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N° 2218

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 13 janvier 2010.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES SUR LA PROPOSITION DE LOI relative à la protection des missions d’intérêt général imparties aux services sociaux et à la transposition de la directive services,

PAR M. Jean-Patrick GILLE,

Député.

——

Voir les numéros :

Assemblée nationale : 2149

INTRODUCTION 5

I.- LES SERVICES SOCIAUX DANS LA DIRECTIVE SERVICES 7

A. LA DIRECTIVE SERVICES : UNE DIRECTIVE ORIGINALE 7

1. Une directive qui est le fruit de négociations tendues entre la Commission et le Parlement européen 7

a) Une adoption issue d’un compromis 7

b) Un dispositif complexe 8

2. Une transposition française de la directive services essentiellement technique 9

B. LA TRANSPOSITION DANS LE SECTEUR SOCIAL 10

1. Une procédure de transposition très opaque 11

a) Un Parlement tenu à l’écart 11

b) La très insuffisante implication des acteurs du secteur 13

c) Des collectivités locales trop peu consultées 13

2. Une liste bien trop restreinte pour le secteur social 14

a) Des critères d’exclusion complexes 14

b) Le champ des exclusions retenues 15

c) La question de la petite enfance 16

II.- LES SERVICES SOCIAUX ET LA PROBLÉMATIQUE DES AIDES D’ÉTAT 19

A. LES RÈGLES COMMUNAUTAIRES RELATIVES AUX AIDES PUBLIQUES D’ÉTAT S’APPLIQUENT EN THÉORIE AUX SERVICES SOCIAUX 19

1. La réglementation européenne des aides d’État s’applique également aux associations 20

2. L’octroi d’une aide publique à une association exerçant une activité économique d’intérêt général doit respecter certaines règles 21

3. Les difficultés liées au recours aux subventions 22

B. CETTE APPLICATION SOULÈVE DE FORTES DIFFICULTÉS 23

C. LA PROPOSITION DE LOI CRÉE UN OUTIL CLAIR DE MANDATEMENT 25

III.- ANTICIPER LES DÉFIS DU FUTUR EN RECONNAISSANT LE RÔLE FONDAMENTAL DES SERVICES SOCIAUX 27

A. LE TRAITÉ DE LISBONNE OUVRE DE NOUVELLES OPPORTUNITÉS POUR LES SERVICES D’INTÉRÊT GÉNÉRAL 27

B. LES SERVICES SOCIAUX SERONT AU CœUR DE LA PROCHAINE MANDATURE DU PARLEMENT EUROPÉEN 28

1. La suite de la mise en œuvre de la directive : la phase d’évaluation mutuelle 28

2. Les débats à venir 29

TRAVAUX DE LA COMMISSION 33

I.- DISCUSSION GÉNÉRALE 33

II.- EXAMEN DES ARTICLES 45

Article 1er Exclusion des services sociaux de la directive services 45

Article 2 Définition des services sociaux d’intérêt général 49

Article 3 Instauration d’une exigence de mandatement 50

Article 4 Définition du mandatement et création d’une convention de partenariat d’intérêt général 52

Article 5 Principes applicables aux services sociaux 54

TABLEAU COMPARATIF 57

ANNEXE AU TABLEAU COMPARATIF 63

AMENDEMENTS EXAMINÉS PAR LA COMMISSION 73

ANNEXES 75

ANNEXE 1 : ÉLÉMENTS D’INFORMATION SUR LE DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE APPLICABLE OU EN COURS D’ÉLABORATION  75

ANNEXE 2 : GLOSSAIRE 83

ANNEXE 3 : LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LE RAPPORTEUR 85

INTRODUCTION

La proposition de loi déposée par le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche a pour objectif de combler un vide démocratique et de permettre un débat public sur une question essentielle pour l’avenir de notre modèle social : il s’agit de la place des services sociaux dans notre système économique et social et de leur préservation dans le nouveau contexte juridique européen.

Il s’agit d’un sujet techniquement complexe, qui peut paraître éloigné des préoccupations immédiates de nos compatriotes. Mais, il s’agit pourtant d’un sujet essentiel dont l’importance va aller grandissante et il est impératif d’anticiper ce débat, en prenant des positions politiques claires, sans attendre que des décisions lourdes de conséquence soient prises, décisions que l’on nous présentera alors comme absolument indispensables, car imposées par l’Union européenne.

Le Gouvernement a fait le choix de ne pas rendre public le débat relatif à la transposition de la directive services adoptée en 2006 et a, écarté le Parlement de cette discussion : il a privilégié une approche exclusivement technique du dossier, négligeant de fait sa dimension politique. Le Parlement s’est donc trouvé dessaisi de cette question essentielle alors que tous les autres États-membres (hormis l’Allemagne dont la structure fédérale rendait une telle disposition difficile) ont fait le choix d’une loi-cadre pour transposer la directive services. Cette absence de débat public a nourri l’inquiétude du secteur social qui, rappelons le, représente près de deux millions de salariés et est constitutif de notre identité républicaine. Les interrogations portent légitimement sur les intentions du Gouvernement, notamment quand celui-ci renonce à utiliser toutes les possibilités d’exclusion du champ d’application de la directive.

Ce secteur est aujourd’hui inquiet face aux évolutions du droit européen : certes, le droit communautaire a petit à petit reconnu l’existence comme la nécessité de règles spécifiques et protectrices pour les services d’intérêt économique général et, parmi eux, pour les services sociaux. Mais, parallèlement, ces services se trouvent confrontés à l’application du droit communautaire dans les domaines de la concurrence et du marché intérieur : la réglementation relative aux aides d’État et l’entrée en vigueur de la directive services adoptée en 2006. Ces deux domaines sont distincts, mais se rejoignent autour de la notion de mandatement, notion essentielle que tente de définir la proposition de loi.

Au final, un des enjeux fondamentaux du dossier consiste à exclure du champ d’application de la directive les services sociaux d’intérêt général ainsi qu’à inscrire tous les autres services d’intérêt général relevant de la protection sociale, de la cohésion sociale, de la solidarité nationale et de la mise en œuvre des droits fondamentaux à la dignité et à l’intégrité humaines dans les dispositions du droit communautaire relatives aux services d’intérêt général, dispositions protectrices du bon accomplissement des missions particulières qui leur sont imparties et qui priment sur l’application des règles de concurrence (interdiction des aides d’État) et du marché intérieur (interdiction des agréments et autres régimes d’autorisation induisant une entrave à la liberté d’établissement et de prestation). C’est précisément ce que fait l’article 2 de cette proposition de loi.

Au final, ce rapport a trois objectifs : le premier est pédagogique, il est de rendre public et compréhensible un débat complexe mais fondamental ; le deuxième est d’utiliser au maximum les possibilités d’exclusion du secteur social du champ de la directive ; le troisième est de sécuriser le financement et les relations entres les autorités publiques, et en premier lieu les collectivités locales, et les acteurs du tiers secteur et de l’économie sociale et solidaire.

I.- LES SERVICES SOCIAUX DANS LA DIRECTIVE SERVICES

La proposition de loi déposée par le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche a pour objectif principal de transposer dans le domaine social la directive n° 2006-123 du 12 décembre 2006 relative aux services dans le marché intérieur (dénommé ci-après directive services). Pour clarifier les enjeux liés à une telle transposition, il est essentiel de rappeler les conditions d’élaboration de cette directive et ses objectifs.

A. LA DIRECTIVE SERVICES : UNE DIRECTIVE ORIGINALE

Lointaine héritière de la directive « Bolkestein » qui a fait l’objet de tant de polémiques, la directive services est une directive originale, tant dans son objectif que dans sa transposition.

1. Une directive qui est le fruit de négociations tendues entre la Commission et le Parlement européen

a) Une adoption issue d’un compromis

Au départ, la directive services s’inscrit dans le cadre général de la l’approfondissement du Marché intérieur, puisqu’elle vise à concrétiser l’une des quatre libertés fondamentales inscrites dans le Traité de Rome (liberté de circulation des personnes, des marchandises, des services et des capitaux).

Les travaux qui ont conduit à l’élaboration de cette directive sont partis d’un constat simple : alors que les services représentent 70 % du PIB de l’Union européenne, les échanges de services ne représentent que 20 % des échanges commerciaux au sein de l’Union. La libre prestation de services et son corollaire, la liberté d’établissement des prestataires de services, bien qu’inscrits au plus haut niveau de la hiérarchie des normes communautaires depuis les origines de la construction européenne, sont restés largement « lettre morte », surtout par comparaison avec la libre circulation des marchandises.

Certes, des textes communautaires sectoriels existaient déjà avant cette directive dans le domaine des services, mais par définition aucun d’eux n’avait une portée générale. L’ensemble normatif qu’ils constituent demeurait fragmenté, et de très nombreux obstacles juridiques empêchent les prestataires de service d’un État membre d’exercer leur activité ponctuellement ou durablement dans un autre État membre.

La Commission européenne a donc souhaité élaborer un texte « horizontal », englobant l’ensemble des services quel que soit leur secteur d’activité. Mais la Commission s’est heurtée au Parlement européen qui a profondément remanié le texte qu’elle avait élaboré : en particulier, le Parlement a rejeté le principe du pays d’origine, qui, en l’absence d’harmonisation des secteurs concernés, représentait un fort risque de dumping social et juridique et pouvait favoriser la concurrence déloyale et la baisse de la qualité de l’offre de services. Le Parlement a également souhaité, à l’issue d’un compromis passé entre les différents groupes politiques, exclure un certain nombre de services du champ de la directive, au premier rang desquels les services sociaux.

Au final, c’est donc un texte très en deçà des ambitions initiales de la Commission, et de certains États membres, qui a été adopté.

b) Un dispositif complexe

La directive se compose de plusieurs dispositifs, ce qui rend sa mise en œuvre extrêmement lourde pour les États.

Le premier volet de la transposition est le passage en revue de la législation nationale. La préparation de la transposition commence par un recensement exhaustif de tous les régimes juridiques nationaux d’autorisation ou d’agrément applicables aux activités de service dans un État donné. Selon les États, et selon les activités, il peut s’agir de textes juridiques législatifs ou réglementaires. Il peut arriver qu’une activité de services qui est, dans tel État, soumise à autorisation, puisse être exercée sans autorisation dans un autre État membre.

Une fois établie cette liste de régimes existants, chaque État doit les examiner un par un pour déterminer si chacun d’eux remplit les conditions, fixées par la directive, permettant d’affirmer qu’ils ne sont pas contraires au droit communautaire.

Il convient d’insister sur le fait que tous les régimes d’autorisation ou d’agrément d’activités de services ne vont pas être mécaniquement et systématiquement supprimés : la directive édicte des critères permettant aux États membres d’apprécier dans quelle mesure le maintien de chacun de ces régimes est justifié. Une fois tous les textes identifiés, il faut apprécier la nécessité, la proportionnalité et le caractère non-discriminatoire de chacun d’eux.

Le deuxième volet est la mise en place des « guichets uniques ». Les « guichets uniques » nationaux fourniront des informations sur les droits et les formalités à accomplir aux prestataires et aux bénéficiaires de services. Ils devront offrir aux prestataires de services la possibilité de communiquer avec l’organisme délivreur d’autorisation.

Plusieurs États ont lancé des expérimentations au niveau national ou au niveau infra-national (dans certains Länder autrichiens et allemands). La France et le Portugal testent actuellement leurs structures auprès de certains secteurs : la profession d’architecte et le secteur immobilier pour la France, le secteur du tourisme pour le Portugal. Les Pays-Bas, le Royaume-Uni et l’Estonie coopèrent afin de s’assurer que leurs guichets nationaux respectifs fonctionnent bien sur une base transfrontalière.

Enfin, la directive services impose aux États membres des obligations importantes en termes de coopération administrative. Cette coopération va exiger la participation d’un grand nombre d’autorités à tous les niveaux d’administration ainsi que des organisations professionnelles.

Pour rendre ceci possible techniquement, la Commission européenne et les États ont mis en place le système IMI (Internal Market Information system), qui permettra d’identifier les interlocuteurs pertinents dans chaque État, de communiquer de manière rapide et par voie électronique.

2. Une transposition française de la directive services essentiellement technique

La directive a été définitivement adoptée le 12 décembre 2006 et les vingt-sept États membres avaient jusqu’au 28 décembre 2009 pour la transposer en droit national. Ce délai de trois ans a été très bref vu le nombre de secteurs, d’activités et de textes concernés. En France, il appartenait au gouvernement de dresser la liste exhaustive de tous les textes devant être modifiés : lois, décrets, arrêtés, etc., puis de déposer le ou les projets de loi correspondants.

Tous les ministères ont été concernés par la transposition de la directive services, à l’exception du ministère des affaires étrangères et du ministère de la défense. Une mission interministérielle, dirigée par Mme Marie-José Palasz, que votre rapporteur a rencontrée, a été créée en mars 2007 pour assurer le pilotage des travaux.

Le rôle de la mission interministérielle est d’assurer la cohérence des travaux des ministères, mais pas d’opérer elle-même la transposition. Chaque ministère est responsable de l’établissement de la liste des régimes d’autorisation existants dans son secteur, de la rédaction des textes nécessaires et des contacts à prendre avec les professions concernées. Le travail de recensement des textes existants par les ministères s’est achevé en juillet 2008. Lorsque cela s’est révélé nécessaire, des arbitrages ont été opérés à Matignon.

Le Parlement a été saisi de textes législatifs ; certains ont déjà été adoptés ou sont en cours d’examen par le Parlement. Il s’agit de :

– la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l’économie, qui comporte notamment des dispositions relatives aux « guichets uniques »,

– la loi n° 2009-888 du 22 juillet 2009 de développement et de modernisation des services touristiques, en ce qui concerne notamment les agences de voyages,

– le projet de loi portant fusion des professions d’avocat et d’avoué près les cours d’appel, en instance de deuxième lecture à l’Assemblée,

– la proposition de loi de M. Jean-Luc Warsmann de simplification et d’amélioration de la qualité du droit, adoptée par l’Assemblée le 2 décembre 2009 et en cours d’examen au Sénat,

– le projet de loi déposé le 29 juillet 2009 relatif aux réseaux consulaires, au commerce, à l’artisanat et aux services.

La France a donc pu transmettre à la Commission européenne début janvier un « rapport » ; celui-ci a pris la forme de fiches déposées sous forme électronique dans une base de données créée par la Commission européenne (base de données dite « IPM » : Interactive Policy Making). Outre la Commission européenne, chaque État membre a accès aux fiches envoyées par les autres États dans cette base de données.

Le Gouvernement français a fait le choix de ne pas notifier les fiches une par une mais « en bloc » à la fin du délai. Les fiches « IPM » composant le rapport sont produites par les ministères concernés, puis validées par la mission interministérielle et le Secrétariat général aux affaires européennes.

Par ailleurs, chaque État rédigera un rapport de synthèse sur la façon dont il a transposé la directive, en mettant l’accent sur les principales modifications faites et sur les principaux secteurs concernés par ces modifications. Pour la France, ce rapport de synthèse sera rédigé par la mission interministérielle d’ici la fin du mois de janvier. La Commission européenne traduira ces rapports et les diffusera auprès de tous les États membres.

Votre rapporteur déplore de n’avoir eu accès à aucun de ces documents, qui devraient pourtant être publics et qui permettraient d’éclairer utilement le débat.

B. LA TRANSPOSITION DANS LE SECTEUR SOCIAL

On a vu que le Parlement européen avait souhaité restreindre le champ d’application de la directive en excluant un certain nombre de secteurs d’activités énumérés à l’article 2 : cela va des services financiers aux services des agences de travail intérimaire, en passant par les services de soins de santé, les services audiovisuels, les activités de jeux d’argent ou encore les services de sécurité privée. Sont également exclus un certain nombre de services sociaux.

L’exclusion des services sociaux peut se fonder soit sur l’article 2.2.a de la directive qui exclut les « services d’intérêt général non économique » (voir glossaire en annexe), soit, et surtout, sur l’article 2.2.j qui exclut « les services sociaux relatifs au logement social, à l’aide à l’enfance et à l’aide aux familles et aux personnes se trouvant de manière permanente ou temporaire dans une situation de besoin qui sont assurés par l’État, par des prestataires mandatés par l’État ou par des associations caritatives reconnues comme telles par l’État ».

Compte tenu des marges d’interprétation de ce dernier article, il revenait à la France d’indiquer à la Commission quels secteurs elle considérait comme exclus du champ de la directive. Pour ce faire, la méthode retenue a été essentiellement technique et administrative au détriment d’une approche publique et politique qui aurait permis au Parlement de jouer pleinement son rôle. Le résultat est une liste de services sociaux exclus excessivement restrictive.

1. Une procédure de transposition très opaque

La spécificité de la directive services est que, stricto sensu, elle n’implique pas nécessairement d’acte positif de réglementation, puisqu’elle ne crée pas de droits nouveaux. Il ne s’agit pas de créer de nouvelles normes mais bien d’évaluer les normes existantes puis, éventuellement, de les réformer. C’est ce raisonnement, technique mais faible politiquement, que le Gouvernement a suivi afin, probablement, d’éviter que ne ressurgissent des débats qu’il souhaitait éviter. Mais, au final, cette discrétion n’a fait que nourrir les inquiétudes du secteur social.

D’autant que la France est l’un des très rares pays à avoir suivi ce raisonnement : la plupart des États-membres ont décidé d’adopter des lois-cadres de transposition de la directive, qui consistaient souvent en une reprise des termes de la directive, loi-cadre éventuellement complétée par des lois sectorielles modifiant tel ou tel régime d’encadrement. Ainsi, 11 États-membres ont déjà adopté leur loi-cadre de transposition (Danemark, Roumanie, Hongrie, République Tchèque, Suède, Espagne, Pays-Bas, Royaume-Uni, Finlande, Estonie, Malte et Belgique) et 13 États-membres devraient probablement adopter leur loi-cadre de transposition dans le premier trimestre 2010 (Autriche, Chypre, Italie, Irlande, Lituanie, Luxembourg, Portugal, Bulgarie, Grèce, Pologne, Slovénie, Slovaquie et Lettonie).

a) Un Parlement tenu à l’écart

L’Assemblée nationale s’est largement impliquée au moment de l’élaboration de la directive services et a joué un rôle d’influence non négligeable dans sa réécriture.

Le 2 février 2005, la Délégation de l’Assemblée nationale pour l’Union européenne a adopté une proposition de résolution qui qualifiait le projet de directive d’inacceptable et demandait son retrait pour une remise à plat. La proposition de résolution de la Délégation et deux autres propositions de résolution déposées sur le même thème ont été examinées par l’Assemblée nationale lors de la séance du 15 mars 2005. À l’issue de ce débat, l’Assemblée a adopté la résolution n° 402 qui : « (…) considère que la proposition de directive est inacceptable et demande résolument son réexamen »

Par la suite, la Délégation de l’Assemblée nationale pour l’Union européenne a continué à suivre l’évolution des négociations et la directive a fait l’objet, avant son adoption définitive par les autorités communautaires, de quatre réunions de la délégation.

Après l’adoption de la directive, la délégation a procédé au suivi des travaux de transposition en nommant, le 25 juillet 2007, MM. Émile Blessig et Christophe Caresche rapporteurs sur le suivi des travaux de transposition de la directive. Les rapporteurs ont présenté, sous la forme d’une communication, un premier point sur le suivi de la transposition de la directive le 15 juillet 2008 devant la délégation qui a adopté des conclusions qui :

– estimaient notamment « indispensable que, préalablement à l’adoption des mesures législatives et réglementaires de transposition, un large travail d’explication et de pédagogie soit effectué par les autorités françaises pour dissiper la confusion et les craintes que ce texte a pu susciter dans l’opinion publique et associer les professionnels concernés » ;

– demandaient que « s’agissant des mesures de transposition de nature législative, le ou les projets de loi correspondants soient déposés sans retard sur le bureau des Assemblées, et que le Parlement soit tenu informé de la manière la plus complète de l’état de la transposition au niveau réglementaire » ;

– appelaient « le gouvernement à clarifier rapidement la délimitation exacte du champ d’application des dispositions de la directive, et à rechercher un accord le plus large possible avec ses partenaires de l’Union européenne, dans la mesure où la marge de manœuvre qui est laissée aux États membres leur permet en principe de tenir compte des sensibilités et spécificités nationales mais risque de conduire à des divergences d’interprétation de ces dispositions selon les pays ;

Force est de constater qu’aucune de ces recommandations n’a été suivie : l’effort de pédagogie a été minimal, le Parlement n’a pas été tenu informé des mesures non-législatives et la marge de manœuvre laissée aux États membres n’a pas été exploitée.

Les parlementaires, sollicités sur ce sujet par des professionnels inquiets, ressentent l’insuffisance du travail « pédagogique » d’explication et de clarification qui aurait dû être mené activement par les ministères. Et l’on peut regretter que le Parlement n’ait pas été plus étroitement associé à l’élaboration des mesures de transposition.

Pourtant, dans le secteur social, la nécessité d’une transposition législative était reconnue et attendue par tous et son absence a nourri les inquiétudes des acteurs concernés.

b) La très insuffisante implication des acteurs du secteur

Le secteur social, que ce soit l’économie sociale, l’éducation populaire, le soutien aux familles, la politique de la petite enfance, représente près de deux millions de salariés, soit 10 % des emplois, et 60 000 opérateurs.

Directement concernés par la transposition de la directive services et quelque peu échaudé par les conditions de son élaboration, les acteurs de ce secteur, rassemblés au sein du Collectif SSIG, n’ont été que peu associés aux travaux de transposition de la directive.

