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Commission chargée des affaires européennes

mercredi 4 février 2009

10 heures

Compte rendu n° 88

Présidence de M. Pierre Lequiller Président

I. Audition de M. Philippe de Ladoucette, président de la Commission de régulation de l’énergie, sur le marché intérieur de l’énergie (ouverte à la presse)

II. Examen de textes soumis à l'Assemblée nationale en application de l'article 88-4 de la Constitution

COMMISSION CHARGEE DES AFFAIRES EUROPEENNES

Mercredi 4 février 2009

Présidence de M. Pierre Lequiller, Président de la Commission

La séance est ouverte à dix heures

I. Audition de M. Philippe de Ladoucette, président de la Commission de régulation de l’énergie, sur le marché intérieur de l’énergie (ouverte à la presse)

Le Président Pierre Lequiller. Monsieur le président, vous êtes à la tête de la Commission de régulation de l’énergie, autorité administrative indépendante chargée de veiller au bon fonctionnement des marchés de l’électricité et du gaz naturel. Nous vous recevons au moment où les discussions communautaires sur le troisième paquet de libéralisation du marché de l’énergie sont sur le point de reprendre. Vous aviez déjà accepté d’être auditionné lorsque nous avions constitué avec la Commission des affaires économiques un groupe de travail sur ce sujet.

L’actualité du secteur énergétique est également marquée par la récente crise gazière, dont l’Europe doit tirer les leçons. Nous souhaiterions tout d’abord connaître votre position sur la délicate question de la séparation patrimoniale. Si en effet les grands groupes estiment que la crise entre l’Ukraine et la Russie a démontré la nécessité des entreprises intégrées, susceptibles de peser face à Gazprom, M. Claude Mandil a défendu devant nous la semaine dernière le point de vue inverse. Par ailleurs, nous aimerions entendre votre appréciation sur le niveau des infrastructures de transport, notamment dans le domaine de l’électricité, et sur les besoins en interconnexions. Au-delà des informations que vous nous donnerez concernant la France, sans doute pourrez-vous, en tant que membre du Groupe des régulateurs européens, élargir votre analyse à la dimension communautaire.

M. Philippe de Ladoucette. Je suis heureux de venir devant votre commission à un moment où l’énergie se trouve au cœur de l’actualité, tant du fait de la crise du gaz russe et des tensions sur le réseau électrique provoquées par la récente tempête que des discussions européennes sur le troisième paquet relatif au marché intérieur et de l’adoption du paquet « énergie-climat » à la fin de l’année dernière.

L’énergie était, à l’origine, au centre de la construction européenne – qui a commencé avec le traité instituant la Communauté européenne du charbon et de l’acier, signé le 18 avril 1951 et entré en vigueur le 23 juillet 1952. Mais par la suite et pendant de longues années, elle fut absente du débat européen. Il fallut attendre l’Acte unique européen de 1986 pour que la Commission européenne décide d’appliquer les principes du libre-échange à l’énergie. Cependant en 1992, le « deuxième paquet Cardoso », qui comportait déjà l’ensemble des orientations encore en débat aujourd’hui – libre circulation de l’énergie, libre implantation des producteurs, choix par le consommateur de son fournisseur – ne fut pas accepté par les Etats membres. Les premières directives jetant les bases de l’ouverture du marché intérieur ont été adoptées respectivement en 1996 pour l’électricité et en 1998 pour le gaz. Elles ont été transposées dans le droit français par la loi de 2000, qui a créé la Commission de régulation de l’énergie.

La CRE est constituée d’un collège de neuf commissaires, aux expériences professionnelles diverses. Depuis la loi de décembre 2006, certains sont à temps complet et d’autres à temps partiel ; de plus, siègent désormais un représentant des consommateurs domestiques et un représentant des grands consommateurs.

Les services de la CRE réunissent environ 125 personnes, réparties entre une direction financière, une direction du gaz, une direction de l’accès au réseau électrique, une direction internationale et une direction des marchés de l’électricité et du gaz. Mais tandis que notre direction internationale compte cinq personnes, son homologue anglaise en compte quarante. L’attention des pouvoirs publics doit être appelée sur la nécessité pour les autorités de régulation de disposer des moyens dont elles ont besoin, surtout lorsqu’il est question de leur donner des responsabilités supplémentaires, comme c’est le cas pour l’énergie dans le cadre du troisième paquet.

