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Amendements  sur le projet ou la proposition

N° 1897

_____

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 2 septembre 2009.

PROPOSITION DE LOI

relative à la suppression du crédit revolving,
à l’encadrement des crédits à la consommation
et à la protection des consommateurs par l’action de groupe,

(Renvoyée à la commission des affaires économiques, à défaut de constitution
d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par Mesdames et Messieurs

Jean-Marc AYRAULT, Alain NÉRI, François BROTTES, Jean GAUBERT, Arnaud MONTEBOURG, Alain VIDALIES, Gérard CHARASSE, Marc GOUA, Olivier DUSSOPT, Marylise LEBRANCHU, Annick LE LOCH, Catherine GENISSON, Jean-Louis BIANCO, Christian PAUL, Christophe CARESCHE, Geneviève GAILLARD, Jean-Paul DUPRÉ, William DUMAS, Jean GRELLIER, Michel ISSINDOU, Claude DARCIAUX, Frédéric CUVILLIER, Pascal DEGUILHEM, Jean-Michel CLÉMENT, Martine PINVILLE, Colette LANGLADE, Odile SAUGUES, Philippe TOURTELIER, Laurence DUMONT, Danielle BOUSQUET, Jean-Paul BACQUET, Michel MÉNARD, Martine CARRILLON-COUVREUR, Philippe DURON, Guy DELCOURT, Frédérique MASSAT, Claude BARTOLONE, Bruno LE ROUX, Élisabeth GUIGOU, Christiane TAUBIRA, Tony DREYFUS, Pascal TERRASSE, Joël GIRAUD, Didier MIGAUD, Armand JUNG, Daniel BOISSERIE, Jean-Yves LE DÉAUT, Didier MATHUS, Yves DURAND et les membres du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche (1) et apparentés (2),

députés.

____________________________

(1)  Ce groupe est composé de Mesdames et Messieurs : Patricia Adam, Sylvie Andrieux, Jean-Marc Ayrault, Jean-Paul Bacquet, Dominique Baert, Jean-Pierre Balligand, Gérard Bapt, Claude Bartolone, Jacques Bascou, Christian Bataille, Delphine Batho, Jean-Louis Bianco, Gisèle Biémouret, Serge Blisko, Patrick Bloche, Daniel Boisserie, Maxime Bono, Jean-Michel Boucheron, Marie-Odile Bouillé, Christophe Bouillon, Monique Boulestin, Pierre Bourguignon, Danielle Bousquet, François Brottes, Alain Cacheux, Jérôme Cahuzac, Jean-Christophe Cambadélis, Thierry Carcenac, Christophe Caresche, Martine Carrillon-Couvreur, Laurent Cathala, Bernard Cazeneuve, Jean-Paul Chanteguet, Alain Claeys, Jean-Michel Clément, Marie-Françoise Clergeau, Gilles Cocquempot, Pierre Cohen, Catherine Coutelle, Pascale Crozon, Frédéric Cuvillier, Claude Darciaux, Pascal Deguilhem, Michèle Delaunay, Guy Delcourt, Michel Delebarre, François Deluga, Bernard Derosier, Michel Destot, Julien Dray, Tony Dreyfus, Jean-Pierre Dufau, William Dumas, Jean-Louis Dumont, Laurence Dumont, Jean-Paul Dupré, Yves Durand, Odette Duriez, Philippe Duron, Olivier Dussopt, Christian Eckert, Henri Emmanuelli, Corinne Erhel, Laurent Fabius, Albert Facon, Martine Faure, Hervé Féron, Aurélie Filippetti, Geneviève Fioraso, Pierre Forgues, Valérie Fourneyron, Michel Françaix, Jean-Claude Fruteau, Jean-Louis Gagnaire, Geneviève Gaillard, Guillaume Garot, Jean Gaubert, Catherine Génisson, Jean-Patrick Gille, Jean Glavany, Daniel Goldberg, Gaëtan Gorce, Pascale Got, Marc Goua, Jean Grellier, Élisabeth Guigou, David Habib, Danièle Hoffman-Rispal, François Hollande, Sandrine Hurel, Monique Iborra, Jean-Louis Idiart, Françoise Imbert, Michel Issindou, Éric Jalton, Serge Janquin, Henri Jibrayel, Régis Juanico, Armand Jung, Marietta Karamanli, Jean-Pierre Kucheida, Conchita Lacuey, Jérôme Lambert, François Lamy, Jack Lang, Colette Langlade, Jean Launay, Jean-Yves Le Bouillonnec, Marylise Lebranchu, Patrick Lebreton, Gilbert Le Bris, Jean-Yves Le Déaut, Michel Lefait, Jean-Marie Le Guen, Annick Le Loch, Patrick Lemasle, Catherine Lemorton, Annick Lepetit, Bruno Le Roux, Jean-Claude Leroy, Bernard Lesterlin, Michel Liebgott, Martine Lignières-Cassou, François Loncle, Victorin Lurel, Jean Mallot, Louis-Joseph Manscour, Jacqueline Maquet, Marie-Lou Marcel, Jean-René Marsac, Philippe Martin, Martine Martinel, Frédérique Massat, Gilbert Mathon, Didier Mathus, Sandrine Mazetier, Michel Ménard, Kléber Mesquida, Jean Michel, Didier Migaud, Arnaud Montebourg, Pierre Moscovici, Pierre-Alain Muet, Philippe Nauche, Henri Nayrou, Alain Néri, Marie-Renée Oget, Françoise Olivier-Coupeau, Michel Pajon, George Pau-Langevin, Christian Paul, Germinal Peiro, Jean-Luc Pérat, Jean-Claude Perez, Marie-Françoise Pérol-Dumont, Philippe Plisson, François Pupponi, Catherine Quéré, Jean-Jack Queyranne, Dominique Raimbourg, Marie-Line Reynaud, Alain Rodet, Bernard Roman, René Rouquet, Alain Rousset, Patrick Roy, Michel Sainte-Marie, Michel Sapin, Odile Saugues, Christophe Sirugue, Pascal Terrasse, Jean-Louis Touraine, Marisol Touraine, Philippe Tourtelier, Jean-Jacques Urvoas, Daniel Vaillant, Jacques Valax, André Vallini, Manuel Valls, Michel Vauzelle, Michel Vergnier, André Vézinhet, Alain Vidalies, Jean-Michel Villaumé, Jean-Claude Viollet et Philippe Vuilque.

(2)  Chantal Berthelot, Guy Chambefort, Gérard Charasse, René Dosière, Paul Giacobbi, Annick Girardin, Joël Giraud, Christian Hutin, Serge Letchimy, Albert Likuvalu, Jeanny Marc, Dominique Orliac, Sylvia Pinel, Martine Pinville, Simon Renucci, Chantal Robin-Rodrigo, Marcel Rogemont et Christiane Taubira.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Les consommateurs français souffrent de nombreuses lacunes de notre législation. Leur protection n’est pas toujours garantie dans leurs relations avec leurs interlocuteurs financiers et l’insuffisance des possibilités d’agir collectivement dans les affaires de consommation est patente.

Connus depuis longtemps, ces défauts de notre droit n’ont pas fait l’objet d’une révision suffisante pour les résoudre. Les pressions de lobbies financiers ou commerciaux ont contribué à endiguer tout volontarisme sur ces sujets.

La crise mondiale que nous connaissons depuis plus d’un an a toutefois montré de manière éclatante d’une part les dérives des pratiques bancaires, et d’autre part les dérives des grands groupes commerciaux pour accentuer toujours plus les taux de rentabilité de leurs activités au mépris des consommateurs démunis devant la puissance commerciale et juridique de leurs cocontractants.

Les dérives du crédit à la consommation et les dérives des pratiques commerciales d’un trop grand nombre d’entreprises dans leurs relations avec leurs clients sont les deux faces d’un même système, tout entier destiné à engranger les bénéfices au détriment des consommateurs transformés en simples numéros de comptes qu’il faut ponctionner toujours plus.

