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N° 1263

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 19 novembre 2008.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES, DE LA LÉGISLATION ET DE L’ADMINISTRATION GÉNÉRALE DE LA RÉPUBLIQUE SUR LA PROPOSITION DE LOI (N° 1233), ADOPTÉE PAR LE SÉNAT, visant à prolonger l’application des articles 3, 6 et 9 de la loi n° 2006-64 du 23 janvier 2006 relative à la lutte contre le terrorisme et portant dispositions diverses relatives à la sécurité et aux contrôles frontaliers,

PAR M. Claude BODIN,

Député.

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Voir les numéros :

Sénat : 39, 61 T.A. 9 (2008-2009).

INTRODUCTION 5

I. LA NÉCESSITÉ D’UNE NOUVELLE INTERVENTION DU PARLEMENT 7

II. L’ARTICLE 3 PERMET LA RÉALISATION EFFECTIVE DE CONTRÔLES D’IDENTITÉ A BORD DES TRAINS INTERNATIONAUX 8

A. UNE DISPOSITION RÉPONDANT À UNE DIFFICULTÉ INCONTESTABLE 8

B. UN PREMIER BILAN SATISFAISANT 10

III. L’ARTICLE 6 MET EN PLACE UN RÉGIME DE RÉQUISITION ADMINISTRATIVE DES DONNÉES DE CONNEXION QUI FONCTIONNE DE FAÇON SATISFAISANTE 12

A. LE DISPOSITIF CRÉÉ PAR LA LOI DU 23 JANVIER 2006 13

B. UN PREMIER BILAN TRÈS SATISFAISANT 14

IV. L’ARTICLE 9 AUTORISE LES SERVICES DE LUTTE CONTRE LE TERRORISME À ACCÉDER À CERTAINS FICHIERS ADMINISTRATIFS 16

A. UN ACCÈS PLUS DIRECT À DES FICHIERS ADMINISTRATIFS 16

B. UNE CONSULTATION DIRECTE TRÈS PRÉCIEUSE DANS LA LUTTE CONTRE LE TERRORISME 17

EXAMEN EN COMMISSION 19

TABLEAU COMPARATIF 23

ANNEXE AU TABLEAU COMPARATIF 25

PERSONNES ENTENDUES PAR LE RAPPORTEUR 33

Mesdames, Messieurs,

La loi n° 2006-64 du 23 janvier 2006 relative à la lutte contre le terrorisme et portant dispositions diverses relatives à la sécurité et aux contrôles frontaliers a permis de compléter certaines lacunes de la législation française de lutte contre le terrorisme. En effet, si le dispositif judiciaire de répression du terrorisme était déjà particulièrement étoffé, les services de police administrative disposaient de peu de moyens juridiques pour agir dans un cadre préventif.

Face aux mutations du terrorisme international, le Gouvernement avait jugé utile de demander de nouveaux outils pour les services concernés, afin de leur permettre de détecter plus en amont les réseaux terroristes, en dehors de toute commission d’infraction. Certes, l’incrimination d’association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste, créée par la loi n° 96-647 du 22 juillet 1996, permet d’agir contre les réseaux terroristes avant même la commission d’un attentat. Pour autant, le livre blanc sur la sécurité intérieure face au terrorisme de 2006 a bien montré la nécessité de renforcer les capacités de détection précoces des réseaux terroristes.

Les services de lutte contre le terrorisme se sont donc vus doter de prérogatives qui ne pouvaient, jusque-là, leur être attribuées que dans le cadre d’une procédure pénale (1). De nombreuses garanties ont été prises afin que ces nouvelles procédures soient utilisées dans la stricte limite des nécessités de la lutte contre le terrorisme.

Compte tenu de leur caractère novateur, certaines de ces dispositions n’ont été adoptées qu’à titre temporaire et ne sont applicables que jusqu’au 31 décembre 2008. Il s’agissait de donner au Législateur le temps d’apprécier, dans une perspective expérimentale, l’utilité de ces dispositions avant de les pérenniser. Ainsi, il serait faux de croire que cette application temporaire s’expliquerait par la nature même de ces dispositions. En effet, celles-ci ne constituent nullement des mesures d’exception qui n’auraient vocation à s’appliquer que pour un laps de temps déterminé afin de faire face à un « pic » d’activités terroristes. Au contraire, elles répondent aux mutations du terrorisme et à l’évolution des technologies.

Ces dispositions concernent les contrôles d’identité à bord des trains transfrontaliers (article 3), le dispositif de réquisition administrative des données relatives aux communications électroniques (article 6) et l’accès des agents des services de lutte contre le terrorisme à certains fichiers administratifs (article 9).

LE PRÉCÉDENT DE LA LOI DU 15 NOVEMBRE 2001
RELATIVE À LA SÉCURITÉ QUOTIDIENNE

Le chapitre V de la loi n°2001-1062 du 15 novembre 2001 relative à la sécurité quotidienne compte 12 articles relatifs à la lutte contre le terrorisme, issus d’un amendement du Gouvernement déposé en nouvelle lecture afin de tenir compte des attentats du 11 septembre 2001. Il fut alors décidé que ces articles seraient applicables jusqu’au 31 décembre 2003.

L’article 32 fut pérennisé dès la promulgation de la loi n°2002-1138 du 9 septembre 2002 d’orientation et de programmation pour la justice. La majorité des autres articles fut pérennisée par l’article 31 de la loi n°2003-239 du 18 mars 2003 pour la sécurité intérieure, à l’exception des articles 24, 25 et 26 dont l’application fut alors prolongée jusqu’au 31 décembre 2005.

Ces articles furent par la suite également pérennisés : l’article 24 par la loi n°2004-204 du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité, l’article 25 par l’ordonnance n°2005-863 du 28 juillet 2005 relative à la sûreté des vols et à la sécurité de l’exploitation des aérodromes et l’article 26 par l’ordonnance n°2005-898 du 2 août 2005 portant actualisation et adaptation des livres III et IV du code des ports maritimes (partie législative).

Le rapport d’application de la loi du 23 janvier 2006 relative à la lutte contre le terrorisme (2) présenté à la commission des Lois le 5 février 2008 a montré que les dispositions transitoires de cette loi étaient effectivement utilisées et qu’elles apportaient une véritable valeur ajoutée aux services de lutte contre le terrorisme dans le respect des libertés individuelles. Il serait donc aujourd’hui impensable de mettre un terme brutal à la mise en œuvre de ces dispositions, dont certaines ont nécessité d’importants investissements.

I. LA NÉCESSITÉ D’UNE NOUVELLE INTERVENTION DU PARLEMENT

En l’absence d’intervention du législateur d’ici le 1er janvier 2009, les articles 3, 6 et 9 de loi du 23 janvier 2006 cesseront d’être applicables. Afin de résoudre cette difficulté, le ministère de l’intérieur avait fait inscrire dans l’avant-projet de loi de programmation pour la performance de la sécurité intérieure 2009-2013, dite « LOPPSI 2 », la prolongation de ces dispositions jusqu’au 31 décembre 2012. Cependant, compte tenu de contraintes constitutionnelles tout d’abord (3), puis de l’encombrement de l’ordre du jour parlementaire ensuite, le projet de LOPPSI 2 n’a pas encore été délibéré en conseil des ministres.

L’adoption définitive de la LOPPSI 2 avant la fin de l’année 2008 s’étant rapidement avérée impossible, il a ensuite été envisagé de faire adopter la disposition législative nécessaire par la voie d’un amendement au projet de loi portant dispositions diverses relatives à la gendarmerie, déposé sur le bureau du Sénat le 21 août 2008. Malheureusement, le calendrier d’adoption de ce texte ne permettra pas non plus son adoption définitive avant la fin de l’année.

Dans la mesure où aucun texte de valeur législative relatif à la sécurité ne doit être définitivement adopté d’ici le 31 décembre prochain, il est nécessaire que le Parlement adopte une loi spécifique sur le sujet. Ces considérations ont motivé le dépôt de la proposition de loi soumise à notre examen par le sénateur Hubert Haenel. Ce dernier, membre de la Commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité (CNCIS) (4) est en effet particulièrement bien placé pour apprécier les conditions de mise en œuvre de la plus importante des dispositions de la loi du 23 janvier 2006, l’article 6 relatif à la réquisition administrative des données de connexion détenues par les opérateurs de communication électronique.

