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N° 1967

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 14 octobre 2009.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2010 (n° 1946),

TOME II

EXAMEN DE LA PREMIÈRE PARTIE
DU PROJET DE LOI DE FINANCES

CONDITIONS GÉNÉRALES DE L’ÉQUILIBRE FINANCIER

Volume 1

Articles 1 et 4 à 34

PAR M. GILLES CARREZ

Rapporteur général,

Député.

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SOMMAIRE

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PREMIÈRE PARTIE

CONDITIONS GÉNÉRALES DE L’ÉQUILIBRE FINANCIER

TITRE PREMIER

DISPOSITIONS RELATIVES AUX RESSOURCES

I.– IMPÔTS ET RESSOURCES AUTORISÉS

A.– Autorisation de perception des impôts et produits

Pages

Article premier Autorisation de percevoir les impôts existants 5

B.– Mesures fiscales

Article 2 : Suppression de la taxe professionnelle 16

Article 3 : Financement des chambres de commerce et d’industrie 16

Article 4 Prorogation pour les dépenses engagées en 2009 de la restitution immédiate et accélérée des créances de crédit d’impôt recherche pour les entreprises 16

Après l’article 4 19

Article additionnel après l’article 4 Instauration d’une taxe additionnelle sur les bénéfices des établissements de crédit 24

Après l’article 4 30

Article 5 Instauration d’une taxe carbone et d’une taxe sur le transport routier de marchandises 31

Après l’article 5 68

Article 6 : Création d’un crédit d’impôt sur le revenu forfaitaire destiné à rendre aux ménages le montant de la taxe carbone 69

Article 7 : Remboursement partiel de la taxe carbone en faveur des exploitants agricoles 82

Après l’article 7 84

Article additionnel après l’article 7 Instauration d’une taxe sur les sacs plastiques 87

Article 8 : Suppression du taux de TVA réduit sur les équipements de climatisation 89

Après l’article 8 92

Article 9 : Barème de l’impôt sur le revenu 2010 97

Après l’article 9 101

Article 10 : Exonération d’impôt sur le revenu de l’aide exceptionnelle de 200 euros versée aux bénéficiaires de certaines prestations sociales et à certains demandeurs d’emploi et de la prime exceptionnelle de 500 euros versée aux travailleurs privés d’emploi 115

Article 11 : Exonération du revenu supplémentaire temporaire d’activité versé dans les DOM et prise en compte de ce revenu dans le montant de la prime pour l’emploi 117

Après l’article 11  121

Articles additionnels après l’article 11 : Modifications de la réduction de l’impôt de solidarité sur la fortune des investissements dans les PME 132

Article 12 : Exonération de droits de mutation par décès des successions des militaires décédés en opération extérieure 137

Après l’article 12  139

II.– RESSOURCES AFFECTÉES

A.– Dispositions relatives aux collectivités territoriales

Article 13 Évolution de la dotation globale de fonctionnement (DGF) 145

Article additionnel après l’article 13 : Abondement des dotations de péréquation de la dotation générale de fonctionnement 150

Article 14 Indexation des dotations d’investissement sur le taux prévisionnel d’inflation 152

Article 15 Reconduction du fonds de mobilisation départementale pour l’insertion (FMDI) 156

Article 16 Évolution des compensations d’exonérations 164

Après l’article 16 179

Article 17 Compensation des transferts de compétences aux départements par attribution d’une part du produit de la taxe intérieure de consommation sur les produits pétroliers (TIPP) 180

Article 18 Compensation des transferts de compétences aux régions par attribution d’une part du produit de la taxe intérieure de consommation sur les produits pétroliers (TIPP) 188

Article 19 Compensation aux départements des charges résultant de la mise en oeuvre du revenu de solidarité active (RSA) 195

Article 20 Évaluation des prélèvements opérés sur les recettes de l’État au profit des collectivités territoriales 202

B.– Autres dispositions

Article 21 : Dispositions relatives aux affectations 206

Article 22 Hausse des tarifs de la taxe de l’aviation civile (TAC) 207

Article 23 Modification de la part du produit du droit de timbre sur les passeports affectée à l’Agence nationale des titres sécurisés (ANTS) 212

Article 24 Affectation au Fonds démonstrateurs de recherche des remboursements des avances du Réseau de recherche sur les technologies pétrolières et gazières (RTPG) 213

Article 25 Mesures relatives au compte de concours financiers « Avances à l’audiovisuel » 216

Article 26 : Prorogation de dégrèvement de contribution à l’audiovisuel public 219

Article 27 Neutralisation des conséquences financières entre les régimes de retraite concernés du transfert de fonctionnaires dans le cadre de la décentralisation 221

Article 28 Modification du périmètre des recettes et des dépenses du compte d’affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l’État » 224

Article 29 Autorisation de cession de l’usufruit de tout ou partie des systèmes de communication militaires par satellites et élargissement du périmètre du compte d’affectation spéciale « Gestion et valorisation des ressources tirées de l’utilisation du spectre hertzien » 227

Article 30 Rattachement du soutien pétrolier de la flotte de la marine nationale au compte de commerce « Approvisionnement des armées en produits pétroliers » 231

Article 31 : Transfert d’un centre d’études de la Délégation générale pour l’armement (DGA) au Commissariat à l’énergie atomique (CEA) 233

Article 32 Exonération de l’Office national des forêts (ONF) du paiement de toute indemnité ou perception de droits, impôts ou taxes relatifs à la signature du bail lui transférant un ensemble de bâti domanial 235

Article 33 Évaluation du prélèvement opéré sur les recettes de l’État au titre de la participation de la France au budget des Communautés européennes 239

Après l’article 33  245

TITRE II

DISPOSITIONS RELATIVES À L’ÉQUILIBRE DES RESSOURCES ET DES CHARGES

Article 34 Équilibre général du budget, trésorerie et plafond d’autorisation des emplois 246

PREMIÈRE PARTIE

CONDITIONS GÉNÉRALES DE L'ÉQUILIBRE FINANCIER

TITRE PREMIER

DISPOSITIONS RELATIVES AUX RESSOURCES

I.– ImpÔts et ressources autorisÉs

A.– Autorisation de perception des impôts et produits

Article premier

Autorisation de percevoir les impôts existants

L’article premier du projet de loi de finances renouvelle l’autorisation annuelle de percevoir les impôts, élément essentiel de la tradition démocratique selon laquelle l’impôt n’est légitime que parce qu’il est librement consenti par la Nation. Il revient donc au Parlement d’exprimer ce consentement qui, par nature, ne peut être que précaire et doit être réitéré régulièrement.

Le 1° du I de l’article 34 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) dispose en ce sens que « la loi de finances de l’année autorise, pour l’année, la perception des ressources de l’État et des impositions de toute nature affectées à des personnes morales autres que l’État ».

I.– L’AUTORISATION DE PERCEVOIR LES IMPÔTS

Le I du présent article autorise la perception des impôts, produits et revenus affectés à l’État, aux collectivités territoriales, aux établissements publics et organismes divers habilités à les percevoir. En la matière, la qualité de l’information fournie au Parlement s’est substantiellement améliorée depuis plusieurs années.

Les recettes du budget général sont décrites de façon précise : les évaluations relatives à l’année concernée s’appuient sur une révision des recettes de l’année en cours, présentée concurremment à celle de la loi de finances initiale. Le tome I de l’annexe des « voies et moyens » décrit le passage de l’évaluation révisée de l’année en cours à l’évaluation du projet de loi de finances pour l’année suivante. Sont distingués quatre facteurs de variation : l’évolution spontanée, les mesures nouvelles, les mesures antérieures au projet de loi de finances et les mesures de périmètre et de transfert. Depuis le projet de loi de finances pour 2009, la distinction entre recettes non fiscales et recettes fiscales a été clarifiée, afin de mieux faire coïncider la notion de « recettes fiscales » avec celle d’ « impositions de toute nature » figurant dans la Constitution et dans la LOLF (1).

Grâce à ces informations, le Parlement est mis à même d’apprécier :

– la façon dont le produit fiscal est affecté par l’évolution de l’assiette, résultant essentiellement du scénario économique retenu par le Gouvernement ;

– l’effet différé de décisions prises antérieurement à l’année concernée par le projet de loi de finances (mesures exceptionnelles ou venant à expiration en 2010, extension en année pleine de mesures mises en œuvre au cours de l’année 2009, mesures législatives ou réglementaires ayant une première incidence en 2010 ou une incidence supplémentaire en 2010 par rapport à 2009) ;

– l’impact des mesures législatives ayant une incidence sur les recettes proposées dans le présent projet.

Le Rapporteur général rappelle que le tome II de la même annexe comporte une présentation des dépenses fiscales, conformément aux dispositions de l’article 32 de la loi de finances pour 1980. Ces dépenses sont des mesures considérées comme dérogatoires par rapport à la fiscalité « normale » : elles portent atténuation des recettes de l’État.

Depuis le projet de loi de finances pour 2006, la présentation des dépenses fiscales, qui ont longtemps constitué le talon d’Achille du Parlement en matière d’information sur les recettes, a été substantiellement améliorée.

Le tome II de l’annexe des voies et moyens a été enrichi de la précision du nombre de bénéficiaires de chaque mesure fiscale (lorsque ce nombre est connu) et d’indications sur le degré de fiabilité du chiffrage de l’impact budgétaire de la mesure et sur la méthode de chiffrage retenue (simulation, reconstitution à partir de données de la Direction générale des impôts, reconstitution à partir de données extérieures). Une mise à jour de la liste des dépenses fiscales a été effectuée en 2006 et a conduit à « requalifier » plusieurs d’entre elles (en particulier certaines exonérations ou certains abattements) en simples modalités de calcul de l’impôt constituant la norme.

En outre, depuis le projet de loi de finances pour 2007, les dates de création et de dernière modification « substantielle » des dépenses fiscales sont mentionnées. Certains allégements applicables en matière d’impôts directs locaux sont pris en compte, à condition qu’ils aient un impact direct sur les ressources et les charges de l’État sous forme de versement au bénéficiaire d’une allocation compensatrice (par exemple les exonérations de taxe foncière ou de taxe d’habitation) ou d’un dégrèvement au profit du contribuable (par exemple les dégrèvements de taxe professionnelle). Il s’agit là d’un indéniable progrès dans le sens d’une meilleure appréhension de la fiscalité locale dérogatoire (2).

Depuis le projet de loi de finances pour 2009, le tome II de l’annexe des voies et moyens comporte plusieurs innovations, qui s’inspirent pour beaucoup des préconisations du rapport de la mission d’information de la commission des Finances sur les niches fiscales de juin 2008 (3). Outre une révision du périmètre des dépenses fiscales, plusieurs importantes données de synthèse ont été ajoutées, en particulier :

– le montant total de ces dépenses, érigé en objectif annuel de dépenses fiscales. Le principe d’un tel objectif, également présenté dans l’exposé des motifs du présent article, a été consacré à l’article 12 de la loi de programmation des finances publiques pour les années 2009 à 2012 (n° 2009-135 du 9 février 2009). Le Rapporteur général renvoie au Tome 1 du présent rapport général pour le commentaire de l’objectif de dépenses fiscales pour 2010 ;

– les dépenses fiscales adoptées depuis le précédent projet de loi de finances, ainsi que celles proposées dans le présent projet de loi de finances, afin de contribuer à la mise en œuvre de la règle de gage encadrant la création de dépenses fiscales, instaurée par l’article 11 de la loi de programmation des finances publiques précitée (4).

Par ailleurs, en application du b du 5° de l’article 51 de la LOLF, les projets annuels de performances (PAP) de chaque programme contiennent une évaluation des dépenses fiscales concourant aux objectifs du programme. Depuis le projet de loi de finances pour 2008, sont systématiquement ventilées dans les PAP les informations figurant dans le tome II de l’annexe précitée, c’est-à-dire : l’impôt concerné, la référence juridique, le type de bénéficiaires, le nombre de bénéficiaires, la méthode de chiffrage utilisée, le niveau de fiabilité, l’indication d’un éventuel changement de méthode de chiffrage, l’année de création de la dépense, l’année de dernière modification de la dépense. S’y ajoute dans le présent projet de loi de finances l’année de fin d’incidence budgétaire de la dépense fiscale considérée.

Depuis les rapports annuels de performances (RAP) joints au projet de loi de règlement du budget de l’année 2007, les annexes budgétaires par mission comportent également des éclairages particuliers sur plusieurs dépenses fiscales dites « à forts enjeux » (par les montants qu’elles représentent ou par l’importance qu’elles prennent dans la réalisation des objectifs du programme). Une vingtaine de dépenses fiscales, puisées dans un « vivier » riche de plus de 500, ont ainsi fait l’objet d’une présentation plus détaillée dans les documents budgétaires : objectifs poursuivis ; évolutions croisées de leur coût et du nombre de bénéficiaires ; efficience des dispositifs ; motivation du recours à la dépense fiscale plutôt qu’à un financement par voie de dépense budgétaire. Les rapporteurs spéciaux sont ainsi mis en mesure non seulement de mieux appréhender les moyens alloués aux différentes politiques publiques, mais aussi de chercher à évaluer l’efficacité et la pertinence de nombreuses dispositions fiscales dérogatoires (5).

Toutefois, cette démarche n’est pas poursuivie les PAP annexés au présent projet de loi de finances, en raison des nouvelles exigences d’évaluation des dépenses fiscales découlant du III de l’article 12 de la loi de programmation précitée : le Gouvernement doit présenter une évaluation de l’efficacité et du coût de chaque nouvelle dépense fiscale dans les trois ans suivant sa création et, d’ici au 30 juin 2011, de l’ensemble des dépenses fiscales déjà en vigueur (6). Dans ces conditions, un dispositif spécifique d’évaluation devrait prochainement être mis en place, à l’issue d’une mission de réflexion confiée à l’Inspection générale des finances.

Depuis plusieurs années, l’information du Parlement a également été améliorée en matière d’impositions affectées à des personnes morales distinctes de l’État.

La LOLF est porteuse de progrès dans ce domaine : son article 2 dispose que les « impositions de toute nature ne peuvent être directement affectées à un tiers qu’à raison des missions de service public confiées à lui » ; son article 63 supprime la parafiscalité, dont le contrôle échappait largement au Parlement (celui-ci se bornant à autoriser annuellement la poursuite de la perception des taxes existantes, établies par le pouvoir réglementaire). Synthétisant les exigences organiques, le Conseil constitutionnel a estimé qu’une affectation ne pouvait être effectuée que « sous la triple condition que la perception de ces impositions soit autorisée par la loi de finances de l’année, que, lorsque l’imposition concernée a été établie au profit de l’État, ce soit une loi de finances qui procède à cette affectation et qu’enfin le projet de loi de finances de l’année soit accompagné d’une annexe explicative concernant la liste et l'évaluation de ces impositions » (décision n° 2001-448 DC du 25 juillet 2001).

Le tome I de l’annexe des voies et moyens offre ainsi, sur le fondement du 1° de l’article 51 de la LOLF, un tableau quasi exhaustif du produit effectif et prévisionnel des impositions affectées, permettant au Parlement de se prononcer en toute connaissance de cause au moment de la délivrance annuelle de l’autorisation de prélever les impôts et les autres ressources.

Depuis l’année dernière, ces informations ont été améliorées et enrichies. Alors que les présentations antérieures s’apparentaient parfois à un authentique capharnaüm, certes quelque peu inhérent à la multiplicité et à la diversité des impôts et taxes en vigueur (7), la présentation retenue depuis le projet de loi de finances pour 2009 apparaît plus claire. Elle comporte en particulier des tableaux de synthèse et des classifications par sous-secteurs.

Le tableau présenté page suivante récapitule ces impositions affectées. La classification ici retenue diffère en certains points de celle figurant dans la présentation du Gouvernement (8), mais le total est concordant avec cette dernière.

RÉCAPITULATION DES IMPOSITIONS AFFECTÉES AUX ÉTABLISSEMENTS PUBLICS
ET À DIVERS ORGANISMES

(en millions d’euros)

 

2008

2009

2010

1. Secteur social

 

 

 

Contribution sociale généralisée

82 253

79 368

79 842

Contribution remboursement de la dette sociale

6 026

5 842

5 883

Droits de consommation sur les tabacs (a)

8 342

5 780

5 946

Contribution sociale de solidarité sur les sociétés

5 235

5 419

5 311

Prélèvement 2 % patrimoine et placements

2 863

2 225

2 258

Compensation allégements généraux (b)

22 750

22 653

23 327

Compensation exonérations heures supplémentaires (c)

3 167

2 951

2 896

Autres

4 692

10 291

10 055

Total secteur social

135 328

134 529

135 518

2. Emploi et formation professionnelle

 

 

 

Taxe d’apprentissage

1 354

1 362

1 366

Financements du congé individuel formation

915

939

951

Participation formation continue

3 180

3 410

3 525

Contribution de solidarité travailleurs privés d’emploi

1 264

1 272

1 282

Contribution 1,1 % patrimoine et placements (RSA)

 

1 136

1 181

Autres

4 135

4 206

4 271

Total formation

10 848

12 325

12 576

3. Organismes consulaires

1 689

1 738

1 755

4. Équipement, logement, transports

 

 

 

Versement transport Paris – Île-de-France

2 971

2 986

2 990

Versement transport province

2 787

2 750

2 750

Cotisations logement des employeurs

2 424

2 527

2 468

Participation à l’effort de construction

1 421

1 434

1 401

Autres

3 508

3 539

3 595

Total équipement, logement, transports

13 111

13 236

13 204

5. Secteur agricole

335

316

236

6. Industrie, recherche, commerce et artisanat

1 459

1 349

1 431

7. Collectivités territoriales

 

 

 

DMTO et taxes additionnelles

9 805

6 895

6 784

TIPP départements

5 141

5 587

5 626

TIPP régions

3 539

3 632

3 657

Taxe conventions d'assurance

3 087

3 122

3 099

Cartes grises

1 967

1 938

1 967

Taxe électricité

1 239

1 281

1 327

Taxe enlèvement des ordures ménagères

5 145

5 591

5 926

Autres

3 210

3 048

3 052

Total collectivités territoriales

33 133

31 094

31 438

8. Divers

 

 

 

Redevances agences de l’eau

1 852

1 913

2 025

Centre national du cinéma et de l’image animée

539

548

582

Autres

1 009

1 293

1 351

Total divers

3 400

3 754

3 958

TOTAL hors collectivités territoriales

166 170

167 247

168 678

TOTAL GÉNÉRAL

199 303

198 341

200 116

(a) Hors fraction affectée à la compensation des allégements généraux de cotisations sociales et à la compensation des exonérations sur les heures supplémentaires (compte tenu des mesures qui seront proposées dans le prochain projet de loi de finances rectificative pour 2009 et dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2010).

(b) Y compris une fraction de droits sur les tabacs.

(c) Y compris une fraction de droits sur les tabacs.

Source : Tome I de l’annexe des voies et moyens jointe au présent projet de loi de finances.

De manière très inhabituelle, le produit global des impositions affectées diminue en 2009 par rapport à l’année précédente (– 962 millions d’euros). Il faut naturellement y voir les effets de la crise, tout spécialement sur les contributions finançant la sécurité sociale (le produit de la CSG diminue de 2,9 milliards d’euros) et sur les droits de mutation à titre onéreux affectés aux départements (dont le produit passe de 9,8 milliards d’euros en 2008 à 6,9 milliards d’euros en 2009). Cette évolution à la baisse est partiellement compensée, à hauteur de 1,1 milliard d’euros, par la mise en place en 2009 de la contribution additionnelle de 1,1 % sur les revenus du patrimoine et les produits de placements, affectée au Fonds national des solidarités actives (9).

En sens inverse, le – timide – retour de la croissance économique attendu pour 2010 entraînerait un redressement de 1,8 milliard d’euros du produit total des impôts et taxes affectés, qui dépasserait 200 milliards d’euros l’année prochaine.

Les impositions affectées au secteur social atteindraient 135,5 milliards d’euros l’année prochaine. Elles seraient notamment marquées par une progression modérée de la CSG (+ 474 millions d’euros) et par le dynamisme du « panier » de recettes affectées à la compensation des allégements généraux de charges sociales, qui augmenterait de près de 700 millions d’euros pour atteindre 23,3 milliards d’euros. Par ailleurs, le niveau très substantiel atteint par la ligne « Autres » dans le tableau ci-avant (plus de 10 milliards d’euros) s’explique principalement par les affectations au régime des non-salariés agricoles des produits de la taxe sur les véhicules de société et des droits sur les alcools (10).

Les évolutions affectant les autres secteurs sont moins marquées. À 12,6 milliards d’euros, les impositions affectées au secteur de l’emploi et de la formation professionnelle progresseraient modérément (+ 2 %). Il en irait de même des impositions affectées aux collectivités territoriales, qui s’établiraient à 31,4 milliards d’euros en 2010, après 31,1 milliards d’euros en 2009.

Enfin, après la suppression le 31 décembre 2008 du compte d’affectation spéciale Cinéma, audiovisuel et expression radiophonique locale, il convient de signaler l’accroissement du produit des taxes affectées au secteur culturel, qui passerait de 669 millions d’euros en 2009 à 715 millions d’euros en 2010, principalement au bénéfice du Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC) (11).

Dernière conséquence de la LOLF (II de l’article 17) en matière de recettes, le tome I de l’annexe des voies et moyens présente, depuis le projet de loi de finances pour 2006, une évaluation des fonds de concours par mission et programme (information également disponible dans chaque PAP). Avant 2006, seule l’annexe « jaune » intitulée « État récapitulatif des crédits de fonds de concours » fournissait au Parlement une information sur le montant prévisionnel des fonds de concours. Depuis 2006, leur montant global apparaît également à l’état A et dans le tableau d’équilibre (article 34 du présent projet).

Entre 2009 et 2010, les ouvertures par voie de fonds de concours seraient en diminution de 3 % en matière d’autorisations d’engagement (– 109 millions d’euros) et de 6 % en matière de crédits de paiement (– 195 millions d’euros). Cette baisse touche principalement la mission Écologie, développement et aménagement durables (– 104 millions d’euros d’AE et – 261 millions d’euros de CP), en raison notamment de moindres fonds de concours apportés par l’Agence de financement des infrastructures de France (AFITF). Le Rapporteur général rappelle qu’à elle seule cette mission représente plus de 60 % de l’ensemble des fonds de concours du budget général.

Le tableau présenté page suivante récapitule, par mission, les ouvertures de fonds concours prévues pour 2010.

ÉVALUATION DES FONDS DE CONCOURS PAR MISSION POUR 2010

(en milliers d’euros)

 

AE

CP

Action extérieure de l'État

8 548

8 548

Administration générale et territoriale de l'État

60 480

60 479

Agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales

53 673

51 573

Aide publique au développement

1 735

1 735

Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation

332

332

Conseil et contrôle de l'État

1 815

1 815

Culture

13 955

53 268

Défense

633 916

633 916

Direction de l’action du Gouvernement

4 106

4 106

Écologie, développement et aménagement durables

1 897 405

1 943 540

Économie

17 284

17 284

Engagements financiers de l'État

Enseignement scolaire

11 520

11 520

Gestion des finances publiques et des ressources humaines

15 220

15 220

Immigration, asile et intégration

32 112

32 112

Justice

4 200

4 200

Médias

Outre-mer

16 771

16 771

Plan de relance de l’économie

Politique des territoires

22 240

49 240

Pouvoirs publics

Provisions

Recherche et enseignement supérieur

64 794

64 794

Régimes sociaux et de retraite

Relations avec les collectivités territoriales

115

115

Remboursements et dégrèvements

Santé

2 500

2 500

Sécurité

44 307

44 307

Sécurité civile

6 633

6 633

Solidarité, insertion et égalité des chances

1 490

1 490

Sport, jeunesse et vie associative

18 900

19 790

Travail et emploi

76 094

76 094

Ville et logement

130

130

Total

3 010 276

3 121 514

Source : Tome I de l’annexe des voies et moyens jointe au présent projet de loi de finances.

II.– LA DATE D’APPLICATION DES DISPOSITIONS FISCALES CONTENUES
DANS LE PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 2010

Le II du présent article prévoit, dans les termes usuels, les conditions d’entrée en vigueur des dispositions fiscales de la loi de finances qui ne comportent pas de date d’application particulière. La règle générale reste l’application des dispositions fiscales à compter du 1er janvier 2010 (alinéa 3). Deux exceptions traditionnelles sont prévues : pour l’impôt sur le revenu, la loi de finances s’applique à l’impôt dû au titre de 2009 et des années suivantes ; l’impôt sur les sociétés est dû sur les résultats des exercices clos à compter du 31 décembre 2009 (une mention particulière est nécessaire, en raison à la fois des différences de date de clôture de l’exercice d’une entreprise à l’autre et du mode de recouvrement par acomptes et soldes de cet impôt direct).

*

* *

M. le président Didier Migaud. L’article 1er ne fait l’objet d’aucun amendement.

En raison de la réforme constitutionnelle, un rapport nouveau nous a été remis, procédant à une évaluation préalable des articles du projet de loi de finances. Force est de constater qu’il lui reste des marges de progression considérables avant qu’il n’atteigne toute la pertinence souhaitable.

M. Charles de Courson. Tout l’intérêt de cet article traditionnel réside dans son exposé des motifs. À cet égard, je félicite le Gouvernement d’avoir enfin intégré dans le projet de loi de finances l’objectif du coût des dépenses fiscales. Or il continue de croître, même hors plan de relance. Le rythme de progression n’est plus que de 1,5 milliard par an, contre 5 milliards auparavant. Il y a donc un progrès. Mais le groupe Nouveau Centre a déposé un amendement dit « coup de rabot » pour autoriser le Gouvernement à réduire les dépenses fiscales, générées par les 469 niches fiscales, de 3,5 milliards par voie d’ordonnance. Pourquoi une telle méthode ? Parce que, depuis seize ans que je siège dans cette commission, nos efforts se sont presque toujours heurtés à la mobilisation de tous ceux qui avaient intérêt au maintien des niches. Je m’étonne, monsieur le président, que le Gouvernement défende une augmentation de 2 % de la dépense fiscale alors qu’il essaie de limiter la hausse des dépenses budgétaires.

Pourquoi cet amendement, à l’objectif somme toute modeste, a-t-il été déplacé après l’article 9 ?

M. le président Didier Migaud. Ce qui compte dans un article, c’est son texte, pas son exposé des motifs. Pour une meilleure cohérence de la discussion, l’amendement que vous évoquez a été déplacé après l’article 9. S’il est adopté, il aura bien évidemment des effets sur l’article 1er, mais ce dernier n’est qu’un article d’autorisation.

M. Charles de Courson. Seules 360 niches fiscales environ, sur les 469 existantes, ne concernent que l’impôt sur le revenu. D’autres affectent la TIPP, la TVA, entre autres.

M. Jérôme Cahuzac. Vous avez raison, monsieur le président : c’est le contenu du texte du projet de loi qui compte. Pour autant, le Gouvernement a décidé, dans l’exposé des motifs de l’article 1er, de tracer l’évolution de la dépense fiscale. Or, si je suis d’accord avec notre collègue Charles de Courson pour juger nécessaire une limitation de cette dépense, je le suis moins s’agissant de la méthode choisie. Plutôt que de passer par une ordonnance ou d’examiner chaque niche une à une, je suggère un moyen beaucoup plus simple : revenir sur une dépense fiscale adoptée cette année et dont on sait d’ores et déjà qu’elle est un échec, la réduction de la TVA dans le secteur de la restauration.

Une telle décision aurait trois avantages. Tout d’abord, elle permettrait de maîtriser l’évolution de notre dépense fiscale. Ensuite, elle permettrait de mettre un terme à une mesure dont les effets ont été objectivement très décevants – pour ne pas dire nuls – puisque la profession n’a respecté ses engagements ni en matière de baisse des prix, ni en matière d’embauches. Enfin, pour obtenir le droit de prendre cette mesure, notre pays s’était engagé auprès de l’Union européenne à ne pas demander de baisse de TVA pour des produits écologiquement compatibles. En renonçant à la baisse de TVA sur la restauration, nous pourrions donc retrouver des marges de manœuvre.

M. Hervé Mariton. Je m’interroge sur la mise en œuvre de certains engagements pris par le Gouvernement. Ainsi, il nous avait assurés, au moment où a été votée la création du prélèvement destiné à financer le RSA, que le montant de ce prélèvement serait atténué par l’effet du plafonnement des niches fiscales. Par ailleurs, alors que la Commission des finances avait voté l’an dernier, en loi de finances, un amendement de familialisation du bonus/malus, ce dispositif n’est toujours pas mis en œuvre. Il serait important d’avoir une réponse sur ces deux points, car ce qui est ici en jeu, c’est la perception que les contribuables ont de l’impôt.

M. Charles de Courson. Je ne comprends pas le tableau de la page 37 présentant les mesures proposées par le Gouvernement dans le projet de loi de finances pour 2010. Il est indiqué : « impact de la suppression de la TP : moins 0,8 ». Comment cette mesure pourrait-elle entraîner une économie ? Elle a au contraire un coût !

M. le rapporteur général. Avec la réforme de la taxe professionnelle, l’ensemble des dégrèvements que l’État prenait en charge sont supprimés. Le chiffre que vous citez correspond sans doute au solde des différents mouvements sur les dégrèvements.

M. Charles de Courson. Mais ce tableau ne prend pas en compte l’article 2.

M. le rapporteur général. Certaines dispositions de la réforme de la taxe professionnelle ont un impact sur les dépenses, d’autres sur les recettes, c’est-à-dire sur le volet proprement fiscal. Ce solde de 800 millions concerne les recettes et est lié aux dégrèvements.

M. Henri Emmanuelli. Tout cela n’est guère convaincant !

M. le président Didier Migaud. Nous serons en mesure de vous apporter plus de précisions cet après-midi.

La Commission adopte l’article 1er sans modification.

Article 2

Suppression de la taxe professionnelle

Cet article est commenté dans le volume 2 du tome 2 du présent rapport, consacré à la réforme de la taxe professionnelle.

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Article 3

Financement des chambres de commerce et d’industrie

Cet article est commenté dans le volume 2 du tome 2 du présent rapport, consacré à la réforme de la taxe professionnelle.

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Article 4

Prorogation pour les dépenses engagées en 2009 de la restitution immédiate et accélérée des créances de crédit d’impôt recherche pour les entreprises

Le présent article a pour objet de proroger, pour les dépenses engagées en 2009, le remboursement immédiat de la créance de crédit d’impôt recherche mis en œuvre, dans le cadre du plan de relance, par l’article 95 de la loi de finances rectificative pour 2008.

I.– L’ARTICLE 95 DE LA LOI DE FINANCES POUR 2009 A PERMIS UN REMBOURSEMENT ANTICIPÉ AUX ENTREPRISES DU STOCK DE CRÉANCES DE CRÉDIT D’IMPÔT RECHERCHE

A.– LE REMBOURSEMENT DES CRÉANCES DE CRÉDIT
D’IMPÔT RECHERCHE

En application de l’article 199 ter B du code général des impôts, le crédit d’impôt recherche est imputé sur l’impôt dû au titre de l’année au cours de laquelle les dépenses de recherche ont été exposées. Si le montant du crédit d’impôt excède le montant de l’impôt dû, l’excédent constitue, au profit de l’entreprise, une créance sur l’État. Celle-ci peut être utilisée pour le paiement de l’impôt dû au titre des trois années suivantes puis, s’il y a lieu, la fraction non utilisée est remboursée.

Toutefois, par exception, peuvent demander le remboursement immédiat de leurs créances de crédit d’impôt recherche :

– les entreprises nouvelles répondant aux critères de l’article 44 sexies du même code ainsi qu’à celles des a, b et c de l’article 199 ter B précité ;

– les entreprises en difficulté ayant fait l’objet d’une procédure de sauvegarde, d’un redressement ou d’une liquidation judiciaire ;

– les petites et moyennes entreprises de croissance satisfaisant aux conditions de l’article 220 decies du même code ;

– les jeunes entreprises innovantes satisfaisant aux conditions de
l’article 44 sexies-0 A du même code.

B.– L’ARTICLE 95 DE LA LOI DE FINANCES RECTIFICATIVE POUR 2008

Dans le cadre du plan de relance annoncé par le Président de la République, l’article 95 de la loi de finances rectificative pour 2008 a permis un remboursement anticipé du stock de créances de crédit d’impôt recherche de toutes les entreprises afin d’améliorer leur trésorerie durement éprouvée par la crise financière.

Ont donc été remboursées par anticipation, à compter du 1er janvier 2009, les créances de crédit d’impôt recherche « calculées au titre des années 2005, 2006 et 2007 et non encore utilisées » mais également, sur demande des entreprises, celles calculées au titre de l’année 2008 (12). Au 31 juillet 2009, 3,73 milliards d’euros avaient été remboursés à 11 782 entreprises, dont 1,13 milliard d’euros à 10 505 PME, s’ajoutant aux 2 milliards d’euros du crédit d’impôt recherche lui-même au titre de l’année 2009, soit un coût global d’environ 5,8 milliards d’euros en 2009.

II.– LE PRÉSENT ARTICLE PROROGE EN 2010 LE REMBOURSEMENT IMMÉDIAT AUX ENTREPRISES DE LEURS CRÉANCES
DE CRÉDIT D’IMPÔT RECHERCHE

Alors que le pire de la crise économique semble être derrière nous et que la reprise s’amorce doucement, le profil de trésorerie des entreprises est encore loin d’être optimal et s’il s’est amélioré en 2009, c’est notamment en raison de l’ensemble des mesures de trésorerie décidées dans la loi de finances rectificative pour 2008 (remboursement immédiat des créances de crédit d’impôt recherche, remboursement des créances de carry-back et du solde de l’impôt sur les sociétés).

Outre une remise en ordre rédactionnelle de l’article 199 ter B du code général des impôts (alinéas 1 à 4), les alinéas 5, 6 et 7 du présent article disposent, comme l’article 95 de la loi de finances rectificative pour 2008 s’agissant des crédits d’impôts recherche calculés au titre de 2008, que l’ensemble des entreprises pourra obtenir, sur demande, le remboursement immédiat de la différence positive entre :

– d’une part, le montant du crédit d’impôt recherche calculé à raison des dépenses de recherches engagées au titre de l’année 2009 ;

– et, d’autre part, le montant de l’impôt (sur les sociétés ou sur le revenu) dû au titre de 2009.

Par conséquent, comme en 2009, les entreprises ayant engagé des dépenses de recherche en 2009 devront, au début de l’année 2010, estimer à la fois le montant de leur crédit d’impôt recherche et celui de leur impôt et, si le premier excède le second, en demander le remboursement immédiat à l’administration fiscale.

Les modalités de remboursement immédiat des créances de crédit d’impôt recherche seront les mêmes que celles exposées dans l’instruction fiscale 4 A-1-09 du 9 janvier 2009 (§ 10 et suivants)

Comme l’article 95 de la loi de finances rectificative précité, le présent article veille à ce que les entreprises n’abusent pas de cette possibilité de remboursement immédiat afin de diminuer indûment leur impôt. Ainsi, si le montant du remboursement excède de plus de 20 % la différence positive entre, d’une part, le montant du crédit d’impôt recherche au titre de l’année 2009 et, d’autre part, le montant de l’impôt dû au titre de cette même année, cet excédent fera l’objet, en application des alinéas 10 à 12 du présent article :

– d’une majoration de 5 à 10 % selon qu’il s’agit de l’impôt sur les sociétés ou de l’impôt sur le revenu ;

– d’une application de l’intérêt de retard de 0,4 % par mois.

Enfin, dans l’hypothèse où le montant du remboursement excéderait le montant du crédit d’impôt « réel », le montant de l’impôt dû au titre de l’année 2009 serait majoré de cet excédent (alinéa 9(13).

La prorogation de la mesure de remboursement anticipée des créances de crédit d’impôt recherche aura un coût (en trésorerie) estimé à 2,5 milliards d’euros. Le coût global du crédit d’impôt recherche en 2010 est évalué à 4 milliards d’euros.

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La Commission adopte l'article 4 sans modification.

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Après l’article 4 :

La Commission est saisie de l'amendement I-CF 180 de M. Henri Emmanuelli.

M. Henri Emmanuelli. L’amendement est défendu. Il s’agit, chacun l’a compris, d’améliorer les dispositifs consistant à financer par emprunt l’acquisition d’entreprises – LBO ou leveraged buy-out….

M. Charles de Courson. De casser les LBO…

M. le rapporteur général. Mon avis est défavorable. Je suis conscient que la possibilité de déduire de l’impôt sur les sociétés les intérêts des dettes contractées pour acheter une affaire est une singularité française. Ce dispositif devra être revu dans le cadre d’une remise à plat de l’impôt sur les sociétés. Le taux de celui-ci devrait être plus faible et son assiette plus large.

La rédaction de l’amendement a l’inconvénient, pour les LBO en cours, de les achever alors qu’ils sont déjà en difficulté, et de s’appliquer à des entreprises qui ne sont pas en LBO. Par exemple, France Télécom a procédé à l’émission d’emprunts obligataires alors que ses capitaux propres représentaient alors moins du tiers de ses fonds permanents. Cette société se verrait donc interdire de déduire les intérêts de sa dette, qui chargeaient pourtant son compte d’exploitation. Cet amendement, que nous avons déjà examiné l’an dernier, vise donc trop large.

M. Henri Emmanuelli. Alors que le mécanisme avait été conçu pour permettre le rachat des entreprises par leurs cadres, il est devenu un outil d’optimisation fiscale : des chefs d’entreprise l’utilisent même pour transmettre des entreprises à leurs enfants ! Ils encaissent alors la totalité de la valeur de marché de l’entreprise, qui est payée par l’entreprise elle-même. Il faudra mettre un peu d’ordre.

M. Jérôme Cahuzac. L’exemple de France Télécom ne doit pas nous empêcher de légiférer. Nous avons tous des exemples d’entreprises « essorées » par des LBO et contraintes de licencier après avoir perdu de considérables parts de marché, faute d’avoir pu consacrer leurs bénéfices à investir, ceux-ci servant à rembourser l’emprunt contracté pour les racheter.

Renvoyer l’arrêt de ces nuisances économiques, industrielles et sociales à une mise à plat complète de l’impôt sur les sociétés est s’exposer à voir ce type de pratiques perdurer. Nous le savons, personne au sein de notre Commission ne le souhaite.

M. Jérôme Chartier. Nous devrons cependant passer par une réforme de l’impôt sur les sociétés. L’affaire ne concerne pas seulement les LBO, mais de façon générale tous les rachats de sociétés : quel que soit le mode de rachat, les entreprises sont très souvent essorées… Il faut reconsidérer les frais de siège, les dépenses qui contournent la remontée des bénéfices. Aujourd’hui, très peu de LBO sont organisés. Se focaliser sur eux amène à oublier l’essentiel.

M. Michel Bouvard. Cette question se pose depuis plusieurs années. La Commission a commencé à s’en préoccuper à la fin de la législature précédente. Il faut arriver à encadrer des détournements réalisés à de pures fins d’optimisation fiscale, sans le moindre intérêt économique. Il serait préférable de travailler à un dispositif de ce genre plutôt que de repousser chaque année l’amendement d’Henri Emmanuelli.

M. le Président. Nous vous ferons une proposition en ce sens, M. le rapporteur général et moi.

La Commission rejette l'amendement I-CF 180.

Elle examine ensuite un amendement I-CF 256 de M. Nicolas Forissier.

M. Nicolas Forissier. La question des fonds propres et quasi-fonds propres des petites et très petites entreprises dans notre pays est un sujet majeur. Cet amendement est aussi la suite logique du rapport de la mission d’information sur le financement en fonds propres des PME, dont j’étais le rapporteur et qui était présidée par François de Rugy. Charles de Courson mène une réflexion analogue.

L’amendement propose pour les entreprises individuelles la constitution d’une réserve spéciale d’autofinancement – la RSA – permettant, dans la limite d’un plafond de 10 000 euros, de fiscaliser au taux de 15 % les bénéfices réintroduits sous la forme de fonds propres dans l’entreprise individuelle. Un dispositif comparable existe déjà en faveur des PME à l’IS ; le plafond est de 38 120 euros. Il s’agit par cet amendement de faire bénéficier du même type de dispositions les entrepreneurs individuels, les artisans. Aujourd’hui, les bénéfices que ceux-ci réintroduisent dans leur affaire sont fiscalisés dans les mêmes conditions que leurs revenus personnels.

La limite a été fixée à 10 000 euros – l’an dernier, nous avions proposé 5 000 –pour leur permettre des investissements significatifs tout en ne demandant qu’un effort raisonnable à l’État.

M. Charles de Courson. Voilà des années qu’avec plusieurs collègues nous déposons cet amendement. Il faut casser le raisonnement des technocrates de Bercy, qui considèrent que, si les entrepreneurs individuels ne sont pas satisfaits de leur régime fiscal, discriminatoire au regard de celui des société – depuis quinze ans, celui-ci a été considérablement amélioré –, il leur suffit de créer une société. Créer une entreprise sous forme de société implique des contraintes formelles, de tenue d’assemblée générale, de procès-verbaux, etc., qui entraînent des coûts spécifiques.

La réticence des entrepreneurs individuels tient aussi à une raison patrimoniale.

Nous proposons donc une mesure de justice consistant à aligner l’imposition des entrepreneurs individuels sur celle des sociétés, et de taxer au taux forfaitaire de 15 % les bénéfices affectés à une réserve spéciale d’autofinancement, à concurrence de 38 120 euros. En cas de distribution, les sommes supporteront l’impôt sur le revenu, déduction faite des 15 % payés lors de la mise en réserve.

On nous objecte le coût de la mesure, mais l’évaluation ne tient pas. En réalité, il serait de 1,8 milliard. D’ailleurs, notre collègue Forissier ne propose pas un alignement puisqu’il fixe le plafond à 10 000 euros. Je propose un sous-amendement pour le rabaisser à 5 000 euros, de sorte que la mesure coûterait entre 200 et 400 millions. Elle est conforme à l’objectif de compétitivité des entreprises. Et, si 5 000 euros, c’est encore trop, alors descendons à 3 000 euros ! L’important, c’est d’amorcer, quitte à ce que le rattrapage prenne dix ans.

Hervé Novelli a fait du très bon travail en faveur des petites et très petites entreprises en obtenant d’en finir avec le concept d’unicité du patrimoine sur lequel s’arc-boutait le ministère de la justice par pure idéologie.

M. le rapporteur général. Le problème posé par cet amendement, que nous examinons chaque année, tient à son coût. Vous n’avez parlé que de l’aspect fiscal. Or la réserve spéciale d’autofinancement est également exonérée de cotisations sociales si bien que le rapport du Gouvernement a conclu qu’avec un plafonnement à 38 120 euros, le manque à gagner serait de 3,7 milliards en année pleine, dont 500 millions à titre fiscal. Avec un plafond de 5 000 euros, il en coûterait encore 2,4 milliards, dont 200 millions à titre fiscal. Au moment où nous nageons dans une mer de déficits sociaux notamment, ce n’est pas opportun.

M. Jérôme Cahuzac. Cet amendement va plutôt dans le bon sens, même si l’objection du rapporteur général est fondée. Peut-être pourrait-on donner suite à cette proposition, avec un gage crédible, comme la hausse de l’impôt sur les sociétés ?

M. Henri Emmanuelli. Il suffirait de repasser au taux normal de TVA dans la restauration !

M. Charles de Courson. Je suis très sensible à l’argument du rapporteur général et je propose de limiter la mesure à son aspect fiscal en retenant la proposition d’abaisser le plafond à 5 000 euros.

M. Nicolas Forissier. On peut réfléchir à une modulation des taux d’IS pour les petites entreprises, mais l’objectif n’est pas tant de leur donner un avantage fiscal que de leur permettre de renforcer leurs fonds propres, donc de développer leur outil de production en générant au passage des recettes fiscales, ne serait-ce que par le biais de la TVA. Bercy l’oublie sans doute dans son évaluation. Je suis en tout cas disposé à limiter l’impact à l’aspect fiscal, en minorant le plafond à 5 000 euros.

Après avis défavorable du rapporteur général, la Commission rejette le sous-amendement de M. de Courson, puis l’amendement de M. Forissier.

Elle examine ensuite l’amendement I-CF 252 de M. Nicolas Forissier.

M. Nicolas Forissier. Cet amendement tend à préciser l’article 30 de la loi de modernisation de l’économie qui a introduit dans notre droit la société de capitaux transparente fiscalement (SCT) permettant à des investisseurs dans des entreprises nouvelles de déduire, au cours des trois premières années, les pertes éventuelles à hauteur de leur apport. Il s’agit de favoriser ainsi les investisseurs providentiels et les investissements dans les petites entreprises.

Cette disposition n’est cependant appliquée que très partiellement dans la mesure où la direction de la législation fiscale applique la « tunnélisation » en vertu de laquelle ne sont déductibles d’un bénéfice que des pertes de même nature. L’amendement propose donc qu’une personne physique qui investirait plus de 100 000 euros dans ce type de société soit considérée comme un investisseur professionnel, ce qui rendrait ipso facto les pertes déductibles de ses revenus. En l’état, la loi n’est pas suffisamment précise et laisse prise à l’interprétation de la direction de la législation fiscale (DLF).

M. le rapporteur général. Avis défavorable. Voilà vingt ans que nous nous efforçons, toutes majorités confondues, de limiter l’imputation de déficits non professionnels sur les autres revenus, notamment professionnels – 100 000 euros, ce n’est pas rien. Le principe de « tunnélisation » remonte, lui, à 1996 et, à cet égard, cet amendement constituerait une régression, sans compter ses effets sur le bouclier fiscal. En effet, les revenus figurant au dénominateur seraient minorés alors que, là encore, nous entendons privilégier les réductions d’impôt par rapport aux mesures d’assiette. Je vois bien les avantages qu’il y a à développer l’activité des business angels, mais nous devons aussi préserver l’équilibre général de notre droit fiscal. L’amendement irait à l’encontre de ce que nous essayons de faire depuis quinze ans.

M. Nicolas Forissier. La finalité, c’est bien l’investissement dans les petites entreprises qui démarrent et qui ont besoin de fonds propres. Si nous n’apportons pas de réponses, notre tissu de PME continuera de vieillir et de souffrir de sous-capitalisation, au détriment de l’investissement et de l’exportation. Je demande seulement que la loi soit clarifiée, tout en restreignant son application aux gros investisseurs providentiels qui, aujourd'hui, ne sont pas incités à investir dans les secteurs créateurs d’emploi car ils prennent des risques juridiques.

M. le rapporteur général. Ces dernières années, nous avons systématiquement agi par le biais de réductions d’impôt, et cet amendement va en sens inverse. Je ne suis pas hostile à une aide, mais pas de cette façon.

M. Nicolas Forissier. Si l’article 30 de la LME, voté il y a un an et demi, est en totale contradiction avec la politique suivie, il faut donc voter cet amendement, ne serait-ce que pour obliger le Gouvernement à préciser les choses !

M. le rapporteur général. Il n’y aurait que des avantages à redéposer cet amendement en séance, en présence de Mme Lagarde, qui a défendu la LME, et de M. Woerth. Si l’article 30 de la LME avait dérogé au principe de « tunnélisation », cela se saurait.

M. Nicolas Forissier. Selon l’exposé des motifs du projet LME, « les associés pourront ainsi imputer d’éventuels déficits immédiatement, sans attendre que la société devienne bénéficiaire ». Je retire mon amendement, mais je le redéposerai pour obliger le Gouvernement à prendre position.

L’amendement I-CF 252 est retiré.

La Commission est ensuite saisie de l’amendement I-CF 253 de M. Nicolas Forissier.

M. Nicolas Forissier. Cet amendement a pour objet de permettre à une entreprise innovante ou exportatrice, dans le cadre d’une contractualisation avec l’État de trois ans, de bénéficier du taux d’IS à 19 % sur la partie de ses bénéfices affectés en fonds propres. La cible, ce sont une nouvelle fois les PME au sens communautaire du terme.

M. le rapporteur général. Nous avons mis en place le crédit impôt recherche qui représente 5,8 milliards cette année et 4 milliards en 2010. Nous l’avons rendu le plus accessible possible aux PME et nous ne pouvons pas multiplier les instruments. L’effort qui est fait en direction des entreprises est déjà gigantesque.

M. Nicolas Forissier. Je retire cet amendement car je suis conscient de son coût, mais sans être persuadé que nous fassions suffisamment d’efforts pour les fonds propres des entreprises.

L’amendement I-CF 253 est retiré.

La Commission examine ensuite l’amendement I-CF 207 de M. Jérôme Cahuzac.

M. Jérôme Cahuzac. En ces temps de disette budgétaire, nous estimons qu’il faut marquer une pause en suspendant la suppression de l’IFA prévue sur trois ans. Le rapporteur général a raison de qualifier l’effort en faveur des entreprises de « gigantesque » puisque le Conseil des prélèvements obligatoires l’évalue, avant même la réforme de la taxe professionnelle, à 10 milliards. Il remarque également que ce sont les ménages qui, bon an, mal an, compensent le manque à gagner budgétaire. Loin de nous l’idée de condamner par principe les dispositions favorables aux entreprises, mais avec un déficit annoncé de 117 milliards d’euros, il est temps de mettre un terme à la dérive des comptes publics au risque, sinon, qu’elle devienne incontrôlable.

Après l’avis défavorable du rapporteur général, la Commission rejette l’amendement.

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Article additionnel après l’article 4

Instauration d’une taxe additionnelle sur les bénéfices des établissements de crédit

La Commission examine ensuite à l’amendement I-CF 25 de M. Didier Migaud.

M. le président Didier Migaud. Cet amendement propose d’établir une taxe additionnelle à l’impôt sur les sociétés en visant les établissements de crédit qui ont bénéficié du soutien public quand il était nécessaire. Devant leur rétablissement, grâce notamment à l’État, il semble légitime de leur demander un certain retour. Certains pays, y compris libéraux, ont d’ailleurs décidé un tel prélèvement exceptionnel.

M. le rapporteur général. Je suppose qu’il s’agirait d’une taxe exceptionnelle, instaurée pour la seule année 2010.

M. le président Didier Migaud. Un sous-amendement peut être proposé dans ce sens.

M. le rapporteur général. Je ne serai pour autant pas très favorable à l’amendement car il existe déjà une contrepartie à la garantie que l’État a apportée aux banques, puisque les financements de la SFEF – la société de financement de l’économie française – ont fait l’objet d’une rémunération à hauteur de 8 %, laquelle a apporté, en 2009, 1,3 milliard d’euros au budget de l’État. Il est vrai que cette opération a également coûté à ce dernier et que la contribution nette des banques au titre du financement par la SFEF est plutôt de l’ordre de 600 à 700 millions d’euros.

M. Jean-Pierre Brard. J’approuve cette proposition de contribution, que l’on peut tout à fait qualifier d’exceptionnelle – de toute façon, l’amendement ne s’appliquera que pour 2010.

Le raisonnement de Gilles Carrez n’est pas inexact, mais celui-ci pêche par omission. Qui nous a mis dans le pétrin, si ce n’est les banques – pas seulement les banques françaises, il est vrai ? Voyez aujourd’hui la valorisation boursière de la Société générale ou de la BNP ! Il ne serait que justice que la communauté nationale bénéficie en retour d’une part de cette valeur.

L’opinion publique, très sensible à ces questions, a parfaitement compris que les banquiers étaient en train de reconstituer très rapidement leurs marges, alors que dans le même temps, l’économie continue de plonger. Le plan gouvernemental a certes empêché l’effondrement du système bancaire, ce qui était sans aucun doute nécessaire, mais aucun levier n’a été prévu en faveur du développement économique. Nos concitoyens sont tout à fait conscients de la différence entre, d’un côté, la reconstitution des marges bancaires – à cet égard, les bonus sont l’arbre qui cache la forêt – et, de l’autre, la situation de plus en plus difficile dans laquelle ils se trouvent.

M. François Goulard. Comme l’a rappelé le rapporteur général, les établissements financiers qui ont bénéficié des concours de l’État ont payé pour cela, et ils ont même payé cher. La disposition proposée, c’est un peu comme si un hôpital taxait les malades qui ressortent guéris. S’ils sont guéris, tant mieux !

Mme Chantal Brunel. Je voterai en faveur de l’amendement à condition de préciser que la taxe additionnelle est établie pour la seule année 2010. Les contribuables ont en effet beaucoup aidé les banques, ce qui leur a permis en retour de faire des bénéfices. Elles ont même trouvé assez d’argent pour distribuer des bonus. Dans un tel contexte, je trouve légitime qu’elles apportent une contribution exceptionnelle sous la forme d’une augmentation de l’impôt sur les sociétés dû au titre de l’année 2009.

M. le président Didier Migaud. J’accepte la rectification proposée : après les mots « impôt sur les sociétés », sont ajoutés les mots « pour l’année 2010 ».

M. Henri Emmanuelli. Ceux qui réclament une limitation des bonus ont l’air de penser qu’ils bénéficieraient de l’économie ainsi réalisée, mais une telle limitation ne ferait que gonfler les bénéfices de la banque – ce dont les actionnaires ne peuvent que se réjouir.

Vous dites, monsieur le rapporteur général, que la garantie apportée aux banques a rapporté de l’argent sous forme d’intérêts. Qu’en serait-il si l’État avait pris une part de leur capital, comme nous l’avions réclamé ? La semaine dernière, la BNP a émis des titres d’une valeur de 40 euros pour rembourser l’État. Ce dernier n’aurait dû en débourser que 27 euros pour acquérir des actions en 2008. Songez aux plus-values ainsi réalisées !

M. François Goulard. Vous voulez que l’État devienne boursicoteur ?

M. Henri Emmanuelli. Il ne s’agit pas de cela, mais d’une opération classique de soutien. Pourquoi l’État devrait-il limiter la casse en cas de crise tout en laissant aux actionnaires d’éventuelles plus-values ? Il est normal de réclamer une participation, d’autant que les bonus, cette année, s’annoncent particulièrement élevés. Il est temps de placer certaines barrières.

M. Jérôme Cahuzac. Sur décision du Gouvernement, et après accord du Parlement, l’État a décidé en 2008 de soutenir le secteur financier. Bien que, sur le principe, nous estimions cette opération de sauvetage nécessaire, nous nous étions abstenus à l’époque, jugeant préférable que l’État prenne une part de capital par l’intermédiaire de la Société de prises de participation de l’État (SPPE). Les titres super-subordonnés impliquaient en effet que l’État soit le dernier remboursé en cas de faillite, et qu’il ne le soit en tout état de cause remboursé qu’à la valeur à laquelle il était entré, c’est-à-dire 27 euros, sans aucunement profiter du rétablissement de la santé financière des établissements, et donc de la revalorisation de leurs actions. Il était stupéfiant de voir Mme Lagarde condamner par principe, au motif qu’il s’agirait de spéculation, une opération visant en réalité à protéger le patrimoine de l’État et des contribuables. Aujourd’hui, on nous explique que le soutien aux banques a constitué une bonne opération puisque l’État récupère, en montant net, environ 700 millions d’euros. Pourquoi, dans ce cas, avoir renoncé à 10 milliards ? Pourquoi ce qui est bien dans un cas est mal dans l’autre ? Reconnaissez, mes chers collègues, qu’une recette de 10 milliards aurait été bonne à prendre dans un contexte où le déficit budgétaire annoncé atteint 117 milliards d’euros !

À l’époque, nous n’avions pas été entendus, hélas ! Mais aujourd’hui, nous avons la possibilité de nous rattraper. Les établissements financiers vont bien ; ils s’apprêtent d’ailleurs à distribuer des bonus importants. Quand elle a lieu, la diminution de la part variable des rémunérations est largement compensée par l’augmentation considérable de la part fixe. Nous devons par ailleurs nous attendre à d’importants plans de distribution de stock-options. Enfin, bien que taxées, les retraites chapeaux continuent à fleurir. Si nous donnons l’impression que les établissements financiers font appel à l’État lorsqu’ils vont mal sans que ce dernier ne tire profit du rétablissement de leur santé financière, nous risquons de ne pas être compris par nos concitoyens.

M. Pierre-Alain Muet. Il est vrai que, si l’État avait recapitalisé les établissements financiers, il serait aujourd’hui largement remboursé. Mais nous sommes dans un système asymétrique : les banques peuvent prendre tous les risques, car elles savent qu’elles sont trop grosses pour qu’on puisse les laisser faire faillite : l’État est toujours prêt à les sauver, sans rien demander en contrepartie. Si l’État était un assureur, il imposerait un malus après chaque gros sinistre. C’est exactement ce que prévoit l’amendement.

M. Marc Le Fur. Je comprends qu’un tel amendement au caractère pénitentiel puisse séduire. C’est en effet une forme de pénitence qui serait infligée à des entités qui nous ont embarqués dans la crise.

M. le président Didier Migaud. C’est là une analyse de l’amendement qui me paraît un peu excessive !

M. Marc Le Fur. Je l’interprète ainsi. Le problème est que les banques n’ont pas été toutes également fautives. Si l’amendement s’applique à Dexia, cela me convient. Mais s’il concerne également les banques mutualistes, ce sont les sociétaires, c’est-à-dire les clients, qui risquent de payer.

M. le président Didier Migaud. Pas du tout : l’amendement s’applique aux bénéfices des établissements financiers. Il instaure une taxe additionnelle à l’impôt sur les sociétés.

M. Jérôme Chartier. Il convient de se rappeler le contexte dans lequel a été prise la décision de soutenir les banques. À l’époque, la priorité était d’agir rapidement pour que les établissements financiers puissent prêter à nouveau. Or entre participer à une augmentation de capital et garantir un prêt, il y a une différence de délai. Si nous avions opté pour la participation à une augmentation de capital, la procédure aurait été très longue. C’est justement la rapidité et l’efficacité de notre réponse qui a permis au réseau bancaire français de prêter à nouveau. C’est pour cette raison que l’économie française est repartie plus rapidement que les autres. Nous en voyons aujourd’hui les résultats.

Le bénéfice de la garantie d’emprunts, nous allons bientôt l’obtenir : en 2010, le secteur bancaire sera l’un des rares à produire de l’impôt sur les sociétés, tout cela parce que la garantie des prêts à permis au système de crédit de continuer à fonctionner.

Cette somme de 600 à 700 millions d’euros pouvait paraître faible à l’époque où personne ne prêtait, mais aujourd’hui, au vu des taux pratiqués, elle représente une bonne rémunération.

Nous avons donc fait un choix stratégique, celui de la rapidité. Et nous avons eu raison, puisque cela a eu pour effet de sauver le système bancaire, et donc le système de financement de l’économie française. Pourquoi donc, comme l’a dit François Goulard, taxer le malade lorsqu’il est guéri ?

M. le président Didier Migaud. Je ne mets pas du tout en cause le choix de soutenir le système bancaire ni ne conteste la réactivité dont le Gouvernement a fait preuve. Le soutien était nécessaire, mais ce sont ses modalités qui sont discutables.

Lorsque la Suisse a soutenu UBS à hauteur de 5 milliards d’euros, l’État a obtenu 1 milliard d’euros en contrepartie. Et il en est de même en Belgique ou aux États-Unis. Mais en France, le soutien de la BNP pour un même montant a généré 220 millions d’euros d’intérêts. Dans notre pays, le soutien au secteur bancaire et financier a été organisé selon des modalités extrêmement favorables à l’égard des établissements concernés.

M. Henri Emmanuelli. M. Chartier a insisté sur la question des délais. Mais si nous avions prévu la convertibilité des titres, l’État aurait pu agir tout aussi rapidement tout en bénéficiant d’une large plus-value.

M. Marc Goua. Il suffisait de prévoir un taux d’intérêt fixe et une participation variable, indexée sur le produit net bancaire, à l’image de ce qui se pratique pour les prêts participatifs. Nous n’aurions pas perdu plus de temps.

M. Olivier Carré. De même qu’il serait avantageux d’acheter des titres en bourse en connaissant les cours du lendemain, il est facile d’affirmer a posteriori qu’il aurait été plus judicieux d’agir de telle ou telle façon.

Demandons-nous plutôt quels ont été les effets, en termes d’avantages compétitifs, du plan de sauvetage sur les entreprises concernées. Nous savons que certains établissements ont accru leurs parts de marché pendant la crise, ce qui est loin d’être le cas des banques situées dans les pays que vous avez cités, monsieur le président.

L’utilité du plan de sauvetage doit être appréciée à l’échelle du secteur bancaire lui-même, mais plus généralement à celle de l’économie tout entière. L’année dernière, certains de nos collègues ont justement pris conscience de l’importance du secteur bancaire sur le fonctionnement global de l’économie. Or je ne suis pas sûr que l’amendement proposé aille dans le sens d’une amélioration de la compétitivité du secteur.

Mme Chantal Brunel. Contrairement à Marc Le Fur, je ne vois dans cet amendement aucun caractère punitif. Les banques ayant bénéficié de l’aide des contribuables, il s’agit simplement de leur demander, à titre exceptionnel, de consacrer une petite partie de ce bénéfice à la lutte contre les effets de la crise. Contrairement à ce qu’affirment certains de mes collègues, un tel prélèvement n’aurait aucun effet sur la distribution de crédit.

M. Jérôme Cahuzac. Le débat n’est pas de savoir s’il aurait été plus intelligent d’opter pour d’autres modalités de soutien au secteur financier. Des choix ont été effectués, mais le fait est qu’au moment où le déficit budgétaire va atteindre 117 milliards d’euros, les banques renouent non seulement avec les bénéfices, mais aussi avec des pratiques moralement choquantes et économiquement scandaleuses. Elles ont les moyens d’assumer cette contribution au budget de l’État ; il n’est donc pas anormal de la leur demander, dès lors que c’est précisément l’État qui les a sauvées.

M. Michel Bouvard. Je comprends les motifs de cet amendement, dans la mesure où les banques ont bénéficié d’une mobilisation de la puissance publique dans une période où l’on connaissait un manque de liquidités. Mais, en versant des intérêts, elles ont déjà acquitté un financement à l’État, que l’on juge son montant suffisant ou non. L’amendement revient donc à leur réclamer un supplément de manière rétroactive. Ce n’est pas une bonne pratique.

Un précédent existe, il est vrai. Voilà quelques années, j’avais voté sans aucun état d’âme l’instauration d’un supplément d’impôt sur les compagnies pétrolières. Celles-ci avaient en effet réalisé, par le seul jeu de la variation des cours du pétrole, des bénéfices exorbitants par rapport à ceux qu’elles réalisaient en temps normal. Mais la proposition de notre président vise à taxer des établissements ayant obtenu des bénéfices dont le montant n’a en tout état de cause rien d’exorbitant.

On pourrait admettre que soient taxés les bénéfices supplémentaires par rapport à la moyenne constatée sur les deux ou trois exercices précédents. Ainsi serait pris en compte le surplus de résultats obtenu pendant la crise. Mais l’aide de l’État ayant déjà donné lieu à un paiement, l’amendement me semble déroger au principe de non-rétroactivité.

La Commission adopte l’amendement rectifié (amendement n° I – 48).

*

* *

Après l’article 4 :

Après avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette successivement l’amendement I-CF 201 de M. Jean-Pierre Balligand et les amendements I-CF 183 et I-CF 176 de M. Jérôme Cahuzac.

Elle examine ensuite l’amendement I-CF 118 de M. Michel Bouvard.

M. Michel Bouvard. Cet amendement tend à reconduire le dispositif de remboursement des acomptes d’impôt sur les sociétés excédentaires mis en place en 2008.

M. le rapporteur général. Les acomptes de 2009 ont été calculés sur la base des résultats de 2008, année pendant laquelle les bénéfices ont été très mauvais. Je ne vois donc pas l’intérêt de prolonger une mesure qui n’aura de toute façon pas de véritable portée.

L’amendement est retiré.

Article 5

Instauration d’une taxe carbone et d’une taxe sur le transport routier de marchandises

Conformément à l’engagement pris par le Président de la République, le présent article a pour objet d’instituer une taxe carbone sur les consommations des produits énergétiques d’origine fossile.

I.– LA TAXE CARBONE : UNE NOUVELLE ACCISE

Les alinéas 1, 2 et 3 du présent article ont pour objet d’insérer dans le code des douanes un nouvel article 266 quinquies C instituant, au profit du budget de l’État, une taxe carbone sur les produits énergétiques utilisés ou destinés à être utilisés comme carburant ou combustible.

A.– UNE ASSIETTE TRÈS LARGE

1.– Une taxe assise sur l’ensemble des énergies fossiles

L’ensemble des produits énergétiques fossiles actuellement soumis aux taxes intérieures de consommation sur les produits pétroliers (TIPP), le gaz naturel (TICGN) et les charbons (taxe « charbon ») sera soumis à la taxe carbone. En effet, le choix a été fait d’aligner le champ d’application de celle-ci sur celui des accises. Elle s’inscrira donc dans le cadre de taxation des produits énergétiques défini par la directive 2003/96/CE du 27 octobre 2003, ce qui permettra d’assurer, en l’absence d’une directive ad hoc sur la taxation des émissions de CO2, sa conformité avec le droit communautaire. La taxe carbone sera donc assimilée, fiscalement, aux accises dont elle suivra le régime.

Toutefois, contrairement aux taxes intérieures de consommation, un tarif spécifique de taxe carbone ne sera pas fixé pour chaque produit énergétique auquel elle s’appliquera. Dans un souci de simplification, le tableau proposé par l’alinéa 4 ne vise en effet que les grandes catégories de produits énergétiques.

Cependant, reprenant la disposition du 3 de l’article 265 du code des douanes, l’alinéa 5 dispose que « tout produit autre que ceux prévus [au tableau susmentionné] destiné à être utilisé, mis en vente ou utilisé comme carburant pour moteur ou comme additif en vue d'accroître le volume final des carburants pour moteur est assujetti à la taxe carbone au taux applicable au carburant équivalent ou au carburant dans lequel il est incorporé ». Par conséquent, même s’ils ne sont pas visés en tant que tels dans le tableau du nouvel article 266 quinquies C, les produits utilisés comme carburant ou combustible seront néanmoins soumis à la taxe carbone, par « équivalence » au produit dont ils se rapprochent le plus.

L’alinéa 6 du présent article a la même finalité s’agissant des hydrocarbures autres que ceux prévus par le tableau susmentionné et utilisés comme combustible (14).

En pratique cependant, considérant les volumes de consommation respectifs des produits énergétiques soumis à la taxe carbone, celle-ci pèsera essentiellement sur les carburants routiers (essence, gazole et GPL), sur le gaz naturel et sur le fioul domestique.

2.– Le droit communautaire oblige à limiter le champ de la taxe carbone

L’article 1er de la directive n° 2008/118 du 16 décembre 2008 relative au régime général d’accise dispose que « les États membres peuvent, à des fins spécifiques, prélever des taxes indirectes supplémentaires sur les produits soumis à accise ». Cet article fonde la possibilité, pour la France, d’instituer une taxe carbone sur les produits énergétiques, la « fin spécifique » étant la lutte contre les émissions de CO2. Cependant, ces impositions ne sont autorisées « qu’à condition [qu’elles] respectent les règles de taxation communautaires applicables à l'accise » définies par la directive 2003/96/CE du 27 octobre 2003 précitée. Par conséquent, seront exclus du champ d’application de la taxe carbone le transport aérien (15), le transport maritime ainsi qu’un certain nombre d’usages industriels des produits énergétiques.

Le tableau suivant récapitule les secteurs et les usages que le droit communautaire oblige à placer « hors champ » de la taxe carbone :

Les produits énergétiques sont placés « hors champ » de la taxe carbone lorsqu’ils sont utilisés :

Définition

Base légale dans la directive 2003/96/CE du 27 octobre 2003

– comme carburant ou combustible pour la navigation aérienne autre que l'aviation de tourisme

Article 14

– comme carburant ou combustible pour la navigation dans des eaux communautaires, autre qu'à bord de bateaux de plaisance privés

Article 14

– à un double usage

usage comme combustible et pour des usages autres que carburant ou combustible (réduction chimique, électrolyse, procédés métallurgiques…)

Article 2

– dans un procédé de fabrication de produits minéraux non métalliques

usage pour fabriquer du ciment, de la chaux, du plâtre ou encore des céramiques

Article 2

– pour la production de produits énergétiques ou pour la production de tout ou partie de l'énergie nécessaire à leur fabrication (16)

Article 14 et 21

Les articles susmentionnés de la directive ont été transposés dans le droit français s’agissant des taxes intérieures de consommation. En effet, les usages précités sont placés « hors champ » de celles-ci par les articles 265 C, 265 bis et 266 quinquies B du code des douanes. Tant la TIPP que la TICGN et la taxe sur les houilles, les lignites et les cokes ne leur sont donc d’ores et déjà pas applicables. Dès lors, en application des alinéas 10 à 14 du présent article, ces usages ne seront pas soumis à la « taxe carbone » (17).

3.– Le choix d’exclure l’électricité

La question de l’électricité et de l’éventuelle application de la taxe carbone à celle-ci est controversée. D’une part, l’objectif de la taxe carbone, dans sa version contribution climat-énergie, est, au-delà de la réduction des émissions de gaz à effet de serre, de diminuer la consommation d’énergie, quelle qu’elle soit ; mais, d’autre part, dans notre pays, l’électricité est à 77 % d’origine nucléaire (18). Certes, lors des pics de consommation, EDF est obligée d’utiliser ses centrales thermiques ; mais si la taxe carbone était appliquée à ce reliquat d’électricité d’origine fossile (10,4 %), elle aurait un effet quasi-nul sur les prix, sur la consommation  et, donc, sur les émissions.

En outre, comme l’a déclaré le Président de la République le 10 septembre 2009, « la production d’électricité émet en France très peu de CO2, grâce à notre parc nucléaire, grâce à l’énergie hydraulique, grâce à la biomasse mais aussi, bien sûr de plus en plus, grâce aux nouvelles énergies renouvelables ». En effet, une part croissante de l’électricité de notre pays est produite à partir des énergies renouvelables (éolien et photovoltaïque notamment) qui n’émet pas de dioxyde de carbone. Dès lors, appliquer la taxe carbone à cette production d’électricité serait incohérent et contradictoire avec la politique actuellement menée en faveur des énergies renouvelables et des véhicules électriques.

Enfin, la contribution de l’électricité et d’une entreprise en particulier - EDF – à la lutte contre les émissions de CO2 est loin d’être négligeable :

● Une part substantielle de la contribution au service public de l’électricité (CSPE) est affectée au rachat, par les producteurs d’électricité, de l’électricité produite à partir d’énergies renouvelables (photovoltaïque, éolien, hydraulique, cogénération). Le tableau suivant retrace (entre autres) les charges de service public supportées à ce titre par EDF (en quasi-totalité) :

 

2003

2004

2005

2006

2007

2008

Variation 2003-2009

Contrat d’achat cogénération

803,8

838,4

676,6

677,9

768,4

521,3

– 35,1 %

Contrat d’achat d’énergies renouvelables

141,1

198,7

89,3

110,8

322,7

93,8

– 47,3 %

Autres contrats d’achat

59

62,4

49,5

54,6

57,5

39,1

– 19,9 %

Total contrats d’achat

1 003,9

1 099,5

815,4

843,2

1 148,6

654,2

– 34,8 %

Source : Commission de régulation de l’énergie

La forte baisse des charges prévue en 2009 résulte, selon la communication de la Commission de régulation de l’énergie (CRE) du 11 février 2009, « de la forte baisse des surcoûts relatifs aux contrats d’achat malgré une forte augmentation des volumes et des coûts d’achat, due à un niveau très élevé des prix des marchés à terme ».

● Les centrales thermiques d’EDF sont soumises aux systèmes européens des quotas d’émissions. Certes, lesdits quotas d’émission sont distribués gratuitement jusqu’en 2013, mais en cas de dépassement des quotas alloués par le Plan national d’allocation de quotas (PNAQ), EDF doit acheter le surplus sur le marché européen au prix du marché (environ 15 euros/tonne en septembre 2009) et provisionner dans ses comptes le coût de ces quotas supplémentaires. En France, le deuxième PNAQ (2008-2012), plus exigeant que le premier, a réduit de 24 % l’allocation de certificats à l’ensemble des secteurs
(- 29 % pour l’électricité). En 2008, selon le rapport annuel d’EDF, la provision pour dépassement de quotas d’émissions s’est élevée à
397 millions d’euros.

Il convient enfin de souligner que la contribution mentionnée à l’article 2 de loi n° 2009-967 du 3 août 2009 de programmation relative à la mise en œuvre du Grenelle de l'environnement vise à « intégrer les effets des émissions de gaz à effet de serre dans les systèmes de prix par la taxation des consommations d'énergies fossiles » et non celle de l’électricité. C’est donc à juste titre que le présent article institue une taxe carbone et non une contribution climat-énergie.

B.– LE TAUX FIXÉ À 17 EUROS PAR TONNE DE CARBONE

La commission présidée par M. Alain Quinet et chargée de valoriser la tonne de carbone afin que la France soit en mesure de respecter ses engagements internationaux de réduction des émissions de gaz à effet de serre est parvenue à un taux de 100 euros par tonne en 2030. Elle en a déduit, en lui appliquant un taux d’actualisation de 4 % par an, un taux de 45 euros par tonne en 2010.

