Accueil > Documents parlementaires > Les rapports législatifs
Version PDF
Retour vers le dossier législatif

N° 884

——

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 13 mai 2008.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES, DE LA LÉGISLATION ET DE L’ADMINISTRATION GÉNÉRALE DE LA RÉPUBLIQUE SUR LA PROPOSITION DE LOI (N° 851) relative aux conditions de lélection des sénateurs,

PAR MBernard ROMAN,

Député.

——

INTRODUCTION 5

I. L’ALTERNANCE IMPOSSIBLE AU SÉNAT MET EN ÉVIDENCE LES INSUFFISANCES DÉMOCRATIQUES DE SA COMPOSITION 7

A. LE BICAMÉRISME PRÉSENTE EN FRANCE UN VISAGE SINGULIER 7

1. Les origines historiques du bicamérisme en France ne remettent pas en cause son intérêt pour l’élaboration de la loi 7

a) Les circonstances historiques ayant conduit à la création du Sénat 7

b) L’intérêt du système bicaméral pour la qualité de la loi 8

2. La légitimité démocratique de la seconde chambre demeure contestée 9

a) Une impossible fonction aristocratique en République 9

b) Une impossible fonction fédérale dans un État unitaire 10

c) Une fonction de modération dont le fondement démocratique est incertain 11

B. L’IMPOSSIBILITÉ AVÉRÉE D’UNE ALTERNANCE AU SÉNAT 13

1. Une alternance qui n’est jamais survenue sous la Vème République 13

2. Une contradiction aujourd’hui flagrante entre la majorité des collectivités territoriales et celle du Sénat censé les représenter 14

3. Une distorsion du suffrage universel qui provient d’une surreprésentation dépassée des petites communes au Sénat 15

II. IL EST ESSENTIEL DE RÉFORMER LES CONDITIONS D’ÉLECTION DES SÉNATEURS POUR ASSURER L’ÉQUILIBRE DÉMOCRATIQUE DE NOS INSTITUTIONS 17

A. LA RÉVISION CONSTITUTIONNELLE ENGAGÉE DEVRAIT PERMETTRE D’ACCROÎTRE LA REPRÉSENTATIVITÉ DU SÉNAT 17

1. La réforme des modalités d’élection des sénateurs s’est heurtée en 2000 à un obstacle constitutionnel 17

2. L’actuel projet de révision de la Constitution doit être clarifié pour lever cet obstacle 18

B. LA PROPOSITION DE LOI TEND À AMÉLIORER LA PRISE EN COMPTE DU SUFFRAGE UNIVERSEL AU SÉNAT 19

1. Une meilleure prise en compte de la démographie dans la représentation des communes et des Français de l’étranger 19

a) Le maintien de la prédominance des communes dans le collège électoral 19

b) La juste représentation des communes en fonction de leur population 20

c) L’application de règles identiques pour la représentation sénatoriale des Français de l’étranger 21

2. Une meilleure représentation des départements et des régions 23

3. La suppression de la participation des députés à l’élection des sénateurs 25

4. Le renforcement du scrutin proportionnel pour l’élection des sénateurs 25

DISCUSSION GÉNÉRALE 27

TABLEAU COMPARATIF 31

ANNEXE AU TABLEAU COMPARATIF 37

MESDAMES, MESSIEURS,

Les institutions de la Vème République ont démontré leur solidité en mettant fin à l’instabilité gouvernementale, leur plasticité en permettant la cohabitation au sein du pouvoir exécutif, mais elles n’ont pas doté la France d’un Parlement pleinement démocratique.

Or, le Parlement s’apprête à examiner un projet de révision constitutionnelle, dont l’ambition annoncée est de démocratiser nos institutions. Il serait incohérent de s’engager dans ce processus en esquivant la question, fondamentale, de la composition des assemblées parlementaires.

Le bicamérisme souffre en effet d’un singulier déséquilibre dans notre pays : alors que la seconde chambre dispose de prérogatives presque aussi étendues que celles de l’Assemblée nationale, l’alternance n’est jamais survenue au Sénat et y demeure, en pratique, impossible. Aucune autre démocratie ne connaît une telle situation en Europe : la seconde chambre y dispose soit de moindres pouvoirs, soit d’une réelle légitimité démocratique.

Du fait d’une surreprésentation des petites communes rurales dans le collège chargé d’élire ses membres, la composition du Sénat n’est aujourd’hui en phase ni avec la majorité exprimée par le suffrage universel, ni avec celle qui dirige les collectivités territoriales qu’il est censé représenter. Le Sénat demeure inéluctablement conservateur, alors même que, depuis le 16 mars dernier, 91 % des régions et 57 % des départements sont dirigés par des majorités progressistes, également chargées d’administrer des communes regroupant 60 % de la population nationale. Cette contradiction majeure entrave le bon fonctionnement de nos institutions et nuit à la crédibilité du Sénat.

Il est donc indispensable d’adapter les conditions d’élection des sénateurs aux exigences démocratiques, ce qui suppose de rééquilibrer le poids respectif des différentes collectivités locales dans le collège électoral chargé de désigner ces parlementaires.

Le législateur ne peut atteindre cet objectif à cadre constitutionnel constant, car la seule réforme tentée en ce sens a été censurée par le Conseil constitutionnel dans une décision du 6 juillet 2000, au motif que le corps électoral chargé d’élire les sénateurs « doit être essentiellement composé de membres des assemblées délibérantes des collectivités territoriales ». La révision annoncée de la Constitution permettra de surmonter cet obstacle si elle précise que le Sénat représente les collectivités territoriales « en fonction de leur population ». La loi pourra alors prévoir un collège électoral pleinement conforme aux réalités démographiques de la France. Cette réforme est donc indissociable de la révision constitutionnelle qui nous est proposée : le rééquilibrage de nos institutions doit être abordé dans sa globalité pour que son approbation consensuelle par le Congrès puisse être envisagée.

La proposition de loi qui vous est soumise s’inscrit dans cette démarche constructive, en prévoyant plusieurs modifications de la loi régissant les conditions d’élection des sénateurs.

Il vous est proposé d’assurer une meilleure expression du suffrage universel au Sénat : pour ce faire, il est prévu de maintenir la prédominance des communes dans le collège électoral chargé d’élire les sénateurs – leur part serait ramenée de 96 % à 70 % –, tout en dotant celles-ci d’une juste représentation en fonction de leur population. Des règles identiques sont prévues pour améliorer la représentation sénatoriale des Français de l’étranger.

Parce que le Sénat doit représenter toutes les catégories de collectivités territoriales et non les seules communes, il vous est également proposé de mieux y représenter les départements et les régions, dont les organes délibérant devraient respectivement désigner 15 % des délégués chargés d’élire les sénateurs.

Enfin, le mode de scrutin proportionnel serait étendu aux 25 départements qui élisent actuellement 3 sénateurs, conformément au système appliqué lors des élections sénatoriales de septembre 2001. Un tel aménagement est, à l’évidence, de nature à conforter l’identité propre et à renforcer la légitimité institutionnelle du Sénat, mieux à même d’exprimer, avec nuance et équilibre, l’ensemble des sensibilités politiques représentées au sein des collectivités territoriales.

En apportant son soutien à cette réforme ciblée mais fondamentale, la représentation nationale pourra remédier à un évident dysfonctionnement de nos institutions, tout en renforçant la légitimité démocratique du bicamérisme.

I. L’ALTERNANCE IMPOSSIBLE AU SÉNAT MET EN ÉVIDENCE LES INSUFFISANCES DÉMOCRATIQUES DE SA COMPOSITION

Depuis ses origines, l’organisation du bicamérisme a eu en France pour finalité d’assurer la stabilité institutionnelle et la modération politique, alors que les secondes chambres jouent dans d’autres États un rôle de représentation fédérale ou aristocratique. L’impossibilité avérée d’une alternance politique au Sénat prouve toutefois que sa composition, structurellement conservatrice, déséquilibre le fonctionnement de notre démocratie.

A. LE BICAMÉRISME PRÉSENTE EN FRANCE UN VISAGE SINGULIER

Le bicamérisme, système dans lequel le Parlement est divisé en deux chambres dont les membres sont désignés distinctement, a été institué en France à la suite de périodes troublées, comme un gage de stabilité institutionnelle et de modération politique. Toutefois, dans un État unitaire comme le nôtre, la légitimité du bicamérisme demeure démocratiquement ambiguë, indépendamment de son utilité fonctionnelle pour l’élaboration de la loi.

1. Les origines historiques du bicamérisme en France ne remettent pas en cause son intérêt pour l’élaboration de la loi

a) Les circonstances historiques ayant conduit à la création du Sénat

Le bicamérisme n’est pas une idée neuve : des secondes chambres composées d’aristocrates ont été instituées dès l’Antiquité pour tempérer la représentation directe du peuple, qu’il s’agisse de la démocratie athénienne ou de la République romaine. Adopté en Angleterre à la fin du XIVème siècle, le dualisme parlementaire a été théorisé à l’époque moderne dans L’Esprit des Lois par Montesquieu, qui y voyait un moyen efficace de morceler davantage les pouvoirs pour mieux garantir la liberté. Aussi ce système apparut-il naturellement, à la fin du XVIIIème siècle, comme le plus adapté aux institutions fédérales mises en place aux États-Unis d’Amérique.

En Europe occidentale en revanche, le bicamérisme ne s’est pas imposé d’emblée. Les secondes chambres sont bien souvent apparues à la suite de graves crises démocratiques, dans des périodes où était prioritairement recherché l’apaisement de grandes tensions politiques : les constitutions dont furent dotées l’Italie en 1947, l’Allemagne en 1949 et l’Espagne en 1978 ont institué un Sénat destiné à jouer un rôle stabilisateur et modérateur (1).

En France également, la création du Sénat résulte de circonstances historiques particulières. En effet, les régimes républicains n’ont pas initialement reposé sur le bicamérisme, associé à un pouvoir aristocratique rejeté ou à un fédéralisme inutile : la Première comme la Seconde République disposaient d’une unique assemblée législative représentant le peuple et incarnant la souveraineté nationale. La création d’une seconde chambre n’intervint alors qu’à l’issue de graves troubles politiques. Aux origines de la IIIème République, le souvenir des événements tragiques de la Commune de Paris conduisit un pouvoir monarchiste à subordonner son acceptation du régime républicain à son caractère conservateur et à la création d’un Sénat. Après la Seconde guerre mondiale, le premier projet de Constitution, rejeté le 5 mai 1946, prévoyait le monocamérisme et la seconde chambre finalement instituée disposait, sous la IVème République, de pouvoirs législatifs bien inférieurs à ceux de l’Assemblée nationale.

