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Amendements  sur le projet ou la proposition

N° 1296

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 3 décembre 2008.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES, FAMILIALES ET SOCIALES SUR LA PROPOSITION DE LOI (n° 1254) de M. Richard MALLIÉ visant à définir les dérogations au repos dominical dans les grandes agglomérations, les zones touristiques et les commerces alimentaires,

PAR M. Richard MalliÉ,

Député.

——

INTRODUCTION 5

I.- LA QUESTION DU REPOS DOMINICAL RECOUVRE DES ENJEUX MULTIPLES 7

A. UN ENJEU JURIDIQUE 7

1. Dès l’origine, le principe du repos dominical comporte des dérogations 7

a) Le repos dominical a été généralisé en 1906 7

b) Le principe souffre des exceptions 8

2. Certaines situations juridiques sont à clarifier 10

a) Des situations de fait créent des ambiguïtés 10

b) Des lacunes sont source de problèmes 11

B. UN ENJEU ÉCONOMIQUE 12

1. Les effets du régime du repos dominical sont importants pour les entreprises 13

a) Ce régime est perçu par les acteurs économiques comme un obstacle au développement 13

b) Les entreprises sont fragilisées par les contentieux 13

2. Les attentes des consommateurs sont manifestes 14

a) La demande est avérée 15

b) La demande est localisée 15

C. UN ENJEU SOCIAL 15

1. Les évolutions sociales doivent être prises en compte 16

a) Les rythmes de vie se sont modifiés de manière importante 16

b) Les comportements d’achat des consommateurs ont évolué 18

2. Les attentes des salariés doivent être entendues 18

a) Les enquêtes d’opinion confirment les attentes des salariés 19

b) Pouvoir travailler le dimanche est une préoccupation majeure pour certaines catégories de salariés 19

II.- LE DISPOSITIF PROPOSÉ 21

A. LE PRINCIPE DU REPOS DOMINICAL N’EST PAS REMIS EN CAUSE 21

1. Le dimanche, repère et point d’ancrage, ne doit pas être un jour comme les autres 21

2. Le repos dominical reste le principe 21

3. Les adaptations proposées s’inscrivent dans une démarche pragmatique observée dans la plupart des pays européens 22

B. LA PROPOSITION DE LOI APPORTE DES RÉPONSES CIBLÉES À DES QUESTIONS SPÉCIFIQUES 23

1. Les dérogations accordées dans les zones touristiques sont clarifiées 24

2. La situation particulière des grandes agglomérations est prise en compte 24

3. Les dérogations accordées dans les commerces de détail alimentaire sont adaptées au mode de vie des Français 26

4. Les apports résultant de la discussion en commission des affaires culturelles, familiales et sociales 26

TRAVAUX DE LA COMMISSION 29

I.- DISCUSSION GÉNÉRALE 29

II.- EXAMEN DES ARTICLES 41

Article additionnel avant l’article 1er Principe du repos hebdomadaire dominical 41

Article 1erDéfinition des dérogations à la règle du repos dominical dans les zones touristiques et les zones d’attractivité commerciale exceptionnelle 42

Article 2 Modalités de mise en œuvre de l’obligation de fermeture dans les zones touristiques et commerciales 75

Article 3 Effet non suspensif des recours présentés contre les décisions d’autorisation de dérogation à la règle du repos dominical 78

Article 4 Report de midi à treize heures de l’heure à partir de laquelle peut être donné le repos dominical dans les commerces de détail alimentaire 81

Article 5 Autorisations délivrées sur le fondement de l’article L. 3132-20 du code du travail avant la promulgation de la loi 82

Après l’article 5 84

Article additionnel après l’article 5 : Non-application de la proposition de loi aux départements de la Moselle, du Bas-Rhin et du Haut-Rhin 84

Titre de la proposition de loi Proposition de loi visant à redéfinir la réglementation du repos dominical concernant les commerces, dans les grandes agglomérations et les zones touristiques 85

TEXTE ADOPTÉ PAR LA COMMISSION 87

AMENDEMENTS NON ADOPTÉS PAR LA COMMISSION 91

ANNEXES 95

ANNEXE 1 : Liste des personnes auditionnées 95

ANNEXE 2 :  Éléments de droit comparé européen 99

INTRODUCTION

Les enjeux que recouvre la question du repos dominical sont multiples.

Juridiques d’abord. On sait que le principe du repos dominical, posé par la loi du 13 juillet 1906, va de pair avec de très nombreuses dérogations. Ce constat n’est certes pas nouveau, mais la complexité des règles applicables confine aujourd’hui parfois à l’absurde. De l’incohérence, on passe dans certains cas à l’injustice. Le droit en vigueur dans les zones touristiques réserve ainsi trop souvent un sort différent à des situations pourtant comparables.

Économiques ensuite. La question des effets économiques des dérogations à la règle du repos dominical n’est pas une question facile, nul ne le conteste. Mais comment ne pas reconnaître la fragilité de très nombreuses entreprises, dont le chiffre d’affaires et l’emploi dépendent étroitement de cette question de l’évolution des dérogations au repos dominical ? Comment ne pas tenir compte de la demande réelle des consommateurs, en particulier dans les grandes agglomérations, en particulier lorsqu’ils sont jeunes ? Comment ne pas prendre en considération les évolutions du commerce, à commencer par le développement considérable des achats par internet ?

Sociaux enfin. Le dimanche n’est pas une journée comme les autres, ne l’a jamais été et ne doit en aucun cas le devenir. Peut-on en même temps ignorer les évolutions soulignées par de très nombreux sociologues, cette « nouvelle carte du temps » pour reprendre le mot de certains d’entre eux ? Doit-on méconnaître les rythmes quotidiens de nos concitoyens dans les grandes agglomérations ? Que dire de la demande d’un nombre non négligeable de salariés qui souhaitent travailler le dimanche, dont les étudiants ?

À l’évidence, la question de la définition des dérogations au repos dominical est complexe. Ses facettes multiples requièrent la vigilance dans les choix retenus. Ces difficultés n’exonèrent pas pour autant le législateur de sa responsabilité, comme l’a rappelé à plusieurs reprises le Président de la République.

Parce que les questions posées sont récurrentes et constituent autant d’interpellations, il était nécessaire de s’atteler à la tâche et de proposer des solutions.

Par deux fois, en 2007, le Conseil économique et social a conduit des études approfondies sur ce sujet : le rapport établi par M. Léon Salto sur la consommation, le commerce et les mutations de la société ainsi que l’étude présentée par M. Jean-Paul Bailly sur les mutations de la société et les activité dominicales constituent des analyses solides et doivent être salués.

Il y a une année environ, un groupe de travail a commencé à se réunir ; pendant plus de cinq mois, ce groupe, composé de députés aussi bien favorables que défavorables a priori à une évolution de la législation, a procédé à l’audition de multiples acteurs concernés par ces questions : partenaires sociaux, fédérations professionnelles, commerçants, salariés, etc. Les auditions menées dans le cadre de la préparation du présent rapport ont complété ce travail.

La proposition de loi soumise aujourd’hui à l’examen de l’Assemblée nationale est le fruit de cette longue réflexion.

Elle n’entend en rien remettre en cause le principe du repos dominical tel qu’il est posé dans le code du travail. Elle ne saurait être interprétée comme ouvrant la voie à une généralisation du travail dominical.

Sur quelques points bien identifiés, elle veut apporter des réponses ciblées à des questions spécifiques : en clarifiant les règles applicables dans les communes et les zones touristiques ; en prenant en compte la situation particulière qui prévaut dans les zones d’attractivité commerciale exceptionnelle des unités urbaines de plus d’un million d’habitants ; en mettant en adéquation avec les pratiques le régime des dérogations accordées dans les commerces de détail alimentaire.

Ces mesures correspondent à des préconisations du Conseil économique et social.

I.- LA QUESTION DU REPOS DOMINICAL
RECOUVRE DES ENJEUX MULTIPLES

La question de la définition des dérogations à la règle du repos dominical recouvre des enjeux qui sont à la fois juridiques, économiques et sociaux. Ces trois aspects de la question sont dissociés pour les besoins de l’analyse, même s’il est manifeste qu’ils sont liés les uns aux autres, que l’on se place du point de vue de l’entreprise, du salarié ou du consommateur.

A. UN ENJEU JURIDIQUE

La question de la définition des dérogations à la règle du repos dominical est d’abord juridique. L’histoire de la consécration juridique du repos dominical est en effet aussi celle du développement des dérogations à cette règle. Aujourd’hui, sur certains points, des clarifications s’imposent.

1. Dès l’origine, le principe du repos dominical comporte des dérogations

a) Le repos dominical a été généralisé en 1906

Le dimanche se caractérise à l’origine comme le premier jour de la semaine, tant dans la tradition judaïque que dans la tradition gréco-latine.

L’étymologie du mot dimanche rappelle sa portée religieuse puisqu’il signifie en latin ecclésiastique « jour du Seigneur » (dies dominicus ou dominica) : les premiers chrétiens se réunissaient ce jour-là en assemblée liturgique.

Comme l’expose l’historien Robert Beck dans son ouvrage consacré à « L’histoire du dimanche de 1700 à nos jours » (1), au fil de la laïcisation et de l’industrialisation de la société, le « dimanche du Seigneur » a peu à peu laissé place au « dimanche de fête ».

Cette évolution remonterait au début du XVIIIè siècle, soit aux prémices de l’industrialisation. Robert Beck rappelle que le calendrier révolutionnaire, établi en octobre 1793, a créé la décade en lieu et place de la semaine et le décadi comme jour chômé, supprimant ainsi le dimanche. Mais le rythme hebdomadaire fut réintroduit en 1806.

Une ordonnance – peu après transformée en loi – prise en 1814 par Louis XVIII précisa les modalités des interdits dominicaux, notamment l’interdiction d’ouvrir les commerces entre huit heures du matin et midi, sous peine d’amendes. Ce texte a été en application pendant une grande partie du XIXè siècle, en dépit de l’hostilité de certains : les ouvriers qui y voyaient un manque à gagner ou les républicains qui percevaient un élément de l’« ordre moral ».

Les lois de 1874 et de 1892, consacrées respectivement au travail des enfants et des femmes, ont posé la règle du repos dominical, mais c’est la loi du 13 juillet 1906 qui lui a conféré une portée générale.

Alors même que cette loi était adoptée, des dérogations très nombreuses ont été, pour des raisons multiples, accordées à la règle du repos dominical : on dénombrait ainsi, en 1913, 25 000 dérogations. Cette situation, plus d’un siècle après, prévaut toujours : le principe du repos hebdomadaire le dimanche est inchangé, mais il va de pair avec de nombreuses dérogations.

b) Le principe souffre des exceptions

Le code du travail interdit aujourd’hui à un employeur « de faire travailler un même salarié plus de six jours par semaine » (article L. 3132-1 du code du travail). Cette règle est le corollaire du principe – conforme aux exigences communautaires – selon lequel le repos hebdomadaire a une durée minimale de vingt-quatre heures consécutives, auxquelles s’ajoutent les heures consécutives de repos quotidien, soit un total de vingt-quatre plus onze heures, autrement dit trente-cinq heures (article L. 3132-2 du code du travail).

En outre, l’article L. 3132-3 du même code énonce expressément que « le repos hebdomadaire est donné le dimanche ».

La jurisprudence souligne l’importance de ce principe en censurant la violation de cette règle du repos dominical, constitutive d’un « trouble manifestement illicite » (Cass. soc., 13 juin 2007).

Mais le code du travail prévoit dans le même temps de très nombreuses dérogations à ce principe. Au total, aux termes des différents travaux qu’il a consacrés à cette question, le Conseil économique et social en dénombre aujourd’hui environ 180.

Ces dérogations relèvent de deux catégories.

Les premières, qui figurent à l’article L. 3132-12 du code du travail, sont permanentes.

Il s’agit de dérogations de plein droit : aucune autorisation particulière n’est donc requise. Ces dérogations s’appliquent dans un certain nombre de secteurs qui figurent à l’article R. 3132-5 du code du travail. Il s’agit de secteurs dont l’interruption est techniquement impossible ou dont la continuité est nécessaire à la vie sociale. Entrent par exemple dans ces catégories l’hôtellerie, les restaurants, les débits de boissons, les fleuristes, les entreprises de journaux et d’information, les entreprises de spectacles ou encore de nombreuses activités de service public.

Cette liste s’est étendue en 2005 à de nouvelles activités, parmi lesquelles les jardineries ou la location de DVD (digital video disk), entre autres. L’article 11 de la loi n° 2008-3 du 3 janvier 2008 pour le développement de la concurrence au service des consommateurs a ajouté à cette liste les établissements de commerce de détail d’ameublement.

L’article L. 3132-13 du code du travail pose une autre dérogation permanente de droit en donnant la possibilité aux commerces de détail alimentaire d’ouvrir le dimanche matin jusqu’à midi, quelle que soit leur taille.

Dans son rapport présenté en 2007 au nom du Conseil économique et social, consacré à la consommation, au commerce et aux mutations de la société, M. Léon Salto évalue à 40 % la proportion des supermarchés aujourd’hui ouverts, en application de cette disposition, le dimanche matin.

Il est également possible de mettre en œuvre par voie conventionnelle des dérogations, dans les industries où le travail est organisé en continu, dans lesquelles le repos hebdomadaire peut être ainsi attribué par roulement (articles L. 3132-14 et L. 3132-15 du code du travail).

La deuxième catégorie de dérogations est celle des dérogations temporaires. Celles-ci sont attribuées par le préfet ou par le maire.

● Les autorisations individuelles attribuées par arrêté préfectoral

– Aux termes de l’article L. 3132-20 du code du travail, à la demande d’une entreprise, le préfet peut accorder une autorisation pour une durée limitée, si l’entreprise qui en fait la demande démontre que « le repos simultané, le dimanche, de tous les salariés [de l’] établissement serait préjudiciable au public ou compromettrait le fonctionnement normal de cet établissement ».

Dans ce cas, le repos peut être attribué par le préfet selon l’une des modalités suivantes : un autre jour que le dimanche à tous les salariés de l’établissement ; du dimanche midi au lundi midi ; le dimanche après-midi avec un repos compensateur d’une journée par roulement et par quinzaine ; par roulement à tout ou partie des salariés.

– Aux termes de l’article L. 3132-25 du code du travail, précisé par les articles R. 3132-16 et R. 3132-17 du même code, « dans les communes touristiques ou thermales et dans les zones touristiques d’affluence exceptionnelle ou d’animation culturelle permanente », le préfet peut, après avis du conseil municipal, de la chambre de commerce et d’industrie et des syndicats d’employeurs et de travailleurs intéressés de la commune, accorder une autorisation temporaire et individuelle, « pendant la ou les périodes d’activités touristiques, dans les établissements de vente au détail qui mettent à disposition du public des biens et des services destinés à faciliter son accueil ou ses activités de détente ou de loisirs d’ordre sportif, récréatif ou culturel ».

● Les autorisations individuelles attribuées par le maire (ou le préfet à Paris)

En application de l’article L. 3132-26 du code du travail, pour les établissements normalement fermés le dimanche, un arrêté municipal – préfectoral à Paris – peut accorder une autorisation exceptionnelle d’ouverture pour un maximum de cinq dimanches par an.

L’autorisation est accordée de façon collective et pour toute une branche. C’est dans ce cadre, par exemple, que prennent place les ouvertures exceptionnelles des grands magasins.

Naturellement, la mise en œuvre de ces dérogations ne prive pas pour autant le salarié travaillant le dimanche des deux journées de repos attribuées chaque semaine dans le cadre de son temps de travail habituel, le cas échéant, sans même évoquer plus avant à ce stade la question des contreparties.

2. Certaines situations juridiques sont à clarifier

Alors même que la règle du repos dominical et les dérogations existantes ont des origines lointaines, cet état du droit n’est pas pleinement satisfaisant : il comporte en effet des ambiguïtés et des lacunes.

a) Des situations de fait créent des ambiguïtés

La législation actuelle sur le repos dominical des salariés est largement perfectible. Il est révélateur que les services du ministère du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité aient ouvert le « guide pratique sur le repos dominical des salariés », document administratif récapitulant l’ensemble de la législation applicable, avec le constat suivant :

« Le repos dominical qui est un principe d’ordre public destiné à protéger la santé des salariés autorise néanmoins de nombreuses dérogations permanentes ou temporaires : leur diversité même, l’enchevêtrement des compétences des autorités chargées de les accorder, ainsi que la jurisprudence née des contentieux initiés sur le sujet, rendent la règle peu lisible pour ses bénéficiaires et son application parfois difficile pour les services instructeurs et les services de contrôle ».

Ce manque de lisibilité tient à l’existence d’un certain nombre de situations ambiguës. S’agissant tout particulièrement des dérogations accordées dans les zones touristiques, l’autorisation étant individuelle et liée aux critères présentés supra, une partie des commerces situés dans ces zones peuvent ouvrir, d’autres non. Si cette différence de traitement peut s’expliquer dans un certain nombre de cas, il est des situations où elle est plus difficile à justifier.

Il en va ainsi de l’exemple souvent cité, parce que révélateur, d’un magasin qui vend des lunettes de soleil, autorisé à ouvrir le dimanche car son activité est considérée comme étant « de loisir », cependant qu’un établissement voisin vendant des lunettes correctrices de vue ne le sera pas.

La jurisprudence considère en effet que ces derniers biens ne constituent pas par eux-mêmes des biens et services destinés à faciliter l’accueil du public ou des activités de détente ou de loisirs d’ordre récréatif ou culturel (2).

De même, la Cour administrative d’appel de Paris, dans un arrêt du 14 novembre 2005, a considéré qu’un commerce ayant pour activité principale « une activité de créateur de mode » et proposant des vêtements et accessoires de mode devait « être regardé comme mettant à disposition du public des biens et des services destinés à faciliter ses activités de détente ou de loisirs d’ordre récréatif ou culturel » (CAA de Paris, 14 novembre 2005, Barbara Bui). En revanche, un magasin de mode procédant à la vente de vêtements sans proposer de « créations » n’est pas considéré comme satisfaisant cette même condition (CAA de Paris, 14 décembre 2005, Valérie Stern).

Les deux rapports précités du Conseil économique et social de 2007, présentés respectivement par M. Léon Salto et M. Jean-Paul Bailly, ont souligné ces difficultés et estimé que « pour des raisons d’équité et de cohérence commerciale, l’autorisation d’ouverture le dimanche pour les commerces situés en zones ou communes touristiques [doit être] collective et s’applique[r] à l’ensemble des commerces ».

b) Des lacunes sont source de problèmes

Par-delà son ambiguïté, la législation sur le repos dominical souffre également, sur certains points, de lacunes. C’est ce qu’a aussi mis en évidence le Conseil économique et social, dans son étude consacrée aux mutations de la société et aux activités dominicales, en 2007, à propos de la mise en œuvre de la dérogation prévue à l’article L. 3132-20 du code du travail : « (…) la jurisprudence du Conseil d’État ne permet de prendre en compte, en cas de fermeture le dimanche, ni l’intérêt manifeste du consommateur ni d’ailleurs les risques de licenciement (…) ».

De fait, l’analyse de cette jurisprudence (3) montre bien que la dérogation définie à l’article L. 3132-20 du code du travail, relative à la situation où le repos simultané, le dimanche, de tous les salariés d’un établissement serait préjudiciable au public ou compromettrait le fonctionnement normal de cet établissement, ne peut toujours suffire à prendre en considération cet « intérêt manifeste » du consommateur.

Ainsi, la seule circonstance qu’un type d’achat soit effectué le plus souvent en famille ne saurait faire regarder les établissements concernés comme proposant des activités familiales qui répondraient à un besoin s’exprimant spécifiquement le dimanche (Conseil d’État, 16 juin 1995, Société MC Dépôts ventes).

En outre, la dérogation prévue à l’article L. 3132-20 doit pouvoir se justifier par l’existence d’un préjudice réel, une simple gêne ne pouvant suffire. La décision du préfet ne saurait à ce titre être entachée d’illégalité du fait qu’il n’aurait pas été tenu compte des préférences du public. Le Conseil d’État a ainsi considéré dans une décision de principe du 29 février 1980 (Société SIDEF-Conforama) qu’en se prévalant des réactions et des préférences de sa clientèle interrogée à l’occasion d’une enquête, la société requérante n’invoque pas de circonstances précises, particulières à l’établissement en cause, de nature à ouvrir droit à une dérogation, laquelle ne saurait se justifier par des raisons de commodités ou même une simple gêne pour le public mais uniquement par l’existence d’un préjudice réel subi par ce dernier.

Enfin, la comparaison du chiffre d’affaires réalisé le dimanche avec celui des autres jours de la semaine constitue un élément déterminant pour l’appréciation des conditions de mise en œuvre de la dérogation prévue à l’article L. 3132-20 du code du travail (Conseil d’État, 3 mai 1907, Sieur Lavesnes et autres), mais elle ne peut pour autant, en l’état actuel du droit, justifier à elle seule l’octroi d’une dérogation.

L’ensemble de cette jurisprudence se comprend aisément compte tenu de la spécificité de la dérogation prévue à l’article L. 3132-20. Mais en prendre acte, c’est dans le même temps s’interroger, comme le fait le Conseil économique et social dans l’étude précitée, sur l’opportunité d’une extension de cette dérogation : « L’appréciation des critères du " préjudice au public " ou du trouble " au fonctionnement normal de l’établissement " pourrait être modernisée en tenant compte de l’intérêt manifeste pour le consommateur d’avoir plus aisément accès à un établissement commercial qui ouvrirait le dimanche, situé dans une zone géographique difficilement accessible le reste de la semaine, pour effectuer des achats ayant un caractère familial... (…). [L]e critère de l’intérêt manifeste du consommateur pourrait s’ajouter aux deux critères existants ».

B. UN ENJEU ÉCONOMIQUE

Si l’objet direct de la présente proposition de loi est, par nature, juridique, sa portée est dans le même temps aussi économique. Soumises à un contentieux parfois important compte tenu des incertitudes affectant leur situation juridique, les entreprises – et, partant, leurs salariés – sont de ce fait fragilisées. En outre, le régime juridique des dérogations à la règle du repos dominical soulève des interrogations du point de vue des consommateurs.

1. Les effets du régime du repos dominical sont importants pour les entreprises

a) Ce régime est perçu par les acteurs économiques comme un obstacle au développement

Comment ne pas reconnaître que le débat macroéconomique sur les effets des dérogations à la règle du repos dominical n’est pas aisé à trancher ? C’est l’une des conclusions des travaux du Conseil économique et social qui, dans son rapport de 2007 consacré à la consommation, au commerce et aux mutations de la société, souligne expressément « la difficulté d’un exercice qui fait intervenir des paramètres multiples ».

Ce n’est cependant pas un hasard si le rapport établi en 2007 par MM. Patrick Artus, Pierre Cahuc et André Zylberberg sur le temps de travail, le revenu et l’emploi, dans le cadre des travaux du Conseil d’analyse économique (CAE) (4), s’interrogeant sur les avantages et les inconvénients induits par une extension des autorisations de travailler le dimanche, intitule le développement qu’il consacre à cette question : « Des pistes pour favoriser l’ouverture des commerces le dimanche ».

Le rapport évoque, notamment, les avantages suivants : le bénéfice pour les consommateurs de l’accroissement de l’amplitude des horaires d’ouverture ; une plus grande équité dans la concurrence avec les magasins automatiques et le commerce électronique qui restent ouverts 24 heures sur 24 ; le fait que « les études empiriques disponibles montrent que les expériences passées dans ce domaine ont induit des créations d’emploi, comprises entre 3 % et 10 % de l’emploi du secteur » ; le constat selon lequel les emplois créés profitent surtout aux jeunes, qui ont des difficultés d’insertion sur le marché du travail particulièrement importantes en France.

Un autre facteur ne doit pas être négligé, à savoir la demande étrangère, surtout si l’on garde à l’esprit le chiffre de soixante dix-huit millions de touristes qui ont visité la France en 2006.

Pour l’ensemble de ces raisons, l’absence d’adaptations du régime du repos dominical peut, dans certains cas, constituer un obstacle au développement économique, mal compris par les entreprises.

b) Les entreprises sont fragilisées par les contentieux

Au total, on dénombre, par la compilation de l’ensemble des règles applicables, près de 180 dérogations à la règle du repos dominical.

« Le caractère discrétionnaire et/ou interprétatif de nombre d’entre elles donne lieu à des recours contentieux en grand nombre avec une importance plus accentuée dans certaines régions et professions. Il en résulte une multiplication de décisions contradictoires dans le temps et dans l’espace, introduisant de nouvelles distorsions de concurrence et créant de véritables imbroglios qui emmêlent un peu plus l’écheveau et font régner l’incertitude pour les opérateurs et leurs salariés ». Le rapport présenté par M. Léon Salto sur la consommation, le commerce et les mutations de la société en 2007 laisse ainsi deviner le lien existant entre incertitude juridique et fragilité économique.

Sans revenir dans le présent développement sur l’ensemble du contentieux affectant la question du repos dominical, on sait les difficultés nombreuses – et récurrentes dans le temps – qui se présentent à Paris, en région parisienne ou encore dans les Bouches-du-Rhône, pour ne retenir que ces exemples qui figurent parmi les plus connus.

Ces contentieux fragilisent d’autant plus les entreprises concernées qu’ils sont de natures multiples : ils peuvent être judiciaires, puisque l’article L. 3132-31 du code du travail donne compétence à l’inspecteur du travail pour saisir en référé le juge judiciaire afin que soient ordonnées toutes mesures propres à faire cesser, dans les établissements de vente au détail et de prestations de services au consommateur, l’emploi illicite de salariés en infraction aux dispositions des articles L. 3132-3 (article général relatif au principe du repos hebdomadaire le dimanche) et L. 3132-13 (article relatif au régime applicable dans les commerces de détail alimentaire) du code du travail.

Mais il peut aussi être administratif puisque, comme tout acte administratif, une décision préfectorale d’autorisation ou de refus de dérogation au repos dominical peut faire l’objet d’un recours gracieux, hiérarchique, ou contentieux devant la juridiction administrative.

Ce contentieux est non seulement source d’incertitude mais peut aussi être directement à l’origine de fragilités financières pour les entreprises concernées : l’article L. 3132-31 précité donne expressément compétence au juge judiciaire pour ordonner, le cas échéant, la fermeture le dimanche d’un établissement en assortissant sa décision d’une astreinte liquidée au profit du Trésor.

Au total, pour les établissements concernés, les enjeux économiques et financiers sont majeurs. À titre d’exemple, à Plan-de-Campagne, zone commerciale des Bouches-du-Rhône, 1 000 emplois sur 6 000 sont liés au dimanche. À Thiais Village, dans le Val-de-Marne, plus de 35 % du chiffre d’affaires de la semaine du centre commercial est réalisé sur la seule journée du dimanche.

2. Les attentes des consommateurs sont manifestes

Par-delà les entreprises, les consommateurs et leur demande doivent être pris en considération pour une appréciation globale des effets économiques des dérogations à la règle du repos dominical.

a) La demande est avérée

Selon le rapport de M. Léon Salto précité, « les consommateurs seraient plutôt favorables à une extension de l’ouverture du dimanche. Cette position tient à plusieurs facteurs, parmi lesquels le mode de vie urbain, l’activité professionnelle des femmes, l’interpénétration des temps de vie et des temps de consommation dans une société où les rythmes ne sont plus les mêmes, où l’on achète aussi bien par plaisir que par nécessité ».

Le rapport ajoute : « En outre, de nombreux achats se font en famille et demandent du temps, en particulier pour les biens d’équipement, dont les vendeurs sont généralement en périphérie, difficilement accessibles en semaine ».

Ce constat est corroboré par des enquêtes d’opinion récentes. Ainsi, à la question : « Si davantage de magasins étaient ouverts le dimanche, vous-même feriez des courses dans ces magasins le dimanche ? », un quart des personnes interrogées déclarent qu’elles le feraient souvent ou très régulièrement (24 %) et 44 % qu’elles le feraient occasionnellement, ce qui porte donc au total cette proportion de personnes intéressées à plus des deux tiers des personnes interrogées (68 %) (5).

b) La demande est localisée

Il est vrai que cette problématique doit être appréciée de manière différente selon le lieu identifié. À l’évidence, elle est manifeste par exemple en Île-de-France. L’Île-de-France est en effet la première région touristique mondiale (6: elle a accueilli 45 millions de visiteurs en 2004. En outre, 250 000 personnes qui vivent hors de la région viennent quotidiennement y travailler, ce qui représente 5 % de l’emploi francilien.

C’est précisément l’un des objectifs de la présente proposition de loi que de prendre en considération la situation prévalant dans les agglomérations urbaines les plus importantes, conformément à la préconisation du Conseil économique et social dans l’étude précitée présentée par M. Jean-Paul Bailly, qui souligne la nécessité de tenir compte dans de telles situations de « l’intérêt manifeste du consommateur ».

C. UN ENJEU SOCIAL

Comme l’enjeu économique, l’enjeu social de la définition des dérogations à la règle du repos dominical n’échappe pas à une certaine complexité, que permet d’apprécier l’extrait présenté ci-après, issu de l’étude présentée au nom du Conseil économique et social par M. Jean-Paul Bailly :

« (…) selon que l’on est étudiant en quête de ressources, d’autonomie et d’expérience, senior en pleine forme ou dépendant, seul ou en famille, en couple avec ou sans enfant, que l’on réside en centre ville, en zone suburbaine ou en milieu rural, que l’on est actif, chômeur, inactif ou retraité, selon son niveau de ressources, ses habitudes de consommation, sa mobilité, ses aspirations dans les domaines de la culture, du loisir et du sport, son engagement associatif, selon..., les attentes sont très différentes. Cette différence tient aussi au fait que chacun est tour à tour salarié, consommateur de biens, de loisirs ou de culture, actif ou oisif, en pleine forme ou fatigué... ».

Le sociologue Jean Viard – cité par le Conseil économique et social – considère également que nous sommes aujourd’hui « dans une société de niches, avec des groupes, dans une société de bouquets de pratiques sociales, de différences (régions, grandes villes, provinces, Nord, Sud). Il faut regarder cette multiplicité du fait social si l’on veut essayer de voir effectivement ce qui se passe ».

Le guide pratique établi par la direction générale du travail du ministère en charge du travail rejoint ce constat lorsqu’il rappelle, dans son avant-propos, que : « Les services de l’État sont aujourd’hui confrontés à des aspirations contradictoires et nouvelles entre la conciliation de la vie professionnelle et de la vie familiale des salariés, le dynamisme économique, une demande sociale de consommation, localisée mais forte, les règles de la concurrence et le respect du cadre juridique existant. L’existence de ces tendances parfois contradictoires et la nécessaire prise en compte des situations locales rendent elles aussi parfois complexe la prise de décision ».

