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N° 3301

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 31 mars 2011.

PROPOSITION DE LOI

visant à abroger les permis exclusifs de recherches d’hydrocarbures non conventionnels et à interdire leur exploration et leur exploitation sur le territoire national,

(Renvoyée à la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, à défaut
de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par Mesdames et Messieurs

Christian JACOB, Michel HAVARD, Pierre MOREL-A-L’HUISSIER, Nicole AMELINE, Jean-Claude FLORY, Robert LECOU, Richard MALLIÉ, Alain MARC, Josette PONS, Franck RIESTER, Isabelle VASSEUR, Yves ALBARELLO, Alfred ALMONT, Martine AURILLAC, Sylvia BASSOT, Marc BERNIER, Claude BODIN, Jean-Claude BOUCHET, Chantal BOURRAGUÉ, Valérie BOYER, Françoise BRANGET, Françoise BRIAND, Philippe BRIAND, Chantal BRUNEL, François CALVET, Gérard CHERPION, Jean-François CHOSSY, Jean-Louis CHRIST, Dino CINIERI, Éric CIOTTI, Philippe COCHET, Georges COLOMBIER, Jean-François COPÉ, Louis COSYNS, Alain COUSIN, Jean-Yves COUSIN, Jean-Michel COUVE, Marc-Philippe DAUBRESSE, Lucien DEGAUCHY, Richard DELL’AGNOLA, Vincent DESCOEUR, Éric DIARD, Michel DIEFENBACHER, Jacques DOMERGUE, Jean-Pierre DOOR, Dominique DORD, Olivier DOSNE, Paul DURIEU, Christian ESTROSI, Jacqueline FARREYROL, Yannick FAVENNEC, André FLAJOLET, Nicolas FORISSIER, Marc FRANCINA, Yves FROMION, Sauveur GANDOLFI-SCHEIT, Jean-Paul GARRAUD, Jean-Jacques GAULTIER, Georges GINESTA, Jean-Pierre GIRAN, Jean-Pierre GORGES, Michel GRALL, Jean-Pierre GRAND, Jean GRENET, Pascale GRUNY, Jean-Claude GUIBAL, Christophe GUILLOTEAU, Michel HEINRICH, Laurent HÉNART, Michel HERBILLON, Antoine HERTH, Françoise HOSTALIER, Guénhaël HUET, Jacqueline IRLES, Denis JACQUAT, Yves JÉGO, Maryse JOISSAINS-MASINI, Marc JOULAUD, Didier JULIA, Christian KERT, Jacques KOSSOWSKI, Patrick LABAUNE, Jacques LAMBLIN, Marguerite LAMOUR, Guy LEFRAND, Michel LEJEUNE, Geneviève LEVY, Gérard LORGEOUX, Lionnel LUCA, Franck MARLIN, Philippe Armand MARTIN, Henriette MARTINEZ, Patrice MARTIN-LALANDE, Jean-Philippe MAURER, Christian MÉNARD, Jean-Claude MIGNON, Jean-Marie MORISSET, Alain MOYNE-BRESSAND, Jacques MYARD, Jean-Marc NESME, Bertrand PANCHER, Yanick PATERNOTTE, Bérengère POLETTI, Sophie PRIMAS, Didier QUENTIN, Éric RAOULT, Frédéric REISS, Jean-Luc REITZER, Jacques REMILLER, Camille de ROCCA-SERRA, Jean-Marc ROUBAUD, Max ROUSTAN, Francis SAINT-LÉGER, Bruno SANDRAS, Jean-Marie SERMIER, Fernand SIRÉ, Daniel SPAGNOU, Lionel TARDY, Guy TEISSIER, Dominique TIAN, Christian VANNESTE, Michel VOISIN, Éric WOERTH et Marie-Jo ZIMMERMANN,

députés.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Le gaz de schiste est un gaz naturel, de type non conventionnel, emprisonné dans du schiste, roche sédimentaire déposée sous forme d’argile et de limon. Dans le cas du gaz naturel classique, les molécules migrent naturellement jusqu’à des poches de forte concentration. Le schiste, lui, a pour propriété de conserver les plus petites quantités et de les empêcher de se rejoindre. L’extraction est longtemps demeurée impossible économiquement et physiquement.

La fracturation hydraulique est une technique développée aux États-unis pour extraire le gaz du schiste : elle con0siste à injecter des millions de litres d’eau et des produits chimiques dans le sous-sol pour fracturer le schiste et autoriser l’extraction du gaz ainsi libéré.

L’exploitation n’a été réalisée qu’aux États-unis en raison de la dérogation aux lois environnementales dont bénéficie le secteur de l’énergie depuis 2005: le schiste y génère 15 % de la production de gaz contre 1 % en 2000 ; le prix du gaz naturel a été divisé par 3 en quatre ans ; les réserves mondiales estimées ont été multipliées par quatre pour atteindre 250 ans de consommation.

