire 10,5 % l’année prochaine. C’est dire si nous ne sommes pas, loin s’en faut, les meilleurs élèves de la classe!

De surcroît, ce sont les secteurs stratégiques qui sont les plus en crise: l’industrie perd encore 52000 emplois, après une perte de 48000 emplois au premier trimestre 2009 et de 26000 emplois au quatrième trimestre 2008. La désindustrialisation est en route et c’est une source d’inquiétude supplémentaire puisqu’il s’agit d’emplois structurants.

On oublie de le dire: ces pertes d’emplois industriels ont des conséquences sur l’intérim et les sous-traitants. L’intérim est véritablement laminé, ce secteur a perdu 225000 emplois. J’en parle en connaissance de cause: à Gandrange, on a acté la disparition d’une aciérie, soit la perte de 575 emplois, mais on n’évoque pas le sort de tous les intérimaires et la suppression de tous les CDD. Ils ne sont pas comptabilisés dans le plan social.

Il faut souligner aussi que les entreprises utilisent parfois – c’est l’effet d’aubaine – cette situation de crise pour hâter des restructurations qui n’étaient pas forcément nécessaires. C’est dire si notre analyse est fondamentalement différente de la vôtre!

Alors, ce projet de budget pour 2010 est-il à la hauteur de la crise et des angoisses de nos concitoyens? Non. À périmètre constant, il est en diminution de 1,73 %. Ce qui est grave, c’est que l’année prochaine nous repartirons pour le budget 2011 avec une mission en baisse. C’est dire si l’effet d’optique lié au plan de relance est intelligent sur le plan de la tactique gouvernementale mais catastrophique sur celui des politiques de l’emploi! À la suite des interventions récurrentes du Président de la République, vous faites des coups successifs mais, au bout du compte, on ne sait plus où on en est. Une chose est sûre en tout cas: la mission est en diminution et les futurs projets de loi de finances partiront sur des crédits en baisse. C’est dire si l’emploi n’est pas votre priorité sur le plan structurel – je reviendrai sur les quelques actions conjoncturelles que vous engagez. Vous dites que votre priorité, c’est la situation des entreprises. Il ne s’agit pas en tout cas de celles qui créent des emplois. Ainsi, la réduction de la TVA n’a pas eu un effet clairement constaté dans les salaires ou les embauches.

Si nous examinons le programme 102 « Accès et retour à l’emploi », nous constatons qu’il paie un lourd tribut avec des coupes très importantes: moins 2,5 %. Or ce programme concerne précisément les populations les plus en difficulté, les plus éloignées du marché de l’emploi. S’agissant par exemple du chômage des jeunes de moins de vingt-cinq ans, on est passé en un an de 18,7 % à 23,9 %. C’est dire si vous ne vous préoccupez pas de ces populations plus défavorisées. On pourrait multiplier les exemples et mes amis y reviendront.

S’agissant de l’AER, on aurait pu penser, puisque les plans sociaux se multiplient, que les seniors peinent à trouver des emplois, que vous alliez reconduire cette allocation en 2010. Eh bien, tel n’est pas le cas! Il en est de même pour l’allocation de fin de formation. Aucune nouvelle entrée: on se contente de prolonger les entrées 2009; Jean-Patrick Gille y reviendra plus longuement.

S’agissant de l’insertion par l’activité économique au travers des entreprises d’insertion, vous n’avez pas choisi de revaloriser « l’aide au poste ». Cela fait pourtant des années que le Comité national des entreprises d’insertion vous demande de le faire. Elle concerne en effet des populations en difficulté et pourrait servir de passerelle vers un retour à l’emploi pérenne. Le Comité dit que l’AP n’a pas changé depuis dix ans. Certes, je n’ai pas vérifié tous les bleus mais depuis 2006, en tout cas elle est toujours de 9681 euros. Le Comité considère à juste titre qu’il faudrait que l’AP atteigne 12500 euros pour que cette filière puisse subsister. Nous pouvons tous citer des exemples. Dans ma circonscription, une entreprise qui fait de la récupération et du traitement des déchets permet ainsi à des gens qui ne travailleraient pas autrement de le faire et donne la possibilité de passer d’un travail temporaire à un travail définitif.

Vous redécouvrez les emplois aidés. Une année, on a critiqué leur disparition, l’année suivante, on a considéré que c’était un effet d’aubaine: cette fois-ci, vous avez compris que c’était la seule solution. Le taux de subvention de l’État passe ainsi de 70 % à 90 % – cela a été acté fin mars dans le fameux plan de relance. S’il a fallu tant de temps pour que les collectivités locales acceptent à nouveau de jouer le jeu, c’est que vous aviez instauré un climat de défiance. Les collectivités locales ne peuvent pas gérer au coup par coup, y compris les emplois aidés. L’emploi aidé ne doit pas servir uniquement à se tirer d’une mauvaise passe: il faut prévoir aussi une formation si l’on veut qu’il débouche sur un emploi définitif. Si vous pouvez espérer que les emplois aidés compensent les effets de la crise, c’est bien parce que les collectivités territoriales se mobilisent: elles croient dans ce dispositif même si elles ne croient pas à vos promesses.

Soyons attentifs à ce qu’il n’y ait pas de rupture entre la prescription des anciens contrats et le nouveau contrat. Encore une de vos marques de fabrique: vous changez continuellement les règles du jeu. Nous verrons bien ce que donnera le contrat unique d’insertion. Veillons en tout cas à ce que cette mise en place ne vienne pas perturber ceux qui bénéficient aujourd’hui d’un contrat aidé. J’ai connu cette situation avec les dispositions relatives aux adultes relais. M. Borloo prétendait dans cet hémicycle qu’elles n’étaient pas supprimées alors que nous constations sur le terrain que les associations avaient dû licencier les personnes concernées pour les réembaucher quelques mois après. Il y a le discours que l’on tient ici et la réalité du terrain.

C’est vrai aussi s’agissant de Pôle emploi, et Monique Iborra et Annick Girardin y reviendront. Il faut être dans l’illusion ou la méconnaissance totale du terrain pour laisser croire que cela se passe bien. Nous avions émis des réserves au moment de la réforme. Nous constatons aujourd’hui qu’un conseiller de Pôle emploi rencontre non pas 60 personnes mais 150 ou 160, alors qu’on nous en avait annoncé 30 pour les publics défavorisés. L’entretien unique n’est donc pas du tout traduit dans les faits, loin s’en faut. Comme je le disais précédemment, ce sont les publics les plus défavorisés, ayant le plus besoin d’accompagnement, qui, une fois de plus, paient le tribut le plus lourd à la crise, et non pas ceux qui habituellement s’en sortent.

D’ailleurs, les syndicats de Pôle emploi, avec lesquels vous négociez une convention collective, ne demandent qu’une seule chose: un peu de détente et une suspension de la réforme.

Calmons-nous, allons-y tranquillement! Ne mettons pas la pression, sinon nous arriverons à une situation similaire à celle que nous connaissons malheureusement à France Télécom, ce qui aurait évidemment – mais ce paramètre ne peut être comptabilisé‚– des conséquences néfastes sur les publics les plus défavorisés.

En effet, ces personnes peuvent elles aussi souffrir, sur les plans moral et psychologique, si elles ne se sentent pas prises en charge et si elles ne peuvent pas bénéficier d’autre chose que d’un simple coup de fil. Vous savez très bien que rien ne remplace la rencontre individualisée.

En ce qui concerne les contrats d'autonomie, on pourrait presque rire du résultat. Dans le cadre du plan espoir banlieues, Fadela Amara nous avait annoncé qu’on allait enfin mettre fin à la « glandouille » dans les quartiers en difficulté.

Je sais bien qu’il est devenu à la mode d’utiliser des expressions comme « casse-toi », ou « nettoyer au Kärcher ». Plus récemment encore, on nous a parlé d’empêcher les jeunes de moins de treize ans de traîner dans les rues.

M. Jean-Marc Roubaud. Cela existe!

M. Michel Liebgott. Je considère d’ailleurs pour ma part, qu’il est tout à fait normal que des enfants de cet âge ne traînent pas dans les rues. La question ne se pose même pas. Le problème peut exister, mais il est du domaine de la responsabilité parentale. Ce n’est pas à l’État, me semble-t-il, de réglementer la vie des familles. (M. François Rochebloine s’exclame.)

Cela dit, ce qu’il faut souligner, c’est qu’on n’a pas mis fin à la « glandouille », tout simplement parce qu’il n’y a pas suffisamment de contrats d’autonomie, alors qu’on les avait annoncés à grand renfort de publicité.

C’est une véritable catastrophe, sur laquelle Monique Iborra reviendra plus longuement, et qui coûte extrêmement cher: ces contrats d'autonomie ont déjà coûté plus de 30 millions, pour moins de 1000 emplois ou formations, soit 30000 euros pièce. Cela fait tout de même cher l'emploi trouvé!

À ce sujet, je me permettrai une comparaison. Tout à l’heure, je demandais que l’aide au poste pour les emplois d’insertion soit revalorisée. Son montant est de 9681 euros, je le rappelle, à rapporter aux 30000 euros que je viens d’évoquer.

Faites les comptes! Il aurait peut-être été mieux de valoriser ce qui existait déjà plutôt que de lancer un plan de communication en proclamant qu’on allait mettre fin à la « glandouille » dans les quartiers défavorisés.

Je ne m’attarderai pas sur l’AFPA, car Jean-Patrick Gille en traitera longuement, mais je dirai qu’il s’agit, comme pour Pôle Emploi, d’un échec patent, et le pire est sans doute encore à venir pour2010!

Sur le programme 103 « Accompagnement des mutations économiques et développement de l'emploi », là encore, la plus élémentaire prudence aurait voulu que les moyens affectés ne soient pas revus à la baisse. Or ils le sont en valeur brute: les crédits de ce programme diminuent de 11,7 %.

Nous aurions souhaité qu’ils ne subissent pas de baisse. En Allemagne, l’ancien gouvernement, auquel participait d’ailleurs le SPD, avait largement utilisé les outils contracycliques. Laurent Hénart a d’ailleurs dit lui-même qu’il pensait que ces outils, comme les contrats aidés ou les mesures de chômage partiel, n’étaient pas suffisamment utilisés.

Je le pense également. Nous ne sommes pas allés assez loin dans ce domaine, et nous allons le constater dans les mois qui viennent. Nous le voyons déjà, d’ailleurs, en comparant notre situation avec celle des pays voisins.

Le chômage partiel, en particulier, est un formidable amortisseur social.

M. Maxime Gremetz. Ah bon, vous encouragez le chômage partiel?

M. Michel Liebgott. Or, aujourd’hui, la ligne budgétaire n’est pas suffisamment abondée. Vous verrez qu’au lieu du chômage partiel nous aurons des licenciements et des plans sociaux.

C’est la raison pour laquelle nous présenterons sur ce sujet un nouvel amendement, le premier ayant été rejeté par la commission des finances.

Deux autres exemples sont évocateurs.

La dotation de l’aide au conseil et à la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences concerne tout ce qui favorise la mobilité interne et l'adaptation à de nouveaux besoins dans l'entreprise en fonction des compétences des personnes. Elle est fixée à 7 millions d'euros, contre 11 millions d'euros en2009, ce qui, pour nous, est incompréhensible.

Il en va de même pour la dotation destinée aux engagements de développement de l'emploi et des compétences, qui passe quant à elle de 30,8 millions en2009 à 11,8 millions d'euros en2010, ce qui ne nous paraît pas du tout logique compte tenu de la situation de crise que nous vivons.

Au titre de l'action 2 « Amélioration de l'insertion dans l'emploi par l'adaptation des qualifications et la reconnaissance des compétences », nous regrettons également une baisse des crédits de 2,1 %, alors que les dispositifs visés correspondent justement à des mesures qui pourraient être structurelles.

Je pense en particulier à la baisse de 10,3 % des exonérations de charges pour les contrats d'apprentissage et à la diminution que connaissent les contrats de professionnalisation.

À cet égard, en ce qui concerne les conventions de reclassement personnalisé, ou CRP, et les contrats de transition professionnelle, les CTP, nous constatons certes qu’une augmentation intervient. Celle-ci paraît même exponentielle: 164 % pour les CRP et 645 % pour les CTP.

Voilà qui est bien. Mais pourquoi ne pas les étendre à l’ensemble du territoire et, surtout, pourquoi le dispositif figure-t-il dans le plan de relance alors que, de notre point de vue, il pourrait s’agir d’une bonne solution de long terme pour assurer la transition professionnelle vers un emploi pérenne?

Vous continuez à en faire simplement un outil provisoire et expérimental. Nous pensons qu’il s’agit d’une erreur, car même en dehors d’une période de crise il faut pouvoir les utiliser. En effet, nous vivons dans une société qui, de plus en plus, verra les salariés changer de travail. Et, pour ce faire, il faut évidemment qu’ils puissent se former en permanence.

Pour conclure, le groupe SRC n’adoptera évidemment pas ce budget, parce que nous considérons qu’il n’est pas à la hauteur de la gravité de la situation, marquée par la nouvelle hausse du chômage qui s’annonce, en France comme dans d’autres pays, mais peut-être plus encore chez nous.

Le commissaire européen chargé des affaires économiques, M. Alumnia, disait d’ailleurs que, certes, nous allions sortir petit à petit de la récession, mais que l’augmentation du PIB serait de l’ordre de 0,3 %, ce qui ne permettra par de créer des emplois supplémentaires. La situation de l’emploi restera donc un point noir. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. Jean-Marc Roubaud. Quel pessimisme!

Mme la présidente. Je vous remercie d’avoir respecté votre temps de parole, mon cher collègue.

M. Maxime Gremetz. Cela n’a pas été le cas des différents rapporteurs!

Mme la présidente. Raison de plus pour ne pas perdre de temps.

La parole est à M. Maxime Gremetz. Vous disposez de dix minutes, mon cher collègue.

M. Maxime Gremetz. Je remercie nos rapporteurs, qui ont pris tout leur temps pour nous exposer leurs réflexions profondes. Mais je ne sais pas si elles vont dans le bon sens: disons donc plus simplement qu’il s’agissait de réflexions.

J’ai tellement de choses à vous dire que je ne sais par où commencer.

Puisque l’on parle du budget de l’emploi, je noterai que celui-ci est en baisse de 400 millions d’euros, alors que nous connaissons une montée du chômage extraordinaire. C’est donc le poste budgétaire qui aurait dû être le plus augmenté.

M. Jean-Marc Roubaud. Nous dépensons mieux!

M. Maxime Gremetz. Épargnez-moi ce genre de réflexion: je suis capable d’aller faire campagne dans votre région!

M. Jean-Marc Roubaud. Avec plaisir!

M. Maxime Gremetz. Il faut augmenter le budget, monsieur Wauquiez.

Il ne suffit de visiter le Pôle emploi à Amiens et de dire que tout y est extraordinaire. La preuve: tout le monde y est en grève aujourd’hui!