L’enjeu social se résume ainsi peut-être par sa diversité. C’est la raison pour laquelle les réponses aux questions spécifiques qui se posent ne peuvent elles-mêmes être que très ciblées.

1. Les évolutions sociales doivent être prises en compte

a) Les rythmes de vie se sont modifiés de manière importante

De nombreuses études sociologiques ont montré l’apparition récente d’une « nouvelle carte du temps » (7), présentant les caractéristiques suivantes : une certaine urgence et une certaine vitesse ; une imbrication croissante entre temps de travail (temps social) et temps de loisir (temps personnel) ; une mobilité plus importante des personnes : le sociologue Jean Viard a ainsi fait récemment un « éloge de la mobilité » (8), analysant les conséquences spatiales de la « mise en loisir du territoire ». De plus en plus, le choix l’emporte sur la contrainte : depuis la fin des années 1980, les déplacements de loisirs ont dépassé ceux liés au travail.

L’appréciation doit cependant être modulée selon les situations. Ainsi, une étude du Centre de recherche pour l’étude et l’observation des conditions de vie (CREDOC) a montré en 1998 (9) que « plus la ville est petite, plus les activités de loisirs et de sociabilité reflètent une vie centrée sur le foyer. (…) On reçoit plus souvent des parents, on pratique plus souvent des activités utiles à la maison (bricolage, jardinage…), on est plus intéressé par les activités physiques et sportives ». En revanche, « le temps consacré à la mobilité, tant quotidienne (pour le travail, pour les services) que saisonnière (pour les voyages et les vacances) ainsi que le temps passé hors du foyer, augmentent de concert, à mesure que s’accroît la taille de la ville ».

De ce point de vue, la spécificité économique de la région Île-de-France, évoquée plus haut, se double d’une spécificité sociale , puisque l’on sait que cette région est particulièrement attractive pour les jeunes adultes de 15 à 29 ans et que les caractéristiques de l’emploi en font une région où la consommation revêt certaines spécificités : la part des cadres supérieurs et des personnes travaillant dans le secteur tertiaire y est plus significative qu’ailleurs ; les temps de transport entre le domicile et le lieu de travail y sont plus importants qu’en province.

Ainsi, un très récent rapport du Centre de recherche pour l’étude et l’observation des conditions de vie (CREDOC), consacré à l’ouverture des commerces le dimanche en novembre 2008, souligne que les habitants de l’agglomération parisienne et que les jeunes, notamment, sont sur-représentés parmi les Français favorables à cette ouverture des commerces.

Ces éléments induisent la nécessité de réserver un traitement spécifique aux plus grandes agglomérations. Car des spécificités existent hors de la région Île-de-France. L’exemple de la zone de Plan-de-Campagne, zone commerciale des Bouches-du-Rhône, le montre bien : « Plan-de-Campagne n’est pas qu’un lieu de commerce, c’est aussi un lieu de rencontre. Il y a des commerces (mais les grandes surfaces sont fermées le dimanche), mais aussi beaucoup de restaurants, de tous niveaux, des cinémas et tous les loisirs en salle possibles. Les jeunes se donnent rendez-vous à Plan-de-Campagne. Il y a beaucoup d’espace et de vastes parkings. La clientèle des magasins, des restaurants ou des lieux de loisirs est très diverse. Il y a les familles, mais aussi beaucoup de jeunes et de personnes âgées » (10).

Il n’est pas incohérent de ce point de vue d’ouvrir la possibilité d’effectuer le dimanche des achats en famille, que ce soit au profit de la décoration intérieure, du bricolage ou encore en matière d’électroménager. Ces achats exceptionnels, que l’on peut dire « de réflexion » ou, pour reprendre le mot de certains sociologues, « anomaux », sont propres au dimanche.

Au reste, on pourrait ajouter que ces activités du dimanche ne sont pas exclusivement familiales. Alors que dans les grandes villes de France, 40 % des logements sont occupés par une personne seule – ce taux atteignant 50 % à Paris – le développement des activités dominicales concerne un public qui n’est pas seulement familial. Comme le note l’étude de M. Jean-Paul Bailly, « s’il représente le jour du temps libre, du temps pour soi, [le dimanche] peut être vécu par certains comme le jour de la solitude et de désoeuvrement... ».

b) Les comportements d’achat des consommateurs ont évolué

D’autres évolutions peuvent être citées, à l’image du développement considérable du commerce électronique au cours des toutes dernières années.

Une étude récente de la Fédération du e-commerce et de la vente à distance (Fevad) montre que les ventes par internet ont progressé de 27 % au troisième trimestre 2008.

Le chiffre d’affaires des sites de commerce en ligne s’était déjà établi à 16 milliards d’euros en 2007, en augmentation de 34 % par rapport à 2006. Il devrait atteindre 20 milliards d’euros en 2008. Désormais, le nombre de sites marchands est évalué à 45 000, en progression de 40 % sur une année.

Ces résultats constituent un indicateur de l’évolution des comportements des consommateurs et doivent aussi pris en considération. Ils requièrent une certaine adaptation du commerce plus traditionnel.

Au total, pour reprendre une terminologie utilisée par le directeur du Centre de recherche pour l’étude et l’observation des conditions de vie (CREDOC), M. Robert Rochefort, le dimanche constitue aujourd’hui un moment utilisé de façon « pragmatique » et non plus « systémique ». C’est pourquoi une adaptation à cette conception pragmatique du dimanche est nécessaire.

2. Les attentes des salariés doivent être entendues

Il existe aussi une réelle attente de la part de certains salariés face au travail du dimanche.

Du reste, l’exercice d’une activité professionnelle le dimanche n’est pas rare aujourd’hui, puisqu’un tiers des Français environ déclare déjà travailler habituellement ou occasionnellement le dimanche : selon l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE), 7,4 millions de personnes sont concernées par le travail habituel ou occasionnel le dimanche (3,4 millions habituellement).

a) Les enquêtes d’opinion confirment les attentes des salariés

De manière générale, les salariés ne se disent pas hostiles au travail du dimanche. Selon des sondages effectués en septembre et octobre 2008 (11), 73 % des franciliens et 68 % des habitants de la région Méditerranée sont favorables à l’ouverture des magasins le dimanche.

Selon l’un de ces sondages, à la question « Travailler le dimanche est payé davantage qu’en semaine. Si votre employeur vous proposait de travailler le dimanche, accepteriez-vous ? », 67 % des actifs répondent positivement, ce taux atteignant 76 % pour la région Île-de-France et 84 % pour le Nord.

Il est aussi révélateur que, selon un sondage d’octobre 2008 commandé par Force Ouvrière (12), à la question « Seriez-vous d’accord pour travailler régulièrement le dimanche ? », 32 % des salariés répondent oui, et ce en l’absence de contreparties financières annoncées.

b) Pouvoir travailler le dimanche est une préoccupation majeure pour certaines catégories de salariés

Il faut reconnaître l’opportunité que représente, pour certains jeunes notamment, la possibilité de travailler le dimanche.

La question du travail des étudiants, de fait, doit être soulignée (13). De nombreux étudiants travaillent aujourd’hui : 75 % de l’ensemble des étudiants (soit les trois quarts d’un peu plus de 2 millions de jeunes) le font en cours d’année si l’on inclut la période de l’été ; plus de 40 % exercent une activité rémunérée pendant l’année universitaire ; et 15 à 20 % des étudiants, soit environ 400 000 personnes, travaillent de façon régulière pendant leurs études.

En outre, cette proportion des étudiants qui travaillent est en augmentation : des années 1990 aux années 2000, la part des étudiants exerçant une activité rémunérée pendant l’année universitaire a progressé de 10 points (passant de 31,5 % en 1997 à 41,6 % en 2003) ; aujourd’hui, près de trois quarts des étudiants ont occupé un emploi rémunéré avant la fin de leurs études, contre seulement la moitié d’entre eux trente ans plus tôt.

Il est indéniable que l’ouverture des commerces le dimanche constitue pour les étudiants une opportunité d’occuper des emplois leur permettant de financer leurs études, notamment si l’on garde à l’esprit le fait que 160 000 étudiants travaillent à temps complet, ce qui représente 40 % du total des étudiants qui travaillent de manière régulière.

Comme le note le rapport du Conseil économique et social consacré par M. Laurent Bérail au travail des étudiants, cette donnée est particulièrement significative « compte tenu des difficultés matérielles à concilier, de fait, deux emplois du temps ».

Par ailleurs, une analyse en termes de « cycle de vie » fait apparaître que les aspirations au travail du dimanche sont évolutives. Ainsi, de jeunes adultes encore dépourvus de charges de famille ou soucieux d’accroître leur revenu en vue d’un investissement immobilier seront, à l’évidence, davantage attirés par une activité ce jour-là que des salariés plus âgés ayant charge d’enfants ou ayant déjà procédé à de tels investissements.

II.- LE DISPOSITIF PROPOSÉ

La présente proposition de loi n’entend ni remettre en cause le principe du repos dominical tel qu’il est fixé par le code du travail aujourd’hui, ni généraliser les situations de travail du dimanche. Elle apporte quelques réponses ciblées à des questions spécifiques qui se posent – pour s’en tenir aux dispositions essentielles –dans trois domaines : les zones touristiques ; les grandes agglomérations ; les commerces alimentaires.

A. LE PRINCIPE DU REPOS DOMINICAL N’EST PAS REMIS EN CAUSE

1. Le dimanche, repère et point d’ancrage, ne doit pas être un jour comme les autres

À l’évidence, le dimanche doit rester ce « repère » et ce « point d’ancrage » évoqué par le Conseil économique et social dans ses travaux. Le dimanche ne peut être un jour comme les autres.

C’est ce qu’a affirmé le rapport présenté par M. Léon Salto au nom du Conseil économique et social : « Le dimanche est un point fixe structurant, permettant de se retrouver et de consolider la cellule familiale de plus en plus éclatée et dispersée ».

L’étude présentée par M. Jean-Paul Bailly ne dit pas autre chose lorsqu’elle rappelle que « ce jour constitue un repère symbolique qu’il convient de ne pas banaliser, tant il constitue un point d’ancrage stable pour la vie familiale et le lien social ». Ou encore : « Le dimanche, marqueur historique, culturel et identitaire, constitue à tous égards, un repère temporel de la semaine ».

2. Le repos dominical reste le principe

La présente proposition de loi traduit au plan juridique ces préoccupations sociales, dans la mesure où elle ne remet pas en cause le principe du repos hebdomadaire dominical tel qu’il est fixé à l’article L. 3132-3 du code du travail en application duquel « le repos hebdomadaire est donné le dimanche ».

Le juge veille à l’applicabilité de ce principe et notamment à ce que le repos hebdomadaire soit ainsi attribué à tout salarié (14): quelle que soit la nature de ses fonctions ou l’importance de ses responsabilités (Cass. soc., 12 juillet 1960) ; quel que soit le nombre d’heures travaillées (Cass. crim., 14 novembre 1989), même si le travail n’est qu’occasionnel (Cass. crim., 2 octobre 1984) ; quel que soit le lieu de travail (ce principe est aussi applicables aux travailleurs à domicile), etc.

Dès lors, l’ensemble des effets juridiques de ce principe ont vocation à demeurer : son caractère impératif et sa participation de ce que les juristes appellent l’ordre public social.

L’article R. 3135-2 du code du travail continue en outre à s’appliquer : cet article sanctionne, au plan pénal, le fait de méconnaître le principe posé à l’article L. 3132-3 de l’amende prévue pour les contraventions de cinquième classe, les contraventions donnant lieu à autant d’amendes qu’il y a de salariés illégalement employés.

3. Les adaptations proposées s’inscrivent dans une démarche pragmatique observée dans la plupart des pays européens

Dans un cadre communautaire qui laisse aux États membres une grande latitude pour adapter leurs législations nationales, il est révélateur de noter, par-delà les évolutions nationales, les pratiques de certains États européens, qui attestent un réel pragmatisme en matière de mise en œuvre des dérogations au repos dominical (voir aussi sur cette question l’annexe 2).

a) Le cadre communautaire se caractérise par sa souplesse

Dans un arrêt du 23 novembre 1989, la Cour de justice des communautés européennes (CJCE) a considéré que le choix d’un jour d’ouverture des commerces fait intervenir des considérations de nature historique, culturelle, touristique, sociale et religieuse qui relèvent de l’appréciation de chaque État-membre.

C’est ainsi que la Cour de Justice a annulé, dans un arrêt du 12 novembre 1996, Royaume-Uni c/ Conseil, à la demande du Royaume-Uni, pour défaut de motivation, la phrase de l’article 5 de la directive 93/104/CEE du 23 novembre 1993 concernant certains aspects de l’aménagement du temps de travail. Celle-ci prévoyait que la période minimale de repos hebdomadaire, d’une durée de 24 heures consécutives par période de 7 jours et que toute entreprise doit accorder à ses salariés, « comprenait en principe le dimanche ».

La CJCE a relevé qu’un considérant de la directive rappelait que l’inclusion du dimanche dans la période de repos hebdomadaire n’était qu’une éventualité laissée à l’initiative des États membres, compte tenu de la diversité des facteurs culturels, ethniques et religieux. Elle a estimé qu’aucun élément ne lui avait été fourni pour justifier en quoi le dimanche avait un rôle plus important que les autres jours, comme jour de repos hebdomadaire, au regard de l’objectif de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs.

Cette précision relative au dimanche a donc été supprimée. Elle ne figure plus dans le texte actuellement applicable en la matière, celui de la directive 2003/88/CE du 4 novembre qui s’est substituée il y a quatre ans au texte de 1993, ni, naturellement, dans la proposition de directive qui a vocation à la réviser et qui est depuis 2004 en cours d’examen au niveau communautaire.

b) Les pratiques et les législations des États européens sont flexibles

Compte tenu du cadre juridique communautaire ainsi posé, un regard sur les habitudes et les règles qui prévalent chez certains des États européens permet d’esquisser une typologie des différentes pratiques qui ont cours aujourd’hui.

D’une part, il existe un certain nombre d’États que l’on peut dire libéraux en la matière. Certains exemples peuvent ainsi être évoqués : en Suède, la liberté de l’exploitant d’ouvrir son commerce le dimanche est intervenue très tôt, en 1971, et d’une manière assez large. Le Royaume-Uni a également, avec le Sunday trading act de 1994, adopté, pour l’Angleterre et le Pays de Galles, le principe de l’ouverture des magasins le dimanche. Au Luxembourg, le principe est aussi celui de l’ouverture le dimanche, mais le matin pour l’essentiel, entre 6 heures et 13 heures.

D’autre part, certains États ont développé des régimes de dérogations et exceptions qui leur permettent d’assouplir avec plus ou moins d’ampleur le principe, qu’ils conservent, de la fermeture dominicale : il en va ainsi par exemple des Pays-Bas, de l’Espagne, de la Finlande ou de l’Allemagne.

La Belgique représente une situation intermédiaire. Le dimanche reste le jour de fermeture de droit commun mais d’une part, le commerçant reste libre d’accomplir son obligation de fermeture hebdomadaire un autre jour et, d’autre part, le conseil municipal peut, dans la limite de quinze jours par an, prévoir certaines dérogations.

Ces exemples attestent la diversité des pratiques et des législations. Elle montre aussi que, face à des besoins précisément identifiés, des solutions pragmatiques ont su, lorsque cela s’avérait nécessaire, être trouvées.

B. LA PROPOSITION DE LOI APPORTE DES RÉPONSES CIBLÉES À DES QUESTIONS SPÉCIFIQUES

Il convient d’emblée de préciser que les dispositions proposées sont, en tout état de cause, relatives à la seule possibilité de déroger à la règle du repos dominical. En aucun cas elles ne sont donc synonymes d’ouverture automatique des établissements concernés le dimanche.

Dans le cadre juridique rappelé, qui ménage de très nombreuses exceptions, la présente proposition comporte des mesures ciblées qui sont autant de réponses particulières à des situations spécifiques.

1. Les dérogations accordées dans les zones touristiques sont clarifiées

Une première mesure consiste à simplifier le régime applicable dans les zones touristiques.

Le cadre de la dérogation existante est inchangé, puisque la proposition de loi continue à viser « les communes touristiques ou thermales » et « les zones touristiques d’affluence exceptionnelle ou d’animation culturelle permanente » concernant les lieux où le repos hebdomadaire peut être attribué par roulement.

En outre, comme dans le droit existant, sont visés les « établissements de vente au détail » qui mettent à disposition des biens et des services.

En revanche, alors que le cadre juridique en vigueur restreint ce champ aux biens et services « destinés à faciliter [l’] accueil [du public] ou ses activités de détente ou de loisirs d’ordre sportif, récréatif ou culturel », cette condition est supprimée par la proposition de loi : on sait en effet les incohérences multiples auxquelles, en pratique, a donné lieu cette condition.

Le Conseil économique et social avait d’ailleurs, tant dans le rapport présenté en mars 2007 par M. Léon Salto au nom de la section des activités productives, de la recherche et de la technologie, que dans l’étude présentée par M. Jean-Paul Bailly au nom de la commission temporaire sur les mutations de la société et les activités dominicales en décembre de la même année, proposé que « pour des raisons d’équité et de cohérence commerciale, l’autorisation d’ouverture le dimanche pour les commerces situés en zones ou communes touristiques [soit] collective et s’applique à l’ensemble des commerces ».

La proposition de loi supprime également la référence aux périodes d’activités touristiques, peu opérante dans la pratique : c’est une évidence que les commerces ne sont pas ouverts quand il n’y a pas de touristes.

2. La situation particulière des grandes agglomérations est prise en compte

Prenant acte des évolutions particulières affectant la situation qui prévaut dans les plus grandes agglomérations, la présente proposition de loi y définit dans un deuxième temps un régime de dérogation à la règle du repos dominical, encadré par des garanties nouvelles au profit des salariés.

Le Conseil économique et social avait lui-même également souligné, dans l’étude présentée par M. Jean-Paul Bailly au nom de la commission temporaire sur les mutations de la société et les activités dominicales en 2007, la nécessité de prendre en compte ces évolutions, en mettant en avant, notamment, la nécessité pour le consommateur « d’avoir plus aisément accès à un établissement commercial qui ouvrirait le dimanche, situé dans une zone géographique difficilement accessible le reste de la semaine, pour effectuer des achats ayant un caractère familial... ».

a) Un nouveau type de zones est identifié

Le nouveau régime est particulièrement ciblé. Il ne concerne que les très grandes agglomérations, puisque le texte de la proposition de loi se réfère aux « unités urbaines de plus d’un million d’habitants », à savoir, en pratique, quatre unités urbaines : Paris, Marseille-Aix-en-Provence, Lyon, Lille.

Au demeurant, ce régime ne sera applicable, au sein de ces unités, que dans celles qui auront été définies comme « zones d’attractivité commerciale exceptionnelle ». Dans ces seules zones, le repos hebdomadaire pourra être donné par roulement, pour tout ou partie du personnel, pour les établissements de vente au détail qui mettent à disposition des biens et des services.

b) Des modalités de mise en œuvre exigeantes et des garanties nouvelles

Le texte de la proposition réglemente la mise en œuvre de ce régime en l’assortissant de conditions exigeantes.

Ces conditions concernent d’abord la procédure à suivre : le conseil municipal prend l’initiative de la demande ; en cas d’opposition du président de la communauté de communes, de la communauté d’agglomération ou de la communauté urbaine concernée, une zone ne pourra, en pratique, être qualifiée de zone d’attractivité commerciale exceptionnelle ; le préfet fixe le périmètre de la zone concernée.

Mais ces conditions concernent également la nature des garanties accordées. En effet, les dérogations ne pourront être attribuées par le préfet qu’au vu d’un accord collectif ou d’une décision unilatérale de l’employeur prise après référendum auprès des personnels concernés par la dérogation. L’accord collectif devra décrire les contreparties accordées aux salariés concernés ainsi que les engagements pris en termes d’emploi ou en faveur de certains publics en difficulté ou de personnes handicapées.

En l’absence d’accord collectif applicable, notamment dans les entreprises dépourvues de délégué syndical, une décision unilatérale de l’employeur pourra être prise après avis des représentants du personnel (comité d’entreprise ou délégués du personnel) et après un référendum. Dans ce cas, le texte de la proposition de loi prévoit que le salarié bénéficiera au minimum d’un doublement de salaire et d’un repos compensateur.

Dans tous les cas, les salariés concernés auront le droit de refuser de travailler le dimanche sans que des sanctions puissent être prises de ce fait à leur encontre : le texte de la proposition de loi énonce expressément que « le refus de travailler le dimanche pour un salarié d’une entreprise bénéficiaire d’une (…) autorisation [de déroger à la règle du repos hebdomadaire en application des articles L. 3132-20, L. 3132-25 et L. 3132-25-1] ne constitue pas une faute ou un motif de licenciement ».

3. Les dérogations accordées dans les commerces de détail alimentaire sont adaptées au mode de vie des Français

L’article L. 3132-13 du code du travail prévoit aujourd’hui que dans les commerces de détail alimentaire, le repos hebdomadaire peut être donné le dimanche à partir de midi.

Les salariés bénéficient alors d’un repos compensateur, par roulement et par quinzaine, d’une journée entière, le même article précisant que les salariés âgés de moins de vingt et un an logés chez leurs employeurs bénéficient d’un repos compensateur, par roulement et par semaine, d’un autre après-midi.

Comme l’ont noté les différents travaux du Conseil économique et social sur le sujet, l’heure de midi telle qu’elle figure dans la législation en vigueur ne tient pas compte des rythmes de vie actuels, notamment du fait que l’heure du déjeuner est plus tardive que par le passé. En pratique, ces commerces sont souvent ouverts jusqu’à treize heures. À cet égard, le Conseil économique et social a évoqué la nécessité de « mettre le droit en accord avec les faits ».

Prenant en considération cette préconisation, la présente proposition de loi porte donc de midi à treize heures l’heure à partir de laquelle le repos hebdomadaire peut être donné le dimanche dans les commerces de détail alimentaire.

4. Les apports résultant de la discussion en commission des affaires culturelles, familiales et sociales

Au cours de ses deux séances du mercredi 3 décembre 2008, la commission des affaires culturelles, familiales et sociales a apporté un certain nombre de précisions à la proposition de loi :

– elle a réaffirmé le principe du repos hebdomadaire dominical ;

– elle a apporté la garantie selon laquelle une entreprise bénéficiaire d’une autorisation de déroger à la règle du repos dominical ne peut prendre en considération le refus d’une personne de travailler le dimanche pour refuser de l’embaucher ; en outre, à l’initiative du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche (SRC), elle a précisé que le salarié d’une entreprise bénéficiaire d’une telle autorisation qui refuse de travailler le dimanche ne peut faire l’objet d’une mesure discriminatoire ;

– elle a prévu que les autorisations de dérogation mentionnées aux articles L. 3132-25 et L. 3132-25-1 du code du travail, s’agissant des zones touristiques et des zones d’attractivité commerciale exceptionnelle, ne peuvent être accordées aux commerces de détail alimentaire visés à l’article L. 3132-13 du même code ;

– elle a rappelé expressément que les dispositions de la proposition de loi ne sont pas applicables aux départements de la Moselle, du Bas-Rhin et du Haut-Rhin, dans lesquels s’applique le code professionnel local ;

– elle a modifié sur deux points le dispositif figurant dans le nouvel article L. 3132-25-3 du code du travail, selon lequel les autorisations de dérogation prévues aux articles L. 3132-20 et L. 3132-25-1 sont accordées au vu d’un accord collectif ou d’une décision unilatérale de l’employeur prise après référendum : d’une part, à l’initiative du groupe SRC, la commission a précisé que la décision unilatérale de l’employeur ne peut intervenir qu’« à défaut » d’accord collectif ; d’autre part, elle a clarifié le dispositif proposé en établissant que, quelle que soit la taille de l’entreprise, cette décision unilatérale de l’employeur ne peut intervenir qu’en l’absence d’accord collectif applicable ;

– elle a précisé que la liste et le périmètre des zones d’attractivité commerciale exceptionnelle au sein des unités urbaines sont établis par le préfet sur une proposition des conseils municipaux « formulée compte tenu des circonstances locales » ;

– à l’initiative du groupe SRC, elle a apporté deux améliorations rédactionnelles à la proposition de loi ;

– enfin, la commission a modifié le titre de la proposition de loi, de manière à préciser que celle-ci vise à « redéfinir la réglementation du repos dominical concernant les commerces, dans les grandes agglomérations et les zones touristiques ».

TRAVAUX DE LA COMMISSION

I.- DISCUSSION GÉNÉRALE

La Commission des affaires culturelles, familiales et sociales a examiné, sur le rapport de M. Richard Mallié, le proposition de loi visant à définir les dérogations au repos dominical dans les grandes agglomérations, les zones touristiques et les commerces alimentaires (n° 1254) le mercredi 3 décembre 2008.

Un débat a suivi l’exposé du rapporteur.

M. Jean Leonetti. J’interviens ici en tant que porte-parole du groupe UMP et je tiens d’emblée à préciser que le débat sur le travail dominical n’est pas clos. Cette question a fait l’objet de longues discussions au sein du groupe UMP dans le cadre du groupe de travail animé par le rapporteur et M. Serge Poignant. De nombreux collègues députés se sont émus du risque de banalisation du travail le dimanche. Pour répondre à cette inquiétude, il a été envisagé, dans un premier temps, de prévoir une période d’expérimentation pendant laquelle le travail dominical serait autorisé dans quelques départements, sous certaines conditions. Mais pour éviter que cette expérimentation ne conduise à une généralisation ou à une suppression du travail le dimanche, ce dispositif a été finalement écarté.

Le groupe de travail s’est interrogé sur la signification du travail le dimanche. Il faut lever certains tabous : le travail le dimanche concerne déjà de nombreux concitoyens, que ce soit au titre de l’activité économique ou de l’engagement associatif ou politique. Le dimanche n’est pas une journée comme les autres mais elle ne doit pas non plus être sacralisée, dans une République laïque où les citoyens se réfèrent à trois grandes religions monothéistes dont la journée de pratique du culte est différente.

Le travail le dimanche a de multiples conséquences en termes d’organisation sociale mais il ne faut pas oublier les enjeux économiques. Un équilibre doit être trouvé pour préserver le commerce de proximité, qui joue un rôle considérable pour l’animation des centres villes, tout en permettant la création d’emplois et le développement économique des centres commerciaux dans les grandes agglomérations. La discussion des amendements doit permettre d’aborder cette question.

Le travail le dimanche modifie les rythmes de vie des salariés mais évitons de faire comme si le travail le dimanche n’existait pas jusqu’à présent. De multiples secteurs sont déjà concernés comme par exemple le secteur hospitalier, les services de police et de gendarmerie ou les activités de loisirs. Certains voudraient faire de la question du travail dominical un enjeu de lutte sociale. Il convient d’adopter une démarche pragmatique pour trouver des solutions opérationnelles dans certaines zones géographiques particulières, sans pour cela risquer de déstructurer les conditions de vie et les équilibres familiaux de l’ensemble des salariés.

Il s’agit aujourd’hui de trouver des solutions face à des situations qui se sont développées pour faire entrer le fait dans le droit plutôt que de détruire le fait. Nous ne pouvons ignorer les multiples commerces ouverts le dimanche et le potentiel économique qu’ils représentent.

L’examen de cette proposition de loi doit permettre d’approfondir encore la réflexion et d’éviter grâce, notamment, aux amendements que nous adopterons, à la fois le statu quo insupportable et la généralisation, tout aussi insupportable.

M. Christian Eckert. Le débat ne se déroule pas dans de bonnes conditions : non seulement les délais d’examen sont déjà brefs, mais il s’agit d’une proposition de loi et, avant de se prononcer, la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire, saisie pour avis et se réunissant demain matin, doit attendre que notre commission ait adopté un texte, ce qu’elle ne peut faire par définition qu’aujourd’hui !

En outre, l’opposition ne peut travailler ni normalement ni sereinement, dans la mesure où certains éléments essentiels de la proposition de loi ne sont pas encore connus, compte tenu des positions à géométrie variable du groupe majoritaire, comme le nombre de zones d’attractivité commerciale exceptionnelle ou le régime applicable aux commerces alimentaires.

La majorité considère que le but du texte est de faire rentrer le fait dans le droit mais en réalité, il vise bien au contraire à adapter le droit aux faits. Les auditions conduites par le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche (SRC) ont même fait apparaître que des ministres, par leurs visites sur certains sites, ont considéré de façon complaisante des situations illégales. C’est scandaleux. Il y a une dissymétrie choquante entre le traitement des écoles d’une part, où les préfets n’hésitent pas à saisir les tribunaux administratifs lorsque l’accueil des élèves n’y est pas assuré en cas de grève, et l’ouverture des magasins le dimanche d’autre part, où les annulations en justice des dérogations accordées par les préfets demeurent sans effet.

Il est aussi regrettable que dans son commentaire écrit, le rapporteur ne fournisse pas suffisamment d’indications factuelles sur des points aussi importants que le nombre de dérogations existantes, les conditions actuelles de rémunération du travail dominical et le droit existant dans les autres pays européens.

Par ailleurs, le texte risque de se traduire par un régime du travail dominical à plusieurs vitesses, en fonction de l’ancienneté de la dérogation ou de l’existence d’accords de branche. En outre, il n’est pas bien rédigé, puisque les compétences des conseils municipaux en matière de dérogations semblent varier d’un article à l’autre : sont-elles accordées à leur demande, sur leur proposition ou sur leur avis, et cet avis est-il conforme ?

S’agissant enfin du volontariat, il serait dangereux de mentionner dans le contrat de travail l’acceptation du recours au travail le dimanche au regard des risques évidents en termes, notamment, de discrimination à l’embauche.

Le groupe SRC se battra donc contre cette proposition de loi, car elle succède à de nombreux autres textes sociaux tout aussi déplorables et sa portée, malgré les déclarations de la majorité, ne sera pas limitée dans le temps ou dans l’espace : ainsi qu’une organisation syndicale l’a fait observer, on met ici « le doigt dans l’engrenage ».

Mme Martine Billard. C’est bien d’un débat sur le travail dominical qu’il est question ici, ce que fait encore mieux apparaître la version originale du texte. La réflexion ne doit pas se placer sur le terrain économique, car c’est d’un choix de société qu’il s’agit : faut-il en effet satisfaire à tout moment ses pulsions de consommation ? Cela n’a rien à voir avec les secteurs de la santé, de la sécurité ou des transports qui sont, eux, indispensables au fonctionnement de la société. L’objectif de la proposition de loi est de légaliser des situations de fait afin d’éviter que des entreprises ne soient contraintes de verser des amendes.

