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N° 3147

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 4 février 2011.

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

ayant pour objet de soutenir la position de la France dans la négociation européenne pour l’extension aux services de presse en ligne du régime de TVA applicable aux publications de presse imprimées,

présentée par

M. Patrice MARTIN-LALANDE,

député.


EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

En application de la réglementation communautaire en vigueur relative à la taxe sur la valeur ajoutée (TVA), et alors même que rien d’essentiel ne les différencie dans leur prestation principale, la presse en ligne fait l’objet d’un traitement fiscal beaucoup moins favorable que celui de la presse imprimée. En France, elle est soumise au taux normal de 19,6 % tandis que la seconde y bénéficie, depuis très longtemps, d’un taux « super réduit » de 2,1 %.

Comme tous les dispositifs de soutien public aux médias, le taux réduit de TVA a vocation à satisfaire un objectif d’intérêt général: favoriser et garantir le pluralisme de l’information, de la culture et du divertissement. L’enjeu de la présente proposition de résolution dépasse donc les seules considérations fiscales : face à la « révolution numérique », il ne suffit plus de garantir le pluralisme tel qu’il existait ces dernières décennies.

Pour assurer les conditions matérielles du nouveau pluralisme de la presse à l’ère numérique et pour respecter les principes fondamentaux d’égalité devant la loi et de neutralité technologique, la présente proposition de résolution vise à soutenir l’application d’un taux réduit de TVA aux services de presse en ligne.

À l’ère numérique, veiller au pluralisme de la presse, c’est :

• assurer l’égalité de charge fiscale entre la presse imprimée et la presse en ligne – c’est le principe de la neutralité technologique devant l’assujettissement à l’impôt ;

• contribuer à trouver un modèle économique viable pour la presse en ligne – c’est aussi contribuer à construire l’avenir de la presse dans son ensemble tant il semble évident que l’avenir de la presse écrite passe par une dématérialisation accrue de ses contenus ;

• assurer à la presse en ligne une situation qui ne la pénalise pas par rapport à ses concurrents numériques ;

• d’un côté, les « non-journalistes » – L’information en ligne créée par les journalistes responsables au plan éditorial est en concurrence avec l’information en ligne de toute nature qui peut être créée par n’importe quel internaute, largement exonéré de responsabilité éditoriale et qui ne supporte aucune taxation. Dans cette compétition, il ne faut pas que l’information tenue à la responsabilité éditoriale soit trop lourdement taxée. C’est ainsi que pourra être assurée la présence la plus large possible de contenus à responsabilité et à valeur ajoutée professionnelles en parallèle des flux illimités de contenus n’apportant pas les mêmes garanties ;

• de l’autre côté, les « quasi-médias » – Il serait choquant que les médias qui fabriquent l’information restent plus lourdement taxés que les moteurs ou les réseaux sociaux qui se contentent d’agréger l’information produite par d’autres.

Dans son discours de clôture des « États généraux de la presse écrite » en janvier 2009, le Président de la République, après avoir annoncé la création d’un statut de la presse en ligne aligné sur celui de la presse traditionnelle, avait précisé que « le statut d’éditeur de presse en ligne ouvrira droit au régime fiscal des entreprises de presse ». Concernant plus spécifiquement le taux réduit de TVA, il précisait : « La France ne peut se résoudre à cette situation, doublement stupide où la presse numérique est défavorisée par rapport à la presse papier, et la presse numérique payante défavorisée par rapport à la presse numérique gratuite. » Et le Président de conclure que le dénouement de cette situation « invraisemblable » passe par un accord au niveau communautaire entre les 27 États membres de l’Union européenne.

Par ailleurs, le rapport relatif à la gouvernance des aides publiques à la presse, remis par Aldo Cardoso en septembre 2010, recommandait de « procéder à l’examen des dispositions fiscales susceptibles d’entraîner une déformation de la structure du marché de l’information en ligne » et préconisait l’application à la presse en ligne d’un taux de TVA « cohérent avec celui octroyé à la presse papier ».

Enfin, à l’automne 2010, lorsque ont été défendus, dans le cadre du projet de loi de finances pour 2011, des amendements visant à réduire le taux de TVA applicable à la presse en ligne, le ministre du Budget a répondu que si les directives européennes en matière de TVA restaient « l’obstacle le plus important », la « détermination » du Gouvernement demeurait « sans faille » et sa « volonté de déplacer les lignes » « intacte ». Le ministre du budget avait alors pris l’engagement que le Gouvernement conduirait une action forte de la France pour relancer, au niveau européen, un examen de la fiscalité communautaire sur les biens culturels.

Deux évènements récents et importants permettent d’envisager une évolution du dossier de la TVA applicable à la presse en ligne. D’abord, la Commission européenne a publié début décembre 2010 un « livre vert » sur l’avenir de la TVA au sein de l’Union européenne. Ensuite, le Président de la République a nommé l’ancien ministre de la culture et de la communication Jacques Toubon « ambassadeur itinérant » pour mener les concertations au niveau européen sur la fiscalité des biens et services culturels fournis par voie électronique.

Cette évolution est devenue particulièrement urgente. Si la question de la TVA doit de nouveau être débattue au niveau communautaire à l’horizon 2015, il est à craindre que ce délai ne soit trop long pour permettre l’émergence d’un modèle économique viable et pérenne des services de presse en ligne.


PROPOSITION DE RÉSOLUTION

Article unique

L’Assemblée nationale,

Vu l’article 34-1 de la Constitution,

Vu l’article 136 du Règlement,

Considérant que la Commission européenne a publié un « livre vert » sur l’avenir de la TVA au sein de l’Union européenne ;

Considérant que le Président de la République a nommé un « ambassadeur itinérant » pour mener les concertations au niveau européen sur la fiscalité des biens et services culturels fournis par voie électronique ;

Soutient résolument la position de la France dans la négociation européenne tendant à l’extension aux services de presse en ligne du régime de TVA applicable aux publications de presse imprimées.


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