Accueil > Documents parlementaires > Projets de loi > Etudes d'impact
Version PDF
Retour vers le dossier législatif

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

     

Ministère des affaires étrangères

et européennes

     
     
   

PROJET DE LOI

autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française

et le Gouvernement de la République de l’Inde relatif à la répartition des droits

de propriété intellectuelle dans les accords de développement

des utilisations pacifiques de l’énergie nucléaire

NOR : MAEJ1120046L/Bleue-1

-----

ETUDE D’IMPACT

I. - Situation de référence et objectifs de l’accord ou convention

Le 30 septembre 2008, la France a signé avec l’Inde un Accord cadre de coopération nucléaire1. Cet accord cadre prévoit la signature de protocoles d’accords sur la responsabilité civile, les informations confidentielles et la propriété intellectuelle.

L’Accord cadre prévoit que les parties coopèrent dans le domaine de l’utilisation de l’énergie nucléaire à des fins pacifiques et non explosives et que la coopération :

- peut prendre notamment les formes suivantes (article Ier): transfert de technologies à l’échelle industrielle ou commerciale, échange et formation de personnel scientifique et technique, échange d’informations scientifiques et techniques, participation de personnel scientifique et technique de l’une des Parties à des activités de recherche et de développement menées par l’autre partie, conduite en commun d’activités de recherche et ingénierie, etc.

- est mise en œuvre soit par des accords spécifiques pour préciser les programmes scientifiques et techniques et les modalités des échanges scientifiques et techniques, soit par des protocoles d’accords ou contrats pour les réalisations industrielles, la fourniture de matières, matières nucléaires, services, équipements, la mise en place d’installations et les questions de localisation et de transferts de technologies.

Dans ce contexte, l’accord relatif à la répartition des droits de propriété intellectuelle doit permettre d’encadrer (en apportant des garde fous mais sans préjuger des négociations futures entre les acteurs du nucléaire civil) la répartition des droits de propriété intellectuelle dans les futurs accords spécifiques, protocoles d’accords ou contrats, et, dans la mesure du possible, régler les défis posés par la loi indienne en matière de propriété intellectuelle.

La loi indienne, au regard de la combinaison de la section 20 de l'Atomic Energy Act de 1962 et du Chapitre II section IV de l'Indian Patent Act de 1970, interdit la délivrance en Inde de brevets portant sur l'énergié nucléaire.

En effet, l'Atomic Energy Act énumère dans la section 20.1 les sujets qui sont exclus de la brevetabilité du fait de leur relation avec l'énergie nucléaire. Quant au Chapitre II.IV de l'Indian Patent Act, il dispose qu'aucun brevet ne peut être délivré pour une invention traitant d'énergie nucléaire et tombant dans la section 20.1 de l'Indian Atomic Energy Act.

 

En outre, l'obtention préalable du gouvernement fédéral est requise pour pouvoir déposer à l'étranger les résultats issus de recherches effectuées en Inde en matière nucléaire, obligation précisée section 20.5 de l'Indian Atomic Energy Act.

 

Ces dispositions de la loi indienne résultent de modifications apportées en 2005 pour répondre au refus de levée d’embargo sur certaines matières. A ce stade, l'Inde refuse de modifier les dispositions de la loi sur la propriété intellectuelle tant que l'embargo n'est pas levé.

Dans ce contexte, il fallait distinguer entre l’objectif idéal qui consistait à obtenir une modification ou dérogation de la loi indienne pour pouvoir déposer un brevet sur le nucléaire en Inde (très improbable de pouvoir obtenir cette modification via un traité) et l’objectif intermédiaire, acceptable pour les acteurs français du nucléaire civil, qui visait à obtenir l’engagement a priori du gouvernement indien qu’il ne s’opposera pas à la protection à l’étranger des résultats de recherche issus d’une coopération franco-indienne. Ce qui a amené à la rédaction du dernier alinéa de l’article 2 rédigé comme suit :

« (…) A cet effet, les Parties s’engagent à ne pas s’opposer à la recherche, par les Participants, d’une protection des Résultats dans les Etats autorisant une telle protection. »

II. - Conséquences estimées de la mise en œuvre de l’accord ou convention

- Conséquences juridiques et administratives

Le présent accord s’insère dans le cadre juridique bilatéral France-Inde sur le nucléaire civil conformément à l’article VII de l’Accord cadre (cf. supra) et à l’accord relatif à la protection de la confidentialité des données et informations techniques concernant la coopération en matière d’utilisations pacifiques de l’énergie nucléaire dans le cadre de leur coopération nucléaire civile signé à New Delhi le 6 décembre 20102.