Cette mauvaise manière de légiférer n’apportera en outre pas les contreparties annoncées : 7 millions de salariés qui travaillent déjà le dimanche n’en bénéficieront pas et les autres non plus, pour peu qu’un accord collectif, même moins favorable, ait été conclu sur ce thème. Largement majoritaires dans la grande distribution, les femmes, dont les rémunérations et les conditions de travail, notamment de temps de transport, sont déjà très mauvaises, seront les premières affectées. Face à cette menace, la secrétaire d’État chargée de la famille se contente de dire qu’on pourra « s’arranger » : si elle considère ainsi qu’il suffit de recourir à des gardes d’enfants, qui doivent d’ailleurs être payées double le dimanche, voilà qui en dit long sur la manière dont elle conçoit son rôle !

Enfin, même pour une députée de Paris, il ne paraît pas raisonnable qu’une commune puisse donner son avis s’agissant de dérogations susceptibles de concerner l’ensemble d’une agglomération.

M. Francis Vercamer. Le groupe Nouveau Centre est bien évidemment défavorable à la généralisation du travail le dimanche. Mais s’il est ici question d’humanisme et de choix de société, il ne faut pas non plus négliger la liberté du travail et la liberté d’entreprendre. Cela étant, les régimes applicables doivent être assortis de garanties, sociales pour les salariés et commerciales pour les magasins de proximité, car le rôle de la loi est de protéger les plus faibles.

La proposition de loi n’entend pas généraliser le travail le dimanche, ni même révolutionner le droit en vigueur. Au demeurant, de nombreux secteurs sont déjà concernés et il s’agit simplement ici de corriger certaines anomalies, dont certaines sont d’ailleurs légitimes.

On peut toutefois regretter que ce texte prenne la forme d’une proposition de loi et n’ait donc pu faire l’objet d’un véritable dialogue social préalable. En outre, la notion de volontariat devrait aller au-delà du simple fait de considérer que le refus de travailler le dimanche ne constitue pas une faute grave. Une autre question se pose : comment une juste rémunération sera-t-elle assurée si ceux qui sont actuellement obligés de travailler le dimanche sont moins payés que ceux qui seront volontaires ?

Il faut enfin prendre en compte les situations locales particulières, l’ouverture des commerces pouvant être autorisée dans certaines villes mais pas dans d’autres, pourtant très proches. Au sein du groupe Nouveau Centre, certains sont favorables au statu quo, d’autres souhaiteraient aller plus loin, d’autres encore considèrent au contraire qu’il faut restreindre le travail dominical ; le groupe adoptera sa position le 9 décembre prochain et, d’ici là, s’abstiendra donc en commission sur ce texte.

M. Bernard Perrut. La proposition de loi permet de prendre en compte des réalités de vie, de consommation et de pratiques commerciales. Elle généralise d’autant moins le travail le dimanche qu’un amendement de M. Pierre Méhaignerie viendra réaffirmer le principe du repos dominical. Elle ne doit pas constituer un premier pas vers la généralisation, au vu du contexte difficile que traverse en ce moment le commerce de proximité. Le travail dominical développe l’activité économique et l’emploi, mais il faudra prévoir des aides spécifiques, dans le cadre du Fonds d’intervention pour les services, l’artisanat et le commerce (FISAC), afin de compenser les incidences de l’ouverture le dimanche sur les commerces des villes moyennes proches des zones concernées.

En outre, il faut veiller à ce que le dimanche continue de constituer un point structurant pour la cellule familiale comme pour les activités de détente. Enfin, les contours du texte peuvent encore évoluer, notamment grâce à un amendement visant à exclure les grandes surfaces alimentaires du régime permettant l’ouverture des commerces le dimanche après-midi.

M. Yves Bur. Le texte a pour objectif de régler d’une manière détournée des situations illégales et marque un premier pas vers la généralisation du travail dominical. L’État ne sera pas capable d’assurer le respect des nouvelles règles, alors qu’il ne parvient déjà pas à le faire pour les règles en vigueur. Les citoyens ne sont pas seulement des consommateurs. Y aura-t-il vraiment liberté de choix pour les salariés dans le secteur de la grande distribution ? Le pouvoir d’achat va-t-il réellement augmenter ? L’Alsace-Moselle ne sera pas non plus préservée de la généralisation. Quant au principe du doublement de la rémunération le dimanche initialement prévu, il est déjà abandonné. Il n’y aura pas avancée sociale mais régression sociale.

M. le président Pierre Méhaignerie. Nous pouvons partager certaines convictions mais notre devoir est aussi de prendre en compte certaines situations tout à fait respectables.

M. Maxime Gremetz. Le rapporteur a omis de mentionner que les représentants de la CFTC, de la CGT, de FO et de l’UNSA avaient voté contre l’étude présentée au nom du Conseil économique et social (CES) par M. Jean-Paul Bailly en 2007, consacrée aux mutations de la société et aux activités dominicales, et que s’étaient abstenus les groupes de l’artisanat, des associations ainsi que la CFDT, tandis qu’avaient voté en sa faveur notamment les groupes de l’agriculture, de la coopération, des entreprises privées, des Français de l’étranger, de l’épargne et du logement, des personnalités qualifiées ou encore des professions libérales. Les témoignages recueillis dans les grandes surfaces amiénoises sont irréfutables : les salariés ne sont pas mieux rémunérés le dimanche. Le respect de la laïcité n’interdit pas de signaler que l’épiscopat s’est prononcé contre cette proposition de loi. Après que le travail de nuit des femmes a été rétabli, voici maintenant un premier pas vers la remise en cause absolue du repos dominical, ce que corrobore d’ailleurs le titre de l’étude du CES. Il n’est même pas possible d’amender un tel texte, contre lequel il faudra donc lutter dans la rue et à l’Assemblée nationale.

M. Jean Bardet. J’essaierai d’être aussi court que M. Maxime Gremetz !

Ce texte n’a rien de révolutionnaire. Il vise seulement à définir des dérogations à la règle du repos dominical. La loi de 1906 qui a institué cette règle prévoyait d’ailleurs déjà des dérogations. En outre, depuis un certain nombre d’années, des magasins ont pris l’habitude d’ouvrir le dimanche, ce qui ne pose pas de problèmes particuliers, y compris au regard de la situation des salariés concernés.

M. Maxime Gremetz. Certains ouvrent même le 11 novembre, ce qui est un scandale !

M. Jean Bardet. Par ailleurs, depuis quelques années, des décisions de justice sont intervenues pour imposer la fermeture de certains magasins, sur lesquels pèsent parfois de lourdes astreintes.

Au total, la proposition de la loi vise à régler des problèmes précis et non à généraliser le travail le dimanche. Les reproches théoriques qui sont adressés à cette proposition de loi relèvent d’ailleurs davantage du procès d’intention que de la bonne foi.

Premièrement, on dit que ce texte tend à légaliser une situation de fait, contraire à la pratique généralement admise. À cela, on répondra qu’une loi adoptée en 1906 peut quand même évoluer pour tenir compte de nouveaux besoins sociaux. En outre, ce n’est pas la première fois que le Parlement légalise ainsi une pratique : je rappelle qu’il l’a fait dans le cadre de la discussion sur la question de l’interruption volontaire de grossesse (IVG).

Deuxièmement, on dit aussi que cette proposition de loi imposera aux salariés de travailler le dimanche. C’est faux. Le dispositif proposé repose entièrement sur le volontariat. Le texte disposera explicitement que la question du travail dominical ne devra pas être abordée lors de l’entretien d’embauche.

Troisième point, on dit qu’il est immoral d’encourager le travail le dimanche pour « gagner plus ». Pourtant, lorsque j’étais jeune étudiant en médecine, je n’ai pas hésité à faire deux ou trois gardes par semaine, car elles m’apportaient un plus dans ma vie professionnelle et je n’ai pas pour autant considéré que je faisais quelque chose d’immoral.

Quatrièmement, on entend certains rappeler que le jour du Seigneur est sacré. Mais on n’est plus en 1906. La France est un pays laïque, qui respecte toutes les religions et toutes les croyances, y compris ceux qui ne croient pas. De plus, le jour du Seigneur varie selon les religions du Livre : ce peut être le vendredi, le samedi ou le dimanche.

Dernier point, certains objectent que ce texte va détruire la vie de famille. C’est inexact : je ne vois pas en quoi ceux qui choisiraient de travailler un ou deux dimanches par mois remettraient en cause l’existence de la cellule familiale. De plus, il me semble qu’aller dans un centre commercial le dimanche pour choisir avec ses enfants un bureau apporte davantage à la vie de famille que de rester assis pour regarder la télévision.

En conclusion, je dirai sans hésiter que ce texte me paraît juste et équilibré.

M. Patrick Roy. La proposition de loi dont nous sommes saisis me paraît injuste et déséquilibrée. Elle pose en outre plusieurs problèmes.

D’une manière générale, j’ai du mal à croire que les Français dépenseront le dimanche ce qu’ils n’ont pas pu dépenser la semaine.

Par ailleurs, l’argument consistant à dire que ce texte n’imposera pas de contraintes nouvelles au salarié m’amène à penser que ceux qui l’invoquent soit ignorent tout du monde de la grande distribution, soit, et c’est peut-être plus souvent le cas, mentent de façon délibérée. Il ne peut y avoir de doute en la matière : ces dispositions constitueront une nouvelle contrainte pour les salariés.

J’observe du reste que, depuis le début de la législature, plus les textes concernant le droit du travail passent, plus le droit est coupé à la hache et plus leurs droits sont retirés aux salariés.

Enfin, une certaine vision de la société me conduit à penser que vivre, ce n’est pas consommer. Il existe d’autres valeurs à défendre pour le bien de la collectivité.

M. Jean-Pierre Marcon. On voit bien que ce texte suscite des discussions animées, quelles que soient nos sensibilités politiques et les catégories sociales auxquelles nous appartenons.

Ce débat a été ouvert en raison de décisions rendues par les tribunaux, ce qui prouve que la règle actuelle n’est plus adaptée à la réalité sociale. C’est la raison pour laquelle la proposition de loi suscite un beau débat de société. En effet, on ne peut faire évoluer la législation actuelle sans réfléchir plus largement à l’organisation de notre vie collective. Je salue donc la ténacité et le courage de Richard Mallié qui, avec sa proposition de loi, a permis l’ouverture de ce grand débat public.

Le dispositif proposé ne remet pas en cause le repos dominical mais réaffirme que le dimanche n’est pas un jour comme les autres. Ayant souvent travaillé le dimanche, mon expérience me conduit à trouver dans la proposition de loi des solutions équilibrées.

Trois mesures principales sont contenues dans ce texte:

– Il porte sur les dérogations en faveur des zones touristiques. Ayant souvent accompagné des touristes étrangers visitant notre pays, j’ai regretté qu’ils ne puissent pas consommer en achetant nos produits le dimanche. Ce texte va permettre de générer le chiffre d’affaires dont les commerces implantés dans ces zones ont besoin.

– Il propose de porter l’heure limite d’ouverture des commerces de détail alimentaire de douze à treize heures. Cette modification permettra ainsi la régularisation de nombreuses situations observées sur le terrain.

– Il propose enfin de mettre en place la notion de « zone d’attractivité commerciale exceptionnelle », les salariés des entreprises concernées devant bénéficier, sous certaines conditions, d’un doublement de salaire.

C’est ce troisième point qui me semble poser une difficulté. D’une manière générale, je suis favorable aux majorations salariales, mais en liant le doublement du salaire à la notion de « zone d’attractivité commerciale exceptionnelle », on semble laisser de côté tous ceux qui travaillent le dimanche hors de ces zones. Or de très nombreux salariés sont concernés par le travail dominical. Par conséquent, il est inévitable qu’ils réclameront une égalité de traitement avec les salariés qui bénéficieront d’une mesure plus avantageuse dans le cadre de la présente proposition de loi.

Cette disposition posera à mon avis des problèmes d’application pour les employeurs de certains secteurs. C’est pourquoi je proposerai un amendement tendant à prévoir que les salaires sont directement discutés au niveau de l’entreprise.

Mme Catherine Génisson. Je suis aussi une travailleuse du dimanche. Ce type de travail n’a rien d’exceptionnel : 25 % des salariés travaillent aujourd’hui le dimanche. Mais dans le même temps, ceux qui travaillent ce jour-là le font par obligation, parce qu’ils doivent assurer un service public ou maintenir une activité de production.

C’est pourquoi je me réjouis que la règle du repos dominical soit inscrite dans le code du travail, dans notre République laïque. À cet égard, je m’étonne que le dernier paragraphe de l’exposé des motifs nous appelle à agir pour prendre en compte les changements intervenus dans les modes de vie d’une partie des Français et pour respecter la différence de chacun et la liberté de tous.

Quand on lance un tel appel, on se doit de réfléchir sérieusement aux conséquences de mesures qui auront un impact important sur la vie des Français. Je ne suis pas sûre en outre que ce texte encouragera les acteurs agissant au sein d’une entreprise à se réunir et à se concerter pour réfléchir à une meilleure organisation collective du travail et de la production. Respecter la différence de chacun implique le respect des droits et des prérogatives des uns et des autres.

Personne ne souhaite spontanément travailler le dimanche. La seule motivation qui pousse un salarié à faire ce choix est l’obtention d’une rémunération plus importante. La vérité, qu’il faut rappeler, est que les salariés sont attachés au repos dominical, qui constitue un temps fort de la vie familiale.

M. Jean Mallot. Il est normal que nous prenions le temps de débattre. C’est le propre du travail en commission. Tous les arguments doivent être avancés, toutes les options doivent être étudiées, afin que soit préparé correctement l’examen du texte en séance publique. Je me réjouis, à cet égard, que notre réunion soit animée et bénéficie de la participation de très nombreux commissaires.

J’observe que le rapporteur a appelé de ses vœux la tenue d’un débat qui ne soit pas marqué par la caricature. Le paradoxe est que cette recommandation semble concerner davantage le groupe UMP que l’opposition. En outre, la belle « unanimité » dont on nous dit qu’elle rassemble l’UMP autour de cette question du travail dominical m’incite à vouloir lui donner satisfaction en l’invitant à examiner la proposition de loi en séance publique un dimanche.

Par ailleurs, j’ai relevé quelques arguments étonnants dans l’exposé des motifs de ce texte. Ainsi, selon l’auteur de la proposition de loi, les dérogations au repos dominical permettront d’apporter une solution aux embouteillages qui empoisonnent la vie de nos concitoyens. Autre argument surprenant : il faut encourager le travail dominical car, désormais, un Français sur trois fait ses achats sur internet. Je ne saisis pas très bien le fondement de cette argumentation.

Pour revenir au dispositif, le point central de la discussion porte sur la liberté de choix du salarié. Si elle existait vraiment, la discussion serait moins orageuse. Mais, en vérité, cette notion de liberté est irréaliste. On ne choisit pas de travailler le dimanche parce qu’on est libre : on est contraint de le faire parce qu’il faut bien gagner assez d’argent pour pouvoir vivre correctement. De même, on n’est pas libre de travailler jusqu’à 70 ans : on y est contraint pour ne pas être obligé de survivre avec une petite retraite.

C’est pourquoi je pense qu’en raison du lien de subordination qui entrave la liberté du salarié, la marge de manœuvre de ce dernier est plus que réduite en ce qui concerne le travail dominical.

J’en viens aux conséquences concrètes du travail dominical. Elles sont au nombre de deux : d’une part, l’ouverture des commerces ce jour-là ne créera aucun emploi supplémentaire, mais au contraire en détruira dans le secteur du petit commerce ; d’autre part, l’ouverture d’un commerce occasionnant toujours des frais, ce texte accroîtra ceux-ci et aura pour effet de pousser à la hausse le prix de vente des produits.

En ce qui concerne les conséquences autres qu’économiques, le dispositif proposé induira un développement du trafic routier et aura un effet « tâche d’huile » sur l’ensemble de la vie collective quelque peu contradictoire avec le Grenelle de l’environnement.

Nous tenons à ce qu’il y ait un jour de repos dans la semaine, indépendamment de la dimension religieuse de ce principe. Nous estimons en effet que se distraire, ce n’est pas se promener dans des centres commerciaux pour contempler, sur des étals, les marchandises qu’on ne pourra pas acheter.

Par ailleurs, ce texte va poser un problème d’égalité entre les salariés. Ainsi, la fameuse règle relative au doublement de la rémunération ne s’appliquera pas à tous les salariés : la coexistence de plusieurs catégories de salariés ne manquera pas de susciter des difficultés sur le plan constitutionnel.

La disposition prévoyant qu’à défaut d’un accord, la décision de l’employeur d’ouvrir le dimanche doit être approuvée par référendum soulève aussi des difficultés. Quelles seront en effet la valeur et la portée juridique de cette consultation ?

Enfin, la loi du 31 janvier 2007 de modernisation du dialogue social prévoit que le vote de toute loi modifiant le code du travail doit être précédé d’une concertation avec les partenaires sociaux. Or je crois pouvoir dire que cette proposition de loi ne respecte pas cette règle, qui est pourtant essentielle.

M. Jacques Domergue. Quand j’allais en classe, il n’y avait pas école le jeudi. Ce jour sans école a ensuite été fixé au mercredi puis, très récemment, les cours du samedi ont été supprimés. La semaine de quatre jours vient d’être instaurée à l’école primaire, ce qui montre que rien n’est figé.

Cette proposition de loi ne vise pas, contrairement à ce qu’affirment ses détracteurs, à instaurer le travail le dimanche, mais à réglementer ce dernier. C’est pourquoi je la soutiens, même si le traitement privilégié accordé à certaines zones pourrait donner le sentiment aux autres que les premières bénéficient d’une forme de passe-droit.

En outre, la règle de la rémunération double va poser un problème d’égalité entre les salariés, qui n’en bénéficieront pas tous nécessairement.

Enfin, il est important de prévoir des dispositions spécifiques pour les grandes surfaces alimentaires. Il est en effet indispensable de « revitaliser » nos centres-ville, en particulier en stimulant les activités de bouche.

Mme Catherine Lemorton. Je souhaiterais répondre à ceux qui avancent des arguments qui tendent à confondre des situations qui ne sont en rien comparables. Ce texte ne vise pas à rétablir l’égalité des droits entre des situations semblables, mais à régulariser des situations qui sont totalement illégales. Comment peut-on prendre l’exemple de l’étudiant en médecine qui décide de travailler et s’en trouve heureux pour soutenir le développement du travail dominical ?

M. Jean Bardet. J’ai simplement évoqué le cas des étudiants qui font le choix de faire deux à trois gardes par semaine.

Mme Catherine Lemorton. Au moment où nous allons examiner une proposition de loi visant à lutter contre l’échec des étudiants en première année de médecine, je ne comprends pas qu’on puisse vouloir encourager ces mêmes étudiants à travailler dix heures le dimanche et à s’épuiser ainsi au lieu de préparer leurs cours !

M. le président Pierre Méhaignerie. Il ne faut pas tout mélanger et exclure qu’un étudiant qui a 18 heures de cours par semaine puisse décider de travailler un jour par semaine.

Mme Catherine Lemorton. J’en viens à l’argument selon lequel, en l’absence de travail dominical, les moments passés devant la télévision ou un écran d’ordinateur ne favoriseraient pas le dialogue au sein des familles.

Pour ma part, je ne considère pas que c’est en me promenant entre les rayons des produits frais et des lessives que je peux dialoguer avec mes enfants.

Par ailleurs, je propose aux députés de la majorité des travaux pratiques avant le vote ce texte. Il suffit, par exemple, de se rendre dans un magasin qui pratique des ouvertures exceptionnelles avant Noël et de demander aux caissières si elles étaient volontaires pour travailler le dimanche. Je peux vous affirmer, en outre, que le délai de prévenance de huit jours pour la fermeture du magasin le 24 décembre à 21 heures 30 n’est jamais respecté. Ainsi, les caissières des grandes surfaces ne sont prévenues que le 23 décembre au soir ou le 24 au matin…

M. Michel Ménard. La liberté tant promue par la majorité se résume à la liberté de travailler jusqu’à l’âge de 70 ans tous les dimanches en faisant des heures supplémentaires. En réalité, parler de liberté dans ce domaine relève davantage du mensonge.

On nous dit que le dispositif proposé constituerait un levier pour stimuler l’économie. Mais les ménages qui connaissent des difficultés économiques ne vont pas pouvoir consommer plus du fait de l’ouverture des commerces le dimanche. La vraie question est celle du pouvoir d’achat des plus modestes et le dispositif proposé n’y apporte pas de réponse.

Par ailleurs, cette proposition de loi aurait mérité des travaux préparatoires plus approfondis, notamment pour corriger certaines imprécisions. C’est d’ailleurs pour de tels motifs que récemment la Commission a décidé de suspendre l’examen d’une proposition de loi relative à la reconnaissance et à l'indemnisation des victimes des essais ou accidents nucléaires et de ne pas présenter de conclusions. Plutôt que de passer en force, la majorité gagnerait à prendre en compte certaines observations de l’opposition. On aurait ainsi pu éviter d’adopter des dispositifs législatifs dont l’application pose plus de problèmes qu’elle n’en résout, comme c’est le cas par exemple du droit d'accueil pour les élèves des écoles maternelles et élémentaires pendant le temps scolaire ou des dispositions relatives à la journée de solidarité pour l’autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées. C’est pourquoi les membres du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche (SRC) souhaitent que la Commission suspende l’examen de la proposition de loi.

M. Richard Mallié, rapporteur. La proposition de loi apporte une réponse à un vrai problème : comment régler les ambiguïtés et combler les lacunes de la législation en vigueur sur le repos dominical, sachant que ces ambiguïtés et ces lacunes fragilisent des entreprises et que 15 000 à 20 000 emplois pourraient être en jeu ?

Pour régler ces problèmes, on aurait pu procéder à l’établissement de dérogations par branches au principe du repos dominical, comme cela a été fait en janvier dernier pour les établissements de commerce de détail d’ameublement. Cette solution a toutefois été écartée, car elle aurait conduit à accorder des dérogations à l’ensemble des entreprises au sein des branches considérées, alors qu’au sein de chaque branche, les entreprises ne souhaitent pas toutes nécessairement bénéficier de ces dérogations.

C’est pourquoi la solution retenue consiste simplement à ajouter une dérogation supplémentaire aux 180 déjà existantes, moyennant des contraintes importantes. En effet, il est proposé que seul le conseil municipal puisse prendre l’initiative de la demande, que le président de l’intercommunalité concernée puisse s’y opposer, que la délimitation du périmètre de la zone concernée revienne au préfet ou encore que les partenaires sociaux soient toujours invités à négocier les contreparties accordées dans le cadre d’un accord collectif, en l’absence duquel pourra intervenir une décision unilatérale de l’employeur prise après référendum.

En tout état de cause, le dispositif proposé établit un cadre national dans le code du travail, mais c’est au niveau local que la décision devra être prise : la loi laisse donc toute sa place à la démocratie sociale. Il n’est d’ailleurs pas rare aujourd’hui que, sur le terrain, les partenaires sociaux adhèrent à un accord collectif permettant le travail dominical alors que la centrale syndicale dont ils relèvent en dénonce le principe au plan national.

S’agissant de la grande distribution, il faut noter que les demandes des entreprises du secteur ont évolué : elles ne souhaitent plus ouvrir tous les dimanches, mais simplement pouvoir ouvrir dix ou douze dimanches dans l’année. Il ne s’agit donc pas des questions spécifiques traitées par la présente proposition de loi.

Enfin, il faut redire qu’avant le dépôt de cette proposition de loi, pendant près d’un an ont été menées des auditions. Ces dernières semaines, préalablement à la présente discussion, de nouvelles auditions ont été ouvertes à l’ensemble des membres de la Commission, auditions auxquelles M. Christian Eckert a d’ailleurs pris part une fois.

II.- EXAMEN DES ARTICLES

La Commission a examiné les articles de la présente proposition de loi au cours de ses séances du 3 décembre 2008.

Article additionnel avant l’article 1er

Principe du repos hebdomadaire dominical

La Commission examine un amendement de M. Jean-Frédéric Poisson visant à réaffirmer le principe du repos dominical.

M. Jean-Frédéric Poisson. Pour renforcer le principe du repos dominical, qui est déjà énoncé de façon très claire dans le code du travail, il aurait fallu soit lui donner une valeur constitutionnelle, ce qui paraît difficile, soit le considérer comme un principe fondamental reconnu par les lois de la République, ce qui correspond à une procédure spécifique et longue, soit encore reprendre mot pour mot la rédaction de l’article L. 3132-3 du code du travail, ce qui aurait été évidemment redondant : d’où la présente rédaction qui précise que c’est dans l’intérêt des salariés que le repos hebdomadaire est donné le dimanche.

D’ailleurs, la jurisprudence des chambres criminelle et sociale de la Cour de cassation considère d’ores et déjà que c’est dans l’intérêt du salarié que le repos hebdomadaire doit être donné le dimanche. En outre, la notion d’intérêt du salarié peut recouvrir plus largement des considérations liées à sa vie personnelle, allant au-delà de son activité professionnelle.

M. Christian Eckert. C’est ubuesque. Loin de renforcer le principe du repos dominical figurant à l’article L. 3132-3 du code du travail, cet amendement en affaiblit la portée : il risquerait de permettre à un juge de valider une décision d’un employeur tendant à obliger un salarié à travailler le dimanche dès lors qu’il n’est pas établi que l’intérêt du salarié est compromis.

Mme Martine Billard. On pourrait qualifier cet amendement de bavard car sa portée est surtout médiatique. Le problème est que ce dispositif n’interdit pas les dérogations au principe du repos dominical, dès lors que l’intérêt du salarié n’est pas remis en cause.

M. Philippe Boënnec. Ramener la justification du repos dominical au seul intérêt du salarié semble un peu réducteur. Il faudrait plutôt défendre plus généralement ce principe dans le cadre d’une « laïcité positive ».

M. Jean Mallot. Les salariés ne sont pas les seuls à avoir intérêt au repos dominical : on pourrait aussi mentionner l’intérêt qu’y ont, par exemple, les travailleurs indépendants.

M. le président Pierre Méhaignerie. Même si cet amendement peut paraître bavard, il est parfois bon de rappeler certains principes. J’ajoute que les travailleurs indépendants peuvent travailler le dimanche.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte cet amendement.

Article 1er

Définition des dérogations à la règle du repos dominical dans les zones touristiques et les zones d’attractivité commerciale exceptionnelle

Cet article a un triple objet :

– d’une part, il clarifie la définition des dérogations existantes au principe du repos dominical dans les communes touristiques ou thermales et dans les zones touristiques d’affluence exceptionnelle ou d’animation culturelle permanente ;

– d’autre part, il définit un régime de dérogations au principe du repos dominical dans les zones d’attractivité commerciale exceptionnelle des unités urbaines de plus d’un million d’habitants ;

– enfin, il précise le régime existant des dérogations applicables dans le cas où le repos simultané, le dimanche, de tous les salariés d’un établissement serait préjudiciable au public ou compromettrait le fonctionnement normal d’un établissement (régime défini aujourd’hui à l’article L. 3132-20 du code du travail).

À cet effet, il procède à une nouvelle rédaction de l’article L. 3132-25 du code du travail et insère après cet article trois nouveaux articles L. 3132-25-1 à L. 3132-25-3.

1. La clarification du régime des dérogations à la règle du repos dominical dans les communes et les zones touristiques

En procédant à une nouvelle rédaction de l’article L. 3132-25 du code du travail, les alinéas 1 à 4 de l’article 1er de la proposition de loi modifient, afin de le clarifier, le régime des dérogations à la règle du repos dominical dans les communes ou les zones touristiques.

a) Le régime aujourd’hui en vigueur des dérogations à la règle du repos dominical dans les communes ou les zones touristiques

Il existe déjà aujourd’hui un régime d’attribution de dérogations à la règle du repos dominical dans les communes ou les zones touristiques. Il s’agit de dérogations accordées par le préfet à titre temporaire.

L’article L. 3132-25 du code du travail ouvre en effet la possibilité – sous certaines conditions – à des établissements d’obtenir l’autorisation de donner le repos hebdomadaire à tout ou partie de leur personnel par roulement, « dans les communes touristiques ou thermales et dans les zones touristiques d’affluence exceptionnelle ou d’animation culturelle permanente ». Cet article encadre le régime d’attribution de cette autorisation, qui ne peut donner lieu à la mise en œuvre d’un repos hebdomadaire par roulement que :

– pendant la ou les périodes d’activités touristiques ;

– dans les établissements de vente au détail qui mettent à disposition du public des biens et des services destinés à faciliter son accueil ou ses activités de détente ou de loisirs d’ordre sportif, récréatif ou culturel.

À titre d’exemple, peuvent bénéficier d’une telle dérogation un établissement de vente d’articles de sport et de montagne dans une station de sports d’hiver durant la saison touristique, un commerce de souvenirs et cartes postales dans une zone touristique d’affluence exceptionnelle, un établissement de service de location de matériel de plage dans une commune balnéaire durant la saison estivale, une librairie d’art dans une zone culturelle d’animation permanente, etc… (15)

Ce même article L. 3132-25 donne compétence au préfet pour établir la liste des communes touristiques ou thermales intéressées et le périmètre des zones touristiques d’affluence exceptionnelle ou d’animation culturelle permanente, respectivement sur demande ou sur proposition du conseil municipal.

L’article R. 3132-18 du code du travail précise que le préfet établit cette liste après avoir recueilli l’avis du comité départemental du tourisme, dans le mois suivant la réception de la demande du conseil municipal.

Le préfet fixe cette liste en prenant en compte la condition selon laquelle « les communes doivent accueillir pendant certaines périodes de l’année une population supplémentaire importante en raison de leurs caractéristiques naturelles, artistiques ou historiques ou de l’existence d’installations de loisirs ou thermales à forte fréquentation » (article R. 3132-20 du code du travail). Un certain nombre de critères – non limitatifs – à prendre en compte sont aussi énumérés par ce dernier article : le rapport entre la population permanente et la population saisonnière ; le nombre d’hôtels, de gîtes, de campings ou de lits ; le nombre des places offertes dans les parcs de stationnement d’automobiles.

Le guide pratique sur le repos dominical établi par la direction générale du travail du ministère du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité en juillet 2007, précise ces critères en disposant par exemple que : « Les communes concernées sont celles qui offrent un ensemble de spécificités naturelles, pittoresques, thermales, historiques ou artistiques résultant de leur situation géographique, ou de particularités telles que des ressources thermales, balnéaires, culturelles ou sportives, et qui connaissent de ce fait un afflux saisonnier très important de population. L’importance de cet afflux de population doit être telle qu’il nécessite la mise en place d’infrastructures propres à accueillir ce public et à répondre à ses besoins particuliers, d’ordre sportif, récréatif ou culturel ».

