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Amendements  sur le projet ou la proposition

N° 3866

_____

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 19 octobre 2011.

PROPOSITION DE LOI

relative à la transparence de la vie publique
et à la prévention des conflits d’intérêts,

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale
de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus
par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par Madame et Messieurs

François de RUGY, Yves COCHET, Noël MAMÈRE et Anny POURSINOFF,

député-e-s.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Invités à porter un jugement sur leurs responsables politiques, 72 % de nos compatriotes interrogés par l’institut TNS SOFRES entre le 23 et le 26 septembre 2011 estiment que les élus et les dirigeants politiques sont « plutôt corrompus » contre 19 % qui déclarent les considérer « plutôt honnêtes ».

Ce sentiment terrible d’une corruption généralisée semble même aujourd’hui à son apogée : le taux enregistré est le plus fort jamais mesuré depuis 1977, date à laquelle la question a été posée pour la première fois par l’institut.

Il est en outre en augmentation de 4 points par rapport à juillet 2010, qui constituait déjà un désolant record.

Ce résultat consternant, et la croissance régulière de ce sentiment d’hostilité envers les représentants politiques ne sauraient nous laisser indifférents : ils portent en eux le germe de tous les populismes, et sapent la confiance indispensable entre les citoyens et leurs élus, sans laquelle il n’est pas de démocratie viable et durable.

Cette montée de la défiance envers les responsables politiques et singulièrement du soupçon quant à leur intégrité apparaît comme une constante en temps de crise. De février 34 à aujourd’hui, en passant par le poujadisme des années 50, c’est quand le système économique produit des effets douloureux sur la société que se manifestent le plus fortement ces relents d’antiparlementarisme, qu’alimentent deux sources : un sentiment de corruption généralisée de la classe politique et le constat d’un manque d’efficacité des politiques menées pour répondre aux conséquences de la crise.

Or, dans l’esprit des auteurs de la présente proposition de loi, la nécessité d’une régulation politique apparaît chaque jour plus indispensable pour juguler les causes des crises sociale, financière et environnementale qui frappent nos sociétés. Dans un tel contexte, le rétablissement, aux yeux de l’opinion, de la légitimité morale des responsables politiques à agir doit être vu comme un impératif absolu, car il est la condition première du retour à la crédibilité de l’action publique et, au final, à son efficacité.

Il convient, de plus, de constater que si le mécanisme de l’antiparlementarisme et de la défiance constitue bien une constante historique, ses moyens d’expression et ses sources changent au gré de l’évolution de notre société et des réalités technologiques.

D’un point de vue culturel, le rapport des Français à l’argent a profondément changé. De ce point de vue, l’ambition présidentielle affichée en 2007 de « réconcilier les Français avec l’argent » semble tenir autant du constat que de la volonté. L’exhibition décomplexée, parfois indécente, de la richesse de quelques-uns s’accompagne de nouveaux comportements, sans doute plus sains : perceptible dans la sphère privée (une enquête récente indiquait que plus de deux salariés sur trois ont révélé leur salaire à leurs collègues de travail), l’exigence de transparence sur les rémunérations s’est traduite par des changements profonds dans la pratique des entreprises, avec la mise en place de comités de rémunérations, et l’affichage des différentes composantes des rémunérations des dirigeants. Dans un tel contexte, toute absence de transparence, tout refus de divulguer des informations précises et complètes sur la situation personnelle des élus – tant patrimoniale que liée aux indemnités et moyens accordés pour l’exercice de leurs mandats – renforce des soupçons le plus souvent injustifiés.

Cette suspicion détestable trouve dans le développement des nouveaux médias et la multiplication des réseaux sociaux des canaux de diffusion particulièrement efficaces. Quel parlementaire n’a jamais reçu de courriels relayant des calculs approximatifs, des amalgames, voire des affirmations totalement erronées concernant leur statut et moyens de fonctionnement, souvent adressés en toute sincérité par des concitoyens choqués par de telles informations ? Bien souvent, au demeurant, même les informations diffusées par des médias professionnels comportent de telles approximations ou des erreurs. Un tel phénomène ne saurait être simplement attribué à une volonté de nuire, ou de complaire à un sentiment ambiant de défiance et de suspicion. Il est la conséquence d’une absence de prise en compte à sa juste valeur de l’impératif de transparence dans l’information qui devrait s’imposer aux pouvoirs publics. Rétablir les faits, distinguer l’information de l’amalgame constituent pour nos concitoyens ou ceux qui sont chargés de les informer des tâches bien souvent insurmontables, du fait d’une dispersion des données disponibles – quand elles le sont ! –, et ce notamment sur les sites Internet publics.

Les auteurs de la présente proposition de loi ne méconnaissent pas – et ne sous-estiment pas – les nombreuses avancées législatives qui ont conduit à la définition d’un corpus imposant de dispositions destinées à assurer la transparence financière de la vie politique. Celles-ci ont eu pour ambition de traiter des principaux aspects concourrant à la transparence de la vie politique.

Concernant la déclaration de patrimoine, on notera notamment :

– la loi n° 88-227 du 11 mars 1988 relative à la transparence financière de la vie politique, qui instaure l’obligation de déclaration de patrimoine pour les membres du gouvernement, les députés européens et les dirigeants d’organismes publics ;

– le décret d’application n° 96-762 du 1er septembre 1996 concernant l’obligation de déclaration de son patrimoine, qui précise les modalités de déclaration de patrimoine d’un certain nombre de hauts responsables publics ;

– la circulaire du 1er septembre 1996, relative aux déclarations de situation patrimoniale de certains élus ou des titulaires de certaines fonctions qui prévoit l’information des assujettis de l’obligation qui leur incombe, des conséquences qui s’y attachent et des modalités pratiques de leur déclaration ainsi que l’information de la commission et mise en œuvre des sanctions ;

– la loi n° 95-65 du 8 février 1995 relative à la déclaration du patrimoine des membres du Gouvernement et des titulaires de certaines fonctions, qui étend notamment l’obligation de déclaration du patrimoine aux membres de l’organe délibérant d’un EPCI à fiscalité propre et sanctionne d’inéligibilité le non respect de cette obligation ;

– la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 portant statut d’autonomie de la Polynésie française, qui étend le dispositif au président, aux membres du gouvernement de Polynésie, ainsi qu’aux représentants à l’assemblée de Polynésie.

