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Délégation pour l’Union européenne

mardi 3 juin 2008

17 heures

Compte rendu n° 48

Présidence de M. Pierre Lequiller Président

I. Examen du rapport d’information de M. Thierry Mariani sur la politique commune de l’immigration (E 3678 et E 3679)

II. Communication du Président Pierre Lequiller sur la XXXIXe COSAC de Brdo

III. Communication de M. Gérard Voisin sur le « paquet routier » (E 3541, E 3542 et E 3543) (suite)

IV. Examen des textes soumis à l’Assemblée nationale en application de l’article 88-4 de la Constitution

I. Examen du rapport d’information de M. Thierry Mariani sur la politique commune de l’immigration (E 3678 et E 3679)

Après avoir rappelé que l'Union européenne, depuis le Conseil européen de Tampere d’octobre 1999, légifère sur l’immigration, M. Thierry Mariani, rapporteur, a souligné qu’une approche européenne de cette question était plus que jamais nécessaire à la suite de l’élargissement et de l’afflux de clandestins aux frontières européennes.

C’est pourquoi il s’est félicité que la France, qui va assumer la présidence de l'Union européenne, ait inscrit l’immigration parmi ses priorités.

Il a indiqué que l’ambition française est double ; elle souhaite, en premier lieu, faire adopter des directives-clés sur l’immigration, en cours de discussion lors de sa présidence et, en second lieu, redonner une nouvelle impulsion politique à ce processus et proposer aux partenaires européens la conclusion d’un pacte européen sur l’immigration et l’asile.

Il a présenté le projet de pacte, qui s’articulerait autour de cinq priorités.

- organiser l’immigration légale et favoriser l’immigration professionnelle, en fonction des capacités d’accueil de chaque Etat ;

- mieux protéger les frontières extérieures de l’Union dans un esprit de solidarité et rendre plus opérationnel le contrôle ;

- rendre plus effectif l’éloignement des étrangers en situation irrégulière et définir une politique commune de retour ;

- mettre en œuvre un régime européen d’asile ;

- renforcer le codéveloppement et l’aide au développement.

Il a souligné le caractère politique et concret de cette initiative, fruit d’une réflexion commune avec les partenaires européens.

Il a ensuite resituer l’initiative française par rapport aux travaux communautaires et présenté deux directives communautaires en cours de discussion, favorisant l’immigration professionnelle, sur lesquelles la Délégation doit se prononcer.

La première directive propose de délivrer à des travailleurs hautement qualifiés de pays tiers à l'Union européenne un titre de séjour, dénommé carte bleue européenne, afin de rendre plus attractif le marché du travail européen.

Le rapporteur a indiqué à la Délégation que ce texte rejoignait la volonté française de promouvoir une immigration choisie et professionnelle et rappelé que la France avait adopté, dans sa législation nationale avec la « carte compétence et talents », un dispositif similaire.

La seconde directive instaure un socle commun de droits pour les travailleurs réguliers de pays tiers. Le rapporteur a attiré l’attention de la Délégation sur la liste de ces droits, tout en se félicitant de la mise en place d’un cadre commun qui pourrait permettre d’éviter que les travailleurs choisissent un Etat où les avantages sociaux seraient plus favorables.

Il a ensuite décrit les principales propositions du pacte dans ses différentes composantes.

Sur le volet organisant un éloignement plus effectif, le projet de pacte préconise l’organisation de vols de retour conjoints, la relance d’accords de réadmission au niveau européen et l’élaboration de normes communes d’éloignement. Il a rappelé que la directive « retour » serait examinée par le Parlement européen dans quelques jours et que la Délégation avait émis des réserves sur le dispositif initial.

Sur le chapitre visant à renforcer la coopération extérieure aux frontières, le pacte suggère de généraliser les visas biométriques dans tous les Etats membres pour 2011 et d’augmenter les moyens opérationnels de Frontex.

Sur le point relatif à la mise en place d’un cadre harmonisé du droit d’asile, il préconise d’élaborer des critères et une procédure communs d’examen des demandes d’asile.