Ils ont certes été entendus dans le cadre de la mission confiée à Michel Thierry, relative à la prise en compte des spécificités des services d’intérêt général dans la transposition de la directive services et l’application du droit communautaire des aides d’État. Mais ils ont été relativement peu sollicités dans le cadre des travaux menés par la Direction générale de l’action sociale. Et ils n’ont été informés des arbitrages qu’a posteriori.

Cette faible association des acteurs du secteur a incontestablement nourri ses inquiétudes et le résultat est, au final, assez négatif.

c) Des collectivités locales trop peu consultées

Il en est de même pour les collectivités locales. Celles-ci sont pourtant directement concernées dans la mesure où il leur revient de mettre en œuvre bon nombre de politiques sociales : c’est vrai pour le niveau départemental bien sûr, qui est chargé de l’aide sociale, mais aussi de pans entiers de la politique en direction des personnes en perte d’autonomie : c’est vrai aussi du niveau communal, qui est au premier plan pour le secteur de la petite enfance, de la politique de la ville, de l’aide à domicile ou de l’animation socio-culturelle ; c’est aussi vrai du niveau régional, où la partie du champ de la formation professionnelle qui concerne les demandeurs d’emploi et les salariés précaires ou fragiles et permettant d’atteindre le premier niveau de qualification ou encore la formation initiale différée, relève indiscutablement aux yeux de votre rapporteur, de l’exclusion prévue à l’article 2.2.j. de la directive.

Malgré cette réalité, les organisations représentatives des collectivités locales, n’ont été que très tardivement associées (au mois d’octobre, soit deux mois avant la fin du délai de transposition) aux travaux de transposition de la directive services et encore, à leur demande.

Le Président de l’Association des maires de France, suivant une décision du bureau réuni le 10 décembre 2009, a ainsi écrit à Xavier Darcos, ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville, pour regretter : « ce n’est que très récemment que l’AMF a été en contact avec vos services à propos de la transposition de la directive services. Elle a ainsi eu connaissance des positions qu’entendait défendre le gouvernement dans son très prochain rapport de transposition en matière d’inclusion ou d’exclusion des services sociaux dans le champ de la directive. La définition de ces positions aurait, pour le moins, nécessité une véritable consultation des élus locaux qui sont des acteurs essentiels de ces services sociaux et sont donc, au même titre que l’État, concernés par la transposition de la directive. »

Votre rapporteur partage totalement ces regrets quand à la méthode suivie ; d’autant qu’il est persuadé que c’est cette méthode qui a amené le gouvernement à avoir une vision restrictive des secteurs exclus du champ de la directive, à moins, pire encore, que ce ne soit l’inverse !

2. Une liste bien trop restreinte pour le secteur social

D’après les informations, parcellaires, obtenues par votre rapporteur, un certain nombre de secteurs sociaux seraient considérés comme hors du champ de la directive et cela était absolument indispensable. . En revanche, d’autres secteurs, pourtant essentiels comme la petite enfance et la formation professionnelle, sont considérés comme relevant de la directive services. Même si leur régime actuel d’autorisation est considéré comme compatible avec les exigences de la directive, leur inclusion aurait pu être évitée et pourrait avoir des conséquences dommageables. C’est pourquoi l’annexe à l’article premier de la proposition de loi dresse une liste plus large des activités exclues du champ de la directive.

a) Des critères d’exclusion complexes

Les opérateurs sociaux avaient depuis longtemps demandé que les services d’intérêt général à caractère social soient exclus du champ d’application de la directive, à l’instar de la santé, domaine extrêmement proche, et compte tenu de l’existence dans la directive d’une dizaine de régimes d’exception ou de renvoi à des directives sectorielles. Les dispositions finalement retenues organisent une exception conditionnelle ainsi libellée dans l’article 2.2.j de la directive : « La présente directive ne s’applique pas aux activités suivantes (...) j) les services sociaux relatifs au logement social, à l’aide à l’enfance et à l’aide aux familles et aux personnes se trouvant de manière temporaire ou permanente dans une situation de besoin, qui sont, assurés par l’État, par des prestataires mandatés par l’État ou par des associations caritatives reconnues comme telles par l’État. »

La combinaison de critères fonctionnels (domaines d’activité) et de critères touchant au statut des opérateurs (opérateurs mandatés) n’est pas aisée. Le mandat, ou délégation de prestation de services d’intérêt général pour le compte d’une autorité publique, s’attache à un opérateur ; or, l’article 2.2.j a pour effet de sortir du champ de la directive des catégories de services ou des ensemble d’opérateurs.

Au-delà de cette complexité liée à la combinaison de critères fonctionnels et de critères touchant au statut des opérateurs, un débat est apparu quant à l’articulation entre les trois premiers secteurs énumérés (logement social, aide à l’enfance et aide aux familles) et le quatrième (aide aux personnes se trouvant en situation de besoin). La question est de savoir si ce dernier est un quatrième secteur, distinct des trois premiers, ou s’il s’agit d’un critère cumulatif qui vient s’ajouter aux trois premiers.

L’ambiguïté vient d’une lecture quelque peu cavalière du considérant 27 de la directive qui indique que la directive ne couvre pas certains services sociaux assurés par l’État ou par des personnes mandatées « avec pour objectif d’assister les personnes qui se trouvent de manière permanente ou temporaire dans une situation de besoin particulière en raison de l’insuffisance de leurs revenus familiaux, ou d’un manque total ou partiel d’indépendance et qui risquent d’être marginalisées ». Il est donc laissé entendre que, pour échapper au champ de la directive, la politique sociale doit non seulement ressortir d’un des trois domaines cités mais également s’adresser à un public spécifique particulièrement fragile. Hormis une lecture tout à fait singulière de l’article principal en question (2.2.j) qui semble omettre la conjonction de coordination « et » consacrant clairement l’aide aux personnes en situation de besoin comme une catégorie à part entière exclue de la directive, cette interprétation du considérant 27 apparaît en contradiction avec un autre passage de ce même considérant ainsi qu’avec le considérant 28. Il est ainsi mentionné plus loin dans le texte que les services sociaux « sont une manifestation des principes de cohésion sociale et de solidarité » et que la directive « ne devrait pas affecter le principe de service universel ». L’interprétation du gouvernement restreignant l’exclusion des services sociaux à ceux à destination des publics les plus vulnérables seraient en contradiction avec les principes d’accès universel, de solidarité et de mixité sociale qui constituent le socle républicain du modèle social propre développé par la France, par ailleurs quasiment unique en Europe.

Cette interprétation littérale, restrictive, du considérant 27 ne tient en outre aucunement compte de la volonté du législateur : rencontrée par votre rapporteur, Mme Evelyne Gebhardt, rapporteure de la directive au Parlement européen, a clairement expliqué qu’il s’agissait de quatre secteurs d’activité distincts et que le dernier (l’aide aux personnes se trouvant en situation de besoin) n’avait nullement vocation à restreindre les trois premiers mais, bien au contraire, à permettre aux États membres de prévoir une exclusion large allant au-delà du logement social et de l’aide à l’enfance et à la famille, pour autant qu’il y ait un mandat explicite.

b) Le champ des exclusions retenues

Au final, sont exclus du champ de la directive au titre de son article 2.2.j, les secteurs du logement social, la quasi-totalité du secteur médico-social (du moins, la partie faisant appel à un financement public, c’est-à-dire relevant de la nouvelle procédure d’appel à projets mise en place par la loi du 21 juillet 2009 portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et au territoire (dite « HPST ») et le secteur de la protection judiciaire de la jeunesse.

En revanche, outre la formation professionnelle, restent dans le champ de la directive les services suivants :

– les régimes d’autorisation des services et établissements sociaux et médico-sociaux sans appels à projets ;

– les organismes habilités pour l’évaluation externe des établissements sociaux et médico-sociaux ;

– les services d’aide et d’accompagnement à domicile qui relèvent ou optent pour le régime de l’agrément qualité ;

– les établissements et services accueillant des enfants de moins de 6 ans ;

– la déclaration préalable pour l’accueil des mineurs et des adultes ; (catégorie résiduelle) ;

– l’agrément de l’accueil familial de personnes âgées et adultes handicapés (accueillants familiaux).

Votre rapporteur estime ce champ des services inclus beaucoup trop large ; il est, en particulier, regrettable que l’ensemble de la formation professionnelle (hormis celles des travailleurs sociaux) soit incluse dans le champ de la directive, alors qu’une approche plus nuancée aurait été possible, par exemple en traitant séparément les actions de formation professionnelle à destination des demandeurs d’emploi et des salariés précaires et fragiles et permettant d’atteindre le premier niveau de qualification. Ces actions s’adressent indiscutablement à des « personnes en situation de besoin » et auraient donc dû être exclues du champ de la directive au titre de l’article 2.2.j.

c) La question de la petite enfance

Le Gouvernement a donc décidé d’inclure le secteur de la petite enfance dans le champ de la directive. Deux raisonnements différents ont été présentés à votre rapporteur pour justifier cette inclusion.

Le premier, développé par le Secrétariat général aux affaires européennes lors de son audition, reprend la lecture restrictive de la Commission : ces services ne s’adressant pas exclusivement à un public en situation de besoin mais bien à l’ensemble des familles, ils ne peuvent être exclus du champ de la directive. Outre que ce raisonnement est très discutable et contesté par la rapporteure de la directive au Parlement européen, il ne semble pas avoir été suivi pour d’autres secteurs, par exemple, celui du logement social qui ne concerne heureusement pas seulement les personnes en situation de besoin mais a bien un objectif de mixité sociale. Il a pourtant été exclu intégralement du champ de la directive. On s’interroge donc sur la cohérence de la position gouvernementale.

Le second raisonnement, plus solide, tient à l’absence de mandatement dans le secteur de la petite enfance. Il s’agit d’une exigence essentielle pour pouvoir bénéficier de l’exclusion au titre du 2.2.j. Comme l’a exposé Mme Palasz, chef de la mission interministérielle pour la transposition de la directive services, l’agrément PMI (protection maternelle et infantile) ne constitue pas, selon le Gouvernement, un mandatement. Le rapport Thierry explicite cette position : pour « les services d’accueil de la petite enfonce, (…) le dispositif central en matière d’autorisation est l’agrément PMI, fondé sur le respect de normes de sécurité et de qualité qui conditionnent le bien-être des enfants accueillis, mais qui n’est pas lié à une délégation de missions d’intérêt général et constitue une simple autorisation d’ouverture. Le seul agrément n’est pas constitutif d’un mandat, même si, pour celles des structures agréées qui bénéficient de financements publics en contrepartie d’obligations de service public, la conjonction entre agrément, conventions de financement ou délibérations de collectivités aboutit à un mandat légitimant l’attribution d’aides publiques ».

Ainsi, le fait que l’agrément PMI constitue une simple « autorisation d’ouverture » que peut, en théorie, parfaitement solliciter un opérateur privé sans faire appel à des financements publics auprès des collectivités locales ou des caisses d’allocation familiale, suffit à inclure l’ensemble du secteur de la petite enfance dans le champ de la directive. Alors même que ce cas est rarissime (de l’aveu même de Mme Palasz, un seul exemple de crèche totalement privée a pu être trouvé) et que la quasi-totalité des services d’accueil de la petite enfance sont financés sur fonds publics, le raisonnement juridique l’emporte sur la réalité pratique et politique.

Pourtant, une telle décision n’avait rien d’évident et le Gouvernement aurait parfaitement pu faire le choix politique d’exclure la petite enfance du champ de la directive. Ainsi, le 16 septembre dernier, au congrès de l’Union nationale des centres communaux d’action sociale, M. Xavier Darcos pouvait affirmer : « la majorité des services sociaux et médico-sociaux devraient pouvoir être exclus du champ d’application de la directive. Il devrait en être de même pour tous les services d’aide à domicile, crèches et haltes-garderies ». Malheureusement, cette option a été battue en brèche lors d’arbitrages intervenus ultérieurement.

Et cette décision, politique donc, suscite l’inquiétude des acteurs du secteur. Dans son courrier précité à M. Darcos, le président de l’Association des maires de France, M. Jacques Pélissard, indique que « le Bureau de l’AMF craint que l’inclusion de ces structures d’accueil dans le champ de la directive services ait pour effet de remettre en cause la réglementation actuelle, garante de la qualité et de la sécurité de l’accueil et du développement éducatif de l’enfant qui pourrait être critiquée comme entravant la libre prestation de services et la liberté d’établissement ».

L’argument du Gouvernement est d’expliquer que l’inclusion de ce secteur dans le champ de la directive ne remet nullement en cause la réglementation actuelle qui est, comme le permet la directive, justifiée par des « raisons impérieuses d’intérêt général ». Et le Gouvernement d’aller plus loin encore en soutenant que le fait d’avoir inclus la petite enfance dans le champ de la directive permet, au contraire, de sécuriser le dispositif d’autorisation actuelle qui sera validée par la Commission et ne pourra donc pas être contesté.

Votre rapporteur n’est pas convaincu par cette argumentation optimiste et partage au contraire les craintes de l’Association des maires de France. Car, en incluant la petite enfance dans le champ de la directive, le Gouvernement semble valider le glissement progressif de ce secteur de l’acte éducatif vers l’aide à la personne : ce qui se traduira inévitablement par un abaissement des exigences de régulation en termes d’encadrement et de qualification des personnels. Mouvement qui a déjà été amorcé avec le lancement des jardins d’éveil.

Par ailleurs, la Cour de Justice de l’Union Européenne considèrera ces services, inclus dans le champ de la directive, comme des « services économiques » comme les autres auxquels elle appliquera sa jurisprudence traditionnelle en matière de règles du marché intérieur. En cela, « l’exclusion » du champ d’application possède un caractère protecteur supérieur à la simple « dérogation » par rapport au droit commun. Contraint par les promesses présidentielles de créer 200 000 places d’accueil d’ici 2012 et l’absence de financements à la hauteur des ambitions, le Gouvernement ne pourra qu’aller vers une certaine dérégulation du secteur, encouragé en cela par les propos de certains députés de la majorité lors de l’examen de ce texte en commission.

II.- LES SERVICES SOCIAUX ET LA PROBLÉMATIQUE
DES AIDES D’ÉTAT

Au-delà de la transposition de la directive services pour le secteur social, la proposition de loi a une deuxième ambition, celle de répondre au très délicat problème de la compatibilité de l’action des autorités publiques dans le domaine social avec les règles communautaires relatives aux aides d’État, communément appelées « paquet Monti-Kroes » du nom des deux commissaires successifs à la concurrence qui l’ont porté.

En effet, les acteurs du secteur social sont très inquiets des conséquences de l’application à leur domaine d’activité de ces règles, complexes et élaborées initialement pour les grands services publics de réseaux. Et cette inquiétude s’est vivement exprimée lors de la préparation de la deuxième conférence de la vie associative qui s’est tenue le 17 décembre dernier, l’un des groupes de travail préparatoire à cette conférence étant consacré aux relations Pouvoirs publics/Associations.

Votre rapporteur tient à souligner qu’il s’agit d’un problème distinct de celui de l’application de la directive : celle-ci concerne le fonctionnement du marché intérieur et non le financement des services ; la réglementation des aides d’État relève du principe de libre-concurrence. Ce sont deux questions différentes : en particulier, le fait d’être exclu du champ de la directive services n’exonère en rien du respect des règles du « paquet Monti-Kroes » ; et, inversement, le fait d’être dans le champ de la directive ne préjuge pas d’une quelconque incompatibilité a priori avec les règles de la concurrence.

Néanmoins, bien que distincts, ces deux dossiers se rejoignent autour d’une notion, celle du mandatement, qui est une exigence commune à la directive et au « paquet Monti-Kroes ». C’est pourquoi la proposition de loi, suivant en cela les préconisations du rapport Thierry, crée un nouvel outil législatif, la convention de partenariat d’intérêt général qui doit permettre de sécuriser les interventions des collectivités locales dans le domaine social.

A. LES RÈGLES COMMUNAUTAIRES RELATIVES AUX AIDES PUBLIQUES D’ÉTAT S’APPLIQUENT EN THÉORIE AUX SERVICES SOCIAUX

À l’occasion des débats et travaux menés dans le cadre de la préparation de la conférence de la vie associative, les associations ont fait part de leurs inquiétudes à l’égard de leurs relations financières avec les pouvoirs publics ; ils ont sollicité des éclaircissements sur les impacts du droit communautaire et sur le champ respectif des subventions, des procédures de marché, de délégation de service public ou encore d’appels à projets.

De fait, un nombre croissant d’activités exercées par les associations entrent dans le champ d’application du droit communautaire, notamment parce qu’elles sont considérées comme étant de nature économique. Cette situation a soulevé une série de questions d’ordre pratique et d’interprétation, s’agissant notamment des règles relatives aux aides d’État et aux marchés publics.

Répondant à cette demande, le Gouvernement a préparé une note présentant les dispositions juridiques communautaires et nationales qui encadrent les relations financières entre les associations et les collectivités publiques. Cette note, reprise en partie dans les développements ci-dessous, est d’une indéniable qualité technique et pédagogique mais elle est, au final, peu rassurante.

1. La réglementation européenne des aides d’État s’applique également aux associations

Soucieux de garantir la libre concurrence au sein de l’Union, le droit européen interdit les aides publiques soutenant des services ou productions susceptibles d’affecter les échanges entre États.

Des aménagements et exceptions sont toutefois prévus par le Traité et ont été progressivement précisés par la jurisprudence européenne puis par la Commission pour prendre en compte et encadrer les aides accordées par les collectivités publiques, nationales ou locales, afin de compenser les charges pesant sur les organismes participant à l’exercice d’activités d’intérêt général.

Cette réglementation dite des « aides d’État » s’applique à toute « entreprise » recevant un financement public, dès lors qu’elle exerce une activité « économique » d’intérêt général, et ce quel que soit son statut juridique (associatif ou autre) ou la façon dont elle est financée par la collectivité publique. Ainsi, une association sans but lucratif exerçant une activité économique d’intérêt général et sollicitant un concours financier public sera qualifiée d’entreprise au sens communautaire et soumise à la réglementation des aides d’État pour la partie de son activité qui est « économique ». Les règles d’encadrement des aides ne s’appliqueront pas, en revanche, à sa part d’activité qui serait qualifiée de non économique.

Cette notion « d’activité économique » recouvre, quel que soit le secteur d’activité, toute offre de biens et/ou de services sur un marché donné :

– le fait que l’activité concernée puisse être de nature « sociale » n’est pas en soi suffisant pour faire exception à la qualification d’activité économique au sens du droit des aides d’État ;

– le fait que l’entité susceptible de bénéficier du concours public ne poursuive pas un but lucratif ne signifie pas que les activités qu’elle exerce ne sont pas de nature économique ;

– seules échappent à cette qualification les activités liées à l’exercice de prérogatives de puissance publique ou certaines activités limitativement identifiées par la jurisprudence communautaire, comme les prestations d’enseignement public ou la gestion de régimes obligatoires d’assurance.

Dans la pratique, la grande majorité des activités exercées par les associations peuvent être considérées comme des « activités économiques », de sorte que les aides publiques qui y sont apportées doivent respecter la réglementation européenne sur les aides d’État.

2. L’octroi d’une aide publique à une association exerçant une activité économique d’intérêt général doit respecter certaines règles

Ces règles ont été fixées par la décision de la Commission 2005/842/CE du 28 novembre 2005 concernant l’application des dispositions de l’article 106, paragraphe 2, du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (anciennement article 86 du traité instituant la Communauté européenne) aux aides d’État, sous forme de compensation de service public, octroyées à certaines entreprises chargées de la gestion d’un service d’intérêt économique général.

Sont considérées comme compatibles avec le traité et ainsi exemptées de l’obligation de notification à la Commission européenne, les aides qui remplissent les conditions suivantes :

– l’obligation de mandatement : l’opérateur doit être mandaté ; le mandat doit notamment prévoir les obligations de service public, plus précisément leur nature et leur durée, de même que la nature des droits exclusifs ou spéciaux le cas échéant octroyés à l’entreprise ;

– la transparence du mode de calcul de la compensation : le mandat doit également prévoir, à l’avance, les paramètres de calcul de la compensation ;

– le principe de la juste compensation : la compensation ne doit pas dépasser ce qui est nécessaire pour couvrir les coûts correspondants à l’accomplissement des obligations de service public, compte tenu des recettes ainsi que d’un bénéfice raisonnable sur les capitaux propres nécessaires pour l’exécution de ces obligations ; elle doit être effectivement utilisée pour assurer le fonctionnement du service concerné ; les coûts sont calculés sur la base des principes de comptabilité analytique généralement acceptés ;

– l’interdiction effective de toute surcompensation : le mandat doit enfin prévoir un mécanisme de contrôle pour éviter toute surcompensation et de remboursement éventuel ; les États membres doivent procéder ou faire procéder à des contrôles.

Ce dispositif ne concerne cependant pas tous les opérateurs. Il s’applique uniquement, d’une manière générale, aux opérateurs dont le chiffre d’affaires annuel est inférieur à 100 millions d’euros et qui reçoivent moins de 30 millions d’euros par an au titre de leur compensation.

