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N° 3460

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 25 mai 2011.

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

tendant à la création d’une commission d’enquête
visant à étudier les modalités de
financement
des
acteurs du dialogue social,

(Renvoyée à la commission des affaires sociales, à défaut de constitution
d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par Messieurs

Nicolas PERRUCHOT, François SAUVADET, Francis VERCAMER et les membres du groupe Nouveau Centre (1) et apparentés (2),

députés.

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(1) Ce groupe est composé de Messieurs : Jean-Pierre Abelin, Christian Blanc, Pascal Brindeau, Hervé de Charrette, Charles de Courson, Stéphane Demilly, Jean Dionis du Séjour, Raymond Durand, Francis Hillmeyer, Michel Hunault, Olivier Jardé, Yvan Lachaud, Jean-Christophe Lagarde, Claude Leteurtre, Hervé Morin, Nicolas Perruchot, Jean-Luc Préel, François Rochebloine, Rudy Salles, André Santini, François Sauvadet, Francis Vercamer, Philippe Vigier.

(2) Thierry Benoit, Philippe Folliot.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Depuis quelques années, le dialogue social est au cœur des évolutions de notre législation, en particulier dans le domaine du droit du travail. C’est notamment vrai via les dispositions de la loi du 31 janvier 2007, qui instaure un processus de concertation préalable des partenaires sociaux sur les projets de réforme touchant aux relations individuelles et collectives du travail, l’emploi et la formation professionnelle et qui relèvent du champ de la négociation nationale et interprofessionnelle. Le rôle des partenaires sociaux s’est par ailleurs illustré sur des sujets aussi fondamentaux que la représentativité des organisations syndicales, la réforme du marché du travail ou celle de la formation professionnelle.

Si la force de notre démocratie sociale tient à son efficacité réformatrice et à sa capacité à explorer des espaces nouveaux d’innovation sociale, elle tient également au caractère indiscutable de sa légitimité. Cela est vrai quant au caractère représentatif des acteurs du dialogue social : si les critères de représentativité ont ainsi été renouvelés pour les organisations syndicales, ils restent à définir pour les organisations patronales. Cela est vrai également quant aux sources et aux modalités de financement des acteurs du dialogue social, dont une analyse est nécessaire pour permettre de déterminer leur montant, leur origine, leur justification et leur efficience.

Déjà, en mai 2006, le rapport  du conseiller d’État Raphaël Hadas-Lebel a abordé le sujet délicat du financement syndical, et a conclu ainsi : « Ce domaine est caractérisé par une grande opacité : aucun document public ou administratif porté à notre connaissance ne présente de synthèse des ressources financières des syndicats en France, ni même des mécanismes de financement ».

Les syndicats sont restés longtemps les seules personnes morales non tenues par la loi à avoir une comptabilité. La loi n°2008-789 du 20 août 2008 portant réforme de la démocratie sociale et du temps de travail a permis une avancée significative de ce point de vue, et fait désormais obligation d'établir des comptes annuels, d'en assurer la publicité et, au-delà d'un certain seuil de ressources, de les faire certifier.

Pour autant, la transparence totale de l’ensemble des acteurs du dialogue social est loin d’être assurée.

Plusieurs enquêtes menées récemment, y compris par des syndicalistes, ont mis sur la place publique des doutes sur les effectifs réels des organisations et le montant des cotisations encaissées, en particulier sur le montant des ressources déclarées comme cotisations (notamment Roger Lenglet, Christophe Mongermont, Jean-Luc Touly, L’argent noir des syndicats, Fayard, 2008).

La faiblesse des effectifs des syndicats fait en effet que les cotisations ne représentent que 15 % à 57 % du budget des organisations françaises, contre 80 % à 90 % pour leurs homologues européennes.

Les syndicats comme les organisations d’employeurs sont par ailleurs subventionnés par le ministère du travail, par le biais de crédits pour former les conseillers des prud’hommes et les salariés exerçant des responsabilités syndicales. Le budget pour 2011 prévoit ainsi 37,6 millions d’euros de crédits pour l’action « dialogue social et démocratie sociale » (36,89 millions d’euros pour la loi de finances initiale 2010).

Les collectivités ont, sous certaines conditions, la possibilité d’accorder des subventions aux syndicats au même « échelon » qu’elles : local, départemental ou régional.

Autre forme de financement public, les « décharges de service » de fonctionnaires. Le rapport Hadas-Lebel a situé entre 5 000 et 5 500 « équivalents temps plein » le nombre d’agents payés par l’État mais travaillant en fait pour un syndicat, pour un coût de plus de 158 millions d’euros.

On ne peut en outre passer sous silence la question du vide juridique concernant les mises à disposition de personnel par les entreprises.

Les syndicats et les organisations professionnelles sont également rémunérés pour les « missions d’intérêt général » auxquels ils participent : formation professionnelle, instances paritaires de protection sociale. Dans ce dernier cas, il s’agit à la fois de remboursements de frais pour les administrateurs, mais aussi de subventions permettant de salarier des conseillers – y compris issus des rangs syndicaux.

On le voit, la question du financement est tout autant posée en ce qui concerne les syndicats de salariés et les organisations d’employeurs, pour lesquelles il est indispensable de connaître également les modalités de financement, la part des cotisations des membres adhérents dans leurs budgets, la part des personnels impliqués dans le fonctionnement des instances du paritarisme.

L’énoncé de ces différents thèmes démontre le besoin d’établir une fois pour toutes, des règles claires, reconnues par tous, de financement du dialogue social dans notre pays.

C’est en effet parce que, tout comme en matière de représentativité des acteurs du dialogue social, les règles du jeu de leur financement auront été clairement définies, qu’elles feront autorité de façon définitive et permettront de conforter la légitimité de toute notre démocratie sociale.

Il est clair en effet que les réformes les plus importantes pour notre pays ne pourront se faire sans échanges productifs et constructifs entre syndicats de salariés et organisations d’employeurs : ce sont eux en effet qui, dans les pays où ils sont forts, ont été à l’origine de réformes majeures.

Face à l’ampleur de la tâche, et à l’importance du sujet qui concerne bon nombre de français, seule une commission d’enquête, dotée de pouvoirs d’investigation larges, aura les moyens de procéder à une analyse poussée de la situation et à formuler, sur le fondement du constat qui aura pu ainsi être établi, un certain nombre de préconisations.

Telles sont les raisons pour lesquelles, Mesdames, Messieurs, il vous est demandé de bien vouloir adopter la proposition de résolution suivante.

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

Article unique

En application des articles 140 et suivants du Règlement de l’Assemblée nationale, il est créé une commission d’enquête de trente membres chargée de préciser le montant global des subventions accordées par l’État pour le financement du dialogue social, d’évaluer le nombre de personnels mis à disposition des centrales syndicales ou organisations patronales et les coûts que cela représente.


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