Les modifications législatives ont également conduit à la création de la commission pour la transparence financière de la vie politique, instaurée par la loi n° 88-227 du 11 mars 1988 relative à la transparence financière de la vie politique qui en fixe la composition et détermine ses compétences, complétée par le décret d’application n° 96-763 du 1er septembre 1996 relatif à la commission pour la transparence financière de la vie politique qui détermine ses règles de fonctionnement et établit les procédures et modèles de déclaration de situation patrimoniale.

Concernant le financement des partis politiques, la loi n° 90-55 du 15 janvier 1990 relative à la limitation des dépenses électorales et à la clarification de financement des activités politiques plafonnait les dons des personnes morales et a ouvert le financement public aux formations politiques non représentées au Parlement. La loi n° 95-65 du 19 janvier 1995 relative au financement de la vie politique a introduit l’interdiction des dons de personnes morales (à l’exception des partis politiques) et augmenté le remboursement des frais de campagne jusqu’à 50 % du plafond de dépenses. Enfin, la loi de finances pour 2006 (n° 2005-1719) a doublé les dons autorisés pour les particuliers, en les portant à 7 500 €.

Concernant l’obligation d’élaborer des comptes de campagne et les sanctions afférentes, on citera la loi n° 2011-412 du 14 avril 2011 portant simplification de dispositions du code électoral et relative à la transparence financière de la vie politique qui introduit un seuil de 1 % des voix à l’article L. 52-12 du code électoral à partir duquel s’impose pour les candidats l’obligation d’établir un compte de campagne, fait peser l’obligation de tenir un compte de campagne sur les candidats ayant reçu des dons de personnes physiques et prévoit à titre de sanction une inéligibilité pour le candidat dont le compte de campagne laisse apparaître un dépassement du plafond de dépenses électorales (il peut être déclaré inéligible pendant une période maximale de 3 ans par le juge de l’élection), pour le candidat n’ayant pas satisfait l’obligation de déposer ses comptes de campagne (il peut être déclaré inéligible pendant 3 ans par le juge de l’élection) ainsi que pour le candidat qui a accompli des manœuvres frauduleuses ayant eu pour objet ou pour effet de porter atteinte à la sincérité du scrutin (il peut lui aussi être déclaré inéligible pour une durée maximale de 3 ans).

Le plafonnement des dépenses électorales pour les élections des députés, conseillers généraux et conseillers municipaux a été instauré par la loi n° 90-55 du 15 janvier 1990 relative à la limitation des dépenses électorales et à la clarification de financement des activités politiques, qui a créé la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques pour veiller à l’application de la loi.

Outre ces avancées législatives et réglementaires nombreuses et effectives, il convient d’ajouter que la multiplication récente de révélations sur les conflits potentiels d’intérêts touchant un certain nombre de responsables publics a conduit à la prise en compte de ce risque, par la création notamment de la Commission de réflexion pour la prévention des conflits d’intérêts dans la vie publique présidée par Monsieur Jean-Marc Sauvé, Vice-président du Conseil d’État. Celle-ci a rendu ses conclusions, dont certaines ont déjà trouvé un début d’application dans les règlements des Assemblées, ou sont inscrites dans un projet de loi gouvernemental.

Ce rappel des avancées législatives et réglementaires intervenues depuis quinze ans ne saurait tenir lieu d’un constat de satisfaction, bien au contraire. Il ne fait que mettre en évidence un paradoxe : c’est alors que l’arsenal législatif et réglementaire destiné à réguler le financement de la vie politique, à assurer sa transparence et à prévenir les conflits d’intérêt n’a jamais été aussi complet que la suspicion est la plus répandue.

Pour les auteurs de la présente proposition de loi, il convient donc de s’interroger sur les causes de ce paradoxe, et tenter de leur apporter des réponses simples et pratiques, applicables sans délai.

La complexité des dispositifs, et la possibilité de contournement des intentions initiales du législateur constituent un premier facteur d’explication du paradoxe susmentionné. C’est notamment le cas pour le financement de la vie politique, avec la multiplication des micro-partis. Dans son rapport 2008, la commission nationale des comptes de campagne recense 283 mouvements ou partis politiques, ce qui marque une forte inflation depuis l’application de la loi sur le financement des partis politiques et des campagnes électorales. Il est à noter qu’il n’y a que 62 partis ou mouvements ayant bénéficié d’une fraction du financement public des partis selon les règles fixées par la loi (nombre minimal de candidats présentés aux élections législatives ayant obtenu un pourcentage minimum des suffrages exprimés). Une telle inflation de micro-partis ne manque pas de soulever des questions légitimes chez nos concitoyens : ne permet-elle pas de tolérer, voire d’organiser un contournement de la volonté initiale du législateur de limitation des dons de personnes physiques, en démultipliant les structures bénéficiaires des contributions des mêmes bienfaiteurs ? Les reversements opérés par des partis ou mouvements politiques bénéficiant d’un financement public, au profit d’autres mouvements « satellites », à l’objet très limité voire à des comités de soutien personnel entièrement dévolus à l’accompagnement et à la promotion d’acteurs politiques individuels, ne génèrent-il pas des conflits d’intérêts spécifiques ? Quelle est l’utilisation des fonds collectés par ces « associations de soutien » à l’action de telle ou telle personnalité politique ? Pourquoi existe-t-il des mouvements de fonds entre ces « associations de soutien » – au bénéfice de celles-ci – et des partis représentés à l’Assemblée nationale, et bénéficiant par là-même du financement public des partis ? En l’absence de suite à la proposition de résolution tendant à la création d’une commission d’enquête relative au financement des partis politiques, formulée par les auteurs de la présente proposition de loi le 7 juillet 2010, il convient aujourd’hui d’agir pour lever tout soupçon sur la question.