Le rapporteur a terminé son intervention en présentant l’accueil réservé à ce projet par plusieurs pays dans lesquels il s’est rendu : l’Autriche, le Royaume-Uni, l’Espagne et la Pologne.

Il a constaté que, de manière générale, ses interlocuteurs avaient manifesté leur intérêt pour cette initiative et lui apporteraient leur soutien.

Il a résumé ensuite la position d’ensemble de ces pays : si un consensus semble se dessiner sur le renforcement de la coopération extérieure aux frontières, la lutte contre l’immigration irrégulière, le refus du principe de régularisations massives et la signature d’un contrat d’intégration par les étrangers soulèvent plus de réticences.

Puis il a présenté les différents points de la proposition de résolution reprenant les principaux éléments ci-dessus évoqués.

M. Jacques Myard a souhaité savoir si la « carte bleue » européenne serait délivrée par les Etats membres ou par l’Union européenne. Il a également interrogé le rapporteur sur la signification de l’expression « gestion intégrée des frontières extérieures ».

M. Thierry Mariani, rapporteur, a répondu que la « carte bleue » européenne serait délivrée par les Etats membres selon une procédure commune.

M. Jacques Myard, après s’être dit favorable à l’adoption de normes européennes dans ce domaine, a demandé si les ambassades seraient responsables de la procédure, comme elles le sont pour la délivrance des visas Schengen.

Le rapporteur a indiqué que le ministère de l’immigration avait une compétence conjointe en matière de visas.

M. Jacques Myard a souligné que selon le principe de l’unité de l’Etat, les ambassades de France représentaient également ce ministère.

Le rapporteur a ensuite indiqué que la France avait dans le passé soutenu, à travers l’expression « gestion intégrée des frontières extérieures », la création d’un corps européen de gardes-frontières mais qu’elle avait dû réduire ses ambitions et demandait maintenant un corps commun de formateurs inspecteurs. Il est souhaitable que toutes les frontières offrent le même niveau de sécurité.

Il a rappelé qu’il avait effectué en 2004 une mission sur le contrôle de la frontière entre la Pologne et l’Ukraine et qu’il avait constaté que les équipements de pointe financés par l’Union européenne n’étaient pas utilisés. Il faut pourtant que les nouveaux Etats membres contrôlent leurs frontières avec la même technicité que les anciens Etats membres.

M. Jacques Myard a estimé que Schengen était un système conçu pour un monde parfait qui n’existe pas. Or le système est faillible car on ne peut avoir confiance dans certains fonctionnaires des Etats partenaires. Il faudrait pouvoir arrêter la procédure de délivrance des « cartes bleues » si un Etat se mettait à en délivrer un nombre anormalement élevé.

Le rapporteur a indiqué que la proposition de la Commission ne prévoyait pas un tel mécanisme. Il a souligné qu’une chaîne de sécurité avait la valeur de son maillon le plus faible. En matière de visas, les dysfonctionnements viennent parfois des anciens Etats membres. Les nouveaux Etats membres sont plus exposés car les salaires des fonctionnaires sont plus faibles. Pour réduire les risques, il faudrait des guichets uniques pour la délivrance des visas, proposition qui figure dans le pacte.

M. Jacques Myard a souhaité qu’un bilan de Schengen soit établi car le système est devenu très lourd. De plus, il est voué à l’échec car l’espace Schengen est incontrôlable.

Le rapporteur a estimé que le système n’était pas parfait à l’heure actuelle et qu’il était nécessaire de mettre en œuvre un contrôle des entrées et des sorties, ainsi que de généraliser les visas biométriques.

Le Président Pierre Lequiller a souligné que le pacte proposé par la France permettrait des avancées, par exemple grâce au refus des régularisations massives ou à l’harmonisation du droit d’asile.

M. Jacques Myard a estimé que la « carte bleue » européenne allait plus loin que l’adoption de normes communes et créait des risques de trafic.

Le rapporteur a insisté sur le chemin fait par l’Union européenne depuis 1999 en matière d’immigration et a évalué à quatre ou cinq années le délai nécessaire pour disposer d’une véritable politique européenne.