Confirmé et renforcé sous la Vème République, le Sénat demeure le « Grand conseil des communes françaises » décrit par Gambetta en 1875 (2) : le poids des élus des petites communes rurales dans son collège électoral lui permet, encore aujourd’hui, de jouer le rôle conservateur pour lequel il avait été institué il y a plus de 120 ans.

Le rappel du contexte historique dans lequel la seconde chambre a été créée en France ne doit pas pour autant conduire à négliger, d’une manière générale, l’intérêt pratique du bicamérisme.

b) L’intérêt du système bicaméral pour la qualité de la loi

Dans la plupart des États qui ont opté pour le bicamérisme, les secondes chambres ont été maintenues en raison de leur utilité pratique, malgré les difficultés posées par leur mode de recrutement et leur légitimité théorique.

Ainsi peut-on considérer que les secondes chambres disposent d’une légitimité fonctionnelle, dans la mesure où elles constituent « un élément de modération de la logique majoritaire imprimée par les premières chambres » et, surtout, parce que « leur intervention dans le processus décisionnel s’avère en outre susceptible d’améliorer la production législative ». Selon cette analyse, une seconde chambre pourrait en principe, du fait du comportement individuel de ses membres, « se détacher des influences majoritaires trop fortes et échapper à une discipline partisane stricte » (3).

Le fonctionnement des secondes chambres en Allemagne et au Royaume-Uni tendrait, selon le même auteur, à se singulariser par des débats plus consensuels et par la qualité de l’expertise législative de leurs membres : « Le travail législatif des secondes chambres permet, en règle générale, la correction formelle et technique des textes, et se focalise davantage sur la rédaction que sur l’impulsion » (4).

Enfin et surtout, l’intervention d’une seconde chambre dans le processus législatif introduit un « rapport au temps » particulier : « toutes les secondes chambres font prévaloir la durée sur l’instant » (5). Ce fait ne tient pas uniquement au comportement des sénateurs, mais aux conséquences même du bicamérisme lorsque les deux chambres exercent le pouvoir législatif. En effet, la circulation des textes législatifs d’une assemblée à l’autre, leur examen successif par des personnes différentes, l’échange d’informations, le dialogue et la confrontation des analyses entre les deux chambres, serait favorable à un travail plus serein et approfondi. L’expérience montre effectivement que la qualité technique et rédactionnelle des projets ou propositions de loi tend à s’améliorer à mesure que progresse la « navette » parlementaire.

2. La légitimité démocratique de la seconde chambre demeure contestée

Indépendamment de son utilité technique pour l’élaboration d’une législation de qualité, le système bicaméral suppose que la seconde chambre dispose d’une légitimité politique propre, qui la distingue la première chambre. L’examen des principales formes possibles de bicamérisme met en évidence l’ambiguïté démocratique du bicamérisme en France. En effet, des trois principales formes de bicamérisme – aristocratique, fédéral, ou modérateur (6) –, seule la troisième peut être applicable aux institutions françaises.

a) Une impossible fonction aristocratique en République

Le bicamérisme peut en principe avoir un fondement aristocratique, comme ce fut le cas, en France, de la Chambre des Pairs de 1814 à 1848 et, dans une moindre mesure, du Sénat sous l’Empire (7). Cette conception, qui subordonne l’appartenance au Sénat à l’hérédité plutôt qu’à l’élection, tend à disparaître dans les démocraties modernes, mais subsiste de manière résiduelle dans la monarchie britannique. En effet, en dépit de la réforme conduite en 1999 par le Premier ministre Tony Blair, 92 des 730 pairs héréditaires ont été transitoirement maintenus à la Chambre des Lords, aux côtés des 620 pairs à vie nommés par la Reine (8) et des 26 représentants de l’Église anglicane.

Il est bien évident que le Sénat d’une République ne peut accepter un critère d’appartenance aristocratique : cette forme de bicamérisme peut d’emblée être écartée pour la France, où, conformément aux principes républicains, la Constitution précise que la souveraineté nationale appartient au peuple dans son ensemble (9) et garantit à tous les citoyens l’égalité devant la loi, indépendamment de leur origine, de leur race ou de leur religion (10), donc sans possibilité de distinctions héréditaires.

b) Une impossible fonction fédérale dans un État unitaire

La seconde chambre peut également avoir une fonction de représentation fédérale : tel est le cas dans des États fédéraux tels que l’Allemagne, la Suisse, la Belgique ou les États-Unis. Son rôle consiste alors à représenter les intérêts distincts des États fédérés, dont les droits spécifiques sont garantis par la Constitution.

Dès lors qu’ils ne représentent pas la nation dans son ensemble mais leurs États, il n’est pas indispensable de prévoir pour ces parlementaires une désignation dans des conditions fondamentalement différentes de celles prévues pour la première chambre. Le suffrage universel direct est d’ailleurs majoritairement appliqué pour l’élection :

- des sénateurs américains (100 sénateurs élus au scrutin uninominal, le plus souvent à un seul tour) ;

- des sénateurs belges (40 des 71 sénateurs sont élus au scrutin de liste, à la représentation proportionnelle, par un collège électoral francophone et un collège électoral néérlandophone) ;

- des membres du Conseil des États en Suisse (46 membres élus au scrutin de liste, à la représentation majoritaire, sauf dans le canton du Jura qui a opté pour la représentation proportionnelle).

Toutefois, la France est un État unitaire et, selon les termes de l’article 1er de notre Constitution, notre République demeure « indivisible », même si « son organisation est décentralisée ». Le Sénat ne saurait donc y avoir une fonction de représentation d’entités fédérées.

À cet égard, le fait que le troisième alinéa de l’article 24 de la Constitution précise que le Sénat « assure la représentation des collectivités territoriales de la République » peut paraître ambigu. Cette mention a une portée essentiellement électorale et ne doit pas donner lieu à une interprétation fédérale erronée, d’autant que les « Français établis hors de France » sont aussi représentés au Sénat : quel que soit le rôle constitutionnel des collectivités locales dans l’élection des sénateurs, ceux-ci demeurent des représentants du peuple français, qualité qui leur permet d’exercer la souveraineté nationale.

Comme le souligne d’ailleurs un auteur, en France « le Sénat représente la nation en tant qu’ensemble indivisible de citoyens égaux et juridiquement identiques ». Cette analyse est fondée sur le constat suivant : l’alinéa 3 de l’article 24 de la Constitution envisage les collectivités territoriales non pas sous un angle purement territorial, mais aussi « dans leur dimension humaine, c’est-à-dire en tant que collectivités de citoyens. Ainsi, les analyses tendant à opposer la représentation de la population assurée par la première chambre et la représentation du territoire assurée par la seconde doivent être rejetées. De même, les collectivités humaines que constituent les collectivités locales ne sont pas représentées au Sénat en tant que personnes morales. On ne peut donc rapprocher la représentation des collectivités territoriales d’une représentation de type fédéral ou corporatiste » (11).

c) Une fonction de modération dont le fondement démocratique est incertain

Les constats qui précèdent conduisent naturellement à s’interroger sur l’objet de la création d’une seconde chambre dans des institutions démocratiques et républicaines : de quelle fonction particulière peut être chargée une seconde chambre, si son rôle n’est ni la représentation d’ordres nobiliaires et religieux, ni celle d’États fédérés ? L’hypothèse d’une représentation corporative n’est pas davantage convaincante en France, puisque ce rôle revient au Conseil économique et social et qu’une transformation en ce sens de la seconde chambre fut rejetée par les Français lors du référendum du 27 avril 1969.

Faute de pouvoir trouver une légitimité démocratique évidente, les secondes chambres justifient en réalité leur existence, dans la plupart des États unitaires qui y ont recours, par le constat de leur utilité pratique : elles joueraient ainsi un rôle modérateur face à l’impatience et aux éventuels excès des représentants directement élus par le peuple. Bien qu’il s’agisse, par élimination des précédentes approches, du seul raisonnement applicable à l’institution du Sénat en France, cette analyse demeure démocratiquement ambiguë pour fonder la légitimité du bicamérisme.

Effectivement, le Sénat, en représentant les citoyens à travers le « filtre » des collectivités territoriales, a d’abord, en France, une fonction de modération : « depuis 1875, le régime électoral de la deuxième assemblée tend à garantir son caractère modéré, en donnant à la France rurale et à ses élus locaux un poids prépondérant dans la désignation des sénateurs » (12).

De nombreux auteurs se sont efforcés de rechercher un fondement démocratique à ce rôle modérateur, voire conservateur dans le cas français, en s’interrogeant à la fois sur la composition et les pouvoirs de la seconde chambre.

Ainsi, selon un autre auteur, « l’exercice de cette action temporisatrice ne va pas de soi. Il suppose un mode de recrutement différent de celui de la Première Chambre, sans être contraire aux principes démocratiques. Il implique des compétences respectueuses de la prépondérance des députés. Il exclut l’obstruction et les conflits violents. Il exige de limiter les pouvoirs de la seconde chambre, d’instaurer des procédures de résolution des litiges. Il requiert de la chambre « modératrice » qu’elle use elle-même modérément de ses pouvoirs » (13).

