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N
° 4130

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 13 octobre 2016.

AVIS

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DE LA DÉFENSE NATIONALE ET DES FORCES ARMÉES
SUR LE PROJET DE LOI
de finances pour 2017 (n° 4061)

TOME VII

DÉFENSE

ÉQUIPEMENT DES FORCES – DISSUASION

PAR M. Jean-Jacques BRIDEY

Député

——

Voir le numéro : 4125 (annexe 11)

SOMMAIRE

___

Pages

INTRODUCTION 7

PREMIÈRE PARTIE ‒ LES CRÉDITS D’ÉQUIPEMENT INSCRITS AU PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 2017 9

I. SAUF « EFFET DE BASE » DÉFAVORABLE, LES CRÉDITS D’ÉQUIPEMENT SERONT CONFORMES À LA PROGRAMMATION MILITAIRE ACTUALISÉE 9

A. UN BUDGET D’ÉQUIPEMENT CONFORME À LA PROGRAMMATION MILITAIRE ACTUALISÉE ET REVUE À LA HAUSSE EN 2015 ET 2016 9

1. Un effort en faveur des équipements a été consenti lors de l’actualisation de la programmation militaire en 2015 9

a. Les crédits d’équipements ont été revus à la hausse par la loi du 28 juillet 2015 actualisant la programmation militaire 9

i. Un effort de deux milliards d’euros pour l’équipement des forces 9

ii. La répartition de l’effort 10

b. L’effort en faveur de la défense a été encore revu à la hausse en Conseil de défense le 6 avril 2016 11

2. Les crédits inscrits pour 2017 au programme 146 « Équipement des forces » sont conformes à la programmation 14

a. Le montant des crédits 14

b. La nature des crédits 14

B. LES HABITUELS ALÉAS DE FIN DE GESTION ET LE RISQUE D’« EFFETS DE BASE » NÉGATIFS SUR LE BUDGET 2017 14

1. Un report de charges à maîtriser 15

2. La nécessaire levée des mises en réserve et des gels 16

a. Le montant des mises en réserve, gels et « surgels » atteint 18 % des crédits votés 16

b. Pour une levée des réserves et des gels 17

II. UN EFFORT D’ARMEMENT ÉQUILIBRÉ ENTRE LES DIFFÉRENTS SYSTÈMES DE FORCES 19

A. LES PRINCIPALES OPÉRATIONS D’ARMEMENT PRÉVUES EN 2017 19

1. La poursuite du financement des grands programmes pluriannuels 19

2. Les principales commandes et livraisons 21

a. Les commandes et les livraisons de l’exercice 2016 21

b. Les commandes et les livraisons prévues pour l’exercice 2017 22

B. ÉVOLUTION DÉTAILLÉE DES CRÉDITS PAR SYSTÈME DE FORCES 23

1. L’évolution des crédits de la dissuasion 23

a. Le niveau des crédits 23

b. La ventilation des crédits 23

2. Les crédits d’équipements de commandement et de maîtrise de l’information 24

a. Les principaux programmes financés en 2017 25

i. Le programme de « système de drone tactique » 25

ii. Programme CERES 25

iii. La première étape du programme de radio CONTACT 26

iv. Le programme MUSIS 26

v. Le programme de système d’information des armées 26

b. Les autres crédits de l’action 07 27

3. Les crédits d’équipements de projection, de mobilité et de soutien 29

a. L’avion de transport futur, ou A400M 30

i. Un programme ambitieux 30

ii. Un avion présentant à ce jour d’importantes défaillances 31

b. Les autres opérations d’équipements de projection de forces 32

c. La rénovation des hélicoptères Cougar 33

d. Le programme d’hélicoptères NH90 Caïman 33

e. Les autres opérations d’équipements de mobilité 33

f. Le programme de porteur polyvalent terrestre (PPT) 34

g. Les autres opérations visant à « maintenir le potentiel ami et autre » 34

h. Le programme MRTT 35

4. Les crédits d’équipements d’engagement et de combat 35

a. Le programme de missile de croisière naval 35

b. Le programme Rafale 35

c. Les autres opérations d’équipements de frappe à distance 36

d. Le programme de véhicule blindé de combat d’infanterie 37

e. Le programme d’hélicoptère Tigre 37

f. Le programme de future torpille lourde 38

g. L’évolution du missile Exocet 38

h. Le programme de frégates multi-missions 38

i. Le programme de SNA Barracuda 39

j. Les équipements destinés à d’autres opérations, y compris à la conduite des opérations spéciales 40

k. L’opération d’ensemble SCORPION 42

l. La rénovation « à mi-vie » du Mirage 2000 43

m. Le programme de missile de moyenne portée 43

5. Les équipements de protection et de sauvegarde 44

a. Les programmes concourant à la sûreté des approches du territoire 44

i. Le programme de « patrouilleur futur » 44

ii. Le programme de missile d’interception à domaine élargi 44

iii. Le programme de bâtiments de soutien et d’assistance hauturiers 45

iv. Autres programmes 45

b. Les programmes de systèmes air-sol futurs 45

c. Les autres opérations et les équipements de protection de l’homme 46

6. La préparation et la conduite des opérations d’armement 47

7. Les crédits issus de contributions étrangères et de programmes civils 47

SECONDE PARTIE ‒ PERSPECTIVES POUR UNE REVALORISATION DU BUDGET DE LA DÉFENSE 49

I. « LES DEUX POURCENT », UN OBJECTIF SAISI COMME UNE CHANCE DE REMÉDIER À NOS INSUFFISANCES CAPACITAIRES 49

A. UN QUASI-CONSENSUS POUR PORTER LE BUDGET DE LA DÉFENSE À 2 % DU PIB 49

1. Le retournement de tendance est engagé, et les moyens de la défense sont orientés à la hausse 49

2. L’objectif de 2 % du PIB fait l’objet d’un quasi-consensus 49

a. Un objectif déjà érigé en « directive » de l’OTAN 49

b. Un objectif de plus en plus consensuel 51

B. UNE PERSPECTIVE VUE COMME UN REMÈDE POSSIBLE À NOS INSUFFISANCES CAPACITAIRES 51

1. Les priorités de l’armée de terre 51

a. Combler des lacunes capacitaires 51

b. Les priorités de l’armée de terre au titre des « deux pourcent » 52

2. Les priorités de l’armée de l’air 53

a. La « recapitalisation organique » de l’armée de l’air 53

b. Adapter le contrat opérationnel à la réalité des engagements 54

c. Renouveler la composante aéroportée de la dissuasion 54

3. Les priorités de la marine 54

a. Consolider le volume de la flotte de premier rang 54

b. Renforcer la flotte de souveraineté 55

c. Renouveler les hélicoptères de la marine 55

d. Engager des travaux en vue du renouvellement du porte-avions 56

4. Les autres priorités des armées, directions et services 57

II. DE L’ÉMULATION À LA PROGRAMMATION : UNE RÉFLEXION À CONDUIRE SUR DES BASES COHÉRENTES ET RÉALISTES 57

A. UNE ÉMULATION LÉGITIME ET FRUCTUEUSE, À CANALISER DANS UN DOUBLE SOUCI DE PRUDENCE ET DE COHÉRENCE 58

1. Un risque de disproportion entre les besoins exprimés et les moyens disponibles 58

2. Un risque de répartition plus ou moins homothétique des ressources 58

3. Un risque de persistance des faiblesses actuelles dans la soutenabilité de la programmation militaire 58

4. Un risque de focalisation sur une logique de moyens, notamment pour le maintien en condition opérationnelle 59

B. ÉLÉMENTS DE RÉFLEXION EN VUE D’UN NOUVEL EXERCICE DE PROGRAMMATION MILITAIRE 59

1. Clarifier les hypothèses de calcul du surcroît de ressources 59

a. Quel périmètre pour « les deux pourcent » ? 59

b. Quel calendrier pour « les deux pourcent » ? 60

c. Quelle évolution spontanée des dépenses ? 60

d. Quelles dépenses inéluctables ? Les besoins liés à la dissuasion 61

2. Définir un rythme réaliste de consolidation capacitaire 61

a. À court terme, investir dans la technologie et contourner l’effet d’inertie des programmes industriels 61

i. L’effet d’inertie des contrats d’armement 61

ii. Des possibilités de dépenses efficientes à court terme 62

b. À moyen terme, sérier les besoins 63

TRAVAUX DE LA COMMISSION 67

I. AUDITION DE M. LAURENT COLLET-BILLON, DÉLÉGUÉ GÉNÉRAL POUR L’ARMEMENT 67

II. EXAMEN DES CRÉDITS 87

ANNEXE : Liste des personnes auditionnées par le rapporteur pour avis 91

INTRODUCTION

Dans la lignée de la loi de finances pour 2016, le projet de loi de finances pour 2017 marque le redressement des crédits de la défense, y compris concernant les crédits du programme 146 « Équipement des forces ».

D’une façon inédite depuis longtemps, les crédits inscrits dans le présent projet sont d’ailleurs supérieurs aux dispositions de la loi de programmation militaire, elles-mêmes actualisées « à la hausse » par la loi du 28 juillet 2015.

Ce redressement trouve naturellement sa justification dans l’évolution du contexte stratégique : les attentats survenus sur le territoire national depuis janvier 2015 ont porté à un niveau d’intensité nouveau la menace pesant sur la France. Ils sont l’illustration du continuum identifié dès le Livre blanc de 2008 entre défense et sécurité, entre menaces à l’intérieur des frontières et menaces à l’extérieur. Ils ont ainsi justifié la mise en œuvre du contrat opérationnel de protection du territoire national assigné aux armées, et la révision à la hausse des hypothèses d’engagement afférentes.

C’est ainsi que s’est ouverte pour nos armées une nouvelle ère, qui va de pair avec une nouvelle approche des menaces ‒ désormais « militarisées » ‒, et de nouvelles missions sur le territoire national. Cette rupture stratégique suppose aussi de doter nos armées de moyens supplémentaires, adaptés aux missions qui leur sont assignées pour lutter contre ces menaces nouvelles.

C’est ainsi que l’idée de porter le budget de la défense à 2 % du PIB, déjà érigée en objectif de l’OTAN, fait l’objet d’un consensus de plus en plus large. Pour contribuer à la progression de la réflexion au-delà de la portée symbolique de cet objectif, le rapporteur pour avis s’est attaché à examiner comment, suivant quel calendrier et pour quelles dépenses cet effort accru en faveur de notre défense pourrait être organisé par une nouvelle programmation militaire.

Le rapporteur avait demandé que les réponses à son questionnaire budgétaire lui soient adressées au plus tard le 10 octobre 2016, date limite résultant de l’article 49 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances.

À cette date, 58 réponses sur 60 lui étaient parvenues, soit un taux de 96,6 %.

PREMIÈRE PARTIE
LES CRÉDITS D’ÉQUIPEMENT INSCRITS AU PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 2017

Le projet de loi de finances pour 2017 prévoit un effort conséquent en faveur de l’équipement des armées. Cet effort est conforme à la programmation militaire telle qu’elle a été actualisée (à la hausse) en 2015 et revue (encore à la hausse) lors du Conseil de défense du 6 avril 2016.

I. SAUF « EFFET DE BASE » DÉFAVORABLE, LES CRÉDITS D’ÉQUIPEMENT SERONT CONFORMES À LA PROGRAMMATION MILITAIRE ACTUALISÉE

Comme l’ensemble des dépenses du ministère de la Défense, les dépenses d’équipement s’inscrivent dans le cadre des perspectives tracées par le Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale de 2013 et des dispositions de la loi de programmation militaire (LPM) pour les années 2014 à 2019, actualisées par la loi du 28 juillet 2015 et dont les modalités de mise en œuvre ont été modifiées par les décisions prises le 6 avril 2016 en Conseil de défense. L’actualisation de 2015 et les ajustements de 2016 vont dans le sens d’un renforcement des moyens de la Défense pour faire face à un contexte sécuritaire dégradé.

A. UN BUDGET D’ÉQUIPEMENT CONFORME À LA PROGRAMMATION MILITAIRE ACTUALISÉE ET REVUE À LA HAUSSE EN 2015 ET 2016

Le projet de loi de finances pour 2017 traduit l’effort supplémentaire de défense prévu par l’actualisation de la programmation militaire et les décisions prises en Conseil de défense, y compris pour l’équipement des forces.

1. Un effort en faveur des équipements a été consenti lors de l’actualisation de la programmation militaire en 2015

a. Les crédits d’équipements ont été revus à la hausse par la loi du 28 juillet 2015 actualisant la programmation militaire

La loi n° 2015-917 du 28 juillet 2015 actualisant la programmation militaire pour les années 2015 à 2019 a programmé une hausse des ressources de la défense pour 3,8 milliards d’euros sur cette période, portant l’effort total à 162,41 milliards d’euros.

i. Un effort de deux milliards d’euros pour l’équipement des forces

L’actualisation de la programmation militaire comprend un effort significatif en faveur de l’équipement des forces, en particulier pour certaines capacités « critiques » comme la composante « hélicoptères », le transport aérien tactique ou le renseignement. À cette fin, la loi du 28 juillet 2015 a prévu un double effort financier :

‒ une majoration de 500 millions d’euros durant la période 2016-2019 des crédits d’entretien programmé des matériels (EPM), permettant la remise en état des matériels soumis à de fortes pressions en OPEX ;

‒ 1,5 milliard d’euros pour les opérations d’armement, cette enveloppe étant constituée de crédits budgétaires nouveaux pour 500 millions d’euros et, pour un milliard d’euros, de la réaffectation au ministère des gains de pouvoir d’achat résultant de l’évolution favorable des indices économiques

La LPM présente les aspects financiers de la programmation en crédits de paiement ‒ et non en autorisations d’engagement ‒, répartis non pas suivant la nomenclature budgétaire, mais par agrégats : « équipement », « hors équipement » et « masse salariale ». L’agrégat « équipement » comprend l’entretien programmé de l’équipement et du personnel, la dissuasion, les études (hors dissuasion), l’infrastructure, le renseignement, l’environnement des programmes, et les grands programmes hors dissuasion : programmes à effet majeur, autres opérations d’armement et équipements d’accompagnement. Ainsi, le budget de l’agrégat « équipement » est porté à 87,7 milliards d’euros entre 2015 et 2019 soit 17,3 milliards d’euros par an, comme le montre le tableau ci-après.

LA TRAJECTOIRE FINANCIÈRE DE LA LPM ACTUALISÉE

(en milliards d’euros courants)

 

2016

2017

LPM initiale (1)

LPM actualisée (2)

LFI 2016

LPM initiale (1)

LPM actualisée (2)

PLF 2017

Ressources totales

31,4

32,0

32,1

31,6

32,3

32,7

Dont équipement

16,7

17,0

17,0

17,1

17,3

17,3

Dont fonctionnement

3,5

3,5

3,5

3,5

3,5

3,5

(1) Loi n° 2013-1168 du 18 décembre 2013 relative à la programmation militaire pour les années 2014 à 2019 et portant diverses dispositions concernant la défense et la sécurité nationale.

(2) Loi n° 2015-917 du 28 juillet 2015 actualisant la programmation militaire pour les années 2015 à 2019 et portant diverses dispositions concernant la défense.

Source : ministère de la Défense.

ii. La répartition de l’effort

Les crédits regroupés par la programmation militaire sous l’agrégat « équipement » se répartissent de la façon suivante pour la période 2015‒2019 :

‒ 19,7 milliards d’euros au titre de la dissuasion nucléaire ;

‒ 41,8 milliards d’euros pour les opérations d’équipement conventionnel, dont 29 milliards d’euros consacrés aux programmes dits « à effet majeur » ‒ c’est-à-dire les plus importants, conduits par la direction générale de l’armement (DGA) ‒ et 12,8 milliards d’euros aux programmes dits « d’environnement » et aux équipements d’accompagnement ;

‒ 18,2 milliards d’euros pour l’entretien programmé des matériels ;

‒ 5,3 milliards d’euros au titre des opérations d’infrastructure ;

‒ 2,7 milliards d’euros d’études dites « amont », des études technologiques qui préparent les programmes d’armement, y compris pour la dissuasion.

b. L’effort en faveur de la défense a été encore revu à la hausse en Conseil de défense le 6 avril 2016

La dégradation du contexte stratégique a conduit le président de la République, lors du Conseil de défense du 6 avril 2016, à rehausser la trajectoire financière résultant de l’actualisation de la programmation militaire. Dans ce cadre, selon le ministère, les crédits inscrits pour l’année 2017 au titre de l’agrégat « équipements » ont été augmentés de 38 millions d’euros, les portant à plus de 17,3 milliards d’euros, comme le montre le tableau ci-après.

Cette hausse se traduit dès 2017 : les crédits de la mission « Défense » atteignent 32,7 milliards d’euros, soit 450 millions d’euros de plus que ne le prévoit la programmation militaire actualisée. À titre d’exemple, l’encadré ci-après présente les effets combinés de l’actualisation de la programmation et des ajustements décidés en Conseil de défense pour l’armée de terre.

L’effort supplémentaire d’équipement programmé en 2015 et en 2016 :
l’exemple de l’armée de terre

● L’actualisation de la programmation militaire en 2015 a permis d’accroître les effectifs de la force opérationnelle terrestre, de combler quelques ruptures temporaires de capacité parmi les plus critiques et de rénover certains dispositifs d’entraînement. Selon le sous-chef d’état-major de l’armée de terre chargé des plans et des programmes, cet effort représente 650 millions d’euros pour la durée de la programmation et permet de financer :

‒ la commande de sept hélicoptères Tigre, six hélicoptères Caïman et 1 000 roquettes à précision métrique pour le Tigre ;

‒ la rénovation de la simulation aux centres d’entraînement au combat (CENTAC) de Mailly-le-camp et aux actions en zone urbaine (CENZUB) de Sissonne ;

‒ 11 000 armes individuelles futures (AIF) supplémentaires ;

‒ la remise en état de 800 véhicules blindés légers (VBL) et l’avancement d’une tranche conditionnelle de 450 porteurs polyvalents terrestres (PPT).

● Les décisions prises en Conseil de défense le 6 avril 2016 prévoient un surcroît de crédits de 650 millions d’euros entre 2017 et 2022, qui doit permettre de financer :

‒ 200 missiles Hellfire et 270 munitions de lance-roquettes unitaire (LRU) ;

‒ 200 véhicules blindés multi-rôles légers supplémentaires ;

‒ 12 930 AIF supplémentaires pour les réserves, ainsi que 4 523 équipements de fantassins FELIN v1.3 et 2 700 jumelles de vision nocturne ;

‒ l’anticipation de la commande des 3 800 véhicules légers tactiques polyvalents non protégés (VLTP-NP) en remplacement des véhicules P4.

ÉVOLUTION DES CRÉDITS DU PROGRAMME 146 « ÉQUIPEMENT DES FORCES »

Source : projet annuel de performances.

2. Les crédits inscrits pour 2017 au programme 146 « Équipement des forces » sont conformes à la programmation

a. Le montant des crédits

Le tableau ci-avant présente l’évolution des crédits du programme 146 « Équipement des forces » par action et par sous-action. Si les autorisations d’engagement sont en repli, les crédits de paiement augmentent de près de 1 % pour s’établir à 10,05 milliards d’euros.

L’évolution du niveau des autorisations d’engagement traduit le fait que la majorité des opérations majeures nouvelles de la loi de programmation militaire auront été lancées fin 2016.

b. La nature des crédits

Dans ce projet de loi de finances, les crédits de paiement inscrits au programme 146 comprennent uniquement des crédits budgétaires, et non des recettes exceptionnelles. Le rapporteur ne peut que se féliciter de cette situation, qui lève l’aléa qui a longtemps pesé sur les crédits d’armement. C’est en effet en décembre 2015 que la loi de finances rectificative a mis en œuvre la décision, prise en Conseil de défense le 29 avril précédent, de remplacer les 2,167 milliards d’euros de recettes exceptionnelles ‒ attendues de la cession des fréquences de 700 MHz ‒ par 2,1 milliards d’euros de crédits budgétaires. Ce Conseil de défense avait prévu que la même substitution soit opérée les années suivantes ; le projet de loi de finances pour 2017 respecte cet engagement.

Si la situation pour 2017 est ainsi simplifiée, le rapporteur observe que, comme l’a souligné le général Bernard Barrera, sous-chef d’état-major de l’armée de terre chargé des plans et des programmes, dans l’ensemble, 40 % seulement des ressources supplémentaires prévues par les décisions prises le 6 avril 2016 en Conseil de défense sont constituées de crédits budgétaires. Pour le reste, le respect de la trajectoire budgétaire prévue repose en partie, d’une part, sur la mobilisation des gains attendus de l’évolution du coût des facteurs de production et, d’autre part, sur la réalisation de cessions immobilières.

B. LES HABITUELS ALÉAS DE FIN DE GESTION ET LE RISQUE D’« EFFETS DE BASE » NÉGATIFS SUR LE BUDGET 2017

Comme à chaque exercice budgétaire, l’ampleur de l’effort prévu par la loi de finances dépend en réalité de la bonne gestion de l’exercice précédent : si les gels et autres mises en réserve de l’exercice précédent ne sont pas levés, la charge restante se reporte sur l’année suivante, déstabilisant l’équilibre trouvé entre les charges et les ressources. Le rapporteur s’est donc attaché à étudier ces risques d’« effets de base » négatifs.

1. Un report de charges à maîtriser

Parce qu’il finance essentiellement des dépenses d’investissement ‒ par nature plus faciles à décaler que d’autres dépenses ‒, le programme 146 concentre la plus grande part des annulations de crédits opérées tous les ans en fin d’exercice. Les crédits ainsi annulés ne pouvant financer les dépenses prévues, la charge de celles-ci est reportée l’année suivante. L’encadré ci-après précise la définition de ce « report de charges ».