Le Président Pierre Lequiller a jugé opportun que le rapport souligne la nouvelle impulsion à donner à cette politique.

Mme Annick Girardin a interrogé le rapporteur sur les objectifs en matière d’immigration qualifiée et souhaité savoir si le niveau d’études demandé pour la « carte bleue » était véritablement lié aux besoins ou s’il visait à limiter l’immigration. Elle a également souhaité connaître les conditions d’expérience professionnelle.

Le rapporteur a observé que la politique d’immigration de l’Union européenne allait se rapprocher de celle du Canada. Ce pays, qui privilégiait certaines professions, met maintenant l’accent sur les compétences et l’employabilité. Un haut niveau de qualification permet aux immigrants de s’adapter.

Mme Annick Girardin a souligné qu’au Canada, l’expérience professionnelle est prise en compte.

Le rapporteur a indiqué que la proposition relative à la « carte bleue » prévoyait comme conditions de délivrance le fait de disposer d’un contrat de travail, d’avoir un salaire supérieur à trois fois le salaire minimum, d’être titulaire d’un diplôme sanctionnant trois années d’études supérieures ou d’avoir trois ans d’expérience professionnelle.

Le Président Pierre Lequiller a souhaité que la Délégation suive ces questions pendant la Présidence française. Il a jugé très positive l’ouverture, sans restrictions, du marché français du travail aux pays d’Europe centrale et orientale annoncée par le Président de la République. Il a observé que certains immigrés polonais retournaient en Pologne du fait de la bonne santé économique de ce pays.

M. Jacques Myard a rappelé que les actes d’adhésion laissaient un délai de 8 ans pour l’ouverture des marchés du travail. Il a estimé que la réglementation européenne relative au détachement des travailleurs aboutissait à une concurrence déloyale car des travailleurs polonais payés au SMIC en France peuvent rester soumis aux normes polonaises en matière de cotisations sociales. Cette possibilité est largement utilisée.

M. Gérard Voisin a estimé qu’il était très difficile de trouver des travailleurs manuels en France.

Mme Annick Girardin a jugé nécessaire de limiter le détachement de travailleurs.

M. Thierry Mariani, rapporteur, a estimé que la France avait eu tort de ne pas ouvrir son marché du travail aux pays d’Europe centrale et orientale dès leur adhésion. Il s’agit d’une erreur politique car ces Etats ont été vexés, et d’une erreur économique car les immigrés les plus qualifiés sont partis en Irlande et en Suède.

Des pays comme la Pologne ont un double point de vue sur l’immigration, car ils sont en même temps pays de départ et pays d’accueil. Cela explique leurs réticences sur les accords d’intégration.

M. Jérôme Lambert a demandé au rapporteur s’il avait connaissance d’un document élaboré par l'Union européenne, qui chiffrerait les besoins européens d’immigration économique.

M. Thierry Mariani, rapporteur, a indiqué que le Livre vert sur la gestion des migrations économiques avait fourni en 2005 une estimation, mais que la situation démographique était différente selon les Etats membres. Celle de la France est plus favorable.

M. Jérôme Lambert a jugé que le chiffre de 20 ou 25 millions de personnes, pour les besoins en main d’œuvre, pour le futur, exigeait une réelle politique européenne d’immigration et qu’il convenait donc de faire coïncider les dispositifs juridiques avec les besoins. Il est donc opportun d’aller au-delà des seules recommandations françaises et de ne pas se déconnecter des perspectives migratoires. On observe d’ailleurs dans le pacte un changement de perspective par rapport au projet originel.