Ces exigences théoriques ne sont bien souvent que partiellement respectées, mais, dans les États unitaires qui disposent d’une seconde chambre, deux principales situations doivent être distinguées :

- soit les sénateurs sont majoritairement élus au suffrage universel direct, comme c’est le cas notamment au Japon, en Italie, en Espagne, en Pologne, en République tchèque ou encore en Roumanie. L’octroi de pouvoirs importants ne pose alors naturellement aucune difficulté démocratique – l’interrogation porte davantage sur le caractère un peu artificiel de la distinction entre deux assemblées disposant d’une légitimité de même nature ;

- soit les sénateurs sont essentiellement élus au suffrage indirect, comme c’est le cas par exemple aux Pays-Bas ou en Irlande (au scrutin proportionnel, les collèges électoraux étant constitués de représentants des Conseils provinciaux dans le premier cas, de catégories socio-professionnelles dans le second cas). Dans ces deux cas, les pouvoirs de la seconde chambre sont plus réduits que ceux de la première. Aux Pays-Bas, les 75 sénateurs ne disposent ni du droit d’amendement – ils peuvent uniquement adopter ou rejeter l’ensemble d’un texte –, ni de celui de poser des questions orales aux membres du Gouvernement, et n’ont jamais exercé le droit théorique de former des commissions d’enquête. En Irlande, les sénateurs disposent certes du droit d’amendement, mais la chambre basse a le « dernier mot » après une seule lecture d’un texte législatif par le Sénat, dont les pouvoirs de contrôle sont par ailleurs très limités.

Or, les sénateurs français, bien qu’ils ne soient pas élus au suffrage universel direct, disposent de pouvoirs presque aussi étendus que ceux de l’Assemblée nationale, tant pour élaborer la législation (malgré le dernier mot généralement donné à l’Assemblée nationale) que pour contrôler l’action du pouvoir exécutif (même si la responsabilité du Gouvernement ne peut être engagée que devant l’Assemblée nationale). Le Sénat a, en particulier, la faculté d’empêcher l’adoption définitive des projets de loi constitutionnelle et des projets de loi organique qui le concernent, pouvoir de blocage dont il n’hésite pas à faire usage lorsqu’une majorité politique progressiste a été élue à l’Assemblée nationale. Rappelons également que le Sénat ne peut, contrairement à l’Assemblée nationale, faire l’objet d’une dissolution décidée par le Président de la République.

La question du caractère démocratique de son mode de recrutement apparaît donc d’autant plus déterminante. « Si l’on écarte d’emblée l’idée que le Sénat français assurerait une représentation fédérale sur le modèle de son homonyme américain », on peut imaginer que « le Sénat est une « assemblée nationale au même titre que « l’Assemblée nationale » et qu’il a pour fonction essentielle de représenter les citoyens, mais de façon différente et selon un autre mode de scrutin, car il ne servirait à rien, au sein d’un Parlement bicaméral, que les deux assemblées soient élues de manière identique » (14).

Compte tenu de ses pouvoirs, le Sénat ne peut légitimement jouer cette fonction modératrice que s’il est composé selon des modalités démocratiquement acceptables. C’est précisément du fait des modalités d’élection de ses membres que l’on peut estimer que, dans le cas du Sénat français, « la fonction modératrice s’avère hémiplégique et partiale. En raison de son mode de recrutement, le jeu de l’alternance ne fonctionne pas et la majorité reste acquise aux partis de droite et centre droit. Cette physionomie politique en fait donc un contre-pouvoir beaucoup trop orienté pour être légitime » (15).

Quels que soient le rôle théorique et l’utilité fonctionnelle du bicamérisme, la légitimité démocratique d’une seconde chambre dotée de pouvoirs étendus dépend de sa représentativité politique, laquelle demeure insuffisante dans le cas français.

B. L’IMPOSSIBILITÉ AVÉRÉE D’UNE ALTERNANCE AU SÉNAT

1. Une alternance qui n’est jamais survenue sous la Vème République

Dans de nombreux pays, le bicamérisme satisfait pleinement aux exigences de la démocratie car les deux chambres reflètent, selon des modalités différentes, la volonté majoritairement exprimée par le suffrage universel. Sans être nécessairement concordantes, ces majorités sont variables et incertaines. Or, en France, le jeu démocratique est faussé au Parlement, parce que l’une des deux chambres conserve toujours, globalement, la même majorité politique. Ainsi, le Sénat n’a connu aucune alternance depuis le début de la Vème République : les majorités y sont structurellement de droite et de centre-droit.

Or, loin des considérations théoriques, la pratique politique a montré qu’inéluctablement, la logique majoritaire s’est imposée au Sénat. Institué pour contribuer à la stabilité institutionnelle et à la modération politique, il tend en réalité à assurer la conservation de l’ordre social et s’inscrit pleinement dans le jeu partisan, au profit permanent des formations conservatrices. En s’opposant, de façon quasi-systématique aux projets législatifs des gouvernements progressistes et en soutenant à l’inverse ceux des gouvernements conservateurs, le Sénat déséquilibre l’institution parlementaire et fausse le jeu des alternances démocratiques. Le constat s’impose : « il n’y a plus de régulation dès lors que, constamment, la fonction ne joue que dans un seul sens, pour renforcer la majorité gouvernementale dans un cas de figure, pour l’entraver dans l’autre » (16).

2. Une contradiction aujourd’hui flagrante entre la majorité des collectivités territoriales et celle du Sénat censé les représenter

Un argument était fréquemment invoqué pour expliquer la constance de cette orientation politique de la majorité sénatoriale : la majorité des assemblées délibérantes des collectivités territoriales représentées au Sénat était conservatrice, ce que la composition de cette assemblée ne faisait que refléter. Son président, M. Christian Poncelet, affirmait ainsi en 2002 : « pour que la gauche plurielle s’empare du Sénat, il suffit tout bonnement qu’elle l’emporte aux prochaines élections municipales » (17). Cet événement s’est clairement produit à l’issue des élections municipales du 16 mars dernier. Depuis lors, la gauche est majoritaire dans les conseils municipaux de 350 villes de plus de 10 000 habitants, contre 262 seulement pour la droite, et les communes gérées par la gauche regroupent 60 % de la population nationale.

En outre, à cette majorité municipale s’ajoutent des majorités départementales et régionales très nettes : 58 conseils généraux sur 102 et 20 conseils régionaux sur 22 disposent de majorités progressistes.

Alors que la gauche l’a clairement emporté lors des différents scrutins municipaux, cantonaux et régionaux, ses élus demeurent minoritaires dans la chambre chargée de représenter les collectivités communales, départementales et régionales et ne peuvent guère espérer qu’il en soit autrement à l’issue des élections sénatoriales de 2008 et 2011. Cette contradiction devenue flagrante entre majorité sénatoriale et majorités locales est démocratiquement injustifiable. Dans ces conditions, la légitime critique de la représentativité défaillante du Sénat risque fort de renforcer les doutes entourant sa légitimité.

Les démocrates attachés au bon fonctionnement de nos institutions ne peuvent que regretter une telle situation, d’autant que les grandes formations politiques, de gauche comme de droite, n’entendent pas remettre en cause un bicamérisme qui a démontré son utilité fonctionnelle.

3. Une distorsion du suffrage universel qui provient d’une surreprésentation dépassée des petites communes au Sénat

La cause de l’important décalage entre le vote des Français aux élections locales et la composition du Sénat tient au mode de scrutin prévu par la loi pour l’élection des sénateurs. En effet, en vertu de l’article L. 280 du code électoral, les membres de cette assemblée sont élus, au niveau départemental, par un collège électoral composé des députés, ainsi que :

- des conseillers généraux, au nombre de 3 857 ;

- des conseillers régionaux, au nombre de 1 722 ;

- et, surtout, des 137 365 délégués désignés par les conseils municipaux.

La composante communale représente donc à elle seule près de 96 % de l’ensemble du collège électoral. Or, les règles de calcul du nombre de délégués des conseils municipaux, fixées aux articles L. 284 et L. 285 du code électoral, accordent aux communes les moins peuplées, dont le vote est traditionnellement plus conservateur, une représentation bien supérieure à leur poids démographique et, à l’inverse, minore la représentation des communes les plus peuplées.

Ainsi, 69 % des délégués des conseils municipaux représentent les communes de moins de 10 000 habitants, alors que celles-ci n’accueillent que la moitié des Français (50,8 % d’après le recensement de 1999). La représentation des communes de plus de 10 000 habitants, peuplées par l’autre moitié des Français, est donc plus de deux fois moindre. Plus radicalement encore, alors que la population totale des communes de plus de 100 000 habitants est deux fois plus élevée que celle des communes de moins de 500 habitants, ces dernières disposent de deux fois plus de délégués chargés d’élire les sénateurs.

Un tel décalage entre le rôle joué par les communes dans l’élection des sénateurs et leur poids démographique réel n’est pas acceptable dans une démocratie. En effet, le fait que les membres du Sénat, assemblée dotée d’importants pouvoirs normatifs, soient élus au suffrage indirect ne remet pas en cause, en principe, l’universalité et l’égalité de ce suffrage. Il convient à cet égard de rappeler que le troisième alinéa de l’article 3 de notre Constitution précise : « Le suffrage peut être direct ou indirect dans les conditions prévues par la Constitution. Il est toujours universel, égal et secret ».

Le système des délégués municipaux, tel que la loi électorale le prévoit actuellement, ne joue pas le rôle d’un simple « filtre » propre au suffrage indirect, mais plutôt celui d’un prisme déformant le suffrage universel : aujourd’hui, lors des élections municipales, la voix d’un électeur de Lyon ou de Marseille n’aura pas, pour la constitution du collège chargé de désigner les sénateurs, le même poids que celle d’un électeur d’une petite commune des Vosges ou de l’Ariège. Alors que le Sénat devrait incarner l’équilibre dans notre démocratie, sa composition structurellement conservatrice déséquilibre nos institutions.

Il ne s’agit pas ici d’un point de vue partisan mais d’un constat objectif. Cette analyse rejoint d’ailleurs celle du rapport, rendu public le 29 octobre dernier, du comité de réflexion et de proposition sur la modernisation et le rééquilibrage des institutions de la Vème République, présidé par l’ancien Premier ministre Edouard Balladur. Ce rapport constate ainsi que la règle fixée pour la constitution du collège électoral du Sénat « favorise à l’excès la représentation des zones faiblement peuplées, au détriment des zones urbaines » et appelle de ses vœux, fort logiquement, une réforme assurant « un meilleur équilibre dans la représentation des populations ». La proposition de loi qui vous est soumise s’inscrit bien dans cette démarche de démocratisation et de modernisation de nos institutions.

