Accueil > Documents parlementaires > Les rapports législatifs
Version PDF
Retour vers le dossier législatif
Amendements  sur le projet ou la proposition

N° 2840

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 5 octobre 2010.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGETAIRE SUR LE PROJET DE LOI (n° 2823), de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014,

PAR M. Gilles CARREZ

Rapporteur général,

Député

——

INTRODUCTION 7

PREMIÈRE PARTIE : MAÎTRISER LA DÉPENSE ET RÉTABLIR LES RECETTES, UN PROGRAMME TROP LONGTEMPS REPOUSSÉ 9

I.– LES HYPOTHÈSES MACROÉCONOMIQUES DE LA PROGRAMMATION 9

II.– LA TRAJECTOIRE DES FINANCES PUBLIQUES : RÉDUIRE MASSIVEMENT LE DÉFICIT POUR ÉVITER L’EFFET « BOULE DE NEIGE » 13

A.– FREINER LA PROGRESSION DES DÉPENSES ET REDRESSER LES RECETTES : DEUX CONDITIONS INDISPENSABLES 13

1.– Diviser par trois le rythme de progression des dépenses publiques : un effort historique partagé par tous les acteurs publics 13

2.– Des prélèvements obligatoires plus robustes que prévu 16

B.– PARVENIR À UN DÉFICIT INFÉRIEUR À 3 % DU PIB EN 2013 ET METTRE FIN À LA PROGRESSION DE LA DETTE PUBLIQUE 17

1.– Une réduction du déficit structurel de plus de 1 % de PIB par an 17

2.– Le retour à une dette soutenable ? 19

SECONDE PARTIE : UN EFFORT PARTAGÉ PAR L’ENSEMBLE DES ADMINISTRATIONS PUBLIQUES 22

I.– L’INÉLUCTABLE RIGUEUR SUR LE BUDGET DE L’ÉTAT 22

A.– UN DOUBLE ENCADREMENT DE L’ÉVOLUTION DES DÉPENSES DE L’ÉTAT 22

B.– UNE PROGRAMMATION TRIENNALE AMBITIEUSE FONDÉE SUR DES OBJECTIFS DE RÉDUCTION DE DÉPENSES SANS PRÉCÉDENT 24

1.– Trois priorités gouvernementales : les dépenses d’avenir, l’amélioration des services de la justice et le soutien aux plus fragiles 24

a) Un effort considérable en faveur de la préparation de l’avenir 24

b) L’amélioration des services de la justice 25

c) Le soutien en faveur des plus fragiles 25

2.– Un objectif de réduction des dépenses, hors charge de la dette et hors pensions, supérieur à 12 milliards d’euros entre 2011 et 2013 26

C.– UNE FORTE SURRÉACTION DES RECETTES FISCALES MALGRÉ LE MITAGE DE LEUR ASSIETTE ? 28

D.– UNE CLÉ DE PASSAGE QUI AMÉLIORERAIT LE DÉFICIT PUBLIC DE 0,1 % DE PIB 29

II.– QUEL NIVEAU D’EXCÉDENT STRUCTUREL POUR LA « NÉBULEUSE » DES ODAC ? 31

A.– LA CADES, À L’ORIGINE DE L’EXCÉDENT DES ODAC 32

B.– L’IMPACT RÉCURRENT ET SUBSTANTIEL DES INVESTISSEMENTS D’AVENIR 33

C.– PLUSIEURS ORGANISMES EN DÉFICIT STRUCTUREL 33

III.– LA MAÎTRISE DES DÉPENSES LOCALES : UNE EXIGENCE RENFORCÉE 34

A.– L’ÉTAT N’A PLUS LES MOYENS D’ACCROÎTRE LES CONCOURS AUX COLLECTIVITÉS LOCALES 34

B.– LES ADMINISTRATIONS PUBLIQUES LOCALES SONT EN MESURE DE RÉDUIRE LA PROGRESSION DE LEURS DÉPENSES 35

C.– DES RÉFORMES COMPLÉMENTAIRES S’IMPOSENT 37

IV.– LES ANGLES MORTS DE LA PRÉVISION DU DÉFICIT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE 38

A.– UN EFFORT DE MAÎTRISE DE LA DÉPENSE CONCENTRÉ SUR L’ASSURANCE MALADIE ET LES RETRAITES 39

B.– UNE RÉDUCTION MÉCANIQUE DU DÉFICIT DU FAIT DE L’AMÉLIORATION DE LA CONJONCTURE 41

C.– UNE INFORMATION INCOMPLÈTE 41

DISCUSSION GÉNÉRALE 43

EXAMEN DES ARTICLES 53

Article premier : Objet de la programmation pluriannuelle 53

Article 2 : Approbation du rapport annexé 54

Chapitre Ier

LES OBJECTIFS GÉNÉRAUX DES FINANCES PUBLIQUES

Avant l’article 3 55

Article 3 : Évolution du solde des administrations publiques et de la dette publique 56

Chapitre II

L’ÉVOLUTION DES DÉPENSES PUBLIQUES

Article 4 : Évolution annuelle des dépenses publiques en volume 58

Article 5 : Norme annuelle de progression des dépenses de l’État 65

Article 6 : Programmation triennale des crédits des missions du budget général de l’État 88

Article 7 : Norme annuelle d’évolution des concours de l’État aux collectivités territoriales 96

Article 8 : Norme annuelle d’évolution des dépenses de sécurité sociale 104

Chapitre III

L’ÉVOLUTION DES RECETTES PUBLIQUES

Article 9 : Encadrement des mesures nouvelles afférentes aux prélèvements obligatoires 112

Article additionnel après l’article 9 : Encadrement de l’application des créations ou extensions de dépenses fiscales et de réductions, exonérations ou abattements de cotisations et contributions sociales 128

Article 10 : Affectation des surplus des prélèvements obligatoires à la réduction du déficit public 129

Chapitre IV

LIMITATION DU RECOURS À L’ENDETTEMENT
DE CERTAINS ORGANISMES PUBLICS

Article 11 : Interdiction d’emprunter pour une durée supérieure à douze mois 137

Chapitre V

LA MISE EN ŒUVRE DE LA PROGRAMMATION

Article 12 : Information du Parlement sur les dépenses fiscales et les réductions, exonérations ou abattements de cotisations et contributions sociales 144

Article additionnel après l’article 12 : Actualisation de la programmation 145

Article 13 : Bilan de la mise en œuvre de la programmation 153

Article 14 : Abrogation de la loi de programmation des finances publiques pour les années 2009 à 2012 155

TABLEAU COMPARATIF 157

AMENDEMENTS EXAMINÉS PAR LA COMMISSION 167

INTRODUCTION

Issu de la révision constitutionnelle de 2008, l’avant-dernier alinéa de l’article 34 de la Constitution prévoit que « les orientations pluriannuelles des finances publiques sont définies par des lois de programmation. Elles s’inscrivent dans l’objectif d’équilibre des comptes des administrations publiques ».

Cette nouvelle disposition a trouvé sa première application dans la loi de programmation des finances publiques pour 2009-2012, qui a constitué une avancée importante dans le pilotage des comptes publics. En prévoyant l’évolution des dépenses de l’État sur trois ans, elle a, en effet, offert aux gestionnaires une visibilité et une stabilité de leurs moyens. Elle a également permis au Parlement de se prononcer sur une trajectoire pluriannuelle d’évolution du déficit public, que le Gouvernement réservait jusqu’alors aux institutions européennes.

Toutefois, entre cette première loi de programmation et le présent projet de loi, la France a traversé la crise économique la plus brutale depuis la Libération.

L’impact de cette crise sur les finances publiques est profond et durable et le retour à un niveau d’endettement public brut conforme aux critères de Maastricht, qui hier était un objectif à portée de main, n’est plus aujourd’hui réalisable dans un avenir proche. Alors que la part de la dette publique brute dans la richesse nationale pourrait atteindre plus de 87 % en 2012, la progression des intérêts de la dette contraint l’État à geler ses dépenses. Le risque de voir l’action publique perdre ses marges de manœuvre du fait de l’endettement devient donc réalité.

Cette crise a également rappelé la possibilité de défaut d’un État et ses conséquences potentiellement désastreuses pour le financement de l’économie. Si la France ne risque pas de perdre, à horizon prévisible, la confiance de ses créanciers, elle est néanmoins menacée par un éloignement progressif de l’Allemagne, dont les conséquences politiques et économiques seraient imprévisibles.

Compte tenu de ces éléments, la décennie qui s’ouvre sera, sur le plan budgétaire, très différente de la précédente. Chaque année, un effort supplémentaire, tant en dépenses qu’en recettes, devra être réalisé pour résorber progressivement un déficit structurel qui, depuis 2000, a été creusé par des baisses d’impôts massives – 100 milliards d’euros sur dix ans – non compensées par des économies sur la dépense.

Or, pour relever un défi d’une telle ampleur, les lois de programmation des finances publiques telles qu’elles existent aujourd’hui sont insuffisantes.

En premier lieu, en se concentrant sur l’évolution du déficit public effectif, elles consistent largement en un exercice de prévision macroéconomique. Le niveau du déficit dans quatre ans peut fortement varier en fonction des hypothèses macroéconomiques retenues – prévisions de croissance du PIB mais également évolution de la masse salariale, de l’inflation, de l’élasticité des recettes à la croissance… La trajectoire peine à faire la part entre l’effet de ces hypothèses macroéconomiques et l’évolution des éléments purement budgétaires, qui constituent pourtant les fondements structurels des comptes publics : mesures discrétionnaires en recettes et économies réalisées sur la dépense.

En deuxième lieu, le calendrier d’examen de la loi de programmation est trop tardif car le programme de stabilité, sur lequel se fonde largement le présent projet de loi, a été envoyé dès le mois de janvier dernier à la Commission européenne. Alors que la création d’un « semestre européen » va conduire à remodeler la procédure d’examen des programmes de stabilité par les institutions communautaires, il serait plus logique que le Parlement se prononce sur la programmation proposée par le Gouvernement avant que le Conseil Ecofin ne le fasse, c’est-à-dire au mois de juin.

Enfin, et surtout, les objectifs prévus dans le présent projet de loi ne contraignent pas le législateur financier. Les lois de finances et de financement ultérieures pourront prévoir des mesures dérogeant à une trajectoire dont la valeur est purement indicative.

Après la création des lois de financement de la sécurité sociale en 1996, de la LOLF en 2001 et des lois de programmation des finances publiques en 2008, l’instauration d’une norme contraignante s’imposant au législateur financier apparaît comme la nouvelle frontière à franchir pour relever le défi de la décennie à venir. Il n’existe, en effet, pas d’alternative pour un État qui doit réussir là où il échoue depuis trente ans.

De la même manière que la majorité et l’opposition s’étaient entendues sur la LOLF à la fin de la Xième législature, un accord bipartisan est nécessaire pour mener à bien cette réforme. Une telle entente devrait être trouvée dès lors que l’ensemble des acteurs partage, comme en 2001, le sens de l’État et de l’intérêt général.

PREMIÈRE PARTIE : MAÎTRISER LA DÉPENSE ET RÉTABLIR LES RECETTES, UN PROGRAMME TROP LONGTEMPS REPOUSSÉ

I.– LES HYPOTHÈSES MACROÉCONOMIQUES DE LA PROGRAMMATION

Après le retournement historique subi à partir du deuxième trimestre 2008 à la suite de la crise bancaire et financière, la France, l’Allemagne et le Japon ont renoué avec une croissance positive dès le deuxième trimestre de l’année 2009, tandis que les États-Unis et la zone euro dans son ensemble n’ont affiché des gains du PIB qu’au trimestre suivant. Pour le Royaume-Uni, cela n’a été le cas qu’en toute fin d’année, et sur un rythme très modéré. Les politiques de soutien et de relance mises en place par les gouvernements ont joué un rôle décisif.

En France, le succès du plan de soutien aux banques pour maintenir l’accès au crédit des entreprises en octobre 2008, couplé à la mise en place d’un plan de relance de l’économie française équilibré, a permis de sortir de la crise malgré la contraction du PIB de 2,9 % en 2009. Cette reprise de l’activité s’est ensuite accélérée au deuxième trimestre 2010 avec une croissance de + 0,7 % (après + 0,2 % au premier trimestre). Pour la première fois depuis 2008, l’investissement des entreprises a progressé et la consommation des ménages a de nouveau augmenté (+ 0,3 %). En outre, l’économie française a créé 59 000 emplois salariés marchands au premier semestre 2010, permettant un deuxième trimestre consécutif de baisse du chômage (– 0,2 % soit un taux de chômage de 9,3 % en juillet 2010).

Le Fonds monétaire international jugeait d’ailleurs en juillet 2010 que : « Les autorités ont pris des mesures importantes pour stabiliser le système financier et elles ont mis en œuvre une politique de relance budgétaire adaptée pour atténuer les effets du ralentissement. Maintenant que la reprise est enclenchée, elles ont réorienté leurs efforts de la gestion de la crise à la consolidation des fondements de l’économie en procédant au rééquilibrage des finances publiques, en œuvrant au redressement complet du système financier et en améliorant la réglementation financière. Elles ont aussi engagé des réformes structurelles pour relever la croissance potentielle, créer des emplois et rehausser la compétitivité ».

Le redémarrage du commerce international, tiré par la robustesse non démentie de la croissance des économies émergentes, en particulier en Asie, a également été un facteur de soutien clé. Dans ce contexte, l’absence de tensions inflationnistes dans les économies développées constitue un élément favorable pour les évolutions de marché à venir. En outre, le climat des affaires semble s’améliorer d’ici la fin de l’année 2010 et la dépréciation de l’euro profite à la reprise des exportations.

Aussi le Gouvernement prévoit-il qu’en 2010 et 2011, la croissance française se redresserait progressivement, de respectivement + 1,5 % et + 2,0 % en volume. La croissance, bien que modérée, serait équilibrée : l’emploi et toutes les composantes de l’activité – exportations, investissement, consommation, variations de stocks – seraient bien orientés, et l’inflation demeurerait contenue comme le montre le tableau ci-après.

ÉVOLUTION EN VOLUME DES PRINCIPAUX INDICATEURS ÉCONOMIQUES
EN 2010-2011

 

2010

2011

PIB en France

+ 1,5

+ 2,0

Demande mondiale adressée à la France

+ 11,2

+ 7,7

consommation des ménages

+ 1,4

+ 1,7

Indice des prix à la consommation

1,50 %

1,50 %

Gain de pouvoir d'achat des ménages

+ 1,2

+ 1,6

masse salariale (secteur marchand non agricole)

+ 1,8

+ 2,9

croissance du PIB aux États-Unis

+ 2,6

+ 1,7

Croissance du PIB en zone euro

+ 1,4

+ 1,6

Croissance du Pib en Allemagne

+ 3,2

+ 2,4

Taux de change euro/dollars USD (moyenne annuelle)

1,31

1,30

Prix du brent (moyenne annuelle)

78

80

Source : projet de loi de finances pour 2011, Les grandes orientations des finances publiques

Pour 2012-2014, le Gouvernement considère que les réformes mises en œuvre depuis 2008 (loi de modernisation de l’économie, crédit d’impôt recherche…) devraient porter leurs fruits et permettre un redressement progressif de la croissance potentielle pour retrouver un rythme de 2 % entre 2012 et 2014.

Le rapport annexé au présent projet de loi de programmation envisage donc une hypothèse de croissance annuelle du PIB en volume de 2,5 % par an. Cette hypothèse est donc un peu supérieure à la croissance potentielle, ce qui serait normal en sortie de crise et de nature à réduire progressivement le déficit d’activité. Mais cette hypothèse reste prudente pour tenir compte de l’incertitude pesant sur le niveau d’activité potentiel : ainsi, l’activité ne rejoindrait pas encore son niveau potentiel en 2014.

Ce redressement de la croissance, malgré le freinage de la demande publique, proviendrait d’un dynamisme de l’investissement et de la bonne tenue de la consommation grâce aux créations d’emplois, dans un contexte de croissance mondiale au rythme d’avant crise. La masse salariale privée croîtrait ainsi à 4,5 % par an, un peu en deçà de la valeur ajoutée privée, ce qui permettrait de retrouver à l’horizon 2014 la part des rémunérations dans la valeur ajoutée d’avant crise.

Bien entendu, ces prévisions sont soumises à de nombreux aléas. Le rapport annexé au présent projet de loi de programmation l’exprime d’ailleurs sans ambages en indiquant que « Parmi les facteurs baissiers qui peuvent peser sur le scénario international figure un éventuel retour de tensions financières sur les marchés obligataires ou boursiers ».

Ce qui s’apparente à une forme de « clause de sauvegarde » prend naturellement d’autant plus de sens à l’aune des récents développements de la crise financière et économique mondiale. À cet égard, le Rapporteur général observe que les hypothèses de croissance du Gouvernement sont supérieures à celles retenues par le FMI ou l’OCDE au mois de juillet et septembre 2010. En effet, ces organisations internationales anticipent une reprise plus progressive de l’économie française entre 2011 et 2014, avec un taux de croissance du PIB compris entre 1,6 % et 2,1 %.

Afin de mesurer plus concrètement la sensibilité à l’activité économique des prévisions gouvernementales, le Rapporteur général s’est donc livré à une estimation des évolutions du solde public qu’entraîneraient deux scénarios de croissance alternatifs à celui retenu dans le présent projet – l’un plus favorable, l’autre plus pessimiste. Ces simulations, qui portent sur le seul effet de la croissance, ont été réalisées toutes choses égales par ailleurs, c’est-à-dire à niveaux d’élasticité des recettes et de progression des dépenses identiques à ceux sous-jacents à la programmation pluriannuelle. A également été faite l’hypothèse d’une exécution 2010 conforme aux prévisions révisées associées au projet de loi de finances pour 20 11 (1).

SENSIBILITÉ À LA CROISSANCE DE LA PROGRAMMATION PLURIANNUELLE
DU DÉFICIT PUBLIC

(en % du PIB)

SENSIBILITÉ À LA CROISSANCE DE LA PROGRAMMATION PLURIANNUELLE
DE LA DETTE PUBLIQUE

(en % du PIB)

SENSIBILITÉ À LA CROISSANCE DE LA PROGRAMMATION PLURIANNUELLE
DES FINANCES PUBLIQUES

 

2010

2011

2012

2013

2014

projet de loi de programmation*

         

PIB en volume

1,50 %

2,00 %

2,5 %

2,5 %

2,5 %

Solde public

– 7,3 %

– 6,0 %

– 4,8 %

– 3,5 %

– 2,5 %

Dette

82,9 %

86,5 %

87,8 %

87,7 %

86,7 %

Scénario optimiste

         

PIB en volume

1,8 %

3,00 %

3,00 %

3,00 %

3,00 %

Solde public

– 7,3 %

– 5,5 %

– 3,9 %

– 2,5 %

– 1,2 %

Dette

82,9 %

84,8 %

84,9 %

83,5 %

81,0 %

Scénario pessimiste

         

PIB en volume

1,5 %

1,5 %

1,6 %

1,7 %

1,7 %

Solde public

– 7,3 %

– 6,1 %

– 5,3 %

– 4,6 %

– 3,9 %

Dette

82,9 %

86,8 %

89,3 %

90,9 %

91,8 %

*Calculs du Rapporteur général à partir des hypothèses du projet de loi de programmation des finances publiques appliquées aux données définitives 2009, INSEE.

Il en ressort que même dans l’hypothèse, certes optimiste, d’une croissance plus forte que celle envisagée par le Gouvernement (+ 1,8 % en 2010, + 3 % à partir de 2011), l’équilibre des comptes publics ne serait toujours pas atteint en 2014 et la dette publique ne commencerait à diminuer qu’à partir de 2013.

À l’inverse, l’hypothèse d’une croissance molle entre 2010 et 2014 (+ 1,6 % en moyenne) ne permettrait pas le retour du déficit sous la barre des 3 % du PIB, même en 2014, et conduirait vers endettement public toujours croissant.

Par construction, ces projections sont très simplificatrices : elles présupposent que les recettes ne surréagissent pas aux fluctuations haussières ou baissières de la croissance, que les dépenses publiques conservent un profil d’évolution totalement déconnecté de celui du PIB en volume et que le niveau de la dette publique n’est affecté que par le déficit (soit une hypothèse de neutralité des flux de créances générés par les cessions et acquisitions d’actifs). Elles aboutissent cependant à deux conclusions :

– d’une part, la programmation pluriannuelle présentée dans le présent projet de loi est extrêmement sensible à la croissance ;

– d’autre part, la réduction du déficit et l’infléchissement de la dette publique à la baisse devront principalement reposer sur d’autres facteurs, en particulier sur le respect scrupuleux de l’objectif d’évolution des dépenses publiques fixé à + 0,8 % en moyenne annuelle sur la période 2011-2014 et sur la nécessité d’approfondir la réduction des niches fiscales et sociales au-delà de 2012.

II.– LA TRAJECTOIRE DES FINANCES PUBLIQUES : RÉDUIRE MASSIVEMENT LE DÉFICIT POUR ÉVITER L’EFFET « BOULE DE NEIGE »

A.– FREINER LA PROGRESSION DES DÉPENSES ET REDRESSER LES RECETTES : DEUX CONDITIONS INDISPENSABLES

1.– Diviser par trois le rythme de progression des dépenses publiques : un effort historique partagé par tous les acteurs publics

Conformément aux recommandations du rapport de MM. Paul Champsaur et Jean-Philippe Cotis sur la situation des finances publiques et aux conclusions de la deuxième conférence des déficits en mai 2010, le Gouvernement a fait le choix d’une réduction durable du déficit public fondée sur la maîtrise des dépenses publiques.

Ce choix se traduit notamment par la fixation d’un objectif d’évolution des dépenses publiques à l’article 4 du présent projet de loi de programmation très ambitieux (2) : la progression des dépenses de l’ensemble des administrations publiques (APU) devra être cantonnée à + 0,8 % en moyenne annuelle entre 2011 et 2014, alors que la progression tendancielle de ces dépenses s’établit à + 2,3 % en moyenne entre 2000 et 2008.

Diviser par trois le rythme de progression des dépenses publiques est donc un objectif inédit dans l’histoire des finances publiques depuis plus de trente ans, d’autant plus difficile à atteindre qu’aucun sous secteurs des APU n’a jamais réussi à limiter l’évolution, en volume, de ses dépenses à moins de 0,9 % par an en moyenne.

CROISSANCE ANNUELLE MOYENNE EN VOLUME DES DÉPENSES DES ADMINISTRATIONS PUBLIQUES (NETTES DE TRANSFERTS FINANCIERS ENTRE SOUS SECTEURS)

(en %)

 

1978-1988

1988-1998

1998-2008

1978-2008

APUC

2,9

2

0,9

1,9

APUL

3,9

2,6

4,2

3,6

ASSO

3,1

2,8

2,5

2,8

Toutes APU

3,2

2,5

2,2

2

Source : INSEE, voir également le rapport de MM Champsaur et Cotis, avril 2010, page 18

Comme le détaille le Rapporteur général dans le commentaire sous l’article 4, le respect scrupuleux de l’objectif d’évolution des dépenses publiques supposerait de réaliser près de 16,7 milliards d’euros d’économies par an en moyenne par rapport à la tendance 2000-2008, soit plus de 66 milliards d’euros sur la période de programmation 2011-2014.

Le rapport de MM. Champsaur et Cotis précité avait évalué l’effort à fournir pour atteindre cet objectif d’évolution des dépenses publiques, à 14 milliards d’euros d’économies par an par rapport à l’année 2009 dans l’hypothèse intermédiaire où la croissance serait de 2 % en moyenne à partir de 2011. À titre de comparaison permettant d’illustrer l’ampleur des efforts à accomplir, il soulignait notamment que, sur les dix dernières années, l’effort moyen de réduction de la dépense publique n’a pas dépassé deux milliards d’euros par an, tous sous-secteurs confondus.

Le respect de l’objectif d’évolution des dépenses publiques limitée 0,8 % en moyenne annuelle peut être appréhendé en mesurant l’effort respectif de réduction de la progression des dépenses des différentes branches des administrations publiques par rapport à leur progression historique entre 2002 et 2008 ce qui impose de réaliser une économie de :

– 3,3 milliards d’euros par an pour l’État et ses opérateurs (3);

– 8 milliards d’euros par an pour les administrations publiques locales ;

– 5,3 milliards d’euros par an pour les administrations de sécurité sociale.

Le Rapporteur général s’est par ailleurs livré à une estimation des évolutions du solde public et de la dette publique qu’entraînerait un scénario d’évolution des dépenses publiques non conforme à l’objectif visé par l’article 2 du présent projet de loi.

Cette simulation, qui porte sur le seul effet d’une progression des dépenses publiques de + 1,6 % en volume en moyenne entre 2011 et 2014 (4), a été réalisée toutes choses égales par ailleurs, c’est-à-dire à niveaux de croissance du PIB et d’élasticité des recettes identiques à ceux sous-jacents à la programmation pluriannuelle (5). A également été faite l’hypothèse d’une exécution 2010 conforme aux prévisions révisées associées au projet de loi de finances pour 2011.

SENSIBILITÉ À L’ÉVOLUTION DES DÉPENSES PUBLIQUES DE LA PROGRAMMATION PLURIANNUELLE DU DÉFICIT PUBLIC

SENSIBILITÉ À L’ÉVOLUTION DES DÉPENSES PUBLIQUES DE LA PROGRAMMATION PLURIANNUELLE DE LA DETTE PUBLIQUE

Avec les mêmes réserves que celles émises précédemment s’agissant du caractère simplificateur de ce type d’estimation, le Rapporteur général souhaite mettre en évidence l’importance des efforts à réaliser pour atteindre l’objectif fixé par l’article 2 du présent projet de loi. Même si la progression des dépenses publiques était réduite d’un tiers par rapport à la tendance historique 2000-2008, le Gouvernement ne pourrait être en mesure de respecter ses engagements européens : toutes choses égales par ailleurs, le déficit public atteindrait – 4,8 % en 2013 et la dette publique continuerait de progresser dépassant la barre des 90 %.

En tout état de cause, le strict respect de l’objectif d’évolution des dépenses des APU entre 2011 et 2014 nécessite, à tout le moins, de maintenir les prélèvements obligatoires à leur niveau actuel en s’abstenant impérativement de toute mesure nouvelle mesure de baisse.

2.– Des prélèvements obligatoires plus robustes que prévu

La trajectoire de prélèvements obligatoires associée à la programmation se distingue de celle prévue en programme de stabilité. Le tableau suivant offre une comparaison entre les deux trajectoires.

ESTIMATION DE L’ÉVOLUTION DU TAUX DE PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES

(en % de PIB)

 

2009

2010

2011

2012

2013

2014

Projet de loi

41,6

41,9

42,9

43,2

43,7

43,9

Programme de stabilité

41,0

41,0

42,0

42,6

43

 

Écart

0,6

0,9

0,9

0,6

0,7

 

Source : ministère du Budget, des comptes publics et de la réforme de l’État.

Deux éléments déterminent l’évolution de la trajectoire de prélèvements obligatoires.

D’une part, l’estimation de leur élasticité à la croissance semble avoir été modifiée entre le présent projet de loi et le programme de stabilité. Celui-ci prévoyait, après un effondrement du taux de prélèvements obligatoires à 41 % en 2009 et 2010, une élasticité élevée, à 1,2, de 2011 à 2013. Il s’avère que la chute des recettes a été moins prononcée que prévu. Le taux de prélèvements obligatoires s’établit en effet à 41,6 % en 2009 et atteindrait 41,9 % en 2010. La surréaction des recettes à la récession ayant été moins forte, il est logique que leur surréaction à la reprise économique le soit également. L’élasticité des prélèvements obligatoires est ainsi estimée à 1,1 en 2012 et 2013 puis à 1 en 2004.

D’autre part, l’écart entre les deux trajectoires de prélèvements obligatoires provient de la différence dans le montant des mesures nouvelles. Annoncées à 2 milliards d’euros par an dans le programme de stabilité, elles sont évaluées, à l’article 9 du présent projet de loi, à 10 milliards d’euros en 2011 puis à 3 milliards d’euros les années suivantes (6). L’écart en 2011 atteint donc 8 milliards d’euros en 2011, soit 0,4 % de PIB, et l’écart cumulé de 2011 à 2013 10 milliards d’euros, soit 0,5 % de PIB.

À cet égard, il convient de remarquer que la hausse de 1 % du taux de prélèvements obligatoires en 2011 est due pour 0,5 % de PIB – 10,5 milliards d’euros – à la disparition de mesures temporaires ayant affecté l’année 2010 et pour 0,5 % de PIB – 10,6 milliards d’euros – aux mesures nouvelles prévues dans les projets de loi de finances et de financement pour 2011. Sur cette base, il semble que l’élasticité des prélèvements obligatoires à la croissance soit estimée à 1 en 2011.

Au final, l’évolution anticipée du taux de prélèvements obligatoires ne pâtit plus de l’incertitude sur le niveau de la surréaction des recettes à la croissance, qui caractérisait la prévision faite en programme de stabilité. Par ailleurs, l’impact des mesures nouvelles en 2011 a probablement été revu à la hausse pour garantir le respect de l’objectif de déficit, compte tenu de la rigidité de la dépense à court terme.

B.– PARVENIR À UN DÉFICIT INFÉRIEUR À 3 % DU PIB EN 2013 ET METTRE FIN À LA PROGRESSION DE LA DETTE PUBLIQUE

1.– Une réduction du déficit structurel de plus de 1 % de PIB par an

La trajectoire de retour à l’équilibre est calquée sur celle indiquée dans le programme de stabilité (7) transmis en janvier dernier à la Commission européenne. La répartition entre sous-secteurs est légèrement différente pour prendre en compte le relèvement de la prévision de solde des ASSO en 2011 (de - 1,7 % à –1,5 %), en raison de recettes meilleures que prévu en 2010, et la légère dégradation – de 0,1 % de PIB – de celle de l’État et des APUL.

PRÉVISION DE DÉFICIT PUBLIC

(en % de PIB)

 

2010

2011

2012

2013

2014

APU

7,7

6

4,6

3

2

APUC

5,6

4

3,1

2,1

1,5

APUL

0,4

0,5

0,3

0,2

0

ASSO

1,7

1,5

1,2

0

0,5

Source : rapport annexé au présent projet de loi.

 Cette trajectoire requiert un effort annuel de réduction du déficit structurel supérieur à 1 % de PIB, soit 20 milliards d’euros.

Le Rapporteur général estime que le suivi de la programmation doit se faire au regard de l’évolution du déficit structurel, et plus particulièrement de l’effort annuel de réduction du déficit structurel, mesuré par la somme des économies en dépenses et des mesures nouvelles en recettes.

Une telle approche permet en effet de neutraliser les effets de la conjoncture sur le déficit et d’appréhender les éléments fondamentaux des comptes publics. Elle est d’autant plus nécessaire que, dans l’hypothèse où le resserrement de la politique budgétaire avait un impact négatif sur la croissance, la trajectoire ne serait probablement pas tenue du fait même des décisions qui garantiraient l’assainissement des finances publiques.

 Comme indiqué plus haut, le moyen privilégié pour tenir cette trajectoire réside avant tout dans un net ralentissement de la croissance de la dépense publique.

Toutefois, compte tenu de la rigidité de la dépense à court terme, il est normal et vertueux que, en début de période, les prélèvements obligatoires soient davantage sollicités pour atteindre l’objectif de déficit public. Dans un second temps, au moment où les effets des réformes structurelles se font sentir, la dynamique de la dépense s’enraye et peut éventuellement permettre de relâcher l’effort sur les prélèvements obligatoires.

C’est pourquoi l’effort en 2011 est majoritairement concentré sur les recettes dont les mesures discrétionnaires augmenteraient le rendement de 10,7 milliards d’euros. Les économies sur la dépense s’établiraient à environ 7 milliards d’euros.

Au final, si, en 2011, l’effort en recettes est supérieur à celui réalisé en dépense, un tel constat n’infirme pas la validité de la programmation présentée par le Gouvernement. Les économies sur la dépense ont, en effet, tendance à se matérialiser à moyen terme et pourraient, à partir de 2012, prendre le relais des mesures relatives aux prélèvements obligatoires.

Le Rapporteur général rappelle que l’objectif de 6 % de déficit public en 2011 est intangible et salue l’action pragmatique du Gouvernement tendant à mobiliser l’ensemble des moyens, y compris en recettes, requis pour atteindre cette cible.

 Il convient enfin de noter que la trajectoire de déficit est, comme celle prévue dans la précédente loi de programmation, fragilisée par les lacunes de l’information transmise par le Gouvernement. En effet, sur plusieurs points – niveau de la clé de passage, déficit des organismes divers d’administration centrale, déficit des organismes de sécurité sociale hors régime général… –, les évaluations du Gouvernement ne sont pas suffisamment explicitées.

2.– Le retour à une dette soutenable ?

1 591,5 milliards d’euros : c'est le montant de la dette publique de la France annoncé par l’INSEE le 30 septembre 2010, soit 82,9 % du PIB (ou encore 24 867 euros par Français).

Il est vrai que le ratio de dette publique a fortement progressé avec la crise, sous l’effet conjugué de déficits élevés et d’une faible croissance nominale de l’économie 2009 de sorte que le Gouvernement avait anticipé, dans le cadre du projet de loi de finances pour 2010, une progression considérable de la dette publique à hauteur de 84 % du PIB. Cependant, à l’occasion de la première loi de finances rectificative pour 2009, le Gouvernement a revu sa prévision de dette publique pour 2010 à 83,2 % du PIB (soit près de 1 650 milliards d’euros).

Dans le cadre de la présentation du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2011-2014, la prévision du Gouvernement est à nouveau révisée à la baisse pour atteindre 82,9 % en 2010 conformément aux prévisions de l’INSEE précitées. Cette révision à la baisse peut s’expliquer de deux façons. D’une part, la croissance attendue en 2010 s’avère aujourd’hui légèrement supérieure aux prévisions de janvier dernier (+ 1,5 % au lieu de + 1,4 %). D’autre part, la révision à la baisse du déficit public en 2009 et en 2010 (respectivement 7,5 % et 7,7 % du PIB au lieu de 7,9 % et 8,2 %) se répercute sur l’évolution de la dette publique.

S’agissant des perspectives pour les années 2011-2014, le Gouvernement anticipe toutefois une progression de la dette publique au sens de Maastricht pour atteindre 87,4 % du PIB en 2012, sous l’hypothèse conventionnelle de flux de créances nuls à partir de 2012. 2013 constituerait le point de départ d’un retour vers une certaine maîtrise de la dette puisque celle-ci commencerait à diminuer grâce au retour du solde public au-dessus du solde stabilisant (8).

(en % du PIB)

 

2009

2010

2011

2012

2013

2014

Ratio d'endettement au sens de Maastricht (1)

78,1

82,9

86,2

87,4

86,8

85,3

Croissance nominale du PIB, en % (2)

– 2,1

2,2

3,7

4,2

4,3

4,3

Solde stabilisant le ratio d’endettement
(hors flux de créances) (3)≈-(1)×(2)

1,5

– 1,6

– 3,0

– 3,5

– 3,6

– 3,5

Solde public effectif (4)

– 7,5

– 7,7

– 6,0

– 4,6

– 3,0

– 2,0

Écart au solde stabilisant (A) = (3)-(4)

9,0

6,1

3,0

1,1

– 0,6

– 1,5

Flux de créances (B)

1,6

– 1,2

0,3

0,0

0,0

0,0

Variation du ratio d'endettement (C) = (A)+(B)

10,6

4,8

3,3

1,1

– 0,5

– 1,5

L’explication concrète de la progression de la dette publique malgré une réduction massive du déficit en 2011 et 2012 peut être appréhendée ainsi : la dette publique française devrait atteindre 82,9 % du PIB, soit environ 1 591 milliards d'euros en 2010. Le PIB peut donc être estimé à 1 920 milliards d’euros. En 2011, le Gouvernement prévoit un taux de croissance de 2 % et une inflation à 1,5 %. Le PIB nominal augmenterait donc 3,5 %, pour atteindre 1 987 milliards d'euros. Pour que la dette reste stable à environ 83 % du PIB, il faudrait donc qu'elle ne dépasse pas 1 649 milliards. En d'autres termes, cela suppose que la dette augmente de moins de 58 milliards, ce qui représente un déficit de 3 % du PIB environ. Or le déficit public sera encore de 6 % l'an prochain. C'est pourquoi la France va devoir continuer de s'endetter l'an prochain pour financer son déficit et les échéances de sa dette qui arrivent à terme. L'Agence France Trésor, qui gère la dette de l'État, a d'ailleurs annoncé que la France prévoit de lever 186 milliards d'euros d'obligations en 2011.

Le Rapporteur général en conclut que le caractère soutenable de la dette publique française dépend directement de notre capacité à réduire le déficit, et en particulier le déficit structurel.

Comme le montrent les projections précédentes, la sensibilité de la dette à l’évolution de la dépense publique comme aux prévisions de croissance est très forte. Le strict respect des objectifs de modération des dépenses figurant dans le projet de loi de programmation constitue donc une condition sine qua non de notre crédibilité budgétaire.

À défaut, les risques d’un emballement de la dette pour l’économie française seraient majeurs :

– d’une part, la charge des intérêts de la dette asphyxie les marges de manœuvre budgétaires de l'État. C'est d'ailleurs ce qui est en passe de se produire : ainsi les crédits de la mission Engagements financiers de l’État essentiellement destinés au financement des intérêts de la dette atteindront un niveau historique en 2013 (56,7 milliards d’euros en 2013) et constituent d’ores et déjà le second poste de dépenses du budget général derrière les crédits de la mission Enseignement scolaire ;

– d’autre part, la capacité de l'État à rembourser sa dette sera jugée de moins en moins crédible par les agences de notation, ce qui pourrait conduire à une dégradation de la note de la France (la dette française ayant toujours conservé la meilleure des distinctions à ce jour, le fameux AAA) ;

– enfin, face à l’impuissance de la France à redresser son niveau d’endettement, les opérateurs de marché pourraient aisément faire grimper les taux d'intérêts auxquels elle emprunte, alourdissant encore la charge de sa dette. Il faut d’ailleurs rappeler qu’un point de hausse des taux d'intérêt équivaut à alourdir de 10 milliards d'euros la charge de la dette. L’ensemble des administrations publiques doit donc contribuer au redressement du déficit et de la dette afin d’éviter ce risque d’effet boule de neige.

SECONDE PARTIE : UN EFFORT PARTAGÉ PAR L’ENSEMBLE DES ADMINISTRATIONS PUBLIQUES

I.– L’INÉLUCTABLE RIGUEUR SUR LE BUDGET DE L’ÉTAT

Le déficit de l’État connaîtrait une réduction substantielle, de 92 milliards d’euros en 2011 à 44,4 milliards d’euros en 2014, en raison de la forte surréaction des recettes fiscales, notamment de l’impôt sur les sociétés, couplée au gel des dépenses hors pensions et charge de la dette. Le tableau suivant illustre cette évolution.

PRÉVISION DE DÉFICIT DE L’ÉTAT

(en milliards d’euros)

 

2011

2012

2013

2014

Solde en comptabilité budgétaire

– 92

– 72,9

– 54,6

– 44,4

Clé de passage

5,6

2,2

2,3

2,2

Solde en comptabilité nationale

– 86,4

– 70,7

– 52,3

– 42,3

Source : rapport annexé au présent projet de loi.

Tirant les conséquences de l’objectif de moindre progression des dépenses publiques fixé à l’article 4 du présent projet de loi de programmation, l’article 5 instaure une nouvelle norme de stabilisation en valeur des dépenses de l’État « hors charge de la dette et pensions » qui doit s’inscrire dans le cadre de la norme de dépense en volume en vigueur depuis 2008. Compte tenu des hypothèses d’inflation, de charges de la dette et d’évolution des pensions retenues par le projet de loi de programmation pour les années 2011-2014, cette nouvelle norme impose, en pratique, de réduire le train de vie de l’État et de ses opérateurs. Il s’ensuit une présentation de la programmation triennale des dépenses de l’État par mission à l’article 6, elle-même fondée sur des objectifs d’économies sur les dépenses sans précédent (9).

A.– UN DOUBLE ENCADREMENT DE L’ÉVOLUTION DES DÉPENSES DE L’ÉTAT

Le Gouvernement s’est engagé auprès de ses partenaires européens, dans le cadre du programme de stabilité de la France 2010-2013, à limiter la progression en valeur des dépenses de l’État au niveau de l’inflation (norme « zéro volume »), au titre de la contribution des administrations publiques centrale à l’effort de redressement des finances publiques dans la perspective d’un retour du déficit public à 3 % du PIB. Sont prises en compte les dépenses de l’État ainsi que les prélèvements sur recettes et les nouvelles affectations de ressources à des opérateurs de l’État dont le montant s’élève en loi de finances initiale pour 2010 à 352,6 milliards d’euros.

Le présent projet de loi de programmation engage le Gouvernement au-delà de cet objectif de stabilisation en volume des dépenses de l’État puisqu’il instaure une autre règle, complémentaire, aux termes de laquelle, hors charge de la dette et hors contributions aux pensions des fonctionnaires de l’État, ces crédit et prélèvement sur recettes sont stabilisés en valeur à périmètre constant à hauteur de 274,8 milliards d’euros sur la période 2011-2013 (norme « zéro valeur ») (10)

Le pilotage des dépenses de l’État s’avère donc renforcé par rapport à la première loi de programmation. Ainsi, l’introduction d’une norme « zéro valeur hors charge de la dette et pensions » devrait contribuer, de façon plus systématique, à l’apurement du déficit de l’État.

En effet, si dans le cadre de la première loi de programmation des finances publiques (11), l’application de la règle « zéro volume » a bien eu pour effet d’éviter un accroissement des dépenses de l’État au-delà de la marge de manœuvre offerte par l’inflation, elle n’a pas permis de réduire le déficit grâce à la moindre progression des charges de la dette et des pensions. Au contraire, en 2009, le Gouvernement a pu compenser le dérapage des crédits de certaines missions du budget général grâce à des économies conjoncturelles sur la charge de la dette (en raison d’une réalisation d’inflation plus faible que la prévision) et sur la charge des pensions des fonctionnaires de l’État (en raison de départs à la retraite moins nombreux qu’escomptés).

Si une telle configuration se reproduisait à l’avenir, il ne serait plus possible de recycler au profit de dépenses ordinaires soumises à la norme du « zéro valeur » une moindre progression de la charge de la dette ou des pensions par rapport aux estimations prévues. L’introduction de cette nouvelle norme garantit donc que les économies ainsi dégagées serviront à la réduction du déficit et viendront participer à l’effort de consolidation structurelle de nos finances publiques.

Plus encore, le Rapporteur général constate que, selon les termes du rapport annexé, « si les variations de prévisions d’inflation, dette et pensions ne permettaient plus de respecter le plafond global « 0 volume », et alors même que les crédits sur le périmètre « hors dette et pensions » respecteraient la règle du « 0 valeur », les plafonds des crédits des missions seraient révisés à la baisse de manière à respecter la norme « 0 volume » ». Il faut donc en conclure que l’évolution des crédits du budget général et des prélèvements sur recettes sera, dans le meilleur des cas, nulle, stabilisant ces dépenses en valeur à hauteur de 274,8 milliards d’euros à périmètre constant, voire négative.

Le nouvel encadrement de l’évolution des dépenses de l’État instaure donc un mécanisme d’ajustement au sein du périmètre de la norme élargie : dès lors que l’article 7 du présent projet de loi consacre la stabilisation en valeur des dépenses des administrations publiques locales et que le Gouvernement n’a pas la maîtrise de l’évolution du prélèvement sur recettes en faveur de l’Union européenne, les crédits des missions du budget général serviront de variables d’ajustement dans l’hypothèse où le poids de la charge de la dette et des pensions des fonctionnaires ne serait pas compensé par la marge offerte par l’évolution prévisionnelle des prix (norme « zéro volume »).

L’application de la norme la plus contraignante constitue donc un effort historique en faveur du redressement des comptes de l’État. Le simple fait de stabiliser en valeur les dépenses de l’État, hors charge de la dette et pensions permet de réaliser près de 2,9 milliards d’euros d’économie par an par rapport à l’évolution de ces dépenses sur la période 2006-2009.

Plus encore, le choix d’appliquer la norme « zéro valeur » en 2011, plus contraignante que la règle « zéro volume », permet de réduire l’ensemble des dépenses de l’État en euros constants de 0,2 % (ce qui représente une économie de 765 millions d’euros), l’effort portant exclusivement sur la réduction des dépenses hors charge de la dette et pensions (– 1,5 % en volume) (12).