Il est important de noter, conformément aux précisions figurant dans ce même guide, que « les dérogations qui peuvent bénéficier aux établissements situés dans les communes ou zones touristiques ou culturelles ne sont pas des dérogations de droit. Elles sont individuelles et ne peuvent être accordées que par le préfet, sur demande des établissements concernés ».

Il appartient donc au préfet, une fois la liste des communes ou le périmètre de la zone établis, de déterminer, sur demande de l’établissement concerné, si celui-ci est effectivement lié au tourisme ou à l’animation culturelle. C’est le nouvel article L. 3132-25-2 du code du travail, créé par la présente proposition de loi (voir infra le commentaire des alinéas 10 à 12 de l’article 1er), qui détaille les modalités de la procédure d’attribution des dérogations.

b) La nécessité d’une clarification du dispositif existant

Comme le souligne l’exposé des motifs de la proposition de loi, la mise en œuvre des dérogations au repos dominical dans les communes et zones touristiques donne lieu aujourd’hui à des « situations ubuesques ».

Un exemple, souvent cité, est révélateur : un magasin qui vend des lunettes de soleil peut ouvrir le dimanche dans la mesure où son activité est considérée comme étant « de loisir » ; s’il vend des lunettes correctrices de vue, en revanche, la jurisprudence considère que ces biens ne constituent pas par eux-mêmes des biens et services destinés à faciliter l’accueil du public ou des activités de détente ou de loisirs d’ordre récréatif ou culturel (16).

Autre exemple : la Cour administrative d’appel de Paris, par un arrêt du 14 novembre 2005, a considéré qu’un commerce ayant pour activité principale « une activité de créateur de mode » et proposant des vêtements et accessoires de mode devait « être regardé comme mettant à disposition du public des biens et des services destinés à faciliter ses activités de détente ou de loisirs d’ordre récréatif ou culturel » (CAA de Paris du 14 novembre 2005, Barbara Bui). Mais il en ira différemment d’un magasin de mode procédant à la vente de vêtements sans proposer de « créations » (CAA de Paris, 14 décembre 2005, Valérie Stern).

Face à ces difficultés, l’avis établi sur le rapport présenté en mars 2007 par M. Léon Salto au nom de la section des activités productives, de la recherche et de la technologie du Conseil économique et social (CES), repris sur ce point par l’étude présentée par M. Jean-Paul Bailly au nom de la commission temporaire sur les mutations de la société et les activités dominicales du CES en décembre de la même année, a proposé que « pour des raisons d’équité et de cohérence commerciale, l’autorisation d’ouverture le dimanche pour les commerces situés en zones ou communes touristiques [soit] collective et s’applique à l’ensemble des commerces ».

c) Le dispositif proposé

Pour l’ensemble de ces raisons, dans un souci de cohérence et d’équité, l’article 1er de la proposition de loi procède à une nouvelle rédaction de l’article L. 3132-25 du code du travail.

Le premier alinéa du nouvel article L. 3132-25 (alinéa 2 de l’article 1er) reprend le principe existant selon lequel « sans préjudice des dispositions de l’article L. 3132-20, dans les communes touristiques ou thermales et dans les zones touristiques d’affluence exceptionnelle ou d’animation culturelle permanente, le repos hebdomadaire peut être donné, par roulement, pour tout ou partie du personnel, pour les établissements de vente au détail qui mettent à disposition des biens et des services après autorisation administrative ».

Ce principe appelle les observations suivantes :

– comme dans le droit aujourd’hui en vigueur, les dérogations relatives aux communes et zones touristiques sont indépendantes des dérogations visées à l’article L. 3132-20 du code du travail, attribuées dans le cas où le repos simultané le dimanche de tous les salariés d’un même établissement serait préjudiciable au public ou compromettrait le fonctionnement normal de l’établissement (régime exposé infra) ;

– la définition des communes ou zones concernées est inchangée par rapport au droit existant ;

– en revanche, les deux éléments à l’origine des situations d’iniquité constatées sont supprimés : la référence à la ou les périodes d’activité touristique d’une part ; la qualification des établissements concernés en fonction des biens vendus définis comme destinés à faciliter l’accueil du public ou ses activités de détente ou de loisirs d’ordre sportif, récréatif ou culturel, d’autre part. En revanche, le type de commerce concerné par la dérogation est inchangé : comme dans la rédaction actuelle du code du travail, sont concernés les établissements de vente au détail qui mettent à disposition des biens et des services.

Aux termes du deuxième alinéa de l’article L. 3132-25 (alinéa 3 de l’article 1er), « la liste des communes touristiques ou thermales intéressées et le périmètre des zones touristiques d’affluence exceptionnelle ou d’animation culturelle permanente sont établis par le préfet sur demande des conseils municipaux ».

Cette procédure est très proche du régime existant : elle donne compétence au préfet pour fixer la liste des communes et le périmètre des zones concernées. La seule différence avec le droit aujourd’hui en vigueur est la suppression de la distinction entre la demande des conseils municipaux dans le premier cas et la proposition dans le second : dans tous les cas désormais, c’est une « demande » qui est présentée, dans un souci de simplification.

La référence expresse aux « critères et modalités définis par voie réglementaire » est également supprimée. Celle-ci n’est en effet pas vraiment nécessaire compte tenu de la rédaction du troisième alinéa de l’article L. 3132-25 (alinéa 4 de l’article 1er) qui, comme dans le droit existant, renvoie à un décret en Conseil d’État le soin de déterminer les modalités d’application de l’ensemble de l’article.

Ce décret pourrait donc prévoir des critères permettant au préfet, comme il en va aujourd’hui, de statuer sur l’inscription de la commune sur la liste des communes touristiques et thermales du département.

Pour le reste, la procédure figurant aujourd’hui aux articles R. 3132-18 à R. 3132-20 du code du travail pourrait être inchangée : initiative du conseil municipal, qui adresse au préfet sa demande à laquelle est jointe le compte rendu de ses délibérations ainsi que l’ensemble des pièces et éléments justificatifs destinés à démontrer le caractère touristique ou thermal de la commune ; avis au préfet du comité départemental du tourisme dans le délai d’un mois ; arrêté motivé du préfet autorisant ou refusant l’inscription de la commune sur la liste des communes touristiques et thermales.

2. La définition d’un régime de dérogations à la règle du repos dominical dans les zones d’attractivité commerciale exceptionnelle des unités urbaines de plus d’un million d’habitants

Les alinéas 5 à 9 de l’article 1er, en insérant un nouvel article L. 3132-25-1 après l’article L. 3132-25 du code du travail, définissent un nouveau type de dérogation à la règle du repos dominical, établi en fonction de la situation des établissements concernés au sein de « zones d’attractivité commerciale exceptionnelle ».

Le premier alinéa du nouvel article L. 3132-25-1 (alinéa 5 de l’article 1er) pose le principe de cette dérogation. Aux termes de cet alinéa, « sans préjudice des dispositions de l’article L. 3132-20, dans les unités urbaines de plus de 1 000 000 d’habitants, le repos hebdomadaire peut être donné, par roulement, pour tout ou partie du personnel, pour les établissements de vente au détail qui mettent à disposition des biens et des services situés dans les zones d’attractivité commerciale exceptionnelle, après autorisation administrative ».

Ce régime est établi, sur un certain nombre de points, sur le modèle du régime qui prévaut dans les zones touristiques :

– le principe de la dérogation est le même : il s’agit d’une autorisation, attribuée par l’autorité administrative, de repos hebdomadaire par roulement, qui concerne tout ou partie du personnel ;

– comme il en va s’agissant de la dérogation concernant les zones touristiques également, ce nouveau régime est distinct de celui prévu à l’article L. 3132-20 du code du travail, relatif aux situations où le repos simultané le dimanche de tous les salariés d’un établissement serait préjudiciable au public ou compromettrait le fonctionnement normal de l’établissement ;

– les établissements de vente au détail mettant à la disposition du public des biens et des services sont concernés.

La spécificité du nouveau dispositif tient à la localisation des établissements. En lieu et place des communes et zones touristiques, cette localisation est en effet définie en fonction de deux éléments cumulatifs : les unités urbaines de plus de 1 000 000 d’habitants ; les « zones d’attractivité commerciale exceptionnelle ».

a) La notion d’unité urbaine de plus de 1 000 000 d’habitants

Le nouveau régime sera applicable « dans les unités urbaines de plus de 1 000 000 d’habitants ».

Comme le précise l’exposé des motifs de la proposition de loi, la notion d’unité urbaine est celle retenue par l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE). On rappellera que selon l’INSEE, « la notion d’unité urbaine repose sur la continuité de l’habitat : est considérée comme telle un ensemble d’une ou plusieurs communes présentant une continuité du tissu bâti (pas de coupure de plus de 200 mètres entre deux constructions) et comptant au moins 2 000 habitants. La condition est que chaque commune de l’unité urbaine possède plus de la moitié de sa population dans cette zone bâtie. Les unités urbaines sont redéfinies à l’occasion de chaque recensement de la population. Elles peuvent s’étendre sur plusieurs départements. Si la zone bâtie se situe sur une seule commune, on parlera de ville isolée. Dans le cas contraire, on a une agglomération multicommunale ».

L’INSEE dénombre aujourd’hui quatre unités urbaines de plus d’un million d’habitants, conformément au tableau présenté ci-après : Paris, Marseille-Aix-en-Provence, Lyon, Lille.

Liste des unités urbaines de plus d’un million d’habitants

Nom de l’unité urbaine

Nombre de communes

Population en 1999

Population en 1990

Évolution de 1990 à 1999

Paris

396

9 644 507

9 318 821

325 686

Marseille-Aix-en-Provence

38

1 349 772

1 230 936

118 836

Lyon

102

1 348 832

1 262 223

86 609

Lille

63

1 000 900

959 234

41 666

Source : INSEE, recensements de la population.

En pratique, comme le précise le deuxième alinéa de l’article L. 3132-25-1 (alinéa 6 de l’article 1er), « la liste et le périmètre des unités urbaines (…) sont établis par le préfet de région sur la base des résultats du recensement de la population ».

C’est au sein d’un périmètre ainsi défini que pourront être attribuées des dérogations à la règle du repos dominical. Celles-ci ne pourront cependant valoir pour l’ensemble de l’unité urbaine concernée : c’est seulement dans les « zones d’attractivité commerciale exceptionnelle », elles-mêmes délimitées dans chacune de ces quatre unités urbaines, que seront accordées, le cas échéant, les dérogations.

b) La notion de zone d’attractivité commerciale exceptionnelle

Les troisième et quatrième alinéas de l’article L. 3132-25-1 (alinéas 7 et 8 de l’article 1er) définissent les modalités selon lesquelles seront établis la liste et le périmètre des « zones d’attractivité commerciale exceptionnelle » au sein des unités urbaines.

Les conseils municipaux ont l’initiative d’une proposition d’inscription de leur commune sur la liste ou dans le périmètre de ces zones.

La compétence pour établir la liste et le périmètre relève du préfet, après consultation des présidents de la communauté de communes, de la communauté d’agglomération ou de la communauté urbaine, lorsqu’elles existent, dans le périmètre desquelles est située la zone d’attractivité commerciale exceptionnelle. Le préfet ne saurait, en tout état de cause, statuer qu’après avis desdites autorités. L’alinéa 8 renvoie à un décret en Conseil d’État le soin de fixer les modalités selon lesquelles sera donné cet avis.

Aux termes du dernier alinéa de l’article L. 3132-25-1 (alinéa 9 de l’article 1er), un décret en Conseil d’État précisera en outre les critères d’attractivité commerciale exceptionnelle au regard de deux éléments : l’importance de la clientèle concernée d’une part ; l’éloignement de celle-ci des zones commerciales en cause d’autre part.

Ces deux éléments sont importants car ils précisent la manière dont il importe de prendre en considération l’intérêt du consommateur.

Cette préoccupation répond à une nécessité mise en évidence par l’étude du Conseil économique et social (CES) présentée par M. Jean-Paul Bailly au nom de la commission temporaire sur les mutations de la société et les activités dominicales en 2007 : « L’appréciation des critères du « préjudice au public » ou du trouble « au fonctionnement normal de l’établissement » [prévus aujourd’hui par le code du travail] pourrait être modernisée en tenant compte de l’intérêt manifeste pour le consommateur d’avoir plus aisément accès à un établissement commercial qui ouvrirait le dimanche, situé dans une zone géographique difficilement accessible le reste de la semaine, pour effectuer des achats ayant un caractère familial... ».

Le CES rappelait à cette occasion que « la jurisprudence du Conseil d’État ne permet de prendre en compte, en cas de fermeture le dimanche, ni l’intérêt manifeste du consommateur ni d’ailleurs les risques de licenciement. C’est pourquoi, le critère de l’intérêt manifeste du consommateur pourrait s’ajouter aux deux critères existants [dans le cadre des dérogations prévues à l’article L. 3132-20 du code du travail] ».

Le rapport poursuivait : « L’objectif serait que les demandes d’autorisation d’ouverture soient instruites en tenant compte aussi de l’intérêt manifeste pour le consommateur : fréquentation du magasin essentiellement le week-end, pour des achats ayant un caractère familial, difficilement réalisables le reste de la semaine car les disponibilités horaires des clients et l’accessibilité du site ne sont pas aisément conciliables (magasins situés en périphérie des lieux d’habitation, accessibles uniquement par la route...) ».

En faisant reposer les critères pris en compte pour les nouvelles dérogations attribuées dans les zones d’attractivité commerciale exceptionnelle des unités urbaines de plus d’un million d’habitants sur la notion d’« importance de la clientèle concernée » et d’« éloignement de [la clientèle] des zones commerciales en cause », le nouveau régime rejoint ces préconisations.

3. Les modalités d’attribution des autorisations de dérogation à la règle du repos dominical

Une fois défini le régime général des deux types de dérogations relatives aux zones touristiques et aux zones commerciales – à savoir les modalités selon lesquelles les listes sont établies –, il importe de fixer les règles selon lesquelles un établissement au sein d’une commune présente sur la liste pourra demander à bénéficier de cette dérogation.

Aujourd’hui, ces règles figurent aux articles R. 3132-16 et R. 3132-17 du code du travail. Elles concernent le régime d’attribution des dérogations dans les zones touristiques mais aussi celui des dérogations accordées par le préfet lorsqu’il est établi que le repos simultané le dimanche de tous les salariés d’un établissement serait préjudiciable au public ou compromettrait son fonctionnement normal (dérogations définies à l’article L. 3132-20 du code du travail).

L’article 1er de la proposition de loi crée deux nouveaux articles dans le code du travail, les articles L. 3132-25-2 et L. 3132-25-3, qui précisent ces règles, rejoignant en cela certaines des analyses figurant dans l’étude précitée établie par M. Jean-Paul Bailly au nom du Conseil économique et social.

Les règles nouvelles sont applicables, selon les cas, aux différents régimes de dérogation temporaire qui prévalent : dans les zones touristiques (dérogation prévue à l’article L. 3132-25 du code du travail), dans les zones commerciales (dérogation prévue à l’article L. 3132-25-1 du code du travail) et dans le cas où il existe un risque de préjudice au public ou d’atteinte au fonctionnement normal de l’établissement (dérogation prévue à l’article L. 3132-20 du code du travail).

Le principe de cette dernière dérogation, tel qu’il est fixé à l’article L. 3132-20 du code du travail, ne fait pas l’objet de modifications aux termes de la présente proposition de loi.

On rappellera que cette dérogation constitue une dérogation individuelle et temporaire. L’article L. 3132-20 permet en effet l’attribution d’une dérogation au repos dominical lorsqu’il est établi que le repos simultané, le dimanche, de tout le personnel de l’établissement serait préjudiciable au public ou compromettrait le fonctionnement normal de l’établissement. Ces deux conditions, définies par la jurisprudence, alternatives et non cumulatives, permettent au préfet d’autoriser l’employeur à donner le repos hebdomadaire selon différentes modalités : un autre jour que le dimanche, à tout le personnel de l’établissement ; du dimanche midi au lundi midi ; le dimanche après-midi avec un repos compensateur d’une journée par roulement et par quinzaine ; par roulement à tout ou partie du personnel.

Ces dérogations attribuées en application de l’article L. 3132-20 ne peuvent être accordées que sur demande des établissements concernés. L’établissement demandeur de la dérogation doit fournir, à l’appui de sa requête, des éléments permettant d’établir l’existence de l’une ou l’autre des conditions précitées.

Les précisions apportées par les deux nouveaux articles L. 3132-25-2 et L. 3132-25-3 du code du travail sont de deux ordres : l’article L. 3132-25-2 définit les caractéristiques de l’autorisation de déroger elle-même ; l’article L. 3132-25-3 précise les modalités selon lesquelles ces autorisations doivent être précédées d’un accord collectif ou d’une décision unilatérale de l’employeur prise après référendum.

a) Les caractéristiques de l’autorisation de déroger

Cinq caractéristiques sont communes à l’ensemble des trois régimes précités. Elles sont détaillées aux deux premiers alinéas de l’article L. 3132-25-2 du code du travail (alinéas 10 et 11 de l’article 1er).

● Des autorisations accordées pour une durée limitée

Ces autorisations sont « accordées pour une durée limitée ». Il s’agit en effet de dérogations dont le régime est prévu au sein du paragraphe 3 de la sous-section 2 (de la section 2 du chapitre II du titre III du livre Ier de la troisième partie du code du travail), sous-section consacrée aux « dérogations au repos dominical », paragraphe précisément intitulé : « Dérogations temporaires au repos dominical ».

Au reste, concernant la dérogation définie à l’article L. 3132-20, qui peut être mise en œuvre lorsque le repos simultané, le dimanche, de tous les salariés d’un établissement pourrait être préjudiciable au public ou compromettre le fonctionnement normal de l’établissement, l’article L. 3132-21 du code du travail prévoit déjà que : « Les autorisations prévues à l’article L. 3132-20 ne peuvent être accordées que pour une durée limitée ». Compte tenu de la précision apportée par ce nouvel article L. 3132-25-2, cet article L. 3132-21 devient redondant et c’est pourquoi, par coordination, l’article 3 de la proposition de loi procède à sa suppression (voir infra le commentaire de l’article 3).

Les dérogations prévues à l’article L. 3132-25 pour les communes touristiques ou thermales et dans les zones touristiques d’affluence exceptionnelle ou d’animation culturelle permanente figurent déjà aujourd’hui dans ce même paragraphe 3 consacré aux dérogations temporaires, même si le caractère limité de leur durée n’est pas prévu expressément par le code du travail. Il n’y a cependant pas d’ambiguïtés quant à ce caractère temporaire, conformément aux précisions fournies par le guide pratique de la direction générale du travail sur le repos dominical des salariés, qui le mentionne expressément.

Finalement, cette précision est nouvelle pour ce qui concerne les seules dérogations prévues dans les zones d’attractivité commerciale exceptionnelle pour les unités urbaines de plus d’un million d’habitants, telles que créées par la présente proposition de loi.

Pour ce qui concerne les autorisations mentionnées aux articles L. 3132-25 et L. 3132-25-1, soit dans les communes et zones touristiques et dans les zones d’attractivité commerciale exceptionnelle, l’alinéa 12 de l’article 1er précise que les autorisations sont accordées « pour cinq ans ». En outre, les dérogations peuvent être attribuées soit à titre individuel, soit à titre collectif, dans des conditions prévues par décret en Conseil d’État, pour des commerces ou services exerçant la même activité.

Cette dernière disposition permet, d’une certaine manière, d’harmoniser le régime des autorisations prévues aux articles L. 3132-25 et L. 3132-25-1 sur celles accordées en application de l’article L. 3132-20 lorsqu’il est établi que le repos simultané le dimanche de tous les salariés serait préjudiciable au public ou compromettrait le fonctionnement normal de l’établissement. S’agissant de ces dernières en effet, l’article L. 3132-23 du code du travail prévoit déjà que « l’autorisation accordée à un établissement par le préfet peut être étendue à plusieurs ou à la totalité des établissements de la même localité exerçant la même activité, s’adressant à la même clientèle, une fraction d’établissement ne pouvant, en aucun cas, être assimilée à un établissement ».

● Des autorisations accordées après avis du conseil municipal, de la chambre de commerce et d’industrie et des syndicats d’employeurs et de travailleurs intéressés de la commune

L’article R. 3132-16 du code du travail prévoit déjà aujourd’hui que « les dérogations au repos dominical prévues aux articles L. 3132-20 et L. 3132-25 sont accordées après avis du conseil municipal, de la chambre de commerce et d’industrie, des organisations d’employeurs et de salariés intéressées de la commune ».

Le texte de la proposition de loi reprend cette garantie importante qui impose une triple consultation préalable à la décision du préfet d’autoriser un établissement à déroger à la règle du repos dominical.

En outre, il étend cette condition, déjà prévue pour les dérogations définies aux articles L. 3132-20 et L. 3132-25, aux nouvelles dérogations définies à l’article L. 3132-25-1 s’agissant des zones d’attractivité commerciale exceptionnelle.

● Des autorisations réputées accordées à l’expiration d’un délai de quatre mois à compter de la réception de la demande

Ce même article L. 3132-25-2 précise aussi que « l’autorisation est réputée accordée à l’expiration d’un délai de quatre mois à compter de la réception de la demande ».

Jusqu’ici, la procédure est la suivante : le préfet doit recueillir l’avis du conseil municipal, de la chambre de commerce et d’industrie ainsi que des syndicats d’employeurs et de salariés intéressés de la commune, par écrit, dans le délai d’un mois (article R. 3132-17 du code du travail). Comme le précise le guide établi par la direction générale du travail précité, à défaut de réponse dans ce délai, si l’avis a été demandé conformément à la loi, « il convient de passer outre et de statuer sur la demande ».

En revanche, aucun délai n’est imparti au préfet pour instruire la demande. C’est pourquoi la proposition de loi prévoit ce dispositif de décision implicite d’acceptation, sur le modèle de celui qui prévaut déjà en droit administratif : l’article 22 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations a en effet posé la règle selon laquelle « le silence gardé pendant deux mois par l’autorité administrative sur une demande vaut décision d’acceptation dans les cas prévus par décrets en Conseil d’État ».

Cette disposition s’inscrit dans une même perspective tout en retenant un délai plus long – de quatre mois –, qui ménage une durée suffisante pour prendre en compte les éventuelles difficultés posées pour l’appréciation de la situation à instruire.

● Des autorisations qui font l’objet d’une publication

Les autorisations de déroger à la règle du repos dominical sont attribuées par arrêté préfectoral. Il est opportun que ces décisions soient rendues publiques. Ce faisant, la proposition de loi affirme une garantie importante et met en cohérence le droit avec une pratique déjà existante.

● Le refus de travailler le dimanche ne constitue pas une faute ou un motif de licenciement

Comme le souligne l’exposé des motifs de la proposition de loi, « il (…) faut assurer une sécurité juridique aux employés qui ne souhaitent pas travailler le dimanche. C’est pourquoi, le texte propose également l’inscription du droit de refus. Cela permettra au salarié qui ne souhaite pas travailler le dimanche d’exercer son droit de refus, aucune sanction ne pouvant lui être imposée. Ce sera ainsi à la représentation syndicale de veiller au volontariat du salarié, c’est-à-dire de le défendre ».

Cette exigence correspond à la nécessité de « respecter le choix du salarié » telle qu’elle avait été rappelée par le Conseil économique et social dans l’étude précitée présentée en 2007 par M. Jean-Paul Bailly :

« Il est souvent argué que ces choix [de travailler le dimanche] ne sont pas véritablement libres et même qu’ils sont assez souvent contraints, par exemple du fait de ressources faibles ou d’une longue période de recherche de travail. Pour autant, ce qui est vraiment contraignant, c’est l’absence d’opportunité qui interdit tout choix... même contraint. La possibilité d’un choix demeure essentielle. Et si l’on reconnaît qu’un choix peut être contraint il faut aussi reconnaître que le choix du travail le dimanche peut être totalement libre, délibéré ou souhaité.

« En réalité, tout au long de la vie (de l’étudiant au retraité en passant par tous les stades de la vie professionnelle), les enjeux et les contraintes évoluent, les priorités et les choix aussi. Aussi, il est important dans ce domaine de ne pas décider pour les autres et d’offrir des opportunités de choix, libre à chacun de les saisir. (…)

« L’employeur qui, dans un cadre légal, désire ouvrir son enseigne le dimanche, s’il fait appel au personnel de l’entreprise, devra respecter le volontariat ».

Tels sont aussi les impératifs qu’entend prendre en compte le présent texte. C’est la raison pour laquelle la proposition de loi dispose expressément que « le refus de travailler le dimanche pour un salarié d’une entreprise bénéficiaire d’une telle autorisation ne constitue pas une faute ou un motif de licenciement ».

b) La condition relative à l’existence d’un accord collectif ou d’une décision unilatérale de l’employeur prise après référendum

Le nouvel article L. 3132-25-3 du code du travail peut être présenté comme complémentaire de l’article L. 3132-25-2. Alors que l’article L. 3132-25-2 du code du travail prévoit les modalités du droit de refus du salarié concerné, cet article impose une décision collective préalable à la mise en œuvre des autorisations prévues tant à l’article L. 3132-20 (lorsque le repos simultané, le dimanche, de tous les salariés d’un établissement pourrait être préjudiciable au public ou compromettre le fonctionnement normal de l’établissement concerné) qu’à l’article L. 3132-25-1 (dans les zones d’attractivité commerciale exceptionnelle).

Cette décision collective doit être entendue comme un préalable à la mise en œuvre de ces régimes dérogatoires. Elle a pour objet la définition des contreparties accordées aux salariés concernés ainsi que des engagements pris en termes d’emploi ou en faveur de certains publics. Elle se distingue donc de la triple consultation préalable à la décision préfectorale d’autoriser tel ou tel établissement à déroger à la règle du repos dominical (avis du conseil municipal, de la chambre de commerce et d’industrie ainsi que des syndicats d’employeurs et de salariés intéressés de la commune), formalité à laquelle elle s’ajoute.

Le premier alinéa de l’article L. 3132-25-3 du code du travail (alinéa 13 de l’article 1er) énonce ainsi que « les autorisations prévues aux articles L. 3132-20 et L. 3132-25-1 sont accordées au vu d’un accord collectif ou d’une décision unilatérale de l’employeur prise après référendum ».

L’alternative est donc la suivante : soit un accord collectif a pu être conclu ; soit aucun accord collectif n’a pu être conclu, la proposition de loi établissant alors un dispositif de prise de décision par l’employeur après référendum.

● La conclusion d’un accord collectif

La première hypothèse correspond à la situation où un accord collectif a pu être conclu, sans que l’alinéa 14 de l’article 1er n’impose le niveau de la conclusion de l’accord : il peut s’agir de tous les niveaux de négociation, même si en pratique ce sont les déclinaisons locales qui ont vocation à être privilégiées, dans la mesure où c’est à un niveau proche du terrain que pourront être au mieux appréciés les besoins.

De ce point de vue, la proposition de loi veut surtout mettre à la disposition des entreprises et des salariés un cadre global qui puisse ensuite être repris au plan local, notamment sous la forme d’un accord interprofessionnel, applicable, dans une zone déterminée, aux entreprises couvertes par ledit accord.

C’est à cet accord qu’il reviendra, aux termes de ce même alinéa, de décrire les contreparties accordées aux salariés privés du repos dominical, qu’il s’agisse de repos compensateur et de majoration de la rémunération.

En outre, ce même accord collectif devra décrire les engagements pris en termes d’emploi ou en faveur de certains publics en difficulté ou de personnes handicapées.

● Une décision de l’employeur approuvée par référendum

Le troisième alinéa de l’article L. 3132-25-3 (alinéa 15 de l’article 1er de la proposition de loi) décrit les modalités selon lesquelles pourra être prise une décision de l’employeur préalable à la mise en œuvre de dérogations à la règle du repos dominical, dans le cas où aucun accord collectif n’est applicable dans l’entreprise.

Cette disposition s’applique avant tout aux plus petites entreprises, conformément au texte de la proposition de loi qui vise « les entreprises ou établissements dépourvus de délégué syndical non assujettis à l’obligation annuelle de négocier prévue à l’article L. 2242-1 ».

L’article L. 2242-1 du code du travail établit les modalités de la négociation obligatoire en entreprise. Le premier alinéa de cet article dispose que « dans les entreprises où sont constituées une ou plusieurs sections syndicales d’organisations représentatives, l’employeur engage chaque année une négociation sur les matières prévues par le présent chapitre » ; les articles L. 2242-8 et suivant précisent ces matières (salaires effectifs, durée effective et organisation du temps de travail, évolution de l’emploi dans l’entreprise, etc.). Ces entreprises sont, pour l’essentiel, les entreprises de moins de cinquante salariés car s’il est vrai que l’article L. 2142-1 du code du travail ne prévoit aucune condition d’effectif pour la constitution d’une section syndicale au sein d’une entreprise, la désignation de délégués syndicaux n’est possible que dans les entreprises d’au moins cinquante salariés (17) et c’est surtout dans ces entreprises que sont, en pratique, constituées les sections syndicales.

Or l’on sait les difficultés particulières que peuvent rencontrer les plus petites entreprises pour engager des négociations collectives : à titre d’exemple, des chiffres publiés en juillet 2008 par la direction statistique du ministère en charge du travail (18) ont montré qu’en 2006, la moitié des entreprises de cinquante salariés ou plus ont ouvert une négociation collective, alors que c’est le cas de 8 % de celles de dix à cinquante salariés. Cette proportion atteint 77 % dans les entreprises où il existe au moins un délégué syndical.

Il est vrai que la loi n° 2008-789 du 20 août 2008 portant rénovation de la démocratie sociale et réforme du temps de travail – reprenant sur ce point la position commune conclue par les partenaires sociaux le 9 avril 2008 sur la représentativité, le développement du dialogue social et le financement du syndicalisme – développe les possibilités de conclusion d’accords avec des élus du personnel ou des salariés mandatés, même en l’absence d’accord collectif étendu portant sur le sujet : l’article L. 2232-21 du code du travail ouvre aux élus du personnel la possibilité de conclure des accords, dans les entreprises de moins de 200 salariés, en l’absence de délégué syndical dans l’entreprise ou l’établissement, ou de délégué du personnel désigné délégué syndical dans les entreprises de moins de cinquante salariés ; l’article L. 2232-24 ouvre cette même possibilité aux salariés expressément mandatés par une ou plusieurs organisations syndicales représentatives dans la branche, dans les entreprises dépourvues de délégué syndical où un procès-verbal de carence établit l’absence de représentants élus du personnel.