3. Les difficultés liées au recours aux subventions

Selon la note évoquée plus haut, l’exercice d’un mandat d’intérêt général et l’exigence de compensation proportionnée ne limitent pas par eux-mêmes l’autonomie et la liberté d’initiative des associations et restent compatibles avec un financement par subvention. La notion de mandat est, en effet, suffisamment flexible pour intégrer les hypothèses dans lesquelles la collectivité publique approuve et finance les propositions émanant du secteur associatif, dont elle reconnaît qu’elles répondent à une finalité d’intérêt général.

La subvention peut donc constituer un mode de financement légal dans le cadre d’un service d’intérêt économique général. Et la note d’expliquer : « la collectivité doit simplement définir, dans son acte unilatéral ou contractuel de mandat, la mission de service d’intérêt économique général, ainsi que les paramètres pour le calcul de la compensation et les sauvegardes associées ». L’on verra que toute la difficulté réside dans ce « simplement », car de telles obligations semblent très excessives.

Par ailleurs, il est rappelé que le droit national de la commande publique limite le recours aux subventions aux cas où l’association est à l’initiative du projet.

Au regard de la réglementation nationale relative à la commande publique, la subvention caractérise la situation dans laquelle la collectivité apporte un concours financier à une action initiée et menée par une personne publique ou privée, poursuivant des objectifs propres auxquels l’administration, y trouvant intérêt, apporte soutien et aide.

Pour pouvoir prétendre bénéficier d’une subvention, une association doit être à l’initiative du projet qu’elle porte, ce qui recouvre deux cas de figure.

– le projet émane de l’association et ne donne pas lieu à contrepartie directe pour la collectivité publique : ce critère est satisfait si l’association porte un projet dont elle est à l’initiative : ceci signifie qu’elle ne répond pas à un besoin préalablement défini par la collectivité publique, pour le compte duquel elle agirait comme un prestataire rémunéré, avec une contrepartie directe ; les pouvoirs publics n’ont à procéder à aucune annonce publique pour verser une subvention à une association, il n’est donc pas nécessaire de recourir à une publicité préalable, mais la collectivité publique doit ensuite rendre publiques les subventions qu’elle accorde ;

– le projet développé par l’association s’inscrit dans le cadre d’un appel à projets lancé par une collectivité publique : dans ce cadre, la collectivité publique a identifié une problématique mais n’a pas défini la solution attendue ; l’appel à projets ne préjuge en rien de l’ampleur des propositions qui seront formulées ou encore de leur contexte ; cela le différencie clairement d’un marché dont le besoin est clairement identifié.

B. CETTE APPLICATION SOULÈVE DE FORTES DIFFICULTÉS

Sur le fond, l’on peut estimer que le cadre ainsi fixé par le « paquet Monti-Kroes », à savoir « mandatement pour définir les obligations de service public, calcul des paramètres de la compensation et contrôle d’une absence de surcompensation », apparaît légitime au nom des principes de transparence et de contrôle démocratique.

Mais force est de constater qu’il est également très lourd : il implique une compétence juridique, de gestion et de comptabilité analytique qui n’est à la portée que des opérateurs et des collectivités d’une certaine taille.

Le rapport Thierry constate à juste titre que ce dispositif s’applique à « des situations où les risques de fausser la concurrence sont extrêmement faibles, pour ne pas dire nuls » et que les éventuels avantages d’un rééquilibrage de la concurrence sont « hors de proportion avec les coûts administratifs induits ».

Il est rappelé que la France compte plus de 36 000 collectivités territoriales, 60 000 opérateurs locaux de services de proximité, dont plus de la moitié opère dans le secteur social. Auditionné par le groupe de travail, le maire d’une commune de 3 500 habitants a ainsi indiqué que 4 structures recevaient des concours publics supérieurs au seuil de minimis normal (celui de 200 000 euros) et devraient ainsi être mandatées si les règles étaient parfaitement respectées.

Par ailleurs, comme l’avaient relevé dans le cadre de leur rapport d’information (n° 2619) sur le financement des services d’intérêt général, MM. Bernard Derosier et Christian Philip, députés, la décision précitée 2005/842/CE offre essentiellement comme avantage l’absence de notification formelle à la Commission européenne d’un grand nombre de compensations. Ainsi, ces dernières ne peuvent être mises en cause pour des raisons de forme.

Sur le fond cependant, elles restent soumises aux conditions prévues par le droit communautaire et peuvent être remises en cause soit par la Commission européenne, saisie d’une aide illégale prétendue ou d’une application prétendument abusive de l’aide, soit à l’occasion d’un contentieux au titre d’une atteinte à la concurrence devant les juridictions nationales, avec éventuellement saisine du juge communautaire selon les développements de la procédure.

Un tel risque ne peut être négligé, car il y a incertitude sur le fond. Et c’est cette incertitude qui pousse de nombreuses collectivités locales à recourir à la procédure de marché public ou d’appel d’offres, compliquant inutilement des procédures qui devraient rester le plus simple possible.

Le Gouvernement français a conscience de ces difficultés. Dans le rapport triennal sur les conditions de mise en œuvre des règles du « paquet Monti-Kroes » que la France a remis à la Commission (rapport non public mais dont la presse spécialisée s’est faite l’écho) en mars 2009, est clairement soulignée l’inadaptation du cadre juridique européen applicable aux services d’intérêt économique général :

« Les travaux de préparation du présent rapport ont montré le décalage extrêmement important qui existe entre les préoccupations des collectivités publiques lorsqu’elles organisent les services publics dans les ressorts de leur compétence, et la façon dont le droit européen appréhende ces services. »

Le texte aboutit à la conclusion que des « incompréhensions fortes subsistent entre les pouvoirs publics français et les autorités communautaires ». Le rapport estime que « ces incompréhensions fortes sont source d’insécurité juridique, mais également de coûts importants ». Il appelle à des clarifications « effectuées de manière plus proactive et politique que les éléments résultant, au coup par coup, de la pratique décisionnelle de la Cour de justice ».

Le texte souligne que, du point de vue des autorités locales, l’application du droit communautaire aux services d’intérêt économique général n’a aucun impact sur la concurrence – faute de concurrents –, ni sur le commerce entre les États membres. C’est par exemple le cas pour une commune qui chercherait à mettre en place des actions de protection du patrimoine historique, ou encore à ouvrir un foyer pour femmes battues.

Les autorités françaises soulignent donc « la nécessité d’une clarification de la situation des services d’intérêt économique général pour lesquelles des compensations reçues ne sont pas susceptibles d’affecter la concurrence ou les échanges entre les États membres, de façon à lever toute ambiguïté sur la question de savoir si ces compensations peuvent être qualifiées d’aides d’État ». En clair, la France réclame à l’Union européenne des clarifications dans ce domaine.

De plus, le texte souligne « des interrogations fortes » sur le lien entre la jurisprudence de 2003, « qui pose des conditions détaillées permettant d’échapper à la qualification d’aides d’État, et l’obligation de facto qui en résulterait d’un recours aux procédures de marchés publics ». Et d’ajouter : « en outre, l’articulation au plan communautaire entre le droit des aides d’État et le droit communautaire des marchés publics (...) est insuffisamment claire dans les travaux de la Commission européenne elle-même. »

Face à ces lourdes incertitudes, le Gouvernement a proposé d’adapter la convention pluriannuelle d’objectifs conclue entre les autorités publiques et les associations, afin de les rendre euro-compatibles. Mais, votre rapporteur craint que ce dispositif réglementaire ne soit insuffisant et propose de sécuriser dans le droit français, au niveau législatif, la procédure de mandatement.

C. LA PROPOSITION DE LOI CRÉE UN OUTIL CLAIR DE MANDATEMENT

L’une des préconisations du rapport Thierry était de « donner éventuellement une base légale à la notion de convention de partenariat d’intérêt général, pour régler les problèmes que peut poser le recours à la subvention. »

En effet, comme on l’a vu, le recours à la subvention ne s’inscrit pas facilement dans le champ descendant de commande publique préalable, qui paraît être le modèle de référence du « paquet Monty-Kroes ». Par ailleurs, la jurisprudence administrative tend à requalifier en marchés les subventions accordées sur appel à projets, et surtout insiste sur l’exigence d’une initiative propre et préalable de la structure subventionnée. Il faut donc acter la rencontre entre le projet propre d’un opérateur et les préoccupations et objectifs de service public d’une autorité publique.

Mais, comme le reconnaît le rapport Thierry, « cette démarche est plus aléatoire dans des champs non couverts par un système législatif et réglementaire formalisant le partenariat avec des opérateurs de la société civile pour la mise en œuvre de services d’intérêt général ». Et le rapport d’énumérer un certain nombre de secteurs, pourtant essentiels, qui pourraient poser des difficultés : le champ de l’action sociale éducative, de l’éducation populaire, des pratiques sportives de proximité, et du soutien global à la vie associative.

Certes, il existe déjà, conformément à l’article 10 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, des conventions pluriannuelles d’objectifs et des systèmes de conventionnement sectoriels déjà organisés par le législateur. Mais, selon le rapport Thierry, il est nécessaire de prévoir une convention « avec une assiette de portée générale offrant un outil pour les secteurs moins structurés et permettant de mieux régler les problèmes que peut poser en droit interne le recours à la subvention. »

Le Gouvernement a partiellement répondu à cette proposition en annonçant, lors de la dernière conférence de la vie associative, un nouveau modèle de convention pluriannuelle d’objectifs compatible avec les exigences du droit communautaire. Un décret est en préparation et devrait être prochainement signé par le Premier ministre. Ce nouveau modèle de convention s’imposera aux services de l’État, mais pourra également être utilisé par les collectivités locales qui ont été étroitement associées à son élaboration.

Néanmoins, votre rapporteur estime que le dispositif proposé par l’article 4 de la proposition de loi est plus solide juridiquement, d’abord parce qu’il est de niveau législatif et non pas réglementaire : le fondement de la loi de 2000 semble très insuffisant pour les collectivités locales dans la mesure où l’objectif est bien de créer un nouveau vecteur pour les services d’intérêt économique général, à côté des procédures de marchés publics, de délégation de service public et de partenariat public/privé.

Ensuite, parce que son champ d’action pourrait être plus large : votre rapporteur vous proposera un amendement permettant d’ouvrir ce nouvel outil à tous les acteurs du secteur social, quelque soit leur statut ; l’idée est de ne pas le réserver au secteur associatif mais de l’ouvrir au secteur privé à but non lucratif, par exemple les structures mutualistes.

Au final, l’objectif de cette convention de partenariat d’intérêt général est bien de mettre en pratique le souhait exprimé par Martin Hirsch lors de son discours introductif à la deuxième conférence de la vie associative : « le but est de revenir à une doctrine, qui ne soit pas celle du tout appel d’offres »

III.- ANTICIPER LES DÉFIS DU FUTUR EN RECONNAISSANT LE RÔLE FONDAMENTAL DES SERVICES SOCIAUX

Après l’exclusion large des services sociaux de la directive services et la sécurisation du secteur face à la réglementation des aides d’État, la troisième ambition de cette proposition de loi est d’exploiter les nouvelles possibilités offertes par le traité de Lisbonne et de sanctuariser les services sociaux.

A. LE TRAITÉ DE LISBONNE OUVRE DE NOUVELLES OPPORTUNITÉS POUR LES SERVICES D’INTÉRÊT GÉNÉRAL

Du point de vue des services sociaux, l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne le 1er décembre 2009 est une très bonne nouvelle car il contient plusieurs dispositions contribuant à renforcer la protection des missions d’intérêt général par rapport aux seules forces du marché. Cette sanctuarisation relève désormais clairement d’une disposition d’application générale à l’ensemble des politiques communautaires assortie d’une base juridique pour légiférer, et non plus d’une simple dérogation aux règles de concurrence. Une avancée réelle qui s’accompagne d’une clarification de la gouvernance des services d’intérêt général dans l’Union européenne au moyen d’un nouveau protocole proposé par le Premier ministre hollandais Jan Peter Balkenende.

En effet, le traité de Lisbonne (voir les textes en annexe) :

– introduit une base juridique nouvelle en co-décision entre le Parlement européen et le Conseil leur donnant clairement mandat d’établir, par voie de règlements, les principes et de fixer les conditions permettant de garantir le bon accomplissement des missions d’intérêt général dans l’Union européenne (article 14 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne – Titre II : dispositions d’application générale) ;

– comporte un nouveau protocole sur les services d’intérêt général qui interprète la notion de valeur commune de l’Union à leur sujet ; ce protocole y affirme notamment le large pouvoir discrétionnaire des autorités publiques nationales, régionales et locales pour fournir, faire exécuter et organiser ces services ; il établit notamment un principe de diversité des services d’intérêt général en référence à des préférences collectives et à la perception des besoins des utilisateurs à satisfaire localement (article 1er du Protocole 26) ;

– confère au droit à l’accès aux services d’intérêt général afin de promouvoir la cohésion sociale et territoriale de l’Union, droit fondamental reconnu dans la Charte des droits fondamentaux, une valeur juridique analogue aux dispositions des traités (article 34 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne) ;

– introduit une « clause sociale horizontale », qui dispose que toutes les politiques et les actions de l’Union soient définies en tenant compte des exigences liées à la promotion d’un niveau d’emploi élevé, à la garantie d’une protection sociale adéquate, à la lutte contre l’exclusion sociale, ainsi qu’à un niveau élevé d’éducation, de formation et de protection de la santé humaine.

Il est donc essentiel de profiter de ce nouveau contexte juridique : c’est ce que propose l’article 2 de la proposition de loi. Il s’agit de dresser une liste, indicative donc non exhaustive, des services sociaux afin de les faire bénéficier des différentes dispositions protectrices figurant dans le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne. Conformément au droit européen, l’article 2 fait la distinction entre d’une part les services sociaux économiques et, d’autre part, les services sociaux non économiques assurant une « fonction à caractère exclusivement sociale ».

B. LES SERVICES SOCIAUX SERONT AU CœUR DE LA PROCHAINE MANDATURE DU PARLEMENT EUROPÉEN

Cette sanctuarisation des services sociaux est d’autant plus importante que ce dossier sera très certainement au cœur des débats européens dans les prochaines années. D’abord, parce que les travaux de transposition de la directive services ne sont pas achevés ; ensuite, parce que va se poser de nouveau la question de l’élaboration d’une législation spécifique sur les services d’intérêt économique général.

1. La suite de la mise en œuvre de la directive : la phase d’évaluation mutuelle

La directive prévoit l’obligation pour les États membres de notifier à la Commission les résultats de leur travail avant la fin de l’année 2009, puis la transmission du rapport de chaque État membre à tous les autres États pour que ceux-ci se livrent à une « évaluation mutuelle ».

Aussi bien les fiches « IPM » transmises que le rapport de synthèse seront accessibles à chacun des États membres. Ces différents éléments feront l’objet d’un examen d’abord par les pays réunis en petits groupes, pendant deux mois (la France sera dans un groupe avec la Belgique et les Pays-Bas), puis fin mars un examen par tous les États membres avec des revues thématiques.

Pour l’instant on ignore quelles formes va prendre la consultation, par la Commission européenne, des « parties intéressées » dans l’examen de ces rapports des États. La même question se pose à l’intérieur de chaque État. En France on ne sait pas encore comment le Secrétariat général aux affaires européennes va associer à ce travail les parties intéressées.

Les modalités de l’information du Parlement européen ne sont pas encore fixées non plus. Le Parlement européen s’interroge d’ailleurs sur l’accès qu’il pourra avoir aux fiches « IPM » et aux rapports de synthèse.

Cette phase d’évaluation mutuelle est d’une importance considérable : elle va consister pour chacun des 27 États à identifier les domaines dans lesquels tel État n’aurait pas respecté ses obligations, ce qui serait préjudiciable pour les entreprises des autres pays. Le but de ce processus est d’identifier les difficultés, de désamorcer les contentieux et de donner une réalité d’ensemble au marché intérieur des services.

La durée de la phase d’évaluation mutuelle n’est pas fixée par la directive mais devrait se dérouler sur au moins six mois, sachant que la directive fait obligation à la Commission européenne de présenter un rapport de synthèse au Conseil et au Parlement européen fin 2010.

2. Les débats à venir

Fin 2011 (et, par la suite, tous les trois ans), la Commission présentera un deuxième rapport consacré à l’application de la directive. Selon l’article 41 de celle-ci, ce rapport devra examiner « l’opportunité de mesures supplémentaires concernant les questions qui sont exclues du champ d’application de la présente directive ». Et ce rapport sera accompagné « le cas échéant, de propositions de modification de la directive en vue de l’achèvement du marché intérieur des services ». Dans la mesure où la directive services sera appelée à être révisée, l’exclusion aujourd’hui des services sociaux de son champ d’application n’en a que plus d’importance.

Il est trop tôt pour préjuger ce que dira ce rapport. On peut repérer des indices contradictoires au sein des différentes institutions de l’Europe : au sein du Conseil, de nombreux États membres considèrent que la directive services n’est qu’une première étape, qui comporte beaucoup trop d’exceptions, et qu’il sera nécessaire d’aller rapidement plus loin ; a contrario, d’autres États membres, et au premier chef l’Allemagne et la France, considèrent que l’expérience d’une directive services « horizontale » n’est pas très concluante et que si l’on souhaite aller plus loin, il faudra le faire de manière sectorielle.

Pour le Parlement européen, les choses sont également contrastées. Certes, il procède à un travail de suivi de la mise en œuvre de la directive qui est assez innovant, ce travail de suivi étant en principe réservé à la Commission : du point de vue institutionnel, cette directive aura été, de son adoption jusqu’à sa transposition, un moment du renforcement du pouvoir institutionnel du Parlement européen face à la Commission, ce qui contraste cruellement avec le traitement du Parlement français dans la transposition de la directive. Par ailleurs, un intergroupe consacré aux services publics a été créé et est présidé par notre collègue Mme Françoise Casteix. Il a pour perspective d’aller vers une directive sur ce sujet.

S’agissant de la Commission enfin, la situation semble avoir significativement évolué entre la commission Barroso I et Barroso II : M. Charlie McCreevy, commissaire européen en charge du marché intérieur et des services dans la commission Barroso I, était un libéral convaincu, fervent partisan de la dérégulation et fermement opposé à toute directive spécifique pour les services d’intérêt économique général. Ce en quoi il était parfaitement en accord avec le président de la Commission.

Ce dernier a certes fait évoluer son discours mais il conviendra de juger les résultats sur pièce : en septembre dernier, avant le vote d’investiture qu’il sollicitait, le président Barroso a adressé aux membres du Parlement européen ses grandes orientations politiques pour le mandat de la prochaine Commission européenne. Ce document expose les objectifs qui, selon lui, devraient guider l’établissement d’un partenariat politique entre la Commission et le Parlement au cours des cinq prochaines années. Et il indique : « Le développement global du secteur des services sociaux et des services de santé devra donc être stimulé, par exemple en créant un cadre de qualité pour les services publics et sociaux, ce qui témoignera de leur importance dans le modèle de société européen ». Il reste à voir dans quelle mesure cela se confirmera à travers un accord pour l’élaboration d’une législation communautaire spécifique aux services sociaux d’intérêt général que beaucoup d’acteurs appellent de leurs vœux.

De même, lors de sa très récente audition par le Parlement européen, le commissaire désigné pour le marché intérieur et les services, M. Michel Barnier, a tenu un discours rassurant sur les services sociaux. En réponse à une question de Mme Gebhardt sur la dimension sociale à accorder à la politique du marché commun, il a répondu qu’il travaillerait « à mettre le marché intérieur au service du progrès humain, à lutter contre le dumping social et à protéger les services d’intérêt général ». Il ne s’est cependant pas engagé, que cela soit sous la forme d’une directive générale ou sectorielle, sur la proposition d’une initiative législative en la matière.

Reste un dernier acteur, le Parlement français. Le rôle des parlements nationaux dans l’élaboration des normes communautaires a été renforcé par le traité de Lisbonne et la nouvelle rédaction de l’article 88-4 de la Constitution prévoit un élargissement des documents communautaires transmis au Parlement (l’ensemble des « projets d’actes législatifs européens »  lui seront transmis). Il reviendra donc à l’Assemblée nationale, et au Sénat, de suivre avec attention ce dossier essentiel des services sociaux.

À plus court terme, la France doit travailler dans le sens d’une adaptation de son droit interne afin de le rendre compatible avec les exigences du mandatement. Les collectivités territoriales sont en première ligne. Dans la mesure où elles se voient chargés de manière croissante de la mise en œuvre de services sociaux mais où elles ne se voient pas encore reconnaître, en contrepartie, la possibilité formelle de « mandater », au sens du droit communautaire, leurs services publics et sociaux locaux afin de sécuriser leur financement, ces autorités publiques ont tendance à choisir presque systématiquement des instruments de mise en concurrence tels que l’appel d’offre. Cela peut avoir dans certains cas des résultats contraires aux effets recherchés. Les acteurs sociaux ont montré quelques inquiétudes en mettant notamment en lumière les risques de déstabilisation du secteur avec d’une part le développement d’une offre rentable prise en charge par les acteurs privés et le développement d’une offre non rentable assurée par les services sociaux financés par des fonds publics. Ce serait alors les principes même d’accès universel, de mixité sociale et de solidarité propre au modèle social français qui seraient remis en cause.

Ce travail est aujourd’hui entamé avec la discussion de cette proposition de loi, il devra être poursuivi afin de sécuriser cette « zone grise » du secteur social qui va de la petite enfance à la formation professionnelle en passant par l’éducation populaire, les pratiques sportives de proximité et, plus généralement, le soutien à la vie associative.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

I.- DISCUSSION GÉNÉRALE

La Commission examine la présente proposition de loi au cours de sa séance du mercredi 13 janvier 2010.