B.– UNE PROGRAMMATION TRIENNALE AMBITIEUSE FONDÉE SUR DES OBJECTIFS DE RÉDUCTION DE DÉPENSES SANS PRÉCÉDENT

L’article 6 du projet de loi de finances met en évidence le fait que plus d’une mission sur deux de l’État voient leur enveloppe globale gelée ou diminuée au cours de la période de programmation. Toutefois, l’État maintient ses trois grandes priorités à travers la promotion de la recherche, l’amélioration des services de la justice et le soutien aux plus fragiles. Pour les financer, l’ensemble des autres ministères et des opérateurs sont censés être mis à contribution afin de dégager des économies sur les dépenses de personnel et les dépenses de fonctionnement et d’intervention.

1.– Trois priorités gouvernementales : les dépenses d’avenir, l’amélioration des services de la justice et le soutien aux plus fragiles

a) Un effort considérable en faveur de la préparation de l’avenir

La priorité donnée aux investissements d’avenir connaîtra une nouvelle étape en 2011, avec la sélection concrète des projets financés par l’enveloppe de 35 milliards d’euros ouverte en loi de finances rectificative du 9 mars 2010 (13), qui doit permettre de mobiliser 60 à 65 milliards d’euros au total, grâce à la participation des entreprises privées et dans une moindre mesure des cofinancements d’autres personnes publiques (fonds européens, collectivités territoriales).

L’année 2010 a en effet été marquée par la constitution des nouvelles instances de pilotage, la signature de l’ensemble des conventions de gestion des investissements entre l’État et ses opérateurs et le lancement des premières procédures de sélection des projets d’investissement. Alors que la totalité des 35 milliards d’euros sera, d’ici la fin de l’année 2010, versée aux opérateurs chargés de piloter les investissements d’avenir, la phase effective de sélection des projets s’accentuera en 2011, selon un processus inspiré des meilleurs standards internationaux et une procédure transparente d’appels à projets. L’objectif du Gouvernement est de retenir, dans chacun des domaines prioritaires retenus, ceux qui sont les plus à même d’accroître la compétitivité de notre pays.

Dans le cadre du projet de loi de finances pour 2011, la principale priorité du Gouvernement reste, avec 23,7 milliards d’euros (hors pensions), le financement de la recherche et de l’enseignement supérieur, qui bénéficie en outre prioritairement du programme d’investissements d’avenir. Le ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche ainsi que les opérateurs qui lui sont rattachés sont par ailleurs exonérés de suppressions d’emplois. Les moyens supplémentaires accordés à cette mission en 2011 serviront notamment à accompagner le passage au régime des responsabilités et compétences élargies des universités et à financer d’importants travaux immobiliers.

b) L’amélioration des services de la justice

Entre 2011 et 2013, la mission Justice continue de bénéficier d’une augmentation de ses crédits conséquente. Pour la seule année 2011, ses crédits progressent de 4,5 % (+ 149 millions d’euros) afin de poursuivre la restructuration du parc immobilier pénitentiaire et l’ouverture de nouveaux établissements, d’améliorer l’immobilier des juridictions et de financer la réforme de la médecine légale. Il s’agit également du seul ministère qui connaîtra des créations d’emplois nettes (400 emplois) en 2011 pour augmenter le nombre de greffiers par magistrat afin d’améliorer l’efficacité de la justice et la rapidité des décisions de justice.

c) Le soutien en faveur des plus fragiles

Si les mesures de relance pour soutenir l’emploi et venir au secours des plus fragiles ne peuvent être prolongées, il n’en demeure pas moins que l’ambition du Gouvernement de maîtriser durablement les dépenses s’accompagne du souci de préserver les personnes les plus en difficulté.

Le projet de loi de programmation s’inscrit pleinement dans cette perspective. Ainsi, la montée en puissance du RSA va se poursuivre en 2011, puisque les effectifs devraient augmenter de 50 % en 2011 (soit plus de 930 000 bénéficiaires du RSA « activité », contre 630 000 en 2010). En outre, le gain du RSA « activité » pour les travailleurs modestes reste nettement plus important (de l’ordre de 160 à 170 euros par mois en moyenne) que les estimations qui avaient été faites lors de la mise en place du dispositif (110 euros en moyenne par mois). Par ailleurs, le projet de loi de finances pour 2011 étendra le dispositif aux départements d’Outre-mer, alors qu’il a déjà été ouvert aux jeunes de moins de 25 ans à compter de 2010. Le RSA confirme ainsi sa vocation à être un véritable « bouclier social », en favorisant l’activité et en luttant contre la pauvreté.

En matière de services à la personne, si le Gouvernement a privilégié la suppression des niches sociales (exonération de 15 points pour les particuliers employeurs et exonérations spécifiques sur les organismes prestataires), il maintient en contrepartie l’avantage fiscal de 50 % sur l’impôt sur le revenu, qui bénéficie à tous les ménages qui recourent aux services à la personne.

Par ailleurs, la totalité des aides fiscales et sociales bénéficiant aux publics les plus en difficulté (personnes âgées, dépendantes, parents d’enfants handicapés…) a finalement été préservée. Les engagements du Président de la République en faveur des personnes handicapées seront tenus. L’allocation aux adultes handicapées (AAH) sera ainsi bien revalorisée de 25 % entre 2008 et 2012 ; le budget pour 2011 prévoit les moyens nécessaires à une revalorisation conforme à cet engagement. Enfin, les étudiants et notamment les plus modestes d’entre eux verront leur situation améliorée. Ainsi, les étudiants modestes, bénéficiaires des bourses sur critères sociaux de l’enseignement supérieur bénéficieront d’un dixième mois de bourse, mis en place en deux étapes, la première intervenant à la rentrée universitaire 2010-2011, la seconde à la rentrée 2011-2012.

2.– Un objectif de réduction des dépenses, hors charge de la dette et hors pensions, supérieur à 12 milliards d’euros entre 2011 et 2013

Poursuivant la démarche de rationalisation des services de l’État lancée par la première vague de la révision générale des politiques publiques en 2008, le Conseil de modernisation des politiques publiques présidé par le Président de la République, a adopté, à la suite de la seconde conférence des déficits, une série de près de 150 nouvelles mesures pour la période 2011-2013, qui ont été présentées en Conseil des ministres le 30 juin 2010.

Le présent projet de loi de programmation en tire les conséquences puisque le Gouvernement s’engage, sur la période 2011-2013, à réaliser des économies pérennes et substantielles sur les dépenses de l’État et de ses opérateurs fondées sur trois piliers (14).

 Premier pilier : la stabilisation des dépenses de personnel à travers :

– la poursuite du non remplacement d’un fonctionnaire sur deux au sein des ministères : cette mesure, qui concerne près de 100 000 équivalents temps pleins au sein des ministères, devrait produire une économie nette de 1,5 milliard d’euros (compte tenu de l’engagement de reverser la moitié de l’économie brute - 3 milliards d’euros – aux agents) ;

En principe, les 583 opérateurs de l’État en 2011 seront associés à cet effort, qui devrait conduire dès l’année 2011 à réduire de plus de 2 600 équivalents temps pleins les emplois des opérateurs (soit une réduction de 1,8 % des effectifs), hors opérateurs rattachés au ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche, qui sont exonérés de l’application de cette règle sur la période de programmation.

– un meilleur pilotage de la masse salariale qui devrait produire une économie de 400 millions d’euros d’ici 2013.

 Deuxième pilier : la réduction des dépenses de fonctionnement et d’intervention de 10 % d’ici 2013 par :

– la réduction de 10 % des dépenses de fonctionnement de l’État – dont l’assiette et les modalités de mise en œuvre sont présentées de manière pour le moins lapidaire dans le rapport annexé –, devrait permettre de réaliser 1,1 milliard d’euros d’économies d’ici 2013.

À cet égard, le Rapporteur général ne peut que réitérer son interrogation sur la décision de ne pas inclure dans l’assiette des dépenses de fonctionnement de l’État, les subventions aux opérateurs qui représentent 57 % des crédits du titre 3 Dépenses de fonctionnement. Il s’étonne d’ailleurs qu’aucun élément ne lui ait été transmis pour lui permettre d’évaluer les efforts des opérateurs pour réduire de 10 % leurs dépenses de fonctionnement et d’intervention en trois ans.

– la réduction de 10 % des dépenses d’intervention, dont le champ reste assez flou, faute d’informations détaillées de la part du Gouvernement. Un tel objectif supposerait, selon les calculs du Rapporteur général, de réaliser plus de 8,5 milliards d’économies. En effet, la simple stabilisation des dépenses de guichet imposerait à elle seule de réaliser 5,7 milliards d’économies sur trois ans pour contrecarrer l’évolution naturelle de ces dépenses ; de plus, l’objectif de réduction de 13 % des dépenses discrétionnaires d’ici 2013 affiché par le rapport annexé nécessiterait de réaliser 2,8 milliards d’économies par rapport à l’assiette de ces dépenses en loi de finances pour 2010.

 Troisième pilier : le gel en valeur des concours de l’État aux collectivités territoriales :

Cette mesure devrait produire entre 2011 et 2014 une moindre dépense de l’État d’environ 300 millions d’euros par an. En effet, cette hypothèse basse représente le coût de la progression des concours de l’État aux collectivités territoriales hors FCTVA entre 2009 et 2010. Il s’ensuit qu’entre 2011 et 2014 le gel en valeur des concours de l’État aux collectivités territoriales représente une moindre dépense de 1,2 milliard d’euros.

Si le rapport annexé prévoit de réaliser au total entre 2011 et 2013, à partir des trois piliers qui viennent d’être décrits, de plus de 12 milliards d’économies sur les dépenses de l’État, hors charges de la dette et pensions, il ne précise pas le détail de ces économies.

C.– UNE FORTE SURRÉACTION DES RECETTES FISCALES MALGRÉ LE MITAGE DE LEUR ASSIETTE ?

La prévision de recettes fiscales nettes de l’État est fondée sur une hypothèse de croissance spontanée annuelle comprise entre 15 et 19 milliards d’euros à compter de 2012, complétée par 2,4 milliards d’euros de mesures nouvelles chaque année à partir de cette date.

Une telle prévision suppose qu’à partir de 2012, l’impôt sur le revenu et la taxe sur la valeur ajoutée progressent à un rythme annuel de 5 % – soit supérieur à la croissance du PIB, évaluée à 4,3 % en valeur – et que l’impôt sur les sociétés augmente de 13 % par an pour retrouver, en 2013, le niveau qui était le sien avant la crise, en 2008 – soit 2,5 % du PIB.

Le Rapporteur général estime que, s’ils ont pu être constatés par le passé, de tels rythmes de progression pourraient s’avérer optimistes compte tenu de la multiplication des dépenses fiscales, qui ont réduit l’assiette, donc la dynamique, de ces trois impositions

Le tableau suivant illustre la trajectoire de recettes fiscales nettes prévue par la programmation.

RECETTES FISCALES NETTES

(en milliards d’euros)

2010

2011

2012

2013

2014

247,8

254,4

273,7

295

310,4

Source : rapport annexé au présent projet de loi.

La programmation anticipe donc une forte surréaction des recettes fiscales à la croissance, symétrique de la « décroissance spontanée » de 9,6 % constatée en 2009. Entre 2011 et 2013, le taux moyen de croissance spontanée des recettes fiscales nettes atteindrait ainsi 7 % et l’élasticité moyenne 1,7.

LES DÉTERMINANTS DE L’ÉVOLUTION
DES RECETTES FISCALES NETTES DE 2011 À 2014

 

2011

2012

2013

2014

Taux de croissance spontanée

5,6 %

7,4 %

7,9 %

5,3 %

Élasticité à la croissance

1,60

1,71

1,83

1,22

S’ils sont élevés, de tels niveaux paraissent néanmoins possibles. Ainsi, lors de la dernière phase de reprise économique, entre 2004 et 2006, le taux moyen de croissance spontanée s’est élevé à 6,6 % et l’élasticité moyenne à 1,53 après une chute des recettes fiscales de 0,2 % en 2002. Or la chute spontanée des recettes fiscales nettes en 2009 a été nettement plus prononcée, à – 9,6 %. Après une telle chute de ses ressources, il n’est pas impossible que l’État profite d’un rebond plus marqué que par le passé. Le tableau suivant rappelle l’évolution de la croissance spontanée des recettes fiscales nettes et leur élasticité depuis 2001.

LES DÉTERMINANTS DE L’ÉVOLUTION DES RECETTES FISCALES NETTES DE 2000 À 2009

 

2001

2002

2003

2004

2005

2006

2007

2008

2009

Croissance spontanée

7,5 %

– 0,2%

0,1%

6,7%

4,4%

8,8%

6%

2,8%

– 9,6%

Élasticité

1,9

– 0,1

0

1,6

1,1

1,9

1,3

1

4,5

Source : ministère du Budget, des comptes publics et de la réforme de l’État

Toutefois, la comparaison avec le passé pourrait être faussée par le fait que, contrairement à la période 2004-2006, les recettes fiscales de la période 2011-2013 seraient grevées par la montée en charge de dépenses fiscales dont l’assiette est corrélée à l’activité économique – les dépenses de recherche et développement pour le crédit d’impôt recherche, les versements de primes d’intéressement pour le crédit d’impôt en faveur de l’intéressement.

Au-delà de ces deux exemples, il existe le risque que le « mitage » de l’assiette de l’impôt sur le revenu, de l’impôt sur les sociétés et de la taxe sur la valeur ajoutée ne permette pas à ces impositions de voir leur produit rebondir, au moment de la reprise économique, aussi nettement que par le passé. Le risque est d’autant plus grand que les ressources de l’État sont de plus en plus concentrées sur ces trois impositions du fait des multiples transferts de recettes réalisés sur la décennie 2000. Le montant de ces 3 impositions représenterait, en 2010, 89 % du montant total des recettes fiscales nettes, contre 80 % en 2001.

D.– UNE CLÉ DE PASSAGE QUI AMÉLIORERAIT LE DÉFICIT PUBLIC DE 0,1 % DE PIB

 La « clé de passage » serait positive sur l’ensemble de la durée de la programmation et améliorerait le solde de l’État en comptabilité nationale par rapport au solde en comptabilité budgétaire d’un montant compris entre 2,2 et 2,3 milliards d’euros à partir de 2012.

Rappelons que la comptabilité budgétaire est une comptabilité de caisse, contrairement à la comptabilité nationale, en droits constatés, qui retrace des flux. Par conséquent les différences de solde entre la comptabilité nationale et la comptabilité budgétaire s’expliquent par :

– les corrections des droits constatés qui visent à rattacher les flux financiers à l’exercice auquel ils se rapportent ; ces corrections portent principalement sur les impôts qui sont recouvrés et/ou remboursés plus tard que la période à laquelle ils se rapportent ;

– les retraitements des opérations budgétaires en « opérations financières » : la comptabilité nationale retraçant les flux, toute recette ou dépense budgétaire qui engendre une augmentation de l’actif ou du passif est annulée ; c’est le cas par exemple des recettes de privatisation ou des rachats de dettes ;

– la prise en compte des opérations réelles du Trésor ; ce sont les opérations sans contrepartie budgétaire qui se traduisent par une augmentation du passif ou de l’actif ; c’est le cas par exemple des remises de dettes ou des versements de dividendes en actions.

 En l’absence d’informations fournies par le Gouvernement, il est malaisé de porter une appréciation sur la clé de passage retenue dans la programmation. On peut toutefois constater que, sur la base des éléments qui lui seraient intégrés de manière récurrente, la clé de passage retenue paraît plausible.

Parmi les corrections en droits constatés, les revenus tirés de la garantie octroyée à la société de financement de l’économie française (SFEF) ont été perçus en 2008 et 2009 mais sont, en comptabilité nationale, étalés sur la durée des prêts accordés. Les derniers remboursements devant être réalisés en 2014, la clé de passage intégrera, chaque année, quelques centaines de millions d’euros de recettes à ce titre.

Les retraitements d’opérations budgétaires en opérations financières concerneraient principalement les dépenses d’équipements militaires. Celles-ci sont, en comptabilité budgétaire, prises en compte au fur et à mesure des versements alors que, en comptabilité nationale, elles le sont au moment de la livraison. Elles ont conduit à une réduction du déficit en comptabilité nationale de 2,7 milliards d’euros en 2009 et de 2,8 milliards d’euros en 2010 et pourraient demeurer à ce niveau au cours des années à venir. Par ailleurs, les prêts octroyés à la Grèce, qui entrent également dans cette catégorie, atteindraient 3,7 milliards d’euros en 2012 et 1,1 milliard d’euros en 2013.

Enfin, certaines opérations réelles du Trésor, qui sont des opérations non budgétaires ayant un impact sur le solde, sont récurrentes. Les remises de dettes en faveur d’États étrangers pourraient s’élever à 4,3 milliards d’euros en 2011 et 2012, seule la part détenue directement par l’État devant venir dégrader la clé de passage (15). Les intérêts courus non échus (16) sont également à prendre en compte. En 2009, ils ont dégradé la clé de passage d’environ 900 millions d’euros.

II.– QUEL NIVEAU D’EXCÉDENT STRUCTUREL POUR LA « NÉBULEUSE » DES ODAC ?

Les organismes divers d’administration centrale (ODAC) dégageraient, sur l’ensemble de la période de programmation, un excédent annuel de 0,3 % à 0,4 % de PIB.

DÉFICIT PRÉVISIONNEL DES ORGANISMES DIVERS
D’ADMINISTRATION CENTRALE

 

2011

2012

2013

2014

Déficit en % de PIB

0,3 %

0,3 %

0,3 %

0,4 %

Déficit en milliards d’euros

5,8

5,8

7,1

8,1

Source : rapport annexé au présent projet de loi.

Comme l’illustre le tableau ci-dessous, les ODAC dégagent généralement un solde positif en raison notamment des excédents de la caisse d’amortissement de la dette sociale (CADES) et du fonds de réserve pour les retraites (FRR) (17). Le solde des autres organismes est, en revanche, très fluctuant et peut dépendre, par exemple, d’opérations patrimoniales, comme celles ayant impliqué la caisse de la dette publique en 2007 ou l’ERAP en 2009, ou de l’attribution de dotations devant être consommées progressivement – cas de l’agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF) de 2006 à 2008 ou du commissariat à l’énergie atomique et aux énergies renouvelables (CEA).

ÉVOLUTION DU SOLDE DES ODAC DE 2001 À 2009

(en milliards d’euros)

 

2001

2002

2003

2004

2005

2006

2007

2008

2009

CADES + FRR

3,8

5,7

5,4

4,3

4,0

4,5

nc

6,1

7,7

Autres ODAC

0,7

3,5

– 0,6

5,2

3,1

6

nc

– 6

– 4,9

Total

4,5

9,2

4,8

9,5

7,1

10,5

– 2,6

0,1

2,8

Total en % du PIB

0,3

0,6

0,3

0,6

0,4

0,6

– 0,1

0

0,1

Pour les années à venir, hors opérations exceptionnelles, deux éléments structurels d’effet opposé détermineraient le solde des ODAC : l’impact des investissements d’avenir et l’accroissement de l’excédent de la CADES. En l’absence d’informations complémentaires du Gouvernement, il semble qu’une prévision d’excédent des ODAC comprise entre 3,5 et 4,5 milliards d’euros, soit 0,2 % de PIB, soit plus sincère.

Par ailleurs, l’article 11 du présent projet de loi prévoit l’interdiction, pour la plupart des ODAC, d’emprunter à plus d’un an. Cette disposition, particulièrement bienvenue, répond à une préoccupation de la commission des Finances qui, à l’initiative de M. Michel Bouvard, a été à l’origine de l’article 107 de la loi de finances pour 2010, prévoyant une information renforcée du Parlement sur l’endettement des opérateurs.

Rappelons que le champ des ODAC ne recoupe qu’imparfaitement celui des opérateurs de l’État, aujourd’hui répertoriés dans une annexe à la loi de finances en application de la LOLF (18). On trouve notamment parmi les ODAC qui ne sont pas des opérateurs de l’État des organismes chargés de la gestion d’une dette – caisse d’amortissement de la dette sociale et la caisse de la dette publique – ou de constituer des réserves – fonds de réserve pour les retraites –, des fonds de garantie, de compensation ou d’indemnisation, des organismes de défaisance… La majorité des ODAC sont rattachés à l’État ; toutefois deux des plus importants, la CADES et le FRR, font partie des administrations de sécurité sociale.

A.– LA CADES, À L’ORIGINE DE L’EXCÉDENT DES ODAC

 La caisse d’amortissement de la dette sociale (CADES) dégage un excédent structurel. Ainsi, en 2009 et 2010, la CADES perçoit environ 8 milliards d’euros de recettes – CSG et CRDS –, supporte des charges d’intérêts d’un montant de 3 milliards d’euros et dégage, en conséquence, une capacité de financement de l’ordre de 5 milliards d’euros – correspondant approximativement au montant du principal de la dette remboursée.

Les reprises de dettes prévues dans le projet de loi de finances et le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2011 contribueraient à accroître cet excédent. En l’absence d’éléments fournis par le Gouvernement, on peut évaluer l’excédent généré par ces transferts entre 1,5 et 2 milliards d’euros (19) à compter de 2011. Cet excédent sera ensuite en diminution progressive du fait du financement des déficits futurs de l’assurance vieillesse par des cessions d’actifs du fonds de réserve des retraites – non considérés comme des recettes en comptabilité nationale.

Au final, à compter de 2011, la CADES dégagerait un excédent structurel que l’on peut évaluer approximativement entre 6,5 et 7 milliards d’euros et qui devrait diminuer progressivement.

 Le fonds de réserve pour les retraites, en revanche, ne devrait plus dégager d’excédents aussi importants que par le passé – 3,2 milliards d’euros en 2008, 2,7 milliards d’euros en 2009 – du fait de la chute de ses recettes. En effet, la quote-part de 65 % du prélèvement de 2 % sur les revenus du capital ne lui serait plus affectée et les produits retirés de ses actifs devraient diminuer du fait de la réorientation de ses investissements vers les produits obligataires.

B.– L’IMPACT RÉCURRENT ET SUBSTANTIEL DES INVESTISSEMENTS D’AVENIR

Selon les évaluations fournies au moment de l’examen du premier projet de loi de finances rectificative pour 2010, la dégradation du solde public due aux investissements d’avenir serait limitée à l’impact des dotations consomptibles et des subventions – les prêts, avances et prises de participation pouvant être considérés comme des opérations patrimoniales. Elle serait ainsi comprise entre 2,5 et 3 milliards d’euros chaque année (20). Une telle évaluation suppose que les fonds du « grand emprunt » soient consommés de façon linéaire sur cinq ans et que seules les dotations consomptibles et les subventions soient prises en compte en tant que dépense.

Cette évaluation doit toutefois être nuancée sur deux points.

D’une part, la répartition exacte entre les différents modes d’intervention n’était pas connue au moment où cette évaluation a été réalisée. Il est possible que soit modifiée la part respective des octrois de prêts ou d’avances et des prises de participations – sans impact sur le solde – et celle des subventions ou dotations consomptibles – considérées comme des dépenses au sens de la comptabilité nationale.

D’autre part, le critère permettant de ne pas considérer un mode d’intervention comme une dépense budgétaire ne tient pas à la nature de cette intervention mais à l’objectif poursuivi par cette aide. Une dépense est en effet classée en tant qu’actif quand l’État se comporte en investisseur avisé attendant un retour financier de son investissement. Le reclassement d’une partie des opérations patrimoniales en dépense budgétaire n’est donc pas à exclure.

Au final, il n’est pas impossible que l’impact des investissements d’avenir sur le solde des ODAC soit supérieur à la prévision du Gouvernement.

C.– PLUSIEURS ORGANISMES EN DÉFICIT STRUCTUREL

Contrairement à la CADES et au FRR, plusieurs organismes connaissent des déficits structurels.

À titre d’exemple, le commissariat à l’énergie atomique (CEA) a clôturé les années 2008 et 2009 sur des déficits de 0,5 et 0,6 milliard d’euros. Il finance en partie ses opérations de démantèlement d’installations nucléaires sur dotation initiale – actifs financiers liquides pour le fonds civil, soulte versée par EDF et Areva pour le fonds militaire – dont le produit de liquidation n’est pas considéré comme une recette au sens de la comptabilité nationale.

L’établissement public de gestion de la contribution de France Télécom, qui reverse chaque année à l’État une fraction de la dotation de 5,7 milliards d’euros versée par France Télécom en 1997, est également en déficit structurel puisque son unique recette provient d’une dotation en capital dont il reverse des fractions, chaque année, à l’État. Il devrait toutefois effectuer son dernier versement, de 243 millions d’euros, en 2011.

Enfin, l’EPFR doit faire face au coût de financement de la dette de 4 milliards d’euros qu’il porte encore et se trouve en situation de déficit structurel. Le rapport annexé au présent projet de loi mentionne comme un facteur d’amélioration du solde des ODAC le fait que la programmation intègre l’hypothèse d’une affectation d’un milliard d’euros par an à l’EPFR pour son désendettement. Toutefois, de telles dotations étant financées à partir de produits de cessions d’actifs retracées sur le compte d’affectation spéciale Participations financières de l’État, elles ne pourraient être réalisées qu’à la double condition de céder un montant suffisamment important d’actifs et de ne pas devoir financer des opérations de recapitalisation trop importantes. À titre d’exemple, compte tenu de l’augmentation de capital de 1,2 milliard d’euros de La Poste prévue en 2011, il semble peu probable que des dotations à l’EPFR soient possibles l’an prochain. Rappelons que le dernier versement réalisé au profit de cet établissement public date de 2006, pour un montant de 512,5 millions d’euros.

III.– LA MAÎTRISE DES DÉPENSES LOCALES : UNE EXIGENCE RENFORCÉE

A.– L’ÉTAT N’A PLUS LES MOYENS D’ACCROÎTRE LES CONCOURS AUX COLLECTIVITÉS LOCALES

L’effort financier de l’État en faveur des collectivités territoriales, tel que défini par l’article 108 de la loi de finances rectificative pour 2007 se compose de trois parties : 1) les concours de l’État aux collectivités territoriales ; 2) les dégrèvements d’impôts locaux et les subventions spécifiques versées par les ministères ; 3) la fiscalité transférée. En 2010, l’effort financier de l’État en faveur des collectivités territoriales s’élève à 98 milliards d’euros. Les concours financiers représentent 60 % de cet effort et s’élèvent à 57,3 milliards d’euros.

Si jusqu’alors la progression des concours financiers de l’État en faveur des collectivités avait été sanctuarisée grâce à l’application d’une norme pluriannuelle de stabilisation en volume (21), comparable à celle que l’État s’appliquait à lui-même en 2009 et 2010, la dégradation de nos finances publiques aujourd’hui nous oblige à accepter le passage à une norme de stabilisation de ces concours en valeur sur un périmètre resserré (hors FCTVA et prélèvement au titre des amendes de police). Le budget triennal prévoit donc que ces concours seront donc stabilisés en valeur au niveau de la loi de finances initiale pour 2010 à 50,45 milliards d’euros en autorisations d’engagement, après neutralisation des mesures de périmètre (22).

Si cette nouvelle norme peut paraître sévère, elle s’explique tout d’abord par la nécessaire contribution des collectivités locales au ralentissement du rythme d’évolution des dépenses publiques qui conditionnent le retour à un déficit de 3 % en 2013 (23).

Elle doit également être appréciée au regard des efforts engagés par l’État lui-même pour réduire ses dépenses. À cet égard, le Rapporteur général ne peut que constater que l’article 7 du projet de loi de programmation pour les années 2011-2013 évite aux collectivités locales, de servir de « variables d’ajustement », dans l’hypothèse où le respect de la norme « zéro volume » fixée par l’article 5 impliquerait de réduire les dépenses de l’État, hors dette et pensions. En effet, si la stabilisation en valeur à périmètre constant des concours de l’État n’était pas garantie par l’article 7, il aurait été envisageable de faire peser sur les concours de l’État au profit des collectivités territoriales l’ajustement lié au respect de la norme de dépense élargie de l’État en volume.

Enfin, le Rapporteur général note avec satisfaction que les remboursements et dégrèvements d’impôts locaux et la fiscalité transférée en compensation des transferts de compétences sont toujours exclus de la norme de dépenses des collectivités territoriales de sorte qu’en cas d’évolution à la hausse les collectivités n’en seront pas privées.

B.– LES ADMINISTRATIONS PUBLIQUES LOCALES SONT EN MESURE DE RÉDUIRE LA PROGRESSION DE LEURS DÉPENSES

Après plusieurs années marquées par une progression de l’endettement des administrations publiques locales (APUL), la programmation 2011-2014 s’appuie sur l’hypothèse que celles-ci visent un retour progressif à l’équilibre de leur budget à l’horizon 2014.

PRÉVISIONS DU SOLDE DES APUL, EN COMPTABILITÉ NATIONALE

 

2009

2010

2011

2012

2013

2014

Dépenses en points de PIB

12,0

12,0

11,8

11,6

11,3

11,2

Recettes en points de PIB

11,7

11,6

11,3

11,2

11,2

11,1

Solde en points de PIB

– 0,3

– 0,4

– 0,5

– 0,3

– 0,2

0,0

Solde en Md€

– 5,6

– 8,5

– 9,9

– 7,0

– 3,3

– 0,3

Source : Rapport annexé au projet de loi de programmation 2011-2013.

Cette amélioration de leur capacité de financement passerait principalement par un ralentissement marqué de la dépense locale sur la période reposant sur deux facteurs, outre le gel en valeur des concours de l’État :

– d’une part, les collectivités locales devraient bénéficier de la fin de la montée en charge de certaines prestations comme l’allocation personnalisée d’autonomie ou la prestation de compensation du handicap. De plus, l’amélioration de la conjoncture économique devrait permettre un certain reflux des dépenses de RSA socle. En outre, conformément aux recommandations des rapports de M. Pierre Jamet sur les finances départementales (avril 2010) et de MM. Gilles Carrez et Michel Thénault sur la maîtrise des dépenses locales (mai 2010), le Gouvernement devrait soutenir les départements, victimes d’un fort effet de ciseaux sur les dépenses sociales, pour faire face à ces dépenses ;

– d’autre part, le prochain cycle d’investissement local devrait se révéler moins dynamique que le précédent, qui s’était caractérisé par une progression des coûts de construction plus rapide que l’inflation. Ce ralentissement de l’investissement à moyen terme pourrait encore être accentué, certains investissements locaux ayant été anticipés grâce aux mesures prises dans le cadre du plan de relance, notamment la mesure de versement anticipé du FCTVA mise en œuvre en 2009 et reconduite en 2010.

Enfin, les prélèvements obligatoires des APUL sont supposés progresser spontanément à un rythme proche du PIB (élasticité légèrement inférieure à l’unité), grâce notamment à un rattrapage des droits de mutation à titre onéreux (DMTO) qui ont sensiblement diminué pendant la crise économique. Par ailleurs, la programmation est construite sur l’hypothèse prudente d’une hausse modérée des taux d’imposition locaux, se traduisant par un surcroît de recettes de 1 milliard d’euros par an en moyenne sur la période.

La trajectoire de solde des APUL peut sembler optimiste puisqu’elle impose aux collectivités locales de réduire de 0,2 point de PIB en moyenne annuelle le niveau de leurs dépenses (soit réaliser une économie de plus de 4 milliards d’euros par an) et de retrouver progressivement une capacité de financement à la fin de la période de programmation, situation qu’elles n’ont plus connue depuis l’acte II de la décentralisation.

Il n’en demeure pas moins que les collectivités locales sont en mesure de maîtriser la progression de leurs dépenses. Ainsi, l’année 2009 a été marquée par un ralentissement certain de la progression des dépenses des APUL (+ 3 % après + 4,3 % en 2008) et de leur besoin de financement (+ 5,6 milliards d’euros contre 8,7 milliards d’euros en 2008). En outre, la situation relativement dégradée des comptes des collectivités locales devrait les amener à un effort de maîtrise important sur l’évolution des dépenses de personnel et celles des dépenses de fonctionnement, comme ce fut par exemple le cas dans la seconde moitié des années 1990. Le gel du point d’indice des fonctionnaires de l’État en 2011 se traduira d’ailleurs par une moindre dépense de la fonction publique territoriale.

C.– DES RÉFORMES COMPLÉMENTAIRES S’IMPOSENT

Le rapport de MM. Gilles Carrez et Michel Thénault sur la maîtrise des dépenses locales a mis en exergue les difficultés auxquelles peuvent être confrontées les collectivités locales de nature à contribuer à la progression de leurs dépenses. Or, l’État peut y répondre en engageant les réformes qui conviennent.

D’une part, il ressort des études menées par les professeurs Gilbert et Guingamp qu’il existe de fortes disparités de dépenses au sein d’une même catégorie de collectivités de collectivités, majoritairement liée à l’écart de ressources et notamment l’écart de dotations, en particulier au niveau communal. Dès lors, un accroissement de la péréquation verticale, mais également horizontale, devrait favoriser la maîtrise globale des dépenses en versant moins aux collectivités les mieux dotées et plus aux collectivités les moins bien dotées.

D’autre part, l’accroissement des normes réglementaires imposées aux collectivités territoriales a directement pour effet d’accroître la progression des dépenses locales. Par conséquent, une véritable limitation de l’effet inflationniste des normes participerait à la maîtrise de la dépense locale. À cet égard, le Gouvernement a pris plusieurs mesures, par voie de circulaire en date du 6 juillet 2010, afin de répondre à ces difficultés telles que :

– l’application d’un moratoire à l’ensemble des mesures réglementaires concernant les collectivités territoriales, leurs groupements et leurs établissements publics, dont l’adoption n’est commandée ni par la mise en œuvre d’engagements internationaux de la France ni par l’application des lois ;

– la consultation plus régulière de la commission consultative d’évaluation des normes (CCEN) sur les projets de loi ou la possibilité d’élaborer un contre rapport sur les projets de texte qui lui sont soumis ;

– une meilleure intégration des coûts induits par les dispositions envisagées dans la préparation des projets de loi, afin de renforcer l’expertise sur les effets induits de la réglementation sur la dépense locale.

En outre, le Président de la République a annoncé que la CCEN pourra s’engager dans l’expertise du coût des normes existantes, dans le cadre d’une révision générale des normes. Le Gouvernement a ainsi saisi les associations d’élus locaux, afin qu’ils se prononcent sur les domaines dans lesquels une révision générale des normes devrait être prioritairement engagée en raison des dépenses qu’elles engendrent pour les collectivités et de préciser, dans ces domaines, les normes qui leur paraissent devoir être révisées. Sur la base de ces propositions, la CCEN serait saisie afin de rendre un avis sur la suppression ou l’aménagement des normes concernées.

Le Rapporteur général constate que ces mesures vont dans le bon sens, mais seule l’expérience montrera si le Gouvernement se tient à ses engagements.

Enfin, la hausse des dépenses sociales obligatoires des départements justifie une solution spécifique : outre les nécessaires réformes proposées par le rapport de M. Jamet destinées à améliorer la gouvernance à travers la mise en place de référentiels communs à tous les départements, à la diffusion de bonnes pratiques ou à la mutualisation des fonctions supports, il est important que l’État s’engage à soutenir financièrement les départements les plus en difficulté, pour permettre de faire face à la progression non maîtrisable de ces dépenses.

IV.– LES ANGLES MORTS DE LA PRÉVISION DU DÉFICIT
DE LA SÉCURITÉ SOCIALE

Avec un déficit prévisionnel de 32,8 milliards d’euros en 2010, soit 1,7 % de PIB, les administrations de sécurité sociale constituent un enjeu majeur de la réduction du déficit public. Le Gouvernement prévoit une amélioration substantielle de leur solde sur la durée de la programmation, dont le premier facteur d’explication est, à compter de 2012, la forte réduction du déficit des organismes hors régime général.

PRÉVISION DE DÉFICIT DES ASSO ET DU RÉGIME GÉNÉRAL

 

2010

2011

2012

2013

2014

Solde ASSO en % de PIB

– 1,7

– 1,5

– 1,2

– 0,8

– 0,5

Solde ASSO en milliards d’euros

– 32,8

– 30

– 25,3

– 18,5

– 11,6

Solde du régime général en milliards d’euros

– 23,1

– 21,4

– 19,7

– 18,2

– 15,5

Source : rapport annexé au présent projet de loi.

NB : les prévisions de soldes des ASSO et du régime général ne peuvent être directement comparées car le premier est évalué en comptabilité nationale alors que le second est en comptabilité de caisse.

Cet objectif ambitieux serait atteint par un effort soutenu de maîtrise de la dépense, qui passerait de 26,3 % du PIB en 2010 à 25,1 % du PIB en 2014. Le taux annuel moyen d’augmentation des dépenses des ASSO serait de l’ordre de 2,9 % en valeur, décomposés en 3,3 % pour le régime général et 2,2 % pour les autres organismes.

Compte tenu du vieillissement démographique, qui tire à la hausse les dépenses d’assurance vieillesse et maladie, et du progrès technique, qui renchérit le coût des soins, la maîtrise des dépenses de sécurité sociale peut difficilement être atteinte sans réforme structurelle. À cet égard, le Rapporteur général salue le projet de loi portant réforme des retraites, qui devrait permettre, à la fin de la décennie, le retour à l’équilibre de la branche vieillesse de la sécurité sociale.

En 2011, cet effort de maîtrise de la dépense serait complété par l’affectation des nouvelles ressources, d’un montant prévisionnel de 3,7 milliards d’euros, prévues dans le cadre de la réforme des retraites.

Rappelons que les administrations de sécurité sociale (ASSO) sont composées :

– des organismes relevant des lois de financement de la sécurité sociale, principalement le régime général qui, en 2009, représente les deux tiers des dépenses des ASSO et près de 90 % de leur déficit, mais également les autres régimes obligatoires de base (régime social des indépendants, régime agricole, régimes spéciaux) et les organismes concourant à leur financement – à savoir le fonds de solidarité vieillesse (FSV) ;

– des régimes complémentaires de vieillesse – Agirc et Arrco ;

– de l’Unedic ;

– des organismes dépendant des assurances sociales (ODASS), principalement les hôpitaux.

L’information sur les organismes hors régime général apparaît particulièrement lacunaire, ce qui est d’autant plus regrettable que la programmation fait reposer sur eux une large part de l’ajustement.

A.– UN EFFORT DE MAÎTRISE DE LA DÉPENSE CONCENTRÉ SUR L’ASSURANCE MALADIE ET LES RETRAITES

Le cœur de la stratégie du Gouvernement réside dans la maîtrise des deux principaux postes de dépenses de sécurité sociale : l’assurance maladie et les retraites.

D’une part, la branche maladie des régimes obligatoires de base, qui représente, en 2009, 37 % de l’ensemble des dépenses des ASSO, se voit fixer un objectif ambitieux de croissance de l’ONDAM : 2,9 % en 2011, 2,8 % les années suivantes. Le II de l’article 8 du présent projet de loi traduit cet objectif par des plafonds de dépenses. Comme l’explique le Rapporteur général dans ses observations sur cet article, une telle cible est ambitieuse mais réalisable à condition d’améliorer les conditions de construction et de suivi infra-annuel de l’ONDAM. Pour 2011, cette maîtrise de la dépense de la branche maladie ne serait pas obtenue par une grande réforme structurelle – comme la réforme des retraites – mais par l’adoption de mesures ciblées d’économies d’un montant total de 2,5 milliards d’euros.

D’autre part, la branche vieillesse des régimes obligatoires de base, qui cumule, en 2009, 40 % de la dépense des administrations de sécurité sociale, verrait la croissance de ses charges limitée du fait de l’impact de la réforme des retraites – laquelle aurait également un impact positif sur le solde de l’Agirc et de l’Arrco. Son solde serait en amélioration constante sur l’ensemble de la période de programmation et passerait de – 16,7 milliards d’euros en 2010 à – 10,1 milliards d’euros en 2014. Comme le montre le tableau ci-dessous, l’impact des mesures d’âge serait déterminant dès 2012.

IMPACT FINANCIER DE LA RÉFORME SUR
L’ENSEMBLE DES RÉGIMES DE RETRAITE

(en milliards d’euros)

 

2010

2011

2012

2013

2014

Rappel solde avant réforme

– 32,3

– 35,1

– 36,6

– 38,1

– 38,7

Impact annuel mesures d’âge

0

1,7

5

6,7

7,4

Effort net de l’État

15,6

15,6

15,6

15,6

15,6

Recettes supplémentaires

0

3,7

3,9

4

4,1

Mesures de solidarité

0

– 0,1

– 0,3

– 0,5

– 0,6

Mesures de convergence public-privé

0

0,4

1

1,6

2,2

Solde après réforme

– 16,7

– 13,7

– 11,4

– 10,7

– 10,1

Source : ministère du Travail, de la solidarité et de la fonction publique

Comme l’indique le Rapporteur général dans ses observations sur l’article 8 du présent projet de loi, les économies prévues sur la maladie et la vieillesse couvriraient les deux tiers des économies prévues à l’horizon 2014.

Sur cette base, il semble que le tiers restant de moindre dépense doive être réalisé sur les deux autres branches de la sécurité sociale. Le rapport annexé au présent projet de loi ne mentionne pourtant aucun élément allant dans ce sens.

La branche AT-MP (accidents du travail et maladies professionnelles) assumerait le coût, estimé à 300 millions d’euros en 2014, des mesures de pénibilité et bénéficierait, dès 2011, du relèvement de 0,1 point du taux des cotisations patronales qui lui sont affectées, pour un rendement de 400 millions d’euros. Aucune information relative à la maîtrise de la dépense n’est indiquée.

La branche famille semble également épargnée par les mesures d’économies, le rapport annexé au présent projet de loi insistant uniquement sur le développement de l’offre d’accueil des jeunes enfants, les nouvelles missions de la branche et l’amélioration de son pilotage financier.

B.– UNE RÉDUCTION MÉCANIQUE DU DÉFICIT DU FAIT DE L’AMÉLIORATION DE LA CONJONCTURE

Compte tenu de la croissance spontanée dynamique des dépenses de sécurité sociale, seule l’adoption de mesures discrétionnaires peut permettre de contenir durablement le solde des ASSO. Celui-ci devrait toutefois profiter de l’amélioration de la conjoncture et du marché du travail par deux canaux différents.

D’une part, les recettes des administrations de sécurité sociale étant principalement assises sur la masse salariale, la progression de celle-ci – estimée à 2,9 % en 2011 puis à 4,5 % les années suivantes – permettrait de maintenir stable, à 24,7 %, leur part dans le PIB. Une très légère surréaction semble anticipée dans la mesure où la croissance du PIB est attendue à 4,3 % en valeur à partir de 2012.

D’autre part, l’Unedic devrait voir ses charges décroître avec l’amélioration du marché du travail. Après un déficit de 3,4 milliards d’euros en 2010, son solde devrait être encore négatif mais en réduction, à 2,7 milliards d’euros, en 2011. Son déficit cumulé atteindrait néanmoins 13 milliards d’euros au 31 décembre 2011.

C.– UNE INFORMATION INCOMPLÈTE

 L’information sur les organismes de sécurité sociale autres que le régime général est, dans le rapport annexé au présent projet de loi, quasiment inexistante.

Ni les régimes obligatoires de base autres que le régime général ni le fonds de solidarité vieillesse ne font l’objet d’un développement. Il convient également de remarquer qu’ils ne sont pas non plus inclus dans la trajectoire de dépenses prévue au I de l’article 8 du présent projet de loi, laquelle porte uniquement sur le régime général.

Aucune information n’est disponible sur les régimes complémentaires d’assurance vieillesse – Agirc et Arrco. Une telle absence est d’autant plus regrettable que ces régimes seront affectés tant par le vieillissement démographique que par les mesures prévues dans le cadre de la réforme des retraites (24). Pour mémoire, ces régimes dégageaient un excédent de 1,2 milliard d’euros en 2009.

Enfin, ni l’Unedic ni les organismes dépendant des assurances sociales (ODASS), qui regroupent principalement les hôpitaux, ne sont non plus mentionnés par le rapport. Pour mémoire, le déficit des ODASS s’établissait à 1,3 milliard d’euros en 2009.

 Le caractère lacunaire de l’information sur ces différents organismes est d’autant plus regrettable que la programmation fait reposer sur eux une large part de l’ajustement. Ainsi, comme le montre le tableau ci-dessous, ces organismes joueraient, à compter de 2012, un rôle déterminant dans la réduction du déficit des ASSO. À partir de cette date, alors qu’ils couvrent moins de 40 % de la dépense du sous-secteur, ils expliqueraient entre 61 % et 78 % de l’amélioration du solde.

Le rapport annexé ne précise aucun autre facteur d’explication sur l’évolution du solde des autres organismes de sécurité sociale. Sur la base des évolutions constatées entre 2004 et 2007, il est possible que le solde de l’Unedic s’améliore d’environ 2 milliards d’euros par an. Une telle amélioration est toutefois insuffisante pour expliquer la variation du solde. On ne dispose donc pas de justification de l’amélioration de leur solde portant sur 1 milliard d’euros en 2012, 3,3 milliards d’euros en 2013 et 2,2 milliards d’euros en 2014, soit environ 0,1 % de PIB en moyenne par an et un impact cumulé de 0,3 % de PIB sur la durée de la programmation.

