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N° 1032

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 8 juillet 2008.

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES, FAMILIALES ET SOCIALES SUR LE PROJET DE LOI, adopté par le Sénat après déclaration d’urgence, instituant un droit d'accueil pour les élèves des écoles maternelles et élémentaires publiques pendant le temps scolaire,

PAR Mme Françoise GUÉGOT,

Députée.

——

Voir les numéros :

Sénat : 389, 408 et T.A. 118 (2007-2008)

Assemblée nationale : 1008, 1045

INTRODUCTION 5

I.- L’ABSENCE D’UN INSTRUMENT PERMETTANT DE CONCILIER LE DROIT DE GRÈVE DES ENSEIGNANTS, LE DROIT À L’ÉDUCATION ET LA LIBERTÉ DE TRAVAILLER DES PARENTS EST PÉNALISANTE 7

A. LES ÉCOLES PRIMAIRES PUBLIQUES SCOLARISENT 5,7 MILLIONS D’ENFANTS 7

B. COMME DANS TOUT SERVICE PUBLIC SOUMIS À L’IMPÉRATIF DE CONTINUITÉ, L’EXERCICE DU DROIT DE GRÈVE À L’ÉCOLE EST ENCADRÉ 9

C. DANS LES FAITS, L’ACCUEIL DES ENFANTS À L’ÉCOLE LES JOURS DE GRÈVE NE PEUT ÊTRE SYSTÉMATIQUEMENT ASSURÉ 15

II.- LE PROJET DE LOI EST PROTECTEUR DU DROIT DE GRÈVE ET PERMET DE RÉPONDRE AUX BESOINS DES FAMILLES 21

A. LA PHILOSOPHIE DU DISPOSITIF PROPOSÉ : SATISFAIRE DEUX EXIGENCES FONDAMENTALES EN RESPECTANT LA CONSTITUTION 21

B. L’INSTITUTION D’UN NOUVEAU DROIT POUR LES FAMILLES S’ACCOMPAGNÉ DE GARANTIES JURIDIQUES ET FINANCIÈRES POUR LES COMMUNES 25

TRAVAUX DE LA COMMISSION 33

I.- DISCUSSION GÉNÉRALE 33

II.- EXAMEN DES ARTICLES 41

Article 1er Modification d’un intitulé de titre et création d’un nouveau chapitre du code de l’éducation 41

Après l’article 1er 43

Article 2 Institution du droit d’accueil dans les écoles maternelles et élémentaires publiques 43

Après l’article 2 50

Article 3 Procédure de prévention des conflits dans le premier degré public et conditions de dépôt d’un nouveau préavis de grève 51

Article 4 Institution d’un service d’accueil des élèves des écoles publiques du premier degré en cas de grève 57

Article 5 Mise en place du service d’accueil par les communes 60

Article 6 Garanties visant à assurer le respect du droit à la vie privée 72

Article 7 Accueil dans les locaux scolaires 73

Article 7 bis Établissement d’une liste des personnes susceptibles de participer à l’organisation du service d’accueil 75

Article 8 Contribution financière versée par l’État aux communes 81

Après l’article 8 86

Article 8 bis Transfert à l’État de la responsabilité administrative des communes lors de la mise en place du service d’accueil 86

Article 9 Attribution de l’organisation du service d’accueil aux établissements publics de coopération intercommunale 92

Article additionnel après l’article 9 Extension du service d’accueil aux écoles maternelles et élémentaires privées sous contrat 95

Article additionnel après l’article 9 Évaluation de la mise en place du service d’accueil pour les communes 95

Article 10 Entrée en vigueur des dispositions relatives au service d’accueil 95

Titre du projet de loi 96

AMENDEMENTS ADOPTÉS PAR LA COMMISSION 97

ANNEXE : Liste des personnes auditionnées 99

INTRODUCTION

L’Assemblée nationale est saisie, après une première lecture au Sénat, du projet de loi instituant un droit d’accueil pour les élèves des écoles maternelles et élémentaires publiques pendant le temps scolaire.

Les difficultés engendrées par ces grèves ne sont pas anecdotiques lorsque l’on prend on compte deux chiffres : les 5,7 millions d’enfants scolarisés dans les écoles primaires et élémentaires publiques et les 85 500 jours de grèves ayant donné lieu, en 2007, à des retenues sur traitement dans le premier degré public (296 000 en 2006). À cet effet de masse s’ajoute un problème d’équité auquel les pouvoirs publics ne peuvent pas rester insensibles : les parents ne sont pas égaux devant les effets de la grève. Pour certains, les plus aisés, elle ne coûte presque rien ; pour d’autres, en revanche, elle peut les placer devant des difficultés insurmontables. Si l’on considère que les collèges et les lycées peuvent, le plus souvent, accueillir leurs élèves les jours de grève, évitant ainsi aux parents de se priver d’une journée de travail, force est de constater que plus l’enfant est jeune, moins l’éducation nationale est capable de remplir son devoir d’accueil.

Le gouvernement a pris la mesure du problème en faisant part de son intention, en décembre 2007, d’offrir, à partir de la rentrée 2008, un nouveau service, consistant à accueillir, les jours de grève, les enfants inscrits dans les écoles primaires publiques. Le ministre de l’Éducation nationale, M. Xavier Darcos, a souhaité expérimenter, par anticipation, ce dispositif en vue de la journée d’action nationale syndicale du 24 janvier, et a publié, le 8 janvier 2008, une circulaire prévoyant la mise en place d’un service minimum d’accueil – le SMA – dans les communes volontaires, en contrepartie d’un financement assuré par l’État.

Pour des raisons tant politiques que pratiques, ce dispositif a connu un succès certes significatif, mais insuffisant : lors des grèves du 24 janvier, du 15 et du 22 mai, un peu moins de 3 000 communes ont mis en place un service qui a concerné une population totale de 2 millions à 2,5 millions de personnes, soit seulement un Français sur trente.

Le 15 mai 2008, le Président de la République a tiré les conclusions de cette expérimentation en annonçant le dépôt d’un projet de loi instituant un droit d’accueil pour les enfants inscrits dans les écoles maternelles et élémentaires publiques. Ce droit se traduira, les jours de grève importante, par un service d’accueil mis en place par les communes. Comme l’a reconnu, avec force, le Président de la République le 15 mai dernier : « C’est un droit que celui de voir accueillir ses enfants y compris les jours de grève dans le service public de l’Education nationale ».

Tout est dit dans cette formule : l’accueil étant l’une des missions fondamentales du service public de l’Éducation nationale, il ne doit pas être mis en échec par le droit de grève. Le législateur disposant, en vertu de la Constitution, d’un pouvoir général d’encadrement des modalités d’exercice de la grève afin d’assurer la continuité du service public, l’État ne fait qu’accomplir son devoir en proposant la mise en place d’un dispositif pragmatique et efficace à même de garantir l’accueil des enfants à l’école en toutes circonstance et de protéger la liberté de travailler des parents.

Par ailleurs, le projet de loi adopté par le Sénat le 26 juin dernier contient de très nombreuses dispositions, enrichies par cette assemblée, visant à faciliter la mise en place du service d’accueil par les communes. Les garanties juridiques et financières données à ces collectivités sont nombreuses et prouvent amplement l’esprit de responsabilité qui préside à l’institution d’un droit d’accueil novateur pour les familles.

De fait, le présent projet de loi est marqué du sceau de la liberté et de la responsabilité dans l’intérêt des enfants : institution de procédures préservant la liberté de faire grève des enseignants ; création d’un dispositif, le service d’accueil, protégeant la liberté de travailler des parents les jours où le droit de grève est exercé ; partage clair de la compétence d’organisation du service d’accueil entre l’État et les communes ; souplesses données à celles-ci pour l’exercice d’une nouvelle compétence ; enfin, devoir de solidarité de l’État à l’égard des communes pleinement assumé.

I.- L’ABSENCE D’UN INSTRUMENT PERMETTANT DE CONCILIER LE DROIT DE GRÈVE DES ENSEIGNANTS, LE DROIT À L’ÉDUCATION ET LA LIBERTÉ DE TRAVAILLER DES PARENTS EST PÉNALISANTE

Les fonctionnaires disposent, depuis 1946, du droit de grève. Cependant, ce droit n’est pas absolu : lorsque les constituants l’ont reconnu en 1946, ils ont posé, dans le même temps, le principe de son encadrement par le législateur. En outre, le juge administratif a développé, s’agissant du droit de grève des fonctionnaires, une jurisprudence précise sur les limitations qui peuvent être apportées à son exercice, tandis que le Conseil constitutionnel, de son côté, a donné une valeur constitutionnelle égale au principe de continuité du service public. Bref, le droit de grève des fonctionnaires est un droit fortement « réglementé ».

Bien entendu, ces règles s’appliquent au personnel enseignant des écoles maternelles et élémentaires publiques. Cependant, force est de constater qu’elles ne suffisent pas à assurer un accueil systématique des enfants les jours de grève. Ainsi, alors qu’on peut considérer que cet accueil fait partie intégrante des missions de service public de l’école primaire, celle-ci n’est pas toujours en mesure de remplir, en cas de grève importante de ses enseignants, cette obligation « élémentaire ». Conséquence : les parents sont contraints, ces jours-là, de renoncer à travailler pour s’occuper de leurs enfants s’ils ne peuvent, pour des raisons financières notamment, recourir à des solutions de garde alternatives.

Compte tenu du fait que 5,7 millions d’enfants sont scolarisés dans le premier degré public, ce défaut d’accueil pose de réels problèmes, en termes de liberté et d’équité, à nos concitoyens (1).

Avant d’entrer dans le vif du sujet, on rappellera que l’éducation nationale et l’enseignement supérieur et la recherche détiennent le « record » du nombre de journées de grèves chez les agents de l’État : 668 123 en 2006, sur un total de 952 364, hors la Poste et France Télécom (2). Les données du ministère de l’éducation nationale sur le nombre de jours de grèves ayant donné lieu, dans le premier degré public, à des retenues sur traitement indiquent que ce chiffre est très élevé : 235 000 en 2004, 265 000 en 2005, 296 000 en 2006 et 88 500 en 2007.

A. LES ÉCOLES PRIMAIRES PUBLIQUES SCOLARISENT 5,7 MILLIONS D’ENFANTS

L’école primaire est l’une des institutions locales les plus anciennes. En effet, l’enseignement primaire fut d’abord confié aux paroisses, puis, en 1833, aux nouvelles écoles publiques communales (3). La création de ces dernières est l’œuvre d’un homme, François Guizot, effrayé par l’agitation révolutionnaire et ouvrière, dont témoignait la révolte des Canuts, à Lyon, en 1832, qu’il voulait endiguer par l’instruction.

Née de façon quelque peu conjoncturelle, la « communale » va devenir une véritable institution nationale, que la Troisième République a confortée et magnifiée avec la loi du 28 mars 1882 portant organisation de l’enseignement primaire. Dès 1850, dans l’un de ses plus beaux discours, le député Victor Hugo avait souligné que l’enseignement primaire répond à une nécessité profonde : « Toute question a son idéal. Pour moi, l’idéal de cette question de l’enseignement, le voici : l’instruction gratuite et obligatoire. Obligatoire au premier degré, gratuite à tous les degrés…L’instruction primaire obligatoire, c’est le droit de l’enfant qui, ne vous trompez pas, est plus sacré encore que le droit du père et qui se confond avec le droit de 1’État » (4).

Aujourd’hui, l’école constitue le premier pilier du service public de l’éducation nationale. Elle présente trois caractéristiques essentielles :

– Elle est une institution de proximité. Ne bénéficiant d’aucune autonomie administrative et financière, contrairement aux établissements scolaires du second degré, les écoles primaires publiques sont, sur le plan administratif, de simples services municipaux.

– Elle est une institution à deux étages. L’école primaire comprend d’abord l’école maternelle pour les enfants âgés de 3 à 6 ans, organisée sur trois niveaux et non obligatoire (5). Elle est suivie de l’école élémentaire pour les enfants âgés de 6 à 11 ans, organisée sur cinq niveaux obligatoires. L’enseignement élémentaire est structuré, depuis le décret du 6 septembre 1990, en trois cycles d’études : cycle 1 ou cycle des apprentissages premiers, cycle 2 ou cycle des apprentissages fondamentaux et cycle 3 ou cycle des approfondissements. Au total, la France compte 17 250 écoles maternelles publiques (160 écoles maternelles privées) et 33 040 écoles élémentaires publiques (5 217 écoles élémentaires privées).

– Elle est une institution universelle. En France métropolitaine, le taux de scolarisation dans l’enseignement pré-élémentaire et élémentaire, y compris dans l’enseignement spécialisé, des jeunes enfants est très élevé, comme le montre le tableau ci-dessous. L’obligation scolaire imposée aux enfants âgés de 6 à 16 ans y contribue, mais pas seulement, car le taux de scolarisation atteint 100 % pour les enfants âgés de 3 à 5 ans.

Population scolaire et taux de scolarisation dans le premier degré

Effectifs de population

Taux de scolarisation dans le premier degré
y compris spécialisé

Année de naissance

Âge

Population totale

2003

2 ans

759 601

25,1 %

2002

3 ans

761 019

100 %

2001

4 ans

773 683

100 %

2000

5 ans

780 840

100 %

1999

6 ans

756 012

99,6 %

1998

7 ans

736 099

99,6 %

1997

8 ans

724 861

99,5 %

1996

9 ans

736 965

99,3 %

1995

10 ans

728 761

96 %

1994

11 ans

716 393

21,2 %

Source : Repères et références statistiques – édition août 2007, ministère de l’éducation nationale

B. COMME DANS TOUT SERVICE PUBLIC SOUMIS À L’IMPÉRATIF DE CONTINUITÉ, L’EXERCICE DU DROIT DE GRÈVE À L’ÉCOLE EST ENCADRÉ

Le droit de grève des enseignants est un principe cardinal qui, ainsi que le rappelle la circulaire du ministre de l’éducation nationale de janvier 2008 relative à l’institution d’un service minimum d’accueil volontaire dans les écoles maternelles et élémentaires, ne « saurait souffrir aucune forme de remise en cause » (6).

Cependant, son exercice fait l’objet de limitations prévues par la Constitution et apportées tant par le législateur que par le juge – administratif et constitutionnel. En effet, comme elles s’appliquent à tous les fonctionnaires, ces limitations s’imposent, naturellement, aux enseignants des écoles publiques.

Les développements qui suivent visent à rappeler ces limitations. Elles sont de trois ordres : constitutionnel, législatif, réglementaire.

Au préalable, on rappellera que nos partenaires européens n’ignorent pas de telles limitations (7). Sans entrer dans le détail de leur réglementation, il convient de citer quelques exemples significatifs. Ainsi, en Allemagne, les 1,9 million de fonctionnaires en charge des missions de « puissance publique » qui dépendent du statut de Beamte (fonctionnaires), au nombre desquels on compte la majorité des enseignants, sont dépourvus du droit de grève. Par ailleurs, plusieurs pays européens ont organisé un service minimum : l’Italie qui prévoit, avec les lois du 12 juin 1990 et du 11 avril 2000, un tel dispositif dans les services qualifiés d’« essentiels », dont fait partie l’instruction publique ; le Portugal, dont la Constitution dispose que la loi fixe les conditions de prestation des services minimaux correspondant à des « besoins essentiels », ainsi que les pays nordiques où le service minimum y est déterminé par des conventions collectives, la majorité d’entre elles contenant des clauses d’interdiction de la grève.

Ÿ Les limitations d’ordre constitutionnel

Les limitations apportées au droit de grève sont, en premier lieu, d’ordre constitutionnel. Selon le septième alinéa du préambule de la Constitution d’octobre 1946, repris par celui de la Constitution du 4 octobre 1958, « le droit de grève s’exerce dans le cadre des lois qui le réglementent ».

Cette disposition revêt une grande importance dans l’histoire du droit de la fonction publique puisque c’est d’elle que découle le droit de grève des fonctionnaires qui, jusqu’en 1946, en étaient privés.

En effet, jusqu’alors, le juge administratif avait successivement considéré qu’en se mettant en grève, les fonctionnaires rompaient le « contrat de fonction publique », puis se plaçaient eux-mêmes « en dehors des lois et règlements » (8).

L’année 1946 est donc celle de la reconnaissance constitutionnelle du droit de grève des fonctionnaires. Mais cette consécration s’est accompagnée de l’affirmation selon laquelle le droit de grève doit s’exercer dans un cadre fixé par le législateur. Cette affirmation a d’ailleurs été reprise telle quelle par l’article 10 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires aux termes duquel « les fonctionnaires exercent le droit de grève dans le cadre des lois qui le réglementent ».

Au principe général d’un encadrement du droit de grève par la loi s’ajoute la nécessité de concilier l’exercice de ce droit avec la continuité du service public, autre principe à valeur constitutionnelle. En effet, par une décision du 25 juillet 1979, le Conseil constitutionnel a élevé le principe de continuité du service public en égal du droit de grève, en autorisant ainsi le législateur à apporter les limitations nécessaires à l’exercice de ce droit. En particulier, le Conseil a considéré que « la reconnaissance du droit de grève ne saurait avoir pour effet de faire obstacle au pouvoir du législateur d’apporter les limitations nécessaires en vue d’assurer la continuité du service public qui, tout comme le droit de grève, a le caractère d’un principe de valeur constitutionnelle ».

C’est sur le fondement de cette jurisprudence que le Conseil constitutionnel a déclaré conforme à la Constitution le texte qui deviendra la loi n° 2007-1224 du 21 août 2007 sur le dialogue social et la continuité du service public dans les transports terrestres réguliers de voyageurs. Un des considérants de cette décision résume, avec clarté, la conception française de l’exercice du droit de grève dans les services publics : « Considérant qu’aux termes du septième alinéa du Préambule de 1946 : Le droit de grève s’exerce dans le cadre des lois qui le réglementent ; qu’en édictant cette disposition, les constituants ont entendu marquer que le droit de grève est un principe de valeur constitutionnelle mais qu’il a des limites et ont habilité le législateur à tracer celles-ci en opérant la conciliation nécessaire entre la défense des intérêts professionnels, dont la grève est un moyen, et la sauvegarde de l’intérêt général auquel la grève peut être de nature à porter atteinte ; que, notamment en ce qui concerne les services publics, la reconnaissance du droit de grève ne saurait avoir pour effet de faire obstacle au pouvoir du législateur d’apporter à ce droit les limitations nécessaires en vue d’assurer la continuité du service public qui, tout comme le droit de grève, a le caractère d’un principe de valeur constitutionnelle » (9).

Aussi le principe de continuité du service public revêt-il une force particulière dans notre droit. Cette donnée fondamentale de notre ordre juridique doit être rappelée à l’heure où le présent projet de loi fait l’objet de polémiques excessives, en ce qu’il porterait une atteinte « intolérable » au droit de grève.

En outre, avant même de se voir conférer une valeur constitutionnelle, le principe de continuité occupait déjà, dans notre culture juridique, une place éminente qui résultait de son ancienneté : en effet, celui-ci a toujours entretenu un lien indissoluble avec le service public, car il est l’un des aspects de la continuité de l’État. Comme l’a relevé, au début du XXe siècle, le commissaire du gouvernement Tardieu dans ses conclusions sur l’arrêt « Winkell » du Conseil d’État de 1909, « la continuité est l’essence même du service public » (10). Elle en est l’essence, car elle permet au service public de satisfaire, sans rupture dans le temps, l’intérêt général.

Principe à valeur constitutionnelle, la continuité du service public joue, enfin, un rôle fondamental dans la vie quotidienne de chaque citoyen et la jouissance concrète, par ce dernier, des droits et des libertés qui lui sont reconnus. C’est notamment le cas de la liberté d’aller et venir, laquelle a une valeur constitutionnelle (11), du droit à l’éducation, le Préambule de la Constitution de 1946 disposant que « la Nation garantit l’égal accès de l’enfant et de l’adulte à l’instruction » et de la liberté de travailler, la Cour de cassation se référant expressément au caractère constitutionnel de cette dernière liberté (12).

Ÿ Les limitations d’ordre législatif

Sur le fondement de la compétence qui lui est attribuée par le Préambule de la Constitution de 1946, le législateur a apporté plusieurs limitations au droit de grève des fonctionnaires.

En ce qui concerne les limitations d’ordre général, elles sont fixées par la loi n° 63-777 du 31 juillet 1963 relative à certaines modalités de la grève dans les services publics dont les dispositions s’appliquent aux personnels de l’État et à ses établissements publics, à ceux des collectivités territoriales (régions, départements et communes comptant plus de 10 000 habitants) et aux entreprises et organismes publics ou privés gérant des services publics. Codifiée aux articles L. 2512-1 à L. 2512-4 du nouveau code du travail, cette loi fixe trois grandes règles qui affectent les modalités de la grève.

– Premièrement, elle impose le dépôt d’un préavis, émanant d’une organisation syndicale représentative au niveau national, avant la cessation concertée du travail. Pendant la durée de ce préavis, qui doit parvenir cinq jours francs avant le déclenchement de la grève à l’autorité hiérarchique, les parties intéressées sont tenues de négocier (article L. 2512-2 du code).

– Deuxièmement, elle interdit certaines formes de grève, à savoir les grèves tournantes, qu’il s’agisse des grèves par roulement concerté ou par échelonnement successif (article L. 2512-3 du code). À cette prohibition législative s’ajoute celle posée par la jurisprudence qui ne reconnaît pas le droit de recourir à la grève sur le tas, c’est-à-dire accompagnée de l’occupation des locaux.

– Enfin, l’inobservation des dispositions précitées entraîne l’application des sanctions prévues par les statuts ou par les règles concernant les personnes intéressées (article L. 2512-4 du code).

En ce qui concerne les restrictions particulières du droit de grève, on rappellera, pour mémoire, que le législateur a prévu dans certains secteurs des services minimums sans pour autant priver les fonctionnaires concernés du droit de grève : c’est le cas de la radio et de la télévision (loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986) et du contrôle de la navigation aérienne (loi n° 84-1286 du 31 décembre 1984). Par ailleurs, des statuts spéciaux ont posé un principe d’interdiction du droit de grève à l’égard de certains fonctionnaires : agents des Compagnies républicaines de sécurité (loi n° 47-2384 du 17 décembre 1947) ; policiers (loi n° 48-1504 du 28 septembre 1948) ; les personnels de l’administration pénitentiaire (ordonnance n° 58-696 du 6 août 1958) ; magistrats de l’ordre judiciaire (ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958) ; personnels de transmission du ministère de l’intérieur (loi n° 68-695 du 31 juillet 1968) ; militaires (loi n° 2005-270 du 24 mars 2005 portant statut général des militaires).

Ÿ Les limitations d’ordre réglementaire

Dans un arrêt célèbre rendu en 1950, le Conseil d’État a jugé qu’en l’absence de lois réglementant le droit de grève, la reconnaissance de ce droit « ne saurait avoir pour conséquence d’exclure les limitations qui doivent être apportées à ce droit comme à tout autre en vue d’en éviter un usage abusif ou contraire aux nécessités de l’ordre public » (13). Le juge administratif a donc admis qu’en l’absence d’une législation générale concernant le droit de grève dans la fonction publique, le Gouvernement, « responsable du bon fonctionnement des services publics », pouvait fixer, sous le contrôle du juge, des limitations à ce droit en usant de son pouvoir réglementaire. Cette compétence peut d’ailleurs s’exercer par la voie de circulaires ministérielles (14).

Par extension, le juge administratif a admis que la compétence de limiter le droit de grève des fonctionnaires émane même des chefs de service (15). En outre, le Conseil d’État reconnaît que c’est l’autorité compétente pour organiser le service qui est qualifiée pour y réglementer et limiter le droit de grève (16). Le pouvoir de ces autorités en la matière est toutefois fortement encadré. D’une part, les mesures prises ne peuvent avoir pour but que de préserver la sécurité des personnels ou des locaux, de maintenir l’ordre public ou d’assurer la continuité des services essentiels ; elles ne peuvent pas être un moyen d’assurer la continuité de tout le service. D’autre part, le juge administratif contrôle les décisions prises en vérifiant que seuls sont privés de la possibilité de faire grève les agents indispensables pour assurer les services indispensables.

Ÿ L’école ne peut s’abstraire de ses obligations de service public, en particulier de sa mission d’accueil

Le législateur et les juges constitutionnel et administratif ont élaboré un corpus juridique très étoffé autour du principe de continuité du service public qui a pour effet de fixer certaines bornes à l’exercice du droit de grève par les agents publics. Comme on l’a vu, cette construction repose sur la nécessité, une fois le droit de grève de ces agents reconnu, de répondre aux besoins d’intérêt général, sans interruption.

Dans certains cas, lorsque les usagers d’un service public se comptent par centaines de milliers ou par millions, la satisfaction de l’intérêt général conduit à mettre en place un service minimum : celui-ci n’est en fait que le prolongement de la continuité du service public.

Dans l’enseignement, la continuité du service public impose des obligations – cette observation constituant une évidence, mais certains semblent l’oublier. Celles-ci ont été rappelées par un guide édité par le ministère de l’éducation nationale et qui mérite d’être cité. Il s’agit de l’édition, publiée en 2001, du guide juridique du chef d’établissement, destiné aux responsables des établissements du secondaire, qui indique, avec raison, que « l’affirmation d’un tel principe impose des obligations à l’administration et au personnel, s’agissant notamment d’assurer la continuité des enseignements, l’exercice du droit de grève et l’instauration d’un service (minimum) d’accueil » (17).

De toute évidence, le constat dressé par le ministère pour les collèges et les lycées vaut aussi pour les écoles maternelles et élémentaires publiques auxquelles les familles confient l’accueil de plus de 5 millions d’enfants. En effet, pourquoi ce qui vaut pour le secondaire ne vaudrait pas pour les établissements du primaire auxquels il revient d’accueillir des enfants qui, un jour ou l’autre, iront au collège, puis au lycée ? Au nom de quel principe faudrait-il admettre que les écoles maternelles et élémentaires puissent se soustraire de leur obligation d’accueil alors qu’elles constituent l’un des services publics les plus emblématiques de notre pacte républicain ?

En conséquence, si la continuité du service public de l’école ne peut être totale, car cela aurait pour effet de priver l’enseignant de son droit de faire grève, les familles ont le droit exiger de ce service qu’il s’acquitte, en tout premier lieu, de son devoir d’accueil des enfants, y compris les jours de grève.

Aussi, loin d’être une aberration, l’exigence d’un service d’accueil des enfants inscrits dans les écoles maternelles et élémentaires publiques est-elle fondée en droit – et en raison pourrait-on ajouter.

Cela étant posé, une fois que l’on quitte le monde des principes pour observer le monde réel, force est de constater que l’école publique ne peut garantir cet accueil de manière systématique.

C. DANS LES FAITS, L’ACCUEIL DES ENFANTS À L’ÉCOLE LES JOURS DE GRÈVE NE PEUT ÊTRE SYSTÉMATIQUEMENT ASSURÉ

Les jours de grève, l’école s’avère, d’une manière générale, incapable d’assurer l’accueil des enfants sur l’ensemble du territoire, malgré les efforts de nombreux directeurs et enseignants. Ainsi, l’exercice du droit de grève par les enseignants met en échec le droit à l’accueil des enfants, qui découle des obligations de service public de l’école, et compromet la liberté de travailler de leurs parents.

Ÿ Une divergence primaire/secondaire préjudiciable aux familles

De manière étonnante, l’école n’est pas dans la même situation, les jours de grève, que les établissements du secondaire. En effet, alors que les élèves des collèges et des lycées sont généralement accueillis dans leur établissement, il arrive, assez souvent, que rien ne soit prévu pour les plus jeunes élèves, ce qui peut placer leurs parents dans une situation difficile, voire impossible.

Il convient de s’interroger sur les raisons de cette différence de situation entre les écoles, d’une part, et les collèges et les lycées, d’autre part.

Sur le plan juridique, l’article 2 du décret n° 89-122 du 24 février 1989 relatif aux directeurs d’école dispose qu’il appartient à ces derniers de prendre « toute disposition utile » pour que l’école assure sa fonction de service public et qu’à cette fin, ils se voient attribuer la mission d’organiser « l’accueil et la surveillance des élèves et le dialogue avec la famille ».

Le décret de 1989 impose donc une obligation d’accueil aux directeurs d’école. Celle-ci a d’ailleurs été explicitée dans une réponse du ministérielle parue au Journal officiel le 19 septembre 1994 : « En cas de grève du personnel enseignant, il appartient aux directeurs d’école qui ont notamment pour mission d’organiser l’accueil et la surveillance des élèves, de rechercher des solutions pour les accueillir, que ce soit avec la participation d’enseignants volontaires, des services municipaux ou des associations de parents d’élèves. Lorsqu’un service municipal de garderie a pu être mis en place en accord avec le directeur d’école, le personnel municipal est tout à fait habilité à surveiller les enfants présents. Dans l’hypothèse où aucune solution n’a pu être trouvée, les parents doivent être informés en temps utile que l’accueil ne pourra pas être assuré et que l’école sera fermée. » (18).

Pour autant, cette obligation d’accueil conduit-elle à imposer la mise en place systématique d’un service d’accueil dans les écoles les jours de grève ? Selon les informations fournies par le ministère de l’éducation nationale, il n’en est rien :

– Il n’est pas fait obligation aux enseignants non grévistes d’accueillir les élèves de leurs collègues grévistes, puisqu’ils assurent, ce jour-là, le service d’enseignement normalement prévu pour les élèves de leur propre classe. Il appartient donc à ces enseignants d’apprécier « dans quelles conditions l’accueil des élèves de leurs collègues grévistes est compatible avec leur propre service ».

– Les communes ne sont pas tenues d’assurer l’accueil des élèves en cas de grève des personnels enseignants, aucune disposition législative ne leur en faisant obligation.

– Dans l’hypothèse où aucune solution n’a pu être trouvée pour accueillir les élèves, les directeurs d’école doivent en informer les parents suffisamment tôt afin qu’ils puissent prendre les dispositions nécessaires pour faire garder les enfants. Mais le ministère précise que « cela suppose…que le nom des personnels grévistes soit connu à l’avance, ce qui n’est pas toujours possible » (19).