M. le président Pierre Méhaignerie. Pour l’examen de cette première proposition de loi, nous accueillons MM. Christophe Caresche et Daniel Fasquelle, chargés par la Commission des affaires européennes de suivre les travaux de transposition de la directive relative aux services dans le marché intérieur. Je leur donnerai la parole après l’intervention de notre rapporteur.

M. Jean-Patrick Gille, rapporteur. Je me réjouis de la présence parmi nous de nos collègues de la Commission des affaires européennes, et notamment de celle de M. Christophe Caresche qui m’a accompagné lundi à Bruxelles.

Un débat suit l’exposé du rapporteur.

M. Christophe Caresche. Le sujet est complexe parce que le droit européen est compliqué et aussi parce que la directive services est le fruit d’un compromis politique ; il est d’une importance capitale, puisqu’il s’agit de créer le marché intérieur des services avec, à la clef, des emplois. L’objectif visé est donc positif mais, comme l’a souligné votre rapporteur, le choix d’une approche sectorielle ayant été écarté, une des difficultés tient à ce que la directive services concerne tous les services, mis sur le même pied.

Par ce texte, il est demandé aux États de passer en revue les activités réglementées et les régimes d’autorisation sur leur territoire, en vue de garantir la liberté d’installation et de prestation de services. Il leur est aussi demandé de créer un portail Internet permettant aux opérateurs des États membres d’avoir accès sans délai à toutes les informations qui faciliteront leur installation dans n’importe quel pays de l’Union.

Cette directive a une histoire sur laquelle il est bon de revenir. Dans un premier temps, elle a fait l’objet d’une forte opposition, selon moi justifiée, car dans le texte initial figurait le principe « du pays d’origine », en vertu duquel un prestataire de services européen pouvait appliquer la réglementation de son pays d’origine, et non celle du pays où il s’installait. À ce moment, les Gouvernements s’étant désengagés du processus, le Parlement européen a décidé de remettre l’ouvrage sur le métier et nommé Mme Évelyne Gebhardt rapporteure. Un compromis a alors été trouvé entre les groupes politiques du Parlement européen, ce qui a permis une nouvelle rédaction de la directive.

Mais ce travail s’est fait en dehors de la Commission européenne. Or, c’est elle qui est chargée d’appliquer la directive dans sa nouvelle version, et les points de vue respectifs de la Commission et du Parlement n’étant pas tout à fait les mêmes, il y a difficulté.

Au Parlement européen, les débats ont porté en premier lieu sur le principe du pays d’origine, qui a été éliminé du texte. Ont ensuite été discutées les exclusions. Comme il s’agit d’une directive « horizontale », il convenait d’exclure de son champ d’application certaines activités, soit qu’elles relèvent d’une directive sectorielle, soit qu’elles aient été l’objet d’une négociation spécifique entre États. C’est ainsi que certaines activités ont été exclues du champ d’application de la directive services : services financiers, agences de travail intérimaire, jeux d’argent, taxis… – toutes activités qui n’ont rien à voir avec les services d’intérêt général.

Les débats ont ensuite porté sur les services sociaux. Tout ce qui concerne la santé était exclu du champ d’application de la directive. Pour ce qui concerne les services sociaux, les choses étaient un peu plus complexes, car deux éléments sont entrés en jeu : les critères d’activité et le mandatement. Le Parlement européen a décidé que pourraient être exclus du champ de la directive le logement social, l’aide à l’enfance, l’aide aux familles et les services aux personnes dans le besoin, ces services devant être mandatés par les pouvoirs publics.

Voilà comment la nouvelle rédaction de la directive a été conçue. Mais, la Commission européenne considère que les exclusions décidées par le Parlement européen sont beaucoup trop nombreuses et qu’il fallait ouvrir le marché intérieur des services bien davantage. Elle a d’ailleurs publié un manuel de transposition de la directive, que le Parlement européen conteste.

Dans ce cadre, quelle transposition le Gouvernement propose-t-il ? Il exclut du champ d’application de la directive certaines activités mais pas d’autres. Des discussions ont eu lieu à ce sujet, certes, mais nous n’avons pas eu beaucoup d’informations. Ainsi, nous ne savons ni combien, précisément, de régimes d’autorisation ont été notifiés à la Commission européenne ni comment ils ont été justifiés. Ainsi, dans le domaine de la santé, les laboratoires d’analyse médicale sont exclus ; pour ce qui est des services sociaux, le logement social est exclu, d’autres services le sont aussi mais les établissements d’accueil de la petite enfance ne le sont pas, alors même que la directive prévoit explicitement qu’ils peuvent l’être. Ce choix suscite de très vives inquiétudes.

Il convient de souligner que ce n’est pas parce qu’une activité n’est pas exclue du champ de la directive que son régime d’autorisation sera démantelé et les contraintes réglementaires encadrant son exercice, levées. La France a déclaré à la Commission européenne environ 500 régimes d’autorisation qu’elle veut voir préservés en l’état, mais une discussion va avoir lieu à l’échelon communautaire, et les difficultés vont commencer car la Commission européenne ne manquera pas d’estimer que, dans tel État membre, le régime d’autorisation est trop restrictif par rapport à ce qui prévaut ailleurs. Dans ce cadre, le choix fait par le Gouvernement français de ne pas exclure l’aide à la petite enfance du champ d’application de la directive suscite de multiples interrogations dans les régions. Qu’adviendra-t-il du régime d’autorisation de création de crèches ?

En résumé, la France aurait dû aller beaucoup plus loin et exclure d’autres services du champ d’application de directive services. C’est ce qui explique notre proposition qui, tout en adaptant le droit français au droit européen, sécurise les services sociaux, menacés par le « paquet Monti-Kroes » relatif aux aides d’État. L’Association des maires de France travaille avec le Gouvernement à trouver un système de sécurisation. Nous proposons à cette fin la création d’une convention de partenariat qui permettrait aux collectivités de contracter avec les associations. Au-delà, la France doit continuer de revendiquer sa spécificité en matière de services sociaux. Alors que le Traité de Lisbonne donne une base juridique à la rédaction d’une directive reconnaissant et sécurisant les services d’intérêt général, on regrettera que le Gouvernement français ait fait sienne une vision plutôt conforme à celle de la Commission européenne. De ce fait, on peut craindre que, pour ce qui concerne l’aide à la petite enfance, il ne se trouve politiquement désarmé. Une forme de normalisation est en marche. Or, le tiers secteur est très présent en France mais beaucoup moins dans les autres pays de l’Union européenne. Cette spécificité pose problème à la Commission européenne, dont la vision est beaucoup plus classique : le marché d’un côté, l’autorité publique de l’autre, et rien entre les deux. En adoptant une vision un peu trop conforme à celle de la Commission, le Gouvernement a fragilisé la position française pour ce qui concerne les services sociaux. La proposition tend aussi à protéger notre spécificité.

M. le président Pierre Méhaignerie. Avant de donner la parole à M. Daniel Fasquelle, je tiens à souligner l’extrême importance de ce dossier. Les services publics et les services sociaux d’intérêt général constituent un vrai rempart contre les inégalités.

M. Roland Muzeau. Très bien !

M. le président Pierre Méhaignerie. Mais à quel coût sont-ils produits ? Pour l’intérêt public, là est le cœur du débat. Les collectivités qui ont besoin de crèches et de haltes-garderies doivent-elles privilégier les délégations de service public ou maintenir des conventions ? Dans ma circonscription, 40 % des actifs sont des ouvriers, et je trouve que l’équilibre ne se fait pas entre un monde protégé qui vend ses services relativement cher et un monde industriel qui fait de très grands efforts de productivité pour fournir des produits bon marché.

Mme Martine Billard. Mais comment peut-on dire des choses pareilles ? C’est dans le secteur des services à la personne que les salaires sont les plus bas ! Faut-il aussi renvoyer les femmes à la maison ?

M. Roland Muzeau. Et baisser les salaires ?

M. Daniel Fasquelle. Je vous remercie d’accueillir deux membres de la Commission des affaires européennes, qui suivent de très près la transposition de la directive services. Je m’attacherai à expliquer en trois points en quoi la proposition est inutile, ce pourquoi je ne la voterai pas.

La première raison, c’est qu’il ne faut pas susciter des peurs sans objet à propos du champ d’application de la directive. Le rapport de M. Michel Thierry est très clair à ce sujet et le Gouvernement ayant suivi la majorité de ses propositions, l’essentiel des services sociaux sont exclus du champ d’application de la directive services : le logement social, les institutions médicales et médico-sociales, la protection judiciaire de la jeunesse. La France se mettrait en porte-à-faux avec la Commission européenne et avec les autres États membres si elle prétendait à une exclusion générale. Le texte définit un champ d’application et des critères d’exclusion, nous devons les respecter ; or les établissements d’accueil de la petite enfance n’entrent pas dans les critères ainsi définis. Il ne serait donc pas raisonnable de les exclure. Mais je le répète, pour l’essentiel, les services sociaux sont exclus du champ d’application de la directive, ce qui doit rassurer tout le monde.

Je ne voterai pas cette proposition pour une autre raison. Est-ce un problème qu’une activité soit dans le champ d’application de la directive ? Non, car ce qui rendait celle-ci dangereuse – le principe du pays d’origine – en a été retiré. Dans sa nouvelle version, la directive se limite à codifier la jurisprudence de la Cour de justice des Communautés européennes. Autant dire qu’on ouvre ici un faux débat, puisque la Cour dit que, pour des raisons d’intérêt général, il est possible de maintenir l’obligation d’autorisation réglementaire – et l’accueil de la petite enfance entre dans ce cadre. Il n’y a donc aucune inquiétude à avoir, le droit français n’a pas à être modifié sur ce point et cette activité demeurera réglementée, plusieurs arrêts de la Cour en apportent la démonstration.

Une troisième raison explique mon opposition à la proposition ; elle a trait au rôle du Parlement dans cette affaire. Je considère que le Parlement français ne doit se substituer ni au Parlement européen ni au Gouvernement. Chacun doit rester à sa place. La directive services a été négociée, elle est écrite, il ne nous appartient pas de la réécrire. Le Parlement a un rôle à jouer dans la transposition et il le joue, qu’il s’agisse des réseaux consulaires ou de la fusion entre la profession d’avocat et celle de conseil en propriété industrielle. Mais, il doit se concentrer sur la partie législative de la transposition de la directive, à ce jour accomplie aux deux tiers. Pour le reste, il appartient au Gouvernement de continuer à transposer la directive sur un plan réglementaire.

Je considère, in fine, que notre modèle national de services sociaux, auquel nous sommes tous très attachés, n’est en rien remis en cause et que les politiques n’ont pas pour mission de faire naître des inquiétudes ou de créer de la confusion, notamment avec les textes concernant la concurrence : non seulement nous nous devons, au contraire, de rassurer et d’éclairer les différents opérateurs mais, précisément parce que ces questions sont complexes comme l’a dit Christophe Caresche, nous devons aussi faire preuve de pédagogie.

M. Régis Juanico. Cette proposition de loi est au cœur d’un enjeu politique national et européen majeur dont la représentation nationale ne saurait être dessaisie.

Depuis la présidence française de l’Union européenne, nous n’avons jamais cessé d’interpeller le Gouvernement quant à la méthode et au calendrier d’une transposition qui devait être effective au 28 décembre dernier. Nous l’avons fait en Commission des affaires européennes – Mme Valérie Rosso-Debord a d’ailleurs rédigé un rapport d’information – … mais également au sein de la Commission des affaires sociales par exemple lors de sa réunion du 10 juin dernier, d’interroger M. Bruno Le Maire, encore secrétaire d’État aux affaires européennes. Nous l’avons également fait dans le cadre de la discussion de certains projets de loi – je songe, notamment, à celui concernant la formation professionnelle – mais sans jamais obtenir de réponses précises.

L’idéal, certes, eût été la signature d’un accord européen en faveur d’une directive-cadre sur les services sociaux d’intérêt général mais, faute du consensus nécessaire, nous devons remettre le Parlement au cœur de cette transposition – d’autant plus, d’ailleurs, que vingt États membres ayant engagé ce processus à travers une loi-cadre, nous ne serions pas isolés. En outre, l’article 14 du Traité de Lisbonne accordant une plus grande place aux parlements nationaux pour garantir le bon accomplissement des missions de service public, nous disposons aujourd’hui de marges de manœuvre plus importantes pour jouer notre rôle. Je regrette donc la méthode un peu opaque, « administrative » et réglementaire, retenue par le Gouvernement.

Par ailleurs, monsieur le président, le problème n’est pas le coût financier des services sociaux locaux, mais l’insécurité juridique et financière de secteurs décisifs pour notre cohésion sociale et territoriale : opérateurs, associations… Ce ne sont pas moins de deux millions de personnes qui sont concernées, soit quasiment 10 % de nos emplois !

Enfin, monsieur Fasquelle, pas plus qu’elle ne tend à instrumentaliser un certain nombre d’opérateurs sociaux, cette proposition, soutenue par le collectif SSIG dont on ne saurait contester la représentativité, ne vise pas à semer le trouble ou la confusion.

M. Bernard Perrut. Notre débat est intéressant sur les plans juridique – il concerne les droits français et européen – et politique, puisque ce sont deux visions des règles de la concurrence qui sont en jeu. Pour ma part, à l’instar du président Méhaignerie, je suis attaché à des services sociaux qui favorisent tout autant l’égalité des citoyens qu’une bonne et saine gestion. Par ailleurs, je regrette que, dans son exposé des motifs, le rapporteur évoque un « déni de débat démocratique », alors que le Gouvernement a simplement pris ses responsabilités.

Si je nourrissais quelques préventions à l’endroit de cette transposition, les réponses apportées par Daniel Fasquelle m’ont rassuré. Ainsi, notre régime d’autorisation et d’agrément dans les secteurs social et médico-social – mais on peut dire la même chose des concours financiers dont ces derniers bénéficient – n’est-il nullement remis en cause puisque ces secteurs sont quasiment exclus du champ d’application de la directive en raison notamment des deux critères cumulatifs du public concerné et du mandat. S’agissant des services d’aide à domicile et d’accueil des jeunes enfants, un rapport remis par le Gouvernement à la Commission européenne précise que les régimes d’autorisation et d’agrément sont justifiés pour des raisons impérieuses d’intérêt général et que, compte tenu des objectifs d’ordre public et de santé publique, il n’est pas utile de les modifier. Cette proposition de loi ne me paraît donc pas utile, d’autant que le Gouvernement a fait ou fera les ajustements qui s’imposent afin de prévenir toute dérégulation ou baisse des exigences de qualité.

Enfin, en s’aventurant au-delà de ce que préconise la directive, ce texte ne risque-t-il pas de ne pas être conforme au droit communautaire ?

M. Yves Bur. Si je comprends les inquiétudes qui se font jour, je n’en dirai pas autant de la méfiance à l’endroit de la construction européenne qu’entretiennent certains collègues depuis le référendum sur le traité établissant une Constitution pour l’Europe ou depuis la directive Bolkestein.

Cela étant, la prudence dont a fait preuve Christophe Caresche me semble, en fait, révélatrice d’une certaine proximité avec Daniel Fasquelle.

Si la transposition de la directive ne fragilise en rien nos services sociaux non plus que leurs financements, leur sanctuarisation totale est-elle néanmoins nécessaire ? S’ils sont en effet constitutifs de notre modèle de développement, comme l’a rappelé le président Méhaignerie, je note également qu’ils n’ont pas empêché les inégalités de s’accroître. J’ai le sentiment que cette proposition ne vise qu’à les doter de « ceintures et de bretelles », afin d’éviter tout questionnement quant à d’inévitables évolutions visant à améliorer la qualité de leurs prestations. Dans le secteur de la petite enfance en particulier, nous avons encore des progrès à accomplir et sans doute le secteur privé peut-il démontrer, en la matière, qu’il est possible de satisfaire à la fois aux exigences de qualité et de sécurité et à des impératifs de bonne gestion.

Enfin, il me paraît d’autant moins opportun de réécrire la directive services dans notre droit – comme tend à le faire cette proposition – qu’elle a fait l’objet d’un large consensus au sein du Parlement européen, y compris parmi les députés socialistes.

Mme Marie-Françoise Clergeau. Il me semble, au contraire, qu’en se saisissant de cette directive, le Parlement est tout à fait dans son rôle.

Je note, par exemple, que ce texte inclut dans son champ la protection de l’enfance. Or, la petite enfance, de zéro à six ans, ne constitue-t-elle pas un public vulnérable et fragile ? Dès lors, ne conviendrait-il pas d’accroître plus que ne le souhaite la majorité le cahier des charges de ce secteur, si substantiel soit-il déjà – accueil des enfants dont les parents sont bénéficiaires des minima sociaux ainsi que des enfants handicapés, respect du barème de la Caisse nationale d’allocations familiales quant au « reste à charge » ainsi que d’un taux d’occupation des structures ?

En outre, si, une fois n’est pas coutume, je salue la politique familiale du Gouvernement – priorité à l’épanouissement de l’enfant, réduction des inégalités, encouragement à la natalité, accompagnement des parents en difficulté, politique de l’emploi –, je considère également que l’accueil de la petite enfance participe au premier chef du droit à l’éducation et, comme tel, relève des missions d’intérêt général.

Enfin, si la directive reste en l’état, nous favoriserons le développement d’un mode d’accueil à deux vitesses, entre assistantes maternelles et dispositifs collectifs, ce qui ne manquerait pas d’engendrer des dérégulations.

Pour toutes ces raisons, je soutiendrai cette proposition de loi.

M. Jacques Domergue. Devons-nous à tout prix maintenir notre niveau de protection sociale alors qu’il est globalement supérieur à celui des autres États membres de l’Union ? Le maintien d’un tel particularisme est-il compatible avec la construction de l’Europe sociale que nous appelons de nos vœux ? Je ne le crois pas. Il convient, au contraire, de trouver un moyen terme acceptable par tous, afin d’éviter de trop peser sur les entreprises et, donc, d’amoindrir leur compétitivité.

M. Roland Muzeau. Voilà qui a le mérite de la franchise !

Je rappelle tout de même que, si les secteurs dont nous parlons jouent certes un rôle économique, la majeure partie des financements sont dédiés aux personnels – c’est notamment le cas, à hauteur de 90 %, des services d’aide à la personne – et que c’est précisément sur eux que la majorité s’acharne !

S’agissant de la concurrence libre et non faussée et des services d’intérêt général, notre religion, si j’ose dire, est faite depuis longtemps : comme nous avons combattu le Traité de Lisbonne, nous avons bataillé contre le traité établissant une Constitution pour l’Europe – lequel, d’ailleurs, portait à son point culminant la déréglementation. La situation présente est donc relativement ambiguë, puisque notre peuple a massivement rejeté ce dernier et que notre Assemblée a du mal à peser sur la Commission et le Parlement européens. En outre, s’il est louable que celui-ci tente de corriger les décisions de celle-là, ses préconisations – dont le succès est d’ailleurs incertain – n’en demeurent pas moins timides.

Plus précisément, en ce qui concerne cette proposition, nous considérons que le Traité de Lisbonne ne protège en rien les législations sociales nationales et, si la volonté exprimée par le rapporteur de protéger un certain nombre de secteurs va dans le bon sens, nous estimons que cette tentative souffre de l’absence de remise en cause de la construction européenne actuelle, ce qui nous conduira inévitablement à revenir souvent sur ces sujets. Dans l’immédiat, nous réservons donc notre position.

M. Michel Issindou. Ce texte a le mérite de clarifier des enjeux de société importants sur lesquels nous ne portons pas le même regard. Ainsi, autant je suis d’accord avec la première partie du propos du président Méhaignerie, autant je suis en désaccord avec la seconde, selon laquelle ces services quasi publics coûteraient cher. Nous considérons, quant à nous, que nous bénéficions d’un service public de qualité, pas très cher et ouvert à la modernisation.

Parce que le secteur marchand a des limites au-delà desquelles des protections s’imposent, cette proposition de loi va dans le bon sens.

M. Dominique Dord. Si notre débat me semble juste et utile – il faut en effet œuvrer en faveur d’une harmonisation au sein de l’Europe tout en préservant notre système de protection sociale, qui a une nouvelle fois fait ses preuves lors de la crise –, je n’en dirai pas autant du texte qui en est l’occasion. Par ailleurs, je crois que ce qui nous sépare est moins important que ce qui nous rassemble, comme en attestent les interventions de Christophe Caresche et Jean-Patrick Gille.

Les services publics dont il est question dans la proposition de loi sont-ils menacés ? Ni le texte, ni les interventions de l’opposition ne le démontrent. Au contraire, il me semble qu’ils sortiront renforcés de l’application de la directive. Parce que, en tant que maire, je ne peux améliorer certains services faute de financements, je ne pourrais en revanche que me féliciter du travail d’autres opérateurs, dès lors qu’ils accompliraient ces tâches avec la même qualité et dans les mêmes conditions d’agrément, et me permettraient de faire porter l’effort sur d’autres secteurs. La qualité du service rendu ne me semble donc pas menacée. S’il ne devait pas en aller ainsi, la France devrait bien entendu faire entendre sa voix si singulière dans ce domaine.

Bref, alors que le texte proposé aurait été indubitablement utile sous le « régime Bolkestein », il n’en est plus de même, selon moi, aujourd’hui.

Mme Catherine Génisson. Il n’est pas possible de considérer à la fois que le modèle social français nous a relativement protégés de la crise – même s’il a, en effet, un coût – et qu’il doit faire l’objet d’une harmonisation par le bas.