L’exploration et l’exploitation des huiles et du gaz de schiste ne sont ni sans conséquence pour notre environnement ni sans risque pour notre santé.

Les conséquences environnementales sont extrêmement néfastes : pollution des eaux, de l’air et des sols, consommation considérable d’eau pour la fracturation, émissions de gaz carbonique inférieures seulement à l’énergie charbonnière, destruction du paysage pour installer les puits de forage. Les nappes phréatiques à proximité des puits sont contaminées par les rejets de produits chimiques et par le gaz libéré. Le prélèvement des masses d’eau nécessaires à la fracturation est tout aussi problématique.

Or, à la lumière des expériences nord-américaines, cette technique de fracturation hydraulique présente un double inconvénient :

– d’une part, elle impose de réaliser des forages à plusieurs endroits sur le sol, laissant apparaître des puits sur nos territoires qui défigurent nos paysages ;

– d’autre part, les produits utilisés, mais également les hydrocarbures récupérés, risquent de s’infiltrer dans la terre et dans les nappes phréatiques, contaminant ainsi notre eau potable, nos cultures, nos vignes.

Des permis d’exploration ont d’ores et déjà été délivrés, notamment pour les départements du sud-est de la France et du bassin parisien. Il est à craindre que ces permis, et les travaux qu’ils vont entraîner, causent des dommages irréversibles à l’environnement et portent préjudice aux habitants.

Il convient de rappeler, en outre, qu’en février 2005, le Parlement a donné valeur constitutionnelle à la Charte de l’environnement, et par conséquent au principe de précaution prévu à l’article 5 :

« Lorsque la réalisation d’un dommage, bien qu’incertaine en l’état des connaissances scientifiques, pourrait affecter de manière grave et irréversible l’environnement, les autorités publiques veillent, par application du principe de précaution et dans leurs domaines d’attributions, à la mise en œuvre de procédures d’évaluation des risques et à l’adoption de mesures provisoires et proportionnées afin de parer à la réalisation du dommage. »

Face aux risques et à l’inquiétude de la population et des élus, le Gouvernement a annoncé, en février dernier, un moratoire jusqu’à la remise des conclusions de la mission conjointe du Conseil général de l’industrie, de l’énergie et des technologies (CGIET) et du Conseil général de l’environnement et du développement durable (CGEDD).

Cependant, ce moratoire, par définition limité dans le temps, n’apporte pas de solution pérenne. Il convient par conséquent d’aller au-delà. Au nom du principe de précaution, il est de la responsabilité de la représentation nationale d’interdire l’exploration et l’exploitation des huiles et gaz de schiste par des forages verticaux comme par des forages horizontaux suivis de fracturation hydraulique de la roche (article 1er).

En conséquence, les permis en cours doivent être abrogés (article 2).

Il convient enfin assurer l’information du public avant l’octroi de tout permis exclusif de recherches d’hydrocarbures et de concession d’exploitation (article 3).

PROPOSITION DE LOI

Article 1er

En application du principe de précaution prévu à l’article 5 de la Charte de l’environnement, l’exploration et l’exploitation des mines d’hydrocarbures liquides ou gazeux non conventionnels, par des forages verticaux comme par des forages horizontaux suivis de fracturation hydraulique de la roche, sont interdites sur le territoire national.

Article 2

Les permis exclusifs de recherches de mines d’hydrocarbures liquides ou gazeux non conventionnels sont abrogés.

Article 3

Le code de l’environnement est ainsi modifié :

I. – Après l’article L. 120-2, il est inséré un article L. 120-3 ainsi rédigé :

« Art L. 120-3. – I. – Le respect de la procédure prévue par le présent chapitre conditionne la délivrance du permis exclusif de recherches prévu aux articles L. 122-1 et suivants du code minier.

« II. – Le respect de la procédure prévue par le présent chapitre conditionne l’octroi de la concession de mines prévue aux articles L. 132-1 et suivants du code minier. »

II. – Après l’article L. 122-3-5, il est inséré un article L. 122-3-6 ainsi rédigé :

« Art. L. 122-3-6. – I. – Le respect de la procédure prévue par la présente section conditionne la délivrance du permis exclusif de recherches prévu aux articles L. 122-1 et suivants du code minier.

« II. – Le respect de la procédure prévue par la présente section conditionne l’octroi de la concession de mines prévue aux articles L. 132-1 et suivants du code minier. »

III. – Après l’article L. 123-1, il est inséré un article L. 123-1-2 ainsi rédigé :

« Art. L. 123-1-2. – Le permis exclusif de recherches prévu aux articles L. 122-1 et suivants du code minier ne peut être accordé que s’il est précédé d’une enquête publique soumise aux prescriptions du présent chapitre. »


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