Inscrite par le groupe UMP du Sénat à l’ordre du jour de la séance d’initiative parlementaire réservée à ce groupe, la proposition de loi a été adoptée par le Sénat le 4 novembre dernier. Son adoption dans les mêmes termes par notre Assemblée permettrait son adoption définitive et sa promulgation avant le 1er janvier 2009, autorisant ainsi la prolongation des dispositifs des articles 3,6 et 9 de la loi du 23 janvier 2006. En effet, l’article unique de la proposition de loi prévoit de modifier l’article 32 de la loi du 23 janvier 2006 qui dispose que ses articles 3, 6 et 9 « sont applicables jusqu’au 31 décembre 2008 » afin de proroger ces dispositions jusqu’au 31 décembre 2012.

II. L’ARTICLE 3 PERMET LA RÉALISATION EFFECTIVE DE CONTRÔLES D’IDENTITÉ A BORD DES TRAINS INTERNATIONAUX

A. UNE DISPOSITION RÉPONDANT À UNE DIFFICULTÉ INCONTESTABLE

La première disposition concernée par la présente proposition de loi est l’article 3 de la loi du 23 janvier 2006. Celui-ci a modifié l’article 78-2 du code de procédure pénale afin d’étendre les possibilités de procéder à des contrôles d’identité systématiques à bord des trains internationaux, au-delà de la bande des vingt kilomètres.

L’entrée en vigueur, le 26 mars 1995, de la convention signée le 19 juin 1990, en application de l’accord de Schengen du 14 juin 1985, a entraîné la suppression des contrôles systématiques des personnes aux frontières intérieures des États concernés (5). En conséquence, il est apparu nécessaire de compenser la disparition des contrôles frontaliers par la mise en place de contrôles d’identité spécifiques, de caractère aléatoire, afin que le principe de la libre circulation ne favorise pas le développement de l’immigration clandestine et des réseaux criminels, notamment terroristes. Ainsi, la loi du 10 août 1993 a ajouté un 8e alinéa à l’article 78-2 du Code de procédure pénale créant un nouveau régime de contrôle d’identité, sans conditions particulières, dans les zones situées à proximité d’une frontière intérieure de l’espace Schengen.

Le principe de base de ces contrôles est fondé sur la limite des « vingt kilomètres », ce qui signifie que des contrôles d’identité peuvent être effectués à tout moment, c’est-à-dire indépendamment de la commission d’une infraction ou d’une réquisition du procureur de la République, dans une bande de vingt kilomètres à partir d’une frontière intérieure de l’espace Schengen (6). Les ports, aéroports, gares ferroviaires et routières ouverts au trafic international étant considérés comme des frontières internationales, des contrôles d’identité peuvent également y être réalisés.

Cependant, une application trop stricte de la règle des vingt kilomètres empêcherait, pour des raisons pratiques, de procéder à des contrôles frontaliers dans certaines situations. Ainsi, sur une autoroute, pour d’évidentes raisons de sécurité, les contrôles ne peuvent être réalisés qu’à l’occasion de l’arrêt des véhicules à un péage ou sur une aire de stationnement. Or, lorsqu’il n’existait pas de péage dans la bande des vingt kilomètres, les contrôles d’identité étaient quasiment impossibles. Pour remédier à cette difficulté, l’article 10 de la loi n° 2003-1119 du 26 novembre 2003 relative à la maîtrise de l’immigration, au séjour des étrangers en France et à la nationalité a autorisé de tels contrôles sur les autoroutes entre la frontière et le premier péage situé au-delà de la bande des vingt kilomètres.

Une autre difficulté liée à la règle des vingt kilomètres persistait : à bord des trains internationaux. En effet, il était concrètement difficile de procéder à des contrôles efficaces, et en tout cas impossible de procéder à des contrôles systématiques, pendant la période au cours de laquelle le train se trouvait dans la limite des vingt kilomètres. S’agissant de trains à grande vitesse, la difficulté était encore plus grande(7). En outre, s’il est possible de procéder à des contrôles d’identité en gare à la descente du train, le rapport réalisé par le ministère de l’intérieur en application de la loi du 23 janvier 2006 (8) précise qu’il est « préférable d’effectuer des contrôles embarqués (…) pour restreindre le nombre de fonctionnaires mobilisés lors de ces contrôles et pour réduire la gêne occasionnée aux passagers ». M. Michel Felkay, sous-directeur chargé du service national de police ferroviaire a en outre indiqué à votre rapporteur que ces contrôles aléatoires à bord des trains bénéficient d’un effet de surprise dont seraient dépourvus des contrôles dans les grandes gares internationales.

Cette situation a donc justifié l’adoption de l’article 3 de la loi du 23 janvier 2006 qui a soumis les contrôles d’identité à bord des trains internationaux à des règles spécifiques. Ces contrôles sont désormais possibles :

—  entre la frontière et le premier arrêt qui se situe au-delà de la zone des vingt kilomètres (9);

—  dans les trains circulant sur des lignes « présentant des caractéristiques particulières de desserte », les contrôles peuvent être, en outre, effectués entre le premier arrêt situé au-delà des vingt kilomètres de la frontière et un autre arrêt situé dans la limite des 50 kilomètres suivants (10).

B. UN PREMIER BILAN SATISFAISANT

L’existence de cette nouvelle disposition législative a sans conteste répondu à une lacune du droit existant. En effet, celui-ci ne permettait pas de procéder de façon efficace à des contrôles à bord des trains internationaux, alors même que la France avait conclu avec ses principaux voisins des accords permettant l’organisation de patrouilles mixtes à bord de ces trains, qui restaient largement théoriques.

L’article 3 a pu être rapidement mis en œuvre, comme le montre le rapport d’application de la loi du 23 janvier 2006 (11). Tout d’abord, l’arrêté fixant les lignes et arrêts concernés a été pris dès le 26 avril 2006. De plus, la création du service national de police ferroviaire (SNPF) (12), par l’arrêté du 27 juin 2006, a permis de dégager les moyens humains suffisants pour réaliser des contrôles, notamment au moyen de patrouilles mixtes avec des fonctionnaires de police de pays frontaliers.

Enfin, l’entrée en vigueur du Traité de Prüm (13) a facilité la mise en place de ces patrouilles mixtes composées de policiers issus de différents États membres, qui peuvent exercer des opérations communes sur l’ensemble du territoire des États parties, en exerçant des compétences de puissance publique. Si ces patrouilles ne pouvaient procéder à des contrôles d’identité à bord des trains internationaux que dans la bande des vingt kilomètres, leur utilité serait très faible.

LES PATROUILLES MIXTES SUR LE TERRITOIRE FRANÇAIS

—  Patrouilles franco-belges : Lille-Mouscron, Lille-Tournai et Lille-Bruxelles : 2 patrouilles par mois (2 policiers français et 2 policiers belges).

Paris-Bruxelles (Thalys) : 101 patrouilles mixtes depuis avril 2008, qui ont réalisé 72 interpellations (dont 59 étrangers en situation irrégulière).

—  Patrouilles franco-allemandes : Patrouilles quotidiennes (2 policiers français, 2 policiers allemands) sur les lignes Forbach-Hambourg et Strasbourg-Fribourg, qui ont réalisé 254 interpellations (dont 155 étrangers en situation irrégulière).

—  Patrouilles franco-suisses : Contrôles en gare de Vallorbe, une fois tous les 15 jours, avec les gardes-frontières suisses. Contrôle des trains de nuit en provenance de Milan à l’arrêt technique par 8 policiers français et 5 gardes-frontières suisses.

—  Patrouilles franco-germano-suisse : 2 patrouilles par mois depuis janvier 2008 (2 policiers français, 2 policiers allemands, 2 gardes-frontières suisses) sur la ligne Mulhouse-Bâle-Fribourg-Kehl-Strasbourg-Mulhouse.

—  Patrouilles franco-italiennes : patrouilles (2 policiers français et 2 policiers italiens) quotidiennes sur la ligne Modane-Bardonnechia et hebdomadaires sur la ligne Menton-Vintimille.

—  Patrouilles franco-espagnoles : 2 patrouilles par mois (3 policiers français et 3 policiers espagnols) sur les trains Talgo Barcelone-Milan.