Le président du Sénat lui-même, M. Christian Poncelet, s’est déclaré, à plusieurs reprises, conscient du problème posé par cette distorsion et de la nécessité d’y remédier en renforçant la représentation sénatoriale des espaces urbains. Il déclarait ainsi, en 1999, que « personne ne conteste la nécessité d’assurer une meilleure représentation du milieu urbain au sein du collège électoral des sénateurs » (18), avant de préciser son analyse en 2000 : « je suis favorable à une représentation plus fidèle du milieu urbain au sein du collège électoral des sénateurs. Bien plus, je ne vois que des avantages à un tel rééquilibrage entre les villes et les campagnes, si cet indispensable correctif préserve une représentation harmonieuse de toutes les collectivités locales. Je suis convaincu qu’une meilleure prise en compte de la réalité urbaine devrait permettre de purger, une fois pour toutes, cette querelle en représentativité et donc en légitimité qui est instruite, çà et là, à l’encontre du Sénat » (19).

Réformer le mode d’élection des sénateurs pour équilibrer la représentation des collectivités territoriales en fonction de leur population devrait donc permettre de conforter le bicamérisme, en améliorant la légitimité démocratique du Sénat. Il ne s’agit donc nullement aujourd’hui de contester l’existence même d’une seconde chambre en France, mais uniquement de remédier à l’anomalie démocratique que représentent les conditions actuelles d’élection des sénateurs.

Rien ne justifie en effet que le recours au suffrage indirect, qui permet d’offrir au Sénat une légitimité distincte de celle de l’Assemblée nationale, s’accompagne en pratique d’une remise en cause de l’universalité de ce suffrage : même « filtré » par les collectivités territoriales que le Sénat est chargé de représenter, la voix de chaque citoyen français doit avoir un poids équivalent, qu’il vive en ville ou en milieu rural.

II. IL EST ESSENTIEL DE RÉFORMER LES CONDITIONS D’ÉLECTION DES SÉNATEURS POUR ASSURER L’ÉQUILIBRE DÉMOCRATIQUE DE NOS INSTITUTIONS

La proposition de loi dont est saisie notre assemblée vise à remédier au déséquilibre précédemment évoqué dans la représentation du Sénat, dont les membres doivent être élus selon un mode de scrutin qui, tout en étant indirect, respecte l’égalité du suffrage universel. Elle ne pourra toutefois aboutir que si la révision constitutionnelle actuellement soumise au Parlement permet de lever clairement le risque d’inconstitutionnalité auquel une telle réforme s’est heurtée dans le passé.

A. LA RÉVISION CONSTITUTIONNELLE ENGAGÉE DEVRAIT PERMETTRE D’ACCROÎTRE LA REPRÉSENTATIVITÉ DU SÉNAT

1. La réforme des modalités d’élection des sénateurs s’est heurtée en 2000 à un obstacle constitutionnel

L’idée de remédier au déséquilibre structurel qui affecte la représentation sénatoriale n’est pas nouvelle. En effet, le Parlement avait définitivement adopté, le 21 juin 2000, sous l’impulsion du Gouvernement conduit par M. Lionel Jospin, un projet de loi relatif à l’élection des sénateurs, qui proposait de rééquilibrer le poids respectif des petites et grandes communes au sein du collège électoral du Sénat. Le nombre de délégués désignés par les conseils municipaux aurait ainsi été, pour toutes les communes sauf Paris, d’un par tranche de 300 habitants, alors que le système en vigueur n’attribue qu’un délégué par tranche de 1 000 habitants au-delà de 30 000 habitants. S’il ne remédiait pas à l’insuffisante représentation des départements et des régions au Sénat, ce système aurait toutefois permis d’y représenter les communes en tenant réellement compte de leur population actuelle : ce seul changement aurait été déterminant pour permettre l’alternance au Sénat.

Or, le Conseil constitutionnel, dans une décision du 6 juillet 2000 (20), jugea ce dispositif contraire au troisième alinéa de l’article 24 de la Constitution. Cette analyse reposait sur une interprétation selon laquelle :

- certes, en vertu du principe constitutionnel d’égalité devant le suffrage (prévu à l’article 3 de la Constitution et à l’article 6 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen du 26 août 1789), « la représentation de chaque catégorie de collectivités territoriales et des différents types de communes doit tenir compte de la population qui y réside » ;

- mais, dans le même temps, la fonction de « représentation des collectivités territoriales », que l’article 24 de la Constitution confie au Sénat, implique que son collège électoral soit « lui-même l’émanation de ces collectivités » et, à ce titre, soit « essentiellement composé de membres de [leurs] assemblées délibérantes ». En conséquence, la participation au collège électoral de délégués supplémentaires représentant les communes les plus peuplées, sans être membres de leur organe délibérant, doit être limitée à une « simple correction démographique ». Cette limite serait dépassée dès lors que ces délégués pourraient représenter « une part substantielle voire, dans certains départements, majoritaire du collège ».

Il est regrettable que, dans la conciliation des exigences résultant respectivement des articles 3 et 24 de la Constitution, le Conseil constitutionnel ait nettement privilégié la seconde. Bien sûr, comme le remarquait un commentateur autorisé (21), la loi déférée au Conseil constitutionnel aurait fortement accru la part d’« élus d’élus » au sein du collège électoral du Sénat, étendant d’autant le recours à une élection des sénateurs au troisième degré. Pour autant, il était contestable de voir dans cette nouvelle organisation une atteinte au caractère indirect du suffrage d’une gravité supérieure à l’atteinte à l’égalité du suffrage résultant de la composition actuelle du collège appelé à élire les sénateurs.

Par cette décision, le Conseil constitutionnel a souscrit à « une analyse classique » de la représentation des collectivités territoriales au Sénat, « c’est-à-dire conforme à sa vocation historique. Depuis 1875, le régime électoral de la deuxième assemblée tend à garantir son caractère modéré, en donnant à la France rurale et à ses élus locaux un poids prépondérant dans la désignation des sénateurs » (22). Il est aujourd’hui possible et nécessaire de rompre avec cette conception surannée et antidémocratique, en levant ce verrou constitutionnel pour ouvrir la voie à la réforme législative qui vous est ici proposée.

2. L’actuel projet de révision de la Constitution doit être clarifié pour lever cet obstacle

Compte tenu de la jurisprudence restrictive du Conseil constitutionnel, il ne sera possible de rééquilibrer réellement la composition du collège électoral du Sénat au profit des communes les plus peuplées que si la Constitution est préalablement modifiée en ce sens. L’examen par le Parlement du projet de loi constitutionnelle de modernisation des institutions de la Vème République offre à cet égard une rare opportunité.

Toutefois, le projet présenté par le Gouvernement demeure ambigu et insuffisant. Il propose en effet de compléter le troisième alinéa de l’article 24 de la Constitution par la précision selon laquelle le Sénat doit représenter les collectivités territoriales « en tenant compte de leur population ». Cette rédaction, qui reprend expressément certains des termes de la décision du Conseil constitutionnel du 6 juillet 2000, semble beaucoup trop imprécise pour garantir la constitutionnalité d’une loi dont l’objet serait de rééquilibrer nettement la composition du collège électoral du Sénat.

Il sera donc indispensable d’adopter une rédaction plus franche et plus claire, qui avait d’ailleurs été retenue dans l’avant-projet de loi constitutionnelle, afin de préciser que le Sénat représente les collectivités territoriales de la République « en fonction de leur population ». Cette rédaction établirait que le Constituant souhaite introduire, pour la composition du collège électoral du Sénat, un critère démographique non pas marginal voire facultatif, mais déterminant et contraignant.

Au Sénat, la représentation des collectivités territoriales doit être une réalité humaine et non physique. Elle ne peut pas être d’abord celle de territoires, mais celle des populations administrées par lesdites collectivités. La représentation de ces dernières doit être clairement ramenée à une simple « modalité technique de mise en œuvre du suffrage indirect et de la représentation du peuple » (23), seul souverain en démocratie.

B. LA PROPOSITION DE LOI TEND À AMÉLIORER LA PRISE EN COMPTE DU SUFFRAGE UNIVERSEL AU SÉNAT

1. Une meilleure prise en compte de la démographie dans la représentation des communes et des Français de l’étranger

L’un des objectifs centraux de la proposition de loi soumise à notre assemblée est de remédier au déséquilibre politique structurel résultant de la surreprésentation des communes les moins peuplées dans le collège chargé d’élire les sénateurs. Pour ce faire, elle propose l’application d’une règle égale et transparente pour la représentation de toutes les communes, qui conserveraient un rôle prédominant au sein du collège électoral du Sénat.

a) Le maintien de la prédominance des communes dans le collège électoral

La conception du Sénat comme « grand conseil des communes françaises » est désormais dépassée, compte tenu du poids politique acquis par les départements et les régions depuis les lois de décentralisation de 1982 et l’élection des conseillers régionaux au suffrage universel en 1986. La composition du Sénat doit tenir compte de son rôle de représentation de l’ensemble des collectivités territoriales, et non de la seule catégorie communale. Dans ces conditions, il n’est pas cohérent de maintenir pour cette élection une intervention quasi-exclusive de représentants communaux, qui constituent à eux seuls près de 96 % du collège électoral de la seconde chambre.

Cette analyse aurait pu conduire les auteurs de la proposition de loi à attribuer à chaque catégorie de collectivités territoriales un nombre égal de représentants dans le collège électoral, ou à partager ce collège en deux moitiés, l’une pour les représentants des communes, l’autre pour ceux des départements et des régions. Toutefois, on ne peut faire abstraction de l’attachement primordial de nos concitoyens à la commune, collectivité locale du quotidien, bien connue de chacun, et échelon démocratique de proximité par excellence. Il convient donc d’éviter toute dévalorisation excessive de la représentation communale au Sénat.