Revenez à Amiens!

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État chargé de l’emploi. Volontiers, votre accueil était si chaleureux! (Sourires.)

M. Maxime Gremetz. Arrêtez donc de jeter de la poudre aux yeux.

Vous savez, certaines personnes me disent aujourd’hui que non seulement vous conduisez une mauvaise politique, mais qu’en plus vous les prenez pour des c…. Or les Français n’aiment pas du tout cela! Ne leur racontez pas d’histoires.

Si je regarde votre budget, je constate que le fonds d’investissement social, qui s’élève à 1,4 milliard, est en augmentation de 200 millions. Seulement!

Mais je ne resterai pas dans les généralités. Certains chiffres traduisent bien la situation. De ce point de vue, l’INSEE est parfait: personne ne peut discuter ses chiffres.

Dans ma région, je viens de recevoir un document qui parle de lui-même. On y lit ceci: « En Picardie, l’emploi salarié perd 4,9 % de ses effectifs au deuxième trimestre2009 par rapport au deuxième trimestre de l’année précédente: 21700 postes ont été supprimés sur un an. »

Cela se passe de commentaires!

M. Jean-Marc Roubaud. Prenez plutôt les chiffres du troisième trimestre!

M. Maxime Gremetz. Ne vous moquez pas des chômeurs, monsieur Roubaud! Vous ne savez pas ce qu’ils vivent alors que moi je les fréquente.

M. Jean-Marc Roubaud. Je connais le monde du travail!

M. Maxime Gremetz. De l’autre côté de la barrière, comme patron!

Je poursuis la lecture de ce document officiel: « L’intérim est particulièrement touché par la crise économique. Le recul de l’emploi se poursuit dans le commerce, l’hébergement-restauration et l’industrie. Le secteur de la construction jusqu’ici épargné perd également des emplois ce trimestre. » Or, vous savez que « quand le bâtiment va, tout va ».

Ce document, qui donne des chiffres précis, est à la disposition de tous. Mais que voit-on par ailleurs?

Je me suis donné beaucoup de mal pour ressortir la liste de toutes les interventions que j’ai faites auprès de M. Estrosi et de Mme Lagarde, et je les ai apportées avec moi.

Je m’excuse, monsieur le secrétaire d’État, mais je ne vous ai pas écrit…

M. Jean Roatta. C’est dommage!

M. Maxime Gremetz. En effet, vous êtes trop « petit » et il faut respecter la hiérarchie.

Mais, comme dirait le Président de la République, les membres du Gouvernement doivent être solidaires. Je suppose donc que vous l’êtes.

M. Jean Roatta. Solidaire et compétent!

M. Maxime Gremetz. Au fait, où est M. Darcos? Devant qui est-ce que je parle? C’est le mépris total! Il ne faudrait pas faire de l’anticommunisme primaire!

Dans ces conditions, madame la présidente, je demande une suspension de séance.

Suspension et reprise de la séance

Mme la présidente. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix heures cinquante-cinq, est reprise à onze heures cinq.)

Mme la présidente. La séance est reprise.

Veuillez poursuivre, monsieur Gremetz, vous avez encore cinq minutes.

M. Maxime Gremetz. Ah non!

Mme la présidente. Je vous en prie, ne perdez pas votre temps.

M. Maxime Gremetz. Nous sommes dans une situation tout à fait particulière. Et vous savez parfaitement que je n’abuse jamais de mon temps de parole!

Mme la présidente. Chacun le sait, monsieur Gremetz.

M. Maxime Gremetz. Je rappelle, pour M. le ministre des affaires sociales – sinon je parle dans un violon –, que j’ai apporté un document officiel de l’INSEE pour la région picarde.

Plutôt que de dire que le chômage augmente, regardons concrètement ce que cela donne: en Picardie, je le répète, l’emploi salarié perd 5 % de ses effectifs au deuxième trimestre 2009, par rapport au deuxième trimestre de l’année précédente; 21700 postes ont été supprimés sur un an. L’intérim est particulièrement touché par la crise économique – la Picardie, vous le savez, est la première région pour l’intérim. Le recul de l’emploi se poursuit – que tous ceux qui parlent de la reprise écoutent bien! – dans le commerce, l’hébergement-restauration et l’industrie. Le secteur de la construction jusqu’ici épargné – « quand le bâtiment va, tout va », dit-on – perd également des emplois ce trimestre.

Ces chiffres sont plus intéressants que de grands discours sur le chômage. Avec ces 21700 personnes qui ont perdu leur emploi, ce sont aussi des atouts industriels extraordinaires de la région qui s’en vont, car je vais vous expliquer comment cela se passe ensuite, et pourquoi. Le problème se pose en particulier pour l’industrie et les grands groupes: nous avons, en Picardie, un tissu très dense de petites et moyennes entreprises; mais un salarié sur trois est employé par les grands groupes et les multinationales, comme Valéo – j’y travaillais, mais j’ai été licencié par un ministre du travail, ce n’est rien du tout, je dis cela en passant –, comme Goodyear, Continental, Nexans… Voilà, on ne peut pas dire que j’exagère!

Je vais vous remettre un autre document. C’est un travail que j’ai fait préparer: vous savez que je suis en contact avec 146 entreprises de la région. C’est d’ailleurs moi qui donne les informations à l’inspecteur du travail! (Rires.)

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d’État. Un peu de respect pour l’inspection du travail!

M. Maxime Gremetz. Mais c’est vrai! Vous devriez me payer! (Rires et exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

M. Jean Roatta et M. Jean-Marc Roubaud. Pour le spectacle!

M. Maxime Gremetz. Car les salariés ne s’adressent pas à l’inspection mais à ceux qui connaissent les entreprises, vous le savez bien! Si vous voulez le savoir, demandez à la préfecture, où nous avons une réunion, ou au directeur du travail, qui me dit de l’alerter dès que j’ai un problème – mais ce n’est pas moi qui ai des problèmes, ce sont les entreprises. Et quelles entreprises!

J’ai réalisé ce travail pour vous le remettre: c’est une liste de soixante-sept entreprises, de soixante-sept groupes qui font des profits, et qui utilisent le chômage partiel – utilisé comme amortisseur social, paraît-il – après avoir licencié les intérimaires, et avant de lancer des plans de licenciement, des restructurations, et pour finir des délocalisations! Voilà la réalité!

Cette liste de soixante-sept entreprises reprend toutes mes interventions, restées sans réponse – sauf des réponses m’assurant que c’est noté, qu’on va regarder. Je ne parle pas de vous, monsieur le secrétaire d’État, mais plutôt de Mme Lagarde et de M. Estrosi: vous êtes moins concerné, puisqu’il s’agit d’industrie et qu’il y a maintenant un ministre chargé de l’industrie.

Regardez cette liste: vous verrez que ces soixante-sept entreprises emploient 15943 salariés constants. Ça, c’est la connaissance du terrain! Et je suis, moi, obligé de transmettre à la préfecture, aux inspecteurs du travail: il n’y a en réalité aucune étude, à part celle de l’INSEE – mais, on le sait, elle est décalée dans le temps. La situation est dramatique!

Monsieur le secrétaire d’État, je voudrais notamment vous interpeller sur Nexans. Car on peut bien parler du budget de l’emploi – j’ai tout un discours là-dessus – mais je veux partir de la réalité concrète, montrer comment les choses se passent. On peut parler du budget, des mesures, des contrats, pendant des heures! Mais la question, c’est: comment allons-nous faire pour tous ces chômeurs et toutes ces entreprises, qui…

Mme la présidente. Pouvez-vous envisager de conclure, s’il vous plaît?

M. Maxime Gremetz. Une seconde, je vous en prie: vous avez été généreuse avec d’autres. Je ne sais pas pourquoi, mais j’ai toujours un problème avec les présidents socialistes! (Rires et exclamations.)

Mme la présidente. Je vous en prie!

M. Maxime Gremetz. En général, les présidents de droite sont plus coulants!

Mme la présidente. Vous perdez du temps, c’est dommage.

M. Maxime Gremetz. Je le répète, c’est toujours comme ça! Pourtant, vous laissez parler les autres.

Mme la présidente. Vous n’avez pas à faire ce genre de remarque. Je vous en prie, concluez.

M. Maxime Gremetz. Pas d’autoritarisme, madame la présidente, autrement, vous savez, on va gagner beaucoup de temps: j’ai ma feuille rose, maintenant!

Mme la présidente. Votre temps s’écoule. Dans très peu d’instants, je serai obligée de vous faire conclure.

M. Maxime Gremetz. Je termine. Cela vous paraît si peu intéressant! Pourtant, de votre côté, c’est du blabla, je m’excuse!

J’ai ici mes notes.

M. Jean Roatta et M. Jean-Marc Roubaud. Il faudra les donner, c’est intéressant.

M. Maxime Gremetz. Je les donnerai, bien sûr: je savais que la présidente serait comme ça. Je remettrai au ministre toutes les listes, par département: Aisne, Oise, Somme. Car la situation est dramatique.

Mme la présidente. Concluez, s’il vous plaît.

M. Maxime Gremetz. Vous permettez que je termine?

Mme la présidente. Je vous en prie: concluez.

M. Maxime Gremetz. Arrêtez! L’anticommunisme primaire, ça suffit!

Je vois que cela ne vous intéresse pas, mais Nexans, à Chauny, a reçu 58 millions du fonds d’investissement! L’État a pris 5 % des parts. Et, un mois après, que voit-on? Les salariés de Nexans – un grand groupe, un groupe international – apprennent que l’entreprise ferme. Je demande au Gouvernement de ne pas laisser faire ça: ils ont reçu des fonds publics, il y a une participation de l’État! Et on me répond qu’on ne peut rien faire!

C’est ce qui me scandalise: dans une situation aussi dramatique, le fonds d’investissement donne 58 millions, l’État prend une participation et, le lendemain, l’entreprise s’en va. Les travailleurs occupent l’usine; ils sont en grève depuis des mois. Mais il n’y a rien à faire, le Gouvernement n’intervient pas!

Alors voyez, je pourrais parler du budget de l’emploi, c’est mon métier – enfin, mon métier, c’est ouvrier! Je suis fier d’être ouvrier, d’être un ouvrier amianté de Valéo.

Je parle avec mon cœur, madame la présidente, pas avec des chiffres. Je ne vais pas plus loin, je vous donne les documents, monsieur le ministre; et j’attends une réponse pour Nexans, car je n’ai toujours pas de réponse sur le fond!

Mme la présidente. Merci.

M. Maxime Gremetz. Madame la présidente, vous commencez mal: certaines nuits, vous allez souffrir!

Mme la présidente. Vos propos sont tout à fait déplacés, monsieur Gremetz.

Mme Chantal Brunel, rapporteur spécial. Très bien, madame la présidente!

Mme la présidente. La parole est à M. François Rochebloine.

M. François Rochebloine. Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, l'examen des crédits de la mission « Travail et emploi » prend cette année, dans le contexte de la crise particulièrement grave que nous connaissons, un relief exceptionnel.

L’an dernier, déjà, le Gouvernement avait dû, dans l'urgence, parant ainsi au plus pressé, prendre une série de mesures destinées à amortir le choc et à adapter les politiques de l'État de manière à mieux traiter les conséquences sociales de la crise. Les efforts consentis ont permis d’éviter, dans certains secteurs, des destructions trop massives d'emplois, des plans sociaux et des restructurations d’entreprises dont le modèle économique était remis en question.

Malheureusement, la crise est loin d’être terminée et beaucoup de grands groupes, il faut le souligner, ont profité et profitent encore de la situation pour délocaliser et fermer définitivement des unités de production implantées sur nos territoires, au nom de la logique de productivité. La crise a bon dos!

En maintenant, autant que possible, le lien à l'emploi, via des mesures de chômage partiel ou l'encouragement à la formation professionnelle, l'État a joué son rôle. Cette politique volontariste a servi d'amortisseur. Que se serait-il passé d’ailleurs si l'État n'avait pas pris ces mesures, si l'État n'avait pas initié un plan de relance massif?

Rappelons également que le partenariat conduit entre l'État, les branches professionnelles et les partenaires sociaux, sans oublier les collectivités territoriales, a parfois permis de conclure des accords innovants pour accompagner les mutations de secteurs d'activité en difficulté et les besoins d'adaptation de leurs salariés, comme dans le cadre de la vente à distance.

Cet effort doit être confirmé l'an prochain, alors que les perspectives de l'emploi restent sombres. Je rappelle que la hausse du nombre de demandeurs d'emploi de catégorie A a été encore de 21600 personnes en septembre, de sorte que la perspective d'un taux de chômage supérieur aux 10 % sera difficilement évitable en 2010.

Le projet de loi de finances pour 2010 prévoit 360000 contrats aidés dans le secteur non marchand, après les 330000 prévus en loi de finances initiale pour 2009. Notre groupe reste favorable à cette politique qui permet de maintenir dans le monde du travail des personnes qui, sans cette possibilité, auraient une grande probabilité de demeurer durablement au chômage. D'où l'importance de travailler à une meilleure articulation entre l'emploi aidé dans le secteur non marchand et l'emploi pérenne dans le secteur marchand.

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. Bien sûr.

M. Francis Vercamer, rapporteur pour avis . C’est vrai.

M. François Rochebloine. Les emplois aidés ont, dans ce contexte, vocation à jouer un rôle de tremplin vers l'activité.

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. Très juste!

M. François Rochebloine. Par ailleurs, 2010 verra la mise en œuvre opérationnelle des contrats uniques d'insertion. Pourriez-vous, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, nous donner davantage d'indications sur la mise en œuvre concrète de cette mesure de simplification? Il est essentiel, en effet, que ces contrats soient rapidement utilisés par les structures auxquelles ils sont destinés, que ce soient les entreprises, les collectivités ou les associations. Nous considérons qu'ils doivent bénéficier aux demandeurs d'emploi qui en ont besoin, sans qu'il y ait rupture de charge entre le dispositif actuel et celui qui va entrer en vigueur.

Le projet de loi de finances prévoit la poursuite des contrats d'autonomie, avec 65 millions d'euros prévus en crédits de paiement pour 2010 contre 50 millions au PLF 2009. Ces contrats s’inscrivent dans le cadre de la politique de la ville via le plan Espoir banlieues et sont destinés aux jeunes des quartiers CUCS en situation difficile qui nécessitent un accompagnement renforcé vers l'emploi. À la frontière entre la politique de l'emploi et la politique de la ville, ce dispositif doit conserver son orientation sociale en s'adressant aux jeunes les plus dépourvus de projet personnel, qu'il s'agisse d'emploi ou de formation. Il est impératif que cet outil demeure ce pour quoi il avait été conçu au départ et n’évolue pas vers un dispositif de retour à l'emploi de jeunes qui, certes, sont touchés par le chômage mais ne sont pas les plus éloignés de l'insertion. En effet, ces derniers peuvent être pris en charge par les politiques de soutien à l'emploi mises en œuvre par Pôle emploi, mais aussi et surtout par les missions locales et les maisons de l'emploi.