Patrouilles mensuelles (2 policiers français et 2 policiers espagnols) entre Bayonne et San Sebastian, qui ont réalisé 24 interpellations depuis novembre 2007.

Source : Rapport annuel 2008 sur la mise en œuvre des articles 3, 6 et 9 de la loi anti-terroriste du 23 janvier 2006 (Ministère de l’Intérieur).

Ainsi, la mise en œuvre de l’article 3 a donné des résultats très satisfaisants, même s’il est difficile d’isoler les contrôles menés dans ce cadre par rapport aux autres types de contrôles (contrôles sur réquisition du procureur de la République, contrôle en cas d’infraction).

Le rapport annuel 2008 sur la mise en œuvre des articles 3, 6 et 9 de la loi anti-terroriste du 23 janvier 2006 montre que les contrôles réalisés par des patrouilles mixtes ont permis de nombreuses interpellations (voir tableau ci-dessus), notamment dans le domaine de la lutte contre l’immigration clandestine.

Néanmoins, le dispositif possède également une utilité incontestable en matière de lutte contre le terrorisme. M. Michel Felkay, sous-directeur en charge du SNPF a estimé que son service participait à cette mission de deux manières :

—  En premier lieu, pour faire face au terrorisme international, il est vital de connaître les déplacements des personnes soupçonnées d’appartenir à un réseau terroriste, lesquelles sont susceptibles d’utiliser les transports ferroviaires. Ainsi, le SNPF est parfois amené à procéder à des contrôles sur la base de renseignements qui lui sont fournis par les services spécialisés quant aux déplacements de personnes surveillées. À l’inverse, des contrôles inopinés peuvent déboucher sur la collecte d’informations concernant des individus qui sont sous la surveillance de ces services. Depuis le début de l’année 2008, 48 personnes contrôlées à bord des trains internationaux faisaient l’objet d’un signalement par les services de lutte contre le terrorisme ;

—  En second lieu, comme l’a rappelé M. Christophe Chaboud, chef de l’Unité de coordination de lutte contre le terrorisme (UCLAT), à votre rapporteur, l’expérience a malheureusement montré que les réseaux ferrés étaient des cibles visés par les terroristes. Par exemple, à l’été 2006, le SNPF a mené 54 patrouilles dans les trains entre la France et l’Allemagne, pour faire face à des menaces avérées d’attentat à leur bord.

Ainsi, l’article 3 de la loi du 23 janvier 2006 est appliqué dans de bonnes conditions, même si notre collègue Éric Diard soulevait une difficulté dans son rapport (14). En effet, plusieurs ordonnances de la Cour d’appel de Bordeaux ont annulé des contrôles d’identité menés dans les trains internationaux dans le sens France-étranger, au motif qu’il ne pouvait alors pas s’agir de contrôles migratoires. Or, le SNPF applique cette jurisprudence, bien que celle-ci soit contestable. Comme l’indique le rapporteur du Sénat, « cette interprétation [est] très restrictive, le législateur n’ayant pas souhaité limiter ces contrôles aux seuls trains entrants ». Pour autant, considérant que la volonté du législateur est sans ambiguïté, le Sénat a estimé qu’il n’était pas nécessaire de préciser la rédaction actuelle de l’article 78-2 du code de procédure pénale.

Ces contrôles étant le plus souvent conduits par des patrouilles mixtes, le concept de sens de circulation semble en effet relativement inopérant, surtout dans le cadre de l’espace Schengen qui est précisément un espace sans frontières intérieures. De plus, votre rapporteur rappelle que cette disposition législative a été prise dans le cadre d’une loi relative à la lutte contre le terrorisme, ce qui signifie bien que les contrôles d’identité menés dans ce cadre n’ont pas seulement pour objet de lutter contre l’immigration clandestine, mais aussi de prévenir le terrorisme. Or, cette mission exige de pouvoir procéder à des contrôles dans les deux sens de circulation.

L’adoption de l’article 3 répondait donc à une difficulté pratique, liée au temps beaucoup trop bref laissé pour mener des contrôles d’identité dans les trains internationaux dans la bande des vingt kilomètres, notamment à bord des trains à grande vitesse. Dans la mesure où la difficulté à l’origine de cette disposition est structurelle, il faudra un jour la pérenniser afin de permettre la réalisation effective de contrôles d’identité aléatoires, lesquels sont la contrepartie naturelle de l’ouverture des frontières au sein de l’espace Schengen.

III. L’ARTICLE 6 MET EN PLACE UN RÉGIME DE RÉQUISITION ADMINISTRATIVE DES DONNÉES DE CONNEXION QUI FONCTIONNE DE FAÇON SATISFAISANTE

La seconde disposition transitoire de la loi du 23 janvier 2006 est l’article 6 qui institue un régime de réquisition administrative des données de connexion. Les opérateurs de communication électronique et les hébergeurs de site Internet sont ainsi tenus de communiquer les données dites de « connexion », qu’ils conservaient d’ores et déjà pour les besoins des procédures pénales, aux agents habilités des services anti-terroristes qui en font la demande.

A. LE DISPOSITIF CRÉÉ PAR LA LOI DU 23 JANVIER 2006

L’article 6 permet donc aux agents individuellement désignés et spécialement habilités des services de prévention du terrorisme d’accéder aux données techniques liées à l’utilisation de la téléphonie, fixe ou mobile, et de l’Internet. Les données en question permettent d’identifier l’identité de l’ensemble des personnes appelées par un abonné, la date et la durée des communications, ainsi que la localisation de tout possesseur d’un téléphone portable, les « logs » de connexion Internet (numéro de protocole Internet, date et durée des connexions) et les données permettant d’identifier toute personne enrichissant le contenu d’un site Internet. Ainsi, contrairement aux procédures « d’écoutes téléphoniques », régies par la loi du 10 juillet 1991, les données ainsi communicables n’ont pas trait au contenu des communications.

Pour permettre cet accès, l’article 6 de la loi prévoit que les opérateurs de communication électronique (15) et les hébergeurs de site Internet (16) sont tenus de communiquer ces données aux agents habilités des services anti-terroristes qui en font la demande. Cet accès n’est cependant pas inconditionnel : les agents doivent formuler des demandes motivées auprès d’une « personnalité qualifiée », placée auprès du ministre de l’intérieur mais désignée par la Commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité (CNCIS) (17), qui est une autorité administrative indépendante.

Le rapport d’application de la loi du 23 janvier 2006 (18)décrit le schéma type d’une demande de réquisition administrative de données de connexion :

—  la demande initiale est effectuée par l’un des fonctionnaires habilités (au nombre de 624) appartenant à l’un des services de prévention du terrorisme au sens de l’arrêté du 31 mars 2006. Dans les faits, 90 % des demandes émanent de la Direction centrale du renseignement intérieur (DCRI). Cette demande est transmise à l’UCLAT, qui dispose d’une plateforme de centralisation à Levallois-Perret ;

—  la demande est ensuite transmise par l’UCLAT à la personnalité qualifiée, ou à l’un de ses adjoints en cas d’empêchement. La décision de la personnalité qualifiée (acceptation, refus ou demande d’information complémentaire) s’impose, il ne s’agit en effet pas d’un simple avis ;

—  en cas de décision favorable, l’UCLAT saisit l’opérateur de communication électronique concerné, qui est tenu de lui transmettre les données qu’il est obligé de conserver pendant une durée d’un an ;

—  l’UCLAT transmet ensuite les données au service demandeur ;

—  parallèlement à cette procédure, la CNCIS reçoit communication dans les sept jours des demandes approuvées par la personnalité qualifiée, ce qui lui permet d’exercer son pouvoir de contrôle.

Ainsi, la procédure telle qu’elle a été créée par l’article 6 de la loi du 23 janvier 2006 est entourée de nombreuses garanties. D’ailleurs, dans sa décision n° 2006-532 DC du 19 janvier 2006, le Conseil constitutionnel a indiqué que « l’article 66 de la Constitution (…) ne saurait être méconnu par une disposition qui se borne à instaurer une procédure de réquisition de données techniques ». Il a également estimé qu’en l’espèce, « le législateur a assorti la procédure de réquisition de données techniques qu’il a instituée de limitations et précautions (…), propres à assurer la conciliation qui lui incombe entre, d’une part, le respect de la vie privée des personnes et la liberté d’entreprendre des opérateurs, et, d’autre part, la prévention des actes terroristes, à laquelle concourt ladite procédure ».