PART DU RÉGIME GÉNÉRAL ET DES AUTRES ORGANISMES DE SÉCURITÉ SOCIALE DANS L’AMÉLIORATION DU SOLDE DES ASSO

(en milliards d’euros)

 

2010

2011

2012

2013

2014

Déficit des ASSO

– 32,8

– 30

– 25,3

– 18,5

– 11,6

Déficit du régime général

– 23,1

– 21,4

– 19,7

– 18,2

– 15,5

Part du régime général dans la réduction du déficit

 

61 %

36 %

22 %

39 %

Déficit des organismes hors régime général

– 9,7

– 8,6

– 5,6

– 0,3

3,9

Part des organismes hors régime général dans la réduction du déficit

 

39 %

64 %

78 %

61 %

NB : le solde des organismes hors régime général est une approximation de l’évaluation qu’en fait le Gouvernement car il résulte de la différence entre le solde des ASSO, en comptabilité nationale, et du solde du régime général, en comptabilité de caisse.

DISCUSSION GÉNÉRALE

La Commission examine le présent projet de loi au cours de sa première séance du mardi 5 octobre 2010.

M. le président Jérôme Cahuzac. Nous allons examiner, en présence de M. François Baroin, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l’État, le projet de loi de programmation des finances publiques 2011-2014, qui nous a été présenté il y a moins d'une semaine. Il s'agit du deuxième projet de cette nature qu'il nous est donné d’examiner, le premier, pour la période 2009-2012, ayant été adopté en février 2009 dans un contexte de crise qui l'a rapidement rendu obsolète.

Comparé au texte de programmation précédent, le texte qui nous est soumis comporte quelques informations et règles supplémentaires, en particulier celle concernant l'interdiction pour les opérateurs d'emprunter à plus d'un an, et celle d'un objectif d’évolution des mesures nouvelles afférentes aux prélèvements obligatoires qui se substitue à la règle du gage à l'intérieur des niches fiscales et sociales. Quant à cet objectif, chiffré à 10 milliards d'euros pour 2011 et à 3 milliards les années suivantes, il appelle des éclaircissements : à quelles « mesures nouvelles » stricto sensu correspond-il en réalité ?

Autre sujet : la place de la programmation des finances publiques par rapport aux autres événements budgétaires, aux niveaux européen et national, puisqu'il nous faut tenir compte désormais du « semestre budgétaire » qui va être mis en place à compter de 2011.

Je précise que nous aurons vingt et un amendements à examiner.

M. Henri Emmanuelli. Pourquoi l’interdiction faite aux opérateurs d’emprunter à plus d’un an ne figure-t-elle pas dans la loi de finances ?

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Je formulerai quelques observations générales sur ce projet de loi de programmation, à partir de la question que vient de poser M. Emmanuelli.

Les lois de programmation prévues à l’article 34 de la Constitution dans le cadre de la réforme de 2008 visent à l’équilibre des finances publiques, lequel suppose que, pour atteindre les chiffres fixés, nous nous dotions de règles de bonne gouvernance. L’une des règles définies par la précédente loi de programmation était, par exemple, l’obligation de gager les dépenses fiscales. Il est néanmoins apparu que des lignes de fuite subsistaient dans ces règles, notamment pour ce qui concerne l’endettement des opérateurs – question qui a donc toute sa place dans une loi de programmation.

En revanche, à moins de procéder à une réforme constitutionnelle, ces lois ne sont pas opposables aux lois de finance.

M. Henri Emmanuelli. Heureusement !

M. le rapporteur général. La commission présidée par M. Camdessus a donc proposé de leur donner une certaine supériorité par rapport aux lois de finance annuelles.

M. Pierre-Alain Muet. Il est bon que nous ayons, avant l’examen du budget, une discussion sur l’évolution des finances publiques à moyen terme.

La réduction des déficits est une question de volonté politique plutôt que de règles. Du reste – et c’est paradoxal –, le Gouvernement n’a respecté aucune des règles existantes – celle des 3 % de déficit et celle des 60 % d’endettement. Je rappelle que la France a atteint puis dépassé pour la première fois le seuil de 60 % d’endettement au deuxième trimestre du gouvernement Juppé. Lorsque nous étions aux affaires, de 1997 à 2002, nous avons ramené à 58 %, à la fin de 2001, une dette qui dépassait 60 % du PIB et réduit à 1,5 % un déficit qui se situait à 3,5 % en juin 2002. Les règles européennes sont bonnes et il n’était pas besoin d’en ajouter de nouvelles. Celles que le Gouvernement a ajoutées ont peut-être une certaine pertinence, comme celle qui consiste à ne pas transférer de déficits à la Caisse d’amortissement de la dette sociale (CADES) sans les assortir de moyens de financement, ou celle qui porte sur les gages, mais elles ne sont pas respectées.

La réduction des déficits exige, plutôt que des règles, une politique économique cohérente. Pour relancer la croissance en réduisant les déficits, il faut axer toute la politique économique sur l’emploi. De fait, si nous avons les mêmes cycles économiques que nos voisins européens et si les indicateurs connaissent la même évolution dans tous les pays, ce qui fait la différence entre la croissance des uns et des autres est la capacité à créer des emplois. La création massive d’emplois se traduit par une croissance supérieure à la moyenne européenne, comme ce fut le cas de la France entre 1997 et 2002. Quand on crée peu d’emplois, la croissance est plus faible, comme entre 1993 et 1997, puis de 2002 à 2008-2009, avant la crise.

La priorité est donc aujourd’hui de disposer d’une politique qui crée massivement des emplois pour restaurer la confiance et remettre notre économie sur un sentier de croissance. Il s’agit aussi de maîtriser les déficits – mais l’un ne va pas sans l’autre.

M. Charles de Courson. Nous avons été en partie à l’initiative de cette réforme constitutionnelle, car nous désirions l’instauration d’une règle d’or – laquelle, malheureusement, n’est encore qu’imparfaitement appliquée.

Sur le fond, j’observe tout d’abord que le Gouvernement se donne pour objectif d’atteindre un déficit de 2 % en 2014, ce qui correspond de très près à la position que nous défendons depuis des années, proscrivant le recours à l’endettement pour financer des dépenses de fonctionnement. L’ensemble des investissements publics étant précisément de l’ordre de 2 % du PIB, ce chiffre correspond à peu près à l’équilibre de fonctionnement global – même si, en termes analytiques, cet équilibre n’est pas encore assuré pour chacune des trois composantes des administrations publiques.

Par ailleurs, une prévision de croissance de 1,5 % nous paraît plus raisonnable que le chiffre de 2,5 % initialement retenu, et même que celui de 2 % auquel le Gouvernement l’a ramené pour le projet de loi de finances pour 2011. Si les résultats sont meilleurs, le surplus permettra de réduire plus vite le déficit de fonctionnement. À cet égard, l’augmentation de 0,8 % en volume moyen annuel de l’ensemble des dépenses publiques est excessive et nous avons déposé un amendement tendant à ramener ce chiffre à 0,3 % afin d’assurer l’équilibre des finances publiques. À défaut, en effet, l’augmentation devrait être nulle pour le bloc « État » – intérêts de la dette et pension compris, qui représentent 1,2 %, soit un peu moins que l’inflation, estimée à 1,5 %. Cette augmentation devrait être de 0,2 %, et non de 0,7 %, pour les collectivités territoriales et, pour les dépenses de sécurité sociale, de 0,6 % plutôt que de 1,1 % – ce qui revient à peu près à réduire de 0,5 point l’augmentation pour chacun des trois volets. Pour la partie liée à l’État, on voit qu’il conviendrait de stabiliser la quasi-totalité des missions – à l’exception de deux.

Un débat consacré à la globalité des dépenses est donc utile. Le Gouvernement nous semble aller dans la bonne direction, mais un effort supplémentaire reste nécessaire.

Enfin, le tau de prélèvements obligatoires doit être relevé de 2 points en cinq ans, ce qui revient à retrouver à peu près la situation d’avant la crise. Ce relèvement doit être de 3 points pour la dépense publique. De fait, il semble raisonnable que l’effort en matière de dépenses s’accompagne d’un effort en matière de recettes.

M. Michel Bouvard. M. Muet est un peu sévère. Nul ne peut en effet contester que la mise en place d’une loi de programmation pluriannuelle des finances publiques soit un progrès. Elle permet au Parlement de tenir un vrai débat sur les objectifs sur lesquels nous nous engageons vis-à-vis de Bruxelles et assure également aux différents partenaires de l’État et aux responsables des comptes publics une lisibilité que la crise rend d’autant plus nécessaire. Enfin, cette loi contient des dispositions pertinentes et utiles, comme celle qui s’applique aux opérateurs, ainsi que celles qui portent sur la norme de dépenses de l’État ou les engagements de l’objectif national des dépenses de l’assurance maladie (ONDAM).

On peut certes objecter que le processus n’est pas assez rapide. Mais l’exercice est difficile et il importe de ne pas fragiliser une croissance encore ténue. Comme cela a déjà été évoqué à plusieurs reprises au sein de notre Commission, en matière de finances publiques, un assèchement trop rapide ou une rupture trop forte peut donner lieu à une stagnation économique : il convient donc d’éviter l’écueil de l’excès dans la réduction, et celui du laxisme consistant à considérer que la croissance réglera spontanément le problème.

Monsieur Muet, il est plus facile de dégager des excédents et de respecter les normes lorsque la croissance est au rendez-vous sur l’ensemble du continent européen, comme la majorité de l’époque à laquelle vous vous êtes référé a eu la chance que ce soit le cas.

M. Henri Emmanuelli. La croissance française était alors supérieure d’un point à celle des autres pays.

M. Michel Bouvard. La situation de la croissance française n’est aujourd’hui pas moins favorable que celle des autres pays de la zone euro. Actuellement, l’environnement ne permet pas de dégager des excédents, mais c’est précisément lorsque les recettes sont bonnes qu’il faut songer à réduire la dépense publique. Or, le choix a été fait de réduire certains impôts, avec la baisse de la TVA sur certains secteurs ciblés, comme le bâtiment, la réduction d’un point du taux de TVA – avec quelle efficacité ? –, ou la baisse de l’impôt sur le revenu, sans réduire pour autant la dépense publique. Celle-ci a continué de croître, ainsi que, en dépit de la décentralisation, le nombre des fonctionnaires de l’État. Nous avons ainsi légué au pays un fardeau définitif – comme vous le savez en effet, le recrutement d’un fonctionnaire engage un processus qui dure jusqu’au décès de sa veuve ou de son veuf, bénéficiaire de la pension de réversion. Il est dommage que les bons résultas obtenus à cette époque n’aient pas été mis à profit pour réduire la dette et le train de vie de l’État.

Quoi qu’il en soit, l’exercice est beaucoup plus difficile à réaliser en période de crise économique ou de sortie de crise.

M Jean-Claude Sandrier. Le projet de loi qui nous est soumis devrait s’intituler « Projet de loi pour la programmation de la baisse des dépenses publique » – ce serait plus sincère.

De fait, vous illustrez une sorte d’obsession idéologique selon laquelle tous nos problèmes viendraient de la dépense publique. Or, le déficit tient à deux facteurs : la crise et la multiplication des niches fiscales. Les rapports officiels montrent en effet qu’en dix ans 120 milliards d’euros de recettes fiscales ont été perdus et que la dépense publique n’a pas augmenté. Pourquoi consacrer une loi de programmation à la seule baisse des dépenses, en évacuant deux questions : celle d’une autre répartition des richesses, c’est-à-dire d’une autre fiscalité, plus juste et plus progressive, et celle de la politique d’investissement ? Quelle suite a été donnée au plan de relance, qui n’était pas une mauvaise idée ? Le projet de loi de programmation ne dit rien des recettes ni de l’investissement. Nous nous apprêtons à faire un grand débat pour peu de chose.

M. Henri Emmanuelli. Monsieur Bouvard, il serait temps de prendre acte du fait qu’à une certaine période, même si la conjoncture était favorable, la croissance française était alors supérieure à la moyenne européenne, comme l’attestent les chiffres de l’OCDE.

Pour ce qui est du projet de loi de programmation, s’il est tout à fait souhaitable d’éclairer l’avenir, il est aberrant de vouloir le verrouiller. Quels que soient ses talents et ses mérites, M. Camdessus, qui fait partie de ceux à qui nous devons le franc fort – politique dont il serait bon de savoir un jour combien elle a coûté au pays –, n’est peut-être pas parmi les personnes les plus à même de nous expliquer comment redresser la situation pour l’avenir.

Monsieur le rapporteur général, l’idée de verrouiller l’avenir par une loi organique est à la fois naïve et conservatrice – ce qui est d’ailleurs étonnant, car les conservateurs ne sont pas forcément naïfs. Elle est naïve, car les deux ans que nous venons de vivre ont montré que le respect d’une loi organique aurait affamé les Français. Cette idée est également antidémocratique. La majorité du Sénat étant susceptible de changer, gardez-vous d’être un jour victimes du processus que vous appliquez à autrui. Pour ma part, je crois à la démocratie : un pouvoir ne saurait avoir la légitimité ni le droit de verrouiller les années à venir et de dicter une politique. Il appartient au souverain qu’est le peuple de voter et de désigner des pouvoirs légitimes qui avisent en fonction des impératifs du moment.

Des règles écartant certaines hypothèses seraient certes bienvenues pour certains, mais j’y suis, quant à moi, pour les mêmes raisons, totalement opposé. C’est depuis trente ans la même rengaine, mais aucune des lois de programmation voulues par les différents ministres n’a jamais été respectée : cessons donc ce jeu d’enfant ! Le facteur déterminant est la volonté politique du moment. De ce point de vue, monsieur le ministre, nous commettons une erreur en voulant à la fois réduire les déficits publics et obtenir le maximum de croissance possible. Mieux vaudrait d’abord relancer la machine de la croissance, notamment en assurant la réindustrialisation de notre pays par tous les moyens possibles et abordables. La réduction des déficits ne viendra qu’ensuite. À vouloir les deux, nous n’obtiendrons ni l’un ni l’autre : la dette ne se réduira pas, les taux remonteront et la croissance sera faible.

M. François Goulard. L’exercice auquel nous nous livrons a ses limites, notamment parce que, avec ou sans la crise, de nombreux engagements pris n’ont pas été tenus, comme l’ont démontré ces dernières années, particulièrement 2009. Il est tout à fait compréhensible que l’approche économique de la gauche soit de nature keynésienne. En revanche, ceux qui pensent que, tout en maintenant les protections sociales et les institutions publiques de notre société, des efforts considérables restent à faire pour réduire la dépense publique, ne voient pas comment y parvenir. Ainsi, les dispositions actuellement en vigueur ne sauraient suffire à contenir la dépense d’assurance maladie dans les prochaines années ni à permettre de respecter les objectifs fixés.

Des réformes de structure beaucoup plus profondes seraient nécessaires, mais il n’est pas facile de les faire passer. De même que la gauche est tétanisée à l’idée de perdre le soutien naturel dont elle jouit dans l’éducation nationale, la droite l’est souvent à l’idée de se fâcher avec les médecins. C’est une très grave erreur, car les réformes ne se font pas et, dans les deux cas, on parvient à se fâcher quand même. Les chiffres importent moins que le fait de s’engager dans de vraies réformes dont la portée ne sera visible que dans cinq ans au moins.

Pour ce qui concerne les collectivités territoriales, je rappelle que la réforme des finances locales a heureusement été améliorée par la Commission des finances de l’Assemblée nationale : si le projet du Gouvernement était absolument inacceptable, ce qui en est sorti, à défaut d’être bon, est au moins à peu près acceptable pour la plupart des collectivités. Il me semble que le seul moyen d’obtenir une progression raisonnable de la dépense publique locale soit d’encadrer davantage la recette. La réforme de la taxe professionnelle aurait été une occasion de le faire, mais son effet n’a été à cet égard que partiel et de nombreuses échappatoires subsistent.

Les engagements sont une chose ; les moyens permettant de les tenir valent bien mieux.

M. Christian Eckert. Mes chers collègues, n’étant membre de notre Commission que depuis un an, j’ai, face à votre compétence, un peu de mal à m’y retrouver : entre la loi triennale, la loi de finances annuelle et les engagements transmis à Bruxelles – sur lesquels nous n’avons d’ailleurs pas été consultés –, quelle est la règle qui prévaut ?

Pour ce qui est de la taxe professionnelle, que vient d’évoquer M. Goulard, j’ai hâte de prendre connaissance du rapport d’étape prévu au titre de la clause de revoyure. Devant les amendements d’une centaine de pages dont nous avons été saisis à la dernière minute, face au mélange de taxes et au transfert de masses et de blocs communaux, le modeste agrégé de mathématiques plutôt cartésien que je suis est un peu perdu.

Nous ne sommes plus crédibles devant nos concitoyens !

Je suis, enfin, très inquiet quant au budget de la mission « Travail et emploi » dont je suis rapporteur spécial avec Mme Chantal Brunel. Ce budget est en effet le plus malmené, passant en deux ans de 12,35 à 9,32 milliards d’euros. En outre, certains crédits étaient inscrits dans le plan de relance et la disparition de celui-ci se traduit sans doute par une diminution de crédits supérieure à celle qui figure dans vos tableaux. Le budget de cette mission, après celui de la défense, est le premier à subir des réductions aussi drastiques. Je souhaiterais connaître votre sentiment sur ce point.

M. Daniel Garrigue. Tout d’abord, il n’est pas mauvais que nous ayons de nouveau des lois de programmation. Depuis que nous avons renoncé à la planification – qui, dans notre pays, comportait une programmation financière –, notre système est en effet un peu trop géré au jour le jour et une programmation est bienvenue, pour autant qu’elle donne lieu à un véritable débat et ne porte pas seulement sur quelques agrégats.

En deuxième lieu, je rappelle le principe constitutionnel de libre administration des collectivités territoriales, fortement lié aux ressources de celles-ci. N’y aurait-il pas lieu d’adopter un jour une loi organique définissant les conditions d’évolution des ressources de ces collectivités ? De fait, ces ressources, qui dépendent de plus en plus des dotations de l’État, sont de plus en plus laissées au bon vouloir de ce dernier à l’occasion des lois de finances annuelles ou de lois comme celle dont nous débattons. Les prérogatives et l’autonomie des collectivités territoriales devraient être mieux garanties par une méthodologie dans ce domaine.

Enfin, la nouvelle procédure du code de conduite en matière d’élaboration des budgets nationaux prévoit que, durant le « semestre européen » qui se déroulera chaque année de mars à juillet, les projets de budgets devront être soumis à la Commission européenne et au Conseil européen, qui rendront – d’après le texte anglais, le seul disponible actuellement – des « advices », qui se situeront entre le conseil et la recommandation. Il s’agit là d’un changement considérable. Ce volet de politique budgétaire, qui manquait dans le traité de Maastricht, est très important pour la construction européenne, mais cette procédure remet gravement en cause la souveraineté budgétaire des États. Or, tout se passe sans que le Parlement soit informé et la loi de programmation elle-même peut être remise en question dès le printemps prochain en fonction des advices qui seront rendus par la Commission européenne et le Conseil européen. Doivent donc être posées les questions de l’information du Parlement et de l’articulation entre la loi de programmation et la nouvelle procédure du « semestre européen ». Pour surmonter le problème constitutionnel, cette procédure doit être assortie de dispositions permettant d’y associer le plus en amont possible les parlements nationaux.

M. Thierry Carcenac. À la page 77 du rapport annexé au projet de loi, il est indiqué que l’on escompte la fin de la montée en charge de certaines prestations, comme l’allocation personnalisée d’autonomie ou la prestation de compensation du handicap : on est loin des réunions que nous avons eues ici, monsieur le rapporteur général, dans le cadre du rapport Carrez-Thenault. Malgré vos incantations, les départements doivent s’attendre à de graves difficultés en matière de prestations sociales, notamment pour ce qui concerne les allocations de solidarité.

On nous promet certes pour la fin de l’année une loi sur la dépendance, qui réformera la situation existante, mais nous n’y sommes pas encore. Les courriers de M. Marleix relatifs aux départements en difficulté promettent des avances remboursables. Où allons-nous ? Nous n’avons pas assez pris la mesure des dépenses d’allocation de solidarité et de leur compensation durant les trois années qui viennent, où toutes les dotations seront gelées du fait de la volonté gouvernementale de placer les collectivités locales dans une situation boiteuse. L’investissement est indispensable à la relance, notamment pour les collectivités locales qui avaient l’habitude d’investir dans certains domaines, comme la recherche. Comment, par exemple, maintenir les dépenses du RSA socle si les collectivités locales ne peuvent plus investir ?

M. Gérard Bapt. L’article 8 du projet de loi traite de l’assurance maladie en prévoyant pour l’ONDAM la réserve de précaution que le Parlement a mise en place pour le budget de l’État. Comment cette réserve pourra-t-elle répondre aux besoins exprimés en matière d’assurance maladie ? À titre d’exemple, le dernier rapport de l’Institut national du cancer indique que le nombre de patients traités par chimiothérapie a augmenté de 12 % depuis 2005, passant de 320 000 à 358 000.

Par ailleurs, nous venons d’entendre une proposition tendant à limiter la capacité des collectivités locales à fixer la progression de leur fiscalité. Ainsi, dans la petite commune de 10 000 habitants dont je suis maire, le conseil municipal a été saisi de l’arrêt du chantier de construction d’une école du fait de la faillite d’une entreprise. En juillet, le président de la Fédération régionale du bâtiment et des travaux publics a déclaré dans le quotidien régional La Dépêche du Midi qu’il faisait appel au sens des responsabilités des élus locaux pour maintenir les plans de charge du bâtiment et des travaux publics. La chambre de métiers, qui nous accusait l’an dernier de vouloir limiter la suppression de la taxe professionnelle en fonction du plafond, constate aujourd’hui que les maires freinent des quatre fers à cause de la limitation des dotations, qui touche directement l’investissement. La mesure relative au Fonds de compensation de la TVA prise l’an dernier était bienvenue pour le maintien de l’investissement des collectivités locales, mais c’était un pistolet à un coup : aujourd’hui, toutes les collectivités et tous les maires déplorent de n’avoir aucune visibilité et d’être confrontés aux revendications des ménages face à l’augmentation des impôts. Nous sommes pris dans une sorte de cercle vicieux. La proposition de M. Garrigue de limiter la liberté qu’ont les collectivités de fixer leur pression fiscale donnerait certes une certaine visibilité – ce mécanisme existe en Allemagne –, mais il s’agit d’un changement radical, d’ordre constitutionnel.

M. Alain Rodet. La multiplication des lois et règlements environnementaux relatifs à l’eau, à l’assainissement et aux déchets a un impact important.

M. Henri Emmanuelli. Monsieur Goulard, monsieur Garrigue, si on limite les recettes des collectivités locales, comment financera-t-on l’allocation pour l’autonomie, l’allocation pour les handicapés ou le RMI-RSA, dont le coût augmente cette année respectivement de 8 %, 9 % et 8 % ? Si on limite les recettes, il faut aussi interdire les dépenses. Sur les 331 communes du département dont je suis élu, 200 ne peuvent plus construire un logement à cause des normes européennes d’assainissement. C’est n’importe quoi !

Monsieur le ministre, on ne peut dire une chose et son contraire ! Réduire les recettes et nous obliger à dépenser relève de la pantalonnade ! Ce système ne tiendra pas ! C’est la raison pour laquelle je ne me fie pas à ces prévisions à deux ou trois ans. Éclairer l’avenir est une chose, le verrouiller en est une autre. Êtes-vous conscient qu’à partir de la fin novembre, certains départements ne pourront plus verser le RSA aux CAF, qui seront, quant à elles, obligées de le payer.

Enfin, il est aberrant de nous dire qu’il faut encadrer l’avenir par une loi organique quelques jours après avoir proposé de prolonger de quatre ans la durée de vie de la CADES afin de ne pas augmenter les prélèvements sociaux.

M. Daniel Garrigue. Si je propose une loi organique, c’est précisément parce que je suis inquiet de constater que les ressources des collectivités locales dépendent de plus en plus de dotations de l’État. Pour garantir à ces collectivités le principe de libre administration, il sera un jour nécessaire d’encadrer ces mécanismes. Il serait très dangereux qu’elles dépendent chaque année de la loi de finances, et seule une loi organique peut leur donner un minimum de garanties.

M. le président Jérôme Cahuzac. La précédente loi de programmation prévoyait en son article 11 une règle de gage des niches fiscales et sociales, qui a systématiquement été bafouée. En outre, le pouvoir exécutif projette de revenir sur la règle d’or exprimée à l’article 20 de la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale. Ces deux précédents peuvent donc rendre suspecte la tentative que font certains d’élaborer de nouvelles règles d’or pour l’avenir.

Par ailleurs, afin d’éviter tout malentendu, je précise qu’il est abusif de qualifier de « règle d’or » la conclusion à laquelle est parvenu la commission Camdessus. À la différence de ce qui a cours en Allemagne, cette conclusion n’est pas une règle de solde. On peut y voir, non une règle qui prédétermine l’avenir, mais un renforcement des droits du Parlement. En effet, voter une loi de programmation et s’assurer qu’elle sera respectée ne contrevient nullement à un renforcement de ces droits – au contraire. Faute de cela, nous savons en les votant que ces lois pluriannuelles ne seront pas respectées. Si donc nous voulons que notre vote soit respecté, les lois annuelles doivent être subordonnées à cette loi de programmation, qui ne prédétermine pas les années qui suivent, car elle est explicitement révisable chaque année. Cette révision annuelle implique que le pouvoir exécutif démontre que la loi précédente s’applique et que la trajectoire est respectée, soit qu’elle ne s’applique pas ou ne peut pas s’appliquer, et pourquoi. C’est aller dans le sens de l’information du Parlement et du renforcement de ses pouvoirs que de prédéterminer une trajectoire à trois ou quatre ans. Cette politique, révisable chaque année, n’est donc pas une « règle d’or ».

Pour ce qui concerne les prélèvements obligatoires, il est vrai qu’au début de cette année, les autorités de notre pays ont transmis à Bruxelles un programme de stabilité prévoyant explicitement un effort de 5 points de PIB – 3 points pour la réduction de la dépense et 2 points d’augmentation des prélèvements obligatoires. Il est clair que cette loi de programmation reprend au moins le schéma de cette augmentation de 2 points. La question est de savoir quelle sera la part entre les prélèvements qui augmenteront mécaniquement du fait de la croissance et ceux qui augmenteront volontairement à la suite de décisions politiques. Ce serait manquer de lucidité que de prétendre qu’une seule de ces deux formes d’augmentation s’appliquerait.

De ce point de vue, un effort incontestable sera réalisé, dès l’année prochaine, tant pour les prélèvements obligatoires que pour les dépenses. Il faudra, au demeurant, que le ministre nous éclaire sur l’évolution des minima sociaux : un blocage est-il envisagé malgré l’inflation et l’augmentation éventuelle des publics concernés ? Le projet de loi de finances précise que des réformes et des adaptations seront nécessaires. Pouvons-nous en savoir plus ?

Le budget pour 2011 est construit sur l’hypothèse d’une croissance de 2 %. Quel serait l’effort nécessaire pour remplir l’objectif de réduction des déficits publics à 6 % du PIB, si la croissance s’établissait en réalité à 1,5 % ? Il a été question de 4 ou 6 milliards d’euros dans cette hypothèse. Qu’en est-il exactement ? Quelles mesures adopteriez-vous alors ?

M. le rapporteur général. J’ai la faiblesse de penser – Henri Emmanuelli dira peut-être qu’il s’agit d’une forme de naïveté – que les règles sont utiles. Elles sont même nécessaires, bien qu’elles ne soient pas suffisantes. Parmi les différentes règles que nous avons réussi à convaincre nos collègues d’adopter dans le cadre de la LOLF, ce qui ne fut pas une mince affaire, figurait notamment une disposition relative aux surplus, aujourd’hui reprise à l’article 10 du projet de loi qui nous est soumis, laquelle aurait permis d’éviter l’affaire de la « cagnotte » entre l’automne 1999 et le printemps 2000. Je rappellerai seulement que le ministre de l’époque avait essayé de cacher aussi longtemps que possible l’excédent des recettes, au prix de quelques déboires, et que son successeur avait engagé des baisses d’impôts tous azimuts que le pays ne pouvait absolument pas se permettre, et qui étaient parfois socialement injustes.

M. François Baroin, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l’État. Nous ne changeons rien à l’indexation des minima sociaux. Aucun « gel » n’est prévu en la matière. J’ajoute que nous ne nous plaçons pas dans l’hypothèse selon laquelle notre prévision de croissance ne se vérifierait pas. Je rappelle toutefois qu’un demi point de croissance représente 5 milliards d’euros.

M. le président Jérôme Cahuzac. Nous en venons à l’examen des articles.

EXAMEN DES ARTICLES

Article premier

Objet de la programmation pluriannuelle

Cet article définit l’objet de la programmation pluriannuelle en distinguant, au sein du présent projet de loi, les dispositions de portée « programmatique » et celles de portée normative.

Les articles 2 à 10 ont vocation à fixer les objectifs de la programmation pour la période 2011-2014. Ils constituent le volet à proprement parler « programmatique » du projet de loi, destiné à appliquer l’avant-dernier alinéa de l’article 34 de la Constitution. Ce volet comprend :

– la fixation des objectifs généraux de la programmation, à travers l’approbation du rapport annexé au projet de loi (article 2) et la définition de la trajectoire d’évolution du solde des administrations publiques et de la dette publique (article 3) ;

– la reconduction de règles de gouvernance des dépenses : norme annuelle d’évolution des dépenses publiques en volume (article 4), norme annuelle de progression des dépenses de l’État (article 5), programmation triennale des crédits des missions du budget général de l’État (article 6), norme annuelle d’évolution des concours de l’État au profit aux collectivités territoriales (article 7) et norme annuelle d’évolution des dépenses de sécurité sociale (article 8) ;

– l’édiction de règles de pilotage des recettes : encadrement des mesures nouvelles afférentes aux prélèvements obligatoires (article 9) et affectation des surplus de prélèvements obligatoires à la réduction des déficits publics (article 10) ;

– la création.

En revanche, les articles 11 à 13 sortent du cadre « programmatique » du projet de loi, et revêtent par conséquent la même portée normative que celle qui s’attache à une disposition législative classique. Ils visent en effet à encadrer l’endettement des ODAC (article 11) et à imposer au Gouvernement des obligations de suivi de la programmation, à travers la présentation au Parlement d’objectifs de coût des dépenses fiscales et des niches « sociales » (article 12) et d’un bilan de la mise en œuvre de la programmation (article 13).

*

* *

La Commission adopte l’article premier sans modification.

*

* *

Article 2

Approbation du rapport annexé

Cet article vise à approuver le rapport annexé au présent projet de loi.

À l’instar des lois d’orientation et de programmation adoptées au cours de la douzième législature (25) et de la loi de programmation des finances publiques pour les années 2009 à 2012, le présent projet de loi est accompagné d’un rapport annexé soumis à l’approbation du Parlement.

Ce rapport a un triple objet :

– définir le contexte macro-économique et les hypothèses retenues ;

– fixer les objectifs assignés à l’ensemble des administrations publiques et à chaque sous-secteur ;

– préciser les modalités d’application des règles de gouvernance prévues par le projet de loi.

Le contenu de ce rapport annexé est commenté dans la partie générale du présent rapport.

*

* *

La Commission adopte l’article 2 sans modification.

*

* *

Chapitre Ier

LES OBJECTIFS GÉNÉRAUX DES FINANCES PUBLIQUES

Avant l’article 3

La Commission examine l’amendement CF 1 de M. Charles de Courson, portant article additionnel avant l’article 3.

M. Charles de Courson. Il s’agit d’établir un principe simple : on a le droit de s’endetter pour financer des investissements, mais pas des dépenses de fonctionnement. Nous proposons d’insérer un article ainsi rédigé : « Le besoin de financement des administrations publiques ne peut excéder la part de l’ensemble des investissements publics, exprimée en pourcentage de produit intérieur brut. »

S’il n’y a pas eu d’effondrement de l’investissement public jusqu’à ce jour, c’est grâce aux collectivités territoriales : les administrations de sécurité sociale investissent très peu, et l’État ne consacre à cet effort que 12 milliards d’euros hors subventions d’équipement, dont 10 milliards d’investissements militaires – l’État ne réalise donc quasiment plus d’investissement.

M. le rapporteur général. Avis défavorable. Nous avons déjà eu un débat très approfondi sur cette question lorsque nous avons révisé la Constitution au début de l’année 2008. Deux possibilités ont été envisagées : soit l’adoption de ce type de règle d’or, soit la création de lois de programmation pluriannuelles tendant à réaliser un équilibre des finances publiques. C’est cette solution qui a été retenue. Je ne crois pas nécessaire de rappeler les difficultés inhérentes à la mesure de l’investissement et au suivi de la règle d’or, ni sur ses échecs – nombreux – à l’étranger.

M. François Baroin, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l’État. Je suis du même avis que le rapporteur général. Je crains que cet amendement ne se heurte à des difficultés pratiques. L’esprit général des lois de programmation est de réduire les déficits dans la durée afin d’atteindre un équilibre budgétaire, objectif qui est partagé par tous. Chacun sait qu’une épée de Damoclès est suspendue au-dessus de nos têtes. Or, ce que vous proposez ne tend pas à réduire les déficits, mais plutôt à orienter les dépenses. L’amendement nous éloignerait donc de notre objectif.

La Commission rejette l’amendement.

Article 3

Évolution du solde des administrations publiques et de la dette publique

Cet article définit la trajectoire de redressement des comptes publics pour la période de programmation, en établissant l’évolution du solde des administrations publiques et de la dette publique.

Cette trajectoire est commentée dans l’exposé général du présent rapport.

*

* *

La Commission est saisie de l’amendement CF 10 du président Jérôme Cahuzac.

M. le président Jérôme Cahuzac. Cet amendement tend à décliner plus précisément l’évolution du déficit et de la dette publics, en précisant la part respective de l’État, des administrations publiques locales et des administrations de sécurité sociale. Nous connaîtrons ainsi plus exactement les attentes placées dans les différents acteurs.

M. le rapporteur général. Avis favorable. Afin de suivre la trajectoire des trois composantes des finances publiques – les comptes de l’État, les comptes sociaux et les comptes des collectivités locales –, nous avions adopté à l’unanimité un amendement semblable à l’occasion de la précédente loi de programmation. Nous avions ensuite fait marche arrière en commission mixte paritaire, mais l’amendement me paraît important. C’est au projet de loi, et non au seul rapport annexé, de retranscrire ces évolutions.

M. Charles de Courson. Je suis très favorable à l’amendement, qui conduira à expliciter, dans le texte du projet de loi, ce qui figure dans le rapport. C’est une question d’affichage.

Il reste que la différence entre les régimes obligatoires de base et les régimes complémentaires pourrait poser un problème : les régimes complémentaires ne sont pas sous la responsabilité de l’État, mais sous celle des partenaires sociaux.

On pourrait également se demander si l’amendement est compatible avec le principe de libre administration des collectivités territoriales, mais cet obstacle me paraît moindre, car le Conseil constitutionnel n’a pas retenu la position que j’ai défendue, des mois durant, au nom de mon groupe : le principe de libre administration des collectivités territoriales n’impose qu’un minimum d’autonomie financière, exigence qu’il est facile de vider de son sens à la différence de l’autonomie fiscale que nous appelions de nos vœux.

M. le ministre. Charles de Courson vient d’expliquer les réticences du Sénat – et celles du Gouvernement – sur cette question. Pour autant, les arguments du rapporteur général ne manquent pas de pertinence. Je m’en remets donc à la sagesse de votre Commission

La Commission adopte l’amendement, puis l’article 3 est ainsi modifié.

*

* *

Chapitre II

L’ÉVOLUTION DES DÉPENSES PUBLIQUES

Article 4

Évolution annuelle des dépenses publiques en volume

Le présent article fixe un objectif de progression des dépenses publiques pour la période 2011 à 2014 de 0,8 % en volume en moyenne annuelle (26).

Alors que l’article 4 de la première loi de programmation des finances publiques pour 2009-2012 fixait un objectif de croissance des dépenses de l’ensemble constitué par l’État, les organismes divers d’administrations centrales (ODAC) et les régimes obligatoires de base de la sécurité sociale, en volume à 1,1 % en moyenne annuelle, le Rapporteur général ne peut que relever l’objectif particulièrement ambitieux affiché prévu pour la programmation 2011-2014. D’une part, le présent article vise les dépenses de l’ensemble des administrations publiques, y compris celles des collectivités territoriales et des autres administrations de sécurité sociale (27), d’autre part, il tend à leur imposer un effort de maîtrise de l’évolution de leurs dépenses bien supérieur à celui retenu dans le cadre de la précédente programmation. Cet objectif est d’autant plus ambitieux que l’évolution tendancielle des dépenses publiques en volume, en moyenne annuelle, atteint 2,3 % depuis 2000.

Concrètement, le respect de l’objectif d’évolution des dépenses publiques affiché par le présent article revient à diviser par trois le rythme habituel de progression des dépenses publiques (I), ce qui impliquerait de réaliser près de 16 milliards d’économie par an par rapport à la tendance historique (II).

I.– L’OBJECTIF : DIVISER PAR TROIS LE RYTHME HABITUEL D’ÉVOLUTION DES DÉPENSES PUBLIQUES

Le taux de croissance annuel moyen en volume des dépenses publiques de l’ensemble des administrations publiques (APU : État, ODAC, administrations de sécurité sociale et administrations publiques locales) depuis le début des années 2000 s’élève à 2,3 % (28).

Entre 2002 et 2008, les collectivités territoriales ont été les principales contributrices à la croissance des dépenses publiques en volume, devant les administrations de sécurité sociale et les administrations centrales, pour une progression moyenne totale de 2,3 %.

ÉVOLUTION DES DÉPENSES PUBLIQUES EN VOLUME

en moyenne annuelle, à champ courant, en comptabilité nationale

 

2000-2008

Administrations publiques

2,3 %

Administrations publiques centrales (APUC) (Etat + ODAC)

1,8 % (a)

Administrations publiques locales (APUL)

4,2 %

Administrations de sécurité sociale (ASSO)

2,6 %

a) La moyenne des dépenses de l’État s’élève à + 0,5 % et celle des ODAC à + 3,1 %

Depuis 2008, les dépenses des administrations de sécurité sociale continuent de progresser de façon inquiétante (+ 2,4 % par an en volume en moyenne contre une prévision de 1,5 %), de même que celles des collectivités territoriales (+ 2,2 % par an en volume en moyenne hors transfert de compétences contre une prévision de 1,5 % par an). En revanche, la norme de dépense de l’État a non seulement été tenue en 2008 mais, du fait de la chute des charges de la dette, est en recul, en valeur absolue, en 2009 (29), tandis que le solde des ODAC s’est nettement amélioré, redevenant positif en 2008 et progressant de 2,7 milliards d’euros en 2009 (soit une croissance annuelle moyenne en volume de + 0,7 % par an)(30).

Cette situation s’explique en partie par l’effet de l’accroissement des dépenses sociales en période de crise par le jeu des stabilisateurs automatiques et des mesures de relance.

Dès lors, en phase de sortie de crise, le ralentissement de la croissance des dépenses publiques prévu par le Gouvernement sur la période 2011-2014 s’avère très volontariste car il devra principalement porter sur la maîtrise de la dépense sociale et locale.

ÉVOLUTION DES DÉPENSES PUBLIQUES ENTRE 2000 ET 2014

Une lecture hâtive de ce graphique pourrait laisser penser que les efforts programmés pour 2011-2014 ne sont, au regard des résultats de 2008 ou des prévisions pour 2010, pas particulièrement drastiques. Une telle interprétation serait fausse, dès lors que :

– la limitation de la progression en volume des dépenses publiques à un niveau exceptionnellement bas en 2008 (+ 0,8 %) masque une évolution en valeur de 3,8 %, guère différente des performances des années précédentes. La part des dépenses publiques dans la richesse nationale a d’ailleurs progressé de 0,5 point de PIB en 2008 ;

– la faible progression en volume des dépenses publiques attendue pour 2010 (environ 1,3 %) s’explique par le « contrecoup » du plan de relance, dont l’essentiel des moyens était concentré sur l’année 2009 (31).

Le respect d’un objectif de progression des dépenses publiques de + 0,8 % par an constitue donc un effort inédit de maîtrise de la dépense. Il devrait permettre de ramener la part des dépenses publiques sur le PIB de 56 % en 2009 à moins de 53 % en 2014, c'est-à-dire au niveau de dépenses publiques avant la crise financière en 2008. Pour ce faire, le Gouvernement envisagerait les mesures ci-après.

 Pour les APUC :

– fin des mesures de relance et stabilisation en valeur des dépenses de l’État hors charge de la dette et des pensions à 274,84 milliards d’euros sur la période 2011-2014 (32;

– effort collectif de baisse de 10 % à l’horizon 2013 des dépenses de fonctionnement (33) et d’intervention, à commencer par une baisse de 5 % des dépenses de fonctionnement de l’État et des opérateurs (ODAC) dès 2011 ;

– application de la règle du non remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant en retraite à compter de 2011 et diminution de 1,5 % chaque année des emplois à l’État mais également à ses opérateurs (ODAC), à l’exception des opérateurs rattachés au ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche ;

 Pour les ASSO :

– des mesures destinées à améliorer le pilotage des dépenses d’assurance maladie à travers la fixation d’un taux de croissance annuel de l’ONDAM de 2,9 % contre 3,7 % en moyenne annuelle et l’instauration de nouvelles méthodes de gouvernance(34;

– une réduction des dépenses en matière de retraite grâce à la mise en œuvre du projet de loi de réforme des retraites qui devrait permettre de réduire le déficit public de 0,5 point en 2013 et le traitement de la dette sociale ;

 Pour les APUL :

– une modération de la progression des dépenses locales à travers la stabilisation en valeur des concours financiers de l’État aux collectivités territoriales et diverses mesures destinées à améliorer le traitement de l’évolution des dépenses sociales des collectivités territoriales (35)

S’il ne fait aucun doute que ces réformes vont générer des économies substantielles, l’effort en euros courants à réaliser par rapport à la tendance observée ces dernières années s’élèverait à 16 milliards d’euros par an en moyenne.

II.– LA CONDITION : RÉDUIRE LA PROGRESSION DES DÉPENSES PUBLIQUES DE 16 MILLIARDS D’EUROS PAR AN EN MOYENNE

Diviser par trois la progression tendancielle annuelle des dépenses publiques en volume est un engagement historique. Le tableau ci-après montre que, pour atteindre l’objectif d’évolution des dépenses publiques fixé à + 0,8 % en moyenne annuelle sur la période 2011-2014, il conviendrait théoriquement de réduire la progression tendancielle des dépenses publiques de 67 milliards d’euros sur quatre ans, et de 12 milliards d’euros dès 2011.

ÉVALUATION DES EFFORTS DE MAÎTRISE DES DÉPENSES PUBLIQUES POUR 2011-2014

 

2010

2011

2012

2013

2014

Moyenne 2011-2014

Prévisions de la loi de programmation des finances publiques pour les années 2011-2014

           

Dépenses publiques en % du PIB

56 %

55,2 %

54,3 %

53,4 %

52,6 %

 

Croissance annuelle des dépenses en milliards d'euros (Mds€)

+26,4

+25,2

+28,6

+29,3

+30

+28

Croissance annuelle des dépenses en % en volume

+1,3 %

+0,8 %

+0,8 %

+0,8 %

+0,8 %

+0,8 %

Évolution tendancielle des dépenses (a)

           

Croissance tendancielle annuelle en Mds €
hors relance (b)

+21,2

+37,3

+45,6

+47,5

+49,4

+44,9

Efforts à réaliser pour respecter le programme de stabilité

           

Effort annuel par rapport à la tendance en Mds €

+5,2

-12,1

-17,1

-18,2

-19,4

-16,7

Effort cumulé 2011-2014 par rapport à la tendance
en Mds €

 

-12,1

-29,2

-47,4

-66,7

 

(a) Augmentation de 2,3 % en volume en moyenne annuelle.

(b) L’évolution tendancielle est corrigée de l’effet des dépenses de relance en 2009 (15 Mds €) et en 2010 (5,7 Mds €)).

Ces ordres de grandeur doivent toutefois être interprétés avec précaution (36). Surtout, ils ne doivent pas faire perdre de vue que, du fait de la dynamique de certaines charges publiques (intérêts de la dette, pensions, prestations sociales, etc.) et des nouvelles dépenses que tout gouvernement est amené à engager pour mener à bien sa politique, c’est un montant d’économies bien supérieur qu’il faut en pratique dégager chaque année pour aboutir à cette moindre progression des dépenses publiques.

