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mis en distribution

le 17 janvier 2008


N° 518

_____

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 20 décembre 2007.

PROJET DE LOI

adopté par le sénat,

autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Turquie sur l’encouragement et la protection réciproques des investissements.

TRANSMIS PAR

M. LE PREMIER MINISTRE

à

M. LE PRÉSIDENT DE L’ASSEMBLÉE NATIONALE

(Renvoyé à la commission des affaires étrangères, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

Le Sénat a adopté, en première lecture, le projet de loi dont la teneur suit :

Voir les numéros :

Sénat : 78, 124 (2007-2008) et TA 37.

Article unique

Est autorisée l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Turquie sur l’encouragement et la protection réciproques des investissements (ensemble un protocole additionnel), signé à Ankara le 15 juin 2006, et dont le texte est annexé à la présente loi.

Délibéré en séance publique, à Paris, le 19 décembre 2007.

Le Président,

Signé : Christian PONCELET

A C C O R D

entre le Gouvernement de la République française

et le Gouvernement de la République de Turquie

sur l’encouragement et la protection

réciproques des investissements

(ensemble un protocole additionnel)

signé à Ankara le 15 juin 2006

________

A C C O R D

entre le Gouvernement de la République française

et le Gouvernement de la République de Turquie

sur l’encouragement et la protection réciproques des investissements

(ensemble un protocole additionnel)

_______

Le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Turquie, ci-après dénommés « les Parties contractantes »,

Désireux de renforcer la coopération économique entre les deux États et de créer des conditions favorables pour les investissements français en Turquie et turcs en France ;

Persuadés que l’encouragement et la protection de ces investissements sont propres à stimuler les transferts de capitaux et de technologie entre les deux pays, dans l’intérêt de leur développement économique, sont convenus des dispositions suivantes :

Article 1

Définitions

Aux fins du présent Accord :

1. Le terme « investissement » désigne tout type d’avoirs investis par un investisseur d’une Partie contractante sur le territoire de l’autre Partie contractante conformément à la législation de cette dernière et, plus particulièrement mais non exclusivement :

a) les biens meubles et immeubles, ainsi que tous autres droits réels tels que les hypothèques, droits de rétention, usufruits, gages et tous droits analogues ;

b) les actions, primes d’émission et autres formes directes ou indirectes de participations à des sociétés ;

c) les revenus réinvestis, créances monétaires ou autres droits ayant valeur financière afférents à un investissement, en particulier les créances découlant de prêts relatifs à la participation aux sociétés mentionnées à l’alinéa précédent ;

d) les droits de propriété intellectuelle et industrielle (tels que les brevets d’invention, les licences, les marques déposées, les modèles et maquettes industriels), les procédés techniques, les noms déposés et la clientèle ;

e) les concessions accordées par la loi ou en vertu d’un contrat, notamment les concessions relatives à la prospection, la culture, l’extraction ou l’exploitation de richesses naturelles, sur le territoire de chacune des Parties contractantes tel qu’il est défini ci-après.

Une modification de la forme d’investissement des avoirs, quelle qu’elle soit, n’affecte pas leur qualification d’investissement, à condition que cette modification ne soit pas contraire à la législation de la Partie contractante sur le territoire de laquelle l’investissement est réalisé.

2. Le terme « investisseur » désigne :

a) les personnes physiques possédant la nationalité de l’une des Parties contractantes ;

b) les sociétés constituées sur le territoire d’une Partie contractante conformément à la législation de celle-ci et dont le siège social ou l’activité économique effective est situé sur le territoire de cette Partie contractante.

3. Une société dont le siège social est situé dans un pays tiers et qui est contrôlée directement ou indirectement par des investisseurs d’une Partie contractante bénéficie de la protection découlant du présent Accord, sauf s’il existe entre ce pays tiers et la Partie contractante où l’investissement est réalisé un accord de protection et d’encouragement des investissements en vigueur qui accorde aux investissements un traitement plus favorable que celui qui leur est accordé par le présent Accord.

4. Le terme « revenus » désigne toutes les sommes produites par un investissement, telles que bénéfices, redevances et intérêts ou dividendes, durant une période donnée.