La CRE appartient au Conseil européen des régulateurs de l’énergie (CEER), association qui regroupe les régulateurs des vingt-sept Etats membres et qui se réunit tous les mois. Elle fait également partie du Groupe des régulateurs européens pour l’électricité et le gaz (ERGEG), qui joue un rôle de conseil auprès de la Commission européenne et qui se réunit tous les trimestres. Elle participe à la plupart des groupes de travail mis en place par le CEER et l’ERGEG et en préside plusieurs, en particulier celui qui traite des sujets concernant les consommateurs et celui qui s’occupe de la stratégie internationale.

J’en viens au troisième paquet énergie. Il porte non seulement sur la séparation patrimoniale, mais aussi sur l’évolution des pouvoirs des autorités de régulation nationales et sur la création, au niveau européen, d’une Agence de coopération des régulateurs de l’énergie.

En ce qui concerne la séparation patrimoniale, le Conseil est arrivé à un consensus en faveur d’une solution alternative, défendue par un groupe de pays mené par la France et l’Allemagne, consistant à donner la possibilité de conserver les entreprises intégrées verticalement tout en renforçant l’indépendance des gestionnaires de réseaux. Les discussions se poursuivent avec la Commission et le Parlement, celui-ci ayant, en première lecture, voté pour le gaz des dispositions assez proches de ce schéma, mais n’ayant pas, en revanche, retenu cette option, dite « ITO », pour l’électricité. Nous espérons que les points de vue pourront se rapprocher, mais la question n’est pas encore réglée.

On parle moins du deuxième sujet en débat, qui concerne les compétences des régulateurs nationaux. Les divergences essentielles entre le Parlement européen et le Conseil portent sur l’autonomie financière des régulateurs, sur l’approbation des programmes d’investissement – et à cet égard nous avons été un peu surpris (mais il s’agit certainement d’une erreur !) de voir l’administration française s’opposer à l’amendement donnant aux régulateurs des pouvoirs que la loi française nous reconnaît déjà –, ainsi que sur la possibilité de prendre des mesures pour promouvoir la concurrence sur le marché intérieur.

Quant à la création d’une Agence de coopération des régulateurs de l’énergie, elle fait l’objet d’un relatif consensus entre les Etats. Le souhait du Parlement européen de donner à cette instance de véritables pouvoirs se heurte à la jurisprudence fixée par l’arrêt Meroni, rendu le 13 juin 1958 par la Cour de justice des Communautés, qui empêche la Commission européenne de déléguer des pouvoirs de décision. Quoi qu’il en soit, alors que dans le secteur des télécoms les régulateurs nationaux n’étaient pas très favorables à la mise en place d’une agence européenne, dans celui de l’énergie ils le sont, en raison de la problématique des interconnexions. L’existence d’une vision générale permet en effet de faire prévaloir l’intérêt commun.

On peut penser que l’agence sera opérationnelle dans le courant de l’année 2010. La France pourrait, me semble-t-il, proposer de l’implanter à Paris, puisqu’elle est plutôt en pointe en matière de régulation des réseaux énergétiques.

Quelques mots sur l’impact du paquet énergie-climat, brillamment défendu par la présidence française, sur le fonctionnement et la régulation du marché intérieur.

Nous serons très attentifs à la manière dont sera transposé le principe de l’accès prioritaire des énergies renouvelables aux réseaux, défini à l’article 16 de la directive relative aux énergies renouvelables. La première difficulté est sa conciliation avec le principe d’accès non discriminatoire qui régit actuellement le marché intérieur. Cette priorité pose également problème pour le dispatching d’électricité. En effet, l’intégration d’une production conséquente d’électricité produite à partir d’énergies renouvelables, en raison de leur caractère intermittent, difficilement prédictible et décentralisé, n’est pas sans conséquence sur le fonctionnement des réseaux. Enfin, cette priorité risque de remettre en cause les installations de production d’électricité utilisant des sources d’énergie conventionnelles, qu’elles soient déjà raccordées ou à l’état de projet. La priorité d’injection des énergies renouvelables entraînerait, pour les producteurs conventionnels, de fortes incertitudes sur les volumes susceptibles d’être vendus par eux. Il s’agit donc là d’un sujet important pour l’équilibre du réseau, en termes de fonctionnement comme de sécurité d’approvisionnement.