Concrètement, l’effort devrait être partagé par l’ensemble des administrations publiques. C’est la raison pour laquelle le rapport annexé à la loi de programmation prévoit de limiter, par sous secteurs, la progression des dépenses de la façon suivante :

ÉVOLUTION DES DÉPENSES PUBLIQUES EN VOLUME

en moyenne annuelle (*), à champ courant, en comptabilité nationale

hors contrecoup du plan de relance

 
 

2011-2014

Administrations publiques

0,8 %

Administrations publiques centrales (APUC) (État + ODAC) (**)

0,0 %

Administrations publiques locales (APUL)

0,6 %

Administrations de sécurité sociale (ASSO)

1,2 %

(*) il s’agit de la moyenne des progressions 2010-2011, 2011-2012, 2012-2013, 2013-2014

(**) hors transfert exceptionnel aux APUL lié à la réforme de la taxe professionnelle

La comparaison entre l’objectif de progression des dépenses publiques entre 2011 et 2014 et la constatation de la progression des dépenses publiques entre 2000 et 2008 montre le chemin à accomplir. De façon très concrète, celui-ci peut être appréhendé en mesurant l’effort de réduction de la progression des dépenses des différentes branches des administrations publiques par rapport à leur progression historique entre 2000 et 2008 :

EFFORTS À RÉALISER PAR SOUS SECTEUR DES ADMINISTRATIONS PUBLIQUES
PAR RAPPORT À LA PÉRIODE 2000-2008

(en milliards d’euros)

 

2011

2012

2013

2014

2011-2014

Moyenne annuelle

AC (État + ODAC)

-2,4

-3,4

-3,6

-3,9

-13,4

-3,3

APUL

-5,8

-8,2

-8,7

-9,3

-32,0

-8,0

ASSO

-3,9

-5,5

-5,8

-6,2

-21,4

-5,3

Total

-12,1

-17,1

-18,2

-19,4

-66,8

-16,7

Ces estimations démontrent que, sur la période 2011-2014, l’essentiel de l’effort devra porter sur la réduction de la progression « naturelle » des dépenses les moins maîtrisables, à savoir celles des administrations locales (– 8 milliards d’euros en moyenne annuelle) et celles des administrations sociales (– 5,3 milliards d’euros en moyenne annuelle). Seul un effort partagé et consenti par l’ensemble des acteurs publics pourrait donc permettre d’atteindre l’objectif d’évolution des dépenses prévu par le présent article.

*

* *

La Commission examine l’amendement CF 2 de M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. Par cet amendement, nous proposons de porter de 0,8 à 0,3 % le taux d’évolution en volume des dépenses des administrations publiques. Le taux de 0,8 % coïncide, en effet, avec une hypothèse de croissance continue de 2,5 % en volume, ce qui ne nous paraît pas réaliste : cela fait dix ans que la croissance ne dépasse 1,5 ou 1,6 % en période de crise. Mieux vaudrait adopter une hypothèse plus basse. Si l’on fait mieux, la réduction des déficits publics ne fera que s’accélérer.

M. le rapporteur général. Avis défavorable. Un taux de 0,8 % en volume revient quasiment à diviser par quatre la tendance moyenne de l’évolution des dépenses publiques au cours des quinze dernières années. C’est un effort considérable, mais il est à notre portée. Ce que nous propose notre collègue serait, en revanche, impossible à atteindre, ce qui aurait pour effet d’ôter toute crédibilité à notre démarche.

M. le ministre. Même avis défavorable.

M. Charles de Courson. J’appelle l’attention de notre Commission sur l’absence de toute clause de réajustement. Si la croissance n’atteint que 1,5 % du PIB, dans quelle mesure faudra-t-il réduire l’évolution des dépenses ? Selon nos calculs, un effort d’au moins 0,5 point serait nécessaire.

La Commission rejette l’amendement.

La Commission adopte ensuite l’article 4 sans modification.

*

* *

Article 5

Norme annuelle de progression des dépenses de l’État

Depuis la loi de finances pour 2008 (37), le Gouvernement a pris l’engagement de stabiliser l’évolution des dépenses de l’État ainsi que des prélèvements sur recettes et des nouvelles affectations de ressources à des opérateurs de l’État (38) au niveau de l’inflation (nome « zéro volume »).

Véritable outil de pilotage des dépenses du budget de l’État, cette norme a démontré son efficacité, les dépenses de l’État ayant globalement été maîtrisées depuis 2008 malgré le contexte de crise qui aurait pu être propice au relâchement de cette rigueur.

Le présent article traduit un engagement encore plus ambitieux du Gouvernement car il instaure une nouvelle norme de stabilisation en valeur des dépenses de l’État « hors charge de la dette et pensions » qui doit s’inscrire dans le cadre de la norme de dépense en volume. Compte tenu des hypothèses d’inflation, de charges de la dette et d’évolution des pensions retenues par le projet de loi de programmation pour les années 2011-2014, cette nouvelle norme impose, en pratique, de réduire le train de vie de l’État et de ses opérateurs en termes réels.

I.– LA NORME « ZÉRO VOLUME » : UN VÉRITABLE OUTIL DE MAÎTRISE DES DÉPENSES DE L’ÉTAT DEPUIS 2008

A.– UN OUTIL DE PILOTAGE DES DÉPENSES QUI S’IMPOSE AU GOUVERNEMENT

1.– Une norme issue de la loi de finances initiale pour 2008

Sous la législature précédente, seules les charges nettes du budget général – c’est-à-dire les dépenses du budget général hors remboursements et dégrèvements et hors recettes en atténuation de la charge de la dette – étaient soumises à la norme d’évolution en volume retenue par les gouvernements successifs. Ces dépenses ont ainsi été stabilisées en volume de 2002 à 2006, puis réduites de 1 % en volume en loi de finances pour 2007.

La loi de finances initiale pour 2008 a franchi une étape essentielle dans la maîtrise des dépenses publiques. Le périmètre de la norme de stabilisation en volume des dépenses de l’État a en effet été élargi aux prélèvements sur recettes en faveur des collectivités territoriales et de l’Union européenne et aux nouvelles affectations de ressources à des organismes publics.

Bien que la question du périmètre de la norme ait longuement été discutée à l’époque(39), la contrainte supplémentaire résultant de l’élargissement du périmètre de la norme « zéro volume » en 2008 a constitué sans nul doute un élément essentiel de modération des dépenses de l’État. Comme le Rapporteur général l’avait déjà souligné à l’époque, si ce périmètre élargi avait été retenu sous la législature précédente, ce sont plus de 10 milliards d’euros supplémentaires qui auraient dû être économisés, soit plus de 2 milliards d’euros chaque année (40). C’est donc avec raison que la première loi de programmation des finances publiques pour 2009-2012 a consacré cette norme.

2.– Une norme consacrée par la première loi de programmation des finances publiques pour 2009-2012

L’article 4 du projet de loi de programmation des finances publiques pour 2009-2012 prévoyait que « la progression annuelle des dépenses de l’État n’excède pas, au cours de la période mentionnée à l’article 1er, l’évolution prévisionnelle des prix à la consommation, selon les modalités décrites dans le rapport annexé à la présente loi ». Le renvoi au rapport annexé permettait de préciser ce qu’il faut entendre par « dépenses de l’État ». Comme dans le cadre de la loi de finances initiale pour 2008, étaient comprise dans le périmètre de la norme, la somme des dépenses nettes du budget général, des prélèvements sur recettes et des nouvelles affectations de recettes à d’autres personnes morales. Étaient donc exclus les remboursements et dégrèvements, les dépenses des comptes spéciaux et les dépenses des budgets annexes.

La crise économique mondiale qui s’est déclarée au cours de l’année 2008, suite à la crise du secteur bancaire, latente depuis le printemps 2007 et devenue systémique à l’automne 2008, a notamment touché la France. Le Gouvernement, qui a réagi très rapidement, a annoncé un plan de relance de l’économie française dès le 4 décembre 2008, qui s’est concrétisé dans le cadre de la loi de finances rectificative pour 2009 du 4 février 2009 (41) notamment. Compte tenu de l’ampleur des besoins pour faire face à la crise et du caractère temporaire des dépenses de relance engagées, le Gouvernement a proposé d’exclure ces dépenses de la norme de dépenses pluriannuelle. Il s’ensuit que le projet de loi de programmation des finances publiques pour 2009-2012 a été modifié. L’article 5 de la loi précise désormais que « La progression annuelle des dépenses de l’État n’excède pas, au cours de la période mentionnée à l’article 1er et à périmètre constant, hors effet de la loi n° 2009-122 du 4 février 2009 de finances rectificative pour 2009, l’évolution prévisionnelle des prix à la consommation, selon les modalités décrites dans le rapport annexé à la présente loi. Toutefois, cette progression s’établit à 0,1 % en volume en 2009 (42)».

B.– UN BILAN POSITIF MAIS UNE NORME DONT LE RESPECT RESTE SOUMIS À DES ALÉAS EXOGÈNES

 Si la loi de finances initiale pour 2008 respectait strictement la norme « zéro volume », l’exécution 2008(43) a été marquée par un dépassement de 4 milliards d’euros par rapport à la prévision.

LA NORME DE DÉPENSE DANS LA LOI DE FINANCES INITIALE POUR 2008 (PRÉVISION)

(en milliards d’euros)

 

LFI 2007

LFI 2008

Variation

en Mds€

en valeur

en volume

Dépenses nettes du budget général

266,9

271,3

     

Changements de périmètre

 

– 0,6

 

 

 

soit à périmètre constant (1)

266,9

271,9

+ 5,1

+ 1,9 %

+ 0,3 %

Prélèvements sur recettes Union européenne (2)

18,7

18,4

– 0,3

– 1,6 %

– 3,2 %

Prélèvements sur recettes collectivités territoriales

49,5

51,2

     

Changements de périmètre

 

+ 1,1

     

soit à périmètre constant (3)

49,5

50,1

+ 0,6

+ 1,3 %

– 0,3 %

Nouvelles affectations de recettes à des organismes publics (4)

 

0,1

     

Total à périmètre constant (1 + 2 + 3 + 4)

335,0

340,5

+ 5,5

+ 1,6 %

0,0 %

N.B. : La colonne « en volume » est calculée compte tenu d’une inflation prévisionnelle de 1,6 %.

LA NORME DE DÉPENSE DANS LA LOI DE RÈGLEMENT POUR 2008 (EXÉCUTION)

(en milliards d’euros)

 

LFI 2007

Exécution 2008

Variation

en Mds€

en valeur

en volume

Dépenses nettes du budget général

266,9

275,0

     

Changements de périmètre

 

– 0,6

 

 

 

soit à périmètre constant (1)

266,9

275,7

+ 8,8

+ 3,3 %

+ 0,5 %

Prélèvements sur recettes Union européenne (2)

18,7

18,7

n.s.

n.s.

– 2,8 %

Prélèvements sur recettes collectivités territoriales

49,5

51,2

     

Changements de périmètre

 

+ 1,1

     

soit à périmètre constant (3)

49,5

50,1

+ 0,6

+ 1,2 %

– 1,6 %

Nouvelles affectations de recettes à des organismes publics (4)

 

0,1

     

Total à périmètre constant (1 + 2 + 3 + 4)

335,0

344,6

+ 9,6

+ 2,9 %

+ 0,1 %

N.B. : La colonne « en volume » est calculée compte tenu d’une inflation réelle de 2,8 %.

La première source du dépassement des crédits votés en loi de finances initiale réside, pour 3,3 milliards d’euros, dans l’évolution de la charge de la dette de l’État. À 44,5 milliards d’euros, celle-ci a largement excédé la prévision initiale de 41,2 milliards d’euros(44). Ce dépassement s’explique à hauteur de près de 2,5 milliards d’euros par l’exceptionnelle hausse des prix constatée au premier semestre 2008 (2,8 % en moyenne annuelle au lieu de 1,6 % prévu en loi de finances initiale), qui a pesé sur la fraction des titres indexés sur l’inflation (OATi et BTANi), qui représentaient 15,2 % de la dette à moyen et long terme à la fin 2007. La revalorisation des emprunts en fonction de l’inflation crée pour l’État une charge d’indexation qui dépend du niveau de l’inflation à la date anniversaire des titres, soit le 25 juillet de chaque année : en l’occurrence, le surcroît d’inflation observé entre le 25 juillet 2007 et le 25 juillet 2008(45) a porté cette charge à 4,6 milliards d’euros, au lieu de 2,2 milliards d’euros prévus initialement.

La deuxième source de dépassement de la norme, à hauteur de 815 millions d’euros, tient à l’accroissement du besoin de financement de l’État entraîné par l’augmentation du déficit en gestion, à l’absence de réalisation de cessions d’actifs permettant d’alléger la dette, au préfinancement des mesures de soutien au secteur bancaire et du plan de relance de l’économie et aux tensions sur les marchés entraînées par la crise financière (46). Après retranchement de 156 millions d’euros d’excédents dégagés par les opérations d’échanges de taux d’intérêt, la charge de la dette après swaps a atteint 44,3 milliards d’euros en 2008, soit 5 milliards d’euros de plus qu’en 2007.

Hors charge de la dette, la troisième source de dépassement entre la prévision et l’exécution 2008 s’établit à 496 millions d’euros. Elle est essentiellement imputable au dérapage des dépenses de la mission Solidarité, insertion et égalité des chances, qui ont atteint 13,1 milliards d’euros, à comparer à 12 milliards d’euros de crédits initiaux. En particulier, les dépenses de guichet du programme Prévention de l’exclusion et insertion des personnes vulnérables ont excédé les crédits initiaux de 625 millions d’euros (dont 379 millions d’euros au titre de la prime de noël aux bénéficiaires du RMI), de même que celles du programme Handicap et dépendance qui ont dépassé l’enveloppe initiale de 347 millions d’euros, sous l’effet principalement du dynamisme de l’allocation aux adultes handicapés (AAH). Ce surcoût de 1,1 milliard d’euros n’a pu être que partiellement compensé par diverses économies sur les dépenses hors titre 2 des autres programmes (soit environ 0,3 milliard d’euros) et sur les dépenses de personnel (soit environ 0,3 milliard d’euros).

Au total, les dépenses de l’État prises en compte dans la norme ont donc atteint 344,6 milliards d’euros en 2008. Par conséquent, l’exécution 2008 s’est traduite par une progression des dépenses par rapport à 2007 de 9,6 milliards d’euros à périmètre constant (+ 2,9 % en valeur), qui s’est traduite par une légère progression en volume des dépenses de l’État (+ 0,1 % en volume) : aux 8,8 milliards d’euros de dépenses supplémentaires sur le budget général s’ajoute en effet une progression par rapport à 2007 de 0,6 milliard d’euros des prélèvements sur recettes (dont 0,3 milliard au profit de l’Union européenne non prévu en loi de finance initiale) et de 0,1 milliard au titre des affectations de recettes.

Au total, si l’année 2008 se traduit par une légère augmentation en volume des dépenses de l’État (+ 0,1 %), l’essentiel de cette hausse résulte de facteurs exogènes difficilement prévisibles au moment de la préparation du projet de loi de finances.

● L’exécution 2009(47) a, elle, été marquée par le fait que, hors dépenses de relance, la norme de dépense a non seulement été tenue mais est en recul de 259 millions d’euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2009 (– 0,1 %).

Ce constat vaut également, de façon encore plus nette, pour la consommation des seules dépenses nettes du budget général, qui s’est avérée inférieure de 1,5 milliard d’euros (– 0,5 %) à l’autorisation parlementaire. Les prélèvements sur recettes ont, en revanche, excédé les prévisions initiales de 1,2 milliard d’euros, du fait principalement du prélèvement au profit de l’Union européenne – qui a atteint près de 20 milliards d’euros, au lieu de 18,9 milliards d’euros dans la loi de finances initiale.

LES DÉPENSES DE L’ÉTAT EN 2009

(en milliards d’euros)

     

Variation

 

LFI
2009

Exécution 2009

En Mds€

En valeur

Périmètre de la norme de dépense

       

Dépenses totales

348,2

363,6

+ 15,4

+ 4,4 %

Dépenses hors relance

348,2

348,0

– 0,3

– 0,1 %

dont PSR hors anticipation du FCTVA

71,1

72,3

+ 1,2

+ 1,7 %

Dépenses du budget général

       

Dépenses totales

277,1

287,4

+ 10,4

+ 3,7 %

Dépenses hors relance

277,1

275,6

– 1,5

– 0,5 %

Ces résultats sont d’autant plus remarquables que l’État a procédé à une importante opération d’apurement de dettes de l’État à l’égard de la sécurité sociale à hauteur de 3,8 milliards d’euros, dont 3,2 milliards d’euros sur des crédits ouverts dans la dernière loi de finances rectificative pour 2009 (48).

Le Rapporteur général rappelle néanmoins que ce bon résultat s’explique principalement par des facteurs exogènes, qui masquent une progression des dépenses de l’État beaucoup plus importante que celle prévue en loi de finances initiale.

D’une part, la norme d’évolution en volume des dépenses de l’État avait été fixée à + 0,1 % dans la loi de finances initiale pour 2009 (49), ce qui correspondait, compte tenu d’une inflation prévisionnelle de 1,5 %, à une progression en valeur de 1,6 % par rapport aux dépenses de la loi de finances initiale pour 2008 (50) (+ 5,5 milliards d’euros à périmètre constant).

Or, en exécution 2009, l’inflation a été très sensiblement inférieure, pour s’établir à 0,1 % en moyenne annuelle. En prenant en compte ce niveau effectif d’inflation (voir tableau ci-après), la progression des dépenses de l’État en 2009 par rapport aux dépenses votées en loi de finances initiale pour 2008 s’établirait donc, non plus à 0,1 %, mais à 1,5 % en volume (+ 5,3 milliards d’euros à périmètre constant).

LA NORME DE DÉPENSE DANS LA LOI DE RÈGLEMENT EN 2009

 

LFI

2008

Exécution
2009

Variation

en Mds€

en valeur

en volume (a)

en volume (b)

Dépenses nettes du budget général

271,3

275,6

       

Changements de périmètre

 

1,6

       

soit à périmètre constant (1)

271,3

274,0

2,7

1,0 %

-0,5 %

0,9 %

Prélèvements sur recettes Union européenne (2)

18,4

20,0

1,6

8,7 %

7,2 %

8,6 %

Prélèvements sur recettes collectivités territoriales

51,2

52,4

       

Changements de périmètre

 

0,1

       

soit à périmètre constant (3)

51,2

52,2

1,0

2,0 %

0,5 %

1,9 %

Nouvelles affectations de recettes à des organismes publics (4)

 

-0,1

 

 

 

 

Total à périmètre constant (1 + 2 + 3 + 4)

340,9

346,2

5,3

1,56%

0,1%

1,5%

(a) Calcul avec le taux d’inflation prévisionnel de +1,5 %

(b) Calcul avec le taux d’inflation réel de +0,1 %

En revanche, par rapport à l’exécution 2008, l’augmentation globale des dépenses en 2009 apparaît plus limitée : elle s’établit, à périmètre constant, à 1,3 milliard d’euros, soit 0,4 % en valeur et 0,3 % en volume.

Le Rapporteur général constate toutefois que cette évolution est entièrement imputable au dynamisme des prélèvements sur recettes, et en particulier à celui au profit de l’Union européenne.

LA NORME DE DÉPENSE ENTRE L’EXÉCUTION 2008 ET L’EXÉCUTION 2009

(en milliards d’euros)

 

Exécution

2008

Exécution
2009

Variation

en Mds€

en valeur

en volume

Dépenses nettes du budget général

275,0

275,6

 

 

 

Changements de périmètre

 

1,6

 

 

 

soit à périmètre constant (1)

275,0

274,0

-1,0

-0,4 %

-0,5 %

Prélèvements sur recettes Union européenne (2)

18,7

20,0

1,3

6,9 %

6,8 %

Prélèvements sur recettes collectivités territoriales

51,2

52,4

 

 

 

Changements de périmètre

 

0,1

 

 

 

soit à périmètre constant (3)

51,2

52,2

1,0

2,0 %

1,9 %

Nouvelles affectations de recettes à des organismes publics (4)

 

-0,1

 

 

-0,1%

Total à périmètre constant (1 + 2 + 3 + 4)

344,9

346,2

1,3

0,4%

0,3%

N.B. : La colonne « en volume » est calculée compte tenu d’une inflation réelle de 0,1 %

D’autre part, la charge de la dette de l’État en 2009 avait été fixée à 42,9 milliards d’euros dans la loi de finances initiale pour 2009 compte tenu d’une inflation prévisionnelle de 1,5 %. La principale source d’économie ayant permis de respecter la norme de dépense en 2009 réside donc dans l’extrême sensibilité de la charge de la dette au taux d’inflation réel et aux taux d’intérêt. Ainsi, avec un taux d’inflation réel de 0,1 % et des taux d’intérêt en baisse, l’État a bénéficié d’une économie de 5,4 milliards d’euros par rapport à la prévision. Force est de constater que cet élément est indépendant de l’action du Gouvernement et qu’il ne reflète en rien un effort supplémentaire de maîtrise de la dépense publique.

LA CHARGE DE LA DETTE DE L’ÉTAT EN 2009 : DE LA PRÉVISION À L’EXÉCUTION

(en milliards d’euros)

 

LFI 2009

Exécution
2009

Écart

Charge brute dette négociable

45,4

40,3

– 5,0

Charge brute dette non négociable

n.s.

n.s.

n.s.

Charge brute gestion de la trésorerie

0,5

0,5

+ 0,1

Total charge brute

45,9

40,9

– 5,0

Recettes d’ordre

2,9

3,3

+ 0,4

Total charge nette (hors swaps)

43,0

37,6

– 5,4

Solde opérations swaps

0,1

0,1

+ 0,1

Total charge dette nette (après swaps)

42,9

37,5

– 5,4

Enfin, le Rapporteur général a déjà eu l’occasion de démontrer qu’en 2009 les dépenses de personnel ont été moins bien maîtrisées que prévu. C’est grâce à la sous-exécution des dépenses de pensions, dans un contexte de départ à la retraite moins nombreux qu’escompté, que le montant total des dépenses de personnel est inférieur de 0,3 milliard d’euros aux crédits votés en loi de finances initiale.

Ce facteur exogène masque lui aussi une augmentation des dépenses de personnel hors pensions supérieur à la prévision (85 milliards d’euros au lieu de 84,4 milliards d’euros) (51).

DÉPENSES DE PERSONNEL : DE LA PRÉVISION À L’EXÉCUTION

(en milliards d’euros)

 

LFI
2009

Exécution 2009

Écart

Rémunérations d’activité

71,6

72,2

+ 0,5

Cotisations et contributions sociales

46,6

46,0

– 0,5

dont contributions au CAS Pensions

35,1

34,2

– 0,9

Prestations sociales et allocations diverses

1,3

1,0

– 0,3

Total

119,5

119,2

– 0,3

Total hors pensions

84,4

85,0

+ 0,6

Ce bilan de la mise en œuvre de la norme de dépense « zéro volume » montre que depuis 2008, l’État a toujours respecté cette norme en prévision et a globalement réussi à maîtriser l’évolution de ses dépenses en dépit de la crise qui aurait pu être propice au relâchement de cette rigueur.

Cependant, l’examen détaillé de l’exécution 2008 et 2009 met en évidence le fait que le respect de la norme par rapport à la prévision dépend très largement de trois facteurs exogènes : l’hypothèse d’inflation compte tenu de l’extrême sensibilité de la charge de la dette, la prévision du nombre de départs à la retraite qui conditionne l’évolution des dépenses de pensions et la progression du prélèvement sur recettes au profit de l’Union européenne.

Compléter la norme de dépense « zéro volume » par une norme de dépense « zéro valeur hors dette et pensions » constitue donc un progrès considérable en faveur d’un meilleur pilotage des dépenses sur lesquelles l’État a directement la maîtrise dès lors qu’il est fait le choix d’appliquer la norme la plus contraignante compte tenu des aléas décrits précédemment.

II.– UN DOUBLE ENCADREMENT DE L’ÉVOLUTION DES DÉPENSES DE L’ETAT AU SERVICE DE LA REDUCTION DU DÉFICIT A COMPTER DE 2011

A.– L’ARTICULATION ENTRE LA NORME DE STABILISATION EN VOLUME ET LA NORME DE STABILISATION EN VALEUR DES DÉPENSES

1.– Les principes de fonctionnement des règles « 0 volume » et « 0 valeur » en cas d’évolution des hypothèses d’inflation, de dette et de pensions.

Pour assurer la contribution de l’État au redressement des finances publiques, le présent article fixe une règle de stabilisation en euros courants (« zéro valeur ») des crédits budgétaires et des prélèvements sur recettes, hors charge de la dette et pensions des fonctionnaires de l’État par rapport au montant de ces dépenses retenues en loi de finances initiale pour 2010, soit 274,84 milliards d'euros.

Par ailleurs, en incluant ces deux postes de dépenses, l’augmentation annuelle des crédits sera au maximum égale à l’inflation (« zéro volume ») sur le périmètre de la norme élargie, soit 352,6 milliards d’euros de crédits et prélèvements sur recettes en loi de finances initiales (LFI) pour 2010 .

Le rapport annexé au présent projet de loi de programmation précise que « quelles que soient ces hypothèses, les plafonds de dépenses résultant des normes « 0 volume » et « 0 valeur hors dette et pensions » seront respectés, la règle la plus contraignante des deux étant retenue pour chaque année.

Ainsi, en 2011, la programmation est plus contraignante que le « 0 volume », puisque les crédits diminueront en euros constants de près de 0,2 %. Les années suivantes, si les prévisions de dépenses relatives à la charge de la dette et aux pensions le permettent, le plafond global de crédits sera révisé à la baisse par rapport à celui déterminé par l’application du « 0 volume », ce qui contribuera au désendettement de l’État.

À l’inverse, si les variations de prévisions d’inflation, dette et pensions ne permettaient plus de respecter le plafond global « 0 volume », et alors même que les crédits sur le périmètre « hors dette et pensions » respecteraient la règle du « 0 valeur », les plafonds des crédits des missions seraient révisés à la baisse de manière à respecter la norme « 0 volume ».

Ces ajustements seraient opérés conformément au cadrage fixé par le premier ministre au début de la procédure budgétaire».

Cela signifie, en pratique, qu’en cas de surcroît d’inflation, la norme de dépense la plus contraignante serait la norme « zéro valeur ». Appliquer cette norme supposera donc un effort de maîtrise des crédits du budget général hors dette et pensions d’autant plus important que les dépenses de guichet indexées sur les prix de certaines missions évolueront à la hausse. Il s’agit par exemple des crédits des missions Ville et Logement (aides au logement), Travail et emploi (contrats aidés), Régimes sociaux de retraite (subvention d’équilibre fonction de l’évolution des pensions des régimes spéciaux, elles-mêmes indexées) et Solidarité, Insertion et égalité des chances (revenu de solidarité active, allocation adultes handicapés). Il conviendra donc de compenser la hausse de ces dépenses par une baisse corrélative d’autres dépenses du budget général, à commencer par les autres dépenses non indexées de ces missions conformément au principe d’auto-assurance.

À l’inverse, dans une hypothèse d’inflation basse voire quasi-nulle, comme en 2009, la norme de dépenses la plus contraignante serait la norme « zéro volume ». Compte tenu du poids de la charge de la dette et des pensions au sein du périmètre de dépense élargi, le respect de cette norme devrait légitimement provoquer une réduction des plafonds de crédits des missions comprenant des dotations dont l’évolution est directement corrélée à l’inflation.

Le Rapporteur général en conclut donc que les deux normes de dépenses fixées par l’article 5 du présent projet de loi peuvent ne pas s’appliquer de façon cumulative dès lors que l’évolution de l’inflation, des charges de la dette ou des pensions du budget triennal ne seraient pas conformes aux prévisions fixées par le présent projet de loi de programmation.

Ces deux normes d’évolution des dépenses de l’État doivent en fait être considérées comme complémentaires. Elles seraient compatibles en toutes circonstances s’il était précisé qu’en tout état de cause les dépenses hors dette et pensions sont au plus égales à une stabilisation en valeur au regard des montants inscrits en loi de finances initiale pour 2010.

Ainsi, quelle que soit l’évolution des hypothèses sous jacentes à la loi de programmation, il ne serait plus possible de recycler au profit de dépenses ordinaires une progression de la charge de la dette ou des pensions par rapport aux estimations prévues. L’introduction d’une règle « zéro valeur » garantit donc que les économies ainsi dégagées serviront à la réduction du déficit et viendront donc participer à l’effort de consolidation structurelle de nos finances publiques.

2.– La mise en œuvre des règles « 0 volume » et « 0 valeur » dans le cadre du budget triennal 2011-2013

Les perspectives budgétaires pour 2011-2014 confirment l’ampleur des économies à réaliser pour permettre le respect cumulatif de la norme de dépense en volume et de la norme de dépense en valeur. Comme le niveau prévisionnel d’inflation dans le projet de loi de finances pour 2011 est légèrement inférieur à celui figurant dans le dernier programme de stabilité (soit 1,5 % au lieu de 1,6 %), l’augmentation des dépenses de l’État par rapport à la loi de finances initiale pour 2010 sera limitée à environ 5,3 milliards d’euros l’année prochaine.

CALCUL DE LA NORME DE DÉPENSE POUR 2011

(en milliards d’euros)

Dépenses prévues en LFI 2010 (au format PLF 2011)

 

Dépenses nettes du budget général (hors relance)

281,1

PSR Union européenne

18,2

PSR collectivités locales (hors relance FCTVA et hors compensation relais TP)

53,0

Dépenses totales (1)

352,3

Inflation prévisionnelle 2011

 

Indice des prix à la consommation hors tabac (programme de stabilité) (2)

1,5 %

Dépenses supplémentaires autorisées dans le PLF 2011 (1) x (2)

5,3

Or, la totalité de cette marge de manœuvre sera absorbée par une augmentation des intérêts de la dette d’environ 3,5 milliards d’euros et par une progression des charges de pension d’environ 2 milliards d’euros en 2011.

Il en sera d’ailleurs de même entre 2012 et 2013 malgré une prévision d’inflation plus élevée (1,75 % en moyenne annuelle). En effet, sur la période du budget triennal, les charges d’intérêt de la dette, malgré les perspectives de réduction du déficit budgétaire, devraient augmenter en valeur de 30 % d’ici 2013. Cette évolution résulte d’abord d’un fort effet volume lié à l’augmentation de l’encours de dette depuis 2009. Elle s’explique également, les années suivantes, par l’augmentation prévisionnelle des taux d’intérêt, dont l’ampleur et le moment exacts restent cependant soumis à incertitudes.

Concernant les départs en retraite de fonctionnaires, ils restent très nombreux sur la période. Les dépenses de pensions resteront donc dynamiques sur les trois années de la programmation (+12,9 % d’ici 2013) du fait des facteurs démographiques structurels et des revalorisations liées à l’inflation. Néanmoins, le budget triennal 2011-2013 intègre l’impact du projet de loi relatif à la réforme des retraites. La prise en compte de l’incidence des mesures d’âge et de l’augmentation progressive des cotisations salariales des fonctionnaires permet ainsi de limiter la progression moyenne annuelle des contributions du budget général aux dépenses de pensions à 4 % en valeur, contre 5 % hors réforme.

Compte tenu de ces deux éléments, la stabilisation en valeur de l’ensemble des autres dépenses de l’État est une nécessité pour respecter l’engagement pris vis-à-vis de nos partenaires européens de stabiliser en volume l’ensemble des dépenses de l’État sur la période 2011-2013 comme le montre le tableau ci-après.

NORME DE DÉPENSE SUR LA PÉRIODE 2011-2013

Dépenses

Montants à périmètre constant
(en milliards d'euros)

Évolution en valeur

 

LFI 2010

2011

2012

2013

LFI 2010

2011

2012

2013

Moyenne 2011-2013

1. Budget général

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Charge de la dette

42,45

45,38

50,51

55,19

42,45

+6,9 %

+11,3 %

+9,3 %

+9,2 %

Pensions

35,06

36,66

37,86

39,58

35,06

+4,6 %

+3,3 %

+4,5 %

+4,1 %

Personnel hors pensions

82,07

82,74

82,45

81,88

82,07

+0,8 %

-0,4 %

-0,7 %

-0,1 %

Provisions

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Autres dépenses BG

121,54

120,92

120,27

120,24

121,54

-0,5 %

-0,5 %

-0,0 %

-0,4 %

Total BG

281,12

285,70

291,09

296,89

281,12

+1,6 %

+1,9 %

+2,0 %

+1,8 %

Évolution en volume

 

0,1%

0,1%

0,2%

 

 

 

 

 

2. PSR

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Collectivités locales

53,08

52,89

52,98

53,06

53,08

-0,4 %

+0,2 %

+0,2 %

-0,0 %

Union européenne

18,15

18,24

19,08

19,60

18,15

+0,5 %

+4,6 %

+2,7 %

+2,6 %

Total PSR

71,23

71,13

72,06

72,66

71,23

-0,1 %

+1,3 %

+0,8 %

+0,7 %

Évolution en volume

 

-1,6%

-0,4%

-0,9%

 

 

 

 

 

3. Affectations de recettes

 

0,06

0,06

0,06

 

 

 

 

 

Total norme élargie

352,35

356,89

363,21

369,61

352,35

+1,3 %

+1,8 %

+1,8 %

+1,6 %

Évolution en volume

 

-0,2%

0,0%

0,0%

 

 

 

 

 

N.B. : La colonne « en volume » est calculée compte tenu d’une inflation prévisionnelle de 1,5 % en 2011 et 1,75 % en 2012 et 2013.

Le respect de la norme « zéro valeur » représente donc un effort inédit par rapport aux exercices précédents puisque les dépenses, hors dette et pensions n’augmenteront pas alors qu’elles ont connu une évolution moyenne, entre 2006 et 2010, d’environ 2,9 milliards d’euros par an.

B.– UNE RÉDUCTION DU TRAIN DE VIE DE L’ETAT

Compte tenu de la progression tendancielle de certaines dépenses de l’État hors charge de la dette et des pensions, le respect de la norme « zéro valeur » sur la période de programmation impose de réduire le train de vie de l’État à travers la stabilisation ou la réduction de certaines de ces dépenses. Au total, les économies envisagées s’élèvent à plus de 12 milliards d’euros sur trois ans.

1.– Stabiliser les dépenses de personnel hors pensions

Comme l’indiquait déjà le Rapporteur général à l’occasion du débat d’orientation des finances publiques (52), la maîtrise des emplois et de la masse salariale (53) est encore loin d’être assurée : les dépenses de personnel hors pensions (qui représente près de 30 % des dépenses du budget général) ont excédé les crédits votés en loi de finances initiale d’environ 0,6 milliard d’euros et augmenté par rapport à 2008 d’environ 0,8 milliard d’euros à périmètre constant.

Les seules économies offertes chaque année par le non remplacement d’un fonctionnaire partant à la retraite sur deux (environ un milliard d’euros d’économies brutes en 2009, soit 0,5 milliard d’euros après la redistribution de 50 % au bénéfice des agents) ne suffisent manifestement pas à garantir un « autofinancement » de la masse salariale de l’État.

Par conséquent, l’introduction d’une norme « zéro valeur » dans le présent article impose non seulement de poursuivre cette politique sur l’ensemble de la période de la programmation mais également de la compléter par une meilleure maîtrise de l’évolution des rémunérations.

a) Poursuivre le non remplacement d’un fonctionnaire partant à la retraite sur deux

Les nouvelles mesures et réformes de modernisation du service public annoncées le 30 juin 2010 et la poursuite des réformes décidées par les CMPP de l’année 2008 conduiront à ne pas remplacer près de 100 000 départs en retraite sur la période 2011-2013, soit – 31 600 ETP en 2011, – 33 000 ETP en 2012 et –33 100 ETP en 2013. Tous les ministères seront concernés à l’exception des ministères de la recherche et de la justice même si l’effet demandé est variable selon les gains de productivité attendus de la nouvelle vague de la RGPP.

Ce niveau correspond à la poursuite du non remplacement d’un fonctionnaire partant à la retraite sur deux sur l’ensemble des trois années du budget triennal, selon des prévisions de départ à la retraite qui s’élèvent à 62 000 ETP en 2011, 63 300 ETP en 2012 et 62 900 ETP en 2013.

Cette réduction des effectifs permettra à l’État de réaliser une économie de près de trois milliards d’euros sur la période 2011-2013. La moitié de cette économie, soit environ 1,5 milliard d’euros, profitera aux agents, sous forme d’un « intéressement » permettant de poursuivre le financement des mesures catégorielles décidées précédemment.

Une autre manière d’apprécier l’impact des réductions d’effectifs consiste à raisonner en engagements de long terme de l’État, c’est-à-dire en fonction des réalisations d’économie de masse salariale sur quarante années d’activité de l’agent puis d’économie sur le versement de sa pension. Selon le ministère du Budget, cet engagement de long terme pour le recrutement d’un fonctionnaire serait de l’ordre d’un million d’euros en valeur actuelle. Renoncer à 100 000 recrutements permettrait ainsi d’éviter 100 milliards d’euros d’engagements implicites de l’État.

Le Rapporteur général appelle également à la vigilance quant à l’évolution des emplois des opérateurs de l’État sur la période 2011-2013 : ils doivent désormais participer réellement à l’effort de réduction des effectifs. L’objectif est donc d’aligner leurs efforts de gestion sur ceux de l’État.

Les 584 opérateurs de l’État sont des organismes aux statuts divers (établissements publics, associations, groupements d’intérêt public notamment), chargés de mettre en oeuvre des politiques publiques grâce à un financement assuré majoritairement par l’État. Le poids stratégique et budgétaire de ces opérateurs n’a cessé de croître. Ils reçoivent aujourd’hui près de 34 milliards d’euros de subventions et de ressources fiscales, emploient plus de 250 000 personnes (hors universités) et mettent en oeuvre une part croissante des politiques de l’État.

Or, le dernier rapport annuel sur l’état de la fonction publique(54) montre en effet que, si l’emploi public au sein de la fonction publique d’État continue de baisser (– 3,1 % entre 2007 et 2008), l’effort de réduction des effectifs est en pratique supporté par les ministères (– 3,9 %). En revanche, les établissements publics administratifs (EPA), qui représentent 57 % des opérateurs de l’État, ont vu leurs effectifs progresser de 3 %. Au total, à la fin de l’année 2008, la fonction publique de l’État voit ses effectifs reculer de 77 493 agents malgré une augmentation des effectifs des EPA de 8 878 agents.

Cette situation s’explique par le fait que les agents, titulaires ou non titulaires, attribués aux opérateurs sont uniquement ceux rémunérés sur le budget propre des établissements. En mode LOLF, il s’agit des personnels des opérateurs de l’État non décomptés dans le plafond d’emplois des ministères de tutelle. En 2010, l’évolution des emplois de tous les opérateurs hors plafond est de + 6 209 ETP. Les transferts de personnels vers des opérateurs apparaissent ainsi comme un moyen commode de contourner les plafonds d’emplois, ce qui n’est plus acceptable à l’avenir.

Le Rapporteur général note donc avec satisfaction que le Gouvernement s’est engagé à ce que la règle du non remplacement d’un fonctionnaire partant à la retraite sur deux soit déclinée et adaptée au niveau des opérateurs de l’État afin qu’ils réalisent le même niveau de gain de productivité que l’État, ce qui se traduit par une réduction de 1,8 % des effectifs par an, hors universités et établissements de recherche (soit une réduction de 2600 équivalents temps plein dès 2011).

b) Assurer un meilleur pilotage de la masse salariale

Le traitement de base de chaque fonctionnaire est calculé en multipliant un indice représentatif de son classement hiérarchique par un montant en euro, le « point » de la fonction publique, identique pour tous. Sa revalorisation annuelle a un impact sur le traitement de base mais aussi sur une grande partie des compléments salariaux. De plus, chaque année, des fonctionnaires passent à des indices supérieurs des grilles, du fait de leur ancienneté ou de promotions. Ce « glissement vieillesse technicité » (GVT) « positif » représente une augmentation de 1,9 % par an des rémunérations sur les dix dernières années(55). Enfin, des avantages spécifiques à des corps, des ministères ou des catégories particulières de fonctionnaires (comme ceux qui ont les salaires les plus bas), notamment des primes, sont accordés chaque année.

Comme le souligne la Cour des comptes dans son rapport sur les perspectives des finances publique (56), au total, le salaire moyen brut par tête a progressé de 2,2 % par an de 1999 à 2009 pour une inflation annuelle de 1,7 %. Une telle évolution n’est pas soutenable dans une perspective de réduction des déficits publics et de maîtrise de la masse salariale.

Plusieurs mesures doivent donc être mises en œuvre pour parvenir à l’objectif d’un gel en valeur des dépenses de personnel hors charge de pensions. Le gel du point d’indice en 2011 constitue une mesure dont l’impact est fort et rapide. En effet, chaque augmentation de 1 % de la valeur du point accroît de 800 millions d’euros la charge de la masse salariale de l’État et d’environ 1 milliard celle des collectivités locales et des hôpitaux.

Le Gouvernement a cependant annoncé que le pouvoir d’achat des agents publics continuera de progresser globalement (+ 1,5 % en 2011), sous l’effet des évolutions automatiques des carrières des fonctionnaires, des promotions individuelles, et des mesures catégorielles interministérielles et ministérielles. Pour les agents dont la progression au sein de la grille ne permettrait pas le maintien du pouvoir d’achat, le Gouvernement prolongera sur l’ensemble de la période 2011-2013 le mécanisme de garantie individuelle du pouvoir d’achat (GIPA). Ainsi, la GIPA interviendra chaque année, de 2011 à 2013, sous la forme d’un examen de la situation de l’ensemble des agents.

Le Gouvernement anticipe ainsi, après un léger ressaut en 2011, une diminution de la masse salariale de l’État en valeur en 2012 et 2013, à périmètre constant (c'est-à-dire hors mesures de transferts et de décentralisation) de 0,4 % en fin de période de programmation par rapport à la loi de finances initiale pour 2010 (soit une économie de 400 millions d’euros d’ici 2013).

Le Rapporteur général souligne que, s’il est justifié de maintenir le pouvoir d’achat des fonctionnaires, encore faudra-t-il veiller à ne pas aller au-delà d’un taux de progression égal au taux d’inflation. En tout état de cause, aucune dérive de la masse salariale n’est permise sur la période 2011-2013.

2.– Réduire de 10 % sur trois ans les dépenses de fonctionnement et d’intervention

a) Une réduction de 10 % des dépenses de fonctionnement d’ici 2013 dont 5 % en 2011

L’assiette des dépenses de fonctionnement de l’État prise en considération pour calculer le montant des économies à réaliser porte sur les dépenses relevant de la catégorie 31 Dépenses de fonctionnement autres que celles du personnel (18,3 milliards d’euros) au sein des dépenses du titre 3 Dépenses de fonctionnement.

Le rapport annexé au présent projet de loi précise toutefois que pour apprécier les efforts de productivité retenus dans le cadre du budget triennal sur le fonctionnement de l’État, il convient d’isoler les crédits de fonctionnement de la mission Défense (7,8 milliards d’euros en 2010), traités globalement dans le cadre de la loi de programmation militaire, ainsi que les crédits de la mission Administration générale et territoriale de l’État relatifs à la vie politique cultuelle et associative (0,2 milliard d’euros en 2010), en raison du ressaut lié à l’organisation des élections de 2012.

Retraitée de ces éléments, l’assiette des crédits de fonctionnement sur laquelle portent les efforts de productivité retenus pour la programmation du budget triennal s’élève à près de 10,3 milliards d’euros. Sur cette assiette, en s’appuyant sur les résultats des travaux conduits dans le cadre de la RGPP, la programmation retient dès 2011 des gains de productivité de 5 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2010, soit une économie globale de 500 millions d’euros. L’économie nette sera cependant de 200 millions d’euros en 2011, compte tenu de la mobilisation de moyens nouveaux, à hauteur d’environ 300 millions d’euros, destinés à couvrir l’organisation des G8 et G20 sous présidence française et à respecter les engagements pris sur la mission Justice.

Le Rapporteur Général en déduit que les économies attendues sur l’assiette des dépenses de fonctionnement retenue par le Gouvernement s’élèvent à 1,03 milliard d’euros sur la période 2011-2013 (dont 200 millions d’euros en 2011). Compte tenu de l’effort de redressement des finances publiques à fournir pour respecter la norme d’évolution des dépenses publiques fixée par l’article 4 du présent projet de loi (+0,8 % par an) (57), il faut ici regretter le fait que l’État ne se soit pas engagé à réduire les dépenses de fonctionnement de ses opérateurs qui peuvent être financées grâce aux dépenses retracées dans la catégorie 32 Subventions aux opérateurs du titre 3 Dépenses de fonctionnement (dont le montant total s’élève à 25,5 milliards d’euros en 2010).