Sur proposition du rapporteur, la Délégation a ensuite adopté la proposition de résolution suivante :

« L'Assemblée nationale,

Vu l’article 88-4 de la Constitution,

Vu la proposition de directive du Conseil établissant les conditions d’entrée et de séjour des ressortissants de pays tiers aux fins d’un emploi hautement qualifié (COM [2007] 637 final/no E 3678),

Vu la proposition de directive du Conseil établissant une procédure de demande unique en vue de la délivrance d’un permis unique autorisant les ressortissants de pays tiers à résider et à travailler sur le territoire d’un Etat membre et établissant un socle commun de droits pour les travailleurs issus de pays tiers qui résident légalement dans un Etat membre (COM [2007] 638 final/no E 3679),

Vu la communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions « Vers une politique commune en matière d’immigration » (COM [2007] 780 final),

1. Se félicite de la démarche de la Commission fondée sur une approche globale et équilibrée qui cherche à compléter la politique commune en matière d’immigration, notamment en encourageant l’immigration professionnelle et en luttant contre l’immigration irrégulière ;

2. Salue l’initiative française et sa volonté de donner un nouvel élan politique au processus, en fixant de nouvelles orientations par le biais de son projet de pacte européen sur l’immigration et l’asile ;

3. Se déclare favorable à la proposition de la Commission instituant une carte bleue européenne, qui correspond à l’approche française d’immigration choisie et professionnelle, en tenant compte de l’état du marché du travail ;

4. Estime cependant opportun de mieux définir les termes d’emploi qualifié et de relever le niveau d’études exigées, afin de cibler une immigration hautement qualifiée ;

5. Suggère que la Commission s’inspire du dispositif français de la carte compétences et talents ;

6. Demande la plus grande vigilance sur la liste des droits énoncés dans la proposition établissant un socle de droits communs pour les travailleurs des pays tiers ;

7. Souhaite que l’Union se prononce contre le principe des régularisations massives et collectives ;

8. Se déclare favorable à une plus grande gestion intégrée des frontières extérieures dans un esprit de solidarité et plaide pour un renforcement des moyens opérationnels de l’agence européenne Frontex et une généralisation des visas biométriques ;

9. Encourage l’adoption de mesures permettant l’éloignement effectif des immigrants en situation irrégulière, notamment par l’organisation de vols conjoints et la relance de la conclusion d’accords de réadmission au niveau européen ;

10. Souhaite que l’harmonisation du droit d’asile progresse afin d’assurer une plus grande solidarité entre Etats membres et que soit élaboré un statut uniforme de réfugié et des procédures communes d’octroi et de retrait du droit d’asile. »

II. Communication du Président Pierre Lequiller sur la XXXIXe COSAC de Brdo

Le Président Pierre Lequiller a fait le point sur les travaux de la XXXIXe COSAC, qui a réuni les membres des commissions pour l'Union européenne de l'ensemble des Etats membres à Brdo, en Slovénie, les 7 et 8 mai 2008. La Délégation y était représentée, outre lui-même, par M. Jérôme Lambert. Il a estimé que cette session, à l'image de la présidence slovène, s'est révélée d'une très grande qualité, tant dans ses intervenants que dans l'organisation de débats de fond permettant à chaque délégation d'exprimer des points de vue souvent convergents mais aussi parfois plus tranchés.

La question au centre des débats a été la mise en œuvre des nouvelles prérogatives que le traité de Lisbonne accorde aux parlements nationaux. Au cœur de la coopération interparlementaire s'impose en effet la nouvelle mission de contrôle de la subsidiarité. Son succès repose sur une coopération étroite des parlements nationaux afin qu'ils soient en mesure, dans le bref délai de huit semaines que leur fixe le protocole, d'atteindre les seuils qui déclenchent les nouveaux effets juridiques. La COSAC a un rôle décisif à jouer dans cette procédure, afin d'assurer une coordination parlementaire apte à encourager l'usage des contrôles de subsidiarité.

De nombreuses délégations ont fait part de leur souhait de fixer un cadre, plus ou moins organisé et contraignant, à cette coopération. Afin cependant de laisser à chaque parlement le soin de définir sa conception du contrôle de subsidiarité, et dans l'attente de l'entrée en vigueur du traité de Lisbonne, la COSAC a décidé de confier à la France le soin de recenser les idées des parlements nationaux afin d'organiser un débat constructif sur la coopération parlementaire lors de la COSAC de Paris des 3 et 4 novembre prochain. A cette fin, un groupe de travail composé des représentants des parlements nationaux auprès de l'Union européenne devra définir les principes directeurs d'un rapport sur ce sujet qui sera rédigé par le Secrétariat de la COSAC à l'automne prochain.