Il serait souhaitable que l'entrée en phase opérationnelle des contrats d'autonomie, que ce soit par les directions départementales du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle ou par les opérateurs privés de placement à qui est confiée cette mission d'accompagnement vers l'emploi, associe davantage les acteurs sociaux des communes concernées lorsqu'ils sont structurés: chefs de projet jeunesse, politique de la ville, équipes médico-sociales ou acteurs de la cohésion sociale dans les villes.

Nous voulons réaffirmer notre soutien à la fusion de l'ANPE et de l'ASSEDIC en une structure unique, Pôle emploi, qui apportera au final un meilleur service aux demandeurs d'emploi.

Mme Marie-Christine Dalloz. Au final!

M. François Rochebloine. Cette réforme ambitieuse n'était pas facile à mettre en œuvre, et nous avons tous à l'esprit des exemples de dysfonctionnements du nouveau Pôle emploi qui ont pu se produire ces derniers mois, véhiculant une image pour le moins contrastée. La fusion de ces opérateurs aux cultures différentes ne peut que réclamer du temps, et la conjoncture défavorable, qui s’est traduite par l'augmentation du chômage, a accentué les difficultés.

Les agents de Pôle emploi ont néanmoins su se mobiliser pour faire face à l'aggravation de la charge de travail liée à l'afflux de demandeurs d'emploi. Nous sommes conscients que les conditions de travail à Pôle emploi doivent connaître des améliorations dans le cadre du dialogue social et que les besoins en effectifs doivent trouver une réponse permettant de gérer au mieux la charge de travail, afin que Pôle Emploi puisse se réinvestir dans sa mission de prospection des entreprises et des offres.

En ce qui concerne le reclassement, il existe aujourd'hui un certain nombre de dispositifs dérogatoires aux règles de droit commun. Leurs caractéristiques varient en fonction de la taille de l'entreprise.

C’est notamment le cas du contrat de transition professionnelle que sont tenues de proposer les entreprises non soumises aux dispositions relatives au congé de reclassement. Sont concernées principalement les entreprises de moins de 1000 salariés et celles en redressement ou liquidation judiciaire, quel que soit leur effectif, qui engagent une procédure de licenciement pour motif économique.

Au rang de ces dispositifs dérogatoires, on trouve également la convention de reclassement personnalisé que doivent proposer les entreprises non soumises à l'obligation de proposer le congé de reclassement.

Même si ces dispositifs sont favorables aux salariés concernés puisqu’ils améliorent leur indemnisation, on ne peut accepter l’idée que des règles dérogatoires puissent créer des distorsions dans les droits ouverts aux salariés, avec le risque d’aggraver les inégalités. Cette question fera l'objet d'un dialogue avec les partenaires sociaux prochainement. Dans ce contexte, il est important de rappeler au Gouvernement toute l'acuité de cette question.

Enfin, je ne puis passer sous silence la problématique de la santé au travail, que notre collègue Francis Vercamer a excellemment traitée dans son rapport.

M. Xavier Darcos, ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville. Son excellent rapport!

M. François Rochebloine. Le groupe Nouveau Centre considère qu'il est indispensable d'accorder une attention soutenue à ce thème, a fortiori dans le contexte actuel. La prégnance des risques psychosociaux devrait inciter à faire progresser la recherche dans ce domaine.

Avant de conclure, je voudrais aborder la question de la revitalisation de nos territoires, en prenant pour exemple le département de la Loire – que vous connaissez bien également, monsieur Wauquiez – et plus particulièrement la vallée du Gier, dont je suis l’élu, qui subit de plein fouet la désindustrialisation et la crise économique, comme la vallée de l’Ondaine, dans la circonscription de mon collègue Dino Cinieri. Je rappelle que la fermeture de deux importants sites, ThyssenKrupp Mavilor, sur la commune de L'Horme, 366 emplois, et Siemens VAI, à Saint-Chamond, 274 emplois, serait dramatique pour toute la région. J’ai déjà alerté M. le Premier ministre et vous‑même, monsieur le ministre du travail, sur l'ampleur exceptionnelle des difficultés que subit cette vallée. La multiplication des plans de restructuration, les fermetures d'entreprises en cascade, les délocalisations en série, et l'explosion du chômage qui en résulte, sont autant d'éléments qui doivent nous interpeller, élus de la représentation nationale et pouvoirs publics.

Face à une telle situation, quel plan de revitalisation peut être envisagé pour ce bassin d'emploi et sans doute pour beaucoup d'autres? La mobilisation de tous est nécessaire, avec la mise en place de réelles stratégies de développement pour nos territoires.

Ce projet de budget est malgré tout, dans un contexte très difficile, un motif d'espoir pour nos concitoyens, car il faut passer la crise. C’est pourquoi le groupe Nouveau Centre le votera. (Applaudissements sur les bancs des groupes NC et UMP.)

Mme la présidente. La parole est à M. Gérard Cherpion.

M. Gérard Cherpion. Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, avec 11,2 milliards d’euros, auxquels il convient d’ajouter 1,4 milliard d’euros inscrits au plan de relance, le budget Travail et emploi n’est pas sacrifié au dogme du « zéro volume », comme l’a prétendu M. Eckert, rapporteur spécial. Au contraire, il s’inscrit dans la volonté du Gouvernement de répondre à l’ensemble des problèmes. Aux problèmes structurels: je pense à l’emploi des jeunes, ou à l’emploi des seniors qu’il ne faut d’ailleurs pas opposer…

M. François Rochebloine. Très bien!

M. Gérard Cherpion. …car l’un ne compense pas l’autre, l’exemple des pays du Nord nous le montre clairement. Comme aux problèmes conjoncturels liés à la crise financière et économique qui frappe tous les pays et, en France, particulièrement les régions les plus industrialisées.

Ce projet de budget prend en compte la situation de l’emploi liée à la crise, avec par exemple la réactivation de l’allocation équivalent retraite ou la majoration des taux d’aide aux contrats aidés dans le secteur non marchand.

Je veux souligner le travail important qui a été réalisé en 2009 avec les partenaires sociaux pour permettre aux salariés et demandeurs d’emploi d’accéder à la formation qui est nécessaire au développement des entreprises mais aussi pour promouvoir les compétences des hommes et des femmes, qui constituent la première richesse de nos entreprises.

La loi sur l’orientation et la formation professionnelle que nous avons récemment adoptée – et dont je regrette, monsieur le rapporteur spécial, que vous ne l’ayez pas votée compte tenu de vos propos – ouvre de nouvelles possibilités, permettant enfin à ceux qui en ont le plus besoin de bénéficier d’une formation. Le fonds de sécurisation des parcours professionnels, la préparation opérationnelle à l’emploi, le congé individuel de formation hors temps de travail, en sont quelques exemples.

Les dispositifs mis en place pour accompagner les licenciés économiques ont beaucoup évolué grâce à l’exercice de la démocratie sociale. Je crois que c’est une marque forte de ce gouvernement.

Ainsi, le contrat de transition professionnelle a été élargi. Demain, ce sont quarante bassins d’emploi qui pourront en bénéficier.

M. Christian Eckert, rapporteur spécial . Ce n’est pas beaucoup.

M. Gérard Cherpion. C’est déjà pas mal, et je vous rappelle que vous vous étiez prononcé contre à l’époque, mais je ne peux que me réjouir que vous vous ralliiez aujourd’hui à ce qui fonctionne.

Ce dispositif est important. Il permet en effet le maintien de 80 % du salaire brut pendant douze mois et l’obtention d’un accompagnement, soit par contrat de transition professionnelle soit par Pôle emploi avec un référent pour trente personnes, ainsi que d’une formation avec une forte réactivité et un engagement particulier des organismes paritaires collecteurs agréés et des OPCA interprofessionnelles, beaucoup moins des régions, malheureusement.

En 2009, les partenaires sociaux ont déjà fait converger contrat de transition professionnelle et convention de reclassement personnalisé. Je pense qu’en 2010, nous devrons aboutir à un dispositif unique pour les licenciés économiques.

M. Francis Vercamer, rapporteur pour avis . Excellente proposition!

M. Christian Eckert, rapporteur spécial . Il faut uniformiser vers le haut!

M. Gérard Cherpion. À ce propos, je souhaite faire plusieurs propositions.

En cas de licenciements diffus, les entreprises de plus de 1000 salariés échappent aux obligations de revitalisation territoriale.

M. Christian Eckert, rapporteur spécial . C’est ce que j’ai dit!

M. Gérard Cherpion. Je souhaite que nous puissions reprendre la disposition que nous avions défendue avec Gaëtan Gorce dans une proposition de loi et qui permettrait d’assujettir ces entreprises de façon équitable aux mêmes conditions.

M. Gaëtan Gorce et M. Jean-Patrick Gille. Très bien!

M. Christian Eckert, rapporteur spécial . Nous sommes d’accord au moins sur un point.

M. Gérard Cherpion. Par ailleurs, comment prendre en compte les entreprises de plus de 1000 salariés en cas de plans sociaux? Aujourd’hui ces entreprises appliquent un système différent, celui des congés de reclassement. Sans les exonérer de leurs responsabilités et de leurs obligations, il me semblerait utile, comme Pierre Méhaignerie le soulignait, de trouver un système de convergence.

Enfin, il me semble nécessaire d’aborder sans tabou le problème des primes supralégales, dans leurs montants et leur fiscalité, ainsi que de définir les moyens à mettre en œuvre pour qu’elles soient orientées vers le retour à l’emploi des salariés licenciés. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Monique Iborra.

Mme Monique Iborra. Madame la présidente, messieurs les ministres, mes chers collègues, dans un contexte de crise économique et sociale sans précédent, alors que les perspectives de sortie du chômage de masse ne sont pas encore tangibles, nous examinons les crédits de la mission « Travail et emploi » pour 2010. Au‑delà des budgets et des chiffres, des effets d’annonce et de la communication politique, auxquels les Français ne croient plus en raison de leur trop grand décalage avec ce qu’ils vivent au quotidien, nous devons, en responsabilité, émettre un avis sur le projet de loi de finances pour 2010.

Des outils ont été mis en place, d’autres annoncés. Sont-ils efficaces, novateurs? Pouvons-nous honnêtement en tirer un premier bilan?

On nous disait que l’accès et le retour à l’emploi seraient facilités avec la création de Pôle emploi. Personne ne peut aujourd’hui sérieusement soutenir cette opinion. Il suffit de se déplacer et d’écouter: la récente grève massive des agents de Pôle emploi montre dans quelle détresse psychologique se trouvent aujourd’hui la majorité d’entre eux.

Quant aux maisons de l’emploi, Mme Dalloz et Mme Brunel devraient se mettre d’accord. Si Mme Dalloz en est une fervente défenseure,…

Mme Marie-Christine Dalloz. Je l’atteste!

Mme Monique Iborra. …Mme Brunel écrit dans son rapport: « Les maisons de l’emploi ajoutent une “ strate ” dans un système déjà complexe; leur offre de services est parfois excessivement restreinte et très variable d’un lieu à l’autre ; l’amélioration de la qualité de service est parfois imperceptible ou insuffisante. Dans ces conditions, il est heureux que le conventionnement des maisons de l’emploi ait été fortement ralenti sur l’année 2008…

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d’État. Gelé!

Mme Monique Iborra. …et que le PLF 2010 ne prévoie que la reconduction du financement des maisons de l’emploi déjà conventionnées. »

Qui, de Mme Brunel ou Mme Dalloz, faut-il croire, monsieur le ministre?

Mme Marie-Christine Dalloz. Les deux!

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d’État. En tout cas, pas Mme Iborra! (Sourires.)

Mme Monique Iborra. Vous feriez pourtant bien!

On nous disait que pour accompagner l’entrée sur le marché du travail de plus de 500000 jeunes, des mesures d’urgence, que l’on qualifiait de novatrices, étaient prises. Parmi celles-ci, les contrats aidés – mesure novatrice s’il en est – hués en leur temps par la droite parlementaire, supprimés par la loi de cohésion sociale. Ces contrats, qui devraient être réservés aux personnes les plus en difficulté, sont aujourd’hui entrés dans le droit commun et ne sont plus, contrairement à ce que nous avions fait en les mettant en place, assortis d’une formation.

Les contrats de professionnalisation, qui ont remplacé malencontreusement les contrats de qualification, et les contrats d’apprentissage ne connaissent pas, c’est le moins qu’on puisse dire, le succès que vous attendiez, malgré les aides diverses, exonérations, conventions annoncées et mises en place. Les dernières statistiques de la DARES montrent une baisse de 40 % des contrats de professionnalisation, et l’enquête que nous avons nous-mêmes menée au niveau des régions atteste, pour le mois de septembre2009, une baisse des contrats d’apprentissage entre 3 % et 5 %, atteignant jusqu’à 10 % à 15 % dans le bâtiment et 16 % dans l’industrie. Le ministre n’était pourtant pas avare de déclarations optimistes, fondées sur des extrapolations qui pourraient bien n’être finalement que des élucubrations.

D’ailleurs, au sein même du Gouvernement, les estimations du nombre d’emplois créés ou préservés varient considérablement. La vérité, c’est que vous ne savez rien, que la traçabilité de votre politique est médiocre. Bref, c’est la grande embrouille! Plus personne n’y comprend rien. Vous voulez surtout faire du chiffre, alors que la cacophonie gouvernementale s’installe à propos des effets sur l’emploi du plan de relance. Qui faut‑il croire? Vous-même, lorsque vous annoncez 600000 emplois créés en 2009, ou M. Devedjian, qui parle de 250000? Qui plus est, vous savez très bien qu’il vous est impossible de faire la part des effets d’aubaine. La situation difficile que nous vivons devrait vous inciter à un peu plus de modestie et de pondération; votre politique y gagnerait assurément en crédibilité.

Rien de nouveau, donc, ni de spectaculaire dans la mise en place de ces outils. S’agissant des salariés, nous attendons toujours la réalisation effective de la sécurisation des parcours. Concernant le FISO, nous notons que c’est finalement avec les fonds des partenaires sociaux que vous financez en grande partie les politiques de l’État.

Nous attendons toujours, malgré les pressions incroyables exercées sur Pôle emploi et les missions locales, que les jeunes bénéficient des contrats d’accompagnement-formation à des métiers dits porteurs. En Midi-Pyrénées, 1896 jeunes devraient entrer dans ce dispositif avant la fin de l’année. Cet objectif est-il bien réaliste?

Quant aux services à la personne, ce formidable gisement d’emplois tant vanté par la loi de cohésion sociale notamment, ils se révèlent surtout être une trappe à travailleurs pauvres, en majorité des femmes, tant ils sont marqués par la précarité.

