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N° 1731

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 10 juin 2009.

PROJET DE LOI

autorisant la ratification de la convention
sur les
armes à sous-munitions,

(Renvoyé à la commission des affaires étrangères, à défaut de constitution
d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

PRÉSENTÉ

au nom de M. François FILLON,

Premier ministre,

par M. Bernard KOUCHNER,
ministre des affaires étrangères et européennes
.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

I. – Le contexte de la négociation

À la suite notamment de l’émotion suscitée par l’utilisation massive d’armes à sous-munitions au Liban à l’été 2006, un groupe de pays a souhaité conduire rapidement des négociations en s’inspirant du processus qui a conduit à l’adoption de la convention d’Ottawa sur l’interdiction des mines anti-personnel. Un mouvement d’interdiction des armes à sous-munitions a ainsi été lancé à Oslo les 22 et 23 février 2007, à l’initiative de la Norvège. En souscrivant à la déclaration d’Oslo, en février 2007, quarante-six pays, dont la France, s’étaient engagés à conclure en 2008 un « instrument juridiquement contraignant qui » :

– interdirait « l’utilisation, la production, le transfert et le stockage des armes à sous-munitions qui causent des dommages inacceptables aux populations civiles » ;

– définirait un cadre de coopération et d’assistance aux victimes.

D’une façon générale, si l’utilité militaire des sous-munitions était avérée dès la Seconde Guerre mondiale, pour arrêter une division blindée, détruire une force mécanisée ou des concentrations logistiques sur les arrières de l’ennemi, il a été estimé qu’il devait être aujourd’hui possible d’interdire celles de ces armes dont l’impact humanitaire peut être considéré comme excessif au sens du droit international humanitaire. Elles peuvent être remplacées par d’autres armes plus modernes qui ne présentent pas ces risques humanitaires. Le principal risque vient en effet des sous-munitions non explosées, qui posent un grave danger aux populations civiles pendant et après le conflit.

La conférence de Dublin (19-30 mai 2008), qui a réuni cent onze pays participant à la négociation, vingt et un États en qualité d’observateurs et plus d’une centaine de représentants d’organisations internationales et d’organisations non gouvernementale (ONG), est parvenue à un consensus sur un traité interdisant toutes les armes à sous-munitions causant des dommages inacceptables. La présente convention prévoit des avancées importantes en matière de dépollution et d’assistance aux victimes. Par ailleurs elle n’interdit pas aux États parties de participer à des coopérations ou des opérations militaires conjointes avec des États non parties qui pourraient être engagés dans des activités prohibées par la convention.

Vice-présidente de la conférence de Dublin, la France n’a ménagé aucun effort pour parvenir à cet accord international, qui consacre notre détermination à en finir avec le drame humanitaire des armes à sous-munitions. Elle a joué un rôle de facilitateur entre pays affectés et États possesseurs, pays industrialisés et pays en développement, gouvernements et ONG, pour que ce traité soit le plus efficace possible sur le plan humanitaire. Sa contribution a été saluée par les initiateurs du processus d’Oslo, Norvège et Irlande, ainsi que par la « coalition contre les armes à sous-munitions », qui rassemble les ONG.

Réunis à Oslo les 3 et 4 décembre 2008, quatre-vingt-quatorze pays ont signé cette convention, à l’exception notable des États-Unis, de la Russie, de la Chine, de l’Inde, du Pakistan et d’Israël. La République démocratique du Congo est devenue, le 18 mars 2009, le 96e pays signataire.

La convention sur les armes à sous-munitions, dite « convention d’Oslo » entrera en vigueur six mois après le dépôt du 30e instrument de ratification.

II. – Les principales stipulations de la convention d’Oslo

La convention d’Oslo est un instrument international interdisant toutes les armes à sous-munitions définies comme telles, causant des dommages inacceptables. Elle prévoit des avancées importantes en matière de dépollution et d’assistance aux victimes.

Aux termes de la convention, la « sous-munition » est définie comme une munition classique conçue pour disperser ou libérer des sous-munitions explosives dont chacune pèse moins de 20 kilogrammes, et comprenant de telles sous-munitions explosives (article 2).