Il reste que les raisons pour lesquelles aucun accord collectif n’est applicable peuvent être multiples et concerner l’ensemble des entreprises, quels que soient leurs effectifs, qu’il s’agisse de l’absence d’accord des représentants des employeurs et des salariés pour engager une négociation, de l’échec de la négociation engagée, de la conclusion d’un accord local inapplicable dans l’entreprise concernée, etc.

Dans l’ensemble de ces situations, aucune dérogation ne pourra être accordée si les conditions suivantes n’ont pas été respectées. Ces conditions sont à la fois des conditions « de forme » et des conditions « de fond ».

La décision unilatérale de l’employeur ne pourra intervenir que si deux conditions de procédure, conditions cumulatives, sont remplies :

– un avis du comité d’entreprise ou des délégués du personnel lorsqu’ils existent ;

– l’approbation par un référendum organisé auprès des personnels concernés par la dérogation au repos dominical. Cette seconde condition permet d’assurer, en tout état de cause, une consultation des salariés, et ce même en l’absence de représentation du personnel.

S’agissant de l’objet de la décision de l’employeur, la proposition de loi précise que cette décision doit décrire :

– d’une part, les contreparties accordées aux salariés privés du repos dominical. Ces contreparties sont de deux ordres : d’abord, un repos compensateur ; ensuite, la perception, pour le jour travaillé, d’une rémunération au moins égale au double de la rémunération normalement due pour une durée équivalente ;

– d’autre part, les engagements pris en termes d’emploi ou en faveur de certains publics en difficulté ou de personnes handicapées.

De manière à laisser ouverte la possibilité de conclusion d’un accord collectif dans toutes les situations, le dernier alinéa de l’article L. 3132-25-3 (alinéa 16 de l’article 1er) précise qu’« un accord collectif régulièrement négocié s’applique dès sa signature en lieu et place des contreparties prévues à l’alinéa précédent ».

*

La Commission examine deux amendements de suppression de l’article de M. Christian Eckert et de Mme Martine Billard.

M. Jean Mallot. Cet article comporte les dispositifs les plus importants de la proposition de loi, susceptibles d’avoir un effet néfaste sur les conditions de vie en société comme pour l’économie française. En effet, la mise en œuvre de cet article induira inévitablement une hausse des prix, alors que l’ouverture des magasins le dimanche ne suffira pas à augmenter le pouvoir d’achat en conséquence.

Quant à l’idée suivant laquelle un tel dispositif créerait des emplois, elle est très contestée car l’ouverture des commerces le dimanche bénéficierait plus aux grandes surfaces qu’au petit commerce, dans la mesure où les grandes surfaces emploient moins de main d’œuvre et ont plus souvent recours à des statuts précaires et à des emplois à temps partiel. En outre, la rédaction proposée pour cet article rend difficile sa mise en œuvre : sur quels critères définir une zone touristique ?

Conformément à l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette ces deux amendements.

Puis elle examine deux amendements pouvant être soumis à une discussion commune, tendant à limiter les dérogations au principe du repos dominical dans les zones touristiques aux seules périodes d’activité touristique, présentés l’un par M. Christian Eckert, l’autre par Mme Martine Billard.

M. Christian Eckert. Dans sa rédaction actuelle, l’article du code du travail relatif aux dérogations au repos dominical dans les zones touristiques limite ces dérogations aux seules périodes d’activité touristique. Une telle précision est conforme au caractère souvent saisonnier des activités touristiques, qui se concentrent plutôt en hiver dans les stations de sport d’hiver, et plutôt en été sur le littoral.

Mme Martine Billard. Il n’y a pas de raison de supprimer cette mention relative aux périodes d’activité touristique pour les dérogations prévalant dans les zones touristiques.

M. Jean Mallot. Des amendements comme ceux-ci, qui ont fait l’objet de réflexions approfondies et visent à apporter des précisions au texte proposé et non à en modifier radicalement l’équilibre, méritent un commentaire détaillé du rapporteur.

M. le rapporteur. L’examen de la proposition de loi en séance publique sera l’occasion de longs échanges argumentés.

Mme Catherine Génisson. Cela va à l’encontre de l’esprit de la dernière révision constitutionnelle, qui vise au contraire à faire plus de place aux débats de fond en commission puisque l’Assemblée nationale délibérera sur le texte issu des travaux de la commission.

Le président Pierre Méhaignerie. Sur le fond, il peut paraître difficile de délimiter avec précision les périodes d’activité touristique.

M. Christian Eckert. Le soin de déterminer ces périodes serait confié aux préfets, chargés d’appliquer le dispositif sur le terrain, et le décret en Conseil d’Etat prévu par l’article 1er pourrait utilement préciser certains critères.

Sur l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l’amendement de M. Christian Eckert, puis celui de Mme Martine Billard.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette ensuite un amendement de Mme Martine Billard tendant à supprimer la possibilité d’accorder des dérogations au principe du repos dominical dans les entreprises qui mettent à la disposition du public des services, et non des biens, dans les zones touristiques.

Puis la Commission examine un amendement de M. Christian Eckert tendant à limiter les possibilités de dérogation au principe du repos dominical aux commerces qui fournissent des biens et des services destinés à faciliter l’accueil du public ou ses activités de détente et de loisirs d’ordre sportif, récréatif ou culturel.

M. Christian Eckert. Cet amendement vise à rétablir dans le code du travail une précision importante, qui y figure aujourd’hui mais est supprimée par la proposition de loi.

M. Jean Mallot. Supprimer cette limitation irait dans le sens d’une extension déraisonnée des possibilités de dérogation au principe du repos dominical.

M. le rapporteur. Cette adaptation du droit existant est utile, et un récent rapport du Conseil économique et social l’a recommandée.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette cet amendement.

Puis elle rejette, suivant l’avis défavorable du rapporteur, un amendement similaire de M. Christian Eckert.

La Commission est saisie d’un amendement de M. Christian Eckert visant à supprimer les alinéas 2 à 4 de l’article 1er, relatifs au régime des dérogations au repos dominical dans les zones touristiques.

M. Jean Mallot. Nous considérons que la rédaction actuelle de l’article L. 3132-25 du code du travail est tout à fait suffisante pour définir les conditions d’ouverture le dimanche des commerces dans les communes touristiques et thermales ainsi que dans les zones touristiques d’affluence exceptionnelle ou d’animation culturelle permanente. Il est par ailleurs inutile de prévoir de nouvelles dérogations s’agissant des zones d’attractivité commerciale exceptionnelle dans les unités urbaines de plus d’un million d’habitants. La rédaction de la proposition de loi constitue au total une véritable régression sociale.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette cet amendement.

En l’absence momentanée de Mme Martine Billard, M. Jean Mallot présente son amendement visant à ce que la liste des communes touristiques et le périmètre des zones touristiques d’affluence exceptionnelle ou d’animation culturelle permanente soient établis par le préfet conformément aux décisions des assemblées délibératives soit de la communauté de communes, soit de la communauté d’agglomération, soit de la communauté urbaine, ou à défaut sur demande des conseils municipaux.

M. Richard Mallié, rapporteur. Cet amendement met en lumière une question juridique importante, qui pourrait être traitée par la Commission des affaires économiques qui s’est saisie pour avis de cette proposition de loi.

M. Christian Eckert. Le rapporteur pourrait-il être plus explicite sur le contenu de l’amendement que présenterait la rapporteure pour avis ?

M. le rapporteur. Il s’agit de répondre à une question de parallélisme des formes : il reviendrait à l’assemblée délibérante de la structure de coopération intercommunale concernée d’intervenir dans la procédure, puisque c’est par ailleurs le conseil municipal qui est compétent s’agissant de cette même procédure.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette cet amendement.

La Commission est saisie d’un amendement de M. Christian Eckert visant à supprimer les alinéas 5 à 9 de l’article 1er, relatifs au régime des dérogations au principe du repos dominical dans les zones d’attractivité commerciale exceptionnelle.

M. Christian Eckert. Il convient de s’interroger sur la pertinence du seuil d’un million d’habitant pour caractériser les unités urbaines au sein desquelles seront définies les zones d’attractivité commerciale exceptionnelle. Le rapporteur n’a donné aucune explication à ce sujet.

De manière plus générale, on peut s’interroger sur la finalité réelle de cette proposition de loi : ne vise-t-elle pas en fait à régulariser massivement des situations illégales ? Il est vrai que ces commerces ouverts le dimanche illégalement ont été tolérés depuis de nombreuses années mais il n’en demeure pas moins que ces situations de fait sont contraires à la loi. Le zonage proposé par la proposition de loi risque de créer des distorsions de concurrence entre les commerces situés à l’intérieur de l’unité urbaine de plus d’un million d’habitants et ceux situés à proximité mais en dehors de sa limite. Certains députés de la majorité ont d’ailleurs évoqué ce problème lors de la discussion générale. Cette situation de rupture d’égalité dont seraient victimes certains commerces pourrait justifier un recours devant le Conseil constitutionnel.

M. le rapporteur. Je suis défavorable à cet amendement, qui conduit à vider le texte de son contenu.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette cet amendement.

La Commission est saisie d’un amendement de M. Xavier Breton visant à préciser la définition des zones d’attractivité commerciale exceptionnelle en imposant la condition selon laquelle la ville-centre doit compter plus de 800 000 habitants.

M. Xavier Breton. Il ne paraît pas pertinent de prendre en considération les unités urbaines de plus d’un million d’habitants sans davantage de précisions.

En effet, il est important de tenir compte de l’attractivité commerciale de la ville-centre. La proposition de loi, dans sa rédaction actuelle, prend en considération la situation de quatre grandes agglomérations, à savoir Paris, Lyon, Aix-Marseille et Lille. Il convient cependant de noter que les élus de la région lyonnaise ne sont pas demandeurs de l’assouplissement des conditions d’ouverture des commerces le dimanche. Cette proposition de loi devrait se borner à légaliser les situations d’ouverture le dimanche des centres commerciaux existants, sans chercher à étendre les possibilités d’ouverture dominicale.

M. le rapporteur. Je ne suis pas convaincu que l’ensemble des élus de la région lyonnaise soient opposés à la redéfinition des conditions d’ouverture le dimanche concernant l’agglomération lyonnaise, certains députés de cette région étant signataires de la proposition de loi. J’ajoute que la possibilité offerte par le dispositif ne contraint en rien les élus de cette région : ce n’est pas une obligation.

De plus, l’amendement présenté revêt une réelle fragilité juridique en recourant à la notion de ville-centre, qui correspond à un découpage administratif, alors que la notion d’unité urbaine a fait l’objet d’une définition objective, élaborée par l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE) pour apprécier la densité de la population dans une unité donnée.

M. Christian Eckert. Je ne suis pas convaincu par votre argumentation, qui parvient mal à cacher que votre proposition de loi n’a qu’un seul objectif : répondre à des situations particulières. Pourquoi ne reconnaissez-vous pas clairement que ce texte cherche à régulariser des situations de fait illicites communes à plusieurs centres commerciaux situés dans la région d’Aix-Marseille et en région parisienne ? Votre proposition de loi conduit à un dévoiement de la procédure législative : en démocratie, la loi n’est pas faite pour résoudre des problèmes particuliers. La situation actuelle est ubuesque, on détermine des critères abscons pour favoriser l’application de ces dispositions à des cas très particuliers.

M. le président Pierre Méhaignerie. Une autre solution aurait été envisageable pour répondre à la réticence des élus lyonnais. Je regrette, de ce point de vue, que le mécanisme de l’expérimentation, introduit dans notre législation il y a quelques années, ait été conçu comme préalable soit à la généralisation, soit à la disparition du dispositif expérimenté, sans qu’ait pu être prévue une « troisième voie », la poursuite de la mise en œuvre du dispositif. Certains y étaient défavorables au nom de l’unité territoriale. Mais il faut garder cette piste présente à l’esprit pour l’avenir, car elle permet la prise en compte de la diversité des situations.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette cet amendement.

La Commission est saisie d’un amendement de Mme Martine Billard visant à ce que la liste et le périmètre des unités urbaines concernées par le nouveau dispositif de dérogation soient établis par le préfet de région à la demande des conseils régionaux.

Mme Martine Billard. Il n’est pas normal de se référer, pour définir une unité urbaine concernée par le nouveau régime des dérogations, au seul critère démographique. Il serait important que les conseils régionaux puissent intervenir dans l’établissement de la liste des unités urbaines, car ils sont les mieux à même d’apprécier s’il est opportun d’assouplir les règles d’ouverture dominicale des commerces dans certaines zones. Il ne faut pas laisser cette prérogative à la seule commune d’implantation de l’établissement concerné.

M. le rapporteur. Je suis défavorable à cet amendement qui introduit une certaine complexité dans le dispositif. Il n’est en outre pas très opportun : à titre d’exemple, le Conseil régional de la région Provence-Alpes-Côte-d’Azur couvre un périmètre géographique comportant quelque 900 communes. Il est peu probable que les problèmes de distribution commerciale d’une ou de quelques communes données intéressent l’ensemble de ce territoire.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette cet amendement.

La Commission examine un amendement de Mme Martine Billard visant à donner compétence à l’assemblée délibérative représentant la structure de coopération intercommunale, et non au conseil municipal de la commune d’implantation, pour saisir le préfet en vue de l’établissement de la liste et du périmètre des zones d’attractivité commerciale exceptionnelle.

M. le rapporteur. Comme je l’ai déjà expliqué précédemment, la rapporteure pour avis au nom de la Commission des affaires économiques pourrait proposer un amendement visant à prendre en compte la question de la compétence de l’assemblée délibérante pour saisir le préfet en vue de délimiter la zone d’attractivité commerciale exceptionnelle.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette cet amendement.

La Commission examine un amendement de précision du rapporteur visant à prévoir qu’en matière d’établissement de la liste et du périmètre des zones d’attractivité commerciale exceptionnelle au sein des unités urbaines de plus d’un million d’habitants, l’initiative des conseils municipaux devra prendre en compte les circonstances locales.

M. le rapporteur. Cet amendement de précision a été inspiré par les services du secrétariat général du Gouvernement, en vue de renforcer la sécurité juridique des décisions des conseils municipaux.

M. Christian Eckert. Je suis très sceptique sur les arguments avancés par le rapporteur. Ne s’agit-il pas ainsi d’empêcher les conseils municipaux qui seraient par principe opposés à l’extension de l’ouverture des commerces le dimanche de prendre position librement ? Surtout, cet amendement semble refléter un certain mépris pour les élus locaux. Il est évident que les conseils municipaux se prononceront en tenant compte des spécificités locales. Faisons leur confiance. Ils sont déjà durement éprouvés.

M. le rapporteur. Pour répondre aux observations de M. Eckert, je dois reconnaître que j’étais moi-même, dans un premier temps, assez dubitatif sur la nécessité de cette précision. Mais les arguments avancés m’ont convaincu que cet ajout permettrait d’éviter certains recours contentieux susceptibles de remettre en cause les décisions des conseils municipaux donc, encore une fois, de sécuriser celles-ci.

M. le président Pierre Méhaignerie. Je tiens à informer les commissaires d’une très intéressante étude qu’a menée M. Gilles Carrez sur les concours financiers de l’État aux collectivités locales sur la période 2002-2008. L’un des apports de cette étude est de démontrer que les collectivités locales ont bénéficié, au cours de cette période, de transferts financiers supplémentaires à hauteur de 10 milliards d’euros, au titre notamment de dégrèvements ou d’exonérations en matière d’impôts locaux. Cela explique que les impôts locaux ne soient pas impopulaires. Cela prouve aussi qu’on est loin d’un désengagement de l’État et il est faux de prétendre que les collectivités territoriales subissent les conséquences des transferts de compétences imposés par l’État.

Force est de constater qu’en France, par rapport à la situation que connaissent nos voisins européens, les liens entre la responsabilité des élus locaux et les contribuables sont particulièrement faibles. Tous les gouvernements, depuis 1989, participent de cette évolution. Au total, la taxe d’habitation ne représente que 5,5 % de la part des dépenses décidées par les collectivités territoriales, à savoir un montant de 11 milliards d’euros sur un total d’environ 200 milliards d’euros.

M. Christian Eckert. Les 10 milliards supplémentaires que vous évoquez reflètent plutôt la décision de l’État de se désengager de certains secteurs, pour en confier la gestion aux collectivités territoriales. Je serais curieux de connaître votre réaction si le Président de la République annonçait prochainement une décision d’exonération de la taxe professionnelle au profit des investissements des entreprises … car il y aura compensation, ce qui accentuera le mouvement que vous dénoncez.

Mme Martine Billard. Je ne suis pas davantage convaincue par les arguments avancés par le rapporteur pour justifier le bien-fondé de son amendement. La rédaction proposée manque de précision. De quelles circonstances locales parle-t-on ? Doit-on prendre en considération les caractéristiques locales de la distribution commerciale ?

La Commission adopte cet amendement.

La Commission examine un amendement de Mme Martine Billard visant à ce que le préfet statue sur le périmètre de la zone d’attractivité commerciale exceptionnelle après avis conforme des communautés de communes, communautés d’agglomération ou communautés urbaines concernées.

Mme Martine Billard. Il faut garantir que les collectivités locales – et non le préfet – décideront de l’opportunité de créer ou non une zone d’attractivité commerciale exceptionnelle. En effet, le représentant de l’État n’a pas une connaissance du terrain suffisante pour évaluer l’intérêt de conférer à telle ou telle zone le statut de zone d’attractivité commerciale exceptionnelle. Au contraire, les élus locaux sont les mieux à même de déterminer les besoins et d’arbitrer, le cas échéant, entre des intérêts divergents.

M. le rapporteur. Cet amendement est intéressant mais il est important de préserver les prérogatives des autorités parties prenantes de la procédure. En pratique, le préfet n’ira pas à l’encontre de la volonté exprimée par les élus locaux.

M. Christian Eckert. Je souhaite demander au rapporteur de clarifier un point de droit. Peut-il nous confirmer que, s’agissant de la détermination des zones au sein desquelles pourront être accordées des dérogations à la règle du repos dominical, seul le conseil municipal concerné a l’initiative de la procédure ?

M. le rapporteur. Concernant les zones d’attractivité commerciale exceptionnelle, l’alinéa 7 de l’article 1er est tout à fait explicite : seuls les conseils municipaux sont habilités à saisir le préfet pour qu’il définisse la liste et le périmètre des zones d’attractivité commerciale exceptionnelle.

M. le président Pierre Méhaignerie. Cela confirme que le texte permet de prendre en compte certaines situations tout en étant restrictif.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette cet amendement.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette un amendement de Mme Billard tendant, en cohérence avec ses précédents amendements, à recueillir l’avis des assemblées délibératives des structures de coopération intercommunale pour la définition des zones d’attractivité commerciale exceptionnelle.

La Commission examine un amendement de Mme Billard visant à recueillir l’avis des chambres de métiers préalablement à l’attribution des autorisations de dérogation à la règle du repos dominical.

Mme Martine Billard. Les chambres de métiers sont concernées par l’attribution de ces dérogations car l’ouverture des commerces le dimanche est susceptible d’avoir une incidence sur leurs membres.

M. le rapporteur. La question posée est tout à fait pertinente, même s’il faut relever que le code du travail ne fait, dans sa rédaction actuelle reprise sur ce point par la proposition de loi, pas référence aux chambres des métiers s’agissant de cette procédure. Il serait cependant très opportun d’approfondir cette question en vue de la réunion que la Commission tiendra la semaine prochaine en application de l’article 88 du Règlement. À ce stade, le retrait de cet amendement est préférable, avant un redépôt éventuel.

L’amendement de Mme Martine Billard est retiré.

La Commission examine un amendement de Mme Billard supprimant l’octroi automatique de l’autorisation de dérogation à l’expiration d’un délai de quatre mois à compter de la réception de la demande par le préfet.

Mme Martine Billard. La méthode retenue par la proposition de loi n’est pas la bonne. L’autorisation ne doit être accordée que sur décision expresse de l’autorité administrative.

M. le rapporteur. Avis défavorable. L’article 22 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations prévoit, de manière générale, qu’un délai de deux mois sans réponse de la part de l’administration peut valoir approbation. Le délai retenu ici permet de tenir compte de la complexité de l’instruction des dossiers dans ce domaine.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette cet amendement.

La Commission examine un amendement de Mme Isabelle Vasseur prévoyant qu’une entreprise bénéficiant d’une autorisation de déroger à la règle du repos dominical ne peut prendre en considération le refus d’une personne de travailler le dimanche pour refuser de l’embaucher.

Mme Isabelle Vasseur. Il faut garantir le caractère volontaire du travail le dimanche et, par conséquent, le droit d’une personne de refuser, au moment de son embauche, de travailler le dimanche.

M. le rapporteur. Avis favorable, car cet amendement s’inscrit tout à fait dans l’esprit de la proposition de loi, qui souhaite mettre le volontariat au cœur du dispositif et, pour ce faire, accordait déjà au salarié le droit de refuser de travailler le dimanche.

M. Christian Eckert. Voilà l’aveu de la difficulté de définir le volontariat ! Cela étant, le groupe SRC s’abstiendra.

M. Jean Bardet. L’amendement apporte une garantie supplémentaire et je souhaite m’associer à cette initiative.

Mme Catherine Génisson. L’alinéa 11 de l’article, s’il était modifié par l’amendement, pourrait faire l’objet d’une rédaction plus synthétique.

M. le président Pierre Méhaignerie. Pour la clarté de nos débats, il serait préférable que cette amélioration prenne, le cas échéant, la forme d’un amendement que la Commission examinerait au cours d’une prochaine réunion qu’elle tiendra en application de l’article 88 du Règlement.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte cet amendement

La Commission examine un amendement de M. Christian Eckert disposant que le salarié d’une entreprise bénéficiant d’une autorisation de déroger qui refuse de travailler le dimanche ne peut faire l’objet d’une mesure discriminatoire.

M. Christian Eckert. Au-delà du seul licenciement, le texte doit assurer le respect de tous les droits des salariés, tels l’avancement, le bénéfice des primes ou des droits à congés ainsi qu’à la formation professionnelle.

Mme Martine Billard. Puisque c’est le volontariat qui doit présider au travail dominical, cet amendement constitue une excellente initiative.

Mme Catherine Génisson. L’amendement devrait même être placé au début de l’alinéa 11 de l’article 1er.

M. Jean Bardet. Je souhaite m’associer à cette initiative qui, renforçant encore la rédaction proposée par Mme Isabelle Vasseur, que la Commission vient d’adopter, va dans le bon sens.

M. le rapporteur. L’amendement soulève des problèmes rédactionnels et juridiques, à commencer par la difficulté de définir avec suffisamment de précision la notion de « mesure discriminatoire ».

M. Pierre Morange. On peut approuver l’esprit de l’amendement, mais il n’en paraît pas moins, dans une certaine mesure, inutile, car toute mesure discriminatoire doit déjà être dûment justifiée à partir du moment où elle rompt l’égalité entre les salariés.

Mme Martine Billard. Il faut explicitement prévoir cette situation dans le texte.

Mme Catherine Génisson. Cet amendement apporte une garantie importante.

Contrairement à l’avis du rapporteur, la Commission adopte cet amendement.

La Commission examine un amendement de M. Bernard Perrut tendant à exclure les commerces de détail alimentaire visés à l’article L. 3132-13 du code du travail du champ d’application du régime des autorisations de dérogation à la règle du repos dominical défini aux articles L. 3132-25 et L. 3132-25-1.

M. Bernard Perrut. Il convient de maintenir l’équilibre entre les différents types de structures et d’activités commerciales en zone rurale et dans les villes moyennes. Cet amendement s’inscrit dans le cadre des travaux déjà accomplis par la commission des affaires économiques, de l’environnement et des territoires, plus particulièrement de nos collègues Bernard Reynès et Serge Poignant. Afin de prendre en compte d’indéniables particularités locales, il s’agit de prévoir que les grandes surfaces, dès lors que leur activité principale se rattache au secteur alimentaire, ne peuvent ouvrir le dimanche après-midi.

M. le rapporteur. Il faut préciser que l’article R. 3132-8 du code du travail prévoit déjà quels sont les établissements concernés par le régime de dérogation existant aujourd’hui pour les commerces alimentaires de détail, commerces exclus, aux termes de l’amendement, du champ d’application des régimes prévus aux articles L. 3132-25 et L. 3132-25-1. En tout état de cause, on peut douter que ces grandes surfaces soient tentées d’ouvrir ne serait-ce que le dimanche matin, compte tenu du coût d’une telle ouverture.

M. Christian Eckert. Le projet de rapport qui nous a été distribué ne permet pas d’établir clairement quels sont les critères d’appréciation du caractère de l’activité principale d’un commerce : est-ce le chiffre d’affaires, la surface des rayons concernés ou l’effectif qui y est employé ? Il faudra que le Gouvernement apporte des éclaircissements sur ce point en séance publique.

M. le rapporteur. Les critères posés par l’article R. 3132-8, qui complète l’article L. 3132-13, ont été notamment précisés par un arrêt rendu en 1989 par la cour d’appel de Paris.

M. Jean Mallot. Procéder par renvoi d’un article du code du travail à un autre article n’est pas de bonne méthode. Selon quels critères le caractère exclusif ou principal de l’activité est-il déterminé ? Au cas par cas ? Comment définit-on l’activité principale ? Les choses doivent être précisées, faute de quoi des dérives sont à craindre.

Mme Martine Billard. Le Gouvernement peut en outre modifier à tout moment une disposition de nature réglementaire.

M. Bernard Perrut. En fait, les règles en vigueur dans ce domaine continueront de s’appliquer.

M. Pierre Morange. Il faudra saisir l’opportunité d’obtenir des précisions sur ce point de la part du Gouvernement lors de l’examen en séance publique.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte cet amendement, le groupe socialiste s’abstenant.

La Commission est saisie d’un amendement de M. Christian Eckert tendant à préciser que le refus de travailler le dimanche pour un salarié d’une entreprise bénéficiaire d’une telle autorisation ne peut constituer un motif de discrimination en matière de rémunération, de mutation, d’affectation, de promotion et de renouvellement du contrat de travail.

À la suite de l’adoption d’un amendement précédemment examiné, l’amendement est retiré.

La Commission est saisie d’un amendement de M. Christian Eckert tendant à prévoir que les contrats de travail des salariés ou des personnes en cours de recrutement dans les entreprises bénéficiant d’une autorisation de dérogation à la règle du repos dominical ne peuvent comporter de clauses relatives au volontariat du salarié pour travailler le dimanche.

M. Christian Eckert. Il est important de prévoir une telle interdiction. Elle répond d’ailleurs à la préoccupation exprimée par la majorité de ne rien imposer aux salariés.

Cette préoccupation doit trouver une traduction dans la future loi. En effet, les situations et les besoins des salariés peuvent évoluer au fil du temps : ainsi, le salarié qui a pu accepter de travailler le dimanche pour financer les études supérieures de ses enfants peut très bien, à un moment donné, ne plus vouloir travailler ce jour pour consacrer davantage de temps à ses loisirs. Il faut éviter toute rédaction qui porterait atteinte à la notion de volontariat.

M. le rapporteur. Il serait souhaitable que vous puissiez retirer cet amendement, car dans le cas contraire, j’émettrai un avis défavorable. En effet, il existe aujourd’hui une réflexion sur cette question et une solution sera proposée à la commission, le moment venu.

M. Christian Eckert. La réponse du rapporteur souligne le problème de méthode auquel nous sommes confrontés avec cette proposition de loi. En effet, le rapporteur nous a expliqué que ce texte chemine depuis plusieurs semaines. Mais dans le même temps, il demande le retrait de certains amendements au motif qu’il travaillerait encore à des améliorations susceptibles d’être apportées à sa proposition de loi.

Pour notre part, nous avons beaucoup réfléchi sur ce texte et c’est pourquoi, même si nous n’approuvons pas sa philosophie, nous vous proposons d’adopter des amendements qui permettent, dès maintenant, d’apporter de réelles améliorations au profit des salariés.

M. le rapporteur. Je rappelle que le texte a été déposé il y a seulement trois semaines et que ce sont les auditions menées depuis ce moment qui ont, notamment, suscité cette réflexion.

Mme Martine Billard. Vous oubliez de mentionner la première proposition de loi sur le même sujet, déposée il y a plusieurs mois.

M. le rapporteur. Les auditions s’étant terminées jeudi dernier, il est légitime de prendre le temps nécessaire pour apporter des réponses précises et pragmatiques aux questions évoquées il y a seulement quelques jours.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette cet amendement.

La Commission est saisie de deux amendements pouvant être soumis à discussion commune, l’un de M. Christian Eckert tendant à réduire la durée de l’autorisation préfectorale d’ouvrir un commerce le dimanche de cinq ans à trois ans, l’autre de Mme Martine Billard tendant à ramener cette même durée à un an.

M. Christian Eckert. La portée et les conséquences économiques et sociales de ce texte auraient dû être davantage évaluées avant que la Commission ne l’examine. Je pense que cet examen aurait gagné à être repoussé en janvier ou février prochain.

M. le rapporteur. Je suis défavorable aux deux amendements présentés respectivement par M. Christian Eckert et Mme Martine Billard pour deux raisons.

Premièrement, la durée des autorisations figurant dans la proposition de loi est en cohérence avec les propositions résultant des travaux du Conseil économique et social.

Deuxièmement, les autorisations en la matière sont accordées au terme d’une procédure précise et assez complexe : par conséquent, il est préférable de ne pas devoir renouveler trop fréquemment les autorisations.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette successivement les amendements de M. Christian Eckert et de Mme Martine Billard.

La Commission examine un amendement de Mme Martine Billard tendant à préciser que les autorisations accordées le sont à seul titre individuel, et non pas à titre collectif.

Mme Martine Billard. Il me paraît nécessaire de garantir une analyse au cas par cas des demandes de dérogation et d’éviter les autorisations collectives, compte tenu de leur impact sur la vie sociale, familiale et privée.

M. le rapporteur. Je suis défavorable à cet amendement pour deux raisons.

Premièrement, l’amendement que vous proposez remet en question une disposition qui permettra, d’une certaine manière, d’harmoniser le régime des autorisations prévues aux articles L. 3132-25 et L. 3132-25-1 sur celles accordées en application de l’article L. 3132-20 lorsqu’il est établi que le repos simultané le dimanche de tous les salariés serait préjudiciable au public ou compromettrait le fonctionnement normal de l’établissement, qui peuvent déjà faire l’objet d’autorisations globales.