J’en arrive à la constitution du marché intérieur, dont la crise du gaz russe a bien montré la nécessité. Elle progresse pas à pas, par le biais des initiatives régionales.

Pour l’électricité, celles-ci sont au nombre de sept, et la France participe à quatre d’entre elles. Elles visent à passer de vingt-sept marchés théoriquement libéralisés, mais en fait juxtaposés, à un véritable marché intérieur. Les avancées ne pouvant être que graduelles, le couplage se fait région par région. Nous avons déjà couplé en 2006 le marché français avec les marchés belge et néerlandais, ce qui nous a permis d’avoir un prix commun sur le marché de gros pendant 70 % du temps en 2008 – et même pendant 95 % du temps si l’on considère seulement deux marchés – France et Belgique ou Belgique et Pays-Bas. Un accord signé en juin 2007 vise à étendre ce mécanisme de couplage à la totalité de la région Centre-Ouest, c’est-à-dire la France, l’Allemagne et le Benelux ; l’échéance, initialement fixée à janvier 2009, a été repoussée à mars 2010. L’Allemagne essaie par ailleurs de réaliser un couplage avec le Danemark. Une plateforme continentale de l’électricité se constitue donc progressivement.

Nous commençons à nous rapprocher des Espagnols et des Portugais, entre lesquels le couplage fonctionne déjà très bien mais dont le système a l’inconvénient majeur de poser des problèmes de compatibilité avec celui que nous construisons. Il faut donc parvenir à dépasser ces particularismes, ce qui techniquement n’est pas simple. La Commission européenne, consciente de la complexité du sujet, organise une réunion tous les six mois avec l’ensemble des acteurs pour faire le point.

Le Président Pierre Lequiller. Pouvez-vous préciser la nature de cette incompatibilité ?

M. Philippe de Ladoucette. Le modèle de marché ibérique est très différent du nôtre. Il est d’ailleurs important de veiller aux spécificités de chaque marché afin, par exemple, de ne pas reproduire les erreurs qui ont conduit l’Allemagne et le Danemark à l’échec lorsqu’ils ont tenté de coupler leurs marchés il y a quelques mois.

En ce qui concerne le gaz, la crise récente a montré qu’il était difficile de faire jouer la solidarité au sein de l’Europe. En particulier, on ne peut pas toujours utiliser les tuyaux dans les deux sens. Ayant lu le compte rendu de l’audition de M. Mandil, je me suis renseigné sur le sujet : en ce qui concerne la France, la réversibilité, à condition de faire les investissements nécessaires, est possible avec les pays du Sud, notamment l’Espagne, ainsi qu’avec la Suisse ; mais elle ne l’est pas avec les pays du Nord, notamment la Belgique et l’Allemagne, pour des raisons réglementaires. En effet le gaz est odorisé en France et en Espagne, alors qu’il ne l’est pas en Allemagne et en Belgique. Entre le Royaume-Uni, les Pays-Bas et l’Allemagne, en revanche, la circulation peut se faire dans les deux sens, les investissements nécessaires ayant été réalisés. De ce fait, nous n’avons pas été directement concernés par le mécanisme de solidarité qui a été mis en œuvre, pendant la crise du gaz russe, entre les pays du Nord et de l’Est de l’Europe.

Il faut donc impérativement faire un gros effort d’investissement pour développer les interconnexions. Comme l’a dit M. Andris Piebalgs, commissaire européen chargé de l’énergie, il est essentiel de tisser progressivement une toile de réseaux, dans toutes les directions – du nord vers le sud et du sud vers le nord, de l’est vers l’ouest et de l’ouest vers l’est. Le Livre vert de la Commission européenne intitulé Vers un réseau énergétique européen sûr, durable et compétitif, publié en novembre dernier, donne une idée des investissements requis : environ 1000 milliards d’euros pour l’électricité et 150 milliards d’euros pour le gaz. Il expose une stratégie de développement des liaisons régionales et transfrontalières autour de six grandes initiatives : interconnexion balte, réseau éolien en mer du Nord, anneau énergétique méditerranéen, corridor Sud d’acheminement du gaz de Caspienne, intégration des systèmes électriques et gaziers d’Europe centrale et du sud-est, stratégie pour le GNL. Considérant, comme l’ensemble des régulateurs européens, que le GNL est un élément essentiel de diversification et de sécurité d’approvisionnement en gaz, nous avons mis en place l’année dernière un groupe de travail pour examiner la problématique des terminaux méthaniers sur le plan de la tarification et de l’éventuelle dérogation à la règle de l’accès des tiers aux réseaux au titre de l’article 22 de la directive gaz de 2003.