En outre, je rappelle qu’il est question de services dont les financements sont principalement consacrés à la rémunération des personnels, mais où les salaires sont très bas et les conditions de travail précaires.

Mme Martine Billard. Les propos de certains collègues de l’UMP m’étonnent : le secteur des services à la personne emploie principalement des femmes, à temps partiel et payées au SMIC. À moins de les payer encore moins ou d’embaucher des sans-papiers, en quoi une privatisation ferait-elle réaliser des économies ?

M. Jean-Patrick Gille, rapporteur. Cette proposition n’eût-elle servi qu’à engager ce débat, elle aurait déjà été utile.

Par ailleurs, je regrette que la discussion ait dérivé vers la question de la concurrence qui, si elle est proche du sujet, n’en constitue pas pour autant le cœur.

C’est parce que nous avons besoin, eu égard au droit européen, d’une véritable sécurisation juridique des services sociaux que nous avons proposé le mandatement, nouveau moyen d’action offert aux gestionnaires locaux qui s’ajoute aux interventions en régie, ou dans le cadre d’une délégation de service public, ou encore dans le cadre de la législation sur les marchés publics, mais aussi au subventionnement direct – instrument menacé, non par la directive, mais par le « paquet Monti-Kroes ». À cet égard, le mandatement offrira un cadre nettement plus sûr et un recours plus aisé que la procédure des marchés publics, tout en préservant une forme de régulation par l’autorité publique. Il y a donc là un progrès possible, et un travail à poursuivre. Cela n’empêche évidemment pas – mais c’est un autre sujet – une collaboration entre les secteurs privé et public : dans les services à la petite enfance, il est par exemple tout à fait possible de faire appel à différents opérateurs.

M. Fasquelle juge cette proposition inutile et en appelle au rapport de M. Michel Thierry ; or, outre que ce dernier considère à titre personnel qu’une transposition législative s’impose – il évoque même un « bloc législatif » –, l’article 4 de la proposition reprend l’idée de convention de partenariat d’intérêt général qui est issue de son travail.

Par ailleurs, vous estimez que le secteur de la petite enfance sera protégé mais, dès lors qu’il est inclus dans la directive, ne risque-t-il pas d’être considéré à l’instar de n’importe quel autre, alors que sa dimension éducative, par exemple, me semble patente ? L’arrivée massive du secteur privé n’entraînera-t-elle pas à terme et au nom de la concurrence une révision des normes à la baisse ? Mais, on peut supposer que le Gouvernement, incapable de créer les 200 000 places supplémentaires qu’il a promises, souhaite la dérégulation de ce secteur – elle est d’ailleurs engagée en ce qui concerne les assistantes maternelles !

Je m’inscris également en faux contre l’idée selon laquelle nous réécririons la directive : comme l’ont fait vingt États membres, nous nous contentons de la transposer.

Bernard Perrut, quant à lui, a peut-être été rassuré à trop bon compte : ce n’est pas parce que le Gouvernement justifie le bien-fondé de l’ensemble des régimes d’autorisation qu’aucun débat avec la Commission européenne n’aura lieu. Dans la discussion avec les autres États membres, il est peut-être stratégiquement utile de placer la barre un peu haut afin de peser sur les négociations à venir, et ce d’autant que le Gouvernement a jugé bon de lâcher du lest vis-à-vis de la Commission. Je rappelle, de surcroît, que la protection des services sociaux d’intérêt général était censée constituer une priorité de la présidence française de l’Union !

Mon désaccord est bien entendu total avec Jacques Domergue, qui préfère d’emblée réviser nos normes sociales à la baisse : si nous voulons tuer l’idée européenne, continuons dans ce sens !

Roland Muzeau a, quant à lui, raison de souligner l’écart qui sépare les positions de la Commission et du Parlement européens : si un compromis s’est fait jour, les tensions n’en demeurent pas moins sensibles. Pour le reste, nos divergences sur la question du Traité sont connues.

Enfin, je considère que c’est la méthode utilisée par le Gouvernement – et non le remarquable travail accompli par les différentes administrations – qui génère de la méfiance à l’endroit de l’Europe. La mise à l’écart du Parlement, comme toujours, est préjudiciable au travail démocratique.

M. Christophe Caresche. Il n’est pas question de se servir de l’Europe à des fins manipulatrices : je l’ai dit, la directive services et le compromis final vont dans le bon sens. La difficulté réside plutôt dans la possibilité d’interprétations diverses de ce texte, dans la latitude laissée aux États de le transposer dans tel ou tel sens. S’agissant de la France, nous contestons la méthode choisie par le Gouvernement : les arbitrages rendus ont été politiques, faisant fi d’un certain nombre de contradictions ; d’une part, les laboratoires d’analyse médicale, opérateurs privés soumis, certes, à des régimes d’autorisation et à des normes, ont été exclus du champ d’application de la directive ; d’autre part, les crèches, qui relèvent souvent d’opérateurs associatifs ou sociaux et sont subventionnées, y ont été incluses. Manifestement, comme l’a dit Jean-Patrick Gille, le Gouvernement a dû faire des concessions à la Commission européenne.

S’il est vrai, monsieur Bur, que je me suis montré prudent sur le plan juridique, il reste que les secteurs relevant de la directive seront confrontés à l’arrivée de nouveaux opérateurs, laquelle entraînera un accroissement de la concurrence. Dès lors, monsieur Dord, les responsables associatifs craignent que, dans le domaine des services à la personne, ces opérateurs n’accaparent la demande solvable, les personnes en difficulté continuant, elles, de relever des associations qui n’auront plus les moyens de faire face.

M. Daniel Fasquelle. S’il est légitime que le Parlement s’empare de cette question, il ne doit pas moins demeurer à sa place, sa mission n’étant pas de réécrire la directive services. En outre, sur un plan méthodologique, il convient de ne pas confondre son rôle législatif et sa fonction de contrôle.

J’ajoute que les exclusions du champ de la directive sont extrêmement nombreuses, et il est significatif à cet égard que le débat ait porté sur les seuls services dédiés à la petite enfance.

Par ailleurs, certains collègues n’ont, semble-t-il, pas lu la directive : dès lors qu’il s’agit simplement de savoir si notre législation est ou non discriminatoire à l’égard de prestataires étrangers qui viendraient s’installer en France, le débat qu’ils ont ouvert me paraît hors sujet. J’ajoute que les dispositions de la directive s’agissant de la qualité des services peuvent contribuer à renforcer nos propres structures et les droits de ceux qui y ont accès.

Enfin, la France ne peut à la fois être dans et hors de l’Europe : si elle ne veut plus, comme naguère, être le mauvais élève de l’Union, nous nous devons de rejeter cette proposition de loi.

M. le président Pierre Méhaignerie. Je remercie l’ensemble des intervenants pour la qualité de leurs propos.

II.- EXAMEN DES ARTICLES

La Commission examine les articles de la présente proposition de loi au cours de sa séance du mercredi 13 janvier 2010.

Article 1er

Exclusion des services sociaux de la directive services

L’article premier de la proposition de loi a pour objet de transcrire la directive sur les services dans le marché intérieur s’agissant des services sociaux en précisant dans la loi les services sociaux qui ne sont pas concernés par la directive.

1. Exclure les services sociaux du champ de la directive

L’alinéa 1 définit les services sociaux exclus de l’application de la directive en reprenant strictement les critères de la directive. Celle-ci prévoit au 2 de son article 2 un certain nombre de secteurs exclus de son champ, parmi lesquels la santé, les transports ou encore les services audiovisuels. Les services sociaux peuvent être exclus de l’application de la directive à deux titres :

– « 2.2.a) les services dintérêt général non économiques », parmi lesquels figurent un certain nombre de services sociaux :

– « 2.2.j) les services sociaux relatifs au logement social, à laide à lenfance et à laide aux familles et aux personnes se trouvant de manière permanente ou temporaire dans une situation de besoin qui sont assurés par l’État, par des prestataires mandatés par l’État ou par des associations caritatives reconnues comme telles par l’État ».

Les services exclus au titre de l’article 2.2.a sont définis par la présente proposition de loi au 2) de son article 2 et figurent à l’annexe III (voir le commentaire de l’article 2 pour une définition de ces services). L’exclusion de ces services ne pose pas vraiment de difficultés.

Le principal enjeu concerne les exceptions prévues au titre de l’article 2.2.j de la directive. Le considérant n° 27 de la directive explique qu’il est nécessaire d’exclure les services en question car ils « sont essentiels pour garantir le droit fondamental à la dignité et à lintégrité humaines et sont une manifestation des principes de cohésion sociale et de solidarité ». Votre Rapporteur partage totalement cette opinion et ces termes sont repris, quasiment mot pour mot, dans la proposition de loi.

Mais une fois ces principes rappelés, la grande difficulté réside dans l’interprétation des critères posés à l’article 2.2.j de la directive : sont d’abord visés les services sociaux relatifs « au logement social », à « l’aide à l’enfance » et à « l’aide aux familles » ; puis sont visés les services sociaux relatifs « aux personnes se trouvant de manière permanente ou temporaire dans une situation de besoin ». Est enfin posé une exigence d’exercice de ces services « par l’État, par des prestataires mandatés par l’État ou par des associations caritatives reconnues comme telles par l’État ».

L’une des questions essentielles est de savoir si les deux premiers critères sont cumulatifs ou alternatifs : le Secrétariat général des affaires européennes (SGAE), entendu par votre Rapporteur, estime que ces critères sont cumulatifs et que ne peuvent être exclus de l’application de la directive que les services sociaux entrant dans un des domaines d’activité cité et s’adressant à un public spécifiquement dans une situation de besoin. C’est ce qui, selon ce raisonnement, justifierait l’inclusion de la petite enfance dans le champ de la directive car les structures d’accueil ne s’adressent pas exclusivement à des personnes se trouvant « dans une situation de besoin ».

Votre rapporteur s’interroge sur ce raisonnement qui n’est pas du tout partagé par les principaux rédacteurs de la directive au Parlement européen qu’il a pu rencontrer. Pour ces derniers, les critères sont alternatifs et l’ensemble des politiques sociales relatives à l’aide à l’enfance ou à l’aide aux familles doit être exclu de la directive, sans qu’il soit nécessaire de vérifier qu’elles s’adressent exclusivement à un public « dans une situation de besoin ».

Par ailleurs, le raisonnement avancé par le Secrétariat général des affaires européennes ne semble pas avoir été suivi par tous les ministères. Par exemple dans le domaine du logement social : c’est en effet l’ensemble du champ du logement social qui est exclu de l’application de la directive et cette politique publique ne concerne heureusement pas uniquement les personnes « dans une situation de besoin ».

Il semble donc que cette interprétation du Secrétariat général des affaires européennes n’ait pas été suivie par l’ensemble des ministères. Il est positif qu’une certaine marge de manœuvre ait été laissée aux ministères dans leur revue des régimes d’autorisation qu’ils gèrent mais, ici, on a le sentiment d’une certaine incohérence.

Surtout que, dans le cas de la petite enfance, d’autres raisonnements ont été présentés à votre rapporteur pour justifier son inclusion dans le champ de la directive, à savoir l’absence de mandatement. Raisonnement également très discutable par ailleurs.

Appliquant ce raisonnement, la Direction générale de l’action sociale, après arbitrage du Premier ministre, a considéré qu’un certain nombre de régimes d’autorisation étaient bien dans le champ de la directive et devaient donc être justifiés. Il s’agit :

– les régimes d’autorisation des services et établissements sociaux et médico-sociaux sans appels à projets ;

– les organismes habilités pour l’évaluation externe des établissements sociaux et médico-sociaux ;

– les services d’aide et d’accompagnement à domicile qui relèvent ou optent pour le régime de l’agrément qualité ;

– les établissements et services accueillant des enfants de moins de 6 ans ;

– la déclaration préalable pour l’accueil des mineurs et des adultes (A-PH) ; (catégorie résiduelle) ;

– l’agrément de l’accueil familial de personnes âgées et adultes handicapés (accueillants familiaux).

A contrario, la proposition de loi considère que les deux premiers critères sont alternatifs et la liste figurant à l’annexe 1 de la proposition de loi (alinéa 3 de l’article premier) est donc beaucoup moins restrictive : selon cette liste, indicative, sont en effet exclus du champ de la directive « les services de crèches et de garderie d’enfants », mais aussi les activités périscolaires ou encore les services de bibliothèque et de médiathèque.

Par ailleurs, en l’état actuel des choses, la formation professionnelle est totalement dans le champ de la directive services ce qui est très contestable selon votre Rapporteur : c’est pourquoi il est proposé d’exclure les dispositifs de formation professionnelle à destination des demandeurs d’emploi et des salariés précaires et fragiles et permettant d’atteindre le premier niveau de qualification et la formation initiale différée.

2. Une présomption de compatibilité des services sociaux

Le fait pour un service d’être inclus dans le champ de la directive n’interdit bien sûr pas tout dispositif d’encadrement et tout régime d’autorisation mais ceux-ci doivent être justifiés au regard des critères posés par la directive. Et l’un des critères pouvant justifier l’existence d’un régime d’autorisation est « une raison impérieuse d’intérêt général » (b du 1 de l’article 9).

La définition d’une raison impérieuse d’intérêt général est donnée à l’article 4 de la directive : « des raisons reconnues comme telles par la jurisprudence de la Cour de justice, qui incluent les justifications suivantes : lordre public, la sécurité publique, la santé publique, la préservation de l’équilibre financier du système de sécurité sociale, la protection des consommateurs, des destinataires de services et des travailleurs, la loyauté des transactions commerciales, la lutte contre la fraude, la protection de lenvironnement et de lenvironnement urbain, la santé des animaux, la propriété intellectuelle, la conservation du patrimoine national historique et artistique, des objectifs de politique sociale et des objectifs de politique culturelle ».

Il est donc possible de fonder un régime spécifique d’autorisation pour telle ou telle activité de service dans le champ de la directive en se fondant sur une des raisons ci-dessus. Néanmoins, ce régime d’autorisation doit répondre à un certain nombre d’exigences posées à l’article 15 de la directive, en particulier la non-discrimination, la nécessité et la proportionnalité. (a, b et c du 3 de l’article 15). Pour les services d’intérêt économique général, il est possible de déroger à certaine de ces exigences dans la mesure où elles risqueraient de « faire échec à la mission particulière qui leur a été confiée ».

Très concrètement, cela veut dire que pour les services relevant de la directive selon le Gouvernement, il est tout à fait possible de justifier un dispositif spécifique d’autorisation. Et c’est d’ailleurs ce qu’il a fait pour la plupart des services évoqués ci-dessus en se fondant sur des « raisons impérieuses d’intérêt général ». L’inclusion du secteur de la petite enfance par exemple n’implique nullement, aux yeux du Gouvernement, une remise en cause du régime actuel d’autorisation.

Devant ce risque, la proposition de loi adopte une stratégie différente en exploitant jusqu’au bout les possibilités offertes par le 4 de l’article 15 de la directive qui prévoit que les exigences à évaluer s’agissant des régimes d’autorisation « ne s’appliquent à la législation dans le domaine des services d’intérêt économique général que dans la mesure où l’application de ces (exigences) ne fait pas échec à l’accomplissement, en droit ou en fait, de la mission particulière qui leur a été confiée ».

L’alinéa 4 de l’article premier de la proposition instaure donc une présomption de compatibilité pour les services sociaux d’intérêt général. À partir du moment où un service d’intérêt économique général est qualifié de social, et quand bien même il ne rentrerait pas dans les dérogations prévues à l’article 2.2.j, son régime d’autorisation sera présumé compatible avec les dispositions de la directive.

Enfin, l’alinéa 5 de l’article premier transpose le 1 de l’article 17 de la directive qui prévoit que les règles relatives à la libre prestation de service ne s’appliquent pas aux services d’intérêt économique général. Cet alinéa précise que sont également bien concernés les services sociaux d’intérêt général.

*

La commission rejette l’amendement AS 1 du rapporteur, rectifiant une erreur de référence, puis examine l’amendement AS 2 du rapporteur.

M. le rapporteur. Cet amendement vise à exclure explicitement les missions locales pour l’insertion des jeunes du champ de la directive.

La commission rejette l’amendement AS 2, ainsi que l’article 1er.

Article 2

Définition des services sociaux d’intérêt général

L’article 2 définit les services sociaux d'intérêt général et précise le droit qui leur est applicable que ceux-ci soient économiques ou non. Quatre objectifs sont retenus à l’alinéa 1 pour définir les services sociaux : protection sociale, cohésion sociale, solidarité nationale et mise en œuvre des droits fondamentaux.

L’ambition est donc plus vaste que la simple application de la directive services car il s’agit bien de dresser une liste, indicative donc non exhaustive, des services sociaux afin de les faire bénéficier des différentes dispositions protectrices figurant dans le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE).

L’article 2 fait, conformément au droit européen, la distinction entre d’une part les services sociaux économiques et les services sociaux non économiques assurant une « fonction à caractère exclusivement sociale ».

1. Les services sociaux économiques

Les premiers sont définis à l’alinéa 2 de l’article et énumérés dans l’annexe II. Comme on le sait, la Cour de justice des communautés européennes a une conception très large de la notion d’activité économique, puisqu’elle considère qu’il y a « entreprise » et « activité économique » dès lors que l’activité est susceptible d’être exercée par une entreprise privée dans un but lucratif. Aussi, le champ des activités non économiques est-il extrêmement réduit : cette méthode d’analyse tend à gommer les particularités des services à caractère social puisque presque toutes les activités peuvent être exercées sur un mode privé. Pour autant, même économique, une activité peut relever d’un service d’intérêt général et, à ce titre bénéficier d’un certain nombre de dispositions protectrices dans le droit primaire européen.

Ce sont ces dispositions qui sont visées à l’alinéa 2 de l’article sachant que certaines d’entre elles ont été renforcées par l’entrée en vigueur du Traité de Lisbonne qui :

– introduit une base juridique nouvelle en co-décision entre le Parlement européen et le Conseil leur donnant clairement mandat d’établir, par voie de règlements, les principes et de fixer les conditions permettant de garantir le bon accomplissement des missions d’intérêt général dans l’Union européenne (article 14 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne – Titre II : dispositions d’application générale) ;

– comporte un nouveau protocole sur les services d’intérêt général qui interprète la notion de valeur commune de l’Union à leur sujet. Ce protocole y affirme notamment le large pouvoir discrétionnaire des autorités publiques nationales, régionales et locales pour fournir, faire exécuter et organiser ces services. Il établit notamment un principe de diversité des services d’intérêt général en référence à des préférences collectives et à la perception des besoins des utilisateurs à satisfaire localement (article 1er du Protocole 26) ;

– confère au droit à l’accès aux services d’intérêt général afin de promouvoir la cohésion sociale et territoriale de l’Union, droit fondamental reconnu dans la Charte des droits fondamentaux, une valeur juridique analogue aux dispositions des Traités (article 34 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne).

2. Les services sociaux non-économiques

Dans son manuel relatif à la mise en œuvre de la directive services, la Commission donne la définition suivante : « l’expression « services non économiques » vise les services qui ne sont pas fournis en échange d’une contrepartie économique ». L’article 2 du protocole n° 26 sur les services d’intérêt général consacre cette notion et indique que « les dispositions des traités ne portent en aucune manière atteinte à la compétence des États membres pour fournir, faire exécuter et organiser des services non économiques d'intérêt général ».

Dans le domaine social, il est revenu à la Cour de Justice des communautés européennes d’élaborer, en droit de la concurrence, la catégorie des activités exclusivement sociales, comme sous-catégories des activités nécessairement non économiques, juste à côté de celles relevant de l’exécution des prérogatives de puissance publique. Il résulte de la jurisprudence de la Cour que les activités exclusivement sociales se caractérisent principalement par l’importance des exigences de solidarité auxquelles elles répondent ainsi que par la détermination légale des cotisations perçues et des prestations servies qui doivent être indépendantes les unes des autres, ainsi les régimes de protection sociale et les systèmes publics d’éducation.

L’annexe III dresse une liste indicative de ces services sociaux non-économiques.

*

La commission rejette les amendements AS 3 et AS 4 du rapporteur, de portée rédactionnelle et l’amendement de coordination AS 5 du même auteur.

Elle rejette ensuite l’article 2.

Article 3

Instauration d’une exigence de mandatement

L’article 3 de la proposition de loi vient, conformément aux exigences du droit européen, rappeler que pour être considérée comme un service social d’intérêt général (économique ou non-économique), une entité chargée par une autorité publique d’un service social doit l’être dans le cadre d’un mandatement.

Cette notion de mandatement est absolument essentielle dans le droit communautaire tant dans l’application des règles en matière d’aides publiques que dans la définition du champ de la directive services. Comme le soulignait la note d’étape du rapport Thierry : « c’est un concept qui n’impose pas un cadre juridique particulier, dont l’application par les États membres renvoie largement au principe de subsidiarité, et dont l’évaluation de la mise en œuvre, sous le contrôle du juge, repose sur la réunion d’un faisceau d’indices, ce qui soulève dans le contexte français quelques questions délicates ».

Cette exigence de mandatement est donc centrale dans le processus de positionnement des services sociaux et de leurs acteurs, notamment ceux relevant de l’économie sociale et solidaire, dans le champ protecteur des missions d’intérêt général qui leur sont imparties.