En outre, les modifications législatives réalisées au cours des deux dernières décennies, pourtant réelles et constituant parfois de significatives avancées par rapport aux situations antérieures à leur adoption, apparaissent souvent comme des demi-mesures aux yeux de l’opinion, renforçant en cela le sentiment d’une grande inertie de classe politique sur ces questions de transparence, de contrôle citoyen et d’intégrité de la vie politique. Qu’il s’agisse de la traduction partielle des propositions de la commission présidée par M. Jean-Marc Sauvé dans le projet de loi gouvernemental, ou de la prise en compte des conclusions et recommandations régulièrement formulées par la Commission pour la transparence financière de la vie politique dans ses rapports annuels, il y a souvent loin des ambitions affichées à leur application effective : bien souvent, la traduction législative ou réglementaire des recommandations formulées par ces commissions aboutit à un résultat édulcoré. Aux yeux des auteurs de la présente proposition de loi, il est impératif de changer profondément cet effet désastreux, en intégrant le plus complètement et le plus fidèlement possible les recommandations des commissions à la réalité du droit.

Troisième facteur explicatif de ce paradoxe : le sentiment d’impunité des responsables politiques convaincus de non-respect de leurs obligations en matière de transparence. Ce sentiment est parfois lié à la différence inévitable entre le temps médiatique et le temps judiciaire, qui voit des faits répréhensibles portés à la connaissance du public mettre de nombreuses années avant de faire l’objet d’une décision judiciaire définitive. L’impunité présidentielle joue d’ailleurs sur cette question un rôle central : la remise en cause des excessives protections dont le Président de la République fait l’objet est au cœur d’une autre proposition de loi constitutionnelle déposée par les auteurs de la présente proposition de loi. Mais au-delà du cas du Président, il convient sans doute de redéfinir le quantum des peines encourues par les responsables politiques convaincus de manquement à leurs obligations et devoirs, et à tout le moins de s’assurer que tout manquement est assorti d’une sanction. En ce sens, l’amendement adopté à l’initiative du groupe majoritaire, dit « amendement Copé-Jacob », qui a dépénalisé le non respect des obligations des parlementaires en matière de déclaration de patrimoine a constitué un signe terriblement négatif envers l’opinion, et a renforcé ce sentiment d’impunité qui sape la confiance entre citoyens et élus.

Enfin, et sans verser dans l’autoflagellation, l’ensemble de la classe politique doit pouvoir convenir que le silence encore trop souvent entretenu sur les rapports personnels entre élus et argent, ou le caractère partiel des informations disponibles pour nos concitoyens ne peut plus perdurer dans un monde ouvert, aux sources et circuits d’informations multiples et – c’est heureux – libres. Bien plus que l’expression de questions légitimes, ou que la mise sur la place publique de pratiques supposées qui demandent à être confirmées, c’est le silence et l’opacité qui nourrissent les populismes et sapent les fondements de notre démocratie. La seule réponse valable et durable est la transparence totale sur la réalité du fonctionnement actuel.

Notons enfin que, dans le souci de traiter de la situation de tous les responsables politiques, et notamment pour ne pas créer de distorsion entre les parlementaires et l’ensemble des élus concernés par cette proposition de loi, ses auteurs ont déposé une proposition de loi organique, qui en est le complément naturel.

Ce dispositif vise tout à la fois à :

– mettre fin aux contournements constatés de l’intention du législateur en matière de financement de la vie politique, notamment par des mesures destinées à lutter contre les dérives liées à la multiplication des micro-partis ;

– systématiser la mise en œuvre de sanctions effectives et réellement dissuasives pour tout responsable public qui ne satisferait pas aux exigences que lui impose la loi, en matière de déclarations de patrimoine ou de revenus tirés de l’exercice de son mandat, ainsi que de financement des activités politiques ;

– transcrire sans délai dans l’arsenal législatif les principales propositions de commission de réflexion pour la prévention des conflits d’intérêts dans la vie publique concernant les responsables politiques, en les étendant également aux élus locaux ;

– assurer une information enfin précise et complète de nos concitoyens sur les situations patrimoniales des titulaires de mandats publics, sur les revenus tirés de l’exercice de ces mandats, ainsi que sur l’utilisation des fonds publics mis à leur disposition pour exercer leurs missions.

Les auteurs de la présente proposition de loi engagent donc tous les parlementaires, quel que soit leur groupe d’appartenance, à adopter sans tarder davantage ce texte, qui constitue un préalable indispensable au rétablissement de la confiance entre les citoyens et leurs représentants.

***

Le chapitre Ier est relatif à la transparence du financement de la vie politique.

L’article premier apporte cinq modifications à la loi n° 88-227 du 11 mars 1988 relative à la transparence financière de la vie politique, dans son paragraphe I et une au code pénal, dans son paragraphe II.

Le vise à empêcher les détournements de la législation sur le financement public des partis politiques. L’article 9 de la loi du 11 mars 1988 prévoit des modalités de financement dérogatoires au droit commun pour les partis politiques qui ne présentent des candidats aux élections législatives qu’outre-mer. Il est proposé de mettre fin au détournement qui peut être fait de ces dérogations, dans les cas où certains parlementaires se rattachent à un parti politique d’outre-mer uniquement pour percevoir la deuxième fraction du financement public, laquelle est immédiatement reversée au parti métropolitain.

Le instaure un plafonnement des dons des personnes physiques aux partis politiques. Les règles actuelles prévoient un plafonnement des dons à 7 500 € par parti. Il est proposé d’instaurer un plafonnement global du même montant : une même personne ne pourrait dès lors pas donner plus de 7 500 €, cette dernière restant libre de répartir cette somme entre le nombre de partis politiques qu’elle souhaite.

Le vise à inclure dans ce plafonnement les cotisations versées en qualité d’adhérent à un parti politique. Un cas particulier est prévu pour les élus, qui pourront excéder le plafond de 7 500 € mais dans la limite de 20 % des indemnités perçues au titre de leur mandat.

Afin de faire respecter ce plafonnement global, le prévoit une obligation, pour les partis politiques, de déclarer à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques la liste des personnes qui ont donné plus de 3 000 € au parti en question, de manière à ce que cette dernière puisse vérifier qu’un même donateur n’a pas excédé le plafond de dons qui lui est autorisé.

Le complète la liste des peines qui sont encourues par les personnes qui violent la législation régissant les dons aux partis politiques, en prévoyant, au-delà de la peine d’emprisonnement et d’amende, une peine complémentaire de privation des droits civiques, et notamment d’inéligibilité.

Le paragraphe II porte de cinq à dix la durée maximale de la peine complémentaire d’inéligibilité pour ce qui est des délits.

Le chapitre II porte sur la transparence de la situation patrimoniale des élus.