5. Le terme « territoire » désigne, pour chacune des Parties contractantes, son territoire, ses eaux territoriales ainsi que les zones maritimes sur lesquelles elle a une juridiction ou des droits souverains aux fins de prospection, d’exploitation et de préservation de ressources naturelles, conformément au droit international.

Article 2

Champ d’application

Le présent Accord s’applique tant aux investissements existants à sa date d’entrée en vigueur qu’aux investissements réalisés après son entrée en vigueur.

Article 3

Promotion, protection et traitement des investissements

1. Chacune des Parties contractantes encourage sur son territoire les investissements réalisés par les investisseurs de l’autre Partie contractante, y établit des conditions favorables à ces investissements et, sous réserve de son droit d’exercer les pouvoirs conférés par sa législation, admet ces investissements sur une base non moins favorable que celle accordée dans des situations analogues aux investissements réalisés par les investisseurs de tout État tiers.

2. Chaque Partie contractante accorde aux investissements, y compris les revenus, réalisés sur son territoire par les investisseurs de l’autre Partie contractante un traitement juste et équitable, conforme aux principes du droit international, et non moins favorable que celui qu’elle accorde aux investissements réalisés par ses propres investisseurs ou par les investisseurs de tout État tiers, si celui-ci est plus avantageux.

3. Chaque Partie contractante assure sur son territoire aux investisseurs de l’autre Partie contractante, à l’égard de leurs investissements et de leurs activités liées à ces investissements, le traitement accordé à ses propres investisseurs ou le traitement accordé à celui de tout État tiers, si celui-ci est plus avantageux. Ce principe s’applique également aux ressortissants d’une Partie contractante autorisés à travailler sur le territoire de l’autre

Partie contractante dans le cadre de leurs activités professionnelles relatives à un investissement.

4. Ce traitement ne s’étend pas aux privilèges qu’une Partie contractante accorde aux investisseurs d’un État tiers en vertu de sa participation ou de son association à une zone de libre échange, une union douanière, un marché commun ou toute autre forme d’organisation économique régionale.

5. Les dispositions du présent article ne s’appliquent pas aux questions fiscales.

6. Les dispositions du présent Accord ne sauraient être interprétées comme empêchant l’une des Parties contractantes de prendre des mesures réglementant les investissements des sociétés étrangères et les conditions de l’activité de ces sociétés en matière de produits culturels, essentiellement dans le domaine des produits audiovisuels.

7. Les Parties contractantes examineront favorablement, dans le cadre de leur législation interne, les demandes d’entrée et d’autorisation de séjour, de travail et de circulation introduites par les ressortissants d’une Partie contractante au titre d’un investissement sur le territoire de l’autre Partie contractante.

Article 4

Expropriation et indemnisation

1. Les investissements réalisés par les investisseurs d’une Partie contractante bénéficient sur le territoire de l’autre Partie contractante d’une protection et d’une sécurité pleines et entières.

2. Les Parties contractantes ne prennent pas de mesures d’expropriation ou de nationalisation ou toutes autres mesures dont l’effet est de déposséder, directement ou indirectement, les investisseurs de l’autre Partie contractante de leurs investissements sur son territoire, si ce n’est pour cause d’utilité publique, conformément aux procédures légales et à condition que ces mesures ne soient pas discriminatoires.

Toutes les mesures de dépossession qui pourraient être prises doivent donner lieu au paiement d’une indemnité prompte et adéquate dont le montant doit être calculé sur la base de la valeur réelle des investissements considérés et évalués par rapport à la situation économique normale qui prévalait immédiatement avant que ces mesures n’aient été rendues publiques.

Ladite indemnité, son montant et ses modalités de versement sont fixés au plus tard à la date de la dépossession. L’indemnité doit être effectivement réalisable, versée sans retard et librement transférable. Elle produit, jusqu’à la date de versement, des intérêts calculés au taux d’intérêt approprié.

3. Les investisseurs d’une Partie contractante dont les investissements auront subi des pertes dues à la guerre ou à tout autre conflit armé, insurrection, état d’urgence national ou révolte survenu sur le territoire de l’autre Partie contractante bénéficieront, de la part de cette dernière, d’un traitement non moins favorable que celui accordé à ses propres nationaux ou à ceux de la nation la plus favorisée.