Le couplage des marchés n’a pas pour seul but d’harmoniser le prix de l’énergie en Europe. C’est aussi une manière d’optimiser les moyens de production. En matière de consommation électrique, par exemple, quand l’heure de pointe est à 19 heures en France, elle est à 21 heures en Espagne et à 17 heures en Angleterre. Du fait de ce décalage, une bonne interconnexion permettrait de bénéficier partout d’une énergie moins chère et moins polluante. On ne le dit pas assez : le développement des interconnexions est un facteur d’efficacité.

S’agissant de l’exercice de la solidarité, la récente tempête a montré tout l’intérêt de nos interconnexions avec l’Espagne : la région de Perpignan, par exemple, ne pouvant plus être alimentée par le réseau français, l’a été par le réseau espagnol.

Sans entrer dans plus de détails afin de répondre à vos questions, je conclurai mon propos en exprimant une conviction. A la question de savoir si, dans le contexte économique et financier actuel, il faut ou non continuer à construire l’Europe de l’énergie, les régulateurs que nous sommes répondent sans hésiter que ce projet, fondamental pour la construction européenne et pour la sécurité de notre approvisionnement énergétique, doit impérativement se poursuivre.

M. André Schneider. Monsieur le président, j’aurais trois questions à vous poser.

La Commission européenne a annoncé qu’elle engagerait des procédures à l’encontre d’EDF et GDF-Suez pour manquement aux règles de la concurrence. Selon vous, les griefs formulés, en particulier l’abus de position dominante qui résulterait des contrats d’EDF avec les grands clients industriels, sont-ils justifiés ?

La semaine dernière, M. Mandil disait ici même que le régulateur allemand « connaît assez mal son métier ». Le même jour, M. Philippe Tourtelier et moi-même auditionnions M. Jean-Marie Chevalier, universitaire spécialiste des questions énergétiques, qui jugeait « dramatique » la situation énergétique allemande. Quel est votre sentiment sur le marché de notre voisin ? La vente par E-ON et RWE d’une partie de leurs réseaux de transport, sous la pression de la Commission européenne, va-t-elle selon vous le faire évoluer ?

Enfin, pensez-vous nécessaire de mettre en place un régulateur européen ?

M. Philippe de Ladoucette. EDF a reçu, le 23 décembre 2008, de la Direction générale de la concurrence de la Commission européenne une communication de griefs relative aux contrats à long terme de fourniture d’électricité conclus en France avec des grands consommateurs industriels. Selon elle, ces contrats pourraient empêcher les clients de s’adresser à d’autres fournisseurs et relever de l’abus de position dominante. Cette communication de griefs est la première étape d’une procédure contradictoire, mais contrairement à ce qui se passe en général, nous n’avons pas été directement interrogés par la Direction européenne de la concurrence.

L’Allemagne a libéralisé les marchés de l’électricité et du gaz avant la France. Les Allemands avaient alors considéré qu’il s’agissait d’activités comme les autres et que l’autorité de concurrence allemande serait en mesure d’assurer la régulation nécessaire. Constatant au bout de quelques années que ce n’était pas le cas, ils ont créé un régulateur sectoriel ; mais celui-ci, contrairement à ses homologues, n’a que trois ans d’expérience, puisqu’il a été créé en 2005. En outre, la situation à laquelle il est confronté est beaucoup plus complexe que la nôtre : il existe en Allemagne quatre réseaux de transport, correspondant aux quatre grandes entreprises qui se partagent le marché – E-ON, RWE, Vattenfall et EnBW –, et ils n’ont pas du tout le niveau d’indépendance dont RTE bénéficie en France, ce dont on a d’ailleurs vu les conséquences lors de la grande panne de novembre 2006 ; concernant la distribution, alors que chez nous il y a un réseau de distribution électrique et un nombre relativement limité d’entreprises locales de distribution (ELD), en Allemagne il y en a 900 à gérer. C’est d’ailleurs largement en raison de la situation allemande, et non de la situation française, que la Commission européenne a voulu faire le troisième paquet.

