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Commission des affaires européennes

mercredi 16 novembre 2011

10 h 30

Compte rendu n° 226

Présidence de M. Pierre Lequiller Président de la Commission des affaires européennes et de M. Serge Grouard Président de la Commission du développement durable et de l’aménagement du territoire

Audition, conjointe avec la Commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, de M. Siim Kallas, vice-président de la Commission européenne, en charge des transports (ouverte à la presse)

COMMISSION DES AFFAIRES EUROPEENNES

Mercredi 16 novembre 2011

Co-présidence de M. Pierre Lequiller,
Président de la Commission des affaires européennes
et de M. Serge Grouard,
Président de la Commission du développement durable et de l’aménagement du territoire

La séance est ouverte à 10 h 30

Audition, conjointe avec la Commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, de M. Siim Kallas, vice-président de la Commission européenne, en charge des transports (ouverte à la presse)

Le Président Pierre Lequiller. Notre Commission, conjointement avec la Commission du développement durable, compétente en matière de transports, a le plaisir d'accueillir pour la deuxième fois en trois ans le commissaire européen aux transports, vice-président de la Commission européenne. Avant d'être commissaire européen vous avez exercé de très hautes fonctions en Estonie, comme Premier ministre, ministre des finances et banquier central, fonctions qui vous sont probablement très utiles au sein du collège des commissaires, avec la période de crise que nous traversons.

Dans la présentation de votre action, vous indiquez que vous vous efforcerez de promouvoir la liberté de circulation, garantie fondamentale des européens et que cette dernière ne saurait s'exercer en l'absence d'infrastructures adéquates. Nous partageons bien entendu votre analyse ; la difficulté viendra du financement.

J’ai également été très sensible à l’attention que vous portez aux passagers et aux usagers et j’ai noté votre promptitude à réagir lors des épisodes neigeux qui ont bloqué les aéroports l’hiver dernier. Cela me semble très important car l’action de l’Union européenne est très visible dans le domaine des transports et il est fondamental que nous ayons un commissaire attentif au sort de nos concitoyens et qui puisse communiquer directement sur ces sujets qui touchent à la vie des gens.

Vous allez devoir relever un défi passionnant mais difficile, évoqué dans le Livre blanc sur les transports sur lequel travaille notre Commission celui de la conjugaison du développement d’une activité économique polluante et dévoreuse d’espaces avec les impératifs environnementaux, tout en veillant à ne pas détériorer la compétitivité de l’Union européenne ; résoudre la quadrature du cercle n’est pas aisé.

Notre commission travaille très régulièrement sur les questions de transport et nos trois rapporteurs concernés par ces sujets sont très actifs : Mme Odile Saugues sur les questions aériennes, M. Gérard Voisin sur les transports terrestres et M. Didier Quentin sur les problèmes maritimes.

M. Siim Kallas, vice-président de la Commission européenne, commissaire en charge des transports. C’est un plaisir de venir devant vous à l’invitation des présidents Lequiller et Grouard. Je vous remercie de me donner l’opportunité de débattre des priorités de la commission européenne.

En adoptant la feuille de route « pour un espace unique des transports » la commission a présenté sa vision pour l'avenir des transports.

Les transports constituent un des rares secteurs compétitifs pour lequel l'Europe est leader au niveau mondial. Ils représentent 4,5 % du produit intérieur de l'Union et emploient dix millions de personnes. Ils sont déterminants pour le bon fonctionnement du marché unique. Laissez-moi expliquer comment je vois l’avenir des transports en Europe pour les décennies à venir. Comme vous le savez, cette vision est développée dans le Livre blanc sur les transports dénommé « Roadmap towards a single European transport area ». C’est une vision à laquelle j’espère que chacun pourra souscrire et j’ai l’espoir que nous pourrons travailler ensemble pour atteindre ces objectifs.

En Europe, nous disposons d’un réseau de transport efficace et compétitif sur lequel peut s’appuyer le marché unique. Les transports représentent le cœur d’une chaîne nécessaire à l’emploi et à la croissance. Les transports sont aussi une des industries européennes les plus compétitives au niveau international dans la mesure où nous disposons d’un leader dans chaque secteur important.

Beaucoup d’entreprises européennes sont des leaders mondiaux en matière d’infrastructure, de logistique et de fabrication d’équipements de transport et de systèmes de gestion. Nous souhaitons très clairement persévérer dans cette voie et je me félicite que la France soit en tête des pays les plus performants, par exemple l’entreprise Alstom pour les trains à grande vitesse. Il y a quelques mois, j’étais au salon du Bourget où Airbus enregistrait pour plusieurs milliards de commandes.

Dans les services de transport, la liste des succès est importante : Air France, SNCF, Veolia Environnement. Et n’oublions pas le rôle pionnier des collectivités locales françaises dans le développement des systèmes modernes de tramway qui en font aujourd'hui un des systèmes de transport les plus performants.

Mais nous affrontons de nouveaux défis qui pourraient menacer notre position et nous ne pouvons pas nous contenter de regarder derrière nous car nous sommes confrontés à des rivaux à bas coûts qui innovent et investissent.

Nous savons que la demande de mobilité continuera à croître dans le futur. Parallèlement, une partie significative de l’infrastructure doit être rénovée et, dans beaucoup de secteurs, nous atteignons les limites physiques de capacité.

Actuellement, il existe encore beaucoup de barrières qui entravent la compétitivité des transports au sein de l'Union européenne. Beaucoup d’obstacles demeurent en matière de formalités administratives, de normes incompatibles, en matière de chemin de fer et de procédures.

C’est pourquoi l’initiative française des « Assises du ferroviaire » s’est révélée particulièrement utile en ouvrant un débat sur la nécessité de la réforme du système ferroviaire national. Les services de la Commission ont participé à ces discussions qui ont reconnu l’existence d’un marché de l’Europe ferroviaire qui doit être pilotée par des règles communes.

Notre stratégie de long terme doit répondre à des défis majeurs.