Enfin, que dire des contrats d’autonomie mis en œuvre dans le cadre du plan banlieues? C’est un échec patent reconnu par tous. Sur 45000 contrats prévus d’ici à 2011, 12400 ont été signés à raison de 30000 euros par emploi, et seules 887 sorties positives ont été enregistrées. Alors que, dans ces quartiers, le taux de chômage des jeunes hommes entre quinze et vingt-quatre ans atteint 41,9 % à la fin 2008 contre 36 % en 2006 – le problème du chômage y est donc encore plus prégnant qu’ailleurs –, rien n’est prévu, pas de réorientation de crédits affectés à ce programme. On constate l’échec et on poursuit, alors que l’accompagnement social dans ces quartiers, on le sait, nécessite une appréhension globale des problèmes. Si l’emploi reste l’objectif final, on relève que dans la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances », les crédits destinés à l’accompagnement des familles dans leur rôle de parents sont en baisse constante depuis 2007 et particulièrement marquée en 2010, et que l’État se désengage des réseaux d’écoute, d’appui et d’accompagnement des parents.

Il faudrait maintenant passer des discours, des annonces, des données invérifiables – qui sont ni plus ni moins de la communication politique, comme l’a dit récemment l’économiste Éric Heyer – à la mise en œuvre de politiques créatrices d’emplois qui n’accompagnent pas seulement les entreprises, dont les jeunes représentent la plupart du temps les variables d’ajustement.

En fait, votre politique s’apparente plus au traitement du symptôme qu’à celui de la maladie, plus facile mais très peu satisfaisant pour nos concitoyens. Ils viennent de le dire dans un sondage publié aujourd’hui, qui n’est pas commandé par l’Élysée, celui-là. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. Jean-Marc Roubaud. On ne peut dire cela!

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Jacques Candelier.

M. Jean-Jacques Candelier. Madame la présidente, messieurs les ministres, chers collègues, il y a beaucoup à dire sur le budget consacré au travail et à l’emploi. Au lieu de spéculer sur une quelconque sortie de crise, « l’après-crise » comme on dit, regardons les chiffres: ils parlent d’eux-mêmes.

Le nombre de demandeurs d’emploi augmente aujourd’hui de plus de 30000 par mois et tout laisse penser que la reprise lente de l’économie, si elle existe, n’apportera aucun emploi. En clair, nous sommes dans une période d’urgence sociale durable à cause de la crise du capitalisme. Pour l’année en cours, alors qu’on annonce 500000 demandeurs d’emploi supplémentaires en catégories A, B et C, contre toute attente la mission « Travail et emploi » verra ses crédits baisser de 400 millions par rapport à la loi de finances initiale pour 2009. On nous explique que les moyens de la mission seront complétés par une dotation exceptionnelle du plan de relance. Que se passera-t-il quand celui-ci cessera et que nous nous enfoncerons de plus belle dans la crise?

De plus, il est prévu que le plafond d’emplois de l’État baisse l’année prochaine, à cause de la RGPP. Les nouvelles DIRECCTE, directions régionales de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi, à peine créées, sont déjà dans le collimateur. Le dogme du non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant en retraite, en touchant notamment l’inspection du travail, a des effets dévastateurs. Qu’on ne s’étonne pas de la multiplication des abus au travail et de la montée du stress!

Comble de l’hypocrisie, on veut nous faire croire que « l’action de l’État s’appuie sur un réseau d’acteurs ». En réalité, ces acteurs, l’État les soutient comme la corde soutient le pendu! Les entreprises d’insertion seront durement touchées. Leur savoir-faire leur vaut une aide qui correspond au prix de la prestation d’accompagnement à l’insertion. Or ce prix, « l’aide au poste », n’a pas été réévalué depuis dix ans, malgré des demandes répétées du secteur.

Pôle emploi n’a pas les moyens d’accompagner activement les chômeurs. Certes, l’État reconduit pour 2010 sa subvention de fonctionnement de 1,360 milliard. Mais ce statu quo signifie qu’il faudra faire plus sans plus de moyens. L’accord sur l’assurance chômage prévoyait qu’un agent de Pôle emploi traite une soixantaine de dossiers; aujourd’hui, il en suit plutôt 200. La raison du ras-le-bol et des grèves dans ce service public n’est pas à chercher ailleurs.

Les missions locales connaissent un véritable bouleversement. Pour celle du Douaisis, la subvention de fonctionnement de l’État représente 1 million d’euros, soit 50 % des subventions de fonctionnement. L’enveloppe est restée constante pour 2009, ce qui, compte tenu de la hausse des charges, signifie une baisse mécanique.

Il y a huit ans, l’État avait substitué à une partie de ses financements ceux du Fonds social européen, à hauteur de 233000 euros. En 2009, le FSE a accusé une chute de 6 %; pour 2010, on nous annonce la réintégration de la part FSE dans le financement direct de l’État. Le tout est d’avoir des certitudes, notamment sur le montant.

De plus, un dispositif comme le CIVIS s’est vu amputer de moitié, notamment pour lancer un appel d’offres ouvert aux opérateurs privés. Or, non seulement le contrat d’autonomie induit un traitement inégal des jeunes, mais il donne des résultats médiocres en sortie à l’emploi. Je pose donc la question: quand l’État mettra-t-il les moyens pour l’insertion des jeunes en s’appuyant sur les réseaux existants?

Ajoutons que les dotations des collectivités territoriales sont en chute libre. Je n’évoquerai pas ici le Fonds d’investissement social, ou plutôt le fonds d’investissement patronal, censé aider à l’insertion; j’aurai l’occasion de le faire plus tard. Est-ce cela le grand plan Marshall pour la jeunesse du candidat Sarkozy?

Dans le Douaisis, près de 19000 demandeurs d’emploi sont recensés et 7300 jeunes sont suivis par la mission locale. Ils étaient 4700 en 2003. Vous pouvez compter sur moi pour leur dire, chiffres à l’appui, qu’ils ne sont pas la priorité du Gouvernement.

Mme Marie-Christine Dalloz. On ne peut pas laisser dire cela!

M. Jean-Jacques Candelier. Les jeunes sont bien les laissés-pour-compte d’une politique réglée en plein accord avec le MEDEF, c’est-à-dire dans l’intérêt de quelques-uns au détriment de millions d’autres.

Au-delà du constat louable du Livre vert de la jeunesse, quels moyens seront mis en œuvre? J’ai l’impression que le Gouvernement se contente de gérer la crise en attendant qu’elle passe. Au contraire, c’est tout de suite qu’il faudrait interdire, comme nous le proposons, les licenciements dans les entreprises profitables, et qu’il faudrait mettre les moyens pour assurer aux jeunes, premières victimes de la crise, un véritable statut.

Pourquoi ne pas faire un état des lieux de l’apprentissage, pour mettre fin à la surexploitation des apprentis et construire les réponses aux problématiques de tous ceux qui choisissent ces filières? Pourquoi ne pas mettre en place une véritable sécurité d’emploi et de formation pour tous? Cela nécessiterait, bien sûr, un budget à la hauteur et une mise à contri bution des profits des entreprises. Chaque jeune devrait pouvoir bénéficier d’un contrat à durée indéterminée et à temps plein qui contribue à sécuriser son parcours professionnel. Ce contrat devrait assurer au jeune travailleur le même salaire qu’aux autres salariés de même qualification et de même poste. Il devrait également lui permettre de bénéficier du droit à une formation continue adaptée à ses diplômes et à sa qualification.

Compte tenu des constats que je viens d’énumérer, et en l’absence de réponse à nos questions, nous voterons, bien entendu, contre les crédits proposés pour la mission « Travail et emploi ».

Mme la présidente. La parole est à M. Laurent Hénart.

M. Laurent Hénart. Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, chers collègues, au fil des rapports, deux évolutions majeures ont été évoquées à propos de ce budget.

La première, qui passe peut-être trop inaperçue, est que nous avons, depuis deux ans, un dialogue social très riche. Les partenaires sociaux, aux côtés du Gouvernement et du Parlement, font évoluer très vite, parfois plus vite que nous ne le pensons, toute une série de facteurs, qui étaient jusqu’à présent des causes de blocage en matière de travail et d’emploi. Je prends l’exemple de la formation tout au long de la vie, texte qu’a suivi notre collègue Gérard Cherpion.

La deuxième évolution concerne le choc social dû à la répercussion de la crise économique mondiale. Nous dénombrons 600000 chômeurs de plus en une année à peine. Et nous savons tous qu’il faudra plus de temps pour amorcer un mouvement de baisse du chômage permettant d’atteindre le niveau d’avant la crise qu’il n’en a fallu pour comptabiliser ces centaines de milliers de chômeurs supplémentaires.

Je voudrais mettre en évidence de mauvaises habitudes, sortes de traditions de notre système économique et social, qui sont, dans cette période de crise, autant de facteurs lourds et pénalisants.

Le premier de ces facteurs, c’est le faible taux d’activité des jeunes et le taux de chômage massif qu’ils connaissent.

M. Bernard Perrut, rapporteur pour avis . Tout à fait!

M. Laurent Hénart. Le second, c’est l’accompagnement insuffisant des demandeurs d’emploi et le peu d’attention portée à cette action, pourtant prioritaire: je ne reviens pas sur les propos de M. Perrut.

L’emploi des jeunes, d’abord. La France est le pays d’Europe où le taux d’activité des seize à vingt-cinq ans – 30 % – est le plus faible par rapport à ce qu’il est chez nos voisins européens: 60 % en moyenne.

Or le taux d’activité recouvre des réalités autres que le travail, à savoir la formation en alternance et les emplois à temps partiel des jeunes qui travaillent durant leurs études ou leurs congés. C’est l’occasion pour eux, en même temps qu’ils se forment, se qualifient, de découvrir le monde du travail et de préparer leur entrée dans la vie active. Je vous encourage, messieurs les ministres, à persévérer dans la volonté de développer les formations en alternance et l’apprentissage en ce moment de crise.

La formation en alternance est, pour les jeunes âgés de seize à vingt-cinq ans, la seule réponse intelligente à la récession qui frappe notre économie en 2009 et à la trop lente reprise de la croissance en2010 et2011. Elle permet aux jeunes d’apprendre à connaître leur métier et d’acquérir une qualification avant d’entrer sur le marché du travail. Trop souvent, ils sont orientés par le chômage. À l’inverse, la formation en alternance permet de les orienter par l’immersion dans le monde du travail, et cela me semble très positif.

Parmi les nombreuses mesures d’urgence qui seront applicables jusqu’à la mi-2010 en faveur du développement de l’alternance, le Gouvernement envisage-t-il d’étendre l’apprentissage au service public? J’ai rendu un rapport à M. le Premier ministre à ce sujet. Le développement de la formation en alternance chez les employeurs publics est un problème structurel, culturel. Il ne suffit pas de surmonter les obstacles réglementaires et financiers, il faut également faire litière des préjugés. Si des mesures massives doivent être envisagées dans ce domaine, prenons-les tout de suite. De nombreux jeunes ont fait le choix de l’alternance et se sont inscrits dans les CFA. Ils veulent exercer un métier mais ne trouvent pas de contrat chez un employeur. Il serait utile et particulièrement judicieux de mettre en œuvre, en 2009-2010, les mesures d’urgence à destination des collectivités qui sont préconisées dans le rapport.

J’en viens, en second lieu, à l’accompagnement. Il est bon que nous ayons, depuis quelques années, plus de moyens pour développer l’accompagnement des demandeurs d’emploi, en particulier des jeunes. Vous avez souligné, messieurs les ministres, qu’il s’agissait d’un élément majeur.

La fusion aboutissant à la création de Pôle emploi reste évidemment une nécessité, elle est d’autant plus utile que le chômage a repris. Je crois qu’il est bon pour les demandeurs d’emploi de n’avoir qu’une seule enseigne, un seul guichet où se renseigner, être accueillis, accompagnés. Mais est-il possible sur le terrain de moduler la deuxième étape de cette fusion, qui est celle de l’entretien unique? Il est parfois compliqué pour des équipes beaucoup plus sollicitées qu’il y a six mois ou un an d’organiser le départ en formation des agents pour que ceux anciennement ASSEDIC se forment aux techniques ANPE et réciproquement. Il faut une modulation concrète.

En ce qui concerne les maisons de l’emploi, je vous remercie, messieurs les ministres, d’avoir élaboré un cahier des charges qui permettra de continuer pour les cinq ans à venir le travail entrepris dans les bassins d’emploi concernés. Envisagez-vous de faire évoluer la réglementation pour que les maisons de l’emploi soient réellement un lieu de synthèse de tous les acteurs du bassin d’emploi et permettent notamment de fusionner maison de l’emploi, plan local d’insertion par l’économie et mission locale pour l’emploi des jeunes ou PAIO? Nous y gagnerions une mutualisation des emplois et une meilleure gouvernance sur le terrain. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Patrick Gille, pour cinq minutes.

M. Jean-Patrick Gille. Madame la présidente, messieurs les ministres, mes chers collègues, si l'on peut raisonnablement espérer que la crise financière soit derrière nous, la crise économique et sociale est malheureusement bien là et se traduit, mois après mois, par l'augmentation des chiffres du chômage et la destruction d’emplois. Toutes catégories confondues, le nombre de chômeurs frôle aujourd'hui les 4 millions. Pourtant, comme l’ont indiqué les rapporteurs, le budget du travail et de l’emploi est en baisse de 400 millions d’euros.

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. Non!

M. Jean-Patrick Gille. Le budget a certes été augmenté au cours de l’année écoulée – c’est sans doute ce que vous voulez dire, monsieur le secrétaire d’État – avec la mise en place du Fonds d'investissement social, voulu par les partenaires sociaux, et il pourrait atteindre, en2009, 13,7 milliards. Mais si on procède au même calcul pour 2010, en ajoutant 1,4 milliard d’abondement du FISO, ce sera pire encore. En effet, avec 12,8 milliards – Mme Brunel disait même 12,6‚– il y aura une baisse de l’ordre de 900 millions.

Nous sommes donc en présence d'un budget en baisse, alors que la vague du chômage continue d’enfler. Néanmoins, à la suite des travaux de la commission Hirsch, un effort a été entrepris pour l'insertion professionnelle des jeunes, afin de faire face à l'urgence de la situation. Je m’en félicite, même si je déplore que rien n’ait été fait en direction des jeunes des quartiers, sachant que le contrat d’autonomie est un échec.

Je suis du reste surpris, et pour tout dire inquiet, que vous utilisiez le FISO, fonds conjoncturel, pour financer des mesures présentées comme structurelles: le soutien à l'alternance, les écoles de la deuxième chance, la réforme du CIVIS et les plateformes anti-décrochage. Ainsi, les missions locales bénéficient de 40 millions supplémentaires, mais elles hésitent à embaucher des conseillers pour accueillir le flux de jeunes qui les sollicitent car elles ne disposent pas d’une garantie de pérennité des crédits sur quelques années. Or nous savons bien que, même dans l’hypothèse d’une reprise, le chômage des jeunes ne se résoudra pas en quelques mois. Comment le recours à des financements a priori transitoires, prévus pour une durée de deux ans, peut-il inciter les partenaires à investir durablement dans ces dispositifs?

