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N° 1777

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 24 juin 2009.

PROJET DE LOI

autorisant la ratification de la convention
relative aux
droits des personnes handicapées,

(Renvoyé à la commission des affaires étrangères, à défaut de constitution
d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

PRÉSENTÉ

au nom de M. François FILLON,

Premier ministre,

par M. Bernard KOUCHNER,
ministre des affaires étrangères et européennes
.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Bien que la revendication d’une convention touchant spécifiquement aux droits des personnes handicapées remonte au début des années 1980, la rédaction de cette convention n’a commencé qu’en 2001, lorsque l’Assemblée générale des Nations unies a chargé un comité d’examiner l’opportunité d’une telle convention. La convention et le protocole sont le fruit de négociations difficiles, mais ne représentent pas moins un grand succès pour les Nations unies. La France a signé la convention le 30 mars 2007 et son protocole facultatif relatif au comité des droits des personnes handicapées le 23 septembre 2008. Celle-ci est entrée en vigueur le 3 mai 2008, suite à sa ratification par vingt États.

Les questions liées au handicap revêtent une importance particulière et font l’objet d’un engagement politique plusieurs fois manifesté au plus haut niveau. Les organisations non gouvernementales ont été très impliquées dans la négociation de cette convention, et seront d’autant plus vigilantes lors de sa ratification.

L’objectif de la convention est d’assurer aux personnes handicapées la jouissance effective des droits déjà reconnus en droit international. La convention réaffirme ces droits encore trop peu respectés à l’endroit des personnes handicapées, mais sans en créer de nouveaux spécifiquement pour ces derniers. Il s’agit en outre de préciser ce que ces droits impliquent pour les personnes handicapées. La convention témoigne d’une prise de conscience collective à l’échelle internationale confortant ainsi les orientations nouvelles voulues par la France et prévues par la loi n° 2005-102 du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées dans le sens d’une véritable participation des personnes handicapées à la vie politique, économique, sociale et culturelle.

Le préambule de la convention reconnaît que malgré les instruments internationaux et autres engagements actuellement en vigueur, les personnes handicapées continuent d’être victimes de violation de leurs droits, et ce partout dans le monde. Les Nations unies recensent 650 millions de personnes handicapées à travers le monde, soit environ 10 % de la population mondiale. Celles-ci font partie des personnes les plus marginalisées. Ainsi, on estime que 20 % des personnes les plus pauvres au monde sont handicapées. 80 % des personnes handicapées vivent dans les pays en développement. Dans ces pays, 98 % des enfants handicapés ne vont pas à l’école et le taux d’alphabétisation des personnes handicapés ne dépasse pas les 3 %. Nombre de ces pays ne possèdent pas à ce jour de dispositions légales aussi avancées que la convention en matière de promotion et de protection des droits des personnes handicapées. Leur accession à la convention les obligera donc à adopter des mesures législatives pour mettre leur droit interne en conformité avec la convention, ce qui se traduira par une amélioration de la situation des personnes handicapées dans ces pays.

En France, la Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité (HALDE) a été saisie de 1 177 réclamations pour discrimination en raison du handicap et de l’état de santé au troisième trimestre 2007. Le handicap est ainsi le deuxième motif de discrimination après l’origine. Près de la moitié de ces discriminations concernent l’emploi, et près de 40 % l’accès aux biens et services. Il convient de noter que le protocole précité accorde aux personnes handicapées la possibilité de soumettre des communications individuelles sur le non respect supposé par un État de certaines dispositions de la convention à un comité international de suivi. La France accepte déjà cette « quasi-justiciabilité » en ce qui concerne les droits civils et politiques, et soutient également ce principe pour les droits économiques, sociaux et culturels.

***

Le texte de la convention reprend les avancées de la loi française du 11 février 2005 précitée. Il reconnaît le concept évolutif du handicap, qui ne se réduit pas aux déficiences et incapacités, et prennent en compte le désavantage social qui résulte de l’environnement social, matériel, humain et technique dans lequel les personnes handicapées évoluent. De même, la convention adopte une définition large du handicap, incluant non seulement l’incapacité des personnes mais aussi les obstacles que ceux-ci rencontrent dans leur interaction avec la société.

La convention qui ne crée pas de nouveaux droits spécifiques aux personnes handicapées réaffirme ceux déjà établis en droit international des droits de l’Homme, et en particulier : le droit à la vie (article 10), le droit à l’accès à la justice (article 13), le droit à la liberté et à la sécurité de la personne (article 14), le droit de ne pas être soumis à la torture ni à des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (article 15), le droit de circuler librement (article 18), la liberté d’expression et d’opinion et le droit à l’information (article 21), le droit à l’éducation (article 24), le droit à la santé (article 25), le droit au travail (article 27), le droit à un niveau de vie adéquat (article 28), le droit à la participation à la vie politique (article 29).

Bien que le terme de discrimination n’ait pas été retenu dans le titre de la convention, le principe de non-discrimination tient une place centrale au sein de cette convention : présent tout au long du texte, il figure expressément parmi les principes généraux énoncés à l’article 3 et fait l’objet de l’article 5.

L’accent est mis sur la garantie effective des droits de l’Homme pour toutes les personnes handicapées, « sur la base de l’égalité avec les autres », terme qui est repris dans chaque article de la convention relatif à un droit en particulier.

La convention étend les obligations des États Parties, qui doivent prendre « toutes les mesures appropriées pour faire en sorte que des aménagements raisonnables soient apportés » (article 5-3) dans des domaines aussi variés que la justice, l’accès à l’information, l’éducation ou encore la santé. La plupart de ces obligations sont déjà garanties en droit interne, la France s’étant dotée, par sa loi du 11 février 2005 précitée, d’un nouvel arsenal législatif de protection des personnes handicapées.

Il convient de noter que la convention stipule également que les États Parties « s’engagent à (…) prendre en compte la protection et la promotion des droits de l’Homme des personnes handicapées dans toutes les politiques » (article 4-1-c). Celle-ci inclut donc notamment la politique de coopération de la France et des autres pays industrialisés avec les pays en développement. La France aura donc l’obligation de prendre en compte le handicap dans sa politique de coopération.

En conclusion, cette convention complète opportunément l’arsenal juridique international en matière de droits de l’Homme. De ce fait et compte tenu de la place prioritaire qu’occupent les questions de handicap en France, la France s’est engagée à ratifier cette convention dans les meilleurs délais.

***

Telles sont les principales observations qu’appelle la ratification de la convention internationale relative aux droits des personnes handicapées qui, comportant des dispositions de nature législative, est soumise au Parlement en vertu de l’article 53 de la Constitution.


PROJET DE LOI

Le Premier ministre,

Sur le rapport du ministre des affaires étrangères et européennes,

Vu l’article 39 de la Constitution,

Décrète :

Le présent projet de loi autorisant la ratification de la convention relative aux droits des personnes handicapées, délibéré en conseil des ministres après avis du Conseil d’État, sera présenté à l’Assemblée nationale par le ministre des affaires étrangères et européennes, qui sera chargé d’en exposer les motifs et d’en soutenir la discussion.

Article unique

Est autorisée la ratification de la convention relative aux droits des personnes handicapées (ensemble un protocole), signée à New York le 30 mars 2007, et dont le texte est annexé à la présente loi.

Fait à Paris, le 24 juin 2009.

Signé : François FILLON

Par le Premier ministre :
Le ministre
des affaires étrangères et européennes,


Signé :
Bernard KOUCHNER

Voir la convention et l’étude d’impact au format pdf


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