Cependant, pour des raisons tenant à l’acceptabilité et à la soutenabilité de la nouvelle taxe, elle a finalement proposé un taux de 32 euros par tonne, taux repris par la commission d’experts présidée par M. Michel Rocard.

Ce taux de 32 euros par tonne se serait cependant traduit par une hausse très importante des prix du carburant et du gaz dans un contexte où les prix du pétrole sont orientés à la hausse, bien au-delà de ce que les ménages et les entreprises, fragilisés par la crise, auraient été capables de supporter. En effet, si le taux de la taxe carbone doit satisfaire à l’objectif environnemental imparti à la taxe, c'est-à-dire être suffisamment élevé pour internaliser dans le prix des énergies le coût des dommages liés aux émissions de CO2 et, par conséquent, inciter les acteurs économiques à s’orienter vers des énergies et des comportements plus respectueux de l’environnement, un taux élevé handicape la compétitivité des entreprises et pèse fortement sur le pouvoir d’achat des ménages.

En outre, un tel taux de 32 euros par tonne aurait été très supérieur au prix de la tonne de carbone tel qu’il est déterminé pour les entreprises par le marché européen des quotas d’émission, introduisant donc une distorsion entre les entreprises sous quotas et les autres et, plus largement, entre les ménages et les entreprises.

Dans ces conditions, le prix retenu par le Gouvernement et proposé par le présent article est de 17 euros par tonne, soit le prix moyen de la tonne de carbone sur le marché européen des quotas d’émission au cours des deux dernières années (19) mais un taux nettement plus faible que dans les autres pays européens (20).

Le taux de la taxe carbone variera selon les catégories de produits énergétiques (21). En effet, il est plus ou moins élevé selon les émissions de dioxyde de carbone qu’entraîne leur combustion. Le tableau du nouvel
article 266 quinquies C du code des douanes les fixe au niveau suivant :

Désignation des produits

Unité de perception

Tarif (en euros)

White spirit

Hectolitre

4,02

Essences et supercarburants utilisés pour la pêche

Hectolitre

1,03

Essences et supercarburants (hors usage pour la pêche), autres huiles légères, sauf carburéacteurs et essence d’aviation

Hectolitre

4,11

Essence d’aviation

Hectolitre

3,93

Pétrole lampant, carbu-réacteurs, autres huiles moyennes

Hectolitre

4,25

Huiles lourdes, fioul domestique

Hectolitre

4,52

Gazole :

– utilisé pour la pêche

– autre

Hectolitre

1,13

4,52

Fioul lourd

100 kg net

5,30

GPL

100 kg net

4,84

Gaz naturel à l’état gazeux

100 m3

3,68

Emulsion d’eau dans le gazole

Hectolitre

3,93

Gaz naturel utilisé comme combustible

Mégawatheure

3,49

Houilles, lignites et cokes

Mégawatheure

6,23

Les facteurs d’émission sont ceux retenus par l’ADEME et le CITEPA (Centre Interprofessionnel Technique d’Étude de la Pollution Atmosphérique). Ces facteurs d’émission sont :

– gazole : 2,66 kg/l

– supercarburant : 2,42 kg/l

– GPL : 231 kg/MWh

– fioul domestique : 2,66 kg/l

– gaz naturel : 205 kg/MWh

– charbon, houille et lignites : 366,67 kg/MWh.

La combustion du gazole émettant plus de dioxyde de carbone que celle du supercarburant, il sera donc plus taxé que ce dernier ; de même pour le fioul lourd, utilisé notamment pour la production d’électricité qui est de loin le produit pétrolier dont la combustion émet le plus de gaz à effet de serre (mais moins, néanmoins, que le charbon).

C.– LES MODALITÉS DE RECOUVREMENT ET DE CONTRÔLE

1.– Les redevables de la taxe carbone seront en nombre très limité

En application de l’alinéa 15, la taxe carbone sera due « par les mêmes personnes que celles qui sont redevables des taxes intérieures de consommation mentionnées aux articles 265, 266 quater, 266 quinquies et 2566 quinquies B » du code des douanes. De même, « le fait générateur et l’exigibilité sont ceux applicables auxdites taxes intérieures de consommation ».

La taxe carbone s’analyse donc, en pratique, comme une taxe additionnelle aux taxes intérieures de consommation. Portant sur les mêmes produits énergétiques, il est normal qu’elle soit payée par les mêmes redevables. C’est d’ailleurs l’un des avantages de cette forme de taxe carbone que sa facilité de recouvrement et de contrôle. En effet, ses redevables, en nombre très limité puisqu’ils seront d’environ 300, sont parfaitement identifiés par l’administration des douanes qui pourra aisément contrôler le respect des obligations mises à leur charge par le présent article (22).

Par conséquent, on peut distinguer trois types de redevables de la taxe carbone en fonction du produit énergétique concernés :

● Pour les carburants et les autres produits pétroliers : les compagnies pétrolières et les grandes surfaces distribuant du carburant

Les produits pétroliers sont traités et raffinés sous le régime de l’usine exercée sous contrôle douanier, c'est-à-dire, en application de l’article 165 B du code des douanes, « en suspension des taxes et redevances dont ils sont passibles ». Les raffineries sont toutes des « usines exercées ». De même, ces produits pétroliers sont stockés en suspension de taxes, notamment par certaines grandes surfaces, dans un entrepôt fiscal de produits pétroliers – lui aussi sous contrôle douanier.

La taxe carbone sera exigible, comme la TIPP, lors de la mise à la consommation des produits pétroliers (23), c'est-à-dire :

– l’importation lorsqu’elle n’est pas suivie d’un régime suspensif ;

– la fabrication hors d’un régime suspensif ;

– et le cas le plus fréquent, la sortie d’un régime suspensif.

Seront donc redevables de la taxe carbone les personnes qui, actuellement, sont redevables de la TIPP, c'est-à-dire les compagnies pétrolières d’une part et les grandes surfaces d’autre part, à la condition que ces dernières aient la qualité d’entrepositaire agréé (24). Toutes les grandes surfaces distribuant du carburant ne seront donc pas redevables de la taxe carbone. Celles qui achètent des carburants « en acquitté », c'est-à-dire après sortie d’un entrepôt fiscal, ne seront pas redevables de la taxe carbone, pas plus qu’elles ne paient aujourd’hui la TIPP ou la TVA pétrolière.

● Pour le gaz naturel : les fournisseurs de gaz naturel

En application du 3 de l’article 266 quinquies du code des douanes, la taxe intérieure de consommation sur le gaz naturel est due :

– par le fournisseur de gaz naturel, c'est-à-dire toute personne titulaire de l'autorisation prévue au I de l'article 5 de la loi n° 2003-8 du 3 janvier 2003 relative aux marchés du gaz et de l'électricité et au service public de l'énergie (25) : GDF-SUEZ, EDF, Poweo…

– à l'importation de gaz naturel, par la personne désignée comme destinataire réel des produits sur la déclaration en douane d'importation ;

– par l’utilisateur final.

Aux trois cas d’exigibilité de la TICGN prévus par le 2 de l’article 266 sexies précité correspondent donc trois redevables possibles de celle-ci et, par conséquent, de la taxe carbone. Dans le cas le plus courant, celui d’un utilisateur final (particulier ou entreprise) qui achète son gaz naturel auprès d’un fournisseur, c’est ce dernier qui sera redevable de la taxe carbone – le montant de celle-ci étant évidemment intégré dans le prix de vente du produit. En cas d’importation de gaz naturel, le redevable sera l’utilisateur final, si celui-ci est désigné comme le destinataire réel du produit dans la déclaration en douane, c'est-à-dire s’il l’a importé directement de l’étranger. Enfin, dans les autres cas, c'est-à-dire en pratique en cas d’approvisionnement direct à partir d’un autre État-membre, ce sera l’utilisateur final (en l’occurrence quelques gros consommateurs).

● Pour les houilles, les lignites et les cokes :

Le 3 de l’article 266 quinquies B du code des douanes répète à l’identique, s’agissant des redevables de la taxe sur les houilles, les lignites et les cokes, les dispositions du 3 de l’article 266 quinquies précités. Seront donc redevables de la taxe carbone :

– les fournisseurs de houilles, de lignites ou de cokes, c’est-à-dire toute personne qui se livre au négoce de ces produits ;

– à l'importation, la personne désignée comme destinataire réel des produits sur la déclaration en douane d'importation ;

– l’utilisateur final.

2.– Les modalités de recouvrement

De la même manière que les redevables de la taxe carbone seront les mêmes que ceux des taxes intérieures de consommation, les modalités de recouvrement de la taxe carbone seront alignées sur celles qui leur sont applicables. L’article 267 du code des douanes disposent en effet que « les taxes intérieures de consommation et la taxe spéciale de consommation respectivement mentionnées aux articles 265, 266 quater, 266 quinquies et 266 quinquies B sont déclarées, contrôlées et recouvrées selon les règles, garanties, privilèges et sanctions prévus par le présent code. Les infractions sont recherchées, constatées et réprimées, les poursuites sont effectuées et les instances sont instruites et jugées comme en matière de douane par les tribunaux compétents en cette matière ».

L’alinéa 22 du présent article ajoute l’article 266 quinquies C à l’énumération qui s’achève actuellement avec l’article 266 quinquies B.

II.– LES DISPOSITIONS PARTICULIÈRES À CERTAINES ENTREPRISES
ET À CERTAINS SECTEURS ÉCONOMIQUES

La taxe carbone étant assimilée à une accise, les dispositions de la directive 2003/96/CE relatives au « hors champ » lui sont applicables, obligeant le présent article à placer lui aussi « hors champ » de la taxe un certain nombre de secteurs et d’usages des produits énergétiques. Il comporte en outre plusieurs mesures en faveur de certains secteurs particulièrement sensibles au prix des produits énergétiques, prix que la taxe carbone aura pour conséquence de renchérir dans un contexte où les cours du pétrole sont orientés à la hausse.

Il convient de souligner que ces dispositions ne sont pas identiques, ni dans leur forme, ni dans leur portée, et qu’elles se traduisent par une exonération (installations soumises aux quotas européens d’émission de gaz à effet de serre ou intensives en énergie), un « remboursement » intégral via la TIPP (entreprises de transport routier de marchandises et de transport public en commun de voyageurs), un remboursement à 75 % (exploitants agricoles) ou un taux réduit de 75 % (pêcheurs).

A.– LES SECTEURS SOUMIS AUX QUOTAS EUROPÉENS D’ÉMISSION
DE GAZ À EFFET DE SERRE

1.– Le système européen de quotas d’émission

Par le protocole de Kyoto (1997), les pays industrialisés, à commencer par l’Union européenne, se sont engagés à réduire de 5 % leurs émissions de dioxyde de carbone en moyenne sur la période 2008-2012 par rapport au niveau de 1990. Afin d’atteindre cet objectif, l’Union européenne a opté pour un instrument de marché et adopté la directive 2003/87/CE du 13 octobre 2003 qui a institué un système européen des quotas d’émissions de dioxyde de carbone à compter du 1er janvier 2005. Le fonctionnement de celui-ci fait appel à la fois au public et au privé :

– l’offre est publique : les quotas sont émis par les États via un Plan national d’allocation de quotas qui les répartit entre les secteurs économiques ;

– la demande est privée : les installations industrielles se voient allouer gratuitement un quota annuel d’émissions ; si elles dépassent leur quota, elles doivent acheter des permis de polluer supplémentaires sur le marché européen, à un prix fixé par le marché, en plus de s’acquitter d’une pénalité non libératoire pour dépassement de quota dont le taux est fixé à 100 euros/tonne.

Ne sont cependant soumis à ces quotas que certains secteurs industriels particulièrement polluants et, au sein de ceux-ci, que les plus grandes installations :

Activités dans le secteur de l’énergie

Installations de combustion d’une puissance calorifique de combustion supérieure à
20 MW (sauf déchets dangereux et municipaux)

Raffineries de pétrole

Cokeries

Production et transformation de métaux ferreux

Installations de grillages ou de frittage, y compris de minerai sulfuré

Installations pour la production de fonte ou d’acier (fusion primaire ou secondaire, y compris les équipements pour coulée continue d’une capacité de plus de 2,5 tonnes par heure)

Industrie minérale

Installations destinées à la production de ciment clinker dans des fours rotatifs avec une capacité de production supérieure à 500 tonnes par jour, ou de chaux dans des fours rotatifs avec une capacité de production supérieure à 50 tonnes par jour, ou dans d’autres types de four avec une capacité de production supérieure à 50 tonnes par jour

Installations destinées à la production du verre, y compris celles destinées à la production de fibres de verre avec une capacité de fusion supérieure à 20 tonnes par jour

Installations destinées à la fabrication de produits céramiques par cuisson, notamment de tuiles, briques, de pierre réfractaires, de carrelages, de grès ou de porcelaine, avec une capacité de production de 75 tonnes par jour et/ou une capacité de four de plus de 4 m3 et une densité d’enfournement de plus de 100 kg/m3.

Autres activités

Installations industrielles destinées à la fabrication de pâte à papier à partir du bois ou d’autres matières fibreuses

Installations industrielles destinées à la fabrication de papier et carton dont la capacité de production est supérieure à 20 tonnes par jour

Le système de quotas d’émission a entraîné le développement d’un marché financier d’échanges de quotas qui a atteint, en 2008, le montant de
70 milliards d’euros, dont 90 % sur les produits dérivés. Les acteurs de ce marché, dont les plateformes sont situées à Paris (BlueNext) et à Londres (ECX), sont les entreprises sous quotas (en particulier les producteurs d’électricité) et les intermédiaires (courtiers, analystes carbone, prestataires d’information…).

Le système européen de quotas d’émissions sera cependant profondément modifié par l’entrée en vigueur de la phase III le 1er janvier 2013 :

– alors qu’actuellement, le plafonnement communautaire des émissions de gaz à effet de serre n’est que l’addition des Plans nationaux d’allocation de quotas, proposés par les États-membres et validés par la Commission européenne, la phase III reposera sur un plafonnement européen défini par la seule Commission qui allouera elle-même les quotas sur la base de règles totalement harmonisées ;

– les quotas ne seront plus attribués gratuitement aux entreprises mais progressivement mis aux enchères. D’environ 60 % en 2013, la part de quotas mise aux enchères sera progressivement augmentée jusqu’à atteindre 80 % en 2020 et 100 % en 2027 ; par conséquent, le nouveau marché primaire (vente des quotas par les États) devra s’articuler avec l’actuel marché secondaire (échanges ultérieurs des quotas initialement émis) ;

– enfin, le système européen des quotas sera élargi à de nouveaux gaz à effet de serre (l’hémioxyde d’azote et les hydrocarbures perfluorés) ainsi qu’à de nouveaux secteurs (l’industrie chimique, la production d’aluminium…).

2.– Les installations sous quotas et les installations ayant pris des mesures équivalentes seront exonérées de taxe carbone

En application de l’alinéa 8 du présent article, les installations soumises au système européen des quotas d’émission de gaz à effet de serre seront exonérées de la taxe carbone pesant sur leurs consommations d’énergie fossiles (chauffage de leurs locaux, carburants pour leurs véhicules…). Ces installations, au nombre de 1 018, représentent 23 % des émissions totales de dioxyde de carbone en France ; c’est donc une part substantielle des émissions qui sera exonérée de taxe carbone.

Le droit communautaire n’impose pas d’exonérer les installations intégrées dans le système européen des quotas d’émissions en tant que telles. Cependant, les dispositions relatives au « hors champ » de la directive 2003/96/CE et le champ d’application de la directive 2003/87/CE (voir supra) se superposent largement. Toutes les installations actuellement sous quotas auraient donc été placées « hors champ » de la taxe carbone en application de la directive « accises », à la seule exception toutefois de l’industrie du papier et du carton qui ne relève que de la directive « quotas ».

Cette exonération générale est donc de bon sens. Assujettir la seule industrie papetière à la taxe carbone alors même qu’elle est soumise aux quotas aurait été une « double peine » peu opportune dans un contexte de crise et de forte concurrence internationale. Elle anticipe en outre les futurs élargissements du système des quotas à de nouveaux secteurs, notamment l’industrie chimique (26), à compter de 2013.

Seront également exonérées, en application du même alinéa 8, « les installations visées à l’article 27 de la directive » 2003/87/CE précitée. Cet article autorise les États-membres à exclure du système européen de quotas d’émission « les installations qui ont déclaré à l’autorité compétente des émissions inférieures à 25 000 tonnes d’équivalent dioxyde de carbone et qui, lorsqu’elles ont des activités de combustion, ont une puissance calorifique de combustion inférieure à 35 MW […] et qui font l’objet de mesures qui permettront d’atteindre des réductions d’émissions équivalentes ».

L’objet de cette mesure est de permettre à des installations de petite taille (notamment de production de tuiles et de briques, de céramiques et de papier), normalement incluse dans le PNAQ, d’en sortir en faisant la démonstration qu’elles sont soumises à des mesures leur permettant d’atteindre des réductions d’émission équivalente.

Selon les informations communiquées par le MEEDDM, cette possibilité n’a jamais trouvé à s’appliquer en France (27). La disposition de l’alinéa 8 précitée n’aura donc aucune portée pratique immédiate.

B.– LES SECTEURS ÉCONOMIQUES PARTICULIÈREMENT SENSIBLES
AU PRIX DE L’ÉNERGIE

1.– Les entreprises intensives en énergie

En application de l’alinéa 9 du présent article, la taxe carbone ne s’appliquera pas aux entreprises intensives en énergie. Celles-ci sont définies comme les entreprises (28) :

– dont les achats de produits énergétiques et d’électricité atteignent au moins 3 % de la valeur de la production pour les installations mentionnées au
1er alinéa du 2 de l’article 9 bis de la directive n° 2003/87/CE. Cet article, introduit dans la directive par la directive 2009/29/CE du 23 avril 2009 vise « les installations qui poursuivent les activités énumérées à l’annexe I et ne sont intégrées dans le système communautaire qu’à compter de 2013 » ;

– dont le montant total des taxes intérieures de consommation dues sur les produits énergétiques et l’électricité qu’elles utilisent dans ces mêmes installations est d’au moins 0,5 % de la valeur ajoutée.

Par conséquent, ce ne sont pas toutes les entreprises intensives en énergie qui seront exonérées mais seulement celles dont les installations seront, à compter du 1er janvier 2013, intégrées dans le système européen de quotas d’émissions. Est en pratique visée par cette disposition la part de l’industrie chimique dont les procédés ne sont pas aujourd’hui placés « hors champ » des accises par la directive 2003/96/CE (29), sachant que l’ensemble de l’industrie chimique sera intégrée dans le système européen des quotas d’émission au 1er janvier 2013 et sera donc exonérée de taxe carbone en application de l’alinéa 8 précité. Afin de ne pas la désavantager par rapport à leurs concurrentes étrangères, les installations concernées seront donc exonérées de taxe carbone.

2.– La pêche

Le carburant destiné à l’avitaillement des navires est actuellement exonéré tant de TIPP que de TVA. Si l’exonération de TVA découle de
l’article 148 de la directive 2006/112/CE du 28 novembre 2006, l’exonération de TIPP n’est qu’une possibilité ouverte par le droit communautaire. En effet, si l’article 14 de la directive 2003/96/CE exonère obligatoirement d’accises « les produits énergétiques fournis en vue d’une utilisation comme carburant ou combustible pour la navigation dans les eaux communautaires, y compris la pêche », les États-membres peuvent limiter le champ de cette exonération aux seuls transports maritimes internationaux ou intracommunautaires.

Dans ces conditions, le tableau de l’alinéa 4 applique la taxe carbone aux carburants (supercarburant et gazole) utilisés pour la pêche mais à un taux réduit, égal à 25 % du taux normalement applicable.

(en euro/hl)

 

Taux normal

Taux réduit en faveur du carburant utilisé pour la pêche

Supercarburant……………………

4,11

1,03

Gazole…………………………….

4,52

1,13

Le choix d’un taux réduit, sur des carburants actuellement totalement exonérés d’accises et de TVA, a été privilégié à la lourdeur d’un remboursement individuel a posteriori.

Le coût de ce taux réduit est estimé à 12 millions d’euros.

3.– L’agriculture

Les exploitants agricoles bénéficieront, en application de l’article 7 du présent projet de loi, d’un remboursement de la taxe carbone égal à 75 % de son montant, pour un coût évalué à 134 millions d’euros en 2010 (30).

4.– Le transport routier de marchandises

Structurellement fragile et soumis à une forte concurrence internationale, le secteur du transport routier de marchandises est en outre durement frappé par la crise. Alors qu’en 2008, 10 000 emplois avaient été détruits et 2 000 entreprises avaient disparu, la tendance s’est aggravée en 2009 : 8 000 emplois ont été supprimés sur le seul premier trimestre, selon la Fédération nationale des transports routiers, en lien avec une baisse de 15,5 % de l’activité (21,6 % dans le transport international).

Dans ces conditions, alors qu’au 1er janvier 2012, les entreprises de transport routier de marchandise devront faire face à la taxe « poids lourds » instituée par l’article 167 de la loi de finances pour 2009, imposer une nouvelle taxe comme la taxe carbone apparaissait comme le meilleur moyen d’accentuer encore la crise que traverse ce secteur.

C’est pourquoi l’alinéa 30 du présent article exonère ces entreprises de la taxe carbone via un aménagement du dispositif de remboursement partiel de TIPP dont elles bénéficient actuellement. Cependant, il convient de souligner que ce n’est pas la taxe carbone en tant que telle qui est remboursée à ces entreprises mais le remboursement de TIPP qui sera majoré du montant de taxe carbone sur le gazole.

En effet, en application de l’article 265 septies du code des douanes, les entreprises propriétaires (31) de véhicules routiers à moteur destinés au transport de marchandises et dont le poids total autorisé en charge est égal ou supérieur à 7,5 tonnes et de véhicules tracteurs routiers dont le poids total roulant est égal ou supérieur à 7,5 tonnes, peuvent obtenir, sur demande de leur part, le remboursement d'une fraction de la taxe intérieure de consommation sur le gazole dont le montant se calcule :

– soit en appliquant au volume de gazole utilisé comme carburant dans les véhicules susmentionnés, acquis dans chaque région, la différence entre 39,19 euros par hectolitre (32) et le tarif qui y est applicable – compris entre 41,69 euros/hl et 42,84 euros/hl (33), soit un remboursement compris entre 2,5 et 3,65 euros/hl ;

– soit en appliquant, au total du volume de gazole, acquis dans au moins trois des régions, un taux moyen de remboursement calculé en pondérant les différents taux régionaux votés par les volumes de gazole respectivement mis à la consommation dans chaque région. Le montant de ce taux moyen pondéré a été fixé à 3,60 euros par hectolitre pour 2009 par l’arrêté du 27 février 2009 (34).

Les alinéas 16 et 17 du présent article substituent, au sixième alinéa de l’article 265 septies, le montant « 34,67 » au montant « 39,19 ». La différence entre ces deux montants est donc strictement égale au taux de la taxe carbone fixé, pour le gazole, à 4,52 euros/hl (4,52 centimes par litre).

Par conséquent, les entreprises de transports routiers de marchandises paieront bien la taxe carbone « à la pompe », lorsqu’elles feront le plein de leurs véhicules, mais le montant de celle-ci leur sera intégralement remboursé, ce montant augmentant le remboursement partiel de TIPP dont elles bénéficient actuellement. Pour ces entreprises, la taxe carbone s’analyse donc comme une taxe différentielle, intégrée à la TIPP via le mécanisme de remboursement, afin que leur charge fiscale ne s’alourdisse pas :

(en euros/hl)

 

En 2009

À compter du 1er janvier 2010

Taux de la TIPP sur le gazole

42,84

42,84

Taux de la taxe carbone sur le gazole

0

4,52

Montant du remboursement

3,65

8,17 (4,52 + 3,65)

Taxation globale du gazole

39,19

39,19

Coût pour l’État

230 millions d’euros

744 millions d’euros

Le choix d’utiliser, pour la taxe carbone, le mécanisme de remboursement de TIPP se justifie par le fait qu’il était techniquement très difficile d’exonérer de taxe carbone « à la pompe » les entreprises de transport routier de marchandises, sans parler des nombreuses possibilités de fraude. En outre, le mécanisme de remboursement étant appliqué depuis 1999, l’administration des douanes connaît les entreprises et a affiné ses moyens de contrôle.

Cependant, il convient de souligner qu’en utilisant le mécanisme de remboursement de TIPP, l’exonération de taxe carbone ne profitera qu’aux véhicules répondant aux conditions de l’article 265 septies du code des douanes précités, c'est-à-dire les véhicules de plus de 7,5 tonnes. Le gazole utilisé par les fourgons, camionnettes et autres pick-ups sera quant à lui soumis à la taxe (35).

En outre, en application de l’alinéa 31 du présent article, les bénéficiaires de ce remboursement partiel – taxe carbone incluse – pourront diminuer le montant de leur demande de remboursement à hauteur du tarif de la taxe carbone – soit, 4,52 euros/hl. En échange, ils recevront un certificat de 4,52 euros qui sera cessible et pourra être utilisé, par les donneurs d’ordre, pour le paiement de la TGAP sur le transport routier de marchandises (voir infra).

Les modalités d’émission et de cession de ces certificats seront précisées par décret, en application de l’alinéa 32.

5.– Le transport public routier en commun de voyageurs

En application de l’article 265 octies du code des douanes, les entreprises de transport public routier en commun de voyageurs bénéficient d’un remboursement partiel de TIPP dont le mécanisme est strictement identique à celui applicable aux entreprises de transport routier de marchandises (voir supra).

L’alinéa 21 du présent article substitue donc, au sixième alinéa de l’article 265 octies précité, le montant « 34,67 » au montant « 39,19 », leur permettant de bénéficier également d’un remboursement intégral de la taxe carbone qu’elles paieront « à la pompe », via le mécanisme de remboursement partiel de TIPP. Pour ces entreprises, la taxe carbone s’analyse donc aussi comme une taxe différentielle, intégrée à la TIPP, afin que leur charge fiscale totale ne s’alourdisse pas.

Le coût de ce remboursement sera de 42 millions d’euros en 2010.

Le tableau suivant récapitule les dispositions proposées par le présent article en faveur de certains secteurs et certaines entreprises :

Secteurs et entreprises

Mesure en leur faveur proposée par le présent article

Installations soumises aux quotas européens d’émission de gaz à effet de serre

Exonération totale sur l’ensemble de leur consommation d’énergie fossile

Installations intensives en énergie soumises aux quotas européens en 2013

Exonération totale sur l’ensemble de leur consommation d’énergie fossile

Entreprises de transport routier de marchandises

Remboursement total de la taxe carbone sur les consommations de gazole

Entreprises de transport public en commun de voyageurs

Remboursement total de la taxe carbone sur les consommations de gazole

Exploitants agricoles

Remboursement de 75 % de la taxe carbone sur les consommations de fioul domestique, le fioul lourd et le gaz naturel

Pêcheurs

Taux de taxe carbone réduit de 75 % sur les consommations de gazole

III.– LA TGAP SUR LE TRANSPORT ROUTIER DE MARCHANDISES

Si l’exonération des entreprises de transport routier elles-mêmes est très simple – via un remboursement a posteriori de la taxe carbone – il n’en va pas de même des dispositions relatives aux donneurs d’ordres qui seront redevables d’une nouvelle taxe équivalente à la taxe carbone. L’assujettissement du transport routier de marchandises (TRM) à la taxe carbone prend en effet la forme d’un nouveau prélèvement de taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) dont le régime est fixé par un nouvel article 266 sexdecies que
l’alinéa 23
du présent article introduit dans le code des douanes.

Bien que se présentant comme une taxe équivalente à la taxe carbone, cette nouvelle composante de la TGAP lui est très différente, tant dans ses modalités que dans son application, lesquelles sont particulièrement complexes puisque plus de la moitié des alinéas du présent article sont consacrés à ce mécanisme d’assujettissement des donneurs d’ordres.

A.– LE CHAMP D’APPLICATION DE LA TGAP TRM

Les alinéas 24 à 30 du présent article définissent les critères que doivent remplir les redevables de la TGAP qui sera due par « toute personne assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée en France au sens de l’article 256 A du code général des impôts ». Par conséquent, la TGAP ne sera pas due par les personnes qui ne sont pas assujetties à la TVA, c'est-à-dire en principe, les ménages et les personnes publiques. De même, elle ne sera pas due par les personnes qui ne sont pas assujetties à la TVA en France, c'est-à-dire les donneurs d’ordre établis à l’étranger.

En application de l’alinéa 25 du présent article, la TGAP ne sera également pas due lorsque les services de transport sont effectués au moyen de véhicules autre que ceux visés à l’article 265 septies précité, c'est-à-dire autres que des véhicules routiers à moteur destinés au transport de marchandises et dont le poids total autorisé en charge est égal ou supérieur à 7,5 tonnes et de véhicules tracteurs routiers dont le poids total roulant est égal ou supérieur à 7,5 tonnes.

Par conséquent, tout transport effectué par des véhicules dont le poids total autorisé en charge ou le poids total roulant sont inférieurs à 7,5 tonnes sera exonéré de la TGAP. Sont notamment visés les transports par les camionnettes, les pick-ups ou les fourgons. En effet, ces véhicules ne bénéficient pas du remboursement de TIPP de l’article 265 septies du code des douanes, réservé aux véhicules de plus de 7,5 tonnes ; soumis à la taxe carbone, il est logique qu’ils soient exonérés de TGAP TRM.

Cependant, aux termes du même alinéa 25, il appartiendra à l’assujetti de justifier qu’il a bien recouru à ce type de véhicule par « des documents de transport comportant la mention de l’immatriculation du ou des véhicules utilisés ainsi que du kilométrage effectué avec ces véhicules ». En d’autres termes, il devra exiger de son transporteur qu’il lui fournisse, outre (ou sur) la facture, un document prouvant les caractéristiques du véhicule utilisé.

En revanche, la TGAP sera due dans les cas suivants :

● Cas n° 1 : l’assujetti acquiert ou réalise pour les besoins de son activité un service de transport routier de marchandises (alinéa 27).

C’est le cas le plus simple. Il vise les assujettis qui, dans le cadre de leur activité ordinaire, ont recours à une entreprise de transport routier de marchandises (pour lesquelles ils sont donneurs d’ordre) ou organisent eux-mêmes, avec leur propre flotte de véhicules, le transport de leurs marchandises.

Par exemple, une entreprise parisienne fabrique des meubles qu’elle livre (ou fait livrer par un transporteur, français ou étranger) à un client marseillais ; elle sera redevable de la TGAP ; en revanche, si le client marseillais réalise lui-même le transport des meubles (il dispose de son propre véhicule) ou fait appel à un transporteur (français ou étranger), c’est lui qui sera redevable de la TGAP. En d’autres termes, dans le cas n° 1, sera redevable de la TGAP l’assujetti donneur d’ordres du transport, qui peut être selon les cas le vendeur ou l’acquéreur du bien transporté. Il va de soi que le vendeur redevable de la TGAP majorera à due concurrence de son montant le coût du transport facturé à l’acquéreur.

En outre, dans un cas, les entreprises de transport seront redevables à la fois de la TGAP TRM et de la taxe carbone (qui leur sera cependant remboursée a posteriori). C’est le cas où un particulier achète auprès de l’entreprise de meubles précité un meuble et qu’il acquiert directement un service de transport auprès d’un transporteur (36). Ce faisant, les conditions du cas n° 1 sont réunies. L’entreprise de transport réalise pour les besoins de son activité un service de transport routier de marchandises et, par conséquent, non seulement paiera la taxe carbone sur ses consommations de gazole mais sera en outre redevable de la TGAP TRM, qu’elle répercutera naturellement sur sa facture.

● Cas n° 2 : l’assujetti réalise une acquisition intracommunautaire (37) ou est destinataire d’une importation de biens (38) lorsque le transport en France est réalisé par le vendeur ou l’expéditeur établi hors de France ou pour leur compte (alinéa 28).

Ce cas vise les assujettis en France qui acquièrent un bien dans un autre État membre ou un État tiers à l’Union européenne. Par exemple : l’entreprise de meubles susmentionnée, installée à Paris, acquiert du bois auprès d’un fournisseur allemand ou russe. Si elle réalise elle-même le transport avec ses propres camions ou si elle recourt à une entreprise de transport, française ou étrangère, elle sera redevable de la TGAP comme elle l’est dans le cas n° 1. De même l’entreprise de meubles sera toujours redevable si ce sont les vendeurs allemand ou russe qui réalisent le transport ou recourent à un transporteur, français ou étranger.

Par conséquent, dans ce cas n° 2, c’est l’acquéreur qui sera redevable de la TGAP, quand bien même le transport serait pris en charge par le vendeur situé dans un autre État-membre ou dans un État tiers à l’Union européenne ou que celui-ci ferait appel à un transporteur.

En revanche, si le fournisseur allemand ou russe est identifié à la TVA en France et qu’il acquiert un service de transport (ou utilise ses propres véhicules), c’est lui qui sera redevable de la TGAP TRM (on retrouve alors le cas n° 1).

● Cas n° 3 : l’assujetti réalise une livraison de biens expédiés ou transportés hors de France lorsque le transport est réalisé par l’acquéreur des biens hors de France ou pour son compte (alinéa 29).

Dans ce cas, est visée l’entreprise qui vend un bien à un client établi dans un autre État-membre ou dans un État tiers à l’Union européenne. Pour reprendre le même exemple, l’entreprise parisienne vend un meuble à un client installé à Berlin ou à Moscou. Qu’elle réalise elle-même le transport avec ses propres camions ou recourt à une entreprise de transport, française ou étrangère (cas n° 1) ou que le transport soit effectué par l’acquéreur russe ou allemand ou pour leur compte – c'est-à-dire qu’ils recourent eux-mêmes à une entreprise de transport, même étrangère – sera indifférent : l’entreprise de meuble parisienne – le vendeur – sera encore seul redevable de la TGAP.

Les trois cas susmentionnés visent la quasi-totalité des cas où un transport de marchandises en France est réalisé (39). La rédaction des alinéas 26 à 29 présente en effet le triple avantage d’appliquer la TGAP au transport international de marchandises, de ne pas discriminer entre les transporteurs français et étrangers et de faire peser la charge de celle-ci sur le seul assujetti à la TVA en France, qu’il soit le vendeur ou l’acquéreur du bien transporté, facilitant ainsi son recouvrement et son contrôle.

Cependant, une entreprise installée à l’étranger et non assujettie à la TVA en France qui livre un bien à un client également installé à l’étranger via un transit routier sur le territoire français, ne sera pas redevable de la TGAP TRM, qu’elle utilise ses propres véhicules ou qu’elle recoure à une entreprise de transport, même française. Cependant, elle ou son transporteur pourra bénéficier du remboursement de la taxe carbone en application du neuvième alinéa de l’article 265 septies du code des douanes précité (40). C’est un effet pervers inévitable du choix d’utiliser le mécanisme du remboursement de TIPP pour neutraliser la taxe carbone pour les transporteurs routiers.

Enfin, il convient de signaler le deuxième cas où une entreprise de transport sera redevable à la fois de la TGAP et de la taxe carbone : lorsqu’un transport sera réalisé par le vendeur ou l’acquéreur d’un bien lui-même, via sa propre flotte de camions, il sera redevable à la fois de la TGAP et de la taxe carbone, celle-ci lui étant néanmoins, comme à tout transporteur, remboursée a posteriori.

B.– L’ASSIETTE DE LA TGAP TRM

En application de l’alinéa 30 du présent article, la TGAP sur le transport routier de marchandises « est assise sur le volume de carburant consommé pour l’exécution du transport ». Le présent article distingue deux cas, selon que le transport est réalisé :

1.– Par un transporteur, par un intermédiaire pour les besoins du redevable,
par le vendeur, l’expéditeur ou l’acquéreur

Lorsque le transport est réalisé par un transporteur, par un intermédiaire pour les besoins du redevable, par le vendeur, l’expéditeur ou l’acquéreur, le volume de carburant consommé est, aux termes des alinéas 33 à 36 du présent article, forfaitairement réputé égal au produit :

– de la distance minimale par route entre les points de départ et d’arrivée du transport pour la part parcourue en France ;

– du nombre minimal de véhicules de 40 tonnes de poids total autorisé en charge qui serait requis pour la réalisation du transport, tel qu’il est déterminé par le redevable compte tenu du poids ou de l’encombrement du chargement ;

– d’un volume forfaitaire au kilomètre fixé par décret en Conseil d’État pris après avis du comité national routier sur la base de la consommation kilométrique moyenne des véhicules de 40 tonnes de poids total autorisé en charge les moins performants sur le plan énergétique.

Par conséquent, en cas de transport international de marchandises à destination ou en provenance de la France, seule la part du transport effectuée sur le territoire français sera soumise à la TGAP TRM. De plus, le montant de la TGAP sera calculé forfaitairement dans un sens relativement défavorable au redevable : la consommation sera calculée sur la base d’un camion de 40 tonnes (les plus lourds autorisés à rouler sur le réseau national) le moins performant sur le plan énergétique.

Si le forfait est si désavantageux, c’est pour inciter les entreprises à recourir à la taxation « au réel ». En effet, en application de l’alinéa 37 du présent article, « le redevable peut substituer à ce volume forfaitaire le volume de carburant effectivement utilisé sous réserve qu’il en soit justifié par tous moyens ». Le preneur devra donc réclamer à l’entreprise les factures de carburants afin qu’il reconstitue le volume de carburant réellement utilisé dans le transport et puisse, ainsi, liquider la taxe.

2.– Le transport est réalisé pour compte propre ou pour les besoins d’un preneur qui réside en France sans y être assujetti à la TVA

L’autre cas que visent les alinéas 38 à 40 du présent article est celui dans lequel le transport est réalisé pour compte propre ou pour les besoins d’un preneur qui réside en France sans y être assujetti à la TVA (41).

Dans ce cas, le volume de carburant consommé est réputé forfaitairement égal au produit du kilométrage effectué en France par les véhicules visés à l’article 265 septies du code des douanes précité, utilisés par le redevable, et d’un volume forfaitaire au kilomètre fixé par décret en Conseil d’État. Comme dans l’autre cas, en application de l’alinéa 41, le redevable peut substituer à ce volume forfaitaire le volume de carburant effectivement utilisé, sous réserve qu’il en soit justifié par tous moyens. Ce cas est nettement plus simple puisque l’entreprise de transport dispose, par définition, de l’ensemble des informations relatives à la taxation et n’a aucune raison de recourir au calcul forfaitaire.

C.– LE TAUX

En application de l’alinéa 42 du présent article, le montant de la TGAP sera égal au produit du volume de carburant consommé – soit le volume forfaitaire, soit le volume réel – par le tarif de la taxe carbone prévu à
l’article 266 quinquies C pour le gazole, soit 4,52 centimes par litre. Le montant de la TGAP sur le transport routier de marchandises sera donc égal – si c’est le volume réel qui est utilisé – à celui de la taxe carbone sur le gazole qu’aura payé l’entreprise de transport routier. Il lui sera supérieur si c’est le montant forfaitaire qui est retenu.

D.– DÉCLARATION, RECOUVREMENT ET CONTRÔLE DE LA TGAP TRM

En application de l’alinéa 31 du présent article, « le fait générateur de la taxe intervient lors de la réalisation du transport ». Elle est exigible « à l’achèvement du transport ». Elle est déclarée et liquidée semestriellement, aux termes de l’alinéa 43 du présent article, au plus tard les 30 avril et le 31 octobre de chaque année, la déclaration s’accompagnant du paiement (alinéa 44). Les certificats sont également admis en paiement de la taxe.

En effet, en application de l’alinéa 19 du présent article, les entreprises de transport routier de marchandises, plutôt que se faire rembourser la taxe carbone via l’augmentation du remboursement partiel de TIPP, pourront opter pour un certificat équivalent au montant du remboursement qu’elles n’auront pas demandé. Ces certificats pourront donc être vendus aux redevables de la TGAP TRM pour les libérer de leur obligation fiscale.

Le Rapporteur général s’interroge sur la portée de cette disposition. En effet, l’intérêt des transporteurs à échanger le « remboursement » de la taxe carbone contre des certificats n’est pas évident. En pratique, le seul cas qui le justifie est celui du transport réalisé pour compte propre. En effet, l’entreprise (de transport ou ayant sa propre flotte de camions) se fera « rembourser » la taxe carbone et sera redevable de la TGAP TRM. En échangeant son « remboursement » contre des certificats, elle pourra utiliser ceux-ci pour le paiement de sa TGAP, allégeant ainsi ses formalités administratives.

En revanche, dans les autres cas, il est probable que les transporteurs ne renonceront au remboursement que si et seulement s’ils peuvent revendre les certificats plus chers que leur valeur faciale. Sinon, à quoi bon renoncer à un remboursement « sonnant et trébuchant » ? Or, les relations commerciales entre les transporteurs routiers et les donneurs d’ordres n’étant pas des plus paisibles, il est à craindre que ces derniers fassent pression pour que les transporteurs renoncent à leur remboursement et leur cèdent, ensuite, leurs certificats à une valeur inférieure. Les certificats pourraient ainsi être le moyen pour les donneurs d’ordre de reporter plus facilement une partie de la charge de la TGAP TRM sur les transporteurs.

Quelle que soit la forme que prendra le paiement de la TGAP TRM, le contrôle de la taxe apparaît particulièrement complexe, en particulier en comparaison de la taxe carbone elle-même. En effet, alors que seuls quelques centaines de redevables, tous connus de l’administration des douanes, paieront la taxe carbone, ce sont l’ensemble des assujettis à la TVA réalisant ou recourant à des services de transport routier de marchandises qui seront redevables de la TGAP, soit potentiellement des dizaines de milliers de redevables, souvent pour des montants relativement faibles.

Dans ces conditions, le Rapporteur général s’interroge sur la capacité de l’administration des douanes à contrôler efficacement le recouvrement de la taxe comme le prévoit l’alinéa 46 du présent article (42). C’est pourquoi, les agents des impôts pourront également contrôler, dans le cadre d’une vérification de comptabilité, le paiement de TGAP TRM et ses justificatifs par les entreprises qui en seront redevables (43).

La forme de la déclaration et son contenu seront fixés, aux termes de l’alinéa 45 du présent article par un arrêté du directeur général des douanes.

Enfin, l’alinéa 47 du présent article appliquera le même seuil de recouvrement à la TGAP TRM que celui actuellement applicable, aux termes de l’article 285 sexies du code des douanes, à la TGAP, soit 61 euros

IV.– LA PORTÉE DE LA TAXE CARBONE

A.– UN RENDEMENT ÉLEVÉ MAIS UNE HAUSSE MODÉRÉE DU PRIX
DES ÉNERGIES FOSSILES

1.– La taxe carbone rapportera 4,5 milliards d’euros en 2010

Le produit de la taxe carbone sera particulièrement élevé puisqu’elle rapportera 4,5 milliards d’euros dès 2010 (incluant un effet TVA d’environ 450 millions d’euros). Versé au budget général, il se répartira comme suit :

Recettes (en M€)

Taxe carbone

TVA

TOTAL

Ménages

2 200

450

2 650

Entreprises

1 900

(déductible)

1 900

Total

4 100

450

4 550

Source : ministère de l’Économie, des finances et de l’industrie

Par produit énergétique, le produit se répartira comme suit :

 

Taxe intérieure de consommation

Taxe carbone

Taxe totale

Produit
(en M€)

Essence (€/hL)

60,69

4,11

64,80

496

Diesel (€/hL)

42,84

4,52

47,36

1 128

Diesel professionnel (€/hL)

39,19

4,52

43,71

663

Fioul domestique (€/hL)

5,66

4,52

10,18

753

Gaz naturel €/MWh)

1,19

3,14

4,33

922

Charbon (€/MWh)

1,19

6,23

7,42

38

GPL carburant (€/100kg)

10,76

4,84

15,60

6

GPL combustible (€/100kg)

0

4,84

4,84

75

Total

     

4 081

TVA sur la part ménages

     

432

Recettes TTC

     

4 513

Source : ministère de l’Économie, des finances et de l’industrie

2.– Le renchérissement du prix des énergies fossiles

La taxe carbone aura un effet analogue à une hausse du prix des énergies fossiles. Sachant que celle-ci sera intégrée dans l’assiette de la TVA, comme l’ensemble des taxes intérieures de consommation (TIC), le prix de détail des produits énergétiques se calculera donc comme suit :

(Prix HT + TIC + taxe carbone) + TVA à 19,6 % = prix de vente au détail

Selon l’étude réalisée par le MEEDDM, sur la base d’un tarif de 17 euros par tonne de CO2 en 2010, la taxe carbone devrait impacter les prix des principaux produits énergétiques dans les proportions suivantes :

– 4,11 centimes par litre de supercarburant, soit un surcoût de 1,96 euro (TVA incluse.) pour un plein de 40 litres ;

– 4,52 centimes d’euro par litre de gazole, soit un surcoût de 2,16 euros (TVA incluse) pour un plein de 40 litres ;

– 0,35 centimes d’euro par KWh de gaz naturel, soit un surcoût de 33 euros (TVA incluse) pour une consommation annuelle de 8 000 kWh (correspondant au chauffage d’un célibataire) ;

– 4,5 centimes d’euro par litre de fioul domestique, soit un surcoût de 53 euros (TVA incluse) pour une consommation annuelle de 1 000 litres (correspondant au chauffage d’un célibataire).

B.– UN IMPACT ENVIRONNEMENTAL AUJOURD’HUI LIMITÉ MAIS QUI SE RENFORCERA AVEC L’AUGMENTATION DU TAUX DE LA TAXE

1.– L’impact environnemental sera limité les premières années

L’objectif de la taxe carbone est d’envoyer un « signal-prix » afin d’orienter les acteurs économiques vers des comportements plus sobres en carbone. Dès, lors, son efficacité sera d’autant plus grande que son taux sera élevé. La consommation d’énergie fossile est en effet relativement élastique et la hausse considérable des prix du pétrole au cours de l’année 2008 a eu un impact immédiat sur la consommation de carburant.

2.– La trajectoire d’évolution de la taxe ne sera pas fixée dans la loi

L’essence même de la taxe carbone exige que son taux augmente de manière progressive et lisible à long terme, afin que les agents économiques puissent anticiper le renchérissement à terme du prix de l’énergie en préparant dès à présent le changement de leur comportement. La commission d’experts présidée par M. Michel Rocard estimait ainsi nécessaire que l’article instituant la taxe carbone « annonce les taux pour les cinq prochaines années » et qu’il soit « contextualisé à plus long terme dans son exposé des motifs ».

C’est pourquoi l’exposé des motifs du présent article dispose que « ce tarif a vocation à évoluer chaque année, après avis de la commission verte qui sera mise en place parallèlement à l’instauration de la taxe carbone. L’objectif sera d’atteindre, à terme, un signal-prix suffisant, évalué à 100 euros par tonne de CO2 en 2030 lors de la conférence des experts, pour refléter intégralement les externalités liées à ce gaz à effet de serre et nous permettre de respecter nos objectifs de réduction d’émissions de CO2 ». L’engagement d’un relèvement progressif de ce prix vers l’objectif de 100 €/tCO2 en 2030 fournit ainsi un signal de long terme qui devrait orienter durablement les comportements et encourager les innovations scientifiques, techniques et industrielles pour atteindre l’objectif de réduction de 75 % d’ici 2050 des émissions de gaz à effet de serre et de 10 % dès 2020. En revanche, l’article 5 lui-même ne fixe pas le taux de la taxe carbone au-delà du 17 euros/tonne qui sera applicable à compter
de 201.

M. Alain Quinet a recommandé, pour la taxe carbone, un taux de 32 euros/tonne en 2010. Ce taux a été calculé à rebours, par l’application d’un taux d’actualisation de 4 % au taux de 100 euros/tonne établi pour l’année 2030. Or, avec un taux fixé à 17 euros/tonne en 2010, la trajectoire d’évolution de la taxe carbone sera beaucoup plus pentue. Pour atteindre ces mêmes 100 euros/tonne en 2030, c’est à un rythme de 9,26 % par an que son taux devra progresser.

C.– LA TAXE CARBONE SERA NEUTRE POUR LES MÉNAGES
ET LES ENTREPRISES

1.– La taxe carbone sera surcompensée, pour les entreprises,
par la réforme de la taxe professionnelle

Si la France, à l’inverse de la Suède, n’instaurera pas un taux réduit pour les entreprises, l’impact sur celles-ci de la taxe carbone devrait être relativement limité, voire totalement neutralisé. En effet :

– les entreprises dont la compétitivité aurait pu être affectée par une fiscalité en France pesant sur les émissions de CO2 sont les industries grandes consommatrices d’énergie fossile (sidérurgie, ciment, verre, papier, raffinage). Or ces entreprises, soumises au système européen de quotas, seront exclues du champ de la taxe carbone. Dès lors, elles ne seront pas désavantagées par rapport à leurs concurrentes étrangères, notamment européennes ;

– en outre, les entreprises de secteurs particulièrement sensibles bénéficieront soient d’un remboursement (exploitants agricoles, transports routiers de marchandises et de personnes), soit d’un taux réduit (pêche) ;

– enfin, la grande majorité des entreprises, en particulier industrielles, bénéficieront de la réforme de la taxe professionnelle dont le coût pour l’État en régime de croisière (hors IS) – 4,3 milliards d’euros – est bien supérieur au produit de la taxe carbone payée par les entreprises. La substitution à une fiscalité nocive (portant sur les investissements) d’une fiscalité vertueuse et tournée vers l’avenir (la taxation des émissions de carbone) permettra donc d’améliorer la compétitivité de ces entreprises et sera favorable la croissance économique (44).

2.– Le produit de la taxe carbone payée par les ménages
leur sera intégralement remboursé via un crédit d’impôt

Les ménages, en particulier ceux pour lesquels l’usage d’une automobile est indispensable, seront particulièrement affectés par le renchérissement des prix du carburant, comme d’ailleurs ceux dont le chauffage fonctionne au fioul domestique ou au gaz naturel.

Or, les ménages ne bénéficieront ni d’une exonération de la taxe, ni d’un taux réduit, ni de l’allègement fiscal découlant de la réforme de la taxe professionnelle. L’impact sur le pouvoir d’achat des ménages pourrait être élevé dans une période de crise et, de fait, affaiblir le consensus sur la légitimité de la taxe carbone au risque de faire apparaître l’environnement comme un prétexte à une hausse de la fiscalité déjà très lourde dans notre pays.

C’est pourquoi la commission d’experts présidée par M. Michel Rocard a estimé que « des redistributions de recettes, aussi forfaitaires que possibles pour ne pas affaiblir l’impact incitatif du signal prix qui est recherché, sont à accepter pour certains ménages ou certains secteurs ». Le Président de la République, dans son discours du 10 septembre dernier, s’est quant à lui engagé à ce que la taxe carbone « s’accompagne de la baisse simultanée et équivalente à l’euro près d’un autre impôt ».

Traduisant tant les recommandations de la commission d’experts que l’engagement présidentiel, l’article 6 du présent projet de loi met en œuvre une redistribution universelle et forfaitaire du produit de la taxe carbone sous la forme d’un crédit d’impôt sur le revenu (45).

*

* *

La Commission est d’abord saisie de l’amendement I-CF 100 de M. Jean-Pierre Brard.

M. Jean-Pierre Brard. La taxe carbone est injuste, nos concitoyens le savent bien, car elle ne tient pas compte des réalités auxquelles ils sont confrontés en matière de transport et de chauffage. C’est pourquoi nous proposons de supprimer l’article 5 qui l’instaure.

Après avis défavorable du rapporteur général, la Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement I-CF 15 de M. François de Rugy.

M. François de Rugy. Conformément aux préconisations du rapport Rocard, établies après de larges consultations, il nous paraît plus juste de fixer le montant de la taxe carbone sur la base de 32 euros/tonne et non à 17 euros/tonne comme l’a arbitré le Président de la République.

M. le rapporteur général. Avis défavorable. Lors des réunions de la commission Rocard, nous étions tous d’accord pour mettre en place une fiscalité environnementale bien acceptée. Si son niveau est d’emblée trop élevé, elle sera mal accueillie par nos concitoyens. Mieux vaut partir d’un niveau plus modeste et le faire évoluer par la suite. J’ajoute que le cours de la tonne de CO2 sur le marché au cours de ces deux dernières années s’établit en moyenne à 17 euros.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement I-CF 248 de M. Christophe Caresche.

M. Jean Launay. Cet amendement tend, d’une part, à remplacer les mots « taxe carbone » par les mots « contribution climat-énergie » et d’autre part à inclure l’électricité dans l’assiette de la taxe carbone à hauteur de 1,30 euro le mégawatheure. Nous devons prendre des mesures susceptibles de diminuer la consommation globale d’énergie, quelle qu’en soit la source.

Certes, l’électricité en France est majoritairement produite à partir du nucléaire. Mais elle n’est pas exempte d’impacts sur l’environnement, puisque les consommations de pointe utilisent l’énergie thermique, émettrice, elle, de gaz à effets de serre.

En Allemagne, où la taxe carbone existe depuis 1999, la taxe due par les ménages et les entreprises inclut l’électricité, à un taux de 2,05 centimes par kilowattheure, soit 20,50 euros par mégawatheure contre 5 euros au Royaume-Uni.

En 2000, l’extension de la taxe générale sur les activités polluantes à l’électricité, qui avait été invalidée par le Conseil constitutionnel, prévoyait un montant de 13 francs le mégawatheure, soit environ 2 euros.

M. le rapporteur général. Avis défavorable. En France, nous utilisons 90 % d’énergies non fossiles ; de plus, la contribution au service public de l’électricité est utilisée pour racheter de l’électricité produite à partir d’énergies renouvelables. Enfin, nos centrales thermiques sont intégrées dans le système des quotas. Les quotas gratuits n’étant pas suffisants, EDF achète des quotas sur le marché.

Pour toutes ces raisons, il ne paraît pas judicieux d’intégrer l’électricité dans l’assiette de la taxe. Je rappelle que la Suède a exclu l’électricité car, comme la France, elle utilise une proportion importante d’énergies renouvelables, dont les énergies nucléaire et hydraulique.

M. Michel Bouvard. S’agissant de l’extension de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) à l’électricité, le Conseil constitutionnel a considéré qu’il n’y avait pas lieu de taxer une activité qui n’est pas émettrice de gaz à effets de serre. Avec 80 % d’énergie nucléaire et 10 % d’énergie hydraulique, la quasi-totalité de la production d’électricité en France n’est pas émettrice de gaz à effets de serre, et si nous adoptions cette disposition, elle serait censurée par le Conseil constitutionnel.

M. François de Rugy. En tant que cosignataire de l’amendement, je tiens à souligner que le taux proposé est très faible. En matière fiscale, les assiettes larges sont préférables aux assiettes restreintes ou qui comportent de nombreuses exonérations.

Le rôle d’une contribution climat-énergie n’est-il pas de favoriser la sobriété énergétique en réduisant les dépenses contraintes de nos concitoyens ? Voulons-nous que ces derniers se libèrent peu à peu de ces dépenses ou simplement qu’ils cessent de consommer des énergies fossiles ? Actuellement, 80 % des logements neufs sont équipés d’un chauffage électrique. En instaurant une taxe carbone qui exclut l’électricité, nous encourageons le chauffage électrique avec pour conséquence de rendre demain nos concitoyens prisonniers des dépenses afférentes.

M. Charles de Courson. Cet amendement pose en effet un problème, car 5 à 6 % de l’électricité produite en France sont d’origine thermique. Mais ce que proposent nos collègues est inadapté, car l’énergie thermique n’est utilisée que lors des pics de consommation. Dans ces conditions, pourquoi ne pas augmenter les tarifs de l’électricité lors des périodes de pointe ? Un tel dispositif, très efficace, ne relevant pas, hélas, du domaine législatif, tâchons d’obtenir du Gouvernement un engagement à le mettre en place.

M. Michel Diefenbacher. La loi a pour objectif de créer une taxe, non une contribution climat-énergie. En Allemagne, si une taxe s’applique à la production d’électricité, c’est que celle-ci est essentiellement d’origine thermique. Ce n’est pas le cas en France, où nous souhaitons promouvoir l’image d’une énergie propre, qui ne relève donc pas de la taxe carbone.

M. Pierre-Alain Muet. N’oublions pas les déchets nucléaires, dont nous ne savons que faire et qui justifieraient pleinement une taxation écologique !

Le montant de 1,30 euro par mégawatheure est parfaitement cohérent puisqu’il correspond à l’émission moyenne de gaz à effet de serre produits par l’électricité communément utilisée en France.

La Commission rejette l’amendement.

Elle est ensuite saisie de trois amendements, I-CF 244 de M. François de Rugy, I-CF 208 de M. Jean Launay et I-CF 249 de M. Christophe Caresche, pouvant être soumis à une discussion commune.

M. François de Rugy. Mon amendement tend à appliquer une progression linéaire de 4,15 euros par an au tarif de la taxe carbone. Nos concitoyens doivent être informés de cette progression.

M. Pierre-Alain Muet. Le prix de la tonne de CO2 devra atteindre 100 euros en 2030. Nous proposons par cet amendement de revaloriser les tarifs de 9,26 % par an jusqu’à cette date. Nous avons choisi une progression exponentielle, dont l’avantage est d’être indolore au début et de permettre les adaptations. Si nous voulons changer les comportements de nos concitoyens, il faut leur offrir une visibilité sur le long terme.

M. Jean Launay. Cette progression doit être inscrite dans la loi, faute de quoi elle risque d’être chaotique et d’avoir des répercussions importantes sur les générations futures.

M. le rapporteur général. Avis défavorable à ces trois amendements. Il est inutile de préciser dans la loi ce que sera le prix de la tonne de CO2 en 2030, l’exposé des motifs fixant un objectif de 100 euros/tonne à cette date.

La Commission rejette successivement les trois amendements.

Puis elle examine deux amendements identiques, I-CF 75 de M. Charles de Courson et I-CF 108 de M. Jean-Pierre Brard.

M. Charles de Courson. Pour les membres du groupe Nouveau Centre, la taxe carbone n’a d’autre objet que d’encourager la modification des comportements des ménages, des entreprises et des collectivités territoriales. Or, pour ces dernières, elle coûtera entre 100 et 200 millions d’euros. L’État devrait appliquer aux collectivités locales le système qu’il a mis en place pour les agriculteurs, à savoir le remboursement de la taxe carbone à hauteur de 75 %, les 25 % restants étant versés à un fonds d’aide à l’investissement destiné à inciter à faire des économies d’énergie.

M. le rapporteur général. Avis défavorable, car les transports publics de voyageurs sont exonérés de la taxe carbone. Les collectivités locales devant montrer l’exemple, il est normal qu’elles assument leur part, en l’occurrence de 160 millions d’euros, dont 90 millions à la charge des communes. La compensation sera, elle, effectuée en priorité en direction des ménages.

M. Jean-Pierre Brard. Je ne partage pas l’avis du rapporteur général, car les collectivités locales pourraient investir le surcoût engendré par la taxe carbone dans des dispositifs générant des économies d’énergie. Souvenez-vous qu’au départ, les communes qui triaient leurs déchets dépensaient plus que les autres, avant que le Gouvernement de l’époque n’y mette bon ordre.

M. René Couanau. J’ai moi-même déposé un amendement qui, s’il ne tombe pas sous le coup de l’article 40, vise à ce que la part de la taxe prélevée sur les entreprises et les collectivités territoriales soit consacrée à des investissements dans les transports collectifs et l’habitat. Malgré le remboursement d’une partie de la taxe, les ménages habitant les zones rurales seront sanctionnés par la taxe carbone puisqu’ils sont contraints par le coût élevé du foncier et de la construction à habiter loin des centres-villes pendant que nous, élus, aménageons des réseaux de transports collectifs aussi denses que possible. Ne pas affecter une part de la taxe carbone à des investissements pour améliorer les transports collectifs témoigne d’un manque de logique et de cohérence !

M. Henri Emmanuelli. Je suis surpris de la réponse du rapporteur général. Pour limiter l’utilisation de la voiture dans ma circonscription, nous avons mis en place des navettes au tarif forfaitaire de 2 euros, ce qui représente pour la collectivité un coût minimum de 3 millions d’euros. Pour nous, ce sera la double peine : nous paierons le déficit de nos lignes sans pour autant récupérer le produit de la taxe.

M. Henri Nayrou. Je voterai les amendements car ils permettent de prendre en compte le lieu de résidence des habitants, en particulier ceux des zones rurales. J’en proposerai d’autres pour ma part en article 88 pour améliorer le remboursement de la taxe aux personnes qui rencontrent des difficultés de transports et pour limiter les surcoûts inacceptables de la taxe sur le chauffage dans certaines régions.

M. Michel Diefenbacher. S’agissant d’un objectif d’intérêt général, les collectivités territoriales se doivent de participer à l’effort national, d’autant que la somme de 160 millions qui correspond à l’ensemble des collectivités territoriales de France reste très modeste.

Selon les différents ministres que nous avons auditionnés, la taxe représenterait pour les ménages un effort d’environ 2,6 milliards d’euros, intégralement compensé, alors même que l’effort consenti par l’État pour inciter les ménages à s’équiper de matériels économes en énergie atteint également 2,6 milliards d’euros : nous sommes bien dans une logique vertueuse.

M. Christian Eckert. Monsieur le rapporteur général, pouvez-vous me confirmer que les transports publics seront exonérés de la taxe carbone ? Qu’en est-il à cet égard des transports privés de voyageurs ?

M. René Couanau. Pour ce qui est du remboursement aux ménages, je pense comme M. de Rugy qu’une commission de suivi serait utile pour connaître les effets du signal prix donné par cette disposition.

Il me semble par ailleurs hypocrite que ceux qui ont longtemps demandé d’alléger la charge que représente la taxe professionnelle pour les entreprises affirment aujourd’hui que la suppression de cette taxe au 1er janvier justifierait que l’on inflige aux entreprises un coût de 2 milliards d’euros. On éviterait ce soupçon en consacrant cette somme à des équipements indispensables. En effet, pour que le taux de la taxe carbone puisse monter en puissance, il faudra que l’organisation de nos transports collectifs en fasse autant, ce qui suppose des investissements.

M. le rapporteur général. Monsieur Eckert, les transports publics routiers de voyageurs sont exonérés de la taxe carbone, qu’ils soient assurés par des opérateurs publics ou privés. Plus précisément, ces transports bénéficient d’un remboursement partiel de TIPP, qui sera majoré de la totalité du coût supplémentaire de la taxe carbone.

Les ménages paieront 2,6 milliards d’euros, qui leur seront intégralement rendus. Par ailleurs, 1,9 milliard d’euros sera payé par les entreprises et les collectivités locales. Quant aux collectivités locales, les 160 millions d’euros qu’elles paient vont au budget de l’État, ce qui se justifie par le fait qu’elles sont chargées comme lui d’une politique publique d’économie d’énergie et ont donc le devoir d’en assumer aussi le coût.

La Commission adopte les trois amendements identiques (amendement n° I – 49).

Elle est ensuite saisie de l’amendement I-CF 30 de M. François de Rugy.

M. François de Rugy. Mon amendement tend à inscrire explicitement dans la loi la création d’une commission de suivi de la taxe carbone, afin d’assurer la plus grande transparence possible quant aux recettes et à la redistribution réelles, ainsi qu’à l’efficacité de cette mesure, en vue de l’évolution ultérieure du taux de la taxe.

M. le rapporteur général. Je suis favorable à une telle commission, qui aura un rôle très important. Une rectification rédactionnelle s’impose toutefois : le nouvel alinéa proposé doit figurer non après le « quatrième », mais après le « dernier » alinéa de l’article.

M. Charles de Courson. Je voterai cet amendement, mais il conviendrait de le réécrire pour préciser quels seront les principes de la composition de la commission.

M. le rapporteur général. La discussion en séance publique pourra permettre d’évoquer la composition de la commission. Il est inutile de l’écrire dans la loi.

La Commission adopte cet amendement (amendement n° I – 51).

Après avis défavorable du rapporteur général, la Commission rejette les amendements I-CF 16, I-CF 17 et I-CF 18 de M. François de Rugy.

Elle est ensuite saisie de l’amendement I-CF 247 de M. Christophe Caresche.

M. Jean Launay. Les carburants d’aéronef ne font l’objet d’aucune taxation au titre de la TIPP. Afin de mettre un terme à cette situation aberrante, le présent amendement tend à intégrer les carburants d’aéronef dans l’assiette de la taxe carbone.

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Avis défavorable.

M. Charles de Courson. Je rappelle que la convention de Chicago interdit toute taxation sur le kérosène. Une telle disposition ne pourrait s’appliquer qu’aux lignes intérieures françaises ou aux lignes intracommunautaires, dans le cadre d’accords bi- ou multilatéraux.

M. le rapporteur général. C’est exact : les vols internationaux sont soumis à la convention de Chicago et les vols intracommunautaires à une directive européenne qui les exonère de taxe. Une telle disposition ne pourrait donc s’appliquer qu’aux vols intérieurs.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement I-CF 7 de M. Marc Le Fur.

M. Marc Le Fur. Cet amendement vise lui aussi à appliquer la taxe carbone aux aéronefs, qui émettent davantage de CO2 que les voitures ou les camions. En outre, les usagers de l’avion ne font pas partie des contribuables les plus modestes !

M. Pierre-Alain Muet. Je soutiens cet amendement. Pour que la taxe carbone ait un sens, il convient que tous les pays l’adoptent. En matière de lutte contre l’effet de serre, où il s’agit de limiter le stock d’émissions, une taxe paraît plus efficace que des quotas.

La négociation internationale entamée à Copenhague va durer plusieurs années. Nous devons envoyer un signal fort en direction du plus gros émetteur de gaz à effet de serre dans le domaine des transports.

M. le rapporteur général. Avis défavorable, pour les raisons évoquées précédemment.

M. Richard Dell’Agnola. Ajoutons que le transport aérien subit de plein fouet les effets de la crise. Air France est en difficulté. Il est inutile d’en rajouter !

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle est saisie de deux amendements identiques I-CF 28 de M. Marc Le Fur et I-CF 79 de M. Charles de Courson.

M. Marc Le Fur. Le dispositif gouvernemental soumet les services de transport routier, non à la taxe carbone, mais à la taxe générale sur les activités polluantes, laquelle sera payée par le donneur d’ordre et, de fait, portera sur le produit transporté – tout comme l’écotaxe créée par la loi Grenelle 1. On estime que la TGAP s’élèvera à 1 % du chiffre d’affaires. Résultat : il existera deux taxes sur le même objet, payées par les mêmes personnes.

Par ailleurs, les réponses de Mme Lagarde sur l’application de la TGAP aux affréteurs étrangers sont peu satisfaisantes. Si ceux-ci font appel à des sociétés étrangères pour transporter, en France, des marchandises d’origine étrangère, nos entreprises subiront une concurrence déloyale.

Dans ce cadre, l’amendement I-CF 29, qui sera appelé ultérieurement, tend à supprimer la TGAP sur les transports. En contrepartie, je propose que les services de transport routier soient soumis, non à la TGAP, mais à la taxe carbone, suivant un mécanisme proche de celui destiné aux professions agricoles, avec une exonération partielle et la mutualisation d’une partie de la recette.

Je souligne qu’un camion parcourt en moyenne cent kilomètres, notamment pour transporter des produits frais, et qu’il n’existe pas d’alternative ferroviaire.

M. le rapporteur général. La taxe carbone vise à réduire les émissions de CO2. Compte tenu de la jurisprudence du Conseil constitutionnel, qui a refusé l’extension de la TGAP à l’électricité, je ne vois pas comment pourrait être accepté un système dans lequel on créerait une taxe carbone dont seraient exonérés les principaux émetteurs de CO!

Dans le dispositif gouvernemental, les transporteurs sont soumis à la taxe carbone, mais elle leur est remboursée, au même titre qu’une fraction de la TIPP. Comme il faut que le transport routier soit concerné par la taxation des émissions de CO2, on crée un mécanisme en miroir, qui consiste à faire payer à l’affréteur une TGAP d’un montant égal à celui de la taxe carbone.

Le système est assez compliqué, je le reconnais, mais il a été conçu de manière à pénaliser le moins possible les transporteurs routiers français par rapport à la concurrence internationale, dans la mesure où la TGAP est exigible pour tout transport de marchandises sur le territoire national, même ceux effectués par des opérateurs étrangers.

Certes, on peut mettre au point des stratagèmes afin d’échapper à la taxation, mais il s’agit de cas isolés. N’allons pas pour autant supprimer la TGAP sur les transports !

M. Jérôme Cahuzac. Le dispositif gouvernemental atteint là ses limites.

Le but d’une taxe est de modifier les comportements. Or, comme l’a souligné Marc Le Fur, il n’existe pas d’alternative au transport routier. Cette taxe est une pénalisation, non une incitation, puisque rien n’est prévu pour financer une solution de remplacement.

Du coup, le Gouvernement en est réduit à imaginer un dispositif extraordinairement complexe pour donner le change. Comment s’y prendra-t-on pour faire payer les affréteurs, dès lors que le point de départ ou d’arrivée du transport se trouvera à l’étranger ? Tout cela procède d’une volonté d’affichage, plutôt que d’une véritable démarche écologique.

M. Marc Le Fur. La taxe ne pourra pas s’appliquer aux transports réalisés en France par un transporteur étranger à l’initiative d’un donneur d’ordre étranger.

M. le rapporteur général. Dès lors que la marchandise est livrée en France, le transport est facturé et la taxe due.

M. Marc Le Fur. Mais comment aura-t-on connaissance de la facture éditée par un transporteur polonais à un affréteur allemand pour la livraison d’un produit fabriqué en Bavière ?

En outre, on ne peut pas prélever deux impôts, la TGAP et l’écotaxe, sur un même objet !

M. le rapporteur général. Il reviendra à l’administration des douanes de contrôler que le client français, redevable de la TGAP, a bien payé celle-ci.

M. Charles de Courson. Les amendements I-CF 28 et I-CF 79 visent à empêcher la diminution de tout ou partie de la demande de remboursement, à hauteur du tarif de la taxe carbone prévue à l’article 266 quinquies C pour le gazole d’indice 22, par le biais d’un certificat qui serait cessible.

M. le rapporteur général. Je suis prêt à sacrifier ces certificats – dispositif d’exonération très compliqué qui n’a aucune chance de fonctionner –, pourvu que l’essentiel, c’est-à-dire la TGAP transport, soit sauvé.

La Commission adopte ces amendements identiques (amendement n° I - 50).

Elle est ensuite saisie d’un amendement I-CF 19 de M. Marc Le Fur.

M. Marc Le Fur. Mon amendement visant à supprimer la TGAP ayant peu de chances d’être adopté, je propose d’appliquer au transport routier la taxe carbone selon les modalités auxquelles est soumise l’agriculture : 75 % étant remboursés, les 25 % restants sont mutualisés pour œuvrer à réduction des émissions de CO2.

M. le rapporteur général. Le Conseil constitutionnel sanctionnerait cette disposition, dans la mesure où les transporteurs sont les émetteurs principaux. Avis défavorable.

M. Marc Le Fur. Dans ce cas, l’ensemble du dispositif sera annulé puisqu’il exonère de l’acquittement de la taxe carbone les 1 000 plus gros pollueurs de France.

M. le rapporteur général. Ils sont soumis aux quotas !

M. Marc Le Fur. Donc, pas à un impôt !

M. Michel Diefenbacher. Cet amendement est satisfait puisque le projet de loi de finances prévoit un remboursement à 100 %.

L’amendement suivant pose en revanche un problème de fond. La suppression de la TGAP pourrait fragiliser l’ensemble du secteur.

M. Marc Le Fur. La TGAP provoquera un renchérissement considérable du coût des produits transportés.

La Commission rejette cet amendement.

Puis la Commission est saisie de deux amendements identiques I-CF 29 de M. Marc Le Fur et I-CF 78 de M. Charles de Courson.

M. Marc Le Fur. Alors que nous venons d’adopter un impôt ayant le même objet dans le cadre du Grenelle 1, il me semble disproportionné de voter un impôt spécifique sur les produits transportés, qui représente 1 % du chiffre d’affaires du secteur.

M. Charles de Courson. J’ai soumis à Mme Lagarde le problème suivant : comment calculer la TGAP sur quatre machines outils produites à Berlin, transportées par un camion tchèque et livrées successivement à Bruxelles, Lille, Luxembourg puis Berne ? La ministre a répondu que le calcul se ferait d’après la lettre de voiture et serait basé sur la distance entre la frontière et le lieu de livraison en France, le rendement au kilomètre étant estimé à partir de celui des camions de 40 tonnes.

