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N
° 685

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 5 février 2008.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES SUR LE PROJET DE LOI, adopté par le Sénat, autorisant l’approbation de la convention d’extradition entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Corée,

PAR M. André SCHNEIDER,

Député

Voir les numéros  :

Sénat : 456 (2006-2007), 121 et T.A. 38 (2007-2008)

Assemblée nationale : 519

INTRODUCTION 5

I – LA CORÉE : UN PARTENAIRE MAJEUR DE LA FRANCE DANS LE NORD-EST ASIATIQUE 7

A – DES RELATIONS POLITIQUES ET ÉCONOMIQUES RENFORCÉES 7

1) Un dialogue politique riche 7

2) Des relations économiques croissantes 8

B – UNE COOPÉRATION JUDICIAIRE À RENFORCER 9

1) Les progrès de la coopération judiciaire 9

2) Des lacunes en matière d’extradition 10

II – UNE CONVENTION POUR FACILITER LES EXTRADITIONS 11

A – UNE CONVENTION TRÈS ATTENDUE 11

B – LE CONTENU ET LA FORME DE LA DEMANDE D’EXTRADITION 12

1) L’instauration d’une « obligation d’extrader » et d’une autorisation de transit entre la France et la Corée 12

2) Le champ d’application de la convention 12

3) Les exigences formelles de recevabilité d’une demande d’extradition 13

C – LES RÈGLES À RESPECTER POUR LA PROCÉDURE D’EXTRADITION 14

1) La procédure de remise de la personne concernée 14

2) Les possibilités de poursuite et de jugement de la personne extradée 14

D – LES CONDITIONS DE REFUS D’UNE EXTRADITION 15

1) Le cas de demandes d’extradition concurrentes 15

2) Les motifs obligatoires et facultatifs de refus d’extradition 15

3) Deux motifs particuliers de refus d’extradition : la cause de nationalité et la cause de peine capitale. 16

CONCLUSION 17

EXAMEN EN COMMISSION 19

Mesdames, Messieurs,

Le présent projet de loi a pour objet d’autoriser l’approbation de la convention d’extradition entre la République française et la République de Corée signée le 6 juin 2006 à Paris.

Plus de 80 pays sont déjà liés à la France par des conventions d’extradition similaires, multilatérales ou bilatérales. Toutes ces conventions s’inspirent très largement de la convention européenne d’extradition du 13 décembre 1957, qui repose sur les mêmes principes fondamentaux que la législation française en la matière.

La présente convention a pour but principal de compléter le système d’entraide judiciaire déjà existant, et notamment de compléter notre dispositif d’entraide en matière pénale.

Après avoir évoqué les relations entre la France et la Corée, et notamment l’état de la coopération judiciaire entre les deux pays, votre rapporteur présentera le dispositif et les enjeux de la nouvelle convention d’extradition.

I – LA CORÉE : UN PARTENAIRE MAJEUR DE LA FRANCE DANS LE NORD-EST ASIATIQUE

La République de Corée, d’une superficie d’environ 100 000 km², abrite sur son territoire 48 millions d’habitants.

Sur le plan politique, la République de Corée verra dans quelques mois l’élection d’une nouvelle assemblée parlementaire : en effet, les élections législatives du printemps feront suite à l’élection présidentielle de décembre dernier, à l’occasion de laquelle le candidat conservateur Lee Myung-bak a été élu. Ce dernier prendra officiellement ses fonctions de Président de la République de Corée le 25 février 2008.

En quelques années, les relations franco-coréennes se sont considérablement densifiées : la mise en place d’un dialogue politique et l’importance des liens économiques entre les deux pays sont à l’origine de nombreuses avancées dans le domaine diplomatique, et notamment en matière de coopération judiciaire.

A – Des relations politiques et économiques renforcées

En 2006, a été commémoré le 120ème anniversaire des relations diplomatiques entre la France et la République de Corée. En effet, les relations économiques et politiques entre les deux Etats ont officiellement commencé le 4 juin 1886 par la signature d’un traité d’amitié et de commerce. Depuis, les relations ente les deux pays n’ont cessé de se développer, et ont atteint ces dernières années une densité politique et économique remarquable.