Les opérateurs devraient en effet être entièrement associés à l’ensemble des mesures d’économies pesant sur les services de l’État. Or, à la date de rédaction du présent rapport, aucune information chiffrée ou étayée par opérateurs n’aura été adressée au Rapporteur général.

b) Une réduction de 10 % des dépenses d’intervention d’ici 2013

Au total, les dépenses d’intervention de l’État s’élèvent à près de 66 milliards d’euros. Une réduction de 10 % sur trois ans suppose de réaliser plus de 8,5 milliards d’économies entre 2011 et 2013 compte tenu de la croissance tendancielle de certaines dépenses.

Les mesures annoncées par le Gouvernement pour réduire les dépenses d’intervention de l’État sont traitées différemment selon qu’il s’agit de « dépenses de guichet », qui sont versées automatiquement dès lors que le bénéficiaire répond à des conditions définies par des textes, et des dépenses « hors guichet », pour lesquelles le niveau de la dépense peut être piloté de manière discrétionnaire par les ministères.

 Les dépenses de guichet

La maîtrise de la dépense doit passer par une modification des paramètres législatifs ou réglementaires qui régissent le niveau et les conditions d’ouverture des droits aux prestations, ou par une optimisation des processus de gestion des prestations en cas de fortes disparités sur le territoire. Compte tenu de la dynamique des dépenses d’intervention, l’objectif est celui de la stabilisation des dépenses sur la période 2011-2013, ce qui impose de réaliser des économies substantielles.

Cette dynamique tendancielle à la hausse peut avoir plusieurs origines, du fait par exemple :

– des mécanismes d’indexation automatique des prix (par exemple pour les loyers) ou des prestations (les allocations logement, certains minima sociaux…) ;

– des effets volume sur le nombre de bénéficiaires d’interventions servies par l’État (pour l’allocation adulte handicapé et les exonérations de cotisations sociales…) ;

– de l’incidence pluriannuelle de décisions déjà prises (par exemple en matière d’investissements ou du fait des contrats de projet État-régions).

Il s’ensuit que la stabilisation en valeur des dépenses d’intervention dites « de guichet » impose en fait à l’État de réaliser plus de 5,7 milliards d’économies sur la période de programmation pour contrecarrer la croissance tendancielle de ces dépenses.

STABILISATION DES INTERVENTIONS DE GUICHET ENTRE 2011 ET 2013

(en milliards d’euros)

 

2010

2011

2012

2013

Économies

2011-2013

Montant total

37,6

37,6

37,5

38

 

Économies attendues par rapport à l’année n-1

-

-1,7

-2,0

-2,0

-5,7

Progression tendancielle hors mesures d’économies

-

+1,6

+1,8

+2,3

+ 5,7

Or, compte tenu des informations transmises au Rapporteur général à la date de rédaction du présent rapport, il semblerait que les dispositifs de guichet que le Gouvernement souhaite revoir à la baisse ou supprimer ne généreront pas, à eux seuls, 5,7 milliards d’euros d’économies sur trois ans, en commençant par 1,7 milliard d’euros d’économies en 2011. En outre, le montant des économies attendues doit être apprécié avec prudence car il s’agit d’économies « brutes ».

SUPPRESSION OU RÉDUCTION DE CERTAINS GUICHETS

(en millions d’euros)

Dispositifs supprimés ou réduits

Mission

Modalités

Économies attendues

 

2011

2012

2013

Exonération de l’avantage en nature des repas des salariés du secteur HCR

Travail emploi

Suppression

121

166

172

Exonération des organismes d’intérêt général dans les ZRR

Travail emploi

Réduction aux seules structures de -10 employés

110,3

141,5

136

Exonération de 15 points des particuliers employeurs et régime spécifiques des structures agréées

Travail emploi

Suppression

440

661

704

Exonérations de cotisations sociales applicables au contrat initiative emploi

Travail emploi

Suppression

9

8

6

Exonération de cotisations sociales accordées aux jeunes entreprises innovantes

Recherche, enseignement supérieur

– plafonnement des rémunérations ;

– plafonnement par établissement

– sortie progressive au cours de la vie de l’entreprise

57

57

57

Exonération de la part salariale des cotisations sociales pour les salariés de moins de 26 ans, saisonniers agricoles

Agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales

Suppression

2,9

2,9

2,9

Intéressement spécifique de l’allocation de solidarité spécifique (ASS)

Travail emploi

Aligné sur celui du RSA

48

50

51

Allocation personnelle d’aides au logement (APL)

Ville et Logement

Alignement de la date d’ouverture des droits sur celle des minima sociaux

120

-

-

Contribution en faveur du fonds national au logement (FNAL)

Ville et logement

Harmonisation au taux de 0,5 %

86

86

86

Dispositifs supprimés ou réduits (suite)

Mission

Modalités

Économies attendues

2011 2012 2013

Réduction de la subvention versée au Fond national de solidarité active (FNSA)

Travail emploi

Utilisation des excédents du FNSA

200

300

300

Subvention au Fonds de solidarité

Travail emploi

Réduction compte tenu de l’extinction de certains dispositifs

200

200

200

Prestations aux anciens combattants

Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation

Diminution spontanée

100

100

100

TOTAL

 

1 494,2

1 772,4

1 814,9

TOTAL 2011-2013

5 081,2

● Les dépenses d’interventions discrétionnaires :

L’effort de maîtrise des dépenses publiques porte également sur les dépenses d’intervention discrétionnaires qui s’élèvent à 21,9 milliards d’euros en loi de finances initiale pour 2010. La révision systématique de celles-ci et la mise en oeuvre de réformes ambitieuses conduit à retenir la programmation suivante sur la période 2011-2013.

RÉDUCTION DES INTERVENTIONS DISCRÉTIONNAIRES ENTRE 2011 ET 2013

(en milliards d’euros)

 

2010

2011

2012

2013

Économies nettes cumulées

2011-2013

Montant total

21,9

21,3

20,2

19,1

 

Économies attendues par rapport l’année n-1 (en Md€)

-

– 0,7

– 1,1

– 1

– 2,8

Économies attendues par rapport à l’année n-1 (en %)

-

– 3 %

– 5 %

– 5 %

– 13 %

Il ressort du rapport annexé que le partage du financement de la formation professionnelle avec d’autres acteurs devrait permettre d’alléger les dépenses budgétaires de la mission Travail / Emploi à hauteur de 330 millions d’euros dès 2011 (30 millions d’euros d’économies en raison du transfert de compétences à l’association de gestion du fonds pour l’insertion professionnelle des personnes handicapées (58) et prélèvement de 300 millions d’euros sur le fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels (59)).

De plus, la réduction du nombre de contrats aidés (de 400 000 en 2010 à 340 000 en 2011, puis 270 000 en 2012 et 200 000 en 2013) et des taux de subvention par l’État (au niveau antérieur au plan de relance de l’économie) du fait des perspectives d’amélioration de la situation de l’emploi, devrait produire une économie importante des dépenses de la mission Travail / emploi. Le Rapporteur général ne peut que regretter que le montant de l’économie en résultant ne soit pas chiffré.

Par ailleurs, les aides aux associations départementales pour l’aménagement de structures et des exploitations agricoles (ADASEA) seront progressivement prises en charge par les chambres d’agricultures, réduisant d’autant les dépenses de l’État sur la mission Agriculture. De même, les dépenses d’intervention de la mission Sport, Jeunesse et vie associative seront sensiblement réduites (–16% en 2011, –20% en 2012 et –24% en 2013). Aucun chiffrage précis des économies attendues n’a cependant été communiqué au Rapporteur général.

3.– Maîtriser l’évolution des concours de l’État aux collectivités territoriales et à l’Union européenne

a) Geler en valeur les concours de l’État aux collectivités territoriales, hors FCTVA

Dans la mesure où l’effort de redressement des finances publiques engage l’ensemble des administrations publiques, État, administrations sociales et collectivités locales, la présente loi de programmation des finances publiques définit, en son article 7, une norme de stabilisation en valeur des concours de l’État aux collectivités territoriales, détaillée dans le commentaire sous l’article.

Le périmètre visé par la stabilisation en valeur des concours de l’État aux collectivités territoriales est constitué par :

– les prélèvements sur recettes au profit des collectivités locales, à l’exception du FCTVA et des dotations de compensation de la réforme de la taxe professionnelle ;

– les crédits du budget général de la mission Relations avec les collectivités territoriales ;

– et la dotation générale de décentralisation relative à la formation professionnelle inscrite sur la mission Travail et emploi.

Il faut par ailleurs noter la suppression du prélèvement sur recettes « amendes de la circulation » au profit des collectivités territoriales compte tenu de la création d’un compte d’affectation spéciale Contrôle de la circulation et du stationnement routier créé dans le cadre du projet de loi de finances pour 2011.

Concrètement, il en résulte que l’enveloppe en autorisations d’engagement des concours de l’État aux collectivités locales est stabilisée en valeur sur 2011-2014 au niveau de la LFI 2010 (au format du projet de loi de finances pour 2011), soit 50,45 millions d’euros. Par rapport à la progression de cette enveloppe entre 2009 et 2010, l’économie résultant du gel en valeur des concours de l’État aux collectivités territoriales pourrait ainsi atteindre 300 millions d’euros par an(60) soit 1,2 milliard d’euros en 2014.

b) Contenir l’évolution du concours de l’État à l’Union européenne

Alors que la Commission européenne a demandé à la France d’augmenter sa participation au budget de l’Union européenne de 6 % en 2011, le Gouvernement espère réussir à contenir cette augmentation à 2,7 % en valeur chaque année ce qui représenterait une augmentation de 500 millions d’euros par an du prélèvement sur recettes au profit de l’Union européenne.

*

* *

La Commission est saisie de l’amendement CF 19 du rapporteur général.

M. le rapporteur général. Cet amendement de précision tend à remplacer le terme de « crédits », propre à l’administration, par celui de « dépenses », que tout un chacun peut aisément comprendre. J’observe, au demeurant, que l’article 4 fait référence à l’évolution des « dépenses » des administrations. Pour montrer que nous réalisons un effort de maîtrise des dépenses, c’est ce terme que nous devons utiliser.

M. Charles de Courson. Ce ne sont pas des dépenses que nous votons, mais des autorisations de dépenses. Je préférerais que l’on retienne cette dernière expression.

M. le rapporteur général. Lorsque nous votons la loi de règlement, nous examinons quel a été le niveau des dépenses : nous vérifions qu’elles n’ont pas dépassé les enveloppes de crédits. La notion de dépense prévaut d’un bout à l’autre de la chaîne.

M. Charles de Courson. Je rappelle que le Parlement n’a pas compétence pour voter des dépenses : il ne vote que des autorisations. C’est le pouvoir exécutif qui dépense !

M. le rapporteur général. Le projet de loi comporte une programmation précise, qui est formulée en termes budgétaires – on distingue ainsi les crédits de paiement et les autorisations d’engagement –, mais il fixe également des règles de gouvernance, relatives aux dépenses et opposables à l’exécutif. Dans ce domaine, il faut parler un langage que tout le monde comprend.

M. le ministre. Avis favorable.

La Commission adopte l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement CF 3 de M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. Nous proposons de supprimer la mention : « hors charge de la dette et hors contribution aux pensions des fonctionnaires de l’État ». Il est faux de penser que les dépenses de pensions sont inéluctables : il s’agit d’une dépense, que nous tendons à modifier grâce à la réforme en cours. En outre, il faut raisonner en termes d’enveloppe globale : si les dépenses augmentent trop parce que nous n’avons pas suffisamment réformé les retraites des fonctionnaires ou bien parce que le poids de la dette et des intérêts augmente, il faut consentir davantage d’économies sur le reste des dépenses. Il ne faut pas laisser croire qu’on peut dépenser hors intérêts de la dette et hors contributions aux pensions.

La question va d’ailleurs se poser dès la prochaine loi de finances : si la progression des dépenses est nulle hors intérêts de la dette et contributions aux pensions, elle s’élève à 1,2 % si l’on prend en compte ces deux paramètres, ce qui représente presque autant que l’inflation. L’opposition reproche au Gouvernement d’être trop dur, mais on peut très bien considérer, au contraire, qu’il ne l’est pas assez : il y aura, l’an prochain, environ 1,5 milliard de dépenses supplémentaires liées aux pensions et entre 3 ou 3,5 milliards au titre de la dette. Pour atteindre l’objectif de zéro, il faudrait un effort supplémentaire de près de 5 milliards d’euros.

M. le rapporteur général. Je ne suis pas favorable à l’amendement de notre collègue, qui me semble beaucoup trop dur.

Fort de l’expérience que constitue la précédente loi de programmation, le Gouvernement nous propose, non pas une simple règle portant sur l’ensemble des dépenses, mais deux règles distinctes qui doivent se cumuler : l’augmentation des dépenses doit être égale à zéro en valeur hors intérêts de la dette et pensions, c’est-à-dire exception faite de l’héritage du passé, et il faut que l’augmentation totale des dépenses, y compris les intérêts de la dette et les subventions aux pensions, ne soit pas supérieure au niveau de l’inflation.

La première de ces deux règles, qui constitue à elle seule une innovation, revêt une grande importance : en 2009 et en 2010, nous avons réalisé des économies notables, de l’ordre de plusieurs milliards d’euros, par rapport aux prévisions des intérêts de la dette. Or, ces économies ont pu être réaffectées à d’autres dépenses en application de la règle globale qui prévaut aujourd’hui. Pour plus rigueur, il paraît nécessaire de préciser que l’évolution des dépenses hors intérêts de la dette et contributions aux pensions doit être limitée à zéro.

L’amendement que je défendrai dans un instant tend à concilier les deux règles qui nous sont proposées en comblant une faille dans la rédaction actuelle du texte. Compte tenu du taux d’inflation prévu pour l’an prochain – 1,6 % –, nous disposons d’une marge de manœuvre de 4,5, voire de 5 milliards d’euros pour l’ensemble des dépenses. Toutefois, si l’augmentation des dépenses liées à la dette et aux pensions était supérieure à ce montant, il faudrait dépenser moins par ailleurs. Mon amendement tend à y veiller, ce qui donnera, au moins partiellement, satisfaction à M. de Courson.

M. Charles de Courson. Je retire mon amendement.

La Commission en vient à l’amendement CF 15 du rapporteur général.

M. le rapporteur général. Je viens de présenter l’amendement.

M. le ministre. Avis favorable. On a longtemps dit que l’objectif de « zéro valeur » hors dette et pensions est identique à celui de « zéro volume ». Or, il y a une différence entre ces deux règles, aussi bien du point de vue de la prévision que de celui de l’exécution : elle est de 700 millions d’euros, ce qui est loin d’être neutre.

La Commission adopte l’amendement.

Elle adopte ensuite l’article 5 ainsi modifié.

*

* *

Article 6

Programmation triennale des crédits des missions
du budget général de l’État

Le présent article reconduit la démarche budgétaire pluriannuelle instaurée par la première loi de programmation des finances publiques pour les années 2009-2012 (61) en précisant les enveloppes allouées à chacune des missions du budget général pour la période 2011-2013.

La programmation du budget pluriannuel 2011-2013 porte sur l’ensemble des dépenses de l’État au sens de la norme de dépense élargie visée à l’article 5. La parfaite adéquation entre le périmètre de la programmation et celui de la norme de dépense, principal instrument de pilotage du budget de l’État, ainsi que la stabilité du périmètre de cette dernière sont des éléments structurants pour assurer la crédibilité de la trajectoire de dépense de l’État et le respect de nos objectifs de finances publiques.

I.– LES OBJECTIFS DE LA PLURIANNUALITÉ

Comme le Rapporteur général l’a exposé dans son rapport sur la première loi de programmation des finances publiques(62), le budget triennal trouve son origine dans les propositions de MM. Alain Lambert et Didier Migaud dans leur rapport d’octobre 2006 relatif à la mise en œuvre de la LOLF. Cette procédure, lancée par la circulaire du Premier ministre du 11 février 2008, ne consiste pas à allouer des enveloppes budgétaires globalisées au sein desquelles les crédits correspondant à chaque année seraient fongibles. Une telle réforme, qui supposerait une modification de la LOLF (sinon de la Constitution(63)), serait certainement très responsabilisante pour les gestionnaires mais probablement très déstabilisante pour la maîtrise globale de la dépense budgétaire.

Plus modestement, le schéma pluriannuel retenu consiste à programmer, pour les trois prochaines années, des plafonds de dépenses par mission. Dès lors que cette programmation s’effectue à droit constant, ces plafonds ne sont juridiquement qu’indicatifs : le Parlement demeure naturellement libre de modifier, dans le respect de l’article 40 de la Constitution et de l’article 47 de la LOLF, les crédits des missions et des programmes soumis à son vote dans les différents projets de loi de finances. Toutefois, d’un point de vue interne au Gouvernement, les plafonds triennaux retenus seront « regardés comme impératifs » selon les termes de la circulaire précitée du Premier ministre.

La programmation pluriannuelle vise trois objectifs :

– mieux maîtriser l’évolution d’ensemble des dépenses de l’État : le plafond global des dépenses, c’est-à-dire la somme des crédits prévus pour les trois années de la programmation, ne pouvant être revu, en principe, que dans la seule hypothèse d’une inflation supérieure aux prévisions ;

– responsabiliser les ministres : la programmation triennale des enveloppes budgétaires par mission confère au ministre un rôle central de pilotage budgétaire. Ainsi, depuis le projet de loi de finances pour 2009, les projets annuels de performances (PAP) comportent une présentation stratégique de la mission, l’évolution des crédits par programme en année n, n+1 et n+2, ainsi qu’une présentation des principales réformes prévues au cours de la période. Le principe dit d’« auto-assurance » doit les conduire ainsi à faire face aux priorités, contraintes et charges nouvelles sans remettre en cause le plafond de crédits de leur mission, soit par redéploiement de dépenses discrétionnaires, soit par la réalisation d’économies. Ces redéploiements ou économies doivent être mis en œuvre prioritairement au sein du programme qui supporte les aléas ou les priorités nouvelles. À défaut, ils doivent être réalisés entre les programmes de la même mission ;

– donner une plus grande visibilité aux gestionnaires : les responsables de programme connaissent non seulement leur enveloppe budgétaire prévue pour l’année n mais aussi celles susceptibles de leur être accordées en n+1 puis en n+2. Quoique ces deux dernières informations ne soient qu’indicatives et dépendantes du degré de fermeté que les ministres entendent leur conférer, elles ont permis d’améliorer les capacités de pilotage des programmes, tant dans la gestion budgétaire que dans la poursuite des objectifs définis dans les PAP. Elles doivent également permettre aux responsables de programmes de décliner, au moins dans leurs grandes masses, les enveloppes de crédits au niveau des budgets opérationnels de programme (BOP).

II.– LA MÉCANIQUE DE LA PLURIANNUALITÉ

A.– NATURE ET PORTÉE DES AUTORISATIONS DU BUDGET PLURIANNUEL

L’article 5 du présent projet de loi définit l’évolution annuelle du plafond global des dépenses de l’État sur le périmètre de la norme élargie (64). Il prévoit, d’une part, une stabilisation en volume de l’ensemble de ces dépenses, d’autre part, un gel en valeur des dépenses du périmètre hors charge de la dette et hors pensions, par rapport à la loi de finances initiale pour 2010, soit une stabilisation à hauteur de 274,84 milliards d’euros.

Le présent article en tire les conséquences et fixe les plafonds 2011, 2012 et 2013 de chacune des missions du budget général. Ces derniers sont exprimés en crédits de paiement ainsi qu’en autorisations d’engagement.

Ils distinguent, pour les missions supportant des dépenses de personnel, un plafond de crédits de paiement hors contributions de l’État au compte d’affectation spéciale Pensions, celles-ci n’étant pas prises en compte pour apprécier la norme « zéro valeur ».

Comme le montre le schéma ci-après, pour l’année 2011, les plafonds de dépense établis au niveau des missions et la répartition par programme des crédits de paiement correspondent à ceux du projet de loi de finances initiale pour 2011. Pour l’année 2012, les plafonds sont fixés par mission et complétés d’une répartition indicative des crédits de paiement par programme, présentée dans les documents budgétaires du projet de loi de finances pour 2011. Pour 2013, les crédits de paiement par mission pourront faire l’objet d’ajustements complémentaires, dans le respect du plafond global de dépense. Une répartition indicative par programme est également présentée dans les documents budgétaires du projet de loi de finances pour 2011.

Source : Rapport préparatoire au débat d’orientation des finances publiques, tome 1, page 27.

Le rapport annexé au présent projet de loi précise toutefois que les autorisations d’engagement fixées au niveau de la mission en 2011, 2012 et 2013 aux termes de l’article 6 pourront, exceptionnellement, faire l’objet d’ajustements liés au mode de budgétisation des crédits. Il s’agit, en particulier, d’assurer la neutralité de la budgétisation selon les différents types de commande publique utilisés, par exemple dans le cas d’un recours à une convention pluriannuelle qui n’aurait pas été pris en compte dans le cadre de la programmation initiale.

Ceci peut conduire à augmenter le niveau des autorisations d’engagement pour l’année où l’engagement juridique est concrétisé et diminuer celui des années suivantes. Cet ajustement éventuel sera opéré dans le cadre de la préparation des projets de loi de finances pour 2012 et 2013. Il ne crée pas de droits au titre des années suivantes, que ce soit en autorisations d’engagement ou en crédits de paiement, et ne peut en aucun cas conduire à engendrer des besoins en crédits de paiement excédant les plafonds de la programmation initiale.

En tout état de cause, en vertu de l’article 13 du présent projet de loi, le Gouvernement établit et transmet au Parlement, avant le débat d'orientation des finances publiques, un bilan de la mise en œuvre de la loi de programmation. Le Rapporteur général en déduit que le Gouvernement devra justifier les ajustements opérés par rapport aux plafonds fixés dans le budget pluriannuel, tant en ce qui concerne le plafond global de dépense que les plafonds par mission.

B.– L’ARTICULATION ENTRE LES BUDGETS PLURIANNUELS ET LES LOIS DE FINANCES ANNUELLES

Pour chacune des années de la programmation, le projet de loi de finances est élaboré et présenté au Parlement dans le respect des plafonds fixés dans le budget pluriannuel au titre du présent article.

La première année de la programmation constitue le cadre du projet de loi de finances pour 2011, qui procède à la ventilation fine des crédits par destination et, à titre indicatif, par nature.

La deuxième année de la programmation fera, de la même façon, l’objet d’une déclinaison (programmes, actions, sous actions, titres et catégories) dans les documents budgétaires lors de la préparation du projet de loi de finances pour 2012.

Enfin, la troisième année de la programmation (2013) constituera le point de départ d’un nouveau budget pluriannuel.

Le schéma ci-dessous illustre les différents degrés de rigidité de la programmation :

SCHÉMA DE L’ARTICULATION ENTRE LES BUDGETS PLURIANNUELS

Source : Rapport préparatoire au débat d’orientation des finances publiques, tome 1, page 28.

C.– LES RÈGLES DE FONCTIONNEMENT DU BUDGET TRIENNAL

1.– L’absence de réserve de budgétisation

Contrairement au précédent budget triennal, le budget triennal 2011-2013 ne prévoit aucune réserve de budgétisation. Les crédits budgétés sur la mission Provisions sont en effet destinés essentiellement aux dépenses accidentelles et imprévisibles, dont les crédits sont répartis par décret conformément à l’article 11 de la LOLF.

Le Rapporteur général ne peut que se féliciter de la suppression de la réserve de budgétisation qui, en pratique, s’est révélée largement insuffisante pour faire face aux aléas économiques dans le cadre du premier budget triennal 2009-2011. En tout état de cause, cette réforme est justifiée par l’ambition inédite du budget pluriannuel 2011-2013 en termes de maîtrise des dépenses, qui se traduit par la règle de progression « zéro valeur hors dette et pensions » ; cette contrainte plus élevée que par le passé devrait conduire à donner au principe d’« auto-assurance » sa pleine portée.

Dans ce cadre, le Rapporteur général soutient la démarche en vertu de laquelle, afin de renforcer la logique d’auto-assurance et d’inciter au respect de la programmation, les dépassements de crédits réalisés en année n pourraient se traduire par une révision à la baisse des ressources disponibles l’année n+1, par exemple par la limitation des reports de l’année n vers l’année n+1 ou par l’application de taux dérogatoires de mise en réserve de crédits en année n+1.

De la même manière, comme il l’a démontré dans le cadre du commentaire de l’article 5, il considère qu’en cas d’évolution des hypothèses d’inflation et de dérive de la charge de la dette ou des pensions, la norme de dépenses la plus contraignante, « zéro volume » ou « zéro valeur » selon la situation envisagée, devra être appliquée, ce qui pourrait provoquer le cas échéant une réduction des plafonds de crédits des missions fixés par le présent article (65).

2.– La réserve de précaution

La réserve de précaution constituée suivant les règles posées au 4° bis de l’article 51 de la loi organique relative aux lois de finances permet, pour sa part, de faire face à des aléas importants survenant en cours de gestion. Elle demeure donc nécessaire dans le cadre du budget pluriannuel et sera, comme aujourd’hui, constituée en début de gestion par l’application de taux de mise en réserve différenciés sur le titre 2 et les autres titres des programmes du budget général.

III.– LES ÉCUEILS À ÉVITER AU REGARD DU BILAN 2009-2011

Le Rapporteur général ne peut que réitérer son vœu, pour 2011-2013, que l’État respecte la double norme de dépenses fixée à l’article 5 et déclinée par mission dans le présent article, et que cette règle ne soit pas transgressée par divers types de contournements utilisés dans le cadre de l’exécution de la première loi de programmation 2009-2011.

En premier lieu, plusieurs changements de périmètre de la norme de dépenses sont intervenus au cours de la première période de programmation budgétaire, ayant pour effet de réduire le montant des dépenses de l’État prises en considération dans le calcul de la norme. Or, certaines de ces mesures de périmètre n’étaient pas justifiées compte tenu du fait que les dépenses ainsi écartées constituaient toujours une charge nette pour l’État. L’on peut citer à titre d’exemple, pour 2009, les subventions versées à l’établissement public AFITF (1,2 milliard d’euros), la dotation de l’État au fonds national des solidarités actives (380 millions d’euros), la charge supplémentaire d’intérêt résultant pour l’État de la dette du FFIPSA (350 millions d’euros) ou encore la contribution au financement de l’audiovisuel public (473 millions d’euros). De la même manière, la non comptabilisation d’affectations supplémentaires de recettes dans la norme de dépenses (368,5 millions d’euros en 2009) peut apparaître critiquable (66). Le Rapporteur général réaffirme donc son souhait que le Gouvernement fixe une « doctrine » claire et stable pour définir le périmètre de la norme de dépenses.

En deuxième lieu, il conviendra de veiller à ce que les dépenses de l’État, hors périmètre de la norme élargie, soient désormais véritablement contenues et ne servent pas à financer des dépenses relevant du budget général.

Ainsi en est-il des dépenses des comptes spéciaux, qui se sont élevés à 109 milliards d’euros en 2009 hors compte d’affectation spéciale (CAS) consacré au paiement des pensions. Outre la croissance importante de ces dépenses, la Cour des comptes a par exemple relevé un usage inapproprié du CAS Gestion du patrimoine immobilier de l’État, les ministères de la défense et des affaires étrangères ayant par exemple fait basculer certaines de leurs opérations immobilières, voire certaines dépenses de fonctionnement, sur le CAS, alors qu’elles étaient auparavant gérées au sein d’un programme ministériel(67). Il en est résulté une extension irrégulière des interventions de ce CAS.

De la même manière, la sous-évaluation des dépenses du compte Avances au fonds d’aide à l’acquisition de véhicules propres pour financer le « bonus écologique » se traduit, en pratique, par un solde déficitaire du compte en 2009 et 2010 de près de 500 millions d’euros qui devrait être assimilé à une dépense supplémentaire pour l’État (68).

De surcroît, le Rapporteur général a constaté, en 2009 et 2010, une augmentation significative de dépenses fiscales correspondant au financement de politiques publiques (comme le crédit d’impôt recherche par exemple), ou de dépenses fiscales qui se sont substituées à des crédits budgétaires (le prêt à taux zéro pour l’achat d’un logement par exemple). Il n’est d’ailleurs pas rare que le montant de certaines dépenses fiscales dépasse largement celui des crédits auxquels elles sont rattachées(69). Ce type de contournements devrait donc être évité, et à tout le moins limité, dans le cadre de la prochaine programmation triennale 2011-2013.

Le Rapporteur général observe également le rôle croissant des opérateurs de l’État dans la mise en œuvre des politiques publiques, qui échappent le plus souvent à l’influence des responsables des programmes concernés, et ce d’autant plus que les opérateurs sont financés par des ressources propres, hors budget de l’État. Il s’ensuit que le pilotage de ces opérateurs se limite, souvent à l’envoi de lettres de mission ou à la signature de contrats d’objectifs, sans qu’un suivi de la performance de la dépense puisse être véritablement mis en œuvre. Il convient donc de renforcer les règles de gouvernance des opérateurs et de les impliquer plus largement à l’effort de redressement des finances publiques sur la période 2011-2013.

En dernier lieu, le Gouvernement a choisi de considérer que le caractère conjoncturel des mesures financées dans le cadre du plan de relance justifiait qu’elles ne soient pas prises en compte dans le calcul de la norme de dépenses. Si ce raisonnement semble tout à fait justifié a priori, le récent rapport de la Cour des comptes à la Commission des finances de l’Assemblée nationale sur la mise en œuvre du plan de relance de l’économie française (70) fait apparaître cependant certaines dérogations au caractère temporaire et réversible de ces dépenses (dispositifs de garantie mis en place par Oséo, dotations complémentaires de fonctionnement allouées aux centres d’hébergement, aides aux entreprises recourant au chômage partiel…). Ce type de dépenses devrait donc être intégré dans le calcul de la norme de dépenses sur la période 2011-2013.

En conclusion, le Rapporteur général ne peut que saluer le maintien d’une programmation triennale pour les années 2011-2013, gage d’un véritable pilotage des dépenses de l’État associant responsabilisation du Gouvernement et prévisibilité pour les responsables de programme, dès lors que seront évités les écueils décelés sur la première période de programmation.

*

* *

La Commission adopte l’article 6 sans modification.

*

* *

Article 7

Norme annuelle d’évolution des concours de l’État
aux collectivités territoriales

Le présent article soumet l’évolution des concours de l’État aux collectivités territoriales à la même norme que celle que l’État applique à son budget hors charge de la dette et hors pensions, soit une stabilisation en valeur sur la période 2011-2014.

Par conséquent, cet article consacre le passage d’une norme « zéro volume » consistant à ne pas faire augmenter les concours plus vite que l’inflation, instaurée par la loi de programmation des finances publiques pour les années 2009 à 2012 (71), à l’application d’une norme « zéro valeur ». En pratique, ces concours sont stabilisés en valeur au niveau de la loi de finances initiale pour 2010, soit 50,45 milliards d’euros en autorisations d’engagement, après neutralisation des mesures de périmètre.

I.– LE GEL EN VOLUME DES CONCOURS DE L’ÉTAT: UNE GARANTIE OFFERTE AUX COLLECTIVITÉS EN 2009 ET 2010

A.– UNE PROGRESSION DES CONCOURS AU RYTHME DE L’INFLATION

L’article 7 de la loi de programmation pour les années 2009 à 2012 appliquait aux concours de l’État aux collectivités territoriales la même norme de dépense que celle que l’État applique au périmètre élargi de son budget, c'est-à-dire l’évolution prévisionnelle des prix.

Le choix de cette norme avait pour effet de neutraliser les concours aux collectivités locales, du point de vue du redressement des comptes de l’État : il ne facilitait pas le respect de la norme de dépense de l’État mais il n’en assurait pas non plus l’ajustement (72).

En outre, si cette norme s’avérait plus stricte que le contrat de croissance et de solidarité profitant aux collectivités entre 2001 et 2007 (73), elle constituait malgré tout une garantie accordée aux collectivités territoriales, garantie qui n’a pas été offerte aux missions du budget général. Compte tenu de la très faible marge de manœuvre budgétaire dont disposait l’État en 2009 et 2010 (74), certaines missions ont en effet vu leurs montants gelés ou diminués pour permettre le respect global de la norme de dépenses(75).

Le choix de l’inflation comme norme pluriannuelle affectée aux concours à destination des collectivités locales constituait donc un effort particulièrement sensible en leur faveur, l’État continuant à partir de 2009 à faire davantage pour celles-ci qu’il n’octroyait à certaines de ses missions.

B.– UN PÉRIMÈTRE NORMÉ CEPENDANT CRITIQUÉ

La loi de programmation des finances publiques pour les années 2009-2012 appliquait la norme « zéro volume » au périmètre le plus large possible des concours aux collectivités locales. Il s’agissait des prélèvements sur recettes en leur faveur, des crédits de la mission Relations avec les collectivités territoriales et des crédits de mission Travail Emploi destinés au financement de la dotation générale de décentralisation de la formation professionnelle.

N’étaient exclus de cette enveloppe que les flux financiers qui ne peuvent y être intégrés :

– les remboursements et dégrèvements d’impôts locaux, qui sont des dépenses fiscales et de ce fait n’intègrent pas la norme de dépense ;

– la fiscalité transférée en compensation des transferts de compétences (notamment TIPP et TSCA), dont l’évolution de LFI à LFI ne peut résulter d’un pilotage, puisque la fraction de taux transférée à chaque collectivité ne varie qu’à raison des nouveaux changements de périmètre.

Il n’en demeure pas moins que ce périmètre n’a cessé de concentrer les critiques des élus locaux de tous bords en ce qu’il incluait notamment le fonds de compensation en faveur de la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA) – hors plan de relance –, ainsi que le prélèvement au titre des amendes forfaitaires de la police de la circulation et des radars automatiques. Compte tenu de la croissance dynamique de ces deux variables, leur inclusion dans le périmètre normé a eu directement pour effet de peser sur la progression des autres concours : certains ont progressé moins vite tandis qu’il a été nécessaire d’en diminuer d’autres, qui ont ainsi servi de variables d’ajustement.

Il faut en effet rappeler que le FCTVA apparaît comme un prélèvement sur recettes dont la progression n’est pas maîtrisée, en raison de son fonctionnement en « guichet ouvert » : les bénéficiaires ont droit à l'attribution du FCTVA correspondant à l'ensemble de leurs dépenses d'investissements éligibles. C’est d’ailleurs l’une des raisons pour lesquelles de nombreux élus considèrent le FCTVA comme une modalité de remboursement automatique de la TVA en cas d’investissement et ne peuvent pas admettre son inclusion au sein d’un périmètre normé.

En tout état de cause, le montant de ce prélèvement sur recettes ne peut être qu’évaluatif et, de ce fait, difficilement prévisible. Entre 2000 et 2010, le montant des crédits consommés a ainsi augmenté de 71 %, reflétant le dynamisme de l'investissement des collectivités locales, la progression du champ des dépenses éligibles et la hausse des coûts des investissements.

ÉVOLUTION DU FCTVA

(en millions d’euros)

 

2000

2001

2002

2003

2 004

2005

2006

2007

2008

2009

2010

FCTVA

3 626

3 583

3 613

3 664

3 710

3 791

4 030

4 711

5 192

5 855

6 228

Évolution
(en %)

+ 7,7

+ 0,85

+ 1,41

+ 1,26

+ 2,18

+ 6,30

+ 16,90

+ 10,21

+ 12,8

+ 6,3

Source : Direction générale des collectivités locales

De la même manière, le produit des amendes forfaitaires de la circulation ne peut faire l’objet d’un véritable pilotage. Il correspond à la rétrocession par l'État, en faveur des communes ou de leurs groupements, du produit effectivement recouvré des amendes de police relatives à la circulation routière dressées sur leur territoire. La répartition est proportionnelle au nombre de contraventions dressées l'année précédente sur le territoire de chaque commune ou groupement. Ce prélèvement est réparti annuellement par le Comité des finances locales. Le code général des collectivités territoriales prévoit que les sommes ainsi distribuées doivent financer des investissements concernant les transports en commun ou la circulation routière. Il faut néanmoins observer que ce prélèvement connaît lui aussi une dynamique forte (+ 27% en 2010 par rapport à l’année 2007).

Le Rapporteur général avait souligné, lors de l’examen de la première loi de programmation des finances publiques, que la définition d’un périmètre complet des concours aux collectivités avait le mérite d’améliorer considérablement la crédibilité de la norme de dépense, bien qu’elle fasse peser une contrainte forte sur les concours du périmètre. Toutefois, le choix des mécanismes d’ajustement du périmètre votés dans le cadre des lois de finances pour 2009 et 2010 a permis de financer les priorités que l’État s’était fixées dans ses relations avec les collectivités territoriales : le soutien à l’investissement local d’une part et le renforcement de la péréquation d’autre part.

II.– LE GEL EN VALEUR DES CONCOURS DE L’ÉTAT : UN NOUVEL IMPÉRATIF POUR LES COLLECTIVITÉS

Compte tenu de l’objectif de réduction du déficit des administrations publiques visé à l’article 2 du présent projet de loi, le présent article consacre le passage d’une norme de stabilisation en volume des concours de l’État aux collectivités territoriales à une norme de stabilisation en valeur plus contraignante. En pratique, ces concours sont stabilisés au niveau de la loi de finances initiale pour 2010 à 50,45 milliards d’euros en autorisations d’engagement, après neutralisation des mesures de périmètre (exclusion du FCTVA et prélèvement « amendes forfaitaires »).

A.– UNE NORME D’ÉVOLUTION DES DÉPENSE PLUS CONTRAIGNANTE

Les collectivités locales pèsent d’un poids bien moindre que celui de la sécurité sociale dans le déficit global des administrations publiques. La règle d’équilibre de la section de fonctionnement de leur budget joue en cela un rôle important.

Il demeure cependant que le montant de l’effort financier de l’État en leur faveur reste élevé et que l’évolution globale de l’ensemble des dépenses des APUL (administrations publiques locales) continue de progresser malgré un infléchissement certain depuis 2008.

ÉVOLUTION DES DÉPENSES DES APUL

(en millions d’euros)

 

2000

2001

2002

2003

2 004

2005

2006

2007

2008

2009

Dépenses

140,48

144,58

154,75

164,22

178,43

188,16

198,50

212,78

221,94

228,52

Évolution

7,31%

2,92%

7,04%

6,11%

8,66%

5,45%

5,49%

7,20%

4,30%

2,96%

Source : INSEE, comptes nationaux annuels

Compte tenu de l’objectif de réduction du rythme de progression des dépenses publiques fixé par l’article 4 du présent projet de loi de programmation, il paraît désormais incontournable d’associer vigoureusement les collectivités territoriales à l’effort de maîtrise des dépenses. Le rapport annexé au présent projet de loi de programmation précise d’ailleurs que, sur la période 2011-2014, les dépenses des APUL ne sauraient progresser de plus de 0,6 % par an en volume.

Au vu du tableau précédent, un tel objectif paraît plus qu’ambitieux mais justifie à tout le moins d’agir sur les dépenses locales dont l’État a la maîtrise. C’est la raison pour laquelle le présent article instaure une norme de stabilisation en valeur des concours aux collectivités territoriales à hauteur de 50,45 milliards d’euros. Il en résulte une économie pérenne pour l’État d’au moins 400 millions d’euros par an, cette somme correspondant à la progression des concours de l’État aux collectivités territoriales entre 2009 et 2010 hors prise en considération du FCTVA.

PROGRESSION DES CONCOURS DE L’ÉTAT AUX COLLECTIVITÉS LOCALES
ENTRE 2009 ET 2010

 

LFI 2009

LFI 2010

Écart

En valeur

PSR

52,2

84,9

   

chgt périmètre

 

32

+0,7

1,2 %

RCT (AE)

2,4

2,5

+0,1

 

chgt périmètre

   

+0,0

1,6 %

DGD form pro (AE=CP)

1,7

1,7

+0,0

1,2 %

Total (constant)

56,3

57,1

0,8

1,2 %

dont FCTVA (hors plan de relance)

5,9

6,2

+0,4

0,0 %

Cette nouvelle norme d’évolution des concours de l’État aux collectivités territoriales, si elle paraît sévère, doit néanmoins s’apprécier au regard des efforts engagés par l’État lui-même pour réduire ses propres dépenses : stabilisation en volume de l’ensemble de ses dépenses couplée à une stabilisation en valeur des dépenses hors charge de la dette et contributions aux pensions des fonctionnaires.

Or, le respect de la norme de stabilisation en volume des dépenses de l’État est susceptible de peser sur la stabilisation en valeur des crédits budgétaires et des prélèvements sur recettes au point de se traduire par une réduction en valeur absolue de ces deux catégories de dépenses. En garantissant la stabilisation en valeur à périmètre constant, de l’ensemble des concours de l’État aux collectivités territoriales, le présent article protège donc les ressources des collectivités : en effet, ni le prélèvement sur recettes à leur profit, ni les crédits de la mission Relations avec les collectivités territoriales, ni ceux de la mission Travail Emploi destinés au financement de la dotation générale de décentralisation de la formation professionnelle ne pourront servir de variables d’ajustement au sein du périmètre de la norme élargie des dépenses de l’État.

B.– UN PÉRIMÈTRE NORMÉ RESSERRÉ

Désormais, la norme s’applique à l’ensemble constitué par :

– les prélèvements sur recettes en faveur des collectivités locales à l’exception du FCTVA (6,2 milliards d’euros) et du prélèvement au titre des amendes forfaitaires de police de circulation et des radars automatiques (640 millions d’euros en 2010) ;

– les crédits de la mission Relations avec les collectivités territoriales ;

– les crédits de mission Travail Emploi destinés au financement de la dotation générale de décentralisation de la formation professionnelle.

L’exclusion du FCTVA et la suppression du prélèvement au titre des « amendes forfaitaires » répond à une demande persistante des élus locaux dans la mesure où ces deux concours ont lourdement pesé sur l’évolution des autres éléments de l’enveloppe normée en 2009 et 2010.

Le Rapporteur général observe cependant que :

– les prévisions d’évolution du FCTVA, au moins pour l’année 2011, sont à la baisse de sorte que son exclusion de l’enveloppe normée aura pour effet de limiter les marges de manœuvre des collectivités territoriales. À l’inverse, si le FCTVA n’avait pas été retiré du périmètre normé, la stabilisation en valeur de l’enveloppe au niveau de la loi de finances initiale pour 2010 aurait permis aux collectivités de profiter de la baisse attendue du FCTVA pour accroître par exemple, les dotations de péréquation ou les autres concours à l’investissement gelés depuis 2009. Par conséquent, le retrait du FCTVA de l’enveloppe normée est une mesure opportune pour permettre à l’État de réaliser des économies s’il est avéré que son montant baisse en 2011 ;

– la suppression du prélèvement « amendes forfaitaires » du périmètre normé s’explique par le fait que le projet de loi de finances pour 2011 crée un nouveau compte d’affectation spéciale Contrôle de la circulation et du stationnement routier qui regroupera l’ensemble des recettes des amendes de circulation, radars et hors radars. Si cette réforme répond au souci de clarifier et simplifier le circuit budgétaire des amendes de la police de la circulation, elle constitue cependant une dérogation au principe de non-affectation des recettes. Il conviendra donc de veiller à ce que les recettes du CAS n’aient pas pour objet, en pratique, de financer certaines dépenses relevant du budget général de l’État ;

Pour conclure, le Rapporteur général souhaite rappeler que les remboursements et dégrèvements d’impôts locaux et la fiscalité transférée en compensation des transferts de compétences sont toujours exclus de la norme de dépenses des collectivités territoriales. Il n’y a donc pas lieu de remettre en cause l’engagement financier de l’État auprès des collectivités territoriales mais simplement de constater que, par cet article, le Gouvernement s’engage à une garantie de non baisse des concours financiers de l’État aux collectivités locales, qui s’impose au regard de l’état de nos finances publiques.

*

* *

La Commission est saisie de l’amendement CF 18 du rapporteur général.

M. le rapporteur général. Cet amendement procède du même esprit que l’amendement CF 19 que nous avons adopté.

La Commission adopte l’amendement CF 18.

Puis elle examine l’amendement CF 4 de M. Charles de Courson. 

M. Charles de Courson. Il s’agit de stabiliser en valeur et à périmètre constant l’ensemble des concours de l’État aux collectivités territoriales en prenant en compte l’ensemble de la fiscalité transférée. Le débat qui a lieu depuis des années est faussé, car plusieurs référentiels existent : les dotations de l’État, les dotations dites « majorées » – par divers crédits –, auxquelles il faut ajouter la notion de concours de l’État, qui inclut la fiscalité transférée dans le but de financer les transferts de compétences aux collectivités territoriales. Le total sera supérieur à 99 milliards d’euros en 2011, soit la moitié du budget des collectivités en chiffres consolidés. C’est l’ensemble de ces concours de l’État qui doit être visé par la stabilisation en valeur, faute de quoi nos efforts sont voués à l’échec.