Précisément, la proposition de loi exprime une recherche d’équilibre en proposant, avec pragmatisme, une diminution modérée du poids relatif des élus communaux dans la représentation sénatoriale : ces élus représenteraient encore, à eux seuls, 70 % du collège électoral du Sénat. Il convient également de souligner qu’en termes absolus, le nombre de représentants des communes ne serait pas réduit mais nettement accru, passant de 137 365 à 213 694. En effet, le souci d’élargir la représentativité du collège électoral de Sénat concerne l’ensemble des catégories de collectivités locales.

b) La juste représentation des communes en fonction de leur population

Les articles 2 et 3 de la proposition de loi visent à donner à toutes les communes françaises (Ville de Paris comprise) un poids correspondant à leur population pour l’élection des sénateurs. Le système actuel, tel que le prévoient les articles L. 284 et L. 285 du code électoral, se caractérise en effet :

- par sa complexité, puisqu’il applique des règles de représentation distinctes aux communes de moins de 9 000 habitants (élection d’un nombre de délégués variable selon le nombre de membres du conseil municipal et choisis parmi ces derniers), aux communes de 9 000 à 30 000 habitants (participation de tous les conseillers municipaux au collège électoral du Sénat) et aux communes de plus de 30 000 habitants (participation additionnelle d’un délégué par tranche de 1 000 habitants au-delà de 30 000 habitants).

- et, surtout, par son iniquité, puisqu’il revient, comme il a été précédemment exposé, à faire varier du simple au quadruple l’impact d’un suffrage d’un citoyen sur la composition du Sénat, selon que ce citoyen a voté pour l’élection du conseil municipal d’une commune de moins de 500 habitants ou de plus de 100 000 habitants.

La réforme proposée permet d’éviter ces deux écueils, par l’application d’une même règle, impartiale et intelligible, à tous les conseils municipaux. Ceux-ci devraient ainsi désigner, pour la participation au collège électoral du Sénat, un nombre de délégués en principe proportionnel à leur population, chaque tranche de 300 habitants ouvrant droit, dès lors qu’elle est entamée, à l’élection d’un délégué. Conformément au droit actuel, les délégués seraient obligatoirement choisis parmi les membres du conseil municipal, sauf lorsque leur nombre serait supérieur à l’effectif de celui-ci – hypothèse dans laquelle tous les conseillers municipaux sont délégués de droit, l’élection de délégués non membres de l’assemblée délibérante de la commune n’intervenant qu’à titre complémentaire.

À titre d’exemple, une commune de 100 habitants disposerait d’un unique délégué, de même qu’une commune de 250 habitants, des communes de 950 ou 1 100 habitants pourraient en désigner quatre chacune, tandis que des communes de 10 000 ou 50 000 habitants pourraient en élire respectivement 34 et 167. Il convient de souligner que le fait d’accorder un délégué pour chaque fraction de tranche de 300 habitants revient à accorder un avantage comparatif aux plus petites communes, mais s’avère indispensable à la représentation de ces dernières. Ce mode de calcul explique que, selon les estimations des auteurs de la proposition de loi, les communes de moins de 3 500 habitants devraient alors élire à elles seules près de 40 % des délégués des conseils municipaux, alors qu’elles ne regroupent que 34 % de la population nationale.

Par ailleurs, compte tenu de l’accroissement global de l’effectif du collège électoral du Sénat, le système proposé ne diminuerait par le nombre de délégués attribués aux communes les moins peuplées : les communes de moins de 3 500 habitants devraient au contraire voir le nombre de leurs délégués passer de 67 975 à 84 480.

Toutefois, l’effet principal de la réforme sera bien un rééquilibrage du poids relatif des différentes communes au sein du collège électoral du Sénat, pour tenir compte de l’évolution de la démographie et, par là, assurer l’égalité du suffrage, même indirect. Ainsi, les communes de plus de 100 000 habitants, qui regroupent au total une population équivalente à celle des communes de 3 500 à 9 000 habitants (environ 15 % de la population nationale), disposeraient après la réforme d’un nombre de délégués presque équivalent (représentant environ 14 % de l’ensemble des délégués des conseils municipaux). Une telle répartition, si elle semble relever d’une évidente logique, n’en constituerait pas moins une évolution majeure, car aujourd’hui, les communes de 3 500 à 9 000 habitants élisent un nombre de délégué presque deux fois et demi plus élevé que les communes de plus de 100 000 habitants.

c) L’application de règles identiques pour la représentation sénatoriale des Français de l’étranger

La proposition de loi vise également, par ses articles 6 à 9, à améliorer la représentativité électorale des 12 sénateurs représentant les Français de l’étranger, seuls parlementaires élus par nos concitoyens établis hors de France. Pour atteindre cet objectif, il est proposé de faire élire ces sénateurs par un collège électoral élargi, reposant sur des bases démographiques claires et incontestables, selon un mécanisme similaire à celui proposé pour les communes.

L’article 13 de l’ordonnance n° 59-260 du 4 février 1959 précise actuellement que cette catégorie particulière de sénateurs est élue « par un collège formé des membres élus de l’Assemblée des Français de l’étranger » (24). Rappelons qu’en application de la loi du 7 juin 1982 relative à l’Assemblée des Français de l’étranger (25), les membres de cette assemblée, présidée par le ministre chargé des affaires étrangères et renouvelable par moitié tous les trois ans, sont élus pour six ans au suffrage universel direct (26) par les Français établis hors de France – qui doivent être inscrits à cet effet sur les listes électorales consulaires.

Toutefois, les 150 membres (27) de l’Assemblée des Français de l’étranger forment un collège trop étroit pour bien représenter correctement les 2,3 millions de Français vivant hors de France. En effet, chaque membre de cette assemblée représente en principe plus de 15 300 expatriés, alors que chaque membre du collège électoral actuellement appelé à élire les 334 autres sénateurs représente en moyenne 445 habitants (28). Cette différence de traitement n’est pas justifiée.

Les articles 6 et 7 de la proposition de loi tendent donc à compléter l’article 13 de l’ordonnance précitée et à insérer dans celle-ci un nouveau chapitre, afin de faire participer à l’élection de ces 12 sénateurs, aux côtés des membres de l’Assemblée des Français de l’étranger, un collège électoral formé de délégués supplémentaires. Ces derniers seraient, comme les délégués supplémentaires des communes de plus de 3 500 habitants, élus au scrutin de liste, à la représentation proportionnelle (29) – les listes de candidats étant présentées par les membres de l’Assemblée des Français de l’étranger. Surtout, chaque tranche de 300 Français inscrits au registre mondial des Français établis hors de France élirait un délégué supplémentaire, par analogie avec le choix précédemment exposé de représenter les communes à hauteur d’un délégué supplémentaire par tranche de 300 habitants pour l’élection des 334 sénateurs représentant les Français vivant en France.

Il convient bien sûr d’éviter que la participation de plus de 4 500 délégués supplémentaires à l’élection des 12 sénateurs représentant les Français de l’étranger ne s’avère matériellement trop difficile à organiser. Pour limiter ce risque, l’article 8 de la proposition de loi complète le premier alinéa de l’article 21 de l’ordonnance précitée, en permettant le vote à distance (par correspondance sous pli fermé ou par voie électronique) pour la participation des délégués supplémentaire à l’élection des sénateurs. Cet assouplissement des modalités pratiques d’élection des sénateurs des Français de l’étranger paraît d’autant plus fondé que les technologies modernes, qui peuvent être sécurisées pour assurer la fiabilité et l’anonymat du vote, s’avèrent particulièrement adaptées pour surmonter les problèmes d’éloignement géographique.

2. Une meilleure représentation des départements et des régions

Du fait de sa faiblesse, la représentation des départements et des régions au Sénat n’est conforme ni à leur rôle constitutionnel – la Constitution prévoit que la seconde chambre « assure la représentation des collectivités territoriales » (30) et, depuis la révision constitutionnelle du 28 mars 2003 (31), énumère les trois catégories de collectivités (32) –, ni au rôle politique et économique essentiel qui est aujourd’hui le leur. En effet, l’application de l’actuel article L. 280 du code électoral, prévoyant que seuls les membres de leurs assemblées délibérantes participent au collège électoral du Sénat, conduit à leur donner une place marginale dans cette élection. Ainsi, les 3 857 conseillers généraux et les 1 722 conseillers régionaux (ou conseillers à l’Assemblée de Corse) ne représentent respectivement que 2,7 % et 1,2 % de ce collège électoral.

Il paraît raisonnable de porter le nombre de délégués attribués à chacune de ces catégories de collectivités territoriales à 15 % de l’effectif total du collège appelé à élire les sénateurs. Pour ce faire, les articles 4 et 5 de la proposition de loi prévoient, par analogie avec la règle retenue pour les communes les plus peuplées, que les assemblées délibérantes des départements (Ville de Paris comprise), dont les membres continueront à faire partie du collège électoral, devront élire des délégués supplémentaires, au scrutin de liste et à la représentation proportionnelle. En conséquence, le nombre de délégués des conseils généraux d’une part, et des conseils régionaux et de l’Assemblée de Corse d’autre part, devrait s’élever dans chaque cas à 45 791.

Compte tenu de l’augmentation proposée pour assurer la représentation des départements et des régions et de la suppression de la participation des députés à l’élection des sénateurs (voir infra), le collège électoral du Sénat comprendrait au total 305 276 membres (contre 143 521 aujourd’hui), répartis conformément au tableau ci-après :

Évolution de la composition du collège électoral du Sénat

Composantes du collège électoral

Participation actuelle au collège électoral

Proportion actuelle du collège électoral

Participation proposée au collège électoral

Proportion proposée du collège électoral

Communes de moins de 3 500 habitants

67 975

47,4 %

84 480

27,7 %

Communes de 3 500 à 8 999 habitants

24 555

17,1 %

30 347

9,9 %

Communes de 9 000 à 29 999 habitants

23 673

16,5 %

38 279

12,5 %

Communes de 30 000 à 99 999 habitants

11 752

8,2 %

31 081

10,2 %

Communes de plus de 100 000 habitants

9 996

7 %

29 507

9,7 %

Total des communes

137 365

95,7 %

213 694

70 %

Départements

3 857

2,7 %

45 791

15 %

Régions

1 722

1,2 %

45 791

15 %

Députés

577

0,4 %

0

0 %

Ensemble du collège électoral

143 521

100 %

305 276

100 %

3. La suppression de la participation des députés à l’élection des sénateurs

L’une des originalités des modalités actuelles d’élection des sénateurs tient à la participation de l’ensemble des députés au collège électoral du Sénat. Cette règle, prévue à l’article L. 280 du code électoral, conduit en effet les membres de la première chambre à désigner, même marginalement, ceux de la seconde.