La convention prévoit :

– l’interdiction de l’emploi, de la production, du transfert et du stockage des armes à sous-munitions définies à l’article 2, ainsi que l’interdiction d’assister, d’encourager ou d’inciter quiconque à s’engager dans une activité interdite par la convention (article 1er).

– la dépollution des zones contaminées dans un délai de dix ans, éventuellement renouvelable. Il est à noter que la France n’est pas affectée (article 4).

– la destruction du stock d’armes à sous-munitions interdites dans un délai de huit ans (renouvelable) (article 3). Actuellement, la France ne dispose pas de capacités industrielles adéquates, elle devra donc soit les développer soit passer des marchés à l’étranger.

La possibilité de conserver des armes à sous-munitions prohibées à des fins d’expertise et d’entraînement. Une étude est en cours dans les armées françaises pour estimer ce besoin.

L’établissement d’un cadre de coopération et d’assistance qui assure des mesures adéquates de soin et de réhabilitation aux survivants et à leurs communautés (articles 5 et 6).

L’établissement de mesures de transparence par la rédaction d’un rapport annuel transmis au secrétaire général des Nations unies (article 7).

La préservation de l’interopérabilité avec des États non parties menant des activités prohibées. Les modalités d’application de cette disposition sont en cours d’étude (article 21).

III. – L’intérêt de la « convention d’Oslo » pour la France

La convention d’Oslo est une avancée pour le droit international humanitaire et le désarmement. Avec l’adoption du protocole V à la convention sur l’interdiction ou la limitation de l’emploi de certaines armes classiques (CCAC) relatif aux restes explosifs de guerre en 2003, la convention d’Oslo constitue une des étapes majeures de la formation du droit international humanitaire depuis l’adoption de la convention d’Ottawa sur l’interdiction totale des mines anti-personnel en 1997.

Jusqu’à la convention d’Oslo, aucun instrument juridique international contraignant n’interdisait les armes à sous-munitions. En effet, elles n’entrent pas dans le champ d’application et de définition de la convention d’Ottawa précitée car, contrairement aux mines, elles ne sont pas conçues pour exploser du fait de la présence, de la proximité ou du contact d’une personne mais conçues pour exploser avant, au moment de l’impact ou immédiatement après l’impact.

La signature de la convention d’Oslo par une centaine de pays fait désormais de cet instrument la norme humanitaire de référence s’agissant de l’interdiction des armes à sous-munitions. À ce titre, c’est un succès pour la France qui s’est engagée activement depuis deux ans pour qu’il soit mis fin à ce type d’armes.

La France n’a pas utilisé d’arme à sous-munitions depuis 1991 et a cessé d’en fabriquer en 2002. Au cours des négociations, l’annonce du retrait immédiat de 90 % de nos stocks de sous-munitions, au milieu de la conférence, avait lancé une dynamique qui a été suivie par le Royaume-Uni et l’Allemagne. En effet, avant même l’entrée en vigueur de la convention, la France a décidé de retirer du service opérationnel la totalité de ses armes désormais interdites par cette convention : la roquette M26 et l’obus de 155 mm à grenades (OGR).

Telles sont les principales observations qu’appelle la convention sur les armes à sous-munitions, signée à Oslo le 3 décembre 2008 qui, comportant des dispositions de nature législative, est soumise au Parlement, en vertu de l’article 53 de la Constitution.


PROJET DE LOI

Le Premier ministre,

Sur le rapport du ministre des affaires étrangères et européennes,

Vu l’article 39 de la Constitution,

Décrète :

Le présent projet de loi autorisant la ratification de la convention sur les armes à sous-munitions, délibéré en conseil des ministres après avis du Conseil d’État, sera présenté à l’Assemblée nationale par le ministre des affaires étrangères et européennes, qui sera chargé d’en exposer les motifs et d’en soutenir la discussion.

Article unique

Est autorisée la ratification de la convention sur les armes à sous-munitions, signée à Oslo le 3 décembre 2008, et dont le texte est annexé à la présente loi.

Fait à Paris, le 10 juin 2009.

Signé : François FILLON

Par le Premier ministre :
Le ministre
des affaires étrangères et européennes,


Signé :
Bernard KOUCHNER

Voir la convention et l’étude d’impact au format pdf.


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