1) Un dialogue politique riche

Le renouveau dans le dialogue franco-coréen a été visible dès les années 2000. La visite officielle du Président Roh Moo-hyun en France, en décembre 2004, a donné l’impulsion pour la création d’un « partenariat global » entre la France et la République de Corée.

Les visites croisées des présidents et des ministres des Affaires étrangères ont renforcé les liens diplomatiques et politiques entre les deux républiques. De nombreux programmes de coopération scientifique, économique et culturel ont été conçus à l’occasion de la visite en France du Premier Ministre coréen en juin 2006. La présente convention s’inscrit pleinement dans ce mouvement de consolidation des relations entre la France et la République de Corée.

2) Des relations économiques croissantes

La République de Corée est aujourd’hui la onzième puissance économique du monde : avec un PIB de 880 milliards de dollars, elle affiche des performances économiques solides (inflation maîtrisée à 2,4 %, balance commerciale excédentaire d’environ 17 milliards de dollars, PIB par habitant de 18 000 dollars, taux de chômage fixe à 3,5 %, etc.). Son taux de croissance (+ 5 %) reste stable et élevé depuis plusieurs années.

Cependant, l’économie sud-coréenne reste fragilisée par les conséquences de la crise asiatique de 1997. En effet, les investissements sud-coréens à l’étranger et les placements internationaux en Corée ont connu en 1997 une chute considérable. La France a été particulièrement concernée par la contraction des investissements coréens en Europe (par exemple, fermeture en 2002-2003 des trois usines françaises de Daewoo, qui employaient 1300 salariés en Lorraine). Ainsi, malgré la croissance actuelle et la bonne santé économique du pays, les effets négatifs de la crise mettront un certain temps à se résorber entièrement.

L’Union Européenne est le deuxième client de la République de Corée après la Chine, et avant les Etats-Unis. Elle est également le quatrième fournisseur de la République coréenne (après le Japon, la Chine, et les Etats-Unis).

En raison des échanges commerciaux très importants entre les deux blocs économiques, des négociations ont débuté en mai 2007 en vue de la conclusion d’un accord de libre échange entre l’Union Européenne et la Corée du Sud.

Les échanges commerciaux entre la France et la République de Corée connaissent chaque année une augmentation importante (+ 33 % en moyenne) et ont atteint 7 milliards d’euros en 2006. Aujourd’hui, la Corée du Sud est le troisième partenaire commercial de la France en Asie. Les exportations françaises vers la Corée s’élèvent à 2,9 milliards d’euros, tandis que les exportations coréennes vers la France ont atteint 4,2 milliards d’euros en 2006.

La France est aujourd’hui le quatrième investisseur étranger en Corée. Environ 160 entreprises françaises sont implantées en Corée. Elles représentent environ 1 % des parts du marché coréen, ce qui signifie que le potentiel de développement des entreprises françaises en Corée est encore important. De grands projets ont déjà été réalisés en Corée par les entreprises françaises, comme par exemple la création, en avril 2004, du train à grande vitesse franco-coréen KTX.

Les investissements coréens en France restent, quant à eux, modestes, et ont souffert de la crise asiatique de 1997 durant laquelle la Corée avait été contrainte de retirer ses capitaux placés à l’étranger. Ils représentent aujourd’hui un total de 195 millions d’euros. Seuls deux projets d’envergure ont vu le jour depuis 1998, dont l’implantation en région parisienne du centre européen de recherche et développement du fabriquant coréen LG Electronics.

La densification des relations économiques a conduit à l’installation d’un certain nombre de ressortissants de chaque Etat sur le territoire de l’autre : actuellement, 7 000 ressortissants coréens vivent sur le territoire français et 2 000 ressortissants français résident en Corée du Sud.

Cette densité des relations économiques et politiques entre la France et la Corée a permis de nombreuses avancées dans le domaine de la coopération judiciaire.

B – Une coopération judiciaire à renforcer

Les nombreuses réformes qui ont lieu actuellement en Corée tendent à rapprocher le système judiciaire coréen du système français, ce qui facilitera la coopération entre les deux pays.