M. le rapporteur général. Cet amendement me paraît inutilement pénalisant pour les collectivités territoriales.

En premier lieu, les travaux de la Commission consultative sur l’évaluation des charges, que préside notre collègue Thierry Carcenac, peuvent conduire à une augmentation de l’affectation de la fraction de TIPP transférée aux collectivités territoriales et de la taxe spéciale sur les conventions d’assurance. Pourquoi empêcher les collectivités de bénéficier d’un ajustement à la hausse si les dépenses transférées sont plus importantes que les prévisions ? Les transferts de fiscalité liés aux transferts de compétences relèvent d’un autre débat. Ces transferts doivent être honnêtes et équilibrés, comme l’impose la Constitution.

En second lieu, le nombre des contrats d’assurance concernés par la taxe spéciale pourrait augmenter. Pourquoi priver les collectivités territoriales du bénéfice d’une telle évolution ?

Ce texte prévoit déjà des conditions assez dures à l’égard des collectivités territoriales. Ce que propose M. de Courson rendrait la situation insupportable.

M. Charles de Courson. L’amendement tend en particulier à inclure les droits de mutation à titre onéreux, dont le montant a explosé au fil du temps, ce qui a facilité la gestion de certaines collectivités, telles que les départements. Mais le mouvement s’est inversé depuis deux ans. On pense systématiquement à la hausse de la fiscalité locale, mais des baisses d’assiette peuvent également se produire, ce qui pose de réelles difficultés à certaines collectivités. En visant l’ensemble des transferts de fiscalité liés à des transferts de compétences, l’amendement protégera les collectivités territoriales en cas de baisse de la fiscalité. N’oublions pas que le montant des transferts de fiscalité est tantôt supérieur, tantôt inférieur à l’évolution des dépenses transférées. Il faut tenir compte de la fiscalité transférée, sur laquelle les collectivités territoriales ne peuvent exercer aucune marge de manœuvre. L’évolution de l’assiette peut jouer à la hausse, mais aussi à la baisse. Les montants en jeu s’élèvent à 25 milliards d’euros, soit un quart des concours de l’État.

M. Richard Dell’Agnola. J’aurais tendance à suivre l’avis du rapporteur général. Nous n’avons pas suffisamment évalué les effets de la suppression de la taxe professionnelle sur les collectivités, et pour cause : ce mal français qu’est l’absence de stabilité fiscale nous empêche d’appréhender pleinement les effets des dispositifs adoptés. Il faut marquer une pause afin d’étudier les évolutions en cours, quitte à procéder plus tard à des ajustements.

M. Thierry Carcenac. Les lois de décentralisation ont transféré aux collectivités territoriales des compétences assorties de ressources. Or, une stricte compensation des compétences transférées deviendrait impossible si l’on adoptait cet amendement. Le cas des DMTO, qui font l’objet d’une péréquation depuis cette année, est tout à fait exceptionnel : dans tous les autres cas, la fiscalité transférée tend à compenser des transferts de compétences, et on est en deçà du compte. Pourquoi donc imposer une telle limite ? Si l’on vous suivait, on pourrait aussi bien supprimer la Commission consultative sur l’évaluation des charges !

La Commission rejette l’amendement.

Elle adopte ensuite l’article 7 ainsi modifié.

*

* *

Article 8

Norme annuelle d’évolution des dépenses de sécurité sociale

L’objet du présent article est double.

D’une part, pour chaque année de la période de programmation, il fixe en valeur absolue – et non en taux de croissance – l’objectif national de dépenses d’assurance maladie (ONDAM) ainsi qu’un nouvel objectif de dépenses du régime général de la sécurité sociale.

D’autre part, il prévoit la mise en réserve, en début d’exercice, d’une fraction des dotations versées à divers organismes de sécurité sociale et intégrées à l’ONDAM.

Le présent article met ainsi en place de nouveaux outils de pilotage de la dépense de la sécurité sociale, et plus particulièrement de la dépense d’assurance maladie. Il fixe un objectif ambitieux de maîtrise de ces charges, dont la réalisation doit contribuer à limiter les taux de croissance annuelle de la dépense des administrations de sécurité sociale et de la dépense du régime général à respectivement 2,9 % et 3,3 % en valeur.

I.– DE NOUVEAUX OUTILS POUR UN PILOTAGE FIN D’UNE PARTIE DE LA DÉPENSE DE SÉCURITÉ SOCIALE

Le présent article prévoit de nouveaux outils de pilotage de la dépense du régime général et de la dépense d’assurance maladie de l’ensemble des régimes obligatoires de base. Son originalité par rapport à l’article 8 de la précédente loi de programmation, relatif aux dépenses d’assurance maladie, est triple.

 En premier lieu, le présent article soumet à objectifs la dépense de l’ensemble des branches du régime général – assurance maladie, mais également vieillesse, famille et accidents du travail. Jusqu’à présent, seules les dépenses d’assurance maladie des régimes obligatoires de base étaient soumises à un objectif, à savoir l’ONDAM.

La fixation d’un nouvel objectif couvrant les quatre branches du régime général paraît bienvenue. Il est toutefois regrettable que la trajectoire ne porte pas sur l’ensemble des régimes obligatoires de base ainsi que sur les organismes concourant à leur financement, ce qui aurait été cohérent avec le champ de la loi de financement de la sécurité sociale et avec le II du présent article déterminant l’évolution de l’ONDAM.

La création de ce nouvel objectif suppose que les dépenses d’assurance vieillesse ainsi que celles des branches « famille » et « accidents du travail et maladies professionnelles » soient pilotées de façon à assurer son respect.

 En deuxième lieu, les objectifs de dépenses ne sont pas déterminés sur la base d’un taux de croissance, mais en valeur absolue. Cette évolution, recommandée pour l’ONDAM par le récent rapport Briet (76), paraît bienvenue car elle implique de rattraper en N+1 le dérapage des dépenses ayant affecté l’année N.

En effet, la fixation de l’ONDAM selon un taux de croissance n’incite pas à un tel effort. Comme le montre le tableau ci-dessous, après un dérapage en année N, le taux de croissance de l’ONDAM aura beau être respecté en N+1, la dépense en valeur absolue est supérieure à ce qu’elle aurait dû être. Dorénavant, pour respecter l’objectif de dépense, il faudra compenser en N+1 par des économies supplémentaires le surplus de dépenses constaté en N.

ILLUSTRATION DES CONSÉQUENCES D’UN ONDAM CALCULÉ EN TAUX DE CROISSANCE

 

Année N–1

Année N

Année N+1

Schéma projeté de 3 % de croissance en N et en N+1

1 000

1 030

1 061

Dérapage à 4 % en année N puis croissance à 3 % en N+1

1 000

1 040

1 071

Dépense supplémentaire malgré le respect de l’objectif en N+1

   

10

 Enfin, la mise en réserve d’une partie des dotations intégrées à l’ONDAM est une innovation suggérée par le rapport Briet et inspirée de l’article 51 de la LOLF. Ces dotations sont versées à des organismes divers de sécurité sociale et ne doivent notamment pas être confondues avec les remboursements de soins au profit des assurés. Le dégel des fractions mises en réserve serait décidé en fonction de l’appréciation portée sur la capacité des régimes obligatoires de base à tenir l’ONDAM.

Le rapport Briet identifie quatre dotations sur lesquelles une régulation ex ante est possible et dont l’assiette potentielle atteint 22 milliards d’euros. Les deux principales sont, d’une part, la dotation allouée à la Caisse nationale pour la solidarité et l’autonomie (CNSA), d’un montant de 13,9 milliards d’euros en 2009, qui finance une partie des dépenses des établissements et services pour les personnes âgées et handicapées, et, d’autre part, la dotation pour les missions d’intérêt général et l’aide à la contractualisation (MIGAC), d’un montant de 7,7 milliards d’euros en 2009, perçue par les hôpitaux.

Le rapport précité insiste toutefois sur le fait que, compte tenu de la spécificité des dépenses ainsi financées, la détermination des enveloppes soumises à la mise en réserve doit être réalisée de manière fine. À titre d’exemple, la dotation « MIGAC » finance des services aussi divers et essentiels que l’aide médicale d’urgence (SAMU, SMUR), les centres de dépistage ou la conservation des embryons.

 Le Rapporteur général salue ces évolutions qui contribueront à assurer un meilleur pilotage des dépenses du régime général et des dépenses d’assurance maladie. Il convient toutefois de souligner le fait que ces différents outils ne portent que sur une partie de la dépense des administrations de sécurité sociale. Sont en effet exclues de leur champ :

– les dépenses financées par les régimes obligatoires de base autres que le régime général et relevant des branches vieillesse – les régimes spéciaux de retraite sont donc hors périmètre –, famille et accidents du travail-maladies professionnelles ;

– les dépenses du fonds de solidarité vieillesse ainsi que la partie des dépenses de la CNSA non financées par l’assurance maladie ;

– les dépenses de l’assurance chômage, financées par l’UNEDIC ;

– les dépenses des régimes complémentaires de vieillesse Agirc et Arrco.

II.– DES ÉCONOMIES À RÉALISER SUR LES QUATRE BRANCHES DU RÉGIME GÉNÉRAL

1.– 3 à 4 milliards d’économies annuelles à réaliser sur le régime général

À périmètre courant, la croissance de la dépense du régime général a atteint, en moyenne, 4,5 % sur la période 2005-2009. Le présent article fixe pour objectif de la limiter, en moyenne, à 3,3 % par an de 2011 à 2014. Le graphique ci-dessous illustre cette prévision.

Pour atteindre ce but, entre 3 et 4 milliards d’euros d’économies devront être réalisées chaque année. La diminution du taux de croissance de l’ONDAM de 3,7 % en moyenne entre 2005 et 2009 à 2,9 % en 2011 puis 2,8 % les années suivantes requiert de réaliser environ 1,5 milliard d’euros d’économies par an. Les mesures d’âge prévues dans le cadre de la réforme des retraites entraîneraient, pour la branche vieillesse du régime général, une moindre dépense croissante et comprise entre 0,7 et 1,5 milliard d’euros par an.

Au total, en supposant, par approximation, que la totalité des économies réalisées sur l’ONDAM profitent au régime général, 70 % des économies à réaliser à l’horizon de l’année 2014 seraient couvertes par des mesures concernant la maladie ou la vieillesse. Pour tenir l’objectif de croissance de 3,3 % des dépenses du régime général, les branches famille et AT-MP (accidents du travail et maladies professionnelles) devraient donc être mises à contribution.

Le tableau suivant récapitule ces différents éléments.

ÉCONOMIES À RÉALISER POUR TENIR L’OBJECTIF DE CROISSANCE DE 3,3 % DES DÉPENSES DU RÉGIME GÉNÉRAL

 

2011

2012

2013

2014

Économies cumulées totales à réaliser par rapport à une croissance de 3,3 % des dépenses du régime général

2,5

6,4

9,8

14,1

Économies cumulées à réaliser par rapport à une croissance de 3,7 % de l'ONDAM

1,3

2,9

4,5

6,3

Économies cumulées dues aux mesures d’âge et bénéficiant à la CNAV

0,3

1,1

2,1

3,6

NB : sur les deux premières lignes, les économies sont calculées par rapport à la moyenne constatée entre 2005 et 2009. On estime, par approximation, que les économies réalisées sur l’ONDAM bénéficient en totalité au régime général.

2.– 1,5 milliard d’euros d’économies supplémentaires à réaliser chaque année sur l’assurance maladie

Le présent article prévoit de contenir le taux de croissance annuelle de l’ONDAM à 2,9 % en 2011 puis à 2,8 % les années suivantes. Un effort d’économies de grande ampleur devra être réalisé pour tenir un objectif aussi ambitieux. En effet, en dépit des mesures d’économie prises chaque année en loi de financement de la sécurité sociale, la croissance annuelle moyenne de l’ONDAM s’est établie, de 2005 à 2009, à 3,7 %.

Comme l’illustre le graphique suivant, c’est donc un effort supplémentaire de maîtrise de la dépense d’assurance maladie qui devra être fourni. Comme indiqué plus bas, il peut être estimé à 1,3 milliard d’euros en 2011 et à environ 1,5 milliard d’euros par an de 2012 à 2014.

Source : rapport annexé au présent projet de loi.

Calculées par rapport à la croissance spontanée des dépenses, constatée en 2009, soit 4,5 %, les économies à réaliser pour tenir l’ONDAM s’élèveraient, en moyenne, à environ 3 milliards d’euros.

Entre 2005 et 2009, la croissance des dépenses du périmètre de l’ONDAM s’est établie à 3,7 % en moyenne annuelle. L’objectif d’une croissance de 2,9 % revient à ce qu’environ 1,5 milliard d’euros de moindres dépenses se rajoutent aux économies réalisées chaque année depuis 2005.

Le tableau suivant montre le montant des économies cumulées – calculées par rapport à des taux de croissance de la dépense de 3,7 % et 4,5 % – à réaliser pour tenir l’objectif prévu au présent article.

ÉCONOMIES À RÉALISER POUR RESPECTER L’ONDAM

(en milliards d’euros)

 

2011

2012

2013

2014

Économies cumulées à réaliser par rapport à une croissance de 3,7 % de l'ONDAM

1,3

2,9

4,5

6,3

Économies cumulées à réaliser par rapport à une croissance de 4,5 % de l'ONDAM

2,6

5,6

8,7

12,1

Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2011 prévoit 2,5 milliards d’euros d’économies. L’ONDAM serait donc tenu à condition que l’ensemble des économies prévues soit réalisé.

III.– MIEUX PILOTER L’ONDAM POUR LE RESPECTER

La question de la réalisation d’économies encore plus substantielles que celles réalisées depuis 2005 constitue la clé du respect de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie fixé dans le présent article.

Au-delà de cette question, le Rapporteur général souhaite insister sur le fait que les conditions de respect de l’ONDAM, déjà évoquées au moment de l’examen de la première loi de programmation, ne sont toujours pas réunies en dépit du défi à venir.

L’ONDAM n’a, en effet, été respecté qu’une seule fois depuis sa création. Les dépenses d’assurance maladie présentent certes des spécificités par rapport à celles de l’État – notamment leur caractère non limitatif. Toutefois, comme le note le rapport Briet, le respect de l’ONDAM peut être obtenu grâce à une meilleure organisation de l’administration, une modernisation des systèmes d’information et la création de nouveaux outils juridiques.

Tant la Cour des comptes, dans son récent rapport sur la sécurité sociale, que le rapport Briet insistent sur deux éléments explicatifs des dépassements constatés par le passé : les problèmes de construction de l’ONDAM et le suivi infra-annuel de la dépense.

 La construction de l’ONDAM de l’année N, en premier lieu, repose sur la prévision de dépenses de l’année N-1, établie au mois de septembre N-1. Contrairement à la prévision faite pour le budget de l’État à cette période, cette prévision ne se fonde pas sur les résultats de l’exécution à la date la plus récente mais sur une actualisation des hypothèses faites en loi de financement pour N-1. Cet aléa expliquerait, selon la Cour des comptes, un tiers des dépassements constatés depuis 2005.

Compte tenu du fait qu’il est impossible, à court terme, d’améliorer les conditions entourant la réalisation de la prévision, il apparaît nécessaire de tirer les conséquences d’un éventuel rebasage dès les premiers mois de l’année N pour adopter des mesures correctrices au plus tôt. À cet égard, le rapport Briet recommande de prévoir la publication, par le comité d’alerte (77), d’un avis avant le 15 avril de l’année N, pouvant conduire à anticiper le franchissement du seuil d’alerte et à décider de nouvelles économies.

Par ailleurs, les hypothèses de construction de l’ONDAM peuvent se révéler peu sincères et expliquer une part des dépassements constatés en cours d’année. Le taux de croissance spontanée de la dépense peut, en effet, être minoré et les économies attendues de la maîtrise médicalisée majorées – leur taux de réalisation atteignant en moyenne 60 %. Le rapport Briet recommande, à cet égard, d’étendre la compétence du comité d’alerte à la réalisation d’une expertise technique des hypothèses sous-tendant la détermination de l’ONDAM en loi de financement.

 Le suivi infra-annuel de la dépense, en second lieu, apparaît encore déficient malgré les progrès réalisés au cours des dernières années grâce à la création du comité d’alerte. Le caractère non limitatif des dépenses d’assurance maladie rend un tel pilotage plus difficile que celui des dépenses de l’État puisqu’il empêche l’utilisation de mesures de régulation existant pour celles-ci – réserve de précaution, annulations et reports de crédits… Toutefois, des améliorations peuvent lui être apportées.

L’efficacité du comité d’alerte pourrait être accrue. Comme le proposait le Rapporteur général au moment de l’examen de la précédente loi de programmation, le seuil d’alerte doit être abaissé à 0,5 % – soit environ 800 millions d’euros en 2010 – contre 0,75 % actuellement – 1,2 milliard d’euros en 2010. Le rapport Briet recommande de mener cette évolution progressivement sur les années 2011 et 2012.

Le dépassement du seuil d’alerte en 2007 a, par ailleurs, prouvé la lenteur de la procédure menant de l’avis donné par le comité d’alerte à l’adoption des mesures correctrices. À la suite de l’avis donné le 6 avril 2007, les mesures n’ont pu être prises qu’entre les mois d’août et de novembre et n’ont donc eu qu’un impact limité sur l’année 2007 – 250 millions d’euros d’économies, permettant une réduction de seulement 8 % du dépassement constaté en fin d’année. Un raccourcissement des procédures pourrait donc être envisagé.

Enfin, comme le Rapporteur général le soulignait déjà au moment de l’examen de la précédente loi de programmation, la mise en œuvre conditionnelle des mesures nouvelles constitue un axe à privilégier dans les années à venir. L’article 36 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2008 prévoit déjà un mécanisme permettant de suspendre une hausse des tarifs prévue dans le cadre de négociations conventionnelles si le comité d’alerte estime qu’il existe un risque sérieux de dépassement de l’ONDAM. Un tel dispositif gagnerait à être généralisé à l’ensemble des mesures sur lesquelles les gestionnaires disposent d’un levier d’action (mesures d’amélioration de la prise en charge pour certains actes ou assurés, créations de places dans le secteur médico-social…).

*

* *

La Commission est saisie de l’amendement CF 5 rectifié de M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. Lors de l’examen des lois de financement de la sécurité sociale, nous avons une fâcheuse tendance à ne considérer que le régime général. Il représente entre 75 et 80 % des dépenses d’assurance maladie, mais seulement entre 52 et 54 % des dépenses de retraite – et je n’évoque même pas la branche des accidents du travail et des maladies professionnelles. Or, on n’équilibrera pas les dépenses de protection sociale en se contentant d’équilibrer celles du régime général. Ce sont donc les régimes obligatoires de base qu’il faut prendre en considération.

M. le rapporteur général. Avis favorable.

M. le ministre. Même avis.

M. Christian Eckert. Dans cette hypothèse, ne faudrait-il pas procéder à un ajustement des tableaux ?

M. le rapporteur général. Vous avez raison, mais nous ne disposons pas des chiffres pour le moment. Nous le ferons dans le cadre de l’article 88 de notre Règlement.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’article 8 ainsi modifié.

*

* *

Chapitre III

L’ÉVOLUTION DES RECETTES PUBLIQUES

Article 9

Encadrement des mesures nouvelles afférentes aux prélèvements obligatoires

Le présent article a pour objet de fixer un montant minimum de hausse des prélèvements obligatoires à réaliser chaque année de la période de programmation. Il fixe un objectif et offre un outil intéressant de pilotage du volet fiscal de la politique budgétaire du Gouvernement dans un contexte de réduction progressive du déficit structurel.

Le dispositif proposé constitue un progrès notable par rapport aux règles de protection des recettes prévues dans la précédente loi de programmation – la trajectoire « garantie » de recettes et la règle de gage des dépenses fiscales. Il neutralise les effets de la conjoncture sur les prélèvements obligatoires, se concentre uniquement sur les mesures discrétionnaires et est adapté à l’objectif de recherche de nouvelles ressources publiques.

I.– LES DÉFAUTS DES RÈGLES DE PROTECTION DES RECETTES PRÉVUES DANS LA PRÉCÉDENTE LOI DE PROGRAMMATION

La précédente loi de programmation prévoyait deux règles de protection des recettes. Elles pâtissaient de défauts de conception et poursuivaient un objectif de stabilité des recettes, qui n’est plus adapté aux conditions budgétaires de l’après-crise.

A.– LA TRAJECTOIRE GARANTIE DE RECETTES, SOURCE D’EFFETS PERVERS

L’article 10 de la précédente loi de programmation des finances publiques prévoyait une première règle de protection des recettes. Il déterminait les trajectoires des recettes fiscales nettes de l’État et des recettes des régimes obligatoires de base de la sécurité et prévoyait le gage de toute mesure nouvelle conduisant à dégrader ces objectifs de recettes.

La règle consistait donc à garantir, à l’État et aux régimes obligatoires de base, un niveau minimum de recettes chaque année de la période de programmation. Une diminution des ressources de l’État et des régimes obligatoires de base de la sécurité sociale ne pouvait être admise qu’à la condition de ne pas mettre en danger la trajectoire prévue. Elle ne pouvait donc avoir lieu qu’à la condition que les recettes de l’année soient supérieures au plancher qui leur avait été fixé en loi de programmation.

Du fait de la corrélation entre le niveau des prélèvements obligatoires et la conjoncture économique, cette première règle présentait le défaut majeur de permettre des allègements d’impôts ou de cotisations sociales en haut de cycle économique, au moment où le produit des prélèvements obligatoires est souvent supérieur aux prévisions du fait notamment des incertitudes sur leur élasticité à la croissance du PIB.

Or, une telle pratique présente un double désavantage. D’une part, elle tend à stimuler l’économie au moment où des mesures de « refroidissement » devraient être prises. D’autre part, l’un des facteurs expliquant la hausse continue de la dette publique depuis trente ans est l’absence de mise à profit des périodes de « vache grasse » pour réduire le déficit public. Or, la règle n’imposait aucune contrainte dès lors que les recettes étaient supérieures au seuil fixé.

Dans ces conditions, la disparition de cette première règle paraît bienvenue.

B.– LA RÈGLE DE GAGE, MOINS PERTINENTE DANS UN CONTEXTE DE HAUSSE DES RESSOURCES

La règle de gage des niches fiscales et sociales, prévue à l’article 11 de la précédente loi de programmation, était adaptée à la politique budgétaire d’avant-crise, dont l’un des objectifs était de garantir la stabilité des recettes. L’impact de la récession sur le niveau de la dette publique conduit aujourd’hui à rechercher de nouvelles ressources. Dans un tel contexte, la règle de gage perd sa pertinence.

Sa disparition est d’autant plus acceptable que les modalités de sa mise en œuvre avaient réduit sa portée. Alors que l’article 11 de la précédente loi de programmation prévoyait que l’appréciation du respect de la règle devait se faire sur une base annuelle, le Gouvernement a considéré qu’une base pluriannuelle était préférable. Une telle approche contribuait à vider la règle de sa substance en conduisant à estimer, par exemple, que l’adoption du taux réduit de TVA dans la restauration était gagée à l’horizon 2013 alors qu’elle dégradait de 3 milliards d’euros le compteur de dépenses fiscales.

En dépit de la disparition de la règle de gage, il est important que l’information du Parlement sur les niches fiscales et sociales soit assurée. Il convient de maintenir les informations, incluses dans le tome II de l’annexe relative à l’évaluation des voies et moyens et l’annexe 5 du projet de loi de financement de la sécurité sociale, qui permettaient de vérifier le respect de la règle en récapitulant l’ensemble des mesures de créations, extensions, suppressions et diminutions de dépenses fiscales. Le II de l’article 13 du présent projet de loi, qui prévoit le maintien de ces informations, est bienvenu. Outre ce « compteur de gage », les récapitulatifs annuels sur les classements et déclassements de dispositifs doivent être également conservés.

À noter enfin que l’article 11 de la précédente loi de programmation prévoyait également que les créations ou extensions de niches fiscales ou sociales n’étaient applicables qu’au titre des quatre années suivant leur entrée en vigueur. Cette disposition, de caractère non normatif, est abrogée, avec le reste de la première loi de programmation, par l’article 14 du présent projet de loi.

II.– UNE NOUVELLE RÈGLE POUR UNE HAUSSE PROGRESSIVE DES RESSOURCES PUBLIQUES

La règle prévue dans le présent article constitue un progrès notable. Elle prévoit que l’impact budgétaire des mesures nouvelles relatives aux prélèvements obligatoires, décidées par le Gouvernement ou le Parlement, doit être supérieur, chaque année, à un plancher fixé par le présent article.

Une telle règle permet d’offrir une vision synthétique de l’orientation de la politique fiscale du Gouvernement et est adaptée au contexte budgétaire de l’après-crise.

Rappelons que le rapport sur les prélèvements obligatoires et leur évolution, annexé aux projets de loi de finances, les définit comme « l’ensemble des impôts et cotisations sociales prélevés par les administrations publiques et les institutions européennes, déduction faite des impôts et cotisations dus non recouvrés ».

A.– LES MESURES NOUVELLES, FACTEUR DE VARIATION DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES QUE L’ÉTAT PEUT CONTRÔLER

1.– Avantages et inconvénients de la focalisation sur les mesures nouvelles

 La présente règle porte sur les « mesures nouvelles afférentes aux prélèvements obligatoires ». Elles recoupent l’ensemble des mesures discrétionnaires – donc maîtrisables par le Gouvernement et le Parlement – ayant un impact sur le rendement de l’un des prélèvements – impositions de toute nature, cotisations sociales.

Elle exclut donc l’incidence de la croissance spontanée des prélèvements obligatoires, laquelle constitue l’autre facteur d’évolution du produit des prélèvements obligatoires. La croissance spontanée correspond à la dynamique de l’assiette des impositions de toute nature ou cotisations sociales et son évolution est, directement ou indirectement, corrélée à des variables macroéconomiques – croissance des revenus, inflation, évolution des marchés financiers…

 En se focalisant sur les mesures nouvelles et en excluant l’incidence de la croissance spontanée des recettes, la présente règle est dépourvue d’une partie des effets pervers de la précédente trajectoire garantie de recettes et permet d’appréhender l’impact des décisions du Gouvernement sur le niveau des recettes.

Le Rapporteur général remarque néanmoins que la croissance spontanée des prélèvements obligatoires inclut l’effet de dispositifs fiscaux pouvant minorer fortement les recettes. À titre d’exemple, les crédits d’impôt « intéressement » ou « recherche » pourraient connaître, au moment de la reprise économique, une forte hausse de leur coût en raison de la corrélation entre leur assiette et l’activité économique.

C’est pourquoi il apparaît nécessaire de compléter la présente règle par un objectif de coût des dépenses fiscales sur chaque année de la durée de programmation. Un tel objectif est fixé, chaque année depuis la loi de finances pour 2009, dans l’exposé des motifs de l’article 1er du projet de loi de finances initiale. Il gagnerait à être intégré à la programmation en prévoyant, à l’instar des dépenses de l’État hors pensions et charge de la dette, un gel de son montant jusqu’en 2014.

Un objectif similaire existe, pour les niches sociales, à l’annexe 5 du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Un gel en valeur pourrait également lui être appliqué.

 À noter que les mesures de périmètre ou de transfert en recettes constituent, pour un sous-secteur d’administration publique, un facteur ayant une incidence sur le produit d’une imposition qui lui est affectée. De telles mesures, internes aux administrations publiques, ne sont pas à prendre en compte dans le cadre de la présente règle qui englobe l’ensemble des prélèvements obligatoires, sans considération de leur affectation à tel ou tel sous-secteur d’administration publique.

B.– LE CHAMP COUVERT PAR LA NOTION DE « MESURES NOUVELLES »

 La notion de « mesures nouvelles » apparaît relativement large. Sur la base de la définition donnée par l’annexe relative à l’évaluation des voies et moyens, on peut la définir comme toute mesure ayant une incidence sur le produit des prélèvements obligatoires de l’année concernée. Le rapport annexé au présent projet de loi mentionne la modification des taux d’imposition ou des assiettes, la création, la modification et la suppression des crédits d’impôts, la création de nouveaux impôts ou la suppression d’impôts existants.

Le champ de la règle couvre donc l’ensemble des mesures ayant un impact sur le rendement des impositions de toute nature ou des cotisations sociales. Il est donc plus étendu que celui de la règle de gage, qui portait uniquement sur les dépenses fiscales et les niches sociales.

Il convient, par ailleurs, de noter que l’effort en recettes ainsi calculé annuellement ne correspond pas exactement au volet « recettes » de la notion d’effort structurel, développée par la Direction générale du Trésor. L’effort structurel mesurant les mesures discrétionnaires venant en réduction du déficit structurel, il ne prend en compte ni les mesures exceptionnelles ni les mesures de trésorerie.

B.– COMMENT MESURER L’IMPACT FINANCIER DES MESURES NOUVELLES ?

Comme l’indique le rapport annexé au présent projet de loi, le mode de comptabilisation de l’impact budgétaire des mesures nouvelles est identique à celui défini par l’annexe relative à l’évaluation des voies et moyens. Cette méthode, décrite ci-dessous pour chaque type de mesure, garantit la bonne information du Parlement car elle prend en compte l’incidence budgétaire de l’ensemble des mesures nouvelles, quelle que soit leur nature.

Toutefois, comme indiqué plus haut, elle ne prend pas en compte la dynamique des niches fiscales et sociales, ce qui justifie, aux yeux du Rapporteur général, la mise en place d’objectifs ad hoc pour ce type de mesures.

Le mode de comptabilisation de l’impact financier des mesures est adapté à la nature de ces mesures qui peuvent relever des cas suivants :

– mesures pérennes ;

– mesures exceptionnelles ou mesures venant à expiration ;

– effets d’extension en année pleine de mesures mises en œuvre au cours de l’année précédente ;

– mesures ayant une incidence supplémentaire par rapport à l’année précédente.

 La comptabilisation des mesures pérennes est simple. Leur impact budgétaire est pris en compte la première année de leur mise en œuvre. Par la suite, le coût ou le gain découlant de la mesure n’est plus pris en compte dans le décompte des mesures nouvelles car la dynamique de l’assiette relève de la croissance spontanée des impositions. Le tableau suivant illustre le mode de comptabilisation de quelques mesures pérennes prévues dans le projet de loi de finances pour 2011.

EXEMPLES DE COMPTABILISATION DE MESURES NOUVELLES PÉRENNES

(en millions d’euros)

 

2011

2012

2013

Suppression du crédit d’impôt attaché aux revenus distribués de source française ou étrangère

+ 645

0

0

Suppression du seuil de cession pour l’imposition sur le revenu des gains de cession de valeurs mobilières

0

+ 180

0

 Bien qu’elles ne soient pas pérennes et ne dégradent pas le déficit structurel, les mesures exceptionnelles doivent être intégrées au périmètre de la règle pour assurer une information exhaustive du Parlement. Comme illustré par le tableau suivant, une mesure de cette nature a un impact l’année de sa mise en œuvre. Quand elle disparaît, elle a une incidence budgétaire identique à celle d’une mesure venant à expiration car l’on considère qu’elle est, en quelque sorte, source de ressources nouvelles. Du point de vue comptable, une mesure exceptionnelle est, en quelque sorte, une mesure pérenne l’année de sa mise en œuvre et une mesure venant à expiration l’année de sa disparition. Sur la durée de la programmation, l’effet budgétaire de la mesure est nul, ce qui est cohérent avec son caractère transitoire.

EXEMPLE DE COMPTABILISATION D’UNE MESURE EXCEPTIONNELLE CLASSIQUE

(en millions d’euros)

 

2011

2012

2013

Taxe exceptionnelle sur la réserve de capitalisation

+ 1 700

– 1 700

0

Les mesures de trésorerie sont à considérer comme des mesures exceptionnelles et leur impact doit être comptabilisé de la même manière. Ces mesures consistent à avancer dans le temps la perception d’un impôt ou le paiement d’une créance sur l’État. À titre d’illustration, la pérennisation du remboursement anticipé des créances de crédit d’impôt recherche aux PME conduit à une perte de recettes de 311 millions d’euros en 2011. Les années suivantes, en revanche, on constate un flux positif correspondant aux montants des créances que l’État aurait dû honorer mais qui l’ont déjà été en 2011. De même, l’imposition aux contributions sociales des compartiments euros des contrats d’assurance-vie multisupports au fil de l’eau conduit à percevoir, dès 2011, des ressources qui auraient dû l’être à la fin des contrats. Dorénavant, au moment de la clôture d’une assurance-vie, par exemple en 2013, l’État ne percevra plus les ressources qui auraient pu lui être versées à ce moment-là mais qui l’ont été dès 2011. Ce manque à gagner doit être comptabilisé comme une perte de recettes. On constate, qu’à l’instar des mesures exceptionnelles classiques, les mesures de trésorerie sont neutres pour le budget de l’État une fois que les dettes ou les créances de l’État ont été entièrement honorées.

EXEMPLE DE COMPTABILISATION DE L’INCIDENCE BUDGÉTAIRE
D’UNE MESURE DE TRÉSORERIE

(en millions d’euros)

 

2011

2012

2013

Remboursement anticipé des créances de crédit d’impôt recherche aux PME

– 311

+ 37

+ 34

Imposition aux contributions sociales des compartiments euros des contrats d’assurance-vie multisupports au fil de l’eau

+1 600

– 200

– 200

 L’extension en année pleine d’une mesure nouvelle implique une incidence budgétaire supplémentaire. À titre d’exemple, la réduction à 25 % du crédit d’impôt sur les équipements photovoltaïques entrerait en vigueur à compter du 29 septembre 2010. Sur les trois derniers mois de 2010, la mesure générerait un produit de 150 millions d’euros. En 2011, elle est étendue en année pleine et il convient de comptabiliser le surplus de produit qui en découle. Sur les neuf premiers mois de l’année, ce « flux » supplémentaire est évalué à 450 millions d’euros. L’addition des incidences budgétaires comptabilisées en 2010 et 2011 correspond au rendement de la mesure en année pleine – dans l’exemple, 600 millions d’euros. À noter que, à compter de 2012, en l’absence de nouvelle modification législative ou réglementaire, la mesure ne doit plus être comptabilisée dans le compteur prévu au présent article, la dynamique de l’assiette étant, comme indiqué plus haut, intégrée à la croissance spontanée de l’imposition. Le tableau suivant illustre le mode de comptabilisation de l’incidence budgétaire de l’extension en année pleine d’une mesure nouvelle.

EXEMPLE DE COMPTABILISATION DE L’INCIDENCE BUDGÉTAIRE DE L’EXTENSION EN ANNÉE PLEINE D’UNE MESURE NOUVELLE

(en millions d’euros)

 

2010

2011

2012

2013

Réduction à 25 % du crédit d’impôt sur les équipements photovoltaïques

+ 150

+ 450

0

0

 La comptabilisation des mesures ayant une incidence supplémentaire par rapport à l’année précédente est identique à celle de l’extension en année pleine décrite ci-dessus. Seul le « flux » supplémentaire de recettes est pris en compte. À titre d’exemple, dans le cas de la montée en charge d’une dépense fiscale, le coût supplémentaire à prendre en compte est lié à la hausse du nombre de bénéficiaires de la mesure. Quand celui-ci est stabilisé, la mesure est en régime de croisière et il n’y a plus lieu de prendre en compte son coût dans le calcul de la règle prévue au présent article. Le tableau suivant illustre la comptabilisation d’une telle montée en charge avec le cas du crédit d’impôt sur l’intéressement prévu dans la loi en faveur des revenus du travail – les évaluations correspondant à celles réalisées au moment du vote de la loi.

EXEMPLE DE COMPTABILISATION DE L’INCIDENCE BUDGÉTAIRE DE L’EXTENSION
EN ANNÉE PLEINE D’UNE MESURE NOUVELLE

(en millions d’euros)

 

2009

2010

2011

2012

2013

Crédit d’impôt sur les sociétés en faveur de l’intéressement

0

– 520

– 270

– 450

0

C.– UN CHAMP COUVRANT LA QUASI TOTALITÉ DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES

En prévoyant que sont concernées les mesures votées par le Parlement ou prises par le Gouvernement par voie réglementaire, la présente règle couvre la grande majorité des prélèvements obligatoires. Seraient exclues du champ :

– les mesures nouvelles décidées par les collectivités territoriales, à savoir les modifications de taux des impôts locaux – cotisation foncière des entreprises, taxe d’habitation, taxes foncières sur le bâti et le non bâti – qui sont décidées par les collectivités territoriales (78) ;

– les mesures nouvelles décidées par les partenaires sociaux, c’est-à-dire les mesures relatives aux cotisations sociales perçues par l’UNEDIC et les régimes complémentaires de vieillesse.

En intégrant les mesures relatives aux impositions affectées aux organismes divers d’administration centrale ainsi qu’une partie de celles modifiant le produit des impôts locaux (mesures d’assiette, dégrèvements, exonérations), le champ couvert par la règle est donc plus étendu que celui de la trajectoire garantie de recettes, prévue dans la précédente loi de programmation, qui ne couvrait que les recettes fiscales nettes de l’État et les recettes des régimes obligatoires de base.

D.– LA QUESTION DES CIRCONSTANCES EXCEPTIONNELLES

La règle prévue au présent article ne prévoit pas de dérogation en cas de circonstances exceptionnelles. En d’autres termes, elle exclut la possibilité de recourir, en cas de récession, à des mesures fiscales semblables à celles utilisées dans le cadre du plan de relance.

S’il peut être avancé que l’absence d’une telle dérogation est critiquable du fait de la nécessité de soutenir l’économie en bas de cycle, deux éléments nuançant un tel argument sont à rappeler. Rappelons, d’une part, que la présente règle a une portée programmatique et n’a pas valeur normative et laisse le Gouvernement libre de réagir comme il le souhaite à une situation exceptionnelle. Dans le cas d’une récession d’une ampleur semblable à celle de 2009, il serait nécessaire et souhaitable que le Gouvernement s’affranchisse de la présente règle et mobilise la fiscalité comme outil de stimulation contra-cyclique. D’autre part, contrairement à la précédente règle de trajectoire garantie de recettes, la règle prévue au présent article exclut de son champ les variations liées à la croissance spontanée des prélèvements obligatoires et permet donc de laisser jouer librement les stabilisateurs automatiques. Ce mode d’amortissement des crises économiques paraît suffisant en cas de simple ralentissement de la croissance économique comme celui de 2002-2003.

III.– UN OBJECTIF ADAPTÉ AU CONTEXTE DE L’APRÈS-CRISE

« Dans la phase de sortie de crise, la fiscalité doit désormais contribuer au redressement des comptes publics. » Le rapport annexé au présent projet de loi indique clairement que les prélèvements obligatoires ne doivent plus être considérés seulement comme un instrument de politique économique, mais comme les ressources permettant de financer les dépenses publiques.

Dans le contexte de l’après-crise, un effort progressif de rétablissement des ressources publiques doit être mené. Il est traduit par les objectifs fixés dans le présent article et rappelés dans le tableau suivant.

IMPACT ANNUEL DES MESURES NOUVELLES AFFÉRENTES AUX PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES VOTÉES PAR LE PARLEMENT OU PRISES PAR LE GOUVERNEMENT
PAR VOIE RÉGLEMENTAIRE

(en milliards d’euros)

2011

2012

2013

2014

10

3

3

3

Le présent objectif ne semble ni inclure les mesures antérieures, ni correspondre à la notion d’ « effort structurel ».

À noter que le montant de 10 milliards ne correspond pas exactement au montant attendu du produit des mesures prévues en projets de loi de finances et de financement pour 2011, récapitulées dans le tableau suivant.

IMPACT EN 2011 DES MESURES NOUVELLES PRÉVUES DANS LES PROJETS DE LOI DE FINANCES ET DE FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE

(en milliards d’euros)

Mesures « retraites »

3,7

Mesures « CADES »

3,2

Autres mesures prévues dans le PLF

2,8

Autres mesures prévues dans le PLFSS

0,8

TOTAL

10,6

Après prise en compte des seules mesures pérennes, prévues dans les projets de loi de finances et de financement ou antérieures à ceux-ci, l’impact des mesures discrétionnaires sur les prélèvements obligatoires s’établirait, comme le montre le tableau suivant, à 7,3 milliards d’euros.

IMPACT EN 2011 DES MESURES PÉRENNES PORTANT SUR LES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES

(en milliards d’euros)

Mesures prévues en PLF et PLFSS

10,7

Mesures prévues non pérennes:

 

Recouvrement CSG assurance-vie

-1,6

Taxe exceptionnelle réserve de capitalisation

-0,8

Mesures pérennes prévues en PLF et PLFSS

8,3

Effet net des mesures pérennes antérieures

-1

Effort net pérenne à réaliser

7,3

1.– L’absence de prise en compte des mesures antérieures

Le dispositif proposé ne précise pas la date d’adoption des mesures à partir de laquelle il convient de comptabiliser les mesures nouvelles. Il a donc vocation à inclure l’impact de l’ensemble des mesures antérieures aux projets de loi de finances et de financement pour 2011. Or, il ne semble pas qu’un tel impact ait été comptabilisé dans l’objectif de 10 milliards d’euros prévu pour 2011.

Trois types de mesures antérieures sont à distinguer.

En premier lieu, certaines mesures pérennes antérieures auraient un effet supplémentaire en 2011 et diminueraient le produit des prélèvements obligatoires d’environ 1 milliard d’euros. Elles sont récapitulées dans le tableau suivant.

IMPACT BUDGÉTAIRE EN 2011 DES MESURES NOUVELLES PÉRENNES EN MATIÈRE FISCALE

(en millions d’euros)

Impact des mesures antérieures pérennes augmentant le niveau des recettes

1 000

Dont suppression demi-part veufs

190

Dont mesure bio-carburants

163

Impact des mesures antérieures dégradant le niveau des recettes

–2 007

Dont crédit d’impôt intéressement

– 406

Dont crédit d’impôt recherche

– 600

Dont suppression IFA

– 363

TOTAL

– 1 007

En deuxième lieu, la disparition des mesures exceptionnelles impactant l’année 2010, hors réforme de la taxe professionnelle, a un impact mécanique à la hausse sur les prélèvements obligatoires en 2011. Les mesures fiscales temporaires ont un coût estimé à 3 milliards d’euros en 2010, entraînant un rebond de même ampleur des recettes en 2011. La principale d’entre elles est la prorogation du remboursement anticipé de crédit d’impôt recherche, d’un montant de 2,5 milliards d’euros.

Enfin, les mesures exceptionnelles liées à la suppression de la taxe professionnelle conduisent à comptabiliser en mesure nouvelle, en 2011, un surplus d’impôt sur les sociétés, lié à la disparition de cette taxe déductible et évalué à 2,1 milliards d’euros en 2011. La disparition du versement aux entreprises de dégrèvements dus au titre des impositions payées les années précédentes constitue également, au sens de l’annexe relative à l’évaluation des voies et moyens, une mesure nouvelle, d’un montant évalué, en projet de loi de finances pour 2010, à 5 milliards d’euros. Le décalage dans les versements des nouvelles impositions (400 millions d’euros reportés de 2010 à 2011) doit également être pris en compte. En revanche, il n’existe pas, en 2011, d’impact supplémentaire des mesures destinées à compenser les pertes des « perdants » à la réforme.

Au total, la disparition des effets temporaires constatés en 2010 du fait de la suppression de la taxe professionnelle entraînerait une hausse mécanique des prélèvements obligatoires de l’ordre de 7,5 milliards d’euros en 2011.

2.– L’absence de distinction entre mesures pérennes et mesures temporaires

 Le présent article ne distingue pas les mesures pérennes des mesures temporaires.

Prévoir un objectif de mesures pérennes en matière de prélèvements obligatoires présente pourtant un double avantage. D’une part, il permet de mettre en lumière les effets des mesures discrétionnaires prises par le Gouvernement. Il constitue donc un « tableau de bord » du volet fiscal de la politique budgétaire. D’autre part, il permet de mesurer l’ « effort structurel » en recettes, c’est-à-dire la réduction annuelle du déficit structurel due aux mesures discrétionnaires prises sur les prélèvements obligatoires.

La prise en compte des mesures pérennes antérieures est également nécessaire car elle permet de prendre en considération l’impact sur les recettes de la montée en charge de divers dispositifs, particulièrement des dépenses fiscales, pouvant produire des effets plusieurs années après leur adoption.