Comment va-t-on calculer le prorata, étant entendu que la TGAP ne peut s’appliquer sur le transit en France des deux machines restant à livrer ? Comment va-t-on parvenir à exploiter les lettres de voiture, qui ne sont généralement pas transmises ? Combien de fonctionnaires seront-ils employés à cette tâche ? Cette taxe est une usine à gaz.

Par ailleurs, elle est discriminatoire à l’encontre des transporteurs français. Les transporteurs étrangers y échapperont, ne serait-ce que parce que les réservoirs des camions peuvent contenir jusqu’à 1 000 litres d’essence.

On confond aussi la répercutabilité juridique et la répercutabilité économique. Certes, on pourra répercuter via le chargeur, mais celui-ci exigera en retour une baisse du prix, sans quoi il ira à la concurrence étrangère.

Les bénéfices de la branche transports sont tombés à 1 % du chiffre d’affaires. Le montant de la TGAP représentant la même proportion, il est fort à craindre que le secteur, déjà mal en point, sera bientôt sinistré. Les transporteurs étrangers, qui respectent moins le code de la route et les normes sociales, et dont les camions sont plus polluants, auront alors supplanté leurs homologues français.

Enfin, je me demande si cette disposition ne sera pas annulée par le conseil constitutionnel au motif qu’elle est inintelligible.

M. Marc Le Fur. Permettez-moi de vous soumettre un autre problème, celui du fret retour des camions province-Paris. Dans la mesure où la TGAP est assise sur le volume de carburant consommé pour l’exécution du transport, même si le volume de marchandises transportées au retour est faible, la TGAP sera néanmoins applicable. C’est une logique absurde.

M. Jérôme Cahuzac. Ce raisonnement s’applique-t-il au fret maritime ?

M. Charles de Courson. Le fret maritime est exonéré.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette ces amendements.

Puis elle examine l’amendement I-CF 80 de M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. Cet amendement prévoit un plafonnement de la taxe carbone afin de protéger les ménages et les entreprises en cas d’envolée du prix du baril de pétrole. Au passage, il montre qu’avec un baril à 120 dollars, la taxe carbone devient inutile.

M. le rapporteur général. Le montant de la taxe est fixé uniquement pour 2010. Cet amendement est inutile.

M. Charles de Courson. Le ministre de l’environnement a pourtant rappelé qu’il fallait une lisibilité à moyen et long terme pour optimiser les investissements en économie d’énergie.

L’amendement est retiré.

La Commission est saisie de l’amendement I-CF 219 de M. Jérôme Cahuzac.

M. Jérôme Cahuzac. La loi de finances pour 2006 avait repoussé au 1er janvier 2010 l’instauration de la TGAP dans les DOM, en raison de l’absence d’unité de production de biocarburants. La situation demeurant inchangée, la mission d’information commune aux commissions des finances et des affaires économiques sur le prix des carburants dans les DOM propose de supprimer définitivement l’application de la TGAP dans les départements d’outre-mer.

Telles sont les limites d’une taxation dont la finalité est de modifier les comportements, alors que rien n’est fait pour aider à la modification des comportements.

M. le rapporteur général. N’y a-t-il aucun projet de production d’éthanol à partir de la canne à sucre ?

M. Charles de Courson. Le problème provient de ce que les normes appliquées dans les DOM les empêchent d’importer leur essence depuis les pays voisins, États-Unis et Venezuela, avec des coûts de transport évidemment moindres. Pourquoi ne pas négocier directement avec l’Europe des critères spécifiques, un traitement identique à celui des TOM ?

M. Jérôme Cahuzac. Cela serait difficile, dans la mesure où ces normes ont été adoptées sous la présidence française.

M. Henri Emmanuelli. Cela n’a rien à voir avec l’Europe. Il s’agit plutôt de protéger des situations acquises !

M. Michel Diefenbacher. À ma connaissance, les normes européennes appliquées dans les DOM seront appliquées au Venezuela et dans les États de la Caraïbe dans un délai de deux ans. Il sera alors possible aux DOM de s’approvisionner en carburant dans des conditions beaucoup plus faciles.

Pour répondre à la question du rapporteur général, la totalité de la production de sucre est destinée à l’alimentation.

M. Jérôme Cahuzac. Le délai sera vraisemblablement de cinq ans. C’est pourtant un horizon proche, qui rend inutile une demande de dérogation auprès de l’Union.

Après avis favorable du rapporteur général, la Commission adopte l’amendement (amendement n° I – 87).

Puis la Commission adopte l’article 5 ainsi modifié.

*

* *

Après l’article 5 :

La Commission est saisie de l’amendement I-CF 76 de M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. La loi de finances pour 2009 comportait une clause de revoyure annuelle concernant le niveau de défiscalisation des biocarburants, pour tenir compte de l’évolution des conditions économiques. Le prix du baril de pétrole a considérablement chuté, la parité euro/dollar a sensiblement évolué et les prix des matières premières agricoles ont énormément changé, à tel point que la compétitivité des biocarburants s’est fortement dégradée. Il convient par conséquent de stabiliser le niveau de défiscalisation pour 2010 et 2011.

M. le rapporteur général. Avis défavorable. L’an dernier, après une discussion très longue, nous avions trouvé un point d’équilibre concernant l’évolution sur trois ans. Du reste, rapport après rapport, l’avantage environnemental des biocarburants est contesté.

M. Charles de Courson. L’objectif communautaire est une réduction des émissions d’au moins 35 %. Or, le rapport publié il y a quelques jours par l’ADEME, l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie, montre que le résultat obtenu va de 45 à 70 % selon les filières. La réalité a été travestie. Il convient en réalité de distinguer les biocarburants selon leur pays d’origine : le bilan du bioéthanol du Brésil, par exemple, est très mauvais, car il est produit sur des terrains issus de la déforestation ; en revanche, dans les pays de l’Union européenne, le bilan est bon.

M. le rapporteur général. Le rapport de l’ADEME exprime tout de même des doutes à propos des gains en émissions avec l’ETBE.

M. Charles de Courson. Vous avez pourtant voté l’amendement de Courson dit « E 10 », qui permet l’incorporation directe.

La Commission rejette l’amendement I-CF 76.

Article 6

Création d’un crédit d'impôt sur le revenu forfaitaire destiné à rendre aux ménages le montant de la taxe carbone

Afin de compenser, pour les ménages, le renchérissement de la facture énergétique résultant de la taxe carbone, le présent article a pour objet de créer un crédit d’impôt sur le revenu forfaitaire dont le coût, pour les finances publiques, sera strictement égal au produit de ladite taxe payé par les ménages, soit 2,65 milliards d’euros en 2010.

I.– LE NOUVEAU CRÉDIT D’IMPÔT

A.– LE RÉGIME DU CRÉDIT D’IMPÔT

Les alinéas 1 et 2 du présent article introduisent dans le code général des impôts un nouvel article 200 quindecies instituant un crédit d’impôt en faveur des contribuables personnes physiques fiscalement domiciliées en France métropolitaine et dans les départements d’outre-mer (46).

Le montant de ce crédit d’impôt, fixé à 46 euros, est forfaitaire, modulé à partir de deux critères qui sont :

● La composition de la famille du contribuable

Les couples soumis à imposition commune (mariés ou pacsés) bénéficieront d’un crédit d’impôt doublé (alinéa 4). Celui-ci sera en outre majoré de 10 euros par personne à charge au sens des articles 196 à 196 B du code général des impôts (47) (alinéa 5). Toutefois, la majoration de 10 euros sera divisée par deux pour les enfants réputés à charge égale de l’un et l’autre de leurs parents ;

● L’intégration ou non du domicile du contribuable dans un périmètre de transports urbains (PTU) défini à l’article 27 de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 d’orientation des transports intérieurs, c'est-à-dire dans « le territoire d'une commune ou le ressort territorial d'un établissement public ayant reçu mission d'organiser les transports publics de personnes » (48) (alinéa 3).

L’intégration ou non dans un PTU est le critère retenu par le présent article pour distinguer entre les contribuables « ruraux » et les contribuables « urbains », les premiers bénéficiant d’un crédit d’impôt majoré à 61 euros. En effet, selon des simulations réalisées à partir de l’étude « Budget des familles 2006 » de l’INSEE, il apparaît que les ménages « ruraux » subiront un surcoût lié à la taxe carbone de l’ordre de 20 à 30 euros par an.

Le tableau suivant présente quelques exemples de calcul du crédit d’impôt selon la situation familiale et le lieu du domicile du contribuable :

(en euros)

 

Domicile situé en milieu urbain

Domicile situé en milieu rural

Célibataire

46

61

Couple soumis à imposition commune

92

122

Couple soumis à imposition commune ayant deux enfants à charge

112

142

La qualité du contribuable, c'est-à-dire sa situation de famille et le lieu de son domicile, sera appréciée au 31 décembre de l’année d’imposition (alinéa 6).

Enfin, de manière classique pour les crédits d’impôt, celui-ci sera imputé sur l’impôt sur le revenu du contribuable après imputation des réductions d’impôt mentionnées aux articles 199 quater B à 200 bis, 200 octies et 200 decies A du code général des impôts, et après imputation des crédits d’impôts et des prélèvements ou retenues non libératoires. S’il excède l’impôt dû, l’excédent sera restitué (alinéa 7).

B.– UN PREMIER VERSEMENT ANTICIPÉ DÈS 2010

Le nouveau crédit d’impôt institué sera applicable, en application de l’alinéa 14, à compter de l’imposition des revenus de l’année 2009. Cependant, afin de rapprocher autant que possible dans le temps le paiement de la taxe carbone de sa compensation, il sera versé par anticipation en 2010 dans les conditions suivantes (alinéa 8) :

– pour les contribuables compris dans les rôles de l’année 2008, le versement par anticipation du crédit d’impôt prendra la forme d’une diminution du premier acompte dès lors qu’ils sont soumis aux acomptes trimestriels (alinéas 9 et 10(49) ;

– pour les contribuables non compris dans les rôles de l’années 2008, le crédit d’impôt leur sera versé par anticipation via un « chèque vert », sur leur demande formulée avant le 30 avril 2010 (alinéa 11).

La date limite du 30 avril 2010 retenue pour les demandes formulées par les contribuables concernés répond à des impératifs techniques de gestion fiscale. Il s’agit en pratique d’offrir un délai suffisant d’option tout en maintenant une dissociation entre la période d’ouverture du droit à versement du crédit d'impôt et le début de la période de réception des déclarations de revenus (50) de l’année 2009 (autour du 1er mai 2010).

Cependant, l’anticipation automatique du crédit d'impôt concernera l’essentiel des contribuables non imposables. Seuls les nouveaux contribuables primo-déclarants, inconnus des bases de données de l’administration fiscale, seront tenus de déposer une demande simplifiée, sur la base d’un modèle qui sera établi par l’administration, aux services des impôts des particuliers ou aux trésoreries principales dont dépend leur domicile fiscal.

Par exception, en 2010, la condition liée au domicile sera appréciée au 1er janvier de l’année d’imposition et non au 31 décembre (alinéa 12).

La régularisation des versements anticipés interviendra lors de la liquidation de l’impôt afférent aux revenus de l’année d’imposition, après imputation éventuelle des différents crédits d’impôt et de la PPE (alinéa 13). Les circonstances de régularisations devraient être limitées et souvent en faveur du contribuable. Elles n’affecteront que les éventuelles majorations ou absences de majoration et concerneront en conséquence deux catégories d’événements :

– les modifications liées à la situation familiale (nombre d’enfants ou de personnes rattachées) ;

– les modifications liées à la situation géographique (inclusion ou exclusion d’un périmètre de transport urbain).

II.– UNE COMPENSATION INTÉGRALE DE LA TAXE CARBONE AUX MÉNAGES, MAIS DES DIFFICULTÉS D’APPLICATION

Le Gouvernement a fait le choix de la simplicité – un crédit d’impôt forfaitaire, modulé uniquement en fonction de la composition de la famille du contribuable et de l’intégration ou non de son domicile dans un PTU. Ce crédit d’impôt traduit l’engagement de rendre aux Français le produit de la taxe. Il revêt également un caractère incitatif : si un contribuable réduit sa consommation d’énergie, il paiera moins de taxe carbone mais le crédit d’impôt, forfaitaire, lui restera acquis.

Ce choix d’un crédit d’impôt forfaitaire, aussi simple qu’il soit, n’est cependant pas exempt d’inconvénients, notamment parce qu’il ne peut tenir compte de l’ensemble des situations de fait des contribuables, dont la conséquence est le caractère parfois inéquitable de la compensation.

A.– UNE COMPENSATION GLOBALE « À L’EURO PRÈS »
DONT CERTAINS SERONT GAGNANTS ET D’AUTRES PERDANTS

L’article 2 de la loi n° 2009-967 du 3 août 2009 de programmation relative à la mise en œuvre du Grenelle de l'environnement dispose notamment que la création de la taxe carbone « sera strictement compensée par une baisse des prélèvements obligatoires de façon à préserver le pouvoir d'achat des ménages et la compétitivité des entreprises ». De même, le Président de la République s’est engagé à ce que celle-ci « s’accompagne de la baisse simultanée et équivalente à l’euro près d’un autre impôt », en l’occurrence l’impôt sur le revenu pour les ménages.

C’est pourquoi, en 2010, le coût de ce crédit d’impôt – 2,65 milliards d’euros – sera en théorie équivalent au produit de la taxe carbone payée par les ménages. À l’avenir, si le taux de la taxe carbone augmente, la compensation augmentera parallèlement afin de garantir la stricte neutralité de la taxe pour les ménages. Dans le même discours, le Président de la République a confirmé en effet que « quelle que soit la progression de la taxe carbone, sa compensation aux Français augmentera exactement dans les mêmes proportions ». Le coût du crédit d’impôt se répartit ainsi :

(En milliards d’euros)

Éléments du coût

Montant

Crédit d’impôt pour les ménages « urbains »

1,31

Crédit d’impôt pour les ménages « ruraux »

1,16

Majoration par personne à charge

0,18

Total

2,65

Source : ministère de l’Économie, des finances et de l’industrie

Cependant, si le produit de la taxe carbone payée par les ménages sera bien reversé intégralement auxdits ménages, il est évident que le choix d’un crédit d’impôt forfaitaire aura pour conséquence que chaque ménage ne recevra pas l’équivalent de ce qu’il a versé au titre de la taxe carbone. Certains seront gagnants, d’autres perdants.

Selon la DGTPE, dont les calculs reposent sur l’exploitation des données de l’enquête « Budget des familles 2006 » de l’INSEE, l’impact de la taxe carbone sur les ménages s’établit comme suit :

 

Gain net moyen (en euros)

Décile de niveau de vie

Rural

Urbain

Ensemble

D1

17

30

25

D2

8

21

15

D3

8

17

13

D4

9

14

12

D5

0

8

4

D6

– 8

– 3

– 5

D7

– 19

– 9

– 13

D8

– 14

– 2

– 7

D9

– 23

– 13

– 17

D10

– 45

– 21

– 27

Source : DGTPE

Par conséquent, les cinq premiers déciles, tant ruraux qu’urbains, seront surcompensés alors que les cinq derniers déciles seront sous-compensés. Même si, formellement, les ménages bénéficieront d’un crédit d’impôt forfaitaire quel que soit leur niveau de vie, celui-ci permettra dans les faits de redistribuer les revenus des ménages les plus aisés – qui consomment le plus –vers ceux les ménages les plus modestes – qui consomment le moins.

B.– LES CONTRIBUABLES SE CHAUFFANT À L’ÉLECTRICITÉ SERONT COMPENSÉS COMME CEUX QUI SE CHAUFFENT AU FIOUL DOMESTIQUE

L’électricité ne sera pas soumise à la taxe carbone. Si cette exclusion est parfaitement justifiée (cf. le commentaire de l’article 5), elle introduit une distorsion entre deux types d’énergie concurrente pour le chauffage domestique : le fioul et l’électricité. Un même contribuable, selon qu’il se chauffe au fioul domestique ou à l’électricité, paiera ou non la taxe carbone mais, dans les deux cas, il sera compensé par un crédit d’impôt d’égal montant.

Du point de vue macroéconomique, il va sans dire que le chauffage électrique bénéficiera d’un avantage par rapport au chauffage au fioul, avantage qui sera, à n’en pas douter, mis en avant par les installateurs et qui s’accroîtra à mesure que le taux de la taxe carbone augmentera.

C.– LE CRITÈRE DE L’INTÉGRATION OU NON DANS UN PTU
SERA DIFFICILE À APPLIQUER DANS LES FAITS

Outre la composition de la famille du contribuable, le montant du crédit d’impôt reposera sur l’accès ou non de celui-ci aux transports en commun, mesuré par l’intégration ou non de son domicile dans un périmètre des transports urbains (PTU).

Cependant, les PTU ne font pas référence à un réseau réel de transport public urbain mais au ressort territorial de l’autorité administrative compétente en la matière, souvent un EPCI. Il est donc possible – et le fait est avéré – que le réseau des transports urbains d’un PTU ne couvre pas la totalité du territoire de la ou des communes concernées, obligeant les habitants des parties de communes) qui ne sont pas desservies à recourir à leur véhicule personnel.

En outre, c’est un schéma directeur (le SDRIF) qui couvre l’Île-de-France. La rédaction du présent article aura donc pour effet de faire bénéficier l’ensemble des ménages franciliens, y compris parisiens, du crédit d’impôt majoré, au même titre que les ménages « ruraux ». Il conviendra donc de corriger cette rédaction en instaurant un dispositif spécifique à l’Île-de-France.

De plus, même si une commune est dans un PTU, par exemple une commune de banlieue, rien ne garantit que le contribuable y résidant soit en mesure d’utiliser les transports en commun s’il travaille à l’extérieur de celui-ci. Le PTU organise un réseau de transport à l’intérieur d’un territoire donné – et encore, pas toujours sur l’ensemble de celui-ci – mais pas en dehors, pas plus que les liaisons avec les communes qui n’en font pas partie. Certains contribuables, bien qu’ayant leur domicile formellement intégré à un PTU, risquent néanmoins d’être obligés d’utiliser leur véhicule personnel – comme les contribuables « ruraux » – mais sans pour autant bénéficier d’un crédit d’impôt majoré.

Enfin, à l’inverse, des ménages « ruraux » bénéficieront d’un crédit d’impôt majoré alors même que, de par leur profession (commerçants, travailleurs à domicile…), ils pourraient n’utiliser que fort peu – pas plus que les ménages « urbains » – leur véhicule personnel. Le caractère forfaitaire du crédit d’impôt ne peut, par définition, prendre en considération l’ensemble des situations de fait des contribuables.

*

* *

La Commission est saisie de l’amendement I-CF 209 rectifié de M. Jérôme Cahuzac.

M. Jérôme Cahuzac. Il s’agit de rendre plus juste la redistribution aux ménages en la calant sur les tranches du barème de l’IR. Nous proposons en outre de multiplier le crédit d’impôt par 1,3 pour les contribuables domiciliés dans une commune non intégrée à un périmètre de transports urbains. Contrairement aux affirmations de Mme Lagarde, dans de très nombreuses villes possédant un plan de déplacements urbains, tout le territoire communal n’est pas couvert. Il est donc nécessaire de nuancer la règle proposée par le Gouvernement.

M. le rapporteur général. Avis défavorable. Pour les ménages des cinq premiers déciles de revenu, qu’ils soient urbains ou ruraux, le remboursement excédera le coût moyen subi au titre de la taxe carbone. L’effet redistributif, certes léger, est donc réel, ce qui répond partiellement à la préoccupation de notre collègue Cahuzac.

M. Jérôme Cahuzac. J’attire également l’attention sur le fait que les transports collectifs ne couvrent pas la totalité du territoire des collectivités qui en sont pourvues, loin s’en faut, et, objectivement, les ménages non desservis sont pénalisés par rapport aux autres. C’est notamment le cas dans de nombreuses communes dites « rurbaines », très étendues, dans lesquelles les transports collectifs ne couvrent que le centre-ville.

M. René Couanau. Lorsque le Gouvernement a présenté la taxe carbone, il a indiqué que la localisation de l’habitation serait prise en compte. Or certaines zones périurbaines ou semi-rurales sont très mal desservies en transports collectifs. En vertu de l’article 40 et de l’orthodoxie budgétaire chère à la Commission et à son président, vous avez osé refuser un de mes amendements, qui visait à affecter une partie du produit de la taxe carbone au développement des transports collectifs.

Je partage l’avis de M. Cahuzac : nous ne pouvons nous contenter d’un signal-prix. Vous ne tenez pas compte de la spécificité des populations semi-rurales, qui demeurent assez loin de leur lieu de travail. Dans la vie courante, cette taxe sera une charge supplémentaire.

M. Pierre-Alain Muet. Tous les pays qui ont instauré une vraie taxe carbone, d’un montant suffisant, prévisible et croissant dans le temps, ont mis en œuvre, dans le même temps, une vraie réforme fiscale. Le but d’une taxe écologique n’est pas de pénaliser les consommateurs mais de modifier un prix. Peut-être le coût s’équilibre-t-il en moyenne, mais certainement pas pour les ménages vivant en milieu rural avec des revenus modestes. La contribution climat-énergie aurait dû faire partie d’une réforme d’ensemble, avec une redistribution pour les revenus les plus bas.

La Commission rejette cet amendement.

La Commission examine en discussion commune les amendements I-CF 245 de M. Christophe Caresche et I-CF 210 de M. Jérôme Cahuzac.

M. Jean Launay. Vous ne serez pas surpris que, dans un souci de justice fiscale, nous revenions sur le bouclier fiscal. Il nous semble que ses bénéficiaires ne devraient pas être concernés par le crédit d’impôt forfaitaire créé pour compenser l’impact de la taxe carbone sur le pouvoir d’achat.

M. le rapporteur général. Avis défavorable. Le dispositif de compensation prend en compte deux critères simples : la taille de la famille et la possibilité d’utiliser les transports en commun. Jamais il n’a été envisagé de faire de cette compensation un outil de redistribution fiscale, contrairement à la prime pour l’emploi.

M. le président Didier Migaud. Pour éviter les formalités administratives, peut-être pourrions-nous suggérer qu’un chèque unique soit adressé aux bénéficiaires du bouclier fiscal ?

M. René Couanau. Les ménages bénéficiaires du bouclier fiscal recevront-ils aussi un chèque de crédit d’impôt pour compenser la taxe carbone ?

M. le président Didier Migaud. Bien sûr !

M. le rapporteur général. La TIPP et la taxe carbone ne sont pas intégrées dans le calcul du bouclier fiscal. En outre, je vous rappelle que 80 % des contribuables bénéficiant du bouclier fiscal ne paient pas l’ISF, et que les 20 % des contribuables qui paient l’ISF et bénéficient du bouclier fiscal perçoivent 90 % des restitutions.

M. Daniel Garrigue. Votre raisonnement est un peu spécieux, monsieur le rapporteur général : pour éviter de remettre le bouclier fiscal en cause, on ne touche plus les prélèvements à caractère général et on les contourne avec des taxations indirectes. Cela participe d’une logique qui vise à démolir progressivement l’impôt. Sans doute aurons-nous besoin un jour de recettes fiscales, et le problème ne sera pas résolu en développant constamment les taxations indirectes. Vous êtes enfermé dans une position dogmatique indéfendable, surtout en période de crise, et vous refusez d’affronter le problème de face.

M. le président Didier Migaud. Les bénéficiaires du bouclier fiscal qui recevront un chèque de 46 euros se feront une mauvaise idée de notre administration. Ou alors, s’ils croient que cette somme correspond à leur restitution, ils risquent de subir un choc ! Tout cela est bien maladroit !

M. Jérôme Cahuzac. Depuis l’adoption du paquet TEPA – en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat –, le Gouvernement et les membres de la majorité ont toujours affirmé que le bouclier fiscal était une mesure de justice fiscale, empêchant que quiconque travaille plus d’un jour sur deux pour l’État. Mais alors, pourquoi le bouclier fiscal ne protège-t-il pas contre la taxation carbone alors qu’il protège, par exemple, contre le financement du RSA, le revenu de solidarité active ? En quoi la taxation carbone serait-elle plus légitime ou plus noble que le financement collectif du RSA ? Vous ne tiendrez pas sur cette ligne. Le président de la Commission des lois, membre de la majorité, a lui-même demandé que la CRDS soit extraite de cette protection. Vous avez l’occasion d’adresser un signal aux pouvoirs publics, en particulier à la Présidence de la République, pour expliquer que tout cela n’a que trop duré.

M. Jean Launay. Il est de plus en plus compliqué de s’en tenir au dogme, monsieur le rapporteur général. Même si le chèque ne sera que de 46 euros, il ne s’agit pas seulement d’un symbole mais d’un problème de fond. Tout à l’heure, à propos de la taxation supplémentaire des banques, nous avons obéi au principe de réalité. Vous devriez avancer aussi sur ce sujet.

M. Henri Emmanuelli. D’après certains inspecteurs des impôts, il arrive que des contribuables non imposables perçoivent des revenus élevés, notamment au titre de l’assurance vie – plusieurs centaines de milliers d’euros parfois –, et reçoivent pourtant un chèque de remboursement de la moitié de leurs impôts locaux. C’est de la folie !

La Commission rejette ces amendements.

Puis elle est saisie de l’amendement I-CF 211 de M. Jérôme Cahuzac.

M. Jérôme Cahuzac. Nous ne concevons pas la taxe carbone de la même façon que vous. Au-delà du signal-prix et des modifications de comportement, nous souhaitons qu’elle contribue à la justice fiscale. C’est pourquoi nous demandons que la restitution ne bénéficie qu’à une partie des ménages redevables de l’impôt sur le revenu.

M. le rapporteur général. Cet amendement procède de la même idée que le précédent : employer la taxe carbone comme instrument de redistribution entre ménages en fonction des ressources. Or le critère des ressources n’a pas été retenu ; c’est un remboursement forfaitaire qui a été choisi, en fonction de la composition de la famille et du lieu de résidence.

La Commission rejette cet amendement.

Elle en vient à l’amendement I-CF 246 de M. Christophe Caresche.

M. Pierre-Alain Muet. Même si ce n’est pas son objectif, une taxe carbone, de fait, constitue un prélèvement sur le revenu, en particulier pour les ménages les plus modestes, qui ne peuvent modifier immédiatement leur comportement. Une politique d’accompagnement redistributive aurait du sens car l’impact de la taxe carbone sur un ménage dépendra du niveau de ses revenus. Il s’agit donc de ne pas redistribuer de façon uniforme, de redistribuer davantage aux ménages modestes et de ne pas redistribuer aux plus riches.

M. le rapporteur général. Eu égard à son caractère forfaitaire, la compensation est automatiquement redistributive. Pour les cinq premiers déciles de revenu, en moyenne, elle est supérieure au surcoût entraîné par la taxe carbone. En revanche, pour les cinq déciles supérieurs, en moyenne, elle est inférieure à ce surcoût, à hauteur de 45 euros en milieu rural et de 21 euros en milieu urbain. Pour le dernier décile, c’est-à-dire les 10 % de ménages percevant les ressources les plus élevées, en moyenne, elle est inférieure de 27 euros à ce surcoût. Le souci de redistribution a été intégré dans le barème même.

M. Pierre-Alain Muet. Quand vous entreprenez une réforme fiscale, vous faites en sorte – c’est le cas pour la taxe professionnelle – que les perdants soient les moins nombreux possible. Or la taxe carbone frappe les ménages les plus modestes, vivant dans des banlieues ou des campagnes dépourvues de transports en commun. Ce n’est pourtant pas son objectif ! Ce qui compte, ce n’est pas la moyenne mais le fait que la redistribution au bas de l’échelle des revenus soit suffisamment forte pour que pratiquement personne ne soit touché. L’enjeu est de rendre acceptable la taxe écologique. Si la mesure rencontre des difficultés, c’est en grande partie parce que nombre de ménages ont le sentiment de subir un prélèvement sur leur pouvoir d’achat.

M. Hervé Mariton. La proposition de Pierre-Alain Muet consiste non pas à augmenter la restitution pour les plus défavorisés, mais à la supprimer pour les plus favorisés. Or, exclure du bénéfice de la compensation de la taxe carbone les tranches les plus élevées de l’impôt le revenu aboutirait, en cas d’augmentation de la taxe ou d’extension de la fiscalité écologique à d’autres produits, à perturber profondément le sens à donner à la fiscalité écologique, qui est de créer un signal-prix. Les pays étrangers qui ont instauré une fiscalité écologique ne sont pas tombés dans cette erreur.

M. Daniel Garrigue. L’augmentation progressive de la taxe carbone est une machine de destruction de l’impôt sur le revenu. Le mécanisme de redistribution généralisée qu’elle prévoit aboutira peu à peu à détruire le caractère progressif de cet impôt, ainsi que sa vocation à procurer des recettes !

M. Pierre-Alain Muet. Si nous, socialistes, avions instauré une taxe carbone, nous l’aurions fait dans le cadre d’une réforme de l’imposition du revenu dont nous avons besoin. Alors que la CSG est proportionnelle, l’impôt sur le revenu est devenu une peau de chagrin. Notre fiscalité est à la fois très peu redistributive et très peu écologique. Pour y remédier, une belle réforme est à faire.

Pourquoi faut-il redistribuer aux plus modestes ? Parce qu’ils n’ont pas le choix. Les dépenses des personnes à revenu faible sont contraintes. La mission d’information commune sur la mesure des grandes données économiques et sociales à laquelle nous avons participé tous les deux, monsieur Mariton, l’a montré. Au contraire des personnes aux revenus élevés, celles aux revenus modestes n’ont quasiment aucune possibilité de faire des choix de substitution. Construire une fiscalité écologique comportant des mécanismes de redistribution relève donc d’une vraie logique.

La Commission rejette l'amendement.

Puis elle est saisie de l'amendement I-CF 217.

M. Henri Nayrou. Je suis à la fois favorable à l’instauration d’une contribution climat énergie, qui peut être une taxe carbone, et hostile au dispositif que vous proposez, qui m’apparaît comme une sorte d’ « usine à gaz ».

Quel est l’objet de mon amendement ? Je suis favorable à une mise en place progressive du dispositif. Vouloir aller immédiatement au meilleur du rendement de la taxe carbone me semble une erreur. Je suis également favorable à ce que cet impôt soit rendu plus juste au regard des revenus, ainsi qu’envers les habitants des zones non pourvues en transports collectifs. Il faut aller plus loin dans l’équité au bénéfice de ceux qui habitent le plus loin, sont obligés pour se déplacer d’utiliser des véhicules individuels, et qui, vivant dans des contrées aux caractéristiques climatiques plus difficiles, dépensent plus pour leur chauffage. Qu’ils vivent par goût ou nécessité dans ces régions, ils n’ont pas à subir la décision subite d’instaurer une taxe carbone.

M. le rapporteur général. Les consommations d’énergie peuvent évidemment varier en fonction de l’altitude, de la longitude et de la latitude. Si Mouthe, la ville la plus froide de France, est bien en zone de montagne, les habitants des zones méditerranéennes doivent plus longtemps que les autres recourir à la climatisation dans leur voiture.

Je ne donnerai d’avis favorable à aucun amendement instaurant des montants différents de la taxe carbone en fonction de la géographie.

M. Michel Bouvard. Nous sommes face à une question de continuité législative et d’équité. La loi « montagne », adoptée à l’unanimité par le Parlement en 1985, reconnaît la spécificité des territoires de montagne et la nécessité d’adapter les textes législatifs et réglementaires à leurs réalités. Ce qui est ici demandé est tout simplement l’application de cette loi.

C’est aussi une affaire d’équité. En zone de montagne, un véhicule consomme beaucoup plus de carburant qu’en plaine. Les cartes retranscrivant les normes d’isolation des bâtiments font apparaître de façon évidente que les zones de montagne sont les plus froides et que les consommations de carburant, à la fois du fait de l’altitude et des problèmes d’isolation des bâtiments, y sont plus élevées. Il n’y a pas de raison qu’une partie de la population s’en trouve pénalisée.

Un texte ne peut traiter de la même manière des territoires différents ; l’Europe le reconnaît désormais. Si, par exemple, l’État a accepté qu’en montagne, les chauffeurs de taxi pratiquent des majorations de tarifs, c’est bien parce qu’il a reconnu que les frais y étaient plus élevés qu’ailleurs. En France, comme dans les autres pays européens, c’est en application de la loi que des communes sont classées en zone de montagne.

M. Philippe Vigier. La taxe carbone est une contribution énergie-climat, assortie d’un mécanisme de remboursement pour préserver le pouvoir d’achat. Ne pourrait-on pas fonder celui-ci sur la longueur des trajets entre le domicile et le lieu de travail ? Le dispositif pourrait être fondé sur une base déclarative. Même en plaine, il faut parfois effectuer de longs trajets en voiture pour pouvoir aller jusqu’à une gare. Nous concitoyens redoutent une amputation de leur pouvoir d’achat due à l’éloignement entre leur domicile et leur lieu de travail.

M. Jérôme Cahuzac. Malgré le bon sens qui marque les arguments de notre collègue Michel Bouvard, je crains qu’ils ne soient acceptés ni par le rapporteur général, ni par le Gouvernement. Les critères édictés pour la redistribution sont ceux du lieu d’habitation et de l’importance de la famille. Cette taxe est une taxe de plus. Le Gouvernement demande au Parlement de la voter pour permettre au Président de la République de se targuer d’avoir instauré une taxe écologique.

M. Henri Nayrou. La taxe carbone est destinée à lutter contre l’émission de CO2. Mais ces émissions sont-elles plus élevées dans les villes, les campagnes, ou les montagnes ? Je continue à me référer à l’article 1er de la loi du 9 janvier 1985. Cette loi reconnaît la spécificité de la montagne : sinon pourquoi des indemnités compensatoires de handicaps naturels (ICHN) auraient-elles été instaurées en matière agricole ? Pourquoi ceux qui vivent de la manière la plus naturelle devraient-ils payer pour les autres ?

La Commission rejette l'amendement.

Après avis défavorable du rapporteur général, la Commission rejette ensuite successivement les amendements I-CF 193 et I-CF 123 de M. Michel Bouvard.

Puis elle examine les amendements identiques I-CF 122 et I-CF 121 de M. Michel Bouvard, l’amendement I-CF 121 faisant l’objet d’un sous-amendement I-CF 281 de M. Marc Le Fur.

M. Marc Le Fur. Le dispositif présenté par le Gouvernement prévoit deux sortes de compensation, l’une modeste, et l’autre plus élevée, destinée au monde rural. Pour distinguer mondes rural et urbain, le critère adopté a été celui du périmètre de transport urbain (PTU). Or, la densité et la qualité du service de transport varient considérablement d’un périmètre à l’autre.

Mon collègue Jean-Yves Cousin et moi-même avons considéré que, lorsque la population du chef-lieu de ce périmètre est inférieure à 15 000 habitants, la capacité du système de transport n’est pas celle que peuvent procurer des PTU dont le chef-lieu est plus peuplé. En réalité, ces secteurs sont des secteurs ruraux, qui s’efforcent de développer un dispositif de transport. Il faut donc accorder à leurs habitants le bénéfice de la compensation majorée. Autrement, le message à l’attention du monde rural va se trouver gravement brouillé.

M. Jean-Yves Cousin. Pour la mise en place d’une très modeste ligne de transport en commun, le département dont je suis l’élu a exigé la création d’un PTU ; mais en réalité, le secteur où celui-ci a été créé est rural.

M. le rapporteur général. Le sous-amendement I-CF 281, qui concerne les PTU où la ville centre comporte moins de 15 000 habitants, a été rattaché à un amendement relatif aux zones de montagne avec lequel il n’a aucun lien. Je souhaite que, lors que la réunion que nous tiendrons en application de l’article 88, il soit déposé de nouveau, mais en tant qu’amendement. Dans les conditions actuelles, par cohérence avec nos votes précédents, je ne peux qu’y donner un avis défavorable.

M. Marc Le Fur. Associé à l’amendement I-CF 121, le sous-amendement I-CF 281 permet de résoudre des difficultés peut-être diverses, mais réelles. La question est bien celle de la détermination respective des secteurs urbains et ruraux.

M. Jérôme Cahuzac. L’équité voudrait que les villes centres de moins de 25 000 habitants soient également concernées. Les populations de ces villes souffrent des mêmes contraintes que celles des communes de moins de 15 000 habitants.

L’amendement I-CF 122 est retiré par son auteur.

La Commission adopte le sous-amendement I-CF 281, puis l’amendement I-CF 121 ainsi modifié (amendement n° I – 57).

La Commission adopte ensuite l’article 6 ainsi modifié.

Article 7

Remboursement partiel de la taxe carbone en faveur des exploitants agricoles

Afin de limiter l’impact économique de la taxe carbone sur un monde agricole particulièrement sensible au prix des produits énergétiques, le présent article a pour objet de fixer les modalités de remboursement partiel de la taxe carbone aux exploitants agricoles.

I.– LE REMBOURSEMENT PARTIEL DE TIPP ET DE TICGN
DES EXPLOITANTS AGRICOLES

Depuis l’article 33 de la loi de finances pour 2005 (n° 2005-1484 du
30 décembre 2004),  décembre tants agricoles bénéficient, sur demande, d’un remboursement de TIPP et de TICGN égal à :

– 5 €/hl pour les quantités de fioul domestique ;

– 1,665 €/100 kg pour les quantités de fioul lourd ;

– 1,071 €/millier de KwH pour les volumes de gaz naturel.

Le décret n° 2009-503 du 4 mai 2009 a fixé les règles applicables à la demande ainsi qu’à la procédure de remboursement

Ce dispositif de remboursement partiel – prorogé chaque année depuis 2004 – a coûté 165 millions d’euros en 2008.

II.– LE PRÉSENT ARTICLE INSTITUE UN REMBOURSEMENT DE 75 %
DU MONTANT DE LA TAXE CARBONE AU BÉNÉFICE
DES EXPLOITANTS AGRICOLES

En application de l’alinéa 1er du présent article, les mêmes personnes qui bénéficient actuellement du remboursement partiel de TIPP et de TICGN sur leur consommation de fioul domestique, de fioul lourd et de gaz naturel bénéficieront d’un remboursement partiel de la taxe carbone.

L’alinéa 2 du présent article fixe, pour l’année 2010, le montant du remboursement à 75 % du tarif de la taxe carbone applicable aux produits énergétiques susmentionnés, soit un pourcentage inférieur à celui du remboursement partiel de TIPP et de TICGN (qui s’établit à environ 90 %) mais équivalent à la taxe carbone supportée par les pêcheurs (51). Le montant du remboursement s’élèvera donc à :

– 3,39 €/hl sur les quantités de fioul domestique ;

– 3,975 €/100 kg net pour les quantités de fioul lourd ;

– 2,76 €/m3 pour les volumes de gaz naturel.

En pratique, les exploitants agricoles déposeront, en application de
l’alinéa 3
du présent article, auprès de la trésorerie générale dans le ressort de laquelle se trouve le siège de leur exploitation, leur demande de remboursement de la taxe carbone supportée sur les consommations de l’année précédente. La taxe carbone étant applicable à compter du 1er janvier 2010 la première demande de remboursement sera déposée en 2011.

Cependant, l’alinéa 4 du présent article dispose que ce remboursement fera l’objet d’un acompte versé au début de l’année 2010 dont le montant sera égal à 75 % du tarif de la taxe carbone relatif à chacun des produits énergétiques susmentionnés, appliqué aux volumes de produits consommés par le demandeur au cours de l’année 2009. Les exploitants agricoles seront donc partiellement remboursés de la taxe carbone avant de l’avoir payée afin de leur éviter, en 2010, une charge de trésorerie.

Un décret fixera, en application de l’alinéa 5 du présent article, les conditions dans lesquelles les exploitants agricoles adresseront leurs demandes d’acompte et de remboursement.

Le coût (en pertes de recettes) de ce remboursement partiel de la taxe carbone aux exploitants agricoles est évalué à 134 millions d’euros en 2010. Cependant, ce dispositif de remboursement n’a pas vocation à être pérenne, du moins à ce taux de 75 %. Comme l’indique l’exposé des motifs du présent article, il est simplement « nécessaire de prévoir des délais plus longs pour permettre au monde agricole de s’adapter à des pratiques plus sobres en carbone ».

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* *

La Commission adopte l’article 7 sans modification.

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Après l’article 7 :

La Commission est saisie de plusieurs amendements portant articles additionnels après l’article 7.

Elle examine d’abord l’amendement I-CF 113 de M. Didier Migaud.

M. le président Didier Migaud. Mon amendement I-CF 113 propose, dans l’esprit de la taxe carbone, d’augmenter quelque peu les tarifs de la contribution de solidarité sur les billets d’avion, créée à l’initiative du président Jacques Chirac. Que le transport aérien ne soit pas concerné par la taxe carbone peut paraître aberrant. La contribution sur les billets d’avion avait aussi pour objet d’adresser un signal-prix. La majoration proposée créerait une recette de 75 millions d'euros et serait affectée, comme aujourd’hui, à un fonds de solidarité pour le développement.

M. le rapporteur général. Avis défavorable. Lors de la création de cette taxe, il nous avait été assuré que tous les autres pays nous suivraient. Or, aujourd’hui, seuls l’ont fait la République démocratique du Congo, le Niger, la Corée du sud, Madagascar, la Côte d’Ivoire et le Chili. J’ajoute qu’Air France annonce un plan de suppression d’emplois concernant 2 500 à 3 000 salariés. Je suis défavorable au développement de taxes spécifiques à la France, qui nuisent à nos entreprises.

M. le président Didier Migaud. Cette contribution existe déjà. D’une certaine façon, elle compense l’exclusion du transport aérien de l’assiette de la taxe carbone.

M. Pierre-Alain Muet. Cet amendement procurerait un double dividende : une taxation indirecte du kérosène et un geste de solidarité sensibilisant au réchauffement climatique.

M. Jean-Michel Fourgous. Mieux vaudrait taxer les bêtises de Cambrai, qui ne sont guère soumises à concurrence… Mais je ne comprends pas que l’on propose sans étude d’impact de majorer les taux sur les transports aériens, qui sont pour leur part soumis à une rude concurrence mondiale.

M. le président Didier Migaud. C’est votre majorité qui a créé cette taxe, je propose simplement d’augmenter un peu son taux.

M. Charles de Courson. Le produit de la taxe s’est effondré dans le sillage de la première classe, qui est taxée dix fois plus que les autres catégories. Si l’on veut soutenir durablement la lutte contre les pandémies, il faut donc passer par des dépenses budgétaires.

Par ailleurs, le transport aérien va très mal, en particulier Air France qui doit résister à la concurrence. Cet amendement vient donc à un très mauvais moment.

M. Gérard Bapt. Il me semble malvenu de faire référence aux bêtises de Cambrai à propos d’une taxe qui a permis, à l’initiative du Président Chirac, de doubler le nombre d’enfants traités par trithérapie dans les pays africains francophones. Alors que le rendement de la taxe va baisser, le Gouvernement projette de récupérer 20 millions des 150 millions collectés pour les affecter à l’aide bilatérale.

Pour toutes ces raisons, je soutiens cet amendement.

M. Henri Emmanuelli. Cette année, le Gouvernement a inclus le produit de cette taxe dans le périmètre de l’aide publique au développement, laquelle diminue.

M. Louis Giscard d’Estaing. J’étais contre une mesure franco-française, qui risquait de créer une distorsion de concurrence. Les autres pays, en particulier européens, ne nous ayant pas suivis, je le regrette, je pense que nous devrions en rester là.

M. Daniel Garrigue. Le transport aérien souffre sans doute, mais l’aide au développement encore plus : elle diminue alors même que les pays les plus pauvres sont parmi les plus touchés par la crise. Ce serait un signe d’accompagner, par le vote de cet amendement, la nouvelle initiative qu’a prise Jacques Chirac pour lutter contre les faux médicaments. Certes, les autres pays ne nous ont pas suivis, mais il fut un temps où l’on était fiers de l’exception française qui faisait que nous étions un peu en avance dans certains domaines. C’était, il est vrai, avant que nous réintégrions l’OTAN et que nous alignions notre politique étrangère sur celle des États-unis…

M. Jérôme Chartier. Le kérosène a été détaxé – en 1944 – pour éviter que des différentiels de taxe ne conduisent à des circuits de ravitaillement qui mettent en péril la sécurité des passagers. Et la convention de Chicago n’a jamais été remise en cause.

N’oublions pas par ailleurs que l’argent d’Unitaid finance principalement la fondation Clinton. Est-ce vraiment l’objectif de cet amendement ?

M. le président Didier Migaud. Le produit de la taxe s’est tassé mais il ne s’est pas effondré. Par ailleurs je ne pense pas que relever une taxe qui ne représente qu’un euro sur les billets de classe économique et dix euros sur ceux de première dissuaderait de prendre l’avion. Enfin, comment expliquerez-vous à ceux qui paieront la taxe carbone que les billets d’avion seront exonérés ?

M. Charles de Courson. En contrôlant l’application de cet impôt, nous avons découvert que certaines compagnies, pour éviter d’avoir à payer quarante euros sur les lignes long courrier, faisaient des escales en Europe. Créer cette taxe a été une erreur, une dotation budgétaire aurait limité les fluctuations.

M. le rapporteur général. Doubler cette taxe au moment où notre compagnie nationale s’apprête à licencier plusieurs milliers de personnes dépasserait l’entendement.

M. le président Didier Migaud. Si vous estimez que cette taxe est responsable d’un sinistre économique à venir, que ne nous proposez-vous sa suppression ?

M. Gérard Bapt. Au secours Chirac, reviens !

La Commission rejette l’amendement I-CF 113.

Elle examine ensuite l’amendement I-CF 114 rectifié de M. Didier Migaud.

M. le président Didier Migaud. Cet amendement élargit la taxe Chirac aux transports maritimes de passagers. Les croisières, elles, sont en excellente santé !

M. le rapporteur général. Avez-vous procédé à une étude d’impact ? Avis défavorable.

M. René Couanau. Indépendamment du fait que ces amendements nous éloignent de la taxe carbone, l’essentiel du trafic maritime de passagers est assuré non pas par les croisières mais par les ferries qui desservent la Corse, le Maghreb et la Grande-Bretagne, dont certains appartiennent encore à des compagnies françaises, en particulier Britanny Ferries, qui ont bien du mal à résister à la concurrence étrangère à cause du poids des charges sociales. Il faudrait donc exclure les lignes régulières du champ de votre amendement.

M. le président Didier Migaud. Sensible à vos arguments, je le réécrirai dans ce sens.

M. Jean-Pierre Brard. Soutenir cet amendement est un devoir moral, et votre objection est surtout idéologique, dans la mesure où les passagers des ferries ne risquent guère de renoncer à les utiliser pour traverser à la nage... On voit bien que faire preuve de solidarité envers d’autres que les banquiers vous donne des frissons.

M. le président Didier Migaud. Vous êtes injuste : nos collègues viennent de voter un prélèvement exceptionnel sur les établissements bancaires…

La Commission rejette l’amendement I-CF 114 rectifié.

Elle rejette ensuite, après avis défavorable du rapporteur général, deux amendements identiques I-CF 20 de M. Marc Le Fur et I-CF 178 de M. Jérôme Cahuzac visant à supprimer l’exonération de TIPP au bénéfice des vols intérieurs.

M. Charles de Courson. Je retire l’amendement I-CF 81.

La Commission rejette l’amendement I-CF 21 de M. Marc Le Fur visant à attribuer à l’AFITF le produit de la taxe acquittée par les aéronefs.

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* *

Article additionnel après l’article 7

Instauration d’une taxe sur les sacs plastiques

La Commission est ensuite saisie de l’amendement I-CF 88 de M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. Je persiste à proposer de soumettre à la TGAP les sacs en plastique distribués aux caisses. Depuis la loi d’orientation agricole de 2006, on n’a toujours pas avancé, nous avons ainsi perdu sur tous les tableaux – emploi et balance commerciale – et les Chinois nous inondent de leurs produits.

Le Gouvernement préférerait un accord conventionnel. Mais cela fait des mois que les industriels et les distributeurs négocient sans arriver à rien. Mon amendement est destiné à faire pression sur eux en vue de la généralisation des sacs biodégradables.

M. le rapporteur général. Certes, les gouvernements hésitent depuis quelques années, mais le nombre de sacs utilisés par la grande distribution est passé de plus de 10 milliards en 2002 à moins de 2 milliards. Beaucoup d’enseignes fournissent maintenant des sacs biodégradables. La négociation avec la Fédération nationale du commerce de détail avance. Cet amendement ne se justifie donc plus.

M. Charles de Courson. Certes, le nombre de sacs biodégradables va en diminuant. Je n’ai jamais prétendu le contraire. Mais ils sont de plus en plus souvent importés. Cet amendement est surtout destiné à pousser à la conclusion d’un accord conventionnel.

M. Hervé Mariton. Dans de nombreuses situations, plus aucun sac n’est proposé : le secteur de la distribution en a profité pour faire des économies. Je ne suis pas sûr que la qualité de vie de nos concitoyens ait beaucoup progressé à cette occasion.

M. Jérôme Cahuzac. Un dispositif similaire a failli être adopté l’année dernière. Outre qu’il ne compromet pas les finances publiques, il s’inscrit dans la tendance au « verdissement » de la fiscalité. La prolifération des sacs plastiques constitue une véritable infection, notamment dans certaines zones touristiques. Il convient d’y mettre un terme.

M. Marc Le Fur. Je regrette que nous n’ayons pas lancé ce signal au moment le plus opportun, car même si des progrès sont observés, les sacs en plastique rendent repoussantes les entrées de nos villes.

Si rien n’a été fait il y a quelques années, c’est en raison de la résistance de certaines entreprises. Aujourd’hui, ces entreprises se sont mises à fabriquer des sacs de nouvelle génération ! Cette disposition aurait déjà dû être adoptée il y a trois ans, mais il n’est peut-être pas trop tard.

M. Pierre-Alain Muet. Cette taxe est extrêmement efficace : les pays qui l’ont instaurée ont fait quasiment disparaître l’usage des sacs plastiques en un ou deux ans.

La Commission adopte l’amendement (amendement n° I – 52).

Article 8

Suppression du taux de TVA réduit sur les équipements de climatisation

Le présent article a pour objet de supprimer le taux réduit de TVA actuellement applicable à l’installation de système de climatisation dans le cadre de travaux dans des locaux d’habitation.

I.– LE DÉVELOPPEMENT DE LA CLIMATISATION :
UN DANGER POUR L’ENVIRONNEMENT

A.– LES DANGERS DE LA CLIMATISATION

Depuis plusieurs années, de nombreux bâtiments professionnels et de plus en plus de logements privés utilisent la climatisation, phénomène qui s’est accéléré après la canicule de l’été 2003. Or, si la climatisation est un élément de confort indéniable, son développement n’est pas sans conséquence à la fois sur la santé (légionellose...) et sur l’environnement. En effet, non seulement les climatiseurs émettent des gaz fluorés mais ils contribuent indirectement à l’effet de serre via leur consommation d’électricité, laquelle aggrave les pics de consommation et leur conséquence : la mise en marche des centrales thermiques.

Plusieurs mesures ont été mises en œuvre afin de réduire l’utilisation de la climatisation, notamment la réglementation thermique des bâtiments (52) et les certificats d’économie d’énergie (53). Cependant, au prix actuel de l’électricité, un climatiseur fonctionnant de manière intensive ne coûte pas plus de 30 euros par mois ; les acteurs économiques ne sont pas, dans ces conditions, véritablement incités à y renoncer, d’autant plus qu’ils bénéficient d’un avantage fiscal non négligeable via un taux réduit de TVA.

B.– LA CLIMATISATION EST FISCALEMENT ENCOURAGÉE
PAR UN TAUX RÉDUIT DE TVA

Depuis l’article 5 de la loi de finances pour 2000 (n° 99-1172 du
30 décembre 2000), la taxe sur la valeur ajoutée est perçue, en application de l’article 279-0 bis du code général des impôts, au taux réduit « sur les travaux d’amélioration, de transformation, d’aménagement et d’entretien portant sur des locaux d’habitation achevés depuis plus de deux ans ». Des exceptions sont cependant prévues s’agissant de la part correspondant :

– à la fourniture d’équipements ménagers ou mobiliers ;

– à l’acquisition de gros équipements fournis dans le cadre de travaux d’installation ou de remplacement du système de chauffage, des ascenseurs ou de l’installation sanitaire dont la liste est fixée par l’article 30-00-A de l’annexe IV au code général des impôts (54).

En d’autres termes, lorsqu’un contribuable réalise des travaux comportant l’acquisition des gros équipements précités, il bénéficiera du taux réduit sur les travaux eux-mêmes mais le taux normal s’appliquera auxdits gros équipements (55).

C’est pourquoi le même article 5 de la loi de finances pour 2000 précitée avait également institué un crédit d’impôt pour les dépenses d’acquisition de ces mêmes gros équipements, codifié à l’article 200 quater du code général des impôts. Considérablement élargi et renforcé par les lois de finances successives, ce crédit d’impôt a été en partie déconnecté de l’article 279-0 bis précité par l’article 90 de la loi de finances pour 2005 (n° 2004-1484 du 30 décembre 2004) qui l’a transformé en un crédit d’impôt en faveur des économies d’énergie et du développement durable dans le logement, dont le coût – en croissance exponentielle – atteindra 2,6 milliards d’euros en 2010 (56).

Cependant, dès lors qu’ils ne figurent pas dans les exclusions de
l’article 279-0 bis du code général des impôts, les appareils de climatisation bénéficient, actuellement, du taux réduit de TVA lorsqu’ils sont installés dans le cadre de travaux dans des logements d’habitation.

II.– LES DISPOSITIONS DU PRÉSENT ARTICLE

A.– LA SUPPRESSION DU TAUX RÉDUIT DE TVA
POUR LES SYSTÈMES DE CLIMATISATION

L’alinéa 1er du présent article a pour objet d’ajouter dans l’article 279-0 bis du code général des impôts, à l’énumération des équipements exclus du taux réduit de TVA, la part correspondant à la fourniture de « système de climatisation ». Par conséquent, un contribuable qui réalise des travaux à son domicile incluant l’installation d’un système de climatisation ne pourra donc plus bénéficier du taux réduit sur celui-ci.

En application de l’alinéa 2, la suppression du taux réduit de TVA s’appliquera aux opérations pour lesquelles le fait générateur de la taxe interviendra à compter du 1er janvier 2010.

B.– LA PORTÉE DE LA SUPPRESSION

1.– Une économie évaluée à 100 millions d’euros

Selon les informations communiquées au Rapporteur général par le ministère de l’Économie, des finances et de l’industrie, le gain, pour les finances publiques, de la suppression du taux réduit de TVA pour les systèmes de climatisation est évalué à 100 millions d’euros en 2010.

Cependant, le taux réduit de TVA de l’article 279-0 bis du code général des impôts restera de loin la première « niche fiscale » puisque son coût est évalué à 5,15 milliards d’euros en 2010.

2.– L’impact environnemental est difficile à évaluer

Selon les évaluations menées par le ministère de l’Écologie, de l’énergie, du développement durable et de la mer, en supposant que l’augmentation du taux de TVA soit entièrement répercutée dans le prix de vente des climatiseurs, le renchérissement de celui-ci s’élèvera à 140 euros en moyenne pour une climatisation « mono-split » (57) en métropole contre 64 euros dans les départements d’outre-mer, et à 1 700 euros pour un appareil « multi-split » (58) en métropole contre 770 euros dans les départements d’outre-mer (59).

Un « signal prix » sera donc envoyé aux consommateurs, qui devrait entraîner une baisse ou, du moins, un ralentissement des ventes de climatiseurs fixes dans les logements. Le ministère reconnaît cependant que l’incertitude quant à l’élasticité des ventes de ces appareils interdit d’évaluer précisément l’impact de la mesure. En revanche, celle-ci a une réelle portée pédagogique puisqu’elle met en avant :

– d’une part, que la climatisation génère des émissions de gaz à effet de serre et, par conséquent, contribue au changement climatique ;

– d’autre part, que le confort d’été peut être assuré par des solutions alternatives et écologiques (« puit canadien », isolation thermique…) qui justifient que la climatisation ne soit pas fiscalement encouragée.

*

* *

La Commission adopte l’article 8 sans modification.

*

* *

Après l’article 8 :

La Commission est saisie de plusieurs amendements portant articles additionnels après l’article 8.

Elle examine d’abord l’amendement I-CF 181 de M. Jérôme Cahuzac.

M. Jean Launay. Alors que ce projet de loi de finances pose les bases d’une véritable fiscalité écologique, nous proposons de créer une « TVA verte » en appliquant aux logements répondant aux normes « bâtiment basse consommation » le taux réduit de TVA déjà prévu pour les ventes et apports de logements sociaux ; à charge pour le Gouvernement de faire valoir une interprétation idoine de la directive relative au système commun de TVA.

La baisse récente du taux de TVA appliqué dans le secteur de la restauration est très coûteuse – 3 milliards d’euros par an –, et elle se révèle inefficace au regard des objectifs initiaux en termes de prix et d’emploi. Il serait plus judicieux de négocier une TVA réduite sur des produits respectueux de l’environnement.

M. le rapporteur général. En aucun cas le Gouvernement ne pourra faire valoir l’interprétation que vous suggérez. Je rappelle que le logement social a été placé dès l’origine dans la catégorie des biens et services pouvant être soumis au taux réduit. La France a pu user de cette faculté lorsqu’elle a décidé de financer le logement locatif social par des mesures fiscales plutôt que par des dotations budgétaires. Ainsi, le financement de ce secteur repose désormais sur l’application du taux réduit. Mais la directive ne permet pas d’appliquer ce taux aux logements BBC. L’amendement n’est donc pas compatible avec le droit européen.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement I-CF 182 de M. Jérôme Cahuzac.

M. Jean Launay. Nous proposons une disposition similaire concernant les bâtiments HQE.

Après avis défavorable du rapporteur général, la Commission rejette l’amendement.

Puis, elle est saisie de l’amendement I-CF 150 de M. Jérôme Cahuzac.

M. Jérôme Cahuzac. Le Parlement doit avoir le courage de revenir sur l’abaissement du taux de TVA consenti dans le secteur de la restauration, car cette mesure est un échec : elle n’a pas permis de faire baisser les prix, de créer des emplois, d’augmenter les salaires ni de favoriser la formation professionnelle. Autrement dit, même si, ici ou là, quelques restaurateurs ont consenti des efforts, le secteur n’a respecté aucun des termes du « contrat d’avenir » signé avec le Gouvernement.

Il est d’autant plus agaçant de voir toute une profession violer un accord qu’elle vient à peine de signer que la mesure coûtera chaque année 3 milliards d’euros au budget de l’État. Cela explique pourquoi la dépense fiscale progressera en 2010 au-delà de la norme prévue, dont nous souhaitons pourtant tous l’application. L’État n’a plus les moyens d’honorer une telle dépense, surtout lorsque la contrepartie est à ce point absente.

M. le rapporteur général. Avis défavorable. La baisse de la TVA sur la restauration correspond à un engagement pris il y a longtemps et plusieurs fois réaffirmé depuis. Il a d’ailleurs figuré dans de nombreux programmes de campagne électorale au cours des dix dernières années, et je ne me souviens pas qu’il ait fait l’objet d’une opposition farouche entre 1997 et 2002.

La raison principale invoquée pour rejeter cette disposition était son incompatibilité avec le droit communautaire. Après de longues négociations, cet obstacle a été levé, la France ayant obtenu que les services de restauration puissent être soumis au taux réduit. Dès lors, il était naturel de tenir cet engagement.

M. Jérôme Chartier. Soyons honnêtes : nous sommes tous déçus par les résultats de cette mesure. Pour autant, les prix de la restauration ont baissé – même si c’est de très peu – en juillet et en août, avant de rester stables en septembre. Cette baisse des prix concerne 30 % des 130 000 points de vente du secteur. Un tiers des restaurateurs a donc appliqué le premier volet du « contrat d’avenir », qui entraînait l’engagement de réduire le prix de dix produits.

Tous les Français demandent une diminution immédiate des prix. Mais la mesure s’applique depuis seulement trois mois, et il serait contre-productif, à ce stade, de revenir en arrière. Quel signal donnerions-nous à ceux qui ont joué le jeu, notamment ceux – pas assez nombreux, il est vrai – qui ont augmenté les salaires de leurs employés ? Quant à la question de l’investissement, je rappelle qu’un contrat a été passé entre l’État et OSEO en faveur de la création d’un prêt spécifique destiné au secteur de l’hôtellerie et de la restauration. Il serait donc dommage de supprimer, après seulement trois mois, une mesure qui était réclamée depuis des années. Il sera temps d’en faire le bilan au bout d’un an, quand nous aurons plus de recul. D’ici là, Hervé Novelli se sera mobilisé – ce matin encore, il convoquait les neuf syndicats de la restauration pour faire le point sur la situation.

M. Henri Emmanuelli. J’ai toujours affirmé, monsieur le rapporteur général, que je ne croyais pas aux effets d’une telle mesure en matière d’emplois et de prix. Le résultat, c’est que seulement un restaurateur sur dix a fait un effort.

Vous dites que vous avez tenu un engagement. Mais la profession, elle n’a pas tenu les siens. Pourquoi l’État devrait-il remplir ses obligations sans que les signataires du « contrat d’avenir » y soient eux-mêmes contraints ? Pensez-vous que ceux qui n’ont pas encore baissé leur prix le feront plus tard ? Ce n’est pas sérieux ! Dans le département touristique dont je suis l’élu, nous avons effectué des relevés de prix sans constater de baisse. Au contraire, nous avons vu des augmentations spectaculaires – j’ai même dû intervenir publiquement sur le sujet. Telle est la réalité !

Que pensent les autres catégories professionnelles de cette opération qui a coûté 3 milliards pour ne créer que 6 000 emplois – soit 500 000 euros par emploi ? Si vous avez vraiment cru aux effets de cette mesure, vous devez agir pour que les engagements de la profession soient tenus. En adoptant cet amendement, nous donnerions des sueurs froides à certains.

M. Daniel Garrigue. Il faut rester prudent sur ce dossier. Pour ma part, malgré les engagements pris, j’étais très réservé à l’égard de la réduction de la TVA sur la restauration, qui ne me paraissait pas nécessairement opportune au regard de l’état de nos finances publiques. À cet égard, il aurait peut-être été plus raisonnable – et rien ne nous en empêchait – de choisir un taux intermédiaire entre 5,5 et 19,6 %.

M. Jérôme Chartier. J’avais proposé 12,5 %.

M. Daniel Garrigue. Cela étant, je suis moins pessimiste que certains de mes collègues en ce qui concerne les effets de cette mesure. Dans mon département, qui a également un caractère touristique, je constate que de nombreux restaurateurs ont baissé leurs prix.

La crise touche particulièrement le secteur de la restauration. Nous n’avons peut-être pas créé le nombre d’emplois attendu, mais si nous revenons en arrière, nous risquons d’en faire disparaître un grand nombre.

M. Jean-Michel Fourgous. Même si les chiffres un peu optimistes qui avaient été annoncés ne sont pas confirmés, la mesure a tout de même contribué à créer 6 000 emplois en trois mois. Il est bien trop tôt pour porter un diagnostic, d’autant que le secteur subit la crise de plein fouet.

M. le président Didier Migaud. Le dispositif précédent, moins coûteux, avait permis de créer 20 000 emplois…

M. Jérôme Cahuzac. Le contrat d’avenir prévoyait 40 000 emplois ou contrats d’apprentissage, contre 6 000 en réalité. La baisse de prix devait être de 11,8 %, mais elle atteint plutôt le dixième. Dès lors, est-il nécessaire de maintenir cette disposition ?

Pas plus que vous, nous ne souhaitons donner l’impression de renier des engagements antérieurs. Mais ils datent d’un temps où les finances étaient dans un autre état. Lorsque la mesure, dont le coût est de 3 milliards d’euros, a été votée, le déficit budgétaire n’atteignait pas encore 141 milliards. Les professionnels n’ont pas respecté leur part du contrat et ils ne le feront pas davantage demain : soit une telle disposition produit des effets immédiatement, soit elle n’en produit jamais. Je vous donne donc rendez-vous l’année prochaine pour un nouveau bilan.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite les amendements I-CF 2, I-CF 3 et I-CF 4 de M. Patrice Martin-Lalande.

M. Patrice Martin-Lalande. Actuellement, la presse traditionnelle et la presse en ligne ne sont pas soumises au même taux de TVA. Pourtant, les états généraux de la presse ont bien montré que l’Internet n’était plus un support marginal pour la presse écrite ; il pourrait même, au contraire, représenter pour elle un moyen de résoudre ses difficultés. Le Parlement a d’ailleurs tenu à faire évoluer le cadre juridique en adoptant un statut de la presse en ligne. Je propose donc d’harmoniser le régime de TVA applicable aux publications de presse. L’amendement I-CF 2 a pour objet de les exonérer totalement de TVA, comme cela se pratique en Grande-Bretagne ; l’amendement I-CF 3 propose d’appliquer un taux super-réduit de 2,1 %, et l’amendement I-CF 4 un taux réduit de 5,5 %, quel que soit le support.

M. le rapporteur général. Ces amendements sont contraires au droit communautaire, qui assimile la presse électronique aux services rendus par voie électronique, assujettis au taux normal. C’est la raison pour laquelle la voie budgétaire a été privilégiée pour sauver la presse. Dans la loi de finances initiale pour 2009, les aides destinées à la soutenir ont été fixées à 163,3 millions d’euros, puis portées en loi de finances rectificative à plus de 317 millions d’euros. Cet effort sera poursuivi en 2010, puisque les crédits du programme « Presse » s’élèveront à 419,3 millions d’euros.

M. Patrice Martin-Lalande. Les aides budgétaires en faveur de la presse écrite ne concernent pour l’essentiel que le support papier : seulement 20 millions d’euros sont prévus pour accompagner le passage à l’électronique. Par ailleurs, comment expliquer que la Grande-Bretagne exonère totalement de TVA les publications de presse écrite, quel que soit le support ?

M. le rapporteur général. La raison en est historique. Lorsque les directives ont été négociées, les pays appliquaient différents taux de TVA et on leur a laissé le choix de les conserver pour deux ou trois catégories de produits. Ainsi que le Portugal applique depuis longtemps le taux réduit en matière de restauration. Pour sa part, la Grande-Bretagne a choisi de maintenir une exonération totale pour la presse écrite.

La Commission rejette les amendements.

Article 9

Barème de l’impôt sur le revenu 2010

Le présent article propose d’indexer les tranches de revenus du barème de l’impôt sur le revenu ainsi que des seuils et plafonds intervenant dans le calcul de cet impôt à hauteur de l’évolution des prix hors tabac prévue en 2009, soit 0,4 %.

Sont ainsi indexés :

– les limites des tranches du barème de l’impôt (1° du I) ;

– les plafonds applicables au bénéfice retiré du dispositif de quotient familial (2° du I) ;

– la décote (3° du I) ;

– l’abattement sur le revenu global net pour rattachement au foyer fiscal d’un enfant majeur marié ou ayant des enfants à charge (II).

I.– L’INDEXATION DES LIMITES DES TRANCHES DU BARÈME

Le 1° du I propose d’actualiser le niveau des tranches du barème. Ainsi, au titre des revenus perçus en 2009, l’impôt sera calculé en appliquant à la fraction de chaque part de revenu qui excède 5 875 euros le taux de :

– 5,5 % pour la fraction supérieure à 5 875 euros et inférieure ou égale à 11 720 euros ;

– 14 % pour la fraction supérieure à 11 720 euros et inférieure ou égale à 26 030 euros ;

– 30 % pour la fraction supérieure à 26 030 euros et inférieure ou égale à 69 783 euros ;

– 40 % pour la fraction supérieure à 69 783 euros.

Certains plafonds et limites prévus par le code général des impôts évoluent, de droit, chaque année, comme la limite supérieure de la première tranche du barème de l’impôt sur le revenu.

On peut citer, par exemple, le plafond de la déduction forfaitaire de 10 % sur les traitements et salaires (3° de l’article 83 du code général des impôts). Il en est de même pour le plafond de la déduction de 10 % sur les pensions (a du 5 de l’article 158 du même code). Quant à la réduction d’impôt afférente aux dons effectués au profit d’associations venant en aide aux personnes en difficulté, elle voit son plafond relevé comme la limite supérieure de la première tranche du barème de l’impôt sur le revenu de l’année précédant celle du versement afin que l’évolution du plafond soit prévisible et n’entrave pas le versement des dons.

Le tableau suivant recense les plafonds et limites concernés par l’évolution des limites des tranches du barème.

SEUILS ET PLAFONDS ÉVOLUANT COMME LA LIMITE SUPÉRIEURE DE LA PREMIÈRE TRANCHE DU BARÈME DE L’IMPÔT SUR LE REVENU

(en euros)

Mesures afférentes aux revenus catégoriels et au revenu global

Référence au code général des impôts

2009

2010

Déduction forfaitaire de 10 % sur les traitements et salaires :

Article 83-3

   

– minimum …………………………………………………………...

413

415

– minimum pour les personnes inscrites en tant que demandeurs d’emploi depuis plus d’un an ………………………………………..

906

910

– maximum ……………………………………………………….. 

13 893

13 948

Plafond de la déduction de 10 % sur les pensions :

Article 158-5a

   

– minimum …………………………………………………………...

367

368

– maximum ………………………………………………………...

3 592

3 606

Abattement pour personnes âgées de plus de 65 ans ou invalides :

Article 157 bis

2 266

2 276

– soit lorsque le revenu net global ne dépasse pas ………………...

13 950

14 010

ou

1 133

1 138

– si le revenu net global est supérieur à la limite précédente, sans excéder …………………………………………………………….

22 500

22 590

Réduction d’impôt afférente aux dons effectués au profit d’associations venant en aide aux personnes en difficulté (a) ………….

Article 200-4

510

513

(a) Son plafond est relevé comme la limite supérieure de la première tranche du barème de l’impôt sur le revenu de l’année précédant celle du versement.

Source : Direction de la législation fiscale.

Depuis la loi de finances pour 2007, l’indexation porte également sur le seuil d’imposition des plus-values réalisées à l’occasion de la cession de valeurs mobilières et de droits sociaux.

Le coût de l’indexation des limites des tranches du barème et des limites évoluant comme la limite supérieure de la première tranche est évalué à 254 millions d’euros.

II.– L’INDEXATION DES PLAFONDS APPLICABLES AU BÉNÉFICE TIRÉ DU QUOTIENT FAMILIAL ET DE L’ABATTEMENT POUR RATTACHEMENT AU FOYER FISCAL D’UN ENFANT MAJEUR MARIÉ OU AYANT DES ENFANTS À CHARGE

Le 2° du I propose de relever les plafonds applicables au bénéfice retiré du dispositif de quotient familial.

Le quotient familial vise à corriger la progressivité du barème de l’impôt en fonction des charges de famille du foyer fiscal. À une part pour les contribuables célibataires, divorcés ou veufs, ou deux parts pour les contribuables mariés ou liés par un pacte civil de solidarité, s’ajoute un nombre de demi-parts additionnelles qui varie selon le nombre des enfants à la charge du contribuable. À revenu égal, le quotient familial allège la charge fiscale des familles par rapport à celle des redevables taxés sur un nombre de parts inférieur.

Depuis la loi de finances pour 1982 (article 12 de la loi n° 81-1160 du 30 décembre 1981), l’avantage fiscal qui résulte de l’application du quotient familial est plafonné de sorte que, pour les contribuables soumis au plafonnement, cet avantage tend à diminuer, en valeur relative par rapport à l’impôt dû, à mesure qu’augmente le revenu.

Selon l’indexation proposée au présent article :

– le plafond de la demi-part de droit commun passera de 2 292 euros à 2 301 euros.

Le tableau suivant présente les revenus imposables (après abattement de 10 % au titre des frais professionnels) à partir desquels un couple marié entre dans le champ d’application du plafonnement du quotient familial ;

PLAFONNEMENT DES EFFETS DU QUOTIENT FAMILIAL EN 2008 ET 2009

(en euros)

Nombre de parts

Couple marié - Premier revenu imposable plafonné

 

Revenus 2008 – PLF 2009

Revenus 2009 – PLF 2010

3

72 290

72 580

4

92 730

93 096

5

113 167

113 613

Source : Direction de la législation fiscale.

– le plafond appliqué à l’avantage retiré des deux premières demi-parts correspondant au premier enfant à charge des contribuables célibataires, divorcés ou séparés ayant à charge un ou plusieurs enfants et les élevant seuls sera de 3 980 euros contre 3 964 euros aujourd’hui ;

– le plafond pour la demi-part bénéficiant aux contribuables célibataires, divorcés ou séparés, vivant effectivement seuls, sans personne à charge mais ayant élevé (seul ou non) un ou plusieurs enfants âgé(s) d’au moins 26 ans sera porté de 880 euros à 884 euros ;

– le montant de la réduction d’impôt accordée à certains contribuables lorsque l’avantage résultant de l’application du quotient familial est limité par le plafonnement pour des demi-parts supplémentaires spécifiques (personnes vivant seules ayant élevé un ou plusieurs enfants, sans personne à charge, dont le dernier enfant est âgé de 25 ans au plus et personnes se trouvant dans les situations suivantes : invalidité personnelle, du conjoint ou d’une personne à charge, qualité d’ancien combattant ou de pensionné de guerre) sera de 651 euros contre 648 euros en l’état du droit. Cette réduction d’impôt ne peut toutefois excéder la perte liée au plafonnement du quotient. En fait, ce dispositif en deux étapes (quotient familial plafonné auquel s’ajoute une réduction d’impôt elle-même plafonnée) constitue simplement un plafond spécifique pour les situations décrites ci-dessus.