Le Président Pierre Lequiller a cependant estimé essentiel d'aménager à chaque parlement national une grande liberté dans la manière dont il organisera le contrôle. Dans ce cadre, la base de données IPEX, qui permet à chaque parlement d'être informé en temps réel des initiatives prises par ses homologues, est l'instrument clef qui devra être renforcé, en particulier afin de rendre immédiatement disponibles, et dans des langues aisément compréhensibles par tous, les avis adoptés par les parlements nationaux.

Le Président Pierre Lequiller a poursuivi en indiquant que M. Janez Janša, Premier ministre de la Slovénie, a ensuite fait le point sur la présidence slovène de l'Union, se félicitant des progrès accomplis sur l'ensemble des grands dossiers à l'ordre du jour, en soulignant en particulier les pas en avant faits dans l'établissement d'un espace commun de liberté, de sécurité et de justice. Les propositions sur les grands chantiers à venir (la lutte contre le changement climatique, l'énergie...) sont sur la table, et les perspectives de parvenir à des compromis durant la présidence françaises sont prometteuses.

A la suite de l'intervention de M. Dragutin Mate, ministre de l'Intérieur de la Slovénie, la COSAC a débattu de l'état de la coopération entre l'Union européenne et les Balkans occidentaux dans le domaine des affaires intérieures. La COSAC a réaffirmé la vocation de l'ensemble des Etats de la zone à appartenir à l'Union à laquelle la Slovénie est en particulier très attachée.

Enfin, sous l'animation de M. Janez Potočnik, Commissaire européen en charge de la Science et de la Recherche, la COSAC a pris acte du lancement par le Conseil européen du nouveau cycle triennal de la Stratégie pour la croissance en insistant sur l'importance décisive du Paquet énergie et changement climatique.

Le Président Pierre Lequiller a conclu en souhaitant que la prochaine COSAC que la France aura l’honneur d’accueillir se révèle d’une aussi grande qualité que celle organisée par les Slovènes.

III. Communication de M. Gérard Voisin sur le « paquet routier » (E 3541, E 3542 et E 3543) (suite)

M. Gérard Voisin, rapporteur, a rappelé, d’une part, que le paquet routier consistait, à travers trois propositions de règlement, à simplifier et à moderniser la législation sur l’accès à la profession de transporteur par route, au marché du transport de marchandises et au marché du transport de voyageurs et que, d’autre part, la Délégation avait décidé, le 26 mars 2008, de réserver sa position, ayant estimé que les mesures proposées par la Commission ne satisfaisaient pas aux exigences de la sécurité routière.

Le rapporteur a relevé que les discussions avaient évolué dans un sens opposé, en ce qui concerne principalement la question du cabotage, au sein du Conseil et du Parlement européen.

Pour ce qui est du Conseil, le Conseil « Transports » du 7 avril 2008 n’a pu parvenir à un accord politique sur le compromis global proposé par la Présidence slovène. A l’exception de la France et de quelques Etats membres qui avaient soutenu ce compromis, les autres Etats étaient trop divisés sur la question du cabotage.

Ultérieurement, les divergences ont pu être surmontées, grâce à la volonté de la plupart des Etats de répondre favorablement au souhait de la Présidence slovène de conclure – très probablement – un accord politique lors du Conseil « Transports » du 13 juin 2008, d’autant que le COREPER du 28 mai 2008 a validé les dispositifs des trois textes.

S’agissant plus particulièrement du régime du cabotage, le rapporteur a relevé que le Conseil avait renouvelé son refus de brûler les étapes d’une trop grande ouverture, à la différence du Parlement européen, puisque – comme le texte initial – le cabotage est limité à trois opérations dans un délai de sept jours. En revanche, elles pourront être effectuées dans n’importe quel Etat membre.