L’article 2 renforce les sanctions applicables dans les cas où une personne soumise à l’obligation de déclarer son patrimoine omet sciemment d’en déclarer une part substantielle ou en fournit une évaluation mensongère, de nature à porter atteinte à la sincérité de sa déclaration. Ne sont prévues actuellement qu’une peine de 30 000 € d’amende, la privation des droits civiques et l’interdiction d’exercer une fonction publique. Il est proposé de compléter cette liste par une peine d’emprisonnement de deux ans.

L’article 3 propose de rendre publiques les déclarations de patrimoine qui sont actuellement transmises à la Commission pour la transparence financière de la vie politique, alors qu’elles sont jusqu’ici protégées par les dispositions du code pénal relatives à l’atteinte à la vie privée. Deux précautions sont à prendre. En premier lieu, la publicité ne concernera que les élus soumis à cette déclaration, à l’exclusion de toutes les autres personnes qui doivent également déclarer leur patrimoine, telles que les présidents d’entreprise nationale. En second lieu, les noms de tiers qui figureraient sur ces déclarations de patrimoine devraient être anonymisés afin de ne pas porter atteinte à leur vie privée.

Le chapitre III vise à améliorer la transparence des revenus tirés de l’exercice d’un mandat ou d’une fonction politique.

L’article 4 prévoit une déclaration annuelle de chaque membre du Gouvernement de l’ensemble des rémunérations qu’il a perçues. Devraient par exemple y figurer leur indemnité de membre du Gouvernement, les indemnités reçues au titre d’un mandat local ou pour toute autre fonction publique ou privée occupée. Ces déclarations seraient collectées par le secrétariat général du Gouvernement et rendues publiques sur le site Internet du Gouvernement. Il n’est pas prévu de sanction à l’absence de déclaration, en dehors de la publicité faite de cette absence de déclaration.

L’article 5 étend cette obligation aux élus locaux, que sont les conseillers municipaux (), les conseillers généraux () et les conseillers régionaux (). Ces déclarations ne couvriraient que les rémunérations perçues au titre de l’exercice d’un ou de plusieurs mandats. Il ne saurait donc être question d’y inclure les revenus professionnels des élus. Elles auraient vocation à recenser les cumuls d’indemnités d’élus ainsi que les autres rémunérations perçues au titre du mandat (par exemple en raison de la présence dans un conseil d’administration, dans un établissement public de coopération intercommunale…). Ces déclarations seraient adressées au président de l’exécutif local et accessibles au public. En cas d’absence de déclaration durant trois années consécutives, la collectivité territoriale qui n’a pas reçu de déclaration ne pourrait plus verser son indemnité à l’élu.

Le chapitre IV vise à instaurer une meilleure transparence dans l’attribution des subventions publiques.

Le mécanisme de la réserve parlementaire permet aux membres du Parlement de faire bénéficier certaines collectivités territoriales et associations de financements publics, afin de soutenir l’un de leur projet. L’article 6 prévoit de rendre publique la liste des projets subventionnés par l’intermédiaire de chaque parlementaire, ainsi que celle des sommes qui ont été versées à ce titre.

Le chapitre V vise à prévenir les conflits d’intérêts pour les membres du Gouvernement, les élus et les membres de leur cabinet.

Il traduit dans le droit une partie des recommandations du rapport de la commission de réflexion pour la prévention des conflits d’intérêts dans la vie publique, présidée par M. Jean-Marc Sauvé, et va, sur bien des aspects, plus loin que le projet de loi n° 3704 relatif à la déontologie et à la prévention des conflits d’intérêts dans la vie publique, déposé sur le bureau de l’Assemblée nationale le 27 juillet 2011. En effet, ce projet de loi ne concerne que les membres du Gouvernement, les membres de leur cabinet ainsi que les fonctionnaires, à l’exclusion des élus, notamment locaux. La présente proposition de loi est donc à la fois une version plus ambitieuse de ce projet de loi pour ce qui est des membres du Gouvernement et de leurs collaborateurs, et un complément à ce dernier, dans la mesure où n’est pas ici abordée la situation des fonctionnaires.

L’article 7 inscrit dans la loi la définition des conflits d’intérêts élaborée par la commission de réflexion pour la prévention des conflits d’intérêts dans la vie publique. Il soumet également les élus et les membres du Gouvernement à une triple obligation de probité, d’intégrité et d’impartialité.

L’article 8 concerne la prévention des conflits d’intérêts pour les membres du Gouvernement.

Son premier alinéa prévoit une obligation de déport en cas de conflit d’intérêts rencontré par l’un des membres du Gouvernement. Une suppléance devra alors être organisée, dans les conditions fixées par le pouvoir réglementaire.

Le deuxième alinéa soumet les membres du Gouvernement à l’obligation de déclarer leurs intérêts à leur entrée en fonction puis chaque année. Un modèle de déclaration d’intérêts figure an annexe du rapport de la commission précitée et pourrait servir de guide pour l’établissement de cette déclaration d’intérêts.

Le troisième alinéa prévoit que ces déclarations soient remises au Premier ministre et rendues publiques, à l’exclusion des mentions qui pourraient porter préjudice à un tiers, exception qui serait précisée par un décret.

L’article 9 prévoit un mécanisme de gestion sans droit de regard des instruments financiers détenus par les membres du Gouvernement ainsi que par leurs plus proches collaborateurs. Ce mécanisme s’inspire notamment de celui qui s’applique au sein de certaines autorités administratives indépendantes qui interviennent dans le monde économique ou le régulent.

L’article 10 impose aux membres de cabinets ministériels et aux collaborateurs du Président de la République d’effectuer une déclaration d’intérêts à leur prise de fonction. Contrairement à celle des ministres, leur déclaration d’intérêts serait tenue secrète et remise à leur ministre de tutelle, ou au secrétaire général du Gouvernement pour les collaborateurs du Président de la République. Le respect de cette obligation déclarative serait garanti par l’existence d’une sanction pénale.

L’article 11 pose les grands principes de la prévention des conflits d’intérêts susceptibles de concerner les élus locaux et les introduit au début du code général des collectivités territoriales.

Un nouvel article L. 1121-1 prévoirait une obligation de déport, pour les membres de l’assemblée délibérante en cas de conflit d’intérêts potentiel. Il fixerait également des règles de suppléance pour les membres de l’exécutif local.