Un tel mécanisme va à l’encontre de l’idée selon laquelle le collège électoral du Sénat permet d’assurer la pleine représentation des collectivités territoriales en son sein, conformément au troisième alinéa de l’article 24 de la Constitution. En effet, tous les députés n’exercent pas un mandat de conseiller municipal, général ou régional, même si tel est le cas pour la majorité d’entre eux. Élus directement par le peuple pour représenter la Nation, ils ne représentent donc pas les collectivités territoriales à l’Assemblée nationale. Dès lors, à quel titre doivent-ils participer en tant que députés à l’élection des sénateurs ?

Votre rapporteur n’est pas parvenu à identifier clairement une fonction particulière des députés qui légitimerait leur intervention spécifique pour désigner les sénateurs – intervention de toute façon peu déterminante, puisque les députés représentent environ 0,4 % de l’effectif total du collège électoral. L’article 1er de la proposition de loi privilégie une approche plus cohérente, en supprimant, à l’article L. 280 du code électoral, les députés de la liste des catégories d’élus appelés à désigner les sénateurs.

4. Le renforcement du scrutin proportionnel pour l’élection des sénateurs

Si la composition du Sénat doit avant tout refléter plus fidèlement les aspirations exprimées par les citoyens lors des élections locales, en représentant les collectivités territoriales en fonction de leur population, la représentativité politique de la seconde chambre pourrait aussi être améliorée, à titre complémentaire, par l’élection au scrutin proportionnel d’un nombre accru de sénateurs. Ce mode de scrutin permettrait d’exprimer de façon plus équilibrée et nuancée la palette des sensibilités politiques représentées dans les assemblées locales. Le rôle de « filtre » joué par ces dernières dans le cadre du suffrage indirect écarterait le risque que le mode de scrutin proportionnel n’offre aux membres de partis politiques extrémistes un accès trop facile à des fonctions parlementaires.

Une telle démarche s’accorderait bien avec la fonction de « modération » habituellement reconnue au Sénat. Celui-ci pourrait y trouver un moyen de renforcer sa légitimité démocratique et sa singularité institutionnelle, par des voies qui ne sont hélas pas explorées à l’Assemblée nationale.

La proposition de loi qui vous est soumise tire les conséquences de cette analyse en prévoyant, dans ses articles 10 et 11, que les sénateurs seront élus à la représentation proportionnelle (33) dans les départements comptant au moins trois sénateurs, alors que l’article L. 295 du code électoral réserve ce mode de scrutin aux départements dans lesquels sont élus quatre sénateurs ou plus. L’article L. 294 du même code serait logiquement modifié, afin de prévoir l’application du scrutin majoritaire à deux tours dans les départements comptant au maximum deux sénateurs, contre trois actuellement.

Il en résulterait une élection au scrutin proportionnel des sénateurs de 54 départements, contre 29 actuellement (34), ce qui porterait de 180 à 255 le nombre de sénateurs élus selon ce mode de scrutin. Près des trois quarts des sénateurs seraient ainsi élus au scrutin proportionnel, contre un peu plus de la moitié aujourd’hui. Rappelons que ces modalités d’élection des sénateurs ont déjà été appliquées lors des élections sénatoriales du mois de septembre 2001, sur le fondement de la loi du 10 juillet 2000 relative à l’élection des sénateurs (35) – laquelle fut remise en cause par la loi du 30 juillet 2003 portant réforme de l’élection des sénateurs (36), sans justification plus claire et explicite que la recherche « d’un meilleur équilibre entre le scrutin majoritaire et la représentation proportionnelle » (37).

Là encore, la proposition de loi n’ouvre la voie à aucune aventure ou révolution institutionnelle, mais seulement à un nécessaire rééquilibrage démocratique, qui ne peut que conforter la légitimité de l’institution sénatoriale.

*

* *

La Commission a examiné la proposition de loi au cours de sa séance du mardi 13 mai 2008. Après l’exposé du rapporteur, une discussion générale a eu lieu.

S’interrogeant sur la concomitance du dépôt de la proposition de loi et de la révision constitutionnelle, M. Michel Hunault a demandé au rapporteur si l’adoption de la proposition de loi conditionnait l’accord du groupe socialiste sur la révision constitutionnelle. Il a jugé préférable d’aborder la question des modes de scrutin après la révision constitutionnelle, qui a principalement pour objet de revaloriser le rôle du Parlement, et éventuellement après la réunion d’un groupe de travail sur le sujet. Il a considéré que la question de la représentativité de l’Assemblée nationale pourrait également être abordée et relevé que la composition des conseils régionaux ne reflétait pas fidèlement le corps électoral français.

Après avoir rappelé que le mode de scrutin pour les élections régionales avait été défini par l’actuelle majorité, M. Bruno Le Roux a souhaité que la réflexion sur la réforme des institutions s’accompagne d’une réflexion sur les modes de scrutin. Il a indiqué que la nécessité de réformer le mode de scrutin sénatorial était communément admise face à l’impossibilité de l’alternance, situation qui n’affecte aucune autre assemblée élue en France, et devait être abordée concomitamment avec la révision constitutionnelle pour rendre les institutions plus démocratiques. Il a indiqué que la discussion de la proposition de loi permettrait de tester la volonté de la majorité de donner des signes en ce sens.

Tout en jugeant la proposition de loi cohérente, M. Philippe Gosselin a jugé qu’elle était discutée à un moment inopportun compte tenu de l’imminence d’une révision constitutionnelle permettant d’engager la réforme du mode de scrutin sénatorial. Il a également émis des réserves sur l’idée de réformer le Sénat par une proposition de loi émanant de l’Assemblée nationale, ainsi que sur l’accroissement du nombre de délégués non élus au détriment des délégués élus, dont la légitimité est mieux établie.

Après avoir rappelé que la suppression du Sénat avait été proposée en 1969 par un Président de la République qui n’était pas socialiste, M. Serge Blisko a estimé qu’il convenait de conserver le système bicamériste qui n’est remis en question ni par les constitutionnalistes, ni par les parlementaires, mais en conférant une plus grande légitimité au Sénat. Il a considéré que le moment était favorable à une révision des conditions d’élection des parlementaires, puisque le comité Balladur a travaillé sur la question et qu’un consensus existe sur la nécessité d’opérer un nouveau découpage des circonscriptions législatives. Il a expliqué que la proposition de loi maintenait une surreprésentation des communes de moins de 3 500 habitants, mais en l’atténuant, et a rappelé que deux nouveaux sièges de députés et de sénateurs avaient été créés pour les collectivités d’outre-mer de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy, pourtant très peu peuplées. Il a conclu son propos en déclarant que le Sénat, en apparaissant figé, se fragilisait et devrait mieux représenter la population.

M. Bernard Roman, rapporteur, a souhaité que l’ouverture esquissée dans les propos de MM. Philippe Gosselin et Michel Hunault puisse être confirmée en séance publique.

Il a jugé déplacée toute comparaison entre les élections régionales et sénatoriales, la victoire de la gauche aux élections de 2004 résultant largement de la désapprobation de la politique gouvernementale et demeurant réversible à l’avenir, tandis que l’alternance au Sénat s’avère en pratique impossible, comme l’a démontré M. Guy Carcassonne.

Le fait que le projet de loi constitutionnelle dont est saisie l’Assemblée nationale précise, dans son article 34, que la nouvelle rédaction proposée pour l’article 24 de la Constitution, relatif notamment aux conditions d’élection des sénateurs, ne s’applique qu’à compter « du deuxième renouvellement partiel du Sénat suivant la publication » de la loi constitutionnelle, c’est-à-dire en 2011 au plus tôt, est révélateur des réticences de la majorité sénatoriale devant cette future réforme électorale.

La révision constitutionnelle doit offrir au Parlement l’occasion de se prémunir contre une nouvelle censure constitutionnelle d’une loi réformant les conditions d’élection des sénateurs pour rééquilibrer rapidement les institutions françaises au profit d’une « démocratie irréprochable ».

Le renvoi de cette réforme à une future loi organique, sur laquelle le Sénat disposerait d’un droit de veto, risque fort de priver le Parlement de la possibilité de démocratiser réellement les conditions d’élection des sénateurs et, par là même, les institutions de la République.

L’adoption de la proposition de loi élaborée en étroite liaison avec les sénateurs socialistes et présentée par les députés du groupe SRC constitue donc, à leurs yeux, une « exigence » majeure afin que puisse être réunie, dans un cadre consensuel, la majorité des trois cinquièmes requise pour l’adoption par le Congrès de la révision constitutionnelle proposée par le Gouvernement.

Le fait que le collège électoral du Sénat soit majoritairement composé de simples délégués, qui n’ont pas eux-mêmes la qualité d’élus locaux, s’explique par le choix de ne pas procéder à un rééquilibrage démographique en diminuant le nombre de délégués des petites communes. Cette importante augmentation du nombre de délégués, bien qu’elle ait été jugée contraire à l’actuel article 24 de la Constitution le 6 juillet 2000, représenterait en pratique une formidable opportunité civique, car les délégués des conseils municipaux tirent en général une grande fierté de leur participation à l’élection des sénateurs.

Le Président Jean-Luc Warsmann a rappelé que le projet de loi constitutionnelle prévoyait que le Sénat devait représenter les collectivités territoriales en tenant compte de leur population, ce qui rendra nécessaire une évolution du mode de scrutin. Il a considéré que la proposition de loi soulevait des questions qui gagneraient à être approfondies, s’agissant notamment de l’augmentation considérable de l’effectif du collège électoral, qui passerait de 143 521 à plus de 300 000 membres, de l’accroissement de la part des délégués non élus et de la réduction de la représentation des communes à laquelle le Président du Sénat n’est d’ailleurs pas hostile. Il a ensuite observé que le Sénat aborderait la question du mode de scrutin le 4 juin 2008 dans le cadre de son ordre du jour réservé et qu’il convenait de le laisser présenter ses propositions. Après avoir rappelé que la proposition de loi était en l’état contraire à la Constitution, il a reconnu la légitimité du débat qui s’engagera dans le cadre de la séance d’initiative parlementaire mardi prochain mais il a proposé de ne pas entrer dès maintenant dans la discussion technique.

M. Bruno Le Roux a jugé que le texte avait été suffisamment préparé et a souhaité que la Commission procède à l’examen des articles de la proposition de loi.