1) Les progrès de la coopération judiciaire

Sous l’impulsion de l’ancien Président Roh Moo hyun, un grand chantier de réformes judiciaires a été ouvert. A la fin de l’année 2004, le comité des réformes judiciaires, rattaché à la Cour Suprême coréenne, a formulé 25 propositions destinées à renforcer les droits de l’homme et les droits de la défense lors des procédures judiciaires. Une commission présidentielle a par la suite cherché à concrétiser ces propositions. A ce jour, au moins six textes de lois ont été adoptés par l’Assemblée Nationale coréenne. Ces textes tendent à rapprocher le système judiciaire coréen de notre système : facilitation du recours aux avocats commis d’office pour les plaignants démunis, renforcement des sanctions en cas de corruption des juges ou des procureurs, meilleure protection des victimes, droit d’appel même devant des tribunaux militaires, etc. D’autres textes sont actuellement à l’étude, comme celui qui prévoit l’introduction d’un système de jurés dans les procès criminels.

Une convention bilatérale d’entraide en matière judiciaire en matière pénale lie déjà la France et la République de Corée. Elle a été signée le 2 mars 1995. Depuis, le système judiciaire de Corée a subi de profonds changements et la Corée est devenue partie à de nouvelles conventions internationales qui traitent de coopération judiciaire internationale. Ainsi, en raison de ces évolutions, un renforcement de la coopération judiciaire en matière pénale était tout à fait envisageable entre les Républiques française et coréenne.

« L’affaire Courjaut » a souligné la nécessité et la pertinence de l’entrée en vigueur d’une convention d’extradition entre les deux pays (1). En l’espèce, la coopération entre les autorités françaises et coréennes a été bonne (commission rogatoire accordée aux magistrats et officiers de police français par les autorités coréennes, procès du couple Courjaut réalisé sur le territoire français, etc.). Cette affaire a néanmoins mis en lumière la nécessité d’une clarification des règles juridiques encadrant les procédures d’extradition entre la France et la Corée.

2) Des lacunes en matière d’extradition

En l’absence de convention internationale, les dossiers d’extradition sont régis par les législations nationales, donc particulières à chaque Etat. Pour la France, la législation en matière d’extradition s’appuie sur les articles 696 et suivants du code de procédure pénale. La disparité des législations nationales peut être source de blocage et de manque de coopération judiciaire entre les Etats. En instaurant des règles communes aux parties contractantes, ces conventions sont un outil précieux de coopération judiciaire internationale.

Les Républiques française et coréenne sont déjà toutes deux parties à des conventions internationales en matière d’extradition et de coopération judiciaire.

Les deux pays sont parties à la convention du Conseil de l’Europe du 21 mars 1983 sur le transfèrement des personnes condamnées. La Corée y a adhéré le 1er novembre 2005. A ce jour, 57 Etats sont parties à cette convention. Elle permet aux personnes condamnées à une sanction privative de liberté en dehors de leur pays d’origine d’y rentrer, sous conditions, pour y purger leur peine. Cette possibilité a été instaurée afin de favoriser la réinsertion sociale des condamnés après leur emprisonnement. L’Etat ayant condamné l’accusé n’est cependant pas obligé de satisfaire la demande de transfèrement.

La France et la Corée sont parties aux conventions des Nations Unies des 30 mai 1961 et du 19 décembre 1998 relative à la lutte contre les produits stupéfiants.

La présente convention permettra à la France d’accroître le nombre de ses Etats partenaires en matière de coopération judiciaire.

Aujourd’hui, la France est liée à 37 Etats par le biais de conventions bilatérales d’extradition. Deux accords spécifiques d’extradition ont été signés avec la Chine et les Emirats Arabes Unis, et des négociations sont en cours avec la Colombie, le Liban, la Jordanie et le Venezuela.