Le report de charges

Dans la terminologie budgétaire, la notion de « report de charges » désigne l’estimation de l’insuffisance de crédits disponibles pour couvrir le montant de l’ensemble des services faits, tel qu’il est envisagé de les prononcer avant la fin d’un exercice budgétaire. Une fois close la gestion d’un exercice annuel, la notion budgétaire de report de charges s’articule avec la définition comptable des « dépenses obligatoires », c’est-à-dire « les dépenses pour lesquelles le service fait a été certifié au cours de l’exercice précédent et dont le paiement n’est pas intervenu » (1). Ces dépenses comprennent les éléments suivants :

‒ les « dettes fournisseurs », c’est-à-dire les demandes de paiement déjà visées par le comptable avant le 31 décembre, mais qui n’ont pas été payées ;

‒ les « charges à payer », c’est-à-dire les charges ayant donné lieu à un service fait ;

‒ les avances dues au titre de contrats signés dans l’année, mais non payées.

Source : ministère de la Défense.

Le tableau suivant présente l’évolution du report de charges en 2014 et 2015, faisant apparaître sa réduction en 2015.

Évolution du report de charges du programme 146 « Équipement des forces »

(en millions d’euros)

Composantes du report de charges

Fin 2014

Fin 2015

Dettes fournisseurs

1 786

1 338

Charges à payer

472

579

Avances dues

83

66

Total

2 341

1 983

Source : ministère de la Défense.

En 2016, les factures validées avant la fin de l’année 2015 ont pu être payées pour 1,4 milliard d’euros le 8 janvier 2016. Le complément de report de charges a été liquidé dans un délai compris entre 30 et 60 jours.

Toutefois, selon le ministère, les prévisions actualisées en septembre 2016 font apparaître un report de charges prévisionnel de 2,43 milliards d’euros à la fin de l’exercice 2016. Cette évaluation repose en outre sur la triple hypothèse d’une levée complète de la réserve de précaution et des gels (pour 2,7 milliards d’euros), d’une complète atteinte du plafond de consommation du ministère sur le compte d’affectation spéciale (CAS) « Immobilier », et d’une couverture intégrale des surcoûts liés aux OPEX et aux opérations intérieures.

Parmi les programmes budgétaires de la mission « Défense », c’est le programme 146 qui supporterait la plus grande part de ce montant, comme le montre le tableau ci-après.

Report de charge prévisionnel pour 2016

(en millions d’euros)

Source : ministère de la Défense.

Le report de charges prévisionnel de la mission « Défense » pour la fin de l’année 2017 est stable par rapport aux prévisions pour 2016, puisqu’il devrait s’établir à 2,8 milliards d’euros. Mais au sein de la mission « Défense », c’est le programme 146 qui devrait supporter à la fois la majeure partie de ce montant et l’essentiel de son augmentation, puisque le report de charges de ce programme se dégraderait de 1,33 milliard d’euros à 1,67 milliard d’euros.

2. La nécessaire levée des mises en réserve et des gels

a. Le montant des mises en réserve, gels et « surgels » atteint 18 % des crédits votés

Le tableau ci-après présente les mouvements de crédits qui ont affecté le programme 146 « Équipement des forces » au 30 juin 2016.

ÉVOLUTION DES CRÉDITS DU PROGRAMME 146 « ÉQUIPEMENT DES FORCES »

(en millions d’euros, au 31 juin 2016)

 

LFI 2016

Réserve initiale

Blocage complémentaire

Virements

FdC et AdP

Reports
sur TF

Reports
hors TF

Total des
reports

Total des crédits ouverts

Ressources disponibles

AE

13 613,4

- 1 089,1

- 472,0

0,6

46,1

9 022,6

2,0

9 024,6

22 684,7

21 123,7

CP

9 952,9

- 796,2

- 1 062,0

-126,8

46,1

0

592,0

592,0

10 464,2

8 606,0

LFI : loi de finances « initiale » ; FdC : fonds de concours ; AdP : attributions de produits ; TF : tranches fonctionnelles

Source : ministère de la Défense.

Ainsi, l’exécution de la loi de finances pour 2016 a été marquée, pour les crédits de paiement du programme 146, par :

‒ la réserve de précaution, pour 796,2 millions d’euros ;

‒ un gel des reports de crédits, pour 592 millions d’euros ;

‒ un « sur-gel » de 470 millions d’euros.

Le virement de 126 millions d’euros de crédits de paiement du programme 146 vers les programmes 178 et 212, effectué en avril 2016, trouve sa justification dans les mouvements intervenus en fin de gestion 2015. En effet, selon le ministère, les crédits budgétaires prévus en substitution des recettes exceptionnelles du CAS « Fréquences » n’ayant été virés qu’en décembre 2015, le programme 146 n’a pas pu être sollicité comme de coutume pour « assurer la couverture de l’insuffisance prévisionnelle sur le titre 2, comme il le fait traditionnellement du fait de sa surface financière et de la structure de sa dépense ». Or les crédits nécessaires pour couvrir cette insuffisance, évaluée à 126 millions d’euros pour les programmes 144, 178 et 212, devaient être mis à la disposition du programme 212 avant la liquidation de la paie de décembre. Leur ouverture a par conséquent été effectuée par décret d’avance, après annulation des crédits hors titre 2 sur les programmes 178 et 212. Un décret de virement du 11 avril 2016 a réalisé la contribution du programme 146 aux programmes 178 (pour 87 millions d’euros) et 212 (pour 24 millions d’euros), mais pas au programme 144 (qui devait recevoir 15 millions d’euros), au motif que le plafond réglementaire des décrets de virement était déjà atteint pour ce programme. Le ministère indique qu’il souhaite intégrer ce transfert au prochain décret d’avance.

Outre ces compensations, le décret de virement inclut également un abondement du programme 144 de 15 millions d’euros ayant pour objet de financer les travaux engagés en 2016 sur la soufflerie S1MA à Modane-Avrieux (Savoie), au titre du soutien à la recherche et à l’innovation aérospatiale.

b. Pour une levée des réserves et des gels

Une « équation budgétaire » compliquée pour l’État, et risquée pour le ministère de la Défense

Les arbitrages de la fin d’exercice 2016 n’étaient pas encore rendus au moment des travaux du rapporteur, mais les représentants de la direction du budget du ministère des Finances qu’il a entendus lui ont indiqué que la fin de cet exercice est, « pour l’État, globalement plus difficile que les années passées » en raison de dépenses non-prises en compte par la loi de finances et d’une évolution mal maîtrisée des dépenses de personnels de plusieurs ministères ‒ mais pas le ministère de la Défense. Or, aux yeux de plusieurs observateurs, ce dernier fait « un candidat assez naturellement désigné à une “taxation” en fin d’exercice » ‒ si ce n’est pas habitude, du moins, du fait de la part importante qu’ont dans son budget les dépenses d’investissement.

Aussi, dans l’hypothèse où la réserve de précaution et les gels successifs de crédits ne seraient pas levés, le ministère de la Défense serait conduit soit à décaler certains programmes, soit à accroître son report de charge.

Les limites des décalages de programmes motivés par un « tour de passe-passe “maastrichtien” »

Selon les explications de la direction du budget, les Finances ont choisi ces dernières années de distinguer « solde budgétaire » et « solde maastrichtien », en ne comptabilisant les dépenses d’armement qu’au jour de la livraison du matériel ‒ plutôt qu’aux dates des paiements ‒ pour l’application des règles établies par le traité de Maastricht. Pour eux, ce mécanisme a permis d’imputer des dépenses plus tard que les paiements afférents. En 2015, par exemple, le report de diverses livraisons ‒ et, par conséquent, de leur imputation dans la comptabilité publique « maastrichtienne » ‒ sur les années 2015 et 2016 semble avoir facilité le remplacement intégral des ressources exceptionnelles par des crédits budgétaires, dans la mesure où l’effet de ces crédits supplémentaires sur la dette publique a ainsi été neutralisé en partie. Mais en 2016, « la situation s’inverse : les livraisons sont plus importantes que les paiements ». De ce fait, « la “clé maastrichtienne” jouera défavorablement en 2016 et 2017, pour un milliard d’euros environ ».

Le ministère de la Défense pourrait-il néanmoins obtenir la levée de la réserve et des gels moyennant de nouveaux décalages de livraisons ? Pour le délégué général pour l’armement, les seuls programmes pour lesquels une telle manœuvre serait possible sont l’A400M et la frégate multi-missions (FREMM). Mais dès lors que le Gouvernement a exigé d’Airbus la livraison de six A400M mis à niveau dès 2016, « il y a une question de principe », et la position de négociation de la direction générale de l’armement (DGA) face à Airbus serait affaiblie si elle devait revenir sur ses exigences en demandant un report de livraison. Quant aux FREMM, elles sont « trop employées aujourd’hui pour que l’on se passe de livraisons ».

Les limites de l’accroissement du report de charge

La direction du budget constate qu’entre les besoins de paiements estimés par le ministère de la Défense lors du deuxième compte rendu de gestion annuel et les besoins constatés au 31 décembre, il y a une réduction de 700 à 800 millions d’euros en moyenne, du fait des retards des programmes d’armement. Pour la direction du budget, cette fréquente surestimation des besoins de paiements laisse penser qu’un « abattement statistique d’au moins 600 millions d’euros » dans les ressources du programme 146 lors de la publication du décret d’avances de novembre n’aurait pas de conséquence majeure sur les programmes. Elle fait d’ailleurs valoir que le projet annuel de performances comporte un objectif de performance n° 1.2 fixant à deux mois l’objectif de retard maximal de livraison pour les programmes d’effet majeur. Rappelant que le financement de ces programmes s’établit en moyenne autour de six milliards d’euros, elle remarque que deux mois de décalage représentent un milliard d’euros qu’il serait possible de reporter sans dépasser cet objectif.

Certes, tout report de charge n’est pas nécessairement infondé. Le délégué général pour l’armement reconnaît d’ailleurs qu’il est « de bonne gestion » que le report de charge s’établisse entre 800 millions d’euros et un milliard d’euros, correspondant aux factures qui arrivent en décembre, qu’il faut viser et pour lesquelles il faut contrôler les services faits.

Mais pour le rapporteur pour avis, accroître le report de charge du ministère de la Défense est difficilement envisageable, car ce report s’aggrave déjà en 2016 et en 2017, pour atteindre le niveau maximal prévu par la programmation militaire pour l’année 2019, à savoir 2,8 milliards d’euros.

Comme l’a dit le général André Lanata, chef d’état-major de l’armée de l’air, la « discussion avec Bercy devrait être rude, mais le contexte opérationnel plaide en faveur de la Défense ». Pour le rapporteur, il est en effet souhaitable que la réserve de précaution et les gels supplémentaires soient levés, afin de garantir le budget 2017 contre les aléas qui pourraient résulter de la gestion de la fin de l’exercice 2016.

II. UN EFFORT D’ARMEMENT ÉQUILIBRÉ ENTRE LES DIFFÉRENTS SYSTÈMES DE FORCES

A. LES PRINCIPALES OPÉRATIONS D’ARMEMENT PRÉVUES EN 2017

1. La poursuite du financement des grands programmes pluriannuels

En matière d’armement, 2017 marquera une étape supplémentaire dans la poursuite des grands marchés pluriannuels, tels que la FREMM, le sous-marin Barracuda, le missile de croisière naval (MdCN). Le tableau ci-après présente la tranche 2017 des principales commandes pluriannuelles, hors dissuasion.

FINANCEMENT DE LA TRANCHE 2017 DES GRANDES COMMANDES PLURIANNUELLES

(en millions d’euros)

Programme

Objet de la commande

Date de notification

Montant

Paiements

2013

2014

2015

2016

2017

FREMM

8 frégates (1)

nov. 2005

sept. 2009

nov. 2015

6 480

399

878

533

334

333

Barracuda

1re tranche

déc. 2006

1 083

664

811

728

641

622

2e tranche

sept. 2007

883

3e tranche

sept. 2008

1 000

commande du 2e appareil + décalage du 1er

juin 2009

1 337

commande du 3e appareil

juin 2011

906

commande du 4e appareil

juil. 2014

1147

MdCN

développement + 50 armes

déc. 2006

652

166

25

51

3

47

100 missiles + étalement des livraisons (2)

déc. 2009

269

FSAF (3)

4 systèmes + 25 missiles ASTER 30

déc. 2007

155

14

21

13

7

6

MMP(4)

400 postes de tir

1550 munitions

déc. 2013

505

0

15

38

65

83

Anti Navire Léger

100 missiles

mars 2014

312

0

5

14

115

35

NH90

12 hélicoptères TTH

nov. 2007

424

125

92

85

107

127

22 hélicoptères TTH

déc. 2008

574

34 hélicoptères TTH

mai 2013

679

14

6 hélicoptères TTH

déc. 2015

169

     

52

46

VBCI

117 véhicules

oct. 2007

304

0

0

0

0

0

116 véhicules

déc. 2008

290

0

0

0

0

0

332 véhicules

août 2009

937

283

94

72

70

0

Rafale

59 avions (dont tranche conditionnelle de 8 avions)

déc. 2004

3 164

126

18

0

0

0

60 avions (5)

déc. 2009

4527

582

692

349

238

62

Munitions

munitions de gros calibres

déc. 2011

152

35

22

15

12

2

munitions de gros calibres

juin 2013

210

11

26

25

16

20

MIDE (6)

100 missiles

déc. 2010

131

0

0

21

28

23

MRTT (7)

1 avion

déc. 2014

399

-

0

114

113

70

8 avions

déc. 2015

1457

   

9

38

96

(1) L’actualisation de la programmation militaire a revu la cible de FREMM à huit frégates, dont six FREMM de lutte anti-sous-marine (ASM) et deux frégates de défense aérienne (FREDA) ; les paiements présentés couvrent l’activité FREMM. (2) Les commandes ont été actualisées en 2014, conformément aux orientations de la loi de programmation militaire de 2013. (3) famille de missiles sol-air du futur ; la commande de décembre 2007 comportait 200 munitions, et a été modifiée conformément aux orientations de la LPM de 2013. (4) Missile de moyenne portée. (5) Le montant de la commande globale intègre les avenants passés entre 2009 et 2016. (6) Missile air-air de longue portée. (7) Airbus A330 Multi Role Tanker Transport (avions multi-rôles de ravitaillement et de transport).

Source : ministère de la Défense.

2. Les principales commandes et livraisons

a. Les commandes et les livraisons de l’exercice 2016

L’année 2016 a été marquée par d’importantes commandes et livraisons, que présente le tableau ci-après. L’une des plus commentées concerne l’arme individuelle future destinée à remplacer le FAMAS, marché remporté par le fusil HK416 de l’industriel allemand Heckler & Koch. Comme le chef d’état-major de l’armée de terre l’a indiqué à la commission, ce fusil est considéré comme « le meilleur sur le marché » ‒ il permet à ses yeux « un gain en termes de sécurité » par rapport au FAMAS, ses munitions sont totalement adaptées aux standards de l’OTAN ‒ et son coût est modéré : selon le général Jean-Pierre Bosser, un fusil HK416 coûte le prix de six chargeurs de FAMAS. Si le fusil est assemblé en Allemagne, il est à noter que l’acier de son canon est produit en France, ce qui, selon le général, représente 30 % du coût de l’arme.

PRINCIPALES COMMANDES ET LIVRAISONS PRÉVUES EN 2016

Système de forces

Commandes 2016

Livraisons 2016

Dissuasion

 

- un lot de missiles M51

- deuxième adaptation du SNLE NG (6)

Commandement et maîtrise de l’information

- un système de drones MALE (moyenne altitude longue endurance)

- deux avions légers de surveillance et de reconnaissance (ALSR)

- deux systèmes de drones tactiques

- un radar fixe SCCOA 4 (1)

- 46 stations sol de communication haut débit par satellite COMCEPT

- 34 modules projetables du système d’information des armées (SIA)

- des commandes relatives au ROEM (2) tactique et stratégique

- rénovation de l’avionique des avions AWACS (3)

- un système de drones MALE (drone moyenne altitude longue endurance)

- un radar rénové et un nouveau radar « haute et moyenne altitude »

- rénovation d’un système de détection et de commandement aéroporté

- des systèmes de sécurité de l’information pour la cyberdéfense

- 16 stations de communications tactiques ASTRID

- 120 stations COMCEPT

- 48 modules projetables du SIA

- 511 kits de numérisation NUMTAC

- sept réseaux navals RIFAN étape 2

Engagement et combat

- 5 340 fusils d’assaut AIF

- un premier lot de véhicules blindés légers (VBL) remis à niveau

- un prototype de système de drones de lutte anti-mines (4)

lancement de la réalisation de la rénovation à mi-vie du SCALP-EG

l’industrialisation de la rénovation du Mirage 2000D

- six Rafale et trois Rafale marine F1 portés au standard F3

- une FREMM

- cinq hélicoptères de combat Tigre

- huit kits pour missiles Exocet SM39

- 25 torpilles MU90

- 25 poids lourds des forces spéciales

- 124 armements air-sol modulaires (AASM)

Protection et sauvegarde

- deux bâtiments de soutien et d’assistance hauturiers (BSAH)

- un bâtiment multi-missions (B2M)

- 48 missiles ASTER 30

- deux B2M

- un patrouilleur léger guyanais (PLG)

- un système de défense sol-air SAMP/T

- 16 missiles ASTER 15 et huit missiles ASTER 30B1

Projection mobilité soutien

- deux avions de transport tactique C130H modernisés

- quatre avions Hercule C130J

- lancement de FoMEDEC (5)

- trois avions de transport A400M

- six hélicoptères NH90

- cinq hélicoptères Cougar rénovés

- 281 porteurs polyvalents terrestres

- 1800 ensembles parachutistes du combattant

(1) Système de commandement et de conduite des opérations aérospatiales. (2) Renseignement d’origine électromagnétique. (3) Airborne Warning and Control System ‒ système de détection et de commandement aéroporté (SDCA). (4) Système de lutte anti-mines futur (SLAMF). (5) Formation modernisée et entraînement différencié des équipages de chasse. (6) Sous-marin nucléaire lanceur d’engins de nouvelle génération.

Source : ministère de la Défense.

b. Les commandes et les livraisons prévues pour l’exercice 2017

L’année 2017 sera une année particulièrement riche en livraisons d’armement, comme le montre le tableau ci-après.

PRINCIPALES COMMANDES ET LIVRAISONS PRÉVUES EN 2017

Système de forces

Commandes 2017

Livraisons 2017

Commandement et maîtrise de l’information

- un système d’entraînement au combat CERBERE (1) déployé au CENZUB (2)

- une station sol de communication haut débit par satellite COMCEPT

- un système électronique de chiffrement (SELTIC NG) 

- 55 modules projetables du SIA

- un radar fixe d’approche SCCOA 4

- un centre de commandement, de détection et de contrôle des opérations aériennes

- deux radars rénovés et deux radars d’atterrissage SCCOA 4

- un centre de commandement, de détection et de contrôle des opérations aériennes SCCOA 3

- des systèmes de sécurité de l’information pour la cyberdéfense

- 18 stations de communication tactique ASTRIDE

- 61 stations sol de communication haut débit par satellite COMCEPT 

- 37 modules projetables du SIA

- quatre réseaux navals RIFAN étape 2

- mise à niveau d’un avion de guet aérien Hawkeye

Engagement et combat

- 12 000 fusils d’assaut AIF

- un sous-marin nucléaire d’attaque (SNA) Barracuda 

- 45 rénovations de Mirage 2000D

- 15 pods de désignation laser nouvelle génération (PDL-NG)

- 20 engins blindés de reconnaissance et de combat (EBRC) Jaguar

- 319 véhicules blindés multi-rôles (VBMR) lourds Griffon

- le second lot de VBL régénérés

- 23 véhicules lourds et 120 de type fardier (3) pour les forces spéciales

- un avion Rafale et deux Rafale Marine F1 portés au standard F3 

- une FREMM

- six hélicoptères de combat Tigre

- les premiers véhicules blindés légers régénérés (4)

- 12 kits pour missiles Exocet SM39

- 5 340 fusils d’assaut AIF

- 150 munitions et 50 postes de tir de missile de moyenne portée (MMP)

- un lot de missiles de croisière navals (MdCN)

Protection et sauvegarde

 

- une usine SECOIA (6)

- deux B2M

- un patrouilleur léger guyanais (PLG)

- 21 missiles ASTER 15 et quatre missiles ASTER 30 B1

Projection mobilité soutien

- 3 000 ensembles parachutistes du combattant

- des véhicules légers tactiques polyvalents (4)

- trois avions de transport A400M 

- un avion de transport tactique C130J

- cinq hélicoptères Cougar rénovés 

- neuf hélicoptères NH90

- 379 PPT

- 1 350 ensembles parachutistes du combattant

(1) Centres d’entraînement représentatifs des espaces de bataille et de restitution des engagements. (2) Centre d’entraînement aux actions en zone urbaine de Sissonne. (3) Véhicule à roues basses servant au transport de charges lourdes. (4) Selon les précisions du ministère de la Défense, les quantités livrées en 2017 seront connues au lancement de la réalisation de l’opération. (5) Selon les mêmes précisions, les quantités commandées en 2017 seront connues au lancement de la réalisation de l’opération. (6) Site d’élimination de chargements d’objets identifiés anciens.

Source : ministère de la Défense.

B. ÉVOLUTION DÉTAILLÉE DES CRÉDITS PAR SYSTÈME DE FORCES

L’architecture budgétaire du programme 146 est organisée en :

‒ cinq actions numérotées 6 à 10 correspondant à cinq grands « systèmes de forces » ‒ dissuasion, commandement et maîtrise de l’information, projection-mobilité-soutien, engagement et combat, et protection et sauvegarde ‒ ;

‒ une action 11 « Préparation et conduite des opérations d’armement » qui rassemble les crédits de fonctionnement de la DGA et les crédits d’investissement dans ses moyens d’expertise et d’essais ;

‒ une action 12 « Parts étrangères et programmes civils » qui regroupe les contributions internationales ou interministérielles à des activités menées par la DGA en coopération ou pour le compte de tiers.