L’article L. 1121-2 exigerait une déclaration d’intérêts des présidents de conseil régional, de conseil général, des maires des villes de plus de 100 000 habitants et des présidents d’EPCI dont les communes membres regroupent plus de 100 000 habitants. Seraient également soumis à cette obligation les conseillers (régionaux, départementaux et municipaux) de ces collectivités et les délégués de ces EPCI qui ont reçu une délégation de la part du président de l’exécutif local, ainsi que les responsables de cabinet de président d’exécutif local précités.

Pour les premiers, la déclaration serait adressée à l’autorité administrative indépendante créée par la présente proposition de loi et, pour les autres, au président de l’exécutif local. Ces déclarations n’auraient pas vocation à être rendues publiques. En revanche, l’absence de déclaration serait passible de sanctions pénales.

Conformément à l’une des recommandations du rapport de la commission de réflexion pour la prévention des conflits d’intérêts dans la vie publique, l’article 12 précise le champ d’application du délit de prise illégale d’intérêts, en faisant référence aux obligations pesant, notamment, sur les élus et sur les ministres.

Le chapitre VI crée une nouvelle autorité administrative indépendante, l’Autorité de la déontologie de la vie publique.

Cette Autorité se substituerait à la Commission pour la transparence financière de la vie politique. Elle aurait également vocation, ainsi que le préconise le rapport précité, à se substituer aux diverses commissions de déontologie existantes, domaine qui excède cependant le champ de la présente proposition de loi.

L’article 13 définit la composition de l’Autorité de la déontologie de la vie publique. Contrairement à ce que prévoit le projet de loi du Gouvernement, cette autorité serait uniquement composée de magistrats, afin de lui donner toutes les garanties d’indépendance. Il s’agirait d’une instance collégiale, présidée par le Vice-président du Conseil d’État, et dont la composition reprendrait celle de l’actuelle Commission pour la transparence financière de la vie politique.

L’article 14 expose la première mission de cette nouvelle Autorité, qui serait de veiller à l’application des dispositions de la présente proposition de loi relatives à la prévention des conflits d’intérêts.

Le  prévoit qu’elle puisse être consultée, de manière informelle et secrète, par toute personne qui a l’obligation de remplir une déclaration d’intérêts. Ces dernières pourraient lui demander un avis, dans les mêmes circonstances, si elles se trouvent confrontées à un conflit d’intérêts qu’elles souhaitent prévenir.

Le  habilite l’Autorité à rendre un avis sur le respect, par un membre du Gouvernement, des obligations qui découlent pour lui de l’article 8 (suppléance et déclaration d’intérêts), à la demande du Premier ministre ou de 30 parlementaires. Ces avis ne seraient pas rendus publics par l’Autorité, mais uniquement adressés au ministre concerné et aux personnes qui l’ont demandé.

Le  établit le même mécanisme en ce qui concerne les élus locaux. Tout membre de l’assemblée délibérante locale pourra demander son avis à l’Autorité sur le respect, par le président ou un membre de l’exécutif local, de ses obligations en matière de prévention des conflits d’intérêts. Ces avis ne seraient pas rendus publics, mais seulement transmis aux personnes intéressées.

Le  permet à un membre du Gouvernement ou à un président d’exécutif local de demander un avis à l’Autorité sur une situation de potentiel conflit d’intérêts touchant l’un des membres de leur cabinet. Ces avis seraient secrets.

Le autorise l’Autorité à émettre des recommandations, éventuellement publiques, en matière de prévention des conflits d’intérêts, de sa propre initiative ou à la demande du Premier ministre.

Le dernier alinéa de cet article autorise une saisine du Défenseur des droits ou une autosaisine de l’Autorité dans les cas prévus au 2° (conflit d’intérêts d’un ministre), 3° (d’un élu local) et 4° (d’un membre de cabinet).

L’article 15 confie à l’Autorité les missions qui étaient celles de la Commission pour la transparence financière de la vie politique.

L’article 16 prévoit que l’Autorité établisse et rende public un rapport annuel, qui devra être exempt de toute indication nominale.

Le chapitre VII comprend des dispositions finales et transitoires.

L’article 17 substitue l’ensemble des références à la Commission pour la transparence financière de la vie politique par des références à l’Autorité de la déontologie de la vie publique.

L’article 18 prévoit la transmission des dossiers et procédures en cours entre les deux autorités administratives indépendantes.

L’article 19 gage la présente proposition de loi.

PROPOSITION DE LOI

Chapitre Ier

Transparence du financement de la vie politique

Article 1er

I. – La loi n° 88-227 du 11 mars 1988 relative à la transparence financière de la vie politique est ainsi modifiée :

1° Après le septième alinéa de l’article 9, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Un parlementaire, élu dans une circonscription autre que celle d’un département d’outre-mer, et autre que Saint-Pierre-et-Miquelon, Saint-Barthélemy, Saint-Martin, Mayotte, la Nouvelle-Calédonie, la Polynésie Française et les Îles Wallis et Futuna, ne peut pas se rattacher à un parti ou groupement politique qui n’a présenté des candidats lors du plus récent renouvellement de l’Assemblée nationale, que dans un ou plusieurs départements d’outre-mer, ou à Saint-Pierre-et-Miquelon, Saint-Barthélemy, Saint-Martin, à Mayotte, en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie Française ou dans les Îles Wallis et Futuna. »

2° Au premier alinéa de l’article 11-4, les mots : « même parti politique » sont remplacés par les mots : « ou de plusieurs partis politiques »

3° Après le premier alinéa de l’article 11-4, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Le montant cumulé des dons visés au premier alinéa et des cotisations versées en qualité d’adhérent d’un ou de plusieurs partis politiques ne peut excéder le plafond de 7 500 €, à l’exception des cotisations qui sont versées par les élus, lesquelles ne peuvent excéder 20 % du montant des indemnités perçues sur le fondement de leurs mandats. »

4° Le troisième alinéa de l’article 11-4 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Les associations de financement et les mandataires financiers communiquent chaque année à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques la liste des personnes ayant consenti annuellement un ou plusieurs dons d’une valeur totale supérieure à 3 000 €. »