Le II du présent article relève l’abattement sur le revenu global net pour rattachement au foyer fiscal d’un enfant majeur marié ou ayant des enfants à charge (article 196 B du code général des impôts).

Il convient de noter qu’afin de préserver la neutralité fiscale des décisions de rattachement, le montant de cet abattement constitue le plafond de la déduction du revenu imposable de la pension alimentaire versée à un enfant majeur (2° du II de l’article 156 du code général des impôts) de sorte que celui-ci est également relevé.

Il est proposé de porter l’abattement de 5 729 euros à 5 753 euros.

Le coût de l’indexation des plafonds applicables au bénéfice retiré du dispositif de quotient familial est estimé à 15 millions d’euros.

III.– L’INDEXATION DE LA DÉCOTE

La loi de finances pour 1982 (loi n° 81-1160 du 30 décembre 1981) a institué en faveur des contribuables imposés sur une part ou une part et demie de quotient familial une décote, afin de limiter les cotisations d’impôt résultant de l’application du barème. La loi de finances pour 1987 (loi n° 86-1317 du 30 décembre 1986) a élargi le mécanisme à l’ensemble des contribuables.

Le 3° du I propose de porter la base de calcul de la décote de 431 euros à 433 euros. Les contribuables bénéficieront d’une décote égale à la différence entre 433 euros et la moitié de leur cotisation d’impôt (4 du I de l’article 197 du code général des impôts).

Le tableau suivant présente le premier revenu net imposable (après abattement de 10 % au titre des frais professionnels) et le dernier revenu net imposable permettant de bénéficier de la décote en fonction du nombre de parts du foyer.

CHAMP D’APPLICATION DE LA DÉCOTE EN 2010

(en euros)

Revenus 2009 – Projet de loi de finances pour 2010

 

Nombre de parts

Premier revenu net imposable bénéficiant
de la décote

Dernier revenu net imposable bénéficiant
de la décote

1

11 778

15 605

1,5

14 804

20 317

2

17 741

25 029

2,5

20 679

29 741

3

23 616

33 361

3,5

26 491

36 298

Source : Direction de la législation fiscale.

Le coût de l’indexation de la limite de la décote est évalué à 14 millions d’euros.

Le coût total des dispositions du présent article est donc évalué à 283 millions d’euros.

*

* *

La Commission, suivant l’avis défavorable du rapporteur général, rejette les amendements I-CF 102 et I-CF 103 de M. Jean-Pierre Brard.

Puis elle adopte l’article 9 sans modification.

*

* *

Après l’article 9 :

La Commission examine l’amendement I-CF 112 de M. Didier Migaud, portant article additionnel après l’article 9.

M. le président Didier Migaud. Cet amendement a pour objet de substituer à l’actuel barème de l’impôt sur le revenu un barème dit « à taux réel ». Je vous propose de raisonner non plus en taux marginal mais en taux réel, ce qui permettrait d’instaurer une progressivité réelle de l’impôt.

M. le rapporteur général. Les contribuables doivent connaître le taux marginal de leur impôt comme le taux moyen, qui figure d’ailleurs sur leur avis d’imposition. Mais je ne suis pas certain que le fait d’appliquer un taux moyen soit un progrès et je suis a priori défavorable à cet amendement.

M. le président. Nous interrogerons le Gouvernement sur ce point.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite les amendements I-CF 115 et I-CF 111 de M. Didier Migaud.

M. le président Didier Migaud. Les mesures de plafonnement que nous avons votées l’an dernier ayant trouvé leurs limites, je vous propose par l’amendement I-CF 115 d’instaurer un impôt minimum alternatif. Mis en place dans d’autres pays, ce dispositif retire aux ménages disposant de revenus confortables toute possibilité de se soustraire au paiement de l’impôt sur le revenu. En cela, il est plus efficace et plus juste que les mesures adoptées l’année dernière et qui trouvent leurs limites.

Quant à l’amendement I-CF 111, il précise le barème applicable pour le calcul de cet impôt minimum alternatif.

M. le rapporteur général. Les effets du plafonnement global que nous avons mis en place l’an dernier – le « chapeau du chapeau » – et que nous avons évalué à 22 millions d’euros ne seront perçus qu’au printemps prochain. Ce plafond est fixé à 25 000 euros, auxquels on peut ajouter 10 % du revenu imposable. En tout état de cause, un contribuable qui utiliserait toutes les possibilités de défiscalisation prévues dans le code général des impôts ne pourrait bénéficier d’un avantage en impôt supérieur à ce plafond.

Nous avions alors constaté que quatre dispositifs de défiscalisation ne faisaient l’objet d’aucun plafond : les deux articles 199 undecies A et 199 undecies B du code général des impôts, qui portent sur les investissements immobiliers et les investissements productifs neufs réalisés outre-mer, la location en meublé professionnel et la loi Malraux – dispositifs dont le coût diminue de 220, voire de 250 millions d’euros, dès 2010 et dont l’essentiel porte sur l’outre-mer. Et nous avions fait en sorte que le plafonnement global ne pénalise pas trop brutalement l’outre-mer, au moment même où était discuté le projet de loi mettant en place les zones globales d’activité.

Le plafonnement global a les mêmes effets que l’impôt minimum alternatif. La plupart des niches fiscales étant devenues des réductions d’impôts, il est désormais possible de les intégrer dans le plafonnement global. Auparavant un contribuable dont l’essentiel des revenus est imposé à hauteur de 40 % pouvait défiscaliser la totalité de ses revenus : désormais, il ne peut le faire que pour 10 %. C’est un progrès substantiel.

Le plafonnement global est donc aussi efficace que le serait un impôt alternatif, sorte d’« impôt bis », qui nous amènerait à établir deux liquidations pour pouvoir les comparer. Votre amendement, monsieur le président, n’a pas d’intérêt cette année.

M. Jérôme Cahuzac. Le rapporteur général craint que le plafonnement des niches ne provoque notamment une diminution de l’investissement productif outre-mer. Cette crainte doit être balayée car, en 2009, la dépense fiscale outre-mer a augmenté de 6,3 %, et les mécanismes de défiscalisation représentent 3,6 milliards d’euros. Nous avons en conséquence une certaine marge de manœuvre, à moins d’écarter l’outre-mer de toute évolution budgétaire ou fiscale.

Il est clair que nous attendions davantage des 22 millions d’euros inscrits au titre du plafonnement. Depuis 2002, la dépense fiscale a évolué de 23 milliards d’euros, et vous nous expliquez que le dispositif concernant les niches fiscales permet de récupérer 230 millions d’euros ! Nous sommes loin du compte ! La baisse des recettes fiscales que nous constatons cette année, si elle est due en grande partie à la crise économique et financière, est également la conséquence de mesures que vous qualifiez de volontaristes, dont les baisses d’impôt initiées par le Gouvernement de M. Dominique de Villepin, et alors même que notre pays connaît un déficit budgétaire de 141 milliards d’euros !

Tant que nous ne reviendrons pas sur ces mesures, les pouvoirs publics seront incapables de maîtriser la dépense publique, évaluée à 53 ou 54 % du PIB, ce qui est essentiellement dû à l’insuffisance des recettes fiscales. Sachant que nos prélèvements obligatoires avoisinent les 40 % du même PIB, nous sommes condamnés au déficit. Nous devons revenir, de façon progressive, à des ressources fiscales conséquentes, faute de quoi nos réformes ne pourront être financées que par la dette, comme nous en avons cette année un magnifique exemple avec la réforme de la taxe professionnelle.

M. Henri Emmanuelli. Savez-vous, monsieur le rapporteur général, qu’il existe encore des personnes qui ne paient pas d’impôt sur le revenu ? C’est mon cas ! Comment voulez-vous que les Français comprennent qu’un député ne soit pas assujetti à l’impôt sur le revenu pendant qu’eux-mêmes, dont les salaires sont beaucoup plus modestes, continuent de le payer ? Moralement, politiquement et psychologiquement, ce n’est pas acceptable. La proposition de Didier Migaud permettrait de supprimer une telle aberration.

M. le président. Pour les salaires élevés, deux niches ont des effets importants : l’emploi à domicile d’un salarié, d’une part, les dons et cotisations, d’autre part. Le dispositif que je propose préserve ces niches fiscales, mais il en tempère les effets.

M. Daniel Garrigue. Le dispositif proposé par notre président me semble aller dans la bonne direction pour deux raisons : la justice fiscale, à laquelle nos concitoyens sont bien entendu attachés, et la nécessaire rentrée de ressources afin que l’État puisse assumer ses fonctions régaliennes et publiques. De ce point de vue, le bouclier fiscal et la manière dont on pense compenser la taxe carbone sont problématiques.

Enfin, je rappelle que M. Pierre Méhaignerie, prédécesseur de M. Didier Migaud à la présidence de la Commission des finances, avait également proposé, par voie d’amendement, cet « impôt minimum ».

M. Hervé Mariton. Les amendements de M. le président sont très éloquents : leur dispositif « cognerait » bien plus sur les classes moyennes supérieures que sur les riches. Par ailleurs, les réformes qui se sont succédé depuis 2005 ne cessent de faire en sorte que la cohorte des personnes assujetties à l’impôt sur le revenu (IR) diminue.

Enfin, si l’indemnité parlementaire est fort décente, monsieur Emmanuelli, elle n’a rien d’extraordinaire non plus. Je ne serai pas démagogue : compte tenu de ce que sont les niches fiscales, il n’est pas en soi choquant de ne pas être assujetti à l’IR.

M. le président Didier Migaud. Il s’agit non pas de « cogner », mais de faire en sorte que tout un chacun contribue à l’impôt et aux besoins du pays en fonction de ses capacités. J’ajoute que ces amendements se situent dans le cadre d’une réforme fiscale globale tendant à une plus grande progressivité de l’IR et à une modification de l’imposition sur le patrimoine. D’autres dispositions concernent par ailleurs nos compatriotes les plus aisés.

Enfin, je suis persuadé que la question de la justice ou de l’injustice fiscales sera au cœur de l’élection présidentielle de 2012.

M. le rapporteur général. Comment le « chapeau du chapeau » pourrait-il produire des recettes ? Les contribuables qui défiscalisent énormément d’argent sont entourés de conseillers fiscaux intelligents ! Il s’agit d’un dispositif préventif.

Par ailleurs, si les investissements défiscalisés ont progressé en 2009 en outre-mer, je note que nous sommes largement en queue de programmes. Prenons donc le temps de réaliser un bilan !

Les États-Unis, quant à eux, ont mis en place l’Alternative Minimum Tax (AMT) en 1969, laquelle, vingt ans plus tard, rapportait plus que l’IR en taxant les classes moyennes + et + +. La situation était telle depuis une douzaine d’années que, quelles que soient les administrations, cet impôt a été considérablement réduit…

M. le président Didier Migaud. Parce que le barème n’avait jamais été actualisé et qu’un certain nombre de corrections auraient dû être apportées ! La majorité démocrate est en train de revoir ce dispositif.

M. Henri Emmanuelli. M. Mariton ne manque pas de bon sens : comme le bouclier fiscal protège les riches, il ne faut pas « cogner » sur les cadres supérieurs. Dès lors, que reste-t-il, si ce n’est les classes moyennes ? Je note que, depuis 2004, ce sont plus de 30 milliards qui ont été transférés au décile supérieur au détriment de tous les autres.

Au demeurant, la question est bel et bien politique. Quels que soient les clivages, le bon sens républicain devrait l’emporter dans tous les rangs, nos compatriotes ne pouvant comprendre qu’un parlementaire comme moi, dont l’épouse est retraitée de l’éducation nationale, ne paie pas un centime d’IR parce que nous employons une femme de ménage alors que mon assistant parlementaire, lui, y est assujetti ! Les conséquences d’une telle remise en cause de notre ciment social peuvent être lourdes. Nul ne peut soutenir l’insoutenable !

M. Daniel Garrigue. La redistribution de l’IR se faisant d’abord à travers la progressivité et le Gouvernement ne tenant pas à remettre en cause le bouclier fiscal non plus que les niches, je soutiens les amendements de M. le président, pis-aller qui tient compte néanmoins d’un certain nombre de réalités.

M. Hervé Mariton. La réforme de 2005 avait favorisé les contribuables qui se situent très au-dessus de la dernière tranche alors que ceux qui étaient à sa jonction n’en avaient quasiment pas profité. Que cette situation ne soit pas satisfaisante, c’est l’évidence, mais la proposition de M. le président ne ferait qu’aggraver ce phénomène.

M. Michel Bouvard. Comme il n’est en effet pas légitime qu’un contribuable disposant de revenus très élevés ne paie pas d’IR, je regarde ce type d’amendement avec sympathie – j’avais d’ailleurs cosigné celui que Pierre Méhaignerie avait présenté et qui allait également en ce sens.

Nous le voyons à travers le rapport du Conseil des prélèvements obligatoires ou dans le cadre de nos débats sur les transferts fiscaux entre les différentes tranches : j’ai le sentiment que l’on se contente de « rafistoler » notre système sans se poser les questions de fond. Quid de l’ISF par rapport à une tranche d’imposition supérieure, du bouclier fiscal, des modes de déduction ? Voter de tels amendements entraînerait-il les mêmes conséquences que l’AMT aux États-Unis ? Nous avons surtout besoin d’éléments afin d’examiner l’évolution de notre fiscalité et, en particulier, celle de nos comptes sociaux – l’ACOSS, je le rappelle, a besoin d’une trésorerie de 60 milliards. Nous devons réfléchir à une réforme profonde qui ne saurait passer par des amendements d’adaptation, mais qui implique un « rebasage » complet. Notre Commission serait bien inspirée d’y songer.

M. le rapporteur général. Je suis prêt à dresser avec vous un bilan des dix dernières années, notamment s’agissant des allégements fiscaux des hauts revenus. Il est vrai, ainsi, que la réforme de 2005 – en raison de l’abattement au titre des 20 % – a favorisé les contribuables les plus aisés, comme je l’avais d’ailleurs écrit dans mon rapport puisque, sur les 4 milliards de baisse de l’IR, un milliard concernait ces derniers.

La restitution globale du bouclier fiscal, en 2008, s’est quant à elle élevée à 578 millions.

Le calibrage des différentes niches fiscales, par ailleurs, est délicat : ainsi, la niche concernant l’emploi à domicile apparaît-elle pour la première fois en 1992, elle a été fortement amplifiée deux ans plus tard avant que d’être réduite de moitié en 1997, puis de réaugmenter lentement. Je rappelle, à ce propos, que la majorité a refusé de voter l’an dernier un amendement gouvernemental visant à l’augmenter de nouveau et qu’elle est aujourd’hui stabilisée. Il est également vrai qu’il est plus difficile d’apprécier ce calibrage par rapport à la distribution des revenus.

J’ajoute que nous avons réalisé l’an dernier un important travail d’équité fiscale en transformant des mesures d’assiette en réduction d’impôt, égalisant ainsi la déduction indépendamment du niveau de la tranche marginale.

M. le président Didier Migaud. Il serait également intéressant d’examiner le fonctionnement de l’impôt minimum au Canada, lequel est beaucoup moins critiqué qu’aux États-Unis.

La Commission rejette successivement les amendements I-CF 115 et I-CF 111.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur général, elle rejette ensuite successivement les amendements I-CF 98 et I-CF 93 de M. Jean-Pierre Brard.

La Commission examine l’amendement I-CF 149 de M. Jérôme Cahuzac, ainsi que les amendements I-CF 35, I-CF 36 et I-CF 37 de M. Charles de Courson.

M. Jérôme Cahuzac. L’amendement I-CF 149 vise à enfoncer le « chapeau du chapeau » un peu plus profondément sur le crâne en limitant à 15 000 euros la déduction de l’impôt obtenue grâce à plusieurs dispositifs.

M. le rapporteur général. Avis défavorable, la somme de 25 000 euros étant fondée sur la moyenne des investissements productifs réalisés en outre-mer. Donnons-nous une année supplémentaire afin de disposer d’une évaluation, le « chapeau du chapeau » étant appelé à évoluer.

M. Jérôme Cahuzac. Les plafonnements n’ont en rien empêché l’accroissement de 6,3 % de la dépense fiscale en outre-mer. Il est donc non seulement possible de moraliser les dispositifs sans perdre en efficacité, mais l’État a un besoin urgent de rentrées fiscales – à moins que l’on veuille faire payer les générations futures !

M. Gaël Yanno. Le plafonnement global et le plafonnement de la dépense fiscale en outre-mer constitueront l’essentiel de l’« effet plafonnement » établi à la fin de 2009.

Outre que les 6,3 % dont fait état M. le rapporteur spécial de la mission « Outre-mer » ne sont qu’une inscription, nous avons changé le périmètre de la défiscalisation et, donc, de son enregistrement budgétaire : ne sont en effet inscrites dans le montant des dépenses fiscales que celles qui sont agréées. J’ajoute qu’à partir de 2010 la LODEOM impose un agrément dès le premier euro. Enfin, nous avons ramené les agréments en investissements productifs de 300 000 à 250 000 euros, et abaissé le seuil d’agrément dans le logement social. Bercy devrait donc connaître quasiment à l’euro près le montant des défiscalisations.

M. le président Didier Migaud. C’est exact. Nous avons par ailleurs maintes fois affirmé que nous ne voulions pas réaliser des économies sur l’outre-mer mais que nous préférions des dispositifs de soutien autres que fiscaux.

M. Henri Emmanuelli. Quand on connaît la réalité économique de l’outre-mer…

M. Charles de Courson. Les trois amendements I-CF 35, I-CF 36 et I-CF 37 visent respectivement à réduire le montant du plafond des niches fiscales à 7 %, à 8 % et à 9 % du revenu net imposable : en effet, que représentent 5 000 ou 10 000 euros de plus ou de moins par rapport aux 25 000 euros lorsque les revenus sont colossaux ? C’est le taux qui doit évoluer, pas le montant.

M. le rapporteur général. Avis défavorable, la rétroactivité étant impossible. Nous avons par ailleurs veillé à ne pas pénaliser les investissements outre-mer même si je suis ouvert à des évolutions.

M. le président Didier Migaud. Seriez-vous prêt à accepter des amendements lors de la discussion de la seconde partie du PLF ?

M. le rapporteur général. Avant d’envoyer un signal, nous devons procéder aux évaluations qui s’imposent.

M. Marc Goua. Les banques, profitant d’un vide juridique, conseillent aux contribuables mariés sous le régime de la séparation des biens de faire deux déclarations afin de bénéficier de deux abattements de 25 000 euros.

M. le président Didier Migaud. L’imagination en matière fiscale et patrimoniale est débordante…

M. Gaël Yanno. Les règles fiscales doivent être stables et les investissements nécessitent de nombreuses années de préparation. Le plafonnement a été mis en place l’an dernier et certains voudraient déjà changer les règles ? Qui peut me dire aujourd’hui quel est le bilan des dispositifs votés en 2008 ? Personne !

La Commission rejette l’amendement I-CF 149.

M. Charles de Courson. Je retire les amendements I-CF 35, I-CF 36 et I-CF 37, mais je les déposerai de nouveau dans le cadre de la séance publique.

Les amendements I-CF 35, I-CF 36 et I-CF 37 sont retirés.

La Commission examine l’amendement I-CF 32 de M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. Ce tout petit amendement représente 3,5 milliards. C’est celui que je voulais présenter à l’article 1er.

Hors plan de relance, les niches fiscales augmentent de 1,5 milliard. Notre Commission essaye régulièrement de les réduire. Elle s’y est toujours cassé les dents parce que, comme l’a dit un de nos collègues, derrière chaque niche, il y a des chiens, et qui arrivent, en séance publique, à faire rejeter les amendements.

Je propose donc de donner par ordonnance au Gouvernement la possibilité de réduire les niches fiscales d’environ 5 %. Nous n’y arriverons jamais autrement. Certes, Éric Woerth a commandé à l’inspection des finances un examen des 469 niches fiscales existantes, mais qu’en résultera-t-il sinon des propositions dans le projet de loi de finances pour 2011 ?

M. le rapporteur général. Avis défavorable.

M. Henri Emmanuelli. Traiter nos collègues de la majorité de chiens…

M. Michel Bouvard. On ne peut pas donner au Gouvernement le pouvoir d’agir par ordonnance dans ce domaine. Cela poserait d’ailleurs sans doute un problème de constitutionnalité. En tout état de cause, je m’y refuse.

M. le président Didier Migaud. Nous n’avons absolument pas le droit de déléguer le pouvoir fiscal au Gouvernement.

La Commission rejette cet amendement.

Elle examine ensuite l’amendement I-CF 165 de M. Jérôme Cahuzac.

M. Jérôme Cahuzac. Il s’agit de rétablir une demi-part fiscale supprimée l’année dernière.

M. le rapporteur général. Nous avons souhaité que cette demi-part ne bénéficie qu’aux personnes qui ont élevé un enfant seules pendant au moins cinq ans. Le dispositif que nous avons voté n’étant pas rétroactif, il entrera en application pour l’impôt sur les revenus de 2009. La réduction de la demi-part est prévue sur trois ans, mais elle n’est pas bien répartie et nécessite de corriger l’effet de sifflet au regard de la situation familiale des bénéficiaires. Il faudra le faire en loi de finances rectificative.

La Commission rejette cet amendement.

Elle est saisie de l’amendement I-CF 171 de M. Jérôme Cahuzac.

M. Jérôme Cahuzac. Il s’agit de remplacer la réduction d’impôt pour les dépenses liées à l’hébergement de personnes dépendantes par un crédit d’impôt.

M. le rapporteur général. Avis défavorable. Nous souhaitons limiter le crédit d’impôt à la garde d’enfants à domicile dans les ménages où les deux conjoints travaillent.

La Commission rejette cet amendement.

Puis elle examine l’amendement I-CF 6 de M. Marc Le Fur.

M. Marc Le Fur. Existait la déduction d’impôt, qui a été remplacée par un crédit d’impôt, plus juste. Mais certains n’en bénéficient pas, en particulier des retraités relativement modestes qui ne payent pas l’impôt sur le revenu et, pour des raisons sanitaires, ont besoin d’une présence humaine. Dans un souci de justice, ils doivent pouvoir bénéficier comme les actifs de cette mesure.

M. le rapporteur général. Avis défavorable. Cet amendement coûterait plusieurs centaines de millions.

M. Marc Le Fur. Mais il concerne la catégorie de personnes qui a le plus besoin de présence humaine !

M. le rapporteur général. Une partie d’entre elles peuvent bénéficier de l’allocation personnalisée d’autonomie. Les deux dispositifs s’excluent l’un l’autre : à partir d’un certain niveau d’impôt sur le revenu, on n’a pas droit à l’APA mais on bénéficie d’une réduction d’impôt. Si l’on n’est pas ou peu imposable, on a droit à l’APA.

M. Henri Emmanuelli. L’APA progresse de 7 ou 8 % par an, et le financement de l’État baisse. Comment pourrons-nous payer dans les années qui viennent ?

M. le rapporteur général. Sans reprise sur succession, ne nous étonnons pas que l’APA galope ! Nous devons prendre nos responsabilités. Par exemple, il n’a pas été facile de supprimer la demi-part que nous venons d’évoquer, mais il n’est pas non plus acceptable qu’elle soit attribuée à vie à des personnes qui ont divorcé !

M. Marc Le Fur. L’APA ne concerne qu’une fraction des retraités. Il y en a dont les difficultés physiques ne sont pas suffisantes pour l’obtenir, mais qui ont besoin d’une présence humaine et qui ne bénéficient pas du crédit d’impôt. Ils vivent cette situation comme une injustice.

La Commission rejette cet amendement.

Elle est saisie de l’amendement I-CF 13 de M. Marc Le Fur.

M. Marc Le Fur. Lorsque nous avons imaginé le dispositif fiscal de l’emploi à domicile, ces emplois ne pouvaient être tenus que par des salariés. Depuis, nous avons créé le statut d’auto-entrepreneur, qui peut s’exercer tout à fait dans le même champ : aide scolaire, bricolage, notamment. Mais lorsqu’on emploie un auto-entrepreneur, on n’a pas droit à l’avantage fiscal. Il faut adapter la loi compte tenu de l’existence de ce nouveau statut.

M. le rapporteur général. L’auto-entrepreneur bénéficie d’un dispositif fiscal extrêmement intéressant, avec un abattement de 50 % sur le chiffre d’affaires avant calcul de l’impôt pour les prestations de services. On ne peut pas en rajouter. La niche sur les emplois à domicile coûte déjà plus de 3 milliards. Tout un ensemble d’entreprises se sont montées pour en profiter. Il faut arrêter ! Les avantages fiscaux du statut d’auto-entrepreneur sont liés à l’entreprise, et à rien d’autre.

M. Laurent Hénart. Les auto-entrepreneurs peuvent exercer dans le service à domicile dès lors qu’ils se soumettent à la procédure d’agrément prévue par la loi. On ne peut pas prendre à la légère des mesures qui permettent de la contourner. La procédure d’agrément peut certes être considérée comme un frein, alors que le statut d’auto-entrepreneur est basé sur la rapidité et la souplesse, mais c’est une garantie indispensable lorsque de l’argent public est en jeu. Je ne vois pas pourquoi on en dispenserait les auto-entrepreneurs alors que les petites entreprises ou associations du même secteur y sont soumises.

M. Marc Le Fur. Un des grands mérites du statut d’auto-entrepreneur est la simplification. Un agrément est peut-être nécessaire pour les emplois liés à la personne, mais pas pour des travaux de bricolage.

La Commission rejette cet amendement.

Elle examine ensuite l’amendement I-CF 172 de M. Jérôme Cahuzac.

M. Jérôme Cahuzac. Cet amendement vise à abaisser le plafond de réduction d’impôt pour emploi à domicile, qui est beaucoup trop haut. J’aimerais d’ailleurs connaître son coût global.

M. le rapporteur général. Avis défavorable. La dépense fiscale totale est de 3 milliards : 1,75 pour la réduction et 1,25 pour le crédit d’impôt.

La Commission rejette cet amendement.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur général, la Commission rejette l’amendement I-CF 157 de M. Jérôme Cahuzac.

Elle examine ensuite l’amendement I-CF 255 de M. Nicolas Forissier.

M. Nicolas Forissier. Cet amendement permettra de renforcer les fonds propres des PME. Il s’agit d’étendre l’avantage fiscal accordé aux Business Angels aux personnes qui souscrivent au capital d’une société de capital risque regroupant des Business Angels et qui répondent à des critères très précis. Ces sociétés de capital risque accéderaient ainsi au même régime que les holdings ou les fonds communs de placement dans l’innovation.

M. le rapporteur général. Avis défavorable. Le régime bénéficie aux sociétés assujetties à l’impôt sur les sociétés, telles que les holdings. Les autres bénéficient déjà d’un avantage fiscal.

M. Nicolas Forissier. Mon but est surtout de pousser le Gouvernement à clarifier en séance publique sa position en ce domaine. Je retire cet amendement.

L’amendement I-CF 255 est retiré.

La Commission examine deux amendements, I-CF 10 et I-CF 9, de M. Marc Le Fur.

M. Marc Le Fur. La presse s’est encore cette année fait l’écho des montants des transferts de joueurs de football. Le salaire moyen des joueurs de la ligue 1 en France – pas tous des stars ! – est de 47 000 euros par mois. Qui paye ? En partie les spectateurs ou les abonnés de Canal +, bien sûr, mais aussi les contribuables et les cotisants sociaux, ce qui a été largement dénoncé par la Cour des comptes.

Les sportifs professionnels bénéficient de trois avantages : de la possibilité de lisser leurs revenus ; de celle, s’ils reviennent de l’étranger, de bénéficier du régime fiscal de l’impatriation ; d’une mesure, aux effets encore plus considérables, sur les droits à l’image. Il me semble que les budgets de l’État et de la sécurité sociale ont d’autres priorités à financer. J’ai donc rédigé une proposition de loi, signée par de nombreux collègues, pour supprimer ces trois avantages. En attendant son inscription à l’ordre du jour, je la découpe en amendements.

Le plus gros avantage, concernant les droits à l’image, sera traité dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale.

Les amendements I-CF 10 et I-CF 9 touchent donc au lissage, possibilité très intéressante lorsque le salaire augmente, et au régime fiscal de l’impatriation, qui avait été conçu pour de tout autres contribuables que les footballeurs.

M. le rapporteur général. J’ai signé votre proposition de loi, mais il ne faut pas oublier que d’autres que les sportifs de haut niveau sont concernés par ces avantages, comme les chanteurs et autres artistes. Le régime des impatriés, lui, bénéficie aussi aux cadres supérieurs d’entreprise. Les dispositions que vous proposez seront donc à l’évidence inconstitutionnelles, puisqu’elles engendreraient une rupture d’égalité entre les contribuables bénéficiaires de la mesure.

J’estime comme vous que le cumul de l’exonération des droits à l’image, de la possibilité de lissage des revenus sur cinq ans, qui permet d’échapper à la progressivité de l’impôt, et du régime de l’impatriation est exagéré. Nous pourrions y réfléchir d’ici à la loi de finances rectificative, ou à la seconde partie du PLF. Mais, en tout état de cause, le dispositif que nous proposerons ne doit pas être rétroactif ni pouvoir être annulé pour rupture d’égalité.

M. Jérôme Cahuzac. On ne peut pas s’indigner de la rémunération de certains dirigeants d’entreprise et pas des invraisemblables avantages consentis aux sportifs de haut niveau. Le rapporteur général semble disposé à faire quelque chose. Il me semble que nous pourrions trouver un consensus d’ici à la loi de finances rectificative. Faisons-le !

M. Henri Nayrou. Le plus gros de ces avantages, le droit à l’image collective, permet de faire échapper à l’impôt à la fois le joueur et le club. Son montant va dépasser 32 millions en 2009, imputés sur le budget du sport, qui ne brille pas par son opulence. Je suis donc tout à fait favorable à ces amendements, mais plusieurs rapports sur le même sujet ont conclu à l’opposé. Il faudrait donc que la majorité accorde ses violons !

Je rappelle en outre que, comme pour les dirigeants d’entreprises, on ne peut encadrer que les bonus, pas les rémunérations. Le prix d’un joueur se détermine entre les clubs et lui-même. Il convient en revanche de se montrer inflexible sur le plan fiscal.

M. Marc Goua. Pourquoi se focaliser sur les joueurs de football ? Beaucoup de tennismen ont leur résidence en Suisse. Prenons garde de privilégier encore plus certains sportifs !

M. Jean-François Lamour. La solution du droit à l’image collective est certes imparfaite, mais elle permettait de rendre les clubs professionnels un peu plus compétitifs. Je regrette que les fortes critiques de la Cour des comptes ne se soient pas accompagnées d’une étude d’impact évaluant le nombre de joueurs que ce dispositif a pu inciter à rester sur le sol, français, et donc à acquitter taxes et impôts. Seul le montant engagé par le ministère chargé des sports a été mentionné. Or je suis persuadé qu’on évite ainsi le départ de nombreux sportifs. Je précise que les joueurs de rugby tirent beaucoup plus de bénéfice du droit à l’image collective que les joueurs de football.

Comme le rapporteur général, j’estime qu’une complète remise à plat est nécessaire. Le dispositif de lissage s’étend également à des sportifs amateurs – les sportifs olympiques, par exemple – qui bénéficient, au-delà de quelques primes défiscalisées, de contrats dont la durée se réduit à celle de l’olympiade. Il serait bon de le maintenir dans ce cas !

Bref, je crois qu’il ne serait pas bénéfique de « saucissonner » ainsi la proposition de loi de M. Le Fur.

M. le président Didier Migaud. J’invite MM. Le Fur, Nayrou et Lamour à travailler ensemble à des propositions qu’ils pourraient présenter lors de l’examen de la seconde partie du PLF ou lors de celui du projet de loi de finances rectificative. Pour ma part, je soutiendrai tout à l’heure un amendement visant à taxer davantage les très hauts salaires.

M. Marc Le Fur. Il ne s’agit nullement, bien entendu, de taxer les sportifs amateurs bénéficiant d’une recette exceptionnelle justifiant le lissage.

Cela dit, nous devrons veiller à la cohérence de notre proposition avec l’amendement relatif au droit à l’image collective que je présenterai lors de l’examen du PLFSS.

M. Jérôme Cahuzac. Je suis aussi soucieux que M. Jean-François Lamour de conserver des sportifs de haut niveau sur le sol français. Le patriotisme sportif est une bonne chose, à condition que ces sportifs ne découvrent pas l’amour du pays, du maillot et du drapeau uniquement lorsque les salaires ou le régime fiscal leur sont favorables.

M. Henri Nayrou. La question du droit à l’image collective viendra en discussion lors de l’examen de la mission « Sport, jeunesse et vie éducative ». En outre, il existe déjà une disposition législative tendant à la réduction en sifflet de ce droit à partir de 2011.

Les amendements I-CF 10 et I-CF 9 sont retirés.

La Commission est saisie de l’amendement I-CF 169 de M. Jérôme Cahuzac.

M. Jérôme Cahuzac. Dans le « paquet TEPA », la majorité a fait le choix de la défiscalisation et de la désocialisation des heures supplémentaires. Nous considérons pour notre part qu’il fallait doubler la prime pour l’emploi. Le Gouvernement restant silencieux sur cette question, le rapporteur général pourrait-il nous préciser le volume estimé des heures supplémentaires en 2008 et 2009 ? Sauf erreur de ma part, le niveau de 2009 est le même que celui de 2007, avant l’application de la loi. Étant donné la baisse de la croissance (plus 2,4 % en 2007, moins 2,5 % cette année), il résulte du dispositif que l’État paie, dans une même entreprise, à la fois pour les heures supplémentaires et pour le chômage partiel ! En période de stagnation ou de récession, la mesure est absurde.

M. le rapporteur général. Estimer ce qui se serait passé sans la mesure relative aux heures supplémentaires (la crise frappant de surcroît) relève de l’économie hypothétique.

M. Michel Sapin. Il y aurait eu des emplois en plus !

M. le rapporteur général. Il me semble normal que la baisse de la croissance se traduise par une baisse des heures supplémentaires, défiscalisées ou non. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle rejette successivement, suivant l’avis défavorable du rapporteur général, trois amendements de M. Jérôme Cahuzac, I-CF 168, visant à indexer la prime pour l’emploi, I-CF 170, visant à majorer cette prime, et I-CF 153, tendant à instaurer un versement forfaitaire pour les catégories les plus défavorisées.

La Commission rejette, suivant l’avis défavorable du rapporteur général, l’amendement I-CF 90 de M. Jean-Pierre Brard.

Article 10

Exonération d’impôt sur le revenu de l’aide exceptionnelle de 200 euros versée aux bénéficiaires de certaines prestations sociales et à certains demandeurs d’emploi et de la prime exceptionnelle de 500 euros versée aux travailleurs privés d’emploi

Annoncées lors du sommet social du 18 février 2009, les deux mesures dont le présent article propose l’exonération de l’impôt sur le revenu, consistent en :

– une aide exceptionnelle de 200 euros versée aux bénéficiaires de certaines prestations sociales et à certains demandeurs d’emploi ;

– une prime exceptionnelle de 500 euros versée aux travailleurs privés involontairement de leur emploi.

Le décret n° 2009-479 du 29 avril 2009 fixe les conditions d’octroi des deux dispositifs.

Le bénéfice de l’aide exceptionnelle de 200 euros, versée sous la forme de chèques emploi-service universels (CESU) préfinancés par l’État, est réservé aux personnes ayant droit à l’allocation personnalisée d’autonomie (APA) au 1er mars 2009, aux bénéficiaires au titre des mois de janvier, février et mars 2009 du complément de libre choix du mode de garde de la prestation d’accueil du jeune enfant (PAJE) et aux bénéficiaires au titre de la même période de l’allocation d’éducation de l’enfant handicapé (AEEH). Les demandeurs d’emploi ayant un enfant à charge peuvent également en bénéficier s’ils reprennent une activité ou une formation, sur prescription du pôle emploi.

Cette aide n’est versée qu’au titre de l’année 2009 et la mesure d’exonération porte par conséquent sur l’imposition perçue en 2010.

Pour les trois premières catégories de bénéficiaires (APA, complément de libre choix de mode de garde de la PAJE, AEEH), cette aide exceptionnelle est exonérée car elle constitue un complément de prestations sociales et bénéficie à ce titre du régime fiscal défini au 2° de l’article 81 du CGI.

Cependant, aucune disposition ne permet, en l’état du droit, d’exonérer l’aide reçue par les demandeurs d’emploi satisfaisant les conditions préalables au versement de la prime. En effet, seule est prévue l’exonération d’impôt sur le revenu de l’aide financière du comité d’entreprise ou de l’entreprise pour le financement des aides à la personne dans la limite de 1 830 euros par an et par bénéficiaire (en application du 37° de l’article 81 du CGI).

Il résulte de ces dispositions un traitement fiscal différent selon la catégorie de bénéficiaires pour une même allocation. Le présent article propose ainsi d’uniformiser la portée de la mesure en exonérant d’impôt sur le revenu l’ensemble de ses bénéficiaires.

Le second dispositif correspond à prime exceptionnelle de 500 euros ayant vocation à être versée aux salariés involontairement privés de leur emploi entre le 1er avril 2009 et le 31 mars 2010 à la condition qu’ils aient exercé une activité pour une période de deux à quatre mois au cours des vingt-huit derniers mois précédant la perte de leur emploi et qu’ils ne puissent prétendre au versement de l’allocation chômage.

Cette prime entre dans le champ de l’impôt sur le revenu puisqu’elle se substitue aux allocations chômage, qui constituent par principe un revenu de remplacement imposable, et qu’elle n’est pas attribuée sous condition de ressources. Elle n’est donc pas susceptible de bénéficier du régime fiscal défini au 9° de l’article 81 du CGI selon lequel les allocations, indemnités et prestations versées par l'État, les collectivités et les établissements publics, en application des lois et décrets d'assistance et d'assurance, sont exonérées.

Le présent article propose de déroger à cette règle afin d’assurer le plein effet de la mesure. L’exonération proposée pourrait ainsi porter sur les impositions de 2010 et de 2011 en fonction de la date du licenciement.

Le coût résultant de la mise en œuvre de ces deux dispositifs est évalué à 10 millions d’euros pour 2010.

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La Commission adopte l’article 10 sans modification.

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Article 11

Exonération du revenu supplémentaire temporaire d’activité versé dans les DOM et prise en compte de ce revenu dans le montant de la prime pour l'emploi

Le présent article propose d’exonérer de l’impôt sur le revenu le revenu supplémentaire temporaire d’activité (RSTA), mis en place afin d’anticiper l’application du revenu de solidarité active (RSA) dans les départements d’Outre-mer (DOM). Par ailleurs, il prévoit de minorer le montant de la prime pour l’emploi (PPE) des sommes versées au titre de ce nouveau revenu aux contribuables éligibles aux deux dispositifs.

Le RSA s’appliquera dans les départements d’Outre-mer au plus tard en janvier 2011. À cette fin, le Gouvernement sera autorisé, après consultation des collectivités concernées, à prendre par ordonnance les mesures de mise en œuvre de cette politique d’insertion.

Cependant, au regard de la crise qui s’est déroulée dans les DOM de janvier à mars 2009, il est apparu nécessaire d’instaurer un dispositif transitoire qui permette également de satisfaire la demande d’augmentation des salaires dans ces départements. Ainsi, le RSTA correspond davantage à une mesure de revalorisation des salaires qu’à une incitation au retour à l’emploi. En ce sens, il diffère du RSA puisque ce dernier propose une allocation dégressive pour les chômeurs reprenant une activité, tandis que le RSTA est un supplément de rémunération forfaitaire

Le montant de cette allocation est de 100 euros par mois versés aux salariés à temps plein du secteur privé de Guadeloupe, de Martinique, de Guyane, de Réunion dont le revenu est compris entre 1 fois et 1,4 fois le SMIC mensuel. Son montant est réduit à due proportion pour les travailleurs à temps partiel ou dont le contrat a débuté ou cessé en cours de mois.

Le versement du RSTA n’entre pas en compte pour la détermination des droits au RMI, à l’allocation de parent isolé, aux avantages d’invalidité et de vieillesse servis sous condition de ressources et à l’aide complémentaire santé.

Entré en vigueur le 1er mars 2009 en application du décret n°2009-602 du 27 mai 2009, les versements trimestriels de la nouvelle allocation ont débuté en juillet 2009.

a) Une exonération d’impôt sur le revenu nécessaire pour garantir
le plein effet de la mesure

Les conditions de ressources pour l’éligibilité au RSA sont appréciées au niveau du foyer, tandis que, dans le cas du RSTA, ne sont pris en compte que les revenus professionnels.

Par conséquent, l’exonération de l’impôt sur le revenu prévue au 9° de l’article 81 du code général des impôts (CGI), qui prévoit que les revenus des allocations d’assistance et d’assurance versés par l’État sont exonérés, ne peut s’appliquer pour cette allocation forfaitaire qui ne prend pas en compte l’ensemble des revenus du foyer.

Le présent article propose de rendre possible cette exonération afin de garantir le plein effet du RSTA en termes de pouvoir d’achat. Ainsi, il ne serait assujetti qu’à la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS), d’un montant de 50 centimes pour 100 euros versés.

b) L’articulation du RSTA avec la prime pour l’emploi

Le présent article propose d’imputer sur le montant de la prime pour l’emploi versée en N+1, les sommes perçues trimestriellement en N par les contribuables au titre du RSTA.

À l’instar du RSA, il constitue ainsi une avance à valoir sur la PPE.

Pour rappel, dans le dispositif de mise en œuvre du RSA, tel que présenté au II de l’article 200 sexies du CGI, cette minoration exclut les montants correspondant à la différence entre le montant forfaitaire prévu à l’article L. 262-2 du code de l’action sociale et des familles (soit le revenu minimum garanti) et les ressources du foyer définies à l’article L. 262-3 du même code. Il y a donc une distinction entre un RSA « de base » (l’actuel RMI) et un RSA « chapeau » qui seul s’impute sur le montant de la PPE. Le contribuable éligible en métropole n’imputera sur le montant de la PPE qui lui est due que la fraction de RSA liée à son activité professionnelle.

Dans le cadre du RSTA, la totalité de la somme est retranchée puisque ce revenu supplémentaire correspond uniquement au RSA « chapeau ».

Le nombre de contribuables concernés par cette mesure est important. En effet, 178 000 foyers ultramarins bénéficient de la PPE, tandis que le Secrétariat à l’Outre-mer évaluait à 220 000 les futurs bénéficiaires du RSTA lors de son lancement.

c) L’application de ces deux mesures permettrait de dégager une recette de 300 millions d’euros étalée de 2010 à 2012

Les dispositions présentées sont applicables à compter des revenus de 2009. Leur incidence budgétaire est évaluée comme suit :

(en millions d’euros)

 

2010

2011

2012

Exonération

– 3

– 5

– 2

Imputation RSTA sur la PPE

110

140

60

TOTAL

107

135

58

Source : Direction de la législation fiscale

Pour rappel, le coût du RSTA en année pleine est estimé à 280 millions d’euros pour un nombre de bénéficiaires estimé à 185.000 salariés dans le secteur privé, auxquels s'ajouteront les agents non titulaires de droit public. Au 30 septembre 2009, 60 340 dossiers avaient fait l’objet d’une décision favorable et mené au versement de 15 millions d’euros aux bénéficiaires de la mesure.

À compter de l’application dans les départements concernés de la loi n° 2008-1249 du 1er décembre 2008 portant généralisation du RSA, le RSTA ne sera plus versé. L’impact de ces mesures est donc circonscrit à la période 2010-2012.

*

* *

La Commission est saisie de l’amendement I-CF 220 de M. Victorin Lurel.

M. Jérôme Cahuzac. Après les mouvements sociaux qui ont touché les départements d’outre-mer durant l’hiver 2008-2009, un protocole a instauré au bénéfice des salariés un « revenu supplémentaire temporaire d’activité » (RSTA), dont le montant mensuel est de 200 euros en Guadeloupe et de 100 euros dans les autres départements. Le PLF pour 2010 impute cette prime sur la prime pour l’emploi, la PPE. En d’autres termes, l’État reprend ce qu’il a accordé à l’issue des mouvements sociaux. Je comprends qu’il y ait des impératifs budgétaires, mais il s’agit là d’une manœuvre totalement déloyale de la part du Gouvernement. Les populations concernées ont la certitude que cette prime est un avantage durable. Il faudra que le Gouvernement s’en explique devant la représentation nationale.

M. le rapporteur général. Dans le régime de droit commun, le RSA est imputé sur la prime pour l’emploi. Comme le droit commun ne pourra s’appliquer à l’outre-mer que dans deux ans, il a été décidé l’an dernier d’appliquer un dispositif temporaire, le RSTA, destiné à permettre la jonction avec le RSA. L’accord Bino n’a pas indiqué explicitement, sauf erreur de ma part, que le RSTA serait déconnecté de la PPE.

Le Gouvernement s’expliquera. Pour ma part, je donne un avis défavorable, dans la mesure où le régime de droit commun s’appliquera à l’outre-mer dans un ou deux ans.

M. Charles de Courson. Implicitement, le rapporteur général souligne un problème d’égalité devant l’impôt. La PPE est un impôt négatif, mais c’est bien un impôt. On ne peut en sortir ainsi des éléments de revenu. Le Conseil constitutionnel risque de censurer la disposition pour rupture d’égalité.

Autant que je me souvienne, la prime et certains avantages accordés au patronat des DOM avaient pour objectif global d’inciter à une augmentation des salaires. Cet objectif est-il atteint ?

M. Hervé Mariton. Je crois que M. Cahuzac a raison. Il faut ramener le RSTA à son humble réalité : sous des dehors de RSA, il s’agit en réalité d’une prime mise en place dans l’attente de l’arrivée, trop tardive pour de multiples raisons, de ce dispositif. Quoi qu’il en soit, il ne semble pas tout à fait de bon sens que les départements les plus concernés par le RMI soient les derniers à connaître la mise en œuvre du RSA. L’effacement de la prime par son imputation sur la PPE – laquelle n’est d’ailleurs pas mentionnée dans l’accord – pose une difficulté. Le Gouvernement devrait plus clairement assumer que le RSTA n’est pas le RSA.

M. Jérôme Cahuzac. Méfions-nous en effet de cette quasi-homonymie ! L’accord Bino ne concerne que la Guadeloupe et fixe la prime à 200 euros, dont la moitié doit être abondée à part égale par les collectivités et par les employeurs. La prime « commune » avec les autres départements, le RSTA de 100 euros, n’a jamais été présentée comme une incitation au retour au travail : l’objectif est d’améliorer un pouvoir d’achat dont les pouvoirs publics eux-mêmes ont reconnu l’insuffisance. Je maintiens que l’imputation sur la PPE est déloyale et sera perçue comme telle par les populations. Au moment où le Président de la République doit conclure les états généraux de l’outre-mer, cela me semble dangereux. Il faudrait au moins que le Gouvernement s’explique sur cette transformation ex post d’une prime en incitation au retour au travail.

M. le rapporteur général. Je maintiens mon avis défavorable mais je conviens qu’il y a là un problème sur lequel le Gouvernement devra s’expliquer. Les populations de l’outre-mer sont très sensibles à la parole de l’État. Nous aviserons en fonction des réponses que l’on nous donnera en séance publique.

Le coût du RSTA est évalué à 280 millions d’euros en année pleine.

M. Jérôme Cahuzac. Plus précisément, la ligne budgétaire consacrée à cette mesure passe de 280 millions d’euro en 2009 à 150 millions en 2010. Le Gouvernement efface donc 130 millions d’euros.

La Commission rejette l’amendement I-CF 220.

Puis elle adopte l’article 11 sans modification.

*

* *

Après l’article 11 :

Suivant l’avis défavorable du rapporteur général, la Commission rejette d’abord l’amendement I-CF 92 de M. Jean-Pierre Brard.

Elle examine ensuite deux amendements identiques, I-CF 174 de M. Jérôme Cahuzac et I-CF 236 de M. Daniel Garrigue, tendant à abroger l’article 1er du code général des impôts.

M. Jérôme Cahuzac. Je suis persuadé que la majorité et le Gouvernement ne tiendront pas jusqu’en 2012 sans toucher au bouclier fiscal. On voit déjà apparaître quelques lézardes, comme ce rapport d’information déposé par le président de la commission des lois, M. Jean-Luc Warsmann.

M. Daniel Garrigue. Non seulement le bouclier fiscal remet en cause la solidarité, mais son existence conduit les pouvoirs publics à recourir à des impôts périphériques, indirects, tant en matière de sécurité sociale qu’au titre du budget de l’État. Ils ne peuvent plus toucher aux impôts et prélèvements de caractère général, comme l’impôt sur le revenu, la CSG ou la CRDS.

M. Woerth a encore récemment affirmé devant nous sa détermination à lutter contre les paradis fiscaux. Mais qu’est-ce que le bouclier fiscal, sinon un paradis fiscal à domicile ?

M. René Couanau. Je ne voudrais pas que cette question, à force d’être débattue à chaque discussion budgétaire, se trouve banalisée. Il ne s’agit pas d’une affaire banale donnant lieu à une confrontation classique entre opposition et majorité, mais d’une réflexion de fond sur notre système fiscal. Nous savons tous que le bouclier fiscal n’est ni juste, ni efficace, ni opportun. Comme le montre le récent rapport de M. Jean-Luc Warsmann, qui propose seulement d’exclure la CRDS de l’assiette du bouclier, et comme nous l’avons souligné dès le départ, nous ne pourrons pas tenir ce qui a pu apparaître, placé à l’article 1er du code général des impôts, comme un dogme. Je persiste à penser que c’est là une mauvaise affaire qui compromet toute réflexion d’ensemble sur le système fiscal. J’en veux pour preuve qu’il n’est plus possible de discuter du relèvement de l’imposition sur la tranche supérieure de revenus, de l’ISF, de la taxe carbone ou de l’augmentation des recettes nécessaires au financement du système social.

Bref, il est temps que le Gouvernement comprenne que la question n’est pas, pour nous, d’« exister », mais d’agir dans l’intérêt général. C’est un problème de fond qu’il faut aborder comme tel.

Bien que préférant la suppression de l’article 1er, je cosignerai des amendements ayant trait aux prélèvements sociaux et aux impôts locaux. L’important est d’aider le Gouvernement à progresser pour surmonter ce handicap et aborder sereinement les questions de justice fiscale.

M. Charles de Courson. Le groupe Nouveau Centre est favorable au principe du bouclier fiscal. Au demeurant, quand nos collègues de l’opposition ont créé l’ISF, ils ont créé, avec le plafonnement, un bouclier.

La question n’est pas de principe. Ce qu’il faut déterminer, c’est ce que l’on inclut dans le bouclier et à quel niveau on le fixe.

Or, dès l’origine, nous avons demandé que le bouclier ne porte ni sur les impôts locaux ni sur la CGS, et la CRDS. Le budget de l’État ne doit pas servir à financer les excès de certains élus locaux. Et, surtout, la CSG et la CRDS sont l’expression de la solidarité nationale et l’on ne peut décider qu’une petite catégorie de personnes très riches y échappe. On nous indique qu’il faudra augmenter les prélèvements sociaux – ce que l’on a d’ailleurs déjà fait en créant une nouvelle taxe de 1,1 % sur les revenus du patrimoine. Mais chacun sait qu’avec 43 milliards d’euros de déficit des comptes sociaux et 73 milliards de besoins de trésorerie, on ne pourra pas survivre très longtemps avec des emprunts de trésorerie dissimulés dans le cadre de l’ACOSS. Il est de notre responsabilité d’apporter à la CADES, au minimum, les moyens de payer les intérêts de la dette qu’elle gère. Allons-nous en exonérer les contribuables les plus aisés ?

Bref, il faut tenir bon sur le principe et sur les 50 %, mais il faut revoir le périmètre.

M. Jérôme Cahuzac. Je suis plutôt en accord avec M. de Courson et en léger désaccord avec M. Couanau.

Ce n’est pas le Gouvernement, c’est le Président de la République qui a voulu le bouclier fiscal, et c’est lui qui refuse qu’on y touche. Nous avons affaire à une volonté politique qui relève du caprice et qui s’est d’ailleurs manifestée sur d’autres sujets, heureusement moins essentiels pour le pays mais aux effets dévastateurs dans l’opinion. Je doute que la majorité puisse continuer très longtemps à accepter cette volonté capricieuse.

Nous reconnaissons volontiers, monsieur de Courson, que le plafonnement institué lors de la création de l’ISF était une forme de bouclier. Vous avez raison : le débat ne porte pas sur le principe, mais sur le niveau et la nature, et c’est une folie que d’avoir inclus les impôts locaux et les impôts sociaux. Je vous renvoie à l’exemple du contribuable ne payant pas l’impôt sur le revenu mais se faisant rembourser par l’État la moitié de ses impôts locaux alors qu’il a des revenus très confortables. Ce n’est pas tenable !

Enfin, on sait bien qu’il faudra abonder la CADES. Conserver le principe du bouclier revient à faire peser un endettement supplémentaire sur les générations futures. C’est moralement indéfendable.

M. le président Didier Migaud. Jusqu’à preuve du contraire, c’est le Parlement qui vote le budget. Le bouclier fiscal a été adopté par une majorité politique. C’est à elle de décider si elle revient ou non sur ce dispositif.

M. René Couanau. Notre Commission s’efforce de réduire les niches fiscales. Or le bouclier fiscal n’est rien d’autre qu’une « super-niche fiscale », la moins justifiée, la moins efficace et la moins consensuelle de toutes.

M. Jean-Yves Cousin. Je partage l’analyse de M. Couanau. En revanche, je regrette le tour polémique que M. Cahuzac a donné à la première partie de son intervention. En effet, il s’agit d’un débat essentiel, dont il convient de préserver la tenue et la hauteur.

M. Henri Emmanuelli. Vous êtes quand même conscient que la situation actuelle est insupportable pour les gens. Je m’efforcerai de donner le plus large écho à l’exemple que j’ai pris hier, car il convaincra tout le monde, y compris l’électorat de l’UMP, que l’on a franchi les limites de la rationalité. Cela dit, si la majorité entend poursuivre sur cette pente suicidaire, ce n’est pas moi qui pourrai l’en empêcher !

M. Jean-Michel Fourgous. Nous sommes au 175e rang mondial en matière de taux d’imposition, et nous sommes au 24e rang – sur 25 – au sein l’Union européenne. Or, trop d’impôt tue l’impôt : il existe un seuil au-delà duquel les hausses d’impôt n’augmentent plus les recettes fiscales, mais poussent certains contribuables et certains capitaux à quitter notre pays.

M. le rapporteur général. Il faut être conscient que le bouclier fiscal a été instauré pour la première fois avec le rétablissement de l’ISF en 1988. Je fais partie de ceux qui préconisent la suppression de l’ISF et du bouclier fiscal, assortie d’une augmentation de l’impôt sur le revenu et d’une révision de la fiscalité du patrimoine en ce qui concerne les revenus du patrimoine, notamment les plus-values, et éventuellement les successions. Il n’en reste pas moins que nous avons besoin du bouclier fiscal tant que l’ISF continuera à exister.

Je pense néanmoins que n’aurions pas dû intégrer les prélèvements sociaux dans le bouclier fiscal en 2007. À ce sujet, je prends l’engagement suivant : si nous devons un jour augmenter la CSG ou la CRDS, je demanderai qu’on les sorte du bouclier fiscal. C’est une simple question d’équité : les ménages les plus aisés qui bénéficient du bouclier fiscal ne doivent pas échapper à une éventuelle augmentation de CSG ou de CRDS.

Je vous demande de n’accepter aucun de ces amendements aujourd’hui. Le bouclier joue en effet a posteriori. Pour la restitution de l’année 2010, par exemple, le dénominateur sera composé des revenus de l’année 2008 et le numérateur des impôts sur le revenu acquittés en 2009 au titre de l’année 2008, ainsi que de la CSG et de la CRDS sur les revenus 2008, donc acquittées en 2008 sur les salaires. La question de la sortie des prélèvements sociaux devra donc être traitée l’année de leur relèvement. Mettons-nous donc d’accord sur le principe. Nous l’appliquerons le moment venu.

M. Henri Emmanuelli. Aux calendes grecques ?

M. Jérôme Cahuzac. Je prends acte des propos du rapporteur général, qui me conviennent en partie. Mais ne devrait-on pas sortir de l’assiette du bouclier fiscal la taxation supplémentaire des retraites chapeaux, proposée par le Gouvernement ? Cette question se pose dès aujourd’hui.

M. le président Didier Migaud. Nous devons savoir gré au rapporteur général d’avoir été aussi franc : jusqu’à présent, la question du bouclier fiscal et celle de l’ISF n’avaient jamais été liées publiquement. Le gouvernement n’en est pas encore là.

M. Jérôme Chartier. Ce qu’a dit le rapporteur était très juste. Mais il ne faut pas non plus oublier que la majorité des bénéficiaires du bouclier fiscal ont des revenus modestes. Nous devons maintenir le bouclier fiscal à leur intention.

M. Didier le président Migaud. Il existe d’autres façons de régler ce problème…

M. Pierre-Alain Muet. Un règlement au cas par cas des situations avec l’administration fiscale a toujours été possible.

La deuxième partie des explications du rapporteur général constituait une formidable autocritique, car il a reconnu que l’élargissement du bouclier fiscal n’était pas justifié. En revanche, je n’accepte pas qu’on lie la suppression du bouclier fiscal et celle de l’ISF : l’impôt sur le revenu ne taxant que les salaires, nous avons besoin d’un impôt sur le patrimoine pour taxer les profits. C’est le rôle fondamental de l’ISF.

M. Didier Migaud. Je constate que beaucoup d’entre nous regrettent maintenant d’avoir voté le bouclier fiscal.

M. René Couanau. Allons, allons ! Restons sereins.

La Commission rejette les amendements identiques I-CF 174 et 236.

Elle rejette ensuite l’amendement I-CF 173 de M. Jérôme Cahuzac.

Puis la Commission examine les amendements I-CF 237, I-CF 235 et I-CF 238 de M. Daniel Garrigue.

M. Daniel Garrigue. Quand le bouclier fiscal a été institué, nous étions un certain nombre au sein de la majorité à soutenir la proposition de Pierre Méhaignerie qui demandait la suppression des niches fiscales et un aménagement de l’impôt sur le revenu.

L’une des justifications du bouclier fiscal était de protéger des ménages ne disposant pas de revenus importants mais soumis à des prélèvements de nature confiscatoire si l’on additionne l’impôt sur le revenu, l’ISF et les impôts locaux acquittés.

De même que nous avions établi un plafonnement de l’ISF, je propose de plafonner le bouclier fiscal en excluant de son bénéfice les contribuables dont les revenus sont imposables au-delà du taux de 30 %, ce qui représente un plafond de 69 000 euros. Au-delà d’un tel seuil, il n’y a aucune raison d’échapper à l’effort de solidarité nationale

Suivant l’avis défavorable du rapporteur général, la Commission rejette successivement ces amendements.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur général, elle rejette successivement l’amendement I-CF 91 de M. Jean-Pierre Brard et l’amendement I-CF 161 de M. Jérôme Cahuzac.

La Commission examine l’amendement I-CF 38 de M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. Il s’agit de sortir du périmètre du bouclier fiscal certains éléments contestables au regard du principe de solidarité nationale et locale : la CSG, la CRDS, la taxe de 1,1 % sur les revenus du patrimoine et les produits de placement, ainsi que les impôts locaux.

M. le rapporteur général. Comme je l’ai indiqué, je souhaiterais que nous nous prononcions sur l’exclusion de la CSG et de la CRDS lorsqu’il nous sera proposé de les augmenter.

M. René Couanau. J’ignore pourquoi les amendements que j’avais déposés avec Jean-Yves Cousin ne figurent pas dans la liasse. Ils étaient identiques à l’amendement I-CF 38 que nous cosignons avec l’accord de son auteur.

Plus le temps passe et plus le bouclier fiscal paraît insupportable. C’est encore plus vrai maintenant que nous connaissons l’état des comptes sociaux et la dette de la Sécurité sociale. Il est de plus en plus incohérent d’inclure les cotisations sociales dans l’assiette du bouclier fiscal. De même pour les impôts locaux. Adopter cet amendement serait un premier pas dans la bonne voie.

M. Hervé Mariton. L’amendement réduirait considérablement le nombre des bénéficiaires du bouclier fiscal, ce qui affaiblirait l’un des principaux arguments en sa faveur. Plafonner vaudrait mieux.

M. Michel Sapin. Un bouclier contre le bouclier !

M. Jérôme Cahuzac. Nous voterons l’amendement. Il n’est pas exact que le bouclier fiscal bénéficie à 15 000 de nos concitoyens : ceux qui obtiennent la restitution de sommes faibles – le plus grand nombre des bénéficiaires – obtiendraient déjà satisfaction en sollicitant directement l’administration fiscale.

J’appelle, par ailleurs, l’attention sur la situation extrêmement délicate des comptes sociaux : le trou de la sécurité atteint un niveau sans précédent et la Caisse des dépôts nous a indiqué qu’elle ne pourrait pas couvrir les creux de trésorerie au-delà de 31 milliards d’euros. Il faudra alors emprunter sur les marchés, ce qui nous exposera à des frais supplémentaires. Le maintien de la CSG et de la CRDS dans l’assiette du bouclier conduirait donc à une bien mauvaise utilisation des fonds publics.

M. le rapporteur général. Je demande que le vote sur ces amendements soit réservé.

M. Henri Emmanuelli. Sur le fondement de quel article du Règlement ?

M. le président Didier Migaud. Je suis saisi d’une demande de suspension de séance par M. Jérôme Chartier.

La séance, suspendue à onze heures trente-cinq, est reprise à onze heures quarante.

M. le président Didier Migaud. Le Règlement ne prévoit pas la possibilité de demander la réserve d’un vote, mais la suspension est de droit.

M. Henri Emmanuelli. La suspension était donc injustifiée. C’est une manipulation.

M. le président Didier Migaud. Il y avait un doute que nous avons levé à l’occasion de la suspension de séance.

M. Daniel Garrigue. La demande de suspension était en réalité motivée par les interrogations des membres de la majorité sur l’amendement.

M. le président Didier Migaud. Chacun aura compris que cet amendement suscitait plus que des interrogations. Il a nécessité que l’on mobilise dans les rangs de la majorité.

La Commission rejette l’amendement I-CF 38.

Puis, suivant l’avis du rapporteur général, la Commission rejette l’amendement I-CF 39 de M. Charles de Courson.

La Commission examine ensuite l’amendement I-CF 42 de M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. Au nom de la responsabilité des élus locaux devant leurs électeurs, cet amendement tend à retirer les impôts locaux de l’assiette du bouclier fiscal. Il n’y a pas de raison que la communauté nationale prenne en charge les conséquences des dérapages de la fiscalité locale.

M. le rapporteur général. Avis défavorable. Ce dispositif a joué en faveur d’un nombre important de contribuables, notamment à la Réunion.

M. Charles de Courson. On laisserait donc des collectivités présenter des déficits incroyables, sans appliquer les mécanismes prévus par la loi, et il reviendrait à la solidarité nationale de compenser les conséquences des hausses de la fiscalité locale ? Quelle absurdité ! Essayons plutôt de ne pas encourager les dérives.

La Commission rejette cet amendement.

La Commission est saisie de l’amendement I-CF 40 de M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. Cet amendement est une variante des précédents. Sachant qu’il faudra bien augmenter la CSG et la CRDS pour faire face à la dette sociale, sortons aux moins ces deux taxations du bouclier fiscal.

M. Michel Bouvard. L’ampleur des déficits nous contraint d’engager une réflexion de fond sur le financement de la dette sociale et d’étudier, il est vrai, l’exclusion des cotisations sociales du bouclier fiscal.

M. René Couanau. Depuis le rapport de notre collègue Warsmann, tout le monde reconnaît que le Parlement devra, à l’occasion de l’examen du PLFSS, poser la question de la contribution de tous à l’effacement de la dette sociale. De même que la taxe carbone est présentée comme un signal envoyé à l’opinion, ce serait un signal de solidarité envoyé à nos concitoyens. Ici l’inflexibilité n’est pas défendable.

M. Jérôme Chartier. En réalité, M. Warsmann est sur la même ligne que notre rapporteur général : il défend le principe du bouclier fiscal, mais imagine un moyen d’augmenter les recettes de CRDS. Sa proposition ne vaut que dans l’hypothèse d’une augmentation des prélèvements sociaux.

M. Jérôme Cahuzac. La majorité reconnaît désormais que l’augmentation des ressources des régimes sociaux est inimaginable aussi longtemps que le bouclier fiscal exonère les plus aisés de nos compatriotes de cet effort de solidarité. Mais je ne comprends pas comment on pourrait ne sortir du bouclier fiscal que l’augmentation, et non pas la totalité de la CRDS. C’est complètement incohérent.

M. Pierre-Alain Muet. Je ne comprends pas moi non plus. Cela veut-il dire que la mesure ne serait que conjoncturelle ? Cela n’a pas de sens. Les différents rapports ont bien montré le scandale que constituait la possibilité, pour les titulaires de gros patrimoines, d’être quasiment exonérés d’impôt sur le revenu et de se voir en plus rembourser l’impôt sur la fortune et les prélèvements sociaux. Si on pense que cette situation est scandaleuse, il faut supprimer le scandale à sa racine, et non à la marge.

M. Daniel Garrigue. Ce débat n’a rien de théorique : dès la semaine prochaine, lors de l’examen du PLFSS par la commission des Affaires sociales, il nous faudra augmenter soit le forfait hospitalier, soit la CRDS. Nous verrons bien alors le degré de sincérité de vos propositions.

M. Charles de Courson. La question se posera en effet dès cette année. Dans le cadre du PLFSS, le Gouvernement nous proposera d’élargir l’assiette de la CSG aux retraites chapeau et aux plus-values de cession des valeurs mobilières dès le premier euro. Or, cet élargissement sera un coup d’épée dans l’eau puisqu’il ne s’appliquera pas aux plus riches, qui échapperont ainsi à l’effort de solidarité.

J’en appelle à votre réflexion, messieurs de la majorité : il ne faudrait pas que, pour un enjeu financier négligeable, de l’ordre de quelques dizaines de millions d’euros, vous négligiez une question de principe. En tout état de cause, le statu quo est impossible.

La Commission rejette l’amendement I-CF 40.

Elle examine ensuite l’amendement I-CF 41 de M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. Depuis la création du bouclier fiscal, on a déjà voté, en dépit de notre opposition, l’intégration d’un nouvel impôt au bouclier fiscal : la contribution de 1,1 % sur les revenus du patrimoine destinée à financer le RSA. Or, la crise a provoqué l’effondrement de l’assiette de cet impôt. J’attire une nouvelle fois votre attention sur le danger de financer des dépenses sociales pérennes par des taxes assises sur le patrimoine.

M. le rapporteur général. Défavorable.

La Commission rejette cet amendement.

Puis elle est saisie de l’amendement I-CF 14 de M. Didier Migaud.

M. le président Didier Migaud. Cet amendement, déjà défendu l’année dernière, prévoit que le revenu pris en compte pour le calcul du droit à restitution intègre les revenus des capitaux mobiliers avant abattement : c’est une question de justice.

M. le rapporteur général. Défavorable au nom du principe de non-rétroactivité, cet ajustement technique, nécessaire, devant trouver sa place en deuxième partie. Je signale à cet égard que le Gouvernement propose, dans le cadre du PLFSS, d’assujettir aux prélèvements sociaux les plus-values mobilières dès le premier euro, et il a corrigé en conséquence le bouclier fiscal. Il a pris acte de la nécessité d’intégrer la plus-value dans le revenu de référence, ce qui est conforme à la logique de votre amendement.

M. le président Didier Migaud. Je suis en désaccord total avec cet argument de la rétroactivité, puisqu’il s’agit en réalité de corriger une erreur : personne n’imaginait que le revenu de référence du bouclier fiscal ne serait pas le revenu réel, mais le revenu minoré des abattements.

M. le rapporteur général. Mon rapport d’information sur l’application de la loi fiscale de juillet dernier a retenu parmi trois thèmes celui du bouclier fiscal. J’y soulignais la nécessité de corriger les imperfections techniques du bouclier fiscal, mais non de façon rétroactive.

M. le président Didier Migaud. Mais cela fait deux ans que nous posons le problème !

M. le rapporteur général. Nous avons déjà corrigé le bouclier fiscal sur un point extrêmement important, l’imputation des déficits. Nous corrigeons les « vices de fabrication » au fur et à mesure.

M. Jérôme Cahuzac. Nous contestons le mode de calcul du seuil de déclenchement du bouclier fiscal depuis l’origine. Vous nous resservez toujours le même argument de la rétroactivité : mais si vous aviez accepté nos propositions les années précédentes, vous n’auriez pas à les rejeter aujourd’hui au nom de la rétroactivité.

Il est par ailleurs inacceptable que les cotisations de retraite par capitalisation viennent en déduction du revenu réel : c’est là un double avantage financé par la collectivité.

Quand on découvre ainsi un nouveau problème chaque année, on ne parle plus de vices de fabrication, mais d’un vice fondamental de conception.

M. le rapporteur général. Le débat sur les revenus pris en compte au titre du bouclier fiscal s’est ouvert il y a un an seulement. Nous engageons les modifications nécessaires depuis lors.

La Commission rejette l’amendement I-CF 14.

Elle examine ensuite l’amendement I-CF 159 de M. Jérôme Cahuzac.

M. Jérôme Cahuzac. C’est toujours la distinction entre revenu réel et revenu de référence.

Sur avis défavorable du rapporteur général, la Commission rejette cet amendement, puis l’amendement I-CF 162 du même auteur.

Elle examine ensuite l’amendement I-CF 160 de M. Jérôme Cahuzac.

M. Jérôme Cahuzac. C’est la même argumentation, cette fois pour les gains de cession des valeurs mobilières.

M. le rapporteur général. Cet amendement est satisfait par le PLFSS, ces gains étant désormais intégrés dans le bouclier fiscal dès le premier euro.

M. Jérôme Cahuzac. C’est deux poids deux mesures : ici, on taxe dès le premier euro, alors que s’agissant du financement du RSA, on invoque le bouclier fiscal.

La Commission rejette cet amendement.

Elle examine ensuite l’amendement I-CF 166 de M. Jérôme Cahuzac

M. Jérôme Cahuzac. C’est la même argumentation, appliquée cette fois aux impositions afférentes aux stock-options, qui sont intégrées dans les impositions servant au calcul du bouclier fiscal.

La Commission rejette cet amendement, après que le rapporteur général s’y est déclaré défavorable.

Elle rejette également les amendements I-CF 151 et I-CF 152 de M. Henri Emmanuelli, auxquels le rapporteur général s’est déclaré défavorable.

Puis elle est saisie de l’amendement I-CF 135 de M. Michel Bouvard.

M. Michel Bouvard. Cet amendement vise à favoriser la mise en société des entreprises individuelles. En effet la taxation des apports des entreprises individuelles freine leur croissance en pénalisant le renforcement de leurs fonds propres.

M. le rapporteur général. Défavorable, car cet amendement n’est ni équitable ni justifié. Il est inéquitable pour l’entrepreneur individuel qui ne change pas de régime juridique, dont la plus-value tirée de la cession de son entreprise sera taxée. Il n’est pas justifié parce qu’il existe un report pour éviter la taxation et que les exonérations doivent être réservées à des cas précis. Nous ne cessons d’ailleurs depuis quelques années de voter des dispositifs d’exonération des plus-values professionnelles. Ainsi le dispositif dit « Dutreil » les exonère en deçà d’un seuil de chiffre d’affaires (250 000 euros). Ce dispositif a été complété en 2004 par l’exonération des plus-values si la valeur de l’entreprise ne dépasse pas 300 000 euros. Depuis 2006 enfin, à mon initiative, ces plus-values sont exonérées en cas de départ à la retraite, sans limite de chiffre d’affaires ou de valeur de l’entreprise, à condition qu’il s’agisse d’une PME. D’ailleurs, dans le cas visé par l’amendement, cette dernière exonération s’appliquera aussi aux plus-values professionnelles en report.

M. Nicolas Forissier. Michel Bouvard a raison de poser ce problème concret. J’entends bien les explications du rapporteur général, mais ces dispositifs sont trop complexes pour le contribuable. Plus généralement, une simplification de notre système fiscal s’impose.

