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APRÈS ART. 33N°II-1068

ASSEMBLÉE NATIONALE
7 novembre 2015

PLF POUR 2016 - (N° 3096)

Commission
 
Gouvernement
 

Adopté

AMENDEMENT N°II-1068

présenté par

le Gouvernement

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ARTICLE ADDITIONNEL

APRÈS L'ARTICLE 33, insérer l'article suivant:

Le chapitre II du titre II du livre Ier du code de l’énergie est complété par une section 3 ainsi rédigée :

« Section 3 : Aide en faveur des entreprises exposées à un risque significatif de fuite de carbone en raison des coûts du système d’échange de quotas d’émission de gaz à effet de serre répercutés sur les prix de l’électricité

« Art. L. 122‑8 – I. Une aide est versée aux entreprises exposées à un risque significatif de fuite de carbone en raison de la répercussion des coûts du système européen d’échange de quotas d’émission de gaz à effet de serre sur les prix de l’électricité.

« II. – Peuvent bénéficier de l’aide mentionnée au I les entreprises qui exercent leurs activités dans un des secteur ou sous-secteur exposé à un risque significatif de fuite de carbone en raison de la répercussion des coûts des quotas du système communautaire d’échange de quotas d’émission de gaz à effet de serre sur les prix de l’électricité. La liste des secteurs et sous-secteurs concernés est définie en annexe II de la Communication 2012/C 158/04 de la Commission européenne.

« III. – 1. Le montant de l’aide mentionnée au I est assis sur les coûts des quotas du système européen d’échange de quotas d’émission de gaz à effet de serre répercutés sur les prix de l’électricité. Ces coûts sont calculés en effectuant le produit des facteurs suivants :

« a) Le facteur d’émission de l’électricité consommée en France en tonnes de dioxyde de carbone par mégawattheure défini au 2 ;

« b) Un facteur P en euros par tonne défini au 3 ;

« c) Le volume de l’électricité éligible en fonction des types de produits, tel que défini aux 4 et 5.

« 2. Le facteur d’émission de l’électricité consommée en France en tonnes de dioxyde de carbone par mégawattheure est fixé par décret dans la limite de 0,76 tCO2/MWh.

« 3. Le facteur P est fixé par arrêté des ministres chargés de l’énergie, de l’industrie et du budget. Pour les coûts supportés en 2015, ce facteur P est fixé à 5,91 euros par tonne.

« 4. Pour la production des produits mentionnés à l’annexe III des lignes directrices 2012/C 158/04, le volume de l’électricité éligible est le produit des trois facteurs suivants :

« a) le référentiel d’efficacité pour la consommation d’électricité spécifique au produit fixé dans l’annexe III des lignes directrices 2012/C 158/04 ;

« b) la production en tonnes par an de produit, dans la limite d’un plafond basé sur la production passée dont les modalités de calcul sont fixées par voie réglementaire ;

« c) le ratio d’électricité soumise aux coûts des quotas du système européen d’échange de quotas d’émission au sens du IV pour la production de chaque produit.

« 5. Pour la production des produits qui ne sont pas mentionnés à l’annexe III de la Communication 2012/C 158/04 précitée et qui relèvent des secteurs ou sous-secteurs mentionnés au II, le volume de l’électricité éligible est le produit des trois facteurs suivants :

« a) le référentiel d’efficacité de repli, égal à 80 % ;

« b) la consommation d’électricité en mégawattheures utilisée pour la production de ces produits, dans la limite d’un plafond basé sur la consommation passée dont les modalités de calcul sont fixées par voie réglementaire ;

« c) le ratio d’électricité soumise aux coûts des quotas du système communautaire d’échange de quotas d’émission au sens du IV pour la production de chaque produit.

« IV. – Pour le calcul du ratio mentionné aux c des 4 et 5 du III, l’électricité est considérée comme soumise aux coûts des quotas du système européen d’échange de quotas d’émission si elle respecte au moins l’une des conditions suivantes :

« a) Elle est produite par l’entreprise éligible pour ses propres besoins à partir de combustibles fossiles au sein d’une installation qui, d’une part, exerce une activité mentionnée à l’annexe I à la directive 2003/87/CE du Parlement européen et du Conseil du 13 octobre 2003 établissant un système d’échange de quotas d’émission de gaz à effet de serre dans la Communauté et modifiant la directive 96/61/CE du Conseil et, d’autre part, est soumise aux dispositions de ladite directive ;

« b) Elle est achetée directement ou par l’intermédiaire d’un fournisseur sur les marchés de l’électricité au prix de ces marchés ;

« c) Le prix de l’électricité dans le contrat de fourniture de l’électricité prend en compte le prix des transactions effectuées sur les marchés organisés de l’électricité ou de quotas d’émissions ;

« d) Le fournisseur d’électricité justifie que l’électricité est produite au moins en partie à partir de combustibles fossiles par une ou plusieurs installations de production d’électricité soumises aux dispositions de la directive 2003/87/CE du Parlement européen et du Conseil du 13 octobre 2003 établissant un système d’échange de quotas d’émission de gaz à effet de serre dans la Communauté et modifiant la directive 96/61/CE du Conseil.