5° L’article 11-5 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Ils encourent également l’interdiction des droits civiques mentionnés aux 1° et 2° de l’article 131-26 du code pénal suivant les modalités prévues par cet article. »

II. – À l’article 131-26 du code pénal, après le mot : « crime », la fin du septième alinéa est ainsi rédigée : « ou délit. »

Chapitre II

Transparence de la situation patrimoniale des élus

Article 2

Au I de l’article 5-1 de la loi n° 88-227 du 11 mars 1988 relative à la transparence financière de la vie politique, après les mots : « puni de » sont insérés les mots : « deux ans d’emprisonnement, »

Article 3

La loi n° 88-227 du 11 mars 1988 relative à la transparence financière de la vie politique est ainsi modifiée :

1° Après le sixième alinéa du II de l’article 3, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Par dérogation aux deux alinéas précédents, les déclarations des personnes mentionnées à l’article 1er et aux deux premiers alinéas de l’article 2 sont rendues publiques sur le site Internet de l’Autorité de la déontologie de la vie publique. Les noms autres que celui de la personne qui effectue la déclaration figurant sur cette dernière sont anonymisés. »

2° Le premier alinéa de l’article 4 est ainsi rédigé :

« Le fait de publier ou de divulguer, de quelque manière que ce soit, tout ou partie des déclarations mentionnées au dernier alinéa de l’article 2 de la présente loi est puni des peines prévues par l’article 226-1 du code pénal. »

Chapitre III

Transparence des revenus tirés de l’exercice
d’un mandat ou d’une fonction politique

Article 4

Les membres du Gouvernement adressent chaque année, avant le 31 janvier, une déclaration au Premier ministre, qui recense les rémunérations, de quelque nature qu’elles soient, qu’ils ont perçues durant l’année écoulée. Le secrétariat général du Gouvernement tient un registre des déclarations faites par les membres du Gouvernement, qui sont rendues publiques sur le site Internet du Gouvernement.

Est également rendue publique la liste des membres du Gouvernement qui n’ont pas adressé de déclaration au Premier ministre.

Article 5

Le code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :

1° Après l’article L. 2123-24-1, il est inséré un article L. 2123-24-2 ainsi rédigé :

« Art. L. 2123-24-2. – Les personnes visées au I de l’article L. 2123-20 déclarent chaque année, avant le 31 janvier, au maire de la commune, les rémunérations de quelque nature qu’elles soient qu’elles ont perçues au titre de chacun de leurs mandats. La commune tient un registre des déclarations faites par ces personnes, qu’elle rend publiques. Elle rend également publique la liste de ses membres qui n’ont pas effectué cette déclaration.

« Les indemnités prévues par la présente sous-section ne peuvent pas être versées aux personnes visées au premier alinéa qui n’ont pas effectué de déclaration pendant trois années consécutives. »

2° Après l’article L. 3123-19-2, il est inséré un article L. 3123-19-3 ainsi rédigé :

« Art. L. 3123-19-3. – Les membres du conseil général déclarent chaque année, avant le 31 janvier, au président du conseil général, les rémunérations de quelque nature qu’elles soient qu’ils ont perçues au titre de chacun de leurs mandats. Le conseil général tient un registre des déclarations faites par ces personnes, qu’il rend publiques. Il rend également publique la liste de ses membres qui n’ont pas effectué cette déclaration.

« Les indemnités prévues par la présente section ne peuvent pas être versées aux personnes visées au premier alinéa qui n’ont pas effectué de déclaration pendant trois années consécutives. »

3° Après l’article L. 4135-19-2, il est inséré un article L. 4135-19-3 ainsi rédigé :

« Art. L. 4135-19-3. – Les membres du conseil régional déclarent chaque année, avant le 31 janvier, au président du conseil régional, les rémunérations de quelque nature qu’elles soient qu’ils ont perçues au titre de chacun de leurs mandats. Le conseil régional tient un registre des déclarations faites par ces personnes, qu’il rend publiques. Il rend également publique la liste de ses membres qui n’ont pas effectué cette déclaration.

« Les indemnités prévues par la présente section ne peuvent pas être versées aux personnes visées au premier alinéa qui n’ont pas effectué de déclaration pendant trois années consécutives. »

Chapitre IV

Transparence de l’attribution des subventions publiques

Article 6

Après l’article 13 de l’ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires, il est inséré un article 13-1 ainsi rédigé :

« Art. 13-1. – Les membres de l’Assemblée nationale et du Sénat communiquent à leur assemblée, au plus tard le 30 juin de chaque année, la liste des subventions versées par l’État par leur intermédiaire durant l’année écoulée. Cette liste comprend, pour chaque subvention, l’indication de la personne bénéficiaire, du montant versé et du projet financé. Chaque assemblée tient un registre des listes qui lui sont adressées, qu’elle rend publiques sur son site Internet. »

Chapitre V

Prévention des conflits d’intérêts

Article 7

Les titulaires d’un mandat électif et les membres du Gouvernement exercent leurs fonctions avec probité, intégrité et impartialité.

Ils veillent à prévenir ou à faire cesser immédiatement les situations de conflit d’intérêts entendues comme des situations d’interférence entre les devoirs inhérents à leurs fonctions et un intérêt privé qui, par sa nature et son intensité, peut raisonnablement être regardé comme pouvant influencer ou paraître influencer l’exercice de ces fonctions.

Au sens et pour l’application du précédent alinéa, l’intérêt privé d’une personne concourant à l’exercice d’une mission de service public s’entend d’un avantage pour elle-même, sa famille, ses proches ou des personnes ou organisations avec lesquelles elle entretient ou a entretenu des relations d’affaires ou professionnelles significatives, ou avec lesquelles elle est directement liée par des participations ou des obligations financières ou civiles.

Ne peuvent être regardés comme de nature à susciter des conflits d’intérêts, les intérêts en cause dans les décisions de portée générale, les intérêts qui se rattachent à une vaste catégorie de personnes, ainsi que ceux qui touchent à la rémunération ou aux avantages sociaux d’une personne concourant à l’exercice d’une mission de service public.

Article 8

Lorsqu’ils estiment se trouver dans une situation dans laquelle leur probité, leur intégrité ou leur impartialité pourrait être mise en doute, les membres du Gouvernement apprécient s’ils doivent être suppléés. Les conditions de cette suppléance sont fixées par un décret en Conseil d’État.