1. L’évolution des crédits de la dissuasion

a. Le niveau des crédits

Les crédits de l’action 06 « Dissuasion » visent, comme l’indique l’intitulé de toutes ses sous-actions, à « assurer la crédibilité technique » de la dissuasion ou de la posture. Si les autorisations d’engagement sont en baisse de 36 % par rapport à 2016, pour s’établir à 2,37 milliards d’euros, les crédits de paiement progressent de 9,4 %, à 3,16 milliards d’euros. Ces évolutions s’expliquent notamment par les calendriers des travaux de développement de deux opérations majeures lancées en 2016 :

‒ la rénovation du missile air-sol moyenne portée amélioré (ASMPA) ;

‒ la définition du sous-marin nucléaire lanceur d’engins (SNLE) dit « de 3e génération » (SNLE 3G).

b. La ventilation des crédits

Cette action comprend plusieurs sous-actions :

‒ la sous-action 14 finance le programme M51 ainsi que le développement et la production de sa charge utile, la tête nucléaire océanique. Les travaux de développement de la troisième version du missile, confiés à Airbus Safran Launchers, ont commencé en 2014. Cette sous-action est dotée de près de 200 millions d’euros pour 2017, contre 163 millions d’euros en 2016 ;

‒ la sous-action 15 « Adaptation M51 » a pour objet d’adapter les SNLE-NG au missile M51. Y sont inscrits 219 millions d’euros en 2017 ;

‒ la sous-action 17 « Air sol moyenne portée amélioré » (ASMPA) finance la préparation de la rénovation « à mi-vie » de ce missile entré en service en 2009, qui emporte la tête nucléaire aéroportée. Ce projet n’en est encore qu’au stade d’élaboration. En 2017, il nécessite 108 millions d’euros d’autorisations d’engagement, et 62 millions d’euros de crédits de paiement ;

‒ la sous-action 18 « Simulation » regroupe les dépenses relatives aux études ainsi qu’à l’acquisition et au maintien en condition opérationnelle (MCO) de l’ensemble des moyens de simulation. Les travaux comprennent notamment la réalisation du laser mégajoule, des installations radiographiques et hydrodynamiques franco-britanniques du programme Teutates, et l’acquisition de supercalculateurs. Il est proposé d’y inscrire 528 millions d’euros de crédits de paiement, contre 488 millions d’euros en 2016 ;

‒ la sous-action 19 « Autres opérations » comprend divers programmes, comme l’adaptation opérationnelle des SNLE, la modernisation du bâtiment d’expérimentation et de mesure Monge, le démantèlement nucléaire et la déconstruction des SNLE type « Le Redoutable », des travaux d’infrastructure, la production et le recyclage des matières nucléaires premières, et les rénovations de l’avionique des ravitailleurs. Cette sous-action est dotée de 649 millions d’euros ;

‒ la sous-action 22 « Soutien et mise en œuvre des forces – toutes opérations » rassemble les financements des travaux et opérations visant à assurer l’entretien et le soutien des moyens des forces nucléaires aériennes et navales, comme le MCO des missiles M45, M51 et ASMPA, ainsi que le celui des moyens de transport spéciaux. Sa dotation s’élève à 746 millions d’euros ;

‒ la sous-action 23 « Assurer la crédibilité technique de la posture » comprend deux ordres de dépenses : d’une part, celles relatives aux systèmes de transmissions nucléaires (les réseaux Ramses, Syderec, Transoum et Transaéro) et, d’autre part, la contribution du ministère au plan national à la lutte contre la prolifération et le terrorisme nucléaire, conformément aux engagements internationaux de la France. Y sont inscrits 256 millions d’euros ;

‒ la sous-action 24 « SNLE 3G » comprend les crédits destinés à préparer le remplacement des SNLE actuels à partir de 2030. Elle ne comprend pas d’autorisation d’engagement pour 2017, mais elle est dotée de 117 millions d’euros de crédits de paiement, contre 46 millions d’euros en 2016.

2. Les crédits d’équipements de commandement et de maîtrise de l’information

L’action 07 « Commandement et maîtrise de l’information » rassemble des crédits destinés à financer essentiellement des programmes d’équipements de renseignement et de transmissions, dans tous les milieux, y compris l’espace. Les crédits de cette action sont en baisse de 31,6 % en autorisations d’engagement et de 9,3 % en crédits de paiement, pour s’établir respectivement à 1,48 et 1,67 milliard d’euros. Cette dotation permettra de poursuivre le renouvellement de la capacité de communication par satellite avec l’opération Syracuse IV, lancée en 2015, ainsi que la mise en place des outils de production de données géographiques de nouvelle génération.

a. Les principaux programmes financés en 2017

i. Le programme de « système de drone tactique »

Le programme de « système de drone tactique » (SDT) a pour objet de remplacer l’actuel « système de drone tactique intérimaire » (SDTI), afin de doter les unités d’une capacité accrue de surveillance, d’acquisition, de reconnaissance et de renseignement (SA2R).

Depuis 2004, l’armée de terre dispose de deux SDTI comprenant chacun deux stations au sol et neuf véhicules aériens, fournis par Safran Electronics & Défense. Ces drones disposent d’une liaison radio et d’une charge utile optique et infrarouge. Argant une autonomie de plusieurs heures et un rayon d’action de 80 kilomètres, ils décollent à l’aide d’une catapulte. Des acquisitions ont été réalisées afin de maintenir un parc en service de l’ordre de 18 drones pour assurer la disponibilité minimale requise et compenser leur attrition ‒ 15 drones ont en effet été détruits depuis leur mise en service.

La réalisation du programme SDT a été approuvée en 2016, sur la base de la solution proposée par Safran Electronics & Defense, le drone Patroller, retenue à l’issue d’une compétition conduite en 2015. Le stade de réalisation prévoit la livraison d’une première capacité fin 2018. À ce titre, la dotation du programme au sein de la sous-action 39 atteint 59,87 millions d’euros de crédits de paiement.

ii. Programme CERES

La réalisation du programme CERES (pour : « capacité de renseignement électromagnétique spatiale ») a commencé en janvier 2015. Il vise à compléter les moyens nationaux de recherche et d’interception des émissions électromagnétiques. Ce programme comprend des satellites ainsi que l’ensemble des moyens permettant l’interception, la caractérisation et la localisation des signaux électromagnétiques par des moyens satellitaires, la programmation de ces moyens et des dispositifs de contrôle des satellites depuis le sol. Il a pour objectif de détecter les signaux des émetteurs de radars et de télécommunications dans les fréquences d’intérêts du renseignement d’origine électromagnétique (ROEM).

Ce programme était doté, en 2016, de 200,50 millions d’euros en autorisations d’engagements et de 93,01 millions d’euros en crédits de paiements, inscrits à la sous-action 42, pour la réalisation des interfaces des différents composants du système CERES et la validation de leur compatibilité. Ces dotations s’élèveront en 2017 à 70,13 millions d’euros de crédits de paiement, conformément au calendrier du programme, qui prévoit le lancement de ces activités de réalisation et de validation.

iii. La première étape du programme de radio CONTACT

Le programme CONTACT vise à doter les forces d’un réseau de radiocommunications tactiques haut débit, sécurisé et interopérable avec l’OTAN, et de postes radio correspondants, en remplacement des systèmes existants. Il contribuera à la numérisation de l’espace de bataille, en équipant de postes radios sécurisés différents opérateurs ‒  fantassins, blindés, navires, ou encore aéronefs de combat, de renseignement et de transport.

La première étape de ce programme prévoit la réalisation du système pour les forces terrestres et navales, avec une première tranche de production composée de postes portatifs, de postes destinés aux véhicules, et du soutien initial correspondant à l’équipement de deux brigades interarmes. La conception du système pour les activités aériennes et le développement du poste aéroporté sont également inclus dans cette étape.

Aucune autorisation d’engagement n’est plus nécessaire en 2017 ; les besoins de paiements pour la poursuite des travaux sont évalués à 148,81 millions d’euros.

iv. Le programme MUSIS

Le programme MUSIS a pour objet d’assurer la continuité des services d’imagerie par satellite de la défense et d’en accroître les capacités. Le système devra permettre la collecte de données répondant aux besoins de renseignement d’origine « image » (ROIM) et de surveillance, ainsi qu’aux besoins de « connaissance de l’environnement », en particulier en matière géographique.

Ce programme, en phase de réalisation, bénéficie de 137,07 millions d’euros en 2017 par la sous-action 40, pour financer la poursuite des travaux de réalisation du système MUSIS et de son infrastructure d’utilisation au sol.

v. Le programme de système d’information des armées

La sous-action 29 finance le système d’information des armées (SIA), que présente l’encadré ci-après.

Le système d’information des armées

Le système d’information des armées (SIA) doit fournir à l’ensemble des acteurs d’un même théâtre d’opération les informations issues des différents systèmes d’armes ainsi que les outils techniques leur permettant de traiter ces données. Le SIA doit permettre d’atteindre un niveau capacitaire équivalent à celui des systèmes qu’il remplace tout en réduisant le coût de possession des systèmes et en améliorant l’interopérabilité entre les armées, au sein de celles-ci, ou avec nos alliés. La première phase du programme SIA, en privilégiant le recours à des systèmes existants, comprend :

‒ le développement d’un socle technique commun interarmées (STCIA) qui rassemble les applications logicielles communes et sur lequel viennent se greffer les applications « métier » des différents acteurs ;

‒ le développement des fonctions « métier » suivantes : « commandement-contrôle » (C2) et obtention des effets », « renseignement » et logistique » ;

‒ le déploiement des premiers modules de série sur les théâtres d’opérations extérieures, puis la fourniture des moyens matériels (serveurs, postes utilisateurs, etc.) constituants les modules projetables ;

‒ la mise en cohérence des systèmes d’information opérationnels et de commandement (SIOC) appelés à être opérés conjointement avec le SIA, ce qui passe notamment par des actions de rationalisation et de convergence de l’architecture des SIOC, de qualification de l’ensemble de ces systèmes, et d’appui aux structures de gouvernance.

Avec 100,29 millions d’euros de crédits de paiement, les crédits inscrits pour 2017 permettront principalement la poursuite de la réalisation de la première version du système ‒ logiciels et matériels compris ‒, la mise en cohérence des SIOC existants dans le champ des capacités opérationnelles assignées au SIA, la poursuite du développement du socle technique commun interarmées rassemblant les applications logicielles communes, et le maintien en condition opérationnelle des systèmes remplacés par le SIA.

b. Les autres crédits de l’action 07

La sous-action 24 « Système de commandement et de conduite des opérations aériennes (SCCOA) » finance les phases 3 et 4 de la mise en œuvre du SCCOA. Ce système sert à remplir des missions de surveillance et de contrôle de l’espace aérien, de coordination de la défense sol-air, ainsi que de préparation et de conduite des opérations aériennes sur le territoire national ainsi qu’en OPEX. Il comprend un ensemble de radars, de centres d’opérations et de moyens de transmissions formant un réseau interopérable avec ceux de l’OTAN comme avec les systèmes civils. Les crédits de cette sous-action progressent de 46 % en autorisations d’engagement pour atteindre près de 42 millions d’euros, et de 3,4 % en crédits de paiement, à 222 millions d’euros.

La sous-action 25 « Système d’information “Terre” » regroupe les différents SIOC de l’armée de terre, dont elle soutient ainsi la numérisation. Elle finance d’ailleurs la réalisation de la première version du système d’information et de communication SCORPION (SICS), destiné à mettre en réseau l’ensemble des brigades interarmes. Y sont inscrits 52,3 millions d’euros de crédits de paiement et 7,2 millions d’euros d’autorisations d’engagement pour 2017.

La sous-action 27 « Géographie numérique » comprend l’ensemble des programmes liés à ce domaine, notamment le programme de données numériques de géographie et en trois dimensions (DNG3D), qui permet de produire des modèles numériques ayant la précision requise pour les missiles de croisière SCALP, et l’opération GEODE 4D, qui vise à renforcer les capacités d’élaboration des données géographiques et d’exploitation combinées des différentes données d’environnement. À 281 millions d’euros, les autorisations d’engagement sont doublées par rapport à 2016, tandis que les crédits de paiement augmentent de 15 %, pour dépasser 55 millions d’euros.

La sous-action 28 « Autres opérations » comprend les systèmes de commandement et de conduite des opérations interarmées ou d’armées, les outils de simulation ou d’entraînement afférents (comme le programme CERBERE précité), et les systèmes de géolocalisation (par exemple avec l’opération de modernisation des équipements de géolocalisation par satellite des armées, dite OMEGA). Elle est dotée de 258 millions d’euros en autorisations d’engagement et de 37,5 millions d’euros en crédits de paiement.

La sous-action 32 « Moyens de communication satellitaire » regroupe trois programmes spatiaux majeurs :

‒ le programme de système de radiocommunications utilisant un satellite (SYRACUSE III) est le système de radiocommunications satellitaires dit « noyau dur ». Avec le satellite franco-italien SICRAL 2, il répond aux besoins des armées en matière de communications à longue distance, sécurisées et résistantes aux moyens de guerre électronique. Les satellites SYRACUSE IIIA et IIIB, lancés en 2005 et 2006, permettent aussi à la France de tenir un rôle majeur au sein de l’OTAN en tant que fournisseur de capacités de télécommunications par satellite. Les dernières livraisons ont été faites en 2016 ;

‒ le programme de réponse aux besoins complémentaires en communications d’élongation de projection et de théâtre (COMCEPT), réalisé en coopération avec l’Italie, vise à apporter aux forces des capacités complémentaires à ce « noyau dur » ;

‒ le programme SYRACUSE IV, anciennement appelé COMSAT NG (communications par satellite de nouvelle génération), vise à assurer le remplacement de SYRACUSE III.

En 2017, la dernière station COMCEPT sera commandée, de même que des mesures d’adaptation de SYRACUSE III à la livraison de SICRAL 2 ; des études concernant SYRACUSE IV seront lancées. Ces opérations nécessitent 578,5 millions d’euros d’engagements et 193,5 millions d’euros de paiements.

La sous-action 35 « Communiquer – autres opérations » regroupe l’ensemble des autres opérations relatives aux transmissions, telles que les programmes ASTRIDE (accès par satellite et par transmission hertzienne au réseau de zone et de l’intranet de l’espace de bataille), INTRACED (Intranet classifié de défense), RDIP (réseau de desserte IP) pour les réseaux internet métropolitains et RIFAN pour l’aéronavale, CYBER pour les systèmes de sécurité de l’information, Telcomarsat (télécommunications de la marine par satellites), SELTIC pour les clés de chiffrement, et MELCHIOR pour les radios tactiques à haute fréquence. La dotation de ces opérations s’établit à 256 millions d’euros en crédits de paiement ;

La sous-action 39 « Renseigner, surveiller, acquérir et reconnaître – Autres opérations » regroupe différents programmes d’équipements relatifs à la conduite d’opérations et au renseignement. Il s’agit, par exemple, de la mise à niveau des avions de guet embarqué Hawkeye, de la rénovation « à mi-vie » des avions AWACS, du système de drone tactique précité, du système d’observation spatiale optique HELIOS II, et des drones de moyenne altitude longue endurance (MALE), tant actuel que futur, au sujet duquel l’encadré ci-après présente l’état d’avancement des projets.

État d’avancement des études sur le projet de drone MALE européen

À l’occasion du Salon du Bourget 2013, Alenia, Airbus et Dassault ont appelé au lancement d’un programme de drone MALE européen et ont remis une proposition non sollicitée en novembre 2014. Lors du Conseil franco-allemand de défense et de sécurité le 19 février 2014, la France et l’Allemagne ont déclaré soutenir la mise en place d’une solution européenne pour la prochaine génération de drones de surveillance. En marge du salon aéronautique ILA à Berlin, les industriels ont envoyé le 15 mai 2014, une mise à jour de leur proposition pour la conduite d’une phase de définition de deux ans d’un programme de drones MALE, appelé « MALE 2020 ». Depuis l’automne 2014, la France et l’Allemagne, rejointes par l’Italie le 24 décembre 2014, travaillent à l’élaboration d’un besoin opérationnel commun et à la mise en place d’un cadre de coopération.

En marge du Conseil des affaires étrangères de l’Union européenne, les ministres de la Défense allemand, français et italien ont rendu officielle le 18 mai 2015 leur intention commune de conduire une étude de définition à coût objectif d’une durée de deux ans afin de préparer la phase de développement d’un système de drones MALE européen.

L’arrangement-cadre de coopération relatif au programme européen est entré en vigueur le 22 juin 2016. L’arrangement de mise en œuvre lié à l’étude de définition a été signé par l’Allemagne, la France, l’Italie et l’Espagne.

L’organisation conjointe de coopération en matière d’armement (OCCAr) est sollicitée pour exercer la conduite du programme dès l’étude de définition. Dans ce cadre, le contrat relatif à l’étude de définition d’un drone MALE européen a été négocié avec Airbus Defense & Space, Dassault Aviation et Leonardo et est prêt à être notifié depuis le 21 juillet 2016, dans l’attente de la signature de l’arrangement de mise en œuvre par l’Espagne. Les résultats attendus sous deux ans doivent démontrer la faisabilité d’un système de drones MALE européen à coûts objectifs.

La coordination avec l’agence européenne de défense (AED) est établie, en particulier dans le but de faciliter l’intégration dans le trafic aérien et de promouvoir des standards de navigabilité harmonisés. De plus, un élargissement de la coopération est prévu avec l’appui de l’AED pour les phases ultérieures.

Source : ministère de la Défense.

Les crédits du programme « DESCARTES » sont inscrits à la sous-action 41. Ce programme prévoit le déploiement d’équipements d’interconnexion pour les 1200 sites du ministère, pour les flux de données comme pour la téléphonie. Il ne nécessite plus d’autorisations d’engagement en 2017, mais ses crédits de paiement augmentent de 58 %, pour atteindre 48,5 millions d’euros.

3. Les crédits d’équipements de projection, de mobilité et de soutien

La dotation de l’action 08 « Projection - mobilité – soutien » est stable en crédits de paiement, à 1,28 milliard d’euros, tandis que les besoins d’autorisations d’engagement sont en nette baisse. Cette action finance plusieurs programmes majeurs.

a. L’avion de transport futur, ou A400M

La sous-action 42 « Projeter les forces – avion de transport futur » rassemble les crédits relatifs à l’A400M.

i. Un programme ambitieux

Le coût total de ce programme est évalué à 9,4 milliards d’euros pour la France, soit un coût unitaire de 161,6 millions d’euros. Mené en coopération avec sept pays, comme le montre l’encadré ci-après, ce programme connaît des vicissitudes que le rapporteur s’est attaché à étudier.

Les débuts de l’A400M

Ce programme est réalisé en coopération avec sept pays qui ont commandé 170 avions, dont 53 pour l’Allemagne, 50 pour la France, 27 pour l’Espagne, 22 pour le Royaume-Uni, 10 pour la Turquie, sept pour la Belgique et un pour le Luxembourg. L’A400M est un avion de transport quadrimoteurs destiné à réaliser l’aérotransport et l’aérolargage de troupes et de matériels. Il doit remplacer progressivement la flotte de transport tactique et fournir un complément à nos capacités de ravitaillement en vol.

Fin 2008, Airbus a fait part de difficultés techniques importantes de nature à menacer l’existence même du programme. Ceci a conduit à une renégociation du contrat et à la signature d’un avenant au contrat initial le 7 avril 2011. Après des difficultés rencontrées sur le moteur en 2012, qui ont retardé la réalisation de certains essais, l’A400M a obtenu son certificat de vol civil le 13 mars 2013 puis son certificat militaire le 24 juillet 2013.

Le premier avion français a été livré en août 2013 à l’armée de l’air. Dix appareils ont été livrés au 31 juillet 2016. La loi de programmation militaire 2014-2019 a conduit à une renégociation globale du planning de livraison des appareils français. Un avenant au contrat A400M a été signé le 25 juillet 2014 pour entériner le nouveau calendrier qui prévoit notamment que 15 avions devront être livrés d’ici 2019.

Pour l’année 2016, la prévision de trois livraisons d’A400M est inchangée. Les deux premières livraisons ont eu lieu respectivement le 8 juin et le 21 juillet, et le troisième avion de 2016 est attendu en décembre. Ces appareils sont dotés des capacités tactiques nouvelles (autoprotection, largage de charges et de personnes).

Dans le domaine du soutien, un premier contrat au profit de la France a été passé en 2013. À l’échéance de celui-ci en février 2015, un contrat de soutien en coopération franco-britannique a été mis en place pour une durée de 20 mois. Il est notamment basé sur la mise en place d’un stock commun de pièces détachées. Ce contrat sera poursuivi avec les Britanniques sur une période de 27 mois à compter d’octobre 2016. Dans le domaine de la formation, les premières prestations ont commencé début 2013 à Séville et se poursuivent depuis 2014 au centre de formation d’Orléans.

Selon le ministère, la France recherche activement des solutions internationales pour la suite de ses activités de soutien et de formation. Ainsi, l’accord de coopération, signé en juillet 2013, formalise la volonté des sept pays signataires de gérer ensemble certaines activités du soutien. Par ailleurs, des discussions sont en cours pour élargir la coopération franco-britannique sur le soutien à d’autres de nos partenaires. L’arrangement de programme pour le soutien en service à six nations a été signé par la France en juillet 2016 pour une entrée en vigueur attendue à brève échéance.

Source : ministère de la Défense.

ii. Un avion présentant à ce jour d’importantes défaillances

Le général André Lanata a jugé que l’A400M et ses défaillances sont « la première cause » des faiblesses de notre aviation de transport. La source principale de ces défaillances, ce sont les moteurs ; « c’est le fait majeur de cette année, la mauvaise surprise de février 2016 ». Le général s’est interrogé sur le point de savoir si Airbus met véritablement en œuvre tous les moyens et toute l’énergie nécessaires pour régler ce problème en urgence. « Car il y a bel et bien urgence » : ces défaillances nécessitent des vérifications de plus en plus fréquentes, à cause d’un industriel italien qui fait défaut sur certaines pièces. Airbus a trouvé une solution intérimaire, qui permet de porter le premier « pas de visite » de 100 à 650 heures, puis toutes les vingt heures – c’est à peine un aller-retour au Moyen Orient...