Le premier est celui de réduire notre dépendance historique aux hydrocarbures, dont l’approvisionnement sera de plus en plus difficile dans les années à venir. Le secteur des transports est presque totalement dépendant de l’importation de cette énergie qui provient de pays parmi les plus instables du monde et dont les marchés figurent parmi les plus volatiles. C’est pourquoi nous devons regarder les alternatives aux énergies fossiles et investir dans la recherche et le développement vers de nouvelles sources d’énergie.

Le deuxième est l’accroissement de la congestion de nos villes et de leurs transports en commun et la nécessité de réduire considérablement à moyen terme les émissions de CO2 des transports.

Nous devons relever ces défis et nous avons besoin dès maintenant de préparer le futur ; le statu quo ne constitue pas une option, spécialement en Europe qui doit être compétitive dans le marché mondial.

L’innovation technologique est cruciale pour relever ces défis. La recherche est au centre de la croissance économique, mais elle ne fera pas tout et nous avons besoin de changer nos habitudes, par exemple en ayant recours à des transports combinés entre la route et le rail ainsi qu’au covoiturage. Pour cela, nous devons penser les transports comme un système plutôt qu’un mode individuel de déplacement.

Le rail et le transport fluvial joueront un plus grand rôle, en particulier dans les longues distances. Les voitures et les trains à grande vitesse correspondront aux transports du plus grand nombre des passagers, mais il faudra développer des transports alternatifs plus attractifs. Le protectionnisme ne constitue pas une façon d’envisager l’avenir. Il faut élaborer des normes minimales permettant un accès équitable aux différents marchés, par exemple, en matière d’homologation des matériels roulants ferroviaires, où nous devons unifier les différents systèmes ferroviaires.

Je reconnais que cela représente une question importante pour la France. La mise en œuvre du premier paquet ferroviaire a rencontré quelques problèmes pour lesquels nous essaierons d’apporter des solutions, car nous avons besoin que le rail soit une alternative attractive aux autres modes de transport. L’aviation doit également, à travers le ciel unique européen, être intégrée dans cette politique, qui a permis de réduire la distance parcourue et, par conséquent, les émissions de CO2 du secteur. Nous devons veiller également à une meilleure exploitation des liens entre les ports, le rail et la voie fluviale.

Dans le futur, le système de transport européen jouera un rôle majeur et devra être plus sécurisé afin que les infrastructures soient moins congestionnées qu’elles ne le sont aujourd'hui.

Une des principales priorités du Livre blanc est de compléter le réseau transeuropéen de transports, qui est essentiel pour la création d’emplois et la croissance économique. Cela implique de trouver des ressources financières importantes pour lesquelles nous devrons développer des instruments financiers innovants, qui pourraient constituer des perspectives attractives pour des capitaux privés. Un de ces instruments pourrait être les « project bonds » qui sont envisagés par la Commission européenne pour la programmation budgétaire 2014-2020. Cet instrument flexible accélèrerait le développement de l’infrastructure de transports et d’énergies. Nous pouvons également envisager des structures financières telles que les partenariats publics, où la France s’est déjà d’ailleurs engagée.

Le Livre blanc montre que nous pouvons transformer notre système de transport pour atteindre l’objectif de réduction de CO2 de 60 % à l’horizon de 2050, entre autres,

Pour l'Europe, la France prend une place clé dans le domaine des transports, géographiquement, techniquement et politiquement. L’Europe a une vision audacieuse du transport. C’est en unissant nos efforts que nous veillerons au mieux à la poursuite de nos objectifs communs, notamment en terme de modernisation du système de transport de demain, et que nous assurerons les besoins de nos citoyens et des compagnies européennes.

Je vous remercie de votre attention.

M. Serge Grouard. Je vous remercie de votre venue à l’Assemblée nationale. Notre commission du développement durable et de l'aménagement du territoire est compétente sur les questions de transport et il s'agit bien là d'un débat essentiel. Pour la France, des évolutions très importantes sont à l'oeuvre aujourd'hui et se sont fait jour, notamment au travers des deux textes du Grenelle de l'environnement. L'évolution du réseau ferré avec les lignes grande vitesse a déjà été évoquée. Vous avez aussi parlé de l'aménagement des transports urbains et des modes alternatifs de déplacement.

Je souhaite concentrer mon propos sur trois points principaux. Premièrement, il convient d’aborder l'ouverture à la concurrence souhaitée par la Commission européenne. Dans cette perspective, l'Union européenne, si elle veut réunir nos concitoyens, doit expliciter les perspectives et les avantages attendus ainsi que répondre aux inquiétudes bien réelles sur le service public et ses missions ainsi que sur la manière de les prolonger dans le futur. Je souhaite en deuxième lieu vous interroger sur cette ambition forte, que vous avez rappelée. A-t-on concrètement les moyens d’atteindre ces objectifs ? Comment agir en termes de gouvernance et de moyens lorsque l'on connaît la situation financière actuelle et que l’enjeu du schéma national des infrastructures de transport en France représente un investissement de 300 milliards d'euros ? En troisième et dernier lieu, les perspectives de réduction de l'effet de serre et l'enjeu climatique ne doivent pas être oubliés à cause de la crise. Disposez-vous d'un déroulé ou d'un plan pour atteindre les objectifs proposés pour 2020 ? Il s'agit là d'un enjeu essentiel, comme nous le verrons à la conférence de Durban.

M. Hervé Gaymard. M. le Commissaire, merci pour votre présentation aujourd'hui. Je souhaite également vous remercier pour les bonnes nouvelles concernant la liaison Lyon-Turin inscrite dans le réseau central européen au cœur du réseau méditerranéen et qui pourrait bénéficier d'un taux de 40 % s'agissant d’un projet transfrontalier. Est-ce que le lancement des travaux du tunnel de base du Lyon-Turin pourra faire l'objet du projet pilote proposé par la Commission européenne sur la séquence 2012-2013. Les accès français, hors le tunnel de base international, pourront-ils faire partie du réseau central européen ?