Il est temps de réformer notre droit et de moraliser ces pratiques. Ce que les chartes de bonne conduite ne parviennent pas à faire, il faut que le législateur le fasse. Nous vous proposons donc d’adopter la présente proposition de loi construite autour de deux titres qui se complètent : la protection et la responsabilisation des consommateurs emprunteurs, et l’amélioration des voies de recours des consommateurs par l’introduction de l’action de groupe dans notre droit.

I – Douze lois ont été adoptées depuis 1989 pour encadrer le crédit à la consommation. Mais la protection du consommateur demeure insuffisante à régler des situations financières de plus en plus complexes.

L’apparition de formes de crédits faciles à contracter et l’évolution du recours à l’endettement sont préoccupantes. En tête des instruments de crédits, le crédit permanent, plus connu sous le nom de crédit revolving, est une forme de crédit consistant à mettre à disposition d’un emprunteur une somme d’argent sur un compte dévolu à ce titre et ouvert auprès de l’établissement qui dispense ce crédit, de façon permanente.

Les premières offres de crédit revolving sont apparues en France en 1965. Le service financier des grands magasins Galeries Lafayette, en partenariat avec CETELEM, l’établissement de crédit, est à son origine. Le système copiait ce qui existait déjà dans les grands magasins aux États-Unis depuis les années 1930. L’objectif était de faciliter les ventes. De mineure à l’origine, cette forme de crédit est désormais devenue très importante en s’adressant d’abord aux classes populaires au revenu annuel moyen compris entre 11 478 et 20 942 euros, qui représentent 41,5 % des crédits renouvelables. Le crédit revolving a rencontré un « succès populaire ». Selon la Banque de France, la part de l’encours de crédit renouvelable dans le total du crédit à la consommation a perdu 6 points entre 1998 et 2007, mais elle demeure à un niveau de 21 %. Actuellement, son encourt est de 1 105 euros par ménage, plaçant la France au troisième rang européen derrière le Royaume-Uni et les Pays-Bas.

Cette forme de crédit agit comme un substitut au maintien du pouvoir d’achat des ménages précarisés et fragilisés, mais avec un taux effectif global énorme qui dégage des marges indécentes pour les acteurs économiques du secteur. En réalité, le crédit revolving s’apparente trop souvent à un crédit « revolver » braqué sur la tempe des plus faibles. L’établissement créancier vise non pas à octroyer une aide au coup par coup, mais bien à maximaliser la rentabilité du client ; ce qui passe par sa fidélisation.

À cette dérive, il convient d’ajouter les conditions actuelles de démarchage et de délivrance de ces crédits, qui confinent à l’abus de faiblesse. Les conseils pressants des vendeurs soumis à l’obligation de vente de crédits par leur hiérarchie visent à orienter le client vers une solution de crédit alors même que le paiement immédiat pourrait être effectué. À l’égard des ménages les plus faibles, les établissements de crédits qui pratiquent cette politique agressive de vente s’apparentent à des marchands de malheur. Comment est-il possible d’accepter la souscription de crédit renouvelable par téléphone, qui méprise toute connaissance interpersonnelle entre le conseiller commercial de l’établissement de crédit et le candidat au crédit ? Dans ce mode de relations téléphoniques, les travaux de la sociologue Hélène Ducourant montrent que « l’octroi du crédit sollicité est déterminé par le score du candidat, statistiquement prédictif de sa capacité de remboursement, score établi automatiquement sur la base des réponses apportées par le candidat à une batterie de questions concernant sa situation socio-démo-économique. » Évidemment, les techniques de vente sont faites pour promouvoir la vente du produit aux taux les plus élevés du marché. Ainsi, le faible temps d’entretien conduit le candidat au crédit à résumer sa propre situation économique et sociale. Il conduit à une analyse insuffisante des besoins réels et des capacités de remboursement de l’emprunteur, qui se trouve piégé dans un système prévu pour durer. Un tel système doit être supprimé. Le crédit revolving doit être interdit pour le bien de tous.

Les questions sociales sont essentielles dans la préhension du phénomène de mal endettement et de surendettement. Le Médiateur de la République le posait le 14 décembre 2006 : le surendettement est la conséquence d’une transformation des rapports sociaux. La cause peut en être trouvée dans « la financiarisation des rapports sociaux ». « Le crédit s’est aussi imposé comme un moyen banal pour financer un projet ou pour faire face à un besoin ponctuel et imprévu de liquidité. Alors que s’endetter était un signe de déchéance sociale, le système encourage maintenant l’endettement : à consommation de masse, crédit de masse ! »

Une telle situation est d’autant plus délicate que ces crédits permettent au consommateur de financer les achats de son choix. Ce ne sont plus seulement les achats exceptionnels pour lesquels le recours au crédit est opéré, mais l’ensemble des dépenses de la vie courante. Vivre à crédit signifie aussi désormais concrètement s’endetter à un taux d’intérêt de plus de 20 % pour se nourrir.

À ce titre, l’endettement pour les produits de consommation est d’abord la conséquence de l’augmentation du coût de la vie et des difficultés à consommer. Les pressions à la consommation désormais érigée en acte de citoyenneté active par des pouvoirs publics anxieux d’une baisse de la consommation, principal moteur de l’économie française, poussent chacun à vouloir toujours plus pour se conformer à la norme sociale.

L’acte de crédit est donc devenu un acte quotidien. Toutes les entreprises se lancent dans la vente de crédit et le démarchage à domicile, dans un mélange des genres inquiétant. Ainsi, les usagers du service public de l’énergie sont-ils par exemple destinataires de courriers vantant « le confort des solutions de la banque Solfea, partenaire de GDF-SUEZ », « quel que soit votre projet », qui fait figurer en très gros caractère un « TEG annuel fixe à partir de 4,90 % » (le taux 4,90 % étant en caractères surdimensionnés, le 4 étant plus grand que les chiffres après la virgule) mais dont le renvoi en bas de page et petits caractères avance un TEG annuel de 4,90 % à 9,50 %. Cette offre est bien entendu accompagnée d’une « Offre préalable de prêt personnel ». Ne reste plus à l’usager du service public de l’énergie qu’à appeler un numéro 0810 pour s’informer…

Un établissement de crédit, COFIDIS, est plus inventif encore. Dans un courrier nominatif, adressé à des personnes qui n’ont par ailleurs pas forcément de dossier dans l’établissement, COFIDIS tente d’attirer les clients sans sollicitation initiale desdits clients. Au-delà du caractère immoral des expressions utilisées, qui reviennent à expliquer qu’emprunter à un taux le plus rapproché possible du taux d’usure est « intéressant », la formule relève de pratiques trompeuses au sens de l’article L. 121-1 du code de la consommation :

« Cher Monsieur […],

J’ai déposé « une demande à caractère exceptionnel » vous concernant auprès de ma directrice, Mme Marie-Cécile Rochet. La réponse vient de me parvenir et c’est une bonne nouvelle puisque vous avez la possibilité, dès aujourd’hui, de demander à bénéficier d’une offre particulièrement intéressante.

En effet, Monsieur […] vous pouvez demander maintenant :

La formule libravou

Une réserve de crédit de 500 € à 5 000 €

Avec pendant 2 mois des mensualités à partir de 10 €/mois

[…]

Une demande de premier chèque de virement, au format chèque, est jointe au courrier, avec promesse de créditer le compte « sous 48 heures par virement sur votre compte bancaire ou postal habituel ou par chèque à votre domicile. »

Au verso de cette « offre particulièrement intéressante », en caractères normaux, l’on apprend que le TEG est de « 21,25 % pour un crédit utilisé inférieur à 1 524 euros, 21,05 % au-delà ». Autrement dit, COFIDIS explique qu’il est intéressant pour le client d’emprunter à un taux immédiatement voisin du taux d’usure.

Ce n’est qu’en quatrième page qu’un pensum contractuel est asséné au client, où l’on apprend que l’offre est destinée notamment à « financer, chez les commerçants, acceptant la carte associée à l’utilisation de ce type de crédit, le paiement intégral des biens achetés ou des services rendus » ; à « effectuer des retraits d’argent liquide » ; et à « effectuer des virements à partir de ce compte de crédit. »

De tels procédés sont tout simplement indécents et relèvent de la pratique trompeuse, quel que soit le type de crédit vendu. À ce titre, le législateur a le devoir de revoir les possibilités de publicité et de démarchage pour le crédit en les encadrant d’une manière drastique.