M. Michel Bouvard. Mon but n’étant pas de favoriser l’optimisation fiscale, je retire cet amendement, en soulignant tout de même l’existence de problèmes d’application des dispositifs existants.

L’amendement I-CF 135 est retiré.

La Commission examine l’amendement I-CF 158 de M. Jérôme Cahuzac.

M. Jean Launay. Cet amendement vise à corriger les effets du bouclier fiscal sur l’impôt de solidarité sur la fortune, en proposant un plafonnement. L’application du bouclier fiscal ne doit pas réduire l’imposition d’ISF due par le contribuable en dessous d’une cotisation minimale.

M. Daniel Garrigue. Un des effets pervers du bouclier fiscal est d’annuler l’effet des dispositifs d’incitation à l’investissement.

La Commission rejette cet amendement.

Elle examine ensuite l’amendement I-CF 87 de M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. Il y a deux solutions : soit on réforme le bouclier fiscal, soit on crée une nouvelle tranche d’IR à 45 % au-delà de 100 000 euros et on supprime l’impôt sur la fortune, comme partout en Europe, même dans les pays dirigés par des socialistes, excepté en Suisse – mais c’est un faux impôt – et dans un ou deux pays scandinaves. Je reconnais que c’est une solution radicale.

M. le rapporteur général. On ne peut pas prendre une mesure aussi radicale sans mener au préalable une étude d’impact approfondie ! En outre, une telle mesure contient des effets de transfert, à analyser puisqu’elle reviendrait à taxer plus fortement les salaires et les petits patrimoines.

La Commission rejette cet amendement.

Elle est ensuite saisie de l’amendement I-CF 185 de M. Jérôme Cahuzac.

M. Jean Launay. Cet amendement vise à supprimer la possibilité d’échapper à l’ISF par un pacte d’actionnaires représentant 20 % seulement des droits d’une société, dont est membre une personne exerçant dans la société sa fonction principale

M. le rapporteur général. Je ne peux qu’être défavorable à une proposition aussi anti-économique. Vous proposez de supprimer un dispositif inspiré de l’amendement dit « Migaud-Gattaz », visant à protéger les entreprises familiales de la délocalisation, que j’ai étendu en 2003 à l’ISF. Je vous rappelle que ces entreprises sont, de l’avis de tous, celles qui se comportent le mieux en période de crise. Elles sont notre patrimoine.

La Commission rejette cet amendement.

La Commission examine ensuite l’amendement I-CF 175 de M. Jérôme Cahuzac.

M. Jean Launay. La suppression de l’article 885 I quater du code général des impôts permettrait d’éviter que des salariés et surtout des mandataires sociaux bénéficient d’abattements sur les stock-options.

Après avis défavorable du rapporteur général, la Commission rejette l’amendement.

*

* *

Articles additionnels après l’article 11

Modifications de la réduction de l’impôt de solidarité sur la fortune des investissements dans les PME

La Commission examine ensuite l’amendement I-CF 148 de M. Michel Bouvard.

M. Michel Bouvard. À la suite d’une modification législative, des souscripteurs de holdings ne pourront plus bénéficier de l’avantage ISF pour les levées de fonds intervenant après le 15 juin 2009. L’amendement tend donc à préciser que cette disposition ne s’applique pas lorsque la souscription était antérieure à cette date.

M. Nicolas Forissier. Une telle mesure a minima est nécessaire s’agissant des holdings ISF qui ne peuvent plus compter plus de cinquante souscripteurs depuis le 16 juin dernier. Comme je le proposerai par la suite, il conviendrait – ainsi que cela avait été décidé par l’Assemblée avec le soutien du Gouvernement avant d’être finalement rejeté en commission mixte paritaire – de permettre aux sociétés holdings de lever des fonds au-delà de ce plafond de cinquante souscripteurs au profit de petites entreprises en amorçage.

M. le rapporteur général. Si M. Michel Bouvard a raison sur le fond, une tolérance administrative est prévue que le ministre pourra expliquer en séance. Une précision législative peut aussi être apportée mais la rédaction doit alors être revue.

L’amendement est retiré.

La Commission est ensuite saisie de l’amendement I-CF 251.

M. Nicolas Forissier. Afin de favoriser l’investissement dans les PME, cet amendement technique tend à permettre aux fonds d’investissement de proximité (FIP), aux fonds communs de placement dans l’innovation (FCPI) et aux fonds communs de placement à risques (FCPR), éligibles à la réduction d’impôt sur la fortune, d’investir en quasi fonds propres et non pas simplement en fonds propres. Ainsi, non seulement tous les FIP, FCP et FCPR seraient mis sur le même plan, mais nous renforcerions – dans la logique initiée par le Président de la République et suivie par des organismes tels qu’OSEO – l’apport en quasi fonds propres sous forme soit d’obligations convertibles en actions soit d’obligations remboursables en actions, lesquelles sont très encadrées. En outre, les entreprises familiales pourraient ainsi surmonter leurs difficultés à ouvrir leur capital. N’est-il pas d’ailleurs proposé au plus haut niveau de l’État de prévoir 1 milliard d’euros supplémentaire de quasi fonds propres, notamment sous forme de prêts participatifs ?

M. le rapporteur général. Cet amendement, d’apparence technique, pose en fait un problème de principe. En l’occurrence, la possibilité de réduction d’ISF n’a été ouverte aux particuliers qu’au titre des interventions en capital et non des prêts, fussent-ils considérés comme des quasi fonds propres. Je précise d’ailleurs que la niche fiscale correspondante est passée de 0 à près de 700 millions d’euros en deux ans.

J’ai déjà refusé aux entrepreneurs individuels l’ouverture de la réduction d’ISF en matière de prêts, au motif que la notion de fonds propres ne pouvait s’appliquer à ces derniers. En outre qu’un amendement suivant portera non plus sur les souscriptions d’obligations non convertibles, mais sur les simples avances en fonds propres, j’exhorte mes collègues à ne pas franchir la ligne blanche qui a été tracée.

M. Nicolas Forissier. Je persiste, face à une doctrine fiscale jusqu’au-boutiste, à opposer le principe de réalité en matière d’investissement des entreprises. Je le répète, les entrepreneurs familiaux ont beaucoup de mal à ouvrir leur capital. Or, avec mon amendement, ne seraient prises en compte que les obligations convertibles en actions ou les obligations remboursables en actions, c'est-à-dire des quasi fonds propres – d’ailleurs appelés à devenir des fonds propres par le biais de la conversion. Sans application du principe de réalité, jamais nos PME ne pourront se développer.

M. le rapporteur général. Il ne s’agit pas en l’occurrence d’appliquer une doctrine fiscale, mais une mesure votée par le législateur, à savoir l’article 885-0 V bis du code général des impôts, lequel n’ouvre droit à la réduction d’ISF qu’aux seules souscriptions au capital initial ou aux augmentations de capital de sociétés. On notera d’ailleurs que même l’achat d’actions sur le marché est exclu. Il n’est pas question de revenir sur l’intention du législateur.

M. Olivier Carré. Il existe d’autres formes de participations au capital qui n’impliquent pas forcément des droits de vote, mais qui répondent à l’objectif visé par Nicolas Forissier sans pour autant être liées à un taux d’intérêt ou à une rente – lesquels peuvent conduire aux déviances sous-entendues par le rapporteur général. Je pense à des titres du type actions sans droits de vote, actions de préférence, ou encore certificats d’investissement, tous titres qui ne sont pas assortis d’un rendement fixé. Ce dernier pourra être différent de celui des actions ordinaires, par exemple par le biais d’une compensation au droit de vote, mais il ne sera en aucun cas certain. Le ministre pourrait répondre sur ce point lors du débat en séance.

L’amendement est retiré.

La Commission examine ensuite l’amendement I-CF 258, deuxième rectification, de M. Nicolas Forissier.

M. Nicolas Forissier. Un encadrement du dispositif de réduction d’ISF a été introduit l’an passé. Il s’agissait au départ d’éviter que les holdings éligibles à la réduction d’ISF dans le cadre de la loi TEPA soient utilisées à autre chose qu’au soutien des entreprises par un apport de fonds propres. J’avais moi-même proposé, l’an dernier, de flécher l’investissement via holding vers les petites entreprises en amorçage. Il n’est donc pas question ici de holdings dont le seul objet est de créer des « parkings à ISF » à forte rentabilité. Pour autant, si cet amendement avait été adopté l’an dernier par l’Assemblée nationale, le Sénat lui a préféré trois conditions d’éligibilité. Or, autant je suis d’accord pour n’accorder ni garantie en capital ni garantie de sortie automatique, et éventuellement pour accepter qu’elles soient dirigées exclusivement par des personnes physiques, autant j’estime que la troisième condition est catastrophique, car elle tend à empêcher tout développement des business angels ou des petites entreprises en démarrage – je veux parler de la limitation à cinquante du nombre des souscripteurs. Or, les fonds d’investissement n’interviennent pas pour des tickets de 300 000 à 500 000 euros.

Je propose donc à nouveau de permettre aux sociétés holdings de lever des fonds auprès de plus de cinquante souscripteurs, sous réserve d’investir dans les PME qui sont la vraie cible, c'est-à-dire qui correspondent à la définition européenne de la « petite entreprise communautaire » employant moins de cinquante salariés et réalisant un total de bilan inférieur à 10 millions d’euros.

M. le rapporteur général. C’est un débat que nous avons avec le Sénat depuis maintenant deux ans, en particulier avec l’homologue de M. Forissier sur ce sujet, le sénateur Philippe Adnot. La solution adoptée procède d’un équilibre entre leurs deux approches. Nous sommes cependant convenus de nous donner un an afin d’en étudier les conséquences. Aujourd'hui, nous manquons d’éléments pour juger.

Si la limitation en question a été introduite, c’est parce que les holdings bénéficient, au titre de la réduction d’ISF, du taux plein de 75 %, comme si le particulier investissait directement – les fonds intermédiés ne bénéficient, eux, que d’une réduction de 50 %, au prorata des investissements éligibles dans les entreprises cibles. Or, la mise en place de la mesure par la loi TEPA a aussitôt entraîné la création de holdings de plusieurs centaines de membres visant, par exemple, à ériger 150 éoliennes, chacun des 150 défiscalisateurs disposant ainsi d’une garantie de revenu et de reprise de son éolienne, cela sans aucun risque, tout en bénéficiant de la réduction d’ISF de 75 % !

Mais puisque le soutien à l’investissement dans les entreprises visées par l’amendement doit être maintenu, l’amendement peut être adopté pour être à nouveau examiné en CMP.

M. Nicolas Forissier. L’association nationale des holdings comprend aujourd'hui vingt-trois de ces dernières, et représente une capacité d’investissement de près de 100 millions d’euros dans des PME. Si nous n’adoptons pas cette mesure dérogatoire, toutes ces holdings disparaîtront faute de pouvoir réunir des tickets d’investissement suffisants avec cinquante souscripteurs. Ne pas encourager de telles structures, sachant qu’elles seraient parfaitement encadrées, ne reviendrait-il pas plutôt à défendre d’autres véhicules d’investissement, tels que les FIP ?

M. le rapporteur général. Tout serait peut-être plus simple si certains montages n’avaient pas attiré l’attention.

M. Nicolas Forissier. De tels montages ne seraient plus possibles puisque l’on encadre justement ces holdings en n’accordant pas de garantie de sortie ou encore en ne visant que les petites entreprises communautaires.

L’amendement est adopté (amendement n° I – 66).

La Commission est ensuite saisie de l’amendement I-CF 260 de M. Nicolas Forissier.

M. Nicolas Forissier. Dans l’hypothèse d’une sortie rendue obligatoire par un pacte d’actionnaires, l’avantage fiscal n’est maintenu qu’en cas de réinvestissement dans un délai de six mois de la totalité du prix de cession des titres. Un tel délai étant insuffisant pour déterminer intelligemment un investissement, il est proposé de le porter à douze mois.

M. le rapporteur général. Sagesse. Faisons toutefois en sorte de ne pas créer, avec des délais d’investissement trop longs, des systèmes qui serviraient à thésauriser de l’avantage fiscal sans que l’argent capitalisé serve aux entreprises.

M. Nicolas Forissier. C’est bien pourquoi l’amendement traite du réinvestissement.

L’amendement est adopté (amendement n° I – 67).

La Commission est ensuite saisie de l’amendement I-CF 259 de M. Nicolas Forissier.

M. Nicolas Forissier. Une réduction d’ISF a été instaurée pour les dons – à hauteur de 75 % de leur montant, dans la limite de 50 000 euros – consentis aux organismes qui participent soit à l’effort de recherche soit à l’insertion des personnes dans le monde de l’entreprise. Il serait légitime d’étendre cette disposition aux réseaux associatifs de financement de la création d’entreprise.

Après avis favorable du rapporteur général, la Commission adopte l’amendement (amendement n° I – 68).

Elle examine ensuite l’amendement I-CF 254 de M. Nicolas Forissier.

M. Nicolas Forissier. Cet amendement résulte d’une discussion récente avec Jacques Attali sur le thème des holdings solidaires qui investissent soit dans des quartiers difficiles soit dans des zones rurales sensibles. Or, la loi TEPA ne permet pas aux personnes physiques investissant dans les sociétés de capital-risque solidaire de bénéficier d’une exonération d’ISF car l’intervention de la holding se fait principalement sous forme, non pas de participations, mais de comptes courants d’actionnaires associés. L’avantage fiscal doit également s’appliquer dans ce cas particulier.

M. le rapporteur général. Avis défavorable pour les raisons précédemment données.

L’amendement est retiré.

Après avis défavorable du rapporteur général, la Commission rejette ensuite successivement les amendements I-CF 215 et I-CF 177 de M. Jérôme Cahuzac.

Article 12

Exonération de droits de mutation par décès des successions des militaires décédés en opération extérieure

Le présent article insère une nouvelle exonération de droits de mutation à titre gratuit à l’article 796 du code général des impôts en faveur des successions des militaires décédés pendant une opération extérieure (OPEX) ou des suites de leur participation à une telle opération dans les trois années suivantes.

Dans sa rédaction actuelle, l’article 796 du code général des impôts exonère notamment de droit de mutation à titre gratuit les successions :

– des militaires des armées françaises et alliées morts sous les drapeaux pendant la durée de la guerre,

– des militaires morts de blessures reçues ou de maladies contractées pendant la guerre, soit sous les drapeaux, soit dans les trois années à compter de la cessation des hostilités,

– de toute personne ayant la nationalité française ou celle d’un pays allié dont le décès a été provoqué par faits de guerre, soit au cours des hostilités, soit dans les trois années à compter de la cessation des hostilités,

– des personnes décédées en captivité ou des conséquences immédiates et directes de leur captivité dans les trois ans,

– des personnes décédées au cours de leur déportation ou des conséquences immédiates et directes de leur déportation dans les trois ans.

L’article 796 du code général des impôts précise que l’exonération ne profite qu’à la part nette recueillie par les ascendants, les descendants, les frères et sœurs ou leurs descendants. En outre, l’exonération n’entraîne pas la dispense de la déclaration de succession qui doit être accompagnée, selon le cas, d’un certificat de l’autorité militaire ou civile compétente.

L’exonération dont bénéficient les successions de militaires décédés au cours ou des suites de leur participation à des opérations armées ne couvre pas, dans les termes actuels, l’ensemble des missions des armées et à cet égard n’est plus adaptée aux modalités d’engagement des forces françaises à l’étranger. La doctrine administrative et quelques décisions ministérielles ont permis l’application de l’exonération dans certaines circonstances particulières :

– militaires des armées françaises employés au maintien de l’ordre hors de métropole (exonération appliquée aux militaires décédés au Tchad, au Liban, en ex-Yougoslavie, et ceux tués lors de l’accident aérien survenu dans le Sinaï le 5 mai 2007) ;

– personnes civiles de nationalité française décédées dans le cadre de missions humanitaires effectuées en ex-Yougoslavie sous l’égide du Haut Commissariat aux réfugiés ;

– militaires décédés à Kigali lors des événements insurrectionnels le 8 avril 1994 et lors des événements de Bouaké le 6 novembre 2004.

Ces extensions au cas par cas ne sont pas satisfaisantes. Il convient de permettre une application générale de l’exonération aux décès liés à des opérations relevant des dispositions propres aux opérations extérieures, dans les mêmes conditions que les engagements relevant du régime spécifique de la guerre.

À cet effet, le A du I du présent article insère un 2° bis dans le I de l’article 796 du code général des impôts visant les militaires décédés des blessures ou des maladies contractées lors d’une opération extérieure ou dans les trois années suivant la fin de celles-ci. Cette rédaction permet de couvrir l’ensemble des missions effectuées dans le cadre d’une opération extérieure, qu’il s’agisse d’une opération militaire ou non.

Comme dans les autres cas de figure, outre le délai de trois ans, l’octroi de l’exonération est subordonné à la fourniture, avec la déclaration de succession, d’un certificat de l’autorité militaire (B du I du présent article). Ce certificat devra constater que la mort a été causée par une blessure reçue ou une maladie contractée pendant l’opération extérieure.

Le II du présent article prévoit une entrée en vigueur rétroactive aux successions ouvertes à compter du 1er janvier 2008. Cela signifie que les successions des militaires décédés en Afghanistan en 2008 seront couvertes. Aucune décision ministérielle ou instruction fiscale n’a en effet été publiée pour leur permettre de bénéficier de l’exonération. Par ailleurs, 10 militaires sont décédés en  OPEX en 2009, dans le cadre des opérations au Tchad, au Liban, au Kosovo et en Afghanistan.

Les déclarations de succession n’ont pas nécessairement été déposées. En effet, lorsque le décès intervient à l'étranger, les familles ont un an pour faire enregistrer la déclaration, en application des dispositions de l'article 641 du code général des impôts. Toutefois, dans l'hypothèse où les familles auraient déjà déposé leur déclaration, ce qui sera au moins le cas pour les militaires décédés en 2008, elles devront faire une demande de restitution auprès du service compétent, dans le cadre d'une procédure contentieuse.

*

* *

Après avis défavorable du rapporteur général, la Commission rejette l’amendement I-CF 95 de M. Jean-Pierre Brard.

Elle adopte ensuite l’article 12 sans modification.

*

* *

Après l’article 12 :

La Commission est d’abord saisie de l’amendement I-CF 26 rectifié de M. Didier Migaud.

M. le président Didier Migaud. Il est proposé de créer une taxe additionnelle de 7 % à la taxe sur les salaires, assise sur la seule fraction des rémunérations supérieure à trois fois le seuil de déclenchement de la dernière tranche du barème de l’impôt sur le revenu, soit 209 349 euros, de manière à imposer davantage les plus hautes rémunérations.

M. Charles de Courson. C’est pourtant l’entreprise qui paye la taxe sur les salaires. Est-ce une bonne idée d’augmenter ainsi le coût du travail des salaires élevés ?

M. le président Didier Migaud. Il s’agit de dissuader certaines hautes rémunérations en faisant en sorte qu’elles soient taxées de manière différenciée.

M. le rapporteur général. Avis défavorable. L’enfer est pavé de bonnes intentions : les effets pervers d’une telle mesure risquent d’être redoutables en accélérant en particulier les délocalisations. Il s’agit en fait d’un amendement anti-place de Paris, même si je reconnais que certaines rémunérations sont trop élevées. Le problème est en passe d’être réglé avec l’accord du G20 sur les rémunérations des traders, les deux tiers n’étant versés qu’après appréciation des résultats sur trois ans.

La Commission rejette l’amendement.

Après avis défavorable du rapporteur général, elle rejette ensuite l’amendement I-CF 96 de M. Jean-Pierre Brard.

Elle examine ensuite l’amendement I-CF 184 de M. Jérôme Cahuzac.

M. Jean Launay. Il est proposé d’instituer une taxe sur les transactions financières de type taxe « Tobin » d’un taux de 0,005 %.

Après avis défavorable du rapporteur général, la Commission rejette l’amendement.

Elle est ensuite saisie de l’amendement I-CF 1 de M. Patrice Martin-Lalande.

M. Patrice Martin-Lalande. Le financement des chaînes privées est une nécessité, de même que celui du service public. Or, le scénario économique qui se réalise est l’inverse de celui qui avait servi de base à l’instauration de la taxe créée sur le chiffre d’affaires publicitaire des chaînes privées, c'est-à-dire pallier « l’effet report » – évalué à 350 millions d’euros – vers ces dernières des investissements publicitaires progressivement supprimés des écrans du groupe France Télévisions. Les recettes publicitaires des trois principales chaînes privées – TF1, M6 et Canal+ – seront notoirement inférieures non seulement aux prévisions, mais également à leurs recettes de 2008, soit 1,950 milliard au lieu de 2,750 milliards. Je propose donc de reporter exceptionnellement au 1er janvier 2011 l’application de ladite taxe afin de ne pénaliser ni le financement normal et nécessaire des chaînes privées, ni celui de la création.

M. le rapporteur général. Avis défavorable. Pour financer la suppression de la publicité sur les chaînes publiques, il a bien fallu trouver des ressources de remplacement. Le report sur les chaînes privées d’une partie du marché publicitaire étant dans ces conditions apparu comme probable, la commission Copé a préconisé une taxation sur le seul supplément de ressources publicitaires, afin de pallier tout effondrement du marché. Or, la taxe a été appliquée sur l’ensemble de la recette publicitaire – avec un abattement à la base, il est vrai. Aujourd'hui que cette recette est en baisse, non seulement aucun supplément n’est donc constaté, mais la suppression de la publicité sur les chaînes publiques se traduira, avec cet amendement, par une dépense budgétaire supplémentaire. Si la taxe est suspendue, c'est le budget de l’État qui devra prendre le relais.

M. Patrice Martin-Lalande. L’esprit de la loi était bien de taxer le supplément de recettes publicitaires. Or, nous sommes dans un scénario inverse, qui met en péril le financement des télévisions privées généralistes.

La Commission rejette l’amendement I-CF 1.

II.– Ressources affectÉes

A.– Dispositions relatives aux collectivités territoriales

La loi de finances pour 2009 a mis en œuvre le premier exercice de la loi de programmation des finances publiques 2009-2011 (60), en ce qui concerne l’évolution des concours de l’État aux collectivités locales. Elle a instauré une norme d’évolution pour l’ensemble d’un périmètre de concours financiers, dont sont seuls exclus les remboursements et dégrèvements d’impôts locaux et la fiscalité transférée en compensation des transferts de compétences. Cette norme est identique à celle appliquée aux dépenses de l’État dans leur ensemble, à savoir l’évolution prévisionnelle des prix, associée à la loi de finances. Cette mesure de rationalisation des concours est à la fois une impérieuse nécessité pour le redressement des comptes publics, et une garantie avantageuse pour les collectivités locales compte tenu de la situation des finances publiques.

Le périmètre ainsi défini inclut principalement les prélèvements sur recettes (46,6 milliards d'euros) mais également les crédits de la mission Relations avec les collectivités territoriales (2,5 milliards d'euros, dont 1,4 milliard d'euros au titre de la dotation générale de décentralisation) ainsi que la dotation générale de décentralisation « formation professionnelle » inscrite dans la mission Travail et emploi (1,7 milliard d'euros). Au total, ce périmètre représentait 56,3 milliards d’euros en loi de finances initiale pour 2009. L’effet de la norme produira une augmentation de 676,2 millions d'euros en 2010 établissant le montant du périmètre à 57 milliards, sensiblement moins forte que la dynamique propre de certaines composantes.

LE PÉRIMÈTRE NORMÉ DE CONCOURS FINANCIERS AUX COLLECTIVITÉS TERRITORIALES 

 

LFI 2009

PLF 2010 à périmètre constant

Évolution

Dotation globale de fonctionnement

40 847

41 092

0,6 %

Dotation spéciale instituteur

38

28

– 26%

Dotation élu local

65

65

0,6 %

Dotation départementale d'équipement des colléges

326

330

1,2 %

Dotation régionale d'équipement scolaire

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661

669

+ 1,2%

Dotation globale d'équipement scolaire

3

3

+ 1,2%

Prélèvement au titre des amendes forfaitaires de la police de la circulation et des radars automatiques

600

640

+ 6,7%

Reversement de TIPP à la Corse

44

41

– 6,9%

Fonds de solidarité en faveur des collectivités territoriales touchées par des catastrophes naturelles

10

20

+ 101,2 %

Fonds de mobilisation départementale pour l'insertion

500

500

+ 0,0%

Compensations d'exonérations :

 

 

 

– Compensation de la part salaire de la TP (FDPTP)

75

76

+ 0,5%

– Compensation des pertes de base de TP

164

184

+ 12,2%

– Réduction progressive de la fraction de recettes prise en compte dans les bases de Taxe professionnelle des bénéfices non commerciaux

300

293

– 2,3%

– Exonération de taxes sur le foncier non bâti hors Corse et hors part communale

216

211

– 2,3%

– Dotation de compensation de la taxe professionnelle (DCTP hors RCE)

595

561

– 5,7%

– Réduction pour création d'établissement (RCE)

43

42

– 2,3%

– Compensations d'exonérations ajustées

407

397

– 2,3%

– Autres compensations diverses (non modifiées)

1 502

1 511

+ 0,6%

Compensation-relais de la réforme de la taxe professionnelle

0

 

 

Total PSR Warning - Cannot convert linked graphic





46 394

46 662

0,6 %

Dotation globale d'équipement des communes

484

490

+ 1,2%

Dotation globale d'équipement des départements

224

227

+ 1,2%

Dotation générale de décentralisation (Mission RCT)

1 415

1 423

+ 0,6%

Dotation de développement urbain (DDU)

50

50

+ 0,0%

Fonds de soutien aux communes touchées par le redéploiement territorial des armées

5

10

+ 100,0%

Dotation globale de compensation

0,3

0

+ 0,6%

Dotation de régisseur police municipale

0,5

0,5

+ 0,0%

Subventions diverses

104

105

+ 1,0%

Dotation de développement rural

131

133

+ 1,2%

Total RCT

2 415

2 440

1,5 %

DGD Formation Professionnelle (Mission "Travail et Emploi")

1 686

1 696

+ 1,2%

Concours de l'Etat aux collectivités territoriales HORS FCTVA

50 501

50 790

0,6 %

Fonds de compensation de la TVA

5 855

6 228

+ 6,4%

Concours de l'État aux collectivités territoriales y compris FCTVA

56 350

57 026

1,2 %

La loi de finances pour 2009 a mis en place un vaste mécanisme d’ajustement interne au périmètre, pour garantir à la fois le respect de sa norme d’évolution mais également le financement des priorités que l’État fixe dans ses relations avec les collectivités territoriales. Ces priorités sont, d’une part, le soutien à l’investissement public local (qui constitue plus de 80 % de l’investissement public en France) et, d’autre part, la péréquation, qui constitue depuis 2003 un objectif de valeur constitutionnelle (61). Afin d’atteindre ces objectifs, le présent projet de loi de finances propose de favoriser la progression de certaines lignes du périmètre, de freiner ou geler la croissance d’autres lignes et enfin de diminuer les concours ayant vocation à assurer l’ajustement du montant total du périmètre.

Pour appréhender dans son ensemble ce mécanisme réparti sur plusieurs articles du projet de loi de finances pour 2010, le Rapporteur général propose la lecture suivante du périmètre. Celui-ci comprend schématiquement cinq blocs de concours aux collectivités locales :

DGF

 

Concours visant la péréquation

Concours satellites de la DGF

– Dotation spéciale pour le logement des instituteurs

– Dotation élu local

– Fonds de mobilisation départementale pour l'insertion

– DGD

Concours visant un soutien au fonctionnement de certaines collectivités locales

FCTVA

 

Concours à l’investissement public local

Concours d’équipement

– DDEC

– DRES

– DGCES

– DGE

– DDR

– Produit des amendes forfaitaires de la police de la circulation

–DDU

– Dotation Outre-mer

– Dotations et subventions diverses

Concours visant un soutien à l’investissement de certaines collectivités locales

Compensations d’exonérations fiscales

– Compensation de la réduction de la fraction des recettes imposable à la TP des BNC

– Compensations d'exonérations de TFPNB agricoles

– Dotation de compensation de la taxe professionnelle

– Autres compensations d'exonérations relatives à la fiscalité locale

– Dotation de compensation des pertes de bases de la taxe professionnelle et de redevance des mines des communes et de leurs groupements

– Prélèvement sur les recettes de l'État au profit de la collectivité territoriale de Corse et des départements de Corse

– Compensation de la suppression de la part salaire de la taxe professionnelle versée aux FDPTP

Concours permettant la compensation des pertes de recettes fiscales

Ce schéma simplifié permet de comprendre l’ajustement que propose le projet de loi pour défendre des priorités tout en respectant la norme d’évolution. Ainsi, l’objectif de soutien à l’investissement public local est poursuivi par le maintien des conditions d’évolution autonomes très dynamiques du FCTVA et une indexation positive des dotations d’investissement. Le projet propose également de protéger la DGF, seul concours péréquateur du périmètre, en ne lui faisant pas jouer le rôle de variable d’ajustement. À périmètre constant, le tableau suivant illustre le rôle de chaque « bloc » dans l’équilibre de l’ensemble :

(en millions d'euros ; périmètre LFI 2009)

Éléments inclus dans le périmètre

LFI 2009

Progression à 1,2 %

Progression proposée

Écart par rapport à la norme

Évolution de LFI à LFI

DGF

40 846

41 336

41 091

– 245

+ 0,6 %

Concours satellites de la DGF

3 703

3747

3 712

– 35

+ 0,24 (1) %

FCTVA

5 855

5 862

6 228

+ 366

+ 6,4 %

Concours d’équipement

2 597

2628

2 677

+ 49

+ 3,1 % (2)

Compensations d’exonérations fiscales

3 345

3 385

3 316

– 69

– 0,9 %

TOTAL

56 350

57 026

57 026

0

+ 1,2 %

(1) La plus faible progression s’explique par la stabilité du montant du FMDI et, surtout, la baisse de la dotation spéciale instituteur de 10 millions d’euros, soit -26 %.

(2) L’écart constaté avec la norme résulte de la stabilité de la DDU à 50 millions d’euros et, à l’inverse, de la progression du produit des amendes forfaitaires de police (+40 millions d'euros).

Ce mécanisme d’ajustement repose donc sur les principes suivants :

1) La DGF progresserait comme la moitié de l’indexation de l’ensemble, soulageant d’autant la contrainte pesant sur les variables d’ajustement et les concours à l’investissement. Les dotations de fonctionnement seraient indexées comme la DGF (article 13 du présent projet de loi) ;

2) Le FCTVA progresserait en suivant sa dynamique propre qui génère une croissance en 2010 de 6,44 % au total (+ 373 millions d'euros). Cette progression occasionne un besoin de financement complémentaire de 366 millions d'euros à l’intérieur du périmètre ;

3) Les dotations d’investissement seraient indexées comme le périmètre, c'est-à-dire sur l’inflation prévisionnelle (article 14 du présent projet de loi). Leur évolution est donc neutre au sein du périmètre ;

4) Au sein de la mission RCT, le Fonds de soutien aux communes touchées par le redéploiement territorial des armées est doté de 5 millions supplémentaires ;

5) Pour combler le besoin de financement résultant de ces quatre augmentations, l’article 16 du présent projet de loi reconduit le mécanisme complexe de minoration de la plupart des compensations d’exonérations de fiscalité locale, que celles-ci soient retracées sur des prélèvements sur recettes spécifiques (comme la DCTP, par exemple) ou au sein du prélèvement sur recettes « balai ». Ces minorations sont calculées de façon à produire l’économie dont le périmètre a besoin pour respecter la norme fixée à 1,2 %. L’ensemble des compensations d’exonérations servant de variable d’ajustement diminuera ainsi de 3,61 % en 2010, afin de générer 56,3 millions d'euros de moindres dépenses pour l’État.

Par ailleurs, l’article 15 du présent projet de loi reconduit le montant inscrit en loi de finances pour 2008 au titre du FMDI, ce qui – par rapport à une indexation à 1,2 % – contribue à hauteur de 6 millions d'euros au respect de la norme appliquée au périmètre global.

*

* *

Article 13

Évolution de la dotation globale de fonctionnement (DGF)

Le présent article définit les modalités d’indexation de la DGF pour 2010. Il prévoit une évolution de +0,6 % par rapport à 2009.

I.– LA DOTATION GLOBALE DE FONCTIONNEMENT SOUS CONTRAINTES

La DGF est un concours global, c'est-à-dire qu’il contient lui-même de multiples dotations aux règles et objectifs très hétérogènes. L’équilibre entre ces dotations au sein du concours global permet de favoriser un objectif, en améliorant la progression annuelle des dotations qui le poursuivent plutôt que celle des autres dotations. Ce concours global est conçu pour favoriser la péréquation, objectif constitutionnel consacré par la loi constitutionnelle du 28 mars 2003 (art. 72-2 de la Constitution). La réforme de l’architecture de la DGF en 2004 a ainsi permis d’augmenter les masses financières consacrées à la péréquation et de répartir ces masses de façon plus pertinente.

La dotation globale de fonctionnement de chaque catégorie de collectivités est désormais structurée en deux ensembles : une fraction forfaitaire garantissant la progression minimale du niveau de ressources de chaque collectivité et une fraction de péréquation permettant une correction plus rapide des inégalités les plus importantes. Cette architecture est doublée d’une règle de progression différenciée entre les deux ensembles, la dotation forfaitaire croissant moins vite que la DGF, et par conséquent la fraction consacrée à la péréquation augmentant plus rapidement. Depuis 2004, cette règle a permis de dégager des montants croissants chaque année pour la péréquation, dont le total s’établissait à 4 506 millions d’euros en 2004 contre 3 007 millions d’euros en 2003. La mise en œuvre de cette règle incombe au Comité des finances locales, dans ses choix de répartition de la dotation globale de fonctionnement.

En 2006, pour la première fois, le Comité des finances locales a exercé pleinement son arbitrage sur l’indexation des composantes de la DGF. Celle-ci a augmenté globalement de 2,73 %, et les dotations de péréquation de façon beaucoup plus rapide : DSU/DSR : +15,8 % ; DNP : +3,49 % ; DPU : +8,79 % ; DFM : +12,61 % et dotation de péréquation des régions : +19,5 %.

Pourtant cette accélération des moyens en faveur de la péréquation a produit en quatre ans un résultat certes sensible, mais finalement relativement modeste. En effet, la répartition de la DGF est un exercice consistant à pondérer la croissance des dotations forfaitaires au sein de la croissance globale des masses, afin de dégager un solde de progression plus rapide pour les concours visant la péréquation. Ces dotations forfaitaires sont « objectivées », c'est-à-dire qu’elles sont elles-mêmes décomposées à l’échelle de chaque collectivité en fonction de données qui lui sont propres.

EXEMPLE DE LA COMPOSITION DE LA DOTATION FORFAITAIRE DES COMMUNES

Dotations incluses

Base de calcul

Dotation de base

Population de la commune

Dotation superficiaire

Superficie de la commune

Complément de garantie

Dotation forfaitaire perçue par la commune en 2004

Compensation « part salaires »

Perte de recettes de taxe professionnelle de la commune, en base 2003

Cette décomposition et le mode d’indexation – calculé sur une fraction de la croissance de la DGF globale – conduisent donc à sanctuariser prioritairement les montants inclus dans les dotations forfaitaires, dont la logique n’est pas d’obéir à un objectif volontariste mais de reconduire un financement antérieur.

Conséquence de ce mécanisme de répartition, l’effort en faveur de la péréquation dépend intimement de l’indexation globale de la DGF. En effet, dès lors que le CFL ne dispose pas de la faculté de réduire les dotations forfaitaires, mais uniquement de pondérer leur croissance, celle des dotations de péréquation résulte de l’accroissement de la DGF davantage que de sa masse totale. Le Rapporteur général souligne que c’est là le risque inévitable des logiques de périmètres ou d’enveloppes normés, dont une partie du contenu est sanctuarisée : l’indexation de l’enveloppe la plus large impacte tous les éléments variables jusqu’au niveau le plus fin.

Le mécanisme dépend donc fortement de la marge de croissance globale de la DGF, qui a bénéficié historiquement de conditions de calcul avantageuses (62). La DGF a ainsi rarement progressé de moins de 2 % depuis sa création. La mise en œuvre de la norme d’évolution des concours financiers aux collectivités territoriales depuis 2009 freine la croissance des concours financiers et à ce titre est susceptible de peser in fine sur l’évolution des moyens en faveur de la péréquation. La réduction de l’indexation globale des concours financiers, au sein desquels le FCTVA conserve son dynamisme très important, impose d’ajuster la croissance des autres dotations, en particulier de la DGF qui représente plus de 70 % du total.

En 2010, la DGF commence effectivement à devenir une variable d’ajustement dans le périmètre des concours financiers de l’État aux collectivités locales. La norme de 1,2 % appliquée au périmètre (56,3 milliards d'euros) permet une progression de 676 millions d’euros. Au sein de ce périmètre, le FCTVA progresse à lui seul de 373 millions d'euros (+12,8 %) ne permettant que 303 millions d'euros de progression pour les autres concours.

Le mécanisme d’indexation de la DGF est prévu au I de l’article L. 1613-1 du code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction issue de l’article 42 de la loi de finances pour 2009 : « la dotation globale de fonctionnement est calculée par application à la dotation globale de fonctionnement inscrite dans la loi de finances de l'année précédente du taux prévisionnel, associé au projet de loi de finances de l'année de versement, d'évolution des prix à la consommation des ménages, hors tabac, pour la même année ».

Le présent article introduit une dérogation à cette règle par l’insertion d’un III à l’article L. 1613-1 précité, prévoyant que la DGF pour 2010 est égale au montant de la DGF inscrit dans la loi de finances pour 2009 majoré de 0,60 %. Ce taux correspond à la moitié de l’inflation prévisionnelle. En lieu et place d’un accroissement de 490 millions d’euros, il en résulte un accroissement de 245 millions d’euros.

Cette mesure constitue donc une baisse du niveau d’indexation prévu l’an passé (égale à l’inflation), lui-même déjà en rupture par rapport aux règles d’indexation historiques de la DGF. En outre, compte tenu des contraintes internes de la DGF, cette indexation limitée remet en cause les règles habituelles de répartition. L’article 55 du présent projet de loi (63) propose, par conséquent, de réformer les règles de répartition de la part forfaitaire de la DGF afin de préserver l’objectif de péréquation malgré une indexation globale diminuée.

II.– UNE PROGRESSION DÉJÀ PRÉEMPTÉE

Il s’avère qu’une grande partie de l’accroissement de la DGF est préemptée par les contraintes internes de répartition. Ce ne sont donc pas 245 millions d’euros à libre disposition que l’indexation à 0,60 % de la DGF produit.

En 2010, la deuxième tranche d’intégration des données démographiques (résidences secondaires) issues de la procédure de recensement rénové imposera, comme l’an passé, non seulement de reconduire les montants importants des dotations forfaitaires des collectivités locales, mais également de tenir compte du fait que la principale d’entre elles est une dotation par habitant. Par conséquent, le recensement rénové – par la prise en compte d’un nombre croissant d’habitants – alourdira mécaniquement le montant de la dotation forfaitaire.

Le surcoût lié à la prise en considération des nouvelles données démographiques est estimé à 101,9 millions d'euros : 43,5 millions pour les départements et 58,4 millions d’euros pour le secteur communal (41,4 millions pour les communes et 17 millions pour les EPCI). Cette estimation est calculée à droit et périmètres intercommunaux constants.

Or, il convient de prendre en compte la progression de l’intercommunalité, qui se traduira par une évolution de la DGF des communes et groupements estimée à 113 millions d'euros.

Le coût de ces deux facteurs combinés laisse un solde d’augmentation de la DGF de 30,1 millions d’euros, mais il convient d’apprécier l’effet des contraintes au sein de chaque échelon. L’enveloppe de 245 millions d’euros est en effet ainsi répartie :

– 140 millions d’euros pour les communes et leurs groupements,

– 73 millions d’euros pour les départements,

– 32 millions d’euros pour les régions.

Au niveau départemental, le recensement a pour effet de réduire le montant disponible à 29,5 millions d’euros.

Au niveau communal, le solde s’avère négatif : 140 – (113 + 58) = –31 millions d’euros. Le présent projet de loi prévoit donc à son article 55 un écrêtement parallèle du complément de garantie des communes, fixé à 3,5 %. Cet écrêtement permet une économie de 183 millions d’euros. Ce sont donc, après intégration de l’effet du recensement, 152 millions d’euros de progression dont bénéficieront les communes).

Les 245 millions de progression permettent au final de ne maintenir une liberté de répartition qu’en écrêtant fortement, à un niveau quasiment identique à celui de la minoration des compensations d’exonérations fiscales prévue à l’article 16 du présent projet de loi (3,5 %). Toutefois, sur les 152 millions d’euros, l’affectation prioritaire aux dotations de péréquation ne pourra se faire qu’au prix d’une contraction de la dotation forfaitaire. Pour mémoire, sur 23,3 milliards d’euros de DGF des communes :

– la fraction forfaitaire représente 14 milliards d’euros ;

– la dotation d’aménagement représente 9,2 milliards d’euros, dont :

– 2,6 milliards de péréquation,

– 6,6 milliards pour la DGF des EPCI, se répartissant entre 4,2 milliards d’euros pour la dotation de compensation et 2,4 milliards d’euros pour la dotation d’intercommunalité.

Bien que la DSU ne bénéfice plus de l’augmentation mécanique prévue par la loi de programmation pour la cohésion sociale (64), il est difficilement envisageable qu’elle ne se voit pas affecter 40 millions d’euros, après 150 millions en 2008 et 70 millions en 2009. Le maintien d’une parité de progression entre la dotation de solidarité urbaine et la dotation de solidarité rurale (+3,44 %) représenterait aussi 26 millions d’euros. Celle d’une progression de la dotation nationale de péréquation à hauteur du taux d’inflation prévisionnelle, conformément à la position constante du CFL, utiliserait quant à elle 10 millions d’euros. Le respect de ces trois hypothèses consommerait donc déjà la moitié des 152 millions.

En d’autres termes, malgré l’écrêtement du complément de garantie prévu à l’article 55 du présent projet de loi, qui est appelé en financement du maintien d’une répartition péréquatrice, la progression à 0,6 % de la DGF est difficilement soutenable au regard des dépenses incompressibles de la dotation.

Plus largement, l’équilibre du périmètre des concours financiers aux collectivités territoriales doit dorénavant être regardé de façon pluriannuelle. Dans une telle perspective, il faut s’interroger sur la soutenabilité de ce périmètre dans lequel les différentiels de progression entre les dotations sont aussi importants.

Dans la mesure où il semble difficile d’envisager que l’objectif à valeur constitutionnelle de péréquation poursuivi par la DGF se voie affecté d’une croissance annuelle de plus en plus réduite, le Rapporteur général souligne à nouveau qu’un rééquilibrage sera vraisemblablement nécessaire, à court terme, entre les différents rythmes de progression des concours compris dans le périmètre. L’effort particulier actuellement consenti en faveur de l’investissement s’avère certes légitime mais, d’une part, il affecte d’ores et déjà la possibilité pour la DGF de progresser au même rythme que l’inflation, d’autre part et corrélativement, il est insoutenable à moyen terme.

*

* *

Suivant l’avis défavorable du rapporteur général, la Commission rejette l’amendement I-CF 109 de M. Jean-Pierre Brard.

Puis elle examine l’amendement I-CF 206 de M. Jean-Pierre Balligand.

M. Jean Launay. Le Gouvernement nous propose une majoration de 0,6 % de la dotation globale de fonctionnement (DGF), soit une évolution négative en valeur réelle, si l’on tient compte de l’inflation, à laquelle il faut ajouter le fait que cette DGF intègre deux ans de remboursement de FCTVA.

M. le président Didier Migaud. En outre, la population a augmenté.

M. Jean Launay. En effet. Pour l’ensemble de ces raisons, nous proposons de porter le taux de progression de la DGF à 1,2 %.

M. le rapporteur général. L’amendement que je proposerai un peu plus loin, plus équilibré, répond en partie à votre souhait. Avis défavorable à celui-ci car il ferait peser l’essentiel de l’effort sur les variables d’ajustement, telles que la DCTP, qui diminuerait de 20 %.

La Commission rejette l’amendement I-CF 206.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur général, elle rejette l’amendement I-CF 221 de M. Victorin Lurel.

Puis elle adopte l’article 13 sans modification.

*

* *

Article additionnel après l’article 13

Abondement des dotations de péréquation de la dotation générale de fonctionnement

La Commission est saisie d’un amendement I-CF 263 du rapporteur général.

M. le rapporteur général. Je vais présenter simultanément les amendements I-CF 263, I-CF 262 et I-CF 264.

L’indexation de 0,6 % de la DGF en 2010 n’est pas suffisante pour assurer la péréquation au bénéfice des communes les moins favorisées, dont la DGF est le principal instrument. Rappelons que c’est à partir de la DGF que sont versées la dotation de solidarité urbaine (DSU), la dotation de solidarité rurale (DSR) et la dotation nationale de péréquation (DNP).

Je vous propose donc de compléter le montant de la DGF, afin de réaliser cette péréquation. Mais nous sommes contraints de le faire à enveloppe constante. Il s’agirait donc, d’une part, de réduire dans des proportions raisonnables le montant des variables d’ajustement – de 8 % pour la DCTP et de 5 % pour les autres –, d’autre part de ne pas indexer les dotations satellites de la DGF, telles que les dotations générales de décentralisation (DGD), non plus que les dotations d’investissement. S’agissant de ces dernières, compte tenu de la progression inchangée du FCTVA et de la concentration de l’effort budgétaire de l’État sur l’investissement, cette non-indexation me paraît pouvoir être décidée à titre exceptionnel. On pourrait ainsi abonder la DGF, ce qui permettrait – en anticipant sur la répartition qui sera opérée en février par le Comité des finances locales – de disposer de près de 70 millions d’euros pour la DSU, comme l’an dernier, d’un peu moins de 50 millions pour la DSR, et de faire progresser la DNP au rythme de l’inflation.

De plus, alors que dans le projet gouvernemental, le complément de garantie – qui fait partie de la dotation forfaitaire de la DGF – diminue de 3,5 %, alors qu’elle a déjà été réduite de 2 % en 2009, ce dispositif permet de limiter la baisse en 2010 à 2 %.

Enfin, je précise que la difficulté à laquelle est confrontée la DGF en 2010 est d’abord lié aux effets du recensement. Après l’impact des résidences principales l’an dernier, il y a maintenant celui des résidences secondaires, qui se traduira pas un surcoût d’une centaine de millions. Par ailleurs, il faut également absorber les effets de l’extension de l’intercommunalité, avec la transformation de nombreux établissements publics de coopération intercommunale en EPCI à taxe professionnelle unique – ce qui représente un nouveau surcoût d’une centaine de millions. Il est donc indispensable d’abonder la DGF, et c’est l’objet du dispositif que je vous propose. Globalement, monsieur Launay, on devrait ainsi parvenir à une progression de près de 1 %.

La Commission adopte l’amendement I-CF 263 (amendement n° I – 69).

Article 14

Indexation des dotations d’investissement sur le taux prévisionnel d’inflation

Le présent article prévoit une indexation sur l’inflation prévisionnelle des dotations d’investissement, après la mesure de gel partiel de la loi de finances pour 2009. Cette indexation s’applique aux dotations pour lesquelles la règle d’évolution consiste en une indexation sur le taux de la formation brute de capital fixe (FBCF) des administrations publiques (APU).

Les concours de l’État aux dépenses d’équipement des collectivités locales sont répartis sur trois types de supports : des crédits budgétaires de la mission Relations avec les collectivités territoriales gérés de façon déconcentrée à l’échelle départementale, des prélèvements sur les recettes de l’État répartis sous forme d’enveloppe dite « fermée » en fonction de critères légaux (DRES et DDEC) et des prélèvements sur les recettes de l’État ayant un caractère évaluatif, le versement à chaque collectivité étant fonction de paramètres non budgétaires mais fixés par la loi. Les dotations entrant dans les deux premières catégories sont concernées par la présente mesure.

● Les subventions dont la gestion est déconcentrée : Il s’agit de la dotation globale d’équipement, elle-même décomposée en DGE des communes et DGE des départements dont les régimes diffèrent, et de la dotation de développement rural (DDR). Ces dotations évoluent chaque année comme la FBCF des administrations publiques.

● Les concours en faveur des équipements scolaires : Créées par les articles 16 et 17 de la loi du 22 juillet 1983 (65), la dotation départementale d’équipement des collèges (DDEC) et la dotation régionale d’équipement scolaire (DRES) ont vocation à compenser les dépenses d'équipement et d’investissement des établissements publics d’enseignement transférés à ces collectivités. La loi de finances pour 2008 n’a pas modifié la règle d’indexation des masses de la DRES et de la DDEC, qui demeure l’évolution de la FBCF des administrations publiques. En revanche, les deux dotations sont devenues des prélèvements sur les recettes de l’État. Par ailleurs, l’article 104 de la loi de finances rectificative pour 2007 a organisé le financement des collectivités de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy et fixé les modalités de calcul et d'attribution d’une dotation globale de construction et d'équipement scolaire (DGCES), prévue en faveur de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy au titre des collèges et lycées transférés par le département et la région de Guadeloupe. La DGCES est financée par prélèvement sur la dotation départementale d'équipement des collèges (DDEC) et la dotation régionale d'équipement scolaire (DRES) de la Guadeloupe.

● Les concours dépourvus de pilotage : Deux autres prélèvements sur recettes sont versés en section d’investissement sur les budgets des collectivités territoriales. Ils partagent la caractéristique d’être inscrits sous forme évaluative dans le budget de l’État, puisqu’il ne s’agit pas d’enveloppe dites « fermées ». In fine leur total réel n’est inscrit qu’en loi de règlement après constatation en exécution des effets de la loi. Il s’agit du FCTVA et du produit des amendes de police.

Le présent article déroge à la règle d’indexation sur le taux de la formation brute de capital fixe (FBCF) des administrations publiques (APU) pour l’ensemble des dotations qui y sont soumises, c'est-à-dire toutes sauf le FCTVA et le produit des amendes de police, et lui substitue une évolution à 1,2 % correspondant au taux prévisionnel d’inflation. Le taux de la FBCF des APU est de -2,2 %. Il était donc indispensable de déroger à la règle d’indexation sur ce taux. Le choix a été fait de leur appliquer le taux plus élevé, applicable à l’enveloppe globale des concours aux collectivités territoriales.

IMPACT DE L’INDEXATION SUR LE TAUX PRÉVISIONNEL D’INFLATION

(en millions d'euros)

 

LFI 2009

Par taux de la FBCF des APU (-2,2 %)

Montant proposé

Évolution par rapport à la règle

Dotation départementale d'équipement des collèges (DDEC)

326,3

319,1

330,2

+3,48 %

Dotation régionale d'équipement scolaire (DRES)

661,2

646,7

669,1

+3,48 %

Dotation globale de construction et d’équipement scolaire de Saint-Martin (DGCES)

2,6

2,54

2,7

+3,48 %

Dotation globale d'équipement des communes (DGEC-AE)

484,4

473,7

490,2

+3,48 %

Dotation globale d'équipement des départements (DGED-AE)

224,5

219,6

227,1

+3,48 %

Dotation de développement rural (DDR)

131,3

128,4

132,9

+3,48 %

TOTAL

1 830,3

1 790,0

1 852,2

+3,48 %

En conséquence, l’ensemble des concours destinés à soutenir l’investissement des collectivités locales reste en progression très dynamique.

(en millions d’euros)

 

LFI 2009

Effet de la norme (1,2 %)

Montant proposé

Écart par rapport à la norme

Progression de LFI à LFI

DDEC + DRES + DGCES + DGEC + DGED + DDR

1 830,3

1 852,2

1 852,2

0,00 %

+1,2 %

Fonds de compensation de la TVA

5 855,0

5 925,3

6 228,2

5,11 %

+6,37 %

Prélèvement au titre des amendes forfaitaires de la police de la circulation et des radars automatiques

600

607,2

640

5,40 %

+6,67 %

TOTAL

8 285,3

8 384,7

8 720,4

4,00 %

+5,25 %

Cette contribution au périmètre global doit être rapprochée de celles de la DGF et des autres dotations de fonctionnement qui évoluent en deçà de la norme globale (évolution de 0,60 % prévue par l’article 13 du présent article). Avant prise en compte des variables d’ajustement, le poids de chaque grand bloc de concours dans l’équilibre du périmètre est donc le suivant :

(en millions d'euros)

 

Évolution de LFI à LFI

Impact sur la norme d’évolution du périmètre (1)

Dotations de fonctionnement (hors DGF)

+ 0,6 %

– 245,1

DGF

+ 0,6 %

– 245,1

Dotations d’investissement

+ 5,25 %

+ 335,7

(1) : Un déficit facilite le respect de la norme par une dépense moins rapide, un excédent illustre une progression trop rapide qui remet en cause la norme.

Les dotations de fonctionnement progressent moins vite que la norme alors que les dotations d’investissement progressent beaucoup plus vite que la norme (+5,25 %), suscitant un fort besoin de financement (335,7 millions d'euros) au sein du périmètre pour que la norme globale soit respectée.

Ce déséquilibre illustre la hiérarchie des priorités affectées aux concours financiers : une progression soutenue du concours à l’investissement, une baisse en volume des montants affectés à la péréquation, un ajustement sur les compensations d’exonérations fiscales. Le Rapporteur général s’interroge sur l’opportunité d’un écart aussi grand, d’une part, entre l’effort supporté par les dotations de fonctionnement, notamment par l’introduction d’un écrêtement à l’article 55 du présent projet de loi, et le dynamisme des dotations d’investissement, et, d’autre part, entre la progression de ces dotations et la baisse qu’elle entraîne sur les compensations d’exonérations.

Pour les communes qui ne sont pas éligibles aux dotations de péréquation, les choix proposés conduiront à une baisse de la DGF.

Il ne serait pas illégitime que le « bloc » des concours à l’équipement des collectivités locales soulage davantage l’ajustement pesant sur les variables. L’application de la règle d’évolution aurait conduit à un taux de -2,2 %. Le fait de leur application une évolution de +1,2 % représente un effort substantiel, financé par un taux d’évolution de la DGF à 0,60 % et un écrêtement du complément de garantie des communes, qu’il faut en pratique comparer à la baisse de DGF qu’enregistreront la majorité des communes.

La reconduction du gel prévu en loi de finances pour 2009 maintiendrait un dynamisme global important, avec une progression de 4,99 %, à comparer à la progression de 0,6 % de la DGF et de ses satellites, comme l’illustre le tableau suivant :

 

LFI 2009

Montant proposé

Montant corrigé du gel

Progression de LFI à LFI corrigé

DDEC + DRES + DGCES + DGEC + DGED + DDR

1 830,3

1 852,2

1 830,3

0 %

Fonds de compensation de la TVA

5 855,0

6 228,2

6 228,2

+ 6,37 %

Prélèvement au titre des amendes forfaitaires de la police de la circulation et des radars automatiques

600

640

640

+ 6,67 %

TOTAL

8 285,3

8 720,4

8 698,5

+ 4,99 %

*

* *

La Commission adopte l’amendement I-CF 262 du rapporteur général (amendement n° I – 70).

Puis elle adopte l’article 14 ainsi modifié.

Article 15

Reconduction du fonds de mobilisation départementale pour l’insertion (FMDI)

Le présent article vise à reconduire en 2010 les crédits du Fonds de mobilisation départementale pour l’insertion (FMDI), créé par l’article 37 de la loi de finances pour 2006 (n° 2005–1719 du 30 décembre 2005) (I).

Compte tenu de la généralisation du revenu de solidarité active (RSA) depuis le 1er juin 2009, en application de l’article 12 de la loi n° 2008-1249 du 1er décembre 2008 généralisant le revenu de solidarité active et réformant les politiques d'insertion, le présent article vise également à adapter le mode et les critères de répartition du FMDI 2010 à la situation en vigueur en 2009, année de référence des données recensées dans le cadre de la répartition du FMDI 2010 (II).

Enfin, un mécanisme nouveau d’écrêtement est institué afin d’éviter que le FMDI constitue un « effet d’aubaine » pour les départements qui bénéficieraient, du fait de l’allocation FMDI, d’un taux de couverture de leur dépense supérieur à 100 % (III).

I.– LA VOLONTÉ RÉITÉRÉE DE L’ÉTAT D’ACCOMPAGNER LES DÉPARTEMENTS DANS LA GESTION DE LA POLITIQUE D’INSERTION

Le transfert de la gestion du revenu minimum d’insertion (RMI), prévu par la loi du 18 décembre 2003, s’est traduit par l’attribution par l’État aux départements du montant exact correspondant à ses propres dépenses de RMI au 31 décembre 2003, soit 4,941 milliards d’euros, conformément au principe de compensation intégrale prévu par l’article 72–2 de la Constitution. Les modalités techniques de cette compensation sont rappelées dans le commentaire sur l’article 19 du présent projet, relatif à la compensation aux départements des charges résultant de la mise en œuvre du revenu de solidarité active.

Mais au-delà de cette compensation, respectueuse des principes constitutionnels et législatifs en vigueur, le Gouvernement a souhaité prendre des mesures exceptionnelles, afin de tenir compte de l’effet de ciseau, induit par le fait que les dépenses transférées ont augmenté à un rythme plus élevé que les ressources de TIPP allouées aux départements en compensation du transfert.

Cet effort supplémentaire de l’État en faveur des départements s’explique par le décalage important entre les dépenses d’insertion exécutées et le droit à compensation tel que constaté sur le fondement des dépenses de l’État au 31 décembre 2003.

Cet effort de l’État a été constant et résulte de 3 dispositions législatives successives.

L’article 2 de la loi de finances rectificative pour 2005 (n° 2005-1720 du 30 décembre 2005) a ajusté les fractions de tarifs revenant aux départements pour traduire l’engagement du Gouvernement d’intégrer au droit à compensation les dépenses liées au transfert du revenu minimum d’activité (RMA) sur la base de celles exposées par l’État en 2004. Le coût supplémentaire lié au RMA pour un département résultait du fait que, le RMI étant une allocation différentielle, son montant était en moyenne un peu inférieur au plafond que constituait le montant fixe de l’aide versée aux employeurs lors de la signature d’un contrat RMA. Le RMA étant un outil mis à la disposition des départements et non une compétence obligatoire mise à leur charge, il n’existait cependant pas d’obligation constitutionnelle d’assurer la compensation du surcoût pouvant en résulter. Le dispositif de compensation résultant de la loi de finances rectificative pour 2005 était donc plus favorable que ne l’aurait été l’application stricte du principe de compensation intégrale.

Le même article 2 de la loi de finances rectificative pour 2005 a prévu un abondement exceptionnel de 457 millions d’euros, réparti entre les départements proportionnellement aux écarts constatés entre les dépenses et le montant de la TIPP versé au titre de l’exercice 2004. Il convient de relever que cet abondement demeurait ponctuel, et n’intégrait pas le droit à compensation annuel des départements. Il n’en constituait pas moins une mesure de soutien très significative, décidée là encore au-delà de toute obligation légale ou constitutionnelle.

L’article 37 de la loi de finances pour 2006 (n° 2005-1719 du 30 décembre 2005) a créé le Fonds de mobilisation départementale pour l’insertion (FMDI), à la suite de l’engagement du Premier ministre d’accompagner les départements dans la gestion du RMI. Ce fonds a été doté par la loi de finances pour 2006 de 100 millions d'euros pour 2006 et 80 millions d'euros pour 2007. Le FMDI devait être un moyen de renforcer les actions d'insertion des départements, et en aucun cas une forme de compensation. Cependant, le Premier ministre a annoncé le 9 février 2006, à l'issue d'une réunion avec l'Assemblée des départements de France, sa décision d'accroître l'effort de l'État, en portant le FMDI à 500 millions d'euros et de le maintenir à ce niveau durant trois ans.

L’article 14 de la loi de finances rectificative pour 2006 (loi n° 2006–1771 du 30 décembre 2006) a en conséquence porté les crédits du FMDI à 500 millions d’euros et allongé d’un an la durée de son activité. De plus, alors que l’article 37 de la loi de finances pour 2006 avait institué un fonds chargé de financer des interventions de soutien aux politiques départementales d’insertion, la loi de finances rectificative pour 2006 a élargi les missions de ce fonds à l’attribution d’un véritable complément de compensation en faveur des départements. En portant à 500 millions d'euros le total des aides versées par le FMDI, elle a permis de couvrir, au-delà de toute obligation légale ou constitutionnelle de l’État, près de la moitié du déficit enregistré par les départements entre la recette transférée et la dépense exécutée jusqu’en 2008.

ÉVOLUTION DE LA DÉPENSE NETTE DE RMI ET DU NOMBRE DE BÉNÉFICIAIRES
DE 2004 À 2008

(France métropolitaine - En millions d’euros)

 

2004

2005

2006

2007

2008

Nombre de bénéficiaires

1 083

1 135

1 123

1 007

984

Allocation brute

4 630

5 060

5 300

5 240

5 160

Indus RMI

 

60

70

90

120

Allocation nette avant déduction des apports de l’État

4 630

5 000

5 230

5 150

5 040

Insertion nette

590

550

730

920

890

Dont contrats aidés

 

10

180

340

300

Dépenses totales nettes

(avant déduction des apports de l’État)

5 220

5 550

5 950

6 070

5 930

TIPP + FMDI

4 270

4 630

4 710

4 810

4 800

Charge nette

(après déduction des apports de l’État)

950

920

1 250

1 260

1 130

Source : rapport de l’observatoire national de l’action sociale décentralisée (juin 2009)

L’article 47 de la loi de finances pour 2009 (n° 2008-1425 du 27 décembre 2008) a reconduit pour un an le FMDI pour un montant identique de 500 millions d’euros.

L’État a donc toujours cherché au-delà de ses strictes obligations constitutionnelles, à accompagner la gestion départementale des dépenses d’insertion. Le présent article poursuit cet effort dans la mesure où l’évolution que l’on peut attendre de la TIPP en 2010 compte tenu de la conjoncture économique risque fort de ne pas suffire à couvrir les dépenses d’insertion des départements : 500 millions d’euros seront donc attribués au FMDI au titre de l’année 2010.

II.– L’ADAPTATION DES RÈGLES DE RÉPARTITION DU FMDI COMPTE TENU DE LA GÉNÉRALISATION DU REVENU DE SOLIDARITÉ ACTIVE

Si le présent article ne modifie pas l’architecture globale du FMDI, il tire toutefois les conséquences de l’entrée en vigueur au 1er juin 2009 du RSA.

L’année 2009 sert en effet d’année de référence des données recensées dans le cadre de la répartition du FMDI 2010. Or, 2009 est caractérisée, d’une part, par le fait qu’en métropole deux dispositifs se succèdent (RMI du 1er janvier au 31 mai et RSA à compter du 1er juin 2009) et, d’autre part, par le fait que le RSA n’est pas applicable dans les DOM qui sont néanmoins éligibles au RSA.

A.– LE MAINTIEN DE L’ARCHITECTURE GLOBALE DU FONDS

Le fonds reste structuré en trois parts distinctes :

– une part au titre de la compensation, qui tend à corriger une partie des écarts constatés entre la recette transférée et la dépense exécutée au titre du RMI dans chaque département ;

– une part au titre de la péréquation qui permet de corriger une partie des écarts constatés entre les départements, tant du point de vue du décalage entre la ressource transférée et la dépense exécutée que d’un point de vue financier plus général, au moyen d’un indice synthétique ;

– une part au titre de l’insertion, destinée à financer les politiques d’insertion et les projets innovants en matière de retour à l’activité.

Le tableau ci-après indique l’évolution de la structure du FMDI depuis sa création.

ÉVOLUTION DE LA STRUCTURE DU FMDI 2006–2009

 

2006

2007

2008

2009

Compensation

50 %

40 %

40 %

40 %

Péréquation

30 %

30 %

30 %

30 %

Insertion

20 %

30 %

30 %

30 %

B.– L’ADAPTATION DES RÈGLES DE RÉPARTITION PROPRES À CHAQUE PART DU FAIT DE LA GÉNÉRALISATION DU RSA LE 1ER JUIN 2009

1.– La révision du mode de calcul de la part « compensation »

Le montant de la première part du FMDI est égal à 40 % du montant total du fonds en 2010 (comme en 2007, 2008 et 2009), soit 200 millions d’euros (en 2006, le taux de cette part était de 50 %).

Ces montants sont répartis sur le critère exclusif de l’écart entre la dépense exécutée dans le département l’année N-1 et le droit à compensation du département. Les sommes sont réparties au prorata du rapport entre l’écart positif départemental et la somme de tous les écarts positifs.

Montant de la première part

= (Dépenses 2009 – droit à compensation) x montant de la première part

∑ (Dépenses 2009 – droit à compensation)

Or, pour la première fois en 2009, le droit à compensation résulte, pour chaque département métropolitain, du transfert du RMI et du RMA (arrêté du 17 août 2006 publié au JO du 7 novembre 2006) mais également de l’extension de compétences opérée par la loi du 1er décembre 2008 généralisant le RSA et réformant les politiques d’insertion.

Les dépenses 2009 recouvrent donc le montant des dépenses constaté dans le compte administratif 2009 du département du RSA socle (revenu minimum garanti pour les allocataires du RMI) et du RSA socle majoré (revenu minimum garanti pour les bénéficiaires de l’allocation de parent isolé – API) minoré du montant des indus du département.

Les départements d’outre-mer n’étant pas concernés par la généralisation du RSA, sont prises en compte les dépenses RMI et RMA constatées dans le compte administratif 2009, minoré du montant des indus RMI et RMA du département.

Seuls les départements qui se retrouvent avec une dépense nette d’insertion à leur charge bénéficient de la part compensation.

En 2008, deux départements n’ont pas bénéficié de cette part compensation (Bouches-du-Rhône et Corse-du-Sud). En 2005, l’écart entre le montant total de dépenses RMI et le montant total du droit à compensation s’élevait à 0,879 milliard d’euros et ce même écart s’élevait à 1,164 milliard d’euros en 2006 et à 1,152 milliard d’euros en 2007.

2.– La révision du mode de calcul de la part « péréquation »

Le montant de la seconde part du FMDI est égal à 30 % du montant total du fonds en 2010, soit 150 millions d’euros.

Une quote-part est réservée aux départements d’outre-mer, répartie selon des critères propres, le solde du versement résultant de l’application aux départements métropolitains d’un indice synthétique de ressources et de charges.

● La quote-part réservée au DOM

Son montant est déterminé par application au total de la masse à répartir du rapport entre, d’une part, le nombre d’allocataires du RMI résidant dans les DOM. Et, d’autre part, le nombre total d’allocataires du RMI dans les DOM et des bénéficiaires du RSA socle diminué du nombre de bénéficiaires du RSA majoré constaté dans tous les départements en France au 31 décembre 2009.


QP seconde fraction
= Masse totale seconde fraction x nombre RMI OM

nombre RMI/RSA total

Cette quote-part est répartie entre les départements d’outre-mer par application du même critère que celui utilisé pour la part compensation, soit au prorata du rapport entre l’écart positif entre la dépense du département et son droit à compensation et la somme des écarts positifs des départements d’outre-mer.

● L’indice synthétique retenu pour les départements métropolitains

Le solde de la part péréquation est réparti entre les départements de métropole, en retenant le ratio de la part compensation pondéré par un indice synthétique, calculé en additionnant :

– 25 % du rapport entre le potentiel financier moyen par habitant des départements et celui de chaque département, au titre de l’année N–1 (2009) ;

– et 75 % du rapport entre la proportion du nombre d’allocataires du RSA à la charge du département divisé par la population INSEE 2009 du département.

Cette règle de répartition fixée par l’article L. 3334-16-2 du code général des collectivités territoriales (CGCT) tire les conséquences de la généralisation du RSA au 1er juin 2009 pour les départements métropolitains.

3.– La révision du mode de calcul de la part « insertion »

Le montant de la troisième part du FMDI est égal à 30 % du montant total du fonds en 2010 (comme en 2007, 2008 et 2009), soit 150 millions d’euros (en 2006, le taux de cette part était de 20 %).

L’ajout d’un nouveau critère au sein de la part insertion, résultant de la généralisation du RSA dans les départements de métropole, conduit à créer pour les DOM une quote-part au sein de la part insertion qui constitue un dispositif transitoire.

● La création d’une quote-part réservée au D.O.M

En raison de l’absence de généralisation du RSA dans les départements d’outre-mer, la répartition de cette troisième part au profit des quatre départements d’outre-mer s’effectue de manière indépendante de celle des départements métropolitain.

Il est ainsi prévu que le montant de cette quote-part en 2010 soit identique au montant cumulé de dotation obtenu par l’ensemble des DOM en 2009.

La quote-part outre-mer sera répartie en proportion du nombre de contrats mentionnés ci-après constaté au 31 décembre de l’année 2009 dans le département d’outre-mer par rapport au nombre de contrats constatés à la même date pour l’ensemble des DOM :

– contrats d’avenir (article L. 5134-35 du code du travail),

– contrats d’insertion – RMA (article L. 5134-74 du même code),

– mesures d’intéressement,

– et contrats aidés dans le cadre des expérimentations conduites sur le fondement de l’article 142 de la loi de finances pour 2007.

● La répartition du solde entre les départements métropolitains

Le solde de la masse à répartir entre les départements métropolitains est répartie en proportion du nombre de contrats mentionnés ci-après constaté au 31 décembre de l’année 2009 dans le département par rapport au nombre de contrats constatés à la même date pour l’ensemble des départements métropolitains :

– contrats d’avenir (article L. 5134-35 du code du travail),

– contrats d’insertion – RMA (article L. 5134-74 du même code),

– mesures d’intéressement,

– et contrats aidés dans le cadre des expérimentations conduites sur le fondement de l’article 142 de la loi de finances pour 2007.

Les crédits du FMDI pour 2010 serviront donc à participer au financement des dépenses intervenues en 2009 : il sera procédé à leur répartition en octobre 2010, après exploitation des comptes administratifs des départements pour 2009.

III.– L’INSTAURATION D’UN MÉCANISME D’ÉCRÊTEMENT POUR ASSURER UNE CERTAINE PÉRÉQUATION HORIZONTALE ENTRE LES DÉPARTEMENTS

Le présent article prévoit l’introduction d’un mécanisme d’écrêtement qui doit être considéré comme une mesure d’équité et de solidarité entre départements.

Ce système d’écrêtement est appliqué aux départements qui reçoivent un montant de ressources, constitué du droit à compensation et de la dotation FMDI, supérieur au montant de leur dépense. L’écrêtement intervient sur la dotation FMDI sans affecter le droit à compensation, qui est constitutionnellement garanti, même si son montant est à lui seul plus élevé que celui de la dépense. Les sommes prélevées sont réparties entre les départements supportant une dépense nette à leur charge au prorata du montant de cette dépense.

1.– Détermination des départements supportant l’écrêtement

Il s’agit des départements bénéficiant d’un écart positif entre le montant de ressources (droit à compensation + dotation FMDI) et le montant de la dépense exposée en 2009.

2.– Calcul de l’écrêtement

Le montant de l’écrêtement appliqué au département est égal à l’écart positif entre le montant de ressources (droit à compensation + dotation FMDI) et le montant de la dépense exposée dans la limite du montant de la dotation 2009.

3.– Détermination des départements bénéficiant des sommes écrêtées

Il s’agit des départements bénéficiant d’un écart négatif entre le montant de ressources (droit à compensation + dotation FMDI) et le montant de la dépense exposée.

4.– Répartition entre les départements du montant total de l’écrêtement

Les sommes prélevées sur les départements supportant l’écrêtement sont réparties entre les départements bénéficiaires au prorata du rapport entre l’écart négatif du département et la somme de ces mêmes écarts.

Part complémentaire = (Écart négatif du département / ∑ des écarts négatifs) x montant total de l’écrêtement

*

* *

Suivant l’avis défavorable du rapporteur général, la Commission rejette l’amendement I-CF 213 de M. Cahuzac.

Puis elle adopte l’article 15 sans modification.

Article 16

Évolution des compensations d’exonérations

Le présent article décline la clé d’ajustement permettant au périmètre des concours financiers aux collectivités locales de respecter la norme de 1,2 % d’évolution que l’État lui assigne pour 2010. Il s’agit de la reconduction du mécanisme général instauré par la loi de finances pour 2009, celle-ci ayant déjà défini l’ensemble des compensations d’exonérations fiscales appelées à jouer le rôle de variable d’ajustement.

Il reste à décliner :

– le calcul de la baisse du montant total de cet ensemble, par rapport à son montant en 2009, qui permettra au périmètre de se cantonner dans sa norme d’évolution ;

– la répercussion forfaitaire de cette baisse sur chaque compensation sous forme d’un taux de minoration applicable en 2010.

I.– LES VARIABLES D’AJUSTEMENT DU PÉRIMÈTRE

L’ajustement du périmètre global des concours financiers de l’État aux collectivités territoriales sera opéré par une baisse des compensations d’exonérations de fiscalité locale. Les compensations que le présent article retient comme variables du contrat sont les mêmes que celles retenues en loi de finances pour 2009. Concrètement, ces compensations sont de trois types : celles qui jouaient déjà en 2008 le rôle de variable du contrat, celles qui sont devenues des variables en 2009 et celles qui sont préservées du rôle d’ajustement.