M. Daniel Goldberg. S'agissant de la sûreté aérienne, depuis le 11 septembre 2001, l’Europe a mis en oeuvre une pratique la plus commune possible. Quelle est votre appréciation sur les contrôles de sûreté dans les transports aériens ? Existe-t-il encore des failles, selon vous ? Quelles améliorations apporter, notamment sur les vols entrants et pour le transport de marchandises ?

Deux textes sont en préparation ou en cours de négociation au niveau européen : l'un sur la directive relative à l'utilisation des données PNR à des fins de lutte contre le terrorisme et la criminalité grave, l'autre sur la libéralisation du fret des marchandises.

M. Gérard Voisin. Votre présence ici est une chance pour les parlementaires français. La stratégie européenne en matière de transports constitue un projet très porteur et vital pour l'Union européenne. Le créneau de la préservation de l'environnement est celui sur lequel l'Union peut se différencier de ses principaux concurrents asiatiques, car ces questions leur paraissent encore trop périphériques, alors même qu'elles sont essentielles. Chargé au sein de cette commission des questions relatives aux transports routier et ferroviaire, je souhaite vous poser quelques questions. La directive sur la perception des amendes transfrontalières ne permet pas le recouvrement des amendes mais uniquement l'information sur l'identité de l'auteur de l'infraction. Serait-il possible, devant le blocage de certains pays, de recourir à une coopération renforcée dans ce domaine afin d'éviter la prolifération des accords bilatéraux ? Les nouveaux taxigraphes permettront de mieux contrôler le temps de travail des routiers. Le temps de conduite des chauffeurs demeure excessif, notamment au regard des impératifs de sécurité routière. La Commission européenne ne pourrait-elle pas imposer une réduction du temps de conduite des chauffeurs et en particulier la présence, dans les poids lourds qui circulent la nuit, d'un second chauffeur, comme cela est le cas pour les car ? En matière d'euro-vignette, d'écotaxe, quelle est la situation à vos yeux ? Enfin, qu'en est-il de la normalisation des prises de recharge électrique des véhicules ? S'agissant des transports ferroviaires, où en sont les contentieux entre la Commission européenne et les Etats membres sur la transposition des paquets ferroviaires ouvrant ce secteur à la concurrence ? Quel est votre regard sur les différences de gouvernance entre la Deutsche Bahn et la SNCF ? Je vous adresse également des questions sur le transport maritime, de la part de mon collègue Didier Quentin, qui n'a pas pu être présent aujourd'hui : est-il possible d'établir un premier bilan des autoroutes de la mer ? L'Europe envisage-t-elle de se doter d'une industrie performante du démantèlement des navires ? Est-il envisagé de subordonner l'octroi de subventions aux lignes maritimes d'utilité publique à l'utilisation de navires construits dans les pays respectant les réglementations antidumping ?

Mme Odile Saugues. Je vous remercie d'être venu expliquer les positions de la Commission européenne. Comment faire respecter la concurrence loyale avec le problème des compagnies low-cost, dont certaines reçoivent beaucoup d'aides des collectivités territoriales, ce qui génère des litiges continuels ? Sur la mise en place des blocs de l’espace aérien fonctionnel, tout doit être finalisé pour le 4 décembre 2012. Que pensez-vous faire, s’agissant du FABEC auquel nous appartenons avec six autres Etats européens, pour mieux structurer le cadre qui doit permettre la création d’une entité chargée des fonctions mises en commun au sein du FABEC ? Ce problème achoppe notamment auprès des syndicats français. Sur les problèmes que le transport aérien a connus avec les intempéries fin 2010, début 2011, dans mon rapport sur les difficultés du transport aérien, j’avais auditionné un de vos collaborateurs et je vous citais : vous souhaitiez établir un service minimum et faire respecter des critères de qualité dans l’intérêt des passagers. Où en sont ces propositions législatives ?

M. Alain Bocquet. Je vous remercie de votre intervention. Nous avons, au sein de l'Assemblée nationale, mis en place une commission d'enquête sur l’industrie ferroviaire que j’ai présidée, son rapporteur étant M. Yanick Paternotte. L'objectif ambitieux du Livre blanc sur les transports de diviser par deux les émissions de CO2 d'ici 2050 doit être analysé au regard du fait que le train est en panne alors que le transport par camions a été multiplié par quatre ou cinq ces dernières décennies. Comment harmoniser le transport ferroviaire ? Trois systèmes de sécurité embarquée existent dans le Thalys entre Paris et Amsterdam, ainsi que sept systèmes d'électrification, sans parler des problèmes d’écartement des voies. Comment arriver à un véritable maillage ferré dans l’ensemble des 27 Etats européens ? Le train reste une réponse aux problèmes du développement durable. Les questions administratives et bureaucratiques devraient aussi pouvoir être résolues. Ainsi, si l'on achète un bus au sein de l'Union, il peut être utilisé dans l'ensemble de l'Union alors que, pour un nouveau produit ferroviaire, il est nécessaire de faire homologuer le produit dans chaque pays, ce qui génère des coûts importants, de l'ordre de 1,5 voire 2 millions d'euros. Quelles mesures pourraient être prises à cet égard ?

Le commissaire Siim Kallas. Il est très intéressant d'échanger avec les parlementaires. Le programme très ambitieux de la Commission européenne essaie d'aller dans le sens évoqué ici. On parle dorénavant de moteurs qui consommeront 1 litre de carburant aux 100 km, avec trois cylindres. Les économies concerneront aussi le transport aérien, avec des moteurs d'avions consommant 30 % de carburant de moins.

S’agissant de la concurrence loyale que vous avez évoquée, à juste titre, à plusieurs reprises, a été posée lundi dernier au Parlement européen la question de savoir s'il faut à ce point changer nos habitudes pour que les compagnies de transport ferroviaire soient toutes des sociétés nationales subventionnées par le contribuable. Je sais, par mon expérience, comment les économies d’Etat fonctionnent. Afin d'améliorer le transport et l'ouvrir à la concurrence, il faut réformer en profondeur le secteur ferroviaire, sinon le routier prendra le dessus. Le service public conserve toute son importance dans le transport et les règles doivent être claires. Il existe déjà des règles qui prévoient un minimum de soutien public pour assurer le service public et ces règles doivent être affinées.