B. UN PREMIER BILAN TRÈS SATISFAISANT

Le rapport d’application de la loi du 23 janvier 2006 souligne le succès de la mise en place de ce dispositif, qui donne satisfaction non seulement aux services utilisateurs, mais aussi aux opérateurs de communication et aux autorités de contrôle.

Les services de lutte contre le terrorisme ont aujourd’hui fait de ce nouvel outil un des instruments fondamentaux de leur arsenal de prévention des réseaux terroristes. Ce dispositif permet en effet de beaucoup mieux utiliser les moyens des services de lutte contre le terrorisme en facilitant le très important travail d’identification des personnes à suivre, et en écartant au contraire les personnes ne présentant pas de danger, tout en étant en relation avec une personne susceptible d’appartenir à un réseau terroriste. Cet instrument juridique est donc parfaitement adapté à la doctrine française de l’anti-terrorisme, fondée sur la détection précoce des réseaux terroristes.

De fait, M. Christophe Chaboud, chef de l’UCLAT, a indiqué à votre rapporteur que l’exploitation des informations relatives aux communications était devenue un outil fondamental de la lutte anti-terroriste, utilisé par l’ensemble des services spécialisés dans le monde. Il est donc préférable de disposer d’un cadre juridique clair dans ce domaine, définissant précisément les données qui peuvent être transmises, les situations dans lesquelles il est acceptable de les transmettre ainsi que les conditions d’habilitation et de traçabilité des demandes.

Entre début mai 2007, date de mise en œuvre opérationnelle du dispositif, et fin août 2008, 49 896 demandes (19) ont été adressées aux opérateurs, concernant principalement la téléphonie mobile (78,45 %), la téléphonie fixe (18 %) et Internet (3,55 %) (20). Ces demandes concernent le plus souvent, dans 73 % des cas, des demandes relatives à l’identification du titulaire d’un abonnement, par exemple obtenir l’identité du titulaire d’une ligne à partir du numéro de téléphone (prestation d’annuaire inversé). Les demandes peuvent également concerner la liste des communications d’un abonné, l’ensemble des informations concernant un abonné, la copie d’un document contractuel, les données relatives à la géolocalisation. Il est intéressant de remarquer que la CNCIS, de même que la personnalité qualifiée, « module le seuil de son exigence quant à la motivation en fonction du caractère plus ou moins intrusif de la prestation sollicitée au regard des libertés individuelles ». (21)

La procédure est très rapide puisque la réponse des opérateurs intervient généralement dans un délai de 24 à 48 heures après la demande initiale. Cependant, en cas d’urgence, il est possible d’obtenir une information en quelques heures.

En 2007, sur les 27 701 demandes présentées, 25 982 ont été validées par la personnalité qualifiée (soit un taux de 93,8 %), 243 ont fait l’objet d’un refus (soit 0,87 % des demandes) (22) et 1 476 ont fait l’objet de demandes complémentaires (5,3 %).

Ainsi, le dispositif de contrôle prévu par la loi du 23 janvier 2006 fonctionne bien. En amont, la personnalité qualifiée prend des décisions qui ne peuvent être contestées par les services, en se fondant sur le dialogue constant qu’elle entretient avec la CNCIS, chargée du contrôle a posteriori. Cette autorité administrative indépendante organise en effet des réunions bimensuelles avec la personnalité qualifiée afin d’harmoniser les critères d’appréciation du motif terroriste. Le rapport annuel 2007 de la CNCIS (23) précise ainsi que « une dizaine d’observations est ainsi faite, à chaque réunion, à la « personnalité qualifiée » qui en tient compte par la suite lors de l’examen de nouvelles demandes. Cette méthode a permis de limiter pour l’instant, le recours à la procédure formelle de la «recommandation» au ministre de l’Intérieur (…). Pour l’instant, une seule recommandation a été formulée dans un cas de manque de base légale ».

Notre collègue Éric Diard, dans le rapport d’application précité, après avoir rencontré le président de la CNCIS, a donc pu indiquer que « la satisfaction autour du dispositif est partagée par l’autorité qui est chargée de son contrôle la CNCIS, laquelle estime qu’il a été mis en œuvre de façon très positive et se félicite des modalités de son propre contrôle ». Il note d’ailleurs que cette appréciation positive est également partagée par les opérateurs de communication électronique, qui se félicitent de la relation professionnelle de qualité qu’ils ont avec l’UCLAT.

Après deux ans de mise en œuvre effective du dispositif, celui-ci a su montrer son utilité dans le cadre de la prévention du terrorisme, tout en utilisant des moyens proportionnés au regard du respect de la vie privée des citoyens.

À cet égard, votre rapporteur voudrait rappeler que la réquisition des données techniques relatives aux communications constitue une démarche beaucoup moins intrusive pour la vie privée que la pratique des écoutes téléphoniques. Comme l’indique d’ailleurs la CNCIS, dans son rapport annuel, « l’écoute de la teneur des conversations des individus suspectés de terrorisme, lesquels sont par définition méfiants et prudents lorsqu’ils communiquent entre eux, est moins intéressante d’un point de vue opérationnel que le recueil des «données techniques» de ces communications ».

Dans ces conditions, il était indispensable que la législation française s’adapte à l’évolution des technologies et des méthodes des terroristes. Ainsi, de même qu’il existe un cadre législatif permanent dans le domaine des interceptions de sécurité, la loi n° 91-646 du 10 juillet 1991, votre rapporteur considère que le cadre législatif organisant la réquisition administrative des données de communication devra, à terme, être pérennisé. Il ne s’agit en effet pas d’une mesure d’exception, qui ne serait acceptable que parce qu’elle serait prise à titre temporaire, mais d’une mesure nécessaire à la protection de la société, parfaitement proportionnée dans ses moyens, comme l’a d’ailleurs relevé le Conseil constitutionnel.

IV. L’ARTICLE 9 AUTORISE LES SERVICES DE LUTTE CONTRE LE TERRORISME À ACCÉDER À CERTAINS FICHIERS ADMINISTRATIFS

A. UN ACCÈS PLUS DIRECT À DES FICHIERS ADMINISTRATIFS

L’article 9 de la loi du 23 janvier 2006 a facilité l’accès par les agents chargés de la lutte contre le terrorisme (24) à des informations dont ils pouvaient déjà avoir connaissance, notamment par l’intermédiaire des fonctionnaires des préfectures.

En effet, les fichiers administratifs énumérés par l’article 9 sont des fichiers qui ne contiennent pas de données sensibles. Bien que gérés majoritairement par le ministère de l’intérieur, ces fichiers se distinguent nettement des « fichiers de police » qui contiennent de telles données, tels que le STIC, JUDEX, le FNAEG ou le FIGEAIS. Les modalités de consultation spécifiques de ces fichiers ne sont pas concernées par l’article 9 de la loi anti-terroriste. Celle-ci permet donc un accès direct aux fichiers suivants :

—  le fichier national des immatriculations ;

—  le système national de gestion des permis de conduire ;

—  le système de gestion des cartes nationales d’identité ;

—  le système de gestion des passeports (DELPHINE) (25) ;

—  le système informatisé de gestion des dossiers des ressortissants étrangers en France (AGDREF) ;

—  l’application destinée à gérer les données concernant les ressortissants étrangers qui ne remplissent pas les conditions d’entrée sur le territoire français (fichier des non admis);

—  le système de délivrance des visas des ressortissants étrangers (VISABIO).

L’ensemble des actes réglementaires créant ces fichiers a été modifié afin de permettre leur consultation par les agents chargés de la lutte contre le terrorisme en application de l’article 9 de la loi du 23 janvier 2006. Cependant, cette disposition législative n’étant applicable que jusqu’au 31 décembre 2008, les dispositions réglementaires d’application ont également été prises temporairement et expireront au 31 décembre 2008. Lorsque la présente proposition de loi aura été adoptée et promulguée, il sera donc nécessaire de modifier dans les plus brefs délais les dispositions réglementaires précitées afin de proroger également leur application (26).