À l’issue de ce débat, la Commission a décidé de ne pas présenter de conclusions sur la proposition de loi relative aux conditions de l’élection des sénateurs (n° 851).

TABLEAU COMPARATIF

___

Texte en vigueur

___

Texte de la proposition de loi

___

 

Proposition de loi relative aux
conditions de l’élection des sénateurs

Code électoral

Article 1er

Art. L. 280. —  Les sénateurs sont élus dans chaque département par un collège électoral composé :

Les quatre derniers alinéas de l’article L. 280 du code électoral sont remplacés par trois alinéas ainsi rédigés :

1° Des députés ;

 

2° Des conseillers régionaux de la section départementale correspondant au département et des conseillers de l’Assemblée de Corse désignés dans les conditions prévues par le titre III bis du présent livre ;

« 1° Des délégués des conseils municipaux et du Conseil de Paris ou des suppléants de ces délégués ;

3° Des conseillers généraux ;

« 2° Des délégués des conseils généraux et du Conseil de Paris ou des suppléants de ces délégués ;

4° Des délégués des conseils municipaux ou des suppléants de ces délégués.

« 3° Des délégués des conseils régionaux et de l’Assemblée de Corse ou des suppléants de ces délégués. »

 

Article 2

 

Les six premiers alinéas de l’article L. 284 du même code sont remplacés par trois alinéas ainsi rédigés :

Art. L. 284. —  Les conseils municipaux élisent parmi leurs membres dans les communes de moins de 9 000 habitants :

« Les conseils municipaux et le Conseil de Paris élisent des délégués dont le nombre est déterminé en fonction de la population des communes, à raison d’un délégué pour 300 habitants ou une fraction de ce nombre.

—  un délégué pour les conseils municipaux de neuf et onze membres ;

—  trois délégués pour les conseils municipaux de quinze membres ;

—  cinq délégués pour les conseils municipaux de dix-neuf membres ;

« Lorsque le nombre de délégués est inférieur ou égal à l’effectif du conseil municipal, les délégués sont élus au sein de ce conseil.

—  sept délégués pour les conseils municipaux de vingt-trois membres ;

—  quinze délégués pour les conseils municipaux de vingt-sept et vingt-neuf membres.

« Lorsque le nombre de délégués est supérieur à l’effectif du conseil municipal, les membres de ce conseil sont délégués de droit, les autres délégués étant élus dans les conditions fixées à l’article L. 289. »

Dans le cas où le conseil municipal est constitué par application des articles L. 2113-6 et L. 2113-7 du code général des collectivités territoriales relatif aux fusions de communes, le nombre de délégués est égal à celui auquel les anciennes communes auraient eu droit avant la fusion.

Art. L. 289. —  Cf. annexe.

 
 

Article 3

Art. L. 285. —  Dans les communes de 9 000 habitants et plus, tous les conseillers municipaux sont délégués de droit.

L’article L. 285 est abrogé.

En outre, dans les communes de plus de 30 000 habitants, les conseils municipaux élisent des délégués supplémentaires à raison de 1 pour 1 000 habitants en sus de 30 000.

 
 

Article 4

 

Le titre III bis du même code est ainsi rédigé :

Titre III bis

« Titre III bis

Désignation des délégués de
l’Assemblée de Corse

« Désignation des délégués des conseils régionaux et de l’Assemblée de Corse

Art. L. 293-1. —  Dans le mois qui suit son élection, l’Assemblée de Corse procède à la répartition de ses membres entre les collèges chargés de l’élection des sénateurs dans les départements de Corse-du-Sud et de Haute-Corse.

« Art. L. 293-1. —  Les conseillers régionaux de la section départementale correspondant au département élisent un nombre de délégués égal à 15 % du nombre total de délégués composant, dans le département, le collège électoral prévu à l’article L. 280, le cas échéant arrondi à l’entier supérieur.

Le nombre de membres de l’Assemblée de Corse à désigner pour faire partie des collèges électoraux sénatoriaux de la Corse-du-Sud et de la Haute-Corse est respectivement de 24 et de 27.

« Les conseillers régionaux de la section départementale correspondant au département élisent aussi des suppléants, dont le nombre est égal au dixième du nombre de délégués qu’ils élisent.

Art. L. 280. —  Cf. supra art. 1er de la proposition de loi.

« Les membres du conseil régional sont délégués de droit.

 

« L’élection des délégués et des suppléants a lieu sur la même liste suivant le système de la représentation proportionnelle avec application de la règle du plus fort reste, sans panachage ni vote préférentiel ; les listes peuvent comprendre un nombre de noms inférieur au nombre de sièges de délégués et de suppléants à pourvoir.

Art. L. 293-2. —  L’Assemblée de Corse désigne d’abord ses membres appelés à représenter la collectivité territoriale au sein du collège électoral du département de Corse-du-Sud.

« Art. L. 293-2. —  L’article L. 293-1 est applicable à l’élection des délégués et des suppléants à l’Assemblée de Corse. »

Chaque conseiller ou groupe de conseillers peut présenter avec l’accord des intéressés une liste de candidats en nombre au plus égal à celui des sièges à pourvoir.

 

L’élection a lieu au scrutin de liste sans rature ni panachage. Les sièges sont répartis à la représentation proportionnelle selon la règle de la plus forte moyenne.

 

Lorsque les opérations prévues aux alinéas précédents ont été achevées, les conseillers non encore désignés font de droit partie du collège électoral sénatorial du département de Haute-Corse.

 

Celui qui devient membre de l’Assemblée de Corse entre deux renouvellements est réputé être désigné pour faire partie du collège électoral sénatorial du même département que le conseiller qu’il remplace.

 

Art. L. 293-3. —  Le représentant de l’État dans la collectivité territoriale de Corse notifie au représentant de l’État dans chaque département de la collectivité territoriale les noms des conseillers désignés pour son département en vue de l’établissement du tableau des électeurs sénatoriaux mentionné à l’article L. 292.

 
 

Article 5

 

Après le titre III bis du même code, il est inséré un titre III ter ainsi rédigé :

 

« Titre III ter

 

« Désignation des délégués des conseils généraux




Art. L. 280. —  Cf. supra art. 1er de la proposition de loi.

« Art. L. 293-3. —  Les conseils généraux et le Conseil de Paris élisent un nombre de délégués égal à 15 % de celui du nombre total de délégués composant, dans le département, le collège électoral prévu à l’article L. 280, le cas échéant arrondi à l’entier supérieur.

 

« Les conseils généraux élisent aussi des suppléants dont le nombre est égal au dixième du nombre de délégués qu’ils élisent.

 

« Les membres du conseil général sont délégués de droit.

 

« L’élection des délégués et des suppléants a lieu sur la même liste suivant le système de la représentation proportionnelle avec application de la règle du plus fort reste, sans panachage ni vote préférentiel ; les listes peuvent comprendre un nombre de noms inférieur au nombre de sièges de délégués et de suppléants à pourvoir.

 

« Le nombre de suppléants est égal au dixième du nombre de délégués.

 

« Art. L. 293-4. —  L’article L. 293-3 est applicable à l’élection des délégués et des suppléants des conseils généraux de la Corse-du-Sud et de la Haute-Corse.

Ordonnance n° 59-260 du 4 février 1959 complétant l’ordonnance n° 58-1098 du 15 novembre 1958
relative à l’élection des sénateurs

Article 6

Art. 13. —  Les sénateurs représentant les Français établis hors de France sont élus par un collège formé des membres élus de l’Assemblée des Français de l’étranger.

L’article 13 de l’ordonnance n° 59-260 du 4 février 1959 complétant l’ordonnance n° 58-1098 du 15 novembre 1958 relative à l’élection des sénateurs est complété par les mots : « et des délégués supplémentaires élus par eux à raison de 1 pour 300 Français inscrits au registre mondial des Français établis hors de France ».

 

Article 7

 

Après l’article 14 de la même ordonnance, il est inséré un chapitre Ier bis ainsi rédigé :

 

« Chapitre Ier bis

 

« Collège électoral

 

« Art. 14 bis. —  La date à laquelle sont désignés les délégués supplémentaires à l’Assemblée des Français de l’étranger ainsi que les suppléants est fixée au troisième mardi du mois de mars.

Loi n° 82-471 du 7 juin 1982 relative à l’Assemblée des Français de l’étranger

Art. 2. —  Cf. annexe

« Art. 14 ter. —  L’élection des délégués supplémentaires et des suppléants, qui sont au nombre de un pour cinq titulaires, a lieu sur la même liste à la représentation proportionnelle suivant la règle de la plus forte moyenne, sans panachage ni vote préférentiel. Sont éligibles les Français établis hors de France inscrits sur les listes électorales établies en application de l’article 2 de la loi n° 82-471 du 7 juin 1982 relative à l’Assemblée des Français de l’étranger.

 

« Chaque membre élu ou groupe de membres élus de l’Assemblée des Français de l’étranger peut présenter une liste de candidats aux fonctions de délégués et de suppléants. L’ordre des suppléants résulte de leur rang de présentation. Les listes peuvent comprendre un nombre de noms inférieur au nombre de sièges de délégués et de suppléants à pourvoir.

 

« En cas de refus ou d’empêchement d’un délégué, c’est le suppléant de la même liste venant immédiatement après le dernier délégué élu de la liste qui est appelé à le remplacer.

 

« Un membre de l’Assemblée des Français de l’étranger empêché d’assister à la séance au cours de laquelle sont élus les délégués et les suppléants peut donner à un autre membre de cette assemblée pouvoir écrit de voter en son nom. Un même membre ne peut être porteur que d’un seul pouvoir qui est toujours révocable.

 

« Art. 14 quater. —  Les recours contestant la régularité de l’élection des délégués et suppléants ainsi que les recours contre le tableau des électeurs sénatoriaux établi par le ministre chargé des relations extérieures sont portés devant le tribunal administratif de Paris par le ministre chargé des relations extérieures ou par tout membre du collège électoral sénatorial des Français établis hors de France. La décision dudit tribunal ne peut être contestée que devant le Conseil constitutionnel saisi de l’élection.

Code électoral

Art. L. 291 et 293. —  Cf. annexe

« Art. 14 quinquies. —  Pour l’application à la constitution du collège électoral sénatorial des Français établis hors de France des articles L. 291 et L. 293 du code électoral, le mot : « préfet » est remplacé par les mots : « ministre chargé des relations extérieures ».