De fait, l’organisation de « l’accueil » des enfants inscrits dans les écoles publiques les jours de grève peut se limiter à la diffusion d’informations sur les mouvements prévus et, le cas échéant, à l’annonce de la fermeture de l’établissement… En effet, ainsi que le rappelle la circulaire précitée du ministre de l’éducation nationale du 8 janvier 2008, les directeurs d’école « sont responsables de l’information des familles sur les mouvements de grève au sein de leur école ». En particulier, la circulaire précise qu’un « affichage sur les portes extérieures de l’école ou sur les panneaux apposés à l’extérieur au minimum quarante-huit heures avant le commencement de la grève est souhaitable ».

La situation des établissements du second degré est quant à elle très différente pour trois raisons.

– Les collèges et lycées disposent en effet de salles de permanence (ou d’études) et de personnels de surveillance, les assistants d’éducation, qui peuvent prendre en charge les élèves en cas d’absence d’un de leurs professeurs.

– Une même classe étant chaque jour prise en charge par plusieurs enseignants, il est par ailleurs très rare que tous les cours de la journée d’un collégien ou d’un lycéen soient annulés.

– Enfin, compte tenu de l’âge des élèves, le fait qu’ils puissent être, dans certains cas prévus par les règlements intérieurs des établissements, autorisés à quitter leurs collèges ou leurs lycées en cas d’absence de leurs professeurs est naturellement moins perturbateur pour les parents. Ceux-ci ne sont pas systématiquement forcés de suspendre leur activité professionnelle pour les garder ou de trouver une solution de garde alternative.

Aussi, alors que l’obligation d’accueil des écoles élémentaires et maternelles publiques peut être réduite à néant les jours de grève, du côté des collèges et des lycées, leurs usagers, c’est-à-dire les élèves, et les parents de ces usagers sont beaucoup mieux lotis. Cet état de fait ne tient qu’à des disparités dans l’organisation de la vie des établissements scolaires du premier degré et du second degré.

En outre, cette différence de traitement entre les usagers d’établissements relevant du même service public, celui de l’Éducation nationale, s’apparente à une rupture d’égalité.

Elle est d’autant moins acceptable qu’elle entraîne, en particulier pour les familles les plus modestes, des difficultés matérielles « insurmontables », pour rependre le terme utilisé, à juste raison, par le Président de la République dans sa déclaration du 15 mai 2008 annonçant la mise en place du droit à l’accueil des enfants inscrits dans les écoles.

Ces difficultés, connues de tous, se présentent sous la forme de deux contraintes, qui deviennent particulièrement aiguës dans le cas des familles monoparentales et/ou dont le revenu est faible :

– D’une part, une contrainte de temps, les familles devant trouver, soit dans un délai resserré, soit le jour même de la grève, un mode de garde pour leurs enfants.

Certes, il existe des mairies prévoyantes qui, moyennant une participation financière modique des parents, 4 euros par exemple à Montauban, permettent aux enfants d’être accueillis au centre de loisirs, le repas étant compris (20). Mais toutes les communes, loin s’en faut, n’ont pas mis en place un tel système d’accueil. On dira aussi qu’il est possible d’avoir recours aux grands-parents ou à d’autres membres de la famille, à des nourrices ou des baby-sitters qui peuvent, ce jour-là, être disponibles, ainsi que des associations ou service privés qui, via Internet ou le téléphone, permettent de proposer des solutions de dernière minute : sites échangeant des heures de garde d’enfant, la « nounou » étant aussi un parent ; sites alertant directement et gratuitement, par mèl ou texto, les parents d’une annonce laissée par une nourrice ; offre de service à la personne appelée Genius et gérée par le groupe La Poste qui permet aux parents d’appeler le prestataire pour définir leurs besoins, ce dernier s’engageant à trouver une baby-sitter sous 48 heures, etc. Il reste que la multiplicité des solutions ne garantit pas la prise en charge effective des enfants les jours de grève, en particulier en dehors des villes : aussi, les parents des enfants privés d’école sont-ils, dès l’annonce de la grève, contraints de se lancer dans une course contre la montre qui, outre qu’elle est angoissante, peut être infructueuse.

– D’autre part, une contrainte financière, les parents étant forcés soit de renoncer à travailler pour garder leurs enfants, soit de rémunérer une personne pour le faire. Dans les deux cas, l’exercice du droit de grève aboutit à imposer une pénalité financière aux familles.

Comme l’a souligné le Président de la République le 15 mai dernier, cela pose des problèmes d’égalité, car « il y a ceux de nos compatriotes qui peuvent faire garder leurs enfants et ceux qui n’en ont pas les moyens ». Ainsi, les plus modestes devront perdre une journée de salaire, tandis que les autres devront financer une nourrice ou une baby-sitter, sans que cette dépense, qui peut être importante, soit compensée par l’État, à l’exception des particuliers assujettis à l’impôt sur le revenu. Dans ce cas de figure, en effet, les contribuables qui exposent des dépenses pour des services à la personne rendus à leur domicile ont droit à une réduction d’impôt sur le revenu égale à 50 % des sommes effectivement restées à leur charge (21). Cependant, cette réduction d’impôt n’intervient que l’année qui suit celle de la dépense et, surtout, elle ne bénéficie pas à tous les Français, puisque, sur 35 millions de foyers fiscaux, 48 % ne sont pas imposables au titre de l’impôt sur le revenu.

Ÿ Malgré la mise en place d’un service minimum d’accueil volontaire, des problèmes persistants qui justifient le recours à la loi

Prenant acte de ces difficultés, le ministre de l’éducation nationale, M. Xavier Darcos, a fait part, le 11 décembre 2007, lors de la présentation de son « Programme de travail et d’action pour le deuxième trimestre de l’année scolaire 2007/2008 », de son souhait de rendre possible, dès la rentrée 2008, un « service minimum d’accueil dans les écoles » en cas de grève.

La perspective de la journée d’action de la fonction publique du 24 janvier 2008 a conduit le ministre à anticiper la mise en place de ce dispositif. Ainsi, le 8 janvier 2008, une circulaire était adressée aux inspecteurs et aux recteurs sur la « mise en place d’un service minimum d’accueil dans les écoles maternelles et élémentaires en cas de grève de personnels enseignants du 1er degré ».

Ce service minimum d’accueil, appelé SMA, fonctionne selon les principes suivants :

– Il est volontaire. Il est en effet proposé par les recteurs et les inspecteurs aux communes, qui, si, elles acceptent de participer au SMA, doivent assurer un service d’accueil des enfants scolarisés dans les écoles maternelles et élémentaires de leur territoire durant les heures normales d’enseignement, soit usuellement six heures par jour.

– Les communes volontaires bénéficient d’un financement du service rendu aux familles qui est assuré par l’État et qui provient des retenues effectuées par ce dernier sur les salaires des enseignants grévistes. Dans ce but, les communes doivent signer, avec l’État, une convention qui fixe les modalités de financement de ce service. Si cette convention est signée dans un délai de deux mois, elle entrera en vigueur pour une durée de trois ans, à la date de la réception de la lettre d’intention de la commune par les services académiques.

– Le montant de la participation que verse l’État aux communes varie en fonction du nombre d’enfants d’accueillis. Il s’élève à 90 euros pour un à quinze élèves accueillis et, au-delà, à 90 euros par tranche de quinze élèves accueillis. Son versement doit intervenir, au maximum, 35 jours après que le maire fait connaître à l’autorité académique le nombre d’élèves ayant bénéficié de ce service.

Ce nouveau service offert aux familles a immédiatement bénéficié du soutien de l’opinion publique : selon un sondage CSA diffusé le 13 mai dernier, 60 % des Français interrogés approuvaient la mise en place d’un service minimum d’accueil dans les écoles les jours de grève. Selon la Fédération des parents d’élèves de l’école publique (PEEP), près de 80 % des familles y seraient favorables.

Par ailleurs, ce dispositif a suscité un intérêt certain chez les communes, qui va en croissant. Lors de la journée de grève du 24 janvier 2008, 2 075 communes, dont des villes comme Toulouse, Caen et Le Havre, sur les 22 492 communes disposant d’une école sur leur territoire, ont mis en œuvre le SMA. Aux journées d’action nationale suivantes, elles étaient 2 886 le 14 mai, dont des villes importantes comme Marseille ou Rouen, et 2 884 le 28 mai.

Le ministère de l’éducation nationale ne dispose pas d’une ventilation des communes ayant participé au SMA en fonction du nombre de leurs habitants. En revanche, il a dressé un bilan des communes de plus de 100 000 habitants ayant mis en œuvre le SMA qui est présenté dans le tableau ci-dessous, lequel démontre que ce service n’a pas eu un effet marginal, contrairement à ce que disent ses détracteurs.

Le SMA dans les communes de plus de 100 000 habitants

 

Situation au 24 janvier 2008

Situation au 15 mai 2008

Situation au 22 mai 2008

Nombre de communes de + 100 000 habitants qui se sont portées volontaires

11

9

9

Nombre de communes de + 100 000 habitants qui ont signé la convention de développement

5

5

7

Nombre d’habitants bénéficiant du SMA dans les communes de + 100 000 habitants

2 534 566

2 054 687

2 139 000

Pourcentage d’habitants vivant dans des communes de + 100 000 habitants volontaires pour la journée du 24 janvier sur le nombre total d’habitants vivant dans des communes de plus de 100 000 habitants

28,96 %

23,48 %

24,44 %

Pourcentage de communes de + 100 000 habitants volontaires pour la journée de grève du 24 janvier

31,4 %

25,7 %

25,7 %

Source : ministère de l’éducation nationale

Le dispositif du SMA n’a pas pu donner toute sa mesure pour deux raisons essentiellement.

La première, sur laquelle on ne s’attardera pas, est que, le SMA étant volontaire, certaines communes refusent, par principe, pour des raisons politiques, de participer à un tel dispositif. Une telle attitude, qui aboutit, concrètement, à priver, pour des motifs qui ne sont pas d’ordre pratique, les familles d’un service leur permettant de continuer à travailler est regrettable.

La seconde raison vient du fait que les communes, même si elles sont désireuses de mettre en place ce service d’accueil, ne peuvent y participer, faute de disposer de l’information qui leur est nécessaire pour leur permettre de s’organiser. En effet, elles éprouvent les plus grandes difficultés pour connaître, à l’avance, le nombre d’enseignants grévistes et organiser ainsi le service d’accueil en mobilisant un nombre suffisant de personnes chargées de l’accueil.

Certes, dans la pratique, la plupart des enseignants et des écoles préviennent les parents à l’avance afin qu’ils s’organisent. En outre, les enseignants grévistes doivent, en principe, prévenir à l’avance le directeur de l’école de leur intention de faire grève, ce dernier informant ensuite les parents par voie d’affichage. Par conséquent, en théorie, l’information sur le nombre probable de grévistes existe, ce qui devrait permettre aux communes de prendre les dispositions nécessaires pour dimensionner l’offre de service.

Cependant, la bonne volonté des uns et des autres ne suffit pas toujours à assurer de manière systématique et suffisamment en amont l’information des parents – et a fortiori des communes. En réalité, aucune disposition n’obligeant les enseignants à faire part de leur intention de faire grève, ceux-ci peuvent faire cette déclaration à la dernière minute. Dans ces conditions il n’est guère étonnant que les parents découvrent la veille ou le jour même de la grève, que l’école où sont inscrits leurs enfants sera fermée.

C’est précisément ce défaut de circulation de l’information indispensable à l’organisation matérielle du service d’accueil qui explique l’attrait limité du SMA pour les communes.

Telles sont les données de fait qui conduisent au dépôt du présent projet de loi : celui-ci contient des dispositions qui visent à remédier, de manière pragmatique, aux difficultés constatées et à instituer un véritable droit d’accueil pour les élèves des écoles publiques du premier degré.

II.- LE PROJET DE LOI EST PROTECTEUR DU DROIT DE GRÈVE ET PERMET DE RÉPONDRE AUX BESOINS DES FAMILLES

Le présent projet de loi fait bien plus que proposer un service d’accueil pour les enfants inscrits dans les écoles maternelles et élémentaires publiques les jours de grève des enseignants. Il instaure un nouveau droit, le droit d’accueil des enfants scolarisés dans ces établissements, dont la portée doit être soulignée.

En effet, l’ambition de ce texte est double :

– D’une part, reconnaître un droit d’accueil des jeunes enfants, afin de conforter leur « droit à l’école », en apportant ainsi une touche finale au droit à l’éducation. De l’instruction obligatoire, en passant par le droit à l’éducation, de la loi d’orientation de 1989 (dite « loi Jospin ») à la loi de programme de 2005 (dite « loi Fillon »), le « droit à l’école » du jeune enfant n’a cessé d’être renforcé, jusqu’à englober désormais, avec le présent projet de loi, la reconnaissance d’un droit à l’accueil aussi logique qu’incontestable ;

– D’autre part, instaurer un service d’accueil, sous certaines conditions, pour conforter la continuité du service public de l’école. Comme cela a déjà été souligné, le législateur dispose d’un pouvoir d’intervention étendu, qui découle de la Constitution, pour assurer la continuité du service public. En l’espèce, il lui est proposé d’adopter des dispositions qui, sans remettre en cause le droit de grève des enseignants, garantiront aux usagers de l’école maternelle et élémentaire que sont les enfants, ainsi qu’à leurs parents, la continuité de l’accueil.

Ce faisant, le projet de loi répond à une exigence d’équité forte, à laquelle les pouvoirs publics ne pouvaient pas ne pas répondre. Pour reprendre les termes utilisés par le Président de la République, le 16 mai 2008, pour présenter le futur projet de loi, « Le droit de grève c’est un droit garanti par la Constitution. Mais le droit au travail pour les familles qui n’ont pas les moyens de faire garder leurs enfants les jours de grève, ce droit doit être aussi garanti. ».

A. LA PHILOSOPHIE DU DISPOSITIF PROPOSÉ : SATISFAIRE DEUX EXIGENCES FONDAMENTALES EN RESPECTANT LA CONSTITUTION

Le présent projet de loi vise à concilier deux libertés, la liberté de faire grève et la liberté de travailler, en instituant un droit à l’accueil des enfants scolarisés dans les écoles maternelles et élémentaires publiques.

Ÿ Le droit d’accueil et le service d’accueil : quelle articulation ?

L’article 2 du présent projet de loi pose, en premier lieu, le principe selon lequel tout enfant scolarisé dans une école maternelle ou élémentaire publique y est accueilli pendant le temps scolaire obligatoire pour y suivre les enseignements prévus par les programmes. En second lieu, cet article prévoit que, dans les cas où ces enseignements ne peuvent être dispensés à l’enfant, celui-ci doit bénéficier d’un service d’accueil.

L’article 4 précise qu’il est prévu d’instituer un tel service, organisé par l’État, en cas de grève. L’article 5 du projet de loi prévoit que c’est la commune qui doit mettre en place le service d’accueil pendant le temps scolaire dès lors que, dans la rédaction issue des travaux du Sénat, au moins 20 % des personnes exerçant des fonctions d’enseignement dans une seule école de la commune ont déclaré leur intention de participer à une grève.

Au total, le droit d’accueil comporte quatre éléments qui doivent être clairement distingués pour comprendre la nature des avancées proposées par le présent projet de loi :

– premier élément, le droit de l’enfant scolarisé dans une école maternelle et élémentaire publique à y être accueilli pour y suivre les enseignements prévus par les programmes. Le droit à l’accueil se rajoute donc au droit à l’éducation et au « droit à l’école » de l’enfant.

– deuxième élément, un service d’accueil assuré lorsque les enseignements ne peuvent être dispensés. L’organisation de ce service relève de la responsabilité de l’éducation nationale – et par conséquent de l’État. L’instauration d’un tel service revient donc à réaffirmer la mission de service public de l’école : l’accueil doit être assuré de manière continue, y compris lorsque les cours ne peuvent, pour une raison matérielle soudaine, être enseignés, afin de respecter le principe de continuité consacré par notre tradition juridique. En outre, ce service d’accueil n’est mis en œuvre qu’à titre subsidiaire : il ne se substitue pas aux dispositifs traditionnels de remplacement des enseignants absents. En effet, ce service n’intervient que s’il est impossible de remplacer l’enseignant, par exemple si celui-ci est pris d’un malaise au moment de commencer son cours, un amendement du Sénat à l’article 2 ayant précisé ce point, afin de marquer que la politique du ministère de l’éducation nationale en matière de remplacement ne sera nullement remise en cause par le présent projet de loi.

– troisième élément, un service d’accueil assuré en cas de grève des enseignants. Les enfants scolarisés en bénéficient pendant le temps scolaire, étant précisé que ce dispositif est organisé par l’État.

– quatrième et dernier élément, un service d’accueil mis en place par la commune en cas de grève importante des enseignants, étant entendu qu’il s’agit d’une prestation à caractère « conjoncturel ». En effet, celui-ci n’intervient que si un certain seuil chiffré d’enseignants ayant déclaré leur intention de faire grève est atteint et, dans cette hypothèse précise, son organisation relève de la responsabilité de la commune. Ce service n’est donc offert par ces collectivités qu’à titre subsidiaire lorsque, en raison de l’ampleur d’une grève, le service d’enseignement ne peut être assuré.

Il ressort de la combinaison de ces trois articles que le gouvernement ne propose pas de légiférer pour assurer, les jours de grève, la continuité intégrale du service public de l’enseignement du 1er degré, ce qui le conduirait à aller plus loin que ce qu’autorise actuellement la Constitution.

En effet, le présent projet de loi ne fait que proposer, au bénéfice des élèves, l’institution d’un droit d’accueil et, les jours où les enseignements ne peuvent être dispensés, d’un service d’accueil, dont la compétence d’organisation de principe est confiée à l’État, ce qui relève bien de la mission d’organisation de la continuité du service public assignée au législateur par la Constitution.

Il y a lieu de noter que le Sénat a supprimé aux articles 2 et 4, ainsi que dans le titre du présent projet de loi, la référence au caractère obligatoire du temps scolaire pendant lequel l’enfant bénéficie du droit d’accueil ou, lorsque les enseignements ne peuvent être dispensés pour cause de grève ou non, du service d’accueil.

Cette suppression est justifiée : la notion de temps scolaire obligatoire, qui se réfère à l’instruction obligatoire prévue par l’article L. 131-1 du code de l’éducation, ne concerne que les enfants d’âge scolaire, soit ceux âgés d’au moins six ans et inscrits à l’école élémentaire. Par conséquent, le droit d’accueil prévu par le présent projet de loi s’appliquant aussi bien aux écoles maternelles qu’aux écoles élémentaires, il serait absurde de « dimensionner » ce droit en fonction d’un temps scolaire obligatoire qui ne vaut que pour les écoles élémentaires. Le Sénat a donc logiquement choisi de définir le droit d’accueil et le service d’accueil en se référant au temps scolaire, c’est-à-dire aux heures normales d’enseignement.

Ÿ L’encadrement du droit de grève : quelles régulations pour un dispositif d’alerte sociale novateur ?

Après avoir posé le principe du droit à l’accueil et au service d’accueil, le présent projet de loi prévoit d’instituer deux procédures visant à limiter les conséquences pour les élèves de la participation de leurs professeurs à une grève.

Ces procédures ne limitent en rien le droit de grève ; elles ne peuvent être, en aucune façon, assimilées à un quelconque régime d’autorisation « liberticide ». Tel n’est pas leur objet, car elles se présentent, en réalité, sous la forme d’étapes à respecter avant le déclenchement de la grève :

– une étape collective, la procédure de prévention des conflits ;

– une étape individuelle, l’obligation pour les enseignants de déclarer, quarante-huit heures avant de participer à la grève, leur intention.

S’il fallait encore rassurer ceux qui s’inquiètent des effets prétendument négatifs du présent projet de loi sur le droit de grève, on observera que de simples étapes ou formalités ne peuvent, par définition, empêcher ou limiter l’exercice d’un droit constitutionnel, mais qu’elles relèvent bien de la mission d’encadrement de ce droit attribuée par la Constitution au législateur.

De manière plus détaillée, ces deux étapes, prévues aux articles 3 et 5 du présent projet de loi et directement inspirées des dispositions de la loi du 21 août 2007 sur le dialogue social et la continuité du service public dans les transports terrestres réguliers de voyageurs, peuvent être présentées de la manière suivante.

– Le dépôt du préavis de grève par des organisations représentatives des personnels ne pourra intervenir qu’après une négociation préalable entre l’État et ces organisations. Un décret en Conseil d’État doit fixer le cadre de la procédure de prévention des conflits, le projet de loi énumérant avec précision les règles minimales d’organisation et de déroulement de la négociation qui devront être déterminées par ce texte réglementaire (article 3). Il faut souligner que le dispositif d’alerte sociale qui est proposé constitue une véritable nouveauté dans la fonction publique d’État.

– Lorsqu’un préavis de grève aura été déposé dans les conditions prévues par le code du travail, toute personne exerçant des fonctions d’enseignement dans une école maternelle ou élémentaire publique devra informer, au plus tard quarante-huit heures avant de participer à la grève, l’autorité administrative de son intention d’y participer (article 5). Même si le projet de loi ne le précise pas, car cela va de soi, l’enseignant qui n’aura pas respecté la formalité procédurale de la déclaration préalable pourra faire l’objet d’une sanction disciplinaire.

– Ces deux procédures sont accompagnées d’une interdiction posée par l’article 3 du présent projet de loi, celle des préavis dits « glissants ». Cette pratique, qui est de nature à perturber la mise en place du service d’accueil, consiste, pour les syndicats, à déposer quotidiennement des préavis successifs, afin de pouvoir déclencher des grèves, qui, si elles sont formellement régulières, sont, en réalité, d’authentiques grèves surprises, lesquelles sont, comme on l’a vu, interdites. Vidant de sa substance l’idée même de négociation, cette technique a été interdite dans les services publics de transports terrestres des voyageurs par la loi du 21 août 2007. Le présent projet de loi prévoit donc d’appliquer aux organisations syndicales enseignantes du premier degré public une règle dont la justesse a déjà été largement admise, en proposant qu’un nouveau préavis ne pourra être déposé, pour les mêmes motifs, qu’à l’issue du délai de préavis en cours et avant que la procédure de négociation préalable n’ait été mise en œuvre.

Compte tenu de ces observations, on peut considérer que le présent projet de loi respecte, sans qu’aucun doute ne soit permis en la matière, les bornes constitutionnelles de l’intervention du législateur en matière de droit de grève.

C’est en soi positif. Mais il y a plus : le dispositif d’alerte social prévu par l’article 3 peut servir de modèle à une généralisation de la procédure de prévention des conflits à l’ensemble des fonctionnaires. Certains interlocuteurs de la rapporteure ont d’ailleurs regretté le champ d’application étroitement limité de cet article, en observant qu’il n’y a pas de raisons objectives pour écarter le second degré – et a fortiori la fonction publique d’État, si ce n’est les trois fonctions publiques, – du bénéfice de la procédure « d’alerte ».

Cette position est incontestablement logique, mais le présent projet de loi vise à régler la situation du premier degré qui se caractérise à la fois par sa singularité et son urgence. Le second degré dispose, on l’a vu, de certains atouts pour organiser l’accueil des collégiens et des lycéens, tandis que, dans le primaire, rien n’est prévu pour organiser la prise en charge d’enfants âgés de 2 à 11 ans. Il est donc logique de proposer de régler, par le biais d’un cadre de négociation renforcé, le problème des grèves affectant les écoles primaires dont les obligations de service public en matière d’accueil sont aujourd’hui plus que compromises, avant d’étudier l’extension du dispositif d’alerte sociale à l’ensemble de la fonction publique. C’est là un autre argument en faveur du présent projet loi : il peut être précurseur en matière de renforcement du dialogue social dans la fonction publique.

B. L’INSTITUTION D’UN NOUVEAU DROIT POUR LES FAMILLES S’ACCOMPAGNÉ DE GARANTIES JURIDIQUES ET FINANCIÈRES POUR LES COMMUNES

L’instauration d’un service d’accueil au bénéfice des enfants scolarisés dans les écoles maternelles et élémentaires publiques les jours de grève suivie ne se traduira pas par l’imposition d’une charge exorbitante sur les communes responsables de la mise en place de cette prestation.

Ÿ Un service qui s’appuie sur l’expérience importante des communes en matière d’accueil

Il convient de rappeler que les communes ont d’ores et déjà une expérience ancienne et importante en matière d’accueil et de surveillance des jeunes enfants. En effet, ces collectivités exercent souvent, bien que ce soit à titre facultatif, de telles compétences en dehors du temps scolaire : elles peuvent ainsi mettre en place, dans les locaux scolaires, des services au bénéfice des élèves tels que la cantine, la garderie, les études surveillées, les activités périscolaires et les centres de loisirs.

On observera que lors de ces activités, le directeur de l’école n’a pas de directive à donner aux personnes chargées de la surveillance, sauf s’il a accepté cette mission. De même, les enseignants n’ont de responsabilité à assumer que s’ils ont accepté d’assurer une telle surveillance. Toutefois, dans ce cadre, ils agissent pour le compte de la commune, tout en étant couverts par les dispositions de l’article L. 911-4 du code de l’éducation qui substitue la responsabilité de l’État à celle des « membres de l’enseignement public » lorsqu’un fait dommageable est commis ou subi par un élève.

Quant aux compétences d’accueil et de surveillance des communes, elles résultent de plusieurs dispositions législatives.

– Sur la base de l’article L. 212-15 du code de l’éducation, les communes peuvent financer des études surveillées permettant d’accueillir les élèves avant ou après la classe. Cet article permet en effet au maire, après accord du conseil d’administration de l’école, d’utiliser les locaux scolaires pour l’organisation d’activités à caractère culturel, sportif ou éducatif pendant les heures ou les périodes au cours desquelles ils ne sont pas utilisés pour les besoins de l’enseignement.

– Issu de la loi d’orientation du 10 juillet 1989, l’article L. 551-1 du code de l’éducation dispose que des activités périscolaires peuvent être organisées « notamment » avec le concours des collectivités territoriales. « Prolongeant le service public de l’éducation », ces activités « ne peuvent se substituer aux activités d’enseignement et de formation ». Elles ont un caractère facultatif, mais les communes apportent souvent une aide aux établissements pour les organiser. Par exemple, la cantine constitue une activité périscolaire, ce service revêtant un caractère expressément facultatif pour les élèves de l’enseignement primaire (22).

– En vertu de la loi n° 2001-624 du 17 juillet 2001 portant diverses dispositions d’ordre social, éducatif et culturel, les activités périscolaires comportant des activités autres que de surveillance, organisation d’ateliers par exemple, doivent être distinguées des activités périscolaires et de la pause méridienne ne comportant que la surveillance. Les premières doivent être déclarées auprès du préfet au titre des centres de loisirs sans hébergement et sont soumises à des taux d’encadrement des enfants par animateurs stricts, tandis que les secondes ne nécessitent aucune déclaration préalable et sont organisées librement par les collectivités lorsque celles-ci ne font appel à aucun financement extérieur, notamment de l’État.

– Enfin, conformément à l’article L. 123-5 du code l’action sociale et des familles, les centres communaux d’action sociale animent une action générale de développement social dans les communes, ce qui peut les conduire à créer des crèches et des garderies.

Dans ces conditions, on peut considérer, comme le fait le ministère de l’éducation nationale, que le service d’accueil proposé par le présent projet de loi se présente comme une extension de la compétence de surveillance et d’accueil des communes aux heures de la journée lorsque l’enseignement est interrompu du fait d’une grève importante.

Un autre argument, déjà évoqué, permet de souligner le fait que la création de compétence proposée par le présent projet de loi ne conduit pas à bouleverser l’équilibre actuel des attributions respectives de l’État et des communes. En effet, l’organisation du service d’accueil par les maires ne constitue pas une compétence dont l’exercice serait permanent pendant les 365 jours de l’année : la commune ne met en œuvre cette nouvelle prestation que si un seuil de déclenchement, constitué d’un pourcentage d’enseignants se déclarant grévistes, est atteint. L’intervention de la commune revêt donc un caractère purement subsidiaire et ponctuel, la compétence de principe en matière d’organisation du service d’accueil étant attribuée à l’État.

Au total, on ne peut affirmer que l’État ait attribué aux communes une responsabilité exceptionnellement lourde à assumer.

Ÿ Un service entouré de nombreuses garanties pour les communes

Le projet de loi prévoit un nombre important de garanties et de souplesses – tant sur le plan juridique que financier – pour les communes quant à l’organisation pratique du service d’accueil. Guidé en quelque sorte par le principe de précaution, le Sénat a renforcé ces dispositions, quand il n’a pas adopté de nouvelles garanties.

– D’une manière générale, les communes disposeront d’une liberté totale en matière de choix du mode d’organisation du service d’accueil, le présent projet de loi étant silencieux sur ce sujet.

Ainsi que l’a indiqué le ministre de l’éducation nationale au Sénat, le choix des intervenants mobilisés pour accueillir les élèves pourra être aussi large que possible : assistants maternels ou autres fonctionnaires municipaux, associations gestionnaires de centres de loisirs, associations familiales, mères de familles, enseignants retraités ou étudiants (23).

– Autre point capital, l’institution du service d’accueil n’imposera aux communes aucune obligation contraignante en matière de qualification des personnels ou de taux d’encadrement des enfants, ce qui est particulièrement important pour les petites communes. En effet, le service d’accueil est « hors » champ d’application des dispositions du code de l’action sociale et familiale concernant l’accueil des enfants dans les centres de loisirs ou l’accueil de mineurs répondant à un besoin social particulier. Par conséquent, les prescriptions résultant des articles L. 227-4 et R. 227-1 et suivants du code, notamment en matière de souscription d’assurance, de déclaration préalable, d’hygiène, de nombre de surveillants par enfant, etc., ne s’imposeront pas aux communes mettant en œuvre le service d’accueil.

– Le choix d’un seuil de 10 % d’enseignants grévistes déclarant leur intention de faire grève dans les écoles d’une commune comme condition pour la mise en place d’un service d’accueil permet de faire peser sur l’administration scolaire – donc sur l’État – l’obligation d’assurer un service d’accueil dans les cas de grèves de faible ampleur.