Faut-il en déduire qu'à l'avenir le fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels, créé par la loi sur la formation professionnelle, prendra le relais? Les partenaires sociaux n’avaient pas travaillé dans cet esprit. Ou risquons-nous de connaître chaque année la même incertitude quant au financement des maisons de l'emploi? Monsieur le ministre, comment envisagez-vous leur avenir? Il vous faudra choisir entre Mme Dalloz et Mme Brunel, même si j’admets que ce n’est pas facile. (Sourires.)

L’allocation équivalent retraite a été prolongée in extremis par décret en 2009, en raison du contexte de crise, qui n’a malheureusement pas évolué. Elle s’adresse aux salariés qui ont le plus de difficultés à trouver un emploi. Quant à l’allocation de fin de formation, financée par le plan de relance jusqu’en juin, elle ne donnera plus lieu à aucune entrée en 2010. Je propose un amendement à ce sujet, car il est aberrant que ces dispositifs ne soient pas prorogés.

J’insiste sur la nécessité de conforter les deux piliers du service public de l'emploi – Pôle emploi et l'AFPA – et surtout de soutenir leurs personnels et de cesser de les fragiliser en poursuivant avec acharnement des réformes inadaptées, notamment en temps de crise, des réformes procédant de l'idéologie qui est à l'origine même de cette crise.

En ce qui concerne Pôle emploi, tout le monde savait que la fusion de l'ANPE et des ASSEDIC, élaborée dans la précipitation, ne serait pas aisée. Il est vite apparu que l'arrivée de la crise la rendait périlleuse. Alors qu’elle devait faciliter les démarches du demandeur d'emploi en lui offrant un suivi personnalisé, il s'avère, dans les faits, que les conseillers sont débordés et que l’entretien unique, comme l’a rappelé M. Hénart, pose des problèmes, ce que confirment les remontées du terrain.

Chaque conseiller doit suivre de 150 à 200 demandeurs d’emploi. Les effectifs sont insuffisants et on peut s’interroger sur la formation des personnels. La polyvalence n’est pas possible en un temps si court. Aujourd'hui, je le dis avec gravité, il y a péril en la demeure et l’opérateur public de l'emploi est en passe de devenir l'exemple type de la dégradation des conditions de travail et du service rendu aux personnes. Il ne faut pas négliger les risques psycho-sociaux que cela peut entraîner. La crise n'explique pas tout, il y a visiblement un problème de management et d'accompagnement au changement qui mérite d'être traité rapidement.

Mme la présidente. Mon cher collègue, je vous prie de conclure.

M. Jean-Patrick Gille. J’évoquerai la situation de l’AFPA cet après-midi lors de la séquence des questions.

Monsieur le secrétaire d’État, votre passion recentralisatrice nuit à l’efficacité. Votre volonté de tout contrôler, de tout rigidifier, risque d’entraîner certaines instances jusqu’au point de rupture, alors que nous devrions faire plus confiance aux collectivités locales, aux acteurs de terrain. C’est ce que propose le Conseil d’orientation pour l’emploi, qui nous invite à associer plus étroitement l’ensemble des décideurs locaux à l'utilisation du FISO, dont la gestion est pour le moment très nationale, ainsi qu’à mutualiser les fonds liés aux obligations de revitalisation. Je pense également que l’on pourrait aller dans le sens de la généralisation des contrats de transition professionnelle. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Mme la présidente. La parole est à M. Gaëtan Gorce, pour cinq minutes.

M. Gaëtan Gorce. Monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, vous avez certainement – tout particulièrement vous, monsieur Wauquiez – l’une des tâches les plus difficiles de ce gouvernement.

D’abord, le chômage croît et les chiffres annoncés ne sont pas rassurants. Je voudrais cependant vous faire observer que la courbe du chômage a commencé à s’infléchir avant la crise spéculative de l’été 2008. En effet, dès le second trimestre, un début de destruction d’emplois et d’inflexion de la courbe du chômage a été observé, ce qui nous a amenés à réfléchir sur les politiques à mettre en place.

Ensuite, la tâche est difficile car les moyens sont limités: mes collègues se sont exprimés sur le sujet, je n’y reviens pas. Les députés socialistes ont même déposé des amendements pour que soient renforcés les crédits affectés à l’ASS et à l’allocation équivalent retraite. Nous nous interrogeons sur la manière dont vous anticipez une situation qui ne pourra que se dégrader en 2010, et surtout en 2011, lorsque les indemnisations s’achèveront et que les salariés n’ayant pas retrouvé un emploi, qui ne seront donc pas les premiers bénéficiaires d’une éventuelle reprise, seront en grande difficulté sociale. Il faut anticiper l’augmentation indispensable et inéluctable des moyens consacrés à l’emploi, en particulier à la couverture sociale et à l’indemnisation des chômeurs qui ne seront plus couverts par aucun dispositif.

Enfin votre tâche est difficile parce que votre politique manque de cohérence. Cela a été démontré à propos des maisons de l’emploi. Comment appréhender la politique de l’emploi alors que l’on n’a pas décidé qui était le pilote? De ce point de vue, la réforme de Pôle emploi est restée en chemin. Entre les maisons de l’emploi, les directions du travail, les autorités regroupées autour de Pôle emploi, qui est réellement responsable sur le terrain de la politique de l’emploi? Il faudrait, au contraire, concentrer les moyens et les énergies sous une seule autorité pour mener la bataille de l’emploi, qui n’a jamais été aussi importante qu’aujourd’hui.

Messieurs les ministres, vous ne parviendrez pas à relever ces défis si vous n’abordez pas de front les questions de fond, car il ne s’agit pas simplement de questions conjoncturelles.

La première question de fond est celle d’un système d’assurance chômage qui privilégie l’indemnisation plutôt que le reclassement professionnel.

La deuxième concerne un système de formation professionnelle qui, malgré la réforme introduite, probablement trop précipitamment – trop peu de temps a été laissé aux partenaires sociaux – continue à bénéficier d’abord aux mieux formés, au détriment de ceux qui auraient le plus besoin de se former.

La troisième, c’est un régime d’exonérations et d’aides publiques qui soutient les emplois les moins qualifiés alors qu’il faudrait donner la priorité aux emplois à plus forte valeur ajoutée.

Il faut donc s’engager dans un vrai processus de réforme: pas seulement en parler, mais le faire!

Cela veut dire d’abord qu’il faudrait engager une réforme de l’assurance chômage où le montant et la durée d’indemnisation seraient calculés non sur les droits acquis, mais sur le besoin de reclassement professionnel et les délais de ce reclassement.

Cela veut dire ensuite qu’il faudrait mener à bien une vraie réforme de la formation professionnelle, qui accompagne un plan de qualification ou de requalification des salariés en leur donnant la priorité et vienne briser un certain nombre de tabous, de frontières, d’intérêts qui minent une véritable politique de formation professionnelle. À titre personnel, je ne serais pas choqué par l’idée de regrouper les moyens de la formation professionnelle avec ceux de l’assurance chômage dans une perspective consistant à privilégier le reclassement, la formation et la qualification.

Cela veut dire encore qu’il faut engager une territorialisation des politiques de l’emploi en mettant en place des agences de l’emploi qui aient la totalité des compétences et qui soient liées par des contrats d’objectifs à l’État et aux autorités locales.

Cela veut dire enfin qu’il faut revenir sur les exonérations de cotisations sociales, non pour les supprimer mais pour les remplacer par une franchise de base et orienter les moyens rendus disponibles vers une politique de qualification de ceux qui occupent des emplois menacés par la concurrence des pays à bas salaires.

C’est à ces conditions, qui anticipent à la fois sur l’évolution du marché du travail consécutive aux changements démographiques et sur les problèmes que nous allons rencontrer à la sortie de crise, que nous pourrions avoir une politique de l’emploi réellement efficace.

Cela supposerait aussi, messieurs les ministres, que vous ne soyez pas seulement réunis sur ce banc à l’occasion du débat budgétaire, mais que le travail et l’emploi soient à nouveau réunis dans un seul et même ministère. C’est une absurdité d’avoir placé le secrétariat d’État à l’emploi sous la tutelle du ministère de l’économie dans la mesure où il est impossible de distinguer aujourd’hui politique du travail et politique de l’emploi. C’est vrai pour la formation, le temps de travail et les conditions de travail. Ce qui a des conséquences sur le travail a des conséquences sur l’emploi et vice-versa. Je vous invite donc à vous pacser, messieurs les ministres, si la formule peut s’appliquer au sein du Gouvernement! (Sourires .)

Je reprendrai à mon compte l’observation de mon ami Gérard Cherpion sur le fonds de revitalisation des territoires ruraux réclamé depuis deux ans, accepté en principe par Mme Lagarde et qui devait être financé par une taxation sur l’ensemble du territoire des entreprises qui licencient, laquelle, malheureusement, n’a pas été mise en place.

Au moment de conclure, je voudrais, à cette tribune, parler au nom de l’ensemble des salariés qui sont touchés de plein fouet par la crise, en particulier dans mon département, qu’ils appartiennent aux entreprises FOG, Henkel, ATB Selni ou plus particulièrement FAS, dans le Cher, sur laquelle j’appelle votre attention. J’en parle d’autant plus librement qu’elle ne se trouve pas dans ma circonscription. Les salariés de FAS à Saint-Satur sont aujourd’hui victimes d’une liquidation pure et simple, avec un plan social vide dans la mesure où le propriétaire chinois n’a pas mobilisé de moyens. Il serait nécessaire que l’État vienne les appuyer pour leur apporter, à défaut d’une réponse économique, une réponse sociale et humaine adéquate.

Compte tenu des faiblesses de ce budget et surtout de votre politique, il n’est évidemment pas question pour le groupe socialiste de voter les crédits d’une mission dénommée « Travail et emploi », mais qui n’apporte pas de vraie réponse aux questions pourtant cruciales du travail et de l’emploi. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Annick Girardin.

Mme Annick Girardin. Madame la présidente, messieurs les ministres, mes chers collègues, s’il est une chose qui ressort des débats que nous avons consacrés à cette loi de finances, c’est assurément un accord unanime sur la formule suivante, presque devenue un cliché: « Si la crise financière est derrière nous, la crise économique est toujours là et la crise sociale reste à venir. »

Tout le monde semble aussi s’accorder à dire que l’État doit prioritairement intervenir en faveur des activités d’avenir créatrices d’emplois. Encore faut-il que ces paroles aient un sens. Or je constate, sans reprendre la démonstration de mes collègues du groupe socialiste, radical et citoyen, que tel n’est manifestement pas le cas dans cette mission consacrée au travail et à l’emploi. Comment parler de dépenses d’avenir et de politique de l’emploi lorsque l’État lui-même détruit près de 34000 postes dans ce budget, dont 16000 dans l’éducation? Ou encore lorsque, outre-mer, l’inquiétude est réelle quant au maintien des contrats aidés spécifiques, désormais noyés dans la masse de cette mission pour mieux en masquer la diminution?

Pour les radicaux de gauche, la sortie de la crise passe d’abord par une refonte réelle du service public de l’emploi. Non pour fusionner des structures en espérant faire plus d’économies que de dégâts, mais pour mettre en place un grand service public des ressources humaines associant l’État, les collectivités locales et les groupements d’acteurs économiques. Il aurait pour mission d’assurer le complément de formation utile suite à la perte d’un emploi, d’accompagner la réinsertion professionnelle des personnes concernées, mais aussi de garantir leur rémunération. Il s’agirait d’un changement d’une profondeur et d’une ambition tout autres que la fusion UNEDIC-ANPE.

Pour nous, la priorité à l’emploi passe par la modulation de l’imposition des bénéfices des entreprises en fonction de leur politique de l’emploi. Concrètement, cela doit se traduire par un abaissement du taux d’imposition pour celles qui embauchent, par l’acquittement du taux normal pour celles qui maintiennent des effectifs constants et par une majoration du taux pour les entreprises qui génèrent un profit mais qui réduisent leurs effectifs sans motif économique valable. Une fois que le principe de cette modulation serait acquis pour la politique de l’emploi, rien n’empêcherait son extension à l’ensemble des pratiques sociales des entreprises concernées. Cette mesure de justice sociale, financièrement équilibrée, constituerait une incitation forte à donner enfin une portée concrète à la moralisation du capitalisme, voire à son humanisation, concept auquel il est tant fait référence ces derniers temps.

Les radicaux ainsi que toute la gauche estiment que, pour sortir de la crise, il faut enfin mettre en place le « parcours d’activité sécurisé », afin de garantir la continuité des droits des salariés malgré la discontinuité des trajectoires professionnelles. L’objectif d’un tel dispositif est de concilier le besoin d’adaptabilité des employeurs, qui demeure lié aux évolutions du marché, et la juste aspiration des salariés à une réelle sécurité, condition de leur pleine participation à la vie économique et sociale, donc à la sortie de crise.

La sortie de crise ne se fera pas, selon nous, sans un réel soutien à l’emploi des jeunes. Or l’on ne peut qu’être déçu par le manque d’ambition des mesures « jeunesse » annoncées par le Gouvernement en matière d’emploi. Nous aurons l’occasion d’y revenir dans la séquence des questions.

Pour favoriser l’emploi des jeunes et véritablement préparer l’avenir, il existe une formule. Elle a marché dans le passé, elle peut marcher à l’avenir: ce sont les emplois-jeunes, …

Mme Marie-Christine Dalloz. Ce sont des parkings pour les jeunes!

Mme Annick Girardin. … qu’il faut relancer et centrer sur des domaines porteurs en matière d’emploi, comme les services à la personne ou la protection de l’environnement.

Ce sont là quelques-unes de nos propositions pour développer l’emploi et pour sortir la France de la crise. Nous avons eu l’occasion de les présenter au Gouvernement dans le cadre de la préparation du grand emprunt, mais il me semble que leur portée va bien au-delà, ne serait-ce que parce la plupart de ces mesures ne coûteraient pas bien cher à l’État mais donneraient une impulsion nouvelle à la croissance de l’économie et de l’emploi.

On sous-estime souvent l’impact de la politique de l’emploi sur l’économie. Je suis malheureusement bien placée pour attester des effets dévastateurs de son insuffisance. L’archipel de Saint-Pierre-et-Miquelon, qui a connu il y a maintenant plus de quinze ans un bouleversement économique et social total avec la fin de la grande pêche, demeure sinistré du fait de l’absence de politique de l’emploi et de plan de développement capable de créer les conditions du redémarrage de l’économie.