L'objectif en matière de CO2 est de réduire de 50 % les émissions d'ici 2050. Nous travaillons en étroite collaboration avec la direction générale environnement. Il existe des objectifs intermédiaires à atteindre. Il est possible que l'on estime ces objectifs trop ambitieux mais il faut, à mon sens, toujours viser haut. Un meilleur usage des réseaux ferrés, les évolutions sur les moteurs, l’utilisation des biocarburants sont autant d’éléments qui permettront cette évolution.

Le projet Lyon-Turin est un projet vital qui ne peut pas être annulé même si des doutes ont été soulevés. Il a été proposé de mettre de côté les sommes non utilisées avant 2015 ; sur les plus de 600 millions d’euros envisagés, seuls 9 ont été avancés. Ce projet connaîtra peut-être des retards, mais il porte sur la restructuration des voies dans leur ensemble.

En matière de sûreté, il n'est pas possible d'atteindre un niveau de sûreté de 100 %, comme vous l'avez vu aux Etats-Unis, où le niveau de sûreté est excellent. Faut-il aussi mettre en oeuvre des mesures de sûreté pour le transport de marchandises qui pourraient peut-être avoir pour effet de paralyser l'économie ? Il convient d'être raisonnable et d'assurer une bonne surveillance des passagers et des marchandises. Les terroristes ont pour cible privilégiée le transport aérien. Nous coopérons avec les Etats-Unis qui ont cependant des outils que nous n'avons pas, qui leur permettent de bloquer les avions au sol si nécessaire. Cela n’existe pas en Europe. Nous pouvons adopter des mesures techniques, sans calquer notre système sur le système américain.

La question des écotaxes et celle du régime de collecte et de traitement des données PNR ne sont pas au cœur de mon secteur de compétence mais des progrès sont faits par les échanges d’informations. Il y avait jusqu'à récemment de réelles difficultés d'information s'agissant du transport de marchandises. La Russie fait également beaucoup de progrès et c'est par les échanges avec ces grands Etats que nous progressons.

S'agissant des amendes et des excès de vitesse, des progrès ont été faits après deux ans de longues négociations. L'on constate que les conducteurs commettent des infractions plus nombreuses à l'étranger que dans leur pays d'origine. Les questions de souveraineté se mêlent à ce problème et la question de l'extraterritorialité des mesures judiciaires est probablement la plus délicate, mais nous progressons. En France, en 2004, un grand projet avait été lancé agissant de la sécurité routière, qui a donné de bons résultats.

Pour ce qui concerne les taxes routières en Europe, des systèmes très différents existent – péage, vignette, etc –. Nous essayons d'atteindre l'équité fiscale mais il existe aussi un objectif de diminution de l'encombrement pour certaines zones urbaines.

Les modes de gouvernance à la Deutsche Bahn et à la SNCF sont différents sur le plan conceptuel, philosophique et historique. Mais il existe aussi une bonne coopération entre les deux, ce qui est encourageant, sur le plan technique notamment.

Pour ce qui concerne l'homologation du matériel, des années de procédures sont souvent nécessaires avant d’aboutir. Alors pourquoi ne pas créer une agence européenne d'homologation du matériel roulant ? C'est ce vers quoi nous tendons.

S’agissant des autoroutes de la mer, nous avons une quinzaine de projets encourageants, dont le projet pilote intitulé « ceinture bleue ». Il propose d’établir des couloirs maritimes privilégiés pour réduire les charges administratives. Quand un navire quitte Rotterdam pour entrer dans les eaux internationales, toutes sortes de dispositions douanières interviennent, parmi lesquelles certaines relèvent de la sécurité maritime, notamment pour les conteneurs d’origines différentes soumis aussi à certaines règles lorsqu’ils entrent dans les ports européens.

Le démantèlement des anciens navires ne relève pas de ma compétence, mais le point de vue écologique s’impose pour savoir que faire de ces bâtiments mis au rebut. En fait, la réponse comporte plusieurs aspects qu’il faut combiner, car elle concerne à la fois la récupération des métaux, les questions environnementales, les subventions publiques et la concurrence.

Concernant la concurrence loyale, les subventions ne sont pas destinées aux constructeurs mais aux transporteurs aériens « low cost » dans les aéroports régionaux. L’Union européenne a lancé des procédures de sanctions contre les Etats membres qui versent des subventions par cette voie détournée à leurs aéroports locaux, mais il est clair que les autorités régionales ou locales exercent une forte pression sur eux pour qu’ils encouragent cette activité économique. Il faut éviter que ces pratiques ne créent une concurrence déloyale mais le concept doit être équilibré : d’un côté, l’Etat membre ne doit pas fausser la concurrence, de l’autre, le développement régional est un objectif à prendre en compte.

S’agissant de l’échéance 2012 pour l’accord de la FABEC signé en 2010 par tous les Etats membres y participant, il est essentiel de mesurer qu’au centre de l’Europe, l’encombrement de l’espace aérien devrait provoquer un retard pour près de la moitié des vols. Une telle perspective impose d’agir et les Etats membres ont proposé un système de bloc de l’espace aérien avec des critères de performance en vue d’une meilleure gestion de cet espace. En même temps, les résultats se font attendre. Les contrôleurs aériens sont contre les réformes proposées et ils ont des moyens de pression assez considérables pour paralyser le trafic aérien partout. Ce n’est donc pas facile à résoudre mais il n’y a pas de raison de penser que le système est voué à l’échec . On peut espérer une amélioration du système de gestion du trafic aérien, grâce notamment à Eurocontrol qui joue un rôle de coordination des efforts de réforme, en particulier pour une évaluation des performances.