Ils sont tenus, lors de leur prise de fonctions de déclarer leurs intérêts. Les déclarations sont mises à jour chaque année. Le modèle, le contenu et les conditions de mise à jour et de conservation des déclarations d’intérêts sont fixés par un décret en Conseil d’État.

Les déclarations d’intérêts sont remises au Premier ministre et rendues publiques dans les conditions et sous les réserves fixées par un décret en Conseil d’État.

Article 9

Les instruments financiers détenus par les membres du Gouvernement et leurs directeurs et directeurs-adjoints de cabinet sont gérés dans des conditions excluant tout droit de regard de leur part, pendant la durée de leurs fonctions.

Les conditions d’application du présent article sont fixées par un décret en Conseil d’État.

Article 10

Les membres des cabinets ministériels et les collaborateurs du Président de la République sont tenus, lors de leur prise de fonctions, de déclarer leurs intérêts selon les modalités prévues par le deuxième alinéa de l’article 8 de la présente loi.

Les déclarations d’intérêts sont remises :

– au secrétaire général du Gouvernement pour les collaborateurs du Président de la République ;

– au Premier ministre pour les membres de son cabinet ;

– au ministre qui a autorité sur l’intéressé pour les autres membres de cabinet.

Ces déclarations ne sont communicables qu’au déclarant, à sa demande expresse, et à l’Autorité de la déontologie de la vie publique, lorsqu’elle en fait la demande.

Le fait pour une personne mentionnée au présent article d’omettre sciemment de déclarer ses intérêts ou d’effectuer une déclaration manifestement mensongère est puni de 30 000 € d’amende et de l’interdiction des droits civiques mentionnés aux 1° et 2° de l’article 131-26 du code pénal, suivant les modalités prévues par cet article.

Article 11

La première partie du code général des collectivités territoriales est ainsi modifiée :

1° Le titre du livre Ier est complété par les mots : « et de la démocratie locale »

2° Le livre Ier est complété par un titre II ainsi rédigé :

« TITRE II

« PRÉVENTION DES CONFLITS D’INTÉRÊTS

« Chapitre unique

« Art. L. 1121-1. – Lorsqu’ils estiment que l’un des sujets se trouvant à l’ordre du jour de l’assemblée locale les place dans une situation dans laquelle leur probité, leur intégrité ou leur impartialité pourrait être mise en doute, les élus locaux s’abstiennent de siéger.

« Lorsqu’ils estiment se trouver dans une situation dans laquelle leur probité, leur intégrité ou leur impartialité pourrait être mise en doute, les membres de l’exécutif local sont suppléés dans les conditions fixées par un arrêté du président de l’exécutif local.

« Les actes pris par les autorités locales ne peuvent être annulés par le juge administratif sur le seul fondement du présent article.

« Art. L. 1121-2. – Sont tenus, lors de leur prise de fonctions, de déclarer leurs intérêts :

« 1° Les présidents des conseils régionaux, des conseils généraux, les maires des communes de plus de 100 000 habitants et les présidents d’établissement public de coopération intercommunale quand les communes qui en sont membres regroupent une population totale supérieure à 100 000 habitants ;

« 2° Les conseillers régionaux et généraux ayant reçu délégation ainsi que les conseillers municipaux et les délégués des établissements publics de coopération intercommunale mentionnés au 1° ayant reçu délégation ;

« 3° Les responsables des cabinets des autorités territoriales des collectivités territoriales et des établissements publics mentionnés au 1°.

« Les personnes mentionnées au 1° remettent leur déclaration à l’Autorité de la déontologie de la vie publique. Elles ne sont communicables qu’au déclarant, à sa demande expresse.

« Les autres déclarations sont remises au président de l’exécutif local ou de l’établissement public concerné. Elles ne sont communicables qu’au déclarant, à sa demande expresse, et à l’Autorité de la déontologie de la vie publique, lorsqu’elle en fait la demande.

« Les déclarations sont mises à jour chaque année. Le modèle, le contenu et les conditions de mise à jour et de conservation des déclarations d’intérêts sont fixés par décret en Conseil d’État.

« Le fait pour une personne mentionnée au présent article d’omettre sciemment de déclarer ses intérêts ou d’effectuer une déclaration manifestement mensongère est puni de 30 000 € d’amende et de l’interdiction des droits civiques mentionnés aux 1° et 2° de l’article 131-26 du code pénal suivant les modalités prévues par cet article. »

Article 12

Au premier alinéa de l’article 432-12 du code pénal, le mot : « quelconque » est remplacé par les mots : « de nature à compromettre son impartialité, son indépendance ou son objectivité ».

Chapitre VI

Autorité de la déontologie de la vie publique

Article 13

Il est institué une autorité administrative indépendante, dénommée Autorité de la déontologie de la vie publique, ainsi composée :

1° Trois membres de droit :

– le vice-président du Conseil d’État, président ;

– le premier président de la Cour de cassation ;

– le premier président de la Cour des comptes.

2° Six membres titulaires et six membres suppléants ainsi désignés :

– quatre présidents de section ou conseillers d’État, en activité ou honoraires, dont deux ont la qualité de suppléant, élus par l’assemblée générale du Conseil d’État ;

– quatre présidents de chambre ou conseillers à la Cour de cassation, en activité ou honoraires, dont deux ont la qualité de suppléant, élus par l’ensemble des magistrats du siège hors hiérarchie de la Cour ;

– quatre présidents de chambre ou conseillers maîtres à la Cour des comptes, en activité ou honoraires, dont deux ont la qualité de suppléant, élus par la chambre du Conseil.

Les membres de l’Autorité sont nommés par décret.

Le secrétaire général de l’Autorité est nommé par arrêté du garde des Sceaux sur proposition des membres de droit.

L’Autorité est assistée de rapporteurs désignés par le vice-président du Conseil d’État parmi les membres, en activité ou honoraires, du Conseil d’État et du corps des conseillers de tribunaux administratifs et cours administratives d’appel, par le premier président de la Cour de cassation parmi les magistrats, en activité ou honoraires, de la Cour de cassation et des cours et tribunaux, par le premier président de la Cour des comptes parmi les magistrats, en activité ou honoraires, de la Cour des comptes et des chambres régionales des comptes. Elle peut également bénéficier pour l’accomplissement de ses tâches de la mise à disposition de fonctionnaires.