Figurant dans le projet de loi initial, cette disposition constituait, selon le gouvernement, une garantie pour les communes, car elles seront sollicitées moins fréquemment que si le seuil avait été fixé à un niveau plus faible. Il en était de même pour la disposition prévoyant que le seuil devra être apprécié au niveau du territoire de la commune et non école par école.

Le Sénat a amendé ces dispositions afin de prévoir un seuil de déclenchement du service d’accueil qui soit encore plus adapté à la diversité des situations communales. Il a en effet considéré que le seuil proposé par le gouvernement est à la fois trop large et trop faible. D’une part, dans le cas des grandes villes, un seuil apprécié commune par commune peut conduire à ce que celui-ci ne soit pas dépassé dans l’ensemble des écoles prises globalement, alors même qu’il le serait dans plusieurs écoles considérées isolément. D’autre part, un seuil de 10 % peut mettre les communes rurales en difficulté, en les obligeant à mettre en place le service d’accueil dès lors qu’un seul enseignant serait gréviste.

Le Sénat a donc modifié le calcul du seuil d’intervention en le portant à 20 % d’enseignants déclarant leur intention de faire grève, ce pourcentage étant apprécié école par école (article 5).

Il a par ailleurs modifié la rédaction initiale de l’article pour prévoir que le service d’accueil en cas de grève suivie est mis en place par la commune et non par le maire.

– Le Sénat a également adopté à l’article 5 une disposition précisant que le délai de 48 heures que doivent respecter les enseignants pour déclarer leur intention de participer à la grève comprend au moins un jour ouvré.

Même si les grèves importantes des enseignants se déroulent plutôt le mardi que le vendredi ou le lundi, la prise en compte d’un jour ouvré dans la computation du délai précédant la déclaration est destinée à rassurer les maires pour qu’ils ne soient pas pris au dépourvu par l’annonce d’une grève qui précédera ou viendra après le week-end et qu’ils puissent disposer ainsi du temps nécessaire pour s’organiser.

– L’État devra verser à chaque commune qui aura mis en place un service d’accueil une contribution financière destinée à compenser les dépenses exposées par cette collectivité pour rémunérer les personnes chargées de l’accueil des élèves (article 8).

Dans l’esprit du gouvernement, cette disposition devait permettre de satisfaire l’exigence posée par l’article 72-2 de la Constitution, aux termes duquel « toute création ou extension de compétences ayant pour conséquence d’augmenter les dépenses des collectivités territoriales est accompagnée de ressources déterminées par la loi ». Dans cette perspective, le projet de loi précise, d’une part, que le montant de cette contribution, compte tenu de son caractère fortement évolutif, sera fixé par décret et, d’autre part, qu’il est fonction du nombre d’élèves accueillis.

Cependant, certains commentateurs estiment qu’en ne précisant pas le niveau de la contribution de l’État, le texte du gouvernement pourrait ne pas s’avérer irréprochable sur le plan du respect des dispositions de l’article 72-2 de la Constitution. Afin d’écarter tout risque d’inconstitutionnalité, le Sénat a modifié la rédaction initiale du dispositif pour utiliser le terme « compensation » au lieu de « contribution » et inscrire ainsi dans la future loi une relation de proportionnalité entre le montant des dépenses de personnel occasionnées par le service d’accueil et le financement de l’État, cette corrélation étant plus à même de respecter l’article 72-2 de la Constitution.

– Le Sénat a adopté à l’article 8 deux garanties supplémentaires sur le financement de l’État qui visent plus particulièrement les petites communes et les communales rurales.

D’une part, le décret d’application des dispositions concernées devra prévoir un mécanisme d’indexation de la compensation financière de l’État et fixer son montant minimal, versé à chaque commune, quel que soit le nombre d’enfants accueillis. Le gouvernement envisage de fixer ce forfait minimal à 200 euros par jour.

D’autre part, la future loi imposera le versement de la compensation au plus tard 35 jours après que le maire ait notifié à l’autorité académique les éléments nécessaires au calcul de ce financement.

– Afin de rassurer les familles sur la qualité des équipes du service d’accueil, le Sénat a adopté un article additionnel prévoyant la constitution d’un « vivier » de personnes qualifiées et volontaires pour animer ce service (article 7 bis).

C’est au maire qu’il reviendra d’établir la liste des personnes susceptibles de participer à l’organisation du service d’accueil, ce qui apportera aux familles la garantie qu’un droit de regard sera exercé sur les futurs encadrants. En outre, cette liste sera transmise à l’autorité académique, qui aura le pouvoir de consulter le fichier judiciaire national automatisé des auteurs d’infraction sexuelle ou violente, afin de vérifier que les volontaires n’y figurent pas et d’écarter, à ce titre, certaines personnes de la liste.

– Deux souplesses importantes sont accordées aux communes pour leur faciliter la mise en place du service d’accueil.

D’une part, grâce à l’article 7 du présent projet de loi, elles pourront accueillir les élèves dans les locaux des écoles, y compris lorsque ceux-ci continuent d’être utilisés pour les besoins de l’enseignement. Les communes seront ainsi dispensées de se lancer, pour assurer l’organisation matérielle de l’accueil, dans une chasse aux locaux disponibles qui peut être, pour elles, complexe et coûteuse.

D’autre part, l’article 9 du projet de loi permet à toute commune de confier, par le recours à une convention, l’organisation du service d’accueil à une autre commune ou à un établissement public de coopération intercommunal. Cet article devrait offrir aux communes rurales un instrument utile, les aidant à s’acquitter de l’obligation d’accueil posée par le présent projet de loi.

– Enfin, dans le but de rassurer les maires qui s’inquiètent des conséquences de la mise en place du service d’accueil sur leur régime de responsabilité, le gouvernement a indiqué, avant même que le projet de loi ne soit déposé, qu’il était favorable à l’institution, par voie d’amendement, d’un mécanisme de substitution de la responsabilité administrative de l’État à celle de la commune. C’est ce qui ressort de la réponse apportée par le ministre de l’Éducation nationale à une question posée à l’Assemblée nationale le 27 mai 2008 par M. Frédéric Lefebvre (24).

Sur la base de cet engagement, le Sénat a adopté un article additionnel au projet de loi tendant à transférer de la commune à l’État la responsabilité administrative d’un fait dommageable commis ou subi par un élève du fait du fonctionnement ou de l’organisation du service d’accueil (article 8 bis). Le texte adopté par le Sénat prévoit donc un aménagement équilibré du régime de responsabilité des communes : le dispositif ne fait qu’alléger, sans l’annuler, le risque judiciaire lié à la compétence de mise en place du service d’accueil, car celui-ci n’empêchera pas les familles de rechercher la responsabilité des communes et de leur maire en cas de faute personnelle et de faute pénale.

Ÿ Il reste à faire un geste en faveur des communes rurales qui risquent d’être placées « en première ligne »

Malgré les précautions juridiques et financières qu’il prévoit, le projet de loi continue de susciter une certaine inquiétude chez les maires des petites communes, en particulier ceux des communes rurales.

Selon l’Association des maires de France (AMF), l’institution du service d’accueil les jours de grève aboutit au paradoxe suivant : quoiqu’il arrive, c’est-à-dire quel que soit le seuil de déclenchement finalement retenu par la loi, les communes rurales seront dans l’obligation de délivrer cette prestation alors même que, dans ces collectivités, les problèmes d’accueil liés aux grèves d’enseignants se posent avec moins d’acuité.

En effet, la commune rurale « moyenne » abrite souvent une seule école avec deux à quatre enseignants. Par conséquent, dès lors qu’un seul de ces enseignants aura fait part de son intention de faire grève, elle devra organiser un service d’accueil au bénéfice des élèves. Or c’est précisément dans ce type de communes que le problème de l’accueil est pratiquement inexistant. En effet, d’après l’AMF, trois facteurs concomitants contribuent à faire de la commune rurale de petite taille une collectivité bien armée pour faire face aux grèves d’enseignants.

D’abord, les communes rurales sont moins concernées que les autres communes par les mouvements de grève des enseignants. Ensuite, les élèves d’une classe dont l’enseignant a fait part de son intention de participer à une grève peuvent être répartis, sans que cela crée des difficultés insurmontables, dans les deux ou trois autres classes non affectées par le mouvement annoncé. Enfin, si la solution précédente ne trouve pas à s’appliquer, les grands-parents, en milieu rural, habitent souvent à proximité de leurs petits enfants et peuvent donc être sollicités pour assurer leur garde pendant la journée, contrairement à la situation qui prévaut dans les grandes villes.

Le législateur ne peut ignorer la situation particulière des communes rurales. S’il doit la prendre en compte, il ne peut pour autant exempter un grand nombre de communes de l’obligation de mettre en œuvre le service d’accueil. Cela reviendrait à prévoir un « service d’accueil d’application minimale », ce qui pourrait ne pas être compris par les Français. Il serait donc préférable de prévoir dans la future loi un dispositif faisant preuve d’équité à l’égard des petites communes.

À cet égard, la disposition adoptée par le Sénat à l’article 8 et tendant à prévoir que le décret relatif à la compensation financière de l’État doit fixer le montant minimal qui est versé à toute commune ayant mis en place le service d’accueil constitue un premier pas.

Afin de rassurer les petites communes, il convient de poursuivre la réflexion sur les modalités de la compensation financière d’ici l’examen du projet de loi en séance publique. Par exemple, on pourrait concevoir que la compensation pourrait être non seulement fonction du nombre d’élèves accueillis, mais également du nombre effectif d’enseignants grévistes, afin qu’un lien plus étroit soit établi entre le financement de l’État et les dépenses de personnel que les communes devront exposer pour prendre en charge les enfants accueillis.

Le 9 juillet, la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République, sur la proposition de son rapporteur, M. Charles de La Verpillière, a adopté un amendement à l’article 8 qui tend à renforcer le niveau de la compensation financière versée aux communes. Cet amendement prévoit en effet que, pour chaque journée de mise en œuvre du service d’accueil par la commune, cette compensation ne pourra être inférieure à un montant égal à neuf fois le salaire minimum de croissance horaire par enseignant ayant participé au mouvement de grève. Il faut espérer qu’un tel mécanisme de « forfait horaire » soit adopté par le Parlement pour qu’il bénéficie aux communes et, notamment, aux plus petites d’entre elles.

*

En conclusion, le présent projet de loi se présente comme un ensemble de garanties offertes à toutes les parties prenantes du service public de l’école primaire : garanties pour les enseignants, dont le droit de grève n’est aucunement remis en cause ; garanties pour les enfants et leurs parents, qui, pour les derniers, se verront offrir, les jours de grève importante, une prestation utile, protectrice de leur liberté de travailler ; garanties, enfin, pour les communes et leurs maires, l’État s’engageant à respecter son devoir constitutionnel de solidarité à leur égard.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

I.- DISCUSSION GÉNÉRALE

La commission a procédé à l’examen pour avis du projet de loi, adopté par le Sénat après déclaration d’urgence, instituant un droit d’accueil pour les élèves des écoles maternelles et élémentaires publiques pendant le temps scolaire obligatoire au cours de sa séance du mardi 8 juillet 2008.

Un débat a suivi l’exposé de la rapporteure pour avis.

Mme Sandrine Mazetier a souligné qu’il s’agit du premier texte de la XIIIè législature concernant l’éducation dont est saisie la commission. Il illustre bien la manière dont ce sujet est traité par le gouvernement, qui fait fi des préoccupations exprimées notamment par les enseignants, les élus et la communauté éducative. Surtout, ce projet de loi porte atteinte au devoir d’instruction, qui constitue la mission fondamentale de l’école et auquel est substitué un droit d’accueil des élèves. Il convient donc de mesurer la pente glissante que constituerait l’adoption de ce texte. Il est à cet égard surprenant que la commission n’en est pas été saisie au fond.

De plus, les amendements adoptés par le Sénat n’ont pas permis de lever les inquiétudes portant sur le caractère effectivement praticable du dispositif proposé mais aussi, et surtout, sur ce qui le rend insupportable, c’est-à-dire l’institution d’un droit à l’accueil en lieu et place du droit à l’éducation.

S’agissant de l’expérimentation du service minimum d’accueil, qui a effectivement rencontré un très faible succès – et pour cause ! – il semble pour le moins abusif d’en imputer la seule responsabilité à la résistance politique de certaines communes, sauf à considérer que l’opposition est à son insu en responsabilités dans de très nombreuses municipalités, par exemple à Saint-Quentin dans l’Aisne… Or, dès la mise en œuvre de cette expérimentation, le gouvernement aurait pu prendre la mesure des difficultés posées par l’accueil des élèves en cas de grève, qu’elles concernent des problèmes pratiques ou le principe même : il s’agit là en effet d’une entaille importante, comme peut-être jamais il n’en a été porté, au contrat social.

Enfin, le projet de loi ne dit mot sur les personnes susceptibles d’accueillir des enfants, ce qui a été interprété par la rapporteure pour avis comme un élément de souplesse. Par-delà les clivages politiciens, il s’agit pourtant là, pour nos enfants, d’un problème majeur qui impose un devoir de vigilance.

M. Yves Bur a déclaré approuver la mise en place d’un service minimum d’accueil pour les élèves dans les écoles maternelles et élémentaires publiques. Les familles y ont légitimement droit lorsqu’on observe que nombre d’entre elles ne peuvent pas faire face à la suppression de cours sans renoncer à une journée de travail. Il faut cependant s’interroger sur le fait que les communes sont amenées à rendre ce service pour le compte de l’État ; l’idéal aurait été que l’État assume directement cette mission. À terme, l’éducation nationale, elle seule, devra avoir la responsabilité d’assurer l’accueil.

Le Sénat a pointé, à juste titre, la question de la responsabilité administrative des communes. C’est une question importante quand on connaît les risques liés à une activité d’accueil d’enfants. Il conviendrait de préciser les obligations qui pèseront sur les communes en matière d’encadrement des enfants. À ce titre, l’État ne devrait pas être plus exigeant à l’égard des collectivités qu’il ne l’est pour ses propres personnels.

Enfin, les communes doivent être prévenues le plus tôt possible de la mise en œuvre de ce service d’accueil. Certes, le projet de loi fixe un délai identique à celui prévu pour le service minimum dans les transports, mais toutes les communes ne disposent pas de retraités de l’enseignement ou de centres culturels pour mettre en œuvre rapidement ce service d’accueil.

M. Yves Durand a jugé que ce projet de loi arrive avec précipitation ; il est d’ailleurs examiné en urgence. Ce texte demanderait plus de réflexion et de concertation, notamment avec les communes et les maires. En fait, il a été imposé. En tant que maire, on ne peut que relayer la réaction de l’Association des maires de France (AMF), dont le président s’est publiquement inquiété des conséquences des dispositions du projet de loi sur les communes en matière de responsabilité, de coût et de faisabilité.

Un examen attentif du projet de loi montre que ce texte est totalement inapplicable dans bien des domaines. Par exemple, il est prévu que les communes rurales peuvent s’associer pour assumer le service d’accueil : cette disposition est inapplicable car les communes ne souhaiteront pas collaborer pour assumer un tel service.

Le projet de loi est également dangereux, car l’éducation est la première mission de l’école. L’école doit éduquer sans être réduite à un service d’accueil. Le Sénat a tenté d’apporter une réponse à ce problème à l’article 2 du projet de loi : si un professeur est absent, l’école doit accueillir les élèves avec les moyens dont elle dispose. Cependant, le projet de loi tend à organiser un système de remplacement, non pas par des enseignants mais par des personnes dont on ne connaît pas la compétence. Le gouvernement propose même la création d’une Agence nationale du remplacement dont les contours et la mise en place restent vagues mais qui pourrait être utilisée pour les remplacements en dehors des cas de grève.

Pourquoi vouloir aller aussi vite ? Le ministre de l’éducation nationale, qui connaît bien l’école, sait lui-même que le projet de loi est inapplicable et dangereux. Il fait là un coup d’annonce et pratique ainsi une sorte de populisme scolaire que le groupe SRC refuse.

M. Patrick Roy a fait observer que le projet de loi est le premier texte sur l’éducation nationale présenté par le gouvernement après treize mois de pouvoir. Cela souligne que l’éducation n’est pas une priorité du gouvernement. De surcroît, ce projet de loi ne concerne même pas l’éducation des élèves. En outre, le premier texte du ministre de l’éducation nationale fait dériver l’école de sa mission première.

On peut observer aujourd’hui qu’un grand nombre de classes est sans professeur car le ministère n’arrive pas à organiser les remplacements et ne parvient pas à assurer la mission fondamentale qui est la sienne, à savoir l’éducation. Le projet de loi est en fait là pour masquer cette déficience grave. On objectera l’existence des journées de grève. Mais il y en a très peu. En réalité, ce texte est un texte politicien.

De plus, le projet de loi fait supporter aux communes une charge nouvelle alors même qu’il existe une grande inégalité de ressources entre les communes. On sait d’ailleurs que la compensation versée par l’État ne permettra pas de couvrir la totalité des coûts. On passe par ailleurs sous silence que dans les écoles maternelles et élémentaires il y a des enseignants qui accomplissent des heures supplémentaires gratuitement.

Ce projet de loi est une atteinte évidente au droit de grève. Pourquoi ce texte arrive-t-il brutalement en urgence ? Il faut dénoncer cette précipitation. Enfin, il ne faut pas faire appel aux parents d’élèves quand on ne peut pas assumer le remplacement des enseignants.

Le président Pierre Méhaignerie a fait valoir qu’aucun pays n’a créé autant de postes d’enseignants que la France depuis quinze ans. Il faut commencer par vérifier le taux d’absentéisme des enseignants avant de dénoncer le manque de postes. Il faut certes toujours regarder les différentes faces d’une même politique, mais on ne peut pas caricaturer à ce point la politique éducative comme l’a fait M. Patrick Roy. Depuis quinze ans, un service d’accueil a été mis en place à Vitré dans les écoles, service jusqu’ici financé par la commune ; demain la commune sera remboursée par l’État.

M. Bernard Perrut a tout d’abord souligné que le projet de loi est tout à fait respectueux du principe constitutionnel de la liberté du droit de grève et qu’il permettra aussi de respecter la liberté des parents qui pourront ainsi continuer à mener leurs activités professionnelles normalement, alors que jusqu’à présent de nombreux parents étaient contraints de cesser de travailler pour garder leurs enfants les jours de grève des enseignants.

Ce projet de loi renforce les principes républicains de l’Éducation nationale qui reposent sur la gratuité de l’enseignement et l’obligation scolaire en introduisant une nouvelle garantie, celle de l’obligation d’accueil des élèves. On peut cependant se demander pourquoi l’Éducation nationale n’a pas été en mesure, jusqu’à présent, d’assurer par elle-même l’accueil des élèves en cas de grève des enseignants. Si l’on s’en tient à une lecture littérale du décret du 24 février 1989 relatif aux directeurs d’école, on pourrait en conclure que ce sont ces personnels qui doivent organiser l’accueil des enfants les jours de grève. Cependant, il a paru plus réaliste de prévoir que, dans certaines conditions, ce sont les communes qui auront la responsabilité d’organiser ce service d’accueil. En effet, aujourd’hui l’Éducation nationale ne peut assurer la continuité du service public de l’accueil.

Cette réforme offrira donc un service très attendu par les familles, mais permettra aussi un renforcement du dialogue social avec les personnels de l’Éducation nationale. En effet, ce texte prévoit des modalités précises pour l’ouverture de négociations préalables à l’exercice du droit de grève et fixe par exemple des règles pour le dépôt des préavis de grève et un délai de prévenance de 48 heures pour se déclarer gréviste.

Il faut se féliciter que la discussion au Sénat ait permis d’éclaircir certains points litigieux du texte, comme la question de la responsabilité administrative de la personne publique organisatrice du service d’accueil. Cette responsabilité a été transférée à l’État, ce qui devrait permettre aux maires des petites communes d’organiser ce service sans aucune prévention. De même, il est positif que la rédaction sénatoriale ait précisé la nature du financement qui sera versé par l’État aux communes pour les aider dans l’organisation de ce service. En conclusion, le droit d’accueil pour les élèves des écoles maternelles et élémentaires représente un véritable progrès et toutes les communes de France seront en mesure de mettre en œuvre cette réforme, contrairement à ce que disent les commissaires du groupe SRC qui prétendent que ce texte est inapplicable. Ce projet de loi est donc applicable, nécessaire et juste.

Concernant les amendements, il serait souhaitable que l’amendement présenté par M. Yves Bur soit adopté afin de permettre une véritable information des parents sur l’organisation de ce service nouveau. Il est essentiel, pour offrir un véritable service aux familles que cette information soit disponible au moins vingt-quatre heures à l’avance. Quant à la disposition relative à la liste établie par les maires où figureront les personnels susceptibles d’assurer le service d’accueil, il semble difficile de la mettre en œuvre, en particulier dans les grandes villes où cette liste devra être constamment actualisée pour tenir compte, par exemple, des déménagements. Cette liste ne pourra donc qu’être évolutive.

M. Christian Eckert a jugé possible d’établir certaines comparaisons entre ce projet de loi et le texte qui a été adopté il y a un an relatif à la continuité du service public dans les transports terrestres réguliers de voyageurs. Lors de la discussion du projet de loi sur le service minimum, il avait été souligné que les perturbations dans les transports n’étaient liées à des faits de grève que dans 3 % des cas ; de même, dans l’Éducation nationale les difficultés d’accueil des enfants sont rarement provoquées par la grève des enseignants. Ainsi, dans sa commune, des parents lui ont adressé des pétitions en raison du non-remplacement des enseignants absents, cette perturbation dans le service public de l’enseignement s’expliquant par la suppression des brigades de remplaçants.

Au-delà des questions de principe, ce texte, paraît mal rédigé. Qu’en est-il par exemple si un enseignant, qui s’était déclaré non gréviste, ou inversement gréviste, quarante-huit heures avant le début de la grève, décide de changer d’avis ? Sera-t-il sanctionné pour ne pas avoir respecté le délai de préavis et comment la commune pourra-t-elle organiser un service d’accueil si de multiples enseignants changent d’avis à la dernière minute ? Des inquiétudes apparaissent aussi quant aux compétences des personnes susceptibles d’assurer le service d’accueil : Pourra-t-on recourir aux services de parents d’élève ? Seront-ils dans ce cas rémunérés ? Au moins, seront-ils assurés ? Comment seront rémunérés les personnels municipaux, auront-ils droit à une rémunération sous forme d’heures supplémentaires non imposables ? L’organisation de ce service d’accueil risque d’ailleurs d’être particulièrement délicate à assurer si les services municipaux sont en grève en même temps que les enseignants.

Il est également indispensable de clarifier la manière dont les dépenses des communes seront compensées pour l’organisation de ce service. Le texte dans sa rédaction actuelle prévoit une compensation financière et non pas un remboursement des frais engagés, ce qui conduit à penser que cette réforme générera de nouvelles charges pour les communes. La possibilité pour les communes rurales de déléguer à une autre commune l’organisation du service d’accueil paraît assez théorique, comme l’a souligné précédemment M. Yves Durand.

M. Yvan Lachaud a considéré que cette réforme représente un véritable progrès pour les parents, qui ne seront plus obligés de cesser de travailler pour assurer la garde de leurs enfants en cas de grève. Il faut toutefois garder à l’esprit que l’organisation de ce service d’accueil par les communes restera exceptionnel et n’interviendra qu’en cas de mouvement social de grande ampleur. Comme par le passé, il sera toujours possible de répartir les enfants des enseignants absents dans les autres classes. Il faut faire confiance au pragmatisme des maires, qui ont réussi par le passé à offrir ce service alors qu’il n’était pas obligatoire. Le progrès de ce projet de loi est d’organiser un cadre légal pour ce service d’accueil et de prévoir un financement pour les communes mettant en œuvre ce service.

Il semble important d’améliorer la rédaction du texte sur deux points : prévoir l’extension du service d’accueil à l’enseignement privé sous contrat et préciser la nature du financement versé par l’État. À cet égard, le Sénat a adopté une disposition intéressante précisant que l’État versera une compensation financière et non une contribution financière.

M. Georges Colombier a déclaré que ce texte permet de respecter la liberté des enseignants de recourir au droit de grève tout en garantissant aux parents la possibilité de pouvoir travailler les jours de grève. Tout en représentant un incontestable progrès, il suscite néanmoins des questions chez les maires des communes rurales, qui s’inquiètent des moyens humains dont ils disposeront pour assurer le service d’accueil et se demandent si leur responsabilité pénale pourra être engagée en cas d’incidents graves dans l’organisation de l’accueil.

M. Marcel Rogemont a déploré que la commission des affaires culturelles n’ait été saisie que pour avis sur ce projet de loi. L’ordre du jour de la commission était trop chargé pour permettre un examen au fond de cette réforme, ce qui est tout à fait regrettable alors que la commission n’a pas eu l’occasion jusqu’à présent d’examiner des textes importants dans le domaine de l’éducation. Pourquoi, de plus, avoir recouru à la procédure d’urgence ? Voilà bien longtemps que l’Éducation nationale doit faire face à des grèves d’enseignants et il semble curieux qu’une solution miracle doive être trouvée pour s’appliquer dès la rentrée prochaine. Certains esprits chagrins et malicieux pourront penser qu’il s’agit de tout mettre en œuvre pour éviter que les parents d’élèves se rendent compte que certains enseignants ont fait grève…

Ce texte est particulièrement inquiétant car il n’est pas circonscrit aux mouvements de grève mais pourra s’appliquer, comme le prévoit l’article 2, lorsqu’il sera impossible de remplacer un professeur absent. Cette hypothèse est loin d’être théorique quand on connaît l’augmentation des heures de cours perdues faute de professeurs remplaçants. Dans une commune d’Ille-et-Vilaine, les journées d’enseignement non remplacées sont ainsi passées de 1 700 jours à 3 600 jours entre 2006 et 2007. Ce phénomène s’explique simplement par la réduction des effectifs d’enseignants titulaires remplaçants. Est-ce à dire que l’Éducation nationale lorsqu’elle sera incapable de fournir un remplaçant en cas d’absence prolongée d’un professeur se dédouanera de ses obligations de service public d’enseignement pour n’offrir qu’un service d’accueil ?

Il faut légiférer sur la suppression des enseignants effectuant des remplacements au lieu de prévoir la mise en place d’un service d’accueil en dehors des situations de grève. La brèche ouverte par l’article 2 doit être colmatée.

Ce projet de loi pose aussi de multiples questions quant à la qualité des personnes qui pourront assurer le service d’accueil. Il est tout à fait illusoire de penser que des pères ou mères de famille sans aucune formation pourront assurer ce service dans des conditions acceptables. Comme l’a souligné l’Association des maires de France, la rédaction actuelle de l’article 8 bis relatif au régime de responsabilité comporte de graves ambiguïtés qu’il est indispensable de lever.

En conclusion, outre les problèmes de principe posé par ce projet de loi, il est impératif de préciser son champ d’application en limitant l’organisation du droit d’accueil des élèves aux seuls mouvements de grève des enseignants.

En réponse aux intervenants, la rapporteure pour avis a donné les précisions suivantes :

– Il est faux de prétendre, comme le prétend Mme Sandrine Mazetier, qu’il s’agit du premier texte de cette législature relatif à l’enseignement, puisque la loi relative aux libertés et responsabilités des universités est déjà entrée en vigueur et a consacré l’autonomie des universités. Chacun sait en outre qu’en matière d’école maternelle et primaire, nombre de sujets relèvent du domaine réglementaire et que le gouvernement a déjà beaucoup avancé sur ce dossier.

– S’agissant du droit d’accueil pour les élèves des écoles maternelles et écoles publiques, ce droit existe tout au long de l’année, et pas seulement pendant les périodes de grève. Il répond à la demande des familles de pouvoir mettre en œuvre le principe fondamental de la liberté de travailler. Pour ce qui concerne les modalités de mise en œuvre de ce service d’accueil, le projet de loi organise la prise en charge par les communes au-delà d’un seuil d’enseignants ayant déclaré leur intention de participer à une grève, sinon il revient à l’État de prendre ses responsabilités.

– Si M. Yves Bur s’est fait l’écho d’inquiétudes concernant la qualification des personnes amenées à encadrer les élèves des écoles maternelles et élémentaires en cas d’application du droit d’accueil, il convient de souligner le caractère exceptionnel de la prise en charge par les communes, tout au plus quatre à cinq fois par an. Dans ce cas, aucune qualification spécifique n’est effectivement requise, puisqu’on ne se situe ni dans le cadre des accueils de loisirs et des séjours de vacances, ni dans le cadre de l’accueil périscolaire, ces deux types d’accueil étant régis par le code de l’action sociale et familiale.

– En réponse aux inquiétudes de l’Association des maires de France (AMF) relayées par M. Yves Durand, il faut rappeler qu’un amendement du Sénat a été introduit pour prévoir que la responsabilité administrative du fait des dommages subis ou commis par un élève dans le cadre du service d’accueil organisé par la commune est transférée à l’État. Par ailleurs, il ne peut pas y avoir transfert de la responsabilité pénale, qui reste donc celle du maire si celui-ci a commis une faute.

– La situation particulière des toutes petites communes est prise en compte par plusieurs dispositions du projet de loi qui visent notamment à introduire une possibilité de conventionnement pour faciliter la mise en place du service d’accueil pour les élèves des écoles maternelles et élémentaires. Une commune pourra ainsi confier par une convention l’organisation de ce service à une autre commune ou à un établissement public intercommunal (EPCI).

– Contrairement aux propos de M. Patrick Roy, qui a fait mention de dérives dans les remplacements, le rapport indique clairement que le taux de remplacement (congés pour maladie ou pour maternité) était de 91,93 % en 2007 dans le premier degré public, et que ce taux s’améliore constamment depuis plusieurs années. Ces chiffres, incontestables, marquent donc une évolution dans le bon sens. En aucun cas, le droit d’accueil ne se substituera à la politique de remplacement du ministère.

– À propos des critiques sur l’urgence qui s’attache à ce projet de loi, il convient de rappeler que trois expérimentations ont déjà été menées depuis 2007 et qu’il est donc maintenant nécessaire d’adopter rapidement un texte avant la prochaine rentrée scolaire.

– Ainsi que M. Bernard Perrut l’a rappelé, le projet de loi respecte pleinement le droit de grève.