Et il faut aller plus loin que la suppression du crédit revolving et l’encadrement de la publicité. Le 14 décembre 2006, le Médiateur de la République interpellait le Gouvernement sur l’urgence de lutter contre le mal endettement. Parlant de « violence » anéantissant « socialement un individu » et qui « provoque l’isolement, la marginalisation », le Médiateur abordait l’urgence d’un traitement adéquat de cette question. La question de la pertinence des fichiers existants doit être posée.

Pour le Médiateur de la République, « le fichier négatif est insuffisant. Seules les personnes en rupture de paiement sont enregistrées. Le prêteur ne dispose donc pas de renseignements au sujet des personnes qui sont à la limite de leur capacité de remboursement, mais qui ne sont pas encore en retard de paiement. Ces emprunteurs ont souvent besoin d’un crédit complémentaire qui risque de déclencher la catastrophe. » De fait, le Gouvernement a lancé le 29 septembre 2008 une réflexion pour réformer le fichier national des incidents de remboursement des crédits aux particuliers (FICP). Un plan en trois points a été avancé. Il s’agit de réduire les délais d’inscription au FICP, créer un nouveau droit d’accès au FICP à distance pour que chacun vérifie son inscription ou non, et accélérer la connaissance des incidents de paiement. Pour le moins, si une réforme est nécessaire, la proposition gouvernementale est très sous-dimensionnée, et montre une cécité devant les enjeux véritables de la question.

La création d’un fichier positif d’endettement apparaît nécessaire. Afin d’éviter que des établissements de crédits puissent s’en servir pour maximiser le travail de prospection de leurs démarcheurs, il convient de le rendre indisponible aux établissements de crédit, de le placer sous la seule responsabilité de la Banque de France qui ne pourrait délivrer l’information qu’à l’emprunteur. L’intérêt de cette démarche serait de permettre une réelle traçabilité de l’endettement pour les débiteurs, à charge pour eux d’en informer les créanciers en cas de souscription de crédit. Il s’agit d’un instrument de prévention susceptible de lutter contre le mal endettement, et donc d’assainir le marché des crédits. L’actualité économique nous montre en effet qu’il convient de poser des garde-fous à l’endettement inconsidéré, qui a conduit aux « subprimes », et à la crise économique dramatique que nous vivons. Le fichier positif serait un instrument de responsabilisation des établissements de crédits et des emprunteurs.

En 1998, un rapport sénatorial posait la question de la responsabilisation des prêteurs : « le groupe de travail a pu constater la multitude de prêts contenus dans certains dossiers déposés auprès des commissions de surendettement. Il s’est demandé à chaque fois si les derniers prêteurs n’avaient pas manifestement fait preuve d’une trop grande légèreté dans l’octroi des crédits, attitude méritant d’être sanctionnée. Or, lorsque cette question est évoquée devant ces établissements, ils se retranchent toujours derrière le caractère déclaratif des informations fournies par les demandeurs de crédit pour nier leur responsabilité. »

Certes, l’article 12 de la loi Neiertz prévoyait que les prêteurs peuvent être traités différemment au regard des précautions dont ils ont entouré l’octroi du crédit. Mais l’expérience montre que la preuve d’une connaissance exacte de la situation de l’emprunteur par le prêteur qui aurait pris un risque inconsidéré méritant sanction est très difficile à établir.

Le rapport sénatorial de 1998 plaidait en définitive « pour une réflexion au sein de la profession bancaire sur l’adoption de règles déontologiques applicables à l’octroi du crédit ». Cette démarche de « soft law » n’a pas porté ses fruits. L’autorégulation n’offre pas de solution en la matière, et la loi doit intervenir.

Devant les difficultés vécues par le pays réel, devant les très nombreuses sollicitations dont sont l’objet nos concitoyens pour accroître leur endettement, l’action est urgente. Réguler les crédits à la consommation s’impose. Il s’agit de rééquilibrer les relations entre les consommateurs et les prêteurs, de poser clairement la responsabilité légale des créanciers qui auraient prêté dans des conditions insatisfaisantes.

La proposition de loi que nous vous invitons à adopter vise, dans son Titre premier, à lutter contre le mal endettement, devenu véritable fléau social. Pour ce faire, la représentation nationale doit recourir à des mesures fortes adaptées à l’évolution des pratiques. Ainsi, nous vous engageons à faire œuvre équilibrée de responsabilisation des professionnels du crédit et des clients.

Dans un chapitre Ier, nous proposons l’interdiction des crédits renouvelables (art. 1er), l’augmentation du délai de rétractation en conformité avec la directive 2008/48/CE concernant les contrats de crédits aux consommateurs (art. 2 et 3).

Dans un chapitre II, nous proposons l’abrogation de l’hypothèque rechargeable (art. 4), installé en France en 2007 sur le modèle du prêt hypothécaire anglo-saxon dit « mortgage » qui a amené à force de sophistication, la crise des « subprimes ». Ce montage implique que le bien est en réalité la propriété du créancier puisqu’il constitue pour lui une garantie. Or, la valeur du bien est, dans ce système, directement au fondement du pouvoir d’achat des ménages. Un ralentissement ou retournement du marché immobilier conduit ainsi à une fragilisation plus grande encore des ménages. Le risque d’effet boule de neige sur la « richesse » du pays est réel. Malgré l’onction présidentielle sur ce système, il convient donc de revenir à des instruments classiques de notre droit sans emprunter à des modèles de droit anglo-saxon des instruments dangereux qui ont prouvé leur capacité à plonger le monde dans la crise.

Avec le chapitre III, nous proposons une responsabilisation des cocontractants du crédit. La création d’un fichier national des crédits aux consommateurs (art. 5), qui ne se substitue pas au fichier national des incidents de paiement caractérisés liés aux crédits aux particuliers (FICP) permettra à chacun de connaître précisément sa situation d’endettement, à quelque moment que ce soit. Indisponible aux établissements de crédits et géré exclusivement par la Banque de France, à qui les établissements de crédits adresseront tous leurs contrats, ce fichier sera interrogé par le seul emprunteur, qui pourra ainsi faire sa déclaration préalable au contrat de crédit sur le fondement d’informations fiables (art. 6). Au-delà de ce fichier, les prêteurs engageront leur responsabilité financière pour les prêts accordés sans s’être préalablement informés de la situation du client, en cas de défaillance de ce dernier. Ils ne pourront procéder au recouvrement (art. 7). La commission de surendettement des particuliers vérifiera par ailleurs les conditions dans lesquelles chaque créancier a accordé un prêt. En cas de comportement non conforme du prêteur, elle recommande la suppression des intérêts dus au titre du crédit considéré et peut mettre à la charge de l’établissement des indemnités, au plus égales au capital restant dû (art. 8). Les débiteurs sont aussi responsabilisés. Ainsi, il ne sera plus permis d’opposer à la communauté ou à l’indivision les dettes contractées par l’un des membres sans le consentement expressément accordé de la communauté ou de l’indivision (art. 9). La gestion du FICP doit aussi être revue afin de ne pas handicaper des particuliers à mauvais escient. Une procédure contradictoire est organisée dans un temps court, cinq jours, avant transmission des informations par la banque au dit fichier (art. 10). Enfin, la responsabilisation passe par une modification des modes de rémunération des vendeurs qui sont amenés à proposer des crédits. La part variable de leur rémunération assise sur la vente de crédits, part d’autant plus importante que le vendeur est efficace, doit être interdite (art. 11). Des négociations salariales doivent s’ouvrir pour accorder des salaires décents aux vendeurs sans qu’ils soient soumis à la pression de résultats de vente qui peuvent fragiliser les clients.

Avec les dispositions contenues dans le chapitre IV, nous souhaitons encadrer la publicité. Il s’agit d’interdire la vente de lots promotionnels liés à l’acceptation d’une offre préalable de crédits (art. 12), d’interdire la distribution et l’ouverture de crédits dans le lieu même de vente du bien de consommation, de même que d’interdire cette distribution et ouverture à distance par téléphone comme cela se pratique (art. 13), ou de laisser entendre que la souscription d’un crédit améliorerait la situation financière de l’emprunteur (art. 14) Nous souhaitons aussi que le taux d’usure soit clairement mentionné dans les messages publicitaires (art. 15).