B. UNE CONSULTATION DIRECTE TRÈS PRÉCIEUSE DANS LA LUTTE CONTRE LE TERRORISME

Avant 2006, lorsqu’un agent des services de renseignement avait besoin d’une information contenue dans un fichier administratif, il lui fallait s’adresser à un fonctionnaire disposant d’un accès à ces fichiers. Ainsi, lorsque les services britanniques ont demandé à leurs collègues français des précisions sur l’identité de victimes françaises potentielles des attentats de Londres de juillet 2005, ceux-ci ont interrogé les services préfectoraux afin qu’ils leur communiquent les informations nécessaires après consultation du fichier des cartes nationales d’identité. Malheureusement, la demande ayant été formulée au lendemain des attentats, soit un vendredi soir, l’information ne fut communiquée que le lundi suivant.

Désormais, les terminaux informatiques CHEOPS qui équipent les services de police chargés de la lutte contre le terrorisme permettent aux agents qui ont été précédemment habilités d’accéder directement aux informations contenues dans ces fichiers. Cet accès direct a trois avantages essentiels :

—  la réactivité : les informations peuvent être consultées sept jours sur sept et 24 heures sur 24 ;

—  la confidentialité. En effet, si les informations consultées ne sont pas confidentielles, il peut néanmoins être préférable de ne pas faire savoir à un tiers que les services de lutte contre le terrorisme sont intéressés par la situation administrative d’une personne ou par le numéro d’immatriculation de sa voiture ;

—  la traçabilité : contrairement au système précédent, toutes les demandes de consultation de fichiers sont mémorisées, permettant de vérifier a posteriori leur caractère justifié ou non. D’après M. Christophe Chaboud, chef de l’UCLAT, aucun abus n’a jusque-là été constaté quant à la consultation de ces fichiers par des agents des services chargés de la lutte contre le terrorisme.

Les informations présentes dans les fichiers administratifs du ministère de l’intérieur et de l’immigration peuvent être très utiles aux services chargés de la lutte contre le terrorisme. Elles permettent tout d’abord de contribuer à la détection de fausses identités, très fréquentes en matière de terrorisme. La vérification de l’immatriculation des véhicules est également essentielle, compte tenu notamment de l’utilisation habituelle de véhicules volés par les membres de l’ETA.

L’article 9 permet également, d’après le rapport annuel 2008 fourni par le ministère de l’Intérieur, de découvrir des éléments de localisation, ou des liens avec d’autres personnes, ou encore d’établir l’origine frauduleuse de documents retrouvés lors de perquisitions ou fournis à des loueurs et ainsi de remonter des filières de fabrication de faux documents.

Votre rapporteur considère donc que la consultation directe, mais encadrée, de fichiers administratifs par les services de lutte contre le terrorisme est une mesure de bon sens, qui doit bien évidemment être prolongée au-delà du 31 décembre 2008. Si, dans un premier temps, la proposition de loi que nous examinons permettra de prolonger l’application de cette disposition pour quatre nouvelles années, votre rapporteur considère, là encore, qu’il faudra ensuite la pérenniser.

EXAMEN EN COMMISSION

La Commission examine la proposition de loi, adoptée par le Sénat, au cours de sa séance du mercredi 19 novembre 2008. Après l’exposé du rapporteur, une discussion générale a lieu.

Mme Delphine Batho. Il est indéniable que la menace terroriste demeure. Il est tout autant indéniable que les services de renseignement ont besoin d’outils juridiques pour prévenir les risques d’attentats. Ces outils, le groupe SRC ne les a jamais refusés.

Lors du vote de la loi du 23 janvier 2006 relative à la lutte contre le terrorisme et portant dispositions diverses relatives à la sécurité et aux contrôles frontaliers, nous nous étions abstenus car si nous trouvions certaines de ses dispositions contestables, nous reconnaissions que d’autres avaient une portée utile. Parmi elles, figurent deux de celles concernées par la proposition de loi soumise à notre examen aujourd’hui.

Pour mémoire, le débat parlementaire qui s’est tenu en 2006 avait débouché sur une extension des pouvoirs conférés aux services de renseignement en amont de l’ouverture de procédures judiciaires en contrepartie d’un engagement du pouvoir exécutif en faveur d’un contrôle démocratique sur le fonctionnement de ces services. Cette perspective avait pesé en faveur de notre abstention. Malheureusement, la délégation parlementaire au renseignement, créée ultérieurement, dispose de compétences limitées, ce qui a justifié que nous nous votions contre le texte l’instituant, alors même que telle n’était pas notre intention initiale.

S’agissant des dispositions de la loi n° 2006-64 qu’il est question de proroger, nous faisons une distinction entre celles des articles 6 et 9, qui fonctionnent et font l’objet de contrôles pertinents, et celles de l’article 3, dont on peine à voir l’intérêt qu’elles présentent pour la lutte contre le terrorisme, à la différence de la répression de l’immigration irrégulière, qui est un autre sujet.

Plus que le fond, c’est la forme qui nous paraît contestable. En privilégiant une proposition de loi au détriment d’un nouveau projet rendu nécessaire par le caractère temporaire des articles en cause, le Gouvernement esquive un débat parlementaire sur le bien-fondé et l’efficacité des mesures prévues en 2006. Il est pour le moins dérangeant que la ministre de l’intérieur ait laissé la majorité parlementaire prendre à sa charge un sujet qui relevait directement de sa responsabilité et que notre rapporteur nous invite à un vote conforme de l’article unique adopté par le Sénat.

Nous nous trouvons ainsi mis devant le fait accompli d’un débat tronqué et quasiment clos alors même que nous ne cessons, depuis plusieurs semaines, de réclamer l’organisation d’un véritable débat sur le fonctionnement des services de renseignement et leur contrôle démocratique.

Pour conclure, bien que nous reconnaissions que deux des trois dispositions visées par la proposition de loi doivent être prorogées pour une durée limitée et non indéfinie, nous ne pouvons absolument pas approuver le texte dont nous débattons aujourd’hui en raison de la méthode contestable sur laquelle repose son adoption.

M. le Président Warsmann. Chère collègue, il ne faut pas dévaloriser l’initiative parlementaire des lois…

M. Michel Hunault. J’aurais aimé que le rapporteur dresse un bilan des dispositions qu’il est question de proroger. En 2006, le législateur avait veillé à concilier l’impératif de lutter contre le terrorisme avec celui de respecter les libertés individuelles, notamment en se conformant aux engagements internationaux et européens de la France en la matière. Nous ne devons pas nous départir aujourd’hui de cet équilibre.

Ce qui me gêne dans la présentation qu’a faite notre rapporteur, c’est la référence à l’immigration clandestine. Je ne voudrais pas qu’à travers ce texte, nous nous trompions d’objectif. Les mesures soumises à notre examen doivent respecter le cadre et l’esprit du travail réalisé par le législateur en 2006.

M. le rapporteur. L’application de la loi a déjà fait l’objet d’un premier bilan par nos collègues Éric Diard et Julien Dray, qui ont présenté un rapport évaluant l’efficacité de cette loi devant notre Commission, en février dernier.

Je peux néanmoins vous donner des informations supplémentaires. Concernant l’article 6, je peux par exemple vous indiquer que 49 896 demandes d’accès à des données techniques ont été effectuées par les services de lutte contre le terrorisme entre mai 2007 et août 2008. Pour la seule année 2007, 27 702 demandes ont été faites : 25 982 ont été validées par la personnalité qualifiée, 243 ont été refusées et 1476 ont fait l’objet de demandes complémentaires. Enfin, j’ai pu constater, au travers des auditions que j’ai réalisées, que le dispositif donnait satisfaction aux services de lutte contre le terrorisme, en répondant parfaitement bien à leurs besoins.

S’agissant des contrôles d’identité et de leur lien avec la lutte contre l’immigration clandestine, il est important de comprendre que ces contrôles ne peuvent pas être ciblés pour une finalité spécifique. En effet, ces contrôles sont aléatoires. Lorsqu’ils sont pratiqués, ils peuvent tout aussi bien révéler qu’une personne est en situation irrégulière ou qu’elle fait l’objet d’une surveillance par les services de lutte contre le terrorisme. Je rappelle qu’au premier semestre 2008, 48 personnes contrôlées par le service national de police ferroviaire se trouvaient dans ce cas. Il n’y a pas une volonté spécifique, dans ce cadre, de lutter contre l’immigration clandestine, mais ces contrôles aléatoires permettent également de participer à cette mission.