– Enfin, il faut souligner que ce projet de loi met en place, pour la première fois dans la fonction publique, un dispositif encourageant la culture du dialogue social au travers de l’instauration d’une procédure de négociation préalable à la grève, sachant que l’obligation de déclaration ne s’oppose pas à ce qu’un enseignant rejoigne une grève déjà commencée et à laquelle il n’avait pas initialement l’intention de participer. Dans la plupart des écoles, la continuité de l’enseignement sera assurée par la répartition des élèves dans les classes où les professeurs ne feront pas grève. Le projet de loi ne remet pas en cause cette pratique.

II.- EXAMEN DES ARTICLES

Article 1er

Modification d’un intitulé de titre et création d’un nouveau chapitre
du code de l’éducation

Le présent projet de loi instituant un droit d’accueil au bénéfice des enfants scolarisés dans les écoles maternelles et élémentaires publiques, on comprend qu’il propose que les divisions du code de l’éducation fassent explicitement référence à cette avancée importante.

Le I du présent article prévoit de remplacer l’intitulé actuel du titre III du livre Ier du code de l’éducation, « L’obligation et la gratuité scolaires », par l’intitulé : « L’obligation scolaire, la gratuité et l’accueil des élèves des écoles maternelles et élémentaires ».

Avec cette modification, le gouvernement propose de mettre, sur le même plan, trois principes complémentaires, d’une valeur égale : un nouveau principe, l’accueil, et deux autres principes, qui constituent des piliers de notre système éducatif, l’obligation scolaire et la gratuité.

Par coordination avec ce changement proposé d’intitulé de titre, le II du présent article prévoit de compléter le titre III du livre Ier du code, actuellement composé de deux chapitres respectivement consacrés à l’obligation scolaire et à la gratuité de l’enseignement scolaire public, par un nouveau chapitre intitulé : « L’accueil des élèves des écoles maternelles et élémentaires ».

Ce chapitre comprendra les nouveaux articles L. 133-1 à L. 133-6, L. 133-6-1, L. 133-7, L. 133-7-1 et L. 133-8 que le projet de loi propose d’insérer dans le code de l’éducation et qui détaillent les principes et les modalités d’organisation du droit d’accueil et du service d’accueil.

*

La commission a examiné un amendement de Mme Sandrine Mazetier visant à supprimer de l’intitulé du titre III du livre Ier du code de l’éducation la mention de « l’accueil des élèves des écoles maternelles et élémentaires » introduite par le projet de loi.

Mme Sandrine Mazetier a indiqué que cet amendement reprend la teneur de ses précédentes interventions, puisqu’il rappelle que l’obligation et la gratuité scolaires sont les deux grands piliers qui fondent le service public de l’éducation nationale et que le droit d’accueil ne peut en aucun cas être situé au même niveau. Les réponses apportées par la rapporteure sont en outre inquiétantes, dans la mesure où elles confirment que le droit d’accueil hors situation de grève est assuré par l’État. Par ailleurs, en cas de grève importante, le système mis en place par le projet de loi revient à autoriser des remplacements par des parents d’élèves ou des agents territoriaux spécialisés dans les écoles maternelles (ATSEM).

La rapporteure pour avis a fait part de son désaccord avec cette analyse. En aucun cas, l’État ne pourra demander à un ATSEM d’organiser le droit d’accueil. Ce droit d’accueil s’applique tous les jours. C’est à l’État qu’il revient de mettre en place un service d’accueil quand il est impossible de remplacer un enseignant. La responsabilité de mettre en place le service d’accueil ne revient à la commune que si un certain seuil d’enseignants se déclarant grévistes est atteint.

Mme Sandrine Mazetier a rétorqué que, dans la mesure où de plus en plus de personnels précaires sont en poste dans l’éducation nationale, l’article 2 ouvre la possibilité pour des personnels précaires qui ne sont pas enseignants de prendre en charge le nouveau droit d’accueil. Quoi qu’il en soit, cet accueil ne peut être considéré comme une mission première de l’enseignement, au même titre que l’obligation scolaire ou la gratuité.

La rapporteure pour avis s’est déclarée défavorable à cet amendement car le projet de loi a justement pour objet de mettre sur le même plan l’obligation scolaire, la gratuité et l’accueil des élèves des écoles maternelles et élémentaires.

M. Yves Durand a appelé l’attention sur le fait qu’en précisant que « lorsque, par suite de l’absence ou de l’empêchement du professeur habituel de l’élève et de l’impossibilité de le remplacer, ces enseignements ne peuvent lui être délivrés, il bénéficie gratuitement d’un service d’accueil », l’article 2 prévoit bien l’existence d’un service d’accueil mais sans jamais préciser qu’il relève obligatoirement d’enseignants.

La rapporteure pour avis a souligné que l’article 2 ne vise qu’une impossibilité avérée de remplacer l’enseignant. L’accueil n’est donc mis en place qu’à titre subsidiaire par l’État. Le service d’accueil n’est pas un service pris en charge par les communes en temps normal. Celles-ci n’interviennent que si le seuil prévu par l’article 5 est atteint.

Suivant l’avis défavorable de la rapporteure pour avis, la commission a rejeté l’amendement.

La commission a examiné un amendement de Mme Sandrine Mazetier, visant à supprimer le nouveau chapitre III du titre III du livre premier du code de l’éducation mentionnant « l’accueil des élèves des écoles maternelles et élémentaires ».

Le président Pierre Méhaignerie a souhaité que cet amendement soit rejeté, vu le débat précédent.

Mme Sandrine Mazetier a invité le président à laisser au moins le temps aux commissaires de lire l’exposé des motifs de son amendement pour qu’un débat digne de ce nom ait lieu.

M. Yves Durand a fait valoir que l’article 2 est inutile au regard des articles 4 et 5 du projet de loi qui précisent les modalités applicables en cas de grève.

Suivant l’avis défavorable de la rapporteure pour avis, qui a indiqué que l’article 2 fixe le principe du droit d’accueil tandis que les articles 4 et 5 organisent le service d’accueil en cas de grève, la commission a rejeté l’amendement.

La commission a donné un avis favorable à l’adoption de l’article 1er sans modification.

Après l’article 1er

La commission a examiné un amendement de Mme Sandrine Mazetier visant à compléter l’article L. 111-2 du code de l’éducation afin de préciser que l’État s’engage à veiller à ce que chaque enseignement soit assuré.

Mme Sandrine Mazetier a réitéré ses craintes quant aux objectifs poursuivis par le projet de loi. Celui-ci ouvre la possibilité pour les communes de prendre en charge des missions qui n’étaient pas les leurs jusqu’ici. De plus, il confère à l’accueil un rang identique à l’obligation et à la gratuité scolaire, sans préciser que le remplacement des enseignants s’effectue nécessairement par un enseignant, alors même que l’éducation est un devoir de la Nation au titre du Préambule de la Constitution de 1946.

Suivant l’avis défavorable de la rapporteure pour avis, qui a tenu à rappeler une nouvelle fois que le projet de loi défend une logique de subsidiarité et non de substitution, la commission a rejeté l’amendement.

Article 2

Institution du droit d’accueil dans les écoles maternelles
et élémentaires publiques

Cet article poursuit un double objectif : d’une part, instituer le droit d’accueil dont bénéficiera tout enfant scolarisé dans une école maternelle ou élémentaire publique ; d’autre part, prévoir, toujours au bénéfice de l’enfant, un service d’accueil lorsque ces enseignements ne peuvent pas être dispensés.

Le présent article propose de codifier ces deux avancées dans un article L. 133-1 nouveau du code de l’éducation, qui sera le premier des articles regroupés sous le nouveau chapitre du code que le projet de loi prévoit de consacrer à l’accueil dans les écoles publiques.

L’institution de ces deux droits, droit à l’accueil en temps ordinaire et droit à un service d’accueil les jours où les enseignements ne peuvent être dispensés, permettra de garantir, à l’enfant et à sa famille, une continuité de l’accueil au niveau du premier degré public, tout en parachevant un ensemble de droits au service de l’éducation des plus jeunes enfants consacrés par le législateur.

1. Le dispositif proposé par le gouvernement

a) L’institution d’un droit d’accueil pour parachever les droits du jeune enfant « à l’école »

L’institution d’un droit d’accueil pour les enfants scolarisés dans les écoles maternelles et élémentaires publiques vient s’ajouter à un corpus juridique en matière d’éducation des enfants progressivement construit par le législateur.

Cela étant dit, il convient de préciser que cette construction juridique, constituée de deux droits – le droit à l’éducation et le droit à être accueilli dans une école dès l’âge de trois ans – et d’une obligation – l’obligation scolaire – , ne vise pas que les enfants en âge d’être scolarisés dans les écoles maternelles et élémentaires : en effet, l’un des droits bénéficie à tous les Français, l’autre aux enfants âgés de trois à cinq ans, tandis que l’obligation vaut pour les enfants âgés de six à seize ans. Cependant, au-delà de ces distinctions, on peut considérer que l’ensemble de ces règles juridiques a pour effet d’instituer un « droit à l’école » au bénéfice des jeunes enfants et que celui-ci sera conforté par le droit à l’accueil proposé par le présent projet de loi.

Cette construction juridique très élaborée est issue de l’une des lois fondatrices de la Troisième République et de deux lois récentes, la loi n° 89-486 du 10 juillet 1989 d’orientation sur l’éducation, dite « loi Jospin », et la loi n° 2005-380 du 23 avril 2005 d’orientation et de programme pour l’avenir de l’école, dite « loi Fillon ». Sur le plan international, la Cour européenne des droits de l’homme consacre, elle aussi, le droit à l’instruction comme un droit fondamental (arrêt du 25 mars 1993, Costello-Roberts c/ Royaume-Uni).

– Le premier droit consacré par notre ordre juridique est le droit à l’éducation, qui constitue un devoir d’État depuis que le Préambule de la Constitution de 1946 dispose que « la Nation garantit l’égal accès de l’enfant et de l’adulte à l’instruction, à la formation et à la culture. L’organisation de l’enseignement public gratuit et laïque à tous les niveaux est un devoir de l’État ». Ce droit a été inscrit par le législateur, en 1989, à l’article L. 111-1 du code de l’éducation qui dispose d’une part, que « l’éducation est la première priorité nationale » et, d’autre part, que « le droit à l’éducation est garanti à chacun afin de lui permettre de développer sa personnalité, d’élever son niveau de formation initiale et continue, de s’insérer dans la vie sociale et professionnelle, d’exercer sa citoyenneté. ».

– Le second droit consacré par notre ordre juridique bénéficie à tous les jeunes enfants d’un certain âge. Il est formulé à l’article L. 113-1 du code de l’éducation, selon lequel « tout enfant doit pouvoir être accueilli, à l’âge de trois ans, dans une école maternelle ou une classe enfantine le plus près possible de son domicile, si sa famille en fait la demande ». Ainsi, la République a institué un droit à scolarisation en école maternelle, étant entendu qu’il ne s’agit pas d’un droit acquis à l’admission, puisque celui-ci ne joue que s’il y a une place disponible à l’école pour l’enfant (25).

– L’obligation instituée par le législateur concerne la scolarité des enfants. De fait, elle est inséparable du droit à l’éducation, puisqu’elle en conditionne l’effectivité. Elle est inscrite à l’article L. 131-1 du code, qui dispose que « l’instruction est obligatoire pour les enfants des deux sexes, français et étrangers, entre six et seize ans ». Les termes utilisés pour formuler l’obligation scolaire sont directement issus de l’article 7 de la loi du 28 mars 1882, l’un des piliers de l’école républicaine.

Quant à la mise en œuvre pratique de ce droit à l’éducation, elle est confiée aux communes. En effet, tant le code général des collectivités territoriales que le code de l’éducation consacrent la compétence de cette collectivité dans ce domaine :

– aux termes de l’article L. 2121-20 du code général des collectivités territoriales, « le conseil municipal décide de la création et de l’implantation des écoles et classes élémentaires et maternelles d’enseignement public après avis du représentant de l’État dans le département » ;

– selon le code de l’éducation, d’une part « toute commune doit être pourvue au moins d’une école élémentaire publique » (article L. 212-2), d’autre part « la commune a la charge des écoles publiques. Elle est propriétaire des locaux et en assure la construction, la reconstruction, l’extension, les grosses réparations, l’équipement et le fonctionnement » (article L. 212-4). Ce code précise, en outre, que le maire doit dresser chaque année la liste des enfants soumis à l’obligation scolaire (article L. 131-6).

Ce rôle éminent de la commune résulte de l’histoire. Les écoles primaires publiques sont, en effet, depuis 1833, des services municipaux, un statut qui a peu évolué depuis leur création par François Guizot. D’ailleurs, ne dit-on pas la « communale » en parlant de l’école primaire, raison pour laquelle les écoles primaires publiques ne bénéficient pas de la personnalité morale et juridique et n’ont pas d’autonomie financière ?

Ainsi, en proposant de créer un droit d’accueil des enfants inscrits dans les écoles le présent article fait doublement œuvre utile :

– il institue un nouveau droit, que le code ignore aujourd’hui, mais qui découle très logiquement du corpus juridique construit par le législateur en matière d’éducation, de scolarité obligatoire et de scolarisation dans les écoles maternelles ;

– il donne corps à l’ensemble des « droits à l’école » des jeunes enfants, en énonçant clairement que dès lors qu’ils y sont scolarisés, ils doivent être accueillis pour suivre les enseignements qui sont dispensés ; la précision peut sembler superflue, mais elle permet de consacrer le statut d’usager de l’école de l’enfant et d’indiquer qu’à ce titre, il doit y être accueilli pour être instruit.

Il faut se féliciter d’une telle avancée, qui non seulement permettra de consacrer un droit d’accueil qui, jusqu’ici, n’était que latent dans les dispositions du code de l’éducation, mais aussi constituera la contrepartie législative du devoir d’accueil qui est imposé aux directeurs des écoles maternelles et élémentaires.

En effet, le décret n° 81-252 du 18 mars 1981 dispose, dans son article 1er, que le directeur d’école est « responsable de l’accueil des élèves auxquels il assure l’accès des locaux du service public d’éducation aux heures prévues par le règlement de l’école ». Plus récemment, le décret n° 89-122 du 24 février 1989 relatif aux directeurs d’école prévoit, comme cela a déjà été dit plus haut, que le directeur d’école « prend toute mesure utile pour que l’école assure sa fonction de service public et organise, à cette fin, l’accueil des élèves ».

Ces textes indiquent clairement que l’accueil est consubstantiel au service public assuré par l’école. Ainsi, en consacrant un couple juridique uni et cohérent, constitué par le droit à l’éducation et le droit d’accueil, le présent projet de loi tend à conforter la mission première du service public de l’école.

b) L’instauration d’un service obligatoire pour garantir la continuité de l’accueil de plus de cinq millions d’usagers

Le présent article prévoit d’instaurer un service d’accueil lorsque les enseignements prévus par les programmes ne peuvent être dispensés.

Il donnera aux enfants, les bénéficiaires « directs » du nouveau droit d’accueil proposé par le présent projet de loi, ainsi qu’à leurs parents, les bénéficiaires « indirects », l’instrument qui fait aujourd’hui défaut pour que l’école assure, sans interruption, sa mission d’accueil.

Ÿ La répartition de la compétence d’organisation du service d’accueil entre l’État et les communes

Le présent article doit être lu avec deux autres articles du projet de loi :

– l’article 4, qui prévoit que les enfants scolarisés dans une école maternelle ou élémentaire publique bénéficient, en cas de grève des enseignants, d’un service d’accueil pendant le temps scolaire ;

– l’article 5, qui prévoit qu’une commune doit mettre en place le service d’accueil des élèves pendant le temps scolaire dès lors qu’au moins 20 % des personnes exerçant des fonctions d’enseignement dans une école ont déclaré leur intention de participer à une grève.

C’est la combinaison de ces trois articles qui permettra d’assurer le respect, par les communes, de l’obligation d’instaurer un service d’accueil lors des journées de grève d’une certaine ampleur.

L’ensemble de ces dispositions conduit à répartir la compétence d’organisation du service d’accueil entre l’État et les communes de la manière suivante :

– l’État dispose, en vertu du présent article, d’une compétence de principe en la matière : c’est à lui que revient la responsabilité d’organiser le service d’accueil dès lors que les enseignements ne peuvent pas être dispensés ;

– les communes, quant à elles, ne disposent que d’une compétence d’attribution puisqu’elles ont l’obligation d’organiser un tel service qu’en cas de grève, et encore faut-il que celle-ci ait une certaine ampleur pour atteindre le seuil prévu par l’article 5 du projet de loi.

Ÿ La portée du service d’accueil

Le projet de loi initial prévoyait que l’enfant ne bénéficie du service d’accueil que lorsque les enseignements ne peuvent pas être dispensés, sans donner plus de précisions sur les facteurs de déclenchement cette prestation.

Dans l’esprit du gouvernement, le service d’accueil n’est mis en œuvre que pour pallier des absences imprévisibles de professeurs, liées par exemple à une maladie ou à un accident qui survient brutalement.

Autrement dit, le service d’accueil ne doit pas être confondu avec les dispositions prises par le ministère de l’éducation nationale pour remplacer des absences d’une certaine durée.

Le traitement de ces situations relève en effet de politiques précises : pour faire face aux absences des enseignants liées à des congés de maladie ou de maternité, mais aussi aux départs en cours d’année, il existe des effectifs permanents d’enseignants ayant pour mission d’assurer la classe lors des absences de courte ou de longue durée des maîtres, dénommés « brigades de remplacement ». Ces enseignants ont le statut de titulaires remplaçants. Le taux de remplacement (congés pour maladie ou maternité) était de 91,93 % en 2007 dans le premier degré public, ce qui fait dire au ministère de l’éducation nationale que la situation est « saine sur le plan national comme dans la plupart des académies » et que le taux constaté l’an dernier confirme l’amélioration constante observée depuis plusieurs années (26).

Évolution du taux d'absence et du taux de remplacement dans le premier degré

 

Taux d'absence

Taux de remplacement

1997-1998

5,80

89,86

1998-1999

5,98

88,57

1999-2000

6,27

88,39

2000-2001

6,34

89,26

2001-2002

6,67

88,96

2002-2003

6,68

91,38

2003-2004

6,93

90,87

2004-2005

6,98

91,63

2005-2006

7,08

91,93

2006-2007

7,23

91,80

Source : Ministère de l’Éducation nationale

Le service d’accueil ne vise donc que les situations où le professeur, pour une raison soudaine, ne peut être remplacé. Loin d’être négligeable, l’institution d’un tel service représente pour les parents une avancée considérable : elle permet au service public de l’éducation nationale de s’acquitter de son devoir d’accueil.

2. Les modifications apportées par le Sénat

Le Sénat a apporté, sur proposition de sa commission des affaires culturelles, deux modifications au présent article :

– Il a adopté un amendement précisant, d’une part, que le service d’accueil n’est offert que lorsque, par suite de l’absence ou de l’empêchement du professeur habituel de l’élève, le remplacement de l’enseignant est impossible, d’autre part, que ce dispositif est gratuit. Cette nouvelle rédaction permet d’indiquer avec toute la clarté voulue que le service d’accueil n’est mis en place que lorsqu’il n’est pas possible de remplacer un enseignant qui, pour une raison ou une autre, ne peut faire cours. Est ainsi affirmé le caractère subsidiaire du service d’accueil, qui n’a pas vocation à se substituer au service d’enseignement ou à la politique de remplacement du ministère de l’éducation nationale.

– Il a supprimé, à juste raison, la mention du caractère « obligatoire » du temps scolaire pendant lequel le service d’accueil est mis en place dans les écoles maternelles et élémentaires. En effet, le temps scolaire obligatoire ne vise, conformément à l’article L. 131-1 du code de l’éducation qui dispose que l’instruction est obligatoire pour les enfants âgés de 6 à 16 ans, que l’école élémentaire et non pas l’école maternelle.

*

La commission a examiné un amendement de Mme Sandrine Mazetier visant à supprimer l’article 2 du projet de loi.

Mme Sandrine Mazetier a indiqué que le projet de loi traite de toute autre chose que de la seule circonstance de la grève. Visiblement, il s’agit, en cas d’absence des enseignants, de les faire remplacer par tout type de personnels. M. Marcel Rogemont a indiqué qu’il avait été fait appel dans sa circonscription à des retraités de l’enseignement, voire à des contractuels de l’ANPE. C’est visiblement ces situations que le texte ambitionne d’étendre au vu des suppressions des postes envisagées dans l’enseignement !

La rapporteure pour avis s’est déclarée défavorable à cet amendement car il revient concrètement à retirer à l’élève le droit d’être accueilli et le droit à bénéficier d’un service d’accueil.

M. Patrick Roy a indiqué ne pas comprendre la logique de l’article 2, sauf à soupçonner le gouvernement d’arrière-pensées, ou de pensées « impures ». En effet, ce droit nouveau n’aurait pas de sens si le ministère de l’éducation nationale assumait l’obligation d’éducation qui est déjà la sienne. On voit bien que l’affirmation du droit d’accueil ne vise qu’à faire face à une carence de l’État qui s’amplifie.

M. Yvan Lachaud a alors interrogé M. Patrick Roy sur les solutions alternatives qu’il propose lorsque dans une école trois professeurs font grève.

M. Patrick Roy a rétorqué que l’absence des professeurs pour cas de grève constitue tout au plus deux à trois pour cent des absences totales, qui s’expliquent très majoritairement par la maladie ou la formation. L’article 2 du projet de loi ne précise pas que le droit d’accueil concerne exclusivement des situations exceptionnelles de grève. La solution alternative est de ne pas supprimer de postes d’enseignants, puisque les élèves ont besoin de ces derniers.

La rapporteure pour avis a souligné que M. Roy a raison de dire que le projet de loi, dont le titre est d’ailleurs explicite, ne vise pas seulement les situations exceptionnelles de grèves. Il va plus loin, ce dont il faut se féliciter, en instituant au bénéfice de l’élève un droit d’accueil qui s’ajoute au droit à l’éducation.

M. Patrick Roy a rappelé que la mission de l’État est de mettre un enseignant devant les élèves et que le projet de loi ignore ce point.

La rapporteure pour avis a indiqué que le projet de loi distingue clairement le droit d’accueil du service d’accueil qui est mis en place par l’État ou la commune pour faire face à des situations nécessairement limitées.

À titre d’illustration, le président Pierre Méhaignerie a indiqué que l’article 2 permet de garantir l’accueil des élèves lorsque les effectifs enseignants sont victimes d’une grippe soudaine et virulente. Il faut prévoir des dispositifs pragmatiques pour faire face à ces situations.

M. Marcel Rogemont a confirmé que la suppression de l’article 2 est justifiée. Il n’y a pas besoin d’instituer un droit d’accueil qui existe déjà.

Suivant l’avis défavorable de la rapporteure pour avis, la commission a rejeté l’amendement.

La commission a examiné un amendement de M. Yvan Lachaud tendant à étendre le dispositif d’accueil aux élèves des établissements d’enseignement privé sous contrat.

Suivant l’avis favorable de la rapporteure pour avis, qui a précisé que 899 000 élèves étaient concernés, la commission a adopté l’amendement, cosigné par M. Jean-Philippe Maurer.

La commission a donné un avis favorable à l’adoption de l’article 2 ainsi modifié.

Après l’article 2

La commission a examiné un amendement présenté par Mme Sandrine Mazetier, visant à avancer à trois ans l’âge de l’obligation scolaire.

Mme Sandrine Mazetier a estimé que si l’objectif du projet de loi est d’ouvrir l’école à tous, il faut donc parallèlement étendre le champ de l’obligation scolaire. D’ailleurs, l’école maternelle est plébiscitée par les parents et scolarise déjà près de 90 % des élèves en âge de l’être.

Suivant l’avis défavorable de la rapporteure pour avis, qui a jugé que la question est hors sujet, la commission a rejeté l’amendement.

La commission a ensuite examiné un amendement présenté par Mme Sandrine Mazetier, ouvrant la possibilité d’une scolarisation à partir de l’âge de deux ans.

Mme Sandrine Mazetier a relevé que cet amendement offrait davantage de souplesse que le précédent et qu’il répond ainsi au souci exprimé par la rapporteure pour avis.

La rapporteure pour avis a considéré que cet amendement était également hors sujet et qu’en outre la scolarisation à l’âge de deux ans ne fait pas l’unanimité parmi les spécialistes de l’éducation et les psychologues.

Citant l’exemple récent d’un projet de loi qui a mélangé les genres en abordant à la fois la représentativité syndicale et la durée du travail, M. Patrick Roy s’est dit surpris par l’argumentation développée par la rapporteure pour avis sur le caractère hors sujet de ces deux amendements.

La commission l’a rejeté l’amendement.

Article 3

Procédure de prévention des conflits dans le premier degré public
et conditions de dépôt d’un nouveau préavis de grève

Cet article, qui prévoit d’insérer un article L. 133-2 nouveau dans le code de l’éducation, poursuit un double objectif : instaurer une procédure de prévention des conflits, afin de limiter les risques de grève dans les écoles, et interdire la pratique des « préavis glissants ».

Ces mesures tendent à mieux réguler le déclenchement et le déroulement des grèves pouvant affecter les écoles publiques du premier degré, en renforçant le dialogue social par ce que le ministre de l’éducation nationale a appelé un dispositif « d’alerte sociale, novateur dans la fonction publique » (27).

Le présent article a un double objectif : faire en sorte que grâce aux règles minimales d’encadrement de la procédure de prévention des conflits et à l’interdiction des préavis glissants, la négociation entre l’État et les syndicats enseignants faisant suite au dépôt du préavis ne se réduise pas à un théâtre d’ombres incantatoire ; permettre aux communes, grâce à la déclaration préalable d’intention de participation à la grève, d’anticiper une offre de service d’accueil répondant aux besoins des familles.

Les dispositions du présent article s’inspirent directement de celles des articles 2 et 3 de la loi n° 2007-1244 du 21 août 2007 sur le dialogue social et la continuité du service public dans les transports terrestres réguliers de voyageurs. Ceux-ci résultent de préconisations faites en 2004 par le rapport de la commission présidée par M. Dieudonné Mandelkern, ancien président de la section du contentieux du Conseil d’État, sur la continuité du service public dans les transports (28).

Les dispositions en question de la loi d’août 2007 ayant été déclarées conformes à la Constitution par le Conseil constitutionnel le 16 août 2007, le commentaire du présent article rappellera les principaux considérants de cette décision pour souligner le caractère constitutionnel des mesures proposées.

Ainsi, loin d’être affaibli, l’exercice du droit de grève sera préservé, tout en étant précédé par des négociations qui se dérouleront dans un cadre juridique plus propice à la conclusion d’accords entre les parties en présence. Dans le même temps, la liberté des parents qui souhaiteront travailler les jours de grève des enseignants, sans être obligés de prendre un jour de congé pour assurer la garde de leurs enfants, sera elle aussi préservée.

1. L’instauration d’une procédure de négociation préalable à la grève

a) Une obligation de négociation relevant de la mission d’encadrement du droit de grève confiée au législateur

Le I de l’article L. 133-2 qu’il est proposé d’insérer dans le code de l’éducation prévoit de créer une obligation de négociation préalable entre l’État et les organisations syndicales représentatives des personnels enseignants du premier degré avant le dépôt, par ces organisations, d’un préavis de grève (alinéa 2).

Cette obligation s’appuie sur la nature particulière du droit de grève des fonctionnaires, qui, comme cela a été dit, est un droit encadré, puisqu’il doit être concilié avec la continuité du service public.

En elle-même, la création d’une obligation de négociation pour les organisations représentatives des fonctionnaires que sont les personnels enseignants, avant que celles-ci ne déposent un préavis de grève, n’est pas en mesure de porter atteinte au droit de grève individuel de ces derniers. C’est ce qui ressort du raisonnement adopté par le Conseil constitutionnel dans la décision précitée du 16 août 2007 : celui-ci a en effet considéré, « qu’eu égard à la nature particulière du droit de grève, le législateur peut…confier à des organisations syndicales représentatives des prérogatives particulières relatives au déclenchement de la grève; que ce rôle reconnu à ces organisations pour le dépôt d’un préavis de grève laisse entière la liberté de chaque salarié de décider personnellement de participer ou non à celle-ci ; que le grief (consistant à dire que l’intervention obligatoire et préalable des syndicats représentatifs porte une atteinte excessive au droit de grève) doit, dès lors, être écarté. ».

Par ailleurs, on ne peut que se féliciter que le présent article prévoie de renforcer le dialogue social entre l’État et les organisations syndicales d’enseignants. La procédure de négociation préalable au dépôt d’un préavis de grève doit être perçue comme une mesure de réassurance à l’égard des personnels enseignants et de leurs syndicats : elle témoigne de la volonté de l’État de donner toute sa place à la négociation alors que les exigences de la société à l’égard de l’éducation nationale, en termes de d’efficacité et de résultats, ne cessent de croître.

Le Sénat a modifié la rédaction du I pour lever toute ambiguïté sur le fait que les préavis visés sont bien ceux qui concernent les personnels enseignants du premier degré.

b) Des règles d’organisation et de déroulement des négociations définies par la loi mais détaillées par décret

Le II de l’article L. 133-2 qu’il est proposé d’insérer dans le code de l’éducation prévoit qu’un décret en Conseil d’État fixe « les règles d’organisation et de déroulement » de la procédure de négociation.

Pour mémoire, il convient de rappeler que le schéma de la négociation préalable prévu par la loi n° 2007-1224 du 21 août 2007 repose sur une logique différente car, en l’espèce, il n’a pas pour objet de réguler le droit de grève des fonctionnaires d’une administration de l’État, mais celui de personnels d’entreprises de transports.

C’est pourquoi la voie de la négociation d’un accord est largement encouragée par la loi d’août 2007, sans que soit exclu pour autant le recours à un acte réglementaire : au niveau des entreprises de transports, l’employeur et les syndicats représentatifs doivent signer un accord de prévention avant le 1er janvier 2008 ; au niveau des branches elles mêmes, les entreprises mènent des négociations qui, d’ici le 1er janvier 2008, pourront aboutir à un accord destiné à pallier la carence des entreprises ; enfin, si les entreprises ne sont pas couvertes par un accord d’entreprise ou de branche à cette date, les règles d’organisation et de déroulement de la négociation seront définies par décret. Au final, la procédure de prévention des conflits collectifs a été fixée par le décret n° 2008-82 du 24 janvier 2008.

