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ART. 36 QUATER | N°CD187 |
RECONQUÊTE DE LA BIODIVERSITÉ - (N° 3748)
AMENDEMENT N°CD187
présenté par
Mme Abeille, Mme Allain, Mme Attard, Mme Auroi, Mme Bonneton, M. Coronado, Mme Duflot, Mme Sas, M. Roumégas, M. Mamère et M. Noguès |
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ARTICLE 36 QUATER
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
Le livre Ier du code de l'urbanisme est ainsi modifié :
1° Le chapitre III du titre Ier est complété par une section 4 ainsi rédigée :
« Section 4
« Espaces de continuités écologiques
« Sous-section 1
« Classement
(Division et intitulé nouveaux)
« Art. L. 113-29. - Les plans locaux d'urbanisme peuvent classer en espaces de continuités écologiques des éléments des trames verte et bleue, définies aux II et III de l'article L. 371-1 du code de l'environnement, qui sont nécessaires à la préservation ou à la remise en bon état des continuités écologiques.
« Sous-section 2
« Mise en œuvre
(Division et intitulé nouveaux)
« Art. L. 113-30 (nouveau). - La protection des espaces de continuités écologiques est assurée par les dispositions prévues au présent chapitre ou à la section 4 du chapitre Ier du titre V du présent livre, notamment aux articles L. 151-22, L. 151-23 ou L. 151-41, ou par des orientations d'aménagement et de programmation en application de l'article L. 151-7, en tenant compte des activités humaines, notamment agricoles. » ;
2° (Supprimé)
EXPOSÉ SOMMAIRE
Cet amendement rétablit l'article 36 quater tel qu'issu des travaux de l'Assemblée nationale et supprimé en commission au Sénat. La loi Grenelle 2 fixe comme objectif aux documents d’urbanisme la préservation et la restauration des continuités écologiques tandis que les dernières lois de décentralisation responsabilise davantage les collectivités sur la protection de la biodiversité. Malheureusement, le droit de l’urbanisme actuel ne fournit pas suffisamment d’outils adaptés pour répondre complètement à cet objectif. En effet, bien utilisé, le droit actuel est adapté pour maîtriser l’urbanisation du territoire, mais il révèle très rapidement ses limites lorsqu’il s’agit de s’intéresser à la dimension fonctionnelle de la trame verte et bleue (TVB).
Par exemple, un zonage « non constructible » d’un PLU pourra donner l’impression de protéger strictement une petite zone humide d’intérêt local, alors que dans les faits il sera toujours possible d’y détruire tout intérêt écologique, soit directement en détruisant la roselière ou la prairie humide qui s’y développe, soit indirectement en procédant au drainage de cette zone (ce qui conduira de façon inéluctable à la disparition de ces formations végétales caractéristiques). Le zonage en apparence protecteur du PLU n’apporte donc en fait qu’une illusion de protection au regard de la dimension fonctionnelle de la continuité écologique. Celle-ci est en effet liée non seulement au caractère inconstructible de l’espace occupé par la zone humide, mais également à l’existence et au maintien des formations végétales spécifiques qui sont indispensables au cycle de vie des espèces, animales ou végétales, qui les utilisent.
Ainsi, l’objectif de l’outil « espaces de continuités écologiques » est de permettre aux collectivités locales (communes ou EPCI) de protéger les petits espaces de nature intéressante qui constituent concrètement la « trame verte et bleue » mais qui ne présentent pas de caractère suffisamment remarquable ou de surface suffisamment conséquente pour prétendre aux statuts de protection de type ENS, APB, RNR, RNN, Natura 2000. En effet, ces espaces sont souvent de petites surfaces, relictuels et marginaux pour les exploitations agricoles. L’objectif de l’ECE n’est pas de mettre sous la contrainte de grandes superficies, notamment lorsqu’elles sont exploitées par l’agriculture. Le fait que cet outil soit d’usage optionnel et à destination des collectivité implique une concertation locale, obligatoire dans les PLU(i), par laquelle le juste équilibre entre protection et exploitation devra être trouvé. S’agissant des espaces et formations végétales qui présentent à la fois un intérêt écologique et un intérêt agricole, typiquement les prairies, leur classement n’aurait de sens que pour des prairies d’intérêt patrimonial avéré (présence d’espèces patrimoniales) et dont la préservation est justifiée par leur rareté et leur rôle de continuité reconnu par un schéma régional de continuités écologiques (SRCE). En aucun cas, il ne s’agirait de classer et donc de protéger des prairies dans des territoires où celles-ci sont abondamment représentées et où il n’y a pas de risque de fragmentation avéré de la continuité des milieux prairiaux. L’objectif de l’espace de continuité écologique est d’empêcher l’irréversible, la coupure des dernières continuités d’un territoire déjà très menacé de fragmentation. En conclusion, cet amendement garantit, pour les espaces à double intérêt agricole et écologique, que le classement en ECE ne porte pas atteinte à la viabilité de l’exploitation agricole et que l’intérêt écologique de l’espace soit suffisamment important pour justifier le classement.
Par ailleurs, pour répondre aux craintes de certains secteurs, il est important de préciser que dans cette version, l’ECE : (i) n’est pas mobilisable sur les communes non dotées de documents d’urbanisme soit 35% des communes françaises majoritairement rurales et agricoles, (ii) il n’y a pas besoin de déclaration préalable pour tout changement d’affectation, tout mode d’occupation ou toute utilisation du sol de nature à compromettre la préservation ou la remise en bon état des espaces et formations végétales protégés par le classement en ECE, (iii) La collectivité doit justifier le caractère patrimonial pour la biodiversité de l’espace visé par l’ECE, ce qui permet de garantir sa bonne utilisation et enfin (iv) le classement doit tenir compte des activités humaines, notamment agricoles en milieu rural. Cet ajout permet de garantir que le classement de l’outil ne portera pas atteinte à la viabilité de l’exploitation agricole et prendra en compte les activités humaines déjà présentes sur place.
Enfin, il est important de rappeler que cet outil ne fournit pas de protection forte comme le fait l’EBC pour les espaces boisés, et il s’agit d’un outil volontaire dont la mobilisation par les élus locaux se fera en concertation avec les acteurs intéressés.