La commission passe ensuite à l’examen de l’article unique de la proposition de loi.

La Commission adopte cet article sans modification, la proposition de loi étant ainsi adoptée sans modification.

*

* *

En conséquence, la commission des Lois constitutionnelles, de l’administration et de la législation générale de la République vous demande d’adopter, sans modification, la proposition de loi, adoptée par le Sénat (n° 1233), visant à prolonger l’application des articles 3, 6 et 9 de la loi n° 2006-64 du 23 janvier 2006 relative à la lutte contre le terrorisme et portant dispositions diverses relatives à la sécurité et aux contrôles frontaliers.

TABLEAU COMPARATIF

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Texte en vigueur

___

Texte adopté par le Sénat

___

Propositions de la Commission

___

 

Proposition de loi visant à prolonger l’application des articles 3, 6 et 9 de la loi n° 2006-64 du 23 janvier 2006 relative à la lutte contre le terrorisme et portant dispositions diverses relatives à la sécurité et aux contrôles frontaliers

Proposition de loi visant à prolonger l’application des articles 3, 6 et 9 de la loi n° 2006-64 du 23 janvier 2006 relative à la lutte contre le terrorisme et portant dispositions diverses relatives à la sécurité et aux contrôles frontaliers

Loi n° 2006-64 du 23 janvier 2006 relative à la lutte contre le terrorisme et portant dispositions diverses relatives à la sécurité et aux contrôles frontaliers

Article unique

Article unique

Art. 32. —  Les dispositions des articles 3, 6 et 9 sont applicables jusqu’au 31 décembre 2008.

Au premier alinéa de l’article 32 de la loi n° 2006-64 du 23 janvier 2006 relative à la lutte contre le terrorisme et portant dispositions diverses relatives à la sécurité et aux contrôles frontaliers, les mots : « jusqu’au 31 décembre 2008 » sont remplacés par les mots : « jusqu’au 31 décembre 2012 ».

(Sans modification)

Le Gouvernement remet chaque année au Parlement un rapport sur l’application de la présente loi.

   

Art. 3, 6 et 9. —  Cf. annexe.

   
     

ANNEXE AU TABLEAU COMPARATIF

Code de procédure pénale 26

Art. 78-2.

Loi n° 2006-64 du 23 janvier 2006 relative à la lutte contre le terrorisme et portant dispositions diverses relatives à la sécurité et aux contrôles frontaliers 27

Art. 3, 6 et 9.

Arrêté du 31 mars 2006 pris pour l’application de l’article 33 de la loi n° 2006-64 du 23 janvier 2006 relative à la lutte contre le terrorisme et portant dispositions diverses relatives à la sécurité et aux contrôles frontaliers 30

Code de procédure pénale

Art. 78-2. —  Les officiers de police judiciaire et, sur l’ordre et sous la responsabilité de ceux-ci, les agents de police judiciaire et agents de police judiciaire adjoints mentionnés aux articles 20 et 21-1 peuvent inviter à justifier, par tout moyen, de son identité toute personne à l’égard de laquelle existe une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner :

—  qu’elle a commis ou tenté de commettre une infraction ;

—  ou qu’elle se prépare à commettre un crime ou un délit ;

—  ou qu’elle est susceptible de fournir des renseignements utiles à l’enquête en cas de crime ou de délit ;

—  ou qu’elle fait l’objet de recherches ordonnées par une autorité judiciaire.

Sur réquisitions écrites du procureur de la République aux fins de recherche et de poursuite d’infractions qu’il précise, l’identité de toute personne peut être également contrôlée, selon les mêmes modalités, dans les lieux et pour une période de temps déterminés par ce magistrat. Le fait que le contrôle d’identité révèle des infractions autres que celles visées dans les réquisitions du procureur de la République ne constitue pas une cause de nullité des procédures incidentes.

L’identité de toute personne, quel que soit son comportement, peut également être contrôlée, selon les modalités prévues au premier alinéa, pour prévenir une atteinte à l’ordre public, notamment à la sécurité des personnes ou des biens.

Dans une zone comprise entre la frontière terrestre de la France avec les États parties à la convention signée à Schengen le 19 juin 1990 et une ligne tracée à vingt kilomètres en deçà, ainsi que dans les zones accessibles au public des ports, aéroports et gares ferroviaires ou routières ouverts au trafic international et désignés par arrêté l’identité de toute personne peut également être contrôlée, selon les modalités prévues au premier alinéa, en vue de vérifier le respect des obligations de détention, de port et de présentation des titres et documents prévues par la loi. Lorsque ce contrôle a lieu à bord d’un train effectuant une liaison internationale, il peut être opéré sur la portion du trajet entre la frontière et le premier arrêt qui se situe au-delà des vingt kilomètres de la frontière. Toutefois, sur celles des lignes ferroviaires effectuant une liaison internationale et présentant des caractéristiques particulières de desserte, le contrôle peut également être opéré entre cet arrêt et un arrêt situé dans la limite des cinquante kilomètres suivants. Ces lignes et ces arrêts sont désignés par arrêté ministériel. Lorsqu’il existe une section autoroutière démarrant dans la zone mentionnée à la première phrase du présent alinéa et que le premier péage autoroutier se situe au-delà de la ligne des vingt kilomètres, le contrôle peut en outre avoir lieu jusqu’à ce premier péage sur les aires de stationnement ainsi que sur le lieu de ce péage et les aires de stationnement attenantes. Les péages concernés par cette disposition sont désignés par arrêté. Le fait que le contrôle d’identité révèle une infraction autre que celle de non-respect des obligations susvisées ne constitue pas une cause de nullité des procédures incidentes.

Dans une zone comprise entre les frontières terrestres ou le littoral du département de la Guyane et une ligne tracée à vingt kilomètres en deçà, et sur une ligne tracée à cinq kilomètres de part et d’autre, ainsi que sur la route nationale 2 sur le territoire de la commune de Régina, l’identité de toute personne peut être contrôlée, selon les modalités prévues au premier alinéa, en vue de vérifier le respect des obligations de détention, de port et de présentation des titres et documents prévus par la loi.

Pendant cinq ans à compter de la publication de la loi n° 2006-911 du 24 juillet 2006 relative à l’immigration et à l’intégration, l’identité de toute personne peut également être contrôlée, selon les modalités prévues au premier alinéa du présent article, en vue de vérifier le respect des obligations de détention, de port et de présentation des titres et documents prévus par la loi :

1° En Guadeloupe, dans une zone comprise entre le littoral et une ligne tracée à un kilomètre en deçà, ainsi que dans une zone d’un kilomètre de part et d’autre, d’une part, de la route nationale 1 sur le territoire des communes de Basse-Terre, Gourbeyre et Trois-Rivières et, d’autre part, de la route nationale 4 sur le territoire des communes du Gosier et de Sainte-Anne et Saint-François ;

2° À Mayotte, dans une zone comprise entre le littoral et une ligne tracée à un kilomètre en deçà.

Loi n° 2006-64 du 23 janvier 2006 relative à la lutte contre le terrorisme et portant dispositions diverses relatives à la sécurité
et aux contrôles frontaliers

Art. 3. —  I. —  Après la première phrase du huitième alinéa de l’article 78-2 du code de procédure pénale, sont insérées trois phrases ainsi rédigées :

« Lorsque ce contrôle a lieu à bord d’un train effectuant une liaison internationale, il peut être opéré sur la portion du trajet entre la frontière et le premier arrêt qui se situe au-delà des vingt kilomètres de la frontière. Toutefois, sur celles des lignes ferroviaires effectuant une liaison internationale et présentant des caractéristiques particulières de desserte, le contrôle peut également être opéré entre cet arrêt et un arrêt situé dans la limite des cinquante kilomètres suivants. Ces lignes et ces arrêts sont désignés par arrêté ministériel. »

II. —  Dans la deuxième phrase du huitième alinéa du même article, les mots : « mentionnée ci-dessus » sont remplacés par les mots : « mentionnée à la première phrase du présent alinéa ».

Art. 6. —  I. —  Après l’article L. 34-1 du code des postes et des communications électroniques, il est inséré un article L. 34-1-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 34-1-1. —  Afin de prévenir les actes de terrorisme, les agents individuellement désignés et dûment habilités des services de police et de gendarmerie nationales spécialement chargés de ces missions peuvent exiger des opérateurs et personnes mentionnés au I de l’article L. 34-1 la communication des données conservées et traitées par ces derniers en application dudit article.