Nous vous proposons en outre, avec le chapitre V, de réviser le taux annuel effectif global (art. 17) et les règles afférentes avec la définition du taux usuraire (art. 18), l’obligation de mentionner clairement ce TEG au consommateur (art. 19 et 21), de réguler le taux variable des contrats de prêt (art. 20).

Le chapitre VI (art. 22, 23, 24) nous permet d’aborder la question de l’exécution du contrat de crédit, et donc de la relation entre le débiteur et le créancier durant la durée de l’endettement.

Enfin, dans le chapitre VII (art. 25, 26, 27), nous adaptons les règles du rachat de crédit aux prescriptions que nous indiquons pour l’ensemble des opérations de crédit.

Le crédit n’est pas un instrument d’enrichissement. Il permet des facilités de vie et ne doit pas être travesti de cette mission pour assouvir l’appât du gain d’établissements financiers. L’adoption de l’ensemble de ces mesures permettra d’assainir un marché devenu trop souvent facteur de misère supplémentaire.

Ces solutions adoptées, les consommateurs doivent en outre voir conforter leurs capacités à agir en justice dans des litiges de masse.

II – L’action de groupe constitue un aboutissement nécessaire de la législation favorable au consommateur commencée en France en 1978. À cette époque, le législateur avait cherché par des moyens impératifs à rééquilibrer les contrats dont les clauses protégeaient abusivement les professionnels.

Trente années plus tard, cette démarche doit être poursuivie car elle laisse trop souvent le citoyen sans moyens ni recours devant les atteintes à ses droits, ou aux règles chargées de le protéger. La République ne peut ainsi délaisser ses citoyens les plus faibles.

L’action de groupe a pour objectif d’organiser le rééquilibrage par la voie judiciaire des rapports entre le faible et le fort. À ce titre, elle constitue un nouvel instrument de régulation du monde économique, qu’il convient de placer parfois devant ses responsabilités. De nombreux pays européens comme l’Angleterre, le Portugal, le Pays de Galles ou la Suède disposent déjà d’une action de groupe qui a fait ses preuves.

L’action de groupe permet ainsi à un ensemble de victimes de comportements fautifs, illégaux ou contraires aux contrats conclus, d’obtenir la juste réparation du préjudice subi.

Le refus de prise en considération du préjudice subi par des milliers, parfois des millions, de victimes des comportements fautifs de professionnels, a pour effet de laisser entre les mains des entreprises le bénéfice de comportements illégaux. L’absence d’accès gratuit au droit ou à la décision judiciaire, le labyrinthe procédural, le coût de la justice, l’hermétisme des règles juridiques, conduisent le particulier ou le citoyen isolé à renoncer à toute action, abandonnant ainsi au professionnel le bénéfice de sa faute. Il s’agit là d’un encouragement inacceptable à la violation de l’état de droit.

La sanction désormais accessible grâce à l’action de groupe participe aussi de la prévention. On ne saurait accepter plus longtemps ce que le premier président de la Cour de cassation, monsieur Guy Canivet, a qualifié en les dénonçant de « stratégies contraires au droit, préjudiciables, adoptées par certains grands groupes économiques, parce qu’ils savent que la réaction judiciaire sera négligeable aussi longtemps qu’aucune action de groupe ne sera introduite en droit français ».

L’exemple de l’entente anti-concurrentielle et illégale entre les opérateurs de téléphonie mobile est éclairant. Cette entente a été sévèrement condamnée par voie d’amende par le Conseil de la concurrence puisque près de 20 millions de personnes ont été déclarées victimes par cette autorité administrative indépendante. L’association de consommateurs UFC-Que Choisir a engagé une action au nom de l’intérêt collectif des consommateurs et a proposé aux victimes de se joindre à sa procédure. Elle a affecté un personnel spécifique pour aider les consommateurs à constituer leurs demandes de réparation. 300 000 personnes se sont inscrites sur le site internet créé à cet effet ; après 10 mois de travail, et 500 000 euros de frais de gestion, seulement 12 521 dossiers ont pu être finalisés et acheminés par camion jusqu’au tribunal chargé de trancher l’affaire. 12 521 demandeurs sur près de 20 millions de victimes, c’est 0,06 % des victimes qui seront peut-être indemnisées. C’est une rente inacceptable accordée aux opérateurs économiques ne respectant pas volontairement l’état de droit.

Les modèles offerts par les systèmes étrangers sont divers, et selon les choix opérés, cette action peut avoir une réelle efficacité ou au contraire n’en avoir aucune.

Quatre séries de choix doivent donc être opérés selon l’efficacité effective et réelle que l’on veut donner à l’action de groupe :

1. En premier lieu, en ce qui concerne son domaine, doit-elle n’être ouverte que pour les litiges de consommation ou faut-il l’autoriser dans d’autres contentieux de masse ?

2. En deuxième lieu, en ce qui concerne les victimes, faut-il ne permettre l’indemnisation que de ceux qui participent à l’action ou au contraire de toutes les victimes du même préjudice, même si elles ne se sont pas fait connaître à l’origine de l’action ?

3. En troisième lieu, en ce qui concerne la représentation, faut-il que seules les associations agréées de consommateurs puissent agir, ou toute association peut-elle être autorisée à le faire ?

4. En quatrième lieu, en ce qui concerne la procédure, faut-il mettre en place un filtre du juge judiciaire ou toute action de groupe sera-t-elle présumée recevable ?

À presque toutes ces questions, l’article 12 du projet de loi n° 3430 en faveur des consommateurs déposé sur le bureau de l’Assemblée nationale le 8 novembre 2006, qui prétendait introduire l’action de groupe en droit français, a répondu de façon à fermer au maximum les possibilités réelles de ces actions. C’est, de manière quasi-systématique, la voie de l’option la plus étroite qui a été choisie, rendant quasi ineffective la procédure ainsi créée.

L’action de groupe proposée était en effet cantonnée aux seuls litiges de la consommation, pour des consommateurs personnes physiques, et encore sans que le préjudice corporel puisse être réparé, et uniquement en cas d’inexécution partielle ou totale d’une obligation contractuelle, à l’exclusion donc des obligations délictuelles. En outre, seules les associations agréées au plan national, c’est-à-dire par le Gouvernement, étaient admises à mener ces actions, ce qui limitait encore leur effectivité. Enfin, le projet de loi limitait de façon incompréhensible les actions aux indemnisations inférieures à une somme fixée par décret en Conseil d’État, et dont l’exposé des motifs du projet de loi énonçait qu’elles pouvaient être de 2 000 euros.

Les conditions d’ouverture de cette action de groupe étaient tellement strictes que la plupart des contentieux de masse s’en seraient trouvés exclus. Ainsi en était-il des actions demandant réparation des dommages relatifs à la santé, à l’environnement, comme par exemple dans le cas des maladies dues à l’hormone de croissance. Et, même en matière contractuelle, la petite entreprise victime n’aurait pas été admise à agir, notamment dans les rapports contractuels déséquilibrés et minés par les abus de position dominante.

Que restait-il alors dans le champ d’application de ce projet de loi ? Quelques menus dommages dus à l’inexécution contractuelle de contrats conclus entre professionnels et consommateurs. Et encore était-il prévu que c’est le professionnel qui ferait l’offre d’indemnisation à chaque consommateur dont le montant n’a pas à être déterminé par le juge. Ce projet de loi revenait finalement à conférer au professionnel le droit de proposer une transaction au consommateur, droit dont il bénéficiait déjà. Et le consommateur, une fois de plus, aurait encouru le risque de se trouver seul au moment d’accepter ou de refuser l’offre. En définitive, ce projet de loi créait un véritable imbroglio juridique, puisque les actions de groupe qui auraient pu être tentées, déjà rares compte tenu du domaine restreint où elles étaient autorisées, et qui auraient abouti à une décision de justice retenant la responsabilité du professionnel, n’auraient fait qu’ouvrir un droit pour le consommateur de négocier son indemnisation, négociation qui, en cas d’échec, aurait donner lieu à une action en justice du consommateur, individuelle cette fois.