M. Philippe Coq, secrétaire général chargé des affaires publiques du groupe Airbus, a indiqué que l’industriel est en train d’imaginer une procédure de vérification qui serait plus légère, consistant à démonter la boîte de transmission de puissance (Propeller Gear Box, ou PGB) non plus en y accédant via le moteur, mais via l’aile directement. Selon lui, on peut aussi espacer ces inspections, moyennant un retrofit lourd à organiser. Il a précisé que la France est « privilégiée » dans les retrofits au titre de sa participation à des OPEX ; mais si ses partenaires lui ont cédé leur place, « il faudra cependant les servir... » Les problèmes de moteur sont aussi des problèmes industriels, car Avio Aero, l’entreprise italienne produisant les PGB et récemment rachetée par General Electric qui fabrique la PGB, voit ses capacités de production saturées. L’usine italienne était en effet configurée au plus juste pour produire les PGB nécessaires à la construction des A400M ; mais dès lors qu’elle doit assurer à la fois la construction et la réparation, ses capacités sont dépassées.

Les représentants d’Airbus ont rappelé que les moteurs de l’A400M sont particulièrement complexes, à l’image de ceux des Mirage 2000 que l’on vérifiait toutes les dix heures. « Ces problèmes sont classiques, et l’on commence à en voir le bout ». La différence avec les précédents programmes tient à l’impact qu’ont les difficultés de jeunesse des matériels sur les capacités des armées : pendant que les Mirage 2000 étaient indisponibles pour les raisons précitées, l’armée de l’air avait suffisamment de Mirage F1 pour remplir ses missions.

Le second problème majeur de l’A400M tient aux standards tactiques de l’appareil. Airbus s’est engagé à fournir les six premiers avions répondant véritablement aux standards tactiques à la fin de l’année 2016. Mais le général André Lanata n’a pas montré d’optimisme particulier quant au respect de ce calendrier. Pour lui, la situation n’est pas satisfaisante, et « la balle est dans le camp de la DGA et de l’industriel ». Le général Bernard Barrera a ajouté que le largage de parachutistes en ouverture automatique « reste un point de vigilance majeur pour l’armée de terre ». En effet, l’industriel a « proposé plusieurs solutions qui n’ont pas apporté d’évolutions significatives ». Certes, une première capacité opérationnelle (PCO) de largage de 30 parachutistes par une porte devrait être reconnue au début de l’année 2017, mais pour le général, « le largage de parachutistes par les deux portes simultanément est une capacité indispensable pour l’armée de terre ». En vue de résoudre les « importantes difficultés techniques » qui s’y opposent, un plan d’action a été mis en place.

Le représentant d’Airbus a fait valoir que six kits d’autoprotection de l’A400M ont été livrés, mais la technologie allemande concernée, très novatrice, est difficile à produire. En l’état, elle présente un taux excessif de fausse alarme. « C’est un classique », mais ce taux est trop élevé pour qu’Airbus soit certain de pouvoir résoudre le problème. Le groupe a toutefois un « plan B », qui consiste à intégrer le système d’autoprotection du Rafale, mais cela suppose un long développement et de longues opérations de mise à niveau, susceptibles de prendre plusieurs années. La France avait fait le choix de ne pas choisir un système dérivé de celui du Rafale, tout en refusant de s’équiper d’un système dont elle ne maîtriserait pas les paramètres ‒ un système dit « de boîte noire » ‒ ; d’où le développement d’une technologie ad hoc, sur laquelle a travaillé l’ONERA. « C’est un système très ambitieux, car actif : une fois la menace détectée, il la détruit, ce qui est plus performant que le système du Rafale ».

Le général André Lanata a fait valoir qu’en tout état de cause, le règlement des problèmes du moteur ne sera que temporaire en 2017, et que les retrofits et les réparations pèsent considérablement sur la disponibilité des A400M : « ils passent leur temps chez l’industriel ». Il a ajouté que le premier standard tactique n’est qu’une étape « qu’il faut faire suivre d’une nouvelle, pour améliorer les capacités tactiques de l’appareil ». Le général Bernard Barrera a précisé que l’expérimentation de largage de matériel ne révèle pas de difficultés majeures, mais que « l’intégralité de la capacité est attendue à l’horizon 2020 ».

Les représentants d’Airbus ont souligné que l’A400M est une micro-flotte, avec des opérations très rapprochées de mise à niveau. L’objectif est que six avions soient portés au standard tactique dans le cadre du sous-programme Hexagone. Ensuite, « pour qu’ils volent, il suffira dès lors de régler le problème de PGB... ». Airbus essaie de faire en sorte que les six avions du programme Hexagone soient prioritaires dans l’attribution des nouvelles PGB. En somme, « on a une énorme partie de la flotte en retrofit et des problèmes techniques divers sur deux ou trois autres, ce qui met la flotte à plat », mais « après, on aura un an à un an et demi de potentiel ».

Pour 2017, le financement du programme A400M atteindra 58 millions d’euros en autorisations d’engagement ‒ contre 255 millions d’euros en 2016 ‒ et 326 millions d’euros en crédits de paiement, soit 3 % de plus qu’en 2016.

b. Les autres opérations d’équipements de projection de forces

La sous-action 43 « Projeter les forces ‒ Autres opérations » réunit plusieurs opérations d’armement destinées à maintenir les capacités des armées à projeter les forces sur les théâtres d’opérations : la modernisation des avions de transport tactique C130 et le renouvellement des ensembles de parachutage du combattant. Les crédits concernés s’élèvent à 203 millions d’euros en 2017.

c. La rénovation des hélicoptères Cougar

La sous-action 46 comprend les crédits finançant la rénovation des hélicoptères de manœuvre Cougar. Ce programme de rénovation porte sur 26 hélicoptères (vingt-trois de l’armée de terre et trois de l’armée de l’air), pour un cout total de 299 millions d’euros, soit 11,5 millions d’euros par appareil. En vue de simplifier le soutien des flottes d’hélicoptères en les rendant plus homogènes, l’ensemble des Cougar rénovés seront livrés à l’armée de terre, qui rétrocédera à l’armée de l’air ses hélicoptères Caracal.

Les Cougar rénovés bénéficieront d’une architecture avionique proche de celle d’hélicoptères récents d’Airbus Helicopters. Aussi, après sa qualification, cette architecture pourra-t-elle être proposée à l’export sur des hélicoptères neufs comme en rénovation, sachant que plus de 600 hélicoptères de la famille « Super Puma / Cougar » ont été vendus dans le monde.

16 hélicoptères rénovés ont été livrés au 1er juillet 2016. Pour la poursuite du programme, 31,6 millions d’euros sont inscrits en 2017.

d. Le programme d’hélicoptères NH90 Caïman

Le programme d’hélicoptères NH90 Caïman, financé par la sous-action 47, englobe le développement et l’acquisition de 74 appareils pour l’armée de terre et de 27 pour la marine, ainsi que le soutien initial associé. Son coût, pour la première étape de ce programme, s’élève à 6,82 milliards d’euros, y compris les six appareils supplémentaires commandés au titre de l’actualisation de la loi de programmation militaire.

Cet hélicoptère se décline notamment en une version transport tactique (TTH) et une version navale (NFH). Au 1er juillet 2016, 19 TTH, 17 NFH et l’ensemble des moyens de formation de la marine ont été livrés, ainsi que les moyens de formation pour l’armée de terre pour les sites de Phalsbourg et du Luc.

e. Les autres opérations d’équipements de mobilité

La sous-action 48 « Assurer la mobilité ‒ Autres opérations » regroupe les crédits de plusieurs programmes visant à assurer la mobilité des forces, tels que le programme de petit véhicule protégé (PVP) ‒ véhicule pour quatre passagers doté d’une protection balistique et d’une arme d’autoprotection de 7,62 mm ‒, le programme de véhicule léger tactique polyvalent (VLTP), qui fournira des véhicules de liaison et de commandement de moins de 3,5 tonnes ou de plus de 5,5 tonnes, ou encore le programme d’hélicoptère interarmées léger (HIL), destiné à remplacer les flottes d’Alouette III, de Gazelle, de Dauphin SP et de Fennec.

Ces opérations, à des stades variés d’avancement, seront financées pour 347 millions d’euros d’engagements et 77,8 millions d’euros de paiements. La forte croissance des autorisations d’engagement (multipliées par 3,8) s’explique par l’anticipation des commandes de véhicule léger tactique polyvalent léger (c’est-à-dire non-protégé), décidée en Conseil de défense le 6 avril 2016, ainsi que par l’augmentation du volume commandé, qui passe de 2 450 véhicules à plus de 3800. Ces véhicules doivent en effet remplacer le parc de Peugeot P4, marqué par un important taux d’attrition.

f. Le programme de porteur polyvalent terrestre (PPT)

La sous-action 51 « Maintenir le potentiel ami et autre - Porteur polyvalent terrestre (PPT) » retrace les crédits de ce programme, lancé en 2010. Le nombre de véhicules de ce programme a été ramené de 2400 à 1600 par la loi de programmation militaire 2014‒2019. Après une première commande de 200 camions passée en 2013 et livrés fin 2015, une deuxième commande a été passée en janvier 2014, au titre de laquelle 77 PPT ont déjà été livrés à l’armée de terre en juin 2016, et une troisième commande de 450 PPT, portant le nombre total de camions commandés à 900, a été notifiée fin 2015. La livraison du 900PPT interviendra en 2018. Le programme recevra 78 millions d’euros en 2017.

g. Les autres opérations visant à « maintenir le potentiel ami et autre »

La sous-action 53 « Maintenir le potentiel ami et autre ‒ Autres opérations » regroupe plusieurs programmes de nature différente :

‒ le programme de flotte logistique, qui vise à fournir les moyens navals permettant d’assurer le soutien d’un engagement majeur en un seul théâtre éloigné de nos principaux points d’appui ;

‒ le projet de formation modernisée et entraînement différencié des équipages de chasse (FoMEDEC), visant à rénover les capacités de formation des pilotes de chasse à Tours et à Cognac ;

‒ la rénovation de vingt avions Alphajet et la mise aux normes de quatre-vingt autres appareils de l’école franco-belge à Cazaux ;

‒ le financement du contrat de partenariat public-privé conclu pour la formation initiale des pilotes d’hélicoptère des trois armées à Dax.

Les principaux engagements pour 2017 recouvrent le financement des heures de vol et les réparations des appareils de Dax. L’opération FoMEDEC ayant été avancée à la fin de l’année 2016, les besoins d’autorisations d’engagement sont réduits de 88 %, à 29,6 millions d’euros, tandis que les crédits de paiement augmentent de 34,5 %, à 49,8 millions d’euros.

h. Le programme MRTT

La sous-action 55 retrace les crédits du programme d’avion multi-rôle de ravitaillement en vol et de transport ‒ ou Airbus A330 Multi Role Tanker Transport. La réalisation du programme MRTT a commencé en 2014, avec la notification par la DGA à Airbus d’un contrat portant sur la fourniture de 12 avions et de moyens de soutien et formation associés. Conformément à la programmation militaire, le premier avion doit être livré en 2018 ; suivront huit appareils commandés par l’affermissement, le 7 décembre 2015, de la première tranche conditionnelle de ce marché.

L’actualisation de la loi de programmation militaire anticipe la livraison des trois derniers MRTT, afin de maîtriser le risque d’un arrêt brutal de notre flotte de ravitailleurs C-135, en service depuis 52 ans en moyenne. Les livraisons doivent s’échelonner entre 2018 et 2025. Les engagements prévus en 2016 couvrent la commande de prestations de soutien en service initial. La poursuite du programme nécessite 180 millions d’euros en crédits de paiement en 2017.

4. Les crédits d’équipements d’engagement et de combat

Les crédits alloués à l’action 9 « Engagement et combat » augmentent de 31,7 % en autorisations d’engagement, pour s’établir à plus de cinq milliards d’euros. Cette augmentation s’explique par plusieurs acquisitions majeures : le cinquième sous-marin nucléaire d’attaque (SNA) de type Barracuda, les premiers véhicules blindés multi-rôles Griffon ainsi que les nouveaux engins blindés de reconnaissance et de combat Jaguar. Les programmes d’armement financés par cette action sont répartis en treize sous-actions.

a. Le programme de missile de croisière naval

La sous-action 56 « Frapper à distance ‒ missile de croisière naval » retrace les crédits de ce programme, qui vise à doter les FREMM et les SNA Barracuda d’une capacité de frappe au sol. Selon le ministère de la Défense, le développement du missile et de son intégration au sous-marin « se poursuit à un rythme soutenu », après des difficultés techniques apparues en 2013, qui ont conduit à retarder le programme.

La livraison du premier lot de munitions de série en version frégate a ainsi été décalée de la fin de 2015 au début de 2017. Ceci explique que le programme n’ait pas reçu de financement en 2016 et nécessite, en 2017, 167,2 millions d’euros d’engagements et 57,8 millions d’euros de paiements.

b. Le programme Rafale

Les crédits du programme Rafale sont inscrits à la sous-action 59. Le périmètre du programme Rafale comprend la fourniture des avions, avec leurs équipements de mission et leur stock de rechanges initial, ainsi que des moyens de maintenance et deux centres de simulation au standard F2. En plus du programme Rafale en lui-même, cette sous-action finance également :

‒ l’opération d’intégration du missile METEOR au Rafale ;

‒ l’opération de mise à niveau (retrofit) de dix appareils de la marine du standard F1 au standard F3 ;

‒ les travaux liés au nouveau standard appelé F3R ;

‒ un ensemble de travaux divers concourant à l’emploi du Rafale : moyens de préparation et d’analyse des missions, moyens d’interopérabilité avec nos alliés, simulateurs et capacités complémentaires de toute nature.

Le premier avion de série équipé des capteurs de nouvelle génération a été livré pour expérimentation en septembre 2012. Les avions actuellement livrés, au titre de la quatrième tranche de production, disposent également de ces nouveaux capteurs. Les travaux de développement du standard F3R du Rafale ont été lancés à la fin de l’année 2013. Ce standard permet notamment de nouveaux emports ‒ comme le missile METEOR et le « pod » de désignation laser de nouvelle génération TALIOS (PDL-NG TALIOS) ‒ et des évolutions ultérieures.

La programmation militaire prévoit la livraison de 26 appareils entre 2014 et 2019, avec la prise en compte à partir de 2016 de livraisons au profit de clients étrangers en complément des deux premiers contrats d’exportation déjà entrés en vigueur en 2015. À la fin de l’année 2015, 142 Rafale ont été livrés aux forces, dont 98 à l’armée de l’air et 44 à la marine. Six livraisons sont prévues pour 2016 ‒ quatre à l’armée de l’air et deux à la marine ‒ et, fin juillet 2016, un avion restait à livrer à l’armée de l’air. Comme le précise le ministère de la Défense, ces six livraisons « tiennent compte du fait qu’afin de satisfaire les exigences liées aux exportations, six Rafale biplaces ont été prélevés en 2015 sur la production destinée à la France au lieu d’être livrés à l’armée de l’air ». Ces prélèvements sont compensés entre 2016 et 2018 par la livraison à l’armée de l’air de six Rafale biplaces, dont un déjà livré en juillet 2016.

L’évolution des crédits est liée à l’avancement du programme et à ces livraisons. Il n’y aura plus d’autorisations d’engagement en 2017, tandis que les crédits de paiement passent de 420 à 344 millions d’euros.

c. Les autres opérations d’équipements de frappe à distance

La sous-action 61 « Frapper à distance ‒ autres opérations » rassemble les crédits de plusieurs programmes. Il s’agit notamment des opérations de maintien des capacités du porte-avions Charles-de-Gaulle dans le cadre de son arrêt technique pour entretien majeur ‒ que présente l’encadré ci-après ‒, de la rénovation « à mi-vie » du missile air-sol SCALP EG, du développement et du soutien du PDL-NG, et de l’armement air-sol modulaire (AASM) qui complète les capacités de tir des Rafale.

L’opération de maintien des capacités du porte-avions Charles-de-Gaulle
à l’occasion de son deuxième arrêt technique majeur

L’opération vise à maintenir les capacités du porte-avions Charles-de-Gaulle à l’occasion de son deuxième arrêt technique majeur (ATM2), programmé en 2017-2018. Elle consiste principalement à identifier ses obsolescences opérationnelles et techniques ne pouvant attendre le troisième arrêt technique majeur, à étudier et valider les solutions les plus pertinentes pour les traiter, puis à réaliser les travaux nécessaires.

Le programme est en phase de préparation des travaux avec l’industriel. Il a été marqué, en 2012, par la notification d’un accord-cadre avec DCNS, ainsi que par la passation d’un marché de rénovation du système de combat. En 2013 ont été passés des marchés de rénovation des systèmes de navigation ainsi qu’un marché de maîtrise d’œuvre d’ensemble. En 2014, un marché de rénovation du système anti-missile a été conclu.

Du point de vue technique, plusieurs étapes de conception de l’opération ont été franchies en 2015 : la revue de conception critique des systèmes d’aviation et de plateforme, et la revue de conception d’ensemble définitive. La préparation de l’arrêt technique sera achevée en 2016, et systèmes et installations destinés à être installés à bord commencent à être testés à terre.

Source : ministère de la Défense

L’essentiel des engagements afférents à la rénovation du SCALP EG ayant été pris en 2016, le besoin d’autorisations d’engagement au titre de cette sous-action baisse de 76 %, pour se concentrer sur le porte-avions et le PDL NG et s’établir, au total, à 68,2 millions d’euros.

d. Le programme de véhicule blindé de combat d’infanterie

Les crédits du programme de VBCI sont inscrits à la sous-action 66. L’essentiel de programme, qui a porté sur près de trois milliards d’euros pour 630 véhicules, est clos depuis 2015, mais la programmation militaire prévoit la transformation de 95 VBCI en une version de 32 tonnes (au lieu de 29 tonnes) afin d’accroître la protection des fantassins embarqués, notamment contre les engins explosifs improvisés. La livraison des VBCI de 32 tonnes a débuté en 2015 et doit se poursuivre jusqu’en 2017. En avril 2016, 44 véhicules avaient été livrés.

Les crédits du programme s’établissent ainsi à 48,4 millions d’euros en crédits de paiement, qui financeront la livraison des derniers VBCI de 32 tonnes et le traitement de diverses obsolescences.

e. Le programme d’hélicoptère Tigre

Les crédits du programme d’hélicoptère de combat Tigre sont inscrits à la sous-action 68. Cet appareil existe aujourd’hui avec deux standards principaux : une version HAP pour les missions d’appui-protection et la version HAD pour les missions d’appui-destruction. Suivant une logique de développement incrémental, les appareils du standard HAP sont progressivement portés au standard HAD. Des études sur un nouveau standard seront lancées en 2017, ce qui justifie 26 millions d’euros d’autorisations d’engagement.

Si la cible initiale du programme était fixée à 60 Tigre, l’actualisation de la programmation militaire a conduit à la commande de sept Tigre supplémentaires en décembre 2015. La poursuite des livraisons, tant pour les livraisons supplémentaires que pour les retrofits, nécessite ainsi 300 millions d’euros de crédits de paiement en 2017, contre 218 millions d’euros en 2016.

f. Le programme de future torpille lourde

La sous-action 69 finance le programme Artemis, qui vise à doter les SNLE et les SNA de la torpille lourde F21, destinée à la lutte contre les bâtiments de surface et les sous-marins. Portant sur 93 torpilles, ce programme en est au stade de réalisation depuis janvier 2008. Les essais à la mer ont permis de valider les principales fonctions de la torpille, et les premiers essais depuis un SNA de type Rubis ont été conduits en avril 2015. Diverses difficultés techniques ont toutefois entraîné un report de la qualification de l’arme, dont la livraison est désormais prévue en 2018.

Les crédits de paiements inscrits en 2016 (pour 43,8 millions d’euros) et prévus en 2017 (53,4 millions d’euros) sont liés aux travaux de qualification et de production de l’arme.

g. L’évolution du missile Exocet

La sous-action 71 regroupe les opérations permettant de maintenir les performances actuelles du système de missile Exocet, visant notamment à améliorer sa robustesse face aux nouvelles menaces et à permettre sa mise en œuvre à partir de nouvelles plates-formes, comme les FREMM, les frégates Horizon, les Rafale et les Barracuda.

Ces opérations sont financées pour 33,8 millions d’euros en 2017, contre 43,3 millions d’euros en 2016.

h. Le programme de frégates multi-missions

La sous-action 73 finance le programme de frégates multi-missions, conduit au sein de l’Organisation conjointe de coopération en matière d’armement en coopération avec l’Italie.

Les FREMM sont appelées à constituer l’ossature principale de la force d’action navale et remplaceront la plupart des frégates anciennes. Avec une masse de l’ordre de 6 000 tonnes, elles possèdent des capacités anti-navires (des missiles mer-mer), des moyens de lutte anti sous-marine (sonars et torpilles MU 90), ainsi que, pour leur version anti sous-marine (ASM), des capacités d’autodéfense anti-aérienne (des missiles ASTER 15) ou, pour leur version à capacité renforcée de défense aérienne, des missiles ASTER 15 et 30. Les FREMM peuvent embarquer des capacités de frappe dans la profondeur (missiles de croisière navals), ainsi que l’hélicoptère NH90 Caïman.

Le Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale de 2013 prévoit quinze « frégates de premier rang » à l’horizon 2025. Comme le précise le ministère de la Défense, « l’opportunité offerte par l’export de la frégate FREMM Normandie à l’Égypte a permis d’ajuster la feuille de route frégates pour améliorer la cohérence d’ensemble des programmes actuels et futurs ». L’actualisation de la programmation militaire a ainsi revu la cible du programme FREMM de onze à huit frégates, avec réaménagement du calendrier.