A.– LES VARIABLES ANCIENNES

L’existence, depuis plusieurs années, d’un contrat de croissance et de solidarité puis, en 2008, d’un contrat de stabilité a d’ores et déjà transformé plusieurs compensations d’exonérations en variables d’ajustement des enveloppes plafonnées.

1.– La variable historique : la DCTP

La dotation de compensation de la taxe professionnelle (DCTP) a été instituée, sous forme d'un prélèvement sur les recettes de l'État, par l'article 6 de la loi de finances pour 1987 (n° 86-1317 du 30 décembre 1986), pour corriger les effets pervers du système antérieur de compensation. Après de multiples mouvements de périmètres ayant vu la DCTP grossir puis décroître en volume, celle-ci regroupe aujourd’hui les allocations compensatrices suivantes :

– la compensation du plafonnement du taux communal, instituée en 1983 ;

– la compensation de la réduction de la fraction des salaires prise en compte dans les bases de TP, également instituée en 1983 ;

– la compensation de l'abattement général de 16 % des bases de TP, instituée par l'article 6 de la loi de finances pour 1987.

Depuis 1996, l’indexation négative de la DCTP est calculée de sorte que le total de l’enveloppe normée respecte la progression prévue par la loi. Le choix de cette compensation pour servir de variable d’ajustement repose à la fois sur le montant important de la DCTP, mais également sur sa répartition. En effet, s’agissant de compenser des exonérations de taxe professionnelle, il a pu être considéré que les principaux bénéficiaires des compensations seraient les collectivités locales disposant d’importantes bases fiscales. Ce raisonnement, qui n’est pas infondé, a conduit à considérer que l’ajustement de l’enveloppe par une baisse de la DCTP revêtirait un caractère péréquateur. En 2009, le montant de la DCTP était de 595 millions d’euros (hors RCE).

2.– Les variables incluses en 2008 dans le contrat de stabilité

Le législateur a dû trouver de nouvelles variables d’ajustement pour supporter la contrainte née du contrat de stabilité instauré par l’article 36 de la loi de finances pour 2008. Ce même article a donc adjoint trois nouvelles compensations à la DCTP afin d’élargir l’assiette supportant l’ajustement.

a) La réduction de la fraction des recettes imposables à la taxe professionnelle

L’article 26 de la loi de finances pour 2003 a instauré une réduction de la fraction des recettes des titulaires de bénéfices non commerciaux (BNC) imposable à la taxe professionnelle, afin de leur procurer un avantage fiscal comparable à la suppression en 2000 de l’assiette salariale pour les autres types de contribuables. Cette réduction s’est étalée sur trois exercices, faisant passer la fraction de 10 % des recettes en 2002 à 6 % à compter de 2005. La perte de recettes générée par cette réduction a été compensée aux collectivités locales selon une méthode devenue habituelle : un prélèvement sur recettes a été institué afin de compenser intégralement chaque année la perte de produit représentée par l’application du taux de 2002 à des bases réduites (à 9 %, puis 8 % et enfin 6 %). Cette compensation a été indexée à partir de 2004 selon le taux d’évolution de la DGF. Elle s’est élevée à 475,85 millions d'euros en 2007. L’ajustement du contrat de stabilité a diminué cette compensation en 2008, son total étant ramené à 361,7 millions d'euros. La loi de finances pour 2009 l’a abaissée à 300 millions d’euros.

b) L’exonération des parts départementale et régionale de taxe foncière sur les propriétés non bâties agricoles

L’article 9 de la loi de finances pour 1993 (n° 92-1376 du 30 décembre 1992) a instauré une exonération totale de la part de TFPNB agricoles perçue au profit des départements et des régions. Cette exonération s’est appliquée dès 1993 pour la part régionale, et sous forme progressive de 1993 à 1996 pour les départements. Ces exonérations ont été compensées dès 1993 aux collectivités territoriales concernées, par attribution d’une dotation égale chaque année au produit des bases ainsi exonérées par le taux de TFPNB de 1992 pour les régions et de 1993 pour les départements. Le total de ces compensations s’élevait en 2007 à 315 millions d'euros. L’article 36 de la loi de finances pour 2008 a minoré le montant total de ces compensations pour l’établir à 260,6 millions d'euros. La loi de finances pour 2009 l’a ramené à 216 millions d’euros.

c) La DCTP au titre de la réduction pour création d’établissement (RCE)

Le dispositif RCE consiste à exonérer de taxe professionnelle les établissements nouveaux en totalité l’année de leur création, et de moitié l’année suivante (article 1478 du code général des impôts). Cette réduction a été compensée aux collectivités locales par attribution de DCTP. Toutefois, le maintien de la RCE à compter de 2000 a conduit le législateur à lui réserver un sort distinct du reste de la DCTP. En outre, contrairement au reste de la DCTP, la part « RCE » évolue toujours en bases réelles, c'est-à-dire que la compensation versée à chaque collectivité est calculée en fonction de la perte de recettes réelle résultant de l’exonération des bases notifiées pour l’année considérée. La fraction de DCTP au titre de la RCE s’élevait en 2008 à 52,1 millions d'euros. Elle a été ramenée par la loi de finances pour 2009 à 43 millions d’euros.

B.– LES COMPENSATIONS D’EXONÉRATIONS DEVENUES VARIABLES D’AJUSTEMENT EN 2009

La loi de finances pour 2009 a décliné un principe général, consistant à transformer toute compensation d’exonération de fiscalité locale en variable d’ajustement du périmètre. Elle a prévu plusieurs exceptions à ce principe, qui, en rétrécissant l’assiette des variables, alourdissent proportionnellement la charge de l’ajustement.

1.– L’ajustement par les concours les moins prioritaires : les compensations d’exonérations fiscales

Hormis les variables historiques aujourd’hui isolées sur des prélèvements sur recettes autonomes, l’intégralité des compensations d’exonérations de fiscalité locale est alimentée par un prélèvement unique sur les recettes de l’État. Par taxe et par article du code général des impôts, la décomposition de ce prélèvement est la suivante :

Exonération compensée

Article du CGI

Taxe foncière sur les propriétés bâties

 

– Personnes âgées et personnes de conditions modestes

1390, 1391 et 1391 A

– Abattement de 30 % pour les logements situés dans les Zones Urbaines Sensibles

1388 bis

–  Logements faisant l'objet de baux à réhabilitation

1384 B, 1586 B et 1599 ter

– Exonération de cinq ans dans les zones franches urbaines

1383 B, 1383 C et 1383 C bis

– Exonérations de 10, 15, 20, 25 ou 30 ans des logements à caractère social

1384, 1384 A, 1384 B et 1384 C

– Exonérations : activités équestres

1382

Taxe foncière sur les propriétés non bâties

 

– Terre agricole, part communale et EPCI (hors Corse)

1384 B bis

– Part du département de Corse

1586 E, 1599 bis

– Part communale sur les terres agricoles en Corse

1394 B

– Terrains plantés en bois

1395

– Terrains situés dans certaines zones humides ou naturelles

1395 D

– Natura 2000

1395 E

– Parcs nationaux dans les DOM

1395 F

Taxe d’habitation

 

– Personnes âgées ou de conditions modestes

1414

Taxe professionnelle

 

– Zone de redynamisation Urbaine (ZRU) et Zones franches urbaines (ZFU)

1466 A

– Zones de revitalisation rurale (ZRR)

1465 A

– Suppression de la part départementale en Corse

1586 bis

– Investissement dans les PME en Corse

1466 C

– Zone franche de Corse

1466 B et 1466 B bis

– Abattement de 25 % pour les établissements en Corse

1472 A ter

– Activités équestres

1450

2.– Les exceptions instituées par la loi de finances pour 2009 (66)

a) La dotation de compensation de la taxe d’habitation

La principale exception au mécanisme concerne la compensation des exonérations de taxe d’habitation. Il s’agit des exonérations visées à l’article 1414 du code général des impôts, qui concernent : les titulaires de l'allocation de solidarité aux personnes âgées ou de l'allocation supplémentaire d'invalidité ; les titulaires de l'allocation aux adultes handicapés lorsque le montant de leurs revenus de l'année précédente n'excède pas la limite prévue au I de l'article 1417 du même code ; les contribuables âgés de plus de 60 ans ainsi que les veuves et veufs sous la même condition de revenus ; les contribuables atteints d'une infirmité ou d'une invalidité les empêchant de subvenir par leur travail aux nécessités de l'existence sous la même condition de revenus. Cette compensation est la plus importante du prélèvement sur recettes détaillé précédemment.

L’exception proposée est donc lourde du point de vue de la répartition de la charge de l’ajustement du périmètre, car elle diminue l’assiette potentielle des variables de 1 242,742 millions d'euros, soit plus d’un tiers du total des compensations d’exonérations. Néanmoins, le Rapporteur général se félicite d’une telle exception. Il rappelle notamment que les collectivités bénéficiant d’importants montants au titre de cette compensation sont celles dont de nombreux contribuables sont de condition modeste, puisque exonérés de taxe d’habitation. À sa manière, cette compensation joue donc un rôle péréquateur, l’État ayant choisi de prendre à sa charge l’imposition des ménages les plus défavorisés. C’est pourquoi diminuer d’une main cette compensation pour soutenir la péréquation de l’autre n’aurait guère de sens. En outre, si son montant est très important, il faut aussi observer que cette compensation n’est pas éparpillée sur de multiples dispositifs, mais procède d’un seul objectif et d’une seule exonération de taxe d’habitation. Le Rapporteur général estime donc qu’il est raisonnable de traiter cette compensation de façon différenciée, et juge toujours souhaitable de ne pas lui faire subir une partie de l’ajustement du périmètre en 2010.

b) Les exonérations applicables en Corse

Le présent article propose également de ne pas inclure dans les variables d’ajustement la compensation de deux exonérations de taxe professionnelle applicables en Corse :

– l’exonération pour 5 ans des investissements réalisés, de 2002 à 2012, dans les PME ;

– l’exonération pour 5 ans de certains établissements existant en 1997 et des créations d’établissements intervenues entre 1997 et 2002, complétée par un système progressif de retour au droit commun, en trois ans, par application d’un abattement dégressif sur les bases exonérées (75 % la première année, puis 50 % et 25 %).

Les compensations afférentes à ces deux exonérations ne pèsent guère dans le total. La première représentait en 2009 une charge de 3,3 millions d'euros et se perpétuera jusqu’en 2017, dernière année d’exonération des derniers investissements éligibles. La seconde concerne un dispositif en fin de vie, puisque 2010 sera déjà la troisième et dernière année de remontée progressive des dernières bases exonérées. L’essentiel des bases exonérées au titre de ce dispositif sont donc d’ores et déjà taxées dans les conditions de droit commun, ce qui explique le très faible montant de la compensation (0,2 million d'euros). Déjà écartées de l’ajustement en 2009, ces compensations ont vocation à s’éteindre à leur propre rythme.

c) La part communale de la taxe foncière sur les propriétés non bâties agricoles

L’article 13 de la loi de finances pour 2006 (n° 2005-1719 du 30 décembre 2005) a instauré une exonération obligatoire de 20 % de la taxe foncière sur les propriétés non bâties agricoles perçue au profit des communes. Cette exonération a été compensée, dès 2006, par attribution d’une dotation égale, la première année, au produit des bases exonérées par le taux voté en 2005, puis indexée selon le taux de progression de la DGF.

Cette compensation, de 173,3 millions d’euros en 2009, continue d’être préservée du rôle d’ajustement dans le cadre du nouveau périmètre des concours financiers. Il faut en effet préserver les petites communes rurales pour lesquelles cette compensation représente des montants substantiels.

Dès lors, l’assiette des variables s’établit à 1 561 millions d’euros :

(en millions d’euros)

Compensations

LFI 2009

Assiette des variables d’ajustement

– Réduction progressive de la fraction de recettes prise en compte dans les bases de Taxe professionnelle des bénéfices non commerciaux

300

300

– Exonération de taxes sur le foncier non bâti hors Corse et hors part communale

216

216

– Dotation de compensation de la taxe professionnelle (DCTP hors RCE)

595

595

– Réduction pour création d'établissement (RCE)

43

43

–  Compensations d'exonérations ajustées

407

407

–  Compensation de la part salaire de la TP (FDPTP)

75

 

–  Compensation des pertes de base de TP

164

 

–  Autres compensations diverses (non modifiées)

1 502

 

Total

3 302

1 561

II.– L’AJUSTEMENT GLOBAL DU PÉRIMÈTRE

L’ajustement du périmètre, c'est-à-dire la baisse que le présent article propose d’appliquer aux variables, est égal à la différence entre l’ensemble de ces variables en base 2009 et le montant disponible pour le même ensemble dans le périmètre 2010, après progression de tous les autres concours. L’article 48 de la loi de finances initiale pour 2009 établissait le montant de l’ajustement pour 2009 à 1 570 596 045 euros, correspondant à un taux de minoration de 17,108 %.

Le total du périmètre des concours financiers en 2009 dans l’enveloppe normée s’élevait à 56 350,14 millions d’euros (67). L’application du taux d’évolution prévisionnelle des prix en 2010 (1,2 %) a pour conséquence de relever ce montant à 57 026,34 millions euros. Ce chiffre permet de calculer la minoration nécessaire des variables d’ajustement, une fois retranchée la croissance des concours actifs à laquelle ce montant est prioritairement affecté.

On peut rappeler que :

– La DGF, dont les conditions de progression en 2010 sont fixées par l’article 13 du projet de loi de finances, s’établira à 41 091,61 millions d'euros.

– Le FCTVA, dont la dynamique et les mécanismes ne sont pas modifiés par le projet de loi de finances, s’élèvera en 2010 à 6 282 millions d'euros.

– La dotation de compensation de la taxe d’habitation et les autres compensations d’exonérations, que le présent article propose de laisser évoluer à droit constant, s’élèveront au total en 2010 à 1 511,4 millions d'euros.

– La DDU s’élèvera à 50 millions d'euros.

– Le Fonds de soutien aux communes touchées par le redéploiement territorial des armées s’élèvera à 10 millions d'euros en 2009.

– La dotation Outre-mer s’élèvera à 103,3 millions d’euros.

 

LFI 2009

PLF 2010 à périmètre constant

Évolution

Dotation globale de fonctionnement

40 847

41 092

0,6 %

Dotation spéciale instituteur

38

28

-26 %

Dotation élu local

65

65

0,6 %

Dotation départementale d'équipement des collèges

326

330

1,2 %

Dotation régionale d'équipement scolaire

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661

669

+1,2 %

Dotation globale d'équipement scolaire

3

3

+1,2 %

Prélèvement au titre des amendes forfaitaires de la police de la circulation et des radars automatiques

600

640

+6,7 %

Fonds de solidarité en faveur des collectivités territoriales touchées par des catastrophes naturelles

10

20

+101,2 %

Reversement de TIPP à la Corse

44

41

-6,9 %

Fonds de mobilisation départementale pour l'insertion

500

500

+0,0 %

Compensation de la part salaire de la TP (FDPTP)

75

76

+0,5 %

Compensation des pertes de base de TP

164

184

+12,2 %

Autres compensations diverses (non modifiées)

1 502

1 511

+0,6 %

Dotation globale d'équipement des communes

484

490

+1,2 %

Dotation globale d'équipement des départements

224

227

+1,2 %

Dotation générale de décentralisation (Mission RCT)

1 415

1 423

+0,6 %

Dotation de développement urbain (DDU)

50

50

+0,0 %

Fonds de soutien aux communes touchées par le redéploiement territorial des armées

5

10

+100,0 %

Dotation globale de compensation

0,3

0

+0,6 %

Dotation de régisseur police municipale

0,5

0,5

+0,0 %

Subventions diverses

104

105

+1,0 %

Dotation de développement rural

131

133

+1,2 %

DGD Formation Professionnelle (Mission "Travail et Emploi")

1 686

1 696

+0,6 %

Fonds de compensation de la TVA

5 855

6 228

+6,4 %

Total des concours actifs

54 789,5

55 522

1,2 %

Le calcul du solde disponible pour les variables d’ajustement est relativement simple :

(TOTAL du périmètre) – (TOTAL des concours « actifs ») = TOTAL des variables

Ce calcul fait apparaître que le montant du total des variables, pour que le périmètre respecte la norme d’évolution fixée à 1,2 %, s’élèverait en 2009 à :

57 026 – 55 522 = 1 504 millions d’euros.

Ce solde disponible implique une baisse de 152,2 millions d'euros sur le périmètre d’ajustement, soit  – 3,61 % du total des variables concernées.

Cependant, il convient de tenir compte du Fonds de solidarité en faveur des collectivités territoriales et de leurs groupements touchés par des catastrophes naturelles, institué par l’article 110 de la loi de finances pour 2008 (n° 2007-1822 du 24 décembre 2007). Ce fonds doit permettre de contribuer à la réparation de dégâts causés par certains événements climatiques ou géologiques. En effet, certains sinistres, bien qu’importants pour les collectivités territoriales concernées, ne relèvent pas d’une ampleur telle, ou sont trop localisés, pour qu’ils justifient la mise en œuvre de la solidarité nationale. Dans ces cas, les collectivités locales sont confrontées aux limites de leurs polices d’assurance qui ne peuvent couvrir l’ensemble des biens touchés (notamment la voirie ou les réseaux d’assainissement). Le Fonds créé en 2008 permet d’apporter rapidement, et selon une procédure plus légère que celle déployée pour la mise en œuvre de la solidarité nationale, une garantie de financement des réparations qui s’imposent.

L’article L. 1613-6 du code général des collectivités territoriales, créé par la loi de finances pour 2008, prévoit que le Fonds sera « doté de 20 millions d'euros par an », cette somme étant prélevée sur le montant de la dotation de compensation de la taxe professionnelle. Dès lors qu’il est prélevé sur la seule DCTP, il est nécessaire, pour fixer le taux de minoration applicable à l’ensemble des variables d’ajustement, de neutraliser cette dotation pour le calcul du solde.

Après avoir été fixée par dérogation à 10 millions d’euros pour 2009 à l’initiative du Rapporteur général (article 44 de la loi de finances pour 2009), la somme allouée au Fonds est de 20,12 millions d’euros pour 2010, conformément à l’article L. 1613-6 précité qui prévoit que la dotation progresse chaque année comme la DGF, alors même que la prévision d’un montant en loi de finances initiale n’a pas réellement une incidence sur le pilotage des subventions en cours d’exercice. Cette année encore, compte tenu des montants en report, la somme allouée au Fonds sera encore supérieure à ces 20,12 millions d’euros, sans qu’il soit démontré que de tels montants sont nécessaires.

Le solde à retenir est donc majoré de 20,12 millions et s’établit très exactement à 1 524 406 740 euros, montant qui figure au IX du présent article. Le taux qui en résulte pour l’ensemble des variables d’ajustement à l’exception de la DCTP est donc –2,32 %.

III.– L’APPLICATION DE LA BAISSE FORFAITAIRE AUX COMPENSATIONS D’EXONÉRATIONS

Les paragraphes I à VIII du présent article répercutent, sur chaque dispositif de compensation d’exonérations ayant vocation à servir de variable d’ajustement, la baisse calculée pour permettre le respect de la norme d’évolution du périmètre global. Comme l’an passé, cette transcription dans la législation existante s’opère cependant de façon inutilement complexe.

Le présent article opère une adaptation du droit en vigueur, afin de pondérer chaque mécanisme de calcul de chacune des variables de la baisse nécessaire pour ajuster le périmètre. Pour appliquer la baisse forfaitaire à chaque compensation, le présent article décline dans le droit en vigueur un alinéa ainsi rédigé : « Au titre de 2010, la compensation calculée selon les dispositions qui précèdent est minorée par application d’un taux correspondant à l’écart entre le montant total versé en 2009 au titre de l’ensemble des compensations mentionnées aux I à VIII de l’article .. de la loi n° ….-…. du .. décembre 2009 de finances pour 2010 et le montant total de ces mêmes compensations prévu à cette fin pour 2010 par le XI de ce même article. »

Cette rédaction, peu explicite, renvoie donc le montant du taux à une soustraction entre le solde du périmètre disponible pour l’ensemble des variables (1 524,405 millions d'euros), fixé au IX du présent article, et le total pour 2009 de ce même ensemble (1 560,594 millions d'euros).

Outre que ce taux est, en réalité, le rapport entre cette différence et le montant pour 2009 de l’ensemble des variables (et non pas cette seule différence), il convient de noter que ce choix de rédaction, plutôt que l’inscription noir sur blanc d’un taux brut dans les dispositifs de compensation, ne va pas de soi. Il conviendra, comme l’an passé, de mentionner expressément le taux de - 2,32 % dans le IX du présent article.

Une explication pouvait résider dans le souhait de pouvoir adapter le taux de baisse en fonction des montants réellement versés en 2009. Une telle modalité d’application eut été inacceptable, comme le soulignait le rapporteur général dans son commentaire de l’article 14 de la loi de finances pour 2009. En effet, que le périmètre soit ajusté sur des compensations révisées, et non pas sur leurs montants inscrits en loi de finances initiale de l’année précédente irait à l’encontre du principe défendu, selon lequel l’évolution normée du périmètre se calcule de LFI à LFI. Ce principe justifie en particulier que les montants du FCTVA, de la DGF ou encore de la DSI ne soient pas rebasés en fonction de leur niveau exécuté. En outre, la prise en compte de montants de compensation révisés pour le calcul du taux de minoration ne saurait être acceptable dès lors que c’est le périmètre inscrit en loi de finances initiale qui sert au calcul du montant disponible.

Le Rapporteur général tient à indiquer que les minorations ont bien été appliquées au prorata des montants de compensation inscrits en loi de finances initiale pour 2009. Ne sont donc pas pris en compte les 39,43 millions correspondant à la minoration des recettes de l’État au titre des amendes de la police de la circulation et résultant d’un amendement du Gouvernement à l’article 3 de la loi de finances rectificative pour 2008 ayant précisément pour objet d’amortir la chute des variables d’ajustement. À cet égard, les 50 millions d’euros mis en réserve par ledit amendement ne sont pas intégralement venus abonder les variables d’ajustement. Tels étaient les propos du secrétaire d’État André Santini lors de l’examen en Séance, par l’Assemblée nationale, de la loi de finances rectificative pour 2009, au cours de sa troisième séance du mardi 9 décembre 2008 : « Cet amendement a pour objet de coordonner le vote du projet de loi de finances rectificative avec celui du projet de loi de finances pour 2009. Lors de l’examen de la première partie du PLF 2009 au Sénat, le Gouvernement a proposé de réserver un montant de 50 millions d’euros du produit des amendes encaissées au titre de 2008, qui doit être mis en répartition en 2009, pour abonder les compensations d’exonérations de fiscalité locale de 2009. Ces 50 millions seront affectés à ces compensations par voie de loi de finances rectificative pour 2009. Grâce à cette affectation, le taux de diminution de ces compensations sera réduit de 2,6 %, passant de moins 17,1 % à moins 14,5 %. Cet amendement permettra donc de réduire la pression pesant sur les compensations d’exonérations en effectuant, en quelque sorte, un redéploiement de crédits. »

En réalité, ce taux n’a été abaissé qu’à – 15,43 %. Or, il s’agit du taux applicable aux variables autres que la DCTP. Il ne représente pas le taux de minoration du total des variables, qui était de – 21,56 % (– 24,67 % pour la DCTP hors RCE et – 17,11 % pour les autres variables) et est donc passé à – 19,58 % (- 23,15 % pour la DCTP hors RCE et – 15,43 pour les autres variables) alors qu’il aurait dû descendre à -19,04 %.

S’agissant de l’application des taux de minoration de – 2,32% pour 2010, bien que la règle soit de répartir au prorata du poids de chacune des variables (sur la base des montants inscrits en loi de finances pour les raisons précédemment évoquées), une reventilation est nécessaire du fait du financement du Fonds « catastrophes naturelles » par la seule DCTP. En conséquence, le taux effectif de minoration s’établit à – 5,70 % pour la DCTP et – 2,32 % pour les autres variables.

Par ailleurs, il convient de rappeler que le montant de compensation qui en résulte est minoré du financement du Fonds de soutien aux communes touchées par le redéploiement territorial des armées, assuré par les compensations d’exonération, qui s’élèvera à 10 millions d'euros en 2009. Ce montant est ventilé sur une base homothétique, ce qui explique qu’il ne soit pas nécessaire de neutraliser son montant pour le calcul du montant disponible pour les compensations d’exonération jouant le rôle de variables d’ajustement.

1.– La baisse de la DCTP

a) La baisse de la DCTP au titre de la réduction pour création d’établissement (RCE)

La dotation de compensation de la réduction de taxe professionnelle au titre de la création d’établissement a intégré les variables du contrat de stabilité instauré par la loi de finances pour 2008. Le 2° du III du présent article modifie l’article 6 de la loi de finances pour 1987 (n° 86-1317 du 30 décembre 1986) afin de préciser que la compensation versée au titre de 2010 sera tout d’abord calculée dans les conditions de droit commun, puis minorée du taux fixé par la loi de finances pour 2009, puis minorée du taux d’ajustement résultant implicitement du présent article, c'est-à-dire -2,32 %.

Son montant en 2009 s’élèvera ainsi à 42,181 millions d'euros.

b) La baisse de la DCTP hors RCE

La masse de la DCTP de droit commun, dont les attributions individuelles n’évoluent plus en fonction des assiettes mais font l’objet d’une répartition figée, a fortement baissé, afin d’ajuster le contrat de stabilité prévu par la loi de finances initiale pour 2008, mais également pour financer à la fois le Fonds « catastrophes naturelles » et le Fonds de compensation des baisses de DCTP, tous deux créés par cette même loi.

Le 1° du III du présent article modifie l’article 6 de la loi de finances pour 1987 (n° 86-1317 du 30 décembre 1986) afin de préciser :

– que la masse de la DCTP doit être minorée en 2009 du taux d’ajustement résultant implicitement du présent article ;

– que cette minoration est opérée sur la masse réellement versée en 2008, avant imputation de la reconduction du financement du Fonds « catastrophes naturelles » en 2010 (c’est-à-dire « avant prise en compte des dispositions de l’article L. 1613-6 du code général des collectivités territoriales »).

La baisse réelle de la dotation répartie s’établira donc à -5,70 %, soit un montant de 560,96 millions d’euros.

2.– Les autres variables d’ajustement

a) L’ajustement des variables déjà utilisées en 2008

Le V du présent article décline la mécanique d’ajustement sur les compensations des exonérations des parts départementales et régionales de TFPNB agricoles et sur la compensation de la réduction de la fraction imposable à la taxe professionnelle des recettes des BNC.

Le présent article modifie respectivement l’article 9 de la loi de finances pour 1993 (n° 92-1376 du 30 décembre 1992) et l’article 26 de la loi de finances pour 2003 (n° 2002-1575 du 30 décembre 2002), afin de préciser que la compensation versée au titre de 2009 sera tout d’abord calculée dans les conditions de droit commun, puis minorée des taux fixés par les lois de finances pour 2008 et 2009, puis minorée du taux d’ajustement résultant implicitement du présent article, c'est-à-dire -2,32 %.

Le total des compensations départementales et régionales de l’exonération de TFPNB agricoles s’élèvera en 2010 à 211 millions d'euros.

La compensation de la réduction de la fraction imposable à la taxe professionnelle des recettes des BNC s’élèvera en 2010 à 292,89 millions d'euros.

b) L’ajustement des variables utilisées pour la première fois en 2009

Les autres compensations visées par le présent article sont minorées par application, en premier lieu du taux fixé par la loi de finances pour 2009, puis du taux de -2,32 % résultant de la rédaction complexe reproduite supra :

– Le I du présent article insère cette règle pour les exonérations de TFPB de droit commun applicables aux logements sociaux ;

– Le II du présent article insère cette règle pour les exonérations de TFPB des logements faisant l’objet d’un bail à réhabilitation.

– Le IV du présent article insère cette règle pour les exonérations de TFPB pour les personnes âgées ou de condition modeste.

– Le VI du présent article insère cette règle pour les exonérations de TP applicables en zone de redynamisation urbaine et dans les zones franches urbaines de 1ère et 2ème générations, ainsi que dans le dispositif de compensation de l’exonération de TFPB applicable dans les zones franches urbaines de 1ère génération.

– Le VI du présent article insère cette règle pour les exonérations suivantes :

• Suppression des parts départementale et régionale et abattement sur la part communale de la TP en Corse ;

• Exonération de TFPB dans les zones urbaines sensibles ;

• Exonération de TFPNB pour les terrains plantés en bois ;

• Exonération de TFPB dans les zones franches urbaines de 2ème génération ;

• Exonération de TFPNB pour les terrains situés dans certaines zones humides ou naturelles ;

• Exonération de TFPNB pour les terrains situés dans un site « NATURA 2000 » ;

• Exonération de TP et de TFPB dans les zones franches urbaines de 3ème génération ;

• Exonérations de TP applicables en zone de revitalisation rurale et en zone de redynamisation urbaine.

– Le VIII du présent article précise que l’ajustement dont font l’objet les dispositifs de compensation mentionnés au présent article est également applicable aux EPCI résultant d’une fusion, après application de la règle spécifique de calcul de la compensation leur revenant.

Le tableau suivant présente l’imputation de l’ajustement forfaitaire sur l’ensemble des compensations d’exonérations utilisées comme variables d’ajustement :

Compensations d’exonérations

Assiette (LFI 2009)

PLF 2010 à périmètre constant

Évolution

Réduction progressive de la fraction de recettes prise en compte dans les bases de Taxe professionnelle des bénéfices non commerciaux

299,84

292,89

– 2,32%

Exonération de taxes sur le foncier non bâti hors Corse et hors part communale

216,01

211,00

– 2,32%

Dotation de compensation de la taxe professionnelle (DCTP hors RCE)

594,87

560,96

– 5,70%

Réduction pour création d'établissement (RCE)

43,18

42,18

– 2,32%

Autres compensations d'exonérations ajustées

406,69

397,26

– 2,32%

Total

1 560,59

1 504,28

– 3,61

3.– Tableau récapitulatif

(en millions d'euros)

Exonérations

Montant de la compensation

 

LFI 2009

PLF 2010

I.– Taxes foncières

 

 

Taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB)

332,8

394,5

– dont ZFU

8,3

7,9

– dont exonérations pour les HLM situés en ZUS

79,5

75,7

- dont exonérations à caractère social

3,0

12,7

– dont exonérations pour les personnes de condition modeste

241,0

229,5

– dont exonérations zones franches globales dans les DOM

0,0

68,7

– dont exonérations activités équestres

1,0

 

Taxe foncière sur les propriétés non bâties (TFPNB)

398,0

403,8

– part départementale de l’exonération de TFPNB agricole

183,5

179,3

– part régionale de l’exonération de TFPNB agricole

32,5

31,7

– part communale - exonération de 20 % de TFPNB agricole

173,3

174,4

– terrains plantés en bois

6,0

5,8

– exonération de TFPNB en Corse (1)

2,3

2,3

– Natura 2000

0,4

0,3

– dont exonérations zones franches globales dans les DOM

0,0

10,0

Total Taxes foncières

730,7

798,3

II.– Taxe d’habitation

1 242,7

1 249,8

III.– Taxe professionnelle

   

Exonération au titre des lois du 4 février 1995 et du 14 novembre 1996 (ZRR, ZRU, ZFU : créations et extensions d’établissements)

68,6

65,3

Exonération zones franches globales dans les DOM

0,0

85,5

Exonération en faveur de la Corse

68,7

73,0

Investissements PME en Corse

3,3

2,8

Zone franche de Corse

0,2

0,0

Réduction de la fraction de recettes prises en compte dans les bases des BNC

299,9

292,9

Dotation de compensation de la taxe professionnelle

594,9

561,0

Réduction pour création d'établissement

43,2

42,2

Activités équestres

1,4

 

Suppression part salaire FDPTP

75,2(2)

75,5

Pertes de base et redevance des mines

164,0

184,0

Total Taxe professionnelle

1 319,2

1 382,2

IV.– Taxe sur les jeux automatiques

9,1

9,2

TOTAL GÉNÉRAL

3 301,8

3 439,5

(1) Exonération des terres agricoles de l'ensemble des collectivités du territoire Corse (communes, EPCI, départements et collectivité territoriale Corse).

(2) Montant recalé : 75,55 millions d’euros.

Source : Direction du budget,

*

* *

Conformément à l’avis défavorable du rapporteur général, la Commission rejette l’amendement I-CF 231 de M. Jean-Pierre Brard.

Puis elle adopte l’amendement I-CF 264 du rapporteur général (amendement n° I – 71).

.

Elle adopte l’article 16 ainsi modifié.

*

* *

Après l’article 16 :

Suivant l’avis défavorable du rapporteur général, la Commission rejette successivement les amendements I-CF 233 et I-CF 234 de M. Jean-Pierre Brard.

Article 17

Compensation des transferts de compétences aux départements par attribution d’une part du produit de la taxe intérieure de consommation sur les produits pétroliers (TIPP)

Le présent article a pour objet d’ajuster la compensation dont bénéficient les départements au titre des transferts de compétences pour l’année 2010.

Cet article ne modifie pas le dispositif de compensation, tel qu’il résulte de l’article 38 de la loi de finances pour 2008, et qui repose sur le transfert à chaque département d’une fraction d’un total formé par l’intégralité du produit de la taxe spéciale sur les conventions d’assurance et par des parts des tarifs de la TIPP afin de produire une recette équivalente au droit à compensation arrêté.

I.– L’AJUSTEMENT DE LA COMPENSATION VERSÉE AUX DÉPARTEMENTS AU TITRE DES TRANSFERTS DE COMPÉTENCES

L’ajustement des compensations départementales consiste :

– à corriger la base de compensation en fonction du montant prévisionnel révisé des transferts intervenus en 2009 ;

– à inscrire, dans le respect du principe de concomitance de la compensation, une provision budgétaire destinée à compenser les transferts devant intervenir en 2010.

A.– L’AJUSTEMENT DU DROIT À COMPENSATION DES DÉPARTEMENTS
AU TITRE DE 2009

Plusieurs ajustements doivent être réalisés sur le droit à compensation des départements au titre des compétences transférées en 2007, 2008 et 2009 pour intégrer durablement dans la base de compensation un montant total de 2 393 156 euros par an.

L’objet, le montant et les justifications des ajustements pérennes portant sur des transferts intervenus au 1er janvier 2009 et des rectifications pérennes portant sur des transferts ayant pris effet au 1er janvier 2007 ou au 1er janvier 2008 sont précisés dans le tableau ci-après.

 

AJUSTEMENT DU DROIT À COMPENSATION DES DÉPARTEMENTS AU TITRE
DES SERVICES TRANSFÉRÉS EN 2007

         

(en euros)

Année de rattachement
de la compensation

Objet de la compensation

LFI 2009

PLF 2010

PLF - LFI
(LFR 2009 mesures pérennes)

Justifications

Année 2009

Ajustement compensation des optants 2ème campagne RD (routes départementales) et RNIL (routes nationales d’intérêt local) pour les services transférés en 2007

14 177 700

27 705 682

13 527 982

– transfert des services des RD pour 283,60 ETP (200,2 ETP intégrés et 83,40 ETP)

 transfert des services des RNIL pour 70,90 ETP (64,9 ETP intégrés et 6 détachés)

Compensation des dépenses d'action sociale des personnels des RD ayant opté au titre de la 2ème campagne

0

239 925

239 925

Compensation non inscrite au PLF 2009

Compensation des dépenses d'action sociale des personnels des RNIL ayant opté au titre de la 2ème campagne

0

42 000

42 000

Compensation non inscrite au PLF 2009

Annulation de la compensation vacants intermédiaires RD ouverte en LFI 2009

17 402 693

0

– 17 402 693

Compensation ouverte à tort au PLF 2009

Annulation de la compensation vacants intermédiaires RNIL ouverte en LFI 2009

4 070 273

0

– 4 070 273

Compensation ouverte à tort au PLF 2009

Compensation prorata temporis des postes constatés vacants en 2009 après transfert de services pour les RD

0

2 609 291

2 609 291

Absence d'informations sur le nombre d'ETP

Compensation prorata temporis des postes constatés vacants en 2009 après transfert de services pour les RNIL

0

448 527

448 52

Absence d'informations sur le nombre d'ETP

Ajustement compensation des personnels non titulaires RD et RNIL

4 119 625

4 068 904

– 50 721

Annulation de la compensation attribuée par erreur au département de la Martinique alors qu'elle doit revenir à la région Martinique

Année 2007 ou 2008

Ajustement compensation des optants 1ère campagne RD et RNIL (intégrés et détachés)

586 584 271

586 514 652

– 69 619

Ajustement au regard du nombre exact d'optants

Ajustement de la compensation des postes constatés vacants en 2007 après transfert de services pour les RD et RNIL

41 087 404

41 514 575

427 171

Ajustement au regard du nombre exact de vacants

Ajustement de la compensation des postes constatés vacants en 2008 après transfert de services pour les RD et RNIL

14 177 700

20 510 443

6 332 743

Ajustement au regard du nombre exact de vacants mais pas d'information sur le nombre d'ETP

Correction compensation des vacants intermédiaires RD et RNIL

52 564 606

52 445 941

– 118 665

Correction faisant suite à l'envoi du bilan financier des transferts de service

Correction compensation des dépenses de fonctionnement RD

15 146 455

15 149 080

2 625

Correction faisant suite à l'envoi du bilan financier des transferts de service

 

AJUSTEMENT DU DROIT À COMPENSATION DES DÉPARTEMENTS AU TITRE
DES SERVICES TRANSFÉRÉS EN 2008

         

(en euros)

Année de rattachement
de la compensation

Objet de la compensation

LFI 2009

PLF 2010

PLF - LFI
(LFR 2009 mesures pérennes)

Justifications

Année 2009

Correction des dépenses de fonctionnement, des dépenses de formation des dépenses d'action sociale des RD, des RNIL et des voies d'eau

378 535

515 878

137 343

Ajustement du droit à compensation au regard du montant définitif prévu par les arrêtés de compensation

Ajustement de la compensation des optants 1ère campagne de droit d'option RD, RNIL et voies d'eau (intégrés et détachés)

3 830 348

3 995 488

165 140

Ajustement au regard du nombre exact d'optants et pas d'informations sur le nombre d'ETP

Compensation indemnité de service fait RNIL pour le département de la Seine-Saint-Denis

0

45 370

45 370

Compensation non inscrite en LFI 2009

Année 2008

Ajustement de la compensation des postes constatés vacants en 2008 après transfert de services pour les RD, RNIL et les voies d'eau

198 249

325 259

127 010

Ajustement au regard du nombre de vacants mais absence d'informations sur le nombre d'ETP

B.– LA MAJORATION DE LA COMPENSATION EN FONCTION DES MONTANTS PRÉVISIONNELS DES TRANSFERTS PRÉVUS EN 2010

En 2010, l’évolution du droit à compensation résulte de la poursuite des processus de transfert des agents des personnels des routes nationales reclassées dans la voirie départementale, des personnels du domaine public fluvial ainsi que des ports maritimes et des personnels chargés de la gestion du fonds de solidarité pour le logement affectés dans des services transférés à compter du 1er janvier 2007.

En effet, il convient de constater que le processus d’intégration des personnels de l’éducation nationale et de l’équipement et de l’agriculture s’est achevé en 2009 et ne donne pas lieu à majoration de la compensation en 2010 comme le montre le calendrier des options ci-après.

CALENDRIER DES OPTIONS ET TRANSFERTS DES
PERSONNELS TITULAIRES AUX DÉPARTEMENTS EN 2009

   

2007

2008

2009

   

1er sem.

2ème sem.

1er sem.

2ème sem.

1er sem.

2ème sem.

TOS

Option

 

3ème phase

Processus achevé

Transfert

transfert 1ère phase

transfert 2ème phase

transfert 3ème phase

Équipement

Option

 

2ème phase

3ème phase

Processus achevé

Transfert

   

transfert 1ère phase

transfert 2ème phase

Agriculture

Option

1ère phase

2ème phase

3ème phase

Processus achevé

Transfert

   

transfert 1ère phase

transfert 2ème phase

TRANSFERTS DE PERSONNEL : LE DISPOSITIF LÉGISLATIF ET RÉGLEMENTAIRE

La mise à disposition des personnels

Cette première phase s’est concrétisée par la création de la commission commune de suivi des transferts de personnels entre l’État et les collectivités territoriales, l’adoption de la convention- type prévue par la loi et destinée à être déclinée localement par les préfets (décret du 4 janvier 2005) et l’envoi d’instructions régulières aux préfets pour mener à bien la concertation locale devant aboutir à la signature des conventions locales de mise à disposition.

À défaut de convention passée dans le délai de trois mois à compter de la publication de la convention-type ou du transfert effectif de la compétence, la liste des services mis à disposition est établie par arrêté conjoint du ministre chargé des collectivités territoriales et du ministre intéressé, après avis motivé de la commission nationale de conciliation.

Le partage définitif des services, par décret en Conseil d’État

La loi n’a fixé aucune date limite pour ces transferts définitifs, dont chaque ministère concerné est responsable. À compter de la publication de chaque décret fixant les modalités du transfert définitif aux départements et aux départements de services ou parties de services les personnels peuvent exercer, pendant deux ans, leur droit d’option.

Les fonctionnaires qui optent pour le statut de fonctionnaire territorial sont intégrés dans les conditions prévues par les dispositions statutaires applicables à ce cadre d'emplois. Les fonctionnaires qui optent pour le maintien de leur statut sont placés en position de détachement auprès de la collectivité territoriale.

L’exercice du droit d’option par les agents

Les transferts de personnels ont été regroupés par l’article 147 de la loi de finances pour 2006 pour rendre compatibles l’exercice du droit d’option et la prise en charge financière des agents par la collectivité :

– le droit d’option exercé par les agents de l’État entre le 1er janvier et le 31 août de l’année n prend effet le 1er janvier n + 1 ;

– le droit d’option exercé par les agents de l’État entre le 1er septembre et le 31 décembre de l’année n prend effet le 1er janvier de l’année n + 2.

Ainsi, chaque transfert se décompose en trois « salves » sur la durée de deux ans. Ce mécanisme doit permettre de provisionner en loi de finances initiale, chaque année, le montant correspondant aux transferts effectifs au 1er janvier suivant, sur la base des options recensées au 31 août précédent.

La compensation financière

Au plan des charges connexes au transfert, elle intègre : la nouvelle bonification indiciaire, sur la base du coût réel par agent ; les charges patronales, notamment la cotisation due à la CNRACL ; 1 % de la masse salariale versé au CNFPT pour la formation ; les dépenses de médecine préventive, le compte épargne temps, puisque les droits accumulés par les agents seront intégralement compensés à la date du transfert ; une estimation des dépenses annexes liées au fonctionnement courant des services, au moyen d'un ratio de coût par agent, calculé selon la moyenne triennale des dépenses de l'État.

Parallèlement, des compensations financières sont allouées aux collectivités lorsque les postes transférés ne peuvent être pourvus physiquement. D’une part, les fractions d'emplois, qui ne peuvent donner lieu à transfert, font l'objet d'une compensation financière. D’autre part, les crédits de suppléance utilisés par l’État en moyenne les trois années précédant le transfert sont également transférés afin que les collectivités aient les moyens de pourvoir aux remplacements ponctuels.

S’agissant des personnels du ministère de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de la mer (MEEDDM), les décrets de partage de services sont respectivement intervenus le 7 novembre 2006, les 10 mai et 15 novembre 2007 et 19 décembre 2008, avec par conséquent des dates d’exercice du droit d’option différentes selon les domaines.

En 2010, la poursuite des transferts de personnels du MEEDDM (deuxième phase) en direction des régions ouvre donc un droit à compensation de 79 716 115 euros.

Les ETP concernés interviennent dans les domaines transférés des routes départementales, des routes nationales d’intérêt local, des ports départementaux et communaux, du fonds de solidarité pour le logement, des aérodromes civils, des ports de l’État non autonomes et des ports et voies d’eau intérieurs.

COMPENSATION DES TRANSFERTS DE COMPÉTENCES AUX DÉPARTEMENTS INTERVENANT EN 2010

(en euros)

Date du
transfert de services ou de la compétence

Objet de la compensation

PLF 2010

Observations

2009

Compensation du transfert du canal de la Bruche au département du Bas-Rhin

73 000

Compensation des dépenses de fonctionnement résultant du transfert au département du Bas-Rhin du canal de la Bruche. Paiement en gestion par le MEEDDM en 2009.

Services transférés en 2007

Compensation des optants 3ème campagne RD (intégrés et détachés) pour les services transférés en 2007

51 445 532

287,60 ETP seront intégrés au 1er janvier 2010

1017,5 ETP seront détachés au 1er janvier 2010 (ce nombre comporte des détachés d'office car les données transmises agrègent les personnels ayant opté pour le détachement et les personnels détachés d'office).

Compensation des optants 3ème campagne RNIL (intégrés et détachés) pour les services transférés en 2007

10 557 335

69,70 ETP seront intégrés au 1er janvier 2010

189,45 ETP seront détachés au 1er janvier 2010 (ce nombre comporte des détachés d'office car les données transmises agrègent les personnels ayant opté pour le détachement et les personnels détachés d'office).

Compensation des optants 3ème campagne FSL (intégrés) pour les services transférés en 2007

35 432

69,70 ETP seront intégrés au 1er janvier 2010.

Application de la clause de sauvegarde RD pour les services transférés en 2007

7 740 960

Il s’agit de compenser aux départements les postes pourvus à la date du 31 décembre 2002 et qui ne l’étaient plus à la date du transfert au 31 décembre 2004 ce qui représente un volume de 724,06 ETP.

Application de la clause de sauvegarde RNIL pour les services transférés en 2007

8 070 682

L'application de la clause de sauvegarde porte sur un volume de 285,81 ETP.

Application de la clause de sauvegarde FSL pour les services transférés en 2007

20 417

L'application de la clause de sauvegarde porte sur un volume de 0,76 ETP.

Extension en année pleine de la compensation des postes vacants constatés en 2009 au titre des RD après
transfert de services

965 115

Le nombre d'ETP concernés est de 140,10.

COMPENSATION DES TRANSFERTS DE COMPÉTENCES AUX DÉPARTEMENTS INTERVENANT EN 2010 (SUITE)

(en euros)

Date du
transfert de services ou de la compétence

Objet de la compensation

PLF 2010

Observations

Services transférés en 2007

Extension en année pleine de la compensation des postes vacants constatés en 2009 au titre des RNIL après transfert de services

84 144

Le nombre d'ETP concernés est de 19,90.

Services transférés en 2009

Dépenses de fonctionnement des RNIL pour les services transférés en 2009

67 718

Absence d'informations sur le nombre d'ETP concernés.

Paiement en gestion en 2009 par le MEEDDM

Dépenses de fonctionnement des voies d'eau pour les services transférés en 2009

41 463

Dépenses de formation des RNIL pour les services transférés en 2009

3 575

Dépenses de formation des voies d'eau pour les services transférés en 2009

3 441

Indemnités de service fait des RNIL pour les services transférés en 2009

91 749

Indemnités de service fait des voies d'eau pour les services transférés en 2009

22 495

Charges de vacations des RNIL pour les services transférés en 2009

1 955

Charges de vacations des voies d'eau pour les services transférés en 2009

2 025

Postes vacants intermédiaires des RNIL pour les services transférés en 2009

450 895

Le nombre d'ETP concernés est de 41.

Postes vacants intermédiaires voies d'eau pour les services transférés en 2009

38 182

Le nombre d'ETP concernés est de 1,91.

II.– LES FRACTIONS DE TIPP TRANSFÉRÉES AUX DÉPARTEMENTS
POUR 2009

A.– LA FIXATION DES TARIFS DE TIPP PRODUISANT LE SOLDE DE LA COMPENSATION ATTENDUE

1.– Rappel du mode de compensation depuis 2008

Jusqu’en 2008, chaque département percevait une compensation sous forme d’une fraction du taux de la taxe spéciale sur les conventions d’assurance des véhicules terrestres à moteur (article 1001 du code général des impôts). Chaque fraction de taux est calculée de sorte que, sur une assiette de référence de la taxe (celle de 2004), elle produise la compensation due. Sur le taux global de cette taxe (18 %), la somme de ces fractions conduisait à affecter une part du produit égale à la somme des compensations.

Les transferts opérés en 2008 ont cependant conduit à épuiser la TSCA-VTM disponible, soit un taux total de 11,55 % (68), sans parvenir à couvrir la compensation due à l’ensemble des départements.

L’article 38 de la loi de finances pour 2008 a donc complété le dispositif de compensation, tout d’abord avec d’autres assiettes de la TSCA, puis – le produit obtenu demeurant inférieur à la compensation – par le transfert d’une partie du produit de la TIPP.

Chaque département bénéficie donc désormais d’une fraction d’une compensation totale égale à la somme, d’une part, de la totalité du produit de la TSCA sur les assiettes transférées, et, d’autre part, d’une partie du produit de la TIPP nationale résultant de l’affectation aux départements d’une fraction des tarifs applicables aux consommations de carburant. Cette dernière part de compensation est celle qui sera dorénavant ajustée chaque année.

2.– Le calcul des fractions de tarifs de TIPP produisant la compensation due en 2010

Le montant total de la compensation produite par les fractions de taux de TSCA est égal à 2 132 millions d'euros.

Or le montant du droit à compensation total des départements pour 2010 s’élèvera à 2 780 816 194 millions d'euros. Par conséquent, l’ajustement de la compensation par les fractions de tarifs de TIPP doit produire le solde manquant, c'est-à-dire : 2 780,8 – 2 132 = 648,8 millions d'euros.

Les fractions de tarifs de TIPP transférées par la loi de finances pour 2010 proposent donc une majoration de ces tarifs, afin qu’ils fournissent un produit égal à la compensation manquante, soit 648,8 millions d'euros. Ces tarifs seront égaux à 1,63 euro/hl pour le supercarburant sans plomb et 1,15 euro/hl pour le gazole.

B.– LA RÉPARTITION DE LA COMPENSATION ENTRE LES DÉPARTEMENTS

La mécanique de la compensation des transferts de compétence par des fractions de fiscalité indirecte d’État, pour complexe qu’elle paraisse, est une nécessité juridique. Elle obéit au souci de ne pas dégrader le ratio d’autonomie financière des départements et des régions, au-delà de son niveau de 2003, ce qu’interdit la loi organique sur l’autonomie financière des collectivités locales (69).

1.– Les droits individuels des départements

Chaque département dispose d’un droit à compensation spécifique, correspondant au montant des charges qui lui ont été spécifiquement transférées. C’est pourquoi chaque transfert donne lieu à la publication d’un arrêté, pris après avis de la Commission consultative d’évaluation des charges, fixant, par département, le droit à compensation.

Cette compensation, au seul titre des transferts prévus par la loi du 13 août 2004, représente une part non négligeable des recettes des départements. Il importe donc qu’elle soit versée selon des modalités propres à ne pas dégrader le ratio d’autonomie financière prévu par la loi organique.

2.– La fraction de fiscalité souscrivant au principe d’autonomie fiscale

L'article LO. 1114-2 du code général des collectivités territoriales définit comme une ressource propre garantissant leur autonomie financière les recettes fiscales des collectivités locales dont la loi « les autorise à fixer l'assiette, le taux ou le tarif, ou dont elle détermine, par collectivité, le taux ou une part locale d'assiette ». Le Conseil constitutionnel, dans sa décision n° 2004-500 DC du 29 juillet 2004 sur la loi organique précitée, a confirmé la conformité de cette définition à la Constitution.

C’est pourquoi la compensation des transferts au bénéfice des départements s’opère par affectation à chaque département d’un pourcentage se rapportant au total des fractions d’impositions transférées, qui est lui-même égal à la compensation due au titre d’une année pour l’ensemble des départements. Le Rapporteur général souligne ici que la loi n’affecte donc pas un montant, mais une fraction de fiscalité dont le produit est sensible à l’assiette. Or, si l’État garantit aux collectivités locales de percevoir, au besoin par correction ponctuelle des fractions, le montant minimal de la compensation due, il ne plafonne pas en contrepartie le produit perçu réellement, qui peut augmenter si l’assiette des taxes s’avère dynamique.

L’alinéa 5 du présent article est un tableau fixant, par département, en fonction du droit à compensation constaté pour chacun au titre de 2010, la fraction du bloc d’impositions transférées lui revenant.

*

* *

La Commission adopte l’article 17 sans modification.

Article 18

Compensation des transferts de compétences aux régions par attribution d’une part du produit de la taxe intérieure de consommation sur les produits pétroliers (TIPP)

Le présent article a pour objet d’ajuster la compensation dont bénéficient les régions au titre des transferts de compétences résultant de la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales.

Cet article ne modifie pas le dispositif de compensation des transferts aux régions, tel qu’il résulte de l’article 40 de la loi de finances pour 2006 et qui repose sur le transfert à chaque région métropolitaine d’une fraction de tarif de la TIPP calculée sur une assiette régionale afin de produire une recette équivalente au droit à compensation constaté.

La TIPP n’étant pas perçue dans les régions d’Outre-mer, la compensation de ces collectivités est versée sous forme de dotation globale de décentralisation, dont les montants sont retracés dans la mission Relations avec les collectivités territoriales (programme « Concours financiers aux régions »).

I.– L’AJUSTEMENT DE LA COMPENSATION VERSÉE AUX RÉGIONS AU TITRE DES TRANSFERTS DE COMPÉTENCES

L’ajustement des compensations régionales consiste :

– à corriger la base de compensation en fonction du montant prévisionnel révisé des transferts intervenus en 2009 ;

– à inscrire, dans le respect du principe de concomitance de la compensation, une provision budgétaire destinée à compenser les transferts devant intervenir en 2010.

A.– L’AJUSTEMENT DU DROIT À COMPENSATION DES RÉGIONS
AU TITRE DE 2007, 2008 ET 2009

Plusieurs ajustements doivent être réalisés sur le droit à compensation des régions au titre des compétences transférées en 2007, 2008 et 2009 pour intégrer durablement dans la base de compensation un montant total de 222 408 euros par an.

L’objet, le montant et les justifications des ajustements pérennes portant sur des transferts intervenus au 1er janvier 2009 et des rectifications pérennes portant sur des transferts ayant pris effet au 1er janvier 2007 ou au 1er janvier 2008 sont précisés dans le tableau ci-après.

 

AJUSTEMENT DU DROIT A COMPENSATION AU TITRE DES COMPÉTENCES TRANSFÉRÉES
AUX RÉGIONS EN 2007, 2008 ET 2009

         

(en euros)

Année de rattachement
de la compensation

Objet de la compensation

LFI 2009

PLF 2010

PLF - LFI
(mesures pérennes LFR 2009)

Justifications

Année 2009

AFPA : transfert au 1er janvier 2009 pour la collectivité territoriale de Corse et la région Lorraine

40 199 111

40 067 804

–131 307

Correction suite à la prise en compte de l'indice des prix à la consommation hors tabac définitif pour 2008 dans le calcul de la moyenne triennale des dépenses consacrées par l'État (1)

Dépenses d'action sociale 2ème vague droit d'option RNIL

0

420

420

Dépenses d'action sociale des optants de la 2ème campagne non compensées en LFI 2009 (2)

Ajustement compensation droit d'option RNIL 2ème campagne

150 397

153 218

2 821

Ajustement au regard du nombre exact d'optants

Compensation prorata temporis des postes constatés vacants en 2009 au titre des lycées maritimes

0

15 460

15 460

Compensation attribuée à la région Bretagne pour un seul ETP (3)

Année 2007 ou 2008

Compensation des vacants intermédiaires des lycées maritimes

50 480

252 400

201 920

Ajustement au regard du nombre exact de vacants intermédiaires (4)

Compensation droit d'option 1ère campagne RNIL

3 112 991

3 279 040

166 049

Cette correction fait suite au bilan financier des transferts de service envoyé le 31 juillet 2009

Ajustement compensation droit d'option lycées maritimes 1ère campagne

1 509 661

1 476 706

–32 955

Ajustement au regard du nombre exact d'optants

 

TOTAL des ajustements prévus en LFR 2009

222 408

 

(1) Transfert de l’organisation et du financement des actions de formation professionnelle mises en œuvre par l’Association nationale pour la formation professionnelle des adultes (AFPA).

(2) Transfert de l’organisation et du financement des routes nationales d’intérêt local (RNIL)

(3) Postes devenus vacants de septembre à décembre 2009, qui n’ont pu être prévus en loi de finances initiale, mais qui ont nécessité des recrutements de la part des régions.

(4) Postes devenus vacants de septembre à décembre 2007 et 2008, qui n’ont pu être prévus en loi de finances initiale, mais qui ont nécessité des recrutements de la part des régions.

B.– LA MAJORATION DE LA COMPENSATION EN FONCTION DES MONTANTS PRÉVISIONNELS DES TRANSFERTS PRÉVUS EN 2010

En 2010, l’évolution du droit à compensation résulte de la poursuite des processus de transferts des personnels du Ministère de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de la mer.

En effet, il convient de constater que le processus d’intégration des personnels de l’éducation nationale et de la culture s’est achevé en 2009 et ne donne pas lieu à majoration de la compensation en 2010 comme le montre le calendrier des options ci-après.

CALENDRIER DES OPTIONS ET TRANSFERTS DES
PERSONNELS TITULAIRES AUX RÉGIONS EN 2009

   

2007

2008

2009

   

1er sem.

2ème sem.

1er sem.

2ème sem.

1er sem.

2ème sem.

TOS

Option

 

3ème phase

Processus achevé

Transfert

Transfert 1ère phase

Transfert 2ème phase

Transfert 3ème phase

Lycées agricoles et inventaire culturel

Option

 

2ème phase

3ème phase

Processus achevé

Transfert

   

Transfert 1ère phase

Transfert 2ème phase

Lycées maritimes

Option

 

1ère phase

2ème phase

3ème phase

Transfert

     

Transfert 1ère phase

La phase de mise à disposition des personnels TOS a donc pris fin avec la mise en œuvre de l’exercice individuel du droit d'option. En effet, à compter du 27 décembre 2005 (date de publication du décret fixant les transferts définitifs des services du ministère de l’éducation nationale), les personnels TOS ont disposé de deux ans pour choisir entre l’intégration dans la FPT ou le détachement sans limitation de durée.

L’exercice du droit d’option par les personnels TOS titulaires du ministère de l’éducation nationale a connu un succès réel. Selon les informations transmises lors de la préparation des lois de finances, 85,74 % des personnels TOS ont exercé leurs droits d’option entre détachement et intégration.

S’agissant des personnels du ministère de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de la mer (MEEDDM), les décrets de partage de services sont respectivement intervenus le 7 novembre 2006, les 10 mai et 15 novembre 2007 et 19 décembre 2008, avec par conséquent des dates d’exercice du droit d’option différentes selon les domaines. Les ETP concernés interviennent en régions, principalement dans les domaines transférés des routes nationales d’intérêt local (RNIL) et des lycées professionnels maritimes.

En 2010, la poursuite des transferts de personnels du MEEDDM (deuxième phase) en direction des régions ouvre donc un droit à compensation de 642 218 euros et se décompose de la manière suivante :

COMPENSATION DES TRANSFERTS AUX RÉGIONS INTERVENANT AU 1ER JANVIER 2010

       

(en euros)

Objet de la compensation

PLF 2010

Observations

Compensation de droits d'option de la 3ème campagne au titre des lycées maritimes (MEEDM et services transférés en 2007)

123 213

3 personnels TOS des lycées maritimes vont être détachés au 1er janvier 2010 et cette compensation sera versée uniquement au profit de la région Bretagne.

Extension en année pleine de la compensation des postes constatés vacants en 2010 au titre des lycées maritimes (MEEDM et services transférés en 2007)

11 043

Compensation attribuée à la région Bretagne pour un seul ETP.

Application de la clause de sauvegarde (1) RNIL (MEEDM et services transférés en 2007)

330 759

Il s'agit de compenser à la Collectivité territoriale de Corse les postes pourvus à la date du 31 décembre 2002 et qui ne l’étaient plus à la date du transfert au 31 décembre 2004 ce qui représente un volume de 12,05 ETP.

Compensation des droits d'option de la 2ème campagne RNIL et postes vacants 2008 à la collectivité territoriale de Corse (MEEDM et services transférés en 2007)

177 203

Il s'agit d'une mesure de transfert d'une compensation inscrite par erreur en DGD en 2009.

TOTAL des mesures inscrites dans l'article compensation pour les régions au titre des transferts
intervenant en 2010

642 218

 

(1) Clause dite « de sauvegarde » prévue à l’article 104 de la loi du 13 août 2004.

II.– LES FRACTIONS DE TIPP TRANSFÉRÉES AUX RÉGIONS POUR 2009

A.– LA FIXATION DE TARIFS DE TIPP PRODUISANT LA COMPENSATION ATTENDUE EN 2010

Le tableau du présent article fixe les fractions des tarifs de TIPP applicables région par région en 2010, telles qu’elles permettent d’atteindre les montants de la compensation cumulée.

Le montant total du droit à compensation dû aux régions de métropole pour l’exercice 2010 s’élève à 3 176 432 153,00 euros dont 864 626 euros au titre des ajustements (222 408 euros) et des compensations (642 218 euros) intervenant au 1er janvier 2010.

Le I de l’article 40 de la loi de finances pour 2006 (n° 2005-1719 du 30 décembre 2005) a fixé les règles de calcul des fractions de TIPP transférées, afin de tenir compte de la régionalisation de l’assiette de la taxe à compter de 2006 :

« La fraction de tarif (…) est calculée, pour chaque région et pour la collectivité territoriale de Corse, de sorte que, appliquée aux quantités de carburants vendues aux consommateurs finals en 2006 sur le territoire de la région et de la collectivité territoriale de Corse, elle conduise à un produit égal au droit à compensation. »

Sur la base des assiettes régionales estimées de TIPP en 2006, cette formule permet d’établir la liste des fractions de tarifs fixée par le présent article. Ces fractions s’appliqueront, sous réserve de la modulation régionale, aux consommations réelles de carburants dans chaque région en 2010.

B.– LA MODULATION RÉGIONALE DE LA TIPP EN 2010

1.– Les choix des régions en 2007, 2008 et 2009

Depuis 2007, les régions se sont substituées à l’État pour exploiter les marges de réduction différenciée de la TIPP concédées par l’Union européenne.

La réglementation en matière de carburants faisant l’objet d’un encadrement communautaire relatif, notamment, à la fixation de tarif minima, la France a dû engager auprès de ses partenaires européens des négociations poussées, afin d’obtenir l’autorisation d’appliquer des tarifs de TIPP différents entre chaque région. Le 25 octobre 2005, le Conseil des ministres de l’Union européenne a autorisé la France à appliquer, pour une durée de trois ans et de façon encadrée, des tarifs différenciés au niveau régional. L’article 84 de loi de finances rectificative pour 2005, modifié par l’article 112 de la loi de finances rectificative pour 2006, a précisé les modalités techniques de cette différenciation régionale.

Jusqu’en 2008, la capacité de modulation était doublement encadrée par la loi :

– par la fourchette de réduction autorisée par l’Union européenne (2,30 euros/hl de gazole et 3,54 euros/hl de super sans plomb), la modulation ne pouvant donc dépasser en valeur absolue 1,15 euro pour le gazole, et 1,77 euro pour le super sans plomb ;

– par une deuxième fourchette se rapportant à leur propre droit à compensation, chaque région ne pouvant moduler le tarif de TIPP qu’à concurrence de la fraction qui lui avait été attribuée à titre de compensation.

En 2007, sur 22 régions, deux avaient renoncé à la modulation (la collectivité territoriale de Corse et la région Poitou-Charentes), tandis que les vingt autres avaient augmenté leurs fractions de tarif, dont trois dans des limites inférieures aux plafonds (Alsace, Bourgogne et Aquitaine) et 17 jusqu’aux valeurs maximales autorisées.

En 2008, sur 22 régions, deux ont renoncé à la modulation (la collectivité territoriale de Corse et la région Poitou-Charentes), tandis que les autres ont augmenté leurs fractions de tarif jusqu’aux valeurs maximales autorisées, à l’exception de la Franche-Comté, qui les a augmentées dans des limites inférieures aux plafonds.

Appliquées aux consommations régionales enregistrées, ces modulations ont permis, en 2008, de dégager, par une surtaxation du carburant dans les régions, les surcroîts de recettes retracés dans le tableau suivant :

PRODUIT DE LA MODULATION RÉGIONALE DE LA TIPP EN 2008

   

Gazole

Supercarburant

Total

 

 11 – ÎLE-DE-FRANCE

46 697 998

33 450 444

80 148 442

 

 21 – CHAMPAGNE-ARDENNE

12 724 040

4 453 198

17 177 238

 

 22 – PICARDIE

14 677 109

6 038 065

20 715 174

 

 23 – HAUTE-NORMANDIE

14 880 720

6 266 985

21 147 705

 

 24 – CENTRE

21 370 904

9 830 856

31 201 760

 

 25 – BASSE-NORMANDIE

12 759 288

5 325 583

18 084 871

 

 26 – BOURGOGNE

16 061 970

7 015 566

23 077 535

 

 31 – NORD-PAS-DE-CALAIS

25 481 459

10 785 472

36 266 931

 

 41 – LORRAINE

15 403 514

6 472 946

21 876 460

 

 42 – ALSACE

13 124 303

6 858 378

19 982 681

 

 43 – FRANCHE-COMTÉ

7 667 422

2 696 765

10 364 186

2008

 52 – PAYS DE LA LOIRE

29 294 010

12 579 986

41 873 996

 

 53 – BRETAGNE

26 282 561

10 919 169

37 201 730

 

 54 – POITOU-CHARENTES

0

0

0

 

 72 – AQUITAINE

24 914 736

11 180 979

36 095 715

 

 73 – MIDI-PYRÉNÉES

21 832 232

9 422 100

31 254 332

 

 74 – LIMOUSIN

6 179 372

2 785 854

8 965 226

 

 82 – RHÔNE-ALPES

47 373 165

21 635 774

69 008 939

 

 83 – AUVERGNE

10 962 420

4 900 900

15 863 320

 

 91 – LANGUEDOC-ROUSSILLON

19 238 954

10 297 015

29 535 968

 

 93 – PROVENCE-ALPES-CÔTE D’AZUR

33 489 336

21 409 016

54 898 352

 

 94 – CORSE

0

0

0

 

TOTAL

420 415 511

204 325 050

624 740 561

Source : DGDDI

En 2009, sur 22 régions, une seule a renoncé à la modulation (la région Poitou-Charentes), tandis que les autres ont augmenté leur fraction de tarif jusqu’aux valeurs maximales autorisées, à l’exception de la région territoriale de Corse, qui l’a augmentée dans des limites inférieures aux plafonds.

2.– La marge de manœuvre des régions en 2010

Le mécanisme de modulation s’applique chaque année aux fractions de tarifs en vigueur, retracées dans le tableau du I de l’article 40 de la loi de finances pour 2006 tel que modifié par la loi de finances la plus récente. Par conséquent, il faut considérer que les décisions de modulation sont en quelque sorte « remises à zéro » par la fixation de nouvelles fractions opérée par le présent article.

Les délibérations que les régions peuvent prendre, si elles souhaitent moduler, avant le 30 novembre 2009 s’appliqueront donc aux fractions résultant du présent article. Il faut souligner que le pouvoir de modulation demeure théoriquement encadré par les mêmes règles qu’à l’origine.

Cependant, depuis 2008, compte tenu de l’ampleur prise par les transferts et leurs compensations, la limite du doublement du droit à compensation n’emporte plus aucune conséquence pour les régions, pour lesquelles la fourchette autorisée par le droit communautaire est davantage sévère.

La dérogation accordée à la France par le Conseil de l’Union européenne arrivant à échéance le 31 décembre 2009, il ne peut être précisé, à ce stade, si la modulation de la TIPP régionale sera reconduite, et donc applicable en 2010. Le pouvoir de modulation régionale en 2010 dépend donc des résultats des négociations menées par la France au cours de l’année. En cas de non renouvellement de la dérogation, l’article 84 de loi de finances rectificative pour 2005 modifié par l’article 112 de la loi de finances rectificative pour 2006, sera incompatible avec le droit communautaire.

*

* *

La Commission adopte l’article 18 sans modification.

Article 19

Compensation aux départements des charges résultant de la mise en œuvre du revenu de solidarité active (RSA)

Le revenu de solidarité active (RSA) entend à la fois garantir un revenu minimum aux personnes privées d’emploi et apporter un complément de revenus aux personnes en situation d’emploi précaire ou disposant de revenus trop faibles pour assumer leurs charges de famille. Il remplace le revenu minimum d’insertion (RMI) et l’allocation de parent isolé (API) mais vise également à soutenir les travailleurs pauvres. En contrepartie de ces droits nouveaux, le bénéficiaire du revenu de solidarité active voit ses devoirs renforcés dans le champ de l'emploi. Le RSA a ainsi pour objectifs de simplifier les dispositifs existants, d’inciter à la reprise d'activité et de lutter contre la pauvreté au travail.

La loi n° 2008-1249 du 1er décembre 2008 généralisant le RSA et réformant les politiques d’insertion prévoit que le RSA sera financé par l’État, via le Fonds national des solidarités actives (FNSA – coût du « RSA chapeau ») et par les départements, ceux-ci étant sollicités pour chaque foyer à hauteur de la différence entre ses ressources et le revenu minimum garanti qui lui est applicable en fonction de sa composition (coût du « RSA socle »). L’article 7 de cette loi prévoit également que les départements se verront compenser des charges résultant de l’extension de compétences liée à la mise en œuvre du RSA dans les conditions fixées par la loi de finances. Enfin, l’article 29 de la même loi prévoit une entrée en vigueur différée du RSA, au plus tard le 1er janvier 2011, dans les départements d’outre-mer et les collectivités de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin et de Saint-Pierre-et-Miquelon.

L’article 51 de la loi n° 2008-1425 du 27 décembre 2008 de finances pour 2009 prévoit donc l’attribution aux départements de métropole d’une part du produit de la TIPP, destinée à financer l’extension de compétence des départements du fait de la mise en œuvre du RSA au 1er juillet 2009.

Le présent article a pour objet d’ajuster la compensation des charges résultant de la mise en œuvre du RSA au 1er juillet 2009 compte tenu des dépenses réelles exécutées en 2008 conformément au principe de compensation posé par l’article 72-2 de la Constitution (I). Il opère également un versement supplémentaire exceptionnel en faveur des départements à hauteur de 45 millions d’euros en 2010 afin de les accompagner dans la gestion de la politique d’insertion dans le contexte de la crise économique actuelle (II).

I.– L’AJUSTEMENT NORMAL DU DROIT À COMPENSATION DES DÉPARTEMENTS AU VU DES DÉPENSES EXÉCUTÉES EN 2008

A.– LE RESPECT DES PRINCIPES CONSTITUTIONNELS DE COMPENSATION DES CHARGES TRANSFÉRÉES AUX DÉPARTEMENTS

Il est ici nécessaire de rappeler les règles régissant la compensation des transferts des compétences de l’État au profit des collectivités locales.

L’évaluation et la compensation des charges transférées doivent s’effectuer conformément aux dispositions prévues, d’une part, aux articles 118 à 121 de la loi n° 2004-809 relative aux libertés et aux responsabilités locales et, d’autre part, aux articles L. 1614-1 et suivants du code général des collectivités territoriales (CGCT). Par ailleurs, cette compensation s’inscrit dans un cadre constitutionnel et organique renouvelé par l’adoption de la loi constitutionnelle n° 2003-276 du 28 mars 2003 relative à l’organisation décentralisée de la République, d’une part, et de la loi organique n° 2004-758 du 29 juillet 2004 relative à l’autonomie financière des collectivités territoriales, d’autre part.

Ainsi la compensation financière doit-t-elle se conformer à quatre principes : elle est intégrale, concomitante à l’entrée en vigueur des transferts de compétences, contrôlée et respecte le principe d’autonomie financière des collectivités territoriales.

Le principe de compensation financière intégrale des transferts de compétences, consacré au quatrième alinéa de l’article 72-2 de la Constitution, s’énonce de la façon suivante : « Tout transfert de compétences entre l’État et les collectivités territoriales s’accompagne de l’attribution de ressources équivalentes à celles qui étaient consacrées à leur exercice. Toute création ou extension de compétences ayant pour conséquence d’augmenter les dépenses des collectivités territoriales est accompagnée de ressources déterminées par la loi ».

Mis en œuvre depuis 1983, ce principe, prévu à l’article L. 1614-1 du code général des collectivités territoriales, a été érigé en principe à valeur constitutionnelle par la loi constitutionnelle n° 2003-276 du 28 mars 2003 relative à l’organisation décentralisée de la République. Les ressources transférées doivent donc être équivalentes aux dépenses précédemment effectuées par l’État au titre des compétences transférées. Toutes les dépenses, directes et indirectes, liées à l’exercice des compétences transférées sont prises en compte.