Même aussi peu ambitieux, ce projet a été abandonné par le Gouvernement de la précédente législature et ne cesse d’être depuis repoussé alors même qu’il avait été promis pour l’examen de la Loi de modernisation de l’économie et que des voix issues de tous les bancs de l’Assemblée nationale réclament l’adoption d’un tel dispositif. Apparaît ainsi le manque de volonté politique réelle de la majorité depuis reconduite, qui n’avait pas caché son hostilité, voire sa méfiance, à l’égard de l’action de groupe pourtant annoncée comme nécessaire à l’équilibre des relations entre consommateurs et distributeurs par le Président Jacques Chirac. La proximité de cette posture avec celle du MEDEF, hostile par principe à des actions de groupe, est à souligner.

Il nous revient donc de proposer l’adoption d’une action de groupe dans notre droit. Nous proposons d’accorder enfin de vrais droits aux victimes d’agissements illégaux, qui leur permettent réellement d’obtenir justice par une procédure simple et équitable, et qui écartent tout autant les risques d’abus ou de dérives.

Il s’agit pour cela d’articuler les différentes variables de manière à ouvrir plus largement, sans excès, les conditions de l’action de groupe.

En premier lieu, il est absurde de cantonner l’action de groupe aux seuls litiges de consommation quand les contentieux de masse concernent tout autant, voire davantage, les problèmes de concurrence. Le Conseil de la concurrence a d’ailleurs souligné l’opportunité d’introduire une action de groupe dans le domaine de la concurrence (rapport général 2005, avis du 21 septembre 2006). Au delà de ce domaine, il convient également d’inclure les litiges relatifs à la santé ou l’environnement, d’autant que ceux ci engendrent souvent des situations bien plus dramatiques au plan humain, et surtout plus urgentes pour les victimes dont le pronostic vital se réduit à mesure que la procédure avance et ne peut donc s’aligner sur la durée d’un procès abusivement prolongé par un adversaire d’autant plus en bonne santé qu’il est une personne morale. En revanche, il faut nécessairement écarter du domaine d’application de la loi tout ce qui relève des contrats de travail et des opérations financières sur titres, qui n’ont pas leur place dans une action de groupe, en raison des spécificités des premiers, et du caractère spéculatif des secondes.

En deuxième lieu, il est capital que l’action soit menée au nom de tous ceux qui subissent le même préjudice imputable au même professionnel, même s’ils ne se déclarent pas au début de la procédure, et sous réserve de ceux qui voudraient s’exclurent d’eux-mêmes de l’action intentée en leur nom. Le système qui prévoit que seuls ceux qui s’inscriraient début de procédure serait représentés dans l’action de groupe est porteur d’injustices puisque ne bénéficieront de fait de l’action de groupe que ceux qui en seront informés, c’est-à-dire ceux qui ont les moyens d’accéder à ces informations. On ne ferait donc que reproduire une injustice au lieu de la combattre, ce qui est l’objectif de l’action de groupe. Il faut simplement s’assurer que toutes les victimes auront été effectivement informées, et c’est pourquoi, à l’instar de ce qui existe dans certains pays comme le Canada, un Fonds d’aide à l’action de groupe est institué. Il pourra avoir notamment en charge d’assurer la publicité des actions de groupe, de centraliser les demandes individuelles de réparation, de recevoir les exclusions de ceux qui ne veulent pas participer à l’action, voire d’avancer les sommes des demandeurs qui ne pourront pas le faire.

En troisième lieu, il faut permettre à des associations qui ont cinq années d’existence réelle et sérieuse au moins, de porter l’action de groupe, et non pas seulement aux associations agréées.

Cependant, en quatrième lieu, le législateur doit édifier un cadre légal qui prévienne les actions intempestives, dilatoires ou infondées. Un filtre efficace est ainsi prévu : c’est le juge judiciaire qui contrôlera la recevabilité de l’action en regard des quatre conditions strictes de recevabilité admises. Le juge est ainsi institué garant du bon exercice de l’action de groupe. Le dispositif est ainsi bien équilibré. Cela nécessite l’adaptation des règles du procès civil, et donc une retouche du nouveau code de procédure civile qui, bien que ne relevant pas du domaine législatif, est également proposée ici.

Au-delà des filtres qui permettront d’écarter les actions malvenues, il faut aussi encadrer les risques que l’instauration de l’action de groupe pourrait engendrer. S’il est naturel que les avocats soient des acteurs importants de la conduite des actions de groupe, il ne faudrait pas que ces actions soient guidées davantage par la poursuite de leur intérêt plutôt que par celui de ceux qu’ils représentent. Pour cela, et afin de se prémunir contre les dérives qui existent dans certains pays, comme les États-Unis, trois règles peuvent être posées ou rappelées : l’interdiction du démarchage de clientèle par les avocats, le plafonnement d’un éventuel honoraire de résultat, l’homologation par le juge de la convention d’honoraires qui devient ainsi publique.

De même faut-il envisager la situation des experts qui ont souvent entre leurs mains une part importante de la solution du litige, surtout quand celui-ci est technique. La voie la plus juste consiste à privilégier l’expertise indépendante ordonnée par le juge saisi de l’action de groupe, plutôt que de permettre à chaque partie de choisir son expert, ce qui est en général coûteux. En outre, pour ne pas demander l’avancement des honoraires aux parties, l’expert percevra ses émoluments lors de la reddition de la décision, ou lors de la conclusion de la transaction si elle devait intervenir.

Car un des autres avantages de l’action de groupe est qu’elle invite les parties à entrer en discussion sur le litige ; elle organise les conditions d’un rapprochement et donc d’un accord. C’est bien une justice négociée que l’on met en place, mais négociée à force égale par le professionnel et le représentant des victimes, et non pas imposée par le professionnel comme c’est le cas dans le projet de loi n° 3430 en faveur des consommateurs.

Cette justice négociée, qui au surplus désencombre les tribunaux, est la meilleure garantie de parvenir à une justice effectivement réparatrice, une justice enfin juste.

Si l’action de groupe permet l’obtention pour chaque victime des dommages et intérêts dans des délais raisonnables, tout en répondant à leurs besoins et en instaurant un accès équitable au procès, l’objectif n’est cependant pas toujours d’obtenir une indemnisation pécuniaire. La réparation peut emprunter de multiples formes, comme l’arrêt des troubles subis, la remise en état des sites pollués, la prise en charge de réparations, l’avoir sur factures à venir, etc.

Bref, il ne s’agit pas de faire payer à tout prix ; il s’agit de mettre fin à l’illicite lorsqu’il est impuni.

Contrairement au projet de loi de novembre 2006, le Titre second de notre proposition de loi a pour objet d’instaurer en France une véritable action de groupe permettant à des victimes ayant subi un même dommage, qu’il soit relatif à la consommation, à la santé, à l’environnement, à la concurrence, qu’il soit d’ordre contractuel ou délictuel, quel que soit le montant du dommage de chacun, de s’unir pour engager une procédure à l’encontre du fautif. L’objectif est de donner accès au droit et à la justice à ceux qui renoncent face aux complications et à la longueur des procédures. C’est aussi le moyen de mettre fin à l’impunité de ceux qui tablent sur le découragement des victimes pour ne pas respecter la loi. Une fois l’action portée par une association représentant les victimes déclarées recevable par le juge judiciaire, tous ceux qui ont subi le même dommage pourront en obtenir réparation, sauf s’ils s’excluent expressément du groupe.

L’article 28 vise à installer au cœur du code civil, sans en bouleverser la numérotation puisqu’il y a un espace vacant depuis 1867 où s’intègrent idéalement les dispositions sur l’action de groupe.

Les nouveaux articles 2062 à 2070 délimitent le cadre juridique de cette nouvelle action de groupe, en en donnant la définition (art. 2062), en y intégrant les dommages civils, non seulement de la consommation, mais aussi de la santé, de l’environnement et de la concurrence (art. 2063), et en permettant à toute association ayant cinq années d’existence réelle et sérieuse de représenter les victimes.