Enfin, je suis très favorable à la création d’une entité de régulation européenne, qui ait de réels pouvoirs. Mais l’Agence s’occupera principalement des interconnexions et sera avant tout une instance de coopération entre les régulateurs, bien loin d’être un régulateur européen.

M. Philippe Tourtelier. Ma première question concerne l’adaptation des réseaux français et européens à l’accueil de la production décentralisée, mais je reviens d’abord sur ce que vous avez dit à propos de l’accès prioritaire des énergies renouvelables aux réseaux : qu’il y ait une remise en cause de la production d’énergie conventionnelle, c’est une évidence, puisque c’est le but !

En France, RTE a déclaré vouloir adapter le réseau français, très centralisé, à la collecte d’énergies renouvelables. Je pensais que les choses seraient plus faciles au niveau européen, d’autant que la critique faite à l’énergie éolienne d’être intermittente ne vaut pas si l’on raisonne à l’échelle de l’Europe, où il est rare que le vent ne souffle pas quelque part : si les interconnexions étaient réalisées, l’éolien deviendrait un élément de sécurité. Je suis un peu inquiet de constater qu’en ce qui concerne l’Allemagne, vous avez parlé des réseaux de transport et de distribution, mais pas du tout de la collecte.

Ma deuxième interrogation porte sur le marché. Vous avez parlé de petits pas, mais avez-vous une idée du calendrier ? A quelle échéance peut-on penser que les interconnexions et l’organisation seront suffisantes pour qu’il y ait un vrai marché ? N’a-t-on pas mis la charrue avant les bœufs, en libéralisant la concurrence sans en avoir réuni les conditions ?

Cela m’amène à ma troisième question, l’une de vos missions étant de concilier concurrence et service public : quelles répercussions ce développement à petits pas du marché européen aura-t-il sur les tarifs que paieront les entreprises et les ménages ?

Enfin, considérez-vous, comme plusieurs personnes que nous avons auditionnées, que les prix de l’énergie vont évoluer à la hausse ? Dans ce cas, peut-on imaginer en France un système comportant un tarif de base, réglementé, pour le niveau de fourniture considéré comme de service public – tant de kWh pour un ménage de tant de personnes –, et appliquant au reste de la consommation le prix du marché, éventuellement majoré pour compenser le tarif de base ?

M. Philippe de Ladoucette. En ce qui concerne l’accès prioritaire des énergies renouvelables aux réseaux, je voulais simplement souligner qu’il peut entrer en contradiction avec le principe légal de non-discriminationla priorité d’accès étant une discrimination. C’est tout le problème de la combinaison entre le paquet énergie-climat et la construction du marché intérieur. Il faut savoir si l’on est dans le « peut » ou dans le « doit », dans le « may » ou dans le « shall » : ce principe d’accès prioritaire relève-t-il de la simple recommandation, ou de l’obligation ? Dans ce dernier cas, certains projets d’investissement qui existent en France, notamment en centrales à gaz, risqueraient de ne pas être réalisés. En la matière, il faut avoir à l’esprit un principe de précaution, d’autant que la production des éoliennes peut souffrir de l’absence de vent.

S’agissant du calendrier, en ce qui concerne la France, le couplage avec l’Allemagne et le Benelux pourrait être réalisé en mars 2010. L’étape suivante sera le couplage avec la péninsule ibérique.