La troisième FREMM, le Languedoc, a été livrée en mars 2016, et les admissions au service actif des FREMM Aquitaine et Provence ont été prononcées respectivement en décembre 2015 et juin 2016.

La poursuite du programme requiert 682 millions d’euros d’autorisations d’engagement et 306,2 millions d’euros de crédits de paiement en 2017.

i. Le programme de SNA Barracuda

La sous-action 74 finance le programme de SNA Barracuda. Ce sous-marin est conçu pour assurer le soutien de la force océanique stratégique (FOST) ou d’une force aéronavale, participer aux opérations de projection de forces et de frappe dans la profondeur (avec le missile de croisière naval) et aux opérations spéciales (il peut embarquer commandos et nageurs de combat) ; il peut également agir isolément.

La réalisation du programme a été lancée et le marché notifié en 2006. Ce marché a été passé en cotraitance aux sociétés DCNS – maître d’œuvre pour l’ensemble du sous-marin – et AREVA TA pour la chaufferie nucléaire. La DGA assure la maîtrise d’ouvrage, et la maîtrise d’ouvrage déléguée des chaufferies nucléaires embarquées est confiée au Commissariat à l’énergie atomique (CEA). Le programme porte sur six appareils, dont quatre sont déjà commandés (les Suffren, Duguay-Trouin, Tourville et De Grasse). La première sortie à la mer du Suffren, premier sous-marin de la série, est prévue en 2018, pour une livraison prévue en 2019. Les travaux de développement et de production se déroulent comme suit :

‒ le Suffren est en phase d’achèvement : l’ensemble des modules internes ont été embarqués, et la coque fermée ;

‒ l’équipage d’armement constitué en 2015 participe aux essais des installations du navire à Cherbourg et s’entraîne sur les simulateurs de Toulon ;

‒ la mise en place des moyens de soutien logistique se poursuit ;

‒ les premières réalisations des sous-marins de série se déroulent conformément au calendrier de référence du programme ;

‒ l’instruction des dossiers de sûreté avec les services du délégué à la sûreté nucléaire et à la radioprotection pour les activités et installations intéressant la défense (DSND) se poursuit.

M. Laurent Collet-Billon, délégué général pour l’armement, a estimé que l’organisation de la production des Barracuda par DCNS et ses fournisseurs méritait certains perfectionnements pour éviter que les contrôles de qualité effectués par la DGA ne conduisent à des retards supplémentaires dans la livraison des navires. En effet, contrairement par exemple à Dassault, les contrôles ont conduit à soulever diverses difficultés. Aux yeux de M. Vincent Moreau, sous-directeur de la 5e sous-direction de la direction du budget du ministère des Finances, ces retards sont de nature à justifier le report d’un versement de 200 millions d’euros initialement prévu pour la fin de l’année 2016.

Ce programme est doté de 1,12 milliard d’euros d’autorisations d’engagement et de 645 millions d’euros de crédits de paiement en 2016, et ces montants passeront respectivement à 950 et à 572 millions d’euros. Ces crédits permettront la poursuite du programme, y compris la commande en 2017 du cinquième sous-marin de la série.

L’année 2016 a aussi été marquée par la conclusion d’un contrat de vente de douze bâtiments de classe Barracuda (Shortfin Barracuda Block 1A) à l’Australie, pour un montant de l’ordre de 34,5 milliards d’euros. Le rapporteur ne peut que se féliciter de cette excellente nouvelle pour l’industrie française.

Il relève que c’est toutefois l’industrie américaine d’armement qui fournira à l’Australie une large part des systèmes d’armes et de combat qui équiperont ces sous-marins, au point que la presse relaie des déclarations de dirigeants de Lockheed Martin affirmant que « les yeux, les oreilles et l’épée du bateau » seront américains. Aussi, rappelant que le développement du Barracuda a coûté près d’un milliard et demi d’euros à la France, le rapporteur juge légitime de veiller à ce que l’accès de nos amis et alliés ‒ mais aussi concurrents ‒ américains aux plans du Barracuda soit encadré, dans une double logique de juste nécessité et, le cas échéant, de juste redevance.

j. Les équipements destinés à d’autres opérations, y compris à la conduite des opérations spéciales

La sous-action 75 « Opérer en milieu hostile – Autres opérations et conduire des opérations spéciales » rassemble plusieurs programmes en cours :

‒ le missile air-surface tactique futur (MAST-F), futur armement principal de l’hélicoptère Tigre dans son troisième standard ;

‒ la rénovation du véhicule blindé léger (VBL), engin de 4,5 tonnes hélitransportable et doté d’une protection balistique, nucléaire et chimique ainsi qu’une capacité de franchissement amphibie. Suivant la programmation militaire, la rénovation de ce véhicule sera lancée en décembre 2016, et financée en 2017 pour 115 millions d’euros d’engagements et 5,7 millions d’euros de paiements ;

‒ la rénovation des avions Atlantique 2, dont l’encadré ci-après présente les enjeux, sera financée pour 66,5 millions d’euros de paiements et près de 30 millions d’euros d’engagement ;

La rénovation des avions Atlantique 2

Le programme de rénovation des Atlantique 2 vise à conserver les capacités de lutte anti-sous-marine et anti-navire de l’appareil pour garantir la liberté d’action de la force océanique stratégique et du groupe aéronaval.

La flotte opérationnelle actuelle est composée de 22 appareils disposant d’un « potentiel de vie » au-delà de 2030. Le programme prévoit la rénovation de 15 aéronefs, pour un total de 803,9 millions d’euros. Il s’agit de traiter les obsolescences critiques du système de combat et d’améliorer les performances de différents sous-systèmes (calculateur tactique, visualisation tactique, acoustique, radar, systèmes d’identification « ami / ennemi », électro-optique). Les autres appareils de la flotte verront seulement leur console de visualisation rénovée.

Les travaux de développement et de qualification du standard de rénovation sur un avion prototype ont été commandés en octobre 2013. Mais par la suite, des retards dans le développement de certains sous-systèmes ont entraîné une réorganisation des travaux industriels, avec des conséquences financières et calendaires. Les travaux de rénovation de 11 appareils supplémentaires ont été commandés en octobre 2015. La livraison du premier avion rénové est désormais prévue en 2019.

‒ le démantèlement des SNA de classe Rubis, en vue duquel des études techniques et des travaux d’infrastructure à Cherbourg sont financés à hauteur de 15 millions d’euros environ ;

‒ le missile anti-navire léger (ANL) mené en coopération avec le Royaume-Uni au titre du projet « One Complex Weapon ». Le contrat afférent a été notifié à MBDA en 2014, et les premiers essais sont prévus en 2016 et 2017. 46,65 millions d’euros y sont consacrés en 2017 ;

‒ le système de lutte anti-mines marines futur (SLAMF), dont le développement est financé pour 235 millions d’euros en 2017 ;

‒ le système « fantassin à équipements et liaisons intégrés » (FÉLIN), destiné à améliorer les capacités des combattants en matière de mobilité, d’observation, de communication, de combat, de protection et de soutien. 18 552 équipements ont été commandés et livrés, équipant 18 régiments d’infanterie. L’année 2016 a vu la qualification de la dernière étape du programme qui comprend notamment un kit d’adaptation, appelé « FELIN V1.3 », qui allège le système et améliore sa modularité. Quatre régiments en seront équipés d’ici la fin de l’année, et les suivants en 2017, pour 670 000 euros en 2017 ;

‒ l’opération « véhicules forces spéciales » (VFS), qui regroupe plusieurs programmes : 241 véhicules légers des forces spéciales (VLFS) livrés avant 2016 pour 70 d’entre eux et après 2017 pour les autres ; 202 poids lourds (PLFS) dont 23 seront commandés en 2017, et 300 fardiers dont 120 commandés en 2017. À ce titre sont prévus 25,4 millions d’euros d’engagements et 17,6 millions d’euros de paiements en 2017 ;

‒ la torpille MU 90, pour laquelle 2,3 millions d’euros sont inscrits ;

‒ la frégate de taille intermédiaire (FTI), qui sera livrée en cinq exemplaires à partir de 2023 et complétera les huit FREMM et les deux frégates de défense aérienne Horizon (FDA) pour constituer la force de quinze frégates de premier rang définie par le Livre blanc. En 2017, 2,1 milliards d’euros d’autorisations d’engagement et 162,7 millions d’euros de crédits de paiement sont inscrits au titre de ce programme ;

‒ la rénovation des frégates de type Lafayette, pour laquelle 130 millions d’euros d’engagements seront pris et 140 millions d’euros de paiements effectués ;

‒ l’arme individuelle future remplaçant le FAMAS, pour l’acquisition de laquelle 130 millions d’euros seront engagés et 10,9 millions d’euros payés en 2017.

k. L’opération d’ensemble SCORPION

La sous-action 77 est consacrée à l’opération SCORPION, qui vise à moderniser les groupements tactiques interarmes (GTIA) afin d’accroître leur efficacité et leur protection, en utilisant au mieux les nouvelles capacités d’échanges d’information au sein de chaque GTIA.

La première étape du programme SCORPION comprend notamment :

‒ des véhicules blindés multi-rôles (VBMR) lourds appelés Griffon (à six roues motrices) et des VBMR légers (à quatre roues motrices), destinés à remplacer les véhicules de l’avant blindés (VAB) en service depuis quarante ans ;

‒ des engins blindés de reconnaissance et de combat (EBRC) Jaguar, destinés à remplacer l’AMX10RC, l’engin blindé ERC Sagaie et le VAB HOT ;

‒ une rénovation des chars Leclerc qui se limite au traitement des obsolescences fonctionnelles majeures ;

‒ un « système d’information du combat SCORPION » destiné à assurer la cohérence des systèmes en service ;

‒ l’adaptation du système de préparation opérationnelle.

La programmation militaire fixe comme cible capacitaire 1 722 Griffon, 558 VBMR légers, 248 Jaguar et 200 chars Leclerc rénovés. L’opération d’ensemble SCORPION a été conçue avec un calendrier très étiré : la première étape porte sur 780 Griffon, 400 VBMR légers, 110 Jaguar et 200 chars Leclerc, et les étapes suivantes devront s’échelonner jusque dans les années 2030.

Le stade de réalisation de la première étape du programme SCORPION a été lancé en octobre 2014. Le marché de développement, production et soutien des Griffon et Jaguar a été notifié en décembre 2014. Les sociétés Nexter, Renault Trucks Defense et Thales ont formé un groupement momentané d’entreprises pour assurer en cotraitance la maîtrise d’œuvre de ce marché. Le marché de rénovation du char Leclerc a été notifié à Nexter en mars 2015. Les procédures d’acquisition des VBMR léger, du système de préparation opérationnelle et de l’architecte intégrateur sont en cours. À l’issue du Conseil de défense d’avril 2016, la cible des VBMR légers a été augmentée de 200 unités afin de répondre au volume croissant d’entraînement des forces terrestres.

Les autorisations d’engagement inscrites en 2016, pour 1,139 milliard d’euros, ont couvert le complément d’affectation nécessaire au développement et à l’industrialisation du VBMR léger et du système de préparation opérationnelle, ainsi qu’à la commande d’une partie des véhicules de série (Griffon et Jaguar) prévue à compter de 2017. Les autorisations d’engagements prévues en 2017, atteignant 100 millions d’euros, sont également destinées aux commandes d’une partie des véhicules de séries (les chars Leclerc rénovés) prévues à compter de 2018. Les crédits de paiement passent de 155 à 191 millions d’euros. Selon les explications fournies par le général Bernard Barrera, sous-chef d’état-major de l’armée de terre chargé des plans et des programmes, la première tranche de production, comprenant 319 Griffon et 20 Jaguar, sera affermie en 2017.

l. La rénovation « à mi-vie » du Mirage 2000

La nouvelle sous-action 78 « Frapper à distance ‒ Mirage 2000 » est entièrement consacrée aux opérations de rénovation « à mi-vie » du Mirage 2000 D. cette rénovation doit permettre leur emploi de ces aéronefs en complément des Rafale jusqu’au-delà de 2030. Outre la modernisation de l’avionique, elle comprend l’adjonction d’un canon air-sol, ainsi que le remplacement des missiles d’autoprotection Magic, d’ancienne génération, par des missiles MICA. La DGA a notifié en 2016 ce marché de rénovation aux sociétés Dassault Aviation et MBDA. Il porte sur 55 avions pour l’armée de l’air, et les livraisons s’échelonnent de 2020 à 2024.

Le programme est financé en 2017 pour 18 millions d’euros d’autorisations d’engagement et 76 millions d’euros de crédits de paiement.

m. Le programme de missile de moyenne portée

La sous-action 88 finance le programme de missile moyenne portée (MMP), qui a pour objet de fournir un système de missiles de combat terrestre remplaçant le missile tactique MILAN, en service depuis 1974. Le premier tir à portée maximum d’une munition a été réalisé avec succès en 2015, et les tirs de qualification ont débuté en 2016. Les premières livraisons sont prévues en 2017, ce qui justifie 87 millions d’euros de paiements.

5. Les équipements de protection et de sauvegarde

L’action 10 « Protection et sauvegarde » est dotée de 407,6 millions d’euros en autorisations d’engagement, soit 53 % de moins qu’en 2015, tandis que ses crédits de paiement sont en repli de 8,8 %, à 392 millions d’euros. Parmi les programmes du périmètre de cette action, on retiendra notamment en 2016 le lancement de deux bâtiments de soutien et d’assistance hauturiers (BSAH), d’un « patrouilleur futur » ‒ appelé « bâtiment multi-missions » ‒ et de l’industrialisation de la rénovation des Mirage 2000D.

a. Les programmes concourant à la sûreté des approches du territoire

La sous-action 79 « Assurer la sûreté des approches ‒ Autres opérations et assurer la sécurité de l’État, de la nation et des citoyens » regroupe les crédits de plusieurs programmes d’équipement nécessaires pour assurer leurs missions de protection du territoire national, dans le cadre de la posture permanente de sauvegarde maritime pour la marine, de posture permanente de sûreté aérienne pour l’armée de l’air, ou de la posture de protection terrestre pour l’armée de terre.

i. Le programme de « patrouilleur futur »

Cette sous-action finance le remplacement de nos patrouilleurs actuels par le programme de « patrouilleur futur ». C’est à ce titre que trois bâtiments multi-missions (B2M) ont été commandés en 2013, et que l’actualisation de la programmation militaire a prévu la commande d’un quatrième en 2016. Pour 2017, 33 millions d’euros sont consacrés à la commande du quatrième B2M.

De même, deux patrouilleurs légers guyanais (PLG) ont été commandés en 2014 pour être déployés dans la zone économique exclusive (ZEE) afin d’assurer les missions relevant de l’action de l’État en mer, de notre souveraineté et de la protection des intérêts nationaux dans la ZEE. Ces bâtiments contribuent également à la protection du centre spatial guyanais.

ii. Le programme de missile d’interception à domaine élargi

La sous-action 79 finance également le programme de missile d’interception à domaine élargi (MIDE), appelé METEOR, qui doit renforcer les capacités d’entrée en premier des Rafale, aussi bien pour des missions de reconnaissance ou de pénétration conventionnelle qu’en mission de défense aérienne face à une menace aérienne moderne. Le coût du programme est évalué à 404,1 millions d’euros. Il est conduit en coopération entre le Royaume-Uni, l’Allemagne, l’Italie et l’Espagne pour l’avion Eurofighter, la Suède pour l’avion Gripen et la France pour le Rafale.

La qualification du système METEOR a été prononcée en novembre 2013. Les livraisons de missiles de série se poursuivent, la France devant recevoir ses premiers missiles opérationnels en 2018. 18,5 millions d’euros d’engagements et 35 millions d’euros de paiements sont prévus en 2017.

iii. Le programme de bâtiments de soutien et d’assistance hauturiers

Les bâtiments de soutien et d’assistance hauturiers doivent assurer des missions de soutien et d’assistance des forces ‒ comme l’accompagnement d’un groupe aéronaval ‒, de surveillance et d’intervention maritime dans le cadre de l’action de l’État en mer, ainsi que de sauvegarde maritime, par exemple de sauvetage ou d’assistance à la protection des biens.

Le programme de BSAH est évalué à 166,7 millions d’euros. Le dossier de lancement de la réalisation approuvé en juillet 2015 prévoyait la réalisation de trois bâtiments, et l’actualisation de la programmation militaire a prévu la commande d’un quatrième bâtiment. 62 millions d’euros sont consacrés en 2017 à la commande des troisième et quatrième navires.

iv. Autres programmes

La sous-action 79 finance également :

‒ le programme d’avion de surveillance et d’intervention maritime (AVSIMAR), consistant, dans un premier temps, à transformer quatre Falcon 50 en avions de surveillance maritime puis, pour une seconde étape, à rénover ou à renouveler l’ensemble de nos capacités de surveillance et d’intervention en mer ;

‒ le programme de développement du successeur du missile MICA, qui constitue l’armement principal du Rafale pour son autoprotection et ses missions de défense aérienne. Ce programme commence en 2017, avec 213 millions d’euros d’engagements et deux millions d’euros de paiements destinés à financer le lancement du stade de réalisation du successeur du MICA ;

‒ le projet de site d’élimination de chargement d’objets identifiés anciens (SECOIA), où seront détruites les munitions chimiques retirées du service. Cette usine, dont les infrastructures ont été achevées en 2016, sera exploitée pendant seize ans par Airbus à compter de l’été 2017. Son financement atteint en 2017 25 millions d’euros d’engagements et 38,8 millions d’euros de paiements, pour un programme dont le coût total avoisine 150 millions d’euros.

b. Les programmes de systèmes air-sol futurs

La sous-action 82 « Assurer la protection des forces et des sites ‒ Famille de systèmes sol-air futurs (FSAF) » rassemble les crédits de deux programmes de missiles Aster 30 et Aster 15 bi-étage, qui remplissent deux types de missions :

‒ pour les missions de défense anti-aérienne du corps de bataille et des bases aériennes, le système « sol-air de moyenne portée / terrestre » (SAMP/T) équipé de missiles Aster 30 « block 1 » pourra traiter des cibles conventionnelles et des cibles balistiques rustiques. C’est ce dispositif qui a été déployé afin de sécuriser la COP 21 et les cérémonies du 14 juillet 2016 ;

‒ pour l’autodéfense des bâtiments de la marine nationale, le « système anti-air missile » (SAAM) équipé de missiles Aster 15 pourra traiter les attaques, même « saturantes », de missiles « manœuvrants » et d’avions.

Ces programmes portent sur 200 missiles Aster 30 block 1 et 118 Aster 30 block 1 au standard NT, plus performant ‒ au lieu des 575 Aster 30 block 1 prévus avant la loi de programmation militaire de 2013 ‒, et 140 Aster 15. De plus, 48 Aster 30 supplémentaires ont été commandés pour les FREMM de défense aérienne, suivant les décisions prises en Conseil de défense en 2016.

En février 2016, la dixième et dernière section SAMP/T a été livrée à l’armée de l’air. En mai suivant, 188 missiles Aster 30 B1 ont été livrés à l’armée de l’air et 31 Aster 15 à la marine. Les négociations relatives l’acquisition de 48 ASTER 30 B1 pour équiper les futures FREMM DA ont abouti en juin 2016.

En 2017, quatre missiles Aster 30 block 1 et 21 Aster 15 seront livrés. L’ensemble du programme de FSAF est doté de 98,23 millions d’euros de crédits de paiement en 2017, ce qui permettra de poursuivre les commandes prévues.

c. Les autres opérations et les équipements de protection de l’homme

La sous-action 86 « Assurer la protection des forces et des sites ‒ Autres opérations et assurer la protection de l’homme » finance principalement la rénovation « à mi-vie » du missile Mistral. Ce programme porte sur 850 munitions ‒ au lieu des 2 050 prévues avant la LPM de 2013 ‒, livrées depuis novembre 2015, et sur l’acquisition de simulateurs. L’avancement du programme explique sa dotation, pour 6,3 millions d’euros de crédits de paiement.

Cette sous-action comprend aussi des crédits relatifs à des travaux de lutte contre les engins explosifs improvisés ‒ première cause de mortalité dans les forces ‒ dans le cadre de l’opération d’ensemble « capacité de réaction et d’anticipation pour la lutte contre les engins explosifs improvisés » (CARAPE). Une première étape de cette opération, achevée en 2011, a permis d’équiper plusieurs bataillons interarmes ; une deuxième étape tend à équiper trois GTIA de moyens supplémentaires, que présente l’encadré ci-après.

ÉQUIPEMENTS FOURNIS DANS LE CADRE DE L’OPÉRATION CARAPE

Première étape

Deuxième étape

‒ 5 véhicules de type Buffalo destinés à la lutte contre les EEI sur itinéraire

‒ 135 brouilleurs électromagnétiques et 245 kits d’intégration

‒ six kits d’intégrations de brouilleurs COF 817 pour AMX 10 RC

‒ 32 kits leurres mécaniques, massiques et infrarouges

‒ 155 surprotections pour VBL

‒ 40 kits de surprotections EEI VAB

‒ 250 kits de surprotection pour les VAB

‒ 20 surprotections pour les AMX 10 RCR

‒ cinq systèmes de protection électronique des enceintes militaires en opération

‒ 50 brouilleurs et 135 kits d’intégration

‒ 200 brouilleurs de nouvelle génération et 260 kits d’intégration

‒ l’aménagement intérieur de 250 petits véhicules protégés

‒ 280 sièges anti-mines pour VAB

Source : ministère de la Défense.

En juin 2016, l’ensemble des systèmes de protection électronique des enceintes militaires, des brouilleurs et kits d’intégration, des surprotections pour AMX 10 RCR, des kits de sièges anti-mines pour VAB et des surprotections pour VAB a été livré. Les livraisons des aménagements intérieurs pour les petits véhicules protégés (PVP) et des brouilleurs de nouvelle génération ont débuté en 2016 et doivent s’achever en 2017.