À l’inverse, le présent article prévoit que d’entrée de jeu, l’organisation et le déroulement de la négociation préalable seront fixés par un décret en Conseil d’État qui devra déterminer « notamment » plusieurs règles en la matière (alinéa 3).

Certains commentateurs se sont interrogés sur le renvoi au décret opéré par le présent article, dans la mesure où les règles constitutionnelles disposent expressément qu’il revient au législateur d’encadrer l’exercice du droit de grève.

Il reste que le contenu du futur décret est précisé par le présent article : celui-ci prévoit de définir les règles minimales d’organisation et de déroulement de la procédure de négociation préalable, qui, par la suite, devront être détaillées par la voie réglementaire. Autrement dit, si le décret fixera le détail de la procédure, il le fera en fonction du cap tracé par le parlement à qui il est proposé de légiférer sur les règles les plus importantes de la négociation, en particulier celles qui encadreront les délais à respecter. On observera que, s’agissant de la loi du 21 août 2007, le Conseil constitutionnel a constaté que la loi « fixe l’objet, encadre le contenu et précise les conditions de mise en œuvre (du) décret, qui doit se borner à prévoir les modalités d’application de la loi ; que, dès lors, le législateur n’a pas méconnu la compétence que lui confie l’article 34 de la Constitution ».

Ces règles minimales d’organisation et de déroulement de la procédure, au nombre de sept, sont identiques à celles fixées par l’article 2 de la loi n° 2007-1224 du 21 août 2007, à l’exception du fait que le projet de loi se réfère à l’État et non à « l’employeur ». Il s’agit :

– des conditions dans lesquelles une organisation syndicale représentative procède à la notification, à l’autorité administrative des motifs pour lesquels elle envisage de déposer le préavis de grève prévu à l’article L. 2512-2 du code du travail (alinéa 4) ;

– du délai dans lequel, à compter de cette notification, l’autorité administrative réunit les organisations syndicales représentatives, étant précisé que ce délai ne peut dépasser trois jours (alinéa 5) ;

– de la durée dont l’autorité administrative et les organisations syndicales représentatives disposent pour conduire la négociation préalable, cette durée ne pouvant excéder huit jours francs à compter de la notification (alinéa 6) ; le point de départ de la computation du délai étant la notification, il faudra donc soustraire le temps écoulé entre le délai et la première réunion, prévue à l’alinéa précédent, entre l’employeur et les organisations syndicales (temps de trois jours au plus) ;

– des informations devant être transmises par l’autorité administrative aux organisations syndicales représentatives (qui ont procédé à la notification), pour favoriser la réussite du processus de négociation, ainsi que du délai dans lequel ces informations doivent être fournies (alinéa 7) ;

– des conditions dans lesquelles la négociation préalable entre les organisations syndicales représentatives et l’autorité administrative doit se dérouler (alinéa 8) ;

– des modalités d’élaboration du relevé de conclusions de la négociation préalable, ainsi que les informations qui doivent y figurer (alinéa 9) ;

– des conditions dans lesquelles les enseignants du premier degré sont informés des motifs du conflit, de la position de l’autorité administrative, de la position des organisations syndicales représentatives qui ont procédé à la notification ainsi que des conditions dans lesquelles ils reçoivent communication du relevé de conclusions de la négociation préalable (alinéa 10).

On observera que les dispositions de l’alinéa 6 auront pour effet d’allonger le délai à respecter avant le début effectif du mouvement de grève.

Le délai minimal de négociations actuellement applicable résulte de la durée du préavis prévu par l’article L. 2512-2 du code du travail : ainsi que cela a été dit, le préavis doit parvenir cinq jours francs avant le déclenchement de la grève à l’autorité hiérarchique, pendant lesquels les parties sont tenues de négocier.

Avec l’article 3 du projet de loi, le délai du préavis sera précédé d’un autre délai devant être lui aussi respecté et qui sera, au maximum, égal aux huit jours francs devant être consacrés à la négociation préalable, à compter de la notification par le syndicat des motifs pour lesquels il envisage de déposer un préavis de grève.

Par conséquent, le « temps » qui devra être consacré à la négociation sera considérablement augmenté, puisqu’il passera de cinq jours francs à treize jours francs, soit le total des cinq jours du préavis et des huit jours prévus pour la durée de la négociation préalable.

Ces règles de « bonne gouvernance » du déclenchement de la grève visent à mettre en place, avant le début effectif de l’arrêt concerté du travail, un cadre de négociation entièrement centré sur les discussions et leur issue : ce qui importe est non d’entrer dans le conflit dans le seul but d’en « découdre », en avançant des positions qui ne sont pas clairement étayées, mais de se lancer, avant de faire grève, dans un processus d’échanges structurés au cours desquels les parties en présence sont tenues de montrer leur jeu.

C’est ce qui fait toute l’importance du relevé de conclusions : cette formalité oblige les parties à indiquer, de manière précise, les raisons pour lesquelles, la négociation ayant échoué, le recours à la grève constitue la prochaine étape. Ainsi que le souligne le rapport de la « commission Mandelkern », il est indispensable de faire obligation aux parties au conflit de « consigner par écrit, conjointement, l’objet du conflit », car trop souvent, « la grève sert (…) à établir les revendications plus que celles-ci ne conduisent à la grève ».

Enfin, il y a lieu de noter que le délai allongé de négociation prévu par le présent projet de loi est, selon toute probabilité, conforme à la Constitution. C’est en tout cas ce qu’a jugé le Conseil constitutionnel en ce qui concerne les services publics de transport, à l’occasion de l’examen de la future loi du 21 août 2007. Le Conseil a en effet considéré que le délai de treize jours résultant de l’article 2 de cette loi « est destiné à permettre d’abord une négociation effective susceptible d’éviter la grève puis, le cas échéant, la mise en place d’un plan de transport adapté afin d’assurer la continuité du service public » et « que ce délai n’apporte pas de restriction injustifiée aux conditions d’exercice du droit de grève ».

2. L’interdiction des préavis glissants

À l’image de qui est déjà prévu, pour le secteur des transports terrestres réguliers de voyageurs, par l’article 3 de la loi du 21 août 2007, le III du futur article L. 133-1 du code de l’éducation vise à interdire la pratique des « préavis glissants », celle-ci étant de nature à perturber la mise en place du service d’accueil par les communes.

Les critiques formulées par le rapport de la « commission Mandelkern », à l’encontre de cette pratique sont tout aussi valables en ce qui concerne l’enseignement public du premier degré. On rappellera que les préavis glissants consistent à déposer quotidiennement des préavis successifs, afin de pouvoir déclencher, dans la pratique, des grèves « surprises », interdites par le législateur, mais qui ont, sur le plan formel, respecté les prescriptions du code du travail. Selon le rapport, cette technique est incompatible avec le principe de la négociation durant la durée du préavis qui est posé par l’article L. 2512-2 du code. En effet, elle permet de dénaturer le principe du délai et de rompre, à tout moment, les discussions. Il en résulte un échec du préavis puisque « les cinq jours prévus ne donnent lieu au mieux qu’à l’établissement d’un désaccord. Au pire, ils ne sont qu’un moment de silence avant l’orage ».

Le présent article reprend les modalités d’encadrement du dépôt d’un nouveau préavis prévues l’article 2 de la loi du 21 août 2007. Il donne ainsi aux organisations syndicales et à l’État, les moyens de négocier effectivement, en renforçant, dans ce but, « la portée du préavis existant », pour reprendre les termes utilisés par le rapport fait au nom de la commission spéciale de l’Assemblée nationale chargée d’examiner le projet de loi sur le dialogue social et la continuité du service public dans les transports terrestres réguliers de voyageurs.

Le dispositif proposé pour encadrer le dépôt successif de préavis est le suivant : un nouveau préavis ne pourra être déposé, pour les mêmes motifs, par la ou les mêmes organisations ayant déjà déposé un préavis dans les conditions prévues par l’article L. 2512-2, d’une part, qu’à l’issue du délai du préavis en cours et, d’autre part, avant que les procédures de négociation préalable n’aient été mises en œuvre (alinéa 11).

On observera que la première condition, à savoir que le délai du premier préavis doit être arrivé à échéance, signifie que le deuxième préavis ne peut être déposé qu’après la date fixée par le premier préavis pour le début de la grève.

Par ailleurs, les deux conditions cumulatives posées par ce dispositif devront donc être respectées, sans que cela n’oblitère la liberté de manœuvre et de pression des syndicats : elles n’empêcheront pas deux syndicats différents de déposer, successivement, sans conditions de délai, deux préavis différents ni un seul syndicat de déposer, successivement et sans conditions de délai, deux préavis successifs pour des motifs distincts.

Quant à la restriction excessive du droit de grève que pourrait constituer, pour certains, l’interdiction des préavis glissants, le Conseil constitutionnel l’a jugée conforme à la Constitution lorsque le législateur l’a prévue pour le secteur des transports terrestres réguliers de voyageurs. En effet, selon le considérant n°14 de la décision du 16 août 2007, « il appartient au législateur d’édicter les mesures qui lui paraissent à même, pour éviter le recours répété à des grèves de courte durée mettant en cause la continuité du service public, d’assurer une conciliation entre la défense des intérêts professionnels et la sauvegarde de l’intérêt général auquel la grève est de nature à porter atteinte ; que les dispositions de l’article 3 de la loi déférée qui, à cette fin, interdisent à un même syndicat de déposer à nouveau, pour un même motif, un préavis de grève avant l’expiration du précédent préavis n’apportent pas à l’exercice du droit de grève une limitation excessive ».

*

La commission a donné un avis favorable à l’adoption de l’article 3 sans modification.

Article 4

Institution d’un service d’accueil des élèves des écoles publiques
du premier degré en cas de grève

Cet article tend à préciser que les enfants scolarisés dans une école primaire bénéficient d’un service d’accueil les jours de grève, en insérant un article L. 133-3 nouveau dans le code de l’éducation.

1. Le dispositif proposé par le gouvernement

Le présent article propose que les enfants scolarisés dans une école maternelle ou élémentaire publique bénéficient, en cas de grève des enseignants, d’un service d’accueil pendant le temps scolaire obligatoire. Ce service est organisé par la commune dans le cas prévu par l’article 5, dans sa rédaction initiale, du présent projet de loi, soit lorsque le nombre de personnes qui ont déclaré leur intention de faire grève est égal ou supérieur à 10 % du nombre de personnes exerçant des fonctions d’enseignement dans les écoles et élémentaires publiques de la commune.

Le présent article appelle deux observations principales.

Ÿ Un accueil de plusieurs heures garanti

En premier lieu, le service d’accueil est défini par référence au temps scolaire obligatoire. En effet, le présent article dispose que les enfants scolarisés dans une école maternelle ou élémentaire publique bénéficient de ce service « pendant le temps scolaire obligatoire ».

Comme on l’a vu dans le commentaire de l’article 2, la mention du caractère obligatoire du temps scolaire n’est pas justifiée ici, car le temps scolaire obligatoire ne concerne pas les écoles maternelles mais les seules écoles maternelles, couvertes par l’obligation scolaire imposée aux enfants âgés de 6 à 16 ans.

Afin de viser les écoles tant maternelles qu’élémentaires, il serait donc préférable que le présent article se réfère au temps scolaire.

Serait ainsi repris dans le cadre du présent projet de loi un principe posé par la circulaire du 8 janvier 2008 instaurant le service minimum d’accueil (SMA) volontaire selon lequel le service est assuré « durant les heures normales d’enseignement, soit usuellement six heures par jour ». Ce faisant, le projet de loi permettrait, en toute logique, de faire coïncider la durée du service d’accueil avec le temps scolaire, puisque le dispositif vise, précisément, à instituer, à la place du service d’enseignement, qui ne peut être assuré par des personnels en grève, une prestation d’accueil.

Même si la référence au caractère obligatoire du temps scolaire n’est pas appropriée, il reste que le gouvernement a voulu établir ainsi un lien clair entre la durée du service d’accueil et les heures normales d’enseignement. Or ce lien est fondamental, car il garantit aux élèves et à leurs parents que ce service d’accueil, une fois mis en œuvre, ne sera pas soumis à des « éclipses » imprévisibles, ce qui remettrait en cause son caractère de service public.

En outre, d’un point de vue pratique, les parents pourront confier leurs enfants pendant une durée qui est, certes, en principe limitée à six heures, mais qui devrait leur assurer le gain d’une journée de travail presque entière.

Ÿ Un service compatible avec la liberté d’action syndicale

Les craintes qui ont été exprimées au sujet de la compatibilité ou la « conventionnalité » du service d’accueil avec les conventions de l’Organisation internationale du travail (OIT) n’apparaissent pas fondées. Elles s’appuient sur le rapport du Bureau international du travail, qui considère que la loi du 21 août 2007 qui institue un service minimum dans les transports terrestres réguliers de voyageurs n’est pas conforme à la convention n°87 de l’OIT sur la liberté syndicale (29). On peut donc penser que, par analogie, le raisonnement suivi par le Bureau pourrait a priori s’appliquer au service d’accueil dans les écoles.

En réalité, il n’en est rien, car la Commission des experts du Bureau international du travail (BIT) ne s’est prononcée que sur une obligation précise, qui n’est nullement comparable à l’organisation du service d’accueil dans les écoles publiques : cette obligation découle de l’article 5 de la loi d’août 2007 qui prévoit la signature d’un plan de prévisibilité du service en cas de grève à l’issue de négociations devant être menées entre l’employeur et les syndicats. À défaut d’accord, une fois un certain délai écoulé, ce plan est défini par l’employeur.

La Commission du BIT a estimé que la fixation d’un « service minimum négocié devrait être limitée aux opérations strictement nécessaires pour que la satisfaction des besoins de base de la population ou des exigences minima du service soit assurée, car elle limite l’un des moyens de pression essentiels dont disposent les travailleurs pour défendre leurs intérêts ».

Or le principe ainsi dégagé par la Commission ne saurait concerner le service d’accueil dans les écoles pour une raison essentielle : ce service n’est pas un service minimum stricto sensu, car il ne vise pas à assurer la continuité des enseignements en imposant à certains enseignants de faire cours.

2. Les modifications apportées par le Sénat

Le Sénat a modifié la réaction du présent article sur deux points : d’une part, il a supprimé, comme à l’article 2 et pour les mêmes raisons, la référence au caractère obligatoire du temps scolaire ; d’autre part, il a affirmé la compétence de principe de l’État en matière d’organisation du service d’accueil, en indiquant, de manière explicite, que ce service « est organisé par l’État », sauf lorsque la commune est chargée de le mettre en œuvre en application de l’article 5 du projet de loi.

*

La commission a examiné un amendement de suppression de cet article présenté par Mme Sandrine Mazetier.

Relevant que si l’absence d’un enseignant n’est pas consécutive à une grève, la responsabilité de l’État est alors en jeu, M. Christian Eckert a jugé que le service d’accueil doit d’ores et déjà être assuré par l’État dans le cadre des textes en vigueur. Au demeurant, comme le texte mentionne des « personnels de l’État » pour assurer l’accueil des élèves, on peut concevoir quelque inquiétude, dans la mesure où il n’est pas précisé de quel ministère ils seront originaires.

Faisant remarquer que l’accueil ne se substitue pas aux politiques de remplacement de l’éducation nationale, la rapporteure pour avis a émis un avis défavorable à cet amendement, en cohérence avec les décisions prises par la commission à l’article 2.

M. Patrick Roy a donné l’exemple d’un enseignant qui, élu par ailleurs conseiller général, a dû s’absenter durant quarante-deux demi-journées au cours de l’année scolaire. Ses élèves n’en ont pas moins été accueillis, mais il y a lieu de s’étonner qui n’ait été remplacé qu’à une seule reprise. En effet, ses absences ont été, par définition, étalées sur l’ensemble de l’année scolaire, par conséquent pas seulement au moment de la période hivernale, où la grippe peut effectivement provoquer des « pics » d’absences difficiles à gérer… Idéalement, ces « pics » devraient être correctement pris en charge, tandis que les enseignants devraient pouvoir pratiquer du soutien scolaire.

La rapporteure pour avis a rappelé que le soutien scolaire a été généralisé dans le cadre de la réorganisation du temps scolaire.

Il faut réfléchir au-delà des cas particuliers et inscrire dans le marbre de la loi un droit à l’accueil des enfants pendant le temps scolaire car, lorsque les enseignants sont en grève, l’État doit prendre ses responsabilités.

La commission a rejeté l’amendement.

Puis la commission a donné un avis favorable à l’adoption de l’article 4 sans modification.

Article 5

Mise en place du service d’accueil par les communes

Cet article a pour objet de préciser les conditions dans lesquelles les communes doivent mettre en place, les jours de grève importante, un service d’accueil des enfants scolarisés dans les écoles maternelles et élémentaires publiques. Pour l’essentiel, il prévoit de n’imposer cette obligation à ces collectivités que lorsque 10 % des enseignants – 20 %, ce seuil étant apprécié école par école, après examen du projet de loi par le Sénat – des écoles publiques d’une commune ont déclaré leur intention de participer à une grève.

1. Les interrogations suscitées par l’application du présent article

Ces interrogations portent sur le caractère constitutionnel du service d’accueil, la capacité de des communes à mobiliser des personnels en nombre suffisant pour animer ce dispositif, le fait de savoir si les dispositions du code de l’action sociale et des familles s’appliqueront ou non à un tel accueil, ainsi que sur le régime de responsabilité applicable lorsque celui-ci est mis en œuvre. Les interrogations que suscitent le financement du service d’accueil et les régimes de responsabilité seront abordées lors du commentaire des articles respectivement consacrés à ces deux points, c’est-à-dire l’article 8 et l’article 8 bis.

a) La question de la constitutionnalité d’un service d’accueil obligatoire

Aux termes de l’article 72 de la Constitution, « dans les conditions prévues par la loi, (les) collectivités s’administrent librement par des conseils élus ». Selon certains, le principe de libre administration des collectivités territoriales posé par cet article interdit d’imposer aux communes la mise en place d’un service d’accueil des enfants les jours de grève.

Ainsi, pour le professeur Dominique Rousseau, si « la loi fait de ce soi-disant « service minimum » une obligation légale, imposée aux maires par les préfets, il sera effectivement porté atteinte à la libre administration des communes qui deviendraient, dans cet esprit, des organes d’exécution de la politique nationale ». M. Didier Maus, président émérite de l’Association française de droit constitutionnel, se montre plus nuancé, tout en soulignant l’existence d’un « risque d’inconstitutionnalité : le principe d’un service minimum n’est pas contraire à la Constitution… mais la loi ne doit pas porter atteinte à l’autonomie des communes » (30).

De son côté, le ministère de l’éducation nationale considère que l’organisation d’un service d’accueil par les communes relève bien de la compétence constitutionnelle du législateur telle qu’elle est définie par l’article 72 de la Constitution aux termes duquel les collectivités s’administrent librement dans les « conditions prévues par la loi ».

De fait, comme l’a souligné devant la rapporteure le professeur Michel Verpeaux, le législateur « peut et doit intervenir » pour définir les compétences des collectivités territoriales. L’article 34 de la Constitution relatif au domaine de la loi est dépourvu de toute ambiguïté à ce sujet : la loi détermine les principes fondamentaux «  de la libre administration des collectivités territoriales, de leurs compétences et de leurs ressources ».

En outre, la libre administration des collectivités territoriales ne constitue pas un « super-principe », autour duquel s’organiseraient l’ensemble des droits, des libertés et des objectifs reconnus par notre Constitution. Ce principe doit être en effet concilié avec d’autres principes à valeur constitutionnelle. À titre d’illustration, lors de l’examen de la loi relative aux libertés et responsabilités locales, le Conseil constitutionnel a considéré, dans sa décision du 12 août 2004, qu’en matière d’accès au logement, « il incombe au législateur de définir les compétences de l’État et des collectivités territoriales, afin de mettre en œuvre l’objectif de valeur constitutionnelle » qu’est « la possibilité pour toute personne de disposer d’un logement décent ».

En outre, le projet de loi ne prévoyant pas de mécanisme par lequel le préfet se substituerait aux communes qui ne mettraient pas en œuvre le service d’accueil, l’argument selon lequel il porterait atteinte au principe constitutionnel de libre administration des collectivités territoriales ne tient pas. D’ailleurs, quand bien même ce serait effectivement le cas, la Constitution n’interdit pas au législateur de définir des situations précises qui autorisent le représentant de l’État à se substituer à une collectivité dans le but de sauvegarder l’intérêt général. Par exemple, dans sa décision du 6 décembre 2007 sur la loi organique tendant à renforcer la stabilité des institutions et la transparence de la vie politique en Polynésie française, le Conseil constitutionnel a estimé qu’il « appartient…au législateur de prévoir l’intervention du représentant de l’État pour remédier, sous le contrôle du juge, aux difficultés résultant de l’absence de décision de la part des autorités décentralisées compétentes en se substituant à ces dernières lorsque cette absence de décision risque de compromettre le fonctionnement des services publics et l’application des lois ».

Au total, on peut considérer que ni la Constitution ni la jurisprudence du Conseil constitutionnel ne font du principe de libre administration des collectivités territoriales un droit absolu, interdisant au législateur d’attribuer de nouvelles compétences aux communes.

Par ailleurs, l’argument consistant à dire que le présent projet de loi aurait pour conséquence que l’État transférerait, en violation de la Constitution, une de ses compétences aux communes, sans prévoir l’attribution de ressources équivalentes à celles qui étaient consacrées à son exercice, n’est pas recevable.

Cet argument s’appuie sur l’article 72-2 de la Constitution selon lequel « Tout transfert de compétences entre l’État et les collectivités territoriales s’accompagne de l’attribution de ressources équivalentes à celles qui étaient consacrées à son exercice ».

Force est de constater, cependant, que le projet de loi ne confie, en aucune façon, l’organisation du service public de l’enseignement, qui relève de la compétence exclusive de l’État, aux communes. Comme le rappelle le ministère de l’éducation nationale, ce texte ne fait que demander aux communes d’assurer une prestation d’accueil et de surveillance les jours de grève des enseignants très suivie. Or un tel service n’étant pas, pour l’heure, assuré par l’État, on ne peut donc affirmer que ce dernier transférerait une de ses compétences propres aux communes. Par conséquent, la nouvelle compétence mise à la charge des communes constitue bien une création et non un transfert de compétence.

Comme on le verra plus loin, la rédaction de l’article 8 du présent projet de loi, telle que modifiée par le Sénat, devrait permettre de satisfaire la disposition de la Constitution qui s’applique en l’espèce, soit de l’article 72-2 aux termes duquel « toute création ou extension de compétences ayant pour conséquence d’augmenter les dépenses des collectivités territoriales est accompagnée de ressources déterminées par la loi ».

b) La question des personnels animant le service d’accueil

Ÿ La situation actuelle

À l’heure actuelle, en dehors du cas du service minimum d’accueil volontaire prévu par la circulaire du 8 janvier 2008, l’accueil des enfants inscrits dans les écoles publiques les jours de grève repose sur la mise en place d’un service municipal de garderie. Ce dernier est généralement installé dans l’école elle-même, après que le directeur de l’école a donné son accord, ou dans une structure de loisirs ou au sein d’une autre structure d’accueil.

Dans ce cas, selon l’Association des maires de France (AMF), le personnel municipal est habilité à surveiller les enfants présents, en particulier les personnels proches des enfants tels que les agents territoriaux spécialisés dans les écoles maternelles (ATSEM) ou les animateurs de centres d’accueil et de loisirs. Les premiers sont recrutés par un concours de la fonction publique territoriale de catégorie C, ouvert aux titulaires d’un certificat d’aptitudes professionnelles dans le domaine de la petite enfance. Les seconds sont titulaires d’un brevet d’aptitude aux fonctions d’animateur en accueils collectifs de mineurs, délivré par un jury émanant d’une direction départementale de la jeunesse et des sports.

Cependant, pour éviter des situations pouvant conduire à engager la responsabilité de la commune, l’AMF recommande que l’encadrement de ces services municipaux de garderie respecte deux principes :

– Le maire doit veiller à prendre toutes les mesures de précaution adéquates, afin que l’encadrement des enfants soit correct. Il peut être assuré par des parents d’élèves, mais pas exclusivement, en raison, précisément, des problèmes de responsabilité qui pourraient survenir ;

– L’accueil mis en place doit être limité à une activité de pure garderie, c’est-à-dire que les activités éducatives proposées doivent rester non organisées et structurées. En effet, dans cette hypothèse, aucune réglementation spécifique n’est prévue, tandis qu’à l’inverse, si une diversité d’activités éducatives est proposée, à l’image de ce qui est prévu dans les centres de loisirs, la garderie pourrait selon toute vraisemblance être assimilée, en cas d’accident, à un accueil périscolaire. Or celui-ci est soumis au respect d’une réglementation très stricte, imposée par l’article R. 227-16 du code de l’action sociale et des familles, en ce qui concerne le taux d’encadrement des enfants : un animateur pour dix mineurs âgés de moins de six ans et un animateur pour quatorze mineurs âgés de six ans ou plus.

Ÿ La situation avec le service d’accueil obligatoire

Beaucoup de communes s’interrogent sur leur capacité, une fois que le service d’accueil sera rendu obligatoire par la loi, à mettre à la disposition de celui-ci un personnel qui soit à la fois qualifié et suffisamment nombreux.

Ainsi, le représentant de l’AMF entendu par la rapporteure, s’appuyant sur son expérience de maire et se référant aux dispositions du code de l’action sociale et familiale relatives aux différents types d’accueil, défend le principe d’un taux d’encadrement des enfants relativement élevé.

Pour mémoire, le code de l’action sociale et familiale prévoit deux niveaux d’encadrement :

– pour les séjours de vacances et les accueils de loisirs, le code exige un animateur pour huit mineurs de moins de 6 ans et un animateur pour douze mineurs âgés de 6 ans ou plus (article R. 227-15) ;

– pour l’accueil périscolaire, c’est-à-dire pour l’encadrement des heures précédant et suivant la classe, l’effectif minimum est d’un animateur pour dix mineurs de moins de 6 ans et d’un animateur pour quatorze mineurs âgés de 6 ans ou plus (article R. 227-16).

Aux yeux du représentant de l’AMF, un taux d’encadrement d’un adulte pour huit élèves d’école maternelle et d’un adulte pour douze élèves d’école élémentaire constitue le « minimum vital » pour surveiller et occuper, pendant six heures, des enfants qui, par définition, sont dissipés. Dans ces conditions, il a demandé comment les communes pourront assurer, concrètement, un service d’accueil reposant sur un nombre suffisant d’adultes.

La réponse se trouve, en réalité, dans la grande liberté laissée aux communes pour employer les personnes chargées d’animer le service d’accueil et pour organiser le fonctionnement de ce service.

D’une part, les communes pourront mobiliser leurs propres agents, dans le respect des statuts de ces derniers, mais également faire appel aux personnels d’associations gérant des centres de loisirs ou encore aux personnes désignées par les associations familiales, ainsi qu’à des parents, à des enseignants retraités ou à des étudiants.

D’autre part, les communes disposant de peu de personnels, en particulier celles en milieu rural, pourront, grâce à l’article 9 du projet de loi, confier l’ensemble de l’organisation du service à une autre commune ou à un établissement public de coopération communale (EPCI). Cette souplesse devrait permettre aux communes les moins dotées en personnels « mobilisables » de confier l’accueil à une commune ou à un EPCI géographiquement proche et disposant des moyens humains nécessaires.

c) Un accueil hors champ du code de l’action sociale et des familles

Si les communes estiment qu’elles devront fournir un effort considérable pour mobiliser des adultes en nombre suffisant pour s’occuper des élèves, elles s’inquiètent, par ailleurs, des contraintes juridiques, issues des dispositions du code l’action sociale et des familles, pouvant peser sur l’organisation du service d’accueil.

Sur ce point, le ministère de l’éducation nationale rappelle que l’article L. 227-5 du code de l’action sociale et des familles, qui prévoit notamment une obligation de déclaration préalable au préfet et de souscription d’un contrat assurance pour les collectivités organisant l’accueil de mineurs, ainsi que des conditions de qualification des personnels et de taux d’encadrement pour l’accueil des mineurs inscrits en établissements scolaires, n’est pas applicable au service d’accueil prévu par le présent projet de loi.

En effet, les modes d’accueil collectifs à caractère éducatif visés par ce code sont, conformément à son article L. 227-4, ceux « entrant dans l’une des catégories fixées par décret en Conseil d’État ». Or le service d’accueil des élèves ne rentre dans aucune des catégories visées par le décret n° 2006-923 du 26 juillet 2006 pris en application de l’article L. 227-4 et qui a été codifié aux articles R. 227-1 et suivants.

C’est ce qui ressort très clairement du 1° et 2° de l’article R. 227-1 qui ne visent que deux types d’accueils collectifs sans hébergement.

« 1° L’accueil de loisirs de sept à trois cents mineurs, en dehors d’une famille, pendant au moins quatorze jours consécutifs ou non au cours d’une même année sur le temps extrascolaire ou périscolaire pour une durée minimale de deux heures par journée de fonctionnement. Il se caractérise par une fréquentation régulière des mineurs inscrits auxquels il offre une diversité d’activités organisées.

2° L’accueil de jeunes de sept à quarante mineurs, âgés de quatorze ans ou plus, en dehors d’une famille, pendant au moins quatorze jours consécutifs ou non au cours d’une même année et répondant à un besoin social particulier explicité dans le projet éducatif mentionné à l’article R. 227-23. »

Par conséquent, l’accueil organisé par une commune les jours de grève ne peut être assimilé aux deux cas qui viennent d’être cités. Il est donc totalement hors champ du code de l’action sociale et des familles pour deux raisons majeures : il ne se caractérise pas par une fréquentation régulière des mineurs concernés ; il ne propose pas, contrairement aux centres de loisirs, une diversité d’activités organisées ou ne concerne pas, s’agissant des autres types d’accueil, les mineurs âgés de quatorze ans ou plus bénéficiant d’un projet éducatif spécifique.

2. Le dispositif proposé par le gouvernement

a) Contenu du dispositif

Le présent article prévoit d’insérer un article L. 133-4 nouveau dans le code de l’éducation regroupant les dispositions qui encadrent la mise en place du service d’accueil (alinéa 1).