Les nouveaux articles 2065 et 2066 mettent en place un système de filtre des actions de groupe avec un examen de la recevabilité par le Tribunal de grande instance (art. 2065). Celui-ci analyse aussi la convergence des prétentions des membres du groupe et la capacité du représentant à les défendre. Il peut, le cas échéant, scinder le groupe en plusieurs sous-groupes (art. 2066).

En matière de procédure, il est prévu que la prescription de l’action de groupe soit alignée sur la prescription de chaque préjudice dont il est demandé réparation. Toutefois elle est interrompue le temps que dure l’action de groupe pour ceux qui s’excluraient du groupe en cours d’action (art. 2067).

Les nouveaux articles 2068 à 2070 organisent l’information et l’indemnisation des victimes membres du groupe qu’elles se soient manifestées ou non au début de l’action de groupe. L’ensemble du dispositif est concentré dans un Fonds d’aide à l’action de groupe qui est en charge de l’exécution de l’information décidée par le juge (art. 2068), qui peut centraliser les demandes individuelles et qui doit verser l’indemnisation aux victimes telle qu’elle aura été évaluée par le juge (art. 2069). En outre, en cas de transaction en cours de procédure, celle-ci pourra être homologuée dans les conditions de l’article 1441-4 du nouveau code de procédure civile (art. 2070).

L’article 29 vise à définir la procédure spécifique à l’action de groupe qui, à ce titre, doit figurer dans le nouveau code de procédure civile aux articles 1441-5 à 1441-8 dans un chapitre intitulé : « L’action de groupe ».

Il s’agit de mettre en place une procédure simple, c’est-à-dire toujours devant le même juge, le tribunal de grande instance de Paris, qui a une compétence exclusive, saisie de manière non contradictoire, et qui statue en premier ressort sur la recevabilité de l’action, ainsi que sur la convention d’honoraires des avocats qui devra être produite pour éviter les éventuels abus (art. 1441-5 et 1441-6).

C’est aussi le juge qui accepte ou refuse les demandes d’expertise pour ne pas noyer les victimes sous des frais de justice parfois inutiles, frais qui seront en tout état de cause versés à la fin de la procédure (art. 1441-7).

Mais c’est au Fonds d’aide à l’action de groupe que revient la mission de recenser les informations sur les recours engagés (art. 1441-8, al. 1er), d’enregistrer les déclarations d’auto-exclusion du groupe (art. 1441-8, al. 2), de distribuer les dommages et intérêts obtenus aux membres du groupe et selon les modalités déterminées par le juge (art. 1441-8, al. 3), et, le cas échéant, d’avancer les frais de justice d’un membre du groupe insolvable (art. 1441-8 al. 4).

L’article 30 pose la création légale du Fonds d’aide à l’action de groupe, nécessaire au bon fonctionnement de l’action de groupe.

PROPOSITION DE LOI

TITRE IER

PROTECTION ET RESPONSABILISATION DE L’EMPRUNTEUR

Chapitre Ier

Interdiction du crédit renouvelable et protection des droits des emprunteurs

Article 1er

I. – Les articles L. 311-9 et L. 311-9-1 du code de la consommation sont abrogés.

II. – Le second alinéa de l’article L. 311-14 du même code est abrogé.

Article 2

I. – L’article L. 311-15 du code de la consommation est ainsi rédigé :

« Art. L. 311-15. – Le consommateur peut, dans un délai de quatorze jours calendaires à compter de l’acceptation du contrat de crédit, se rétracter sans donner de motif. Pour permettre l’exercice de cette faculté de rétractation, un formulaire détachable est joint à l’offre préalable. L’exercice par l’emprunteur de sa faculté de rétractation ne peut donner lieu à enregistrement sur un fichier.

« Ce délai de rétractation s’ouvre le jour de la conclusion du contrat de crédit, ou le jour où le consommateur reçoit les clauses et conditions contractuelles ainsi que les informations prévues par le présent code si cette date est postérieure à celle de la conclusion du contrat.

« Le prêteur n’a droit à aucune autre indemnité versée par l’emprunteur en cas de rétractation. »

II. – Aux articles L. 311-16, L. 311-24, L. 311-25 et L. 311-28 du même code, le mot : « sept » est remplacé par le mot : « quatorze ».

III. – Au quatrième alinéa de l’article L. 311-25 du même code, le mot : « huitième » est remplacé par le mot : « quinzième ».

Article 3

L’article L. 311-25-1 du code de la consommation est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« L’exercice par le consommateur de son droit de rétractation sur le contrat principal emporte résiliation de plein droit du contrat de crédit destiné à en assurer le financement, sans frais ni indemnité. »

Chapitre II

Abrogation de l’hypothèque rechargeable

Article 4

I. – L’article 2422 du code civil est abrogé.

II. – L’article L. 313-14 du code de la consommation est ainsi rédigé :

« Art. L. 313-14. – Les dispositions de la présente section s’appliquent aux opérations de crédit consenties à titre habituel par toute personne physique ou morale relevant des dispositions du chapitre Ier relatif au crédit à la consommation. »

Chapitre III

Responsabilisation des cocontractants du crédit

Article 5

Après l’article L. 313-6 du code monétaire et financier, il est inséré une sous-section 3 ainsi rédigée :

« Sous-section 3

« Fichier national des crédits aux consommateurs

« Art. L. 313-6-1. – Il est institué auprès de la banque de France un fichier national recensant les crédits accordés aux personnes physiques pour des besoins non professionnels. Ce fichier est géré exclusivement par la Banque de France. Il est soumis aux dispositions de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés.

« Ce fichier est indisponible aux établissements de crédits. L’emprunteur interroge la banque de France sur son état d’endettement.

« Les modalités de fonctionnement du fichier sont définies par décret en conseil d’État. »

Article 6

Avant l’article L. 311-11 du code de la consommation, il est inséré un article L. 311-10-2 ainsi rédigé :

« Art. L. 311-10-2. – Avant de conclure le contrat de crédit, le prêteur évalue la solvabilité du consommateur à partir d’un nombre suffisant d’informations fournies par ce dernier et par la consultation des bases de données pertinentes.

« À cet effet le prêteur consulte le fichier national recensant les informations sur les incidents de paiement prévus à l’article L. 333-4. Il demande à l’emprunteur l’état de sa situation au regard du répertoire national des crédits aux consommateurs prévu à l’article L. 313-6-1 du code monétaire et financier.

« Si le rejet d’une demande de crédit se fonde sur la consultation d’un fichier ou d’une base de données, le prêteur informe le consommateur sans délai et sans frais du résultat de cette consultation et de l’identité de la base de données consultée. Une contestation peut être opérée par l’emprunteur. »

Article 7

Après l’article L. 311-30 du code de la consommation, il est inséré un article L. 311-30-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 311-30-1. – Le prêteur qui a accordé un crédit sans s’être préalablement informé de la situation de solvabilité de l’emprunteur, et notamment de sa situation d’endettement global et de ses revenus, ne peut exercer de procédure de recouvrement à l’encontre de l’emprunteur défaillant, ou de toute personne physique ou morale s’étant portée caution.

« Si l’emprunteur a fait des fausses déclarations ou remis des documents inexacts en vue de tromper le prêteur pour obtenir un crédit, le prêteur est exonéré de la responsabilité prévue au premier alinéa. »

Article 8

Le septième alinéa de l’article L. 331-7 du code de la consommation est remplacé par quatre alinéas ainsi rédigés :

« Pour l’application du présent article, la commission vérifie, en prenant en compte le crédit accordé le plus récemment, que chaque créancier a correctement pris en compte la situation financière du débiteur. Elle poursuit l’analyse des conditions dans lesquelles ont été accordé chaque crédit antérieur jusqu’à ce qu’il apparaisse que le créancier concerné à effectivement accompli les vérifications nécessaires concernant la solvabilité de l’emprunteur.

« Lorsqu’elle constate qu’un établissement, lors de la conclusion des différents contrats de crédit, a consenti un crédit manifestement disproportionné eu égard aux facultés de remboursement de l’emprunteur, la commission recommande la suppression des intérêts dus au titre du crédit considéré.

« La commission peut de surcroît mettre à la charge des établissements concernés une indemnité au plus égale au capital restant dû.