Ces conventions bilatérales d’extradition s’inspirent très fortement de la convention européenne d’extradition du 13 décembre 1957. Quarante sept Etats sont parties à cette convention, dont la France. Cette convention d’extradition a pour but de faciliter la procédure par laquelle un des Etats remet à l’autre Etat, sur sa demande, une personne se trouvant sur son territoire. L’Etat requérant l’extradition peut alors, par cette procédure, juger la personne transférée ou lui appliquer la peine prononcée par les tribunaux de l’Etat requis. Toutes les conventions d’extradition signée par la France, y compris la présente convention, visent le même objectif, mais elles mettent en place des conditions d’extradition particulières, qui prennent en compte les particularités du système judiciaire de l’Etat partenaire.

II – une convention pour faciliter les extraditions

Comme toutes les autres conventions bilatérales signées par la France, la convention d’extradition avec la République de Corée, signée le 6 juin 2006, s’inspire des stipulations de la Convention du Conseil de l’Europe du 21 mars 1983 et de la convention européenne sur l’entraide judiciaire en matière pénale du 20 avril 1959.

A – Une convention très attendue

Sur la base d’un projet présenté par la Corée en 2005, une session de négociations s’est ouverte en février 2006. Cette session unique a permis d’avaliser le texte de la présente convention, qui a été signé à Paris, le 6 juin 2006, à l’occasion de la visite officielle en France du Premier ministre coréen. La rapidité avec laquelle les deux parties ont trouvé un accord est une preuve supplémentaire de la volonté des deux pays de coopérer.

Les autorités coréennes ont notifié le 13 décembre 2006 que toutes les mesures permettant l’entrée en vigueur, sur leur territoire, de la convention avaient été effectuées. Pour qu’elle produise ses effets juridiques, il convient donc que la France achève sa propre procédure d’approbation, et notamment que l’Assemblée nationale vote ce projet de loi visant à autoriser l’approbation de la présente convention d’extradition.

Conformément à son article 20, la convention entrera en vigueur le premier jour du deuxième mois suivant la date de réception de la deuxième notification de l’accomplissement des procédures requises par le droit interne de chaque Etat.

La Convention peut cesser d’entrer en vigueur après dénonciation par l’une des deux parties. La dénonciation doit être notifiée par voie écrite et diplomatique. La convention cesserait alors de produire ses effets dans un délai de six mois à compter de la réception de ladite notification (article 20).

Il est important de noter qu’aucun dossier de transfèrement ou d’extradition n’est actuellement en cours entre les Républiques françaises et coréennes. La rapidité de l’action coréenne est donc due à une volonté réelle de renforcer la coopération judiciaire entre nos deux pays.

B – Le contenu et la forme de la demande d’extradition

Le préambule de la convention d’extradition affirme la volonté des deux pays d’établir une coopération étroite en « vue de la prévention et de la répression de la criminalité » et de signer une convention dont l’objectif reste de « faciliter les relations entre les deux pays en matière d’extradition ».

La présente convention pose les conditions sous lesquelles la France et la Corée s’engagent à extrader toute personne qui serait réclamée par l’autre Etat contractant. Pour être recevable, une demande d’extradition doit à la fois satisfaire des exigences de fond et des exigences de formes, liées notamment aux informations devant être reçues par le pays requis.

1) L’instauration d’une « obligation d’extrader » et d’une autorisation de transit entre la France et la Corée

L’article 1 de la présente convention dispose que chaque partie s’engage, sous certaines conditions, à livrer sur demande à l’autre partie « toute personne qui, se trouvant sur le territoire de la partie requise, est réclamée dans la partie requérante afin d’y être poursuivie, jugée, ou d’exécuter une peine, pour une infraction donnant lieu à extradition ».

L’article 17 institue une autorisation générale de transit entre les deux parties contractantes. A travers cet article, chaque partie s’engage à autoriser le transit à travers son territoire d’une personne faisant l’objet d’une procédure d’extradition liant l’autre partie contractante et un Etat tiers. A l’image de la demande d’extradition, la demande de transit doit satisfaire certaines règles formelles : elle doit être présentée par écrit, et peut être transmise soit par voie diplomatique, soit entre les deux ministères de la Justice. Les mêmes motifs de refus peuvent être opposés à une demande de transit et à une demande d’extradition. En cas de transit aérien, une autorisation de survol doit être obtenue uniquement en cas d’atterrissage.

