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No 4325

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 7 février 2012

PROPOSITION DE RÉSOLUTION
EUROPÉENNE

sur la proposition de règlement relatif à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données,

TEXTE DE LA COMMISSION

DES AFFAIRES EUROPEENNES

ANNEXE AU RAPPORT1

PROPOSITION DE RÉSOLUTION EUROPÉENNE

Article unique

L’Assemblée nationale,

Vu l’article 88-4 de la Constitution,

Vu l’article 151-5 du Règlement de l’Assemblée nationale,

Vu le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, notamment son article 16,

Vu la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, notamment ses articles 7 et 8,

Vu la directive 95/46/CE du Parlement européen et du Conseil du 24 octobre 1995 relative à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données,

Vu la loi modifiée no 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés,

Vu la communication de la Commission européenne au Parlement européen et au Conseil « Une approche globale de la protection des données à caractère personnel dans l'Union européenne » (COM [2010] 609 final),

Vu la proposition de règlement relatif à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données (COM [2012] 11 final/no E 7055),

1. Réaffirme son engagement en faveur d’une protection renforcée de la vie privée des citoyens. Cela constitue une exigence démocratique face à l’apparition de nouvelles technologies et à l’émergence d’acteurs mondiaux dont le modèle économique repose notamment sur le traitement commercial de données personnelles ;

2. Soutient les objectifs annoncés par la Commission européenne dans sa communication du 4 novembre 2010 concernant la révision du cadre juridique européen en matière de protection de la vie privée et des données personnelles ;

3. Estime que la modernisation, l’harmonisation et la simplification des règles applicables favoriseront une meilleure prise en compte, par l’ensemble des acteurs, des exigences européennes sur ces questions, grâce notamment à une plus grande responsabilisation des responsables de traitement, qui devront prendre toutes les mesures nécessaires à la protection des données personnelles traitées ;

4. Se félicite à ce titre de l’introduction, au niveau européen, de nouvelles dispositions qui participeront à une meilleure protection des droits des citoyens ;

5. Rappelle les orientations figurant dans la déclaration parlementaire franco-allemande de la mission d’information de l’Assemblée nationale sur les droits de l’individu dans la révolution numérique et de la commission d’enquête du Bundestag sur Internet et la société numérique, en date du 19 janvier 2011 ;

6. Souligne ainsi l’inscription dans le texte proposé par la Commission européenne d’un droit à l’oubli pour les citoyens qui devrait, dans un souci de réalisme, être applicable aux réseaux sociaux et qui permettra aux personnes d’obtenir plus simplement la suppression de leurs données personnelles par les responsables de traitement. Il conviendra toutefois de s’assurer que ce droit permette aux personnes concernées d’obtenir la suppression des données mises en ligne par un tiers ;

7. Se prononce également en faveur de l’introduction d’un nouveau droit à la portabilité des données personnelles pour les citoyens qui pourront désormais obtenir, à leur demande, restitution des données traitées, et notamment pour celles publiées sur les réseaux sociaux, dans un format électronique qui permette leur réutilisation sur d’autres supports ;

8. Défend la proposition de la Commission européenne visant à modifier considérablement les règles de recueil du consentement des citoyens au traitement de leurs données personnelles. Cette disposition sera beaucoup plus protectrice puisque l’expression du consentement nécessitera désormais une action positive du citoyen. Son silence ou son inaction ne pourront plus être assimilés à un consentement implicite ;

9. Soutient la désignation de délégués à la protection des données au sein des administrations publiques et des entreprises de plus de 250 salariés. Cette disposition, particulièrement attendue par certaines autorités de protection européennes, participera assurément à une meilleure prise en compte des règles applicables dans ce domaine et à une plus grande sensibilisation des structures publiques et privées à ces questions. Toutefois, le caractère obligatoire de la désignation pourrait être contre-productif, une attention particulière devant être portée à la situation des salariés désignés délégués à la protection des données ;

10. Exprime son opposition claire à l’inscription, dans le texte proposé par la Commission européenne, du critère du principal établissement du responsable de traitement, qui serait porteur de conséquences politiques et économiques extrêmement dommageables pour notre pays, et pour l’ensemble du territoire européen ;

11. Considère que cette solution éloignerait les Européens des autorités compétentes et qu’elle irait à l’encontre de la construction d’une Europe politique et concrète, proche des préoccupations de ses citoyens. Elle favoriserait également la pratique du « forum shopping », et l’établissement d’entreprises au sein des Etats membres dont les autorités de protection privilégient une approche plus souple. Elle réduirait également considérablement l’attractivité des territoires français et européens ;

12. Défend une solution alternative, fondée sur le maintien de la compétence d’une autorité de protection d’un Etat sur tout traitement de données ciblant spécifiquement la population de cet Etat, quel que soit l’Etat membre sur lequel est établi le responsable de traitement ;

13. Exprime ses plus vives inquiétudes quant au mécanisme de coopération proposé par la Commission européenne, qui ne garantirait pas une information suffisante des autorités de protection, notamment dans les cas de traitement de données particulièrement sensibles, comme les données génétiques, biométriques, ou les données de santé, réduisant considérablement les contrôles a priori sur ces traitements à risques. Elle soutient l’introduction de nouvelles dispositions permettant une coopération renforcée entre les autorités de protection, afin notamment de garantir un contrôle rigoureux des traitements de données à risques ;

14. Regrette la concentration de pouvoirs considérables entre les mains de la Commission européenne, aux dépends des autorités de protection, quant à l’élaboration des lignes directrices en matière de protection des données personnelles et à la définition des modalités d’application des nouvelles dispositions. Elle défend un rééquilibrage de ces compétences au profit des autorités de protection qui bénéficient de l’expertise technique indispensable à cette mission ;

15. Appelle à un meilleur encadrement des transferts internationaux de données, qui doivent nécessairement préserver les pouvoirs de contrôle et d’autorisation de ces échanges des autorités nationales de protection. L’auto-évaluation des conditions de transferts, par les responsables de traitement eux-mêmes, conduirait à une baisse considérable du niveau de protection des droits des citoyens ;

16. Invite le Gouvernement français à se saisir de cette question dans les plus brefs délais et à défendre une réforme plus respectueuse des droits de nos concitoyens, en accord avec la position défendue publiquement par la Commission nationale de l’informatique et des libertés ;

17. Appelle à l’adoption, par les Etats membres de l’Union européenne et les États tiers, d’une convention internationale pour la protection des personnes à l’égard du traitement des données personnelles, comme le soutient la résolution de Madrid, adoptée par la 31e conférence internationale des commissaires à la protection des données et de la vie privée.

1 Voir le numéro 4227.


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