Pour le « package » aéroportuaire, nous n’en sommes pas arrivés au stade du détail mais des grands principes ont été posés et cette question est liée au fonctionnement de l’espace aérien. Il n’y a pas d’autres moyens d’agrandir les aéroports européens – Heathrow est saturé, Francfort peut-être – et il faut donc améliorer la gestion des créneaux et celle des services de manutention au sol. Nous avons rencontré les syndicats pour trouver le meilleur compromis social et, pour l’instant, on a maintenu la paix sociale pour le service au sol qui ne comprend pas moins de douze services différents.

Le transport ferroviaire comporte une homologation des équipements et nécessite une harmonisation des systèmes, tant de la signalisation que des sources d’électricité. A cet égard, la Deutsche Bahn et la SNCF travaillent main dans la main pour réduire la complexité technique du fer.

M. Daniel Paul. Je vous remercie pour votre intervention et souhaite vous poser quatre questions.

Je partage l’objectif de réduction du recours aux carburants fossiles. Mais l'Europe pèsera peu face à l’explosion du recours à ces carburants dans de nombreux pays en développement. Aussi ne conviendrait-il pas de mettre l’accent beaucoup plus sur l’impact en recherche et développement, en fabrication dans l’industrie et en emplois dans nos pays avec, en outre, la nécessité de protéger ces emplois ?

Vous avez une vision libérale – concurrence loyale avez-vous dit – qui caractérise l'Europe depuis plusieurs années. Vous avez évoqué la nécessité d’entendre les régions pour le développement du transport aérien, y compris le low cost, ce qui ouvre des perspectives pour défendre l’emploi. Ne conviendrait-il pas d’adopter la même attitude à l’égard d’entreprises dans d’autres secteurs pour sauver des centaines ou des milliers d’emplois ?

Pour prolonger ce qu’à dit notre collègue Alain Bocquet dans le domaine du fer, ne conviendrait-il pas de permettre des rapprochements entre constructeurs européens qui vont de plus en plus être confrontés à la concurrence de plus en plus difficile à contenir de pays comme la Chine et bientôt l’Inde, qui sont en train de rattraper leurs retards technologiques ?

Enfin, sur les modalités de financement des infrastructures de transport en France et en Europe, comment continuer à investir dans des infrastructures de transport de plus en plus lourdes à supporter et assurer en même temps la maintenance et la sécurité des installations existantes ? Le retard observé en France a conduit à de lourdes difficultés de circulation ferroviaire et à des fermetures de lignes à la circulation normale.

Mme Marie-Line Reynaud. La Commission européenne souhaite connecter tous les réseaux de transport en Europe et prévoit à cet effet un investissement de 50 milliards d’euros de 2014 à 2020. La carte de la route, du fer et des canaux est une véritable mosaïque qui devrait aboutir à un réseau de transport unifié en 2030. Le plan comporte notamment le TGV Lyon-Turin, mais y a-t-il d’autres projets concernant la France ?

Par ailleurs, il existe diverses agences européennes de transport concernant le fer, la sécurité aérienne et autres. Envisagez-vous de les regrouper dans une agence unique pour gérer et contrôler l’ensemble des modes de transport au sein de l'Union européenne ?

M. Yanick Paternotte. Vous avez déclaré dans votre rapport que les infrastructures conditionnent la mobilité, mais les services proposés également. Une difficulté à l’ouverture à la concurrence dans la compétence partagée entre les Etats membres et l'Union européenne est le manque d’harmonisation fiscale et sociale. C’est vrai pour le low cost aérien, ça l’est encore plus pour le fer, le cabotage et la circulation des poids lourds. Je voudrais savoir quelle coordination vous lie aux autres commissaires pour éviter les blocages, car sans harmonisation fiscale et sociale, il n’y aura pas d’unification du réseau.

Sur l’aérien, vous avez évoqué le doublement du trafic en 2050. L’exemple des vols de nuit risquent d’être une thématique chez les riverains et donc chez les élus ; l’OMS recommande un couvre-feu de huit heures consécutives. Envisagez-vous de présenter une proposition de directive sur ce sujet, même si je crois savoir que non, car le doublement du trafic, mais pas forcément des vols, en 2050 est très inquiétant ?

Mme Martine Lignières-Cassou. Vous nous avez indiqué que 500 milliards d’euros seraient nécessaires d’ici 2020 pour réaliser un réseau ferroviaire européen digne de ce nom. Or la Commission a prévu de lui affecter 31 milliards d’euros, dont 10 milliards dans le Fonds de cohésion sociale. Il y a donc une distorsion entre les besoins des Etats membres et l’effort de la Commission européenne. En raison de la situation des finances publiques, les Etats membres ne peuvent pas résoudre cette problématique. Comme vous l’avez recommandé, nous faisons appel au partenariat public-privé pour la ligne Sud-Ouest Atlantique, pour la partie Tours-Bordeaux. Or l’Etat et les collectivités territoriales ont des difficultés à lever des financements et il n’est pas sûr que la ligne dépasse Bordeaux au-delà de 2020.

Dans le contexte actuel, au-delà des propositions libérales que vous faites, ne pensez-vous pas qu’il appartient à l'Union européenne de prendre en main cette question qui peut être un levier pour sortir de la crise économique actuelle et d’une possible récession ?

M. Maxime Bono. Aucun système ferroviaire en Europe n’a pu trouver un modèle économique équilibré, et ce quel que soit le degré de séparation entre gestionnaires d’infrastructures et gestionnaires de réseaux. Il semblerait que la Commission recherche la condamnation du modèle allemand, qui est à la fois le moins consommateur d’argent public et celui dans lequel cette séparation est la moins marquée juridiquement. Cette séparation aboutit à une impasse : elle ne garantit aucunement l’ouverture à de nouveaux opérateurs, et elle conduit à une perte d’expertise globale d’autant plus dommageable que, sur le plan commercial, les clients demandent de plus en plus d’offres intégrées.

S’agissant de la gouvernance, allez-vous vous prononcer sur cette funeste séparation entre réseaux et infrastructures ? Si vous la prônez, quelles mesures comptez-vous mettre en œuvre pour pallier la perte d’expertise, à la fois en termes de matériel, d’infrastructures et de réseaux, qui en découle, et qui porte atteinte à la compétitivité de l’industrie ferroviaire européenne ?