Deuxièmement, le Conseil économique et social a lui-même proposé que, pour des raisons d’équité et de cohérence commerciale, l’autorisation d’ouverture le dimanche pour les commerces situés dans les zones touristiques soit collective et puisse s’appliquer à l’ensemble des commerces.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette cet amendement.

La Commission est saisie d’un amendement de Mme Martine Billard tendant à prévoir qu’en cas de changement d’exploitant, la demande d’autorisation devra être redéposée.

M. le rapporteur. Je suis défavorable à cet amendement. D’une part, il constitue un dispositif assez complexe et dont l’utilité n’est pas certaine, qui s’appuie sur la notion « d’exploitant », laquelle n’est pas très précise. D’autre part, toute appréciation au moment de l’attribution d’une dérogation tiendra compte, par définition, de la situation d’espèce.

Mme Martine Billard. Que se passe-t-il si à la place d’une grande surface de jardinerie bénéficiant de l’autorisation, c’est une grande surface alimentaire qui s’installe ? Le terme d’exploitant n’est peut-être pas le plus approprié. Cependant, il faudra trouver le moyen de préciser, au besoin par une autre rédaction, qu’une nouvelle demande d’autorisation doit être redéposée si la nature de l’activité de l’établissement concerné vient à changer.

L’amendement de Mme Martine Billard est retiré.

La Commission est saisie d’un amendement de M. Christian Eckert tendant à modifier l’alinéa 13 de l’article 1er pour prévoir que l’autorisation de travailler le dimanche n’est accordée qu’au vu d’un accord collectif, en supprimant l’option du recours à une décision unilatérale de l’employeur prise après référendum.

M. Christian Eckert. Vous commencez à prendre la mauvaise habitude de placer les termes de « décision unilatérale de l’employeur » un peu partout dans le code du travail. Même précédée d’un référendum, l’option de la décision unilatérale de l’employeur ne me plaît guère. C’est pourquoi je propose de ne retenir que la possibilité d’autorisations accordées au vu d’un accord collectif.

En effet, quelle serait la valeur réelle du référendum qui précéderait la décision unilatérale de l’employeur ? Peut-on imaginer que, dans un petit commerce comprenant quelques salariés, où l’employeur dispose presque d’un « droit de vie et de mort » sur ceux-ci – ces termes sont sans doute excessifs, mais ils reflètent une part de la réalité –, le référendum permettra aux employés de s’exprimer en toute liberté ? Par ailleurs, dans quelles conditions ce référendum sera-t-il organisé et qui le contrôlera ? Enfin, au vu du contexte économique et social annoncé, marqué par une montée du chômage et de la précarité, de quelle liberté disposeront réellement les salariés d’une entreprise menaçant de fermer dans laquelle un tel référendum est organisé ?

M. le rapporteur. Je suis défavorable à cet amendement et favorable à un autre des amendements présentés par M. Eckert qui sera examiné dans quelques instants et permet, à mes yeux, d’apporter une réponse satisfaisante aux questions qu’il vient de poser.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette cet amendement.

La Commission est saisie de deux amendements de M. Christian Eckert pouvant être soumis à une présentation commune, tendant à insérer à l’alinéa 13 de l’article 1er une référence aux organisations syndicales représentatives compétentes pour conclure un accord collectif préalable à la mise en œuvre des procédures d’attribution de dérogations.

M. Christian Eckert. Ces amendements de précision visent à assurer la cohérence de la proposition de loi avec la position commune des partenaires sociaux et la loi récemment adoptée sur cette question de la représentativité des syndicats.

M. le rapporteur. Je suis défavorable à ces amendements. Ils ne permettent notamment pas de prendre en compte l’hypothèse de la conclusion d’accords au plan local, dans certaines zones, qui peuvent être plus avantageux que les accords de branche.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette successivement ces deux amendements.

La Commission est saisie d’un amendement de M. Christian Eckert tendant à modifier l’alinéa 13 de l’article 1er précisant que la décision unilatérale de l’employeur n’intervient « qu’à défaut » d’accord collectif.

M. Christian Eckert. La rédaction résultant de cet amendement serait plus avantageuse pour le salarié car elle tend à prévoir que les autorisations sont accordées au vu d’un accord collectif ou, « à défaut », d’une décision unilatérale de l’employeur prise après référendum. Elle permet ainsi de mettre l’accent sur l’accord collectif, qui doit être toujours privilégié.

M. le rapporteur. Je suis favorable à cet amendement de précision qui s’inscrit dans la philosophie du texte.

Mme Catherine Génisson. Il s’agit d’un amendement de repli et non de précision.

M. Christian Eckert. C’est effectivement un amendement de repli.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte cet amendement.

La Commission est saisie d’un amendement de Mme Martine Billard prévoyant l’attribution d’un repos compensateur équivalent en temps et le doublement du montant du salaire pour les heures travaillées, en cas d’accord collectif.

Mme Martine Billard. Le dispositif proposé prévoit de n’accorder une rémunération double et un repos compensateur que si l’option du référendum est exercée. À l’inverse, ces avantages ne sont pas prévus s’agissant de l’hypothèse où un accord collectif est conclu.

Mon amendement a donc pour objet de prévoir que les salariés bénéficieront du repos compensateur et du doublement du salaire, que les dérogations soient accordées sur la base d’un accord collectif ou sur la base d’une décision unilatérale de l’employeur prise après référendum. Si cet amendement est adopté, on évitera une différence de traitement inéquitable entre les salariés amenés à travailler le dimanche à la suite d’un accord collectif et ceux qui travaillent ce jour-là à l’issue d’une consultation par référendum.

M. le rapporteur. Je suis défavorable à cet amendement car il remet en cause la liberté de négociation des partenaires sociaux. Il est nécessaire d’inclure dans la future loi une disposition selon laquelle, si les organisations syndicales ne veulent pas signer un accord, le doublement du salaire doit être prévu en cas de travail le dimanche. Mais il est aussi important de laisser aux partenaires sociaux une entière liberté de décision dans ce domaine.

Mme Martine Billard. Je rappelle que les accords collectifs ne sont pas toujours conclus avec l’accord de la majorité des salariés.

M. Christian Eckert. Cette question est importante. Je propose d’ailleurs un amendement ultérieur ayant le même objet. Il est indispensable de fixer des contreparties minimum au travail du dimanche en dessous desquelles les accords collectifs ne pourront descendre. Sans cette précaution, vous risquez de créer une inégalité de traitement entre les salariés.

C’est d’ailleurs l’une des grandes fragilités de cette proposition de loi que de créer des situations à plusieurs vitesses entre les salariés. Le Conseil constitutionnel sera nécessairement saisi de ce texte et je pense qu’il ne manquera pas de se pencher sur cette rupture d’égalité.

Par ailleurs, je m’interroge sérieusement sur l’opportunité d’étendre le principe du doublement du salaire à l’ensemble des salariés travaillant le dimanche.

Enfin, je n’ai pas pu assister à toutes les auditions du rapporteur, mais il me semble que certains syndicats ont indiqué qu’ils bénéficiaient de plusieurs jours de repos compensateur ou d’une majoration de 100 % du salaire, ces deux avantages ne pouvant toujours être cumulés.

En tout état de cause, la simplicité imposerait donc de fixer un plancher.

Mme Martine Billard. Je rappelle que les accords collectifs sont plus rares dans les entreprises de moins de cinquante salariés. Par conséquent, le dispositif proposé par le rapporteur aura pour effet d’imposer plus d’obligations aux petites entreprises.

M. Xavier Breton. Je suis sensible à cet amendement, car il est cohérent avec le discours selon lequel nous encourageons le travail du dimanche pour donner plus de pouvoir d’achat aux salariés et continuons de considérer que ce jour n’est pas comme les autres.

M. le rapporteur. Je ne partage pas cette analyse. Plusieurs syndicats m’ont affirmé qu’en fixant un tel plancher, la future loi pouvait les bloquer dans leurs négociations pour améliorer la situation des salariés.

En outre, certaines organisations pourront préférer privilégier un système garantissant des jours de repos compensateur. Il faut vraiment laisser les salariés et les syndicats négocier librement.

M. Philippe Boënnec. Je partage l’argumentation du rapporteur. Dans le cas du commerce de proximité, le recours à deux jours de repos compensateur suffit à équilibrer leur activité. Par ailleurs, dans les zones touristiques où l’activité se concentre sur le samedi et le dimanche, on voit bien qu’il n’est pas opportun de fixer un cadre trop rigide qui conduirait à fragiliser les commerces concernés.

M. Christian Eckert. Je souhaiterais répondre à l’argumentation du rapporteur. Ce texte n’a qu’un but : faire perdurer certaines pratiques. En outre, contrairement à ce qu’affirment certains, un salarié ne doublera pas systématiquement sa rémunération en travaillant le dimanche. Enfin, quel sera le sort des accords collectifs existants sur le travail dominical ? Seront-ils maintenus en l’état ? Les partenaires sociaux seront-ils obligés d’ouvrir des négociations sur la base de la nouvelle loi ? L’option du référendum sera-t-elle ouverte aux entreprises ayant déjà conclu des accords collectifs ?

M. le rapporteur. Je rappelle que la discussion de cet amendement se situe dans le cadre de l’article L. 3132-20 du code du travail, non dans celui de l’article L. 3132-25. Ce sont deux régimes juridiques différents.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette cet amendement.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte un amendement rédactionnel de M. Christian Eckert.

La Commission est saisie d’un amendement de M. Christian Eckert tendant à préciser que les contreparties accordées aux salariés privés du repos du dimanche sont constituées « au minimum » d’une rémunération double et d’un repos compensateur.

M. Christian Eckert. Cet amendement a le même objet que l’amendement de Mme Martine Billard précédemment examiné.

Mme Catherine Génisson. Il apporte une précision utile à l’amendement de Mme Martine Billard en ajoutant la référence à un « minimum ».

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette cet amendement.

La Commission est saisie d’un amendement de M. Christian Eckert tendant à supprimer les autorisations de dérogation accordées au vu d’une décision unilatérale prise par l’employeur.

M. Christian Eckert. Cet amendement vise la situation des entreprises dépourvues de délégués syndicaux, afin de protéger leurs salariés des éventuelles décisions unilatérales de leur employeur.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette cet amendement.

Puis, la Commission adopte un amendement de clarification du rapporteur, destiné à préciser les modalités d’articulation entre l’intervention d’un accord collectif et celle d’une décision unilatérale de l’employeur après référendum, préalablement à la mise en œuvre d’une autorisation de déroger à la règle du repos dominical.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte un amendement de précision rédactionnelle de M. Christian Eckert.

La Commission examine un amendement de M. Jean-Pierre Marcon tendant à ce que le niveau de la majoration de salaire accordée aux salariés travaillant le dimanche soit négocié au niveau de chaque entreprise.

M. Jean-Pierre Marcon. Certes, il est important que les salariés qui acceptent de travailler le dimanche perçoivent une contrepartie financière, parce que le dimanche n’est pas un jour comme les autres.

Mais préciser dans la loi que la rémunération de ces salariés doit être au moins égale au double de la rémunération normale pour une durée de travail équivalente, dans l’hypothèse d’une décision unilatérale de l’employeur prise après référendum, risque de créer de sérieuses difficultés pour certaines entreprises dont les salariés travaillent déjà le dimanche sans percevoir de telles contreparties financière. Ces employés voudront légitimement bénéficier de ces avantages, mais certains employeurs, notamment ceux qui emploient peu de salariés, ne pourront pas supporter cette charge supplémentaire. La loi aurait alors pour effet contre-productif de mettre en difficulté des entreprises qui travaillent déjà le dimanche, notamment dans le secteur de l’hôtellerie et de la restauration. C’est pourquoi il serait préférable que la contrepartie financière accordée aux salariés qui acceptent de travailler le dimanche soit négociée au sein de chaque entreprise.

M. le rapporteur. Une telle disposition irait à l’encontre de l’esprit du texte. Par ailleurs, l’hôtellerie et la restauration relèvent d’un régime spécifique distinct du champ d’application des dispositions concernées : les employeurs de ce secteur ne seront donc pas soumis à l’obligation de doubler la rémunération de leurs salariés le dimanche.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette cet amendement.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette un amendement de Mme Martine Billard tendant à préciser que les accords collectifs au vu desquels des autorisations d’ouverture le dimanche peuvent être accordées à certains commerces ne peuvent pas prévoir de rémunérations inférieures à celles que la loi fixe par ailleurs en l’absence de tels accords.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette un amendement de Mme Martine Billard, visant à ce que les accords collectifs requis préalablement à l’attribution de dérogations au principe du repos dominical n’entrent en vigueur qu’après un délai de trois mois suivant leur signature.

Puis la Commission adopte l’article 1er ainsi modifié.

Article 2

Modalités de mise en
œuvre de l’obligation de fermeture
dans les zones touristiques et commerciales

Cet article précise les modalités de mise en œuvre de l’obligation de fermeture dans les zones touristiques et commerciales, compte tenu des modifications apportées par l’article 1er de la proposition de loi au régime des dérogations à la règle du repos dominical. Avant de présenter la modification proposée, il convient de revenir sur le régime juridique existant.

1. Les arrêtés préfectoraux de fermeture pris sur le fondement de l’article L. 3132-29 du code du travail

L’article L. 3132-29 du code du travail prévoit que « lorsqu’un accord est intervenu entre les organisations syndicales de salariés et les organisations d’employeurs d’une profession et d’une zone géographique déterminées sur les conditions dans lesquelles le repos hebdomadaire est donné aux salariés, le préfet peut, par arrêté, sur la demande des syndicats intéressés, ordonner la fermeture au public des établissements de la profession ou de la zone géographique concernée pendant toute la durée de ce repos. Ces dispositions ne s’appliquent pas aux activités dont les modalités de fonctionnement et de paiement sont automatisées ».

Ces dispositions remontent à une loi du 29 décembre 1923. Elles avaient pour objectif, dans certaines situations, d’assurer une généralisation du repos collectif : en effet, l’obligation d’accorder aux salariés un repos dominical de vingt-quatre heures ne prive pas l’employeur du droit de laisser son établissement ouvert ce jour-là s’il y travaille seul ou avec les membres de sa famille ; en outre, certains commerces, n’employant pas de personnel, peuvent rester ouverts. Ces dispositions visaient aussi, comme l’a rappelé la Cour de cassation dans un arrêt du 26 mai 1976, à faciliter les conditions du contrôle du repos hebdomadaire.

En pratique, les employeurs et les salariés d’une même profession, qu’ils soient ou non soumis au repos dominical et qu’ils bénéficient ou non de dérogations, ont la possibilité de décider, par accord collectif représentant la volonté de la majorité d’entre eux, de revenir à un mode de repos collectif.

Sur le fondement de cet accord, le préfet peut, par arrêté, ordonner la fermeture, un jour par semaine, d’une catégorie donnée d’établissements commerciaux.

Comme le précise le guide pratique établi par la direction générale du travail sur le repos dominical des salariés, le préfet dispose d’un pouvoir d’appréciation non négligeable pour ordonner ou non la fermeture : s’il ne peut agir que sur demande expresse des professionnels intéressés, « il détient pourtant un pouvoir d’appréciation et de contrôle. En effet, l’article L. 3132-29 lui donne une simple faculté d’entériner l’accord, mais ne lui en fait aucunement l’obligation ».

Le même document dispose que le préfet « doit en particulier tenir compte des intérêts du public et s’assurer que la fermeture n’est pas de nature à compromettre la marche des services dont la continuité serait indispensable ». Le préfet ne peut certes pas, comme l’a rappelé la jurisprudence, modifier les termes de l’accord professionnel (Cass. crim., 14 mai 1925), mais il a la possibilité, rappelle le guide précité, de « restreindre le champ d’application (géographique ou professionnel) de l’accord ».

En outre, il existe aujourd’hui certaines dérogations à ce principe. D’une part, l’article L. 3132-29 prévoit que l’arrêté préfectoral prescrivant la fermeture ne s’applique pas « aux activités dont les modalités de fonctionnement et de paiement sont automatisées ». Il s’ensuit par exemple que les stations-service « automatiques » (où le paiement est effectué par cartes de crédit) peuvent être ouvertes sept jours sur sept.

D’autre part, la jurisprudence a acté l’existence d’exceptions à la fermeture si celles-ci sont de portée générale, applicables à tous les établissements remplissant les conditions qu’elle énonce : le Conseil d’État a par exemple admis, dans un arrêt du 6 mars 2002, la suspension de l’obligation de fermeture à certaines époques, variables en fonction des zones concernées. Il avait déjà admis, dans un arrêt plus ancien, la légalité d’un arrêté préfectoral qui prévoyait des exceptions à la règle de la fermeture dominicale concernant le dimanche compris dans l’opération « soldes collectifs » organisée annuellement par une profession, les deux dimanches compris dans la période de la foire de Lyon, trois dimanches de l’année dans le cadre de la procédure prévue par l’article L. 221-19 du code du travail (devenu aujourd’hui l’article L. 3132-26 relatif aux dérogations accordées par le maire) ainsi que les dimanches matin pour les commerçants situés à proximité immédiate d’un marché local (Conseil d’État, 25 mai 1988).

2. Le dispositif proposé

L’article 2 de la présente proposition de loi ne revient pas sur le principe énoncé à l’article L. 3132-29 du code du travail – il en laisse inchangée la rédaction – mais précise le régime de la mise en œuvre de l’obligation de fermeture, compte tenu de la redéfinition des dérogations à la règle du repos dominical par l’article 1er de la proposition de loi, en complétant cet article par deux nouveaux alinéas (alinéas 1 et 2 de l’article 2).

Aux termes de ces deux alinéas, l’article L. 3132-29 est complété par un alinéa nouveau donnant la possibilité au préfet d’« exclure de l’obligation de fermeture tout ou partie des communes ou des zones définies aux articles L. 3132-25 ou L. 3132-25-1 », autrement dit les communes et zones touristiques ou thermales et les zones touristiques d’affluence exceptionnelle ou d’animation culturelle permanente ainsi que les zones d’attractivité commerciale exceptionnelle définies au sein des unités urbaines de plus d’un million d’habitants.

Cet ajout, cohérent avec l’état du droit existant qui accorde déjà au préfet un pouvoir d’appréciation pour mettre en œuvre l’obligation de fermeture et ménage la possibilité d’exceptions de caractère général, contribue à la clarification des règles applicables.

Cette clarification, qui était nécessaire, est aujourd’hui facilitée par les modifications réalisées par l’article 1er de la proposition de loi dans la mesure où, d’une part, cet article unifie le régime applicable dans les communes et zones touristiques en mettant fin à des situations particulièrement incohérentes et où, d’autre part, les dérogations applicables dans les zones d’attractivité commerciale exceptionnelle constituent une nouvelle catégorie juridique elle aussi homogène.

*

La Commission est saisie de deux amendements de suppression de l’article présentés par M. Christian Eckert et Mme Martine Billard.

M. Christian Eckert. Lorsque les organisations représentatives des salariés et des employeurs d’une profession sont parvenues à un accord sur le repos hebdomadaire, il est important que ces organisations puissent saisir le préfet pour que celui-ci ordonne par arrêté la fermeture de tous les établissements où s’exerce la profession concernée, qu’ils soient situés ou non en zone touristique ou dans les zones d’attractivité commerciale exceptionnelle. Par exemple, si un accord collectif prévoit la fermeture de certains commerces le dimanche, il faut que le préfet ait les moyens de le faire appliquer.

M. le rapporteur. Ne pas permettre au préfet d’exclure les zones définies par la proposition de loi du champ d’application d’un arrêté de fermeture serait contraire à l’esprit du texte.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette ces deux amendements.

La Commission est saisie d’un amendement de M. Jean-Pierre Marcon prévoyant que les commerces figurant au nombre des dérogatoires de plein droit ne peuvent pas faire l’objet d’un arrêté préfectoral de fermeture.

M. Jean-Pierre Marcon. Cet amendement est une initiative complémentaire d’un amendement, à venir en discussion après l’article 5, tendant à établir un dispositif de travail dominical de plein droit cinq dimanches par an dans les commerces de détail.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette cet amendement.

La Commission adopte l’article 2 sans modification.

Article 3

Effet non suspensif des recours présentés contre les décisions d’autorisation de dérogation à la règle du repos dominical

Cet article, composé d’un alinéa unique, a un double objet : d’une part, il procède à la suppression, pour coordination, de l’article L. 3132-21 du code du travail ; d’autre part, il vise à revenir sur la règle de l’effet suspensif des recours présentés contre les décisions prévues aux articles L. 3132-20 et L. 3132-23 du code du travail, en supprimant l’article L. 3132-24 du code du travail.

1. Une mesure de coordination

La suppression de l’article L. 3132-21 du code du travail constitue une mesure de coordination avec une modification effectuée par l’article 1er de la proposition de loi.

Aux termes de cet article L. 3132-21, « les autorisations prévues à l’article L. 3132-20 [autrement dit attribuées dans le cas où le repos simultané le dimanche de tous les salariés d’un établissement serait préjudiciable au public ou compromettrait le fonctionnement normal de cet établissement] ne peuvent être accordées que pour une durée limitée ».

Or l’alinéa 10 de l’article 1er de la présente proposition de loi prévoit que « les autorisations prévues [à l’article] L. 3132-20 (…) sont accordées pour une durée limitée (…) ».

Aussi cet article L. 3132-21 est-il désormais redondant et doit-il être supprimé.

2. L’attribution d’un effet non suspensif aux recours présentés contre les décisions prévues aux articles L. 3132-20 et L. 3132-23

a) Le principe de l’effet suspensif des recours contre les décisions d’attribution de dérogations en application des articles L. 3132-20 et L. 3132-23

L’article L. 3132-24 du code du travail prévoit aujourd’hui la règle selon laquelle « les recours présentés contre les décisions prévues aux articles L. 3132-20 et L. 3132-23 ont un effet suspensif ». Autrement dit, sont visées les décisions d’attribution de dérogations à la règle du repos dominical lorsqu’il est établi que le repos simultané, le dimanche, de tous les salariés d’un établissement serait préjudiciable au public ou compromettrait le fonctionnement normal de cet établissement (article L. 3132-20 du code du travail) ainsi que les décisions d’extension de ces autorisations à plusieurs ou à la totalité des établissements de la même localité exerçant la même activité, s’adressant à la même clientèle (article L. 3132-23 du code du travail).

Comme tout acte administratif, une décision préfectorale d’autorisation ou de refus de dérogation au repos dominical, prise dans ces deux situations, peut faire l’objet d’un recours gracieux, hiérarchique et contentieux.

Dans ce dernier cas, les dispositions de l’article L. 3132-24 du code du travail prévoient que les recours pour excès de pouvoir présentés devant les tribunaux administratifs contre les décisions prises en application des articles L. 3132-20 et L. 3132-23 ont un effet suspensif : ainsi, lorsqu’une dérogation préfectorale au repos dominical accordée à un établissement fait l’objet d’un recours contentieux, celle-ci est suspendue tant que le tribunal administratif n’a pas statué sur sa légalité.

b) Le problème posé et la solution retenue

En pratique, cette règle soulève certaines difficultés d’application.

Ces difficultés tiennent d’abord à la cohérence des solutions retenues. Ainsi, cette règle prévaut dans le cadre des dérogations prévues aux articles L. 3132-20 et L. 3132-23, dérogations temporaires attribuées par le préfet. En revanche, elle n’est pas applicable aux dérogations attribuées en application de l’article L. 3132-25 dans les communes ou zones touristiques et, évidemment, pas davantage à la dérogation établie par la proposition de loi dans les zones d’attractivité commerciale exceptionnelle.

Ensuite, si les recours pour excès de pouvoir présentés devant les tribunaux contre les arrêtés préfectoraux autorisant les dérogations au repos dominical dans le cadre de l’article L. 3132-20 ont un effet suspensif, il en va différemment des arrêtés préfectoraux refusant d’accorder une autorisation d’ouverture dominicale. Le Conseil d’État a précisé, dans un arrêt en date du 13 octobre 2003, que l’effet suspensif du recours ne s’applique qu’aux recours formés contre des décisions accordant une autorisation d’ouverture dominicale. Par conséquent, les recours formés contre le refus du préfet d’ouvrir l’entreprise le dimanche ne sont pas suspensifs (Conseil d’État, 13 octobre 2003, Société Ekima international).

Enfin, en contentieux administratif, c’est le principe de l’effet non suspensif des recours qui domine. Ce principe de portée générale figure aujourd’hui à l’article L. 4 du code de justice administrative. Il revêt un caractère fondamental, qui explique la généralité de sa portée et qu’il tient de sa liaison étroite avec la présomption de légalité des actes administratifs, dont résulte la force exécutoire immédiate de ces actes (19).

Pour l’ensemble de ces raisons, le principe de l’effet suspensif des recours présentés contre les décisions prévues aux articles L. 3132-20 et L. 3132-23 n’est pas justifié. Aussi cet article supprime-t-il l’article L. 3132-24 du code du travail en alignant le régime particulier du contentieux portant sur ces autorisations de dérogation accordées sur le fondement des articles L. 3132-20 et L. 3132-23 sur la règle générale applicable en contentieux administratif.

*

La Commission examine deux amendements de suppression de l’article présentés par M. Christian Eckert et Mme Martine Billard.

M. Christian Eckert. L’abrogation de l’article L. 3132-24 du code du travail, prévue par cet article, a pour effet de priver de leur effet suspensif les recours formés contre les décisions d’attribution de dérogations à la règle du repos dominical à certains établissements ou contre les décisions d’extension de ces dérogations à plusieurs établissements, ce qui serait de nature à faciliter le contournement de la réglementation par certains établissements.

Mme Martine Billard. Si ces recours n’ont plus d’effet suspensif, certaines entreprises pourraient chercher à forcer la main de l’administration et des tribunaux, en ouvrant leurs établissements le dimanche dans l’espoir que la situation de fait ainsi créée sera entérinée par le juge.

M. le rapporteur. Cet article poursuit un objectif de cohérence. Certes, la règle de l’effet suspensif prévaut, en application de l’article L. 3132-24 du code du travail, dans le cadre de certaines dérogations temporaires accordées par le préfet. Mais elle n’est pas applicable aux dérogations attribuées en application de l’article L. 3132-25 dans les communes ou zones touristiques et, évidemment, pas davantage à la dérogation établie par la proposition de loi dans les zones d’attractivité commerciale exceptionnelle. En outre, en contentieux administratif, c’est le principe de l’effet non suspensif des recours qui domine. Ce principe de portée générale figure aujourd’hui à l’article L. 4 du code de justice administrative. Il revêt un caractère fondamental, qui explique la généralité de sa portée.

Enfin, dès lors qu’une autorisation est délivrée à titre temporaire, pour une période limitée, l’effet suspensif du recours risquerait d’empêcher complètement son application, compte tenu des délais liés aux contentieux.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette ces deux amendements.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette un amendement de Mme Martine Billard tendant, dans le même but que l’amendement de suppression de l’article, à écarter la suppression de l’article L. 3132-24 du code du travail.

La Commission adopte l’article 3 sans modification.

Article 4

Report de midi à treize heures de l’heure à partir de laquelle peut être donné le repos dominical dans les commerces de détail alimentaire

Cet article a pour objet de reporter de midi à treize heures l’heure à partir de laquelle, aux termes de l’article L. 3132-13 du code du travail, peut être donné le repos hebdomadaire dans les commerces de détail alimentaire.

Aux termes de l’article L. 3132-13 du code du travail, « dans les commerces de détail alimentaire, le repos hebdomadaire peut être donné le dimanche à partir de midi. Les salariés âgés de moins de vingt et un ans logés chez leurs employeurs bénéficient d’un repos compensateur, par roulement et par semaine, d’un autre après-midi. Les autres salariés bénéficient d’un repos compensateur, par roulement et par quinzaine, d’une journée entière ».

Cet article fonde ainsi une dérogation à la règle du repos dominical, qui entre dans la catégorie des dérogations permanentes de droit, valable le dimanche matin en principe jusqu’à midi.

L’article L. 3132-13 du code du travail vise de manière générale les « commerces de détail alimentaire ». L’article R. 3132-8 du même code précise qu’il s’agit des établissements « dont l’activité exclusive ou principale est la vente de denrées alimentaires au détail ».

Le guide pratique établi par la direction générale du travail sur le repos dominical des salariés encadre les modalités de mise en œuvre de ces dérogations en précisant que la réalité de l’activité principale doit être appréciée strictement, au cas par cas, établissement par établissement, sur la base de différents critères : le chiffre d’affaires réalisé dans les divers rayons, les surfaces occupées et l’effectif employé dans ces rayons, conformément à la jurisprudence (Cour d’appel de Paris, 2 février 1989, Continent).

Le guide souligne que « compte tenu de ce qui précède, la situation des commerces doit faire l’objet, au cas par cas, d’un examen attentif. S’il s’avère, au terme de cet examen, que l’établissement en cause n’est pas un commerce alimentaire (mais un commerce multiple par exemple, c’est-à-dire offrant à la vente les produits les plus divers, sans qu’aucun type de produits ne prédomine sur les autres), il ne pourra bénéficier des dispositions de l’article [L. 3132-13] ».

L’article L. 3132-13 précise les modalités d’attribution du repos compensateur. Celui-ci est donné par roulement et par quinzaine, pour une journée entière.

Une modalité particulière est prévue pour « les salariés âgés de moins de vingt et un ans logés chez leurs employeurs » : ceux-ci bénéficient d’un repos compensateur d’une demi-journée, par roulement et par semaine.

Enfin, comme le rappelle le guide précité, le décret du 27 avril 1937, déterminant les modalités d’application de la loi du 21 juin 1936 sur la semaine de 40 heures dans les commerces de détail de denrées alimentaires, permet l’attribution d’un repos hebdomadaire d’un jour, d’un jour et demi ou de deux jours, selon le mode de répartition de la durée du travail dans le cadre de la semaine pour lequel les entreprises ont opté. La durée du travail peut ainsi être répartie de façon à ce que soient accordées une demi-journée ou deux demi-journées en plus des vingt-quatre heures de repos hebdomadaire prévues par la loi.

Dans son rapport présenté en 2007 au nom du Conseil économique et social sur la consommation, le commerce et les mutations de la société, M. Léon Salto avait formulé une préconisation concernant les horaires d’ouverture des commerces de détail alimentaire : « Afin de tenir compte des rythmes de vie actuels et mettre le droit en accord avec les faits, l’ouverture autorisée jusqu’à midi est portée à 13 heures ».