« Les données pouvant faire l’objet de cette demande sont limitées aux données techniques relatives à l’identification des numéros d’abonnement ou de connexion à des services de communications électroniques, au recensement de l’ensemble des numéros d’abonnement ou de connexion d’une personne désignée, aux données relatives à la localisation des équipements terminaux utilisés ainsi qu’aux données techniques relatives aux communications d’un abonné portant sur la liste des numéros appelés et appelants, la durée et la date des communications.

« Les surcoûts identifiables et spécifiques éventuellement exposés par les opérateurs et personnes mentionnés au premier alinéa pour répondre à ces demandes font l’objet d’une compensation financière.

« Les demandes des agents sont motivées et soumises à la décision d’une personnalité qualifiée, placée auprès du ministre de l’intérieur. Cette personnalité est désignée pour une durée de trois ans renouvelable par la Commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité sur proposition du ministre de l’intérieur qui lui présente une liste d’au moins trois noms. Des adjoints pouvant la suppléer sont désignés dans les mêmes conditions. La personnalité qualifiée établit un rapport d’activité annuel adressé à la Commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité. Les demandes, accompagnées de leur motif, font l’objet d’un enregistrement et sont communiquées à la Commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité.

« Cette instance peut à tout moment procéder à des contrôles relatifs aux opérations de communication des données techniques. Lorsqu’elle constate un manquement aux règles définies par le présent article ou une atteinte aux droits et libertés, elle saisit le ministre de l’intérieur d’une recommandation. Celui-ci lui fait connaître dans un délai de quinze jours les mesures qu’il a prises pour remédier aux manquements constatés.

« Les modalités d’application des dispositions du présent article sont fixées par décret en Conseil d’État, pris après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés et de la Commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité, qui précise notamment la procédure de suivi des demandes et les conditions et durée de conservation des données transmises. »

II. —  Après le II de l’article 6 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique, il est inséré un II bis ainsi rédigé :

« II bis. —  Afin de prévenir les actes de terrorisme, les agents individuellement désignés et dûment habilités des services de police et de gendarmerie nationales spécialement chargés de ces missions peuvent exiger des prestataires mentionnés aux 1 et 2 du I la communication des données conservées et traitées par ces derniers en application du présent article.

« Les demandes des agents sont motivées et soumises à la décision de la personnalité qualifiée instituée par l’article L. 34-1-1 du code des postes et des communications électroniques selon les modalités prévues par le même article. La Commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité exerce son contrôle selon les modalités prévues par ce même article.

« Les modalités d’application des dispositions du présent II bis sont fixées par décret en Conseil d’État, pris après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés et de la Commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité, qui précise notamment la procédure de suivi des demandes et les conditions et durée de conservation des données transmises. »

III. —  1. À la fin de la seconde phrase du premier alinéa de l’article 4 de la loi n° 91-646 du 10 juillet 1991 relative au secret des correspondances émises par la voie des communications électroniques, les mots : « ou de la personne que chacun d’eux aura spécialement déléguée » sont remplacés par les mots : « ou de l’une des deux personnes que chacun d’eux aura spécialement déléguées ».

2. Dans la première phrase du premier alinéa de l’article 19 de la même loi, les mots : « de l’article 14 et » sont remplacés par les mots : « de l’article 14 de la présente loi et au ministre de l’intérieur en application de l’article L. 34-1-1 du code des postes et des communications électroniques et de l’article 6 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique, ainsi que ».

3. La même loi est complétée par un titre V intitulé : « Dispositions finales » comprenant l’article 27 qui devient l’article 28.

4. Il est inséré, dans la même loi, un titre IV ainsi rédigé :

« Titre IV

« Communication des données techniques relatives à des communications électroniques

« Art. 27. —  La Commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité exerce les attributions définies à l’article L. 34-1-1 du code des postes et des communications électroniques et à l’article 6 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique en ce qui concerne les demandes de communication de données formulées auprès des opérateurs de communications électroniques et personnes mentionnées à l’article L. 34-1 du code précité ainsi que des prestataires mentionnés aux 1 et 2 du I de l’article 6 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 précitée. »

Art. 9. —  Pour les besoins de la prévention et de la répression des actes de terrorisme, les agents individuellement désignés et dûment habilités des services de police et de gendarmerie nationales spécialement chargés de ces missions peuvent, dans les conditions fixées par la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 précitée, avoir accès aux traitements automatisés suivants :

—  le fichier national des immatriculations ;

—  le système national de gestion des permis de conduire ;

—  le système de gestion des cartes nationales d’identité ;

—  le système de gestion des passeports ;

—  le système informatisé de gestion des dossiers des ressortissants étrangers en France ;

—  les données à caractère personnel, mentionnées aux articles L. 611-3 à L. 611-5 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, relatives aux ressortissants étrangers qui, ayant été contrôlés à l’occasion du franchissement de la frontière, ne remplissent pas les conditions d’entrée requises ;

—  les données à caractère personnel mentionnées à l’article L. 611-6 du même code.

Pour les besoins de la prévention des actes de terrorisme, les agents des services de renseignement du ministère de la défense individuellement désignés et dûment habilités sont également autorisés, dans les conditions fixées par la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 précitée, à accéder aux traitements automatisés mentionnés ci-dessus.

Un arrêté du ministre de l’intérieur et du ministre de la défense détermine les services de renseignement du ministère de la défense qui sont autorisés à consulter lesdits traitements automatisés.

Arrêté du 31 mars 2006 pris pour l’application de l’article 33 de la loi n° 2006-64 du 23 janvier 2006 relative à la lutte contre le terrorisme et portant dispositions diverses relatives à la sécurité et aux contrôles frontaliers

Art. 1er. —  Pour l’application des articles 6, 7, 8, 9 et 12 de la loi du 23 janvier 2006 susvisée, les services et unités de la police nationale spécialement chargés de la prévention et de la répression des actes de terrorisme sont :

I. —  Pour la prévention des actes de terrorisme :

1° L’unité de coordination de la lutte antiterroriste (UCLAT) à la direction générale de la police nationale ;

2° Les groupes, sections et unités de recherche spécialement chargés de la lutte contre le terrorisme au sein de la direction du renseignement de la préfecture de police.

II. —  Pour la prévention et la répression des actes de terrorisme :

1° Les services et unités spécialement chargés de la lutte contre le terrorisme au sein de la direction centrale du renseignement intérieur ;

2° Les services de police judiciaire ci-après désignés :

—  la sous-direction antiterroriste de la direction centrale de la police judiciaire ;

—  la division de coordination et d’analyse de la sous-direction de la lutte contre la criminalité organisée et la délinquance financière de la direction centrale de la police judiciaire ;

—  la division des supports opérationnels de la sous-direction de la lutte contre la criminalité et la délinquance financière de la direction centrale de la police judiciaire ;

—  les directions interrégionales et régionales de la police judiciaire.

Art. 2. —  Pour l’application des articles 6, 7, 8, 9 et 12 de la loi du 23 janvier 2006 susvisée, les services et unités de la gendarmerie nationale spécialement chargées de la prévention et de la répression des actes de terrorisme sont :

1° Les services et unités relevant de la sous-direction de la police judiciaire ci-après désignés :

—  le bureau de la lutte anti-terroriste ;

—  le service technique de recherches judiciaires et de documentation ;

2° Les sections de recherches.

Art. 3. —  Pour l’application des articles 6, 7, 8, 9 et 12 de la loi du 23 janvier 2006 susvisée, sont également au nombre des services et unités de police et de gendarmerie spécialement chargés de la prévention et de la répression des actes de terrorisme les offices centraux de police judiciaire désignés ci-après :

—  Office central de lutte contre le crime organisé ;

—  l’Office central pour la répression de la grande délinquance financière ;

—  l’Office central pour la répression de l’immigration irrégulière et de l’emploi d’étrangers sans titre ;

—  l’Office central de lutte contre la criminalité liée aux technologies de l’information et de la communication ;

—  l’Office central de lutte contre les atteintes à l’environnement et à la santé publique.