M. Jean-Marie Sermier. Dans le réseau ferroviaire européen à grande vitesse, une ligne Nord-Sud revêt une importance particulière : celle qui traverse au Nord la Finlande, l’Allemagne, la Belgique, la Hollande, le Luxembourg, la France, et l’Italie et l’Espagne au Sud. Elle permettra, entre autres, une liaison entre les aéroports de Francfort et Saint-Exupéry de Lyon, ce qui améliorera l’intermodalité de nos réseaux intra-européens.

Le 11 décembre, la première branche de cette LGV Rhin-Rhône doit être inaugurée. Qu’en est-il de la seconde, qui doit permettre de relier Besançon à Lyon ? Fait-elle bien toujours partie des priorités de la Commission européenne ?

Par ailleurs, vous nous avez fait part des réflexions de la Commission sur les véhicules du futur et les nouvelles technologies. L’une des énergies les plus prometteuses s’avère être, et vous n’en avez pas parlé, l’hydrogène, mais son développement reste subordonné à une harmonisation des législations des États membres, qui n’existe pas aujourd’hui. Pouvez-vous m’indiquer où en sont les réflexions de la Commission européenne à ce sujet ?

M. Patrice Calméjane. La Commission affiche des objectifs très ambitieux en matière de réduction des émissions de CO2. On ne peut que s’en féliciter, mais, pour avoir un ordre de grandeur, je rappelle que les émissions annuelles des deux plus grands pôles de production chimique chinois équivalent celles de 25 millions de véhicules automobiles circulant en Europe ! Il faut impérativement fixer des règles mondiales de réduction des émissions, respectées par tous les États. Faute de quoi l’Union européenne court le risque de faire figure de très bon élève dans une cour où d’autres ne jouent pas le même jeu. Quand règlera-t-on, donc, le problème des importations de ces pays « mauvais joueurs » qui ne respectent pas l’environnement, au moyen d’écotaxes ?

S’agissant de la ville, la Commission européenne a pour objectif ambitieux d’en bannir, à horizon 2050, les véhicules émettant du CO2. Il me semble difficile à atteindre, car cela correspond à deux cycles de production industriels, ce qui est très rapide.

Enfin, je voudrais mettre en lumière l’incohérence de certains pans de la législation européenne. Par exemple, elle soumet au même régime juridique, et donc aux mêmes obligations, une estafette chargée de l’acheminement du courrier en ville, qui roule à 7 kilomètre/heure, et un autocar qui transporte, à une vitesse bien supérieure et sur 3 000 kilomètres, près de 50 passagers de Barcelone à Copenhague ! Cela vaut pour une toupie à béton et un poids lourd chargé de 25 tonnes de vrac de terre… Cette absence de cohérence conduit à une augmentation des coûts de production.

En conclusion, nous avons besoin d’un large débat sur le changement de nos circuits de transport d’électricité. La perspective d’une baisse de la part du nucléaire dans notre énergie primaire, et donc de la fermeture de sites, conduira nécessairement à la multiplication par 10 voire par 30 des sites de production, de taille moins importante. Cette évolution doit impérativement être prise en compte dans notre stratégie en matière de transport d’énergie. Quelle analyse fait la Commission de cette évolution et comment compte-t-elle favoriser l’interconnexion  des sites ?

M. Jean-Yves Cousin. Il faut mettre un terme au recours massif à une énergie issue des matières fossiles, qui nous place dans une situation de dépendance vis-à-vis des pays producteurs, notamment de pétrole, qui sont, à 96 %, des pays instables. Quels sont les moyens mis en œuvre par la Commission pour atténuer cette dépendance énergétique ?

M. Yves Albarello. Je voudrais aborder un sujet connexe aux transports, le projet Galileo, dont l’objet est notamment de concurrencer le système américain. Pouvez-vous nous faire un point d’étape de sa mise en œuvre ?

M. Daniel Fidelin. Monsieur le Commissaire, je souhaite aborder, en tant que parlementaire du port du Havre, la question des pilotes maritimes. À la page 32 du Livre blanc de la Commission sur les transports, les questions de la sécurité, de la sûreté et de la protection de l’environnement font l’objet de développements importants. Ces pilotes fournissent des prestations de services dans le cadre de dérogations pour raisons impérieuses d’intérêt général, avec un impératif de sécurité. Ils sont commissionnés par le préfet, sont indépendants et gèrent la sécurité des navires, notamment des pétroliers. Pouvez-vous m’indiquer si vous souhaitez les intégrer dans un environnement concurrentiel, ce qui à mon sens constituerait une erreur ?

M. Philippe Plisson. Votre discours m’apparaît comme trop marqué par l’idéologie libérale et par le dogme d’une concurrence libre et non fautive, fût-elle loyale. Pourtant la crise financière actuelle, et la crise écologique avec l’épée de Damoclès de 6 ° de réchauffement climatique à horizon 2050, ont démontré leur inanité. Ce travers s’illustre notamment par la condamnation européenne de la France lorsqu’elle défend son service public ferroviaire, comme par les encouragements que vous avez prodigués aux agrocarburants, qui « affament » la planète.

Ne serait-il pas temps d’engager une réflexion au sein de l’Union européenne sur un autre modèle de développement dans lequel les urgences écologique et sociale prendraient le pas sur le profit ?

M. Didier Gonzalez. De nombreux États membres ont entamé une réflexion sur la localisation de leurs aéroports internationaux, en raison de leur saturation, ce qui est le cas de celui d’Heathrow en Grande-Bretagne. L’Allemagne a relocalisé deux aéroports berlinois sur un nouveau site, à Schönefeld.

La France a quant à elle installé une commission stratégique sur l’avenir de l’aéroport d’Orly, à laquelle j’ai l’honneur de participer. Il faut en effet avoir une démarche prospective, qui prenne en compte les perspectives de doublement, à horizon 2050, des activités de transport aérien. Le livre blanc sur les transports de la Commission européenne fait état d’une augmentation du nombre de mouvements au sein de l’Union, qui devrait passer de 9 millions en 2011 à 25 millions en 2050. Pouvez-vous nous confirmer l’ampleur de ces évolutions, et nous faire part des réflexions de la Commission sur l’évolution de l’offre aéroportuaire au sein de l’Union ?