Ÿ D’abord, le présent article prévoit d’instituer une obligation de déclaration préalable d’intention de participation à la grève pour les personnes exerçant des fonctions d’enseignement (alinéa 2). Directement issue des recommandations du rapport de la « Commission Mandelkern », cette obligation figure à l’article 5 de la loi n° 2007-1124 du 21 août 2007.

Appliquée par le présent projet de loi aux écoles maternelles et élémentaires publiques, cette obligation conduirait à ce que, dans le cas où un préavis a été déposé dans les conditions prévues par l’article L. 2512-2 du code du travail, toute personne y exerçant des fonctions d’enseignement serait tenue d’informer, quarante-huit heures avant de participer à une grève, l’autorité administrative de son intention d’y prendre part.

L’obligation de déclaration individuelle s’applique à toute personne qui exerce des fonctions d’enseignement. Selon le ministère de l’éducation nationale, cette formulation permet d’inclure toutes les personnes dont l’absence laisse les enfants sans prise en charge. Sont ainsi visées, en plus des enseignants, les personnes qui, sans posséder ce statut, interviennent devant les enfants pour leur enseigner certaines disciplines comme les langues. Dès lors que leur absence pour fait de grève rend nécessaire une solution de garde alternative, il est en effet logique qu’elles soient soumises à l’obligation de déclaration. A l’inverse, la formulation permet d’exclure les enseignants qui n’exerceraient pas de fonctions d’enseignement (enseignants détachés dans d’autres administrations, directeurs d’école totalement déchargés). Est ainsi respectée la jurisprudence du Conseil constitutionnel qui exige que l’obligation de déclaration individuelle des grévistes ne porte que sur les personnes « dont la présence détermine directement l’offre de services » (considérant 29 de la décision n°2007-556 DC du 16 août 2007).

Quant à l’autorité administrative à laquelle la déclaration est transmise, il s’agit, en principe, de l’inspecteur d’académie.

Ÿ Ensuite, le présent article prévoit de préciser le « circuit » emprunté par les informations découlant de ces déclarations : l’autorité administrative qui les reçoit communique sans délai au maire, pour chaque école, le nombre de personnes ayant fait cette déclaration et exerçant dans la commune (alinéa 4).

Le cheminement de ces informations sera donc le suivant : l’enseignant ayant l’intention de faire grève en informe l’inspecteur d’académie qui, à son tour, communique aux maires le nombre d’enseignants exerçant dans leurs communes ayant déclaré leur intention de participer à cette grève.

Ÿ Enfin, le présent article prévoit de créer une obligation de mise en œuvre du service d’accueil pour les maires. Lorsque le nombre de personnes ayant déclaré leur intention de participer à la grève est égal ou supérieur à 10 % du nombre des personnes exerçant des fonctions d’enseignement dans les écoles maternelles et élémentaires publiques d’une commune, le maire met en place ce service d’accueil (alinéa 5).

Le gouvernement a donc choisi de lier cette obligation à un « seuil de déclenchement », qui se réfère au pourcentage d’enseignants des écoles publiques d’une commune ayant fait part de leur intention de faire grève.

Selon le ministère de l’éducation nationale, ce choix s’explique pour plusieurs raisons pratiques.

– Le seuil de 10 % est fondé sur les enseignements que l’on peut tirer de l’observation des mouvements de grève dans le premier degré. En effet, on constate que ces mouvements prennent généralement deux formes : des mouvements d’ampleur limitée mobilisant moins de 5 % de grévistes et de grands mouvements portés par un syndicat qui atteignent des taux de grévistes proches de 20 %. Le ministère a souhaité tenir un seuil qui se veut réaliste et non arbitraire, en faisant le partage entre ces deux types de conflits.

– Le seuil de déclenchement est apprécié au niveau du territoire de la commune et non école par école. Ce choix est logique aux yeux du ministère, dans la mesure où l’autre alternative, qui consisterait à fixer le seuil de 10 % de grévistes école par école, conduirait à solliciter plus fréquemment les communes. En effet, il est tout à fait possible qu’une école ait un taux de grévistes supérieur à 10 % alors que la moyenne des grévistes sur l’ensemble des écoles de la commune est inférieure à ce seuil.

Par ailleurs, le fait d’apprécier le seuil de déclenchement au niveau des territoires devrait faciliter l’organisation pratique du service d’accueil : les communes pourront, grâce aux dispositions de l’article 9 du présent projet de loi, recourir au conventionnement afin de choisir un échelon d’intervention pertinent pour mettre en œuvre ce dispositif. Cela les aidera à mettre en place un service qui ne sera pas nécessairement pensé école par école, mais pourra être commun aux élèves de plusieurs communes.

– Dans le cas des grèves de faible ampleur, c’est-à-dire celles qui devraient mobiliser un pourcentage de personnel inférieur au seuil prévu par le projet de loi, l’obligation de garantir le service d’accueil pèsera, comme on l’a vu, sur l’administration scolaire et donc sur l’État. Ainsi, les communes seront déchargées de leur obligation d’instituer un service d’accueil en cas de grèves peu importantes ou en cas d’absence des enseignants pour toute autre cause. Cela devrait leur apporter une garantie supplémentaire contre les actions indemnitaires intempestives.

– Enfin, selon le ministère de l’éducation nationale, les communes qui ont failli à leur mission alors que le seuil de déclenchement était atteint pourront toujours, pour cause de grèves importantes et simultanées, plaider le cas de force majeure et donc l’absence de faute, une exception qui est reconnue par le Conseil d’État (arrêt du 17 janvier 1986, Ville de Paris contre Duvinage).

b) Philosophie du dispositif

Le présent article appelle plusieurs observations de fond.

Ÿ Des garanties respectueuses du droit de grève et utiles pour les familles

– La déclaration préalable : un dispositif clef pour le service d’accueil à la constitutionnalité certaine

La déclaration préalable est l’une des dispositions clefs du présent projet de loi, ainsi que l’une des conditions du bon fonctionnement du service d’accueil des écoliers les jours de grève. En effet, cette obligation de déclaration préalable constitue, à ce jour, la meilleure des garanties disponibles pour obtenir une connaissance presque parfaite du taux de grévistes. Et c’est très précisément ce taux que les maires doivent connaître suffisamment à l’avance pour mobiliser des personnels en nombre adéquat pour organiser, les jours de grève, le service d’accueil.

C’est une évidence : on ne peut organiser le service d’accueil sans exiger des personnels dont l’absence va dimensionner l’étendue dudit service qu’ils accomplissent la formalité de la déclaration préalable. Cette obligation constitue donc l’instrument juridique idoine pour s’assurer de la qualité de la prestation offerte par le service d’accueil.

Or la déclaration préalable ne s’avère pas seulement un outil efficace : elle présente aussi l’avantage de ne soulever aucune difficulté d’ordre constitutionnel. En effet, comme le souligne de rapport de la « Commission Mandelkern », elle ne porte qu’une atteinte « extrêmement faible au droit de grève dont l’exercice demeure entièrement libre » :

– La déclaration préalable « ne constitue, à l’évidence, en rien une demande d’autorisation directe ou indirecte : elle n’est qu’une information donnée par le salarié ». Ainsi, la comparaison entre cette formalité et le régime de l’autorisation, restrictif du point de vue des libertés publiques, n’a aucun fondement. D’ailleurs, le régime de la déclaration préalable a été largement utilisé par le droit de la presse, des manifestations et des associations, ce qui prouve son lien ancien, datant de la Troisième République, et pour ainsi dire naturel, avec la protection de ces libertés .

– La déclaration préalable impose aux personnels visés une restriction au regard de la situation actuelle, mais elle ne remet pas en cause le droit de grève, ni aucun autre droit fondamental. Elle ne fait qu’une chose : elle « se borne à édicter une condition préalable à l’exercice de ce droit ».

Si des doutes ont pu être exprimés sur la constitutionnalité de l’obligation de déclaration préalable lors de l’examen du projet de loi sur le dialogue social et la continuité du service public dans les transports terrestres réguliers de voyageurs, ils ont dû être définitivement levés par la décision du Conseil constitutionnel du 16 août 2007, qui a jugé conforme à notre Constitution un tel dispositif. Selon cette décision, en effet, « contrairement à ce qu’affirment les requérants, l’obligation de déclaration ne s’oppose pas à ce qu’un salarié rejoigne un mouvement de grève déjà engagé et auquel il n’avait pas initialement l’intention de participer, ou auquel il aurait cessé de participer, dès lors qu’il en informe son employeur au plus tard quarante-huit heures à l’avance ; que l’aménagement ainsi apporté aux conditions d’exercice du droit de grève n’est pas disproportionné au regard de l’objectif poursuivi par le législateur… »

Enfin, même si cela n’est pas précisé par le présent projet de loi, il va de soi que les personnels qui n’auront pas informé l’autorité administrative de leur intention de faire grève seront passibles des sanctions disciplinaires prévues par les règles du droit de la fonction publique. Celles-ci sont encadrées par la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant diverses dispositions statutaires relatives à la fonction publique d’État et leur mise en œuvre est placée sous le contrôle du juge administratif.

– L’obligation d’instituer un service d’accueil : un instrument au service des familles

Selon le ministère de l’éducation nationale, le présent article donne aux familles un moyen de pression efficace pour exiger que le service d’accueil soit mis en place les jours de grèves, tout en leur garantissant le paiement d’une indemnité en cas de défaillance de la collectivité.

En effet, tout parent dont l’enfant n’aura pas été accueilli les jours de grève pourra, sauf cas de force majeure, mettre en jeu la responsabilité de la collectivité défaillante. Selon de ministère de l’éducation nationale, il le fera en exerçant une action indemnitaire et en faisant valoir le préjudice qu’aura constitué pour lui le fait de prendre un jour de congé « forcé » ou de financer une solution de garde alternative.

Cependant, pour être réellement dissuasif à l’égard des communes qui voudraient se soustraire à la nouvelle compétence instituée par la loi, un système de sanction reposant sur le recours au juge administratif ne peut être opérationnel que si ce dernier reconnaît effectivement la réalité du préjudice financier subi par la famille.

Quant à la collectivité défaillante, il s’agira de la commune dès lors que 10 % (ou 20 %, dans la rédaction issue des travaux du Sénat) des personnels exerçant des fonctions d’enseignement dans les écoles de la commune (ou dans une école, dans la rédaction des travaux issue du Sénat) ont déclaré leur intention de participer à la grève. À l’inverse, la responsabilité de l’État pourra être engagée en cas de grève de faible ampleur ou pour toute autre cause d’absence de l’enseignant.

– Le seuil de déclenchement : un mode de calcul à parfaire pour tenir compte de la réalité communale

Le dispositif proposé par le gouvernement se veut équilibré. Cependant, de nombreux maires, notamment ceux des petites communes, s’inquiètent d’être encore trop souvent sollicités si le seuil de déclenchement de 10 % était retenu.

Ces inquiétudes sont compréhensibles au regard du nombre important de communes de petite taille possédant une école. À cet égard, les statistiques du ministère de l’éducation nationale indiquent qu’à la rentrée 2006, dans le secteur public, 5 682 écoles de la France métropolitaine et des départements d’outre-mer sont à classe unique, soit 11,3 % de l’ensemble. Plus des deux tiers des écoles publiques, dont 81 % des écoles maternelles et 60 % des écoles élémentaires, ont entre une et cinq classes.

C’est pourquoi, au vu du maillage communal de la France, qui doit être pris en compte par le législateur, il convient de faire preuve d’une extrême prudence dans la fixation du seuil de déclenchement afin de ne pas pousser les maires des zones rurales à la faute …. Dans le même temps, il convient de ne pas fixer un seuil trop élevé qui reviendrait à priver de nombreuses familles du service d’accueil.

Compte tenu de ces observations, on peut considérer que le seuil de 10 % figurant dans le projet de loi initial n’est pas entièrement satisfaisant, car il est trop bas. Comme cela a été déjà indiqué, il résulte d’une observation du ministère sur l’ampleur des mouvements de grève, qui l’a conduit à distinguer ceux qui mobilisent respectivement moins de 5 % et près de 20 % des enseignants et à proposer, sur la base de ce constat, d’établir une ligne de partage entre ces deux types de grève avec un seuil de 10 %. Or, précisément, la fixation du seuil se voulant avant tout pragmatique, pourquoi s’arrêter en si bon chemin en proposant une solution médiane alors que le problème de l’accueil se pose avec le plus d’acuité lors des grèves de grande ampleur, qui mobilisent 20 % d’enseignants ?

Le choix d’un seuil plus élevé conduirait ainsi à imposer aux communes une obligation davantage fondée sur une logique « gagnant-gagnant » : les familles ne seraient pas privées du service d’accueil, tandis que les communes ne devraient le mettre en place que si la liberté de travailler des parents serait, sur le plan national, effectivement compromise du fait de l’ampleur de la grève.

4. Les modifications apportées par le Sénat

Le Sénat a apporté deux modifications de fond au présent article, portant respectivement sur les modalités de la déclaration préalable et sur le seuil de déclenchement du service d’accueil.

Ÿ Une déclaration préalable aménagée

Le Sénat a modifié le délai minimal de 48 heures devant être respecté par l’enseignant soumis à l’obligation de déclaration préalable. Il l’a allongé, en prévoyant que les 48 heures devront comprendre au moins un jour ouvré, afin de donner un peu plus de temps aux communes pour s’organiser. La nouvelle disposition permet, en réalité, de tenir compte du week-end : qu’adviendrait-il en effet si le délai de 48 heures correspondait au samedi et au dimanche ? Même si les grèves importantes d’enseignants se déroulent plutôt le mardi ou le jeudi, il convient de prévoir un dispositif qui permette aux communes de disposer d’un délai suffisant pour mobiliser le personnel d’accueil si la grève a lieu le lundi ou le vendredi.

Par ailleurs, le Sénat a adopté un nouvel alinéa au présent article prévoyant qu’au cours de la période de négociation préalable, l’État et la ou les organisations syndicales ayant procédé à la notification des motifs de la grève peuvent convenir des modalités selon lesquelles les déclarations individuelles préalables sont portées à la connaissance de l’autorité administrative (alinéa 3). Cet aménagement du dispositif de déclaration préalable a été proposé par la commission des affaires culturelles, après que la Confédération française démocratique du travail a fait part au rapporteur du sénat, M. Philippe Richert, de son souhait de voir évoluer le texte sur ce point.

L’avantage d’un tel dispositif est d’être souple et de permettre la recherche de solutions de transmission pragmatiques, adaptées à la réalité du monde scolaire et des situations locales. Selon l’exemple cité par le rapporteur du Sénat, la déclaration pourrait être transmise par l’enseignant au directeur de l’école, à charge pour ce dernier de communiquer le nombre de personnes déclarant leur intention de faire grève 48 heures au plus tard avant le début effectif de la grève.

Le nouvel alinéa précise qu’en tout état de cause, l’autorité administrative doit être informée, au plus tard 48 heures avant le début de la grève, du nombre, calculé école par école, d’enseignants ayant transmis cette déclaration.

Ÿ Un seuil de déclenchement modifié

Le Sénat a souhaité retenir un seuil de déclenchement de la mise en place du service d’accueil plus adapté à la diversité des situations communales. Il a en effet critiqué le seuil initialement proposé par le gouvernement au motif que celui-ci serait trop peu contraignant pour les grandes agglomérations et trop contraignant pour les communes rurales. D’une part, un seuil déterminé au niveau de la commune peut avoir pour effet que, dans le cas des grandes villes, celui-ci ne soit pas dépassé par l’ensemble des écoles prises globalement, alors même qu’il le serait dans plusieurs écoles considérées individuellement. D’autre part, un seuil de 10 % de grévistes obligerait les communes rurales à mettre en place le dispositif d’accueil dès lors qu’un seul enseignant serait en grève…

Ce double constat a conduit le Sénat à modifier le présent article pour porter le seuil de déclenchement à 20 % d’enseignants déclarant leur intention de faire grève, ce pourcentage étant apprécié école par école (alinéa 5). Ainsi redéfini, ce seuil aura pour effet d’exempter de la mise en place du service d’accueil les écoles à six, sept, huit, neuf et dix classes où un seul enseignant fera part de son intention de faire grève : dans toutes ces écoles, la commune ne devra instituer un service d’accueil qu’à partir du moment où deux enseignants feront une déclaration préalable.

Par ailleurs, le Sénat a adopté une rédaction du présent article tendant à préciser que c’est la commune et non le maire qui met en place le service d’accueil. À partir du moment où cette collectivité se voit confier une nouvelle compétence, il est logique de prévoir que c’est elle qui est chargée de mettre place le service d’accueil. Le professeur Yves Gaudemet a d’ailleurs estimé, lors de son audition, que l’organisation de ce service devra faire l’objet d’une délibération du conseil municipal.

*

La commission a examiné un amendement de la rapporteure pour avis tendant à obliger les communes à mettre en place un service d’accueil lorsque le pourcentage d’enseignants déclarant leur intention de faire grève est supérieur à 20 %, et non plus égal ou supérieur à 20 %.

La rapporteure pour avis a précisé que cette rédaction présente deux avantages : d’une part, dans le cas des 6 425 écoles comprenant cinq classes, lorsqu’un seul enseignant entend faire grève, le service d’accueil sera de facto assuré par la répartition des élèves entre les différentes sections, sans surcharger les enseignants non grévistes ni solliciter pour autant la commune ; d’autre part, ce chiffre permet de mieux tenir compte de la réalité des mouvements de grève, afin de proportionner le seuil de déclenchement du dispositif en fonction du caractère réellement perturbateur de ces mouvements.

La commission a adopté l’amendement.

Puis elle a donné un avis favorable à l’adoption de l’article 5 ainsi modifié.

Article 6

Garanties visant à assurer le respect du droit à la vie privée

Cet article a pour objet de prévoir des garanties propres à assurer aux enseignants que les informations issues de leurs déclarations d’intention de participation à la grève ne pourront être utilisées qu’à la seule fin d’organiser le service d’accueil et que cette utilisation sera soumise au respect du droit à la vie privée. Il prévoit d’insérer à cet effet un article L. 133-5 nouveau dans le code de l’éducation.

De telles garanties se justifient dans la mesure où les informations issues de la déclaration individuelle sont appelées à circuler entre les enseignants ayant l’intention de faire grève, l’inspecteur d’académie qui sera, en principe, l’autorité administrative recevant cette déclaration, et les maires qui sont informés, par cette dernière, du nombre d’enseignants exerçant dans leur commune et ayant déclaré leur intention de faire grève.

Dans ces conditions, il convient de prendre toutes les précautions nécessaires pour que la circulation de ces informations ne conduise pas à violer le secret professionnel auquel sont tenues, en application de l’article 226-13 du code pénal, toutes les personnes qui « en sont dépositaires soit par état ou par profession, soit en raison d’une fonction ou d’une mission temporaire ».

Les garanties proposées par le présent article s’inspirent de celles prévues par l’article 5 de la loi n° 2007-1224 du 21 août 2007. Elles sont au nombre de trois :

– Les informations issues de ces déclarations individuelles ne peuvent être utilisées que pour l’organisation du service durant la grève.

– Ces informations sont couvertes par le secret professionnel. Le droit de la fonction publique impose aux agents de l’État de respecter ce principe : l’article 23 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires de l’État dispose ainsi que « les fonctionnaires sont tenus au secret professionnel dans le cadre des règles instituées par le code pénal ». On observera qu’à cette obligation, l’article 26 de la loi du 13 juillet 1983 ajoute une obligation de discrétion professionnelle qui impose aux fonctionnaires, sous peine d’encourir une sanction disciplinaire, de s’abstenir de communiquer à des tiers, fonctionnaires ou non, n’ayant pas qualité pour en avoir connaissance, des renseignements acquis grâce à leurs fonctions.

– L’utilisation de ces informations à d’autres fins ou leur communication à toute personne autre que celles habilitées à en connaître est passible des peines prévues à l’article 226-13 du code pénal. Il s’agit de l’article prévoyant que la révélation d’une information à caractère secret par une personne qui en est dépositaire soit par état ou par profession, soit en raison d’une fonction ou d’une mission temporaire, est punie d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende.

Il y a lieu de noter que, dans sa décision du 16 août 2007 sur la loi sur le dialogue social et la continuité du service public des transports terrestres réguliers de voyageurs, le Conseil constitutionnel a considéré, après avoir énuméré ces trois garanties, que « l’obligation de déclaration individuelle s’accompagne de garanties propres à assurer, pour les salariés, le respect de leur droit à la vie privée ».

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La commission a donné un avis favorable à l’adoption de l’article 6 sans modification.

Article 7

Accueil dans les locaux scolaires

Cet article a pour objet de permettre à la commune d’accueillir les élèves, les jours de grève, dans les locaux des écoles maternelles et élémentaires, y compris lorsque ceux-ci continuent d’être utilisés pour les besoins de l’enseignement. Il insère à cet effet un article L. 133-6 nouveau dans le code de l’éducation.

La faculté ainsi proposée aux communes vient s’ajouter à deux autres possibilités d’utilisation, par ces collectivités, des locaux scolaires.

D’une part, en vertu de l’article L. 212-15 du code de l’éducation, le maire, sous sa responsabilité et après avis du conseil d’administration de l’école, peut utiliser les locaux et équipement scolaires à des fins d’organisation d’activités à caractère culturel, sportif, social ou socio-éducatif pendant les heures ou les périodes au cours desquelles ils ne sont pas utilisés pour les besoins de la formation initiale et continue.

D’autre part, en vertu de l’article L. 216-1 du code, les communes, tout comme les départements ou les régions, peuvent organiser, dans les établissements scolaires, pendant leurs heures d’ouverture et avec l’accord des conseils et des autorités responsables de leur fonctionnement, des activités éducatives, sportives et culturelles complémentaires. Ces activités sont facultatives et ne peuvent se substituer ni porter atteinte aux activités d’enseignement fixées par l’État. Leur organisation est fixée par une convention.

De fait, le présent article permet d’offrir, sans la lier à une quelconque formalité, comme la conclusion d’une convention, une réelle souplesse d’organisation aux communes, qui ainsi ne seront pas obligées de se lancer, en cas de grève suivie des enseignants, dans une recherche de locaux disponibles qui peut être coûteuse en termes de temps et d’argent. Le Sénat l’a modifié pour préciser que la flexibilité proposée par ce dispositif ne peut être utilisée que pour la mise en œuvre du service d’accueil, ce qui permet de la distinguer plus clairement des autres possibilités d’utilisation des locaux scolaires par les collectivités territoriales prévues par le code de l’éducation.

*

La commission a examiné un amendement de Mme Sandrine Mazetier visant à rappeler que les locaux scolaires doivent être prioritairement utilisés pour des besoins scolaires.

Mme Sandrine Mazetier a craint que le nouveau droit d’accueil ne favorise le développement de la casuistique. Il convient de rappeler que les locaux scolaires doivent prioritairement servir à l’enseignement, car l’accueil ne sera pas seulement assuré par des enseignants. Des situations ingérables vont apparaître : en effet, un directeur d’école, auquel les textes ne confient aujourd’hui aucune autorité sur les professeurs des écoles, n’en aura pas davantage à l’égard des personnes qui seront amenées à assurer le service d’accueil. Le moment venu, comment pourra-t-on en pratique faire la différence entre les élèves relevant de ce service et ceux qui sont effectivement en classe ? Il faut protéger les personnels de l’Éducation nationale, le risque étant que les maires soient administrativement déchargés tout en demeurant pénalement responsables.

Relevant que dans les faits, de nombreux maires ont mis en place depuis trente ans, de tels services d’accueil, avec pragmatisme et dans le souci de faciliter la vie des familles, le président Pierre Méhaignerie a souhaité que le bon sens l’emporte dans cette discussion.

Faisant remarquer que l’Association des maires de France (AMF) avait exprimé des préoccupations à la lecture du projet de loi, Mme Sandrine Mazetier a observé que les amendements de M. Yvan Lachaud, et même certains des amendements de la rapporteure pour avis, traduisaient ces craintes.

Mme Françoise de Panafieu a établi une distinction entre deux types de maires : ceux qui s’efforcent d’aider les familles quoi qu’il arrive et ceux qui, comme à Paris, refusent d’ouvrir les écoles, un adjoint au maire s’étant même adressé aux familles en se contentant de leur enjoindre de se débrouiller.

M. Patrice Debray a déploré le sectarisme et le mépris qui s’étaient exprimés au regard de l’action de personnes qui ne souhaitent que rendre service aux familles.

S’estimant personnellement mise en cause, Mme Sandrine Mazetier a mis au défi qui que ce soit de trouver dans ses interventions des propos sectaires ou méprisants à l’égard des parents d’élèves.

M. Marcel Rogemont s’est indigné de ce qu’on oppose ainsi de façon simpliste « bons » et « mauvais » maires dans ce domaine : en recourant à une stigmatisation aussi scandaleuse de la position des députés socialistes et communistes, toute discussion deviendra vaine.

M. Christian Eckert a jugé qu’il ne revenait pas à la commission des affaires culturelles, familiales et sociales de se prononcer sur des affaires internes à la ville de Paris, d’autant que les électeurs se sont chargés de le faire eux-mêmes au printemps dernier. Le fonctionnement des structures périscolaires et des centres de loisirs sans hébergement (CLSH) est supervisé par les maires dans le respect de conditions très contraignantes, afin d’assurer la sécurité des élèves. Or ces règles ne sont pas reprises dans le projet de loi, de telle sorte que celui-ci pose de véritables questions en termes de sécurité. Il s’agit peut-être de détails techniques, mais chacun sait que le diable se niche dans les détails, d’autant que la bonne foi des maires n’est évidemment pas ici en cause.

M. Yvan Lachaud a estimé qu’il s’agit simplement de régler un problème, c’est-à-dire de permettre l’accueil des élèves quand il n’y a pas d’autre solution. C’est une simple question d’organisation, et non d’éthique.

Convenant que tous les commissaires adhèrent au principe rappelé par l’amendement, la rapporteure pour avis s’y est néanmoins déclarée défavorable, car il supprime la souplesse que le texte du projet de loi offre aux communes, et notamment aux plus petites d’entre elles, d’autant qu’il ne faut pas oublier que celles-ci sont propriétaires des locaux en question.

M. Patrick Roy a reconnu que certains adultes non enseignants sont actuellement déjà associés de façon bénévole à des actions d’accompagnement ou même de partage de compétences, mais ces interventions ne se font qu’à titre complémentaire, toujours en présence d’un enseignant : dans un tel cadre, les élèves sont donc placés sous sa responsabilité, aussi bien physique que pédagogique. Ne représentant que 2 à 3 % des absences des enseignants, la question des journées de grève apparaît en réalité comme un « gadget », et si l’État est contraint de chercher des solutions, c’est parce qu’il se révèle défaillant à assumer son obligation d’éducation. De fait, s’il n’avait pas failli de la sorte, il n’y aurait pas eu lieu de légiférer.

La commission a rejeté l’amendement, puis a a donné un avis favorable à l’adoption de l’article 7 sans modification.

Article 7 bis

Établissement d’une liste des personnes susceptibles de participer
à l’organisation du service d’accueil

Constatant que le projet de loi ne comporte aucune disposition relative aux qualifications des personnes qu’une commune pourrait « mobiliser » pour assurer le service d’accueil, le Sénat a adopté, avec cet article additionnel, qui a reçu l’avis favorable du gouvernement, un ensemble de dispositions visant à rassurer les parents sur la qualité et la moralité du futur personnel d’encadrement des enfants.

Un double souci d’organisation d’un « droit de regard » sur la capacité d’encadrement des personnels d’accueil, et d’élaboration d’un dispositif qui ne soit pas exagérément contraignant pour les communes, a conduit le Sénat à adopter, sur la proposition de sa commission des affaires culturelles, un dispositif qui vise, pour l’essentiel, à permettre la constitution, par le maire, d’un « vivier » de personnes qualifiées pour assurer le service d’accueil.

L’alinéa 1 du présent article prévoit d’insérer un nouvel article L. 133-6-1 dans le code de l’éducation relatif à l’établissement de la liste des personnes susceptibles de participer à l’organisation du service d’accueil.

L’alinéa 2 prévoit que cette liste est établie par le maire. Cette disposition garantit aux familles qu’un droit de regard sera exercé sur les capacités des personnels susceptibles d’encadrer des enfants âgés de 2 à 11 ans.

Elle doit être saluée car les familles éprouvent le besoin – parfaitement naturel – d’être rassurées sur la qualité de cet encadrement. En effet, la mise en œuvre du service d’accueil ne doit pas conduire à recourir à des solutions fantaisistes – comme par exemple, le fait de mobiliser le cantonnier pour assurer la surveillance des enfants…

Par ailleurs, la disposition adoptée par le Sénat constitue une mesure de bonne gestion administrative qui ne peut qu’être approuvée. Elle aura pour effet d’inciter les maires à préparer, très en amont, la mise en place du service d’accueil. Ainsi, elle limite les risques d’improvisation qui sont non seulement craints par les familles, mais aussi par les maires eux-mêmes. Le rapporteur du Sénat, M. Philippe Richert, estime à cet égard qu’une circulaire pourrait indiquer les personnels privilégiés pour animer le service d’accueil, en évoquant les exemples des agents territoriaux spécialisés des écoles maternelles, des membres des associations familiales établies sur le territoire de la commune, des parents d’élèves, des étudiants, des adultes titulaires d’un brevet d’aptitude aux fonctions d’animateur de centres de vacances et de loisirs ou des enseignants retraités.

Au total, cette incitation à l’anticipation facilitera la mise en place du service d’accueil les jours de grève, en donnant, de surcroît, aux familles l’assurance, grâce au droit de regard exercé par le maire, que le personnel d’accueil sera de qualité. La confiance des familles dans le service d’accueil étant une condition absolue et nécessaire de sa généralisation, la précaution proposée par le Sénat complète utilement le projet de loi. D’ailleurs, certaines communes, comme Etampes, ont déjà mis en œuvre une telle liste.