La prise en compte des décisions passées peut donc prendre deux formes différentes :

– la prise en compte de l’impact des mesures antérieures dans le cadre des objectifs prévus au présent article ;

– la prise en compte de la dynamique des dépenses fiscales, après montée en charge des dispositifs, qui n’impacte pas le montant des mesures nouvelles mais de la croissance spontanée des prélèvements obligatoires. Elle peut être appréhendée par l’objectif de dépenses fiscales décrit dans l’exposé des motifs de l’article 1er des projets de loi de finances initiale.

 Pour 2011, le montant des mesures pérennes prévu par le Gouvernement s’établirait à 8,3 milliards d’euros (79). L’impact des mesures pérennes antérieures, indiqué plus haut, conduirait à diminuer le rendement des prélèvements obligatoires de 1 milliard d’euros.

Les mesures pérennes en matière de prélèvements obligatoires conduiraient donc à augmenter le produit des prélèvements obligatoires de 7,3 milliards d’euros en 2011.

3.– Un effort pour 2012 déjà partiellement financé

À noter que les deux tiers de l’effort en prélèvements obligatoires seraient financés dès le projet de loi de finances pour 2011. Celui-ci prévoit plusieurs mesures dont l’impact sera constaté en 2012, notamment le « rabot » sur les niches fiscales, évalué à 440 millions d’euros, et l’aménagement du crédit d’impôt développement durable (680 millions d’euros supplémentaires par rapport à 2011).

IMPACT EN 2012 DES MESURES NOUVELLES PRÉVUES DANS LES PROJETS DE LOI DE FINANCES ET DE FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE

(en milliards d’euros)

Mesures « CADES »

– 0,2

Mesures prévues dans le PLF

2,1

Mesures prévues dans le PLFSS

0

TOTAL

1,9

*

* *

La Commission examine l’amendement CF 6 de M. Charles de Courson, tendant à modifier l’intitulé du chapitre III.

M. Charles de Courson. Nous proposons d’intituler le chapitre III « L’évolution des prélèvements obligatoires ». Je rappelle que le taux de prélèvements obligatoires est tombé à 41,6 % du PIB en 2009, après avoir atteint un pic de 43,9 % en 2006 – la perte due à la crise pourrait atteindre 2,3 points. Le taux devrait remonter à 41,9 % cette année et à 42,9 % en 2011, puis atteindre 43,2 % du PIB en 2012, soit le même niveau qu’en 2007.

M. le rapporteur général. Avis défavorable, notamment au vu de l’amendement CF 7. Ce texte constitue un progrès méthodologique considérable par rapport à la précédente loi de programmation. Toute la difficulté est de garantir l’évolution des recettes en évitant de les « trouer » à coups de dépenses fiscales dont on ne maîtrise pas la dynamique, puisqu’elles fonctionnent sous la forme de guichets ouverts. La précédente loi de programmation demandait que l’on gage les dépenses fiscales nouvelles en supprimant d’autres dépenses. Mais nous ne l’avons pas fait lorsque le taux de 5,5 % de TVA a été appliqué à la restauration. Il nous est proposé de raisonner désormais en termes de « mesures nouvelles », en prenant probablement comme point de départ le mois de juillet 2010 afin d’écarter les mesures exceptionnelles liées au plan de relance. Il s’agira de fixer une séquence de produit minimum que doivent rapporter les mesures nouvelles – aussi bien les réductions de niches fiscales et les hausses d’impôts que les dispositifs entraînant des baisses de recettes. La séquence prévue par le Gouvernement est de 10 milliards d’euros en 2011, puis de 3 milliards au cours des années suivantes, ce qui coïncide avec les évolutions prévues au début de l’année dans le cadre du programme de stabilité.

Le président Cahuzac demandait tout à l’heure quelles seraient la part de l’augmentation de la pression fiscale et celle des évolutions spontanées. La sortie de la crise devrait favoriser la reconstitution spontanée des recettes, qui sera accélérée par leur élasticité. Depuis 1998, on a en effet constaté que les recettes redémarraient plus vite que la croissance, et diminuaient plus vite qu’elle – c’est ce coefficient qu’on nomme « élasticité ». Compte tenu des effets combinés de l’augmentation de la croissance et de l’élasticité des recettes, pour laquelle le Gouvernement a fait des prévisions tout à fait raisonnables, les trois quarts de l’augmentation attendue devraient être de nature spontanée. Si l’on adoptait les amendements CF 6 et CF 7 de notre collègue, nous mélangerions de nouveau la croissance spontanée et les mesures nouvelles. Or, seules les mesures nouvelles sont de nature discrétionnaire. Il convient donc d’établir une distinction.

M. le président Jérôme Cahuzac. Ce sont 10 milliards d’euros de recettes nouvelles qui sont attendus en 2011. Cependant, nous savons que ces mesures ne seront pas toutes pérennes. Affirmer qu’il faudra seulement 3 milliards d’euros supplémentaires en 2012 revient à sous-estimer la réalité : certaines mesures ne produiront pas les mêmes recettes qu’en 2011, ce qui appellera une compensation.

Quant à la décomposition entre les mesures nouvelles et l’accroissement spontané des recettes, je trouve que le rapporteur général fait preuve d’une grande audace. Si l’on en croit le rapport du ministère du Budget sur les prélèvements obligatoires et leur évolution en 2011, la contribution des mesures nouvelles devrait être de 0,9 point l’année prochaine, contre seulement 0,1 point pour l’augmentation des recettes due à la croissance. Le raisonnement du rapporteur général sera peut-être juste sur une période plus longue, mais en 2011 l’essentiel viendra des mesures nouvelles.

M. le rapporteur général. Les mesures nouvelles font l’objet, depuis toujours, d’une comptabilité un peu particulière. En 2010, par exemple, la réforme de la taxe professionnelle crée une sorte de « bosse » : avec le passage du dispositif en vitesse de croisière, on comptera en mesures nouvelles 3 milliards d’euros qui ne reflètent, en réalité, qu’un retour à la situation initiale. De même, l’instauration d’une exit tax sur les compagnies d’assurance rapportera 850 millions d’euros en 2011 et autant en 2012, mais rien ne sera comptabilisé au titre des mesures nouvelles en 2012, car le produit attendu sera le même que l’année précédente, et l’on comptabilisera une baisse de 850 millions en 2013.

M. Charles de Courson. Le document cité par notre président est probablement entaché d’erreurs. La seule certitude est que les prélèvements obligatoires augmenteront globalement d’un point. Les mesures relatives aux niches fiscales représentant 0,5 point. Il y a manifestement un problème de méthodologie, peut-être lié à l’existence de mesures négatives de non-reconduction.

M. le ministre. Concernant les 10 milliards d’euros, la seule mesure qui ne soit pas pérenne est l’exit tax.

En 2012, le taux de prélèvements obligatoires retrouvera dans notre pays le niveau qu’il avait en 2007, et ce sera également le cas en Allemagne. Cela dit, nous pouvons nous interroger sur la pertinence de ce ratio calculé par rapport à la richesse nationale, sachant qu’il est pour une grande part lié à l’activité économique et à l’évolution du PIB. La divergence qui existe entre Dominique Strauss-Kahn et le Gouvernement vient du fait que nous nous prévoyons, en ce qui nous concerne, que toutes les recettes supplémentaires liées à l’activité économique seront affectées à la réduction des déficits. Nous échappons donc au risque potentiel – et absurde, compte tenu de notre niveau d’endettement – d’une éventuelle cagnotte. De toute façon, vous réglerez le problème en votant ce projet de loi.

Je soutiens par ailleurs l’idée que les niches fiscales sont un élément de la gestion des dépenses de l’État et correspondent à son choix de donner une impulsion à telle ou telle activité économique ou de soutenir tel ou tel dispositif. Lorsque le ministre du budget que je suis diminue ou supprime les niches fiscales, il réduit la dépense de l’État.

M. le président Jérôme Cahuzac. Le fait d’affecter le surplus de recettes au désendettement est très pertinent, mais je vous rappelle que la dépense liée à la baisse du taux de la TVA dans la restauration a été gagée par un surplus de recettes que l’État n’attendait pas. Vous soutenez, monsieur le ministre, que c’est en fin d’année qu’il faut constater l’éventuel surplus de recettes. Mais si tous les surplus constatés en cours d’année sont affectés à d’autres dépenses, il ne subsistera plus à la fin de l’année le moindre surplus de recettes pour contribuer au désendettement !

Maintenez-vous votre doctrine selon laquelle les surplus constatés en cours d’année pourront être utilisés pour autre chose que le désendettement, ou estimez-vous au contraire qu’ils devront être réservés au désendettement ? Si tel est le cas, vous avez changé de doctrine. D’ailleurs, si elle avait été appliquée lors de la baisse de la TVA dans la restauration, cette dernière n’aurait pas été gagée.

M. le ministre. Je suis favorable à une affectation régulière des surplus de croissance – grâce à la publication des chiffres et à l’application de la loi de programmation des finances publiques – à la réduction des déficits.

M. le président Jérôme Cahuzac. Je me réjouis d’une telle évolution.

La Commission rejette l’amendement CF 6.

La Commission est ensuite saisie de l’amendement CF 7 de M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. Cet amendement vise à faire figurer à l’article 9 l’augmentation en pourcentage des prélèvements obligatoires prévue d’ici à 2014, sachant qu’ils devront augmenter d’environ 1 point pour redresser les finances publiques. Je regrette que nous n’ayons pas inscrit cette précision pour les dépenses.

M. le rapporteur général. Avis défavorable.

M. le ministre. Avis également défavorable.

La Commission rejette l’amendement CF 7.

Elle examine l’amendement CF 9 du président Jérôme Cahuzac et l’amendement CF 22 rectifié du rapporteur général.

M. le président Jérôme Cahuzac. Cet amendement vise à clarifier la définition retenue des mesures nouvelles, à laquelle le chiffre de 10 milliards d’euros ne semble pas correspondre. En effet, les mesures nouvelles auraient dû englober l’effet de la réforme de la taxe professionnelle. On ne peut à la fois justifier la hausse de 0,9 point des prélèvements obligatoires rapportés au PIB et l’oublier lorsqu’il s’agit de définir les mesures nouvelles.

M. le rapporteur général. Je suis favorable à cet amendement, mais permettez-moi de vous présenter l’amendement CF 22 rectifié, par lequel je vous propose de décompter les mesures nouvelles à partir du 1er juillet 2010.

Nous avons pris, dans le cadre du plan de relance, un ensemble de dispositions exceptionnelles. Celles-ci ne doivent pas être prises en compte dans le décompte des mesures nouvelles tel qu’il est chiffré par le Gouvernement. Il en va de même de la réforme de la taxe professionnelle : après une hausse en 2010, du fait du cumul avec les dégrèvements préexistants, ses effets diminueront en 2011, le régime de croisière étant atteint.

L’amendement du président Cahuzac est intéressant en ce qu’il précise les mesures nouvelles, et celui que je vous propose va plus loin en fixant la date de départ du compteur des mesures nouvelles

M. le ministre. Je fais miens les arguments du rapporteur général. Je suis favorable à son amendement, qui d’ailleurs ne me paraît pas contradictoire avec celui du président Cahuzac.

La Commission adopte successivement les amendements CF 9 et CF 22 rectifié.

La Commission en vient à l’amendement CF 16 du rapporteur général.

M. le rapporteur général. Cet amendement très important vise à compléter la règle encadrant l’évolution des mesures nouvelles.

Notre stock de dépenses fiscales est évalué à 75 milliards d’euros, dont la moitié au titre de l’impôt sur le revenu. Or, certaines dépenses fiscales connaissent une période de chauffe : c’est le cas de celles qui relèvent de l’article 200 quater du code général des impôts, du crédit impôt recherche ou encore du crédit impôt en faveur de l’intéressement.

Il faut donc stabiliser le stock. Il serait en effet paradoxal que nous nous fixions des objectifs rigoureux pour les dépenses engagées sous forme de crédits sans le faire pour les dépenses fiscales, alors qu’il existe une perméabilité totale entre les unes et les autres. Un certain nombre de politiques, par exemple l’accession sociale à la propriété, ont été conduites sur la base de crédits budgétaires puis se sont transformées en mécanismes de dépenses fiscales. D’où la nécessité de fixer des objectifs en matière de dépenses fiscales. J’ajoute que cet amendement est très protecteur pour le ministre du budget.

M. le ministre. On ne peut faire des efforts considérables en matière de dépenses sans faire de même dans le domaine fiscal. Je m’en remets sur ce point à la sagesse de la Commission. Il faut changer notre regard : on ne peut, d’un côté, dans le cadre de la Conférence nationale des finances publiques, donner aux lois de finances le monopole des dépenses fiscales, et, de l’autre, ne pas nous doter de moyens contraignants, y compris pour le Gouvernement, nécessaires pour atteindre nos objectifs.

M. le président Jérôme Cahuzac. Je suis d’accord avec vous. Cette position est d’ailleurs parfaitement cohérente avec la circulaire du Premier ministre. Toutefois, nous sommes en droit d’interroger le ministère du Budget sur la déclassification de certaines niches fiscales en modalités particulières du calcul de l’impôt. Nous savons ce qu’il en est de l’exonération des plus-values de cession de parts d’entreprise acquises depuis plus de deux ans, mieux connue sous le nom de « niche Copé »…

M. le rapporteur général. Cette disposition est un héritage du rapport de Michel Charzat…

M. le président Jérôme Cahuzac. …qui n’avait pas été adoptée par la majorité de l’époque ! La Cour des comptes s’est émue de cette déclassification, dont la justification ne lui a pas parue limpide… Les services de votre ministère doivent faire en sorte que les décisions du Gouvernement soient mieux comprises, en particulier par le Parlement.

La Commission adopte l’amendement CF 16.

Puis elle adopte l’article 9 ainsi modifié.

Article additionnel après l’article 9

Encadrement de l’application des créations ou extensions de dépenses fiscales et de réductions, exonérations ou abattements de cotisations et contributions sociales

La Commission examine l’amendement CF 11 rectifié du président Jérôme Cahuzac.

M. le président Jérôme Cahuzac. La loi de programmation des finances publiques actuellement en vigueur prévoit de limiter dans le temps l’application des nouvelles dépenses fiscales et sociales, afin qu’elles soient évaluées avant d’être, le cas échéant, prorogées. Il est dommage que le présent projet de loi ne le prévoit pas, car si la dépense budgétaire est évaluée annuellement, lors du vote du budget, la dépense fiscale est quant à elle composée de dispositions qui s’ajoutent les unes aux autres et qui sont rarement évaluées. Nous ne pouvons continuer ainsi ! La maîtrise des finances publiques suppose que les dépenses fiscales fassent l’objet d’une évaluation régulière, éventuellement confirmée par le Parlement.

M. le rapporteur général. Avis favorable.

M. le ministre. Avis également favorable.

La Commission adopte l’amendement CF 11 rectifié.

*

* *

Article 10

Affectation des surplus des prélèvements obligatoires à la réduction
du déficit public

Le présent article prévoit que les surplus des impositions de toute nature par rapport aux évaluations de la loi de finances de l’année (80) sont affectés à la réduction du déficit de l’État. Il innove en disposant que les surplus des impositions de toute nature et contributions établies au profit des régimes obligatoires de base et des organismes concourant à leur financement par rapport aux évaluations de la loi de financement de sécurité sociale de l’année sont, eux aussi, affectés à la réduction des déficits.

Bien que de faible intensité normative, le présent article constitue un engagement du Gouvernement à gérer les excédents de recettes de manière prudente.

En ce qui concerne l’État, le principe ainsi posé pourra être repris dans les lois de finances initiales de la période de programmation, sur le fondement de l’article 34 de la LOLF. Il a déjà été retenu dans chacune des lois de finances depuis 2006.

L’article 9 de la précédente loi de programmation des finances publiques prévoyait une règle identique pour les impositions affectées à l’État. Elle n’a pu trouver d’application compte tenu de l’effondrement des recettes fiscales constaté en 2009. La période qui s’ouvre pourrait, au contraire, donner lieu à la constatation de surplus et conférer une certaine actualité à la présente règle.

I.– UNE RÈGLE D’AFFECTATION DES SURPLUS DE RECETTES POUR PLUS DE TRANSPARENCE ET DE RESPONSABILITÉ

A.– UNE RÈGLE QUI OBLIGE LE GOUVERNEMENT À S’ENGAGER

1.– Une règle issue de la révision organique de 2005

La loi organique du 12 juillet 2005 (81) a modifié l’article 34 de la LOLF pour autoriser le législateur financier à arrêter, dans la première partie de la loi de finances de l’année, « (…) les modalités selon lesquelles sont utilisés les éventuels surplus, par rapport aux évaluations de la loi de finances de l’année, du produit des impositions de toute nature établies au profit de l’État ». Il s’agit d’une compétence exclusive mais facultative du législateur financier.

L’intention initiale du Gouvernement, à l’origine de la loi du 12 juillet 2005, était d’inscrire dans la LOLF l’obligation d’affecter de façon prépondérante les éventuelles plus-values fiscales à la réduction du déficit budgétaire. La solution finalement choisie s’est imposée du fait des objections juridiques soulevées par le Conseil d’État à l’inscription dans la loi organique d’une règle de politique budgétaire opposable au Gouvernement dans l’élaboration du projet de loi de finances (82).

2.– Une règle peu contraignante pour plus de responsabilité et de transparence

Selon les mots utilisés par le Rapporteur général dans son rapport sur le projet de loi organique (83), la règle d’affectation des surplus fournit un encadrement « plus “moral” que contraignant ». Tant la règle prévue au présent article que celles appelées à être prévues par chaque loi de finances initiale au cours de la programmation se caractérisent en effet par une faible intensité normative.

Il convient d’abord de noter que la règle ainsi prévue par la loi – de finances ou de programmation – s’impose au pouvoir réglementaire. Le présent article interdit donc, par exemple, l’adoption d’un décret d’avance gageant des dépenses supplémentaires par la constatation de plus-values de recettes fiscales par rapport à la prévision faite en loi de finances initiale.

En revanche, la disposition ainsi prévue ne saurait contraindre le législateur financier ou ordinaire. Le texte organique ne fixant aucune direction à suivre dans l’utilisation des surplus, la règle d’affectation arrêtée – le cas échéant – en loi de finances initiale peut toujours être modifiée par un collectif budgétaire ou remise en cause implicitement par une loi ordinaire, puisque l’article 34 de la Constitution ne réserve pas la matière fiscale au législateur financier, mais en fait un domaine partagé entre le législateur ordinaire et le législateur financier. Ce point a été confirmé par le Conseil constitutionnel en 2007.

L’adoption de la loi TEPA dans le courant de l’année 2007 illustre le caractère non contraignant de la présente règle.

La loi de finances initiale pour 2007 reprenait, s’agissant de la clause d’affectation des surplus, le même dispositif – devenu traditionnel – que celui de la loi de finances pour 2006. Le IV de son article 52 – l’article d’équilibre – disposait ainsi que « pour 2007, les éventuels surplus (…) sont utilisés dans leur totalité pour réduire le déficit budgétaire. Il y a constatation de tels surplus si, pour l’année 2007, le produit des impositions de toute nature établies au profit de l’État net des remboursements et dégrèvements d’impôts, révisé dans la dernière loi de finances rectificative de l’année 2007 ou, à défaut, dans le projet de loi de finances pour 2008, est, à législation constante, supérieur à l’évaluation figurant dans l’état A (…). »

Or, les exonérations de cotisations sociales sur les heures supplémentaires et les allégements de droits de succession et de donation prévues dans le cadre de la loi TEPA entraînaient une perte de recettes pour l’État dès 2007 de l’ordre de 735 millions d’euros, modifiant ainsi implicitement la règle de l’affectation des surplus prévue par la loi de finances pour 2007. Appelé à se prononcer sur la constitutionnalité de la loi TEPA, le Conseil constitutionnel a considéré que la disposition de la LOLF « n’a ni pour objet ni pour effet de modifier la capacité du législateur à décider, en cours d’exercice, de nouvelles mesures fiscales (84) ».

Dans un souci de transparence, le Rapporteur général a fait adopter un amendement au projet de loi de finances rectificative pour 2007 tendant à faire reconnaître qu’une partie des surplus de recettes de l’exercice 2007 servirait à financer le coût de la loi « TEPA » cette même année, le reste demeurant affecté à la réduction du déficit. Cet amendement a permis de conférer à la règle organique un effet utile : si le législateur demeure libre de modifier l’affectation des surplus en cours d’année, il est tenu d’en faire explicitement état dans une prochaine loi de finances, en modifiant en conséquence la rédaction de la clause d’utilisation des surplus.

Si elle n’est pas juridiquement contraignante, la règle d’affectation des surplus à la réduction des déficits constitue donc un progrès dans la mesure où elle accroît la transparence sur les choix budgétaires faits par le Gouvernement et engage celui-ci devant la représentation nationale. Elle permet, selon les mots du Conseil constitutionnel, « d’améliorer la gestion des finances de l’État et de renforcer l’information du Parlement ».

3.– Une règle étendue aux recettes perçues par les régimes obligatoires de base et d’intensité normative plus élevée

Le présent article étend la règle d’affectation des surplus aux régimes obligatoires de base de sécurité sociale et aux organismes concourant à leur financement. Elle porte sur deux types de ressources affectées à ces régimes :

– les cotisations sociales ;

– les contributions de sécurité sociale, à savoir les impositions de toute nature établies au profit exclusif de la sécurité sociale, comme la contribution sociale généralisée ou la contribution sociale sur les sociétés.

Le champ d’application de la règle exclut donc notamment les impositions de toute nature transférées dans le but de compenser le coût des exonérations générales de charges et des exonérations sur les heures supplémentaires. Leur exclusion paraît bienvenue dans la mesure où leur montant a vocation à être ajusté en cours d’année pour assurer une compensation à l’euro près. S’ils dégageaient un « surplus » par rapport à la prévision, celui-ci aurait vocation à être retourné au budget de l’État.

Dans la mesure où de nombreuses décisions relatives aux finances sociales sont du domaine réglementaire – taux de remboursements d’actes ou de médicaments, taux et assiettes des cotisations sociales… –, il semble que le caractère contraignant de la règle soit plus prononcé que celle applicable au budget de l’État. Selon les informations transmises au Rapporteur général, la présente règle n’aurait toutefois qu’un caractère programmatique et ne saurait avoir de portée normative, conformément aux dispositions de l’article 1er du projet de loi.

B.– LES CONDITIONS DE MISE EN œUVRE DE LA RÈGLE

La loi organique et la jurisprudence du Conseil constitutionnel ont posé les principes encadrant la mise en œuvre de la règle applicable aux impositions de toute nature établies au profit de l’État. La disposition prise en loi de finances précise les modalités d’appréciation du respect de la règle.

L’application de la règle dans le champ de la sécurité sociale ne devrait pas s’écarter substantiellement des principes et modalités ainsi définis.

1.– Les règles de valeur organique

La loi organique précise que la règle porte sur les impositions de toute nature établies au profit de l’État – et non les recettes fiscales – et que le surplus est calculé par rapport à la prévision faite en loi de finances initiale.

 La règle organique prévoit que les impositions de toute nature établies au profit de l’État sont l’objet de la règle. Dans son avis sur le projet de loi organique de 2005, le Conseil d’État avait en effet préféré cette notion à celle de « recettes fiscales » qu’il a estimé dépourvue de substance juridique.

Si un tel choix est bienvenu, il ne va pas sans conséquences pratiques compliquant l’appréciation du respect de la règle. Les recettes fiscales, retracées à l’état A des lois de finances, ne recoupent pas exactement les impositions de toute nature dont certaines peuvent être classées, au sein de la nomenclature budgétaire, en tant que recettes non fiscales. Au cours des dernières années, l’administration a toutefois fourni un effort de reclassement des impositions de toute nature retracées en recettes non fiscales. Ainsi, les produits des jeux et les frais d’assiette et de recouvrement des impôts locaux sont désormais considérés comme des recettes fiscales.

Si la concordance entre recettes fiscales et impositions de toute nature n’a jamais été aussi proche, il est néanmoins toujours d’actualité d’améliorer l’information du Parlement en précisant, dans l’annexe « Évaluation des voies et moyens », les recettes pouvant être considérées comme des impositions de toute nature (85).

 L’article 34 de la LOLF précise également que le surplus est calculé en fonction de la prévision faite en loi de finances initiale. C’est le surplus « non anticipé » par la loi de finances qui est concerné, et non la croissance spontanée des recettes. Une telle base de référence renforce la nécessité de respecter le principe de sincérité budgétaire dans l’évaluation des recettes. Leur surestimation en loi de finances initiale conduirait en effet à vider la règle de son contenu.

2.– Une appréciation globale des recettes selon la jurisprudence du Conseil constitutionnel

Dans sa décision sur la loi de finances pour 2006 (86), le Conseil constitutionnel a confirmé que les surplus de recettes doivent s’appréhender globalement.

Dans sa rédaction originelle, le projet de loi de finances pour 2006 avait posé pour principe que les éventuels surplus seraient « utilisés dans leur totalité pour réduire le déficit budgétaire ». Toutefois, il avait introduit une disposition dérogatoire spécifique à la fiscalité pétrolière, selon laquelle « les éventuels surplus de recettes des impositions de toute nature portant sur les produits pétroliers peuvent être utilisés pour financer des dépenses ».

Cette disposition a fait l’objet d’une censure partielle du Conseil constitutionnel. Le Conseil constitutionnel considère en effet que la notion de surplus doit s’apprécier globalement : les surplus « sont ceux qui sont susceptibles d’être constatés en fin d’exercice en retranchant au produit de l’ensemble des impositions de toutes natures établies au profit de l’État le total prévu par la loi de finances initiale ». Cette solution, conforme à la logique juridique, est favorable aux finances publiques.

Pour préserver les finances publiques, l’intention du législateur organique de 2005 était bien de prévoir un traitement indifférencié des plus-values fiscales. Lors des débats sur cette loi, le Rapporteur général avait souligné qu’« il n’était pas envisageable de procéder à une appréciation d’éventuels surplus à partir de chaque ligne de recettes considérée séparément. La distribution d’un surplus susceptible d’apparaître sur une ligne de recettes déterminée, alors même qu’au plan macro budgétaire, l’évolution globale de la conjoncture et des recouvrements se traduirait par une détérioration du solde, serait évidemment de mauvaise politique. Il convient donc que les surplus soient appréciés sur la base d’un agrégat de recettes ».

Par ailleurs, permettre un « tri » des surplus en fonction des différentes catégories de recettes permettrait d’aboutir à la création implicite d’un nouveau mécanisme d’affectation d’une recette à une dépense, non prévu par l’article 16 de la LOLF. Il s’ensuivrait une atteinte à l’universalité budgétaire.

3.– Les règles prévues en loi de finances

Depuis 2006, chaque loi de finances comporte, en son article d’équilibre, une disposition prise en application du 10° du I de l’article 34 de la LOLF et tendant à prévoir l’affectation des éventuels surplus d’impositions de toute nature. La rédaction, reprise à l’identique depuis la loi de finances pour 2006 (87), apporte trois précisions de mise en œuvre.

En premier lieu, les remboursements et dégrèvements sont déduits du produit des impositions de toute nature. Même si la rédaction n’est pas explicite sur ce point, il semble logique que seuls soient concernés les remboursements et dégrèvements d’impôts d’État – à l’exclusion des remboursements et dégrèvements d’impôts locaux retracés dans le programme 201.

En deuxième lieu, le niveau des recettes prévues en loi de finances initiale est comparé à celui qui est révisé dans le collectif budgétaire de fin d’année ou, à défaut, dans le projet de loi de finances afférent à l’année suivante. Même si l’appréciation se fait au regard d’une évaluation, forcément incertaine, réalisée en cours d’exercice budgétaire, une telle solution est plus satisfaisante que le choix consistant à apprécier la règle par rapport aux recettes constatées en loi de règlement, au mois de juin N+1.

Enfin, il est précisé que l’appréciation de la règle se fait « à législation constante ». Comme l’a déjà indiqué le Rapporteur général (88), cette référence doit être « simplement prise comme une modalité d’application de la règle (qui décrit concrètement comment calculer les surplus) : c’est effectivement en neutralisant l’effet des mesures fiscales adoptées en cours d’année qu’il convient de constater l’existence d’éventuels surplus ». Il convient donc de ne pas interpréter cette précision dans un sens tendant à vider la règle de son contenu en postulant qu’une modification en cours d’année de la législation fiscale conduit à apprécier la règle par rapport aux surplus restants après cette modification.

4.– Des modalités d’application probablement identiques pour la sécurité sociale

Il semble logique que les modalités d’application de la règle à la sécurité sociale soient proches de celles en vigueur pour les impositions établies au profit de l’État.

Ainsi, les surplus calculés par rapport à la prévision faite en loi de financement seraient pris globalement, en appréciant le montant consolidé des cotisations et des contributions sociales. Il ne semble en effet pas adéquat d’apprécier le surplus dégagé par chaque type de ressources.

Ils seraient constatés au moment du dépôt de la loi de financement pour l’année suivante qui, comme le prévoit la loi organique, prévoit une révision des prévisions de recettes pour l’année en cours. Enfin, leur appréciation serait réalisée à législation constante, selon la définition donnée plus haut.

II.– UNE RÈGLE CENTRALE DANS UN CONTEXTE DE REBOND DE LA CROISSANCE ÉCONOMIQUE

Les surplus de recettes fiscales, appréciés selon l’écart entre prévision et exécution, tendent à apparaître au moment où la croissance économique s’accélère. Dans la phase ascendante du cycle en effet, l’élasticité des prélèvements obligatoires à la croissance peut se révéler supérieure à la prévision et conduire à la formation de surplus de recettes.

Le tableau suivant montre les différences constatées entre l’évaluation des recettes fiscales nettes faites en loi de finances initiale et leur exécution. Il illustre le fait que les surplus de recettes sont constatés dans la phase ascendante du cycle économique – 1999-2000 ou 2004-2006 – alors que les moins-values le sont en phase de ralentissement – par exemple 2002-2003 ou 2008-2009. À noter que le surplus non anticipé de recettes peut être partiellement distribué en cours d’année, via des hausses de dépenses ou des allègements d’impôts, ce qui explique le montant relativement peu élevé de l’écart indiqué par le tableau pour 1999 et 2000.

RECETTES FISCALES NETTES : ÉCARTS ENTRE PRÉVISION EN LOI DE FINANCES INITIALE ET CONSTATATION DE L’EXÉCUTION EN LOI DE RÈGLEMENT

(en milliards d’euros)

1992

1993

1994

1995

1996

1997

1998

1999

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

2007

2008

-18,3

-17,1

2,7

-0,7

-6,3

3,2

0,6

4,7

3,6

-4

-10,2

-8,6

9,2

-0,2

10,2

1

-12

Deux modes de gestion de tels surplus ont pu être constatés par le passé. Le premier, respectueux des principes de bonne gestion des finances publiques, consiste à affecter l’intégralité des surplus ainsi dégagés à la réduction du déficit et a été suivi en 2004 et 2006. Le second, privilégiant le court terme au détriment de l’équilibre structurel du budget de l’État, suppose l’affectation de ces ressources inattendues à de nouvelles dépenses ou à des allègements d’impositions et a prévalu en 1999 et 2000 – seulement un tiers des 11,6 milliards d’euros de surplus constatés, en 2000, en cours d’exécution ayant été affectés à la réduction du déficit.

La présente règle incite à mieux gérer les hauts de cycle économique, lesquels n’ont, jusqu’à présent, jamais été mis à profit pour rétablir l’équilibre des finances publiques. Elle a aujourd’hui d’autant plus de valeur qu’il est probable que le nouveau cycle économique entamé en 2010 connaisse, sur la durée de la programmation, une phase ascendante, se traduisant par une croissance plus forte qu’escomptée et des recettes fiscales plus dynamiques que prévu.

La règle verra enfin sa force renforcée par l’engagement pris par le Gouvernement de réserver les mesures fiscales aux lois de finances. Une telle pratique permettra de renforcer le contrôle du respect de la règle en évitant toute dérogation implicite que représente l’inclusion d’une mesure fiscale dans une loi ordinaire.

*

* *

La Commission adopte l’article 10 sans modification.

*

* *

Chapitre IV

LIMITATION DU RECOURS À L’ENDETTEMENT DE CERTAINS
ORGANISMES PUBLICS

Article 11

Interdiction d’emprunter pour une durée supérieure à douze mois

Le présent article propose d’interdire le recours à l’emprunt des organismes divers d’administration centrale pour une durée supérieure à douze mois et de limiter les capacités d’emprunt des établissements publics de santé (EPS) par un meilleur encadrement des modalités de recours à l’emprunt.

I.– LA DETTE DES ODAC ET DES HÔPITAUX AUGMENTE DANGEREUSEMENT

A.– UN ENCADREMENT DU RECOURS À L’EMPRUNT DISPARATE ET INÉGAL

Dès le mois d’avril 2007, le rapport de l’inspection générale des finances sur la gestion pluriannuelle des finances publiques (89) soulignait que l’effort de redressement des finances publiques de la France ne pouvait passer que par un meilleur encadrement de chaque sous secteur des administrations publiques dans l’engagement national de désendettement, dont les ODAC et les opérateurs de l’État.

Il faut en effet rappeler que les ODAC – il y en a environ 800 recensés par l’INSEE – se retrouvent dans leur très grande majorité parmi les 583 opérateurs de l’État recensés dans l’annexe « jaune » sur les opérateurs. Quelques exceptions toutefois peuvent être signalées : ainsi, par exemple, les agences de l’eau sont des opérateurs mais pas des ODAC, tandis que les structures de désendettement et de défaisance sont des ODAC mais pas des opérateurs. Pour être qualifié d’opérateur de l’État, un organisme doit, quel que soit son statut (établissement public administratif ou industriel et commercial, groupement d’intérêt public, association…), satisfaire à trois critères cumulatifs :

– exercer une activité de service public, rattachable à une politique de l’État dans la nomenclature budgétaire (mission-programme-action) ;

– bénéficier d’un financement assuré majoritairement par l’État, directement sous forme de subventions ou indirectement via des ressources affectées, notamment fiscales. Ceci n’exclut pas la possibilité pour l’opérateur d’exercer des activités marchandes à titre subsidiaire ;

– être soumis à un contrôle direct de l’État avec une tutelle ayant la capacité à orienter les décisions stratégiques.

L’inspection générale des finances avouait alors l’incapacité du ministère des finances à établir la liste précise des ODAC pouvant s’endetter et proposait notamment que « soit conduite une réflexion sur la définition de règles générales encadrant le recours à l’emprunt, en particulier pour les opérateurs de l’État. Cette réflexion pourrait porter à la fois sur le rôle de la tutelle dans les décisions d’emprunt et sur les conditions de cette capacité d’emprunt, aujourd'hui ouverte pour un nombre important d’entre eux, même si l’essentiel de la dette est porté par la caisse d’amortissement de la dette sociale (CADES) et autres structures de défaisance. L’adoption d’une « règle d’or » pourrait ainsi être envisagée, pour les opérateurs dont l’autonomie se justifie ».

En juillet 2008, la mission d’information relative à la mise en œuvre de la LOLF (MILOLF) s’est penchée sur cette question et a mis en exergue le caractère particulièrement flou des règles relatives à la capacité d’emprunt des opérateurs de l’État (90). Elle avait donc préconisé de demander au Gouvernement de « présenter au Parlement un récapitulatif annuel de l'endettement des opérateurs de l'État, avec indication pour chacun du texte réglementaire autorisant son endettement, sa dette et le taux correspondant». Cette demande n’ayant jamais été satisfaite par le Gouvernement, la Commission des finances de l’Assemblée Nationale a déposé un amendement à l’initiative M. Michel Bouvard, dans le cadre de l’examen de la loi de finances pour 2010 (91) afin de concrétiser cette recommandation de la MILOLF. En pratique, il aura fallu attendre une circulaire du 1er juillet 2010 (92) pour que le Gouvernement s’engage à faire un état des lieux de l'endettement et des engagements hors bilan des opérateurs de l’État au 31 décembre 2009.

Le Rapporteur général souligne cependant qu’il n’existe pas de limitation de portée générale du recours à l’emprunt des ODAC, celui-ci étant encadré au cas par cas par des règles de valeur législative (c’est notamment le cas pour la caisse d’amortissement de la dette sociale, pour la société de prises de participation de l’État ou pour les établissements publics contribuant à l’action extérieure de la France) ou plus généralement par des normes spécifiques de valeur réglementaire. Concernant les établissements publics administratifs, le recours à l’emprunt est toutefois soumis à la validation expresse de la tutelle financière. L'article 161 du décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique prévoit en effet que « L'autorisation préalable du conseil d'administration est nécessaire en cas (...) d'émission d'emprunts. (...) Les délibérations du conseil d'administration relatives aux émissions d'emprunts ne sont exécutoires qu'après approbation du ministre des finances ».

Dans le champ des organismes divers des administrations sociales (ODASS), le rapport d’information de M. Jean Mallot en conclusion des travaux de la Mission d’évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale (MECSS) sur le fonctionnement de l’hôpital, intitulé « Mieux gérer pour mieux soigner », a lui aussi tiré la sonnette d’alarme s’agissant de l’endettement croissant des établissements publics de santé, faute d’un encadrement des modalités de recours à l’emprunt de ces établissements (93). Si l’article L. 6141-2-1, alinéa 6, du code de la santé publique leur permet en effet de recourir à l’emprunt, il n’existe aucune autre norme fixant les modalités d’application de ce principe.

L’on assiste donc, tant pour les ODAC que pour les établissements publics de santé, à une dérive certaine de la dette qui pèse dangereusement sur notre capacité à redresser la trajectoire de la dette publique.

B.– UNE CONTRAINTE PESANT SUR L’ENDETTEMENT PUBLIC

L’endettement public, au sens du règlement (CE) n° 2223/96 du Conseil du 25 juin 1996, est l’endettement total des administrations publiques vis-à-vis de tiers privés.

Sur la période 2002-2009, la répartition de l’endettement public entre les sous secteurs des APU montre que la part des ODAC a fortement progressé depuis 2004 et s’élève en moyenne à 7,3 % du PIB :

PART DES SOUS SECTEURS DES APU DANS LA DETTE PUBLIQUE FRANÇAISE

(en % du PIB)

 

2002

2003

2004

2005

2006

2007

2008

2009

État

81,6 %

80,4 %

78,7 %

78,1 %

77,6 %

76,8 %

78,8 %

78,1 %

Organismes divers d'administration centrale

5,0 %

5,5 %

8,5 %

8,3 %

7,9 %

8,1 %

7,3 %

7,7 %

Administrations locales

11,6 %

10,9 %

10,5 %

10,5 %

11,1 %

11,3 %

11,3 %

10,5 %

Administrations de sécurité sociale

1,8 %

3,1 %

2,3 %

3,2 %

3,4 %

3,7 %

2,7 %

3,6 %

Total administrations publiques

100 %

100,0 %

100,0 %

100,0 %

100,0 %

100,0 %

100,0 %

100,0 %

Il s’ensuit que le dérapage de l’endettement de certains ODAC est susceptible d’avoir un impact non négligeable sur l’évolution de la dette publique.

Le rapport annexé au présent projet de loi de programmation précise d’ailleurs que, sur le seul champ des opérateurs de l’État, près de cinquante organismes sont endettés auprès d’établissements bancaires. Or, il ressort de l’évaluation préalable du présent article que le risque de dérapage de la dette de ces opérateurs n’est pas mineur : ainsi, sur le seul champ des opérateurs dotés d’un comptable public, l’endettement des ODAC s’élevait à plus de 120 millions d’euros au 31 mars 2008 (hors l’Établissement public de financement et de restructuration) et à près de 140 millions d’euros au 31 mars 2009, soit une progression de 16 % en un an.

De la même manière, si l’endettement des établissements publics de santé ne représente qu’une faible part de la dette publique française, sa progression rapide constitue néanmoins un facteur de risque. L’endettement hospitalier a plus que doublé entre 2001 et 2008 : il s’est ainsi accru de 8,8 milliards d’euros à 18,9 milliards d'euros sur la période considérée.

La situation financière des établissements publics de santé, notamment des centres hospitaliers universitaires (CHU), est en outre marquée par :

– un allongement de la durée apparente de la dette (nombre d’années nécessaires pour rembourser les emprunts contractés), qui passe de 4,9 ans en 2007 à 6 ans en 2008 (7 pour les CHU) ;

– une détérioration de l’indépendance financière (rapport entre l’endettement et les capitaux permanents), le taux des EPS passant de 33,2 % en 2004 à 46 % en 2008 (48 % pour les CHU).

Par conséquent, la dispersion et l’insuffisante maîtrise des sources d’émission d’emprunts au sein des administrations publiques constitue un handicap alors que nos engagements européens au titre du pacte de stabilité et de croissance portent bien sur un champ qui intègre ces organismes. Stopper cette dissémination de la dette publique est d’autant plus nécessaire que ces entités se financent la plupart du temps à des coûts supérieurs à ceux observés pour l’État, augmentant ainsi la charge d’intérêt supportée par les administrations publiques dans leur ensemble. Enfin, s’il apparaît que les entités qui ont recours à l’emprunt n’ont pas une capacité de remboursement propre suffisante, c’est au final l’État qui est appelé à supporter financièrement ces établissements.

Cette situation a d’ailleurs été jugée inacceptable par le groupe de travail présidé par Michel Camdessus au second semestre 2010. Dans son rapport intitulé « Réaliser l’objectif constitutionnel d’équilibre des finances publiques » (94), il a notamment regretté qu’il soit permis « à un opérateur de s’endetter alors qu’il n’a manifestement pas une capacité de remboursement propre suffisante, ou à affecter à un ODAC des recettes non fiscales existantes ou futures (telles des créances non échues) ponctuelles, conduisant à terme à faire apparaître un besoin de financement non couvert. Dans notre organisation institutionnelle, l'État émet et gère la dette publique liée à la conduite des politiques publiques ; seules les collectivités territoriales ont également cette capacité, au nom de leur libre administration, ce qui en fait aujourd’hui le premier investisseur public. Il ne peut être question d’étendre cette possibilité aux opérateurs que dans le cadre d’un périmètre clairement défini et d’une régulation appropriée, sous un contrôle strict, particulièrement lorsqu’ils peuvent apparaître aux marchés comme bénéficiaires d’une garantie au moins implicite de l’État ». L’heure est donc venue d’instaurer des règles claires afin de limiter l’endettement des ODAC et des EPS.

II.– L’ENCADREMENT GÉNÉRAL DU RECOURS A L’EMPRUNT DES ODAC
ET DES HÔPITAUX EST DÉSORMAIS PRIMORDIAL

A.– L’INTERDICTION DU RECOURS À L’EMPRUNT DES ODAC AU DELÀ DE 12 MOIS

Le I du présent article vise à la fois à limiter, sur la période de programmation, l’endettement des ODAC et à empêcher pour l’avenir que des organismes nouvellement créés puissent recourir à cette faculté, sauf autorisation expresse du Parlement.

1.– Les organismes visés par l’interdiction du recours à l’emprunt

La formulation retenue par le présent article au terme de laquelle sont concernés par l’interdiction du recours à l’emprunt « les organismes relevant de la catégorie des administrations publiques centrales au sens du règlement (CE) n° 2223/96 du Conseil du 25 juin 1996, à l’exception de l’État, de la caisse d’amortissement de la dette sociale, de la caisse de la dette publique et de la société de prises de participation de l’État » permet d’appliquer la règle à l’ensemble des entités de la catégorie des organismes divers d’administration centrale (ODAC), au sens de la comptabilité nationale.

Seuls trois organismes sont explicitement exonérés de cette règle en raison de la nature très particulière de leur activité : la Caisse d’amortissement de la dette sociale, la Caisse de la dette publique et la Société de prises de participation de l’État.

Le présent article prévoit d’ailleurs qu’un arrêté conjoint du ministre chargé de l’économie et du ministre chargé du budget établit la liste des organismes auxquels s’applique cette interdiction. Cette disposition remet donc en cause le partage actuel des compétences entre l’État et l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE). En effet, jusqu’à présent, il relève de la compétence de l’INSEE d’établir et d’actualiser pour la France la liste des ODAC, en lien avec Eurostat, conformément au principe de subsidiarité.

La difficulté réside dans le fait que la liste des ODAC est établie de manière rétrospective. En cas d’entrées/sorties d’entités du périmètre ou de créations d’ODAC, l’INSEE se prononce sur le classement avec une voire deux années de retard dans certains cas. Aussi, le Gouvernement propose-t-il de pallier ce décalage dans le temps en laissant le soin aux ministres chargés de l’économie et du budget de fixer par arrêté, sur une base annuelle, une liste comprenant, d’une part, les organismes inscrits sur la dernière liste en vigueur de l’INSEE et, d’autre part, le cas échéant et à titre transitoire, les entités nouvellement créées qui pourraient ultérieurement être considérées comme des ODAC par les comptables nationaux.