Ordonnance n° 59-260 du 4 février 1959 précitée

Article 8

 

Le premier alinéa de l’article 21 de la même ordonnance est complété par une phrase ainsi rédigée :

Art. 21. —  Le collège électoral se réunit au ministère des relations extérieures.

« Toutefois, les membres de ce collège peuvent, dans des conditions définies par décret, voter par correspondance sous pli fermé ou par voie électronique. »

Le bureau de vote est présidé par un conseiller à la cour d’appel de Paris désigné par le premier président de cette juridiction.

 
 

Article 9

Art. 22. —  Les dispositions des articles L. 63 à L. 67, L. 313 et L. 314 du code électoral sont applicables aux opérations de vote. Les dispositions de l’article L. 314-1 du même code sont également applicables, la liste d’émargement étant constituée par la liste des membres élus de l’assemblée mentionnée à l’article 13, certifiée par le ministre chargé des affaires étrangères.

Art. 13. —  Cf. supra art. 6 de la proposition de loi.

Après les mots : « la liste des membres », la fin de la seconde phrase de l’article 22 de la même ordonnance est ainsi rédigée : « du collège électoral mentionné à l’article 13, certifiée par le ministre chargé des relations extérieures ».

Code électoral

Article 10

Art. L. 294. —  Dans les départements où sont élus trois sénateurs ou moins, l’élection a lieu au scrutin majoritaire à deux tours.

Dans le premier alinéa de l’article L. 294 du même code, le mot : « trois » est remplacé par le mot : « deux ».

Nul n’est élu sénateur au premier tour de scrutin s’il n’a réuni :

 

1° La majorité absolue des suffrages exprimés ;

 

2° Un nombre de voix égal au quart des électeurs inscrits.

 

Au second tour de scrutin, la majorité relative suffit. En cas d’égalité des suffrages, le plus âgé des candidats est élu.

 
 

Article 11

Art. L. 295. —  Dans les départements où sont élus
quatre sénateurs ou plus, l’élection a lieu à la représentation proportionnelle suivant la règle de la plus forte moyenne, sans panachage ni vote préférentiel.

Dans le premier alinéa de l’article L. 295 du même code, le mot : « quatre » est remplacé par le mot : « trois ».

Sur chaque liste, les sièges sont attribués aux candidats d’après l’ordre de présentation.

 

ANNEXE AU TABLEAU COMPARATIF

Code électoral

Art. L. 289. —  Dans les communes visées aux chapitres III et IV du titre IV du livre Ier du présent code, l’élection des délégués et des suppléants a lieu sur la même liste suivant le système de la représentation proportionnelle avec application de la règle de la plus forte moyenne, sans panachage ni vote préférentiel. Les listes peuvent comprendre un nombre de noms inférieur au nombre de sièges de délégués et de suppléants à pourvoir.

Chaque conseiller municipal ou groupe de conseillers municipaux peut présenter une liste de candidats aux fonctions de délégués et de suppléants.

L’ordre des suppléants résulte de leur rang de présentation.

En cas de refus ou d’empêchement d’un délégué, c’est le suppléant de la même liste venant immédiatement après le dernier délégué élu de la liste qui est appelé à le remplacer.

Un conseiller municipal empêché d’assister à la séance au cours de laquelle sont élus les délégués et les suppléants peut donner à un autre conseiller municipal de son choix pouvoir écrit de voter en son nom. Un même conseiller municipal ne peut être porteur que d’un seul pouvoir qui est toujours révocable.

Art. L. 291. —  Au cas où le refus des délégués et des suppléants épuiserait la liste des délégués, le préfet prend un arrêté fixant la date de nouvelles élections.

Art. L. 293. —  En cas d’annulation de l’élection d’un délégué ou d’un suppléant, il est fait appel au suivant de liste des suppléants élus. Si la liste des délégués reste néanmoins incomplète, le préfet prend un arrêté fixant de nouvelles élections pour la compléter.

Loi n° 82-471 du 7 juin 1982 relative à l’Assemblée des Français de l’étranger

Art. 2. —  Sont électeurs les Français établis hors de France inscrits sur les listes électorales consulaires établies en application de la loi organique n° 76-97 du 31 janvier 1976 relative aux listes électorales consulaires et au vote des Français établis hors de France pour l’élection du Président de la République.

© Assemblée nationale

1 () À l’inverse, les secondes chambres ont été supprimées dans certains États européens à la faveur de périodes de paix civile, comme au Danemark en 1953 et en Suède en 1969, ou, plus récemment, en Croatie en 2001 et en Serbie en 2003.

2 () Discours de Belleville prononcé le 23 avril 1875 par M. Léon Gambetta.

3 () « L’élaboration parlementaire de la loi, étude comparative (Allemagne, France, Royaume-Uni) », Mme Murielle Mauguin Hegelson, Dalloz, 2006 (p. 337).

4 () Mme Murielle Mauguin Hegelson, op. cit. (p. 341).

5 () « Les secondes chambres en Europe occidentale : légitimité ? utilité ? », M. Jean Mastias, article publié dans la Revue internationale de politique comparée, volume 6 intitulé « Des Sénats », printemps 1999 (p. 181).

6 () Selon la classification de M. Jean Grangé, « Le bicamérisme », in « Dictionnaire constitutionnel », sous la direction de MM. Yves Mény et Olivier Duhamel, PUF, 1992 (p. 77).

7 () Le Sénatus-consulte organique du 28 floréal An XII prévoyait que les Princes français étaient membres du Sénat, les autres membres étant choisis par l’Empereur.

8 () Nomination sur proposition du Premier ministre, sous le contrôle d’une commission indépendante saisie d’une majorité de candidatures transmises par les partis politiques, mais aussi de candidatures de personnes non membres d’un parti.

9 () L’article 3 de la Constitution précise ainsi, dans ses deux premiers alinéas : « La souveraineté nationale appartient au peuple qui l’exerce par la voie de ses représentants et par la voie du référendum. Aucune section du peuple ni aucun individu ne peut s’en attribuer l’exercice. ».

10 () L’article 1er de la Constitution prévoit notamment que la France « assure l’égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d’origine, de race ou de religion. ».

11 () « La représentation des collectivités territoriales par le Sénat, étude sur l’article 24 alinéa 3 de la constitution française du 4 octobre 1958 », M. François Robbe, LGDJ, 2001 (p. 551).

12 () M. François Robbe, op. cit. (p. 384).

13 () « Les secondes chambres en Europe occidentale : légitimité ? utilité ? », M. Jean Mastias, article publié dans la Revue internationale de politique comparée, volume 6 intitulé « Des Sénats », printemps 1999 (p. 172).

14 () M. Michel Verpeaux, avant-propos (p. VIII) à l’ouvrage précité de M. François Robbe.

15 () Mme Murielle Mauguin Hegelson, op. cit. (p. 339-340).

16 () « Le bicamérisme », M. Jean Grangé, in « Dictionnaire constitutionnel », sous la direction de MM. Yves Mény et Olivier Duhamel, PUF, 1992 (p. 698).

17 () Journal Le Monde, 28 mars 2002.

18 () Journal « Le Monde », 23 juin 1999.

19 () Revue « Pouvoirs locaux », n° 44, 2000.

20 () Décision n° 2000-431 DC du 6 juillet 2000 « Loi relative à l’élection des sénateurs ».

21 () M. Jean-Eric Schoettl, « Le mode d’élection du Sénat doit permettre à celui-ci d’assurer la représentation des collectivités territoriales de la République », in Petites affiches, 12 juillet 2000.

22 () M. François Robbe, op. cit. (p. 384).

23 () M. François Robbe, op. cit. (p. 382).

24 () Ordonnance n° 59-260 du 4 février 1959 complétant l’ordonnance n° 58-1098 du 15 novembre 1958 relative à l’élection des sénateurs.

25 () Loi n° 82-471 du 7 juin 1982 relative à l’Assemblée des Français de l’étranger.

26 () Élection au scrutin majoritaire à un tour dans les circonscriptions où le nombre de sièges à pourvoir est inférieur à trois et, dans les autres cas, élection au scrutin de liste à la représentation proportionnelle.

27 () 155 membres en 2009, en vertu de la loi n° 2004-805 du 9 août 2004 relative au Conseil supérieur des Français de l’étranger.

28 () Calcul effectué en fonction d’une population nationale estimée par l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE) à 63,8 millions d’habitants au 1er janvier 2008.

29 () Représentation proportionnelle suivant la règle de la plus forte moyenne, sans panachage ni vote préférentiel.

30 () Deuxième phrase du troisième alinéa de l’article 24 de la Constitution.

31 () Loi constitutionnelle n° 2003-276 du 28 mars 2003 relative à l’organisation décentralisée de la République (article 5).

32 () Premier alinéa de l’article 72 de la Constitution.

33 () Représentation proportionnelle suivant la règle de la plus forte moyenne, sans panachage ni vote préférentiel et dans l’ordre de présentation des candidats au sein de chaque liste.

34 () Les 25 départements dans lesquels le scrutin proportionnel serait étendu seraient les suivants : Ain, Aisne, Calvados, Charente-Maritime, Côte d’Or, Côtes d’Armor, Doubs, Drôme, Eure, Eure-et-Loir, Gard, Indre-et-Loire, Loiret, Manche, Marne, Morbihan, Puy-de-Dôme, Pyrénées-Atlantiques, Saône-et-Loire, Sarthe, Haute-Savoie, Somme, Vaucluse, Vendée, Guadeloupe.

35 () Loi n° 2000-641 du 10 juillet 2000 relative à l’élection des sénateurs.

36 () Loi n° 2003-697 du 30 juillet 2003 portant réforme de l’élection des sénateurs.

37 () Rapport (n° 1000), enregistré à la présidence de l’Assemblée nationale le 2 juillet 2003, présenté par M. Jérôme Bignon au nom de la commission des Lois sur la proposition de loi organique portant réforme de la durée du mandat et de l’âge d’éligibilité des sénateurs ainsi que de la composition du Sénat, ainsi que sur la proposition de loi portant réforme de l’élection des sénateurs (p. 23).