Le présent accord vise à faciliter la négociation par les acteurs français du nucléaire civil d’accords spécifiques, protocoles d’accords ou contrats dans les meilleures conditions. Il encadre la relation contractuelle entre les acteurs publics ou privés qui seront amenées à conclure des accords spécifiques, des protocoles d’accord ou contrats. En posant les grands principes de la protection, répartition et utilisation de la propriété intellectuelle l’accord sert de trame aux négociations spécifiques.

Cet accord n’appelle pas de modification de la législation française, les conditions d’attribution des droits de propriété intellectuelle sont inchangées. En effet, les articles L. 611-1 et suivants, qui ne font pas de distinction en fonction du domaine de l’invention (selon le principe de neutralité technologique reconnu en France), s’appliquent.

Respectueux du droit international existant, cet accord bilatéral est en tous points conforme aux dispositions des accords multilatéraux en matière de propriété intellectuelle, notamment la Convention de Stockholm du 14 juillet 1967 établissant l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI)3 et l’Accord sur les aspects de propriété intellectuelle relatifs au commerce (ADPIC) de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) signé le 15 avril 19944 et entré en vigueur le 1er janvier 1995, auxquels la France et l’Inde sont parties.

En outre, il n’existe pas d’accord de propriété intellectuelle européen dans le cadre du nucléaire civil. Un accord de libre échange UE-Inde, contenant des dispositions générales sur la propriété intellectuelle, est en revanche en cours de négociation.

- Conséquences économiques et financières

Bien qu’il soit difficile de prévoir aujourd’hui les répercussions de cet accord sur les accords spécifiques, protocoles d’accords ou contrats qui seront négociés par les acteurs français du nucléaire civil, celui-ci doit contribuer à une meilleure valorisation de la propriété intellectuelle préexistante (Connaissances Propres dans l’accord) et la propriété intellectuelle qui résultera de la coopération avec la partie indienne (Résultats Communs).

Dans la mesure où les acteurs français du nucléaire civil disposent de droits préexistants, ils doivent pouvoir négocier leur utilisation dans le cadre de la coopération, voire la monnayer le cas échéant.

Ils doivent également pouvoir obtenir tout ou partie des droits attachés aux Résultats Communs, à mesure de leur contribution à la coopération. La rédaction de l’article 2 doit en effet permettre que le gouvernement indien ne s’oppose pas à la protection à l’étranger des résultats de recherche issus d’une coopération franco-indienne.

III. - Historique des négociations

Après la signature de l’Accord cadre le 30 septembre 2008, des négociations ont été engagées avec le Gouvernement de la République d’Inde en septembre 2009. Le texte soumis aux autorités indiennes avait été préparé en concertation avec les ministères concernés et les acteurs français du nucléaire civil, qui ont été consultés tout au long de la négociation.

Suite à la proposition de la France envoyée à la partie indienne en septembre 2009, le texte a entièrement été réécrit pas la partie indienne et communiqué en retour en janvier 2010. Plusieurs échanges de courriels ont suivi en mai, juin et septembre 2010. L’intervention du Conseiller nucléaire de l’Ambassade de France à New Dehli a été nécessaire pour finaliser le texte de l’accord qui a finalement été présenté à la signature le 6 décembre 2010 à New Dehli.

IV. - Etat des signatures et ratifications

L’Accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République d’Inde a été signé, par le Ministre des Affaires Etrangères le 6 décembre 2010 à l’occasion de la visite présidentielle française en Inde.

Le Gouvernement de la République d’Inde n’est pas tenu par une procédure parlementaire et est donc dans l’attente de nos instruments.

1 Décret n° 2011-147 du 3 février 2011 portant publication de l'accord de coopération entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de l'Inde pour le développement des utilisations pacifiques de l'énergie nucléaire (ensemble deux annexes), signé à Paris le 30 septembre 2008.

2 Décret n° 2011-427 du 19 avril 2011 portant publication de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de l'Inde sur la protection du caractère confidentiel des données techniques et des informations relatives à la coopération en matière d'utilisations pacifiques de l'énergie nucléaire, signé à New Delhi le 6 décembre 2010.

3 Décret n°74-976 du 20 novembre 1974 portant publication de la convention instituant l'Organisation mondiale de la propriété intellectuelle, signée à Stockholm le 14-07-1967.

4 Décret no 95-1242 du 24 novembre 1995 portant publication de l'accord de Marrakech instituant l'Organisation mondiale du commerce (ensemble quatre annexes), signé à Marrakech le 15 avril 1994, annexe 1 C.


© Assemblée nationale