6. La préparation et la conduite des opérations d’armement

L’action 11 « Préparation et conduite des opérations d’armement » rassemble les crédits de la DGA hors titre 2 ‒ les dépenses de personnels étant désormais retracées au programme 212. Elle est ainsi constituée de deux principaux types de dépenses :

‒ les dépenses de fonctionnement de la DGA, au titre de la sous-action 89, y compris la subvention de fonctionnement de l’OCCAr. Les crédits de paiement baissent de 4,8 %, grâce aux économies liées à la libération du site de Bagneux ;

‒ les dépenses d’investissements pour les besoins propres de la DGA, au titre de la sous-action 90, croissent de 15,8 % en autorisations d’engagement pour atteindre 127,5 millions d’euros, tandis qu’ils s’érodent de 0,4 % en crédits de paiement, à 110,2 millions d’euros. Selon les explications du ministère, cette évolution est due principalement aux investissements nécessaires à « la montée en puissance de l’ingénierie système, dans un environnement informatique collaboratif, pour accompagner la modernisation de la DGA ».

7. Les crédits issus de contributions étrangères et de programmes civils

L’action 12 « Parts étrangères et programmes civils » qui regroupent, en cours d’exécution, les contributions internationales ou interministérielles à des activités menées par la DGA en coopération ou pour le compte de tiers.

Par nature, la loi de finances n’inscrit pas de dotation à cette action. Elle est abondée en cours de gestion, soit par les pays concernés s’agissant de coopération internationale ‒ tel est l’objet de la sous-action 96 « Parts étrangères » ‒, soit par d’autres programmes budgétaires s’agissant d’actions opérées par la DGA pour le compte d’autres ministères, auquel cas les crédits correspondants sont inscrits à la sous-action 97 « Programmes civils ».

SECONDE PARTIE ‒ PERSPECTIVES POUR UNE REVALORISATION
DU BUDGET DE LA DÉFENSE

L’objectif consistant à consacrer 2 % du produit intérieur brut (PIB) à la défense fait l’objet d’un consensus de plus en plus large. Le rapporteur pour avis s’est donc attaché à examiner la place que les dépenses d’armement pourraient avoir dans cette perspective.

I. « LES DEUX POURCENT », UN OBJECTIF SAISI COMME UNE CHANCE DE REMÉDIER À NOS INSUFFISANCES CAPACITAIRES

« Les deux pourcent » sont devenus un thème récurrent de discussions et de réflexions parmi les acteurs et les observateurs de notre politique de défense nationale. La plupart des propositions formulées dans cette perspective placent les équipements au premier rang des besoins des armées.

A. UN QUASI-CONSENSUS POUR PORTER LE BUDGET DE LA DÉFENSE À 2 % DU PIB

1. Le retournement de tendance est engagé, et les moyens de la défense sont orientés à la hausse

L’année 2015 aura marqué un profond retournement de tendance : après plusieurs décennies de réduction presque ininterrompue, les ressources humaines et financières de la défense voient leur évolution repartir à la hausse.

L’actualisation de la programmation militaire par la loi du 28 juillet 2015 puis les décisions prises en Conseil de défense le 6 avril 2016 ont marqué deux jalons dans ce retournement de tendance. L’article 5 de la loi du 28 juillet 2015 prévoit d’ailleurs la possibilité d’une « nouvelle actualisation » de cette programmation, au vu d’un rapport d’évaluation remis par le Gouvernement au Parlement au plus tard le 31 mars 2017.

2. L’objectif de 2 % du PIB fait l’objet d’un quasi-consensus

a. Un objectif déjà érigé en « directive » de l’OTAN

En septembre 2014 déjà, au sommet de Newport, les États membres de l’OTAN avaient affirmé leur attachement à la « directive OTAN » fixant une double norme de référence pour les dépenses de défense : consacrer 2 % de leur PIB à la défense, et consacrer 20 % de leurs dépenses de défense à l’acquisition de nouveaux équipements majeurs, recherche et développement compris.

Les graphiques ci-après montrent ce que cet engagement avait d’ambitieux pour un grand nombre d’États membres.

DÉPENSES DE DÉFENSE EN POURCENTAGE DU PRODUIT INTÉRIEUR BRUT

Source : OTAN.

DÉPENSES D’ÉQUIPEMENT EN POURCENTAGE DES DÉPENSES DE DÉFENSE


Source : OTAN.

b. Un objectif de plus en plus consensuel

On observe l’émergence d’un consensus autour de l’idée de porter le budget de la défense à 2 % du PIB ; les dernières universités d’été de la défense l’ont d’ailleurs montré.

En effet, après que le chef d’état-major des armées a déclaré que l’« effort de guerre » à ses yeux « indispensable aux armées » consiste à « consacrer 2 % du PIB à la défense durant le prochain quinquennat », le Premier ministre a estimé que « seul un effort de cette nature peut nous permettre de consolider et de crédibiliser notre modèle complet d’armée ». Le Premier ministre a d’ailleurs ajouté : « Je pense que dans les dix ans qui viennent, le niveau d’engagement financier et humain pour les ministères de l’Intérieur et de la Défense ira croissant », estimant que « nous n’avons pas le choix sur l’effort en matière de sécurité et de défense ». Il a déclaré de surcroît : « Je pense que l’objectif des 2 % est atteignable, et il faut ce niveau, peut-être plus ».

Ces déclarations, comme de nombreuses autres, témoignent de l’émergence d’un consensus autour de l’objectif de 2 %.

B. UNE PERSPECTIVE VUE COMME UN REMÈDE POSSIBLE À NOS INSUFFISANCES CAPACITAIRES

Depuis 2015, les perspectives de hausse des moyens de la défense ont conduit les armées, directions et services du ministère de la Défense à exprimer à plusieurs reprises leurs besoins. Ces travaux permettent de nourrir la réflexion sur le point de savoir à quels besoins « les deux pourcent » pourraient pourvoir.

1. Les priorités de l’armée de terre

Lors de son audition du 12 octobre 2016 devant la commission, le général Jean-Pierre Bosser, chef d’état-major de l’armée de terre, a défini ce qu’il appelle un « modèle économique d’un nouveau genre pour l’armée de terre ». Sa ligne directrice est la suivante : « au moins les cinq prochaines années, l’armée de terre devra porter davantage son effort dans le champ des équipements que dans le champ des effectifs ». Il a clairement indiqué que « s’il y avait une ambition de 2 %, dans les prochaines années, autour de la défense », le souhait de l’armée de terre est « que les équipements rattrapent désormais les effectifs ».

a. Combler des lacunes capacitaires

Le rapporteur pour avis a étudié avec le général Bernard Barrera, sous-chef d’état-major de l’armée de terre chargé des plans et des programmes, les lacunes capacitaires que l’armée de terre juge nécessaire de combler. Elles concernent :

‒ le rythme de la montée en puissance du programme SCORPION, tant pour ses véhicules (Griffon, Jaguar, VBMR légers) que pour son environnement numérique (SICS, Contact, C- NUMTACT). « Lent et étalé dans le temps, ce tempo oblige à maintenir des parcs anciens trop longtemps » ‒ à titre d’exemple, l’armée de terre aurait encore 1 000 VAB en 2030, lorsque cet engin aura 54 ans ‒ et multiplie les problèmes d’interopérabilité ;

‒ un déficit en matière de mobilité et de moyens puissants pour les opérations « courantes » comme pour les engagements les plus durs : « nos équipements d’artillerie ou du génie reposent encore et durablement sur la génération des années 1970 », et les volumes de livraisons prévus par les programmes de canons CAESAR, de chars Leclerc rénovés ou de missiles MMP « sont en deçà des besoins » ;

‒ les reports réguliers dans l’acquisition d’équipements de cohérence en raison des contraintes financières, que ce soit pour des « briques capacitaires complètes » (comme l’armement d’infanterie hors AIF), des besoins réguliers (notamment en munitions) ou des besoins nouveaux, comme les microdrones ;

‒ une prise en compte insuffisante ou décalée dans le temps de besoins C4ISR, devenus incontournables pour les opérations interarmées, comme les radars de surveillance et de « déconfliction 3D » dans le SCCOA ;

‒ l’insuffisance de nos capacités d’aérocombat, combinant problèmes de disponibilité des hélicoptères les plus récents, et de prise en compte limitée de besoins spécifiques de certaines unités, comme les forces spéciales.

b. Les priorités de l’armée de terre au titre des « deux pourcent »

Dans l’hypothèse d’un budget de la défense rehaussé à 2 % du PIB, les priorités de l’armée de terre seraient les suivantes :

‒ accélérer la mise en œuvre de l’opération SCORPION, en visant à équiper trois brigades interarmes en 2025 au lieu d’une, et à compléter les cibles de VBMR légers. Le général (2S) Jean-Marc Duquesne a d’ailleurs précisé au nom du groupement des industries françaises de défense et de sécurité terrestres et aéroterrestres (GICAT) que les capacités de production des industriels permettent une telle accélération, qui offrirait en outre un triple gain financier : par un « effet de cadence », les coûts de structure seraient limités ; par le resserrement dans le temps de la phase de production, il y aurait moins d’obsolescences industrielles à traiter en cours de programme ; et le GICAT estime à 30 % le gain possible sur le coût du MCO des capacités concernées, compte tenu du coût croissant de la maintenance des matériels vieillissants ;

‒ pour améliorer la mobilité des forces, « consolider » les programmes de véhicules légers de transport de personnes, de porteur polyvalent terrestre et de poids lourd ;

‒ augmenter le flux financier des équipements de cohérence, regroupés l’appellation « autres opérations d’armement » (AOA) en portant leur financement annuel à 300 millions d’euros ;

‒ renforcer nos capacités d’intervention majeures, avec l’acquisition de chars Leclerc rénovés supplémentaires, de stocks de missiles et de roquettes plus nombreux, de 32 canons CAESAR et de 50 engins modernes pour remplacer les engins blindés du génie ;

‒ compléter nos capacités de C4ISR et de coordination interarmées en acquérant des radars 3D pour l’armée de terre (dans le cadre des opérations SCCOA), davantage de drones tactiques SDT, des stations de communication mobiles par satellite (du programme COMSAT NG), etc. ;

‒ augmenter les crédits d’entretien programmé du matériel aéroterrestre, ce que les décisions du 6 avril 2016 n’ont permis de faire que de façon jusqu’à présent incomplète ;

‒ poursuivre la transformation des capacités d’aérocombat, en prenant en compte les besoins spécifiques des forces spéciales avec une version adaptée de l’hélicoptère Caïman.

2. Les priorités de l’armée de l’air

Le général André Lanata, chef d’état-major de l’armée de l’air, a évoqué trois axes de réflexion pour une hausse possible du budget de la défense.

a. La « recapitalisation organique » de l’armée de l’air

La première priorité du général André Lanata est la « recapitalisation organique » de l’armée de l’air, « qui ne tourne pas aujourd’hui à plein régime » : elle manque de mécaniciens pour produire des heures de vol, de fusiliers pour décharger les mécaniciens de la garde des emprises, etc. « On s’en sort, mais on est sur la corde raide ». Le général a fait valoir la complexité des mesures que doit prendre l’armée de l’air pour assurer ses missions avec des moyens limités, dans les domaines précités comme dans d’autres. La difficulté principale consiste à produire suffisamment d’heures de vol pour soutenir l’exportation, assurer les OPEX et garantir l’activité dite « organique », c’est-à-dire celle qui permet à l’ensemble des professionnels de maintenir leurs compétences opérationnelles.

Concernant les équipements nécessaires à cette « recapitalisation organique », les moyens de l’armée de l’air sont très limités en matière :

‒ de ravitaillement en vol : l’opération Chammal ne dispose que d’un seul ravitailleur C135, sur une flotte d’ailleurs marquée par une indéniable usure ;

‒ d’ISR (Intelligence, Surveillance and Reconnaissance, c’est-à-dire renseignement, surveillance et reconnaissance), pour lesquels « nous dépendons des Américains ».

b. Adapter le contrat opérationnel à la réalité des engagements

Pour le général André Lanata, le niveau d’ambition décrit dans les contrats opérationnels peut être revu. Aujourd’hui, l’armée de l’air compte vingt avions de combat engagés en OPEX contre douze prévus ; quatre bases aériennes extérieures contre une prévue ; quatre théâtres d’engagement contre un à deux prévus. Cet engagement « disperse la logistique, et épuise les personnels ».

Il faut en effet noter que l’intense activité en OPEX suppose une importante manœuvre de soutien, moins visible, mais très intense. Cela a conduit d’ailleurs à effectuer « un “roque” » entre Rafale et Mirage 2000D, « car cette ressource était très consommée : les escadrons de Mirage 2000D consommaient 60 % de leurs heures de vol en OPEX, ce qui ne laissait pas suffisamment de potentiel pour leur activité “organique” ».

c. Renouveler la composante aéroportée de la dissuasion

Le chef d’état-major de l’armée de l’air a souligné que le renouvellement de la composante aéroportée de la dissuasion appelle des décisions autour de l’année 2020 sur l’arme elle-même et sur l’avion qui la porte. Si l’essentiel des engagements financiers portera sur une programmation militaire du milieu des années 2020, les études amont doivent être lancées dès la prochaine période. Pour le général, « le choix de la dissuasion, ce n’est pas seulement un choix d’armement : c’est un choix politique avant tout ; les moyens nécessaires à sa crédibilité s’en déduisent ». Pour lui, dès lors que la France décide de conserver le rang de puissance nucléaire, « la double composante est indispensable ».

3. Les priorités de la marine

L’amiral Christophe Prazuck, chef d’état-major de la marine nationale, a présenté dans les grandes lignes l’état d’avancement de ses réflexions sur les priorités d’investissement de la marine.

a. Consolider le volume de la flotte de premier rang

Le renouvellement de la flotte de premier rang est en cours et s’échelonne jusqu’en 2030, avec les programmes de renouvellement des Atlantique 2, des sous-marins nucléaires d’attaque, des sous-marins nucléaires lanceurs d’engins et les frégates multi-missions. S’agissant en particulier des FREMM, l’amiral a indiqué que « même si elles ne sont pas parfaites, leur potentiel est exceptionnel ».

Interrogé sur le point de savoir si le nombre de frégates de premier rang fixé par le Livre blanc (à savoir 15) lui paraissait mériter d’être revu à la hausse, l’amiral a indiqué que les 17 frégates aujourd’hui en ligne « suffisent à peine » et qu’assurément, « la marine gagnerait en robustesse à en avoir davantage », tout en précisant que ce n’est pas là le premier objectif poursuivi par la marine dans ses travaux actuels.

b. Renforcer la flotte de souveraineté

À ses yeux, la « flotte de souveraineté » présente pour une large part de ses matériels une disponibilité technique opérationnelle « inquiétante », notamment pour les patrouilleurs de haute mer (dits avisos), qui ont près de quarante ans. Cela plaide en faveur de livraisons de bâtiments de surveillance maritime plus tôt que 2023-2024, comme le prévoit le programme BATSIMAR. Les moyens existants sont donc très limités, leur technologie est dépassée (il s’agit de bateaux à simple coque) et ils sont très employés à « combler les trous » pour diverses missions ‒ suivi des manœuvres russes, participation au groupe aéronaval, etc. ‒ ; pour l’amiral, ils sont aujourd’hui « hors normes ».

L’amiral a fait valoir à ce propos que « ce qui se passe en mer de Chine méridionale est certes loin de nos côtes, mais proche de nos enjeux de souveraineté », citant par exemple le cas du canal du Mozambique. En effet, plusieurs État côtiers du canal ont découvert des gisements d’hydrocarbures dans leurs zones économiques exclusives (ZEE), ce qui ne rend pas improbable l’existence de tels gisements dans la ZEE française également ; de telles richesses feraient vraisemblablement l’objet de convoitises, et « les pays de la région, s’ils ne sont pas des puissances militaires majeures, peuvent trouver des alliés... »

L’amiral a souligné que les bâtiments concernés sont à la fois :

‒ légers, tant en tonnage qu’en système d’armes : « leur principal système d’arme, c’est le drapeau » ;

‒ relativement peu coûteux : une soixantaine de millions d’euros, soit dix fois moins qu’une frégate moderne ;

‒ relativement peu sophistiqués, ce qui permet d’envisager de confier leur construction à des entreprises ne disposant pas de la maîtrise de la plus haute technologie.

c. Renouveler les hélicoptères de la marine

Le chef d’état-major de la marine a également signalé comme un point d’attention la situation des hélicoptères de la marine, rappelant que la flotte de liaison est armée en partie par des Alouette III des années 1960 et que la marine avait dû retirer du service ses Nord 262 et ses Super Frelon.

Certes, « il y a le projet HIL, mais les armées ont du mal à faire converger les besoins ». En la matière, la marine « n’a pas besoin d’une endurance énorme : elle a besoin d’un hélicoptère simple », comme le Panther. L’objectif initial ‒ fixé par la LPM 2009-2014 et retardé par la LPM 2014-2019 ‒ consistait à définir un besoin commun aux armées pour un appareil de quatre tonnes, mais même sur ce point, « il n’y a pas d’accord ». Pour l’amiral, « les armées ont besoin de plusieurs types d’hélicoptères, certes tous légers, mais adaptés aux spécificités des différents milieux et des différents emplois ». Les discussions continuent certes, mais sauf à acquérir un appareil « sur étagère », il faudrait aux yeux de l’amiral une solution de transition, « le temps que les vues des armées convergent », pour disposer d’un hélicoptère logistique, « éventuellement d’occasion et pas cher », de la même famille que le Dauphin et le Panther ; d’ailleurs, avec la chute des cours des hydrocarbures qui met en difficulté les sociétés de ce secteur, l’offre d’occasion est aujourd’hui abondante.

d. Engager des travaux en vue du renouvellement du porte-avions

L’amiral a rappelé que le Charles-de-Gaulle « s’arrête en 2040 ». Son remplacement soulève des questions techniques : quelle masse ? Quel type de catapulte ? Les Américains sont passés au catapultage électromagnétique, mais cette technologie suppose des générateurs plus puissants que les nôtres. Quelle chaufferie : nucléaire ou non ? L’amiral a signalé l’enjeu industriel de la question : la maîtrise technologique de la filière est fondamentale, ne serait-ce que parce que la force océanique stratégique en dépend. D’une part, les Britanniques font des porte-avions de soixante mille tonnes à chaufferie classique, « donc ça marche ». Mais d’autre part, pour Areva, « il y a aussi une question d’entretien des compétences après l’arrêt technique majeur du Charles-de-Gaulle et la conception du Barracuda ». En outre, les bénéfices du nucléaire en matière d’endurance sont manifestes, même si le coût d’investissement est plus élevé.

M. Hervé Guillou, président et directeur général de DCNS, a souligné l’importance d’un maintien des compétences industrielles. Selon lui, a contrario, les retards constatés dans le programme Barracuda le montrent : « DCNS est reparti de rien, car six ans après Le Terrible, l’équipe nucléaire a du tout réapprendre ». En effet, pour des économies de court terme, une large part des compétences des ateliers de Cherbourg n’a pas été entretenue, et ce d’autant que la main-d’œuvre en question est rare, « surtout dans le Cotentin, où Flamanville fait concurrence ». En outre, « en cinq ans, les standards ont changé, et ce que l’on tolérait il y a vingt ans n’est plus toujours conforme aux standards actuels ».

M. François Geleznikoff, directeur des applications militaires du commissariat à l’énergie atomique (CEA), a estimé que la propulsion nucléaire n’avait rien d’incompatible avec le catapultage électromagnétique des avions. Au contraire, l’électromagnétisme devrait « améliorer les choses » car les pics d’énergie qu’il demande nécessitent des dispositifs d’accumulation d’énergie dont le chargement peut être lissé dans le temps ; ainsi, avec ce mode de catapultage, « on charge de l’énergie dans le temps, ce qui fait donc moins de pics de besoin qu’avec la vapeur ».

L’amiral Christophe Prazuck a aussi fait état d’interrogations autour de projets étrangers : l’Inde veut construire un troisième porte-avions sous dix ans, ce qui pourrait intéresser les industriels français, « avec de possibles effets d’entraînement ». En revanche, la coopération avec les Britanniques, en ce domaine, offre peu de perspectives. Ils ont choisi le F35, avec un mode de décollage et d’atterrissage qui est incompatible avec celui du Rafale. À défaut d’interopérabilité, on aurait pu imaginer une coopération européenne autour de l’emploi d’un porte-avions en permanence, en synchronisant les rythmes d’emploi opérationnels des porte-avions français et britannique de façon à garantir la disponibilité d’un porte-avions pour l’Europe. Depuis le Brexit, « on continue à y travailler, mais sans l’aspect “Union européenne” ».

Le délégué général pour l’armement a fait valoir que plusieurs éléments ‒ les normes de sûreté, l’amélioration du blindage, etc. ‒ conduisent à penser que le nouveau porte-avions sera nécessairement plus lourd que le Charles-de-Gaulle, faisant observer que tel est déjà le cas des porte-avions britanniques en construction. À ses yeux, il s’agirait d’un programme de l’ordre de quatre milliards d’euros développement compris, le coût marginal d’un second navire étant nettement plus limité.

4. Les autres priorités des armées, directions et services

Aux yeux du rapporteur pour avis, le principal besoin d’investissement des autres directions et services du ministère de la Défense concerne les infrastructures du ministère, notamment son parc immobilier. À titre d’exemple, le chef d’état-major de l’armée de terre a déclaré devant la commission que « le premier point dur est l’infrastructure », qu’il décrit comme demeurant, depuis plusieurs années, « le talon d’Achille de l’armée de terre ». Si certaines « actions “coup de poing” » ont pallié les manques les plus criants ‒ avec le plan d’urgence « condition du personnel » de l’été 2014, l’infrastructure d’hébergement de la force Sentinelle ou le logement modulaire des nouvelles unités des forces terrestres ‒, la situation demeure « globalement préoccupante ».

Tout surcroît de ressources du ministère de la Défense doit donc être mis à profit, en partie, pour améliorer des infrastructures parfois indignes.