Cette exigence de mandatement conditionne en effet :

1. la compatibilité du financement public des services sociaux aux règles européennes de concurrence et notamment à l’interdiction des aides d’État : le mandatement permet d’appliquer le régime adapté dit des « compensations de service public », permettant de financer par des aides publiques jusqu’à 100 % des coûts d’exécution des obligations de service public. L’application de ce régime adapté est conditionnée à l’existence d’un acte de mandatement précisant la nature et la durée des obligations de service public, le territoire concerné, les droits exclusifs ou spéciaux octroyés, les paramètres de calcul de la compensation, le principe de juste compensation et les moyens de prévenir les éventuelles surcompensations.

2. l’exclusion de services sociaux du champ d’application de la directive services, notamment ceux qui sont assurés par des prestataires mandatés par l’État (et les collectivités territoriales) et par conséquent obligés de fournir les services sociaux en question aux bénéficiaires. Il s’agit du logement social, des services d’aide à l‘enfance et aux familles (crèches, soutien scolaire…) et aux personnes dans le besoin (sans-abri, personnes handicapées, personnes âgées, placement et formation des chômeurs…). Cette exclusion du champ d’application sous réserve de mandatement permet de maintenir les régimes d’encadrement des acteurs (agrément, autorisation, labellisation) visant à protéger les bénéficiaires vulnérables (petite enfance, handicap, exclusion, marginalisation…). Aucune exigence quant au contenu et aux modalités du mandatement n’accompagne cette notion de mandatement au sens du droit du marché intérieur contrairement aux dispositions relatives au droit de la concurrence.

Si la notion de mandat est commune aux champs de la directive et à celui du régime des aides publiques, elle n’a pas nécessairement le même contenu dans les deux cas et il existe un débat quant au terme même. En effet, cette notion ne s’appuie pas sur les mêmes bases juridiques et, surtout, elle ne répond pas tout à fait aux mêmes objectifs : dans l’application de la directive services, il s’agit avant tout de vérifier la délégation de missions d’intérêt général qui justifient l’existence de dispositions particulières encadrant l’activité exercée ; dans l’application du « paquet Monti-Kroes », l’accent est mis sur l’élimination des distorsions de concurrence, la détermination et le contrôle des aides publiques (1).

Même si l’objectif du mandatement est donc différent selon le domaine concerné, l’exigence d’un mandatement reste entière et l’article 3 reprend donc cette exigence.

*

La commission rejette l’article 3.

Article 4

Définition du mandatement et création
d’une convention de partenariat d’intérêt général

L’article 4 découle directement de l’article 3 en définissant avec précision les caractéristiques et les exigences d’un mandatement, conformément à la note d’étape du rapport Thierry précité qui indiquait qu’il « serait utile de disposer dans la loi de transposition de la directive services d’un rappel de la définition des éléments constitutifs du mandat ».

1. La définition de l’acte de mandatement

L’alinéa 1 de l’article 4 rappelle donc les éléments constitutifs du mandat en indiquant que l’acte de mandatement doit préciser ;

– la nature de la mission particulière impartie au service social ;

– la nature et la durée des obligations spécifiques qui en découlent ;

– le territoire concerné ;

– les droits spéciaux ou exclusifs éventuellement octroyés ;

– la nature et les paramètres de calcul de la juste compensation ;

– les moyens d’éviter d’éventuelles surcompensations.

Sont ainsi respectées l’ensemble des exigences posées par le « paquet Monti-Kroes » et par la directive services.

L’alinéa 2 indique ensuite la nature juridique de l’acte de mandatement et l’auteur du mandatement. La première peut être extrêmement variable puisqu’elle peut être aussi bien de nature législative que réglementaire, contractuelle ou internationale. En effet, l’auteur du mandatement, à savoir l’autorité publique, peut aussi bien agir par la loi, le règlement ou le contrat. C’est vrai pour l’État bien sûr, qui dispose de ces trois outils mais aussi des collectivités locales qui sont des acteurs essentiels des politiques sociales.

Le protocole n° 26 sur les services d’intérêt général reconnaît d’ailleurs explicitement ce rôle des autorités locales à son article 2 qui souligne : « le rôle essentiel et le large pouvoir discrétionnaire des autorités nationales, régionales et locales pour fournir, faire exécuter et organiser les services d'intérêt économique général d'une manière qui réponde autant que possible aux besoins des utilisateurs ».

À côté de l’État et des collectivités locales (dans leur diversité : régions, départements, communes et établissements publics de coopération intercommunale), figure aussi l’Union européenne.

2. La création d’une « convention de partenariat général »

L’une des préconisations du rapport Thierry était de « donner éventuellement une base légale à la notion de convention de partenariat d’intérêt général, pour régler les problèmes que peut poser le recours à la subvention. »

En effet, le recours à la subvention ne s’inscrit pas facilement dans le champ descendant de commande publique préalable, qui paraît être le modèle de référence du « paquet Monty-Kroes ». En effet, la jurisprudence administrative tend à requalifier en marchés les subventions accordées sur appel à projets, et surtout insiste sur l’exigence d’une initiative propre et préalable de la structure subventionnée. Il faut donc acter la rencontre entre le projet propre d’un opérateur et les préoccupations et objectifs de service public d’une autorité publique.

Mais, comme le reconnaît le rapport Thierry, « cette démarche est plus aléatoire dans des champs non couverts par un système législatif et réglementaire formalisant le partenariat avec des opérateurs de la société civile pour la mise en œuvre de services d’intérêt général ». Et le rapport d’énumérer un certain nombre de secteurs qui pourraient poser des difficultés : le champ de l’action sociale éducative, de l’éducation populaire, des pratiques sportives de proximité, et du soutien global à la vie associative.

Certes, il existe déjà, conformément à l’article 10 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, des conventions pluriannuelles d’objectifs et des systèmes de conventionnement sectoriels déjà organisés par le législateur. Mais, selon le rapport Thierry, il est nécessaire de prévoir une convention « avec une assiette de portée générale offrant un outil pour les secteurs moins structurés et permettant de mieux régler les problèmes que peut poser en droit interne le recours à la subvention ».

Le Gouvernement a partiellement répondu à cette proposition en proposant lors de la dernière Conférence de la vie associative, qui s’est tenue le 17 décembre dernier, un nouveau modèle de convention pluriannuelle d’objectifs compatible avec les exigences du droit communautaire. Un décret est en préparation et devrait être prochainement signé par le Premier ministre. Ce nouveau modèle de convention s’imposera aux services de l’État, mais pourra également être utilisé par les collectivités locales qui ont été étroitement associées à son élaboration.

Néanmoins, votre rapporteur estime que le dispositif proposé par l’article 4 de la proposition de loi est plus solide juridiquement d’abord parce qu’il est de niveau législatif et pas réglementaire : le fondement de la loi de 2000 semble très insuffisant pour les collectivités publiques dans la mesure où l’objectif est bien de créer un nouveau vecteur pour les SIEG, à côté des procédures de marchés publics, de délégation de service public et de partenariat public/privé.

Ensuite, parce que son champ d’action est plus large : le dispositif proposé par le Gouvernement semble peu adapté à certaines politiques, par exemple la politique de la ville, dans lesquelles le droit d’initiative des associations gestionnaires de la politique est, au final, assez réduit.

En revanche, suite aux auditions menées par votre Rapporteur, il est apparu qu’il était contre-productif de restreindre cet outil aux seules associations et que d’autres acteurs privés à but non lucratif pourraient utilement bénéficier de cette « convention de partenariat d’intérêt général ». Il vous sera donc proposé un amendement élargissant le dispositif.

*

La commission examine l’amendement AS 6 du rapporteur.

M. le rapporteur. La convention de partenariat d’intérêt général ne doit pas être conclue uniquement entre les collectivités locales et les associations, mais doit pouvoir concerner d’autres opérateurs, comme ceux du secteur privé non lucratif.

La commission rejette l’amendement, ainsi que l’article 4.

Article 5

Principes applicables aux services sociaux

L’article 5 rappelle un certain nombre de principes généraux applicables aux services sociaux d'intérêt général. Il rappelle les différents objectifs qui peuvent être confiés à un tel service :

– protection sociale ;

– cohésion sociale ;

– solidarité nationale ;

– mise en œuvre des droits fondamentaux.

Ces services doivent être fournis conformément à un certain nombre de principes qui sont au nombre de cinq :

 Accès universel : par l’obligation d’accueillir l’ensemble des utilisateurs éligibles et de leur apporter une réponse adaptée à leur besoin, de garantir la liberté de choix, l’égalité d’accès à des services de qualité quels que soient les statuts, les situations socio-économiques et territoriales des utilisateurs ;

 Accessibilité tarifaire : par l’obligation de respecter une tarification spécifique des services fournis afin de garantir un accès universel pour les utilisateurs ;

 Continuité : par l’obligation d’assurer une continuité du service en direction des utilisateurs éligibles et de présence dans les territoires prioritaires d’intervention ;

 Qualité : par l’obligation de garantir un haut niveau de qualité des services, d’évaluer les résultats obtenus en termes de satisfaction effective des besoins des utilisateurs et d’adapter la nature des obligations de service public à l’évolution des besoins des utilisateurs à satisfaire ;

 Protection des utilisateurs : par l’obligation de soumettre les activités en question à des contrôles réguliers visant à garantir la qualité du service, à corriger l’asymétrie d’information entre le prestataire et les utilisateurs, la consultation des utilisateurs et de définir des voies de recours en cas de non-satisfaction des utilisateurs.

*

La commission rejette l’article 5.

*

En conséquence, la Commission des affaires sociales rejette l’ensemble de la proposition de loi. Aux termes de l’article 42 de la Constitution, la discussion en séance publique aura lieu sur le texte initial de cette proposition de loi.

M. le président Pierre Méhaignerie. Ce vote n’empêchera pas la qualité du débat en séance publique.

TABLEAU COMPARATIF

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Texte en vigueur

___

Texte de la proposition de loi

___

Texte adopté par la

Commission

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Article 1er

 

Directive relative aux services dans le marché intérieur 2006/123/CE

Art. 2. – Cf. annexe.

Les services sociaux, tels que définis à l’article 2§2 de la présente loi ainsi que les services sociaux, assurés par l’État ou les collectivités territoriales, par des prestataires mandatés par l’État ou par les collectivités territoriales au sens des articles 3 et 4 de la présente loi, et par des associations caritatives, reconnues comme telles par l’État conformément à la loi n° 2008-776 du 4 août 2008, qui sont relatifs au logement social, à l’aide à l’enfance et à l’aide aux familles et tout autre service social destiné aux personnes se trouvant de manière permanente ou temporaire dans une situation de besoin, ne relèvent pas du champ d’application de la directive relative aux services dans le marché intérieur (2006/123/CE) conformément à ses articles 2.2.a) et 2.2.j). Ces services sont essentiels pour garantir le droit fondamental à la dignité et à l’intégrité humaines et sont une manifestation des principes de cohésion sociale et de la solidarité nationale.

 
 

La directive relative aux services dans le marché intérieur (2006/123/CE) n’affecte pas les critères ou conditions fixés par la République française pour assurer que ces services sociaux exercent effectivement une fonction au bénéfice de l’intérêt public de la France et de sa cohésion sociale.

 
 

Les services sociaux exclus du champ d’application de la directive relative aux services dans le marché intérieur (2006/123/CE) conformément à ses articles 2.2.a) et 2.2.j) sont définis, à titre indicatif, à l’annexe I.

 

Art. 14. – Cf. annexe.

Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne

Art. 106. – Cf. annexe.

Les régimes d’autorisation liés aux services sociaux considérés comme étant « d’intérêt économique général », qui ne sont pas exclus au titre de l’article 2.2.j) de la directive, dérogent néanmoins aux règles relatives aux régimes d’autorisation dès lors qu’une mission d’intérêt général leur est impartie. En effet, les services sociaux relevant de l’article 2§1 de la présente loi et ne relevant pas du présent article bénéficient des dispositions prévues à l’article 14.4 de la directive relative aux services dans le marché intérieur (2006/123/CE), à savoir que les paragraphes 1, 2 et 3 de l’article 14 de ladite directive ne s’appliquent à la législation dans le domaine des services d’intérêt économique général que dans la mesure où l’application de ces paragraphes ne fait pas échec à « l’accomplissement, en droit ou en fait, de la mission particulière qui leur a été confiée », conformément aux dispositions d’application générale de l’article 14 ainsi que des dispositions du 2° de l’article 106 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne.

 

Directive relative aux services dans le marché intérieur 2006/123/CE

Art. 16. – Cf. annexe.

Art. 17. – Cf. annexe.

Les services sociaux considérés comme étant « d’intérêt économique général », qui ne sont pas exclus au titre de l’article 2.2.j) de la directive, ne sont pas soumis aux règles relatives à la libre prestation de services. En effet, les services sociaux relevant de l’article 2§1 de la présente loi et ne relevant pas du présent article, sont exclus du champ d’application des dispositions de la directive en matière de libre prestation de services établies à son article 16 conformément aux dispositions établies à son article 17.1 qui précisent que l’article 16 ne s’applique pas « aux services d’intérêt économique général qui sont fournis dans un autre État membre ».

 
 

Article 2

 
 

Est définie comme services sociaux toute activité à laquelle des missions d’intérêt général sont imparties à des fins de protection sociale, de cohésion sociale, de solidarité nationale et de mise en œuvre des droits fondamentaux. Ces services sociaux peuvent être considérés compte tenu de leur mode d’organisation et de financement :

 
     

Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne

Art. 14 . – Cf. annexe.

Art. 106. – Cf. annexe.

Protocole n° 26 sur les services d’intérêt général des traités de l’Union européenne et sur le fonctionnement de l’Union européenne

Art. premier. – Cf. annexe.

Charte des droits fondamentaux

Art. 36. – Cf. annexe.

1) soit comme des services ou des activités de nature économique au sens du traité et de la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne car fournis contre rémunération, y compris quand le payeur du service n’est pas l’utilisateur direct (tiers payant). Ils relèvent des dispositions protectrices du bon accomplissement de leurs missions particulières telles que définies aux articles 14 et 106§2 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, de l’article premier du protocole n° 26 sur les services d’intérêt général des traités de l’Union européenne et sur le fonctionnement de l’Union européenne et de l’article 36 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne. Ces services sociaux, relevant des dispositions des articles 14 et 106§2 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, de l’article premier du protocole n° 26 sur les services d’intérêt général et de l’article 36 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne sont définis à titre indicatif à l’annexe II de la présente loi.

 

Protocole n° 26 sur les services d’intérêt général des traités de l’Union européenne et sur le fonctionnement de l’Union européenne

Art. 2. – Cf. annexe.

2) soit comme assurant une « fonction à caractère exclusivement social» au sens de la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne. Ils ne relèvent pas des règles applicables aux activités de nature économique et aux services du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne. Ces services sociaux ne sont pas fournis contre rémunération mais à titre gratuit, sans aucune contrepartie économique conformément aux principes d’accès universel, de solidarité nationale et de péréquation tarifaire ou sur base d’une contribution ne relevant pas d’une rémunération car définie par l’autorité publique indépendamment des coûts réels de sa fourniture. Ils sont assurés par des entités sans but lucratif à gestion désintéressée ne maîtrisant pas le niveau des recettes qui est défini par l’autorité publique, entités créées spécifiquement pour accomplir ces missions particulières à finalité exclusivement sociale ou en l’absence d’offre concurrente à but lucratif structurée et pérenne qui soit à même d’en assurer durablement la fourniture aux conditions fixées par l’autorité publique conformément aux principes définis à l’article 5. Ces services sociaux non-économiques relevant d’une fonction à caractère exclusivement social et des dispositions de l’article 2 du protocole n° 26 sur les services d’intérêt général, sont définis à titre indicatif à l’annexe III de la présente loi.

 
 

Article 3

 
 

Les dispositions de l’article 2 s’appliquent à toute entité chargée par une autorité publique ou par une entité mandatée à cet effet par une autorité publique nationale, régionale ou locale, de la gestion de services sociaux ainsi définis, au moyen d’un acte officiel de mandatement chargé de fournir le service social concerné conformément aux obligations spécifiques découlant de la mission particulière qui lui est impartie.

 
 

Article 4

 
 

L’acte officiel de mandatement doit préciser la nature de la mission particulière impartie au service social, la nature et la durée des obligations spécifiques qui en découlent, le territoire concerné, les droits spéciaux ou exclusifs éventuellement octroyés nécessaires à l’accomplissement de la mission impartie et à l’imposition effective des obligations spécifiques et au respect des principes définis à l’article 5 de la présente loi, la nature et les paramètres de calcul de la juste compensation octroyée à l’entité chargée de la gestion du service social concerné ainsi que les moyens d’éviter d’éventuelles surcompensations.

 
 

Est considéré comme acte officiel de mandatement tout acte opposable de nature législative, règlementaire, contractuelle ou internationale, obligeant l’entité à fournir les services sociaux conformément aux obligations spécifiques découlant de la mission particulière impartie, qui est établi par l’État, par les collectivités territoriales (régions, départements, communes, établissements publics de coopération intercommunale) ou par toute entité mandatée à cet effet par une autorité publique y compris une institution, un organe ou un organisme de l’Union européenne.

 

Code des marchés publics

Art. 30.– Cf. annexe.

Directive relative à la coordination des procédures de passation des marchés publics de travaux, de fournitures et de services 2004/18/CE

Art. 21. Cf. annexe.

Annexe II B. Cf. annexe.

Les actes relatifs aux contrats de marché public établis pour les services sociaux conformément à la procédure allégée de l’article 30 du code des marchés publics découlant des dispositions de l’article 21 et de l’annexe II B catégorie 25 de la directive 2004/18/CE, aux contrats de délégations de service public, à l’octroi de droits spéciaux ou exclusifs, aux conventions y compris aux conventions de subvention, sont constitutifs d’actes officiels de mandatement dès lors qu’ils sont conformes à l’alinéa 1 du présent article.

 
 

Conformément aux principes généraux du traité sur le fonctionnement de l’Union, de transparence, d’égalité de traitement et de non-discrimination en fonction de la nationalité, ces actes, quelle que soit leur nature, doivent faire l’objet d’un avis de publicité préalable adéquate.

 
 

Il est créé une convention de subvention spécifique à la gestion des services sociaux relevant de l’article 2§1 de la présente loi, dites « convention de partenariat d’intérêt général » afin de sécuriser le mode de contractualisation entre les autorités publiques et les associations relevant de la loi 1901 auxquelles il est reconnu un droit d’initiative fondé sur un projet associatif s’inscrivant dans le cadre de la mission particulière impartie à ces services. Un décret en établira le contenu conformément aux dispositions des premier et quatrième alinéas du présent article.

 
 

Article 5

 
 

Les services sociaux auxquels des missions d’intérêt général sont imparties à des fins de protection sociale, de cohésion sociale, de solidarité nationale et de mise en œuvre des droits fondamentaux sont fournis conformément aux principes communs d’accès universel, d’accessibilité tarifaire, de continuité, de qualité et de protection des utilisateurs tels que définis à l’article premier du protocole n° 26 sur les services d’intérêt général des traités de l’Union européenne et sur le fonctionnement de l’Union européenne.

 

ANNEXE AU TABLEAU COMPARATIF

Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne 64

Protocole n°26 sur les services d’intérêt général des traités de l’Union européenne et sur le fonctionnement de l’Union européenne 64

Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne 65

Directive relative aux services dans le marché intérieur 2006/123/CE 65

Directive relative à la coordination des procédures de passation des marchés publics de travaux, de fournitures et de services 2004/18/CE 71

Code des marchés publics 71

Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne

Art. 14 (ex-article 16 TCE) – Sans préjudice de l'article 4 du traité sur l'Union européenne et des articles 93, 106 et 107 du présent traité, et eu égard à la place qu'occupent les services d'intérêt économique général parmi les valeurs communes de l'Union ainsi qu'au rôle qu'ils jouent dans la promotion de la cohésion sociale et territoriale de l'Union, l'Union et ses États membres, chacun dans les limites de leurs compétences respectives et dans les limites du champ d'application des traités, veillent à ce que ces services fonctionnent sur la base de principes et dans des conditions, notamment économiques et financières, qui leur permettent d'accomplir leurs missions. Le Parlement européen et le Conseil, statuant par voie de règlements conformément à la procédure législative ordinaire, établissent ces principes et fixent ces conditions, sans préjudice de la compétence qu'ont les États membres, dans le respect des traités, de fournir, de faire exécuter et de financer ces services.

Art. 106 (ex-article 86 TCE). – 1. Les États membres, en ce qui concerne les entreprises publiques et les entreprises auxquelles ils accordent des droits spéciaux ou exclusifs, n'édictent ni ne maintiennent aucune mesure contraire aux règles des traités, notamment à celles prévues aux articles 18 et 101 à 109 inclus.

2. Les entreprises chargées de la gestion de services d'intérêt économique général ou présentant le caractère d'un monopole fiscal sont soumises aux règles des traités, notamment aux règles de concurrence, dans les limites où l'application de ces règles ne fait pas échec à l'accomplissement en droit ou en fait de la mission particulière qui leur a été impartie. Le développement des échanges ne doit pas être affecté dans une mesure contraire à l'intérêt de l'Union.

3. La Commission veille à l'application des dispositions du présent article et adresse, en tant que de besoin, les directives ou décisions appropriées aux États membres.