L’alinéa 3 du présent article prévoit d’offrir une garantie supplémentaire aux familles en permettant à l’autorité académique, à laquelle la liste est transmise, de consulter le fichier judiciaire national automatisé des auteurs d’infraction sexuelle ou violente, afin de vérifier qu’aucune des personnes volontaires n’a d’antécédents de comportements dangereux pour les enfants accueillis. L’alinéa précise que cette vérification s’opère dans les conditions prévues au 3° de l’article 706-53-7 du code de procédure pénale.

Pour saisir la portée du dispositif adopté par le Sénat, on rappellera que le fichier judiciaire national automatisé des auteurs d’infraction sexuelle ou violente (FIJAIS) a été créé par la loi n° 2004-204 du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité.

Parmi les infractions entraînant une inscription automatique à ce fichier, on compte notamment le viol et le viol aggravé d’un mineur punis par les articles 222-23 à 222-26 du code pénal, l’agression ou la tentative d’agression sexuelle d’un mineur autre que le viol, lorsqu’elle est accompagnée de circonstances aggravantes mentionnées par les articles 228-28 à 228-30 du code pénal, la corruption d’un mineur lorsqu’elle est accompagnée de circonstances aggravantes punie par l’article 227-22 du code pénal et la diffusion d’une image ou la représentation pornographique d’un mineur avec la circonstance aggravante de l’utilisation d’un réseau électronique punie par l’article 227-33 du code pénal.

Le 3° de l’article L. 706-53-7 du code de procédure pénale autorise les préfets et les administrations d’État à consulter, par l’intermédiaire d’un système de télécommunication sécurisé, le fichier pour l’examen des demandes d’agrément concernant des activités ou professions impliquant un contact avec les mineurs.

Dans le but de protéger le droit au respect de la vie privée, l’alinéa 4 précise que lorsqu’une personne est écartée, suite à la vérification effectuée par l’autorité académique, celle-ci en informe le maire, sans divulguer pour autant les motifs de l’inscription de l’individu en cause sur le fichier.

*

La commission a examiné un amendement de la rapporteure pour avis destiné à modifier l’alinéa 2 de l’article 7 bis, consacré à l’établissement par le maire d’un « vivier » de personnes assurant le service d’accueil, en précisant que le maire doit s’assurer que ces personnes possèdent les qualités requises pour encadrer des enfants.

La rapporteure pour avis a indiqué que cet amendement apporte une réponse à de nombreuses interrogations formulées notamment par les familles, ainsi que par certaines communes.

La commission a adopté l’amendement.

En conséquence, deux amendements de Mme Sandrine Mazetier tendant à déterminer les qualifications des personnes assurant l’accueil des enfants et à préciser que l’encadrement des enfants par le personnel communal doit être compatible avec leurs missions statutaires, sont devenus sans objet.

La commission a examiné un amendement de Mme Sandrine Mazetier tendant à préciser que sont applicables aux situations d’accueil visées par le projet de loi le taux et les normes d’encadrement fixés selon la réglementation aujourd’hui en vigueur.

Mme Sandrine Mazetier a souligné que cet amendement répond à une préoccupation des parents d’élèves. L’organisation de l’accueil ne prend certes pas place dans le cadre strictement éducatif, mais dans un cadre périscolaire. Pour autant, le respect d’un certain nombre de normes est une nécessité : il n’est pas imaginable de confier des classes de 25 ou 30 élèves à des personnes dont on ne connaît pas par avance, par exemple, le nombre. Aussi convient-il de se référer à la réglementation aujourd’hui en vigueur, établie selon les critères de l’administration de la jeunesse et des sports : à savoir un animateur pour douze enfants âgés de six ans et plus et un animateur pour huit enfants âgés de moins de six ans. Quiconque a déjà été présent à une fête d’anniversaire où sont invités une vingtaine d’enfants, qu’ils soient âgés de six ans mais aussi de huit ou dix ans, comprend aisément cette réalité.

La rapporteure pour avis a estimé que le projet de loi repose sur une inspiration différente : il s’agit de faire confiance au discernement des maires et de laisser à ces derniers le plus de liberté possible. C’est pourquoi les dispositions du code de l’action sociale et des familles n’ont pas à être appliquées au service d’accueil. Il faut bien garder à l’esprit que ce dispositif d’accueil ne sera mis en œuvre qu’à titre exceptionnel, quelques jours par an. Cette situation n’est pas comparable à celle qui prévaut dans les centres de loisirs ou à l’occasion de l’accueil d’un mineur bénéficiant d’un projet éducatif : encore une fois, il n’y a pas à proprement parler d’organisation d’une activité de nature éducative. Il est important de ne pas rigidifier le dispositif proposé.

M. Marcel Rogemont a évoqué la situation dans laquelle des personnes seraient conduites à prendre en charge dix ou vingt enfants de trois ans, voire plus jeunes. Il serait utile d’indiquer quelles normes sont applicables. Si un accident devait survenir, qui serait responsable ? La personne en charge de l’accueil ? Le maire ? S’en remettre au libre arbitre du maire déterminant les personnes chargées de l’accueil, c’est faire le choix d’un discernement qui répondra avant tout à l’urgence.

En réponse à M. Jean-Claude Mathis, M. Marcel Rogemont a estimé que la solution consistant à confier la garde des enfants aux agents territoriaux spécialisés des écoles maternelles (ATSEM) n’est pas crédible : en temps normal jamais un ATSEM ne prend seul en charge une classe entière.

La rapporteure pour avis a rappelé que la liste des personnes chargées de l’accueil sera établie très en amont. En outre, elle sera transmise à l’autorité académique afin de vérifier que ces personnes ne figurent pas au fichier judiciaire national automatisé des auteurs d’infraction sexuelle ou violente.

Suivant l’avis défavorable de la rapporteure pour avis, la commission a rejeté l’amendement.

La commission a examiné un amendement de Mme Sandrine Mazetier destiné à assurer l’information des parents par l’affichage en mairie de la liste des personnes susceptibles d’accueillir les élèves.

Mme Sandrine Mazetier a précisé que cette proposition reprend un dispositif figurant dans un amendement précédemment examiné. La liste des personnes susceptibles d’accueillir les élèves, telle qu’elle aura été établie par le maire, devra être affichée et consultable en mairie. En effet, mieux vaut prévenir que guérir. Il convient d’éviter d’éventuels drames.

La rapporteure pour avis a invité l’auteure de l’amendement à le retirer, compte tenu de la perspective du dépôt en vue de la discussion en séance publique d’un amendement informant les parents de la mise en place du service d’accueil par les communes 24 heures avant le début de la grève.

Mme Sandrine Mazetier ayant souhaité maintenir à ce stade cette initiative, la commission a rejeté l’amendement, conformément à l’avis défavorable de la rapporteure pour avis.

La commission a examiné un amendement de Mme Sandrine Mazetier destiné à assurer la transmission de la liste des personnes susceptibles d’accueillir les élèves au tribunal pour enfants de la juridiction dont dépend la commune.

Mme Sandrine Mazetier a fait valoir que cette initiative favorisera la prise en compte du fichier judiciaire national automatisé des auteurs d’infraction sexuelle ou violente.

La rapporteure pour avis a donné un avis défavorable à l’adoption de l’amendement, en rappelant que l’autorité académique peut déjà procéder à une telle vérification.

Suivant l’avis défavorable de la rapporteure pour avis, la commission a rejeté l’amendement.

La commission a examiné un amendement de Mme Sandrine Mazetier prévoyant la transmission de la liste sur laquelle figurent les personnes susceptibles de procéder à l’accueil des élèves aux services de santé publique dont dépend la commune.

Mme Sandrine Mazetier a expliqué que cette disposition est destinée à répondre à une préoccupation des parents. Aujourd’hui, les enseignants sont soumis à de nombreux contrôles, notamment en matière de santé. Dans un souci de parallélisme, il est naturel de prévoir que les personnes assurant l’accueil verront leurs aptitudes physiques et psychologiques à s’occuper d’enfants vérifiées ; par ailleurs il est important de pouvoir déceler toute pathologie liée à l’absorption et à la dépendance à l’alcool ou à toute substance dangereuse et illicite.

La rapporteure pour avis a rappelé que l’accueil ne sera organisé par les communes qu’occasionnellement et ne saurait être comparé à un service d’accueil régulier des enfants. En outre, de nombreuses personnes travaillant aujourd’hui en milieu scolaire ne sont pas soumises régulièrement à de tels contrôles.

M. Patrice Debray a estimé qu’il pourrait être important de procéder à certains contrôles, comme la détection de la tuberculose, au besoin auprès du médecin traitant des intéressés.

La rapporteure pour avis a considéré que le sujet, au demeurant essentiel, de la santé scolaire, doit faire l’objet d’une analyse plus globale, au-delà de la discussion de ce seul projet de loi. Il est vrai que, d’une manière générale, toute personne en contact avec des enfants devrait faire l’objet de contrôles médicaux.

Mme Sandrine Mazetier a rappelé que la responsabilité pénale du maire subsistera pleinement, quand bien même l’accueil n’interviendra qu’à titre exceptionnel. Or la consommation de substances psychotropes ou d’alcool est une réalité en France. Ce n’est pas parce qu’on est parent d’élèves qu’on ne consomme pas de telles substances. L’objectif de cet amendement est de protéger les maires envers lesquels les parents ne manqueront pas de se retourner en cas de comportement violent ou d’agression.

M. Georges Colombier, président, a estimé que le débat pourra être poursuivi en séance publique, compte tenu, notamment, des éléments qu’apportera à cette occasion le gouvernement.

M. Patrice Debray a insisté sur le fait qu’un certificat d’aptitude devrait être établi par le médecin traitant.

M. Georges Colombier, président, a répondu que des amendements pourront être déposés en vue de la discussion en séance publique.

M. Jean-Claude Mathis a considéré que de tels certificats d’aptitude devront en tout état de cause ne concerner que le champ sanitaire.

Suivant l’avis défavorable de la rapporteure pour avis, la commission a rejeté l’amendement.

La commission a adopté un amendement de la rapporteure pour avis tendant à prévoir que les personnes acceptant d’assurer le service d’accueil doivent être informées, avant que la liste des participants au dispositif mis en place par les communes ne soit transmise à l’autorité académique, de la procédure de consultation du fichier judiciaire national automatisé des auteurs d’infraction sexuelle ou violente.

La commission a examiné un amendement de la rapporteure pour avis précisant que la liste sur laquelle figurent les personnes susceptibles d’accueillir les élèves est transmise pour information aux représentants des parents d’élèves élus au conseil d’école.

La rapporteure pour avis a précisé que cet amendement prévoit également que les personnes concernées sont préalablement informées de la transmission de cette liste au conseil d’école.

La commission a adopté l’amendement.

La commission a donné un avis favorable à l’adoption de l’article 7 bis ainsi modifié.

Article 8

Contribution financière versée par l’État aux communes

Cet article a pour objet de prévoir le versement, par l’État, d’une contribution aux communes ayant mis en place le service d’accueil afin de compenser les dépenses exposées pour la rémunération des personnes chargées de l’accueil des élèves.

1. La nécessité d’un financement de l’État

De nombreuses communes s’inquiètent du coût que représentera, pour elles, la mise en place du service d’accueil. Cette inquiétude n’est pas fondée pour quatre raisons.

Premièrement, les communes pouvant utiliser les locaux scolaires pour y organiser le service d’accueil, on peut parier que les dépenses les plus lourdes auxquelles elles s’exposeront seront liées à l’emploi des personnes chargées d’animer ce dispositif.

Deuxièmement, si ces dépenses de personnel peuvent, pour les communes de petite taille au budget nécessairement limité et les communes de grande taille scolarisant beaucoup d’élèves, représenter un coût important, on rappellera qu’il ne s’agit pas d’une dépense pérenne. En effet, les communes ne s’exposent à une telle dépense que si les conditions posées par l’article 5 sont réunies, c’est-à-dire si le seuil de déclenchement est atteint. Autrement dit, les jours de grève qui donneront lieu à une telle dépense ne seront pas nombreux : ils se compteront généralement sur les doigts d’une main.

Troisièmement, la dépense par personne affectée au service d’accueil sera limitée dans son montant, puisque la durée de l’accueil est elle-même limitée. L’article 4 du présent projet de loi prévoyant expressément que l’accueil est mis en place pendant le temps scolaire, cela signifie que la rémunération du personnel affecté au dispositif d’accueil couvrira, en principe 6 heures de travail, pas une de plus.

Enfin, et c’est le point le plus important, l’État est dans l’obligation d’assurer le financement de telles dépenses. Ainsi que cela a déjà été rappelé, l’article 72-2 de la Constitution, introduit par la loi constitutionnelle n° 2003-276 du 28 mars 2003, dispose que « toute création ou extension de compétences ayant pour conséquence d’augmenter les dépenses des collectivités territoriales est accompagnée de ressources déterminées par la loi ». En l’espèce, l’État n’a pas le choix.

On observera d’ailleurs que, dans le cas du service minimum d’accueil volontaire, l’État a pris ses responsabilités. C’est ainsi que la circulaire du 8 janvier 2008 relative au SMA indique que ce dispositif « sera financé par l’éducation nationale», à partir des retenues sur salaire des enseignants grévistes. Ainsi, lorsque le service minimum d’accueil a été expérimenté en janvier et mai derniers, les communes ont reçu un financement s’élevant à 90 euros par groupe de un à quinze élèves, ce qui correspond, selon le ministre de l’éducation nationale, au montant moyen de la rémunération journalière d’un enseignant du premier degré.

Selon le ministère de l’éducation nationale, pour ce qui est de la journée de grève du 24 janvier 2008, le constat réalisé à l’issue de la paie de mai 2008 fait apparaître un montant de retenues pour grève de 21 millions d’euros pour la mission enseignement scolaire, qui couvre le premier et le second degré, et de 8,2 millions d’euros pour le seul 1er degré. Le montant des retenues pour service non fait au titre du mois de mai 2008 n’est pas encore disponible, car la retenue sur salaire ne s’effectue pas au cours du mois où s’est produit le mouvement social, mais au cours des mois suivants en raison du délai de traitement de l’information. Quant aux remboursements versés aux communes, la journée de grève du 24 janvier 2008 a donné lieu à des versements d’un montant de 186 300 euros à la date du 3 juin 2008.

2. Le dispositif proposé par le gouvernement

L’alinéa 1 du présent article prévoit d’insérer un article L. 133-7 nouveau dans le code de l’éducation précisant les modalités de versement de la contribution financière de l’État aux communes ayant mis en place le service d’accueil.

L’alinéa 2 prévoit que l’État verse une contribution financière à chaque commune qui a mis en place le service d’accueil. Il précise en outre que ce versement intervient au titre des dépenses exposées pour la rémunération des personnes que les communes ont chargées de l’accueil des enfants scolarisés.

En proposant que la prise en charge du service d’accueil donne droit à une contribution financière, le présent article donne un signe clair de la volonté de l’État de s’acquitter de l’obligation posée par l’article 72-2 de la Constitution.

Par ailleurs, le devoir de solidarité financière de l’État doit s’exercer de manière responsable :

– Le versement de la contribution n’intervient que si la commune a mis en place le service d’accueil. L’effort de solidarité déployé par l’État pour permettre aux communes de faire face à cette nouvelle dépense est nécessairement lié à l’accomplissement, par celles-ci, de leur nouvelle mission. La responsabilité de l’État est en effet inséparable de la loyauté des communes.

– Cette contribution est strictement liée aux dépenses effectuées pour rémunérer les personnes chargées de l’accueil. En effet, à partir du moment où les communes auront la possibilité d’organiser le service d’accueil au sein des locaux scolaires, comme le prévoit l’article 7 du présent projet de loi, il ne serait pas équitable d’exiger de l’État qu’il apporte une contribution financière allant au-delà des dépenses de personnel.

L’alinéa 3 du présent article prévoit, d’une part, que cette contribution est fonction du nombre d’élèves accueillis et, d’autre part, que le montant et les modalités de versement celle-ci sont précisés par décret.

La disposition précisant que la contribution tient compte du nombre d’élèves accueillis repose sur un principe d’équité évident. L’équité impose en effet de rendre la contribution financière de l’État « proportionnelle » : plus les communes auront dépensé, parce qu’elles auront accueilli beaucoup d’enfants, cas par exemple des grandes villes, plus elles devront être aidées.

Le principe de proportionnalité a d’ailleurs été retenu par la circulaire du 8 janvier 2008 instituant le service minimum d’accueil dans les communes volontaires. Rappelons en effet que, selon cette circulaire, le montant de la participation de l’État varie en fonction du nombre d’enfants accueillis, ce montant étant de 90 euros pour 1 à 15 élèves accueillis et, au-delà, de 90 euros par tranche de 15 élèves accueillis.

Par ailleurs, le choix de renvoyer à un décret le montant et les modalités de versement de la contribution résulte d’une considération de bon sens. En effet, il serait absurde de vouloir figer dans une loi le montant d’une contribution qui évoluera en fonction de l’évolution du coût des personnels mobilisés pour la mise en œuvre du service d’accueil. Il est donc logique de proposer de confier au pouvoir réglementaire le soin d’adapter rapidement le montant de la contribution à ces évolutions.

Cependant, certains observateurs s’inquiètent de ce que ce choix pourrait contrevenir aux dispositions de l’article 72-2 de la Constitution qui prévoient expressément que les ressources attribuées aux collectivités territoriales à la suite d’une création de compétence doivent être déterminées par la loi.

Selon le ministère de l’éducation nationale, la jurisprudence du Conseil constitutionnel sur la nature exacte des obligations qui pèsent, en vertu de cet article, sur le législateur ne conduit pas à condamner le renvoi à un décret proposé par le projet de loi. En effet, dans la décision n° 2004-509 du 13 janvier 2005, le Conseil constitutionnel a précisé qu’en application de l’article 72-2 de la Constitution, « il n’est fait obligation au législateur que d’accompagner ces créations ou extensions de compétences de ressources dont il lui appartient d’apprécier le niveau, sans toutefois dénaturer le principe de libre administration des collectivités territoriales ».

D’après le ministère de l’éducation nationale, cette décision n’implique pas que le législateur doive fixer lui-même le montant de la ressource, surtout si celui-ci est appelé à évoluer avec le temps. Comme le souligne le Conseil constitutionnel, le législateur en « apprécie » seulement le niveau. Or, en l’espèce, le ministère de l’éducation nationale considère que le projet de loi s’acquitte de cette obligation dès lors qu’il dispose que la contribution est fonction du nombre d’élèves accueillis.

3. Les modifications apportées par le Sénat

Le Sénat ayant considéré que la rédaction du présent article ne suffisait pas à écarter tout risque d’inconstitutionnalité liée à l’absence de toute précision relative au montant de la contribution financière de l’État, il l’a modifiée en substituant au terme « contribution » le terme « compensation ».

Le Sénat a en effet considéré que la rédaction initiale de l’article laissait au gouvernement toute latitude pour adopter un décret prévoyant le versement d’une contribution forfaitaire de l’État qui ne couvrirait pas la réalité des dépenses de personnel exposées par les communes. En pratique, d’après le rapporteur de la commission des affaires culturelles du Sénat, M. Philippe Richert, cette rédaction pourrait autoriser le gouvernement à adopter un forfait qui ne couvrirait, en moyenne, que 50 %, au lieu de 75 % ou de 100 %, des dépenses effectivement engagées pour la rémunération des personnels animant le service d’accueil. Or, selon ce dernier, le choix d’un forfait ne couvrant que la moitié des dépenses engagées pourrait être inconstitutionnel au regard du principe de compensation induit par l’article 72-2 de la Constitution.

Dans ces conditions, le Sénat, pour des raisons de prudence, a préféré inscrire dans le projet de loi, de manière claire, la relation de proportionnalité qui doit s’établir entre le montant des dépenses des communes et les versements de l’État. C’est ce raisonnement qui l’a conduit à préférer l’utilisation du terme « compensation », terme qui permet de garantir une corrélation, plus à même de satisfaire l’article 72-2 de la Constitution, entre le niveau des dépenses communales et le financement de l’État.

Par ailleurs, le Sénat a introduit deux nouveaux alinéas dans le présent article, qui constituent autant de garanties financières pour les petites communes. Le premier résulte d’un amendement déposé par le gouvernement qui est le fruit d’une concertation avec les commissions des affaires culturelles et des finances du sénat et l’Association des élus de montagne. Le second résulte d’un amendement déposé par le Groupe socialiste, accepté par la commission des affaires culturelles et le gouvernement.

– Le décret prévu par le présent article devra fixer le montant minimal de la compensation versée à toute commune ayant mis en place le service d’accueil, ainsi que l’indexation de cette dernière (alinéa 4). Cette disposition, qui vise tout particulièrement les communes rurales, instaure de fait un forfait minimal qui sera versé, quel que soit le nombre d’enfants accueillis, à toute commune ayant participé au dispositif d’accueil. Le gouvernement envisage de fixer le montant en question à 200 euros par jour. Par ailleurs, le fait de prévoir que le montant de cette compensation devra être indexé permettra de « calquer » son évolution en fonction de coûts réels induits par la rémunération des personnels d’accueil.

– Le versement de la compensation devra intervenir au maximum 35 jours après notification par le maire à l’autorité académique ou à son représentant des éléments nécessaires au calcul de cette compensation (alinéa 5). Cette disposition permettra de faire figurer dans la future loi l’engagement de l’État à procéder à un remboursement rapide des communes qui est inscrit dans la circulaire du 8 janvier 2008 sur le service minimum d’accueil volontaire.

La commission a examiné un amendement de Mme Sandrine Mazetier destiné à préciser que la compensation versée par l’Etat aux communes est fonction des frais réellement engagés par les communes.

Mme Sandrine Mazetier a souligné l’absence d’une telle précision dans le projet de loi. En outre, on évoque souvent la compensation de la rémunération des personnes chargées de l’accueil, mais non les charges supplémentaires qui devront être assumées par les communes : ces charges pourront être liées à l’établissement des listes, aux vérifications diverses, mais aussi aux frais de justice éventuellement engagés à la suite de la mise en cause de la responsabilité des maires.

La rapporteure pour avis a objecté qu’en pratique une telle compensation sera difficile à mettre en œuvre, compte tenu des surcoûts qui ne manqueraient pas de s’ensuivre. Par ailleurs, à l’occasion des débats qui ont eu lieu au Sénat, le gouvernement a indiqué qu’une somme forfaitaire de 200 euros versée à toute commune ayant mis en place le service d’accueil serait prévue. De plus, il faut savoir qu’aujourd’hui un enseignant du premier degré perçoit en moyenne 90 euros par jour et qu’à cet égard le gouvernement semble penser que l’institution d’un forfait de 110 euros par groupe de 15 élèves accueillis pourrait constituer une piste intéressante.

Suivant l’avis défavorable de la rapporteure pour avis, la commission a rejeté l’amendement.

La commission a donné un avis favorable à l’adoption de l’article 8 ainsi modifié.

Après l’article 8

La commission a examiné deux amendements présentés par Mme Sandrine Mazetier relatifs au calcul des contributions des communes aux dépenses obligatoires concernant les classes des écoles privées sous contrat d’association prévu par l’article 89 de la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales, modifié par l’article 89 de la loi n° 2005-380 du 23 avril 2005 d'orientation et de programme pour l'avenir de l'école.

Mme Sandrine Mazetier a rappelé qu’il s’agissait d’un débat ancien, l’article 89 ayant suscité de nombreuses polémiques. Comme le projet examiné crée de nouvelles obligations pour les communes en matière scolaire, les deux amendements visent pour le premier à supprimer les dispositions de l’article 89, pour le second à les aménager.

La rapporteure pour avis a jugé ces amendements hors sujet. En effet, en prévoyant la participation des communes aux dépenses de fonctionnement des écoles privées sous contrat d’association, la loi Debré en 1959 a consacré le principe de parité entre enseignement public et privé.

Suivant l’avis défavorable de la rapporteure, la commission a rejeté les deux amendements.

Article 8 bis

Transfert à l’État de la responsabilité administrative
des communes lors de la mise en place du service d’accueil

Cet article additionnel a été adopté par le Sénat sur la proposition de sa commission des affaires culturelles. Il tend à substituer la responsabilité administrative de l’État à celle des communes à l’occasion d’un dommage subi ou causé par un élève dans le cadre du service d’accueil.

1. Les motivations ayant conduit à l’adoption du présent article

Le rapport de la commission des affaires culturelles du Sénat considère, à juste titre, que la création du service d’accueil les jours de grève « conduira mécaniquement à accroître le risque judiciaire qui pèsera sur les communes », évoquant à cet égard une « démultiplication du risque judiciaire » (31).

D’ailleurs, les communes craignent de s’exposer à des recours à répétition, dès lors que leur responsabilité pourra être engagée en cas d’accident ou de faute commise lors de la surveillance ou de l’encadrement des élèves.

Avant de présenter la solution envisagée par le gouvernement avant le dépôt du présent projet de loi et le dispositif proposé par le Sénat, les différents régimes de responsabilités en vigueur à l’école seront rappelés.

a) La situation actuelle

Ÿ Les responsabilités en matière de surveillance et de sécurité des élèves

Les responsabilités en matière de surveillance et la sécurité des élèves sont clairement définies.

En ce qui concerne la surveillance des élèves, le directeur de l’école est, comme on l’a vu, chargé de l’organiser, conformément à l’article 2 du décret n° 89-122 du 24 février 1989.

Le champ de l’obligation de surveillance est défini par l’article D. 321-12 du code de l’éducation, aux termes duquel « la surveillance des élèves durant les heures d’activité scolaire doit être continue et leur sécurité doit être constamment assurée en tenant compte de l’état de la distribution des locaux et du matériel scolaires et de la nature des activités proposées. L’accueil des élèves est assuré dix minutes avant l’entrée en classe. Le service de surveillance à l’accueil et à la sortie des classes, ainsi que pendant les récréations, est réparti entre les maîtres en conseil des maîtres de l’école ».

Ainsi, durant les heures d’activité scolaire, la surveillance des élèves est entièrement placée sous la responsabilité de l’État, à travers le directeur de l’école, qui est un enseignant, fonctionnaire de l’État.

Quant aux personnels communaux en service dans les écoles maternelles, c’est-à-dire les agents territoriaux spécialisés dans les écoles maternelles ou ATSEM, ils sont placés, pendant leur service dans les locaux scolaires, sous l’autorité des directeurs d’école, conformément aux dispositions de l’article 2 du décret de 1989.

En revanche, les plages horaires réservées à la restauration sont exclues des périodes pendant lesquelles la surveillance des élèves est placée sous la responsabilité de l’État. Un dommage subi par un élève au cours du service de restauration entraîne donc la responsabilité de la commune, sauf si des enseignants participaient à la surveillance : dans ce cas de figure, une faute de la part de ces personnels aurait pour conséquence d’engager la responsabilité de l’État sur le fondement de l’article L. 911-4 du code de l’éducation.

En ce qui concerne les questions de sécurité, la commune, en tant que propriétaire des locaux de l’école, en charge de leur équipement et fonctionnement, est responsable des dommages pouvant résultat de l’état des bâtiments et des équipements.

Ÿ Les régimes de responsabilité en cas d’accident

En cas d’accident dans une école, plusieurs régimes de responsabilité peuvent être mis en œuvre.

Les régimes de responsabilité en cas d’accident dans les écoles
(extraits du « vade-mecum du directeur d’école », édité en 2006 par la direction des affaires juridiques et la direction générale de l’enseignement scolaire du ministère de l’éducation nationale)

1) Régime de responsabilité civile

a) Faute dans l’organisation du service

Si l’accident trouve sa cause dans une faute dans l’organisation du service, peuvent être mises en cause soit la responsabilité de l’État, soit celle de la commune :

– si le défaut d’organisation intervient dans un domaine qui relève de la compétence du directeur, la responsabilité de l’État pourra être mise en cause devant le tribunal administratif ;

– si le défaut d’organisation intervient dans un domaine qui relève de la compétence de la commune, la responsabilité de celle-ci pourra être mise en cause devant le tribunal administratif.

b) Faute du personnel chargé de la surveillance ou de l’encadrement des élèves

Si l’accident trouve sa cause dans la faute d’un personnel chargé de la surveillance ou de l’encadrement des élèves, la responsabilité de l’État peut être mise en cause, dans les conditions prévues à l’article L.911-4 du code de l’éducation, devant le tribunal d’instance ou de grande instance, selon le montant de la demande indemnitaire.

Issu de la loi du 5 avril 1937, l’article L. 911-4 du code de l’éducation dispose que « dans tous les cas où la responsabilité des membres de l’enseignement public se trouve engagée à la suite ou à l’occasion d’un fait dommageable commis, soit par les élèves ou les étudiants qui leur sont confiés à raison de leurs fonctions, soit au détriment de ces élèves ou de ces étudiants dans les mêmes conditions, la responsabilité de l’État est substituée à celle desdits membres de l’enseignement qui ne peuvent jamais être mis en cause devant les tribunaux civils par la victime ou ses représentants ».

c) Défaut d’entretien ou vice de conception d’un ouvrage public

Si l’accident trouve sa cause dans un défaut d’entretien ou un vice de conception d’un ouvrage public, la personne publique responsable du dommage sera la collectivité propriétaire de l’ouvrage, c’est-à-dire, dans le cas des écoles, la commune, conformément aux dispositions de l’article L.212-4 du code de l’éducation. La responsabilité de la commune pourra être mise en cause devant le tribunal administratif.

d) Accident provoqué par un élève

Si l’accident est provoqué par un élève, la responsabilité des parents peut être mise en cause par la victime sur le fondement de l’article 1384 du code civil, même lorsque le fait dommageable a été commis dans le cadre scolaire. La Cour de cassation a jugé que la responsabilité des parents peut être recherchée, même si l’acte commis par leur enfant n’est pas fautif, dès lors qu’il est la cause directe du dommage.

En aucun cas, la responsabilité civile du directeur – ou d’un autre enseignant – ne peut être mise en cause directement devant les juridictions. Seul l’État peut, s’il estime qu’une faute personnelle détachable a été commise, exercer une action récursoire en demandant au personnel concerné de rembourser tout ou partie des sommes mises à la charge de l’État à la suite de cette faute.

2) La responsabilité pénale liée aux délits non intentionnels

La responsabilité pénale est purement personnelle, c’est-à-dire que toute personne reconnue coupable d’une infraction prévue et réprimée par le code pénal assumera seule la condamnation qui pourra être prononcée par le juge à son encontre.