II. DE L’ÉMULATION À LA PROGRAMMATION : UNE RÉFLEXION À CONDUIRE SUR DES BASES COHÉRENTES ET RÉALISTES

La perspective d’un surcroît de ressources conduit chacun à faire valoir des besoins légitimes, mais il est loin d’être certain que les ressources suffisent à pourvoir à tous les projets. L’émulation actuelle sera d’autant plus fructueuse que l’on pourra rapidement en clarifier le cadre financier.

A. UNE ÉMULATION LÉGITIME ET FRUCTUEUSE, À CANALISER DANS UN DOUBLE SOUCI DE PRUDENCE ET DE COHÉRENCE

L’expression de besoins, tant qu’elle ne s’inscrit pas dans un cadre clair concernant les ressources envisageables, fait peser plusieurs risques sur la réflexion collective.

1. Un risque de disproportion entre les besoins exprimés et les moyens disponibles

Selon les documents statistiques de l’OTAN, la France consacre déjà 1,78 % du PIB à sa défense ; les évaluations du surcroît de ressources que représenterait l’atteinte de l’objectif de 2 % varient entre six et huit milliards d’euros par an. S’il s’agit d’une somme très conséquente, elle ne suffira pas, à l’évidence, à satisfaire à tous les besoins évoqués plus haut. Cette disproportion entre les besoins et les marges de manœuvre réelles comporte à l’évidence des risques de déception.

Pour le rapporteur pour avis, cette situation appelle un effort de hiérarchisation des besoins dès leur expression.

2. Un risque de répartition plus ou moins homothétique des ressources

Pour le rapporteur pour avis, l’exigence d’efficience de la dépense publique est incompatible avec une répartition plus ou moins homothétique des surcroîts de ressources, qui consisterait, très schématiquement, à répartir une « manne » entre les armées, directions et services du ministère de la Défense à raison de leurs poids relatifs dans les effectifs ou dans les dépenses du ministère.

Certains observateurs des mécanismes de prise de décision en la matière relèvent que des biais de cette nature ne sont pas toujours absents, notant que l’actualisation de la programmation militaire en 2015 a pu être vue comme servant de « match retour » des arbitrages antérieurs, et comme en partie marquée par un souci d’équilibre entre les forces.

Quoi qu’il en soit, il importe que l’allocation de ressources procède toujours d’une logique de projets, découlant des contrats opérationnels.

3. Un risque de persistance des faiblesses actuelles dans la soutenabilité de la programmation militaire

Les représentants de la direction du budget ont fait valoir au rapporteur pour avis que l’actuelle programmation militaire comporte des éléments de « relative insoutenabilité », résultant d’une prise en compte à leurs yeux insuffisante de certains coûts dans la « base » des dépenses du ministère. Ces effets de « débasage » concernent en premier lieu les OPEX : non seulement la provision annuelle, fixée à 450 millions d’euros, s’est toujours avérée inférieure à la réalité de ces surcoûts, mais surtout, selon eux, l’effet d’OPEX intenses et fréquentes sur la durée de vie des matériels (toujours plus longue) ou sur le remplacement des matériels détruits (qui n’est jamais pris en charge au titre des surcoûts) n’est pas assez pris en compte par la programmation. Selon eux, la situation du parc immobilier du ministère peut être analysée au même prisme : la programmation ne tient pas compte du besoin réel de maintien en condition des infrastructures. Un « rebasage » de ces dépenses est donc souhaitable, et les sommes nécessaires représentent une part non négligeable du surcroît de ressources envisagé.

Or il est par nature difficile d’augmenter les ressources d’un ministère sans que cela soit justifié, au moins en partie, par des missions nouvelles. Aussi, pour les représentants du ministère des Finances, l’expérience montre que dans une telle situation, le risque est grand que soient proposés aux autorités politiques de nombreux projets de missions ou de capacités nouvelles, qu’un certain nombre de ces projets soient retenus, que les marges de manœuvre restantes ne permettent pas de « rebaser » dans le même temps des dépenses jusqu’alors sous-estimées, et que perdurent ainsi les mêmes facteurs de relative insoutenabilité de la programmation.

4. Un risque de focalisation sur une logique de moyens, notamment pour le maintien en condition opérationnelle

Certaines des insuffisances capacitaires actuelles ont déjà fait l’objet de financements accrus par l’actualisation de la programmation militaire, qui a accru de 500 millions d’euros les crédits d’entretien programmé des matériels.

En la matière, le rapporteur pour avis s’interroge sur le point de savoir si l’indisponibilité de certains équipements, notamment les hélicoptères, ne tient pas davantage à des problèmes d’organisation que de financement de leur système de maintien en condition opérationnelle.

B. ÉLÉMENTS DE RÉFLEXION EN VUE D’UN NOUVEL EXERCICE DE PROGRAMMATION MILITAIRE

Pour le rapporteur pour avis, il conviendra de s’interroger sur l’ampleur réelle des marges de manœuvre que représente pour la défense un budget de 2 % du PIB, ainsi que sur les délais dans lesquels l’industrie peut répondre aux besoins.

1. Clarifier les hypothèses de calcul du surcroît de ressources

a. Quel périmètre pour « les deux pourcent » ?

Les règles statistiques de l’OTAN n’ont pas la rigueur des normes françaises ou européennes ; pour l’appréciation de ses dépenses de défense, chaque État-membre dispose d’une certaine liberté dans la composition de l’agrégat financier retenu. De même, dans le débat français sur « les deux pourcent », la définition du périmètre des dépenses prises en compte risque fort de constituer un enjeu majeur des travaux interministériels. Les discussions pourraient porter par exemple sur les points suivants :

‒ la retraite du combattant, que, par convention, la France n’inclut pas aujourd’hui dans les agrégats présentés à l’OTAN ;

‒ la gendarmerie : selon la direction du budget, certains États-membres de l’OTAN intègrent le budget de leur gendarmerie dans leurs dépenses de défense, ce qui n’est plus le cas de la France ;

‒ la recherche duale, qui n’est pas prise en compte non plus.

Ces questions de périmètre n’émergent que depuis peu dans le débat public, car « les deux pourcent » ne constituent un thème de discussion de premier rang que depuis peu. Mais le traitement de ces questions revêtira une importance dans les réflexions à venir : selon le périmètre retenu, les marges de manœuvres varient en effet considérablement. Pour le rapporteur pour avis, conserver le même périmètre aurait l’avantage de la clarté dans la présentation de l’effort consenti.

b. Quel calendrier pour « les deux pourcent » ?

« “Les deux pourcent”, oui mais quand ? » : comme l’a fait observer M. Laurent Collet-Billon, délégué général pour l’armement, la réalité des marges de manœuvres dégagées en portant le budget de la défense à 2 % du PIB dépendent largement du rythme de cette hausse. Certains évoquent 2020, d’autres 2022, et d’autres encore 2025.

Selon le rapporteur pour avis, l’horizon d’une législature aurait l’avantage de marquer l’investissement politique de l’effort consenti. En tout état de cause, la trajectoire de « montée en puissance » du budget devra être fixée par un nouvel exercice de programmation militaire.

c. Quelle évolution spontanée des dépenses ?

Pour apprécier les marges de manœuvre que représentent « les deux pourcents » par rapport à la situation actuelle, encore faut-il prendre en compte l’effet d’inertie des programmes d’armement en cours.

Or, comme l’a montré la première partie du rapport, l’équilibre entre commandes et livraisons a tendance à s’inverser à partir de 2016 et 2017. En effet, une part importante des commandes prévues par l’actuelle programmation militaire a été passée dans les premières années de cette dernière ; viennent désormais les années marquées par les livraisons des matériels concernés, qui créent des besoins accrus de crédits de paiement.

En outre, l’évolution spontanée des dépenses de personnels sera supérieure aux prévisions de la loi de programmation militaire actualisée. En effet, si l’actualisation de 2015 avait conduit à renoncer à une large part des réductions d’effectifs programmés, le président de la République a annoncé le 16 novembre 2015 renoncer à toute déflation supplémentaire, ce que les décisions prises le 6 avril 2016 en Conseil de défense ont confirmé. Ainsi, plus de 9 000 postes ont été conservés, ce qui se traduira par un surcroît de besoins de crédits de titre 2. Ces besoins seront d’autant plus importants que certaines mesures indemnitaires, comme la création de l’indemnité d’activité cumulée (IAC), ne produiront leurs effets « en année pleine » qu’à partir de 2017.

Joue en outre l’évolution spontanée des dépenses de pension. En effet, le bulletin statistique de l’OTAN précise que les dépenses de défense considérées comprennent les dépenses de pensions, qui représentent environ huit milliards d’euros par an. Dès lors, comme l’ont fait valoir les représentants de la direction du budget, l’évolution spontanée de ces dépenses de pensions a un fort impact sur l’estimation des marges de manœuvres dégagées par un budget de la défense porté à 2 % du PIB.

d. Quelles dépenses inéluctables ? Les besoins liés à la dissuasion

Le nécessaire renouvellement des composantes de la dissuasion nucléaire « consommera » une large part des marges de manœuvre résultant d’une hausse du budget de la défense à 2 % du PIB.

Le coût de cette opération dépendra bien entendu des options techniques choisies ‒ la commission a d’ailleurs créé une mission d’information sur les enjeux technologiques du renouvellement des composantes de la dissuasion. Mais en tout état de cause, selon les estimations du délégué général pour l’armement, on peut estimer que ces opérations de renouvellement porteront de trois à six milliards d’euros par an le coût annuel de la dissuasion pendant plusieurs années.

2. Définir un rythme réaliste de consolidation capacitaire

Compte tenu des délais dans lesquels les programmes d’armement s’inscrivent et des capacités de production des industriels, la consolidation de nos capacités doit s’inscrire dans un calendrier bien défini.

a. À court terme, investir dans la technologie et contourner l’effet d’inertie des programmes industriels

i. L’effet d’inertie des contrats d’armement

Comme l’a fait valoir le délégué général pour l’armement, « modifier des contrats d’armement ou en passer de nouveaux ne portera pas d’effet avant 2020 ». En effet, pour les programmes d’armement, les crédits de paiement ne sont pas dépensés instantanément.

Ainsi, par exemple, il est difficilement envisageable d’accélérer les livraisons majeures de l’opération SCORPION avant 2020. Certes, la production des Jaguar, Griffon et VBMR légers est en cours, mais une fois ces équipements livrés, « il faut un an d’expérimentations techniques » ; ensuite, un régiment est désigné pour tester le matériel, ce qui prend encore au moins un an, et il faut un certain temps aux industriels pour traiter les difficultés ainsi soulevées. Pour M. Laurent Collet-Billon, « ces étapes sont essentielles, sinon les militaires “rejettent” les matériels, et de ce fait, le programme est un échec, ce qui a failli être le cas pour le programme FELIN ». Ainsi, pour SCORPION, la phase de production « en masse » ne commencera qu’en 2020 ou 2021 : ce n’est qu’à cet horizon qu’une accélération du programme, même décidée en 2017, pourra commencer à porter ses fruits.

ii. Des possibilités de dépenses efficientes à court terme

Si l’accélération des grands programmes d’armement est freinée par ce type d’inertie, d’autres dépenses peuvent être engagées dans les premières années de la hausse du budget de la défense.

Investir dans les nouvelles technologies de défense

La DGA plaide en faveur d’une hausse des crédits des études amont, qui pourraient passer de 730 millions d’euros à un milliard d’euros très rapidement ; « la DGA saurait les dépenser ». Parmi les secteurs où la technologie paraît la plus prometteuse, M. Laurent Collet-Billon a cité les suivants :

‒ la furtivité des avions ;

‒ les moyens de détection et de guerre électronique, notamment pour les radars embarqués : certaines technologies permettraient d’équiper les avions non plus d’un radar de « nez », mais d’un ensemble d’équipements plus performants sur l’ensemble de leur fuselage ;

‒ les radars des avions de mission, dont les progrès permettent d’envisager par exemple qu’avec un seul Atlantique 2, on puisse un jour surveiller quasiment l’ensemble de la Méditerranée ;

‒ l’acoustique sous-marine, domaine dans lequel les capteurs réalisés par Thales n’ont de concurrent crédible qu’aux États-Unis, et pour lequel le design de la FREMM est très adapté ;

‒ les matériaux innovants, pour les blindages.

Combler des lacunes capacitaires par des achats « sur étagère »

Certains achats sur étagère sont envisageables à court terme pour combler certaines lacunes capacitaires. Le délégué général pour l’armement a évoqué à titre d’exemple l’idée d’acquérir des A330 MRTT « directement sur la chaîne de production à Toulouse », voire quelques drones MALE Reaper supplémentaires ‒ à condition toutefois que les conditions posées par les Américains permettent de les employer de façon suffisamment autonome.

b. À moyen terme, sérier les besoins

La réponse à une large part de besoins exprimés par les armées ne peut ainsi se concevoir qu’à moyen terme, et de façon ordonnée compte tenu de ce que seront les marges de manœuvre.

Certains programmes pourraient aussi être accélérés. Tel est le cas de l’opération SCORPION, mais aussi, par exemple, du programme AIF : alors que ce programme s’étale sur près de dix ans, une accélération faciliterait le soutien de l’arme pour les armées ‒ en limitant, par exemple, la période où elles auront à gérer deux chaînes de soutien et d’approvisionnement en chargeurs ‒, tout en permettant de doter rapidement la garde nationale de FAMAS, au moins dans un premier temps.

D’autres programmes nouveaux pourraient être lancés. À titre d’exemple, le rapporteur pour avis note qu’en matière de systèmes d’alerte, la technologie a été consolidée par le système préparatoire infrarouge pour l’alerte (SPIRALE), mais que faute de crédits, on a renoncé en 2013 à lancer un programme d’armement. Pourtant, le besoin capacitaire existe : comme l’a dit M. Laurent Collet-Billon, un tel équipement « viendrait parfaitement en appui du concept actuel de dissuasion », basé sur la riposte. En effet, pour riposter, il faut savoir d’où part un tir, or plusieurs pays ont des capacités de missiles balistiques. Avec un système d’alerte autonome, la France pourrait se passer de l’appui des Américains.

D’autres pistes mériteraient encore d’être explorées, pour la préparation de l’avenir. Ainsi, par exemple, le remplacement du Rafale, aux environs de l’année 2040, doit être préparé. L’Allemagne est l’un de nos rares partenaires à ne pas avoir choisi de s’équiper de F35 : les voies et moyens d’une coopération avec elle mériteraient d’être recherchés. En outre, les premiers résultats du démonstrateur de drone de combat nEUROn semblent attester la pertinence du recours aux drones en complément des avions de chasse classiques.

*

* *

En somme, pour le rapporteur, il importe avant tout de hiérarchiser les besoins, en prenant en compte les cinq impératifs suivants :

‒ la soutenabilité de l’effort de défense dans le budget de la Nation, gage de la crédibilité des engagements annoncés. On a trop vu d’exercices de programmation militaire très prometteurs se trouver exécutés « au rabais » ou passés « au rabot » au fil des lois de finances successives et des ajustements de fin d’exercice budgétaire ‒ et ce, au prix de la cohérence de notre outil de défense et, trop souvent, du moral de ceux qui le servent. Pour être ambitieuse, la programmation militaire devra commencer par être crédible, et donc construite sur des bases soutenables ;

‒ une mise à niveau de l’ensemble des infrastructures de la défense, opérationnelles ou non, dont l’état est plus que préoccupant : bien souvent, il est indigne. Trop longtemps, les crédits d’infrastructure ont servi de variable d’ajustement aux aléas budgétaires. Mais le jeu sur ce levier n’a qu’un temps : à négliger l’entretien de ses infrastructures pour des économies de court terme ‒ et, somme toute, de faible importance ‒, l’État laisse se constituer une sorte de « dette implicite », car les opérations d’entretien que l’on remet à plus tard sont toujours in fine plus lourdes, donc plus coûteuses, et l’on ne peut les reporter indéfiniment ;

‒ adapter nos capacités aux missions de nos armées, en commençant par la résorption des « réductions temporaires de capacités » qui, lorsqu’elles durent, deviennent de véritables lacunes. Les contrats opérationnels sont d’ores et déjà dépassés, et si les armées n’ont pas failli, c’est au prix d’une gestion extrêmement tendue de moyens comptés. Certainement une nouvelle programmation militaire devra-t-elle revoir à la hausse les contrats opérationnels, et à tout le moins faudra-t-il qu’elle donne aux armées les moyens, notamment en équipements, correspondant à ces contrats ;

‒ augmenter les crédits des études amont, qui constituent notre principal levier de préparation de l’avenir et de conservation de notre maîtrise technologique. Leur effet sur la base technologique et industrielle de défense est d’ailleurs double : les succès enregistrés à l’exportation montrent que l’excellence des armements français contribue à notre croissance et à notre balance commerciale. Même en 2013, alors que la programmation militaire était élaborée dans un contexte plus contraint que jamais, ces crédits avaient été préservés. Il faut désormais amplifier l’effort ;

‒ financer le renouvellement des deux composantes de la dissuasion nucléaire, que l’on présente à juste titre comme « l’assurance-vie de la Nation ».

Aux yeux du rapporteur pour avis, « les deux pourcents » sont en quelque sorte le symbole d’un effort accru de la Nation en faveur de sa défense. Cet effort marque une telle inversion de tendance, après des décennies marquées par la recherche des supposés « dividendes de la paix », que la programmation militaire gagnerait à inscrire cet effort dans un cadre temporel plus vaste que d’habitude. Il s’agit :

‒ dans un premier temps, de planifier la hausse des crédits, de lancer ou d’accélérer des programmes majeurs, et de financer les investissements qu’il est possible de faire immédiatement, par exemple dans les études amont, dans certaines infrastructures, ou dans des équipements « sur étagère » ;

‒ dans un second temps, de programmer les livraisons d’équipements en quantité et en qualité cohérentes avec les contrats opérationnels des armées.

L’ampleur de l’effort de la prise en compte des effets d’inertie industriels plaide ainsi en faveur d’une programmation militaire non plus quinquennale, mais décennale.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

I. AUDITION DE M. LAURENT COLLET-BILLON,
DÉLÉGUÉ GÉNÉRAL POUR L’ARMEMENT

La commission de la défense nationale et des forces armées a entendu M. Laurent Collet-Billon, délégué général pour l’armement, sur le projet de loi de finances pour 2017 (n° 4061), au cours de sa réunion du mercredi 12 octobre 2016.

Mme la présidente Patricia Adam. Nous avons le plaisir d’accueillir M. Laurent Collet-Billon, délégué général pour l’armement, qui vient nous présenter les crédits d’équipement de la mission « Défense » du projet de loi de finances (PLF) pour 2017. Après l’université de la défense, j’ai reçu de très nombreux messages commentant les propos que vous avez tenus sur la dissuasion, et nous ne pouvons que nous réjouir que le débat existe.

M. Laurent Collet-Billon, délégué général pour l’armement. Le projet de loi de finances pour 2017 arrive à mi-chemin de l’exécution de la loi de programmation militaire (LPM) couvrant les années 2014 à 2019.

L’exécution du budget de cette année conditionne la prévision pour l’année prochaine. Pour le programme 146 « Équipement des forces » les besoins de paiement actualisés sont estimés à 11,5 milliards d’euros, quand les ressources prévisionnelles de crédits de paiement s’établissent à 10,5 milliards d’euros, répartis entre 9,9 milliards de crédits budgétaires initiaux, réserve levée, 592 millions d’euros de report de crédits de l’année 2015, et 73 millions d’euros de ressources extrabudgétaires liées aux fonds de concours et à l’attribution de produits. Ces crédits ont été réduits de 141 millions d’euros par des transferts vers d’autres programmes de la mission « Défense », 15 millions d’euros ayant notamment été alloués au financement de travaux urgents et réussis sur la soufflerie S1 de l’Office national d’études et de recherches aérospatiales (ONERA) à Modane.

Le niveau des engagements prévus à la fin de l’année atteint 10,6 milliards d’euros. Les programmes à effet majeur représentent près de 50 % des besoins d’engagement. Le niveau des engagements en 2016 sera inférieur aux besoins de paiement car les principaux programmes ont été réalisés au cours de la première période de la LPM ; ainsi, à la fin de l’année 2016, soit à mi-parcours de la loi de programmation, 80 % des programmes à effet majeur auront déjà été lancés.

Comme chaque année, le risque principal de la gestion du programme 146 tient à l’incertitude du devenir des crédits gelés. La réserve de précaution du programme pour l’année 2016 atteint près de 800 millions d’euros, mais le gel ne se limite pas à cette réserve. En effet, la direction du budget a décidé de reporter 590 millions d’euros de crédits de paiement ouverts par la loi de finances rectificative (LFR) de décembre 2015 en 2016, puis a gelé ce montant au printemps dernier. Par ailleurs, un « surgel » supplémentaire, de 470 millions d’euros de crédits de paiement en 2016, a été appliqué au titre de la contribution de la mission « Défense » au financement d’un projet en faveur de l’emploi – tous les ministères ayant été sollicités sur ce point. Les crédits gelés du programme 146 s’élèvent au total à 1,858 milliard d’euros en crédits de paiement, soit environ 18 % de la ressource.

La valeur du report de charges sur le programme 146 dépendra donc des décisions prises pour ces crédits gelés ou mis en réserve. Si tous les gels étaient levés (gel, surgel et mise en réserve), le report de charges dépasserait légèrement 1,3 milliard d’euros en 2016, mais si tous les crédits gelés étaient annulés ou reportés, le report de charges pourrait approcher 3,2 milliards d’euros, montant compromettant l’équilibre de la LPM. La LPM initiale et ses actualisations successives ont prévu de contenir le report de charges à 2,8 milliards d’euros d’ici à la fin de l’année 2019. Compte tenu de l’augmentation des besoins de paiement attendue en 2018 et en 2019, ce résultat ne pourrait être obtenu que si la totalité des crédits actuellement gelés pouvaient être consommés.