Il est également instauré un mécanisme de garantie dans l’hypothèse où les recettes provenant des impositions attribuées à titre de compensation financière des transferts de compétences diminueraient pour des raisons étrangères au pouvoir de modulation reconnu aux collectivités bénéficiaires. Dans une telle hypothèse, l’État doit prévoir en loi de finances des mesures propres à garantir aux collectivités bénéficiaires un niveau de ressources équivalent à celui qu’il consacrait à l’exercice de la compétence avant son transfert.

En second lieu, tout accroissement de charges résultant de ces transferts doit être accompagné du transfert concomitant des ressources nécessaires à l’exercice des compétences transférées. Concrètement, l’année précédant le transfert, les ministères décentralisateurs doivent procéder à l’évaluation provisoire des dépenses qu’ils consacraient jusqu’alors à l’exercice des compétences transférées. Cette évaluation permet de prendre, en loi de finances, les dispositions nécessaires à la compensation provisoire des charges nouvelles. Aussi, dès que les données définitives sont connues, il est procédé aux régularisations qui s’imposent.

La compensation doit également être contrôlée. L’évaluation des charges correspondant à l’exercice des compétences transférées est constatée pour chaque collectivité par arrêté conjoint du ministre chargé de l’intérieur et du ministre chargé du budget, après avis de la commission consultative sur l’évaluation des charges (CCEC), réformée par l’article 118 de la loi relative aux libertés et aux responsabilités locales.

La compensation doit enfin être conforme au principe d’autonomie financière des collectivités locales inscrit à l’article 72-2 de la Constitution.

L’article 51 de la loi de finances pour 2009 prévoit donc dans son paragraphe I le principe de la compensation au titre de l’extension de compétence précitée par « une part du produit de la taxe intérieure sur les produits pétroliers ». Il précise que cette part est obtenue, pour 2008, pour l’ensemble des départements, par application d’une fraction du tarif de la TIPP aux quantités de carburants vendues sur le territoire national et que cette fraction de tarif « est calculée de sorte qu’appliquée aux quantités de carburants vendues sur l’ensemble du territoire en 2008, elle conduise à un produit égal au montant » du coût des compétences transférées.

B.– LES MODALITÉS ET LE CALENDRIER D’AJUSTEMENT DE LA COMPENSATION DES DÉPARTEMENTS

Le II de l’article 7 de la loi du 1er décembre 2008 généralisant le RSA et réformant les politiques d’insertion et l’article 51 de la loi de finances initiale pour 2009 précise les modalités de calcul de la compensation à verser aux départements métropolitains et le calendrier pour réaliser les ajustements de compensation.

La généralisation du RSA au 1er juin 2009 en métropole commande qu’une compensation provisionnelle soit versée aux départements dès cette date. Cette compensation provisionnelle a vocation à être reconduite et ajustée chaque année jusqu’à ce que le droit à compensation définitif soit arrêté au regard des dépenses exposées par les départements en faveur des bénéficiaires du RSA socle majoré (ex API) figurant dans les comptes administratifs pour 2010.

En loi de finances initiale pour 2009, les départements ont reçu une part du produit de la TIPP, correspondant à une compensation, évaluée de façon prévisionnelle, à 322 millions d’euros, pour une demi-année, fondée sur la moitié des dépenses prévisionnelles exposées par l’État dans les départements métropolitains en 2008 au titre de l’API, diminuées de la moitié des dépenses prévisionnelles en 2008 dans les départements métropolitains au titre de l’intéressement proportionnel et forfaitaire applicables à l’API et au RMI (charges qui relèvent du Fonds national des solidarités actives au titre du « RSA chapeau »).

La loi de finance initiale pour 2009 prévoyait également que les fractions de TIPP transférées seraient corrigées au vu des montants définitifs de dépenses exécutées en 2008 au titre de l’API, de l'intéressement proportionnel et forfaitaire applicable à l’API et de l'intéressement proportionnel et forfaitaire applicable au RMI.

Le I du présent article procède donc à cet ajustement de compensation en actualisant, pour l’année 2010, les taux des fractions de la TIPP inscrits à l’article 51 de la loi de finances pour 2009. Compte tenu des dépenses définitives constatées au titre de 2008, la compensation aux départements devrait s’établir, à compter de 2010, à 599 millions d’euros, soit 45 millions d’euros de moins que l’évaluation initiale réalisée pour 2009. Le montant de fraction de TIPP arrêté au I aboutit ainsi à transférer en base, au profit des départements de métropole, 599 millions d’euros de recettes fiscales.

Il convient de préciser que l’article 7 de la loi du 1er décembre 2008 précité prévoit deux étapes de réajustements complémentaires.

D’une part, les montants de compensation devront être ajustés au vu des dépenses constatées dans les comptes administratifs des départements pour l'année 2009. Or, dans la mesure où les comptes administratifs des départements ne seront transmis à l’administration qu’en novembre 2010, cet ajustement ne pourra intervenir qu’en loi de finances rectificative pour l’année 2010, afin de corriger à la hausse ou à la baisse la compensation provisionnelle perçue au titre de l’année 2010 et des six derniers mois de l’année 2009, sous le contrôle de la CCEC.

D’autre part, à compter de 2011, la compensation devra être ajustée de manière définitive au vu des dépenses constatées dans les comptes administratifs des départements pour 2010. Pour les mêmes raisons que précédemment, cet ajustement ne pourra intervenir qu’en loi de finances rectificative pour l’année 2011, sous le contrôle de la CCEC. Par conséquent, la compensation provisionnelle versée au titre du RSA en loi de finances initiale pour 2011 sera établie au vu des dépenses constatées dans les comptes administratifs des départements pour 2009 (qu’il conviendra de multiplier par deux pour les comptabiliser en année pleine).

Il s’ensuit que la loi de finances rectificative pour l’année 2011 procédera aux ajustements définitifs des compensations versées au titre de l’année 2011, 2010 et des six derniers mois de l’année 2009, au vu des dépenses constatées dans les comptes administratifs pour 2010, qui constituent la base de la compensation définitive.

Enfin, la loi de finances initiale pour 2012 procédera aux ajustements des fractions de TIPP inscrites en base de manière définitive au vu des dépenses constatées dans les comptes administratifs pour 2010, toujours sous le contrôle de la CCEC.

II.– UN EFFORT EXCEPTIONNEL DE L’ÉTAT EN 2010 POUR ACCOMPAGNER LA GESTION DE LA POLITIQUE D’INSERTION PAR LES DÉPARTEMENTS

A.– UNE MAJORATION EXCEPTIONNELLE DE LA COMPENSATION EN 2010

Le droit à compensation résultant de l’extension de compétence au titre du RSA a été estimé provisoirement à 322 millions d’euros pour 2009 (correspondant à une demi-année), soit 644 millions d’euros en année pleine.

Comme il a été dit précédemment, compte tenu des dépenses définitives constatées au titre de 2008, la compensation aux départements métropolitains devrait s’établir, à compter de 2010, à 599 millions d’euros, soit 45 millions d’euros de moins que l’évaluation initiale réalisée pour 2009. Les prévisions de dépenses au titre de la mise en œuvre du RSA dans les départements de métropole en 2008 étaient donc supérieures aux dépenses réelles constatées en 2008 en métropole (299 millions d’euros). On aurait donc pu s’attendre à une mesure d’ajustement à la baisse dans le cadre de la loi de finances rectificative pour 2009 à hauteur de 23 millions d’euros.

Toutefois, eu égard au caractère provisoire et estimatif du montant de la compensation fixé sur les données d’exécution de l’année 2008, l’État ne prévoit pas de minorer le montant de la compensation de 45 millions d’euros en 2010.

Le II du présent article autorise ainsi un versement exceptionnel en 2010 d’un montant de 45 millions d’euros, permettant de neutraliser la diminution du droit à compensation des départements métropolitains tel qu’il résulte de l’application de l’article 51 de la loi de finances pour 2009. Ce versement supplémentaire excède donc les obligations légales imposées à l’État en matière de compensation des transferts de charge de façon transitoire.

En effet, l’État entend accompagner l’effort des départements dans la gestion de la politique d’insertion en leur donnant une « avance de trésorerie » qui pourra s’avérer très utile si, dans le contexte économique actuel, les dépenses d’insertion 2009 évoluent plus vite que les dépenses définitivement constatées en 2008.

Dans la mesure où l’ajustement définitif n’interviendra qu’en loi de finances rectificative pour 2011, l’État prend la responsabilité d’anticiper l’évolution dynamique de la dépense en 2009 tout en se laissant la possibilité de procéder à une compensation à l’euro près par le biais d’ajustements à la hausse ou à la baisse d’ici là.

En tout état de cause, cette opération n’induit aucun coût supplémentaire pour l’État au regard du droit à compensation initialement évalué à 644 millions d’euros en 2009 en année pleine.

B.– UNE MAJORATION RÉPARTIE SELON DEUX MODALITÉS

Le versement exceptionnel de 45 millions d’euros en 2010 est composé de deux parts :

– une première part, à hauteur de 8 millions d’euros, versée au titre de 2009 aux départements métropolitains dont le montant du droit à compensation initialement évalué en loi de finances pour 2009 s’avère finalement inférieur à celui correspondant aux dépenses définitivement constatées en 2008.

Cette première part constitue en réalité un ajustement à la hausse de la compensation perçue en 2009 par 34 départements (ceux figurant dans la colonne A du tableau du présent article) dans la mesure où elle était inférieure aux dépenses réellement exécutées en 2008. Il convient toutefois de noter que l’État renonce ainsi à corriger à la baisse la compensation des autres départements qui a pu être supérieure aux dépenses exécutées en 2008, confortant ainsi la trésorerie de ces départements.

– une seconde part, à hauteur de 37 millions d’euros, versée au titre de 2010, au-delà du montant du droit à compensation, à l’ensemble des départements métropolitains (figurant dans la colonne B du tableau), au prorata des charges pesant sur chaque département métropolitain sur la base des données d’exécution 2008.

Ce versement supplémentaire, qui excède donc les obligations légales imposées à l’État en matière de compensation des transferts de charges, est effectué à titre conservatoire, pour ne pas sous-compenser temporairement les départements au titre de la mise en œuvre du RSA. Cette mesure peut donc être assimilée à une anticipation du surcroît de compensation qui pourrait résulter d’une augmentation des dépenses d’insertion des départements en 2010 du fait de la crise et s’avère ainsi très favorable aux départements.

Le III du présent article est un alinéa de coordination.

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* *

La Commission adopte l’article 19 sans modification.

Article 20

Évaluation des prélèvements opérés sur les recettes de l’État au profit des collectivités territoriales

Le présent article a pour objet de fixer le montant du prélèvement sur recettes au profit des collectivités territoriales et de ses différentes composantes. Le prélèvement s’établirait, en 2010, à 84,6 milliards d’euros, contre un révisé 2009 de 56,3 milliards d’euros. Cette forte hausse à périmètre courant s’explique par l’inscription de la compensation relais de la réforme de la taxe professionnelle, qui s’élève à 31,6 milliards d’euros. Parallèlement, cette augmentation est partiellement compensée par la disparition de la mesure de remboursement anticipé de FCTVA, qui entraîne une baisse mécanique du prélèvement de 3,8 milliards d’euros.

À périmètre constant, le montant total du prélèvement sur recettes progresserait de 1,23 % par rapport à la LFI 2009 et de 0,83 % par rapport au révisé. Le tableau suivant explicite les retraitements à opérer pour comprendre l’évolution du prélèvement sur recettes en 2010.

PRÉLÈVEMENT SUR RECETTES AU PROFIT DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES
EN 2009 ET 2010

(en millions d’euros)

 

LFI 2009

Révisé 2009

PLF 2010

Prélèvement sur recettes à périmètre courant

52 249

56 298

84 612

Mesure FCTVA du plan de relance

 

3 841

 

Compensation relais de la réforme de la taxe professionnelle

   

31 558

Mesures de périmètre

   

163

Prélèvement sur recettes à périmètre constant

52 249

+2 %/LFI 2008

52 457

52 891

+1,23 %/LFI

+0,83 %/révisé

I.– UN ACCENT PORTÉ SUR L’INVESTISSEMENT AU DÉTRIMENT DU FONCTIONNEMENT

A.– UNE RÉPARTITION DES DOTATIONS FAVORISANT L’INVESTISSEMENT

Le prélèvement sur recettes constitue un agrégat de prélèvements dont l’évolution est différenciée. Le prélèvement constituant une enveloppe fermée, certaines dotations doivent jouer le rôle de variable d’ajustement pour permettre de porter l’accent sur telle ou telle priorité. Les articles 13, 14 et 16 du présent projet de loi déterminent ainsi l’évolution de la dotation globale de fonctionnement (article 13), des dotations d’investissement (article 14) et des compensations d’exonérations (article 16).

L’analyse de leur progression ou diminution permet de mettre en lumière les priorités que l’État privilégie dans la mise en œuvre des politiques publiques, via les collectivités territoriales.

En 2010, dans le contexte du plan de relance de l’économie, l’investissement serait privilégié. Le prélèvement au profit du FCTVA progresserait de 6 %, à 6,2 milliards d’euros. Seraient indexées à l’inflation (1,2 %) les dotations d’investissement – dotation régionale d’équipement scolaire, dotation départementale d’équipement des collèges et dotation globale de construction et d’équipement scolaire. Au total, un effort supplémentaire de près de 150 millions d’euros par rapport à la LFI 2009 serait fourni en faveur de l’investissement. À noter également que, compte tenu de la crise, il est prévu d’augmenter de 12 %, soit 20 millions d’euros, la dotation de compensation des pertes de bases de taxe professionnelle, en raison de la prévision d’un plus grand nombre d’entreprises en faillite.

L’ajustement permettant de respecter le plafond de l’enveloppe est réalisé aux dépens des exonérations d’impositions locales dont le montant est diminué ou maintenu à leur niveau de 2009 – ce qui revient à les réduire en termes réels.

La dotation globale de fonctionnement (DGF) verrait également sa progression limitée à un niveau inférieur à l’inflation, à + 0,59 % par rapport à la LFI 2009. Cette hausse pourrait paraître faible dans la mesure où cette dotation finance principalement des dépenses de personnel dont la dynamique est liée à celle du niveau général des prix. Toutefois, elle se comprend au regard du décalage entre inflation prévisionnelle et inflation réelle en 2009. La loi de finances pour 2009 avait en effet prévu que la DGF augmenterait selon l’inflation prévisionnelle, soit 2 %. Or, l’inflation réelle s’établirait à 0,4 %, ce qui implique une hausse du montant réel des dotations versées aux collectivités territoriales. En conséquence, le taux d’évolution prévu pour 2010 tend à assurer une croissance davantage en ligne avec l’inflation sur les deux années 2009 et 2010.

Comme le montre le tableau ci-dessous, en dépit de cette faible augmentation en 2010, la dotation globale de fonctionnement resterait plus élevée que si son montant avait été strictement indexé sur l’inflation. Le « gain » réalisé ne serait ainsi repris que partiellement – à hauteur de 40 % – en 2010. Les collectivités territoriales conserveraient un solde d’environ 390 millions d’euros.

ÉVALUATION DU GAIN DE DOTATION GLOBALE DE FONCTIONNEMENT
DÉCOULANT DU DÉCALAGE ENTRE INFLATION PRÉVISIONNELLE ET INFLATION RÉELLE

(en millions d’euros)

 

2009

2010

Dotation globale de fonctionnement prévue en LFI 2009 et PLF 2010

40 855

41 090

Dotation globale de fonctionnement qui aurait résulté de la stricte indexation sur l’inflation

40 216

40 699

Gain retiré par les collectivités territoriales du décalage entre inflation prévisionnelle et inflation réelle

639

391

B.– L’ÉVOLUTION DES CONCOURS AUX COLLECTIVITÉS TERRITORIALES AU SEIN DE LA NORME DE DÉPENSE

Le prélèvement sur recettes constitue la principale composante du périmètre de concours aux collectivités territoriales soumis à la norme de dépenses. Y sont également inclus la quasi-totalité des crédits de la mission Relations avec les collectivités territoriales et la dotation générale de décentralisation compensant le coût des transferts de compétence aux régions en matière de formation professionnelle et inscrite dans la mission Travail et emploi.

L’ensemble de ces crédits de paiement progresserait, de LFI 2009 à LFI 2010, sur un rythme supérieur à l’inflation prévisionnelle – soit 1,3 % contre 1,2 %. En 2010, l’État réalise donc un effort plus important pour les collectivités territoriales que pour ses propres dépenses.

CONCOURS AUX COLLECTIVITÉS TERRITORIALES INSCRITS DANS LE PÉRIMÈTRE
DE LA NORME DE DÉPENSE (CRÉDITS DE PAIEMENT)

(en millions d’euros)

 

LFI 2009

PLF 2010

Prélèvement sur recettes

52 249

52 891*

Crédits de paiement de la mission

Relations avec les collectivités territoriales**

2 356

2 410

Dotations de la mission Travail et emploi

1 686

1 706

Total

56 291

57 007

Évolution

 

1,3 %

* à périmètre constant

** Hors subventions diverses pour travaux d’intérêt général et crédits de fonctionnement de la direction générale des collectivités territoriales

II.– LA NÉCESSITÉ D’UNE MEILLEURE INFORMATION DU PARLEMENT

Dans son rapport sur la loi de finances initiale pour 2009, le Rapporteur général avait suggéré plusieurs évolutions tendant à assurer une meilleure information du Parlement, tant sur la structure du prélèvement que sur l’information relative aux relations financières entre l’État et les collectivités territoriales. Compte tenu des sommes et des enjeux, il paraît en effet légitime que l’administration fournisse les éléments nécessaires à l’évaluation de ces dépenses.

Il pourrait être envisagé d’améliorer la présentation du prélèvement, sur laquelle les parlementaires sont appelés à se prononcer. Plutôt que de le décomposer selon les différentes lignes budgétaires figurant à l’état A annexé au projet de loi, il serait plus explicite de regrouper les prélèvements en fonction de l’objectif qu’ils poursuivent – fonctionnement, investissement, compensations d’exonérations… – ou de leur rôle dans le périmètre global – en précisant notamment les dotations jouant le rôle de variable d’ajustement. À cet égard, il pourrait ne pas être inutile soit de regrouper toutes les variables d’ajustement du périmètre sous un seul prélèvement, soit, à tout le moins, d’isoler sur un prélèvement autonome les compensations d’exonérations jouant ce rôle.

La Commission examine l’amendement I-CF 212 de M. Jérôme Cahuzac.

M. Jean Launay. Il concerne les prélèvements sur recettes au profit des collectivités territoriales.

M. le rapporteur général. Son coût est de 2 milliards d’euros…

La Commission rejette l’amendement I-CF 212.

Elle adopte l’article 20 sans modification.

B.– Autres dispositions

Article 21

Dispositions relatives aux affectations

L’article premier de la loi organique relative aux lois de finances (n° 2001-692 du 1er août 2001) dispose que « dans les conditions et sous les réserves prévues par la présente loi organique, les lois de finances déterminent, pour un exercice, la nature, le montant et l’affectation des ressources et des charges de l’État, ainsi que l’équilibre budgétaire et financier qui en résulte ».

Son article 16 dispose pour sa part que « certaines recettes peuvent être directement affectées à certaines dépenses. Ces affectations prennent la forme de budgets annexes, de comptes spéciaux ou de procédures comptables particulières au sein du budget général, d’un budget annexe ou d’un compte spécial ».

Les affectations de ressources au sein du budget de l’État, autorisées par l’article 16 précité, devant être déterminées pour chaque exercice en application de l’article premier de la loi organique relative aux lois de finances, le présent article propose de les confirmer pour l’année 2010. Cette confirmation doit s’entendre sous réserve des dispositions particulières qui pourraient être prises dans le présent projet de loi de finances.

*

* *

La Commission adopte l’article 21 sans modification.

Article 22

Hausse des tarifs de la taxe de l’aviation civile (TAC)

Le budget annexe Contrôle et exploitation aériens (BACEA) est financé, entre autres recettes, par l’affectation d’une partie du produit de la taxe de l’aviation civile (TAC).

La répartition du produit de cette taxe entre le budget annexe et le budget général est arrêtée en loi de finances. La loi de finances pour 2009 a considérablement accru la part affectée au BACEA, la portant de 53,37 à 82,14 %.

Le présent article propose d’augmenter les différents tarifs de la taxe. Il s’agit de fournir au budget annexe des recettes supplémentaires. Leur volume global a en effet été très affecté par la contraction du trafic aérien, provoquée par la crise économique.

I.– LE DROIT EXISTANT

A.– LA TAXE DE L’AVIATION CIVILE EST L’UNE DES RECETTES DU BUDGET ANNEXE CONTRÔLE ET EXPLOITATION AÉRIENS

● Successeur depuis 2006 du budget annexe de l’aviation civile, le budget annexe Contrôle et exploitation aériens retrace les activités de production de biens ou de prestations de services de la direction générale de l’Aviation civile (DGAC).

Les recettes du budget annexe sont constituées par :

– des redevances, regroupées en deux catégories. Les redevances de navigation aérienne (redevance de route et redevance pour services terminaux de la navigation aérienne) rémunèrent les prestations de l’opérateur de navigation aérienne. Les redevances de surveillance et de certification rémunèrent les prestations de surveillance des opérateurs de l’aviation civile et la délivrance des agréments, autorisations, licences et certificats nécessaires aux opérateurs, personnels, équipements et systèmes ;

– le produit d’emprunts ;

– des recettes diverses (vente d’une production éditoriale, rémunérations de prestations de formation aéronautique, recettes domaniales, rémunérations de services par des instances internationales) ;

– la quotité de la taxe de l’aviation civile qui lui est affectée.

● Créée en 1999 et régie par l’article 302 bis K du code général des impôts, la taxe de l’aviation civile est due par les entreprises de transport aérien public. Elle est assise sur le nombre de passagers et la masse de fret et de courrier embarqués en France.

Le tarif de la taxe est différencié selon la destination et la nature du vol (passage ou fret) :

– 3,92 euros par passager embarqué à destination de la France, d'un autre État membre de la Communauté européenne, d'un autre État partie à l'accord sur l'Espace économique européen, ou de la Confédération suisse ;

– 7,04 euros par passager embarqué vers d'autres destinations ;

– 1,17 euro par tonne de courrier ou de fret embarquée.

La TAC a vocation à financer les dépenses du budget annexe non couvertes par le produit des redevances.

Il convient de noter qu’est prélevée sur la même assiette, au moyen d’une majoration des tarifs, la contribution de solidarité sur les billets d’avion. Cette contribution est perçue au profit du fonds de solidarité pour le développement (70), créé par l’article 22 de la loi de finances rectificative pour 2005 et géré par l’Agence française de développement.

B.– LA QUOTITÉ DE TAXE DE L’AVIATION CIVILE AFFECTÉE AU BUDGET ANNEXE A FORTEMENT AUGMENTÉ

En application du III de l’article 302 bis K du code général des impôts, la loi de finances détermine la répartition du produit de la TAC entre le budget général et le BACEA.

● La loi de finances pour 2006 a substantiellement modifié cette répartition, faisant passer la quotité affectée au budget général de 34,42 à 56,27 %. Cette évolution s’expliquait par l’entrée en vigueur de l’article 18 de la loi organique relative aux lois de finances du 1er août 2001 (LOLF). Disposant que « des budgets annexes peuvent retracer, dans les conditions prévues par une loi de finances, les seules opérations des services de l'État non dotés de la personnalité morale résultant de leur activité de production de biens ou de prestation de services donnant lieu au paiement de redevances, lorsqu'elles sont effectuées à titre principal par lesdits services », cet article semblait alors impliquer le transfert vers le budget général des activités dites « régaliennes » de la DGAC (sécurité des vols et sûreté des passagers, notamment). En effet, la rédaction de l’article 18 de la LOLF paraît plus restrictive, s’agissant du champ des budgets annexes, que celle de l’article 20 de l’ordonnance du 2 janvier 1959 portant loi organique relative aux lois de finances, qui autorisait la création de tels budgets pour retracer « les opérations financières des services de l'État que la loi n'a pas dotés de la personnalité morale et dont l'activité tend essentiellement à produire des biens ou à rendre des services donnant lieu au payement de prix ».

● Depuis 2007, un mouvement inverse s’est opéré, tendant à accroître dans des proportions considérables la part de TAC affectée au BACEA. La loi de finances pour 2007 a abaissé la quotité affectée au budget général à 50,44 % du produit de la taxe. La loi de finances pour 2008 a prévu une nouvelle augmentation, transitoire, de la part affectée au budget annexe : 53,37 % pour les exercices 2008 et 2009 ; 51,47 % pour l’exercice 2010 ; retour, à compter de 2011, à la répartition applicable en 2007.

● L’article 45 de la loi de finances pour 2009 a une nouvelle fois, et de manière encore plus significative, accru la part de TAC affectée au BACEA : 82,14 % en 2009 ; 79,77 % en 2010 ; 77,35 % à compter de 2011, et à titre permanent. Le projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances pour 2009 prévoyait ainsi un montant de TAC affecté au BACEA de 308,6 millions d'euros, en progression de 58,6 % par rapport à 2008. Entre 2006 et 2009, le produit de la taxe reversé au budget annexe a été multiplié par 2,15. En 2009, la TAC représente 17,2 % des recettes de fonctionnement du BACEA, contre 12 % en 2008.

Cette importante modification de la répartition du produit de la TAC s’expliquait par des mesures de périmètre tendant à transférer du budget général vers le budget annexe des dépenses relevant du « cœur de métier » de la DGAC afin, selon le Gouvernement, « de renforcer la cohésion et l’efficacité opérationnelle de l’action de l’État en matière d’aviation civile et d’offrir une meilleure lisibilité externe, tant auprès des parlementaires que des usagers du transport aérien, en particulier les compagnies aériennes ». Ce sont 108,1 millions d'euros qui ont été ainsi transférés vers le budget annexe (71).

II.– L’AUGMENTATION DES TARIFS DE LA TAXE DE L’AVIATION CIVILE : ACCROÎTRE LES RECETTES DU BUDGET ANNEXE

● Le présent article propose une augmentation des différents tarifs de la taxe de l’aviation civile (II de l’article 302 bis K du code général des impôts) :

– 4,11 euros par passager embarqué à destination de la France, d'un autre État membre de la Communauté européenne, d'un autre État partie à l'accord sur l'Espace économique européen, ou de la Confédération suisse (+ 4,85 %) ;

– 7,38 euros par passager embarqué vers d'autres destinations (+ 4,83 %) ;

– 1,23 euro par tonne de courrier ou de fret embarquée (+ 5,13 %).

Présentée comme uniforme à hauteur de 4,9 %, la hausse des tarifs proposée est donc, en réalité, légèrement différenciée selon le tarif concerné.

Il faut préciser que, depuis 2006, les tarifs de la TAC n’ont pas été révisés. Cette stabilité était permise par le dynamisme du trafic aérien, aujourd’hui frappé de plein fouet par la crise économique.

● L’augmentation des tarifs de la TAC a pour objet de fournir au BACEA des recettes supplémentaires. Selon le Gouvernement, les recettes prévisionnelles pour l’année 2010 devraient être inférieures de 260 millions d'euros au montant arrêté dans la programmation triennale 2009-2011. Cela résulte de la forte contraction du trafic aérien, conséquence de la crise économique. Selon l’International Air Transport Association (IATA), le trafic mondial de juin 2009 (exprimé en passager-kilomètre transporté) est en recul de 7,2 % en glissement annuel. Pour l’ensemble de l’année 2009, la baisse devrait atteindre 7,6 %. L’hypothèse retenue pour la construction du budget annexe est une baisse de 7 % du trafic en 2009, avant une remontée (+ 1,5 %) en 2010.

L’augmentation des tarifs de la TAC devrait générer une recette globale de 15,9 millions d'euros. En application de la clé de répartition arrêtée en loi de finances pour 2009, le budget général devrait percevoir 3,2 millions d'euros et le budget annexe 12,7 millions d'euros.

● Selon le Gouvernement, une série de mesures complémentaires devrait permettre de compenser les conséquences, pour le budget annexe, de la contraction du trafic :

– un plan d’économies, essentiellement sur les postes de fonctionnement de la DGAC (40 millions d'euros) ;

– une augmentation de 4,9 % des taux des redevances de navigation aérienne (61 millions d'euros) ;

– un relèvement de l’autorisation d’emprunt accordée au budget annexe (135 millions d'euros).

La baisse des recettes par rapport aux prévisions élaborées fin 2008 ne serait donc pas totalement compensée, puisque le montant cumulé de ces diverses mesures est de 248,7 millions d'euros.

● L’augmentation des tarifs de la TAC, comme celle des redevances, pèsera sur les compagnies aériennes qui, vraisemblablement, répercuteront cette augmentation sur le prix du billet payé par les voyageurs. Le Gouvernement estime que l’augmentation ne devrait pas modifier significativement le comportement des usagers du transport aérien. Il faut en effet veiller à ne pas affecter excessivement l’activité des compagnies aériennes, qui, pour la plupart d’entre elles, voient leurs résultats dégradés par la crise économique.

*

* *

La Commission adopte l’article 22 sans modification.

Article 23

Modification de la part du produit du droit de timbre sur les passeports affectée à l’Agence nationale des titres sécurisés (ANTS)

L’Agence nationale des titres sécurisés (ANTS) est un établissement public administratif créé par le décret n° 2007-240 du 22 février 2007. Elle a pour mission de répondre aux besoins des administrations de l’État en matière de titres sécurisés. L’ANTS est notamment chargée d’élaborer et d’assurer le suivi des moyens nécessaires à la fabrication et à la lecture des titres sécurisés de l’État. Ces titres sont des documents délivrés par l’État, faisant l’objet d’une procédure d’édition et de contrôle sécurisée (certificats d’immatriculation et passeports).

Un droit de timbre prévu à l’article 953 du code général des impôts est perçu pour la délivrance d’un passeport. Une taxe est perçue pour la délivrance de titres assimilés (titres de voyage délivrés aux réfugiés ou apatrides, et sauf-conduits délivrés aux étrangers titulaires d’un titre de séjour).

L’article 46 de la loi de finances pour 2007 a prévu d’affecter 70 % du produit de ces droits et taxes à l’ANTS, dans la limite d’un plafond. Ce plafond, initialement fixé à 45 millions d’euros par la loi de finances pour 2007, a été porté successivement à 47,5 puis 131 millions d’euros par les lois de finances pour 2008 et pour 2009.

Le besoin de financement de l’ANTS est estimé pour 2010 à un montant inférieur de 23,5 millions d’euros au montant fixé pour 2009. Cette différence résulte d’une diminution des dépenses d’investissement relatives à la mise en œuvre du marché des « titres électroniques sécurisés ».

Afin de mettre en adéquation le montant des droits et taxes affecté à l’ANTS avec les besoins de financement de celle-ci, le présent article propose de porter le plafond d’affectation de 131 à 107,5 millions d’euros.

*

* *

La Commission adopte l’article 23 sans modification.

Article 24

Affectation au Fonds démonstrateurs de recherche des remboursements des avances du Réseau de recherche sur les technologies pétrolières et gazières (RTPG)

Le présent article prévoit une affectation de recettes à l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME), pour un montant cumulé de 30 millions d’euros entre 2010 et 2012. Ces recettes sont des remboursements d’avances attribuées par le Réseau de recherche sur les technologies pétrolières et gazières (RTPG), qui alimentent actuellement le budget général de l’État. Leur affectation à l’ADEME vise à alimenter un fonds de soutien à la recherche sur les nouvelles technologies de l’énergie.

Rappelons que l’article 36 de la loi organique relative aux lois de finances dispose que « l’affectation, totale ou partielle, à une autre personne morale d’une ressource établie au profit de l’État ne peut résulter que d’une disposition de loi de finances ».

I.– LE PRÉSENT ARTICLE PERMET LA MISE EN œUVRE D’UN ENGAGEMENT PRIS DANS LE CADRE DU GRENELLE DE L’ENVIRONNEMENT

● Dans le cadre du Grenelle de l’environnement, l’État s’est engagé à accroître son effort en faveur de la recherche sur le développement durable d’un milliard d’euros sur la période 2008-2012. Ce montant comprend notamment une enveloppe de 400 millions d’euros destinés à un fonds de soutien à la recherche sur les nouvelles technologies de l’énergie, créé en 2008 et géré par l’ADEME.

Ce fonds est destiné à la mise au point de démonstrateurs. Ceux-ci permettent la mise en œuvre expérimentale d’une technologie à une échelle proche de l’échelle industrielle, après appel à manifestation d’intérêt (AMI) lancé par l’ADEME (72). Le fonds alimente donc un vivier de nouvelles technologies en voie d’application.

Le transfert de recettes de 30 millions d’euros, prévu dans le présent article, contribue à financer l’enveloppe de 400 millions d’euros mentionnée ci-dessus, le reste du budget du fonds provenant de dotations de l’ADEME et de l’État. Pour mémoire, la possibilité d’un soutien financier aux démonstrateurs de nouvelles technologies de l’énergie est prévue par le cinquième alinéa du II de l’article 19 de la loi dite « Grenelle I » (73).

● Les recettes transférées sont des remboursements d’avances versées par le Réseau de recherche sur les technologies pétrolières et gazières (RTPG) à des entreprises ou organismes de recherche pour financer des travaux de recherche dans le domaine des hydrocarbures. La procédure requérait la signature de lettres de notification accompagnées des conditions générales d’octroi de l’aide remboursable.

Le RTPG, géré par l’État, est en extinction depuis 2006, aucune avance n’ayant été concédée depuis cette date. Il reste néanmoins un encours d’avances d’un montant de 110 millions d’euros car, s’il y a lieu de procéder au remboursement, celui-ci n’est effectué qu’une fois les travaux réalisés et parfois de manière fractionnée. L’administration évalue à 30 millions d’euros le montant des remboursements entre 2010 et 2012.

II.– L’ÉVALUATION DU MONTANT DES RECETTES TRANSFÉRÉES EST INCERTAINE

Le talon d’Achille du dispositif proposé pourrait se trouver dans l’évaluation du montant des recettes transférées – 30 millions d’euros sur la période 2010/2012. Deux incertitudes pèsent en effet sur cette estimation.

● D’une part, le montant total des remboursements futurs est incertain. Compte tenu de l’encours restant de 110 millions d’euros et d’un taux moyen de remboursement constaté de 30 %, on peut anticiper que le remboursement des avances s’établisse à 33 millions d’euros, soit un niveau très proche des 30 millions d’euros prévus.

Toutefois, le fait générateur du remboursement est très aléatoire, celui-ci n’ayant lieu qu’à la condition que la technologie subventionnée trouve une application. Il est donc possible qu’en cas de nombreux échecs ou de nombreuses réussites, le montant total des remboursements oscille sensiblement. En d’autres termes, les valeurs extrêmes sont importantes, ce qui diminue le caractère prédictif de la moyenne utilisée pour évaluer la dotation. Par ailleurs, 12 % de l’encours ont été attribués avant l’année 2000. Il existe donc des doutes importants quant à la possibilité de voir ces avances vieilles de plus de 10 ans remboursées un jour, d’autant que celles ayant une maturité supérieure à 20 ans sont passées par pertes et profits.

S’il est très difficile de prédire si et quand un remboursement aura lieu, il est également malaisé de savoir quel sera son montant exact. En effet, celui-ci ne correspond pas au montant de l’avance versée mais est fonction de l’avantage retiré par le bénéficiaire de la nouvelle technologie.

Du fait de l’ensemble de ces éléments, il paraît donc difficile d’estimer précisément le montant des recettes transférées.

● D’autre part, ce transfert de recettes s’inscrit dans un plan de financement couvrant la période allant jusqu’à 2012. Or, le rythme de remboursement des avances est impossible à prévoir et il n’est pas impossible que la perception de ces recettes soit étalée au-delà de 2012. En moyenne, environ 10,7 millions d’euros sont remboursés chaque année, ce qui valide la prévision de 30 millions d’euros sur la période 2010/2012. Toutefois, il n’est pas impossible que, du fait du caractère aléatoire du fait générateur du remboursement, l’échéancier de remboursements ne dépasse l’horizon de 2012, ce qui, toutes choses égales par ailleurs, réduirait les ressources du fonds « démonstrateurs » sur cette période.

Au final, si l’administration paraît avoir correctement évalué le montant des recettes transférées compte tenu des éléments à sa disposition, on ne peut exclure que le montant ou le rythme des remboursements s’éloignent des moyennes constatées, sur lesquelles se fondent l’estimation. Une telle hypothèse conduirait à une recette inférieure aux prévisions ou à l’étalement de son versement sur une période supérieure à 3 ans, ce qui contribuerait à éroder les ressources du fonds « démonstrateurs ». Le cas inverse – des recettes supérieures à la prévision, rapidement versées – semble plus improbable du fait de l’ancienneté de nombreuses avances.

Parce qu’ils sont intégrés dans la norme de dépense, les transferts de recettes ne présentaient pas d’avantage particulier par rapport à la dotation budgétaire. Celle-ci aurait pourtant permis d’attribuer au fonds « démonstrateurs » des ressources plus sûres et plus régulières.

*

* *

La Commission adopte l’article 24 sans modification.

Article 25

Mesures relatives au compte de concours financiers
« Avances à l’audiovisuel »

Le compte de concours financiers Avances à l’audiovisuel public accorde des avances aux organismes de l’audiovisuel public et perçoit des recettes constituées, d’une part, par les encaissements de redevance audiovisuelle nets des frais de trésorerie et de recouvrement et, d’autre part, par une dotation correspondant au montant des dégrèvements de redevance audiovisuelle pris en charge par le budget général.

La loi de finances pour 2006 a prévu un mécanisme dit de double garantie. Il permet de fixer le niveau minimal des ressources affectées aux organismes de l’audiovisuel public et plafonne le montant maximal des dégrèvements pris en charge par le budget général. Ce dispositif a pour objectif de protéger à la fois les intérêts financiers du secteur audiovisuel public et ceux de l’État.

Chaque année, les montants de ces deux garanties sont actualisés en loi de finances initiale. C’est l’objet du présent article. Par ailleurs, l’article 29 de la loi n° 2009-258 du 5 mars 2009 relative à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision ayant changé la dénomination de la redevance audiovisuelle en « contribution à l’audiovisuel public », le présent article assure la coordination avec l’article 46 de la loi de finances pour 2006.

A.– L’ACTUALISATION DE LA GARANTIE DE RESSOURCE ACCORDÉE AUX ORGANISMES DE L’AUDIOVISUEL PUBLIC

Le 3 du VI de l’article 46 de la loi de finances pour 2006 (74) fixe un montant plancher de redevance audiovisuelle, que l’État s’engage à verser aux organismes de l’audiovisuel public. Ce dispositif permet de garantir le niveau des ressources accordées aux organismes de l’audiovisuel public malgré d’éventuelles variations des encaissements nets de redevance audiovisuelle – qui pourraient être notamment dues à l’accroissement du nombre de contribuables dégrevés. Sur le plan de la technique budgétaire, l’activation de cette garantie conduirait à une majoration à due concurrence de la dotation de l’État au titre des dégrèvements. Le montant de la garantie est revalorisé chaque année en loi de finances.

Depuis la création du compte, cette garantie n’a été mise en œuvre qu’une seule fois, en 2006, avec une dotation complémentaire de l’État de 65 millions d’euros.

Après un montant de 2 451,7 millions d’euros en 2009, le troisième alinéa du présent article prévoit un plancher d’encaissements nets de redevance à 2 561 millions d’euros pour 2010, soit une hausse de 4,5 % (et près de 110 millions d’euros).

B.– L’ACTUALISATION DU PLAFONNEMENT DES DÉGRÈVEMENTS DE REDEVANCE AUDIOVISUELLE PRIS EN CHARGE PAR L’ÉTAT

Le 1 du VI de l’article 46 de la loi de finances pour 2006 plafonne le montant des dégrèvements de redevance audiovisuelle pris en charge par le budget général de l'État. Ce dispositif vise à limiter le coût supporté par l’État du fait des dégrèvements de redevance audiovisuelle. Si ce plafond était dépassé, les organismes de l’audiovisuel public participeraient donc indirectement au financement des dégrèvements de redevance. Ce plafond est revalorisé chaque année.

Le niveau de ce plafond a été fixé à 546 millions d’euros pour 2009. Le deuxième alinéa du présent article propose de l’établir à 561,8 millions d’euros en 2010, soit une hausse de 2,9 %.

C.– LE MONTANT DES RESSOURCES PRÉVUES POUR L’AUDIOVISUEL PUBLIC

Le montant des ressources garanties aux organismes bénéficiaires des avances du compte de concours financiers est la somme des encaissements de contribution à l’audiovisuel public, nets des frais de trésorerie et de recouvrement, et de la dotation correspondant au montant des dégrèvements de redevance audiovisuelle.

Il passerait donc de 2 997,7 millions d’euros en 2009 à 3 122,8 millions d’euros en 2010, soit une progression de 4,2 % (et de 125 millions d’euros). Ce taux de croissance des montants de ressources garanties par l’État s’accélère donc légèrement, après 3,7 % en 2009 et 3,6 % en 2008.

RESSOURCES PUBLIQUES DU SERVICE PUBLIC DE L’AUDIOVISUEL EN 2008, 2009 ET 2010

(en millions d'euros)

 

LFR 2008

LFI 2009

PLF 2010

Encaissements nets garantis de redevance audiovisuelle

2 329

2 451,7

2 561

Plafond des dégrèvements de redevance pris en charge par le budget général de l’État

561,7

546

561,8

Ressources publiques allouées aux organismes de l’audiovisuel public à partir du compte de concours financiers « Avances à l’audiovisuel public »

2 890,7

2 997,7

3 122,8

La répartition de ces ressources entre les différents organismes de l’audiovisuel public (France Télévisions, ARTE, Radio France…) est indiquée dans le projet annuel de performance relatif au compte de concours financiers Avances à l’audiovisuel public.

À noter que le montant garanti de redevance et celui du plafond de dégrèvements sont respectivement 2 451,7 et 546 millions d’euros en 2009, et non 2 329 et 561,7 millions d’euros comme la rédaction du présent article le laisse penser. Ces deux derniers chiffres sont ceux de 2008, tels que modifiés par la seconde loi de finances rectificative pour 2008 (75), et non ceux de 2009. Suite à une erreur d’édition juridique, la disposition prévue par ce second collectif budgétaire pour 2008, entré en vigueur après la loi de finances initiale pour 2009, a modifié les dispositions prévues par celle-ci (76). En conséquence, la modification prévue pour 2008 s’est, par erreur, appliquée à l’année 2009. C’est pourquoi le présent article vise ces chiffres destinés à l’année 2008, et non ceux prévus en loi de finances initiale pour 2009.

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La Commission adopte l’article 25 sans modification.

Article 26

Prorogation de dégrèvement de contribution à l’audiovisuel public

Le présent article a pour objet de prolonger d’un an les dégrèvements de redevance audiovisuelle – devenue « contribution à l’audiovisuel public » – établis en 2005 au profit de certains « perdants » de la réforme de cette imposition. Ce dispositif devait s’éteindre au 31 décembre 2007 mais il a déjà été prolongé deux fois, pour les années 2008 et 2009, et le serait donc une troisième fois, en 2010, aux termes du présent article.

I.– LE RÉGIME DES « DROITS ACQUIS » : PROTÉGER CERTAINS PERDANTS DE LA RÉFORME DE 2005

La réforme de la redevance audiovisuelle, réalisée en 2005, a conduit à l’alignement du régime de celle-ci sur le régime de la taxe d’habitation. Mais de fait, certaines personnes assujetties à la taxe d’habitation et précédemment exonérées de redevance audiovisuelle se trouvèrent redevables de cette dernière. Le législateur décida alors de maintenir provisoirement ces « droits acquis » pour les personnes âgées ou infirmes disposant de faibles revenus. La fin de ce régime de transition était prévue au 31 décembre 2007.

Par application du 3° de l’article 1605 bis du code général des impôts (CGI), les redevables de la redevance non dégrevés au titre du droit commun, désormais aligné sur le régime de la taxe d’habitation, ont donc pu bénéficier des « droits acquis », sous réserve de satisfaire aux conditions suivantes :

– être âgé d’au moins 65 ans au 1er janvier 2004, non imposable à l’impôt sur le revenu pour les revenus perçus au titre de l’année précédant celle au cours de laquelle la redevance est due, non redevable de l’impôt de solidarité sur la fortune au titre de la même année, et ne pas habiter avec des personnes imposables à l’impôt sur le revenu ;

– être mutilé, invalide civil ou militaire, ou atteint d’une invalidité ou d’une infirmité d’au moins 80 %, avec un revenu fiscal de référence pour les revenus perçus au titre de l’année précédant celle au cours de laquelle la redevance est due n’excédant pas le seuil défini au I de l’article 1417 du CGI (soit 9 837 euros annuels, plus 2 627 euros par demi-part supplémentaire), et non redevable de l’impôt de solidarité sur la fortune au titre de la même année. Par tolérance administrative, les personnes redevables de taxe d’habitation qui hébergent une personne infirme peuvent bénéficier de l’exonération de redevance audiovisuelle.

La réforme de 2005 s’est donc accompagnée de la mise en place d’un dispositif transitoire de maintien des « droits acquis » pour les années 2005, 2006 et 2007.

II.– LE RÉGIME DES « DROITS ACQUIS » : UN PROVISOIRE QUI DURE

Si la disparition des « droits acquis » était une conséquence logique de l’alignement des dégrèvements de redevance audiovisuelle sur les exonérations de taxe d’habitation, et ceci pour plus de clarté et d’équité, le législateur a néanmoins considéré préférable de prolonger ces « droits acquis » pour 2008 et 2009 en votant les dispositions suivantes :

– l’article 142 de la loi de finances pour 2008 pérennise le dégrèvement de redevance pour la part la plus fragile des contribuables concernés, à savoir certains mutilés, invalides ou infirmes, sous réserve de satisfaire aux conditions requises (soit 22 612 foyers en 2007) ;

– l’article 29 de la loi de finances rectificative pour 2007 ménageait une sortie du dispositif moins rapide pour les personnes âgées, en maintenant pour la seule année 2008 un dégrèvement de 50 % de la redevance audiovisuelle en faveur des personnes âgées de plus de 65 ans au 1er janvier 2004 (soit 724 898 foyers en 2007). Cependant, ce dégrèvement partiel a ultérieurement été transformé en dégrèvement total par l’article 8 de la loi n° 2008–111 du 8 février 2008 relative au pouvoir d’achat ;

– en loi de finances pour 2009, à l’initiative de M. Patrice Martin-Lalande, le dégrèvement au profit des personnes âgées a été reconduit pour l’année 2009.

Le présent article vise à prolonger le dispositif de dégrèvement de redevance audiovisuelle au profit des personnes âgées à faibles revenus pour une année supplémentaire.

Le coût de cette mesure est évalué à 56 millions d’euros. Le nombre de bénéficiaires est estimé à 469 000 foyers en 2010, ce qui suppose la poursuite de la baisse annuelle de 15 % constatée depuis 2005. Le coût moyen par bénéficiaire serait de l’ordre de 120,1 euros par foyer, ce qui correspond à une moyenne pondérée entre le montant de la redevance en métropole (121 euros) et celui en vigueur dans les départements d’outre-mer (75 euros).

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La Commission adopte l’article 26 sans modification.

Article 27

Neutralisation des conséquences financières entre les régimes de retraite concernés du transfert de fonctionnaires dans le cadre de la décentralisation

Le présent article propose l’application à compter de 2010 d’un nouveau dispositif de compensation des déséquilibres induits par l’affiliation à la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL) des agents de l’État transférés aux collectivités territoriales, en vertu de la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et aux responsabilités locales.

Cette dernière a programmé trois séries de transferts : les transferts de compétences, les transferts de services et les transferts d'emplois.

Ces mesures déclinent le principe énoncé à l’article 7 de la loi du 28 mars 2003 relative à l’organisation déconcentrée de la République selon lequel tout transfert de compétences doit s’accompagner de l’attribution des moyens qui leur étaient consacrés par l’État.

Les transferts de compétences réalisés se sont donc accompagnés du transfert de 130 000 agents de l’État aux collectivités territoriales, comprenant 95 000 techniciens, ouvriers et agents de services (TOS) des établissements scolaires du second degré et 35 000 agents de l’équipement. En 2009, ont été transférés la dernière tranche des agents TOS concernés et les personnels des directions départementales de l’équipement s’occupant de l’entretien des routes.

La parution au Journal officiel du 21 août 2008 du décret en Conseil d'État fixant les transferts définitifs des services (décret n° 2008-791 du 20 août 2008) ouvre le délai de deux ans dont disposent ces fonctionnaires de l’État, en application de l’article 109 de loi du 13 août 2004, pour opter, soit pour une intégration au sein de la fonction publique territoriale (FPT), soit pour le maintien de leur statut de fonctionnaire d’État (dans le cadre d’un détachement sans limitation de durée).

Le choix de l’intégration dans la fonction publique territoriale entraîne, conformément à l’article 108 de la loi du 13 août 2004, l’affiliation des agents concernés au régime spécial de la CNRACL, qui ne devient définitive qu’après titularisation. Le principe d’interpénétration des carrières est ainsi respecté. Par ailleurs, ils bénéficient d’une pension rémunérant les services effectifs accomplis, y compris pour l’État, antérieurement à l’intégration.

Le montant des charges transférées en matière de pension est estimé à un total de huit à dix milliards d’euros.

En absence de toute mesure correctrice, l’affiliation à la CNRACL priverait l’État des cotisations qui couvraient le versement des pensions d’agents déjà retraités. Cependant, il n’aurait plus à assumer le versement des futures pensions des agents intégrés. Au contraire, la CNRACL encaisserait les cotisations de ses nouveaux affiliés, mais devrait à terme payer les charges grandissantes des pensions afférentes. L’équilibre financier des deux régimes de retraite serait ainsi déstabilisé.

Ce constat a justifié les deux précédentes modifications de la dernière phrase de l’article 108 de la loi du 13 août 2004.

En effet, la première, introduite par voie d’amendement à l’Assemblée nationale lors de l’examen de cette loi, prévoyait que le Gouvernement remettrait, avant le 2 octobre de chaque année, un rapport évaluant les conséquences de l’affiliation à la CNRACL des agents de l’État transférés ayant opté pour l’intégration dans la fonction publique territoriale. La seconde, présentée par la loi du 5 mars 2007 instituant un droit au logement imposable, propose de compenser intégralement les charges assurées pour le compte de l’État par la CNRACL en lui affectant une fraction de la taxe sur la valeur ajoutée dans les conditions fixées par une loi de finances.

Cette dernière mesure n’a pas été appliquée puisque la Caisse de retraite bénéficie de davantage de cotisations salariales et patronales au titre des agents intégrés, tandis que l’État conserve à sa charge les pensions déjà liquidées afférentes au même groupe d’agents. En conséquence, l’État connaît, pour le moment, une perte de ressources importante que le dispositif en vigueur ne permet pas de compenser.

Face à cette situation, il s’agit de mettre en oeuvre une nouvelle mesure permettant de neutraliser les conséquences financières des transferts de personnels tant pour le budget de la CNRACL, que pour le compte « Pensions » du budget de l’État.

Le projet de loi modifie à nouveau l’article 108 en ce sens. Il dispose que les cotisations perçues par la CNRACL du fait des transferts de personnels sont reversées à l’État. En contrepartie, celui-ci rembourse à la Caisse les pensions versées aux agents intégrés, ainsi que les charges supplémentaires afférentes, dues au titre de l’article L. 314-1 du code de la sécurité sociale (relatif aux mécanismes de compensation des différents régimes de sécurité sociale, dont les régimes spéciaux d’assurance vieillesse).

Il s’agit pour l’État de neutraliser l’impact de la décentralisation pour la CNRACL sur le montant des compensations démographiques « vieillesse » prévues par ce dernier article. La compensation porte notamment sur l’ensemble des charges de l'assurance vieillesse.

Cette mesure assure le respect du principe de répartition selon lequel la solidarité nationale s’exprime notamment entre individus d’une même génération, mais de catégories socioprofessionnelles différentes, par le biais du mécanisme de compensation entre les régimes d’assurance vieillesse.

Les dispositions de l’article 51 de la loi du 30 décembre 2005 de finances pour 2006 relatives au compte d’affectation spécial « Pensions », lui-même prévu à l’article 21 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances, sont modifiées afin de prendre en compte le nouveau mécanisme de compensation.

Il est ainsi prévu que les versements de la CNRACL, effectués en application de la nouvelle version de l’article 108, viennent en recettes du compte d’affectation spéciale « Pensions ». Parallèlement, viendraient en dépenses les versements de l’État à la Caisse correspondant au montant brut des pensions et autres charges afférentes.

L’article prévoit que les modalités de mise en œuvre de ce reversement et de ce remboursement sont précisées par un décret pris après avis du conseil d’administration de la CNRACL.

Par ailleurs, le dispositif est neutre pour les affiliés puisque les taux des cotisations patronales et salariales, ainsi que les modalités de liquidation de la pension restent ceux pratiqués par la CNRACL.

Pour mémoire, cette mesure avait été pour partie développée dans le cadre de la proposition de loi du 28 juillet 2009 déposée au Sénat portant diverses dispositions relatives au financement des régimes d’assurance vieillesse des fonctions publiques hospitalière et territoriale. Elle est de nouveau codifiée par le présent article à la demande de la CNRACL.

Dans le cadre de la rédaction proposée, le dispositif sera dans un premier temps défavorable à cette dernière qui reversera un montant de cotisations supérieur au montant du remboursement des prestations retraite opéré par l’État. Toutefois, un point d’équilibre devrait être atteint en 2015 du fait de la progression des départs en retraite des agents concernés.

Le rendement estimé de la mesure pour le budget de l’État est de 434 millions d’euros en 2010. Il devrait diminuer, puis devenir structurellement négatif du fait de l’inversion des flux à moyen terme.

Les dispositions du présent article entrent en vigueur le 1er janvier 2010. Elles cessent d’être appliquées au décès du dernier agent ayant été décentralisé, et au décès de ses ayants cause éventuels.

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La Commission adopte l’article 27 sans modification.

Article 28

Modification du périmètre des recettes et des dépenses du compte d’affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l’État »

Le présent article propose deux modifications techniques aux règles régissant le fonctionnement du compte d’affectation spéciale (CAS) Gestion du patrimoine immobilier de l’État. Leur non adoption présenterait le double inconvénient, d’une part, d’empêcher le pilotage par le CAS de certaines opérations immobilières et, d’autre part, de fragiliser juridiquement les opérations qui auraient quand même été comptabilisées sur le CAS, en violation des règles le régissant, comme l’a relevé la Cour des comptes dans sa note d’exécution budgétaire de mai 2009 sur l’exercice 2008.

Rappelons que ce CAS a été créé par la loi de finances initiale pour 2006 pour permettre l’affectation des recettes des cessions immobilières aux dépenses immobilières des ministères. Un mécanisme de « retour » des produits des cessions aux ministères existait déjà dans une circulaire « Cresson » de 1992, mais n’avait jamais été réellement appliqué.

Après un montant annuel de cessions inférieur à 100 millions d’euros jusqu’en 2004, les cessions ont été de 634 millions d’euros en 2005, de 798 millions d’euros en 2006, de 820 millions d’euros en 2007 et de 397 millions d’euros en 2008, en raison du retournement du marché. La création du CAS a permis d’instaurer un mécanisme budgétaire qui assure aux ministères le « retour » de 85 % du produit des cessions en règle générale. Certains ministères (Défense, Équipement, Affaires étrangères) ont un régime dérogatoire assurant un « retour » de 95 % ou 100 %. 15 % du produit des cessions est affecté au désendettement. Depuis la loi de finances initiale pour 2009, le « retour » de 85 % est scindé en 65 % pour le ministère cessionnaire et 20 % mutualisé entre tous les ministères.

Le CAS a constitué un outil de transparence pour le Parlement, dans la mesure où toutes les cessions et toutes les dépenses immobilières y sont maintenant consignées. Il s’agissait de ne pas renouveler les errements intervenus précédemment où, dans leurs opérations immobilières de réimplantation, certains ministères dépensaient plus qu’ils ne recevaient des produits des cessions.

Les règles de fonctionnement du CAS ont déjà été modifiées deux fois dans les lois de finances initiales pour 2007 et 2009. Dans cette dernière modification, adoptée à la suite d’un amendement sénatorial, il s’agissait de donner un caractère législatif au pourcentage de 15 % affecté au désendettement de l’État et de borner dans le temps les régimes dérogatoires au « retour » aux ministères des produits des cessions.

a) L’extension du CAS au produit des droits immobiliers attachés

Le présent article propose d’abord d’élargir le produit de ce compte de la cession du bien proprement dit aux droits à caractère immobilier attachés à ces biens : redevances, loyers, produits de droits réels, etc.

Cette proposition de modification va dans le bon sens en ce qu’elle permet de verser au CAS les produits de ces droits immobiliers attachés. Ainsi le ministère de la Défense a-t-il récemment cédé l’immeuble de la caserne d’Istres, sur la toiture duquel se trouvent des panneaux photovoltaïques. En l’état actuel des règles, seul le produit de la cession de l’immeuble peut être versé sur le CAS, le produit des droits attachés ne pouvant être versé qu’en tant que recette non fiscale. Un autre cas couvert par la modification proposée concerne les immeubles ayant une certaine valeur historique dont l’État considère n’avoir plus l’usage sans pour autant souhaiter en abandonner la pleine propriété. On peut encore citer le cas de biens immobiliers sur lesquels des droits réels sont cédés à des tiers, afin d’en améliorer la gestion et la rentabilité (par exemple des logements).

b) L’extension du CAS aux dépenses immobilières sur les immeubles des opérateurs ou dont l’État n’est pas propriétaire

Le présent article propose ensuite de rendre éligibles les dépenses financées sur le CAS aux opérations réalisées sur des immeubles dont l’État n’a pas la propriété mais figurant à l’actif de son bilan et sur des immeubles du domaine de l’État mais occupés par des opérateurs de l’État.

Le premier cas vise en particulier les nombreux services déconcentrés de l’État (préfectures…) souvent logés depuis des décennies dans des immeubles appartenant à des collectivités locales. Il en résulte souvent un défaut d’entretien préjudiciable aux administrés, aux fonctionnaires et – in fine – aux finances publiques, dans la mesure où un entretien préventif régulier est moins coûteux sur le long terme que des grosses réparations ponctuelles. Il serait ainsi possible de financer des travaux sur des biens dont l’État n’est pas propriétaire mais qu’il contrôle.

Le second cas vise à permettre d’enregistrer sur le CAS des opérations immobilières portant sur des biens appartenant à l’État et à ses opérateurs, permettant ainsi un pilotage budgétaire global de l’ensemble de ces opérations. Il en est ainsi par exemple de la réimplantation du ministère de l’Agriculture sur le site de Picpus. Il deviendrait ainsi possible de financer des travaux réalisés sur un bâtiment propriété de l’État et remis en dotation à un opérateur.

L’extension du périmètre des dépenses immobilières éligibles est dans les deux cas utile.

c) La conformité des règles actuelles du CAS à la nouvelle politique immobilière de l’État

Si le « retour » aux ministères de la plus grande partie des produits des cessions immobilières était justifié dans les premières années de la réforme, pour lancer le mouvement avec un parc largement surdimensionné, ce mécanisme n’est maintenant plus adapté. Depuis le décret du Premier ministre du 1er décembre 2008, le régime de l’affectation des biens immobiliers aux ministères a été supprimé ; il est remplacé par des conventions d’utilisation, sur le modèle des baux commerciaux. Cette évolution du droit domanial répond au souci de distinguer les fonctions de propriétaire (l’État, représenté par le ministre du Budget et le service France Domaine) et d’occupant (les ministères et leurs opérateurs).

MM. Georges Tron, Président du Conseil de l’immobilier de l’État, et Yves Deniaud, Rapporteur spécial sur le CAS Gestion du patrimoine immobilier de l’État, ont plaidé à plusieurs reprises pour la disparition du mécanisme de « retour » aux ministères, afin de mutualiser l’ensemble des recettes des cessions (77). Le service France Domaine, incarnation de l’État propriétaire, pourrait ainsi jouer son rôle et piloter les opérations immobilières des ministères. Au lieu de cela, le maintien de la règle de « retour » aux ministères, même réduite à 65 %, maintient ces derniers dans une attitude de quasi-propriétaire en les laissant maîtres de leurs budgets d’investissement. Certes le service France Domaine examine la conformité des opérations projetées par les ministères aux orientations de la nouvelle politique immobilière de l’État, en regardant notamment la performance immobilière de ces opérations. Mais de fait ce contrôle est en grande partie virtuel, quand ce sont les ministères qui effectuent directement l’étude de projet et quand ils disposent du financement sur l’un des seize budgets opérationnels de programme (BOP) ministériels du CAS.

Au-delà des améliorations techniques réelles apportées par le présent article aux règles du CAS, il y a donc lieu de réfléchir à une modification plus profonde de ces règles, permettant que soit réellement remplie la fonction d’État propriétaire.

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La Commission adopte l’article 28 sans modification.

Article 29

Autorisation de cession de l’usufruit de tout ou partie des systèmes de communication militaires par satellites et élargissement du périmètre du compte d'affectation spéciale « Gestion et valorisation des ressources tirées de l'utilisation du spectre hertzien »

Sur le fondement de l’article 21 de la LOLF qui autorise la création de comptes d’affectation spéciale (CAS), le Gouvernement a créé, dans la loi n° 2008-1425 du 27 décembre 2008 de finances pour 2009, un CAS intitulé « Gestion et valorisation des ressources tirées de l’utilisation du spectre hertzien ». Ce compte a pour objet d’affecter le produit des redevances d’utilisation des bandes de fréquences libérées par les ministères affectataires au financement d’investissements dans le domaine des télécommunications. Ce sont les règles de fonctionnement de ce compte que le présent article se propose de modifier.

I.– UN COMPTE SPÉCIAL D’AFFECTATION CRÉÉ EN 2009 POUR TIRER LES BÉNÉFICES DU DIVIDENDE NUMÉRIQUE

A.– LE PASSAGE À LA TÉLÉVISION NUMÉRIQUE ET LA LIBÉRATION DE FRÉQUENCES PAR LE MINISTÈRE DE LA DÉFENSE

Grâce à la libération de fréquences par l’armée et au basculement de la télévision analogique vers le numérique prévu en novembre 2011, une partie du spectre radioélectrique va être libérée et redistribuée. En effet, une fréquence qui transportait une chaîne analogique pourra désormais diffuser six chaînes numériques. Or, les fréquences sont une ressource rare utilisée par les radioamateurs, les télévisions, les radios, les communications aéronautiques, les liaisons satellites ou encore la téléphonie mobile. L’investissement réalisé par le passage à la télévision numérique va donc permettre de percevoir une sorte de dividende, d’où l’expression de « dividende numérique ».

B.– UNE OPPORTUNITÉ HISTORIQUE DE VALORISER UNE RESSOURCE RARE

La loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, modifiée par la loi n° 2007-309 du 5 mars 2007, prévoit que la réaffectation des fréquences libérées par l’extinction de la diffusion hertzienne analogique est décidée par le Premier ministre, dans le cadre d’un schéma national, après consultation de la commission du dividende numérique, instituée par cette même loi. Selon la répartition du spectre envisagée, dix à onze réseaux de télévision numérique terrestre (TNT) pourraient être déployés, chacun pouvant diffuser quatre chaînes de télévision haute définition. La télévision mobile personnelle pourrait se voir octroyer deux réseaux de seize chaînes chacun. La radio numérique ainsi que des réseaux d'accès Internet à très haut débit mobile pourraient également bénéficier de cette redistribution.

II.– LA NÉCESSITÉ DE PRÉCISER ET D’ASSOUPLIR LE DISPOSITIF

A.– UN PLUS LARGE ÉVENTAIL DE RECETTES

La nouvelle rédaction proposée permettra au compte d’affectation spéciale de bénéficier non seulement des redevances qui seront acquittées par les opérateurs privés pour l’utilisation des fréquences hertziennes libérées, mais aussi « du produit de cession de l’usufruit de tout ou partie des systèmes de communication militaires par satellite de l’État ».

En effet, conformément à la loi de programmation militaire 2009-2014, le ministère de la défense envisage de réaliser des recettes exceptionnelles issues de la cession de l’usufruit de tout ou partie des systèmes de communications militaires par satellites. En l’état de la législation, ces ressources ne peuvent figurer en recette au CAS dès lors qu’elles ne sont pas liées à la valorisation du spectre hertzien. Une modification de la liste des recettes est donc nécessaire.

B.– UN ASSOUPLISSEMENT DES RÈGLES DE DÉPENSES

Les recettes enregistrées sur le CAS permettront au ministère de la défense de financer des dépenses relatives aux investissements dans le domaine des systèmes d’information et de communication opérationnels.

Toutefois, la rédaction adoptée dans le texte d’origine impose des conditions cumulatives qui s’avèrent, à l’usage, trop restrictives. L’article 54 de la loi de finances pour 2009 dispose notamment que ce compte retrace en dépenses « les dépenses d’investissement et de fonctionnement liées aux services de télécommunications et visant à améliorer l’utilisation du spectre hertzien » (alinéa a) ainsi que « les dépenses d’investissement et de fonctionnement liées à l’interception et au traitement des émissions électromagnétiques à des fins de renseignement » (alinéa b).

Dans un cas comme dans l’autre, certains investissements envisagés par le ministère de la défense ne remplissent que l’une des deux conditions, tout en se situant d’évidence dans l’esprit qui a présidé à la création du CAS. À titre d’exemple, les programmes COMCEPT (télécommunication par satellite) et SOCRATE (réseau interopérable sécurisé de transport de l’information) constituent des investissements permettant de répondre à de nouveaux besoins en matière de télécommunications militaires, mais pour lesquels il sera difficile de démontrer qu’ils visent également à améliorer l’utilisation du spectre hertzien.

La nouvelle rédaction propose en conséquence de supprimer le cumul des conditions dans les alinéas a et b, de manière à offrir plus de souplesse à l’utilisation des ressources du CAS. Par ailleurs, les dépenses « liées à l’interception et au traitement des émissions électromagnétiques », cantonnées jusqu’à présent à la seule finalité du « renseignement », pourront également avoir pour objet « la surveillance ».

III.– L’EXTERNALISATION D’UNE PARTIE DES COMMUNICATIONS SATELLITAIRES MILITAIRES

A.– VERS UN PARTENARIAT PUBLIC-PRIVÉ

Le choix de basculer vers un partenariat avec des industriels et de passer d’une logique patrimoniale d’acquisition des moyens à une logique d’acquisition de services dans le domaine des télécommunications par satellites a été fait lors des travaux préparatoires à la loi de programmation militaire.

Surmontant ses réticences, le ministère de la défense s’apprête à innover en cédant l’usufruit de tout ou partie du système de communications par satellites Syracuse III qui comprend les satellites Syracuse 3A et 3B, ainsi que la charge utile française du satellite franco-italien Sicral 2. Le ministère louera ensuite les capacités qui lui seront nécessaires, soit environ 90 % des ressources du système. La cession du seul usufruit permet à l’État de rester propriétaire de jure des satellites, même si de facto un partenaire privé sera chargé de les gérer.

Cette opération pourra comprendre, de manière optionnelle, l’externalisation de tout ou partie de l’opération des satellites et des réseaux au sol connexes. Cette activité représente actuellement 30 emplois de militaires au sein de la direction interarmées des réseaux d’infrastructure et des systèmes d’information de la défense.

La cession de l’usufruit de biens affectés à une mission de service public ne peut intervenir sans autorisation du législateur. C’est la raison pour laquelle cette disposition a été introduite dans le projet de loi de finances.

B.– DES RECETTES EXCEPTIONNELLES ATTENDUES, AU MIEUX, FIN 2010

La cession de l’usufruit des satellites à un opérateur privé est attendue, dans le respect des délais de consultation et de soumission des offres, à la fin de l’année 2010. En échange, l’opérateur retenu obtiendrait un contrat de fourniture de capacités de télécommunications sécurisées sur la durée de vie restante des satellites. Les capacités non utilisées par les militaires – qui sont actuellement perdues – pourraient alors être proposées à d’autres clients, afin de mutualiser les coûts fixes et donc de diminuer les prix.

Le ministère de la défense estime à 400 millions d’euros les recettes exceptionnelles qu’il pourrait tirer de la cession de l’usufruit de ces satellites. Mais le montant réel des recettes ne pourra être évalué qu’à l’issue de la mise en concurrence des sociétés intéressées par le marché.

Deux sociétés ont fait connaître leur intérêt pour ce projet : Astrium, filiale d’EADS et Thales Alenia Space (TAS), filiale commune du français Thales et de l’italien Alenia. Astrium a déjà conclu un contrat similaire avec l’armée britannique alors que TAS, qui n’a pas encore d’expérience dans ce domaine, serait susceptible, grâce à Alenia, de conclure également un partenariat avec l’armée italienne.

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La Commission adopte l’article 29 sans modification.

Article 30

Rattachement du soutien pétrolier de la flotte de la marine nationale au compte de commerce « Approvisionnement des armées en produits pétroliers »

Cet article a pour objet de modifier sur deux points l’article 71 de la loi n° 84-1208 du 29 décembre 1984 de finances pour 1985 par lequel a été créé le compte de commerce intitulé « Approvisionnement des armées en produits pétroliers » : il s’agit d’une part de rattacher le soutien pétrolier de la flotte au service des essences des armées (SEA) et d’autre part d’autoriser le remboursement au budget général des frais occasionnés par la cession de produits pétroliers, lequel n’est aujourd’hui possible qu’en cas de vente à des pays étrangers.

I.– LE SERVICE DES ESSENCES DES ARMÉES DEVIENT COMPÉTENT POUR L’APPROVISIONNEMENT DE LA FLOTTE

Dans le cadre de la révision générale des politiques publiques (RGPP), il a été décidé de faire du service des essences des armées le seul service compétent en matière d’approvisionnement en carburant. Or, jusqu’à présent, sur la base de l’arrêté du 5 novembre 1991 portant organisation du commissariat de la marine, l’armée de mer bénéficiait d’un régime dérogatoire et s’approvisionnait directement en combustible de navigation par l’intermédiaire de marchés qui lui étaient propres, le SEA étant toutefois compétent pour le kérosène nécessaire à l’aéronavale. Dans le cadre de la réorganisation des commissariats des armées, cet arrêté a vocation à être abrogé en 2010.

L’objectif visé consiste à rationaliser les modalités d’approvisionnement en carburant de l’ensemble des armées afin, d’une part, de bénéficier d’une expertise technique unique profitable à toutes les armées et, d’autre part, de générer des économies. La désignation du service des essences des armées comme responsable unique de cette mission semble naturelle.

Cette mesure n’engendrera aucun coût supplémentaire. Au contraire, elle sera de nature à générer des économies. Les gains en personnels pourraient s’élever à dix équivalents temps plein travaillés, soit 0,23 million d’euros pour l’ensemble des activités de dépôt, d’approvisionnement et d’expertise aujourd’hui assurées par la station d’essais des combustibles et lubrifiants de la flotte. Des économies d’échelle sont également attendues, mais dans une moindre mesure.

II.– L’ÉLARGISSEMENT DES POSSIBILITÉS DE REMBOURSEMENT

L’actuelle rédaction de l’article 71 de la loi n° 84-1208 du 29 décembre 1984 de finances pour 1985 ne mentionne pas expressément le remboursement au budget de l’État des frais occasionnés par la cession de produits pétroliers à des bénéficiaires autres que les Gouvernements étrangers.

Or, des organismes publics comme la sécurité civile ou d’autres clients du secteur civil bénéficient de prestations du service des essences des armées. Il paraît donc légitime d’inscrire dans la législation le principe du remboursement à ce service des frais induits par la cession de produits pétroliers à des entités autres que les armées étrangères, dans la mesure où ces dépenses sont supportées par le budget du ministère de la défense.

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La Commission adopte l’article 30 sans modification.

Article 31

Transfert d'un centre d'études de la Délégation générale pour l’armement (DGA) au Commissariat à l’énergie atomique (CEA)

Le centre d’études de Gramat (CEG) exerce principalement une activité d’évaluation de la vulnérabilité des systèmes d’armes aux agressions nucléaires et électromagnétiques intentionnelles, et aux agressions des armes conventionnelles. Situé dans le Lot, il relève de la Délégation générale pour l’armement (DGA).

Avec un effectif de près de 300 personnes, et un budget annuel d’environ 40 millions d’euros, les compétences techniques et les moyens détenus par le CEG sont de taille réduite, aussi bien dans le domaine nucléaire que dans celui de la défense conventionnelle. Leur pérennité nécessite de les adosser à une structure plus importante. Le présent article prévoit donc le transfert du CEG au Commissariat à l’énergie atomique (CEA). Elle s’inscrit dans le cadre de la révision générale des politiques publiques de la DGA.