En second lieu, ainsi que la France l’a souhaité, les Etats pourront prendre des mesures de sauvegarde. Enfin, le COREPER a repris la disposition proposée par la Commission à titre de compromis, selon laquelle cette dernière présentera un rapport à la fin de l’année 2012, pour évaluer s’il convient de procéder à une libéralisation du cabotage, au vu notamment de l’évolution des conditions d’emploi.

Quant au Parlement européen, il a adopté, le 21 mai 2008, des amendements qui répondent aux souhaits de la France, tels que la référence explicite à l’application du détachement en cas de cabotage ou la réintroduction des mesures de sauvegarde. Mais le Parlement européen a confirmé les décisions de la commission des transports en faveur d’une libéralisation totale du cabotage. Dès 2012, il a porté à sept – au lieu de trois – le nombre d’opérations pouvant être effectuées dans un délai de sept jours. D’autre part, il a décidé de supprimer au 1er janvier 2014, toutes les restrictions concernant le nombre et la durée des opérations de cabotage.

Enfin, le Parlement européen pourrait confirmer, très prochainement, une disposition adoptée par la commission des transports, qui rétablit une disposition antérieure autorisant, à titre dérogatoire, un temps de conduite durant 12 jours consécutifs pour le seul transport international occasionnel de voyageurs. Le rapporteur a fait observer que les dispositions adoptées par le Parlement européen risqueraient de rendre très difficile la procédure de conciliation entre le Parlement européen et le Conseil.

En conclusion, M. Gérard Voisin a déclaré vouloir soumettre à l’approbation de la Délégation des conclusions, dont le souci est de plaider en faveur d’un cadre équilibré, qui permette de concilier activités de transport et respect des règles en matière de concurrence et de sécurité.

M. Jérôme Lambert a demandé des précisions sur la législation actuelle de manière à apprécier le progrès que représente la règle des trois opérations de cabotage dans un délai de sept jours.

Mme Annick Girardin, s’associant à la demande de M. Jérôme Lambert, a déploré la difficulté à mesurer l’impact réel des dispositions susceptibles d’être adoptées par le Conseil « Transports ».

Le rapporteur a indiqué que la situation était très disparate selon les Etats membres. Le cabotage est ainsi autorisé en France dans la limite de 30 jours consécutifs ou de 45 jours sur une période de douze mois. En Italie, la limite est fixée à 30 jours par an. La règle prévue de trois opérations de cabotage sur sept jours représente une situation plus satisfaisante par rapport aux perspectives de la libéralisation totale, souhaitée par le Parlement européen.

M. Jérôme Lambert a évoqué les questions de sécurité et a souhaité connaître les modalités de contrôle.

En réponse, le rapporteur a précisé que les contrôles étaient, en France, opérés non seulement par la gendarmerie mais également par l’inspection du travail des transports.

M. Jérôme Lambert s’est inquiété de la faiblesse des effectifs et de la difficulté à procéder à des contrôles efficaces.

Le rapporteur a rappelé que les questions de sécurité et de contrôle étaient particulièrement préoccupantes pour le transport de voyageurs, compte tenu du souhait du Parlement européen de rétablir la disposition qui autorisait, à titre dérogatoire, un temps de conduite durant douze jours consécutifs pour le seul transport international occasionnel de voyageurs. La mise en place des registres prévue par le paquet routier en est actuellement la clef.

M. Jérôme Lambert a souligné qu’une réglementation autorisant sept cabotages dans un délai de sept jours, comme le propose le Parlement européen, conduirait à dégrader de façon importante la situation actuelle des professionnels français.

Le rapporteur a noté que ces derniers sont, certes, assez réticents face à cette proposition, mais ne manifestent pas de trop vives inquiétudes.

M. Jérôme Lambert a déploré le traitement inégal des infractions au code de la route commises par les transporteurs routiers. Les routiers français peuvent se voir retirer des points et donc, à terme, leur permis de conduire, tandis que les ressortissants étrangers, notamment ceux des autres Etats membres, ne risquent qu’une sanction financière, ce qui conduit certains de leurs employeurs à les inciter à ne pas respecter les limitations de vitesse, puisque les gains seront toujours supérieurs aux amendes encourues.