2) Le champ d’application de la convention

La demande d’extradition du pays requérant doit remplir certaines conditions de fond pour être satisfaite. En effet, seules certaines les infractions peuvent donner lieu à extradition. Pour que la personne en question soit extradée par l’Etat requérant, il faut que l’infraction commise remplisse certains critères.

L’infraction doit satisfaire au principe de double incrimination. Ce principe permet d’éviter que les ressortissants soient extradés pour des actions qui ne seraient pas passibles, en France, d’une sanction.

L’infraction doit être punie d’une peine d’emprisonnement d’au moins deux ans dans chaque pays contractant. Cette condition permet de limiter la procédure d’extradition à des personnes ayant commis des infractions graves. Si plusieurs infractions ont été commises, il suffit que l’une d’entre elles remplisse les conditions évoquées pour que l’extradition soit accordée : la personne répondra devant la même juridiction de toutes ses infractions. Cette disposition évite un émiettement des responsabilités et des jugements qui serait préjudiciable à la cohérence et à l’efficacité des procédures d’extradition.

La partie de la peine restant à être purgée doit être supérieure à six mois. Cette condition vise à limiter les procédures d’extradition dont la mise en œuvre est longue et coûteuse pour l’Etat requérant, c’est pourquoi il convient de limiter son application aux cas les plus importants.

3) Les exigences formelles de recevabilité d’une demande d’extradition

La demande d’extradition de l’Etat requérant doit respecter des règles de procédures très précises, qui sont évoquées à l’article 7 de la présente convention : la demande d’extradition doit être faite par écrit et transmise par le canal diplomatique ; elle doit aussi être accompagnée d’informations très précises sur la personne réclamée, les faits incriminés et la peine encourue. Si la demande est réalisée en vue de l’exécution d’un jugement, le pays requérant doit fournir une copie du jugement précisant le quantum de la peine restant à purger et une copie du mandat d’arrêt.

Si l’Etat requis s’estime insuffisamment informé, il peut réclamer auprès de l’Etat requérant un supplément d’informations (article 9 de la convention).

Si l’Etat requérant ne dispose pas de toutes les informations requises pour une demande d’extradition, il peut avoir recours à une procédure exceptionnelle dite d’urgence, décrite à l’article 8 de la convention.

La procédure d’urgence permet à l’Etat requérant de demander l’arrestation, à titre préventif, de la personne concernée. Cette demande d’arrestation provisoire, qui doit également être écrite, peut être directement transmise entre ministères de la justice, sans transiter par la voie diplomatique.

A la réception de cette procédure d’urgence, l’Etat requis doit indiquer, sans délai, quelle est la suite qu’il réserve à cette demande, et doit éventuellement motiver son refus d’arrestation provisoire.

Pour que l’arrestation provisoire se transforme en arrestation traditionnelle, l’Etat requérant doit transmettre une demande d’extradition en bonne et due forme dans un délai de 45 jours. Si, au bout de 45 jours, aucune demande officielle ne parvient, la personne concernée sera remise en liberté, du moins jusqu’à ce que la demande d’extradition officielle soit réceptionnée par voie diplomatique.

C – Les règles à respecter pour la procédure d’extradition

1) La procédure de remise de la personne concernée

L’Etat requis doit remettre, sur son propre territoire, la personne réclamée aux autorités de l’Etat requérant. Le transfert de la personne concernée se fait donc ensuite sous la responsabilité de l’Etat requérant, qui doit effectuer le transit jusqu’à son propre territoire dans un délai de 30 jours (article 12). Passé ce délai, la personne peut être remise en liberté par l’Etat requis, ce dernier pouvant même refuser une nouvelle demande d’extradition pour la même infraction (sauf en cas de force majeure).

Tous les biens provenant de l’infraction peuvent être remis à l’Etat requérant avec la personne extradée (article 14). La remise des biens à l’Etat requérant a notamment pour but de permettre aux autorités judiciaires de cet Etat de réunir des pièces à conviction utiles dans le cadre d’un éventuel procès.