Pour les mêmes raisons, l’étude consacrée aux mutations de la société et aux activités dominicales par M. Jean-Paul Bailly au nom du Conseil économique et social avait repris cette recommandation.

En procédant, dans le premier alinéa de l’article L. 3132-13 du code du travail, à la substitution au mot : « midi » des mots : « treize heure », l’alinéa unique de l’article 4 de la proposition de loi tend à modifier le droit en vigueur conformément aux préconisations du Conseil économique et social, prenant ainsi en compte les rythmes de vie actuels et mettant le droit en accord avec les faits.

*

La Commission adopte l’article 4 sans modification.

Article 5

Autorisations délivrées sur le fondement de l’article L. 3132-20 du code du travail avant la promulgation de la loi

Cet article prévoit que les autorisations délivrées sur le fondement de l’article L. 3132-20 du code du travail avant la promulgation de la loi issue de la présente proposition de loi demeurent en vigueur pour la durée pour laquelle elles ont été délivrées.

Il s’agit de sécuriser les dérogations existantes fondées sur l’article L. 3132-20 du code du travail, à savoir celles qui sont justifiées par le fait que le repos simultané, le dimanche, de tous les salariés d’un établissement serait préjudiciable au public ou compromettrait le fonctionnement normal de cet établissement.

La proposition de loi ne modifie certes pas formellement les dispositions de l’article L. 3132-20 du code du travail.

Cependant, la création d’un nouvel article L. 3132-25-3 du code du travail, qui subordonne l’attribution des dérogations accordées sur le fondement de l’article L. 3132-20 à la conclusion d’un accord collectif ou à une décision unilatérale de l’employeur prise après référendum, affecte les modalités de mise en œuvre du régime prévu à cet article L. 3132-20. Or en l’état actuel du droit, cette condition n’étant pas requise – même si, dans certaines situations, un tel accord ou une telle décision peut être intervenu –, des dérogations ont été attribuées sans ce préalable.

De manière à assurer la légalité des décisions d’attribution des dérogations prises sur le fondement de l’article L. 3132-20 du code du travail avant l’entrée en vigueur de la loi, l’alinéa unique de cet article 5 dispose que « les autorisations délivrées sur le fondement de l’article L. 3132-20 du code du travail avant la promulgation de la présente loi demeurent en vigueur pour la durée pour laquelle elles ont été délivrées ».

Lorsque cette période sera arrivée à échéance, de nouvelles dérogations ne pourront plus être délivrées, conformément au nouveau régime applicable, qu’au vu d’un accord collectif ou d’une décision unilatérale de l’employeur prise après référendum.

*

La Commission est saisie d’un amendement de Mme Martine Billard tendant à obliger les établissements titulaires d’une autorisation de dérogation au repos dominical à demander un renouvellement de cette autorisation dans les trois mois suivant l’entrée en vigueur de la loi.

Mme Martine Billard. Cet amendement vise à éviter que l’application de ce texte ne crée des situations inégalitaires entre les salariés.

M. le rapporteur. Cet amendement est contraire à l’objectif de sécurisation des décisions d’attribution des dérogations existantes poursuivi par l’article 5. Par ailleurs, on peut s’interroger sur la durée du délai proposée.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette cet amendement.

La Commission adopte l’article 5 sans modification.

Après l’article 5

La Commission examine un amendement de M. Jean-Pierre Marcon tendant à établir un dispositif de travail dominical de plein droit cinq dimanches par an dans les commerces de détail.

M. Jean-Pierre Marcon. Les commerces de détail non-alimentaires habituellement fermés le dimanche peuvent aujourd’hui ouvrir jusqu’à cinq dimanches par an, sur autorisation du maire. Cette option est fréquemment utilisée par les entreprises concernées, mais elle les oblige à solliciter des dérogations municipales. Il serait donc utile d’assouplir ce dispositif en permettant aux commerces de détail non-alimentaires d’organiser le travail cinq dimanches par an de plein droit. Cette mesure correspond à une préconisation adoptée récemment par le Conseil économique et social à une très large majorité.

M. le rapporteur. Avis défavorable. Aujourd’hui, toutes les communes ne bénéficient pas de ces « dimanches du maire ». Par exemple, le maire de Nantes n’en accorde aucun. Mieux vaut laisser cette décision à la libre appréciation des maires.

M. le président Pierre Méhaignerie. Il faut en effet laisser des marges d’appréciation aux maires. À Vitré, par exemple, de façon concertée avec les acteurs intéressés, ces dérogations sont accordées deux dimanches par an. Je rappelle que le présent texte est un texte d’équilibre.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette cet amendement.

Article additionnel après l’article 5

Non-application de la proposition de loi aux départements
de la Moselle, du Bas-Rhin et du Haut-Rhin

La Commission examine un amendement de M. Frédéric Reiss précisant que les dispositions de la proposition de loi ne s’appliquent pas aux départements de la Moselle, du Bas-Rhin et du Haut-Rhin, dans lesquels s’applique le code professionnel local.

M. Frédéric Reiss. Si cet amendement peut paraître, en droit, superfétatoire, il est cependant important de réaffirmer clairement la spécificité du droit applicable dans ces trois départements. M. Antoine Herth s’associe à cette initiative.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte cet amendement.

Titre de la proposition de loi

Proposition de loi visant à redéfinir la réglementation
du repos dominical concernant les commerces,
dans les grandes agglomérations et les zones touristiques

La Commission examine un amendement du rapporteur tendant à modifier le titre de la proposition de loi, de manière à préciser que celle-ci vise à « redéfinir la réglementation du repos dominical concernant les commerces, dans les grandes agglomérations et les zones touristiques ».

M. le rapporteur. Cet amendement permet de préciser le titre de la proposition de loi. Cette initiative est commune avec mon collègue de la Commission des affaires économiques M. Lionnel Luca.

La Commission adopte cet amendement.

La Commission adopte ensuite l’ensemble de la proposition de loi ainsi rédigée.

*

En conséquence, la Commission des affaires culturelles, familiales et sociales demande à l’Assemblée nationale d’adopter la proposition de loi dont le texte suit.

TEXTE ADOPTÉ PAR LA COMMISSION

PROPOSITION DE LOI VISANT À REDÉFINIR LA RÉGLEMENTATION DU REPOS DOMINICAL CONCERNANT LES COMMERCES, DANS LES GRANDES AGGLOMÉRATIONS ET LES ZONES TOURISTIQUES

Article 1er


L’article L. 3132-3 du code du travail est ainsi rédigé :


« Art. L. 3132-3. – Dans l’intérêt des salariés, le repos hebdomadaire est donné le dimanche. »

Article 2


L’article L. 3132-25 du code du travail est remplacé par quatre articles L. 3132-25, L. 3132-25-1, L. 3132-25-2 et L. 3132-25-3 ainsi rédigés :


« Art. L. 3132-25. – Sans préjudice des dispositions de l’article L. 3132-20, dans les communes touristiques ou thermales et dans les zones touristiques d’affluence exceptionnelle ou d’animation culturelle permanente, le repos hebdomadaire peut être donné, par roulement, pour tout ou partie du personnel, pour les établissements de vente au détail qui mettent à disposition des biens et des services après autorisation administrative.


« La liste des communes touristiques ou thermales intéressées et le périmètre des zones touristiques d’affluence exceptionnelle ou d’animation culturelle permanente sont établis par le préfet sur demande des conseils municipaux.


« Un décret en Conseil d’État détermine les modalités d’application du présent article. »


« Art. L. 3132-25-1. – Sans préjudice des dispositions de l’article L. 3132-20, dans les unités urbaines de plus de 1 000 000 d’habitants, le repos hebdomadaire peut être donné, par roulement, pour tout ou partie du personnel, pour les établissements de vente au détail qui mettent à disposition des biens et des services situés dans les zones d’attractivité commerciale exceptionnelle, après autorisation administrative.


« La liste et le périmètre des unités urbaines mentionnées au premier alinéa sont établis par le préfet de région sur la base des résultats du recensement de la population.


« La liste et le périmètre des zones d’attractivité commerciale exceptionnelle au sein des unités urbaines sont établis par le préfet sur proposition des conseils municipaux, formulée compte tenu des circonstances locales, et après consultation des présidents de la communauté de communes, de la communauté d’agglomération ou de la communauté urbaine, lorsqu’elles existent, dans le périmètre desquelles est située la zone d’attractivité commerciale exceptionnelle.


« Le préfet statue après avis des présidents de la communauté de communes, de la communauté d’agglomération ou de la communauté urbaine concernée, donné dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État.


« Un décret en Conseil d’État précise les critères d’attractivité commerciale exceptionnelle au regard de l’importance de la clientèle concernée et de l’éloignement de celle-ci des zones commerciales en cause.


« Art. L. 3132-25-2. – Les autorisations prévues aux articles L. 3132-20, L. 3132-25 et L. 3132-25-1 sont accordées pour une durée limitée, après avis du conseil municipal, de la chambre de commerce et d’industrie et des syndicats d’employeurs et de travailleurs intéressés de la commune. L’autorisation est réputée accordée à expiration d’un délai de quatre mois à compter de la réception de la demande. Elle fait l’objet d’une publication.


« Une entreprise bénéficiaire d’une telle autorisation ne peut prendre en considération le refus d’une personne de travailler le dimanche pour refuser de l’embaucher. Le refus de travailler le dimanche pour un salarié d’une entreprise bénéficiaire d’une telle autorisation ne constitue pas une faute ou un motif de licenciement. Le salarié d’une entreprise bénéficiaire d’une telle autorisation qui refuse de travailler le dimanche ne peut faire l’objet d’une mesure discriminatoire.


« Les autorisations prévues aux articles L. 3132-25 et L. 3132-25-1 ne peuvent être accordées aux commerces de détail alimentaire visés à l’article L. 3132-13.


« Les autorisations prévues aux articles L. 3132-25 et L. 3132-25-1 sont accordées pour cinq ans. Elles sont accordées soit à titre individuel, soit à titre collectif, dans les conditions prévues par décret en Conseil d’État, pour des commerces ou services exerçant la même activité. »


« Art. L. 3132-25-3. – Les autorisations prévues aux articles L. 3132-20 et L. 3132-25-1 sont accordées au vu d’un accord collectif ou, à défaut, d’une décision unilatérale de l’employeur prise après référendum.


« L’accord fixe les contreparties accordées aux salariés privés du repos dominical ainsi que les engagements pris en termes d’emploi ou en faveur de certains publics en difficulté ou de personnes handicapées.


« En l’absence d’accord collectif applicable, les autorisations sont accordées au vu d’une décision unilatérale de l’employeur, prise après avis du comité d’entreprise ou des délégués du personnel, lorsqu’ils existent, approuvée par référendum organisé auprès des personnels concernés par cette dérogation au repos dominical. La décision de l’employeur approuvée par référendum fixe les contreparties accordées aux salariés privés du repos dominical ainsi que les engagements pris en termes d’emploi ou en faveur de certains publics en difficulté ou de personnes handicapées. Dans ce cas, chaque salarié privé du repos du dimanche bénéficie d’un repos compensateur et perçoit pour ce jour de travail une rémunération au moins égale au double de la rémunération normalement due pour une durée équivalente.


« Toutefois, un accord collectif régulièrement négocié s’applique dès sa signature en lieu et place des contreparties prévues à l’alinéa précédent. »

Article 3


L’article L. 3132-29 du code du travail est complété par un alinéa ainsi rédigé :


« Le préfet peut exclure de l’obligation de fermeture tout ou partie des communes ou des zones définies aux articles L. 3132-25 ou L. 3132-25-1. »

Article 4

Les articles L. 3132-21 et L. 3132-24 du code du travail sont abrogés.

Article 5

Dans le premier alinéa de l’article L. 3132-13 du code du travail, le mot : « midi » est remplacé par les mots : « treize heures ».

Article 6

Les autorisations délivrées sur le fondement de l’article L. 3132-20 du code du travail avant la promulgation de la présente loi demeurent en vigueur pour la durée pour laquelle elles ont été délivrées.

Article 7

Les dispositions des articles 2 à 6 ne sont pas applicables aux départements de la Moselle, du Bas-Rhin et du Haut-Rhin, dans lesquels s’applique le code professionnel local.

AMENDEMENTS NON ADOPTÉS PAR LA COMMISSION

Article 1er

Amendements présentés par M. Christian Eckert et Mme Martine Billard :

Supprimer cet article.

Amendement présenté par M. Christian Eckert :

À l’alinéa 2, après le mot : « roulement, », insérer les mots : « pendant la ou les périodes d’activités touristiques, ».

Amendements présentés par Mme Martine Billard :

•  À l'alinéa 2, après le mot : « personnel, », insérer les mots : « pendant la ou les périodes d'activités touristiques, ».

•  À l'alinéa 2, après le mot : « biens », supprimer les mots : « et des services ».

Amendements présentés par M. Christian Eckert :

•  À l’alinéa 2, après le mot : « services », insérer les mots : « destinés à faciliter l’accueil du public ou ses activités de détente ou de loisirs d’ordre sportif, récréatif ou culturel, ».

•  À l’alinéa 2, après le mot : « services », insérer les mots : « strictement en rapport avec le caractère touristique, thermale ou culturel des communes ou zones concernées ».

Amendement présenté par M. Christian Eckert :

Supprimer les alinéas 2 à 4.

Amendement présenté par Mme Martine Billard :

À l'alinéa 3, après le mot : « demande », insérer les mots : « et conformément aux décisions des assemblées délibératives soit de la communauté de communes, de la communauté d'agglomération, de la communauté urbaine, ou à défaut ».

Amendement présenté par M. Christian Eckert :

Supprimer les alinéas 5 à 9.

Amendement présenté par M. Xavier Breton :

À l’alinéa 5, après le mot : « habitants », insérer les mots : « dont la ville-centre a plus de 800 000 habitants ».

Amendements présentés par Mme Martine Billard :

•  Compléter l'alinéa 6 par les mots : « et sur demande des conseils régionaux ».

•  Après le mot : « proposition », rédiger ainsi la fin de l’alinéa 7 : « des assemblées délibératives des communautés de communes, de communautés d'agglomération, et des communautés urbaines ou à défaut des conseils municipaux dans le périmètre desquelles est située la zone d'attractivité commerciale exceptionnelle. »

•  À l'alinéa 8, après le mot : « avis », insérer le mot : « conforme ».

•  À l'alinéa 10, substituer aux mots : « du conseil municipal », les mots : « des assemblées délibératives des communautés de communes, de communautés d'agglomération et des communautés urbaines ou à défaut des conseils municipaux ».

•  À l'alinéa 10, après les mots : « d'industrie », insérer les mots : « , de la chambre des métiers ».

(retiré en commission)

•  Supprimer la deuxième phrase de l’alinéa 10.

Amendements présentés par M. Christian Eckert :

•  Après l’alinéa 11, insérer l’alinéa suivant : « Le refus de travailler le dimanche pour un salarié d’une entreprise bénéficiaire d’une telle autorisation ne peut constituer un motif de discrimination en matière de rémunération, de mutation, de reclassement, d’affectation, de classification, de promotion professionnelle, de renouvellement de contrat de travail. »

(retiré en commission)

•  Après l’alinéa 11, insérer l’alinéa suivant : « En aucun cas les contrats de travail des salariés ou des personnes en cours de recrutement dans les entreprises bénéficiaires d’une telle autorisation, ne peuvent comporter des clauses relatives au volontariat du salarié pour travailler le dimanche. »

•  À la première phrase de l'alinéa 12, substituer au mot : « cinq », le mot : « trois ».

Amendements présentés par Mme Martine Billard :

•  À la première phrase de l'alinéa 12, substituer aux mots : « cinq ans », les mots : « un an ».

•  À la dernière phrase de l'alinéa 12, substituer aux mots : « soit à titre individuel, soit à titre collectif », les mots : « à titre individuel ».

•  Compléter l'alinéa 12 par la phrase suivante : « En cas de changement d'exploitant, la demande d'autorisation devra être redéposée. »

(retiré en commission)

Amendements présentés par M. Christian Eckert :

•  Après le mot : « collectif », supprimer la fin de l’alinéa 13.

•  À l’alinéa 13, après le mot : « collectif », insérer les mots : « de branche ou d’entreprise  conclu avec des organisations syndicales représentatives ».

•  À l’alinéa 13, après le mot : « collectif », insérer les mots : « conclu avec des organisations syndicales représentatives et ayant recueilli la majorité absolue des voix aux élections des représentants du personnel ».

Amendement présenté par Mme Martine Billard :

Compléter l’alinéa 13 par les mots : «, sous condition du respect d'un repos compensateur équivalent en temps et du doublement du montant du salaire pour les heures travaillées. »

Amendements présentés par M. Christian Eckert :

•  Compléter l’alinéa 14 par la phrase suivante : «  Les contreparties fixées sont constituées, au minimum pour chaque salarié privé du repos du dimanche, du bénéfice d’une rémunération au moins égale au double de la rémunération normalement due pour une durée équivalente et d’un repos compensateur appliqué dans des conditions fixées par l’accord. »

•  Supprimer les deux premières phrases de l’alinéa 15.

Amendement présenté par M. Jean-Pierre Marcon :

Après le mot : « travail », rédiger ainsi la fin de la dernière phrase de l’alinéa 15 : « une majoration de salaire dont le montant sera négocié au niveau de chaque entreprise. »

Amendements présentés par Mme Martine Billard :

•  À l'alinéa 16, après le mot : « collectif », insérer les mots : « respectant les minima prévus à l'alinéa précédent du présent article ».

•  Après les mots : « s’applique », rédiger ainsi la fin de l'alinéa 16 : « au premier jour du troisième mois suivant sa signature et sous réserve des recours éventuels prévus à l'article L. 3132-24 du présent code. »

Article 2

Amendements présentés par M. Christian Eckert et Mme Martine Billard :

Supprimer cet article.

Amendement présenté par M. Jean-Pierre Marcon :

Rédiger ainsi cet article :

« L'article L. 3132-29 du code du travail est ainsi rédigé : « Art. L. 3132-29. – Les commerces figurant au nombre des dérogatoires de plein droit ne peuvent pas faire l’objet d’un arrêté préfectoral de fermeture. »

Article 3

Amendements présentés par M. Christian Eckert et Mme Martine Billard :

Supprimer cet article.

Amendement présenté par Mme Martine Billard :

Rédiger ainsi cet article :

« L'article L. 3132-21 du code du travail est abrogé. »

Article 5

Amendement présenté par Mme Martine Billard :

Après le mot : « loi », rédiger ainsi la fin de cet article : « devront être renouvelées à leur terme et dans un délai maximum de trois mois afin de se conformer aux obligations fixées par la présente loi. »

Après l’article 5

Amendement présenté par M. Jean-Pierre Marcon :

Insérer l’article suivant :

« Dans les établissements de commerce de détail où le repos hebdomadaire a lieu normalement le dimanche, ce repos est supprimé de plein droit cinq dimanches par an. Le choix des dates sera arrêté après consultation des organismes employeurs, des salariés concernés, et des collectivités locales. »

ANNEXES

ANNEXE 1

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

(par ordre alphabétique)

Ø Assemblée des chambres françaises de commerce et d’industrie (ACFCI)  M. Jean-François Bernardin, président, et M. Vincent Martin, directeur de l’appui aux entreprises

Ø Assemblée permanente des chambres des métiers (APCM) – M. François Moutot, directeur général, et Mme Béatrice Saillard, chargée des relations avec le Parlement

Ø Association « Laissez-nous travailler » – M. Jean-Patrick Grumberg, président, Mme Clarisse Coufourier et M. Marc Semof, conseillers en communication

Ø Association nationale des maires des stations classées et des communes touristiques (ANMSCCT) – M. Marc Francina, président, Mme Géraldine Leduc, directrice générale, et M. Michaël Bismuth, chargé de mission

Ø Autobacs France – M. Laurent Proust, président, et M. Guillaume Prugnard, directeur des ressources humaines

Ø Centre de recherche pour l’étude et l’observation des conditions de vie (CREDOC) – M. Robert Rochefort, directeur

Ø Confédération française démocratique du travail (CFDT) – M. Jean-Michel Drou, secrétaire confédéral, et Mme Aline Levron, secrétaire nationale à la fédération des services

Ø Confédération française de l’encadrement - Confédération générale des cadres (CFE-CGC) – M. René Roche, président de la Fédération nationale de l’encadrement du commerce et des services (FNECS), et Mme Martine Saavedra, secrétaire générale du SNECS (Syndicat national de l’encadrement du commerce et des services)

Ø Confédération française des travailleurs chrétiens (CFTC) – M. Joseph Thouvenel, secrétaire général-adjoint

Ø Confédération générale de l’alimentation en détail (CGAD) – M. Alain Duplat, président, et M. Dominique Perrot, secrétaire général

Ø Confédération générale des petites et moyennes entreprises (CGPME) – M. Jean-François Roubaud, président, M. Jean-Eudes du Mesnil, secrétaire général, Mme Sandrine Bourgogne, secrétaire générale–adjointe, et Mme Amélie Jugan, juriste

Ø Confédération générale des salariés du dimanche – Mme Sophie Hurel, présidente, MM. Olivier Pardo et Antoine Raymond, avocats, et Mme Clarisse Coufourier, conseillère en communication

Ø Confédération générale du travail (CGT) – Fédération du commerce et des services – Mme Michèle Chay, secrétaire générale, et M. Jean-Pierre Sorrento, conseiller fédéral

Ø Fédération des enseignes de l’habillement (FEH) – M. Lucien Odier, président, et M. Jean-Marc Genis, président exécutif

Ø Fédération des entreprises du commerce et de la distribution (FCD) – M. Jérôme Bédier, président, et Mme Stéphanie Lagalle-Baranès, chef du service social

Ø Fédération française du négoce de l’ameublement et de l’équipement de la maison (FNAEM) – M. Didier Baumgarten, président, et M. Jean-Charles Vogley, directeur des affaires économiques et du développement

Ø Fédération française du prêt-à-porter féminin – M. Jean-Pierre Mocho, président, et M. François-Marie Gros, délégué général de l’Union française des industries de l’habillement

Ø Fédération nationale de l’habillement (FNH) – M. Charles Melcer, président, Mme Sandra Vassy, secrétaire générale, et M. Bernard Morvan, commerçant, administrateur de la Fédération

Ø Fédération professionnelle des entreprises du sport et des loisirs (FPS) – M. Pierre Gogin, président délégué, Mme Cécile Landreau, directrice juridique, et Mme Jessica Fernandez, juriste

Ø Force Ouvrière (CGT-FO) – Mme Marie-Alice Medeuf-Andrieu, secrétaire confédérale, Mme Sandra Mitterrand, assistante confédérale chargée du dossier du repos dominical au secteur conventions collectives, M. Serge Legagnoa, secrétaire général de la fédération des employés et cadres, et M. Rafaël Nedzinsky, secrétaire général de la fédération agriculture alimentation

Ø Librairie « Le Grand Cercle » à Éragny – M. Erik Vautrin, président

Ø Librairie « Le Grand Cercle » à Éragny, Association des salariés du Grand Cercle 95 – M. Olivier Gombert, président

Ø Maître Philippe Mougeotte, avocat

Ø Mouvement des entreprises de France (MEDEF) – M. Thomas Chavane, vice-président de l’Union patronale des entreprises (UPE) 13, et M. Guillaume Ressot, directeur–adjoint chargé des affaires publiques

Ø Syndicat des magasins de boulangerie-pâtisserie (SMPB) –M. Philippe Godard, directeur délégué, et M. François Catala, consultant

Ø Union du commerce de centre-ville (UCV) – M. Claude Boulle, président

Ø Union nationale des associations familiales (UNAF) – M. François Fondard, président, et Mme Corinne Griffond, administratrice

Ø Union professionnelle artisanale (UPA) – M. Pierre Martin, président, M. Pierre Burban, secrétaire général, et Mme Caroline Duc, chargée des relations avec le Parlement

Par ailleurs, le rapporteur s’est entretenu avec Mgr André Vingt-Trois, archevêque de Paris.

ANNEXE 2

ÉLÉMENTS DE DROIT COMPARÉ EUROPÉEN

(notes élaborées par le service des affaires européennes
de l’Assemblée nationale)

SYNTHÈSE

L’ouverture des commerces les dimanches et jours fériés relève de la compétence des États membres, et non de l’Union européenne.

Les États membres peuvent donc librement fixer les modalités suivant lesquelles ils abandonnent, atténuent ou conservent le principe du dimanche jour chômé, d’application très générale il y a encore quelques décennies.

Leur latitude est importante. La Cour de Justice a annulé, dans un arrêt du 12 novembre 1996, Royaume-Uni c/ Conseil, affaire C-84/94, à la demande du Royaume-Uni, pour défaut de motivation, la phrase de l’article 5 de la directive 93/104/CEE du 23 novembre 1993 concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail. Celle-ci prévoyait que la période minimale de repos hebdomadaire, d’une durée de 24 heures consécutives par période de 7 jours et que toute entreprise doit accorder à ses salariés, « comprenait en principe le dimanche ».

Certes, la Cour de Justice a relevé qu’un considérant de la directive rappelait que l’inclusion du dimanche dans la période de repos hebdomadaire n’était qu’une éventualité laissée à l’initiative des États membres, compte tenu de la diversité des facteurs culturels, ethniques et religieux. Mais, elle a estimé qu’aucun élément ne lui avait été fourni pour justifier en quoi le dimanche avait un rôle plus important que les autres jours, comme jour de repos hebdomadaire, au regard de l’objectif de protection de la santé et la sécurité des travailleurs.

Cette précision sur le dimanche a donc été supprimée. Elle ne figure donc plus dans le texte actuellement applicable en la matière, celui de la directive 2003/88/CE du 4 novembre 2003 qui s’est substituée il y a quatre ans au texte de 1993, ni non plus, naturellement, dans la proposition de directive qui a vocation à la réviser et qui est depuis 2004 en cours d’examen au niveau communautaire (document E 2704/ COM(2004) 0607 final).

Dans ce contexte européen qui permet tant la déréglementation totale que la réglementation la plus stricte, les États se sont organisés selon des modalités qui permettent d’établir une distinction, une typologie, entre, d’une part, les États libéraux en la matière, Royaume-Uni, Suède, Luxembourg et, d’autre part, les États qui ont développé des régimes de dérogations et exceptions qui leur permettent d’assouplir avec plus ou moins d’ampleur le principe, qu’ils conservent, de la fermeture dominicale (Pays-Bas, Espagne, Finlande, Allemagne).

L’approche la plus libérale est celle de la Suède où la liberté de l’exploitant d’ouvrir son commerce le dimanche est intervenue très tôt, en 1971, et d’une manière très large. La seule limite est celle de l’interdiction du travail de nuit, pendant le cœur de la nuit, précisément. Les commerçants fixent leurs horaires d’une manière libre mais aussi assez limitée. Selon les informations les plus courantes, les magasins sont ouverts le dimanche entre 12 et 16 heures dans les grandes villes.

Le Royaume-Uni a également adopté, pour l’Angleterre et le Pays de Galles, en 1994, le principe de l’ouverture des magasins le dimanche. Des restrictions horaires ont cependant été prévues au-delà d’une certaine taille. L’amplitude horaire est limitée à 6 heures en continu, avec l’interdiction d’ouvrir avant 10 heures et de fermer après 18 heures pour les magasins de plus de 280 mètres carrés.

Au Luxembourg, le principe est également celui de l’ouverture le dimanche, mais le matin pour l’essentiel, entre 6 heures et 13 heures plus précisément. L’ouverture des commerces alimentaires vers 7 heures 30 est citée dans plusieurs informations à caractère commercial.

Pour sa part, la Belgique représente une situation intermédiaire. Le dimanche reste le jour de fermeture « de droit commun », mais, d’une part, le commerçant reste libre d’accomplir son obligation de fermeture hebdomadaire un autre jour, et, d’autre part, le conseil municipal peut, dans la limite de 15 jours par an, prévoir des dérogations permettant d’ouvrir quand même, aux commerces qui ont choisi de rester fermés le dimanche.

Dans les autres États étudiés, à savoir la Finlande, les Pays-Bas, l’Espagne et l’Allemagne, le principe reste celui de la fermeture des commerces le dimanche, avec des exceptions plus ou moins étendues.

Ce sont les cas les plus éclairants du point de vue de la France.

Chacun des pays concernés trouve, en effet, son propre point d’équilibre en arbitrant entre le nombre des dimanches et jours de fêtes où l’ouverture est autorisée, les heures limites d’ouverture et de fermeture, l’amplitude horaire maximale autorisée à l’intérieur de cette plage horaire, la distinction entre les petites et les grandes surfaces, ainsi que le degré, le niveau et les modalités d’intervention des autorités locales. En outre, l’Allemagne a confié cette compétence aux Länder, dans le cadre de la réforme du fédéralisme en 2006, et l’Espagne a dévolu de larges compétences à ses communautés autonomes.

La Finlande prévoit un régime saisonnier d’ouverture des commerces le dimanche entre 12 et 21 heures, de mai à août puis en novembre et décembre, sauf pour les surfaces de moins de 400 mètres carrés qui peuvent ouvrir toute l’année dans ces mêmes plages horaires.

En Allemagne, tous les Länder, qui ont depuis 2006 une compétence exclusive en la matière, ont opté pour un nombre limité de dimanches et jours fériés, entre 3 et 10 (4 le plus souvent), avec en outre des contraintes horaires plus ou moins étendues, tant sur les heures limites d’ouverture et de fermeture que sur l’amplitude totale d’ouverture d’un même magasin. Le choix des dates est fixé soit au niveau du Land, soit, dans certains cas, localement, par les communes (le droit des collectivités locales est régi par chaque Land, en Allemagne).

Le cas de l’Espagne est voisin. Les Communautés autonomes ne disposent cependant pas de la même latitude en la matière que les Länder, pouvant seulement moduler les principaux éléments prévus par la loi de l’État, notamment le nombre de dimanches ouvrables (autour de 12) et la surface maximale des commerces qui peuvent librement ouvrir (autour de 300 mètres carrés).

Pour ce qui concerne les Pays-Bas, le principe de l’interdiction d’ouverture le dimanche reste d’application stricte, même s’il connaît plusieurs exceptions. Le conseil municipal peut notamment décider que les commerces pourront ouvrir jusqu’à 12 dimanches ou jours fériés par année civile, et prévoir des dérogations pour le secteur de l’alimentation, dans la limite d’un commerce pour 15.000 habitants. En outre, en contrepartie d’un jour de remplacement pour la fermeture, l’exploitant peut ouvrir le dimanche tant pour des motifs religieux qu’en raison de ses convictions.

SUÈDE

La Suède est le premier pays à avoir adopté, en 1971, un système souple. Les jours et horaires d’ouverture des commerces sont libres.