PERSONNES ENTENDUES PAR LE RAPPORTEUR

– M. Christophe CHABOUD, chef de l’unité de coordination de la lutte antiterroriste (UCLAT) à la Direction générale de la police aux frontières ;

– M. Michel FELKAY, sous-directeur chargé du service national de la police ferroviaire à la Direction centrale de la police aux frontières.

© Assemblée nationale

1 () Du moins en ce qui concerne la DST (de même pour la Direction centrale du renseignement intérieure – DCRRI depuis le 1er juillet 2008) qui était à la fois un service de renseignement classique et un service de police judiciaire).

2 () Rapport d’information n° 683 par MM. Éric Diard, rapporteur et Julien Dray, co-rapporteur au nom de la commission des Lois.

3 () À la suite de l’abrogation de l’article 1er de l’ordonnance du 2 janvier 1959 à l’occasion de l’entrée en vigueur la loi organique relative aux lois de finances (LOLF), la définition des lois de programme résultait uniquement de l’article 34 de la Constitution, qui était limité au seul domaine économique ou social. Le Conseil constitutionnel (décision n° 2004-500 DC du 29 juillet 2004) appliquant strictement cette disposition, la présentation d’une nouvelle loi de programmation dans le domaine de la sécurité intérieure nécessitait l’adoption préalable d’une modification constitutionnelle, intervenue à l’occasion de la révision du 23 juillet 2008 (article 11).

4 () La CNCIS, autorité administrative indépendante créée en 1991,est composée de trois membres : son président, nommé par décret du président de la République (M. Jean-Louis Dewost), un député (M. Daniel Vaillant) et un sénateur. La CNCIS a une mission de contrôle de l’application de l’article 6 de la loi du 23 janvier 2006.

5 () La convention est entrée en vigueur le 26 juin 1995. L’espace Schengen comprend aujourd’hui treize États de l’Union européenne (l’Allemagne, l’Autriche, la Belgique, le Danemark, l’Espagne, la Finlande, la France, la Grèce, l’Italie, le Luxembourg, les Pays-Bas, le Portugal et la Suède) et deux États qui n’en sont pas membres (Norvège, Islande).

6 () Soit les frontières entre la France d’une part et la Belgique, l’Allemagne, le Luxembourg, l’Italie et l’Espagne d’autre part. Un accord d’association Schengen entre la Suisse et l’UE a été approuvé par votation le 5 juin 2005 et est entré en vigueur le 1er mars 2008. L’ouverture des frontières terrestres est envisagée pour le 12 décembre 2008, et celle des frontières aériennes pour le 29 mars 2009.

7 () À 300 km/h, un TGV parcourt la distance des 20 kilomètres en 4 minutes.

8 () Rapport annuel 2008 sur la mise en œuvre des articles 3, 6 et 9 de la loi anti-terroriste du 23 janvier 2006.

9 () D’après l’arrêté du 26 avril 2006 : sur les liaisons franco-allemandes, ces arrêts sont Saverne, Nancy ou Paris-Est (selon le premier arrêt du train) ; sur les liaisons franco-belges, les arrêts sont Douai, Paris-Nord, la gare TGV Haute-Picardie ou gare TGV aéroport Charles-de-Gaulle ; sur les liaisons franco-espagnoles, les arrêts sont Perpignan, Limoges ou Poitiers ; sur les liaisons franco-italiennes (ligne Bardonècchia-Barcelone), Perpignan.

10 () D’après l’arrêté du 26 avril 2006, sur la ligne Sarrebruck (Allemagne)-Metz, les contrôles peuvent avoir lieu jusqu’à Metz ; sur la ligne Irun (Espagne)-Lyon, jusqu’à Dax ; sur la ligne Bardonècchia (Italie)-Chambéry, jusqu’à Saint-Jean-de-Maurienne ou Chambéry ; sur la ligne Coni (Italie)-Toulon, jusqu’à Saint-Raphaël ; sur la ligne Vintimille (Italie)-Marseille, jusqu’à Nice, Cannes, Mandelieu-La Napoule ou Saint-Raphaël, selon les arrêts et le terminus du train ; sur les lignes Luxembourg-Paris et Luxembourg-Metz, jusqu’à Metz ; sur les lignes Luxembourg-Nancy, jusqu’à Metz, Pont-à-Mousson, Pagny-sur-Moselle ou Nancy, selon les arrêts et le terminus du train.

11 () Rapport d’information n° 683 présenté par MM. Éric Diard, rapporteur et Julien Dray, co-rapporteur au nom de la commission des Lois, p. 30.

12 () Le SNPF rattaché à la direction centrale de la police aux Frontières, est chargé de coordonner au plan national l’action de l’ensemble des services de police, de gendarmerie et de la surveillance générale de la SNCF, concourant à la sécurité des réseaux ferrés. Il compte 680 agents en propre et peut compter sur un potentiel de 2500 policiers et gendarmes pour mener des opérations.

13 () Signé à Prüm (Allemagne) le 27 mai 2005 par sept États (Allemagne, Autriche, Belgique, Espagne, France, Luxembourg et Pays-Bas), ce traité vise à améliorer la coopération policière dans le domaine de la lutte contre le terrorisme, la criminalité transfrontalière et l’immigration illégale, en intensifiant les échanges d’informations et en renforçant la coopération opérationnelle transfrontalière.

14 () Rapport d’information n° 683 présenté par MM. Éric Diard, rapporteur et Julien Dray, co-rapporteur au nom de la commission des Lois, p. 30

15 () Cette disposition est applicable depuis la mise en œuvre du décret n°2006-1651 du 22 décembre 2006.

16 () Le décret d’application de cette disposition n’a pas encore été publié. D’après les informations données à votre rapporteur, le décret serait prêt et en attente des deniers contreseings nécessaires à sa publication.

17 () M. François Jaspart, inspecteur général de la police nationale, a été nommé en qualité de personnalité qualifiée pour une durée de trois ans, par décision de la CNCIS en date du 28 décembre 2006.

18 () Rapport d’information n°683 présenté par MM. Éric Diard, rapporteur et Julien Dray, co-rapporteur au nom de la commission des Lois, p. 22.

19 () Ce nombre ne correspond cependant pas au nombre de « cibles » des services de lutte contre le terrorisme, il n’est pas rare qu’une centaine de demandes soit réalisée concernant une même personne.

20 () Le nombre de demandes concernant Internet est en progression rapide et constante. Il connaîtra une nouvelle augmentation importante lorsque les services de lutte contre le terrorisme pourront faire des demandes aux hébergeurs de sites Internet.

21 () 16ème Rapport d’activité (2007) de la Commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité, p. 30.

22 () D’après le rapport d’application précité (n°683, p. 23) « Les cas de refus portent principalement sur des demandes qui ne relèvent pas de la prévention, mais de la répression du terrorisme (et donc doivent utiliser les outils juridiques offerts par la procédure pénale), ou sur des demandes insuffisamment motivées qui ne font pas apparaître le caractère terroriste de la menace. Par exemple, une pratique rigoureuse de l’islam n’est pas un élément suffisant pouvant justifier la mise en œuvre de la procédure ».

23 () p. 32.

24 () Sont concernés par ces dispositions les agents individuellement désignés et dûment habilités des services de police et de gendarmerie nationale spécialement chargés de la prévention et de la répression du terrorisme (voir en annexe l’arrêté du 31 mars 2006 modifié)ainsi que les agents individuellement désignés et dûment habilités chargés de la prévention du terrorisme des services de renseignement du ministère de la défense (direction générale de la sécurité extérieure, direction de la protection et de la sécurité de la défense, direction du renseignement militaire).

25 () Le décret n°2008-426 du 30 avril 2008 a créé le passeport biométrique. Son article 9 a prévu que l’image numérisée des empreintes digitales ne faisait pas partie des informations que peuvent consulter les agents chargés de la lutte contre le terrorisme.

26 () Votre rapporteur note que, à l’inverse, le décret d’application de l’article 6 de la loi du 23 janvier 2006 (décret n°2006-1651 du 22 décembre 2006) n’a pas été pris à titre temporaire. Ainsi, il ne sera pas nécessaire de modifier ce décret en cas d’adoption de la proposition de loi. Bien évidemment, ses dispositions ne pourraient cependant pas être mises en œuvre au-delà du 31 décembre 2008 en l’absence de base légale adaptée.