L’Etat requis peut, sous certaines conditions, ajourner la remise de la personne concernée ou préciser que cette remise est temporaire. Cette possibilité est décrite à l’article 13 de la présente convention. Elle peut être appliquée si la personne concernée est poursuivie ou a été condamnée par l’Etat requis pour des faits autres que ceux pour lesquels elle doit être extradée. Dans ce cas, il est légitime que l’Etat requis puisse réclamer que la personne purge d’abord sa peine sur son territoire avant de répondre, à l’étranger, à d’autres types d’accusation.

L’Etat requis cesse d’assumer les frais de la procédure d’extradition dès lors qu’il remet la personne concernée entre les mains de l’autorité de l’Etat requérant. L’Etat requérant assume quant à lui les frais engendrés dès la remise de la personne concernée, ce qui inclut notamment les frais de transit. Le partage des frais liés à la procédure d’extradition est précisé par l’article 18 de la convention.

2) Les possibilités de poursuite et de jugement de la personne extradée

La personne remise à l’Etat requérant ne peut être jugée pour une infraction autre que celle pour laquelle elle a été extradée, selon le principe de spécialité des poursuites (article 15). Ce principe évite que l’Etat requérant ne profite de la présence, sur son territoire, de la personne concernée pour la poursuivre, la juger ou la détenir pour des faits antérieurs et différents de ceux pour lesquels l’extradition a été accordée. Trois exceptions à cette règle sont toutefois prévues :

– si l’Etat requis donne son accord pour ce type de poursuites, jugement ou détention ;

– si la personne extradée est retournée de son plein gré sur le territoire de l’Etat requérant ;

– si la personne extradée n’a pas quitté le territoire de l’Etat requérant dans les 45 jours qui suivent la date à partir de laquelle la personne pouvait le faire.

Dans tous les cas, lorsque la demande d’extradition a été satisfaite, l’Etat requérant doit tenir informé l’Etat requis des suites de la procédure d’extradition (article 16), et le renseigner notamment sur le résultat des poursuites pénales engagées contre la personne extradée, sur l’exécution de la peine, etc.

D – Les conditions de refus d’une extradition

Lorsqu’il reçoit une demande d’extradition, et même si cette dernière remplit toutes les conditions précitées, l’Etat requis peut opposer à l’Etat requérant un refus d’extradition. Ce refus lui-même ne peut être motivé que par certaines circonstances, qui sont énumérées par la convention.

1) Le cas de demandes d’extradition concurrentes

L’article 10 de la présente convention énumère les critères à prendre en compte pour déterminer, parmi les demandes d’extradition de plusieurs Etats, celle qui devra être examinée en priorité. Pour déterminer vers quel Etat la personne doit être extradée, le pays requis doit notamment tenir compte de la nationalité de la personne concernée, de son lieu de résidence habituel, les intérêts de chaque Etat requérant, les dates respectives des demandes, etc. Ainsi, l’Etat requis peut refuser de satisfaire une demande d’extradition si cette dernière n’est pas jugée prioritaire par rapport à une demande concurrente.

2) Les motifs obligatoires et facultatifs de refus d’extradition

Les motifs obligatoires obligent l’Etat requis à refuser l’extradition d’une personne si cette extradition est fondée sur certains critères, énumérés par l’article 3 de la présente convention, et qui visent à protéger les droits de la personne.

L’Etat requis doit refuser l’extradition si elle est demandé en raison d’infraction politique, ou d’infraction connexe à une action politique. Le droit international ne donnant pas de définition de « l’infraction politique », c’est à l’Etat requis d’apprécier le caractère politique de l’infraction en cause. Il faut noter cependant deux exceptions à cette règle. L’extradition peut être accordée dans le cas où l’infraction serait une tentative d’attentat contre un chef d’Etat ou de gouvernement, ou contre un membre de sa famille. Il s’agit alors d’une infraction considérée comme pénale, et non comme politique. Enfin, l’extradition peut être accordée si les deux parties ont signées un accord multilatéral établissant une obligation d’extrader pour une infraction bien précise. Ce cas vise notamment les actes terroristes, pour lesquels les parties peuvent, en vertu d’un accord international, être obligées d’extrader les personnes concernées.