Enfin, en tant que membre du groupe d’amitiés France - Estonie, je salue votre venue aujourd’hui, Monsieur le Commissaire, comme une marque d’amitié entre nos deux pays. « Tenan vega » (bienvenue) !

M. Jean-Paul Chanteguet. Le secteur des transports est responsable de 20 % des émissions de GES. La Commission européenne s’étant fixé comme objectifs de réduire cette part à 10 % - une directive a été prise en ce sens – et de réduire ses émissions de 60 % à horizon 2050, une action vigoureuse s’impose. Cet objectif sera-t-il atteint ?

Les véhicules électriques représentent également un réel enjeu industriel et environnemental : comment la Commission européenne envisage-t-elle d’y répondre ?

M. Frédéric Cuvillier. Comme notre collègue Daniel Fidelin, je voudrais revenir sur les risques de déréglementation portuaire. Une première tentative a fait long feu en 2004, grâce au Parlement européen. Aujourd’hui ce risque resurgit notamment sur trois aspects : l’extension des dispenses de pilotage, la restriction des services portuaires et surtout la mise en concurrence des missions de pilotage et de remorquage.

La plupart des États membres restent organisés sur le modèle d’un service public d’intérêt général de surveillance et de protection des côtes. Je tiens à votre disposition la liste des drames maritimes survenus en raison de la déréglementation : l’Exxon Valdez, de sinistre mémoire, en 1989, est le premier d’entre eux. Les conclusions des commissions d’enquête sont à chaque fois sans appel. Bref, il s’agit d’une mission d’intérêt général, peut-on reconnaître des droits exclusifs sur cette question du pilotage ?

Le commissaire Siim Kallas. Je vous remercie vivement. Vos nombreuses questions montrent que la thématique du transport est essentielle et suivie très précisément par les parlementaires.

D’abord, en ce qui concerne la recherche et le développement, nous allons mettre en œuvre, vous le savez, un programme stratégique de recherche sur la technologie afférente aux transports. Il s’agit avant tout de trouver des substituts aux carburants traditionnels. Nous avons mené un premier travail, avec mes collègues de la Commission, afin de déterminer les modalités de financement d’un tel programme de recherche. Le besoin existe et nous nous devons d’apporter des solutions à la demande des industriels. Ce travail concerne notamment le secteur aérien, pour lequel une feuille de route a fixé des objectifs ambitieux pour 2020. Bien entendu, notre succès dépendra des budgets dont nous disposerons.

Vous avez évoqué la question des véhicules électriques. N’étant pas ingénieur, je ne peux vous présenter précisément les progrès technologiques enregistrés ces dernières années. Néanmoins, si les véhicules hybrides seront de plus en plus nombreux, il est évident que les véhicules individuels ne disparaîtront pas demain. Comme vous le savez, l’Estonie a lancé un important projet visant à développer les véhicules électriques : or, s’il s’agit de véhicules propres et silencieux, ils ne réduiront pas la congestion des voies de circulation. En revanche, les transports publics représentent un formidable potentiel de développement.

Aujourd’hui, des modes de transports collectifs propres existent dans un certain nombre de villes, que l’on pense seulement aux bus électriques ou aux tramways, voire aux bus à propulsion par hydrogène : ces modes de transports publics alternatifs répondent aux enjeux de l’encombrement des routes. J’ai eu l’occasion de m’entretenir avec les dirigeants d’Aéroports de Paris, qui mènent actuellement une réflexion sur le déploiement de ce type de transport. De même, des villes comme Londres ou Paris ne cessent d’innover dans le domaine des transports publics.

D’une manière plus générale, les carburants traditionnels ne pourront pas disparaître du jour au lendemain. Il faudra avoir recours à tout type d’énergie en les combinant, et utiliser ainsi l’hydrogène, les biocarburants, l’électricité...

Certains d’entre vous ont souligné la problématique du financement des grands projets destinés à réduire les émissions de dioxyde de carbone. Comme vous le savez, les Gouvernements n’ont eu de cesse de rassurer les populations quant au maintien de ces investissements. Ceci est d’autant plus compréhensible que la réalisation d’infrastructures de grande ampleur est l’un des fondements essentiels de la croissance et de l’emploi. L’Union européenne a donc maintenu ses financements, à hauteur d’une trentaine de milliards d’euros pour des projets de mise en réseau au travers du nouveau fonds pour l’interconnexion en Europe - « Connecting Europe Facility » (CEF). Nous soutenons également le système de gestion du trafic aérien SESAME, à hauteur de trois milliards d’euros. Mais des acteurs privés – des compagnies aériennes, des constructeurs notamment – participent également à ce projet, à hauteur de trente milliards d’euros.

Ainsi, le rôle des acteurs privés est fondamental dans le financement de projets d’infrastructures de transports. Je suis bien évidemment convaincu que, si les budgets le permettent, un financement public est également essentiel. À mon sens, et je parle en tant qu’ancien ministre des finances, la réalisation de partenariats entre le secteur public et le secteur privé pour ce type d’investissement est une piste intéressante à explorer. Dois-je rappeler que les zones les plus à l’est de l’Union européenne ne sont dotées que d’infrastructures vieillissantes, aucunement comparables aux situations française ou allemande ? Je sais que certains États qui, dans le cadre des programmes de cohésion, bénéficiaient jusqu’alors presque exclusivement de ces mannes financières, ne sont pas très satisfaits d’en voir une partie s’échapper vers les pays les plus à l’ouest. Toutefois, nous devrons mettre en place de grands projets paneuropéens.