Lorsque la personne mise en cause n’a pas directement créé le dommage mais a seulement créé ou contribué à créer la situation à l’origine du dommage, l’article 121-3 du code pénal, introduit par la loi n°2000-647 du 10 juillet 2000 tendant à préciser la définition des délits non intentionnels, dite « loi Fauchon », précise que la responsabilité pénale de l’intéressé n’est engagée que s’il a commis une faute entrant dans une des deux catégories suivantes :

– faute consistant dans la violation manifestement délibérée d’une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement ;

– faute caractérisée, exposant autrui à un risque d’une particulière gravité que l’auteur de la faute ne pouvait ignorer.

La faute pénale n’est donc établie que si trois éléments constitutifs sont réunis :

– il doit s’agir d’un comportement fautif caractérisé pouvant résulter d’un manquement à des obligations essentielles ou d’une accumulation d’imprudences ou de négligences successives ;

– la faute doit avoir exposé autrui à un risque d’une particulière gravité ;

– l’auteur de la faute doit avoir connaissance du risque ou, à tout le moins, se trouver dans l’impossibilité de l’ignorer au vu de ses constatations ou des informations dont il dispose, cette situation de risque appelant de sa part une action ou une abstention pertinentes.

En pratique, le juge apprécie la faute « in concreto », en utilisant un faisceau d’indices : le danger était-il prévisible, de quels moyens l’auteur du dommage disposait-il pour prévenir le danger, a-t-il pris les précautions raisonnables… ?

Le juge pénal peut écarter la faute pénale sans que la victime soit pour autant privée de la possibilité d’être indemnisée, lorsqu’une faute civile peut être établie.

Il convient de rappeler que si le juge considère qu’une faute civile a été commise par un membre de l’enseignement, que sa responsabilité pénale ait été retenue ou non, le juge condamnera l’État à verser les réparations civiles aux victimes, sur le fondement des dispositions de l’article L.911-4 du code de l’éducation.

Compte tenu de l’état actuel du droit, la responsabilité de la commune ou du maire pourrait être mise en jeu, à l’occasion d’un fait survenant dans le service d’accueil, sur trois terrains différents :

– la responsabilité administrative de la commune pourrait être engagée à raison d’un fait dommageable commis ou subi par l’un des élèves accueillis ;

– en cas d’accident, la responsabilité civile du maire pourrait être recherchée par la victime ou ses ayants droit dès lors que celui-ci a commis une faute personnelle ;

– enfin, la responsabilité pénale du maire liée aux délits non intentionnels pourrait être engagée.

b) La solution envisagée avant l’examen du projet de loi au Sénat

Lors de la séance de questions au Gouvernement de l’Assemblée nationale du 27 mai 2008, M. Xavier Darcos, ministre de l’éducation nationale, a indiqué qu’il apporterait, le moment venu, son soutien à un dispositif tendant à ce que la responsabilité administrative de l’État se substitue à celle de la commune organisant l’accueil des enfants.

En effet, il n’aurait pas été équitable de confier aux communes une compétence aussi sujette aux risques d’accidents que celle de l’accueil de jeunes enfants sans prévoir de mécanisme permettant de tempérer la mise en jeu de leur responsabilité. Si rien n’avait été prévu en la matière, on aurait abouti au paradoxe suivant : la grève de personnels de l’État – les enseignants –, aurait fait peser sur les communes une véritable épée de Damoclès judiciaire.

Or le service d’accueil ne marchera que si un climat de confiance est instauré pour faciliter sa mise en œuvre. Compte tenu de l’importance de la nouvelle compétence qui est mise à la charge des communes, il est nécessaire de donner aux communes une assurance contre le risque judiciaire lié à l’organisation et au fonctionnement du service d’accueil pour que celles-ci ne puissent prêter à l’État des arrière-pensées. Par conséquent, afin que les conditions d’un lancement réussi du service d’accueil soient réunies, le régime de responsabilité des communes doit être aménagé. Aménagé, mais non supprimé.

En effet, autant l’organisation d’un transfert de responsabilité administrative de la commune à l’État est légitime, car celui-ci est à l’origine de la création d’une compétence communale dont l’exercice est particulièrement délicat, autant la responsabilité de ces collectivités et de leurs maires en cas de faute personnelle ou pénale doit être maintenue dans son intégralité. Car si l’on doit attendre de l’État qu’il fasse un geste au regard de l’effort qu’il demande aux communes – et singulièrement aux plus petites d’entre elles –, on ne peut aller plus loin et dire aux parents des enfants accueillis par la commune et victimes d’une faute commise à cette occasion qu’ils ne disposeront d’aucune voie de recours leur permettant de rechercher la responsabilité des auteurs du dommage.

En outre, sur le plan pénal, le Conseil constitutionnel a jugé, dans une décision du 7 novembre 1989, que le principe d’égalité rend impossible toute exonération absolue de responsabilité : « la loi pénale ne saurait, dans l’édiction des crimes ou des délits, ainsi que des peines qui leur sont applicables, instituer au profit de quiconque une exonération de responsabilité à caractère absolu, sans par là même porter atteinte au principe d’égalité ».

2. Le dispositif adopté par le Sénat

L’alinéa 1 du présent article prévoit d’insérer dans le code de l’éducation un nouvel article L. 133-7-1 relatif à la substitution de la responsabilité administrative de l’État à celle de la commune qui met en place le service d’accueil.

L’alinéa 2 du présent article propose de préciser l’étendue de ce transfert de responsabilité.

– D’une part, il est précisé que la responsabilité de l’État se substitue à la celle de la commune dans tous les cas où celle-ci est engagée en raison d’un fait dommageable commis ou subi par un élève du fait de l’organisation ou du fonctionnement du service d’accueil. Cette disposition vise à couvrir tout le « champ » de la responsabilité administrative susceptible d’être mise en jeu à l’occasion de l’instauration du service d’accueil, en mettant ainsi les communes à l’abri de recours intempestifs : elle permet de couvrir tous les cas de figure d’engagement de la responsabilité administrative suite à un fait dommageable ; ce dernier est explicitement entendu comme englobant les dommages commis ou subis par un élève ; enfin, l’origine des dommages est définie de manière large pour couvrir ceux qui résulte aussi bien du fonctionnement que de l’organisation du service.

– D’autre part, il est précisé que l’État est subrogé aux droits de la commune, étant entendu qu’il lui revient d’exercer les actions récursoires qui lui sont ouvertes. Celles-ci désignent les recours que pourra déposer l’administration, qui aura été condamnée à verser des dommages et intérêts, à l’encontre des agents ou des personnels ayant également commis des fautes personnelles.

*

La commission a ensuite examiné un amendement présenté par Mme Sandrine Mazetier prévoyant l’irresponsabilité pénale dans l’exercice de ses fonctions d’un maire organisant un service d’accueil pour des faits survenus durant ce service.

Mme Sandrine Mazetier a souligné que cet amendement vise à protéger les maires, en l’absence de dispositions dans le projet de loi fixant les taux et les normes d’encadrement et compte tenu de la difficulté d’organiser le service d’accueil.

La rapporteure pour avis a observé que le souci exprimé par cet amendement est largement couvert par la substitution de la responsabilité administrative de l’État à celle de la commune, qui a lieu dans tous les cas où la responsabilité administrative se trouve engagée en raison d’un fait dommageable commis ou subi par un élève du fait de l’organisation ou du fonctionnement du service d’accueil. Aller plus loin en organisant une irresponsabilité pénale des maires serait inacceptable, le principe d’égalité interdisant à la loi pénale d’instituer une exonération de responsabilité pénale à caractère absolu, comme l’a rappelé une décision du Conseil constitutionnel du 7 novembre 1989.

Suivant l’avis défavorable de la rapporteure pour avis, la commission a rejeté l’amendement.

Puis elle a donné un avis favorable à l’adoption de l’article 8 bis sans modification.

Article 9

Attribution de l’organisation du service d’accueil aux établissements publics de coopération intercommunale

Cet article a pour objet de permettre à une commune de confier, par le biais d’une convention, l’organisation du service d’accueil soit à un établissement public de coopération intercommunale (EPCI), soit à une autre commune.

Il se propose ainsi d’encourager le recours, par une commune, aux moyens d’une autre collectivité consœur ou d’un EPCI, pour organiser, dans les meilleures conditions possibles, le service d’accueil. De toute évidence, cette souplesse est destinée, en priorité, aux communes des zones rurales. En leur offrant un cadre de juridique permettant de confier l’organisation du service d’accueil à l’échelon de proximité le plus pertinent et le mieux doté, le présent article aidera ces communes à s’acquitter de leur nouvelle obligation.

L’alinéa 1er prévoit d’insérer un article L. 133-8 nouveau dans le code de l’éducation relatif aux procédures de coopération entre les communes destinées à faciliter la mise en place du service d’accueil.

L’alinéa 2 permet aux communes de confier, par convention, l’organisation de la mise en place d’un service d’accueil à une autre commune ou à un EPCI.

Cette disposition est semblable, dans son principe, à la démarche contractuelle prévue par l’article L. 5111-1 du code général des collectivités territoriales aux termes duquel les collectivités territoriales peuvent conclure entre elles « des conventions par lesquelles l’une d’elles s’engage à mettre à la disposition d’une autre collectivité ses services et ses moyens afin de lui faciliter l’exercice de ses compétences ». Elle s’avère cependant beaucoup plus souple dans la mesure où, contrairement au code général des collectivités territoriales, elle ne définit pas les formes que revêt la prestation de services organisée par la convention : en effet, le code précise que cet instrument juridique implique la mise à disposition des moyens et des services de la collectivité, ce que ne fait pas le présent article.

Par ailleurs, le dispositif proposé par le présent article vient s’ajouter à une autre souplesse concernant les seuls EPCI prévue par le code général des collectivités territoriales. L’article L. 5211-17 du code dispose en effet que les communes membres d’un EPCI peuvent « à tout moment transférer, en tout ou partie, à ce dernier, certaines de leurs compétences dont le transfert n’est pas prévu par la loi ou la décision institutive ». Ce transfert doit cependant se conformer à des règles de procédure strictes prévues par le code (délibérations concordantes de l’organe délibérant de l’EPCI et des conseils municipaux se prononçant dans les conditions de majorité requise pour la création de l’établissement) et qui, de fait, sont beaucoup plus contraignantes que la grande liberté proposée par le présent article en matière conventionnelle.

Le ministère de l’éducation nationale a conçu ces souplesses en pensant à la politique menée dans les zones rurales fragiles pour encourager les regroupements pédagogiques (RPI) et les réseaux d’école.

– Les RPI sont des regroupements d’écoles, soit sur un seul site, soit sur un site dispersé, visant à maintenir un enseignement de qualité en milieu rural. En 2006-2007, on compte 4 847 RPI. Ils ne doivent pas être confondus avec la possibilité, ouverte par l’article L. 212-2 du code de l’éducation, pour deux ou plusieurs communes, de se réunir pour l’établissement et l’entretien d’une seule école. Il convient de rappeler que cet article impose, en outre, le regroupement d’élèves de plusieurs communes dans une seule commune lorsque, deux ou plusieurs localités étant distantes de moins de moins de trois kilomètres, la population scolaire de l’une d’entre elles est inférieure à 15 élèves.

– Les réseaux d’école sont des regroupements d’écoles ou de RPI de plusieurs communes autour d’un projet pédagogique commun et souvent une mise en commun des équipements concernés. On en recense 200 pour l’année 2006/2007, dont près de la moitié sont liés à une structure intercommunale.

Par ailleurs, l’implication des structures intercommunales dans le domaine éducatif – scolaire et périscolaire – étant déjà significative, on peut penser que la flexibilité prévue par le présent article trouvera à s’appliquer. Selon une étude parue en 2004, 40 % des 2 174 structures de coopération intercommunale à fiscalité propre que compte la France menaient au moins une action tournée vers le milieu scolaire. Cette étude indiquait que, selon le ministère de l’éducation nationale, seulement 400 EPCI disposant d’une fiscalité propre étaient dotés expressément d’une compétence scolaire. Cette étude cite également les estimations d’un professeur à l’Université de Poitiers, M. Yves Jean, selon lesquelles le regroupement le plus courant, en milieu rural, est le syndicat intercommunal à vocation scolaire, dont le nombre est évalué entre 7 000 à 8 000. Par ailleurs, un peu moins de 10 % des communautés de communes assument une compétence « éducative », c’est-à-dire scolaire ou périscolaire, soit 200 communautés de communes (32).

L’essor de « l’intercommunalité éducative » repose sur des bases juridiques complexes qui seront présentées brièvement ci-dessous, pour mémoire.

– Pour les communautés d’agglomération, l’article L. 5216-5 du code général des collectivités territoriales ne fait aucune référence à leur compétence en matière d’activités scolaires ou périscolaires.

– Pour les autres EPCI, ce code leur reconnaît, à des degrés divers, des compétences dans le domaine scolaire et périscolaire. Si les communautés de communes ne sont compétentes, au titre de leurs compétences optionnelles, qu’en matière de construction et d’entretien d’équipements de l’enseignement pré-élémentaire et élémentaire (article L. 5214-16), les communautés urbaines exercent une compétence obligatoire en matière socio-éducative étendue, car elle englobe la construction, l’entretien, la gestion et l’animation d’équipements ou de réseaux d’équipements « socio-éducatifs » lorsqu’ils sont « d’intérêt communautaire ».

– Enfin, il résulte de l’article L. 5211-17 déjà cité que les communes membres d’un EPCI peuvent, à tout moment, transférer, en tout ou en partie, à ce dernier certaines de leurs compétences dont le transfert n’est pas prévu par la loi ou la décision institutive.

Suite à l’avis favorable de sa commission des affaires culturelles, le Gouvernement s’en remettant, pour sa part, à la sagesse de cette assemblée, le Sénat a adopté une disposition prévoyant de confier, de plein droit, l’exercice de la compétence d’organisation du service d’accueil aux EPCI lorsque les compétences relatives au fonctionnement des écoles publiques leur ont été transférées (alinéa 3).

*

La commission a examiné un amendement de la rapporteure pour avis tendant à supprimer l’alinéa 3 de cet article qui tend à confier de plein droit la compétence d’organisation du service d’accueil aux établissements publics de coopération intercommunale lorsqu’ils exercent les compétences relatives au fonctionnement des écoles.

La rapporteure pour avis a indiqué que les possibilités ouvertes par l’article 9 et le code général des collectivités territoriales réduisent la portée pratique de ce nouvel alinéa introduit par le Sénat. L’article 9 permet en effet à toute commune de confier, par une convention, l’organisation du service d’accueil à une autre commune ou à un établissement public de coopération intercommunale (EPCI) ; de plus, il n’exclut pas le transfert de la compétence d’organisation de ce service à l’EPCI dont la commune est membre dans les conditions de droit commun prévues par l’article L. 5211-17 du code général des collectivités territoriales. Par ailleurs, le dispositif du Sénat prévoit l’automaticité du transfert de compétence d’organisation du service d’accueil, ce qui introduit de la rigidité dans un domaine caractérisé par des situations très variables sur le terrain.

La commission a adopté l’amendement de la rapporteure pour avis.

Puis elle a donné un avis favorable à l’adoption de l’article 9 ainsi modifié.

Article additionnel après l’article 9

Extension du service d’accueil aux écoles maternelles
et élémentaires privées sous contrat

La commission a ensuite examiné un amendement présenté par M. Yvan Lachaud portant article additionnel et prévoyant de mettre à la charge des organismes de gestion des écoles maternelles et élémentaires privées sous contrat l’organisation du service d’accueil des élèves.

M. Yvan Lachaud a précisé que lorsque le service d’accueil sera mis en place du fait d’une grève ayant été suivie par plus de 20 % des personnes exerçant des fonctions d’enseignement dans l’école qu’il gère, l’organisme de gestion percevra une contribution financière qui est fonction du nombre d’élèves accueillis et du nombre effectif de grévistes.

La rapporteure pour avis ayant émis un avis favorable, la commission a adopté l’amendement, cosigné par M. Jean-Philippe Maurer.

Article additionnel après l’article 9

Évaluation de la mise en place du service d’accueil pour les communes

La commission a examiné un amendement de la rapporteure pour avis portant article additionnel et prévoyant une évaluation du dispositif d’accueil.

La rapporteure pour avis a expliqué que la mise en œuvre du service d’accueil par les communes, en particulier rurales, suscitant parfois des interrogations chez les maires comme chez les parents des élèves, le dispositif doit être évalué dans tous ses aspects.

M. Jean-Claude Mathis a observé qu’il est inutile de mettre en place un service qui a un coût lorsque l’accueil n’intéresse pas forcément tous les parents. Une évaluation en la matière est donc tout à fait justifiée.

La commission a adopté l’amendement.

Article 10

Entrée en vigueur des dispositions relatives au service d’accueil

Cet article a pour objet de prévoir que les articles L. 133-1, L. 133-3 à L. 133-6, L. 133-6-1, L. 133-7 et L. 133-7-1 que le présent projet de loi prévoit d’insérer dans le code de l’éducation entreront en vigueur à compter de la publication du décret fixant le montant et les modalités de versement de la contribution financière de l’État aux communes ayant mis en place le service d’accueil.

En revanche, les autres articles du projet de loi, soit l’article 1er, relatif aux modifications des divisions du code, et l’article 3, relatif à la procédure de prévention des conflits, entreront en vigueur le lendemain de la publication de la loi au Journal officiel.

Il convient de ne pas se tromper sur la signification de cette entrée en vigueur différée de la plupart des articles du présent projet de loi. En effet, il s’agit d’un signal fort adressé par le gouvernement aux communes : il leur signifie que l’ensemble des articles relatifs à l’institution du droit d’accueil et à la mise en place du service d’accueil entreront en vigueur le jour où l’État aura publié le texte qui organisera l’exercice de son devoir de solidarité financière pour la mise en place du service d’accueil et laisser le temps aux communes de s’organiser. Il leur laisse aussi le temps de s’organiser en amont pour qu’elles ne soient pas prises au dépourvu les jours de grève.

Afin de ne pas subordonner l’application d’une loi garantissant aux enfants et à leurs parents un nouveau droit à la parution d’un décret, le Sénat a modifié le présent article pour prévoir que les nouveaux articles du code, à l’exception de celui consacré à la procédure de prévention des conflits, entreront en vigueur au plus tard le 1er septembre 2008. Il y a également inséré des dispositions de coordination faisant référence aux articles additionnels.

*

La commission a donné un avis favorable à l’adoption de l’article 10.

Titre du projet de loi

La commission a examiné un amendement de coordination présenté par M. Yvan Lachaud tendant à modifier l’intitulé du projet de loi en supprimant le mot « publiques ».

Suivant l’avis favorable de la rapporteure pour avis, elle a adopté l’amendement, cosigné par M. Jean-Philippe Maurer.

Puis la commission a donné un avis favorable à l’ensemble du projet de loi ainsi modifié.

*

En conséquence, et sous réserve des amendements qu’elle propose, la commission des affaires culturelles, familiales et sociales demande à l’Assemblée nationale d’adopter le projet de loi n° 1008.

AMENDEMENTS ADOPTÉS PAR LA COMMISSION

Article 2

Amendement présenté par Mme Françoise Guégot, rapporteure pour avis, M. Yvan Lachaud et M. Jean-Philippe Maurer :

Dans la première phrase de l’alinéa 2 de cet article, après le mot : « publique », insérer les mots : « ou privée sous contrat ».

Article 5

Amendement présenté par Mme Françoise Guégot, rapporteure pour avis :

Dans l’alinéa 5 de cet article, supprimer les mots : « égal ou ».

Article 7 bis

Amendements présentés par Mme Françoise Guégot, rapporteure pour avis :

•  Après le mot « établit », rédiger ainsi la fin de l’alinéa 2 de cet article :

« une liste des personnes susceptibles d’assurer le service d’accueil prévu à l’article L. 133-4 en veillant à ce qu’elles possèdent les qualités requises pour encadrer des enfants. »

•  Dans l’alinéa 3 de cet article, substituer aux mots : « les personnes volontaires pour participer à l’organisation de ce service », les mots : « ces personnes, préalablement informées de la vérification, ».

•  Compléter cet article par l’alinéa suivant :

« Cette liste est transmise pour information aux représentants des parents d’élèves élus au conseil d’école. Les personnes y figurant sont préalablement informées de cette transmission. »

Article 9

Amendement présenté par Mme Françoise Guégot, rapporteure pour avis :

Supprimer l’alinéa 3 de cet article.

Article additionnel

Amendement présenté par Mme Françoise Guégot, rapporteure pour avis, M. Yvan Lachaud et M. Jean-Philippe Maurer :

Après l’article 9, insérer l’article suivant :

« Dans le chapitre III du titre III du livre Ier du code de l’éducation, il est inséré un article L. 133-9 ainsi rédigé :

« Art. L. 133-9 – L’organisme de gestion des écoles maternelles et élémentaires privées sous contrat est chargé de la mise en place du service d’accueil prévu à l’article L. 133-1.

Dans le cas où un préavis a été déposé dans les conditions prévues par l’article L. 2512-2 du code du travail et en vue de la mise en place d’un service d’accueil, toute personne exerçant des fonctions d’enseignement dans une école maternelle ou élémentaire privée sous contrat informe le chef d’établissement, au moins quarante-huit heures avant de participer à la grève, de son intention d’y prendre part. Le chef d’établissement transmet sans délai cette information à l’organisme de gestion de l’école d’exercice.

L’État verse une contribution financière à chaque organisme de gestion qui a mis en place le service d’accueil au titre des dépenses exposées pour la rémunération des personnes chargées de cet accueil, lorsque le nombre de personnes exerçant des fonctions d’enseignement dans chaque école qu’il gère et qui ont participé à la grève est égal ou supérieur à 20 % du nombre d’enseignants de l’école. Cette contribution est fonction du nombre d’élèves accueillis et du nombre effectif de grévistes. Son montant, les modalités de son versement et son indexation sont fixés par décret. »

Article additionnel

Amendement présenté par Mme Françoise Guégot, rapporteure pour avis :

Après l’article 9, insérer l’article suivant :

« L’application des articles L. 133-4, L. 133-6, L. 133-6-1,   L. 133-7, L. 133-7-1 et L. 133-8 du code de l’éducation fait l’objet d’une évaluation présentée sous la forme d’un rapport déposé avant le 1er septembre 2009 sur le bureau des assemblées. Cette évaluation retrace notamment les difficultés matérielles rencontrées par les communes pour l’organisation dudit service. »

Titre

Amendement présenté par Mme Françoise Guégot, rapporteure pour avis, M. Yvan Lachaud et M. Jean-Philippe Maurer :

Dans le titre du projet de loi, supprimer le mot : « publiques ».

ANNEXE

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LA RAPPORTEURE POUR AVIS

(auditions communes avec M. Charles de La Verpillière,
rapporteur de la commission des lois)

(par ordre chronologique)

Ø Fédération syndicale unitaire (FSU) et Syndicat national unitaire des instituteurs, professeurs des écoles et PEGC (SNUIPP) – M. Gérard Aschieri, secrétaire général de la FSU, et M.  Gilles Moindrot, secrétaire général du SNUIPP

Ø M. Michel Verpeaux, professeur de droit public à l’Université Paris I

Ø Association des maires de France (AMF) – M. Pierre-Yves Jardel, M. Sébastien Ferriby, chargé d’études Éducation et culture, et M. Alexandre Touzet, chargé des relations avec le Parlement

Ø Fédération nationale de l’enseignement, la culture et la formation professionnelle du syndicat national FO, unité des directeurs et instituteurs de l’enseignement public FO – M. Norbert Tricard, secrétaire général, et M. Richard Lempeur, secrétaire général adjoint.

Ø Confédération syndicale de l’éducation nationale (CSEN) – M. Vincent Gavard, secrétaire général adjoint, et Mme Joëlle Houziaux, secrétaire générale adjointe

Ø Syndicat CFTC de l’éducation nationale, de la recherche et de l’action culturelle (SCENRAC) – Mme Pascale Brethenoux, secrétaire générale

Ø Fédération des syndicats généraux de l’éducation nationale CFDT (SGEN-CFDT) – M. Thierry Cadart, secrétaire général

Ø Union nationale des syndicats de l’éducation nationale CGT (UNSEN-CGT) – M. Christophe Godard, cosecrétaire général.

Ø Fédération des conseils de parents d’élèves des écoles publiques (FCPE) –M. Jean-Jacques Hazan, président.

Ø Fédération des parents d’élèves de l’enseignement public (PEEP) –Mme Anne Kerkhove, présidente nationale, et Mme Claudine Caux, vice-présidente.

Ø M. Yves Gaudemet, professeur de droit public à l’Université Paris II

Ø Union nationale des associations familiales (UNAF) – M. Rémy Guilleux, administrateur, et Mme Patricia Humann, coordinatrice du pôle éducation, formation et petite enfance.

© Assemblée nationale

1 () Selon le ministère de l’éducation nationale, les effectifs d’élèves scolarisés dans le premier degré public s’élèvent à 5 743 535 pour l’année 2007/2008.

2 () Rapport annuel sur l’état de la fonction publique, ministère du budget, des comptes publics et de la fonction publique, 17 juillet 2007.

3 () L’Edit de 1606 ordonne que « les Régens, précepteurs ou maîtres d’école soient approuvés par les Curés des paroisses ou les personnes ecclésiastiques ».

4 () Prononcé le 15 janvier 1850 à l’occasion de l’examen du projet de loi sur l’enseignement préparé par le ministre l’instruction publique, Frédéric-Alfred de Falloux.

5 () Les enfants âgés de trois ans bénéficient du droit à scolarisation institué par l’article L.  113-1 du code de l’éducation. Le même article précise que les enfants de deux ans peuvent être accueillis, mais cet accueil est « étendu en priorité dans les écoles situées dans un environnement social défavorisé » (zones urbaines, rurales ou de montagne et régions d’outre-mer).

6 () Note du ministre de l’éducation nationale à l’attention des recteurs et inspecteurs d’académie relative à la mise en place d’un service minimum d’accueil dans les écoles maternelles et élémentaires en cas de grève des personnels enseignants du 1er degré, en date du 8 janvier 2008.

7 () Les exemples qui suivent sont extraits du rapport n° 107 déposé par la commission spéciale chargée d’examiner le projet de loi sur le dialogue social et la continuité du service public dans les transports terrestres réguliers de voyageurs, présenté par M. Jacques Kossowski (juillet 2007), et du rapport d’information n° 1274 déposé par la Délégation pour l’Union européenne sur le service minimum dans les services publics en Europe, présenté par M. Robert Lecou (décembre 2003).

8 () Arrêt du Conseil d’État du 7 août 1909, Winkell, et arrêt du Conseil d’État du 22 octobre 1937, Minaire.

9 () Conseil constitutionnel, Décision du 16 août 2007.

10 () Conclusions Tardieu sur l’arrêt « Winkell » du Conseil d’État du 7 août 1909.

11 () Décision du 12 juillet 1979 du Conseil constitutionnel. Le Conseil a rattaché dans une décision du 19 janvier 2006 la liberté d’aller et de venir aux articles 2 et 4 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789.

12 () Voir, par exemple, l’arrêt de la chambre sociale de la Cour de cassation du 30 janvier 2002 dans lequel la Cour estime que « la liberté de travailler constitue l’un des droits économiques et sociaux fondamentaux de la personne consacré par la Constitution de 1946 ».

13 () Conseil d’État, 7 juillet 1950, Dehaene.

14 () Conseil d’État, 18 mars 1956, Hublin.

15 () Conseil d’État, 19 janvier 1962, Bernardet.

16 () Conseil d’État, 7 février 1936, Jamart, qui reconnaît qu’il appartient aux ministres « comme à tout chef de service de prendre les mesures nécessaires au bon fonctionnement de l’administration placée sous leur autorité » et Conseil d’État, 23 octobre 1964, Fédération des syndicats chrétiens de cheminots, reconnaissant au ministre des transports la possibilité de prendre des mesures interdisant ou réglementant par avance l’exercice du droit de grève par le personnel SNCF.

17 () « Le guide juridique du chef d’établissement », édition 2001, direction des affaires juridiques du ministère de l’éducation nationale. Cette direction procède à l’actualisation de cet ouvrage ; la nouvelle version devrait être mise en ligne d’ici la fin de l’année 2008.

18 () Réponse ministérielle n° 17 552 du 15 août 1994 parue au Journal Officiel-Assemblée nationale du 19 septembre 1994.

19 () Réponse du ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche à la question écrite n° 07749 de M. Louis Sauvet, sénateur, publiée dans le Journal officiel Sénat du 28 mars 2003.

20 () Voir l’exemple de cette commune cité à l’occasion d’une question au gouvernement (Assemblée nationale, compte rendu intégral de la deuxième séance du 20 mai 2008).

21 () Article 199 sexdecies du code général des impôts.

22 () Circulaire du 13 avril 1988 relative au modèle du contrat pour la concession ou l’affermage du service de restauration scolaire du premier degré.

23 () Compte rendu analytique officiel de la séance du 26 juin 2008.

24 () Séance de questions au Gouvernement du 27 mai 2008.

25 () Seul le critère de l’absence de place disponible peut être opposé aux parents d’un enfant pour refuser son inscription (Tribunal administratif de Lyon, 12 novembre 2007, Mlle Riquin).

26 () Rapports annuels de performances 2007 de la mission « Enseignement scolaire ».

27 () Intervention lors de la discussion générale du présent projet de loi au Sénat, séance du 26 juin 2008.

28 () Rapport de la commission présidée par M. Dieudonné Mandelkern sur la continuité du service public dans les transports terrestres réguliers de voyageurs, juillet 2004.

29 () « Rapport de la Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations », Bureau international du travail, 97e session de la Conférence internationale du travail de l’Organisation internationale du travail, 2008.

30 () Le Journal du Dimanche, 18 mai 2008.

31 () Rapport n°  408 fait au nom de la commission des affaires culturelles sur le projet de loi instituant un droit d’accueil pour les élèves des écoles maternelles et élémentaires publiques pendant le temps scolaire obligatoire, déposé le 19 juin 2008.

32 () « Se regrouper pour mieux éduquer », article du « Guide de l’éducation nationale : école, commune, territoires », Centre national de documentation pédagogique, 2004.