Un décret en Conseil d’État fixe l’organisation et le fonctionnement de l’Autorité, ainsi que les procédures applicables devant elle.

Article 14

L’Autorité de la déontologie de la vie publique a pour mission de suivre l’application des dispositions de la présente loi dans son domaine de compétences.

À ce titre, elle est chargée :

1° De rendre des avis à la demande des personnes mentionnées aux articles 8 et 10 de la présente loi et à l’article L. 1121-2 du code général des collectivités territoriales sur les questions d’ordre déontologique qu’elles rencontrent dans l’établissement de leur déclaration d’intérêts ou dans la prévention des conflits d’intérêts susceptibles de les concerner. Ces avis, ainsi que les documents sur la base desquels ils sont rendus, sont secrets ;

2° De rendre des avis, à la demande du Premier ministre ou de trente parlementaires sur le respect, par un membre du Gouvernement, de l’article 8 de la présente loi. Ces avis sont transmis aux personnes qui ont saisi l’autorité et au membre du Gouvernement concerné ;

3° De rendre des avis, à la demande d’un membre d’une assemblée locale mentionné au 1° de l’article L. 1121-2 du code général des collectivités territoriales, sur le respect, par une personne mentionnée au 1° ou au 2° de cet article, des obligations découlant de l’article L. 1121-1 du même code. Ces avis sont transmis aux personnes qui ont saisi l’autorité et à la personne qui a fait l’objet de l’avis ;

4° De rendre des avis, à la demande du Premier ministre ou de l’une des personnes mentionnées au 1° de l’article L. 1121-2, sur les questions d’ordre déontologique qu’elles rencontrent dans la prévention des conflits d’intérêts susceptibles de concerner l’un des membres de leur cabinet. Ces avis, ainsi que les documents sur la base desquels ils sont rendus, sont secrets ;

5° D’émettre, à la demande du Premier ministre ou de sa propre initiative, des recommandations sur l’application des dispositions de la présente loi, qu’elle adresse aux autorités publiques intéressées qu’elle détermine, ou, le cas échéant, aux personnes chargées des questions de déontologie dans les autorités administratives, les collectivités territoriales et les établissements publics de coopération intercommunale et, pour les membres du Gouvernement, au secrétaire général du Gouvernement. Elle peut les rendre publiques.

L’Autorité peut également être saisie par le Défenseur des droits ou par son président aux fins d’exercer les compétences qu’elle détient sur le fondement des 2°, 3° et 4°.

Article 15

L’article 3 de la loi n° 88-227 du 11 mars 1988 relative à la transparence financière de la vie politique est ainsi rédigé :

« Art. 3. – L’Autorité de la déontologie de la vie publique, mentionnée à l’article 13 de la loi n°          du                   relative à la transparence de la vie publique et à la prévention des conflits d’intérêts, a également pour mission de recevoir les déclarations de situation patrimoniale des membres du Parlement et des personnes mentionnées aux articles 1er et 2 de la présente loi.

« Elle informe les autorités compétentes du non-respect par les personnes mentionnées aux articles 1er et 2 de la présente loi des obligations définies par ces articles après qu’elles ont été appelées à fournir des explications.

« Ces personnes communiquent à l’Autorité, pendant l’exercice de leur mandat ou de leurs fonctions, toutes les modifications substantielles de leur patrimoine, chaque fois qu’elles le jugent utile.

« L’Autorité peut demander aux personnes mentionnées aux mêmes articles communication des déclarations qu’elles ont souscrites en application des articles 170 à 175 A du code général des impôts et, le cas échéant, en application de l’article 885 W du même code. À défaut de communication dans un délai de deux mois de ces déclarations, elle peut demander à l’administration fiscale copie de ces mêmes déclarations.

« L’Autorité assure le caractère confidentiel des déclarations reçues ainsi que des observations formulées, le cas échéant, par les déclarants sur l’évolution de leur patrimoine.

« Les déclarations déposées et les observations formulées ne peuvent être communiquées qu’à la demande expresse du déclarant ou de ses ayants droit ou sur requête des autorités judiciaires lorsque leur communication est nécessaire à la solution du litige ou utile pour la découverte de la vérité.

« L’Autorité apprécie la variation des situations patrimoniales des membres du Parlement et des personnes mentionnées aux articles 1er et 2 de la présente loi telle qu’elle résulte des déclarations et des observations qu’ils ont pu lui adresser.

« Dans le cas où l’Autorité a relevé, après que l’intéressé aura été mis en mesure de faire ses observations, des évolutions de patrimoine pour lesquelles elle ne dispose pas d’explications, elle transmet le dossier au parquet. »

Article 16

L’Autorité établit un rapport annuel, transmis au Président de la République, au Premier ministre et au Parlement, qu’elle rend public. Ce rapport ne contient aucune indication nominale quant aux situations patrimoniales et aux déclarations d’intérêts.

Chapitre VII

Dispositions finales

Article 17

La loi n° 88-227 du 11 mars 1988 relative à la transparence financière de la vie politique est ainsi modifiée :

I. – Au premier alinéa de l’article 1er, les mots : « la commission » sont remplacés par les mots : « l’Autorité ».

II. – À l’article 2, les mots : « la commission » sont remplacés, par trois fois, par les mots : « l’Autorité ».

III. – Au dernier alinéa de l’article 4, les mots : « la Commission pour la transparence financière de la vie politique », sont remplacés par les mots : « l’Autorité de la déontologie de la vie publique ».

IV. – Au I de l’article 5-1, les mots : « la Commission pour la transparence financière de la vie politique », sont remplacés par les mots : « l’Autorité de la déontologie de la vie publique ».

Article 18

Les procédures en cours devant la commission pour la transparence financière de la vie politique, à la date d’installation de l’Autorité de la déontologie de la vie publique, se poursuivent devant cette autorité.

Article 19

Les charges qui pourraient résulter de l’application de la présente loi pour l’Autorité de la déontologie de la vie publique sont compensées à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Les charges qui pourraient résulter de l’application de la présente loi pour les collectivités territoriales sont compensées à due concurrence par la majoration de la dotation globale de fonctionnement et, corrélativement pour l’État, par la création d’une taxe additionnelle aux droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.


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