Le rapporteur a noté que la même inégalité pourrait être constatée s’agissant des véhicules de tourisme, même s’il est vrai qu’en ce qui concerne le transport routier, des emplois sont en jeu. Cette remarque déborde néanmoins le cadre du présent rapport et il convient d’ailleurs de préciser qu’une proposition de directive facilitant l’application transfrontalière de la législation dans le domaine de la sécurité routière est en cours d’examen.

Le Président Pierre Lequiller a considéré qu’une harmonisation serait souhaitable dans ce domaine.

M. Jérôme Lambert a conclu que, pour toutes les raisons précédemment évoquées, il voterait contre la proposition de conclusions. Un tel vote par l’ensemble de la Délégation serait d’ailleurs de nature à conforter le Gouvernement lors des négociations communautaires, car il pourrait se prévaloir de la ferme opposition du parlement national.

Mme Annick Girardin a déclaré souhaiter voter pour, estimant que les dispositions proposées au niveau du Conseil représentaient le minimum qu’il était possible de négocier.

Le rapporteur a considéré qu’un vote contre de la Délégation n’aiderait pas le Gouvernement à bien négocier.

Le Président Pierre Lequiller a constaté que, dans ce dossier, la France était relativement isolée.

A l’issue de ce débat, la Délégation a approuvé – M. Jérôme Lambert votant contre – les conclusions suivantes :

« La Délégation,

Vu l’article 88-4 de la Constitution,

Vu la proposition de règlement relative à l’accès à la profession de transporteur par route (marchandises et voyageurs) (COM [2007] 263 final/nE 3541),

Vu la proposition de règlement en matière d’accès au marché du transport de voyageurs (COM (2007) 264 final/no E 3542),

Vu la proposition de règlement en matière d’accès au marché du transport de marchandises (COM (2007) 265 final/no E 3543),

1. Approuve le principe des propositions de règlement présentées par la Commission au regard de l’objectif d’achèvement du marché intérieur ;

2. Se félicite que le Conseil des ministres des transports du 13 juin 2008 puisse parvenir à un accord politique sur la base de dispositions équilibrées, en particulier en ce qui concerne les modalités d’encadrement du cabotage ;

3. Demande aux autorités françaises d’obtenir du Conseil que, dans la suite des discussions, ce dernier puisse s’opposer à toute proposition de libéralisation du cabotage qui ne satisferait pas aux exigences d’une concurrence loyale et de sécurité ;

4. Souhaite que, dans un souci de bonne application des trois futurs règlements, les Etats membres prennent les mesures nécessaires en vue de renforcer leur coopération judiciaire pour ce qui est de la définition des infractions notamment et améliorent la qualité du contrôle effectué par les autorités administratives et judiciaires. »

IV. Examen des textes soumis à l’Assemblée nationale en application de l’article 88-4 de la Constitution

Sur le rapport du Président Pierre Lequiller, la Délégation a examiné des textes soumis à l'Assemblée nationale en application de l'article 88-4 de la Constitution.

Aucune observation n’ayant été formulée, la Délégation a approuvé les trois textes suivants :

Point B

Ø Commerce extérieur

- proposition de décision du conseil relative à la conclusion d'un accord sous forme d'échange de lettres entre la Communauté européenne et l'Ukraine concernant le maintien des engagements relatifs au commerce des services contenus dans l'accord de partenariat et de coopération (document E 3859) ;

- proposition de décision du conseil relative à la signature et à l'application provisoire de l'accord sous forme d'échange de lettres entre la Communauté européenne et l'Ukraine concernant le maintien des engagements relatifs au commerce des services contenus dans l'accord de partenariat et de coopération (document E 3860).

Ø Espace de liberté, de sécurité et de justice

- proposition de décision du conseil sur l’application à la Confédération suisse des dispositions de l’acquis de Schengen relatives au système d’information Schengen (SIS) (document E 3871).