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N° 2575

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 4 juin 2010.

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

tendant à la création d’une commission d’enquête sur les causes de l’accident, survenu le 30 juin 2009, de l’appareil de la compagnie Yemenia assurant la liaison Paris-Moroni via Sanaa,

(Renvoyée à la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, à défaut
de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par

M. Abdoulatifou ALY,

député.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Moyen de déplacement réputé comparativement plus sûr que d’autres, le transport aérien n’échappe cependant pas aux aléas inhérents à toute activité humaine et à des catastrophes, qui, lorsqu’elles surviennent, frappent vivement l’opinion publique, par leur ampleur et le nombre de vies humaines sacrifiées.

À cet égard, les accidents du vol Paris-New York en Concorde en 2000 ou, plus récemment, celui du vol Air France Rio de Janeiro-Paris ont marqué les esprits d’une manière particulière dans notre pays. Mettant en jeu des appareils de notre compagnie nationale, une des plus importantes et des plus prestigieuses au monde, ils appellent de la part de celle-ci à une amélioration constante de ses règles et procédures, au même titre que la grande majorité des compagnies aériennes qui assurent à leurs passagers et équipages un degré de sécurité certes très élevé mais continuellement perfectible.

Le crash du vol Sanaa-Moroni de la compagnie nationale yéménite Yemenia, le 30 juin 2009, relève d’une logique différente. La particularité de cet accident est qu’il a posé de manière dramatique la problématique de compagnies qui, à la différence des précédentes, ne répondent aucunement aux exigences requises pour exercer une activité dans le domaine de l’aviation civile – ce que certains qualifient en termes crus d’« avions cercueils » ou « avions poubelles ».

Rappelons les faits : le 30 juin 2009 un Airbus A 310 de la compagnie s’est abimé en mer au large des Comores avec 142 passagers à bord et 11 membres d’équipage. L’Airbus effectuait le dernier tronçon d’un trajet au départ de France en assurant la liaison entre Sanaa, capitale du Yémen, et Moroni, capitale de l’Union des Comores. En effet, un grand nombre de passagers avaient d’abord emprunté un A 330 qui assurait le vol Yemenia 749, parti de l’aéroport Charles de Gaulle, à Paris, pour se rendre, via Marseille, à Sanaa, où ils avaient embarqué à bord de l’A 310 assurant le vol IY 626 à destination de Moroni. L’avion a disparu des écrans radar alors qu’il se trouvait en phase d’atterrissage vers l’aéroport international Prince Saïd Ibrahim de Moroni. Sur les 153 personnes à bord, seule une jeune fille de douze ans a survécu à l’accident. Parmi les victimes qui ont pu être identifiées, on compte pour la quasi-totalité des ressortissants français et/ou comoriens (certains étant des binationaux).

Les enquêtes diligentées à la suite de l’accident, à l’occasion desquelles la boite noire de l’appareil a été retrouvée, n’ont pas encore permis d’en déterminer les causes exactes mais tous les éléments connus à ce jour mettent en accusation le non-respect par la Yemenia des règles les plus élémentaires de sûreté aérienne et amènent à penser que cette catastrophe était évitable.

Autant chacun a conscience que le risque zéro ne peut exister, encore moins dans nos sociétés mondialisées et marquées par la mobilité croissante des personnes, autant la poursuite, dans l’indifférence générale, de l’activité de compagnies défaillantes, au vu et au su de tous, constitue un véritable scandale.

Dans le cas de la Yemenia, le fait que de nombreux usagers aient tiré depuis des années la sonnette d’alarme, allant jusqu’à créer en 2008 – soit antérieurement au crash du 29 juin 2009 ! – une association dénommée « SOS Voyages aux Comores » représente une circonstance aggravante lourde de signification. Fait encore plus inacceptable : il est de notoriété publique que, malgré les risques encourus, c’est la politique tarifaire de la Yemenia, plus basse que celle de ses concurrents, qui attire à elle de nombreux clients, le plus souvent peu fortunés, ce qui revient dans les faits à une véritable ségrégation économique et sociale devant le risque aérien.

La leçon que chacun – et les pouvoirs publics en premier lieu – doit tirer du crash du vol de la Yemenia est simple : il faut tout faire pour éviter que des Français meurent à nouveau dans les mêmes conditions ?

Et ce d’autant plus que la Yemenia a repris ses vols dans exactement les mêmes conditions qu’avant la catastrophe et que sa situation est loin d’être isolée. Chacun a notamment en mémoire le crash du vol charter Charm-el-Cheikh-Paris de la compagnie égyptienne Flash Airlines, le 3 janvier 2004.

Dans ces conditions, il convient que, sans se substituer aux enquêtes techniques et judiciaires en cours, les parlementaires puissent évaluer avec précision l’enchaînement des causes directes et indirectes, proches et lointaines, qui ont amené au déroulement de ce drame, afin de parvenir à des mesures susceptibles d’en empêcher la répétition, possible sinon probable en cas d’inaction persistante.

La création d’une commission d’enquête parlementaire aura pour mission de mener cet indispensable travail qui, en plus du respect dû aux victimes et à leurs familles, relève d’une pure logique de prévoyance, qui est, comme chacun sait, la vertu cardinale de tout décideur politique digne de ce nom.

Telle est la proposition de résolution qu’il vous est demandé, Mesdames, Messieurs, de bien vouloir adopter.

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

Article unique

En application des articles 140 et suivants du Règlement, il est institué une commission d’enquête de trente membres sur les causes de l’accident, survenu le 30 juin 2009, de l’appareil de la compagnie Yemenia assurant la liaison Sanaa-Moroni


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