J’en viens à présent à la question, complexe, de la concurrence. D’une part, la liste des règles harmonisées au niveau communautaire est impressionnante, nul ne peut le nier ! Ceci est particulièrement vrai dans le domaine routier : que l’on pense simplement à la réglementation en vigueur s’agissant de la durée de conduite maximale des chauffeurs de poids lourds ou de la fiscalité des péages. Nous sommes également parvenus à uniformiser nos procédures dans le domaine social ; je pense notamment à la formation de la main d’œuvre dans le secteur maritime.

D’autre part, j’en conviens, nous ne sommes pas à l’abri de la concurrence internationale. Si nos entreprises occupent encore la première place pour des marchés de niches, comme les bateaux sur mesure, n’oublions pas que l’industrie navale coréenne a recours à près de 900 fournisseurs européens. Je n’évoquerai même pas le cas du secteur de l’aviation pour lequel le nombre de fournisseurs est encore plus élevé. Certes, un grand nombre de marchés demeurent fermés à nos entreprises. Mais l’Union européenne produit encore plusieurs centaines d’avions civils par an ! Au salon du Bourget, des constructeurs étrangers ont présenté des avions régionaux de nouvelle génération, qui ont recours à des pièces fabriquées en Europe – je pense aux moteurs SAFRAN. De même, la réalisation de l’appareil Dreamliner de BOEING dépend énormément de fournisseurs européens. Pourquoi alors « crier haro » sur BOEING alors que l’Europe en profite largement ? La concurrence n’est qu’un moyen de conserver et de créer des emplois : elle ne représente pas une fin en soi. Ainsi, concernant la réalisation des corridors européens, dont la France bénéficie largement, il nous est impossible, et il est même inenvisageable, de fusionner les instances en charge de la sécurité des différents transports compte tenu de leurs spécificités.

Vous m’avez également interrogé sur les vols de nuit. Nous avons déjà évoqué le cas de l’aéroport de Francfort. Celui de Leipzig est également opérationnel la nuit pour les avions de fret aérien ; quelques entreprises de transport comme DHL ont d’ailleurs leur « hub » à Leipzig. Il est évident que la question des nuisances doit être réglementée.

S’agissant du transport ferroviaire, si j’ai évoqué le cas de l’Allemagne, je suis bien conscient de l’existence de vingt-sept systèmes de signalisation et de régulation différents au sein de l’Union européenne… Afin de gagner des parts de marchés face à la route, le transport ferroviaire doit être plus ponctuel, moins coûteux et plus rapide. Le transport ferroviaire est confronté à trois grands enjeux : les infrastructures, le matériel roulant et la maintenance.

J’en viens à présent à l’écotaxe. Je dois l’avouer, la vraie difficulté est de parvenir à l’unanimité sur le sujet. En tant que commissaire européen, mon rôle est d’essayer d’harmoniser les pratiques entre les différents États membres.

S’agissant des voitures dans les zones urbaines, certaines villes ont déjà pris des mesures de restriction d’accès à leurs centres : je pense ainsi à Oslo, Londres ou Stockholm. À l’inverse, je vous laisse imaginer la situation à Moscou, où le stationnement des véhicules est gratuit !

Concernant la sécurisation de notre approvisionnement en hydrocarbures, nul besoin de remémorer la crise du gaz en Ukraine survenue il y a quelques années. Nous avions alors dû refondre la législation sur l’énergie afin de nous prémunir contre l’instabilité de certaines approvisionnements.

A propos du système Galileo, qui ne relève pas réellement de mon secteur, deux premiers satellites ont déjà été lancés. Certaines applications, notamment la géolocalisation, auront in fine un impact direct sur le secteur des transports.

Vous avez souhaité que je m’exprime sur les pilotes maritimes, qui ne font pas non plus partie de mon portefeuille d’attributions. En ce moment même, les services de la Commission européenne travaillent avec les responsables des ports afin de déterminer une feuille de route. Aucune stratégie n’a été arrêtée pour l’instant ; nous avons identifié quelques pistes d’amélioration, notamment en termes de fluidité du trafic.

Enfin, sur la capacité des aéroports européens, nous travaillons avec les services au sol afin d’harmoniser les pratiques, notamment sur les créneaux d’ouverture.

Le Président Serge Grouard. Monsieur le Commissaire, au nom du Président Pierre Lequiller et en mon nom propre, je souhaite vivement vous remercier de votre présence parmi nous aujourd’hui et des nombreuses réponses que vous nous avez apportées. Comme vous avez pu le constater, les questions relatives aux transports intéressent au plus au point les députés français. Nous sommes ravis de vous avoir entendu, tant sur des questions d’ordre général que sur des points plus précis. Vous serez toujours le bienvenu pour vous exprimer à l’Assemblée nationale.

Le commissaire Siim Kallas. Si vous le souhaitez, je me tiens à votre disposition.

Le Président Serge Grouard. Je vous en remercie vivement.

La séance est levée à 12 h 15

Membres présents ou excusés

Commission des affaires européennes

Réunion du mercredi 16 novembre 2011 à 10 h 30

Présents. - M. Patrice Calméjane, M. Christophe Caresche, M. Jean-Yves Cousin, M. Michel Diefenbacher, Mme Marie-Louise Fort, M. Hervé Gaymard, M. Régis Juanico, Mme Marietta Karamanli, M. Jérôme Lambert, M. Pierre Lequiller, Mme Odile Saugues, M. Philippe Tourtelier, M. Gérard Voisin

Excusés. - M. Pierre Bourguignon, Mme Pascale Gruny

Assistaient également à la réunion. - M. Yves Albarello, M. Alain Bocquet, M. Maxime Bono, M. Christophe Bouillon, M. Jean-Paul Chanteguet, M. Frédéric Cuvillier, M. Stéphane Demilly, M. Jacques Desallangre, M. Paul Durieu, M. Daniel Fidelin, M. Daniel Goldberg, M. Didier Gonzales, M. Serge Grouard, M. Michel Havard, M. Jean Lassalle, Mme Martine Lignières-Cassou, M. Yanick Paternotte, M. Daniel Paul, Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont, M. Philippe Plisson, Mme Marie-Line Reynaud, M. Max Roustan, M. Martial Saddier, M. Jean-Marie Sermier