L’objectif poursuivi est de constituer, dans le domaine de la défense, un pôle d’excellence regroupant des activités diverses, ayant des applications en matière de dissuasion nucléaire et de défense conventionnelle. L’intégration du CEG au CEA permet de profiter au mieux des synergies entre les activités du CEG et celles des autres centres du CEA, et par conséquent, de répondre aux besoins de défense à un coût optimisé. Il doit également permettre de répondre aux demandes croissantes liées à la sécurité globale telles que définies par le livre blanc sur la défense et la sécurité.

Une alternative consistant à fermer le site du CEG et à déplacer les activités vers d’autres centres de la DGA ayant des activités connexes aurait pu être envisagée. Elle présente l’inconvénient majeur de transférer l’ensemble du personnel vers d’autres sites et d’entraîner des coûts importants. Par ailleurs, cette solution ne permet pas de développer des synergies importantes, et d’optimiser ainsi les coûts de fonctionnement. Remarquons que le CEG est le 8ème employeur du Lot. Il a externalisé de nombreuses tâches à des sociétés sous-traitantes. Le choix de conserver le site de Gramat préserve donc une activité économique importante pour le département, en particulier concernant les PME innovantes.

Le CEA s’est engagé à rechercher des économies dans le domaine du fonctionnement, et notamment des gains de productivité dans le domaine du support. Ces gains résultent d’une gestion simplifiée des ressources humaines et d’outils de gestion centralisés. L’organisation envisagée permet de diminuer les coûts de fonctionnement plus rapidement que dans le schéma actuel par le non remplacement de personnels – en contrepartie de l’externalisation de certaines activités (reprographie, traitement du courrier) qui serait, le cas échéant, intervenue plus tardivement. Les gains sont estimés à près de 13 millions sur la période 2010-2014. Le surcoût récurrent est estimé à 2,5 millions par an. Il comprend le différentiel de charges sociales, les cotisations spécifiques (participation de l’employeur au comité d’entreprise, cotisation d’invalidité et mutuelle de santé principalement), ainsi que la compensation de la non imposition de l’indemnité pour charges militaires.

La DGA et le CEG estiment que l’opération de transfert sera amortie sur la période de programmation militaire 2010-2014 et générera ultérieurement un gain pour le ministère de la défense d’environ 1 million d’euros par an. En 2010, le transfert engendrera un coût net de 1,6 million d’euros.

Après avoir reçu, fin 2008, une information précise sur les finalités et les modalités de l’opération envisagée, le personnel du CEG a été régulièrement tenu informé de l’opération. Les modalités d’intégration des personnels au CEA en fonction de leur statut ont fait l’objet de négociations entre les organisations syndicales représentatives de la défense et le CEA dès la fin 2008. Le CEA proposera à chaque personnel affecté un contrat de travail à durée indéterminée, à effet au 1er janvier 2010. Tout personnel, qui, de manière expresse, manifestera sa volonté de ne pas rejoindre le CEA sera affecté dans un autre service, centre ou établissement de la défense, et sera éligible au bénéfice des dispositions du Plan d’accompagnement des restructurations mis en place par le ministère de la défense. Ceux des personnels qui accepteront ce contrat de travail et qui souhaiteront conserver leur qualité d’agent public se verront appliquer les dispositions suivantes :

– les militaires et les fonctionnaires de l’État seront placés en position de détachement, prévu par leurs statuts respectifs ;

– les agents sous contrat seront placés en congé sans rémunération pour convenances personnelles ;

– les ouvriers de l’État seront placés en congé sans salaire (78).

Les logements actuellement occupés par le personnel du CEG ne sont pas transférés au CEA. Les personnels civils et militaires qui y sont actuellement logés continueront à en bénéficier dans les mêmes conditions que s’ils étaient restés au ministère de la défense.

La nouvelle entité qui résultera du transfert ne procédera à aucun licenciement. Pour l’avenir, le rattachement du CEG au CEA devrait permettre, de par les missions et outils mis en place par le CEA, le développement du site.

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La Commission adopte l’article 31 sans modification.

Article 32

Exonération de l'Office national des forêts (ONF) du paiement de toute indemnité ou perception de droits, impôts ou taxes relatifs à la signature du bail lui transférant un ensemble de bâti domanial

Pour dynamiser la gestion de son patrimoine immobilier, l’État entend désormais généraliser le paiement de loyers par les opérateurs qui bénéficient de la mise à disposition de ses biens et terrains. Ce sera prochainement le cas du parc immobilier domanial utilisé par l’Office national des forêts (ONF) (79), qui lui sera désormais loué par l’État sous forme de bail emphytéotique. Toutefois, afin de ne pas faire peser de charges excessives sur cet établissement en situation financière difficile, le présent article tend à le dispenser des frais liés au transfert des biens.

I.– LA FIN DE LA MISE À DISPOSITION GRATUITE DU PATRIMOINE IMMOBILIER DE L’ÉTAT

Selon les conclusions du Conseil de modernisation des politiques publiques tenu le 12 décembre 2007, « le patrimoine détenu ou remis en dotation aux grands opérateurs devra continuer à être recensé et faire l’objet [d’une] politique de dynamisation, pour responsabiliser les opérateurs sur sa valeur, surtout lorsque ces opérateurs perçoivent une subvention d’équilibre ».

Dans le même sens, M. Éric Woerth, ministre du Budget, des comptes publics et de la fonction publique déclarait dans Le Monde du 4 juillet 2008 : « qu’il s’agisse de leurs effectifs ou de leurs immeubles, les opérateurs devront appliquer les mêmes règles de bonne gestion que l’État. Il faudra revoir certaines situations lorsque le patrimoine de l’État n’est pas correctement valorisé. Je pense au patrimoine utilisé par l’Office national des forêts, qui est la propriété de l’État, et pour lequel l’ONF n’a jamais versé de loyer (...) ». L’enjeu n’est pas mince : avec 9,9 millions d’hectares, le parc immobilier dont dispose l’ONF représente plus de 95 % du parc des opérateurs de l’État (80).

Traduisant concrètement ces nouvelles orientations, le décret n° 2008-1248 du 1er décembre 2008 relatif à l’utilisation des immeubles domaniaux par les services de l’État et ses établissements publics met fin à la procédure d’affectation d’immeubles à des services de l’État ainsi qu’à la procédure d’attribution à titre de dotation à ses établissements publics (81). Désormais, les mises à disposition d’immeubles de l’État passent par la signature de conventions, assorties du paiement d’un loyer (82).

C’est ainsi que, le 27 juillet 2009, une convention – visée dans le texte du présent article – a été signée par l’ONF, le service France Domaine et le ministère de l’alimentation, de l’agriculture et de la pêche, posant le principe de la passation d’un bail emphytéotique portant sur l’ensemble du parc immobilier bâti mis à disposition de l’ONF par l’État. Dans une rédaction qui rend hommage à la complexité caractérisant les règles de la propriété publique, le présent article fait référence à cet ensemble immobilier en énumérant :

– les biens actuellement remis en dotation à l’ONF ;

– les biens utilisés par l’ONF sans avoir été remis en dotation et inscrits au Tableau général des propriétés de l’État (TGPE) (83) ;

– les biens utilisés par l’ONF sans avoir été remis en dotation et non inscrits au TGPE.

Concrètement, sont essentiellement visées par ce transfert les maisons forestières domaniales qui, au nombre d’au moins 2 200, représentent environ 70 % du parc immobilier de l’ONF. Alors qu’environ un tiers de ces maisons forestières ne sont plus utilisées par les agents de l’Office, la question de la valorisation de ce patrimoine immobilier, souvent vétuste et partiellement enclavé, se pose de façon récurrente depuis plusieurs années.

Le recours à un bail emphytéotique, d’une durée de cinquante ans, permettra de conférer à l’ONF des droits réels sur les immeubles transférés et, selon l’étude d’impact jointe au présent article, lui donnera « une plus grande autonomie pour l’utilisation des bâtiments et la programmation des travaux d’entretien et d’amélioration ». À terme, une fois rénovés, une partie de ces biens pourront être cédés, moyennant l’accord préalable de l’État et un intéressement de l’ONF aux plus-values réalisées.

Selon la convention précitée, le futur contrat de bail prévoira un versement à l’État par l’ONF d’un capital de 50 millions d’euros en cinq ans (84), puis d’un loyer annuel sur toute la durée du bail. Ce loyer serait de l’ordre de 7 à 8 millions d’euros par an, en fonction de l’estimation définitive – actuellement confiée à un cabinet privé – de la valeur des biens transférés.

II.– UNE EXONÉRATION DES FRAIS LIÉS AU TRANSFERT DES BIENS À L’ONF

L’ONF connaît en 2009 en situation financière difficile. Alors que son budget primitif adopté en novembre 2008 prévoyait des comptes à l’équilibre avec 756 millions d’euros de charges et de produits, ces derniers seront plus faibles que prévu du fait principalement d’une baisse des ressources tirées de la vente de bois. Le 1er juillet dernier, le conseil d’administration de l’Office a voté un budget modifié à l’équilibre prévoyant à la fois des économies (sur les achats externes et sur la masse salariale) et une aide de l’État, sous la forme notamment d’une subvention exceptionnelle de 19 millions d’euros.

Dans ce contexte, afin de ne pas faire peser de charges excessives sur l’ONF, le présent article prévoit de l’exonérer de tout droit, impôt ou taxe normalement exigible ainsi que du versement des salaires ou honoraires dus aux conservateurs des hypothèques aux titres des formalités de publicité foncière et d’enregistrement (article 879 du code général des impôts).

Il s’agit d’une disposition relativement courante lors des transferts entre les patrimoines immobiliers de deux personnes publiques (85). Son coût pour l’État en 2010 est estimé à 2,3 à 2,6 millions d’euros.

Ce coût a été évalué en appliquant un taux global de 0,715 % au montant total des loyers versés sur les cinquante années du bail (86). Les baux d’immeubles à durée limitée de plus de douze ans sont en effet normalement soumis au paiement de la taxe de publicité foncière de 0,60 %, majorée d’une taxe additionnelle de 0,10 %, due sur le montant cumulé de toutes les années à courir (articles 742 et suivants du code général des impôts). S’y ajoutent des frais d’assiette de 2,5 % du montant de la taxe de publicité foncière (soit 0,015 %), en application de l’article 1647-V du code général des impôts.

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* *

La Commission adopte l’article 32 sans modification.

Article 33

Évaluation du prélèvement opéré sur les recettes de l’État au titre de la participation de la France au budget des Communautés européennes

Le présent article a pour objet d’évaluer le montant du prélèvement sur recettes de l’État au profit de l’Union européenne, qui correspond à la contribution brute de la France au budget communautaire (87). Rappelons que ce prélèvement est inclus dans le périmètre de la norme de stabilisation en volume des dépenses de l’État depuis la loi de finances pour 2008.

Le périmètre du prélèvement est réduit à compter de 2010, avec l’exclusion des ressources propres traditionnelles – droits d’importation et cotisations sur le sucre. À périmètre courant, il passerait de 20 milliards d’euros à 18,2 milliards d’euros.

À périmètre constant toutefois, l’exécution 2009 se révèle nettement supérieure – de plus d’un milliard d’euros – à la prévision. Pour 2010, le montant du prélèvement serait en léger retrait. Le tableau suivant illustre ces évolutions.

LE PRÉLÈVEMENT SUR RECETTES AU PROFIT DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES

(en millions d’euros)

 

2008

Révisé 2009

2010

Prélèvement selon l’ancien périmètre

18 702

19 965

19 500

Droits d’importations et cotisations sur les sucres

– 2 080

– 1 641

– 1 347

Prélèvement selon le nouveau périmètre

16 622

18 324

18 153

Évolution du prélèvement selon le nouveau périmètre (en %)

7,9 %

10,2 %

 0,9 %

I.– LE BUDGET COMMUNAUTAIRE FACE À LA CRISE : UN OUTIL PEU EFFICACE

À la suite du Conseil européen des 11 et 12 décembre 2008, le budget communautaire a été mobilisé dans le but de contribuer à la relance de l’économie. 5 milliards d’euros ont été dégagés sur 2009 et 2010 pour financer des projets en matière énergétique – pour 3,5 milliards d’euros – et de développement rural – pour 1,5 milliard d’euros. La résolution de l’Assemblée nationale relative à l’avant-projet de budget général des Communautés européennes pour 2010 a toutefois pointé les limites d’un tel budget « de crise » (88).

Ces limites sont, d’une part, de nature structurelle et tiennent à la rigidité des instruments budgétaires et financiers communautaires. La contrainte d’équilibre empêche toute tentative de régulation contracyclique de l’économie. Par ailleurs, l’inscription du budget au sein des perspectives pluriannuelles ainsi que le processus de négociation au sein du Conseil contribuent à limiter substantiellement les marges de manœuvre disponibles. À titre d’illustration, les 5 milliards d’euros dégagés sur deux ans représentent moins de 2 % du budget. Ils ont été financés par redéploiement en 2009, et non par réduction des marges sous plafond, ce qui limite leur impact économique.

D’autre part, la résolution de l’Assemblée nationale a regretté la faiblesse des propositions de la Commission. Celle-ci n’a notamment fait aucune proposition quant au mode de financement des mesures pour 2010, qui doit être déterminé au cours de la procédure budgétaire. À noter également qu’elle n’a encore formulé aucune proposition dans le but de préparer la « clause de rendez-vous », prévue dans l’accord sur les perspectives pluriannuelles 2007-2013 et visant à faire un point sur les réformes budgétaires communautaires dès 2010.

Le reste de l’actualité budgétaire de l’Union européenne ainsi que le détail des perspectives pluriannuelles 2007/2013 et du budget pour 2010 sont développés dans l’annexe « jaune » relative aux relations financières avec l’Union européenne.

II.– UNE PRÉVISION DE PRÉLÈVEMENT SOUMISE À DE NOMBREUX ALÉAS

A.– LE MODE DE CALCUL DE LA CONTRIBUTION AU BUDGET COMMUNAUTAIRE

Le prélèvement sur recettes au profit de l’Union européenne est la somme de deux types de contributions :

– une première contribution correspond à la part de la France dans la ressource « TVA », qui consiste en l’application d’un taux uniforme à l’assiette de la TVA. La correction britannique est financée par un mécanisme faisant appel à cette ressource. À cet égard, la diminution progressive du montant du « chèque britannique », acquise lors des négociations sur les perspectives pluriannuelles 2007/2013, se traduirait dès 2010. L’effort de la France baisserait en effet de 400 millions d’euros, à 1,1 milliard d’euros ;

– une seconde contribution est assise sur le produit national brut de chaque État et joue le rôle de variable d’ajustement du budget communautaire. Elle représente près de 80 % du prélèvement européen en 2010.

L’Union européenne se finance également par des ressources propres traditionnelles, instaurées en 1970 et constituées des droits de douane et des cotisations sur le sucre. Leur assiette et leur taux étant déterminés au niveau communautaire, elles constituent les seules ressources de l’Union que celle-ci peut maîtriser – mais leur part est marginale. Les autres types de contributions sont en effet plus proches de la dotation budgétaire que de la ressource propre stricto sensu. À compter du présent projet de loi, elles sont exclues du périmètre du prélèvement sur recettes pour des raisons exposées plus bas.

B.– UNE PRÉVISION GREVÉE DE MULTIPLES INCERTITUDES

La prévision du montant du prélèvement sur recettes est effectuée au mois de mai, après la présentation par la Commission de son avant-projet de budget. Elle s’avère difficile car tant le volet « dépenses » que le volet « recettes » du budget peuvent évoluer.

D’une part, les besoins de financement de l’Union pour l’année 2010 peuvent fluctuer pour plusieurs raisons :

– le montant total des dépenses finalement voté est généralement inférieur au montant proposé par la Commission ;

– les crédits votés ne sont généralement pas consommés en intégralité, ce qui tend à minorer le besoin de financement et donc les contributions des États ;

– des budgets rectificatifs peuvent être adoptés en cours d’exercice.

Le montant total des dépenses à financer est donc incertain au moment où le montant du prélèvement sur recettes est fixé.

D’autre part, le montant exact des recettes est inconnu au moment de la détermination du prélèvement :

– les contributions TVA et PNB sont ajustées en cours d’exécution, au mois de novembre, et les montants définitivement dus pour les années N-1 à N-12 sont fixés en cours d’année, ce qui fait fluctuer le montant du prélèvement ;

– le solde reporté de 2009 vers 2010, dû à des dépenses inférieures aux prévisions ou à des surplus de recettes, fait l’objet d’une évaluation qui peut être différente du montant exécuté ;

– le montant de la correction britannique est déterminé plusieurs années après l’exercice pour lequel elle est due.

Le budget de l’Union étant soumis à une contrainte d’équilibre et les contributions des État devant s’ajuster à ses évolutions, toutes les fluctuations de ses dépenses et recettes ont un impact direct sur le niveau du prélèvement sur le budget de l’État.

Cette difficulté à déterminer avec précision le montant du prélèvement en loi de finances initiale est traduite par le graphique suivant.

Un signe négatif représente une dépense supplémentaire pour l’État, un signe positif une économie pour l’État.

Source : annexe « jaune » relative aux relations financières avec l’Union européenne

III.– UNE HAUSSE IMPORTANTE DU PRÉLÈVEMENT PAR RAPPORT À 2008

A.– LE CHANGEMENT DE PÉRIMÈTRE

À compter de 2010, seront exclues du périmètre du prélèvement sur recettes les ressources propres traditionnelles, c’est-à-dire les droits d’importation et les cotisations sur le sucre. Comme l’indique l’exposé des motifs du présent article, deux considérations justifient cette évolution qui a été suggérée par la Cour des comptes.

D’une part, les ressources propres traditionnelles pourront ainsi être traitées en compte de trésorerie. Elles ne sont pas, en effet, des ressources de l’État mais des ressources de l’Union européenne dont l’État assure le recouvrement.

D’autre part, le traitement comptable de ces ressources serait uniformisé. Elles sont, en effet, comptabilisées en compte de tiers en comptabilité générale, ce qui traduit bien leur caractère étranger au budget général de l’État. De plus, la comptabilité nationale ne les considère pas comme des dépenses alors que le prélèvement sur recettes au profit des Communautés européennes est inclus dans la norme de dépense.

Cette évolution a pour conséquence la disparition des droits d’importations et des cotisations sur le sucre du budget de l’État.

Rappelons également que du fait de l’inclusion du prélèvement dans la norme de dépenses, celle-ci voit également son périmètre modifié.

B.– UNE NETTE AUGMENTATION À PÉRIMÈTRE CONSTANT

À périmètre constant, on constaterait une forte augmentation, de l’ordre de 10 %, du montant du prélèvement sur recettes en 2009, qui atteindrait 18,3 milliards d’euros selon le nouveau périmètre. Cette évolution serait due notamment à l’accroissement de la part de la France dans la ressource RNB, conjuguée à un taux d’appel supérieur de cette ressource en raison de l’érosion du produit de la ressource TVA et des ressources traditionnelles. En d’autres termes, la part de la ressource RNB serait plus importante dans le financement du budget communautaire et la part de la France au sein de cette ressource s’accroîtrait également.

La France en effet verrait sa part dans le PNB communautaire s’accroître en 2009 en raison de sa plus grande résistance à la crise économique. Ainsi, le taux de croissance s’établirait à –2,25 % en 2009 puis 0,75 % en 2010 contre -4,1 % et 0,2 % dans la zone Euro. Par ailleurs, la dévaluation de la Livre sterling face à l’Euro contribuerait à renforcer cette évolution en minorant la part du Royaume-Uni.

Dans le même temps, le taux d’appel de la ressource RNB serait en hausse. Cette ressource joue en effet le rôle de variable d’ajustement du budget communautaire. Les dépenses de celui-ci étant rigides, elle varie en fonction du rendement des autres ressources. Or, du fait de la crise économique, la ressource TVA ainsi que les droits d’importation voient leur rendement minoré. Mécaniquement, la part de la ressource RNB est donc appelée à s’accroître en 2009.

En 2010, le prélèvement serait en légère baisse, à 18,1 milliards d’euros, en raison notamment du fait que la part de la France dans le RNB communautaire se replierait.

Le tableau suivant retrace l’évolution du prélèvement sur recettes et de ses composantes de 2001 à 2010.

LE PRÉLÈVEMENT SUR RECETTES AU PROFIT DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES

(en millions d’euros)

 

2001

2002

2003

2004

2005

2006

2007

2008

2009*

2010*

LFI

15 169

16 870

15 800

16 400

16 570

17 995

18 697

18 400

18 900

18 153

Exécution

14 500

14 756

16 342

15 510

18 037

17 633

17 175

18 702

19 965

 

Évolution en exécution n-1/n en %

– 1,1

1,8

11

5

16

– 2

– 3

8,9

6,8

 

Dont :

                   

droits de douane

1 418

1 294

1 253

1 376

1 559

1 678

1 803

1 773

1 600

0

cotisations sucre et isoglucose

139

234

131

171

260

47

– 27

306

41

0

ressource TVA

7 260

5 533

5 326

3 729

4 085

4 327

4 441

4 714

3 633

3 790

dont correction britannique

1 650

1 521

1 642

1 495

1 430

1 420

1 327

1 723

1 522

1 058

ressource PNB

5 683

7 695

9 633

10 235

12 133

11 580

10 959

11 906

14 691

14 363

Frais de perception

163

624

346

387

455

431

444

520

410

337

Prélèvement sur recettes net des frais de perception

14 337

14 132

15 997

15 124

17 582

17 201

16 731

18 182

19 555

17 816

Part dans les recettes fiscales nettes en %

5,9

5,9

6,7

5,7

6,5

6,4

6,3

6,9

9,2

7,2

* Prévisions

C.– UNE DÉGRADATION PROGRESSIVE DU SOLDE NET DE LA FRANCE

Les « retours » des différents États membres sont présentés chaque année par la Commission européenne dans son rapport sur la situation des dépenses de l’Union européenne.

En 2008, dernière année connue, la France a bénéficié de 13,7 milliards d’euros de dépenses, ce qui la place au premier rang des bénéficiaires devant l’Espagne, l’Allemagne et l’Italie. Près des trois quarts de ces dépenses proviennent de la politique agricole commune dont la France est la première bénéficiaire depuis 2003, près d’un quart des actions structurelles et le reste des dépenses dans les domaines de la compétitivité, sécurité, justice et citoyenneté. La France devrait cesser d’être bénéficiaire nette au titre de la politique agricole commune à partir de 2013 avec la montée en puissance des aides directes dans les nouveaux États membres.

Pour 2008, le solde net de notre pays est évalué à – 4,3 milliards d’euros, soit – 0,22 % de son PNB, selon la méthode comptable (89), ce qui place la France en sixième position en valeur et en neuvième position en pourcentage de son PNB. Le solde net atteint – 3 095 millions d’euros et – 0,19 % de son PNB selon la méthode dite du « rabais britannique » (90), qui la place au troisième rang de contributeurs nets en valeur et au sixième rang des contributeurs nets en pourcentage de son PNB.

Depuis dix ans, la tendance est à la dégradation progressive du solde net de la France. Elle devrait s’accentuer dans les prochaines années en raison notamment de la réorientation des fonds structurels et de la PAC vers les nouveaux membres. Les prévisions pour la période 2007-2013 évaluent le solde net moyen de la France à – 0,37 % de son PNB, ce qui justifie qu’un regard attentif sur l’évolution des dépenses de l’Union.

L’analyse en termes de « retours » fait l’objet d’une étude attentive par chaque État membre. Elle est pourtant limitée puisqu’elle n’intègre pas les externalités positives de l’appartenance à l’Union européenne. À titre d’exemple, l’appartenance à un grand marché de plusieurs centaines de millions d’habitants tend à offrir des opportunités de croissance pour les entreprises françaises et à accroître la variété des produits offerts aux consommateurs. De même, l’appartenance à la zone Euro contribue à stabiliser et limiter fortement le coût de l’endettement de l’État.

La Commission adopte l’article 33 sans modification.

*

* *

Après l’article 33 :

La Commission est saisie de l’amendement I-CF 155 de M. Jérôme Cahuzac.

M. Jean Launay. Il s’agit d’interdire à un établissement de crédit qui bénéficie de fonds de l’État au titre du dispositif de soutien de verser des bonus à ses opérateurs de marché et des dividendes à ses actionnaires. Cette contrepartie nous paraît être une exigence.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur général, la Commission rejette l’amendement I-CF 155.

Puis elle examine l’amendement I-CF 242 de M. Daniel Garrigue.

M. Daniel Garrigue. Il ne faut pas laisser croire aux Français que nous pourrions vivre dans des déficits permanents. Il est un peu étonnant que l’on parle d’émettre des emprunts pour financer des dépenses supplémentaires, la gestion de ces fonds se faisant dans des conditions qui sont encore mystérieuses, mais qui risqueraient d’aboutir à la création d’un véritable budget bis. Au nom des principes d’unité et d’universalité budgétaires, je propose de prévenir les tentations, en introduisant un article additionnel disposant que « Aucun emprunt émis au cours de l’année 2010 ne pourra voir son produit utilisé à d’autres fins que le financement du déficit de la loi de finances pour 2010 et la dette publique de l’État ».

M. le rapporteur général. Je vous rassure, nous aurons un débat sur le grand emprunt puisqu’il fera l’objet d’une loi de finances rectificative. Par ailleurs, si le déficit venait à être supérieur à celui que nous allons voter en loi de finances initiale, votre amendement empêcherait l’État d’emprunter pour couvrir la différence…

M. Daniel Garrigue. Je rédigerai mieux l’amendement pour le débat en séance !

La Commission rejette l’amendement I-CF 242.

TITRE II :

DISPOSITIONS RELATIVES A L’ÉQUILIBRE GÉNÉRAL DES RESSOURCES ET DES CHARGES

Article 34

Équilibre général du budget, trésorerie et plafond d’autorisation des emplois

L’article d’équilibre comprend les principales dispositions dont la présence en première partie du projet de loi de finances est requise par l’article 34 de la loi organique n° 2001-692 relative aux lois de finances du 1er août 2001 (LOLF).

L’équilibre financier ainsi défini est analysé dans le premier tome du présent rapport général. C’est pourquoi le présent commentaire se borne à rappeler les différents éléments qui structurent cet article.

Son premier volet est le tableau d’équilibre, figurant au paragraphe I, qui « arrête les données générales de l’équilibre budgétaire ».

Un deuxième volet, au paragraphe II, est constitué :

– du tableau de financement, qui définit « les ressources et les charges de trésorerie qui concourent à la réalisation de l’équilibre financier » ;

– du plafond de variation nette de la dette négociable de l’État d’une durée supérieure à un an ;

– de diverses autorisations relatives aux emprunts et à la trésorerie de l’État qu’il est demandé d’accorder, pour l’année 2010, au ministre chargé de l’économie, des finances et de l’emploi.

Un troisième volet, figurant au paragraphe III, est le plafond autorisé des emplois rémunérés par l’État.

Le dernier volet, au paragraphe IV, expose l’utilisation qui serait faite des éventuels surplus de recettes, en application du 10° de l’article 34 de la LOLF telle que modifiée par la loi organique n° 2005-779 du 12 juillet 2005.

On rappellera enfin que l’état A, annexé au présent article et soumis au vote en même temps que celui-ci, dresse un tableau des « voies et moyens » présentant l’évaluation, pour 2010, de chaque ligne de recettes du budget général, des budgets annexes et des comptes spéciaux. Il comporte également une évaluation des prélèvements sur recettes et, depuis 2006, une évaluation des fonds de concours.

I.– LE TABLEAU D’ÉQUILIBRE

À compter de la loi de finances pour 2006, l’application de la LOLF a entraîné de substantiels changements dans la présentation du tableau d’équilibre.

La distinction entre dépenses ordinaires civiles, dépenses civiles en capital et dépenses militaires a été abolie. L’article d’équilibre, à l’image de l’ensemble de la loi de finances, ne connaît plus que des « dépenses » en général. Au-delà de la meilleure lisibilité donnée au tableau d’équilibre, c’est aussi la conséquence du caractère indicatif de la ventilation des dépenses par nature – à l’exception, en exécution, des dépenses de personnel du titre 2.

La suppression de la distinction entre opérations à caractère définitif et opérations à caractère temporaire contribue elle aussi à la plus grande clarté du tableau (d’autant que les dépenses et les recettes enregistrées sur certains comptes n’avaient parfois de « temporaires » que le nom).

Les recettes en atténuation de la charge de la dette, telles que les recettes de coupon couru, ont disparu du tableau et, plus généralement, du budget général. Ces recettes « pour ordre », non représentatives d’une réelle charge pour le budget général, sont désormais retracées au sein du compte Gestion de la dette et de la trésorerie de l’État dont la création résulte de l’article 22 de la LOLF.

L’équilibre budgétaire peut aussi s’apprécier, depuis 2006, en tenant compte des recettes de fonds de concours « prévues et évaluées » pour l’année à venir, ainsi que des dépenses qu’elles permettront de financer (article 17 de la LOLF). Cette innovation profite également aux budgets annexes.

La première ligne du tableau fait apparaître les recettes fiscales brutes, alors que sous l’empire de l’ordonnance organique de 1959, la première ligne de recettes présentait un montant brut agrégeant les recettes fiscales et les recettes non fiscales.

Les comptes spéciaux portent la marque des catégories redéfinies par la LOLF : comptes d’affectation spéciale et comptes de concours financiers pour les comptes dotés de crédits, comptes de commerce et comptes d’opérations monétaires pour les comptes non dotés de crédits. Ces derniers sont présentés sous forme de soldes et non plus en termes de « charge nette », notion qui conduisait à présenter des excédents sous forme de montants négatifs (les recettes étant ôtées des dépenses).

II.– LES AUTORISATIONS D’OPÉRATIONS DE TRÉSORERIE

A.– LES AUTORISATIONS RELATIVES À LA DETTE DE L’ÉTAT

1.– Le tableau de financement et le plafond de variation de la dette

• Le tableau de financement figurant au 1° du II du présent article apparaît comme le pendant, au plan financier, du tableau d’équilibre prévu en matière budgétaire.

L’article 34 de la LOLF dispose en effet que la première partie de la loi de finances « évalue les ressources et les charges de trésorerie qui concourent à la réalisation de l’équilibre financier, présentées dans un tableau de financement ». Cette nouveauté essentielle permet l’appréhension des charges de remboursement de la dette de l’État dans un tableau récapitulant le besoin de financement et la capacité de financement de l’État. Le solde budgétaire arrêté à l’article d’équilibre n’est en effet que l’une des composantes de l’équilibre financier de l’État, le déficit budgétaire devant être financé au cours de l’année par la voie de l’emprunt.

• En application du même article 34 de la loi organique, l’article d’équilibre tend également à fixer un plafond de la variation de la dette. Ce plafonnement vise la variation nette, appréciée en fin d’année, de la dette négociable de l’État d’une durée supérieure à un an. C’est donc la dette émise sous forme d’obligations assimilables du Trésor (OAT) et de bons du Trésor à taux fixe et à intérêt annuel (BTAN) qui est concernée. Concrètement, le plafond représente la variation entre le 31 décembre de l’année 2009 et le 31 décembre de l’année 2010 de la somme des encours d’OAT et de BTAN nets des amortissements et rachats. Si le plafond était dépassé en fin d’année, une mesure en projet de loi de finances rectificative devrait être proposée à l’approbation du Parlement. En revanche, un éventuel dépassement en cours d’année ne nécessiterait pas de retour devant le législateur. Il importerait alors néanmoins que les Commissions des finances soient tenues informées des évolutions du stock de dette.

Depuis la loi de finances pour 2007, le tableau de financement fait apparaître, parmi les ressources de financement, une ligne dédiée aux annulations de titres de l’État par la Caisse de la dette publique (CDP). Cette innovation a le mérite de mieux rendre compte du rôle croissant joué par la CDP dans les opérations de gestion primaire de la dette (91), c’est-à-dire dans les opérations de rachats et d’annulations de titres ou les prises en charge de l’amortissement de titres à échéance. Depuis la loi de finances pour 2006, la CDP peut en effet recevoir des dotations de l’État issues des produits de cessions d’actifs (à partir du compte d’affectation spéciale Participations financières de l’État), à des fins de rachats et d’annulations de titres de dettes. L’identification d’une ligne spécifique dans le tableau de financement donne une meilleure visibilité à ces opérations.

En outre, elle facilite l’appréhension du plafond de variation de la dette : l’agrégation des annulations de titres au sein de la première ligne des ressources, consacrée aux émissions de moyen et long terme nettes des rachats, aurait quelque peu perturbé le calcul du plafond. Actuellement, la lecture du tableau de financement permet aisément de le déterminer, en soustrayant les amortissements à moyen et long terme des émissions à moyen et long terme. Traiter distinctement les annulations de titres par la CDP permet d’éviter une majoration du plafond qui aurait été peu significative de l’évolution de l’équilibre général des lois de finances.

Depuis la loi de finances initiale pour 2009, conformément à certaines recommandations de la Cour des comptes (92), le tableau de financement comporte une ligne « Amortissement de dettes reprises par l’État » (remplaçant l’ancienne ligne « Engagements de l’État ») et une ligne « Autres ressources de trésorerie » (ainsi distinguée de la variation du compte du Trésor). Ces autres ressources de trésorerie regroupent les primes et décotes à l’émission et les pertes et profits sur rachats, ainsi que la provision pour indexation du capital des titres indexés sur l’inflation (93).

2.– Les autorisations relatives à la dette de l’État

• En application de l’article 34 de la LOLF, la première partie de la loi de finances doit comporter « les autorisations relatives aux emprunts et à la trésorerie de l’État ». Le 2° du II du présent article a pour objet d’accorder au ministre de l’économie, des finances et de l’emploi une telle autorisation générale pour l’année 2009. Celle-ci porte sur le court, le moyen et le long terme, et les emprunts peuvent avoir deux objets : la couverture de l’ensemble des charges de trésorerie et le renforcement des réserves de change.

Le Rapporteur général rappelle que, dans la loi de finances initiale pour 2003, le Gouvernement a demandé au Parlement d’autoriser l’émission d’emprunts en devises. Dans l’histoire nationale, une telle faculté a été utilisée en des temps de crise financière : elle a donc mauvaise presse. Aujourd’hui, la possibilité d’émettre des emprunts en devises est considérée comme un instrument normal dans la panoplie des outils qu’un État souverain peut avoir à sa disposition pour satisfaire à ses besoins de financement. L’autorisation a donc été accordée et il est demandé de la renouveler, en même temps que l’autorisation générale d’emprunt. Ce renouvellement ne pose pas de problème particulier. Les contacts sont aujourd’hui suffisamment nombreux avec les gestionnaires de la dette pour que le Parlement puisse aisément prendre connaissance de la stratégie envisagée en la matière. D’ailleurs, lors de la discussion de l’amendement introduit au Sénat, le Gouvernement s’était engagé à informer les commissions des finances des deux assemblées au cas où se rapprocherait la perspective d’utiliser l’autorisation de principe qui a été délivrée par le Parlement.

• Depuis la loi de finances pour 1991, l’autorisation générale d’emprunt est complétée par un ensemble d’autorisations relatives à des opérations dites « de gestion active » de la dette de l’État. Ces opérations, réalisées sur le marché secondaire de la dette, sont énumérées aux c, d et e du 2° du II du présent article. La politique de modernisation de la dette de l’État, engagée à partir du milieu des années 1980, a rendu nécessaires des interventions du Trésor sur les marchés. La concentration des émissions sur un faible nombre de lignes, très liquides mais « pesant » parfois plus de 15 milliards d’euros, a pour corollaire des charges d’amortissement variant de façon considérable d’année en année, ou de mois en mois. La gestion active de la dette permet de lisser l’échéancier des titres à amortir et d’optimiser le profil de trésorerie de l’État.

L’article 66 de la loi de finances pour 2006 a ajouté parmi les opérations autorisées les contrats portant sur « d’autres instruments financiers à terme », conséquence de la création du compte de commerce Couverture des risques financiers de l’État par l’article 54 de la même loi. Son objet est de retracer l’ensemble des produits et des charges relatifs aux transactions sur instruments financiers à terme effectuées pour la mise en œuvre d’opérations de couverture des risques financiers de l’État, à raison par exemple des variations de cours de change ou de prix.

L’article 52 de la loi de finances pour 2007 a introduit la possibilité pour l’État de souscrire des titres de créances négociables émis par des établissements publics administratifs (e du 2° du II). Dans la logique d’optimisation de la trésorerie des administrations publiques promue depuis 2006, l’État est autorisé à acquérir – provisoirement – des titres afin de faciliter et de sécuriser le lancement de programmes d’émissions par d’autres personnes publiques et, par la même occasion, de limiter l’appel au marché des différents acteurs de la sphère publique. Par exemple, en décembre 2006, la Caisse de la dette publique, dotée de 4,96 milliards d’euros issus des recettes de cessions d’actifs via le compte d’affectation spéciale Participations financières de l’État, a souscrit au premier programme de billets de trésorerie émis par l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS) (94), avant d’en obtenir le remboursement en janvier 2007 et de recouvrer sa trésorerie (augmentée des intérêts).

• Le Rapporteur général rappelle par ailleurs que, depuis la loi de finances pour 2000, la liste traditionnelle des autorisations accordées au ministre de l’économie et des finances a été complétée par la mention d’« opérations de dépôts de liquidités sur le marché interbancaire de la zone euro et auprès des États de la même zone » (d du 2° du II du présent article).

En effet, le Trésor a souhaité élargir la palette des instruments dont il dispose pour gérer au plus près la liquidité de l’État et notamment le niveau de son compte courant auprès de la Banque de France. La pratique des prises en pension de titres détenus par d’autres agents financiers, notamment les spécialistes en valeurs du Trésor, procure déjà un moyen souple et sûr de placer des liquidités excédentaires sur le marché afin d’en obtenir une rémunération supérieure à celle procurée par leur maintien sur le compte courant à la Banque de France. Cependant, il peut survenir des occasions où les opérations de pension ne peuvent satisfaire aux besoins du Trésor. Il semble, par exemple, qu’elles soient difficiles à conclure à certains moments de la journée. Le dépôt de liquidités sur le marché interbancaire permet de retrouver une souplesse infra journalière.

Dans la même perspective, le présent article inclut à nouveau une autorisation accordée au ministre de l’économie, des finances et de l’emploi pour effectuer des opérations de dépôt auprès d’autres États de la zone euro. Les politiques de modernisation de la dette conduites par les États européens – où la France a le plus souvent été à l’avant-garde – conduit à des tensions beaucoup plus fortes qu’auparavant sur les trésoreries des États. Le remboursement de lignes arrivées à échéance, dont le principal s’élève parfois à une dizaine ou une quinzaine de milliards d’euros, peut se conjuguer avec le versement, le même jour, d’une grande partie des intérêts dus dans l’année sur la dette de l’État. Ainsi, en France, les mois d’avril et octobre voient des sorties de trésorerie particulièrement importantes, notamment le 25 de chaque mois pour ce qui est des dépenses budgétaires (versements d’intérêts).

Les États de la zone euro ont, depuis quelques années, engagé un lent rapprochement de leurs calendriers d’émission, dans un cadre coopératif très informel. Ce mouvement a pour corollaire naturel une coordination renforcée en matière de gestion de trésorerie. Certains États se sont montrés intéressés par des opérations d’ajustement coopératif des trésoreries des États, les excédents temporaires des uns pouvant aider à financer, par l’intermédiaire de prêts et dépôts, les besoins temporaires des autres dus, par exemple, à une échéance très lourde.

La disposition incluse dans le présent article vient en complément d’une innovation introduite par le décret n° 99-309 du 21 avril 1999. Celui-ci a autorisé le ministre de l’économie et des finances à « procéder à des opérations d’emprunts sur le marché interbancaire et auprès des États de la zone euro ». Cette innovation pouvait être rattachée à la rédaction du paragraphe II, alinéa 2, de l’article d’équilibre de la loi de finances pour 1999, qui évoque les « emprunts à court terme », sans préciser leur nature. En revanche, les opérations de placement de disponibilités, autorisées dans le cadre de l’alinéa 3 du même paragraphe du même article, ne comportaient pas, dans les lois de finances antérieures à 2000, les mentions du marché interbancaire et des opérations susceptibles d’être conclues avec d’autres États.

• Le Gouvernement demande enfin, comme les années précédentes, de compléter les autorisations de « gestion active » par l’autorisation d’attribuer directement à la Caisse de la dette publique (CDP), créée par l’article 125 de la loi de finances pour 2003, des titres de dette publique (b du 2° du II). Il s’agit de renforcer la capacité d’intervention et d’animation du marché secondaire de la dette de l’État, la CDP étant habilitée à détenir un portefeuille de titres publics susceptibles de faire l’objet d’échanges sur les marchés financiers. La loi de finances pour 2007 a étendu cette autorisation à des opérations de dépôts de liquidités par l’État auprès de la CDP (d du 2° du II présent article). L’article 125 précité autorise en effet l’État à accorder à la CDP des dotations, des prêts ou avances budgétaires et des avances de trésorerie. La mention explicite, parmi les autorisations délivrées au Gouvernement par l’article d’équilibre, de la possibilité d’y déposer également des liquidités a permis de sécuriser les opérations que la CDP peut être amenée à réaliser dans son rôle de surveillance du bon fonctionnement du marché. Les décrets relatifs à l’émission des valeurs du Trésor, pris chaque fin d’année en application de l’article d’équilibre de la loi de finances, mentionnaient d’ailleurs déjà cette possibilité.

B.– LES AUTORISATIONS TRADITIONNELLES DE PRISE DE GARANTIE

Le 3° du II du présent article reprend les dispositions traditionnelles qui ont pour objet d’autoriser le ministre de l’économie, des finances et de l’emploi à prévoir la stabilisation des charges d’emprunts en devises des établissements spécialisés dans le financement à moyen et long terme des investissements. Cette garantie est la contrepartie des encouragements donnés, depuis le milieu des années soixante-dix, à ces établissements pour couvrir une partie de leurs besoins en capitaux sur les marchés internationaux afin de faciliter le financement de la balance des paiements. Depuis la loi de finances pour 2007, il est précisé que les établissements en question doivent être « chargés d’une mission d’intérêt général ».

III.– LE PLAFOND D’AUTORISATION DES EMPLOIS RÉMUNÉRÉS PAR L’ÉTAT

En application du 6° du I de l’article 34 de la LOLF, la première partie de la loi de finances fixe un plafond d’autorisation des emplois rémunérés par l’État. La LOLF a ainsi fort opportunément écarté la notion d’emploi budgétaire – qui correspond, en quelque sorte, aux cases de l’organigramme de l’administration – au profit de celle d’« emploi rémunéré par l’État », plus vaste et indifférente au statut juridique de la personne employée : le seul critère pertinent est l’existence d’un lien juridique entre l’agent et la personne morale État. Les emplois sont exprimés en « équivalents temps plein travaillé » (ETPT), notion qui permet de comptabiliser les agents au prorata de leur période de présence et de leur quotité de travail.

À la différence des plafonds de dépenses qui sont ventilés entre le budget général, chaque budget annexe et chaque catégorie de comptes spéciaux, il s’agit d’un plafond global pour l’ensemble des emplois rémunérés par l’État. Le plafonnement d’un « stock » d’emplois publics apparaît donc comme un élément participant à l’équilibre général du budget de l’État.

Le III du présent article tend à fixer le plafond d’autorisation des emplois rémunérés par l’État à 2 020 252 équivalents temps plein travaillé (ETPT), au lieu de 2 120 830 ETPT en 2009.

En seconde partie du présent projet de loi de finances (à l’article 39), les emplois font l’objet d’une répartition par ministère et par budget annexe, dans la limite du plafond voté en première partie. Ces plafonds ministériels complètent le dispositif de plafonnement de la masse salariale (crédits du titre 2), conformément au III de l’article 7 de la LOLF : « les crédits ouverts sur le titre des dépenses de personnel sont assortis de plafonds d’autorisation des emplois rémunérés par l’État. Ces plafonds sont spécialisés par ministère ».

IV.– L’AFFECTATION DES SURPLUS DE RECETTES

La présence en première partie de la loi de finances d’une disposition arrêtant les conditions de l’affectation des éventuels surplus de recettes fiscales est une possibilité introduite dans la LOLF en 2005. D’après son article 34, tel que modifié par la loi organique n° 2005-779 du 12 juillet 2005, la première partie « arrête les modalités selon lesquelles sont utilisés les éventuels surplus, par rapport aux évaluations de la loi de finances de l’année, du produit des impositions de toute nature établies au profit de l’État ». Cette modification de la loi organique a été motivée par la volonté de définir une norme de comportement budgétaire vertueuse en cas de surplus non anticipés de recettes.

Comme les années précédentes, le IV du présent article prend soin de définir ce qu’il faut précisément entendre par surplus : « il y a constatation de tels surplus si, pour l’année 2010, le produit des impositions de toute nature établies au profit de l’État net des remboursements et dégrèvements d’impôts, révisé dans la dernière loi de finances rectificative de l’année 2010 ou, à défaut, dans le projet de loi de finances pour 2011, est, à législation constante, supérieur à l’évaluation figurant dans l’état A mentionné au I du présent article ».

• Dans la loi de finances pour 2006, le législateur avait posé comme principe l’affectation de ces surplus à la réduction du déficit budgétaire. Il avait néanmoins entendu réserver la possibilité d’affecter les éventuels surplus de recettes issues de la fiscalité pétrolière à des dépenses supplémentaires. Cette disposition avait été censurée d’office par le Conseil constitutionnel au motif que « le législateur organique n’a pas entendu permettre que des règles spécifiques soient prévues pour l’utilisation du surplus constaté à partir d’une catégorie particulière de recettes » (décision 2005-530 DC du 29 décembre 2005).

Il est vrai que, comme l’écrivait le Rapporteur général dans son rapport sur le projet de loi organique modifiant la LOLF, « la distribution d’un surplus susceptible d’apparaître sur une ligne de recettes déterminée, alors même qu’au plan macro budgétaire, l’évolution globale de la conjoncture et des recouvrements se traduirait par une détérioration du solde, serait (…) de mauvaise politique » (95). On ne peut donc qu’approuver le fait que le IV du présent article dispose que les éventuels surplus de 2010 seront « dans leur totalité » affectés à la réduction du déficit budgétaire.

• En 2007, le Conseil constitutionnel a été amené à statuer sur la portée de la règle d’affectation des surplus. Dans sa décision n° 2007-555 DC du 16 août 2007 relative à la loi en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat (dite loi « TEPA »), il a estimé que « la règle d'affectation des surplus a été introduite, en 2005, dans la loi organique du 1er août 2001, afin d’améliorer la gestion des finances de l’État et de renforcer l’information du Parlement ; que ces surplus sont ceux qui sont susceptibles d'être constatés en fin d'exercice en retranchant au produit de l'ensemble des impositions de toutes natures établies au profit de l'État le total prévu par la loi de finances initiale ; que, dès lors, elle n’a ni pour objet ni pour effet de modifier la capacité du législateur à décider, en cours d’exercice, de nouvelles mesures fiscales ». Le Conseil constitutionnel répondait ainsi aux requérants qui estimaient que les mesures d’allégement d’impôts et de cotisations sociales instituées par la loi « TEPA », du fait de leur impact sur les recettes de l’État en 2007, rendaient nécessaire le vote d’une loi de finances rectificative modifiant en conséquence la règle d’affectation des surplus fixée en loi de finances initiale pour 2007 (celle-ci prévoyant une affectation intégrale à la réduction du déficit budgétaire).

Tout en approuvant cette jurisprudence peu contestable, le Rapporteur général considère que, dans l’hypothèse où les surplus de recettes sont, au moins partiellement, mobilisés en cours d’année pour consentir des allégements fiscaux ou pour couvrir de nouvelles dépenses, il convient d’en tirer les conséquences en modifiant, dans la plus prochaine loi de finances, la clause d’affectation figurant à l’article d’équilibre. Une telle interprétation – consacrée il y a deux ans par le Parlement à l’article 7 de la loi de finances rectificative pour 2007 – permet de poursuivre l’objectif initialement assigné à la clause relative à l’utilisation des surplus lors de sa création en 2005 : celui d’être, non pas une règle contraignante et figée, mais un gage de transparence dans la gestion des ressources de l’État.

On rappellera par ailleurs que l’article 9 de la loi de programmation des finances publiques pour les années 2009 à 2012 (loi n° 2009-135 du 9 février 2009) a consacré le principe d’affectation des surplus de recettes à la réduction du déficit budgétaire pour toute la durée de la présente législature.

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La Commission examine l’amendement I-CF 89 de M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. On va nous faire voter à cet article un déficit de 116 milliards. Si on enlève les 15 milliards du plan de relance, il reste 101 milliards, se partageant par moitié entre un déficit structurel et un déficit qu’on espère conjoncturel. Nous avons fait des propositions pour engager la réduction du déficit structurel, qui aboutissent à réduire de 5 milliards les charges de l’État et le déficit.

M. le rapporteur général. Vous êtes trop bon spécialiste pour ne pas savoir que c’est programme par programme que l’on peut identifier les économies possibles. On ne peut pas modifier l’article d’équilibre sans les préciser.

M. Charles de Courson. En 1996, je faisais partie de ceux qui avaient déposé un amendement sur l’article d’équilibre – et il avait été adopté.

La Commission rejette l’amendement I-CF 89.

Puis elle adopte l’article 34 sans modification.

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La Commission adopte l’ensemble de la première partie du projet de loi de finances ainsi modifiée.

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© Assemblée nationale

1 () Dans le présent projet, cette préoccupation est prolongée par le reclassement parmi les recettes fiscales des frais d’assiette et de recouvrement des impôts locaux.

2 () Ce progrès s’inscrit dans le droit fil des préconisations du Conseil des impôts dans son rapport de 2003 intitulé La fiscalité dérogatoire. Pour un réexamen des dépenses fiscales.

3 () MM. Didier Migaud, Gilles Carrez, Jean-Pierre Brard, Jérôme Cahuzac, Charles de Courson et Gaël Yanno, Rapport d’information n° 946, juin 2008.

4 () La mise en œuvre de ces règles est commentée dans le tome I du présent rapport général.

5 () Le tome II de l’annexe des voies et moyens fournit également une récapitulation par mission et programme, dans l’ordre abécédaire, de l’ensemble des dépenses fiscales.

6 () Les niches sociales sont soumises aux mêmes exigences.

7 () La complexité de la matière tient notamment à la grande hétérogénéité des qualifications retenues par le législateur : « impôt », « taxe », « surtaxe », « redevance », « droit », « cotisation », « prélèvement » etc. On sait qu’au-delà de cette diversité sémantique, la seule catégorie juridique pertinente est celle des « impositions de toute nature » et que les jurisprudences du Conseil d’État et du Conseil constitutionnel n’hésitent pas à requalifier comme telles les « faux amis » que constituent parfois certaines « redevances » ou certaines « cotisations ».

8 () En particulier, les impositions affectées aux collectivités territoriales sont ici plus largement entendues.

9 () Le produit attendu dans le projet de loi de finances pour 2009 était de 1,4 milliard d’euros.

10 () Il faut rappeler qu’aux termes de la loi de finance initiale pour 2009 et de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2009, la répartition de l’affectation entre les différents organismes sociaux du produit des droits sur les tabacs et du produit des différents droits sur les alcools a été profondément modifiée, à des fins de simplification. La totalité des droits sur les alcools bénéficie désormais au régime des non-salariés agricoles, tandis qu’a été augmentée la part des droits sur les tabacs affectée à la compensation du coût des allégements généraux de cotisations sociales. On conviendra cependant que, du fait du fractionnement persistant du produit des droits sur les tabacs, la simplification opérée en 2009 demeure relative : si boire du cidre contribue assurément au financement du régime des non-salariés agricoles, fumer le cigare peut bénéficier tout autant au régime général de sécurité sociale, au Fonds national d’aide au logement ou encore au Fonds de solidarité.

11 () Depuis le 1er janvier 2009, le CNC est affectataire de la taxe sur le prix des entrées aux séances organisées dans les établissements de spectacles cinématographiques, de la taxe sur les services de télévision et de la taxe sur les ventes et les locations de vidéogrammes filmés destinés à l’usage privé du public. Le Rapporteur général renvoie sur ce point à son commentaire de l’article 22 du projet de loi de finances pour 2009 (Rapport général, Tome II, n° 1198, octobre 2008, p. 249).

12 () Comme l’impôt sur les sociétés dû au titre de l’année 2008 ne devait être liquidé qu’en avril 2009, les entreprises ont dû estimer, d'une part, le montant du crédit d'impôt calculé à raison des dépenses de recherche engagées au titre de l'année 2008 et, d'autre part, le montant de l'impôt dû au titre de 2008 et, si la différence entre les deux était positive, en demander le remboursement immédiat. Cependant, afin d’éviter les abus, si le montant du remboursement était surévalué de 20 % par l’entreprise, celle-ci sera sanctionnée par une majoration de son impôt et par l’application de l’intérêt de retard.

13 () Inversement, et très logiquement, l’alinéa 8 du présent article dispose que le montant du crédit d’impôt recherche calculé à raison des dépenses de recherche engagées au titre de l’année 2009 et utilisées pour le paiement de l’impôt dû au titre de cette année est diminué du montant du remboursement.

14 () À l’exception toutefois de la tourbe, cette dernière étant exonérées en application de l’article 2 de la directive 2003/96/CE susmentionnée.

15 () La directive 2008/101/CE du 19 novembre 2008 dispose cependant que le transport aérien sera inclus dans le système européen de quotas d’émission dès le 1er janvier 2012.

16 () L’article 14 de la directive n’exonère obligatoirement que les produits énergétiques utilisés pour la production d’électricité. En revanche, l’article 21 ouvre la possibilité aux États-membres qui le souhaitent de na pas taxer les produits énergétiques utilisés pour produire l’énergie.

17 () Toute tentative de contourner ces dispositions serait sanctionnée par la CJCE. La Suède s’y était risquée en instituant, sur ses vols intérieurs (à l’époque obligatoirement exonérés au même titre que les vols intracommunautaires aujourd’hui), une taxe environnementale calculée sur la consommation de carburant et les émissions d'hydrocarbures et de monoxyde d'azote des aéronefs. Saisie, la CJCE a considéré, dans son arrêt Braathens Sverige AB du 10 juin 1999, cette taxe contraire au droit communautaire car remettant en cause « le caractère inconditionnel de l’obligation d’exonération » du carburéacteur.

18 () C’est la raison pour laquelle le Conseil constitutionnel, dans sa décision DC n° 2000-441 du
28 décembre 2000, a censuré l’extension de la TGAP à l’électricité, au motif que l’objectif de cette extension était la lutte contre l’effet de serre, auquel ne participe pas l’électricité d’origine principalement nucléaire et hydraulique.

19 () En août 2009, la tonne de carbone se négociait en moyenne à 14,60 euros sur le marché européen des quotas d’émission, le cours ayant été divisé par deux depuis le début de l’année 2008.

20 () Actuellement, le taux est en Suède à 108 euros/tonne. Il était de 27 euros/tonne en 1991 lorsque la taxe carbone a été institué.

21 () Les produits non mentionnés dans le tableau se verront appliquer « par assimilation », le taux applicable à la catégorie de produit à laquelle ils appartiennent.

22 () Au contraire, si la taxe carbone avait pris la forme de taxe à la consommation, assise sur le contenu en carbone des produits de consommation, les redevables se seraient chiffrés en centaines de milliers, rendant le recouvrement et le contrôle très difficile, sans parler de la difficulté à mesurer incontestablement le contenu en carbone desdits produits…

23 () La mise à la consommation est une notion définie par l’article 6 de la directive 92/12/CEE du 25 février 1992 relative au régime général, à la détention, à la circulation et au contrôle de certains produits soumis à accises.

24 () En effet, en application de l’article 158 A du code des douanes, seul un entrepositaire agréé (par l’administration des douanes) peut « exploiter un entrepôt fiscal de produits pétroliers, y recevoir, détenir et expédier des produits pétroliers ».

25 () Cette autorisation, nominative et incessible, est délivrée par le ministre chargé de l’énergie dans les conditions fixées par le décret n° 2004-250 du 19 mars 2004.

26 () Le cas de l’industrie chimique est en outre l’objet de l’alinéa 9 du présent article.

27 () En revanche, elle s’est appliquée au Royaume-Uni qui, pour les plus petites installations soumises aux quotas européens d’émission, a mis en place un système national d’échange de quotas, leur permettant, si elles le souhaitent, de sortir du système européen.

28 () Ces deux définitions sont directement issues des 1 et 2 de l’article 17 de la directive 2003/96/CE précitée qui autorise les États membres à appliquer un niveau de taxation allant jusqu’à zéro aux produits énergétiques et à l’électricité lorsqu’ils sont utilisés par des entreprises grandes consommatrices d’énergie.

29 () L’article 2 de la directive 2003/96/CE place « hors champ » des accises uniquement l’utilisation des produits énergétiques à double usage, par exemple pour la réduction chimique ou l’électrolyse.

30 () Voir le commentaire de l’article 7.

31 () Ou, en leur lieu et place, les entreprises titulaires des contrats cités à l'article 284 bis A du même code.

32 () Ce taux de 39,19 euros/hl est le taux minimal de taxation du gazole professionnel qui s’impose à la France en application de l’article 7 de la directive 2003/96/CE du 27 octobre 2003.

33 () Selon que les régions ont utilisé ou non leur possibilité d’augmenter de 1,15 centime la TIPP sur le gazole. En 2009, seules les régions Corse et Poitou-Charentes n’ont pas encore utilisé cette possibilité d’augmenter leur taux de TIPP.

34 () Ce taux moyen ne s’applique pas puisqu’il n’y a que deux taux de TIPP différents en métropole (hors Corse), l’ensemble des régions, à l’exception de Poitou-Charente ayant augmenté de 1,15 centime par litre leur taux de TIPP sur le gazole.

35 () En revanche, le recours à ces véhicules par les donneurs d’ordres sera exonéré de TGAP (voir infra).

36 () Le problème ne se pose pas s’il réalise lui-même le service de transport. Dans ce cas, il paiera la taxe carbone et, n’étant pas une entreprise de transport (par définition assujettie à la TVA), il ne pourra se la faire rembourser.

37 () Aux termes du 3° du I de l’article 256 bis du code général des impôts, « est considérée comme une acquisition intracommunautaire l’obtention du pouvoir de disposer comme un propriétaire d’un meuble corporel expédié ou transporté en France par le vendeur, l’acquéreur ou pour leur compte, à destination de l’acquéreur à partir d’un autre Etat-membre de la Communauté européenne ».

38 () En application du 2 du I de l’article 291 du code général des impôts, « est considérée comme importation d’un bien l’entrée en France d’un bien, originaire ou en provenance d’un État ou d’un territoire n’appartement pas à la Communauté européenne ».

39 () Le cas des commissionnaires en transport, intermédiaire entre un preneur et un transporteur, est réglé par l’alinéa 30 du présent article. Il sera exonéré de la TGAP TRM dès lors que le preneur en sera redevable et que les factures qu’il lui remettra comporteront toutes les informations lui permettant de liquider la taxe.

40 () Il dispose en effet que : « le remboursement est également accordé aux entreprises établies dans un autre Etat membre de la Communauté européenne qui sont en mesure de justifier qu'elles ont acquis du gazole en France au cours de la période couverte par le remboursement et que ce gazole a été utilisé comme carburant dans des véhicules » éligibles au remboursement (soit des véhicules de plus 7,5 tonnes).

41 () C’est le cas, par exemple, où un particulier acquiert un service de transport routier de marchandises.

42 () En application de l’alinéa 46, la TGAP sur le transport routier de marchandises sera « recouvrée et contrôlée dans les conditions mentionnées à l’article 266 duodecies » du code des douanes, c'est-à-dire selon les règles, garanties, privilèges et sanctions prévus par ledit code.

43 () En effet, les prestations de transports sont soumises à la TVA. Dès lors, les entreprises seront en possession de bons d’expédition, de chargement…. Les vérifications de comptabilité permettront de faire apparaître des distorsions entre les déclarations déposées et les factures conservées par l’entreprise. Les agents des impôts alerteront alors l’attention des agents des douanes pour qu’ils réalisent un contrôle plus approfondi.

44 () Par ailleurs, il convient de souligner que la taxe carbone, charge d’exploitation, sera déductible de l’assiette de la nouvelle cotisation complémentaire sur la valeur ajoutée instituée par l’article 2 du présent projet de loi ainsi que de l’assiette de l’impôt sur les bénéfices.

45 () Voir le commentaire sous l’article 6.

46 () Il ne sera cependant pas applicable dans les collectivités d’outre-mer.

47 () Sont considérés comme à la charge du contribuable, en application de l’article 196 du code général des impôts, ses enfants âgés de moins de 18 ans ou infirmes et les enfants qu’il a recueillis dans son propre foyer. Sont également considérées à charge, à la condition qu’elles vivent sous le même toit que le contribuable, les personnes titulaires de la carte d’invalidité prévue à l’article L. 241-3 du code de l’action sociale et des familles (article 196 bis A du code général des impôts) ainsi que toute personne majeure âgée de moins de 21 ans ou de moins de 25 ans lorsqu’elle poursuit ses études ou, quel que soit son âge, lorsqu’elle effectue son service militaire ou est atteinte d’une infirmité et qui est rattachée au foyer fiscal du contribuable (article 196 B du même code).

48 () Ainsi que, le cas échéant, dans le territoire de plusieurs communes adjacentes ayant décidé d'organiser en commun un service de transports publics de personnes via un EPCI.

49 () Les contribuables ayant opté pour les acomptes mensualisés recevront par anticipation, sans démarche de leur part, le versement du crédit d'impôt selon des modalités pratiques qui seront fixées par décret (il devrait s’agir d’un chèque ou d’un virement).

50 () L’impôt sur le revenu calculé sur la base de ces déclarations a en effet vocation à comprendre le crédit d'impôt considéré.

51 () Les pêcheurs bénéficient en effet d’un taux de taxe carbone réduit de 75 % sur leurs consommations de gazole et de supercarburant (voir le commentaire sous l’article 5 du présent projet de loi).

52 () Les caractéristiques thermiques minimales actuellement en vigueur pour les bâtiments neufs prennent en effet en compte la consommation d’énergie liée à un éventuel recours à la climatisation.

53 () L’installation d’un climatiseur fixe de classe A ouvre en effet droit à la délivrance de certificats d’économie d’énergie dans le secteur tertiaire, en cas de remplacement en France et dans tous les cas dans les départements d’outre-mer.

54 () Sont notamment visés les chaudières utilisées comme mode de chauffage ou de production d’eau chaude, les cuves à fioul, les citernes à gaz et les pompes à chaleur, tous les ascenseurs et les cabines hammam et les saunas prêts à poser.

55 () L’application du taux normal est une exigence du droit communautaire. L’annexe III à la directive 2006/112/CE, laquelle s’est substitué à l’annexe H de la directive 77/388/CEE, dispose en effet que les Etats membres peuvent appliquer un taux réduit de TVA à « la rénovation et la réparation de logements privés, à l’exclusion des matériaux qui représentent une part importante de la valeur du service fourni ».

56 () Il n’y a plus aujourd’hui de correspondance parfaite entre les gros équipements exclus du taux réduit de TVA en application de l’article 279-0 bis et ceux qui bénéficient du crédit d’impôt de l’article 200 quater. Les installations sanitaires sont totalement exclues des deux dispositifs, de même que les ascenseurs, à l’exception des ascenseurs électriques à traction possédant un contrôle avec variation de fréquence. Quant aux installations de chauffage, seules les plus performantes du point de vue énergétique ou environnemental bénéficient désormais du crédit d’impôt.

57 () Un climatiseur « mono-split » est un climatiseur qui dispose d'une seule unité intérieure pour une unité extérieure.

58 () Un climatiseur « multi-split » est un climatiseur permettant le raccordement de plusieurs unités intérieures sur une seule unité extérieure.

59 () Les taux de TVA sont, dans les départements d’outre mer, de 2,1% pour le taux réduit et de 8,5 % pour le taux normal.

60 () Loi n° 2009-135 du 9 février 2009 de programmation des finances publiques pour les années 2009 à 2012.

61 () Le dernier alinéa de l’article 72-2 de la Constitution dispose : « La loi prévoit des dispositifs de péréquation destinés à favoriser l’égalité entre les collectivités territoriales. »

62 () C’est la loi de finances pour 2009 qui a réformé l’indexation pour la fonder sur l’inflation prévisionnelle associée au projet de loi de finances.

63 () Cet article est commenté dans le rapport spécial consacré aux crédits de la mission Relations avec les collectivités territoriales.

64 () Article 135 de loi n° 2005-32 du 18 janvier 2005 de programmation pour la cohésion sociale.

65 () Loi n° 83-663, complétant la loi n° 838 du 07-01-1983 relative à la répartition des compétences entre les communes, les départements, les régions et l’État.

66 () Les compensations des deux exonérations applicables aux activités équestres qui étaient exemptées en 2009 se sont éteintes.

67 () Se reporter au commentaire de l’article 13 du présent projet de loi pour la décomposition du périmètre normé et les progressions des grandes catégories de concours.

68 () Il faut rappeler, en effet, que l’article 52 de la loi de finances pour 2005 (n° 2004-1484) a substitué, dans le cadre du financement des Services départementaux d’incendie et de secours (SDIS), à une part de la dotation de compensation des départements une fraction de taux de la TSCA-VTM. L’article 11 de la loi de finances rectificative pour 2006 a fixé définitivement cette fraction à 6,45 %, pour tenir compte de l’assiette définitive de cette taxe en 2005.

69 () Loi organique n° 2004-758 du 29 juillet 2004 prise en application de l'article 72-2 de la Constitution relative à l'autonomie financière des collectivités territoriales.

70 () Aux termes du décret n° 2006-1139 du 12 septembre 2006 sur le fonds de solidarité pour le développement pris en application de l'article 22 de la loi de finances rectificative pour 2005 instaurant une contribution de solidarité sur les billets d'avion, les recettes de la majoration de la taxe d'aviation civile affectées au fonds de solidarité pour le développement sont utilisées à hauteur d'au moins 90 % pour le financement de la facilité internationale d'achat de médicaments (UnitAid) et, dans la limite de 10 %, pour le remboursement de la première émission d'emprunt de la facilité de financement internationale pour la vaccination.

71 () Soit :

– la masse salariale des effectifs travaillant directement dans les domaines des politiques de l'aviation civile (68,4 millions d’euros) ;

– des crédits de l’ancien programme 225 Transports aériens, supprimé en loi de finances pour 2009 (39,4 millions d'euros) ;

– des crédits du ministère des Affaires étrangères couvrant la cotisation de la France à la Conférence européenne de l'Aviation civile (300 000 euros).

72 () Le fonds finance des projets aussi variés que les véhicules hybrides ou électriques, le stockage et le captage du CO2 ou la production de biocarburants de deuxième et troisième générations. Il est, en quelque sorte, un capharnaüm des nouvelles technologies de l’énergie.

73 () Loi n °2009-967 du 3 août 2009 de programmation relative à la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement

74 () Loi n° 2005-1719 du 30 décembre 2005 de finances pour 2006

75 () Article 10 de la loi n°2008-1443 du 30 décembre 2008 de finances rectificative pour 2008.

76 () Article 57 de la loi n°20089-1425 du 27 décembre de finances pour 2009.

77 () Voir les rapports suivants :

- Rapport (n° 923) de la Mission d’évaluation et de contrôle (MEC) intitulé « Immobilier de l’État : une réforme au milieu du gué » et présenté en juin 2008 par MM. Yves Deniaud et Jean-Louis Dumont, sous la présidence de MM. Georges Tron et David Habib.

- Rapport spécial (n° 1198 annexe 26) sur le projet de loi de finances pour 2009 présenté en novembre 2008 par M. Yves Deniaud.

78 () Ils seront régis par les dispositions du décret n° 79-714 du 23 août 1979 relatif au droit à pension de certains ouvriers réglementés des établissements industriels du ministère de la défense employés par le CEA ou par une filiale de ce Commissariat. Il prévoit, pour les ouvriers affectés au CEA et placés en congé sans salaire, une prise en compte des services effectués au CEA dans la constitution du droit à pension. Ils restent en particulier affiliés au fonds spécial de pension des ouvriers des établissements industriels de l’État.

79 () Opérateur rattaché au programme Forêt de la mission Agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales, l’ONF est un établissement public industriel et commercial placé sous la tutelle des ministres chargés de la forêt et de l’environnement.

80 () D’autres décisions relatives à l’ONF ont été arrêtées dans le cadre de la Révision générale des politiques publiques (RGPP). En réponse à une question écrite (JO, Sénat, 20 août 2009, p. 1982), le ministère de l’alimentation, de l’agriculture et de la pêche indiquait ainsi : « des décisions ont été prises à la suite du comité de modernisation des politiques publiques du 11 juin 2008, notamment une réduction d’effectifs, du fait du non-remplacement d’un départ à la retraite sur deux applicable à l’ONF, comme à l’ensemble des opérateurs de l’État, l’intégration de l’Inventaire forestier national et la réalisation de gains de productivité pour permettre le versement de dividendes à l’État. Par ailleurs, le Premier ministre a fait part le 18 septembre 2008 du projet du Gouvernement de relocaliser le siège de l’ONF à Compiègne, dans le cadre du plan d’accompagnement des territoires concernés par les restructurations des unités militaires. En outre, l’ONF devra prendre en charge, comme les autres opérateurs, l’augmentation par palier jusqu’en 2011 de la part patronale de la cotisation des pensions civiles, afin de garantir la retraite des fonctionnaires ».

81 () Cette orientation est également affirmée dans la circulaire du Premier ministre du 16 janvier 2009 relative à la politique immobilière de l’État.

82 () Articles R. 128-12 et suivants du code du domaine de l’État. L’article 6 du décret précité ouvre une période transitoire de cinq ans pour la conclusion de conventions relatives à des immeubles déjà affectés ou déjà remis en dotation.

83 () Le TGPE est un inventaire destiné à recenser l’ensemble des biens immobiliers détenus en propriété et en jouissance par l’État et ses opérateurs. Depuis le 1er avril 2009, il a vocation à être remplacé par l’application Chorus-RE (Real Estate).

84 () Ce montant, qui sera versé en recettes du compte d’affectation spéciale Gestion du patrimoine immobilier de l’État, devrait servir au financement du regroupement rue de Picpus des services centraux du ministère de l’Agriculture et de la pêche. La convention stipule que le premier versement pourra intervenir avant la fin de l’année 2009, nonobstant l’absence de signature du bail.

85 () Parmi les précédents, peuvent par exemple être cités l’article 8 de la loi n° 97-135 du 13 février 1997 portant création de l’établissement public Réseau ferré de France, l’article 36 de la loi de finances initiale pour 2007 (n° 2006-1666 du 21 décembre 2006) transférant des biens de l’État au nouvel établissement public Monnaie de Paris ou bien encore l’article 56 de la loi de finances initiale pour 2008 (n° 2007-1822 du 24 décembre 2007) transférant des biens de l’Agence de l’innovation industrielle à OSEO. On trouve également une disposition similaire à l’article 31 du présent projet de loi de finances, à propos du transfert d’un centre d’études de la Délégation générale pour l’armement au Commissariat à l’énergie atomique.

86 () Dans l’attente des résultats définitifs de l’évaluation des immeubles, le montant total des loyers est actuellement estimé à 322 à 359 millions d’euros.

87 () La contribution nette prend en compte les frais de perception des ressources reversés par l’Union.

88 () Pour plus d’information sur cette résolution et l’avant-projet de budget de la Commission pour 2010, se référer au rapport n° 1805 de M. Jean-Louis Dumont

89 (1) Selon la méthode comptable, le solde net se calcule en faisant la différence entre la contribution brute de l’État membre nette des frais de perception et le montant des dépenses effectuées dans cet État membre, y compris les dépenses administratives.

90 (2) Selon la méthode dite du « rabais britannique », le solde net est calculé sans tenir compte du montant des ressources propres traditionnelles. La méthode dite « de la Commission » utilise la méthode dite « du rabais britannique », en excluant les dépenses administratives, ce qui a pour effet de rendre contributeurs nets le Luxembourg et la Belgique qui bénéficient fortement de l’implantation des institutions européennes sur leur territoire.

91 () En plus de sa fonction d’animation du marché secondaire, décrite infra, 2.

92 () En particulier dans son rapport sur les résultats et la gestion budgétaire de l’État en 2007 (mai 2008).

93 () Cette dernière est en effet incluse dans le besoin de financement (au titre du déficit budgétaire), alors même qu’elle ne correspond à aucun flux en trésorerie. Il convient donc, en contrepartie, de la faire apparaître parmi les ressources de financement.

94 () Cette possibilité a été ouverte à l’ACOSS par l’article 38 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2007 (n° 2006-1640 du 21 décembre 2006).

95 () Rapport n° 1926, novembre 2004, p. 33.