« V. – Le montant de l’aide est fixé à 85 % des coûts mentionnés au III supportés en 2015, à 80 % des coûts mentionnés au III supportés en 2016, 2017 et 2018, puis à 75 % des coûts mentionnés au III supportés en 2019 et 2020.

« VI. – L’aide mentionnée au I s’applique sur les coûts mentionnées au III subis à partir du 1er janvier 2015 jusqu’au 31 décembre 2020. Elle est versée dans le courant de l’année qui suit celle pour laquelle l’aide est accordée.

« VII. – Un décret en Conseil d’État détermine les conditions d’application du présent article.

« VIII. – Le présent article entre en vigueur à la date de réception par le Gouvernement de la réponse de la Commission européenne permettant de regarder le dispositif législatif lui ayant été notifié comme conforme au droit de l’Union européenne en matière d’aides d’État. »

EXPOSÉ SOMMAIRE

L’amendement présenté a pour objet de mettre en place un dispositif de « compensation carbone » pour les industriels électro-intensifs exposés à la concurrence internationale.

Cette mesure, prévue par le droit européen et déjà instituée par plusieurs États membres, en faveur des secteurs électro-intensifs exposés à la concurrence internationale, consiste à verser aux entreprises bénéficiaires une aide d’un montant caractéristique du coût du carbone, lié au système européen d’échange de quotas d’émission de gaz à effet de serre, incorporé dans le prix de l’électricité.

Elle s’inscrit dans le cadre des mesures engagées par le Gouvernement depuis 2014 pour soutenir la compétitivité des sites industriels, et dont certaines se sont concrétisées dans la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte.

Pour certaines activités industrielles (production d’aluminium, de chlore, de silicium …), l’approvisionnement en électricité représente en effet jusqu’à 30 % des coûts de production et peut représenter plus de 100 % de la valeur ajoutée. La compétitivité et l’existence même de ces industries, au service de l’emploi et de la lutte contre le chômage, priorités du Gouvernement, dépendent donc d’un approvisionnement compétitif et prévisible à long terme en électricité.

Ces sites très électro-intensifs et exposés à la concurrence internationale représentent en France environ 80 000 emplois directs. Certains sites constituent les seules sources d’emploi pérennes et non saisonnières des territoires sur lesquels ils sont implantés. D’autres sont structurels pour la pérennité des plateformes sur lesquelles ils sont installés. Enfin ces sites sont intégrés dans les chaines industrielles régionales ou nationales.

La « compensation carbone » poursuit ainsi un triple objectif : réduire le risque de fuite de carbone (par la délocalisation hors de l’Union européenne d’activités industrielles), maintenir l’objectif du système d’échanges de quota carbone de l’Union européenne de réaliser la décarbonation en assurant un bon rapport coût-efficacité, et limiter au minimum les distorsions de concurrence dans le marché intérieur.

Le dispositif proposé cible les entreprises des secteurs ou sous-secteurs énumérés à l’annexe II des lignes directrices 2012/C 158/04 (production d’aluminium, fabrication de papier et de carton, sidérurgie, métallurgie, chimie de base…) qui sont des secteurs qui présentent à la fois une forte intensité en consommation d’électricité et une forte exposition au commerce international.

L’assiette de l’aide est un montant caractéristique du coût engendré par la répercussion des coûts des quotas sur le prix de l’électricité. L’aide est versée l’année suivant celle au cours de laquelle les coûts sont supportés, en tenant compte notamment de la consommation d’électricité exposée au coût du CO2.

Ainsi, en 2016, seront compensés les coûts supportés au cours de l’année 2015, à hauteur de 85 % (conformément à la limite communautaire). Cela représente une enveloppe de 93 M€. L’aide représente pour les bénéficiaires un allègement de l’ordre de 3 €/MWh, soit une économie de l’ordre de 6 à 20 % de leur facture d’électricité, contribuant à leur compétitivité.

Les ressources permettant le financement de ce dispositif seront obtenues à la faveur du mouvement de rebudgétisation de la contribution au service public de l’électricité, qui sera réalisée en loi de finances rectificative pour 2015.