Le système fonctionnera sur les prix de gros, qui ont un lien avec les prix de détail dans certains pays, mais non en France, où les tarifs réglementés en sont totalement déconnectés. Le Parlement nous a donné en 2006 la responsabilité de surveiller la formation de ces prix de gros, et notre premier rapport sur le sujet vient de sortir. Il montre que le « marginal nucléaire », c’est-à-dire la période pendant laquelle c’est le coût marginal du nucléaire qui détermine le prix de gros, représente 15 % du temps annuel – même si le nucléaire représente 80 % de la production française d’électricité. Le « marginal » est de 25 % pour l’hydraulique et entre 25 et 30 % pour le charbon – brûlé en France ; il se situe entre 20 et 25 % pour l’électricité venant des autres pays par les interconnexions. En conclusion de notre rapport, nous constatons n’avoir rien découvert d’anormal dans la formation des prix, mais nous demandons des explications supplémentaires à EDF sur la valorisation du nucléaire et de l’hydraulique. En effet lorsque le nucléaire est marginal, il est valorisé à un coût supérieur au coût de production, et c’est encore plus vrai pour l’hydraulique. Nous allons lancer un audit sur ce sujet.

En ce qui concerne les tarifs, la commission présidée par M. Champsaur, qui comprend deux députés, deux sénateurs et des experts, doit remettre ses conclusions à la fin du mois de mars. Pour notre part, nous avons expertisé deux grands modèles mis en avant par les acteurs du marché, à savoir maintien des tarifs réglementés, avec ouverture du marché et cession d’une part de l’énergie nucléaire aux nouveaux entrants, ou suppression de ces tarifs, moyennant compensation pour que les consommateurs continuent à bénéficier de l’avantage compétitif du nucléaire. Reste à savoir quel est le modèle le plus « eurocompatible ». Le sujet n’est pas simple, et l’on aurait sans doute pu se poser en 1995 les questions que nous nous posons aujourd’hui.

Le Président Pierre Lequiller. Merci beaucoup.

II. Examen de textes soumis à l'Assemblée nationale en application de l'article 88-4 de la Constitution

Sur le rapport du Président Pierre Lequiller, la Commission a examiné des textes soumis à l'Assemblée nationale en application de l'article 88-4 de la Constitution.

Point B

Aucune observation n’ayant été formulée, la Commission a adopté les textes suivants :

Ø PESC et relations extérieures

- action commune du Conseil prorogeant le mandat du représentant spécial de l'Union européenne pour le processus de paix au Moyen-Orient (document E 4245) ;

- action commune 2009/PESC du Conseil du … 2009 prorogeant le mandat du représentant spécial de l'Union européenne dans l’Ancienne République yougoslave de Macédoine (RSUE ARYM) (document E 4257 ).

( Questions budgétaires

- avant-projet de budget rectificatif no 1 au budget général 2009 - Etat des dépenses par section - Section III – Commission (document E 4243-1) ;

- proposition de décision du Parlement européen et du Conseil relative à la mobilisation du Fonds de solidarité de l'Union européenne (E 4244).

Ø Transports

- projet de règlement (CE) no …/.. de la Commission du […] complétant les normes de base communes en matière de sûreté de l'aviation civile figurant à l'annexe du règlement (CE) no 300/2008 (document E 4236) ;

- projet de directive .../…/CE de la Commission du modifiant la directive 2006/87/CE du Parlement européen et du Conseil établissant les prescriptions techniques des bateaux de la navigation intérieure (document E 4238).

Procédure d’examen en urgence

Enfin, la Commission a pris acte de l’approbation, selon la procédure d’examen en urgence, des textes suivants :

- position commune du Conseil renouvelant les mesures restrictives à l'encontre du Zimbabwe (document E 4224) ;

- projet de position commune du Conseil modifiant la position commune 2008/369/PESC concernant l'adoption de mesures restrictives à l'encontre de la République démocratique du Congo (document E 4225) ;

-  projet de position commune du Conseil portant mise à jour de la position commune 2001/931/PESC relative à l'application de mesures spécifiques en vue de lutter contre le terrorisme et abrogeant la position commune 2008/586/PESC (document E 4226) ;

-  projet de décision du Conseil mettant en oeuvre l'article 2, paragraphe 3, du règlement (CE) no 2580/2001 concernant l'adoption de mesures restrictives spécifiques à l'encontre de certaines personnes et entités dans le cadre de la lutte contre le terrorisme, et abrogeant la décision 2008/583/CE (document E 4227) ;

-  action commune du Conseil prorogeant le mandat du représentant spécial de l'Union européenne pour le Soudan (document E 4228).

La séance est levée à onze heures quinze