2.– La portée de l’interdiction du recours à l’emprunt

Seules l’émission de titres d’emprunt et la souscription d’un emprunt bancaire sont interdites. Ainsi, la disposition proposée ne s’oppose pas aux prêts et avances entre administrations publiques, comme par exemple les prêts et avances du Trésor.

Enfin, seuls les emprunts souscrits « pour une durée supérieure à douze mois » sont interdits, laissant ouverte la possibilité de couvrir par emprunt bancaire des besoins de trésorerie, qui ne soulèvent pas les mêmes problèmes structurels de maîtrise des finances publiques.

Le Rapporteur général considère que le I du présent article constitue donc une avancée certaine en faveur d’une meilleure maîtrise de la trajectoire de la dette publique pour trois raisons :

– d’une part, elle permettra d’améliorer la sélectivité des investissements des ODAC puisque ceux-ci seront financés via des subventions pour charge de service public, incluses dans la norme des dépenses de l’État ou, par exception, par avance du Trésor lorsque l’entité dispose de perspectives de ressources propres suffisantes ;

– d’autre part, elle permettra de réduire les charges d’intérêt de la dette des administrations publiques en limitant les sources d’endettement au sein de la sphère des APU et en réduisant le « spread » existant entre l’État et les ODAC (différentiel entre les taux d’intérêt négociés par les organismes publics lorsqu’ils recourent à l’endettement et les taux d’intérêt applicables à l’État lorsqu’il s’endette) ;

– enfin, elle contribuera à limiter le risque de contournement de la norme de dépenses de l’État consistant à financer certaines dépenses par le biais d’un opérateur qui souscrirait un emprunt.

B.– LE NÉCESSAIRE ENCADREMENT DU RECOURS À L’EMPRUNT DES HÔPITAUX

Le II du présent article vise exclusivement les établissements publics de santé (EPS) qui sont des personnes morales de droit public dotées de l’autonomie administrative et financière aux termes de l’article L. 6141-1 du code de la santé publique.

Les EPS font partie de la sous catégorie des « organismes dépendant des assurances sociales » (ODAS) au sein de la catégorie des administrations de sécurité sociales (ASSO) au sens de la comptabilité nationale. Ils bénéficient, en application de l’article L. 6141-2-1 alinéa 6 du code de la santé publique de diverses ressources, dont la possibilité d’avoir recours à des emprunts ou avances sans limitation.

L’objectif du II du présent article est donc d’encadrer le recours à l’emprunt des EPS « dans les limites et sous des réserves fixées par décret ». Le Gouvernement pourrait ainsi préciser les modalités d’application du recours à l’emprunt de ces établissements afin d’inverser la tendance à la hausse de l’endettement hospitalier, qui devient parfois insoutenable pour certains CHU en particulier.

L’encadrement des modalités de recours à l’emprunt des établissements publics de santé s’inscrit plus largement dans le besoin de maîtriser la dynamique de la dette publique qui va s’accentuer dans les années à venir. Il permettra également d’éviter certaines dérives mises en évidence dans le dernier rapport de la Cour des comptes sur la sécurité sociale (95) qui constate que : « l’emprunt sert non seulement au financement des investissements, mais aussi à faire face aux déficits d’exploitation (…). Le constat est celui d’une concentration du problème sur les CHU et de l’existence de cas difficiles dispersés parmi les CH. »

*

* *

La Commission adopte l’article 11 sans modification.

*

* *

Chapitre V

LA MISE EN ŒUVRE DE LA PROGRAMMATION

Article 12

Information du Parlement sur les dépenses fiscales et les réductions, exonérations ou abattements de cotisations et contributions sociales

Le présent article reprend les obligations d’information du Parlement prévues par l’article 12 de la loi de programmation 2009-2012 en matière de niches fiscales et sociales.

Ainsi, en application des paragraphes I et II, le Gouvernement s’engage à transmettre chaque année au Parlement :

– en même temps que le projet de loi de finances de l’année n+1, le coût constaté ou prévu des dépenses fiscales pour les années n-1, n et n+1, ainsi qu’un bilan des créations, modifications et suppressions de niches fiscales adoptées dans les douze derniers mois ou prévues par le projet de loi de finances ;

– en même temps que le projet de loi de financement de l’année n+1, le coût constaté ou prévu des niches sociales pour les années n-1, n et n+1, ainsi qu’un bilan des créations, modifications et suppressions de niches sociales adoptées dans les douze derniers mois ou prévues par le projet de loi de financement.

S’agissant des niches fiscales, cette information figure depuis 2009 dans l’exposé des motifs de l’article 1er du projet de loi de finances autorisant la perception des impôts, qui actualise l’objectif de dépenses fiscales de l’année en cours et fixe celui pour l’année à venir. S’agissant des niches sociales, des informations équivalentes sont inscrites dans l’annexe 5 du projet de loi de financement.

Le paragraphe III reprend l’obligation pour le Gouvernement d’évaluer chaque niche fiscale et sociale dans les trois ans qui suivent son entrée en vigueur. Cette obligation d’évaluation des nouvelles niches était déjà prévue par la loi de programmation 2009-2012, l’évaluation du stock devant l’intervenir au plus tard le 30 juin 2011.

*

* *

La Commission adopte l’article 12 sans modification.

*

* *

Article additionnel après l’article 12

Actualisation de la programmation

Cet article additionnel fixe les modalités d’actualisation de la présente programmation, en prévoyant le dépôt d’un projet de loi de programmation des finances publiques avant le 1er juin 2011.

Il vise ainsi à suivre les recommandations du groupe de travail constitué à la demande du Président de la République et présidé par M. Michel Camdessus afin de formuler des propositions pour mieux assurer l’objectif constitutionnel d’équilibre des comptes publics.

Ce groupe de travail a en effet conclu à la nécessité d’examiner chaque année un projet de loi de programmation. Constatant l’absence d’instrument permettant un vote du Parlement sur nos engagements, le groupe de travail s’est prononcé en faveur de l’examen, chaque printemps, d’une loi-cadre de programmation des finances publiques, en remplacement de l’actuel débat d’orientation des finances publiques. Un tel dispositif permettrait au Parlement de se prononcer sur le programme de stabilité : « Une discussion annuelle pourra permettre d’assurer [la] cohérence entre rapport annexé et programme de stabilité : les lois-cadres devront être prolongées chaque année d’un an supplémentaire, de même que leurs rapports annexés, qui seront également actualisés afin de préserver une logique de “miroir” avec les programmes de stabilité » (96).

Certes cette proposition du groupe de travail s’insère dans un projet plus large de révision de la Constitution destinée à donner la suprématie des lois-cadre de programmation des finances publiques sur les lois de finances et de financement, afin de réaliser l’objectif constitutionnel d’équilibre des finances publiques. Il n’en reste pas moins qu’un examen chaque année, au cours du dernier trimestre de la session ordinaire, de la programmation constituerait un progrès notable dans la gouvernance des finances publiques et mériterait d’être appliqué dès le printemps 2011, en particulier dans l’hypothèse où la révision constitutionnelle prônée par le groupe de travail et les textes organiques nécessaires à son application ne pouvaient pas entrer en vigueur à temps.

La fixation annuelle d’orientations pluriannuelles ne serait paradoxale qu’en apparence : chaque année, le Gouvernement présente d’ores et déjà une nouvelle programmation pluriannuelle des finances publiques, tant dans le rapport économique, social et financier (RESF) joint au projet de loi de finances (comme le requiert l’article 50 de la LOLF) que dans le programme de stabilité adressé en décembre à la Commission européenne.

Une actualisation annuelle de la loi de programmation permettrait de disposer d’un document de référence, discuté et approuvé par le Parlement, présentant le dernier état prévisionnel d’évolution des finances publiques. Dès lors que le programme de stabilité n’en serait plus que la simple déclinaison, la question récurrente de sa plus grande appropriation par le Parlement (97) serait réglée d’elle-même.

Un examen au printemps, en lieu et place du débat d’orientation des finances publiques, aurait le mérite de fixer le solde de l’État et des administrations de sécurité sociale dès le mois de juin et assurerait de fait la primauté de la loi de programmation sur la préparation des lois de finances et de financement de la sécurité sociale. Aujourd’hui, c’est la logique inverse qui prévaut : la loi de programmation n’est finalisée qu’une fois rendus les arbitrages sur le PLF et le PLFSS.

L’anticipation, dès le mois de juin, du niveau des déficits prévisionnels de l’État et de la sécurité sociale pour l’année suivante constituerait une novation qui n’est pas techniquement insurmontable : le volet « dépenses » du budget de l’État est d’ores et déjà arrêté au moment du débat d’orientation budgétaire (a fortiori dans le cadre du budget triennal) ; l’élaboration du volet « recettes » continuerait de se dérouler jusqu’à la fin septembre (réformes fiscales, mesures de rendement etc.) mais serait de facto contrainte par le niveau de déficit arrêté dans la loi de programmation. Les seules réelles difficultés résident dans la plus grande incertitude pesant sur l’exécution budgétaire de l’année en cours et dans le cadrage macro-économique sous-jacent au PLF et au PLFSS, lequel est susceptible d’évoluer par rapport à celui retenu dans la loi de programmation. Ces difficultés peuvent cependant être atténuées par une certaine prudence dans les prévisions associées à la loi de programmation et, le cas échéant, par l’usage de « fourchettes » pour les projections de déficit.

Dans le contexte budgétaire actuel, cette innovation s’avère de surcroît politiquement souhaitable : en avançant dans le temps les arbitrages relatifs au niveau du déficit de l’État et de la sécurité sociale et en ajoutant au cadrage global donné en début d’année par le Premier ministre un cadrage à mi-année voté par le Parlement, le schéma ici proposé renforce substantiellement la contrainte budgétaire, et converge avec la réforme en cours du programme de stabilité destinée à mettre en place un « semestre européen » qui se traduirait par la remise des programmes de stabilité au printemps.

On notera qu’une actualisation chaque année de la programmation ne signifie en rien obligation de revoir l’ensemble des dispositions de la précédente loi de programmation. Il s’agirait de prévoir, le cas échéant, les ajustements nécessaires à la trajectoire prévue pour les années couvertes par la précédente programmation et de la prolonger d’une année supplémentaire afin de la caler sur le dernier programme de stabilité. Quant aux règles gouvernance, elles n’ont bien entendu pas vocation à être modifiées chaque année.

*

* *

La Commission examine, en discussion commune, trois amendements, CF 8 de M. Daniel Garrigue, CF 13 du président Jérôme Cahuzac et CF 14 du rapporteur général.

M. Daniel Garrigue. Les ministres européens des finances ont approuvé, le 7 septembre dernier, la mise en place d’un cycle de surveillance baptisé « semestre européen ». Au cours de ce semestre, les États membres présenteront leur projet de budget pour l’année suivante, celui-ci devant s’inscrire dans la stratégie définie par le Conseil européen sur proposition de la Commission européenne, puis le Conseil des ministres des finances se prononcera sur ces projets.

Cela pose différents problèmes.

Tout d’abord, dans la mesure où l’intervention du Conseil des ministres des finances, le fameux advice, se situe entre conseil et recommandation, quelle est la portée exacte du dispositif ?

Par ailleurs, le projet de loi de programmation fait l’impasse sur le « semestre européen », qui pèsera fortement sur les finances publiques en cours d’année.

Ce qui est en cause, c’est le gouvernement économique de l’Europe – sur ce point, le dispositif contribuera à combler la principale lacune du traité de Maastricht –, mais c’est aussi la souveraineté budgétaire des États. On ne peut imaginer que les Parlements nationaux ne soient pas consultés ou qu’ils soient écartés de la procédure.

Par l’amendement CF 8, je propose que les avis et recommandations stratégiques établis par le Conseil européen soient communiqués à notre Parlement. Si ces documents entraînent des modifications dans la loi de programmation des finances publiques, ce qui est vraisemblable, le Gouvernement déposera un projet de loi de modification.

Cet amendement précise également que les programmes nationaux de réformes relatives à l’emploi et à l’inclusion sociale seront présentés chaque année à notre Parlement.

Il est fondamental que les Parlements nationaux soient associés le plus en amont possible à cette procédure, faute de quoi la souveraineté budgétaire, fondement du Parlement, sera profondément remise en question. Je souhaite donc que le Gouvernement, avant la fin de l’année, fasse au Parlement des propositions en ce sens.

M. le rapporteur général. Mon amendement CF 14, identique à celui du président Jérôme Cahuzac, donne satisfaction aux préoccupations légitimes de Daniel Garrigue.

Le groupe de travail présidé par Michel Camdessus, dont je faisais partie, a conclu que le plus opportun serait de présenter la loi de programmation en juin, en remplacement du débat d’orientation des finances publiques. À cette date, le ministère du Budget est en mesure de fixer les perspectives de dépenses et de recettes. Cette année, nous avons entouré le débat d’orientation d’une certaine solennité en le clôturant par un vote, en application de l’article 50-1 de la Constitution, mais cette procédure reste artificielle. Si nous avions voté la loi de programmation en juin dernier, nous aurions fixé les perspectives de dépenses jusqu’en 2014, ainsi que l’enveloppe de la recette globale, ce qui aurait évité certaines annonces que le Gouvernement a faites au cours de l’été. Certes, le Parlement doit laisser au Gouvernement la liberté de prendre telle ou telle mesure, mais sous réserve qu’elles s’inscrivent dans le cadre d’un montant global préalablement fixé.

Cette formule est très saine. Dorénavant, dans le cadre du « semestre européen », le programme de stabilité – qui n’est autre chose qu’une loi de programmation pluriannuelle – sera transmis aux autorités communautaires au début du printemps. Elles auront ainsi le temps de l’étudier et de délivrer le fameux advice. Il est parfaitement légitime qu’avant l’examen par le Conseil ECOFIN, qui se tiendra en juillet, le Parlement national puisse se prononcer sur le programme de stabilité. Le vote du projet de loi de programmation en juin est donc parfaitement adapté. Même si cette procédure pose un problème technique, nous devons la mettre en place dès 2011. Nous avons du temps devant nous ; profitons-en !

M. Richard Dell’Agnola. Vos remarques sont très pertinentes, mais nous n’avons pas autant de temps que cela. Puisque nous nous plaçons dans la perspective d’une convergence avec l’Allemagne, serons-nous prêts en juin 2011 ?

M. Daniel Garrigue. Je maintiens mon amendement car il va plus loin que les deux autres, notamment sur la nécessité d’associer plus en amont les Parlements nationaux.

S’agissant de sujets neufs et difficiles, je propose à la Commission réfléchisse à l’articulation entre la procédure budgétaire nationale et le nouveau dispositif européen. Nous ne savons pas très bien où nous allons avec ce dispositif, qui couvre des enjeux constitutionnels fondamentaux.

M. le président Jérôme Cahuzac. L’amendement de notre collègue Garrigue va en effet plus loin que celui du rapporteur général et le mien, qui ne tendent qu’à améliorer l’information du Parlement et à donner du sens à son vote.

La convergence fiscale avec l’Allemagne n’est qu’un projet politique annoncé, tandis que la programmation est en cours d’élaboration, et je ne suis pas certain qu’il soit opportun de mélanger les deux procédures. Le rapporteur général et moi-même souhaitons que la programmation entre dans les faits. Cela dit, elle n’a pas de vertus normatives : ce qu’une majorité fait l’année n, une autre majorité peut le défaire l’année n + 1. Les dispositions que nous examinons aujourd’hui ne préjugent nullement de ce que la majorité décidera l’année prochaine, car elles sont révisables chaque année.

M. Christian Eckert. J’ai bien compris l’intérêt des advices et je sais bien que les décisions prises par le conseil ECOFIN en janvier 2010 l’ont été sans que soit consulté le Parlement. Mais que recouvre la convergence fiscale avec l’Allemagne ? S’il s’agit de la suppression du bouclier fiscal et de l’ISF, c’est bien une question politique. Dites-nous simplement si vous voulez procéder à cette suppression avant ou après les élections présidentielles !

M. le président Jérôme Cahuzac. La convergence avec l’Allemagne porte par exemple sur le plafonnement à 30 % des intérêts d’emprunt déductibles pour les entreprises, qui rapporterait à l’État 11 milliards sur trois ans !

M. Jérôme Chartier. La convergence fiscale avec l’Allemagne ne se résume pas à ces deux mesures. En 2007, l’Allemagne a mis en place la TVA sociale. Cette augmentation de 3 points de TVA, loin de réduire les charges pesant sur le travail, a pesé pour 0,5 point sur la réduction de l’assurance chômage et pour 2,25 points sur la réduction de l’impôt sur les sociétés. L’Allemagne n’a donc pas mis en place une TVA sociale destinée à réduire le coût du travail, mais bel et bien une mesure de compétitivité fiscale puisque, d’une part, il n’existe pas dans ce pays de salaire minimum et que, d’autre part, le coût du travail y est faible depuis dix ans.

La convergence fiscale avec l’Allemagne ne saurait servir à masquer la suppression de l’ISF et du bouclier fiscal puisque l’arrêt de la Cour de Karlsruhe date de 1995 et la suppression de l’ISF de 1997. Il est en revanche intéressant de comprendre pourquoi, en Allemagne, ce dispositif n’existe pas, comment s’articulent la fiscalité territoriale et la fiscalité nationale, tant pour les particuliers que pour les entreprises, comment ce pays s’organise, sous le contrôle des conventions fiscales passées avec l’étranger, pour le rapatriement des bénéfices des sociétés filles vers les sociétés mères, et plus particulièrement comment il parvient à sécuriser ses recettes et à réduire ses dépenses publiques.

M. Richard Dell’Agnola. Évoquer la convergence fiscale avec l’Allemagne n’est pas une grossièreté. D’ailleurs, la première secrétaire du Parti socialiste elle-même en a souligné la nécessité.

Mme Aurélie Filippetti. J’ai le sentiment que cette convergence n’est qu’un prétexte pour faire passer des mesures fiscales que le Gouvernement et la majorité n’assument pas. Le besoin de faire référence à l’Allemagne – comme un sur-moi inassumé – est très révélateur.

En tant qu’élue d’une circonscription frontalière avec l’Allemagne, je me permets de dire à M. Chartier qu’il a commis plusieurs erreurs, en particulier sur le coût du travail. La TVA en Allemagne a certes été augmentée, mais la croissance allemande ne repose pas sur la consommation – contrairement à la croissance française –, mais sur les exportations – contrairement à l’économie française. Nous aurions peut-être des leçons à prendre de l’Allemagne en matière de politique industrielle, mais également de dialogue social car je n’ai pas entendu les dirigeants allemands traiter les syndicalistes comme l’ont fait en France le Président de la République et la majorité.

Dans le cadre de son éventuelle réforme fiscale, le Gouvernement entend-il supprimer le quotient familial ?

M. le président Jérôme Cahuzac. Sachez, monsieur Garrigue, que je proposerai au bureau de la Commission de fixer les modalités d’une réflexion sur l’association des Parlements nationaux à la mise en place du semestre européen.

M. le ministre. Nous assistons à la naissance d’un nouvel outil de coordination des objectifs budgétaires, mais nous ne pouvons faire abstraction de la crise, des menaces qui pèsent sur les États et des secousses qui ont agité la monnaie européenne, ni oublier l’objectif que nous nous sommes fixé d’atteindre l’équilibre budgétaire. Le fait de mettre en place une coordination au niveau du Conseil des ministres du budget européens ne me choque pas.

Un exemple concret : l’évolution de la croissance allemande apportera à ce pays des recettes supplémentaires. Le déficit, annoncé à 5 %, ne dépassera pas en 2011 les 4 %. L’écart entre nos deux pays se creusera donc l’année prochaine.

La convergence fiscale n’est pas un prétexte, madame Filippetti. Votre évocation du « sur-moi non assumé », qu’elle soit lacanienne ou freudienne, est très éloignée des additions et des soustractions auxquelles nous procédons depuis plusieurs semaines. Cela dit, elle agrémente nos débats, ce dont je vous remercie.

S’agissant des amendements du président et du rapporteur général, j’émets quelques réserves, mais je prends l’engagement devant vous de faire d’ici à la fin décembre des propositions visant à associer le Parlement et à l’informer en amont des positions défendues par le Gouvernement. Celui-ci, pour la lisibilité de son engagement, se doit d’adresser des messages clairs aux investisseurs et aux acteurs économiques, ce qui nécessite une certaine souplesse.

Il n’y a ni doctrine ni idéologie de ma part, seule importe l’efficacité de la parole de l’État. C’est la raison pour laquelle je suis quelque peu réservé à l’idée de revisiter chaque année les lois de programmation pluriannuelle. Quelle sera la valeur de la parole du ministre du budget s’il définit un objectif sur quatre ans mais que le Parlement remet ce dernier en question chaque année ? Nous avons besoin de quelques semaines pour réfléchir à la portée du dispositif.

M. le président Jérôme Cahuzac. Nous n’avons pu examiner le projet de loi de programmation des finances publiques au cours du printemps dernier car votre ministère n’était pas prêt. Vous n’avez pas utilisé aujourd’hui cet argument et vous avez eu raison car il n’est plus recevable : nous sommes en effet au début de l’automne, ce qui vous laisse le temps de préparer le dépôt d’un nouveau texte au 1er juin prochain.

Quant au signal donné au marché, il a été pris en compte par la commission Camdessus qui a adopté la proposition, élaborée de façon unanime et consensuelle par Jean Arthuis, Philippe Marini, Gilles Carrez et moi-même, d’examiner la programmation pluriannuelle chaque année au mois de juin. La sensibilité des marchés à certaines situations ne nous a pas échappé et je ne crois pas que notre proposition soit irresponsable. Il reviendra au Gouvernement, à l’occasion de l’examen de chaque loi de programmation, de prouver sa fidélité aux trajectoires de finances publiques qu’il a annoncées.

Enfin, l’amendement que nous vous proposons vous aidera, monsieur le ministre, à protéger les recettes. La politique de finances publiques menée par la France est très observée par les marchés, auxquels notre pays emprunte plus que les autres pays. Mais le fait que le pouvoir exécutif informe le Parlement et que celui-ci se prononce chaque année n’est pas un élément défavorable aux yeux des marchés, bien au contraire.

Pour ces trois raisons, monsieur le ministre, il me semble que vous devriez vous en remettre à la sagesse de la Commission.

M. le rapporteur général. La procédure que nous vous proposons renforce les pouvoirs du ministre en charge des comptes publics, qui abordera les derniers arbitrages sur la loi de finances dans une position plus forte. À la fin du mois de juin, il aura pris des engagements en termes de dépenses et il bénéficiera de l’appui du Parlement sur une enveloppe de recettes.

Nous avons, au sein de la commission Camdessus, convenu à l’unanimité que la loi de programmation devait être un « point fixe », s’agissant notamment des dépenses. Pour les recettes, nous sommes obligés de tenir compte de la réalité, en particulier de leur évolution spontanée, ce qui nous oblige à faire le point une fois par an. Le faire au mois de juin dans le cadre de la loi de programmation permet d’aborder la préparation de la loi de finances avec des éléments précis.

Le calendrier actuel aboutit en effet à un résultat paradoxal : nous attendons d’avoir fabriqué le projet de loi de finances pour mettre en place le projet de loi de programmation. Cela devrait être l’inverse, la loi de programmation fixant le cadre dans lequel s’inscrit la loi de finances.

M. le ministre. Nous essaierons d’atteindre cet objectif. Pour cette raison, je m’en remets à la sagesse de la Commission.

M. le rapporteur général. Notre proposition est née de la réflexion du groupe de travail présidé par Michel Camdessus. Elle représente, j’en conviens, un travail considérable pour l’administration.

La Commission rejette l’amendement CF 8.

Puis elle adopte les amendements identiques CF 13 et CF 14.

*

* *

Article 13

Bilan de la mise en œuvre de la programmation

Le présent article fixe les modalités de suivi de la mise en œuvre de la programmation.

Le paragraphe I reprend l’obligation pour le Gouvernement d’établir chaque année un bilan de la mise en œuvre de la programmation avant le débat d’orientation des finances publiques (DOFP). Cette obligation, déjà prévue par l’article 13 de la loi de programmation 2009-2012, ne s’est pas traduite en 2009 et 2010 par le dépôt d’un document spécifique, le Gouvernement considérant que son rapport sur l’évolution de l’économie française et sur les orientations des finances publiques faisait office de bilan de la programmation. Pour la période 2011-2014, il conviendra que le bilan de la programmation fasse l’objet de développements particuliers – le cas échéant insérés dans le rapport en vue du DOFP – transmis au Parlement au cours du dernier trimestre de la session ordinaire.

Les paragraphes II et III créent deux obligations :

– en premier lieu, le Gouvernement présentera chaque année au Parlement d’une part les modalités de mise en œuvre de la norme d’évolution de l’ONDAM prévue au II de l’article 8, et d’autre part les conditions dans lesquelles, en application du III de même article, des dotations ont été mises en réserve pour assurer le respect de cette norme. Déposée au plus tard le 15 octobre, cette présentation a vocation à figurer en annexe de chaque projet de loi de financement de la sécurité sociale ;

– en second lieu, la règle en encadrant les mesures nouvelles afférentes aux prélèvements obligatoires prévue à l’article 9 fera l’objet, chaque année, d’une évaluation. Cette évaluation sera présentée avant le premier mardi octobre, c’est-à-dire en même temps que le projet de loi de finances de l’année.

*

* *

La Commission est saisie de l’amendement CF 12 du président Jérôme Cahuzac.

M. le président Jérôme Cahuzac. L’article 13 du projet prévoit que le Gouvernement transmet au Parlement un rapport annuel sur l’exécution de la loi de programmation des finances publiques. Le présent amendement vise à ce que ce rapport soit remis le 1er juin.

La Commission, suivant l’avis favorable du rapporteur général, adopte l’amendement CF 12.

En conséquence, l’amendement CF 21 du rapporteur général n’a plus d’objet.

Puis, la Commission adopte l’amendement de coordination CF 20 du rapporteur général.

Elle adopte l’article 13 ainsi modifié.

*

* *

Article 14

Abrogation de la loi de programmation des finances publiques
pour les années 2009 à 2012

Le présent article vise à abroger l’ensemble des dispositions de la loi n° 2009-135 du 9 février 2009 de programmation des finances publiques pour les années 2009 à 2012.

Cette abrogation est la conséquence logique des modalités programmation choisie par le Gouvernement : une programmation quadriennale, appelée à être votée tous les deux ans. En conséquence de ce choix, la présente loi n’est pas une loi de programmation rectificative, mais a vocation à se substituer à la précédente loi de programmation – qui devient ainsi caduque –, aussi bien pour les dispositions fixant la trajectoire d’évolution des finances publiques que pour celles édictant des règles de gouvernance.

*

* *

La Commission adopte l’article 14 sans modification.

Enfin, la Commission adopte l’ensemble du projet de loi ainsi modifié.

*

* *

La suite de ce document est disponible au format pdf.

© Assemblée nationale

1 () Calculs du Rapporteur général à partir des chiffres définitifs 2009 et des hypothèse de croissance en volume du PIB, d’élasticité des recettes et d’évolution des dépenses publiques figurant dans le rapport annexé au projet de loi de programmation des finances publiques pour 2011-2014.

2 () Voir le commentaire de l’article 4.

3 () Pour le détail des calculs, voir le commentaire de l’article 4.

4 () + 1,6 % correspond à l’évolution, en moyenne annuelle en volume, des dépenses publiques entre 2006 et 2010 (hors année 2009, celle-ci étant largement marquée par les effets du plan de relance de l’économie) et correspond à la meilleure performance jamais atteinte en terme de réduction du rythme de progression annuel des dépenses publiques sur quatre ans en France.

5 () Calculs du Rapporteur général à partir des chiffres définitifs 2009 et des hypothèses de croissance en volume du PIB, d’élasticité des recettes et d’évolution des dépenses publiques figurant dans le rapport annexé au projet de loi de programmation des finances publiques pour 2011-2014.

6 () Le Rapporteur général fournit plus de précisions sur ces évaluations dans ses observations sur cet article.

7 () Rappelons que la trajectoire du programme de stabilité courrait jusqu’en 2013, et non 2014 comme la présente programmation.

8 () Le niveau de dette publique à la fin d’une année donnée, exprimé en milliards d’euros, correspond au niveau de dette en début d’année, auquel s’ajoutent le déficit public de l’année et d’éventuels « flux de créances ». Sous l’hypothèse de flux de créances nuls, il faudrait donc pour stabiliser le niveau de dette en milliards d’euros que le solde public soit à l’équilibre. En revanche, lorsque le niveau de dette est rapporté à la taille de l’économie et exprimé en pourcentage du PIB, ce qui est usuellement le cas, la condition pour le stabiliser est d’autant moins exigeante que la croissance du PIB est rapide. En effet, pour stabiliser le ratio d’endettement (dette/PIB), il suffit que numérateur et dénominateur croissent au même rythme. Ainsi, en l’absence de flux de créances, on peut montrer que le solde public stabilisant la dette publique est approximativement égal au produit du niveau du ratio d’endettement de l’année précédente par le taux de croissance nominale de l’économie : .

9 () Voir les commentaires des articles 4,5 et 6.

10 () Voir le commentaire de l’article 5.

11 () Loi n° 2009-135 du 9 février 2009 de programmation des finances publiques pour les années 2009 à 2012.

12 () Pour plus de détails, voir le commentaire de l’article 5.

13 () Loi n° 2010-237 du 9 mars 2010 de finances rectificative pour 2010 .

14 () Pour plus de détails, voir les commentaires des articles 5 et 7.

15 () Les pertes sur créances détenues par des tiers, notamment par l’agence française de développement, sont compensées par l’État par crédits budgétaires.

16 () Les intérêts courus non échus sont les intérêts dus, en fin d’année, au titre des titres de dette émis par l’État mais non encore versés (les intérêts étant versés à date fixe, en fin de période).

17 () Les ressources de la CADES financent le remboursement des intérêts de la dette sociale mais aussi le principal de cette dette. Or, ce dernier type de dépense ne constitue pas une dépense au sens de la comptabilité nationale, ce qui explique l’importance de l’excédent dégagé par cet ODAC. De même, les achats de titres financiers par le fonds de réserve des retraites (FRR) ne constituent pas une dépense au sens de la comptabilité nationale, ce qui entraîne le même effet sur le solde de cet ODAC.

18 () Voir le commentaire de l’article 11 du présent projet de loi de programmation.

19 () Hypothèses :

– transfert de 68 milliards de dette « structurelle » et de « de crise » d’euros financés par le transfert de ressources d’un montant de 3,55 milliards d’euros en 2010 et 3,35 milliards d’euros en 2011 et d’un coût de financement de 4 %, soit 2,7 milliards d’euros.

– transfert des déficits de l’assurance vieillesse au fil de l’eau, sur la base d’environ 10 milliards d’euros par, financés par la quote-part du prélèvement de 2 % sur les revenus du capital affectés au fonds de réserve des retraites, soit 1,5 milliard d’euros, et d’un coût de financement de 4 %, soit 400 millions d’euros.

20 () Pour plus de précisions quant à l’impact des investissements d’avenir sur le solde public, se référer au rapport n° 2268 de M. Gilles Carrez relatif au premier projet de loi de finances rectificative pour 2010.

21 () Loi n° 2009-135 du 9 février 2009 de programmation des finances publiques pour les années 2009 à 2012.

22 () Voir le commentaire de l’article 7.

23 () Voir le commentaire de l’article 4.

24 () Les mesures d’âge prévues par le projet de loi portant réforme des retraites leur feraient économiser 2,4 milliards d’euros en 2014.

25 () Voir notamment les lois d’orientation et de programmation pour la sécurité intérieure (du 29 août 2002), pour la justice (du 9 septembre 2002), pour la ville et la rénovation urbaine (du 1er août 2003).

26 () Hors incidence de la non reconduction en 2011 des mesures du plan de relance de 2010.

27 () Il faut en effet rappeler que la loi de programmation des finances publiques pour les années 2009-2012 n’avait fixé qu’un objectif d’évolution des dépenses de l’ensemble constitué par l’Etat, les organismes divers d’administration centrale et les régimes obligatoires de base de sécurité sociale.

28 () Estimation sur la période 2000-2008 évaluée à 2,26 % par an, l’année 2009 n’étant pas représentative compte tenu du plan de relance de l’économie.

29 () Voir commentaire de l’article 5 du présent projet de loi de programmation des finances publiques.

30 () Voir l’exposé général de M. Gilles Carrez dans le rapport n° 2651 sur le règlement des comptes et rapport de gestion pour 2009, page 9.

31 () Pour la Cour des comptes, en 2010, « hors relance et allocations chômage, la croissance des dépenses publiques en volume serait de 1,7 %. Elle serait donc inférieure à la moyenne des dix dernières années, mais très loin de l’objectif de 0,6 % retenu pour les années 2011 à 2013 » (Rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques, juin 2010, p. 51).

32 () Voir commentaire de l’article 5 du présent projet de loi de programmation des finances publiques.

33 () L’assiette des dépenses de fonctionnement s’élève à près de 10,3 milliards d’euros et porte sur les dépenses relevant de la catégorie 31 (18,3 milliards d’euros en 2010) à l’exception des crédits de fonctionnement du ministère de la défense (7,8 milliards d'euros en 2010) et les crédits de la mission Administration générale et territoriale de l’État relatifs à l’action Vie politique, culturelle et associative (0,2 milliard d’euros en 2010).

34 () Voir commentaire de l’article 8 du présent projet de loi de programmation des finances publiques.

35 () Voir commentaire de l’article 7 du présent projet de loi de programmation des finances publiques.

36 () Notamment parce qu’ils sont particulièrement sensibles à la progression « tendancielle » servant de trajectoire de référence, ainsi qu’au « point de départ » de la projection (c’est-à-dire les années 2009 et 2010, marquées par des dépenses exceptionnelles liées à la crise).

37 () Loi n° 2007-1822 du 24 décembre 2007 de finances pour 2008.

38 () Toutes les affectations de recettes ne sont pas prises en compte dans la norme, ainsi qu’en témoignent les développements nourris du rapport annexé sur ce point.

39 () Voir par exemple le rapport d’information préalable au débat d’orientation budgétaire pour 2008, n° 67, juillet 2007, pages 18 à 25.

40 () Sur les contours de la norme de dépense, voir Gilles Carrez, Rapport n° 276, tome 1, sur le projet de loi de finances initiale pour 2008.

41 () Loi n° 2009-122 du 4 février 2009 de finances rectificative pour 2009.

42 () Loi n° 2009-135 du 9 février 2009 de programmation des finances publiques pour les années 2009 à 2012.

43 () Voir Gilles Carrez, Rapport n° 1775 sur le projet de loi de règlement des comptes et rapport de gestion pour 2008, juin 2009, pages 7 à 16.

44 () En revanche, par rapport à la loi de finances rectificative du 16 octobre 2008, qui a ouvert 4 milliards d’euros de crédits supplémentaires sur le programme Charge de la dette et trésorerie de l’État, la dépense finale est inférieure de 0,7 milliard d’euros.

45 () En pratique, lors de l’élaboration de la loi de finances initiale pour 2008, l’inflation anticipée à cet horizon était de 1,5 % pour la France et de 1,6 % pour la zone euro. Elle s’est in fine établie à respectivement 3,2 % et 3,6 %, sous l’effet de la forte hausse des prix des matières premières au premier semestre 2008.

46 () La crise a ainsi incité l’Agence France Trésor, dans un souci de sécurisation de sa politique d’émission, à rouvrir d’anciennes lignes obligataires plutôt que de lancer de nouvelles lignes lorsque la liquidité était au plus bas.

47 () Gilles Carrez, tome 1 du rapport n° 2651 sur le règlement des comptes et le rapport de gestion pour 2009, juin 2010, pages 9 à 20.

48 () Voir Gilles Carrez, Rapport n° 2132 sur le troisième projet de loi de finances rectificative pour2009, décembre 2009, page 13.

49 () Le taux de progression de 0,1 % en volume (plutôt que de 0 %) s’explique, à titre exceptionnel, par une évolution de 0,5 % en volume des concours financiers de l’État aux collectivités territoriales en 2009. Ces derniers ont en effet conservé le rythme d’évolution en valeur prévu initialement dans le projet de loi de finances pour 2009 (soit 2 %), en dépit de la révision à la baisse de l’inflation prévisionnelle dans la loi de finances initiale pour 2009 (soit 1,5 %).

50 () Rappelons que, comme de coutume, c’est la loi de finances initiale pour l’année n qui a servi de référence pour le calcul de la norme de dépense régissant l’élaboration de la loi de finances initiale pour l’année n+1.

51 () Gilles Carrez, tome 1 du rapport n° 2651 sur le règlement des comptes et le rapport de gestion pour 2009, juin 2010, pages 16-17.

52 () Voir le rapport d’information préalable au débat d’orientation des finances publiques pour 2011, n° 2689, juillet 2010, pages 36 à 39.

53 () C'est-à-dire l’ensemble des charge liées à la rémunération des agents de l’État.

54 () Rapport de la DGAFP sur l’état de la fonction publique 2009-2010, août 2010, pages 27-28.

55 () Le glissement-vieillesse-technicité positif (ou « effet de carrière ») est contrebalancé par l’impact à la baisse des mouvements d’entrées et sorties dans la fonction publique à effectifs constants (GVT négatif ou « effet de noria »).

56 () Rapport de la Cour des comptes sur la situation et les perspectives des finances publiques, juin 2010, pages 115 à 117.

57 () Voir le commentaire de l’article 4.

58 () Voir le commentaire de l’article 97 du projet de loi de finances pour 2011 dans le rapport spécial sur la mission Politique de l’emploi et du travail.

59 () Voir le commentaire de l‘article 96 du projet de loi de finances pour 2011 dans le rapport spécial sur la mission Politique de l’emploi et du travail.

60 () En effet, entre la loi de finances initiale pour 2009 et la loi de finances initiale pour 2010, les concours de l’Etat aux collectivités territoriales (crédits de la mission Relations avec les collectivités territoriales, prélèvement sur recettes au profit des collectivités territoriales hors FCTVA et dotation générale de décentralisation inscrite sur la mission Travail emploi) ont progressé de 300 millions d’euros.

61 () Loi n° 2009-135 du 9 février 2009 de programmation des finances publiques pour les années 2009 à 2012.

62 () Gilles Carrez, Rapport sur la programmation des finances publiques pour les années 2009-2012, n° 1155, octobre 2008, p. 16.

63 () Il convient en effet de rappeler que le principe d’annualité budgétaire est une norme de rang constitutionnel (voir notamment les décisions du Conseil constitutionnel n° 98-406 DC du 29 décembre 1998 sur la loi de finances rectificative pour 1998 et n° 2001-448 DC du 25 juillet 2001 sur la LOLF).

64 () Voir le commentaire de l’article 5.

65 () Voir le commentaire de l’article 5 relatif aux principes de fonctionnement des règles « 0 volume » et « 0 valeur » en cas d’évolution des hypothèses d’inflation, de dette et de pensions.

66 () Pour plus de détails, voir par exemple les appréciations portées par Gilles Carrez et la Cour des comptes sur les changements de périmètres pris en compte par le Gouvernement dans le calcul de la norme de dépenses pour 2009 et 2010 : Rapports sur le projet de loi de finances pour 2009, tome 1, n° 1198, octobre 2008, p 69 et sur le projet de loi de finances pour 2010, tome 1, n° 1967, octobre 2009, p. 101 à 105 et Rapport de la Cour des comptes sur les résultats et la gestion budgétaire de l’État, exercice 2009, mai 2010, page 108-109.

67 () Voir Cour des comptes, résultats et gestion budgétaire de l’État, exercice 2009, mai 2010, page 98 et s.

68 () Voir les décrets n° 2009-1368 du 9 novembre 2009 et n° 2010-1147 du 29 septembre 2010 portant ouverture et annulation de crédits à titre d’avance.

69 () Sur la mission Ville et Logement, les dépenses fiscales représentaient 11 milliards d’euros en 2009 (+14,6 % par rapport à 2006), soit une fois et demi le total des crédits budgétaires (7,6 milliards d’euros). Il en de même s’agissant de la mission Solidarité, insertion, égalité des chances (22,73 milliards d'euros de dépenses fiscales pour 9,49 milliards d'euros de crédits budgétaires) et des missions Travail/emploi ou Économie.

70 () Rapport remis en application de l’article 58-2 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances, juillet 2010.

71 () Loi n° 2009-135 du 9 février 2009 de programmation des finances publiques pour les années 2009 à 2012.

72 () Voir Gilles Carrez, Rapport sur le projet de loi de finances pour 2009, tome 1 ,n° 1198, octobre 2008, pages 93 à 106.

73 () Le contrat de croissance et de solidarité prévoyait une évolution des dotations de l’Etat aux collectivités locales conforme à l'indice prévisionnel des prix à la consommation des ménages hors tabac associé au projet de loi de finances de l’année, majoré de 33% du taux de croissance du produit intérieur brut (PIB) de l’année précédente.

74 () Voir le commentaire de l’article 5.

75 () En 2009, hors plan de relance de l’économie et hors contribution au compte d’affectation spéciale Pensions, 11 missions sur 31 présentaient des dotations inférieures à la programmation pluriannuelle. En 2010, 7 missions sur 31 ont vu leurs dotations baisser par rapport à la programmation pluriannuelle afin de respecter la norme de dépense de l’Etat.

76 () Rapport du groupe de travail sur le pilotage des dépenses d’assurance-maladie.

77 () Rappelons que le comité d’alerte, créé par l’article 40 de la loi du 13 août 2004 relative à l’assurance maladie, a principalement pour tâche d’alerter le Parlement, le Gouvernement et les caisses d’assurance maladie s’il estime qu’il existe un risque sérieux que les dépenses d’assurance maladie dépassent un seuil fixé, par décret, à 0,75 % de l’ONDAM (la loi prévoyant que ce seuil ne peut être supérieur à 1 %).

78 () En revanche, l’État peut décider de mesures relatives à l’assiette de ces impositions.

79 () La mesure relative au mode de recouvrement des prélèvements sociaux sur les contrats d’assurance, d’un montant de 1,6 milliard d’euros, n’est pas pérenne car elle constitue une mesure de trésorerie (la perception de l’imposition est avancée de le temps). La taxation des réserves de capitalisation des compagnies d’assurance est une mesure exceptionnelle dont le produit attendu en 2011 s’élève à 850 millions d’euros.

80 () Il ne s’agit donc pas des surplus spontanés de recettes fiscales, mais des surplus de recettes constatés en exécution par rapport à la prévision.

81 () Loi organique n° 2005-779 du 12 juillet 2005 modifiant la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances.

82 () Le risque existait en effet que le Conseil constitutionnel jugeât une telle règle contraire à l’article 20 de la Constitution, dans sa rédaction alors en vigueur et selon laquelle « le Gouvernement détermine et conduit la politique de la Nation », et à l’habilitation conférée par l’article 34 de la Constitution au législateur organique en matière de lois de finances, laquelle a toujours été entendue comme ne concernant que des règles de procédure.

83 () Rapport n° 1926 de M. Gilles Carrez du 17 novembre 2004.

84 () Décision n° 2007-555 DC du 16 août 2007.

85 () Voir les propositions faites à ce sujet dans le rapport relatif au projet de loi organique.

86 () Décision n° 2005-530 DC du 29 décembre 2005.

87 () Abstraction faite de la disposition de la loi de finances pour 2006 relative aux surplus du produit de la fiscalité pétrolière et censurée par le Conseil constitutionnel.

88 () Rapport n°445 de M. Gilles Carrez relatif au projet de loi de finances rectificative pour 2007.

89 () Rapport n° 2007-M-005-02 du mois d’avril 2007.

90 () Voir Rapport d’information de MM. Bouvard, Brard, Carcenac et de Courson, n° 1058, juillet 2008.

91 () Article 107 de la loi n°2009-1673 du 30 décembre 2009 de finances pour 2010.

92 () Circulaire du 1er juillet 2010 - 1BLF-10-3061 relative au projet de loi de finances pour 2011 - Finalisation des documents budgétaires.

93 () Rapport d’information présenté par M. Jean MALLOT établi en conclusion des travaux de la mission d’évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale (MECSS) sur « le fonctionnement de l’hôpital » adopté par la Commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale le 26 mai 2010

94 () Rapport remis au Premier ministre le 21 juin 2010, accessible sur le site Internet du ministère du Budget : http://www.budget.gouv.fr/directions_services/sircom/rapport_camdessus_2010.pdf .

95 () Rapport de la Cour des comptes, septembre 2010.

96 () Rapport du groupe de travail présidé par Michel Camdessus, Réaliser l’objectif constitutionnel d’équilibre des finances publiques, 21 juin 2010, page 13.

97 () Cette question n’est pas spécifique à la France : voir par exemple la communication de la Commission européenne du 13 juin 2007, « Assurer l’efficacité du volet préventif du pacte de stabilité et de croissance ».