Nous souffrons, en effet, de problèmes structurels qui empêchent la définition d’une politique cohérente. En matière de formation, par exemple, la gouvernance est éclatée entre l’État et ses différentes structures et la collectivité territoriale, sans partage clair des responsabilités, et nous n’avons toujours pas les moyens de croiser les données du marché du travail et de l’emploi avec les données économiques et sociales de l’archipel pour définir les perspectives et les actions à mener. Il est donc urgent de mettre en place un nouveau schéma d’organisation de la formation professionnelle à Saint-Pierre-et-Miquelon. Or cela ne se fera qu’avec un appui fort de l’État.

À ce titre, la venue prochaine du directeur de l’Agence nationale pour l’insertion des travailleurs d’outre-mer, que j’avais demandée et qui vient de m’être confirmée par Mme la secrétaire d’État chargée de l’outre-mer, constitue une opportunité unique. Mais au-delà, ce projet a besoin de votre soutien résolu, monsieur le ministre, pour relancer l’économie de l’archipel. Face à l’ampleur des enjeux, j’espère que vous serez au rendez-vous. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Mme la présidente. La parole est à M. Patrick Lebreton.

M. Patrick Lebreton. Madame la présidente, messieurs les ministres, mes chers collègues, nos territoires d’outre-mer connaissent depuis ces dernières années une crise sociale sans précédent. La démographie est toujours positive et nos territoires souffrent de ne pouvoir offrir à nos jeunes des emplois adéquats. Tout est souffrance en ce moment dans le milieu de l’emploi. Combien de victimes collatérales dues à la fusion ratée de l’ANPE et de l’UNEDIC ?

À la Réunion, depuis le 29 octobre, la grève sévit au Pôle emploi par manque d’effectifs. Qu’envisagez-vous de faire pour débloquer la situation? Allez-vous accepter de saisir la main tendue par l’intersyndicale, qui a fait des propositions de sortie de crise pour le plus grand bien des usagers?

La crise qui frappe si durement la France n’épargne aucun de ses territoires. Que fait pendant ce temps le Gouvernement? Il s’acharne sur les plus pauvres et les plus éloignés de l’emploi. Les territoires d’outre-mer sont dans une situation de vulnérabilité économique structurelle accentuée par des facteurs conjoncturels: le désengagement de l’état, la crise économique, la crise sociale et sociétale qu’a traversée l’outre-mer, notamment en ce début d’année, et les crises sanitaires.

Les collectivités ultramarines ont dû supporter une succession d’événements qui ont contribué à les fragiliser plus durement. Les outre-mer sont donc dans une situation économique fragile. Votre gouvernement n’a pour autant de cesse de reléguer leurs citoyens au dernier plan. N’hésitant pas à reprendre d’une main ce qu’il donne de l’autre, par exemple en imputant sur le RSTA la prime pour l’emploi. Votre gouvernement ne laisse pas non plus de repousser nos amendements. Lors de l’examen de la LODEOM, il nous a sommés de patienter jusqu’aux états généraux. Les états généraux passés, nous devons maintenant attendre le fameux conseil interministériel.

Pourtant les chiffres sont là. Les statistiques publiées en février par l’institut officiel européen Eurostat rappellent l’ampleur de la crise que traversent nos territoires lointains. Parmi les cinq régions d’Europe où le taux de chômage était le plus élevé en 2007, on trouve les quatre départements d’outre-mer français aux quatre premières places. Le score le plus élevé revient malheureusement à la Réunion, avec un taux de demandeurs d’emploi de 27,2 %. La Guadeloupe est elle aussi au-dessus des 25 %, tandis que la Martinique et la Guyane font à peine mieux. Dans ces conditions, nous sommes nombreux à ne pas comprendre votre politique de l’emploi.

Les DOM se distinguent surtout par un chômage massif des jeunes. Le taux de chômage des 15-24 ans atteint, en 2009, 55,7 % en Guadeloupe, 50 % à la Réunion et 47,8 % à la Martinique, contre 19,4 % en moyenne en France – taux déjà inquiétant – et 15,6 % dans l’Union européenne.

Il est vrai que les DOM ont une démographie dynamique. La population active y augmente de 2 à 4 % par an selon les départements, alors qu’elle stagne en métropole. Mais il y a aussi un problème de qualification. Le taux de chômage chez les jeunes qualifiés n’est en effet pas plus élevé aux Antilles que dans l’hexagone. Le marché du travail est même plus fragile outre-mer que ne le laissent supposer les seuls chiffres du chômage. La fonction publique y sert d’amortisseur social: elle représente 37 % des emplois en Martinique et 28 % en Guadeloupe, contre 20 % dans l’hexagone.

Ces chiffres, vous les connaissez, et pourtant rien n’est proposé pour permettre une réelle sortie de cette crise sociale. Les économies insulaires sont par définition limitées. Plus que de promesses, c’est d’actions que les populations ont besoin.

L’approche du conseil interministériel de l’outre-mer ne laisse par ailleurs rien transparaître dans votre budget. Votre politique de l’emploi en faveur de l’outre-mer peine à convaincre et les ultramarins ne s’y tromperont pas.

Mme la présidente. Nous avons fini d’entendre les orateurs inscrits.

La parole est à M. Xavier Darcos, ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville.

M. Xavier Darcos, ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville. Madame la présidente, mesdames et messieurs les députés, je remercierai tout d’abord les rapporteurs, Chantal Brunel et Francis Vercamer pour la partie travail, Christian Eckert et Bernard Perrut pour la partie emploi. J’ai noté que M. Eckert a été plus bref sur ce sujet que sur le travail dominical! (Sourires. )

Dans le contexte économique difficile que nous connaissons depuis plus d’un an, le champ « Travail » de la mission « Travail et emploi » dont nous avons l’honneur d’examiner le budget ce matin, revêt, tout le monde l’a dit, une importance capitale. C’est sur lui que repose le lien de confiance qui unit les salariés et l’entreprise. C’est sur lui que reposent les relations interpersonnelles, parfois si durement mises à l’épreuve lorsque la situation économique se dégrade, nous l’avons vu ces derniers mois. C’est sur lui enfin que repose l’équilibre d’un modèle social qui, depuis ses origines, a choisi de faire du travail un facteur de progrès, d’épanouissement personnel et non un simple moyen de subsistance.

Pour cela, il faut des moyens qui permettent aux administrations chargées d’appliquer ces politiques d’accomplir leur mission. Grâce aux 891 millions d’euros de crédits inscrits aux programmes 111 et 155, conformément au budget triennal 2009-2011, le PLF pour 2010 du champ « Travail » de la mission « Travail et emploi » correspond, me semble-t-il, à ce besoin, tout en respectant l’engagement gouvernemental de réduction du nombre d’emplois publics.

Mais il faut surtout une ambition, pour mettre ces moyens au service des nouveaux défis que mon ministère doit relever; c’est tout l’enjeu du texte que nous examinons ce matin. Les crédits du PLF pour 2010 permettent de relever ces défis, qu’il s’agisse de veiller au respect du droit qui régit les relations entre employeurs et salariés, d’assurer la progression des droits pour répondre à des situations nouvelles, de promouvoir le travail comme facteur de cohésion ou de favoriser le dialogue social. Telles sont en effet les missions quotidiennes et fondamentales du ministère du travail.

Il est d’ores et déjà possible d’identifier quatre grands chantiers autour desquels s’organisera l’activité de mon ministère en 2010.

Le premier, que vous avez tous évoqué dans vos interventions, est le renforcement de la politique de santé et de sécurité au travail. Le PLF lui consacre 30 millions d’euros, ce qui représente une progression de plus de 20 % par rapport aux crédits votés l’an dernier. C’est que cette politique s’inscrit dans le cadre de la stratégie européenne de santé au travail pour la période qui s’étend de 2007 à 2012, laquelle pose notamment le principe d’une réduction de 25 % du taux d’incidence globale des accidents du travail.

Je compte sur le deuxième plan « Santé au travail », qui sera élaboré en décembre et prendra effet début 2010, pour poursuivre l’effort de réduction des accidents du travail et des maladies professionnelles. Ce plan prolongera le premier, mais tiendra également compte de nouveaux risques, qu’il s’agisse des risques psychosociaux, des troubles musculo-squelettiques ou des risques liés à l’utilisation de produits dangereux, cancérogènes, mutagènes ou reprotoxiques. Le travail de l’AFSSET, que le programme 111 finance à hauteur de 9,7 millions d’euros, et celui de l’ANACT, auquel il apporte une contribution de 12 millions, permettront de mieux connaître ces risques. Vous le savez, le problème auquel se consacre l’ANACT constitue un véritable drame. La fusion programmée de l’AFSSET et de l’AFSSA, évoquée par plusieurs intervenants, rendra par ailleurs plus performant le dispositif de prévention des risques en améliorant la synergie entre les deux structures.

À ce propos, et en réponse à ce que M. Vercamer dit, dans son rapport, de la multiplicité des acteurs intervenant dans le domaine de la santé au travail, les partenaires sociaux et les pouvoirs publics doivent naturellement se parler très régulièrement pour s’accorder sur leurs priorités. Je l’ai dit, cette cohérence devrait être la marque de fabrique du deuxième plan « Santé au travail ». Ainsi, il est hors de question que ce plan ignore la convention d’objectifs et de gestion qui unit l’État et la branche AT-MP, qu’il devra au contraire prendre pour référence. De même, le souci de cohérence que vous avez souligné préside à la répartition des rôles entre les différents acteurs – AFSSET, INRS, ANACT, OPP dans le secteur du bâtiment et des travaux publics. La recherche de cohérence gouverne donc entièrement l’élaboration de ce plan, cher monsieur Vercamer.

D’autre part, la politique active de prévention des risques se décline par type de risque, par type de public et par secteur d’activité. Elle s’appuie sur des résultats chiffrés qui doivent favoriser une prise en compte globale des problèmes de santé et de sécurité au travail.

Enfin, pour soutenir la politique d’amélioration des conditions de travail, la subvention de l’ANACT a été fixée à 12,49 millions d’euros, ce qui revient au niveau de la LFI de 2008, après une réduction opérée en 2009 pour réajuster le fonds de roulement de l’agence.

Du reste, l’ANACT a été particulièrement mobilisée lors du plan d’urgence pour la prévention du stress au travail, dans le cadre duquel elle est chargée de mener les actions d’information sur les risques psychosociaux destinées aux PME et TPE. Elle joue aussi un rôle décisif en gérant le fonds pour l’amélio ration des conditions de travail, qui finance des investissements immatériels ou des études préalables à des investissements matériels, afin de permettre aux entreprises – en particulier aux plus petites, qui n’ont naturellement pas toujours les moyens de procéder à ces études – d’améliorer les conditions de travail de leurs salariés. Ce fonds a vocation à se développer, comme en témoigne la progression de ses crédits, qui passent de 1,9 millions en 2009 à 3 millions en 2010.

Le deuxième chantier sur lequel nous devons absolument avancer est la promotion de l’égalité professionnelle entre hommes et femmes. Six lois ont été votées depuis 1972; un accord national a été conclu en 2006; et pourtant, nous avons dû constater que, malgré une réduction significative, les écarts de rémunération et de carrière perdurent. Or je ne peux accepter que la rémunération des femmes soit inférieure en moyenne de 27 % à celle des hommes.

Mme Claude Greff. Bravo! (Exclamations sur les bancs du groupe GDR.)

M. Xavier Darcos, ministre du travail. Cette question fait partie intégrante des actions développées en faveur de la qualité et de l’effectivité du droit, que le programme111 finance à hauteur de 11 millions d’euros. Je remercie Mme Greff de son soutien!

Mme Claude Greff. Merci à vous, monsieur le ministre!

M. Xavier Darcos, ministre du travail. Je réunirai demain la Commission nationale de la négociation collective afin d’examiner exclusivement cette question, sur laquelle j’inviterai les partenaires sociaux à négocier. Un document d’orientation leur sera transmis, qui s’appuie essentiellement sur les recommandations du rapport que m’a remis Brigitte Grésy en juillet dernier. J’attends de cette négociation des résultats concrets en matière d’égalité professionnelle et salariale et de conciliation entre vie familiale et professionnelle; et je présenterai un projet de loi sur le sujet courant 2010.

Mme Claude Greff. C’est l’avenir de la France!

M. Xavier Darcos, ministre du travail. Le troisième chantier concerne l’emploi des seniors. Environ 85 % des Français sont actifs à l’âge de 53 ans; à 60 ans, ils ne sont plus qu’un sur quatre. Cette situation est d’autant moins satisfaisante qu’elle est très largement subie: dans les faits, ces personnes sont très fortement incitées à quitter le marché du travail, sur lequel elles n’hésitent pas à revenir dès qu’elles peuvent cumuler emploi et retraite.

Le plan national d’action concertée pour l’emploi des seniors, que Laurent Wauquiez et moi-même avons présenté cette semaine, a pour objectif affiché de porter le taux d’emploi des 55-64 ans à plus de 50 % en 2010, contre à peine plus de 38 % aujourd’hui, ce qui est très nettement inférieur à la moyenne européenne. Du reste, je rappelle que, conformément aux dispositions du PLFSS pour 2009, le Gouvernement a laissé jusqu’au 1 er  janvier 2010 aux entreprises pour conclure des accords ou présenter un plan d’action destinés à favoriser l’emploi des seniors, à défaut de quoi elles seront redevables d’une sanction égale à 1 % de leur masse salariale. J’ai fait savoir aux entreprises que le Gouvernement ne reculerait pas sur ce point et que la loi serait strictement appliquée.

M. Vercamer a également insisté sur le problème de la pénibilité, qui justifie la création d’un observatoire et la mobilisation du COCT pour définir des volets et des critères très précis: organisation du travail, environnement du travail, pénibilité physique. Monsieur le rapporteur, la pénibilité sera naturellement au cœur de cette action, comme de la réflexion sur les retraites que nous devrons conduire mi-2010.

Enfin, le quatrième chantier est le renforcement du dialogue social, dont la qualité est essentielle: sans lui, on ne saurait concilier au mieux les intérêts des salariés et ceux des entrepreneurs. Voilà pourquoi nous poursuivons la formation des personnels syndicaux, à laquelle nous ne consacrons pas moins de 26,6 millions d’euros, et celle des conseillers prud’homaux. Afin d’accompagner l’application de la loi du 20 août 2008 sur la représentativité des organisations syndicales, nous développons en outre un programme de mesure de l’audience de la représentativité syndicale, le projet MARS, auquel nous consacrons 11 millions d’euros en autorisations d’engagement. À cette fin, nous avons lancé un appel d’offres dont l’échéance est fixée à 2013. À partir de cette date, nous devrions pouvoir mesurer la représentativité des différentes organisations syndicales lors des élections au comité d’entreprise et de celles des délégués du personnel au niveau de la branche et au niveau national, interprofessionnel.

J’en viens à la répartition des moyens et à l’organisation des services du ministère du travail, sujets à propos desquels je serai plus bref. Il s’agit également de répondre à une exigence d’efficacité accrue de la dépense et de l’action publiques. De ce point de vue, l’année 2010 sera marquée par deux changements très importants.