« Ces recettes sont assimilées à un fonds de concours pour dépenses d’intérêt public et rattachées au budget du ministère de la justice. »

Article 9

Après l’article L. 311-8 du code de la consommation, il est inséré un article L. 311-8-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 311-8-1. – La créance née de l’ouverture des opérations de crédit visées à l’article L. 311-2 est inopposable à la communauté, à l’indivision et au membre de la communauté ou de l’indivision qui ne l’a pas expressément acceptée. »

Article 10

I. – Après la première phrase du premier alinéa de l’article L. 333-4 du code de la consommation, sont insérées deux phrases ainsi rédigées :

« Avant toute déclaration, le débiteur est informé de sa situation et invité à exposer les raisons de l’incident de paiement dans un délai de cinq jours francs. Faute pour le débiteur de démontrer que l’incident ne lui est pas directement imputable dans ce délai, les établissements et services susvisés procèdent à la déclaration de l’incident de paiement à la Banque de France. »

II. – L’article L. 313-6 du code monétaire est ainsi rédigé :

« Art. L. 313-6. – Les règles relatives au fichier des incidents de paiement caractérisés sont fixées par les articles L. 333-4 et L. 333-5 du code de la consommation ci-après reproduits :

« “Art. L. 333-4. – Il est institué un fichier national recensant les informations sur les incidents de paiement caractérisés liés aux crédits accordés aux personnes physiques pour des besoins non professionnels. Ce fichier est géré par la Banque de France. Il est soumis aux dispositions de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés.

« “Les établissements de crédit mentionnés à l’article L. 511-1 du code monétaire et financier et les organismes mentionnés au 5 de l’article L. 511-6 du même code sont tenus de déclarer à la Banque de France les incidents visés à l’alinéa précédent. Avant toute déclaration, le débiteur est informé de sa situation et invité à exposer les raisons de l’incident de paiement dans un délai de cinq jours francs, à l’issu duquel les établissements et services susvisés peuvent procéder à la déclaration de l’incident de paiement à la banque de France. Les frais afférents à cette déclaration ne peuvent être facturés aux personnes physiques concernées.

« “Dès que la commission instituée à l’article L. 331-1 est saisie par un débiteur en application du premier alinéa de l’article L. 331-3, elle en informe la Banque de France aux fins d’inscription au fichier institué au premier alinéa du présent article. La même obligation pèse sur le greffe du juge de l’exécution lorsque, sur recours de l’intéressé en application du deuxième alinéa de l’article L. 331-3, la situation visée à l’article L. 331-2 est reconnue par ce juge ou lorsque le débiteur a bénéficié de l’effacement des dettes résultant de la procédure de rétablissement personnel en application de l’article L. 332-9.

« “Le fichier recense les mesures du plan conventionnel de redressement mentionnées à l’article L. 331-6. Ces mesures sont communiquées à la Banque de France par la commission. L’inscription est conservée pendant toute la durée de l’exécution du plan conventionnel, sans pouvoir excéder dix ans.

« “Le fichier recense également les mesures prises en vertu des articles L. 331-7 et L. 331-7-1 qui sont communiquées à la Banque de France par le greffe du juge de l’exécution. S’agissant des mesures définies à l’article L. 331-7 et au premier alinéa de l’article L. 331-7-1, l’inscription est conservée pendant toute la durée d’exécution de ces mesures, sans pouvoir excéder dix ans. S’agissant des mesures définies au troisième alinéa de l’article L. 331-7-1, la durée d’inscription est fixée à dix ans.

« “La Banque de France est seule habilitée à centraliser les informations visées à l’alinéa

« “Les organismes professionnels ou organes centraux représentant les établissements et les organismes visés au deuxième alinéa sont seuls autorisés à tenir des fichiers recensant des incidents de paiement.

« “La Banque de France est déliée du secret professionnel pour la diffusion, aux établissements de crédit et aux organismes mentionnés au 5 de l’article L. 511-6 du code monétaire et financier, des informations nominatives contenues dans le fichier.

« “Il est interdit à la Banque de France et aux établissements de crédit et aux organismes mentionnés au 5 de l’article L. 511-6 du code monétaire et financier de remettre à quiconque copie, sous quelque forme que ce soit, des informations contenues dans le fichier, même à l’intéressé lorsqu’il exerce son droit d’accès conformément à l’article 39 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 précitée, sous peine des sanctions prévues aux articles 226-22 et 226-21 du code pénal.”

« “Art. L. 333-5. – Un arrêté du ministre, pris après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés et du comité consultatif du secteur financier, fixe notamment les modalités de collecte, d’enregistrement, de conservation et de consultation de ces informations.” »

Article 11

La vente d’un bien de consommation ne peut faire l’objet d’aucune rémunération assise sur le crédit contracté pour l’achat du bien par le consommateur.

Chapitre IV

Régulation de la publicité

Article 12

Après l’article L. 311-2 du code de la consommation, il est inséré un article L. 311-2-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 311-2-1. – Il est interdit de proposer sous quelque forme que ce soit des lots promotionnels liés à l’acceptation d’une offre préalable d’opération visée à l’article L. 311-2. »

Article 13

Après l’article L. 311-2 du code de la consommation, il est inséré un article ainsi rédigé :

« Art. L. 311-2-1. – La distribution et l’ouverture des crédits visés à l’article L. 311-2 ne peuvent s’opérer dans la même enceinte que celle de l’achat du bien de consommation, ni à distance.

« Le démarchage à domicile et le démarchage itinérant sont interdits. »

Article 14

Après l’article L. 311-4 du code de la consommation, il est inséré un article L. 311-4-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 311-4-1. – La publicité pour les opérations visées à l’article L. 311-2 ne peut comporter de mention qui inviterait à penser que la situation de l’emprunteur serait améliorée par la souscription desdites opérations. »

Article 15

I. – L’article L. 311-10 du code de la consommation est complété par un 5° ainsi rédigé :

« 5° mentionne le seuil de l’usure correspondant aux prêts ou crédits proposés. »

II. – Le même article est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Toute offre préalable proposée avant la présentation par l’emprunteur des pièces justificatives de sa situation financière entraîne la déchéance du droit aux intérêts du prêteur. »

Article 16

À l’article L. 341-2 du code monétaire et financier, les mots : « de grande surface visées par l’article L. 752-1 du code de commerce » sont remplacés par les mots : « de surface commerciale de plus de trois cents mètres carrés. »

Chapitre V

Dispositions relatives au taux annuel effectif global et au taux d’usure

Article 17

L’article L. 313-1 du code de la consommation est complété par deux alinéas ainsi rédigés :

« Le taux annuel effectif global est égal à la valeur actualisée de l’intégralité des engagements, prélèvements, remboursements et frais et pénalités convenus par le prêteur et le consommateur.

« Le calcul du taux annuel effectif global est effectué conformément à l’équation de base figurant à l’annexe I de la directive 2008/48/CE du Parlement européen et du Conseil, du 23 avril 2008, concernant les contrats de crédit aux consommateurs et abrogeant la directive 87/102/CEE du Conseil. »

Article 18

Le premier alinéa de l’article L. 313-3 du code de la consommation est ainsi rédigé :

« Constitue un prêt usuraire tout prêt conventionnel consenti à un taux effectif global qui excède, au moment où il est consenti, le taux des prêts sur le marché interbancaire à douze mois multiplié par un coefficient déterminé par décret après avis du Conseil national du crédit et du titre et compris entre deux et quatre. »

Article 19

L’article L. 311-4 du code de la consommation est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les mentions relatives au coût total, au taux effectif global ainsi qu’au montant des remboursements doivent être expressément indiquées au consommateur par un document spécifique dédié à cet effet. »

Article 20

Après l’article L. 313-6 du code de la consommation, il est inséré un article L. 313-6-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 313-6-1. – Le taux variable d’un contrat de prêt ne peut excéder, à tout moment de son exécution, un plafond correspondant au niveau mensuel moyen des taux des contrats de prêt à taux fixes conclus par l’établissement de crédit pour une durée de vingt ans au cours du mois considéré.