Article 5

Rapatriement et transfert

1. Chaque Partie contractante fait en sorte que tous les transferts relatifs à un investissement soient effectués librement et sans retard, tant à destination qu’en provenance de son territoire.

Lesdits transferts portent sur :

a) les revenus ;

b) les versements du capital et des intérêts découlant des emprunts régulièrement contractés afférents à un investissement;

c) le produit de la liquidation totale ou partielle de l’investissement, y compris les plus-values du capital investi ;

d) l’indemnité prévue à l’article 4 ci-dessus ;

e) les versements qui découlent d’un différend portant sur un investissement ;

f) la rémunération des ressortissants de l’une des Parties contractantes qui ont été autorisés à travailler sur le territoire de l’autre Partie contractante au titre d’un investissement agréé.

2. Les transferts seront effectués en devises librement convertibles, au taux de change du marché applicable à la date du transfert.

3. En cas de difficultés de balance des paiements, de difficultés financières extérieures ou de menace desdites, chaque Partie contractante peut, à titre temporaire, soumettre des transferts à des restrictions, à condition que celles-ci :

a) soient promptement notifiées à l’autre Partie contractante ;

b) soient conformes aux statuts du Fonds monétaire international ;

c) n’excèdent pas six mois en tout état de cause ;

d) soient imposées équitablement, sans discrimination et de bonne foi.

Article 6

Subrogation

Si un assureur d’une Partie contractante, à la suite d’une garantie couvrant les risques non commerciaux accordée pour un investissement réalisé par des investisseurs d’une Partie contractante sur le territoire de l’autre Partie contractante, effectue des versements à ces investisseurs, cet assureur est, de ce fait, subrogé dans les droits et actions dudit investisseur.

Lesdits versements n’affectent pas les droits du bénéficiaire de la garantie de recourir au CIRDI pour la part de l’investissement non couverte par l’assurance.

Les différends entre une Partie contractante et un assureur sont réglés conformément au dispositif de l’article 8 du présent Accord.

Article 7

Dispositions plus favorables

Le présent Accord ne porte pas atteinte :

a) aux lois et règlements, pratiques ou procédures administratives, ou décisions administratives ou de justice de l’une des Parties contractantes ;

b) aux obligations de droit international ;

c) aux obligations assumées par l’une des Parties contractantes, y compris celles qui découlent d’un accord sur les investissements ou d’une autorisation d’investissement, qui accordent à des investissements ou à des activités connexes un traitement plus favorable que celui qui est accordé par le présent Accord dans des situations analogues.

Article 8

Règlement des différends entre une Partie contractante et des investisseurs de l’autre Partie contractante

1. Tout différend entre une Partie contractante et un investisseur de l’autre Partie contractante relatif à un investissement réalisé par ce dernier sur le territoire de la première Partie contractante dans le cadre de cet accord est réglé à l’amiable entre les deux Parties concernées.

2. Si ce différend n’a pas pu être réglé dans un délai de six mois à partir du moment où il a été soulevé par l’une des Parties au différend, il est soumis, à la demande de l’investisseur, soit aux tribunaux de la Partie contractante considérée, soit à l’arbitrage du Centre international pour le règlement des différends relatifs aux investissements (CIRDI) créé par la Convention pour le règlement des différends relatifs aux investissements entre États et ressortissants d’autres États ouverte à la signature à Washington le 18 mars 1965. Lorsque l’investisseur a soumis ou accepté de soumettre le différend soit aux tribunaux, soit à l’arbitrage, le choix de la procédure est définitif.

Article 9

Règlement des différends entre les Parties contractantes

1. Les différends relatifs à l’interprétation ou à l’application du présent Accord doivent être réglés par voie de négociations directes et substantielles.

2. Si le différend n’a pu être réglé dans un délai de six mois à partir de la date à laquelle il a été soulevé par l’une ou l’autre des Parties contractantes, il peut être soumis, à la demande de l’une ou l’autre Partie contractante, à un tribunal d’arbitrage.

3. Ledit tribunal sera constitué pour chaque cas de la façon suivante :

Chaque Partie contractante désigne un arbitre et les deux arbitres désignent d’un commun accord un troisième arbitre qui doit être ressortissant d’un État tiers et qui est nommé président du tribunal par les deux Parties contractantes. Tous les arbitres doivent être nommés dans un délai de deux mois à compter de la date à laquelle une des Parties contractantes a fait part à l’autre Partie contractante de son intention de soumettre le différend à l’arbitrage.