Protocole n°26 sur les services d’intérêt général des traités de l’Union européenne et sur le fonctionnement de l’Union européenne

Art. premier. – Les valeurs communes de l'Union concernant les services d'intérêt économique général au sens de l'article 14 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne comprennent notamment :

– le rôle essentiel et le large pouvoir discrétionnaire des autorités nationales, régionales et locales pour fournir, faire exécuter et organiser les services d'intérêt économique général d'une manière qui réponde autant que possible aux besoins des utilisateurs;

– la diversité des services d'intérêt économique général et les disparités qui peuvent exister au niveau des besoins et des préférences des utilisateurs en raison de situations géographiques, sociales ou culturelles différentes;

– un niveau élevé de qualité, de sécurité et quant au caractère abordable, l'égalité de traitement et la promotion de l'accès universel et des droits des utilisateurs;

Art. 2. – Les dispositions des traités ne portent en aucune manière atteinte à la compétence des États membres pour fournir, faire exécuter et organiser des services non économiques d'intérêt général.

Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne

Art. 36. – Accès aux services d'intérêt économique général. L'Union reconnaît et respecte l'accès aux services d'intérêt économique général tel qu'il est prévu par les législations et pratiques nationales, conformément au traité instituant la Communauté européenne, afin de promouvoir la cohésion sociale et territoriale de l'Union.

Directive relative aux services dans le marché intérieur 2006/123

Art. 2. – Champ d'application. 1. La présente directive s'applique aux services fournis par les prestataires ayant leur établissement dans un État membre.

2. La présente directive ne s'applique pas aux activités suivantes :

a) les services d'intérêt général non économiques;

b) les services financiers tels que ceux ayant trait à la banque, au crédit, à l'assurance et à la réassurance, aux retraites professionnelles ou individuelles, aux titres, aux fonds d'investissements, aux paiements et aux conseils en investissement, y compris les services énumérés à l'annexe I de la directive 2006/48/CE;

c) les services et réseaux de communications électroniques ainsi que les ressources et services associés pour ce qui concerne les matières régies par les directives 2002/19/CE, 2002/20/CE, 2002/21/CE, 2002/22/CE et 2002/58/CE;

d) les services dans le domaine des transports, y compris les services portuaires, qui entrent dans le champ d'application du titre V du traité;

e) les services des agences de travail intérimaire;

f) les services de soins de santé, qu'ils soient ou non assurés dans le cadre d'établissements de soins et indépendamment de la manière dont ils sont organisés et financés au niveau national ou de leur nature publique ou privée;

g) les services audiovisuels, y compris les services cinématographiques, quel que soit leur mode de production, de distribution et de transmission, et la radiodiffusion sonore;

h) les activités de jeux d'argent impliquant des mises ayant une valeur monétaire dans les jeux de hasard, y compris les loteries, les casinos et les transactions portant sur des paris;

i) les activités participant à l'exercice de l'autorité publique conformément à l'article 45 du traité;

j) les services sociaux relatifs au logement social, à l'aide à l'enfance et à l'aide aux familles et aux personnes se trouvant de manière permanente ou temporaire dans une situation de besoin qui sont assurés par l'État, par des prestataires mandatés par l'État ou par des associations caritatives reconnues comme telles par l'État;

k) les services de sécurité privée;

l) les services fournis par les notaires et les huissiers de justice, nommés par les pouvoirs publics.

3. La présente directive ne s'applique pas en matière fiscale.

Art. 14. – Exigences interdites. Les États membres ne subordonnent pas l'accès à une activité de services ou son exercice sur leur territoire au respect de l'une des exigences suivantes :

1) les exigences discriminatoires fondées directement ou indirectement sur la nationalité ou, en ce qui concerne les sociétés, l'emplacement du siège statutaire, en particulier :

a) l'exigence de nationalité pour le prestataire, son personnel, les personnes détenant du capital social ou les membres des organes de gestion ou de surveillance du prestataire,

b) l'exigence d'être résident sur leur territoire pour le prestataire, son personnel, les personnes détenant du capital social ou les membres des organes de gestion ou de surveillance du prestataire;

2) l'interdiction d'avoir un établissement dans plus d'un État membre ou d'être inscrit dans les registres ou dans les ordres ou les associations professionnels de plus d'un État membre;

3) les limites à la liberté du prestataire de choisir entre un établissement à titre principal ou à titre secondaire, en particulier l'obligation pour le prestataire d'avoir son établissement principal sur leur territoire, ou les limites à la liberté de choisir entre l'établissement sous forme d'agence, de succursale ou de filiale;

4) les conditions de réciprocité avec l'État membre où le prestataire a déjà un établissement, à l'exception de celles prévues dans les instruments communautaires en matière d'énergie;

5) l'application au cas par cas d'un test économique consistant à subordonner l'octroi de l'autorisation à la preuve de l'existence d'un besoin économique ou d'une demande du marché, à évaluer les effets économiques potentiels ou actuels de l'activité ou à évaluer l'adéquation de l'activité avec les objectifs de programmation économique fixés par l'autorité compétente; cette interdiction ne concerne pas les exigences en matière de programmation qui ne poursuivent pas des objectifs de nature économique mais relèvent de raisons impérieuses d'intérêt général;

6) l'intervention directe ou indirecte d'opérateurs concurrents, y compris au sein d'organes consultatifs, dans l'octroi d'autorisations ou dans l'adoption d'autres décisions des autorités compétentes, à l'exception des ordres et associations professionnels ou autres organisations qui agissent en tant qu'autorité compétente; cette interdiction ne s'applique ni à la consultation d'organismes tels que les chambres de commerce ou les partenaires sociaux sur des questions autres que des demandes d'autorisation individuelles ni à une consultation du public;

7) l’obligation de constituer ou de participer à une garantie financière ou de souscrire une assurance auprès d'un prestataire ou d'un organisme établi sur leur territoire. Ceci ne porte pas atteinte à la possibilité pour les États membres d'exiger une couverture d'assurance ou des garanties financières en tant que telles et ne porte pas atteinte aux exigences relatives à la participation à un fonds collectif de compensation, par exemple pour les membres d'ordres ou organisations professionnels;

8) l'obligation d'avoir été préalablement inscrit pendant une période donnée dans les registres tenus sur leur territoire ou d'avoir exercé précédemment l'activité pendant une période donnée sur leur territoire.

Art. 15.Exigences à évaluer. 1. Les États membres examinent si leur système juridique prévoit les exigences visées au paragraphe 2 et veillent à ce que ces exigences soient compatibles avec les conditions visées au paragraphe 3. Les États membres adaptent leurs dispositions législatives, réglementaires ou administratives afin de les rendre compatibles avec ces conditions.

2. Les États membres examinent si leur système juridique subordonne l'accès à une activité de service ou son exercice au respect de l'une des exigences non discriminatoires suivantes:

a) les limites quantitatives ou territoriales sous forme, notamment, de limites fixées en fonction de la population ou d'une distance géographique minimum entre prestataires;

b) les exigences qui imposent au prestataire d'être constitué sous une forme juridique particulière;

c) les exigences relatives à la détention du capital d'une société;

d) les exigences autres que celles relatives aux matières couvertes par la directive 2005/36/CE ou que celles prévues dans d'autres instruments communautaires, qui réservent l'accès à l'activité de service concernée à des prestataires particuliers en raison de la nature spécifique de l'activité;

e) l'interdiction de disposer de plus d'un établissement sur le territoire d'un même État;

f) les exigences qui imposent un nombre minimum de salariés;

g) les tarifs obligatoires minimum et/ou maximum que doit respecter le prestataire;

h) l'obligation pour le prestataire de fournir, conjointement à son service, d'autres services spécifiques.

3. Les États membres vérifient que les exigences visées au paragraphe 2 remplissent les conditions suivantes:

a) non-discrimination: les exigences ne sont pas directement ou indirectement discriminatoires en fonction de la nationalité ou, en ce qui concerne les sociétés, de l'emplacement de leur siège statutaire;

b) nécessité: les exigences sont justifiées par une raison impérieuse d'intérêt général;

c) proportionnalité: les exigences doivent être propres à garantir la réalisation de l'objectif poursuivi, ne pas aller au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre cet objectif et d'autres mesures moins contraignantes ne doivent pas permettre d'atteindre le même résultat.

4. Les paragraphes 1, 2 et 3 ne s'appliquent à la législation dans le domaine des services d'intérêt économique général que dans la mesure où l'application de ces paragraphes ne fait pas échec à l'accomplissement, en droit ou en fait, de la mission particulière qui leur a été confiée.

5. Dans le rapport d'évaluation mutuelle prévu à l'article 39, paragraphe 1, les États membres indiquent:

a) les exigences qu'ils envisagent de maintenir ainsi que les raisons pour lesquelles ils estiment qu'elles sont conformes aux conditions visées au paragraphe 3;

b) les exigences qui ont été supprimées ou allégées.

6. À partir du 28 décembre 2006, les États membres ne peuvent plus introduire de nouvelles exigences du type de celles visées au paragraphe 2, à moins que ces exigences soient conformes aux conditions prévues au paragraphe 3.

7. Les États membres notifient à la Commission toute nouvelle disposition législative, réglementaire ou administrative qui prévoit des exigences visées au paragraphe 6 ainsi que les raisons qui se rapportent à ces exigences. La Commission communique lesdites dispositions aux autres États membres. La notification n'empêche pas les États membres d'adopter les dispositions en question.

Dans un délai de trois mois à compter de la réception de la notification, la Commission examine la compatibilité de ces nouvelles dispositions avec le droit communautaire et, le cas échéant, adopte une décision pour demander à l'État membre concerné de s'abstenir de les adopter, ou de les supprimer.

La notification d'un projet de loi nationale conformément à la directive 98/34/CE vaut respect de l'obligation de notification prévue par la présente directive.

Art. 16.Libre prestation des services. 1. Les États membres respectent le droit des prestataires de fournir des services dans un État membre autre que celui dans lequel ils sont établis.

L'État membre dans lequel le service est fourni garantit le libre accès à l'activité de service ainsi que son libre exercice sur son territoire.

Les États membres ne peuvent pas subordonner l'accès à une activité de service ou son exercice sur leur territoire à des exigences qui ne satisfont pas aux principes suivants :

a) la non-discrimination : l'exigence ne peut être directement ou indirectement discriminatoire en raison de la nationalité ou, dans le cas de personnes morales, en raison de l'État membre dans lequel elles sont établies;

b) la nécessité : l'exigence doit être justifiée par des raisons d'ordre public, de sécurité publique, de santé publique ou de protection de l'environnement;

c) la proportionnalité : l'exigence doit être propre à garantir la réalisation de l'objectif poursuivi et ne pas aller au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre cet objectif.

2. Les États membres ne peuvent pas restreindre la libre prestation de services par un prestataire établi dans un autre État membre en imposant l'une des exigences suivantes :

a) l'obligation pour le prestataire d'avoir un établissement sur leur territoire;

b) l'obligation pour le prestataire d'obtenir une autorisation de leurs autorités compétentes, y compris une inscription dans un registre ou auprès d'un ordre ou d'une association professionnels existant sur leur territoire, sauf dans les cas visés par la présente directive ou par d'autres instruments de la législation communautaire;

c) l'interdiction pour le prestataire de se doter sur leur territoire d'une certaine forme ou d'un certain type d'infrastructure, y compris d'un bureau ou d'un cabinet d'avocats, dont le prestataire a besoin pour fournir les services en question;

d) l'application d'un régime contractuel particulier entre le prestataire et le destinataire qui empêche ou limite la prestation de service à titre indépendant;

e) l'obligation, pour le prestataire, de posséder un document d'identité spécifique à l'exercice d'une activité de service délivré par leurs autorités compétentes.

f) les exigences affectant l'utilisation d'équipements et de matériel qui font partie intégrante de la prestation du service, à l'exception de celles nécessaires à la santé et la sécurité au travail;

g) les restrictions à la libre prestation des services visées à l'article 19.

3. Les présentes dispositions n'empêchent pas l'État membre dans lequel le prestataire se déplace pour fournir son service d'imposer des exigences concernant la prestation de l'activité de service lorsque ces exigences sont justifiées par des raisons d'ordre public, de sécurité publique, de santé publique ou de protection de l'environnement et conformément au paragraphe 1. Elles n'empêchent pas non plus cet État membre d'appliquer, conformément au droit communautaire, ses règles en matière de conditions d'emploi, y compris celles énoncées dans des conventions collectives.

4. Le 28 décembre 2011 au plus tard, la Commission présente au Parlement européen et au Conseil, après consultation des États membres et des partenaires sociaux au niveau communautaire, un rapport sur l'application du présent article, dans lequel elle examine la nécessité de proposer des mesures d'harmonisation concernant les activités de services couvertes par la présente directive.

Art. 17. – Dérogations supplémentaires à la libre prestation des services. L'article 16 ne s'applique pas :

1) aux services d'intérêt économique général qui sont fournis dans un autre État membre notamment :

a) dans le secteur postal, aux services couverts par la directive 97/67/CE du Parlement Européen et du Conseil du 15 décembre 1997 concernant des règles communes pour le développement du marché intérieur des services postaux de la Communauté et l'amélioration de la qualité du service;

b) dans le secteur de l'électricité, aux services couverts par la directive 2003/54/CE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2003 concernant des règles communes pour le marché intérieur de l'électricité;

c) dans le secteur du gaz, aux services couverts par la directive 2003/55/CE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2003 concernant des règles communes pour le marché intérieur du gaz naturel;

d) aux services de distribution et de fourniture d'eau et aux services de traitement des eaux usées;

e) au traitement des déchets;

2) aux matières couvertes par la directive 96/71/CE;

3) aux matières couvertes par la directive 95/46/CE du Parlement européen et du Conseil du 24 octobre 1995 relative à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données;

4) aux matières couvertes par la directive 77/249/CEE du Conseil du 22 mars 1977 tendant à faciliter l'exercice effectif de la libre prestation des services par les avocats;

5) aux activités de recouvrement judiciaire des dettes;

6) aux matières couvertes par le titre II de la directive 2005/36/CE ainsi qu'aux exigences en vigueur dans l'État membre où le service est fourni, qui réservent une activité à une profession particulière;

7) aux matières couvertes par le règlement (CEE) n° 1408/71;

8) en ce qui concerne les formalités administratives relatives à la libre circulation des personnes et à leur résidence, aux matières couvertes par les dispositions de la directive 2004/38/CE qui précisent les démarches administratives que les bénéficiaires doivent entreprendre auprès des autorités compétentes de l'État membre où le service est fourni;

9) en ce qui concerne les ressortissants de pays tiers qui se déplacent dans un autre État membre dans le cadre d'une prestation de service, à la faculté des États membres de requérir un visa ou un permis de séjour pour les ressortissants de pays tiers qui ne sont pas couverts par le régime de reconnaissance mutuelle prévu à l'article 21 de la convention d'application de l'Accord de Schengen du 14 juin 1985 relatif à la suppression graduelle des contrôles aux frontières communes, ni à la faculté des États membres d'imposer aux ressortissants de pays tiers de se manifester auprès des autorités compétentes de l'État membre où le service est fourni au moment de leur entrée sur le territoire ou ultérieurement;

10) en ce qui concerne les transferts de déchets, aux matières couvertes par le règlement (CEE) n° 259/93 du Conseil du 1er février 1993 concernant la surveillance et le contrôle des transferts de déchets à l'entrée et à la sortie de la Communauté européenne;

11) aux droits d'auteur et droits voisins, aux droits visés par la directive 87/54/CEE du Conseil du 16 décembre 1986 concernant la protection juridique des topographies de produits semi-conducteurs et par la directive 96/9/CE du Parlement européen et du Conseil, du 11 mars 1996, concernant la protection juridique des bases de données ainsi qu'aux droits de propriété industrielle;

12) aux actes pour lesquels la loi requiert l'intervention d'un notaire;

13) aux matières couvertes par la directive 2006/43/CE du Parlement européen et du Conseil du 17 mai 2006 concernant les contrôles légaux des comptes annuels et des comptes consolidés ;

14) à l'immatriculation des véhicules pris en leasing dans un autre État membre;

15) aux dispositions relatives aux obligations contractuelles et non contractuelles, y compris la forme des contrats, déterminées conformément aux règles du droit international privé.

Directive relative à la coordination des procédures de passation des marchés publics de travaux, de fournitures et de services 2004/18/CE

Art. 21. – Marchés de services figurant à l'annexe II B. La passation des marchés qui ont pour objet des services figurant à l'annexe II B est soumise seulement à l'article 23 et à l'article 35, paragraphe 4.

Annexe II B

Catégories

Désignation de services

Numéros de référence CPC(2)

Numéros de référence CPV(3)

25

Services sociaux et sanitaires

93

74511000-4, et de 85000000 à 85323000 (sauf 85321000-5 et 85322000-2)

Code des marchés publics

Art. 30. – I. – Les marchés et les accords-cadres ayant pour objet des prestations de services qui ne sont pas mentionnées à l'article 29 peuvent être passés, quel que soit leur montant, selon une procédure adaptée, dans les conditions prévues par l'article 28.

II. – Toutefois :

1° Les dispositions du III de l'article 40 ne sont pas applicables ;

2° Lorsque le montant estimé des prestations demandées est égal ou supérieur à 206 000 euros HT, elles sont définies conformément aux dispositions de l'article 6 et le marché fait l'objet d'un avis d'attribution dans les conditions fixées à l'article 85 ;

3° Les marchés d'un montant égal ou supérieur à 206 000 euros HT sont attribués par la commission d'appel d'offres pour les collectivités territoriales ;

4° Le pouvoir adjudicateur veille au respect des principes déontologiques et des réglementations applicables, le cas échéant, aux professions concernées ;

5° Les marchés de services juridiques ne sont pas soumis aux dispositions du titre IV de la présente partie. En outre, ceux de ces marchés qui ont pour objet la représentation d'une collectivité territoriale en vue du règlement d'un litige ne sont pas transmis au représentant de l'État.

III. – Lorsqu'un marché ou un accord-cadre a pour objet à la fois des prestations de services mentionnées à l'article 29 et des prestations de services qui n'y sont pas mentionnées, il est passé conformément aux règles qui s'appliquent à celle de ces deux catégories de prestations de services dont le montant estimé est le plus élevé.

AMENDEMENTS EXAMINÉS PAR LA COMMISSION

Amendement n° AS 1 présenté par M. Jean-Patrick Gille, rapporteur

Article 1er

À la dernière phrase de l’alinéa 4, substituer par deux fois au nombre : « 14 », le nombre : « 15 ».

Amendement n° AS 2 présenté par M. Jean-Patrick Gille, rapporteur

Article 1er

Après l’alinéa 17 de l’annexe I, insérer l’alinéa suivant :

« les missions locales pour l’insertion des jeunes et permanences d’accueil, d’information et d’orientation assurées par les organismes mandatés par l’État ou les collectivités territoriales conformément à l’article 3 de la présente loi ; »

Amendement n° AS 3 présenté par M. Jean-Patrick Gille, rapporteur

Article 2

À la dernière phrase de l’alinéa 2, supprimer les mots : « , relevant des dispositions des articles 14 et 106§2 TFUE, de l’article premier du protocole n°26 sur les services d’intérêt général et de l’article 36 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne ».

Amendement n° AS 4 présenté par M. Jean-Patrick Gille, rapporteur

Article 2

Au titre de l’annexe II, substituer aux mots : « l’article premier », les mots : « au 1) de l’article 2 ».

Amendement n° AS 5 présenté par M. Jean-Patrick Gille, rapporteur

Article 2

Après l’alinéa 3 de l’annexe II, insérer l’alinéa suivant : « les missions locales pour l’insertion des jeunes ».

Amendement n° AS 6 présenté par M. Jean-Patrick Gille, rapporteur

Article 4

Après le mot : « publiques », rédiger ainsi la fin de la première phrase de l’alinéa 5 : « et les opérateurs exerçant des actions à vocation sociale dans le cadre de mission d'intérêt général, et particulièrement aux associations relevant de la loi de 1901 auxquelles il est reconnu  un droit d'initiative fondé sur un projet associatif ».

ANNEXES

ANNEXE 1

ÉLÉMENTS D’INFORMATION SUR LE DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE APPLICABLE OU EN COURS D’ÉLABORATION 
(4)

I. Rappels sur la directive 2006/123/CE relative aux services dans le marché intérieur du 12 décembre 2006, dite « directive services » :

La libre circulation des services et la liberté d’établissement des prestataires de services, bien qu’inscrites au plus haut niveau de la hiérarchie des normes communautaires depuis les origines de la construction européenne, méritaient d’être encore approfondies, surtout par comparaison avec la libre circulation des marchandises qui, quant à elle, a été résolument mise en œuvre – avec succès.

Certes, des textes communautaires sectoriels existent, mais l’ensemble normatif qu’ils constituent demeure fragmenté, et de nombreux obstacles juridiques empêchent les prestataires de services d’un État d’exercer leur activité dans les autres États membres. La « directive services » a donc été élaborée dans le but de rendre plus concrètes les libertés d’établissement et de circulation pour les acteurs du secteur tertiaire.

La directive « relative aux services dans le marché intérieur » a été adoptée en décembre 2006, et le délai de transposition a expiré le 28 décembre 2009. L’étape de la transposition en droit national est extrêmement difficile. Pourquoi ? D’une part, parce que chaque État membre devait transposer la directive dans un délai de trois ans, ce qui est bref vu le nombre de secteurs, d’activités et de textes concernés.

D’autre part, la transposition comporte le risque – inévitable – que chaque État interprète différemment les dispositions de la directive. L’existence d’une marge de manœuvre pour les États au moment de la transposition est habituelle pour les directives, mais celle-ci comporte indiscutablement des dispositions qui manquent de clarté, en ce qui concerne la délimitation de son champ d’application. Ce manque de clarté est en partie voulu, pour permettre le respect des spécificités de chaque État membre. Mais il peut être la source de litiges, et en dernier ressort, la Cour de justice sera éventuellement amenée à trancher.