L’Etat requis a aussi obligation de refuser l’extradition dans les trois cas suivants :

– si la personne réclamée a déjà été jugée pour l’infraction fondant la demande d’extradition ;

– si des considérations de race, de religion, de nationalité, de sexe, d’opinions politiques semblent être à l’origine des poursuites entamées contre la personne ;

– si la demande est fondée sur une infraction militaire, ou si la personne recherchée serait jugée par la suite par un tribunal d’exception.

Les motifs facultatifs de refus d’extradition permettent à l’Etat requis de refuser, s’il le souhaite, la demande d’extradition, en s’appuyant sur les possibilités énumérées à l’article 5 de la présente convention. Généralement, il s’agit de situations où l’Etat requis préfère juger lui-même la personne concernée, notamment parce qu’il a déjà entamé les poursuites ou l’instruction de l’affaire, ou encore parce que l’infraction a été commise sur son propre territoire. L’Etat requis peut également décider de refuser l’extradition s’il a lui-même abandonné les poursuites entamées contre la personne concernée, ou si celle-ci a déjà été acquittée pour cette infraction. Enfin, la demande d’extradition peut être refusée pour des raisons humanitaires, si la remise de cette personne peut avoir de graves conséquences sur sa santé.

3) Deux motifs particuliers de refus d’extradition : la cause de nationalité et la cause de peine capitale.

L’Etat requis peut refuser la demande d’extradition d’un de ses ressortissants, faisant donc appel au motif de sa nationalité. Cela dit, si ce seul motif est soulevé pour refuser la demande d’extradition, l’Etat requis doit, sur demande de l’Etat requérant, soumettre l’affaire à ses autorités nationales, de manière à ce que son ressortissant soit jugé pénalement pour les infractions commises (article 6).

L’Etat requis peut refuser l’extradition de la personne concernée si l’Etat requérant ne lui donne pas l’assurance que la peine capitale ne sera pas prononcée ou exécutée (article 4). Cette sanction est toujours en vigueur dans le système judiciaire coréen, même si, depuis 1998, un moratoire des exécutions capitales a été institué. Ainsi, la France peut refuser d’extrader vers la Corée la personne concernée si la Corée ne lui donne pas l’assurance que la peine de mort ne sera pas appliquée. Concrètement, l’article 4 implique donc que la Corée s’engage à ne pas appliquer la peine de mort sur les personnes qui seraient extradées par la France.

CONCLUSION

Ces dernières années, les relations diplomatiques et économiques entre la Corée et la France se sont densifiées, et témoignent de la bonne entente qui unit les deux républiques. Ces bonnes relations ont notamment permis aux deux pays de développer leur coopération en matière judiciaire, et de consolider leur système d’entraide judiciaire en matière pénale. La présente convention a pour but de compléter les initiatives déjà prises dans ce domaine.

Alors que la Corée devient, à l’échelle mondiale, un partenaire de plus en plus important, alors que les échanges humains se multiplient entre nos deux nations, il semble primordial de donner à la France tous les moyens de développer sa coopération avec la Corée.

Votre rapporteur est donc favorable à l’adoption du présent projet de loi.

EXAMEN EN COMMISSION

La commission a examiné le présent projet de loi au cours de sa réunion du 5 février 2008.

Après l’exposé du rapporteur, M. François Loncle a souhaité savoir si la Corée continuait à appliquer la peine de mort.

M. André Schneider, rapporteur, a indiqué que si la peine de mort faisait toujours partie des peines applicables dans la République de Corée, celle-ci respectait un moratoire des exécutions depuis 1998.

Suivant les conclusions du rapporteur, la commission a adopté le projet de loi (no 519).

*

* *

La commission vous demande donc d’adopter, dans les conditions prévues à l’article 128 du Règlement, le présent projet de loi.

NB : Le texte de la convention figure en annexe au projet de loi (n° 519).

© Assemblée nationale

1 () En juillet 2006, des cadavres de nouveaux-nés étaient retrouvés au domicile des époux Courjaut.