Tout d’abord, le plan de modernisation et de développement de l’inspection du travail se poursuit. Nous recruterons en 2010 160 agents supplémentaires, dont 50 inspecteurs, 10 médecins et ingénieurs et 100 contrôleurs. Au total, près de 700 agents auront rejoint l’inspection du travail en cinq ans. Cette progression s’inscrit dans le cadre du programme de fusion des services de l’inspection du travail des ministères de l’agriculture, des transports et du travail, effectif depuis le 1 er  janvier dernier. Cette fusion conduit enfin à une unification des règles de management, elles-mêmes évolutives dans le cadre du plan de modernisation de l’inspection du travail.

L’année 2009 étant naturellement une année de transition, il est trop tôt pour évaluer les effets de la fusion; nous avons pu en revanche en mesurer le bien-fondé lors de la campagne de contrôle des produits phyto-sanitaires qui s’est déroulée du 15 mars au 15 juillet dernier et concernait tous les professionnels du secteur. En effet, ceux-ci appartenant aussi bien aux professions agricoles qu’au secteur commercial, cette campagne eût été très difficile à organiser avant la fusion.

2010 se caractérisera également par la généralisation des DIRECTE – directions régionales des entreprises, de la consommation, de la concurrence, du travail et de l’emploi‚–, évoquée par plusieurs orateurs, en particulier M. Perrut. L’extension de ces nouvelles directions régionales, communes aux ministères du travail et de l’économie, se fera à partir de l’expérimentation menée dans cinq régions préfiguratrices: l’Aquitaine, le Languedoc, la région PACA, la Franche-Comté et Rhône-Alpes. Ces nouvelles structures seront l’interlocuteur unique de toutes les entreprises, aux besoins desquelles elles apporteront ainsi des réponses bien plus appropriées. Au sein des cinq structures déjà en place, le taux de satisfaction des usagers atteint 80 %.

Partout sur le terrain, l’action conjuguée de l’inspection du travail et de l’ANACT, des ARACT et des futures DIRECTE permettra de déployer des moyens d’information et de contrôle afin d’assurer l’effectivité du droit.

Ces changements décisifs destinés à accompagner l’évolution du ministère du travail s’inscrivent dans un cadre budgétaire conforme aux engagements du plan triennal, en particulier à celui de non-renouvellement d’un fonctionnaire sur deux.

M. Maxime Gremetz. Cet engagement-là sera tenu!

M. Xavier Darcos, ministre du travail. Au total, 163 emplois seront supprimés – et 160 agents supplémentaires recrutés, monsieur Gremetz, dans le cadre du plan de modernisation et de développement de l’inspection du travail. Les agents en place bénéficieront ainsi d’un retour catégoriel significatif. Celui-ci explique notamment la stabilité de la masse salariale, qui s’établit cette année à 439 millions d’euros environ.

Enfin, nous avons souhaité présenter explicitement et ex ante les crédits d’intervention destinés au financement des maisons départementales des personnes handicapées. Les moyens consacrés au programme 155 s’élèvent ainsi à 823 millions d’euros en autorisations d’engagement, ce qui devrait permettre une amélioration significative de la qualité du service rendu aux usagers.

Mesdames, messieurs les députés, j’ai l’intime conviction que les crédits prévus pour le champ « Travail » de la mission « Travail et emploi » s’inscrit dans une vision juste et pragmatique des enjeux qui y sont attachés. Nous essayons d’opérer au plus près des besoins des entreprises et des salariés, dans le respect des engagements budgétaires et des orientations politiques adoptés depuis le début du quinquennat. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Mme la présidente. La parole est à M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État chargé de l’emploi.

M. Maxime Gremetz. Attention: c’est un vrai moulin à paroles, celui-là!

M. Philippe Vitel. Parce que vous, pas du tout, monsieur Gremetz!

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État chargé de l’emploi. Madame la présidente, je voudrais tout d’abord m’associer à l’hommage qu’a rendu Xavier Darcos au travail de Mme et MM. les rapporteurs, remercier le président Méhaignerie de sa présence et vous tous, mesdames, messieurs les députés, qui avez été amenés à intervenir.

Nous le savons tous, notre pays est entré depuis de longs mois dans l’une des crises économiques les plus difficiles et les plus douloureuses depuis l’après-guerre.

M. Christian Eckert, rapporteur spécial . Jusque-là, nous sommes d’accord.

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. Une telle réalité nous impose à tous la modestie. Elle nous conduit à agir le plus possible sur le terrain afin d’essayer d’amortir le choc pour nos compatriotes.

Personne n’a de solution miracle en cette période: le Gouvernement, plus que tout autre, en est conscient. Mais personne n’a non plus le droit de baisser les bras. Une fois passé le choc de la crise financière, nous avons essayé de nous attacher à ce qui a constitué pour nos compatriotes l’impact principal: l’emploi. Nous avons ainsi consacré des moyens exceptionnels à la politique de l’emploi et, surtout, nous avons tenté, conjointement avec nos partenaires, de concevoir des outils originaux et novateurs qui permettent de la réorienter.

Avant de répondre plus précisément aux questions que les uns et les autres vous avez avec justesse soulevées, je voudrais rappeler les principales orientations qui ont guidé notre politique de l’emploi.

En termes de méthode, notre premier choix a reposé sur la conviction que l’État et le Gouvernement ne détenaient pas seuls les clefs et les solutions. Il s’est agi pour nous de travailler conjointement avec les partenaires sociaux, et bien évidemment avec la représentation nationale. Quasiment aucun des outils que je vais évoquer n’a été conçu ou amélioré sans l’aide des partenaires sociaux. Je souhaite ici leur rendre hommage. En cette période, ils ont fait preuve d’un esprit de responsabilité exemplaire, à rebours de bien des caricatures qui sont faites de leur place dans notre pays.

Je souhaitais également souligner devant la représentation nationale le rôle déterminant qu’ont joué certains parlementaires dans la conception et l’amélioration de ces outils. Vous me pardonnerez, je l’espère, de citer leurs noms dans un ordre approximatif.

Je veux évoquer tout d’abord le président Méhaignerie, mais aussi Chantal Brunel, sur l’expertise de laquelle je me suis beaucoup appuyé, du fait notamment de l’attention qu’elle porte à la réalité des petites entreprises et aux enjeux de la formation professionnelle. Je citerai encore le travail de Laurent Hénart sur le prolongement de l’apprentissage et les services à la personne, celui de Francis Vercamer sur l’économie sociale. Je soulignerai le rôle essentiel de Bernard Perrut pour ce qui concerne l’insertion des jeunes et l’animation du réseau des missions locales. Je n’oublie pas, bien sûr, Marie-Christine Dalloz, qui nous a permis d’améliorer le dispositif des maisons de l’emploi. Je pense également au travail mené par Gérard Cherpion sur la formation professionnelle, plus largement sur le contrat de transition professionnelle. Enfin, je salue l’apport des députés de l’opposition, notamment M. Gille, avec lequel nous avons beaucoup travaillé, sur la formation professionnelle en particulier, ainsi que Mme Iborra.

M. Maxime Gremetz. Il manie bien la brosse à reluire: il ira loin!

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. Notre deuxième choix de méthode a consisté à veiller à ce que les mesures que nous adoptions soient concrètes, simples et surtout directement applicables. Pourquoi? Parce que le principal danger dans une période comme celle-ci, c’est un délai souvent trop long entre le moment où l’outil est conçu et le moment où les acteurs se l’approprient sur le terrain.

M. François Rochebloine. Très juste!

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. Il est arrivé que les outils ne soient opérationnels qu’une fois la crise passée. À ce propos, j’ai eu des échanges fructueux avec Jean-Louis Borloo sur la crise de 2002-2003: en temps que ministre du travail, il s’était heurté à cet écueil pendant la mise en place du plan de cohésion sociale, en fin de quinquennat.

Notre priorité est allée, non à des outils de marketing, raffinés et subtils, mais à des outils robustes et simples qui puissent être appliqués directement par les acteurs de terrain, je pense par exemple au dispositif « zéro charge ».

Pour la conception de la politique de l’emploi, le premier choix, très fort, qui n’a pas été facile à faire, a consisté à écarter tout traitement statistique du chômage. Par le passé, le premier réflexe en matière de politique de l’emploi était de financer des préretraites aux seniors pour être certains de pouvoir les sortir du décompte des demandeurs d’emploi. Le deuxième réflexe était de se tourner vers les jeunes pour mettre en place des dispositifs destinés à les inciter massivement à rester plus longtemps sur les bancs de la faculté.

Ces deux choix n’avaient absolument aucun intérêt en termes de politique de l’emploi à moyen ou à long terme. Le seul avantage qu’ils présentaient, c’était de permettre au ministre de l’emploi de dégonfler artificiellement les statistiques du chômage d’environ 10000 à 15000 demandeurs d’emploi chaque mois.

Au lieu de cela, nous avons choisi d’assumer la vérité des chiffres du chômage. Ce budget ne comporte pas le moindre dispositif destiné à camoufler la réalité des statistiques.

Notre dernier choix a consisté à refuser, en cette période de crise, de nous contenter d’une politique de l’emploi statique ou défensive.

M. Maxime Gremetz. C’est ça!

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. Bien sûr, il est très difficile de retrouver des sujets d’espoir ou de profiter de bulles d’oxygène permettant de créer de l’emploi. Pour autant, nous avons tenté d’identifier des leviers, en cherchant des possibilités de créer de l’emploi dans les très petites entreprises ou dans les secteurs restant en expansion, comme les services à la personne ou le développement des énergies renouvelables. Nous avons ainsi essayé d’offrir à des personnes licenciées provenant de secteurs très difficiles, comme le textile ou la métallurgie, des possibilités de reconversion.

M. Christian Eckert, rapporteur spécial . C’est faux!

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. Il s’est agi pour nous d’éviter ce que j’appelle le syndrome de la sidérurgie des années quatre-vingt-dix où l’on se contentait de voir disparaître les emplois sans proposer aux demandeurs d’emploi des possibilités de rebond.

Je ne dis pas du tout que nous y sommes parvenus tout le temps.

M. Maxime Gremetz. Ça se saurait!

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. Je ne dis pas non plus que nous avons réussi à chaque fois. Je dis simplement que nous avons cherché à élaborer des outils conjointement avec les partenaires sociaux, qui sont à l’origine de la plupart de ces dispositifs.

Avant d’entrer dans le détail des différentes questions que vous m’avez posées, j’aimerais revenir brièvement au budget.

Pour 2010, le budget de l’emploi connaît une augmentation de 2,3 milliards d’euros par rapport à l’année précédente, à périmètre égal. Ainsi, 10, 5 milliards d’euros sont inscrits aux programmes 102 et 103…

M. Christian Eckert, rapporteur spécial . Faux!

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. Monsieur Eckert, même si vous avez souligné la difficulté de concilier le budget de l’emploi et le budget consacré à la relance, je ne doute pas que le fin connaisseur que vous êtes ait parfaitement identifié ces éléments.

À cela s’ajoutent 1,4 milliard d’euros au titre du FISO et 410 millions d’euros au titre du « zéro charge », ce qui fait un total de quasiment 12,5 milliards d’euros. Il ne faut pas oublier, si l’on veut raisonner à périmètre constant, ….

M. Bernard Perrut, rapporteur pour avis . Très juste!

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. …les 500 millions d’euros destinés à l’origine à financer des aides à l’emploi dans le secteur des hôtels-cafés-restaurants qui, après la baisse de la TVA, n’ont plus lieu d’être.

Au total, à périmètre constant, ce budget est en augmentation de plus de 2,4 milliards d’euros par rapport à la loi de finances initiale de 2009 et de 3,3 milliards d’euros par rapport à la loi de programmation initiale.

M. Christian Eckert, rapporteur spécial . Ce n’est pas vrai!

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. Personne ne peut dire que, durant cette période, nous n’avons pas dégagé les moyens nécessaires, en termes de crédits budgétaires et de politique de l’emploi, pour surmonter les difficultés.

M. Maxime Gremetz. Arrêtez!

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. En ce domaine, il ne faut d’ailleurs pas oublier les engagements des partenaires sociaux, notamment à travers les fonds de l’UNEDIC.

Ce budget est très clairement celui auquel nous accordons la plus haute priorité au sein de la politique budgétaire de l’État pour l’année 2010.

Par respect pour vous, mesdames, messieurs les députés, je voudrais répondre rapidement aux questions que vous avez posées avant d’entrer plus avant dans le détail de notre action.

Je remercie tout d’abord Chantal Brunel d’avoir salué le travail de terrain que mènent les acteurs de la politique de l’emploi. Ce sont plus de 90000 personnes qui, chaque jour, œuvrent pour soutenir les demandeurs d’emploi. Nous sommes prêts à travailler avec elle sur les possibilités de simplification, notamment informatiques, qu’elle a suggérées pour Pôle emploi.

Monsieur Eckert, je suis très heureux de constater le ralliement de votre groupe au contrat de transition professionnelle, que vous aviez beaucoup critiqué. Je ne reprendrai pas les différentes interventions que vous aviez faites lors de sa création mais je ne peux que me réjouir de voir que vous êtes devenus, avec nous, des défenseurs de ce dispositif, forgé pour partie par les partenaires sociaux, notamment la CGT. Je salue cette évolution.

S’agissant des exonérations et des aides relatives aux services à la personne, je ne pense pas qu’il soit souhaitable de les remettre en cause, car elles correspondent à 2 millions d’emplois. Mais je ne pense pas non plus que tel soit votre souhait.

Quant à l’AFPA, je vous rassure, notre but n’est absolument pas de la démanteler, même si certains conseils régionaux ont évoqué cette possibilité. Nous sommes attachés à une structure d’envergure nationale qui rende un service de qualité en matière de formation professionnelle. Il est hors de question de fragiliser cette vocation.

M. Maxime Gremetz. Vous l’avez déjà tuée!

M. Jacques Desallangre. Il n’y a plus d’AFPA!

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. Du reste, vous l’avez vous-même souligné dans votre intervention.

Monsieur Perrut, je tiens à vous remercier pour le rôle que vous avez joué auprès des missions locales, dont l’investissement nous a permis d’augmenter le nombre de contrats initiative emploi destinés aux jeunes, ce qui était extrêmement important. Sans leur mobilisation et la vôtre, nous n’aurions pas connu au mois de septembre cette inversion tant attendue des tendances dans la prescription de CIE.

L’intervention de Francis Vercamer portait essentiellement sur des sujets relevant du champ du travail. Je tiens à rappeler toutefois la mission qui lui a été confiée dans le domaine de l’économie sociale en précisant que nous attendons beaucoup des travaux qu’il sera amené à rendre.