Outre son ambition particulièrement vaste, cette directive est loin d’être une directive « comme les autres » : elle se compose en réalité de plusieurs dispositifs, ce qui rend sa mise en œuvre extrêmement lourde pour les États.

Le premier volet de la transposition est le passage en revue de la législation nationale. La préparation de la transposition devait commencer par un recensement exhaustif de tous les régimes juridiques nationaux d’autorisation ou d’agrément applicables aux activités de service dans un État donné. Une fois établie cette liste de régimes existants, chaque État devait les examiner un par un pour déterminer si chacun d’eux remplit les conditions, fixées par la directive, permettant d’affirmer qu’ils ne sont pas contraires au droit communautaire.

Il convient d’insister sur le fait que tous les régimes d’autorisation ou d’agrément d’activités de services ne vont pas être mécaniquement et systématiquement supprimés : la directive édicte des critères permettant aux États membres d’apprécier dans quelle mesure le maintien de chacun de ces régimes est justifié. Une fois tous les textes identifiés, il faut apprécier la nécessité, la proportionnalité et le caractère non-discriminatoire de chacun d’eux.

Le deuxième volet est la mise en place des « guichets uniques ». Les « guichets uniques » nationaux fourniront des informations sur leurs droits et sur les formalités à accomplir aux prestataires et aux bénéficiaires de services. Ils devront offrir aux prestataires de services la possibilité de communiquer avec l’organisme délivreur d’autorisation.

Plusieurs États ont lancé des expérimentations au niveau national ou au niveau infra-national (dans certains Länder autrichiens et allemands). La France et le Portugal testent actuellement leurs structures auprès de certains secteurs : la profession d’architecte et le secteur immobilier pour la France, le secteur du tourisme pour le Portugal. Les Pays-Bas, le Royaume-Uni et l’Estonie coopèrent afin de s’assurer que leurs guichets nationaux respectifs fonctionnent bien sur une base transfrontalière. En France, en application de la loi de modernisation de l’économie du 4 août 2008, ce sont les centres de formalités des entreprises (CFE) qui joueront le rôle de « guichets uniques » au sens de la « directive services ».

Enfin, la « directive services » impose aux États membres des obligations importantes en termes de coopération administrative. Cette coopération va exiger la participation d’un grand nombre d’autorités à tous les niveaux d’administration ainsi que des organisations professionnelles. Pour rendre ceci possible techniquement, la Commission européenne et les États ont mis en place le système IMI (Internal Market Information system), qui permettra d’identifier les interlocuteurs pertinents dans chaque État, de communiquer de manière rapide et par voie électronique. Un projet pilote fonctionne depuis janvier 2009.

II. L’examen de la proposition de directive, et le suivi de la transposition de la directive, par la commission des affaires européennes de l’Assemblée nationale :

1. L’examen de la proposition initiale de directive :

Le 2 février 2005, sur le rapport de Mme Anne-Marie Comparini (rapport d’information n° 2053), la Délégation de l’Assemblée nationale pour l’Union européenne a adopté une proposition de résolution qui considérait la proposition initiale de directive comme inacceptable et demandait son retrait pour une remise à plat. Cette proposition de résolution a été renvoyée à la commission des affaires économiques, qui a également conclu, le 1er mars 2005, sur le rapport de M. Robert Lecou (rapport n° 2111), que la proposition initiale de directive était inacceptable. Ces propositions de résolution ont été inscrites à l’ordre du jour et l’Assemblée nationale s’est prononcée en séance plénière le 15 mars 2005, reprenant la conclusion de la commission des affaires économiques (résolution n° 402).

La Délégation de l’Assemblée nationale pour l’Union européenne a continué à suivre l’évolution des négociations sur la proposition de directive jusqu’à l’adoption définitive de celle-ci par le Parlement européen et le Conseil, notamment en y consacrant une réunion tenue à Bruxelles le 30 novembre 2005 avec les membres du Parlement européen, et la réunion de la Délégation du 10 mai 2006, au cours de laquelle Mme Comparini a présenté à ses collègues la proposition révisée de directive présentée par la Commission.

2. Après l’adoption de la directive : le suivi des travaux de transposition

Le 15 juillet 2008, MM. Emile Blessig et Christophe Caresche, rapporteurs chargés du suivi de la transposition de la « directive services », ont présenté une première communication devant la Délégation. A l’issue de cette présentation, la Délégation a adopté les conclusions suivantes :

« La Délégation,

Vu la directive 2006/123/CE du Parlement européen et du Conseil du
12 décembre 2006 relative aux services dans le marché intérieur,

Considérant que cette directive, d’une importance et d’une complexité particulières, prévoit que les États membres doivent en avoir achevé la transposition dans leur droit national avant le 28 décembre 2009,

1. Demande au gouvernement de poursuivre résolument les travaux préparatoires à la transposition de manière à ce que la France soit en mesure de respecter le délai imposé par la directive elle-même ;

2. Juge indispensable que, préalablement à l’adoption des mesures législatives et réglementaires de transposition, un large travail d’explication et de pédagogie soit effectué par les autorités françaises pour dissiper la confusion et les craintes que ce texte a pu susciter dans l’opinion publique et associer les professionnels concernés ;

3. Demande que, s’agissant des mesures de transposition de nature législative, le ou les projets de loi correspondants soient déposés sans retard sur le bureau des Assemblées, et que le Parlement soit tenu informé de la manière la plus complète de l’état de la transposition au niveau réglementaire ;

4. Appelle le gouvernement à clarifier rapidement la délimitation exacte du champ d’application des dispositions de la directive, et à rechercher un accord le plus large possible avec ses partenaires de l’Union européenne, dans la mesure où la marge de manœuvre qui est laissée aux États membres leur permet en principe de tenir compte des sensibilités et spécificités nationales mais risque de conduire à des divergences d’interprétation de ces dispositions selon les pays ;

5. Demande au gouvernement de veiller à une bonne articulation de la directive relative aux services avec la directive relative à la reconnaissance des qualifications professionnelles. »

M. Blessig ayant par la suite été remplacé en tant que co-rapporteur par M. Daniel Fasquelle, un nouvel « état des lieux » des travaux de transposition de la « directive services » a été présenté par MM. Caresche et Fasquelle devant la commission des affaires européennes (anciennement Délégation) le 16 décembre 2009. Les éléments présentés conjointement par les deux rapporteurs ont porté sur les points suivants :

III. Méthode de transposition et calendrier des travaux en France

Le Gouvernement français a considéré que cette transposition était l’occasion de mener un travail transversal de modernisation et de simplification. Il convient de préciser que ceci n’est pas une obligation fixée par la directive.

Tous les ministères sont concernés par la transposition de la directive « services », à l’exception du ministère des affaires étrangères et du ministère de la défense. Une mission interministérielle, dirigée par Mme Marie-José Palasz, a été créée en mars 2007 pour assurer le pilotage des travaux.

Le rôle de la mission interministérielle est d’assurer la cohérence des travaux des ministères, mais pas d’opérer elle-même la transposition. Chaque ministère est responsable de l’établissement de la liste des régimes d’autorisation existants dans son secteur, de la rédaction des textes nécessaires et des contacts à prendre avec les professions concernées. Le travail de recensement des textes existants par les ministères s’est achevé en juillet 2008. Lorsque cela s’est révélé nécessaire, des arbitrages ont été opérés à Matignon.

Quel a été le rôle du Parlement dans le processus de transposition ? Le Parlement français s’était prononcé en amont de l’adoption de la directive, en 2005 et 2006. En revanche, l’intervention du Parlement dans l’élaboration des textes de transposition a été très limitée, car en France beaucoup de régimes d’autorisation sont du domaine réglementaire (décrets, arrêtés).

Selon le Gouvernement français, à ce stade le déroulement des travaux met la France dans une bonne moyenne par rapport aux autres États membres. En France, si tous les projets de loi estimés nécessaires par le Gouvernement pour la transposition ont bien été déposés à temps, tous n’ont pas été adoptés avant le 28 décembre 2009.

Outre la proposition de loi présentée par le groupe SRC relative à la protection des missions d'intérêt général imparties aux services sociaux et à la transposition de la directive services, les textes législatifs déjà adoptés ou en cours d’examen par le Parlement, ayant pour effet de transposer partiellement la « directive services », sont :

– la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l’économie, qui comporte notamment des dispositions relatives aux « guichets uniques »,

– la loi n° 2009-888 du 22 juillet 2009 de développement et de modernisation des services touristiques, en ce qui concerne notamment les agences de voyages,

– le projet de loi portant fusion des professions d'avocat et d'avoué près les cours d'appel, en instance de deuxième lecture à l’Assemblée,

– la proposition de loi de M. Jean-Luc Warsmann de simplification et d’amélioration de la qualité du droit, adoptée par l’Assemblée le 2 décembre 2009 et en cours d’examen au Sénat,

– le projet de loi déposé le 29 juillet 2009 relatif aux réseaux consulaires, au commerce, à l’artisanat et aux services.

IV. Éléments d’information sur les méthodes suivies dans les autres États :

Plusieurs facteurs expliquent que le processus de transposition se soit déroulé de manière très différente selon les pays.

a) Dans les pays à structure fédérale comme l’Allemagne et l’Autriche, une grande part des travaux de transposition relève de la compétence des régions ou des Länder.

b) Des choix spécifiques ont été opérés par chaque État : fallait-il élaborer une loi transversale sur les services, ou plusieurs lois sectorielles ? Créer de toutes pièces des « guichets uniques », ou charger des organes existants d’assurer cette fonction ? Publier des informations accessibles au grand public, ou ne mener une démarche d’information qu’auprès des professions concernées ? Tous ces cas de figure trouvent des illustrations ; par exemple :

– la Suède a adopté une loi générale sur les services et a modifié une douzaine de lois sectorielles, tandis que le Royaume-Uni a procédé aux modifications nécessaires texte par texte ;

– au Royaume-Uni et en Espagne, des informations sur les travaux de transposition sont publiées sur un site Internet gouvernemental, même si elles sont succinctes, tandis qu’en France aucun système d’information de ce type n’a été prévu ;

– en France, en Belgique et aux Pays-Bas, les guichets uniques seront intégrés à des structures déjà existantes ; en Allemagne, la forme exacte que prendront ces centres d’information dépendra des décisions prises au niveau de chacun des Länder ;

c) Le calendrier d’adoption des lois nationales – sans même parler des textes réglementaires – a été très variable selon les pays. Le Danemark a été le premier État à adopter une loi horizontale de transposition, suivi par la Roumanie, la Hongrie et la République tchèque.

V. La vigilance du Parlement européen :

Plusieurs membres du Parlement européen, représentant l’ensemble des groupes politiques, ont posé une question orale à la Commission européenne et au Conseil, ce qui a permis d’exposer, à l’occasion d’un débat en plénière le 11 novembre 2009, les éléments suivants :

La Commission européenne a rappelé qu’elle avait fourni un travail très important d’assistance aux États membres et d’organisation de rencontres de coordination bilatérale et multilatérale, mais que la transposition relève exclusivement de la responsabilité des États. Elle a indiqué qu’à cette date, seulement la moitié des États membres semblait être en position d’achever la transposition avant la fin de l’année 2009 ou au début de l’année 2010. Bien que cette situation n’ait rien d’exceptionnel par rapport aux autres directives relatives au marché intérieur, cela constitue une source d’inquiétude. La Commission n’a pas précisé quels étaient les États visés.

Lors de ce débat, et par de nombreuses questions écrites, les membres du Parlement européen, qui ont joué un rôle essentiel dans l’élaboration du texte, ont manifesté une très forte volonté de suivre attentivement la mise en œuvre de cette directive. Le travail de suivi auquel se livre Mme Evelyne Gebhardt, qui a été la rapporteure sur la proposition de directive, reçoit clairement le soutien de ses collègues, toutes tendances politiques confondues.

VI. La date du 28 décembre 2009 est loin de marquer la clôture du processus de transposition : l’année 2010 sera celle de l’ « évaluation mutuelle »

La directive a prévu l’obligation pour les États membres de notifier à la Commission les résultats de leur travail avant la fin de l’année 2009, puis la transmission du rapport de chaque État membre à tous les autres États pour que les États membres se livrent à une « évaluation mutuelle ».

1° - Chaque État devait transmettre à la Commission européenne fin décembre 2009 un « rapport » ; celui-ci va prendre la forme de fiches déposées sous forme électronique dans une base de données créée par la Commission européenne (base de données dite « IPM » : Interactive Policy Making). Outre la Commission européenne, chaque État membre aura accès aux fiches envoyées par les autres États dans cette base de données.

Le Gouvernement français a fait le choix de ne pas notifier les fiches une par une mais « en bloc » à la fin du délai. Les fiches « IPM » composant le rapport sont produites par les ministères concernés, puis validées par la « mission Palasz » et le SGAE. À la fin du mois de novembre 2009, selon le SGAE, environ la moitié des fiches « IPM » françaises étaient prêtes à être envoyées.

2° - Pour le processus d’évaluation mutuelle, chaque État rédigera un rapport de synthèse sur la façon dont il a transposé la directive, en mettant l’accent sur les principales modifications faites et sur les principaux secteurs concernés par ces modifications. Pour la France, ce rapport de synthèse sera rédigé par la « mission Palasz ». La Commission européenne traduira ces rapports et les diffusera auprès de tous les États membres.

Les différents rapports feront l’objet d’un examen, d’abord par les pays réunis en petits groupes, pendant deux mois, puis fin mars un examen par tous les États membres avec des revues thématiques.

Pour l’instant on ignore quelles formes va prendre la consultation, par la Commission européenne, des « parties intéressées » dans l’examen de ces rapports des États. Les modalités de l’information du Parlement européen ne sont pas encore fixées non plus. Le Parlement européen s’interroge d’ailleurs sur l’accès qu’il pourra avoir aux fiches « IPM » et aux rapports de synthèse.

Il convient de bien distinguer les deux phases du processus de mise en œuvre de la directive :

– la phase de transposition, qui s’est achevée il y a quelques jours, est celle pendant laquelle chaque État devait « se mettre en règle » par rapport à la directive ;

– la phase d’évaluation mutuelle est d’une importance considérable : elle va consister pour chacun des 27 États à identifier les domaines dans lesquels tel État n’aurait pas respecté ses obligations, ce qui serait préjudiciable pour les entreprises des autres pays. Le but de ce processus est d’identifier les difficultés, de désamorcer les contentieux et de donner une réalité d’ensemble au marché intérieur des services.

La durée de la phase d’évaluation mutuelle n’est pas fixée par la directive mais devrait se dérouler sur au moins six mois, sachant que la directive fait obligation à la Commission européenne de présenter un rapport au Conseil et au Parlement européen fin 2010.

* * *

ANNEXE 2

GLOSSAIRE

Ø Service d’intérêt général : Un service d’intérêt général (SIG) est un service qu’une autorité publique juge nécessaire de fournir ou de faire fournir. Il se caractérise par des conditions particulières de fourniture, des exigences et obligations exorbitantes du droit commun découlant du caractère de nécessité de satisfaction. Cela recouvre une grande variété de services dont le caractère de nécessité est fondé sur des valeurs et des préférences collectives constitutives du modèle social européen (droits fondamentaux, acquis sociaux, protection sociale, cohésion économique, sociale et territoriale, solidarité…).

Ø Service social d’intérêt général : Selon la Commission, un service social d’intérêt général (SSIG) est un SIG dont la mission vise à répondre aux besoins vitaux de l’être humain à lui permettre de bénéficier de ses droits fondamentaux telles que la dignité et l’intégrité de la personne et d’un niveau élevé de protection sociale. La Commission opère une distinction, parmi les SSIG, entre les services de santé et d’éducation, les régimes de protection sociale (santé, vieillesse, accidents du travail, chômage, retraite, handicap) et les services sociaux essentiels parmi lesquels les services d’aide aux personnes vulnérables (endettement, chômage, toxicomanie, rupture familiale….), les services d’insertion économique et sociale (formation professionnelle, réinsertion…), les services d’inclusion sociale (handicap, santé) et le logement social.

Ø Service d’intérêt économique général : Les SIG, y compris les SSIG, peuvent relever d’activités de « nature économique » au sens du traité. Ils sont alors qualifiés des « services d’intérêt économique général » (SIEG). La nature « économique » est définie au cas par cas par la Cour de justice des communautés européennes (CJCE) en référence à l’existence ou non d’un marché (notion d’entreprise) et/ou d’une rémunération ou contrepartie économique à la fourniture du service (notion de services). Les SIEG relèvent des règles de concurrence et du marché intérieur à la condition qu’elles ne fassent pas échec à l’accomplissement de la « mission particulière » qui leur est impartie. La Commission en a déduit un « principe de primauté de l’accomplissement des missions d’intérêt général » sur l’application de ces règles.

Ø Service non économique d’intérêt général : Les SIG, y compris les SSIG, qui ne relèvent pas d’activités de « nature économique » sont qualifiés de « services non économiques d’intérêt général (SNEIG) ». Les règles de concurrence et du marché intérieur qui s’appliquent aux entreprises et aux services ne leur sont donc pas applicables. Seuls s’appliquent les grands principes du traité. Sont considérés par la Cour de justice des communautés européennes comme relevant d’activités de « nature non économique » les « fonctions de puissance publique » et les « fonctions exclusivement sociales ». Ces dernières sont caractérisées par l’absence de contrepartie économique ou par une déconnexion entre le coût effectif de la prestation et sa facturation à l’utilisateur (exemples des SSIG de protection sociale fondés sur la solidarité tels que les régimes obligatoires de protection sociale et d’éducation).

ANNEXE 3

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LE RAPPORTEUR

(par ordre chronologique)

Ø Inspection générale des affaires sociales (IGAS) – M. Michel Thierry, inspecteur

Ø Union nationale interfédérale des œuvres et organismes privés sanitaires et sociaux (UNIOPSS) – Mme Carole Salères, conseillère technique du pôle « Europe », et Mme Karine Métayer, conseillère technique du pôle « Enfance, jeunesse, famille »

Ø Direction générale de l'action sociale (DGAS) – M. Guy Janvier, directeur de projet

Ø Collectif SSIG M. Laurent Ghekiere, représentant de l’Union sociale pour l’habitat auprès de l’Union européenne, Mme Cornélia Federkeil-Giroux, responsable du département Europe de la Mutualité Française, et M. Christophe Piteux, responsable du département conseil juridique et formation de lUnion nationale des centres communaux daction sociale

Ø Association nationale pour la formation professionnelle des adultes (AFPA) – M. Vincent Destival, directeur général adjoint, M. Philippe Belin, directeur juridique et M. Florent Longuepée, directeur des relations institutionnelles

Ø Secrétariat général des affaires européennes (SGAE) – Mme Muriel Lacoue-Labarthe, chef de secteur, secrétaire général aux affaires européennes

Ø Mission pour la transposition de la directive services Mme Marie-José Palasz, chef de la mission

Ø Haut commissariat aux solidarités actives contre la pauvreté, haut commissariat à la Jeunesse M. Jérôme Teillard, conseiller technique

Ø Association des maires de France (AMF) – Mme Marie-Claude Serre-Combourieu, directrice du département « Action sanitaire et sociale », et Mme Nathalie Fourneau, juriste

Ø Assemblée des départements de France (ADF) – M. Jean-Pierre Hardy, chef du service des politiques sociales, Mme Catherine Bertin, chef du service « Europe, culture et sports », Mme Christine Cote, chargée de mission « Europe », et Mme Marylène Jouvien, chargée des relations institutionnelles

Ø Assemblée des régions de France (ARF) – Mme Marie-Laure Meyer, conseillère régionale d’Ile-de-France, Présidente déléguée de la Maison de l’emploi et de la formation (MEF) de Nanterre

Ø Ministère du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville – MM. Grégoire François-Dainville et Damien Doré, conseillers techniques

Ø Déplacement à Bruxelles le 11 janvier 2010 :

Ø Représentation permanente de la France auprès de l'Union européenne – M. Emmanuel Puisais-Jauvin, conseiller « coordination politiques internes, compétitivité, directive services, marchés publics » et M. Etienne Grass, conseiller « travail, emploi, santé, inclusion sociale »

Ø Commission européenne, direction générale « Marché intérieur et services »–  Mme Maria Martin-Prat, chef de l'unité « libre circulation des services et établissement, directive services » et Mmes Géraldine Fages et Cécile Helmryd, administratrices

Ø Mme Evelyne Gebhardt, députée européenne, membre de la Commission du marché intérieur et de la protection des consommateurs, rapporteure sur la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative aux services dans le marché intérieur

Ø Mme Pervenche Berès, députée européenne, présidente de la Commission de l’emploi et des affaires sociales, Mme Françoise Casteix, députée européenne, membre de la Commission des affaires juridiques, candidate à la présidence de l'intergroupe européen sur les services publics et Mme Françoise Vergniaud, membre de la commission du marché intérieur et de la protection des consommateurs

© Assemblée nationale

1 () D’ailleurs, comme le fait remarquer la noté d’étape précitée, si la terminologie est la même est français, les termes sont différents en allemand et en anglais.

2 () Classification centrale des produits

3 () Common procurement vocabulary (vocabulaire commun pour les marchés de l’Union européenne)

4 () Note établie par le service des affaires européennes