La seule contrainte est l’interdiction du travail de nuit entre 0 heures et 5 heures.

En pratique et en général, selon les informations les plus courantes, les commerces sont ouverts entre 9 et 18 heures les jours de semaine.

La fermeture est dans l’ensemble échelonnée entre 13 et 16 heures le samedi.

Dans les grandes villes, certains commerces sont ouverts les jours ouvrables jusqu’à 20 ou 22 heures. Ils ouvrent entre 12 heures et 16 heures le dimanche.

ROYAUME-UNI

Pour l’Angleterre et le Pays de Galles, le Shops Act de 1950, qui interdisait le commerce de certains produits le dimanche, a été abrogé en 1994 par le Sunday Trading Act.

C’est un texte de compromis, qui prévoit quelques restrictions. En 1986, un projet prévoyant une ouverture beaucoup plus large des commerces le dimanche avait, en effet, été rejeté.

Pour apprécier la portée du Sunday Trading Act, il faut rappeler que les commerces peuvent rester ouverts 24 heures sur 24 les autres jours de la semaine.

En vigueur depuis le 28 août 1994, cet Act fixe pour l’ouverture le dimanche des règles différentes selon la taille des magasins.

Pour les commerces de moins de 280 mètres carrés (3000 sq ft, selon les unités de surface locales), il n’y a aucune restriction. Ils peuvent rester ouverts toute la journée et toute la nuit.

Pour les grandes et moyennes surfaces supérieures à ce seuil, deux limites sont prévues :

– d’une part, l’ouverture ne peut intervenir avant 10 heures et la fermeture doit avoir lieu à 18 heures au plus tard ;

– d’autre part, la durée d’ouverture est limitée à six heures d’affilée.

En 2004, une disposition réglementaire (Regulatory Reform Order) a imposé, à des fins de contrôle, la notification préalable à l’autorité locale des horaires d’ouverture le dimanche des grands et moyens commerces, ainsi que de leurs modifications.

Cette limitation de la durée et de la plage d’ouverture était, avec le volontariat des salariés concernés et le versement de primes, l’une des conditions posées par le syndicat des employés du commerce de détail (USDAW) pour donner son assentiment à la future loi.

L’Employment Right Act de 1996 a par conséquent consolidé le droit des employés de magasin (shop workers) et des employés dans le secteur des paris (betting workers) de refuser de travailler le dimanche (même si leur contrat de travail le prévoit), sauf s’ils ont été engagés pour travailler uniquement ce même jour.

En pratique, les grands centres commerciaux sont ainsi ouverts de 11 heures à 17 heures et les supermarchés optent pour 10 heures /16 heures, le dimanche. Les informations touristiques mentionnent l’ouverture des magasins les dimanches et jours fériés à Londres comme de plus en plus fréquente, avec une certaine prudence.

Deux fêtes religieuses font exception à la règle de l’ouverture le dimanche, Pâques et Noël :

– d’une part, dès 1994, a été prévue l’interdiction d’ouvrir le dimanche de Pâques, interdiction qui ne concerne que les magasins de plus de 280 mètres carrés ;

– d’autre part, depuis 2004, le Christmas Day Trading Act interdit à ces mêmes grandes et moyennes surfaces d’ouvrir le jour de Noël. Cette règle s’applique également lorsque cette fête religieuse tombe un dimanche.

Par ailleurs, le commerce des alcools relève d’une autre législation spécifique.

Les magasins dont l’activité exclusive ou principale consiste à vendre des alcools relèvent de la loi qui n’autorise la vente de ces produits le dimanche qu’entre 10 heures et 23 heures.

S’agissant de l’Écosse, aucune législation comparable à celle de 1950 n’était intervenue. C’est par habitude que les commerces étaient fermés le dimanche.

Au fur et à mesure, certains commerces se sont mis à ouvrir. Les employés ont été traités de manière comparable aux salariés anglais, nonobstant l’absence de législation.

Cependant, le licenciement en 2001, par la chaîne de magasins Argos, d’employés qui refusaient de travailler le dimanche, a conduit à l’adoption en 2003 du Sunday Working (Scotland) Act qui donne aux écossais le même droit de refus du travail du dimanche qu’aux anglais et gallois.

LUXEMBOURG

La loi du 19 juin 1995 réglant la fermeture des magasins de détail, fixe les plages horaires d’ouverture des magasins en semaine (entre 6 heures et 20 heures, avec une possibilité de fermeture « tardive » à 21 heures un jour de la semaine, et entre 6 heures et 18 heures les samedis et veilles de jours fériés), ainsi que les conditions d’ouverture les dimanches et jours fériés.

Pour ces derniers, le principe est que l’ouverture ne peut intervenir avant 6 heures et la fermeture après 13 heures. La loi prévoit cependant plusieurs dérogations :

– l’heure limite de 13 heures pour la fermeture est portée à 18 heures pour certains commerces : boucheries, boulangeries, pâtisseries, traiteurs et « salons de consommation », ainsi que commerces de tabac, de journaux et de souvenirs ;

– les petits magasins de détail n’occupant normalement qu’une seule personne assistée des membres de sa famille bénéficient d’une dérogation générale aux horaires légaux, donc aux horaires des dimanches et jours fériés ;

– des dérogations temporaires peuvent également être accordées, de même qu’aux règles sur les horaires les jours de semaine, à l’ensemble des magasins de détail d’une ou plusieurs branches du commerce et de l’artisanat. Elles relèvent du ministère des classes moyennes, du tourisme et du logement. Elles ne peuvent prévoir une fermeture des établissements commerciaux au-delà de 21 heures.

En outre, il faut mentionner les secteurs exclus.

La loi de 1995 ne s’applique, en effet, ni aux traiteurs (prestations hors locaux commerciaux), ni aux hôtels, cafés, restaurants, ni aux taxis et aux ambulances, ni aux pompes funèbres, ni aux foires et expositions, ni aux fêtes et kermesses locales, ni aux commerces de journaux, tabacs, alimentation et fleurs dans les gares, ni aux magasins des aérogares, ni aux stations services (20) (lesquelles peuvent également vendre ce même jour des produits alimentaires sur une surface de moins de 20 mètres carrés), ni au dépannage et remorquage des véhicules, ni aux prestations à exécuter en cas d’urgence ou de force majeure.

PAYS-BAS

Les horaires d’ouverture des commerces aux Pays-Bas sont définis par une loi de 1996 (Winkeltijdenwet). Les magasins peuvent ouvrir tous les jours ouvrables de 6 heures à 22 heures. L’heure limite de fermeture est cependant de 19 heures le vendredi saint, le 24 décembre et le 4 mai (Jours des morts). S’agissant cependant des gérants de certains centres commerciaux, ceux-ci sont tenus de respecter les horaires d’ouverture fixés par le propriétaire, lesquels peuvent être plus stricts.

En ce qui concerne plus précisément les dimanches et jours fériés (lundi de Pâques, Ascension, lundi de Pentecôte, Noël et le lendemain de Noël), le principe est l’interdiction d’ouverture.

Cependant, plusieurs exceptions et dérogations sont prévues:

– dans la limite de 12 jours par année civile, le conseil municipal peut décider, à titre dérogatoire, de l’ouverture des magasins les dimanches et jours fériés. Cette compétence peut éventuellement être déléguée au maire et aux adjoints ;

– pour les zones touristiques, dont Amsterdam, ainsi que pour les échanges transfrontaliers, à proximité des postes frontières, le conseil municipal, avec la même faculté de délégation aux maires et aux adjoints, peut, par arrêté, prévoir des dérogations tant à l’interdiction d’ouvrir les dimanches et jours de fête, qu’aux règles horaires ;

– le conseil municipal peut, par arrêté également, donner au maire et aux adjoints le pouvoir d’accorder des dérogations, pour les commerces alimentaires et de boissons (sauf les alcools forts), dans la limite d’un magasin pour 15.000 habitants. Pour les communes de moins de 15.000 habitants, un seul magasin peut rester ouvert ;

– en outre, le maire et les adjoints peuvent accorder des dérogations, dans les cas prévus par arrêté municipal, pour des occasions exceptionnelles à caractère temporaire.

Par ailleurs, l’ouverture le dimanche est de plein droit pour les propriétaires ou gérants qui appartiennent à une communauté religieuse dont le jour de repos hebdomadaire est un autre jour que le dimanche ou qui déclare avoir des convictions en ce sens. Dans ce cas, le maire et les adjoints accordent sur demande une levée d’interdiction. En compensation, le magasin doit être fermé un autre jour.

Certaines communes touristiques ont ainsi permis aux commerçants d’ouvrir leurs magasins 45 dimanches par an, en moyenne, selon les éléments communiqués. Afin de limiter l’utilisation de l’exception liée au caractère touristique, le Gouvernement néerlandais a annoncé une réforme de la loi. Deux textes sont en cours d'examen en ce sens au Parlement : une proposition de loi et un projet de loi du ministère de l'Économie et des Finances. Des auditions publiques sur ces textes sont prévues ce mois de décembre.

ESPAGNE

En Espagne, les horaires d’ouverture des commerces sont de la compétence non seulement de l’État, mais également des Communautés autonomes, dans le cadre des dispositions légales prévues au niveau central.

La loi 1/2004 du 21 décembre 2004 en règle les dispositions.

Elle pose d’abord le principe de la liberté des commerçants de fixer leurs jours et horaires d’activité dans le cadre des dispositions légales nationales et des règles prévues par les Communautés.

Elle dispose ensuite que les Communautés peuvent limiter la durée totale d’ouverture des commerces, mais que ce plafond ne peut être réduit en deçà d’un minimum de 72 heures.

Les principes posés par cette même loi pour l’ouverture des dimanches et jours fériés sont les suivants :

– le nombre minimum de droit commun de dimanches et jours fériés au cours desquels les magasins peuvent ouvrir est de 12 (un par mois en moyenne) ;

– ce nombre de 12 peut être modulé, à la hausse comme à la baisse, par les Communautés autonomes, sans pouvoir être réduit à moins de 8. La décision d’une Communauté concerne la totalité de son territoire. En pratique, selon une carte publiée par le quotidien El País sur la situation en 2007, 15 des 19 Communautés avaient réduit de 12 à 8 le nombre des dimanches et jours fériés d’ouverture. Seules les Canaries, à raison de 9 dimanches et jours fériés, Murcie, à raison de 10, Ceuta, avec 12, soit le droit commun, et Madrid, à raison de 20 font exception ;

– chaque commerçant détermine librement ses heures d’ouverture et de fermeture les dimanches et jours fériés concernés, sans que les Communautés autonomes ne puissent limiter la durée totale d’ouverture à moins de 12 heures.

La loi prévoit enfin des exceptions. Pour ces exceptions, les jours et heures d’ouverture sont librement fixés par les exploitants. Elles concernent :

– certains secteurs et activités précis : pâtisserie ; boulangerie (commerces de pain) ; plats préparés ; presse ; combustibles et carburants ; fleurs et plantes. Sont concernés les établissements qui exercent principalement l’une de ces activités ;

– les commerces, dits de commodité, des postes frontières, des gares, des gares maritimes et des aéroports ;

– les magasins assimilés aux commerces dit de commodité. Ce sont ceux qui vendent des livres revues et périodiques, des produits alimentaires, des disques, des vidéos, des jouets, cadeaux et articles variés, et dont la superficie de vente et d’exposition au public est inférieure à 500 mètres carré. Ils peuvent d’ailleurs rester ouverts au moins 18 heures par jour ;

– indépendamment du secteur concerné, les petits commerces, ceux dont l’espace de vente et d’exposition au public est de moins de 300 mètres carrés. Pour éviter de contourner cette règle, en sont exclus les établissements qui appartiennent à une entreprise ou un groupement de distribution qui ne relève pas de la catégorie des petites et moyennes entreprises, ou utilisent le même nom ou la même raison sociale.

Ce seuil de 300 mètres carrés peut être modifié par les Communautés autonomes, à la hausse, comme à la baisse, sans pouvoir cependant aller en deçà de 150 mètres carrés.

– les établissements implantés dans les zones de grande affluence touristique. Ces zones sont délimitées par les Communautés autonomes, qui fixent également les périodes d’exercice de la liberté d’ouverture et de fermeture des commerces qui y sont implantés.

Par ailleurs, deux compétences supplémentaires sont reconnues aux Communautés autonomes :

– d’une part, elles peuvent, dans le cadre prévu par la loi, fixer les horaires des établissements qui vendent exclusivement des biens culturels ou qui délivrent des services de même nature ;

– d’autre part, elles fixent les sanctions applicables en cas d’infractions aux règles sur les jours et horaires de commerce.

Enfin, les pharmacies relèvent d’une législation spécifique.

Précisions complémentaires :

Le nombre d’heures ordinaires de travail ne doit jamais dépasser les neuf heures quotidiennes, sauf convention collective ; une période de repos de douze heures minimum entre les journées de travail doit être respectée ; les salariés ont droit à un repos hebdomadaire d’une journée et demie sans interruption.

FINLANDE

La loi du 28 décembre 2000 sur les horaires d’ouverture des commerces et salons de coiffure prévoit la possibilité pour les commerces d’ouvrir le dimanche entre 12 heures et 21 heures :

– pour les commerces de petite ou moyenne surface de moins de 400 mètres carrés ;

–  pour l’ensemble des commerces et les salons de coiffure, un régime saisonnier avec ouverture les dimanches de la fin du printemps et de l’été (de mai à août) ainsi que de la période avant Noël (novembre et décembre).

Selon les informations touristiques, c’est à surtout Helsinki que certains magasins sont ainsi ouverts le dimanche, à partir de 12 heures.

ALLEMAGNE

La loi fondamentale de 1949 a d’abord attribué à l’État fédéral la compétence en matière de jours et horaires d’ouverture des commerces.

La loi du 28 novembre 1956 (Gesetz über den Ladenschluβ) a ainsi confirmé les règles antérieures relatives à la fermeture des commerces le dimanche et même dès le samedi après-midi dès 14 heures, avec des exceptions (stations services, magasins de gare, kiosques, pharmacies) et des dérogations.

1. Le régime antérieur à la loi fédérale de 2003

Après plusieurs modifications de la loi de 1956, qui ont conduit notamment à une fermeture plus tardive le samedi après-midi, une réforme législative d’ensemble a prévu en 2003 une nouvelle extension des horaires d’ouverture des commerces. Elle est entrée en vigueur le 1er juin de cette même année. C’est la dernière intervenue au niveau fédéral. La compétence a été transférée, dans le cadre de la réforme de 2006, aux Länder.

– une ouverture générale limitée à 4 dimanches ou jours fériés, avec des contraintes horaires

En 2003, l’ouverture des commerces les dimanches et jours fériés a été autorisée 4 fois dans l’année, à l’occasion de foires, expositions ou manifestations analogues.

Le choix précis des dates et modalités a été confié au Gouvernement du Land concerné, celui-ci pouvant en déléguer l’exercice à une autorité de niveau administratif inférieur. Le droit des collectivités locales relève, en Allemagne, des Länder.

Plusieurs restrictions horaires ont été posées, avec :

– une limitation à 5 heures, sans interruption, de la durée totale d’ouverture ;

– l’obligation de fermer à 18 heures au plus tard ;

– l’obligation de n’ouvrir qu’en dehors des heures des services religieux.

– des exceptions à l’interdiction d’ouverture le dimanche

Les exceptions ont par ailleurs été précisées, pour autoriser l’ouverture de certains commerces les dimanches et jours fériés :

– soit en raison de leur activité, à savoir les pharmacies et les kiosques à journaux (avec une ouverture de 11 heures à 13 heures), ainsi que, sur ordonnance ministérielle soumise à l’approbation du Bundesrat, les commerces de lait et produits laitiers, de fruits, fleurs et journaux, de même que les boulangeries et pâtisseries ;

– soit en raison de la nature du site d’implantation : stations services ; gares ; ports et aéroports ; stations thermales et de cure ;

– soit à titre saisonnier, pour les zones rurales, pendant les périodes de travaux des champs ou de récolte (ouverture de 2 heures pour l’accès des populations locales à l’indispensable).

– des règles pour assurer la protection des salariés

Différentes dispositions ont été prévues pour assurer la protection des travailleurs les dimanches et jours fériés, avec notamment :

– le principe d’une compensation (le ministre de l’emploi et des affaires sociales a été habilité à prendre, le cas échéant, une mesure en ce sens) ;

– une limitation à 8 heures de la durée totale de travail ;

– une limitation à une demi-heure de la présence en dehors des heures d’ouverture au public, cette présence ne pouvant d’ailleurs être exigée que pour les opérations indispensables de mise en place et de fermeture des magasins ;

– un repos compensateur pour le salarié ainsi que l’obligation de ne pas l’employer au moins un dimanche sur trois.

2. Synthèse des choix effectués par les Länder après la réforme du fédéralisme en 2006

– une ouverture générale le plus souvent limitée à 4 dimanches ou jours fériés, Berlin faisant exception avec 10

Après la réforme du fédéralisme en 2006, les Länder ont exercé leur nouvelle compétence en matière d’ouverture et de fermeture des commerces.

Berlin a été le premier à légiférer, en novembre 2006. Les Länder frontaliers de la France ont également adopté leurs propres lois en la matière, la Sarre et la Rhénanie-Palatinat en novembre 2006, le Bade-Württemberg en février 2007.

Selon un tableau de synthèse établi en juin 2007 par les Chambres de commerce et d’industrie allemande sur l’ensemble des Länder (sauf la Bavière, où aucune loi n’a pu être adoptée faute d’accord au sein de la majorité du Land), il apparaît que les règles générales suivantes, applicables à tous les commerces, sont en vigueur (les exceptions ne sont pas prises en considération) :

– la majorité des Länder s’en tient à une ouverture des commerces 4 dimanches ou jours de fêtes par an ;

– un seul, le Brandebourg, autorise une telle ouverture 6 dimanches ou jours de fêtes par an ;

– font exception le Bade-Württemberg, à raison de 3, et Berlin, à raison de 10.

En ce qui concerne plus précisément les dimanches de l’Avent, la période qui précède Noël, autorisent une telle ouverture les Länder de l’Est, pour l’essentiel :

– sans restriction : Berlin, le Brandebourg, la Rhénanie du Nord-Westphalie, la Saxe, la Saxe-Anhalt ;

– le seul premier dimanche de l’Avent : le Mecklembourg-Poméranie, la Sarre, la Rhénanie-Palatinat (uniquement s’il n’est pas en décembre), la Thuringe.

D’autres fêtes peuvent être exclues de la liste des dimanches et jours de fêtes susceptibles d’ouverture. Le Bade-Württemberg a ainsi interdit outre les dimanches de l’Avent, le dimanche de Pâques, le dimanche de la Pentecôte et Noël.

– Des amplitudes horaires limitées à quelques heures dans le cadre de plages horaires précises, le plus souvent

Pour ce qui est des horaires d’ouverture autorisés, cette même étude permet de distinguer 4 cas.

Le premier cas, le plus courant, est celui des 9 Länder qui ont tant limité la durée totale d’ouverture à quelques heures pour les dimanches et jours fériés autorisés que fixé des bornes précises pour l’ouverture ou pour la fermeture.

Plus précisément, 7 d’entre eux ont opté pour une durée de 5 heures, et 2 pour une durée de 6 heures.

Parmi les 7 qui ont adopté une durée totale d’ouverture de 5 heures :

– 4 d’entre deux, le Bade-Württemberg, Hambourg, la Sarre et le Schleswig-Holstein, ont imposé une fermeture à 18 heures au plus tard ;

– les 3 autres ont imposé ou interdit des plages précises : Brême exige que ces 5 heures s’inscrivent dans la plage horaire allant de 11 à 18 heures ; la Saxe-Anhalt a le même dispositif, mais avec une plage horaire plus longue allant de 11 à 20 heures ; la Rhénanie-Palatinat interdit la tranche 6-11 heures.

Les 2 Länder qui ont prévu une amplitude un peu plus longue, de 6 heures, sont la Hesse (Francfort) avec une fermeture à 20 heures au plus tard, et la Thuringe qui exige que ces 6 heures s’inscrivent dans la plage 11-20 heures.

Le deuxième cas est celui des 3 Länder qui ont opté pour une plage horaire fixe, mais sans limitation de durée à l’intérieur de cette plage : la Saxe autorise, pour les dimanches et jours fériés concernés, l’ouverture entre 12 heures et 18 heures ; Berlin et le Brandebourg, Land dont le territoire entoure entièrement celui de Berlin, ont prévu 13-20 heures.

Le troisième cas de figure est celui des 2 Länder, Rhénanie du Nord-Westphalie et Basse-Saxe, qui ont prévu une durée d’ouverture limitée à 5 heures, sans autre précision, pour les dimanches et jours fériés autorisés.

Le dernier cas est celui du Mecklembourg-Poméranie, qui a uniquement prévu que, lorsque pour les dimanches et fêtes où cela était autorisé, les magasins ne pouvaient être ouverts pendant les heures des services religieux.

– des choix concrets qui peuvent être délégués aux communes

En ce qui concerne le choix concret des dimanches et jours de fêtes où l’ouverture des commerces est autorisée, les dispositions varient d’un Land à l’autre.

Deux exemples sont éclairants :

– au Bade-Württemberg, c’est la commune (la taille des communes est plus importante en Allemagne qu’en France ; il y a un peu plus de 12.000 communes pour 82 millions d’habitants) qui fixe, en dehors des dates interdites, comme on l’a vu, les 3 dimanches et jours fériés d’ouverture ;

– pour Berlin, la loi prévoit elle-même l’ouverture pour les 4 dimanches de l’Avent. S’agissant des 6 autres dimanches ou jours de fêtes, 4 sont fixés par l’équivalent de l’autorité ministérielle (Senatsverwaltung) et 2 sont destinés aux manifestations particulières, notamment celles qui concernent les commerces d’une rue et les anniversaires des entreprises. La loi interdit cependant en tout étant de cause l’ouverture générale des commerces le 1er janvier, le 1er mai, le vendredi saint, le dimanche de Pâques, le dimanche de la Pentecôte, le Jour de deuil national (2è dimanche de novembre), le jour des morts ainsi que les jours de fête de décembre (dont Noël).

Les Églises catholique et protestante ont introduit en novembre 2007 un recours devant le juge constitutionnel allemand (Bundesverfassungsgericht) contre la généralisation du travail le dimanche à Berlin (10 dimanches d’ouverture). Elles se fondent sur l’article 140 de la Constitution qui protège le dimanche et les jours fériés en tant que jours de repos. Le jugement devrait être rendu en 2009.

– des exceptions et des dérogations classiques

En ce qui concerne les dérogations et exceptions, les deux mêmes exemples illustrent leur profil assez classique.

Pour ce qui concerne le Bade-Württemberg, l’interdiction d’ouvrir en dehors des 3 dimanches autorisés ne fait pas obstacle aux exceptions permanentes suivantes :

– les boulangeries, pâtisseries, ainsi que les commerces de fleurs peuvent régulièrement ouvrir les dimanches et jours de fête pour une durée de 3 heures ; pour les marchands de journaux, le même principe vaut, mais pour une durée de 6 heures ;

– des régimes particuliers sont prévus de manière classique pour les pharmaciens, stations-service, gares et aéroports, sites touristiques et de cure ainsi que, de manière plus rare, pour les ventes de produits à la ferme.

S’agissant de Berlin, la loi « locale » prévoit de manière détaillée les exceptions permanentes suivantes :

– les commerces destinés aux touristes ou aux visiteurs, de 13 à 20 heures ;

– les commerces qui vendent un ou plusieurs des produits suivants : fleurs et plantes ; journaux et magasines ; pains et pâtisseries ; lait et produits laitiers. L’ouverture est autorisée entre 7 et 16 heures. Des règles très strictes sont prévues pour Noël, Pâques et la Pentecôte, où seuls les marchands de journaux et les commerces « de rue » tenus par les producteurs de fruits et légumes sont autorisés.

BELGIQUE

Entrée en vigueur le 1er mars 2007, la loi du 10 novembre 2006 relative aux heures d’ouverture dans le commerce, l’artisanat et les services, a remplacé les dispositions antérieures de la loi du 22 juin 1960 sur le repos hebdomadaire dans l’artisanat et le commerce et celle du 24 juillet 1973 instaurant la fermeture obligatoire dans ces mêmes secteurs et les services.

S’agissant des jours de semaine, elle prévoit une plage d’ouverture entre 5 heures et 20 heures. L’heure limite de fermeture est reportée à 21 heures le vendredi et les veilles de jours fériés. Le statut de magasin de nuit permet par ailleurs de vendre des produits alimentaires et des articles ménagers, sur une petite surface de moins de 150 mètres carrés, entre 18 heures et 7 heures le lendemain matin. Ces horaires peuvent être différents si un règlement communal le prévoit.

Pour ce qui concerne le dimanche, la loi de 2006 prévoit le libre choix du commerçant pour fixer le jour où il respecte l’obligation d’une fermeture hebdomadaire de 24 heures consécutives. Cette obligation couvre d’ailleurs tant l’accès des clients aux locaux commerciaux que les livraisons à domicile.

Le dimanche conserve cependant un statut particulier. Il reste le jour de fermeture des commerces par défaut.

En l’absence d’une option de l’exploitant pour un autre jour, l’obligation de fermeture hebdomadaire de 24 heures consécutives commence, en effet, le dimanche soit à 5 heures, soit à 13 heures, et se termine le lendemain à la même heure.

Lorsque l’exploitant choisit pour sa fermeture hebdomadaire, commençant de la même manière soit à 5 heures, soit à 13 heures, et se terminant le lendemain à la même heure, un jour autre que le dimanche, il doit prévoir un affichage extérieur mentionnant clairement le dit jour de repos hebdomadaire et l’heure de début (l’obligation antérieure de déclarer à la commune le jour de repos a été supprimée). L’entreprise ne peut alors le dimanche vendre d’autres produits ou délivrer d’autres services que ceux qu’elle vend ou fournit habituellement. L’option exercée ne peut être changée avant l’expiration d’un délai de 6 mois.

En cas d’infraction, les peines prévues vont de 1 mois à un an d’emprisonnement et de 250 à 10.000 euros d’amende.

En dépit de leur souplesse, ces règles connaissent cependant plusieurs exceptions :

– dans la limite de 15 jours par an, à la demande d’un ou plusieurs commerçants ou artisans, agissant en leur nom, ou de groupements de commerçants ou artisans, le « conseil municipal » (Collège des bourgmestres et échevins et, depuis 2006, en Wallonie, Conseil communal) peut accorder des dérogations aux entreprises qui ferment le dimanche, en cas de circonstances particulières et passagères ou à l’occasion de foires et marchés. Pour le seuil précité de 15 jours, ces dérogations se comptabilisent avec les dérogations à l’obligation de fermeture à 20 heures le soir (21 heures le vendredi) ;

– les entreprises qui ont choisi le dimanche comme jour de fermeture, peuvent quand même ouvrir, à titre dérogatoire, pour assurer la garde dominicale de la profession ;

– les fédérations professionnelles de commerce de détail peuvent demander à être exclues, par arrêté royal, du champ d’application de la loi ou de certaines de ses dispositions. Un arrêté royal en ce sens peut également être pris sur initiative du ministre.

En pratique, le dimanche reste le principal jour de fermeture des commerces.

Sont par ailleurs hors du champ de la loi :

– certaines ventes à domicile ;

– les commerces et prestations de services implantés dans les gares, y compris de métro, et les aéroports ;

– les prestations de service à effectuer en cas de nécessité impérieuse ;

– les ventes dans les stations d’essence d’autoroute, de denrées et articles ménagers autres les boissons alcoolisées, lorsque la surface de vente est de moins de 250 mètres carrés.

Il en est de même pour :

– les commerces de journaux, produits du tabac, cartes téléphoniques et produits de la Loterie nationale ;

– les magasins de DVD, vidéos et jeux vidéos ;

– les stations services ;

– les débitants de crèmes glacées en portion individuelles ;

– les traiteurs (denrées alimentaires préparées et à emporter).

Enfin, pour les stations balnéaires et les centres touristiques, les règles de droit commun ne sont pas non plus applicables.

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© Assemblée nationale

1 () Robert Beck, L’histoire du dimanche de 1700 à nos jours, Paris Éditions ouvrières, 1997. Voir également les éléments figurant dans « La règle du repos dominical », Sylvie Hennion-Moreau, Droit social, mai 1990, n° 5.

2 () CAA de Paris, 5 juillet 2006, société Grand Optical.

3 () Telle qu’elle est rappelée, notamment, par la direction générale du travail du ministère du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité dans le guide pratique sur le repos dominical.

4 () « Temps de travail, revenu et emploi », Conseil d’analyse économique, 2007.

5 () Sondage IFOP, septembre 2008.

6 () Éléments rappelés notamment par M. Jean-Paul Bailly dans son étude précitée au nom du Conseil économique et social.

7 () Voir sur cette question « Modernité, la nouvelle carte du temps », François Ascher et Francis Godard, Éditions de l’Aube, 2003.

8 () Jean Viard, Éloge de la mobilité, Editions de l’Aube, 2006.

9 () CREDOC, Consommation et mode de vie, n° 131, novembre-décembre 1998.

10 () Extrait de l’étude de M. Jean-Paul Bailly précitée.

11 () Sondage IFOP, « Les Français et l’ouverture des magasins le dimanche » ; sondage CSA, « L’opinion des Français à l’égard du travail le dimanche ».

12 () Sondage BVA, « Les salariés et le travail le dimanche ».

13 () Les données présentées ci-après sont extraites de « Le travail des étudiants », rapport de M. Laurent Bérail au nom du Conseil économique et social, 2007 ; INSEE Première, « Deux étudiants du supérieur sur dix ont un emploi », juillet 2008.

14 () Comme le rappelle le guide pratique de la direction générale du travail sur le repos dominical des salariés.

15 () Exemples figurant dans le « guide pratique de la direction générale du travail sur le repos dominical des salariés » (juillet 2007).

16 () CAA de Paris, 5 juillet 2006, société Grand Optical.

17 () Mais dans les entreprises de 11 à 49 salariés, un délégué du personnel peut être désigné comme délégué syndical, en application de l’article L. 2143-6 du code du travail.

18 () Premières informations et premières synthèses de la direction de l’animation, de la recherche et des études statistiques du ministère du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité, « Négociations collectives et grèves en 2006 dans le secteur marchand », juillet 2008, n° 27.3.

19 () Voir notamment René Chapus, Droit du contentieux administratif, Montchrestien, 2008.

20 () La loi du 21 février 1976 impose aux stations services un jour de fermeture hebdomadaire.