Je remercie Marie-Christine Dalloz pour son soutien à Pôle emploi. Elle a parfaitement raison de souligner que Pôle emploi n’est pas un problème mais une solution en période de crise. Une solution que l’on doit améliorer. Une solution que l’on doit renforcer étape après étape. Cela nécessite beaucoup de travail de notre part. Toutefois, si c’était une réforme facile, les gouvernements successifs ne l’auraient sans doute pas soigneusement remisée au placard depuis vingt ans. Nos difficultés ne sont pas liées à Pôle emploi, elles sont liées à la crise. Et en cette période, cette structure répond beaucoup mieux aux problèmes que ne l’ont fait, en 1993, l’ANPE et l’ASSEDIC.

S’agissant des maisons de l’emploi, notre doctrine est simple. Elle consiste d’abord à affirmer, ce dont je ne me suis jamais caché, qu’après la création de Pôle emploi, il ne s’agit pas de multiplier leurs implantations à travers le territoire.

Elle consiste ensuite à éviter de remettre en cause le travail déjà effectué sur le terrain, notamment par les élus locaux – je pense en particulier au rôle de Pierre Méhaignerie: dans le secteur de Vitré, nous conserverons les maisons de l’emploi.

Elle consiste enfin à mettre un peu d’ordre dans leur fonctionnement. Il existe des distorsions de financement parfaitement inacceptables. En outre, certains élus locaux ont développé des pratiques de clientélisme politique – je n’entrerai pas dans le détail – qui sont tout aussi inacceptables s’agissant d’une mission de service public qui doit viser l’intérêt républicain. Notre but est d’établir un cahier des charges clair. Celui-ci reposera d’ailleurs sur le travail que vous avez mené, madame Dalloz, que je mets en parallèle avec celui de Chantal Brunel qui nous a amenés à rationaliser les dépenses affectées aux maisons de l’emploi, notamment par une meilleure évaluation.

M. Liebgott, que je remercie, a évoqué deux sujets importants: l'allocation en faveur des demandeurs d'emploi en formation et l’allocation équivalent retraite. Nous sommes en discussion avec les partenaires sociaux à propos de ces dispositifs qu’ils cofinancent, afin de déterminer quelles sont les meilleures solutions pour l’année 2010.

S’agissant de l’intervention de Maxime Gremetz, j’ai bien compris que je n’avais pas, à ses yeux, un rang suffisamment élevé dans le Gouvernement pour lui répondre, simple secrétaire d’État que je suis.

M. Maxime Gremetz. Mais si, mais si! Seulement je voulais parler au ministre.

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. S’il m’adresse des questions dans la suite du débat, peut-être pourrai-je cependant lui répondre.

Monsieur Rochebloine, je vous remercie très vivement du soutien que vous avez apporté aux contrats passerelle. Nous essayons de mieux concevoir l’articulation entre les phases du contrat aidé et de l’insertion dans l’emploi. Cet effort important, difficile à réaliser, doit être consenti conjointement avec les élus locaux – je ne vous apprendrai rien, vous qui connaissez ces sujets par cœur.

Quant au contrat unique d’insertion, je ne veux surtout pas qu’il aboutisse à une déstabilisation. Dans la période actuelle, nous ne savons que trop bien que lorsqu’on se forge d’autres outils, on prend souvent six mois dans la vue! La priorité n’est pas de se faire plaisir en inventant de nouveaux dispositifs, mais de faire en sorte qu’ils tournent sur le terrain et que les demandeurs d’emploi qui en ont besoin obtiennent des réponses. Le contrat unique est un outil de simplification. Nous veillerons, dans un premier temps, à ce que les règles du jeu ne soient pas modifiées, sinon nous perdrons plusieurs mois, et c’est précisément ce que je veux éviter en cette période.

Je tiens à remercier Gérard Cherpion pour le travail qu’il a accompli s’agissant du CTP.

M. Maxime Gremetz. Le secrétaire d’État distribue les bonnes et les mauvaises notes!

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d’État. En la matière, nous travaillons à la mise en place d’un accompagnement, notamment des publics précaires. Je pense aux salariés en fin d’intérim ou de CDD.

Madame Iborra, permettez-moi de vous dire que je ne partage pas votre vision du recours au FISO. Les partenaires sociaux n’estiment pas qu’il s’agisse d’un dessaisissement de l’État ni que l’on finance les politiques de l’État en grande partie avec les fonds qui sont les leurs. Vous n’avez qu’à les interroger.

Mme Monique Iborra. Je l’ai fait!

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d’État. Qu’il s’agisse de Marcel Grignard pour la CFDT, de Maurad Rabhi pour la CGT, de Stéphane Lardy pour FO, des représentants de la CGC, de la CFTC ou de ceux du MEDEF, tous sont extrêmement attachés au FISO. Nombre des dispositifs aujourd’hui appliqués sur le terrain n’auraient pu l’être sans leur appui.

Mme Monique Iborra. Je ne l’ai pas nié!

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d’État. De ce point de vue, ils méritent un peu plus de respect de notre part.

Monsieur Candelier, vous avez eu raison d’insister sur le recrutement d’apprentis et de jeunes en contrat de professionnalisation. C’est l’un des grands défis de cette fin d’année.

Je ne reviendrai pas sur l’intervention de Laurent Hénart.

Je ferai à M. Gille la même remarque qu’à Mme Iborra: concernant l’utilisation du FISO, il ne s’agit pas d’un dessaisissement de l’État, mais au contraire d’un effort pour piloter ensemble, avec les partenaires sociaux, la politique de l’emploi. C’est de cette façon qu’ils le vivent.

Je tiens à renouveler tout mon soutien aux agents de Pôle emploi qui, dans cette période difficile, rencontrent des difficultés sur le terrain.

Monsieur Gaëtan Gorce, je pense, contrairement à vous, que le rattachement de la politique de l’emploi à Bercy a deux avantages. D’une part, il nous permet de travailler avec l’industrie et, comme vous l’avez tous souligné, il n’y a pas de politique de l’emploi sans un effort pour l’articuler avec la politique industrielle. D’autre part, Xavier Darcos et moi-même travaillons conjointement. Cette semaine encore, nous nous sommes penchés sur l’emploi des seniors et sur la mise en place du CV anonyme.

Madame Girardin, je suis à votre disposition pour travailler sur la formation, notamment à Saint-Pierre-et-Miquelon.

Monsieur Lebreton, les contrats aidés ont été massivement conclus, outre-mer notamment, ce qui est le signe de notre engagement. De même, l’activité partielle a été très utilisée outre-mer par de nombreuses entreprises. En termes de ratio d’emploi, ce sont les territoires qui l’ont le plus sollicitée.

J’en viens maintenant aux principales caractéristiques de notre politique de l’emploi et aux outils qui ont été mis à son service.

Trois de ces outils représentent les trois colonnes sur lesquelles nous nous appuyons le plus.

Le premier est le dispositif « zéro charge » qui a permis, depuis son entrée en vigueur, plus de 600000 embauches dans les entreprises de moins de dix salariés. Ce dispositif simple, qui a pu être utilisé très facilement par les employeurs, reposait sur une intuition tout aussi simple: l’actualité médiatique est trop souvent faite par les grands groupes et elle passe à côté de la réalité de la création d’emplois qui est principalement le fait des entreprises de moins de dix salariés.

M. Georges Colombier. C’est vrai!

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d’État. Nous avons massivement investi dans ce dispositif. Ainsi, 410 millions d’euros sont reconduits à ce titre pour 2010, montant qui nous a déjà permis d’exercer un effet de levier maximal en termes de création d’emplois. Cet effort nous permet également de conserver le même taux de création d’emplois dans les entreprises de moins de dix salariés qu’avant la crise. C’est une vraie performance, qui montre que nous avons sans doute là l’un des outils les plus efficaces de la politique de l’emploi.

Le deuxième outil est l’activité partielle, l’une des intuitions du Président de la République. Ce dispositif a fait ses preuves puisque ce sont les deux pays qui ont le plus misé dessus, à savoir la France et l’Allemagne, qui ont le mieux sauvé l’emploi dans cette période.

L’idée est simple: avec la crise, les entreprises risquent de sur-réagir au choc et de supprimer des emplois en prévision d’un marasme de cinquante ans qui n’a rien de rationnel eu égard au rythme des cycles économiques. Le but est donc d’éviter qu’elles ne se privent de compétences à long terme et de les inciter à conserver les savoir-faire qui font leur force.

M. Maxime Gremetz. Arrêtez!

Mme la présidente. Monsieur Gremetz!

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d’État. La richesse et la compétitivité d’une entreprise – et je serais surpris que M. Gremetz me démente – est l’œuvre de ses salariés et tient aux compétences humaines.

M. Maxime Gremetz. Vous voulez que je vous dise ce qu’ont fait de leurs compétences humaines des sociétés comme Nexans, Continental, Goodyear ou Renault?...

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d’État. Justement, parlons de Renault et de Peugeot, monsieur Gremetz!

Vous savez très bien quelle était la perspective dans ces entreprises il y a un an. On nous annonçait des plans sociaux avec de vrais licenciements et la fermeture de sites. Nous avons fait le point avec les délégués CGT, qui ont été à l’origine de l’amélioration de l’activité partielle. C’est parce que nous avons massivement investi avec eux dans l’activité partielle que nous avons pu éviter toute fermeture de site chez Renault et Peugeot et qu’il n’y a eu aucun licenciement. Je crois qu’on peut leur rendre hommage. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. Maxime Gremetz. 5000 emplois en moins! Et ne mettez pas en cause la CGT!

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d’État. Troisième outil: le dispositif des contrats de transition professionnelle et de la convention de reclassement personnalisé nous a permis d’offrir la possibilité à des salariés qui avaient perdu leur emploi de rebondir dans d’autres domaines en leur donnant du temps et une formation. Ce dispositif, travaillé conjointement avec Gérard Cherpion, a permis d’accompagner dans cette période plus de 100000 personnes qui en avaient considérablement besoin.

J’évoquerai cet après-midi, en répondant à vos questions, les accords de gestion par secteur – je pense notamment à la chimie ou à l’agro-alimentaire –, l’insertion par l’activité économique et l’emploi des jeunes. Quant à l’emploi des seniors, il a été traité conjointement avec Xavier Darcos. Là encore, j’y reviendrai lors des questions.

La plupart des dispositifs que je viens de décrire sont conjoncturels, et je l’assume. Chacun sait que nous traversons une période budgétaire difficile. Le principal objectif que nous nous sommes assigné a donc consisté à identifier très précisément toutes les mesures de soutien permettant de faire face à la crise. Je n’ai pas voulu que soient pérennisés des dispositifs qui, sous couvert de la crise, auraient entraîné des déficits structurels perdurant en période de croissance.

M. Bernard Perrut, rapporteur pour avis . Très bien!

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d’État. C’est bien pour cela que nous serons capables d’arrêter, dès la fin de la crise de l’emploi, le fonctionnement de la quasi-totalité des outils qui ont été mis en place. Je le dis, car cet effort de transparence envers la représentation nationale me paraît indispensable.

M. Philippe Vitel. Très bien!

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d’État. Nous n’avons pas voulu signer des chèques en blanc sur la durée. Notre but est de répondre à un grave choc conjoncturel, il n’est pas d’engager des dépenses que nous supporterions pendant de très nombreuses années. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

En conclusion, il est bien évident que les résultats de la politique de l’emploi en période de crise ne sont jamais suffisants.

M. Jacques Desallangre. C’est de la résignation: ce n’est pas pareil!

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d’État. Il est bien évident que ce que nous voudrions tous, au-delà des postures que nous pouvons adopter les uns et les autres, c’est que le taux de chômage n’augmente pas.

M. Maxime Gremetz. Ce n’est pas une posture, c’est de l’indignation! Les hommes sont traités comme des marchandises! Ils ne comptent pas!

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d’État. Malgré tout, je veux rappeler quelques réalités. Le taux de chômage a augmenté de 70 % en Espagne et de plus de 70 % au Danemark.

M. Maxime Gremetz. Arrêtez!

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d’État. Monsieur Gremetz, je pense que les femmes et les hommes qui perdent leur emploi méritent de vous la même attention partout en Europe!

M. Maxime Gremetz. Vous croyez qu’on peut comparer l’Espagne et la France?

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d’État. Aux États-Unis, ce taux a augmenté de 62 % et au Royaume-Uni de 50 %.

En Espagne, en moins d’un an, 1,6 million de personnes supplémentaires ont été amenées à s’inscrire au chômage.

M. Philippe Vitel. Eh oui!

M. Maxime Gremetz. Quelle arrogance: le secrétaire d’État tient la tribune plus longtemps que le ministre! Et vous, madame la présidente, vous le laissez parler autant qu’il veut!

Mme la présidente. Monsieur Gremetz, je vous en prie!

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d’État. Je constate, monsieur Gremetz, que vous situez le débat sur l’emploi au niveau où il doit être… Mais au-delà du respect que vous manifestez si libéralement au Gouvernement, il ne vous aura pas échappé que je m’exprime au titre de la politique de l’emploi, qui est rattachée au ministère de Christine Lagarde, tandis que M. Darcos intervient au titre du travail.

M. Maxime Gremetz. D’accord! Voilà pourquoi vous parlez plus longtemps que lui!

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d’État. Il ne vous a sans doute pas échappé non plus que la plupart des crédits que vous avez évoqués relèvent de la politique de l’emploi. Mais peut-être n’avez-vous pas poussé l’analyse jusque-là!

S’agissant maintenant des résultats de la politique de l’emploi en France, l’augmentation du chômage est excessive. Nous sommes parvenus à l’amortir, mais elle atteint néanmoins 20 %, ce qui est beaucoup trop. C’est beaucoup trop pour chacun des demandeurs d’emploi qui ont perdu leur poste. Mais c’est aussi beaucoup mieux que tout ce qui avait été prévu.

Je vous rappelle qu’au début de l’année, on nous avait prédit plus de 700000 demandeurs d’emploi supplémentaires. Nous allons vraisemblablement réussir – même si ce n’est pas un motif de satisfaction, c’est mieux que ce qu’on nous avait annoncé – à limiter l’augmentation à 500000. C’est beaucoup trop, je le répète, et cela nécessite de notre part, sur tous les bancs, un effort considérable. De ces chiffres, on peut tirer la leçon que, même au cœur de la crise, nous n’avons pas le droit de baisser les bras.

M. Maxime Gremetz. C’est nous qui sauvons les emplois, pas vous!

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d’État. Nous sommes astreints à inventer tous les outils qui peuvent nous permettre d’amortir le choc. Sans doute n’arriverons-nous pas à l’effacer, mais en réduire l’ampleur pour nos compatriotes est une mission qui mérite tous nos efforts. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Mme la présidente. Nous aborderons cet après-midi la séquence des questions.

Ordre du jour de la prochaine séance

Mme la présidente. Prochaine séance, cet après-midi, à quinze heures :

Suite de la discussion de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2010:

Travail et emploi (suite);

Défense.

La séance est levée.

(La séance est levée à douze heures cinquante-cinq.)

Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l’Assemblée nationale,
Claude Azéma