« Les perceptions excessives au regard de l’alinéa précédent sont imputées de plein droit sur les intérêts normaux alors échus et subsidiairement sur le capital de la créance. »

Article 21

L’article L. 311-4 du code de la consommation est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les mentions relatives au coût total, au taux effectif global ainsi qu’au montant des remboursements doivent être portées avec des caractéristiques techniques identiques à celles relatives au montant de l’opération proposée. »

Chapitre VI

Exécution du contrat de crédit

Article 22

Après l’article L. 311-14 du code de la consommation, il est inséré un article L. 311-14-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 311-14-1. – Le consommateur est informé de toute modification du taux débiteur ou des frais dont il est redevable sur un support papier ou sur un autre support durable de son choix, vingt jours avant que la modification n’entre en vigueur. Cette information indique le montant des paiements à effectuer après l’entrée en vigueur du nouveau taux débiteur et précise si le nombre ou la périodicité des paiements change. »

Article 23

Après l’article L. 311-19 du code de la consommation, il est inséré un article L. 311-19-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 311-19-1. – Le consommateur peut procéder à tout moment, sans frais ni indemnité à la résiliation type d’un contrat de crédit, à moins que les parties n’aient convenu d’un délai de préavis. Ce délai ne peut être supérieur à un mois. »

Article 24

I. – Le II de l’article L. 312-1-1 du code monétaire et financier est complété par deux alinéas ainsi rédigés :

« Ce document mentionne également le montant moyen, par personne physique n’agissant pas pour des besoins professionnels, des sommes perçues par l’établissement de crédit, au cours des douze derniers mois, pour une unité de chaque catégorie de produits ou de services fournis dans le cadre de la gestion d’un compte de dépôt.

« Une fois par an, un document indiquant le montant total des sommes perçues pour chaque catégorie de produits ou services dont bénéficient les personnes visées aux alinéas précédents ainsi que le montant moyen pour une unité de chaque catégorie de produits ou de services fournis à ces mêmes personnes est adressé par l’établissement de crédit à l’Autorité de la concurrence, qui inclut ces informations dans son rapport annuel public. »

II. – Le récapitulatif visé au II de l’article L. 312-1-1 du code monétaire et financier est adressé à l’Autorité de la concurrence, à compter du 1er janvier 2009.

Chapitre VII

Des opérations de « Rachats de crédits »

Article 25

Après l’article L. 311-4 du code de la consommation, sont insérés deux articles L. 311-4-2 et L. 311-4-3 ainsi rédigés :

« Art. L. 311-4-1. – Est interdite dans toute publicité relative à une opération de crédit consistant à racheter des crédits antérieurs, toute mention prétendant qu’elle est de nature à faciliter, simplifier, ou assouplir la gestion du budget ou la situation financière de l’emprunteur.

« Art. L.311-4-2. – Toute publicité ou information relative à une opération de crédit consistant en des rachats de crédits antérieurs doit mentionner le surcoût total de l’opération dont le montant est obtenu par la différence entre le coût total de la nouvelle opération et celui de chacune des opérations à laquelle elle se substitue. »

Article 26

L’article L. 341-10 du code monétaire et financier est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« 5° Les opérations consistant en des rachats de crédits antérieurs. »

Article 27

Après l’article L. 311-10 du code de la consommation, il est inséré un article L. 311-10-1 ainsi rédigé :

« Art. L.311-10-1. – Aucun devis, aucune simulation ou réponse de principe, ni aucune offre préalable de crédits relatifs à une opération de crédit consistant en un rachat de crédits antérieurs ne peut être proposé à l’emprunteur avant l’expiration d’un délai de huit jours à compter de la prise de contact sollicitant ledit devis, ladite simulation ou réponse de principe ou ladite offre préalable. »

TITRE II

CRÉATION DE L’ACTION DE GROUPE

Article 28

Est introduit dans le code civil, après le titre XVI du livre III, le titre suivant :

« TITRE XVII

« DE L’ACTION DE GROUPE 

« Art. 2062. – L’action de groupe est celle par laquelle une association saisit un juge pour le compte d’un ensemble de personnes, physiques ou morales, agissant dans un cadre non professionnel, et ayant subi un préjudice similaire du fait d’un même professionnel.

« Art. 2063. – L’action de groupe peut être engagée à l’occasion de tout préjudice civil, de nature contractuelle ou délictuelle, en matière de consommation, de santé, d’environnement ou de concurrence.

« Art. 2064. – L’action de groupe peut être engagée à l’initiative de toute association de consommateurs faisant la preuve de son existence réelle et sérieuse depuis cinq années.

« Chapitre Ier

« De la recevabilité de l’action de groupe

« Art. 2065. – La recevabilité de l’action de groupe est soumise à quatre conditions :

« – l’existence du préjudice ;

« – le lien de causalité entre le préjudice et le fait du professionnel ;

« – le caractère sérieux et commun des prétentions ;

« – l’impossibilité de mener une procédure conjointe ou une procédure avec mandat.

« Sont irrecevables les actions relatives au contrat de travail ou entre associés d’une même société ou d’un groupe de sociétés.

« Art. 2066. – Les prétentions des membres du groupe sont communes, identiques, similaires ou connexes entre elles.

« Le juge peut d’office modifier la composition du groupe, au besoin en scindant celui-ci en sous-groupes, pour assurer le respect des conditions de l’alinéa précédent.

« L’association démontre qu’elle est en mesure de représenter et de protéger de façon adéquate les intérêts des membres du groupe.

« Art. 2067. – Le délai de prescription de l’action de groupe correspond au délai de prescription du type de préjudice subi. Toutefois celle-ci est interrompue pendant la durée de la procédure jusqu’au prononcé du jugement pour ceux qui s’excluraient du groupe en cours de procédure.

« Chapitre II

« De l’information et de l’indemnisation de l’action de groupe

« Art. 2068. – Le Fonds d’aide à l’action de groupe assure la publicité de l’action de groupe et des modalités prescrites par le juge. La publicité intervient au moment où l’action est déclarée recevable, et après jugement au fond ou transaction.

« Tout membre du groupe peut s’exclure de l’action par déclaration individuelle expresse auprès du Fonds d’aide à l’action de groupe jusqu’au prononcé du jugement.

« Art. 2069. – Les personnes concernées par l’action de groupe réclament la liquidation des dommages et intérêts auprès du Fonds d’aide à l’action de groupe, qui reverse les sommes à chaque membre du groupe au regard du préjudice subi.

« Le montant des dommages et intérêts non réclamés dans un délai de deux ans suivant le prononcé du jugement au fond est reversé au Fonds d’aide à l’action de groupe.

« Art. 2070. – La transaction relative à l’action de groupe est homologuée par le juge. »

Article 29

Est introduit dans le nouveau code de procédure civile, après le chapitre VI du titre IV du livre III, le chapitre suivant :

« Chapitre VII

« L’action de groupe »

« Art. 1441-5. – L’action de groupe est formée par requête remise ou adressée au secrétariat greffe ou au greffe du Tribunal de grande instance de Paris, qui a compétence exclusive. Le ministère d’avocat est obligatoire.

« Art. 1441-6. – Le tribunal statue par ordonnance sur la recevabilité de l’action de groupe. Cette ordonnance est susceptible d’appel dans un délai de quinze jours.

« Le tribunal valide la convention d’honoraires des avocats. Il peut ordonner une médiation.

« Art. 1441-7. – Le juge est seul compétent pour ordonner des expertises. Le paiement des frais d’expertise se fait après le jugement au fond, ou après la transaction.

« Art. 1441-8. – Le Fonds d’aide à l’action de groupe est chargé de centraliser l’information sur tous les recours engagés.

« Il distribue les dommages et intérêts aux membres du groupe selon les modalités fixées par le juge dans la décision statuant au fond ou selon les termes de la transaction.

« Si le demandeur n’est pas en mesure de les supporter, il prend en charge les frais de justice résultant d’une action de groupe.

Les membres du groupe s’excluent de l’action par déclaration expresse faite auprès du Fonds jusqu’au prononcé du jugement.

Article 30

La composition et le fonctionnement du fonds visé à l'article 1441-8 du nouveau code de procédure civile sont fixés par décret en Conseil d'État.


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