4. Si les délais fixés au paragraphe 3 ci-dessus n’ont pas été observés, l’une ou l’autre des Parties contractantes, en l’absence de tout autre accord, invite le Secrétaire général de l’Organisation des Nations unies à procéder aux désignations nécessaires. Si le Secrétaire général est ressortissant de l’une ou l’autre Partie contractante ou si, pour une autre raison, il est empêché d’exercer cette fonction, le Secrétaire général adjoint le plus ancien procède aux désignations nécessaires.

5. Le tribunal prend ses décisions à la majorité des voix. Ces décisions sont définitives et exécutoires de plein droit pour les Parties contractantes.

Le tribunal fixe lui-même son règlement. Il interprète la sentence à la demande de l’une ou l’autre des Parties contractantes. A moins que le tribunal n’en dispose autrement compte tenu de circonstances particulières, les frais de la procédure, y compris les vacations des arbitres, sont répartis également entre les deux Parties contractantes.

6. Cette procédure ne s’applique pas aux questions relatives au statut territorial de l’une ou l’autre des Parties contractantes.

7. Un différend ne peut être soumis à un tribunal arbitral international en vertu des dispositions du présent article si le même différend a été soumis à un autre tribunal arbitral international en vertu des dispositions de l’article 8. Les présentes dispositions ne sauraient empêcher l’engagement de négociations directes et substantielles entre les deux Parties contractantes.

Article 10

Entrée en vigueur

Chacune des Parties contractantes notifiera à l’autre l’accomplissement des procédures constitutionnelles requises pour l’entrée en vigueur du présent Accord, lequel prendra effet un mois après la date de réception de la dernière notification.

L’Accord est conclu pour une durée initiale de dix ans. Il demeurera en vigueur après ce terme, à moins que l’une des Parties contractantes ne le dénonce par la voie diplomatique avec préavis d’un an.

En cas de résiliation du présent Accord, les investissements effectués pendant qu’il était en vigueur continueront de bénéficier de la protection de ses dispositions pendant une période supplémentaire de quinze ans.

Fait à Ankara, le 15 juin 2006, en double exemplaire en langues française et turque, les deux textes faisant également foi.

Pour le Gouvernement
de la République française :

Christine Lagarde
Ministre déléguée
au commerce extérieur

Pour le Gouvernement
de la République de Turquie :

Kürsat Tüzmen
Ministre
du commerce extérieur

P R O T O C O L E

Lors de la signature de l’accord ce même jour entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Turquie sur l’encouragement et la protection réciproques des investissements, les Parties contractantes sont également convenues des dispositions suivantes qui font partie intégrante de l’accord :

En ce qui concerne l’article 5 :

Les dispositions des alinéas précédents du présent article ne s’opposent pas à l’exercice de bonne foi, par une Partie contractante, de ses obligations internationales ainsi que de ses droits et obligations au titre de sa participation ou de son association à une zone de libre échange, une union douanière, un marché commun, une union économique et monétaire ou toute autre forme de coopération ou d’intégration régionale.

En ce qui concerne l’article 8 :

Conformément à la déclaration soumise par la République turque au Centre international pour le règlement des différends relatifs aux investissements (CIRDI) le 3 mars 1989, relativement à l’article 25 (4) de la Convention pour le règlement des différends relatifs aux investissements entre États et ressortissants d’autres États :

a) les différends découlant des activités d’investissement direct, qui ont effectivement commencé et qui ont reçu, si besoin est, la permission nécessaire, conformément à la législation de la République de Turquie sur les capitaux étrangers, seront soumis à la compétence du Centre (CIRDI) ;

b) les différends relatifs aux droits de propriété et aux droits réels sur les biens immobiliers sont entièrement de la compétence des tribunaux turcs et ne seront pas soumis, pour cette raison, au Centre (CIRDI) ou à un autre mécanisme international de règlement des différends.

Christine Lagarde
Pour le Gouvernement
de la République française 

Kürsat Tüzmen
Pour le Gouvernement
de la République de Turquie 


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