Le niveau sans précédent de ces gels de crédits conduit aujourd’hui même à une rupture de paiement, c’est-à-dire que depuis ce matin, les demandes de paiement que nous émettons vers le comptable ne sont plus couvertes en crédits de paiement. Cela arrive un peu précocement, car, l’an dernier, nous n’étions dans cette situation qu’à la fin du mois d’octobre. Je compte sur la représentation nationale pour nous aider à obtenir de Bercy le dégel de la réserve.

L’exécution des études amont au titre du programme 144 « Environnement et prospective de la politique de défense » est conforme, en engagements et en paiements, aux objectifs de la LPM. Si la réserve d’un montant de 65 millions d’euros était levée, nous nous retrouverions avec 681 millions d’euros d’engagements et un peu plus de 700 millions d’euros de paiements, dont 50 millions au profit du régime d’appui pour l’innovation duale (RAPID) à destination des petites et moyennes entreprises (PME) et des entreprises de taille intermédiaire (ETI) innovantes.

Les principales études lancées en 2016 portent sur la poursuite des travaux relatifs à la préparation du renouvellement des missiles balistiques et des sous-marins nucléaires lanceurs d’engins (SNLE), et une nouvelle campagne d’essai du démonstrateur européen de drone de combat (nEURon). Parmi les résultats d’études marquant en 2016, figure la fin de la phase de faisabilité du futur drone aérien de combat (FCAS-DP) réalisée en commun avec les Britanniques.

Le report de charges prévisionnel, dépenses obligatoires comprises, devrait atteindre 150 millions d’euros à la fin de cette année pour les études amont. Les devis et les délais sont globalement maîtrisés, et les indicateurs de la LPM actualisée sont globalement conformes aux objectifs du projet annuel de performance (PAP).

Dans le domaine de la surveillance et du renseignement, un quatrième système de drone Reaper, deux systèmes de drones tactiques, deux avions légers de surveillance et de reconnaissance ont été ou seront commandés d’ici la fin de l’année. Dans le domaine naval, les commandes des bâtiments de soutien et d’assistance hauturiers (les 3e et 4e BSAH), et de 48 missiles Aster destinés aux frégates multi-missions (FREMM) de défense aérienne sont également planifiées. Enfin, dans le domaine terrestre, la commande du nouveau fusil d’assaut, dit arme individuelle future (AIF), vient d’être notifiée à l’industriel allemand HK, à l’issue d’une procédure conduite dans le strict respect des directives européennes que vous avez transposées dans la réglementation française. Par ailleurs, nous avons commandé quatre avions Hercules C-130J conformément à l’actualisation de la LPM, et devons lancer, d’ici à la fin de l’année, la rénovation des missiles de croisière anti-infrastructures, les SCALP-EG.

À la fin de cette année, nous aurons livré un deuxième système de drone Reaper, un lot de missiles M51 – dont le ministre vient de mettre en service opérationnel la version M51.2 – et trois avions A400M, dont le troisième devrait être livré avant la fin de l’année conformément aux engagements pris par Airbus auprès du ministre l’an dernier. Nous avons également livré six NH90, dont deux en version navale et quatre en version terrestre, cinq hélicoptères Tigre en version HAD, 120 stations sol COMCEPT et une frégate de type FREMM.

Plusieurs « urgences opérations » ont été lancées en 2016 pour un montant de 49 millions d’euros : des corps de bombes de 250 kilogrammes, le système Auxylium, réseau de communication destiné à améliorer l’interopérabilité avec les forces du ministère de l’Intérieur dans Sentinelle, des robots de reconnaissance subaquatique, des systèmes projetables de cyberdétection. D’autres commandes, à hauteur de 30 millions d’euros, devraient être passées d’ici la fin de l’année dont des postes de radio. Les « urgences opérations » représentent moins de 50 millions d’euros, ce qui indique que ce que les matériels livrés et déployés sur le terrain répondent aux attentes, preuve que l’on ne s’est pas trompé dans leurs spécifications.

Vous connaissez le montant historique de nos exportations de matériel d’armement en 2015, 16,9 milliards d’euros. Il s’agit d’un changement d’échelle radical par rapport à ce que l’on constatait auparavant : cette somme représente plus du double de celle de 2014, qui était une bonne année, et plus de quatre fois le résultat de certaines années creuses. Cette performance permet à la France de consolider sa position dans le peloton de tête mondial. Les pays du Proche et du Moyen-Orient ont passé les trois quarts des prises de commandes que nous avons reçues, le secteur aéronautique comptant pour plus de 60 % des 16,9 milliards d’euros. Le succès du Rafale a profité au secteur des missiles qui totalise près de 20 % des commandes. Le secteur naval a enregistré 10 % des commandes, le principal contrat étant la vente d’une FREMM à l’Égypte.

En 2016, plusieurs contrats d’envergure ont d’ores et déjà été conclus : un satellite de télécommunications pour 600 millions d’euros avec l’Égypte, des hélicoptères Caracal avec le Koweït pour plus d’un milliard d’euros, et, avec l’Inde, 36 avions Rafale et leurs armements associés pour un montant de l’ordre de huit milliards d’euros ; en outre, l’Australie a choisi en avril dernier DCNS, plutôt que ses concurrents japonais et allemand, comme partenaire privilégié pour la conception de ses 12 futurs sous-marins. La décision australienne consacre l’excellence de l’offre industrielle française qui s’appuie sur les savoir-faire acquis dans les SNLE et les sous-marins nucléaires d’attaque (SNA), principalement le Barracuda. Nous continuons d’œuvrer pour concrétiser d’autres projets majeurs concernant des hélicoptères, des sous-marins et des bâtiments de surface.

La DGA emploie 9 600 personnes, les décisions du président de la République après les attentats de novembre 2015 ayant permis d’alléger de 86 postes la baisse des effectifs prévue, cette déflation s’élevant à 130 emplois pour deux ans. La masse salariale atteint 740 millions d’euros, mais je suis préoccupé par la faible compétitivité des salaires offerts par l’État par rapport à ceux du secteur privé. Il faut réfléchir aux mesures à prendre pour rester compétitifs en matière de recrutement des ingénieurs civils, notamment dans des domaines spécifiques comme la cyberdéfense.

Dans le budget pour 2017, les besoins de paiement pour le programme 146 se montent à 10,4 milliards d’euros et les ressources en crédits de paiement s’établissent à 10,13 milliards d’euros. Ces ressources se répartissent entre 10 milliards d’euros de crédits budgétaires et des prévisions de ressources extrabudgétaires atteignant 74 millions d’euros. Sauf aléa budgétaire, le report de charges devrait être dégradé d’environ 200 millions d’euros, ce qui n’est pas très conséquent.

Les besoins d’engagement s’élèvent à 11,6 milliards d’euros, ce niveau élevé s’expliquant par la commande de quelques « gros » équipements : un sous-marin Barracuda, des véhicules Jaguar et Griffon dans le cadre du programme Scorpion, l’acquisition des véhicules légers tactiques polyvalents (VLTP) et la préparation du segment sol Syracuse 4. Ces quatre derniers engagements représentent 2,5 milliards d’euros sur les 7,6 milliards d’euros de besoins d’engagement pour les programmes à effet majeur.

Dans le programme 144, les ressources consacrées aux études amont sont de l’ordre de 857 millions d’euros en autorisations d’engagement et de 720 millions d’euros en crédits de paiement. Le PLF pour 2017 se caractérise par une forte hausse du niveau d’engagements, liée au lancement de la phase suivante du programme FCAS-DP en coopération avec le Royaume-Uni. Ce niveau d’engagements reste cohérent par rapport au flux de paiement annuel moyen de 730 millions d’euros, prévu par la LPM initiale et actualisée pour la période allant de 2014 à 2019. Les autres études amont se concentreront sur la maturation technologique du futur missile de longue portée, en préparation des programmes missile antinavire successeur de l’Exocet et missile de croisière successeur du SCALP-EG. Nous travaillons en coopération avec le Royaume-Uni dans ces domaines. Nous conduisons également des études relatives à la préparation du renouvellement des missiles balistiques et des SNLE, ainsi que sur la cybersécurité.

Parmi les commandes emblématiques, on peut citer un sous-marin d’attaque Barracuda, la rénovation de 45 Mirage 2000D, 15 nouveaux pods de désignation laser, 319 véhicules Griffon, deux bâtiments multi-missions (B2M) et un patrouilleur léger guyanais. Nous prévoyons de livrer neuf hélicoptères NH90, six hélicoptères de combat Tigre, 379 camions porteurs polyvalents terrestres, trois A400M, une FREMM et deux B2M.

Les contrats nouveaux à l’exportation comportent dorénavant un volet de prestations étatiques important, tant dans la préparation des contrats eux-mêmes que dans leur exécution. Cette situation nouvelle, rencontrée depuis peu du fait des demandes des États clients, tranche avec le soutien à l’exportation pratiqué jusqu’alors. Elle constitue une tendance de fond appelée à s’inscrire dans la durée. À ce titre, le contrat indien nécessitera une implication très forte des personnels de la DGA pour accompagner le client lors du développement des avions, dont le standard sera différent de celui de la France, et plus largement pour surveiller l’exécution du contrat. Les armées seront également fortement impliquées.

Les effectifs de la DGA ne permettent pas, en l’état, d’absorber la charge des contrats exports en préparation au profit des différents clients tout en maintenant l’ensemble des activités au profit des programmes nationaux. Un renfort est ainsi nécessaire, estimé à 300 emplois sur la période de la LPM, dont une grande partie dans les mois qui viennent.

Même si la DGA est, dans le temps, la première confrontée à ce besoin du fait de son implication dans la préparation des contrats, les armées seront également sollicitées le moment venu. De fait, nous présenterons avec elles une feuille de route pour l’accompagnement des exportations de défense.

J’observe que la gestion de cet effort ne relève pas d’une question uniquement de défense dès lors que les retombées économiques (emplois, recettes fiscales) et diplomatiques des exportations d’armement en dépassent largement le cadre. Il serait ainsi légitime de partager l’effort avec les autres ministères. De plus, nous fournissons des prestations d’accompagnement des exportations de défense dont les industriels retirent du chiffre d’affaires, des emplois et des bénéfices, il est donc normal que nous les facturions afin de contribuer à compenser les dépenses encourues par la défense. Nous incitons nos amis des armées à demander la même chose, même si les industriels sont réticents.

Je souhaite insister en conclusion sur ma préoccupation principale qui tient à la fin de gestion et au gel de 1,858 milliard d’euros. Cela conditionne entièrement l’exécution du budget de 2017. Il ne nous reste plus de crédits de paiement le 12 octobre. De ce fait, nous devons différer la notification des contrats nouveaux jusqu’au début du mois de décembre.

Mme la présidente Patricia Adam. Notre commission appuiera votre demande pour que les fonds soient débloqués le plus rapidement possible.

Mme Marianne Dubois. Monsieur le délégué général, les missiles Crotale R440 arrivent en fin de vie et ne peuvent plus être rénovés. Les dotations en missiles MVT1 nécessitent d’être remis à neuf au bout de quinze ans, soit en 2021. Le Livre blanc ne confirme pas le maintien de la composante de courte portée, et le calendrier de décision sur ce sujet risque d’avoir un impact négatif sur le mode opérationnel, sur le site de Fleury-les-Aubrais où sont produits les Crotale et sur les clients étrangers qui envisagent de prolonger la durée de vie de leur système. Où en sont les réflexions sur la composante de courte portée Crotale ?

M. Jean-François Lamour. Monsieur le délégué général, quelle est la position de la DGA sur la fourniture à l’armée de l’air du solde de la tranche 4 du contrat Rafale et du démarrage de la tranche 5 ?

Quelle est votre réflexion sur le passage du standard F3R au F4 pour le Rafale ? Nous avons obtenu de grands succès à l’exportation, et l’on souhaite qu’ils se reproduisent dans les années à venir.

Le général Jean-Pierre Bosser a évoqué une accélération du processus de remplacement du véhicule de l’avant blindé (VAB) par le véhicule blindé multi-rôles (VBMR) en laissant entendre que l’industriel pourrait, sous certaines conditions, y faire face. Quel est votre sentiment ? J’ai visité le 35e régiment d’artillerie parachutiste (RAP) à Tarbes qui dispose d’un parc de 40 VAB, mais qui ne pourra plus en utiliser que la moitié l’année prochaine, à cause d’un problème d’extincteur moteur. Est-il possible d’obtenir plus rapidement les VBMR ?

Mme Marie Récalde. La notification du standard F4 du Rafale pourrait-elle avoir lieu en 2017 ? Le pari à l’exportation est gagné, mais il ne faudrait pas être entravé par des difficultés de livraison ; dans cette optique, il convient de ne pas négliger les études amont.

Où en est l’avancement du projet de drone de moyenne altitude et de longue endurance (MALE) franco-germano-italo-espagnol ? 

M. Jean-Jacques Candelier. Le légendaire fusil d’assaut FAMAS équipe nos soldats depuis 1979 et, soi-disant dépassé, sera remplacé par le fusil HK 416 allemand. On assiste, depuis dix à quinze ans, au démantèlement de notre industrie d’armement, et on ne peut plus avoir de fusils français. Il s’agit d’une erreur capitale, d’autant plus qu’a été signé un contrat d’entretien pour le HK 416 de trente ans !

Estimez-vous, Monsieur le délégué général, que le recours de l’industriel belge Herstal sur les modalités de l’appel d’offres soit fondé ? Pourquoi, à l’instar des Indiens, le Gouvernement français n’exige-t-il pas que le maintien en condition opérationnelle (MCO) du futur fusil reste en France ? Avons-nous retenu les leçons de nos erreurs de sous-traitance des munitions du FAMAS ? Une modernisation du FAMAS, plus économique et plus durable, était-elle inenvisageable ?

M. Laurent Collet-Billon. Madame Dubois, la LPM ne fait aucune mention du remplacement ni même de la modernisation du Crotale. Un pays oriental s’était déclaré intéressé par une actualisation de ses systèmes d’armes terrestres, mais il n’a pas donné suite. Dans le cadre de la modernisation des porteurs, notamment celle des frégates, d’autres solutions existent, comme des systèmes d’armes de courte portée reposant sur des missiles d’interception, de combat et d’auto-défense (MICA) à lancement vertical, ou des missiles MISTRAL. Il faudra débattre de ce sujet lors de l’élaboration de la prochaine loi de programmation militaire, voire lors de l’éventuelle actualisation de la présente après l’élection présidentielle. Les frégates La Fayette (FLF) seront dotées de capacités de détection acoustique sous-marine et l’autoprotection des bâtiments sera améliorée, afin de permettre à la marine de tenir le format de quinze frégates de premier rang en attendant l’arrivée de la première frégate de taille intermédiaire. Madame Dubois, ce dossier reste donc à étudier.

Monsieur Lamour, plusieurs questions se posent sur les tranches 4 et 5 des Rafale. Quand faut-il développer le standard F4, devant succéder au standard F3R ? Ce nouveau standard comportera des améliorations des logiciels de détection du radar à antenne active et des contre-mesures électroniques de l’avion ; la capacité d’emport d’armes se trouvera également accrue, ce qui permettrait d’y installer le MICA de nouvelle génération. L’objectif est de disposer d’une flotte dont tous les appareils auraient le même standard, ne serait-ce que pour faciliter le soutien logistique et la mission des pilotes. La LPM prévoit la commande du standard F4 en 2018, des travaux préliminaires devant être entrepris l’année prochaine. Dans l’industrie, certains aimeraient voir débuter le standard F4 dès 2017, notamment à cause d’un problème de plan de charge dans le bureau d’études. Il serait malsain de faire dépendre la viabilité du bureau d’études de Dassault du standard F4, d’autant que le développement du nouveau standard des avions pour l’Inde prévoit l’utilisation d’équipements non européens et dont l’intégration à conduire représentera une charge significative. En 2017, le nouveau Gouvernement décidera de l’opportunité d’accélérer ou non la notification du standard F4.

La fin de la livraison de la tranche 4 aura lieu dès que possible, en fonction du calendrier des exportations et des souhaits de l’armée de l’air et de la marine. La chaîne de production du Rafale à Mérignac pourrait monter jusqu’à trois appareils par mois. Il est hors de question de laisser traîner la queue de production de la tranche 4 au-delà du raisonnable car cela créerait trop de problèmes d’obsolescence.

Nous pourrions accélérer le calendrier de production du programme SCORPION, qui a été défini en fonction des disponibilités financières de la LPM et de sa projection jusqu’en 2025. Si l’on disposait de crédits supplémentaires, on parviendrait techniquement et industriellement à accélérer la production, ce à quoi je ne serais pas hostile. Il convient de mettre en perspective l’accélération potentielle du programme SCORPION, comprenant d’excellents véhicules que nous parviendrons sans doute à exporter, avec le coût d’entretien des VAB et l’indisponibilité de certains véhicules qui subissent un acharnement thérapeutique. Il est prévu de produire de l’ordre de 24 véhicules Jaguar par an, pour une période de dix ans, et il n’y a pas de doute que l’on puisse faire mieux. La limite à l’accélération du programme SCORPION tient dans notre souhait de terminer proprement les développements et les qualifications des matériels avant le démarrage de la production.

Madame Récalde, le contrat du drone MALE européen est parti, l’Espagne s’étant jointe au projet au mois d’août dernier. Plusieurs difficultés peuvent survenir pour ce programme. Tout d’abord, si l’on souhaite utiliser ce type de drone en toute sécurité aéronautique au-dessus d’une zone très peuplée, les règlements de l’aéronautique civile imposent de le doter de deux moteurs, ce qui ferait exploser son prix. Nous avons déjà échoué cinq fois dans le passé à cause du coût du projet, si bien qu’il faut veiller à cet aspect ; nous avons prévenu nos partenaires de ce risque en insistant sur le fait que si les capacités d’utilisation n’étaient pas comparables à celles du Reaper, on ferait face à un vrai obstacle. Par ailleurs, nous sommes vigilants quant à l’entrée de nouveaux partenaires dans le programme, un projet à quatre pays nous semblant déjà suffisamment difficile à conduire.

Monsieur Candelier, après une réflexion poussée, il a été décidé d’arrêter la fabrication du FAMAS il y a longtemps, et les ateliers qui le produisaient ont fermé il y a vingt ans. Je ne partage pas votre jugement sur le démantèlement de l’industrie d’armement. Le choix du fusil allemand HK 416 résulte d’une mise en compétition d’industriels, d’une évaluation commerciale et d’une longue étude technique et opérationnelle. Plusieurs centaines de milliers de cartouches ont été tirées pour vérifier les performances initiales de l’arme et leur évolution au cours des années. Le HK 416 est fabriqué à partir d’un acier Aubert & Duval, conçu aux Ancizes. Il faut produire entre 115 000 et 120 000 armes, ce chiffre pouvant varier en fonction du format des armées et de la manière dont sera dotée la Garde nationale. L’évaluation initiale du coût du programme s’établissait à 250 millions d’euros, mais nous avons obtenu un prix très sensiblement inférieur. Je vous rappelle que, de notre côté, nous avons vendu à l’Allemagne un troisième satellite d’observation optique dans le cadre du programme multinational d’imagerie spatiale pour la surveillance, la reconnaissance et l’observation (MUSIS). Le HK 416 est en service dans les forces spéciales qui l’apprécient tout particulièrement. L’industriel belge FN Herstal a déposé un référé devant le tribunal administratif puis un appel devant la cour administrative d’appel qui ont été tous deux rejetés. Le contrat est donc notifié et s’exécute, les premières armes devant être livrées en 2017.

M. Jean-Michel Villaumé. Monsieur le délégué général, quel bilan dressez-vous de l’A400M ? Que pensez-vous de ses déboires, de son coût et des retards du programme ?

Pourriez-vous nous faire un point sur le renouvellement des satellites Syracuse ?

M. Gilbert Le Bris. Monsieur le délégué général, en tant qu’ingénieur de l’armement et chef de la DGA depuis près de neuf ans, vous êtes le mieux placé pour répondre à ma question sur le transfert de technologies ou de services lié à des ventes à l’étranger. Nous avons subi une déconvenue avec la Pologne au sujet des hélicoptères Caracal et les négociations sur les Rafale ont été très difficiles en Inde, si bien que je me demande si les industriels ne sous-estiment pas les capacités d’innovation de certains pays lorsqu’ils affirment que notre avance technologique est suffisante pour leur proposer des transferts sans craindre de les aider à nous concurrencer.

Quel est l’impact des succès à l’exportation sur les ressources humaines à la DGA ?

M. Yves Fromion. Monsieur le délégué général, pourriez-vous nous dire un mot sur le rapprochement entre Krauss-Maffei Wegmann (KMW) et Nexter Systems ?

A-t-il été envisagé de confier l’entretien et le MCO du HK 416 à un industriel français ou les Allemands en auront-ils la responsabilité ?

La négociation avec l’Inde s’était ouverte sur 126 Rafale. La commande des 36 appareils est-elle définitive ou peut-on espérer l’augmenter ?

La mode actuelle consiste à débattre de l’objectif de consacrer 2 % des dépenses budgétaires à la défense. Quelle serait l’enveloppe nécessaire pour accélérer la mise en œuvre du programme des Griffon et des Jaguar ? Vous avez affirmé que le programme SCORPION serait qualifié en 2020, mais cette durée de quatre ans pour qualifier les deux types de véhicules me semble bien longue au regard de l’urgence résultant du délabrement des VAB. Pourrait-on réduire ce délai ?

M. Philippe Vitel. Il est prévu de moderniser les quatre AWACS que nous possédons. À quelle date envisagez-vous la fin de ce programme ?

S’agissant des drones tactiques, prévoyons-nous toujours de remplacer 20 Sperwer par 14 Patroller et d’acquérir 12 Reaper ? Le calendrier de ces programmes est-il respecté ?

Pourquoi les quatre pays européens engagés dans le projet du drone MALE européen ne contribuent-ils pas à parts égales à la réalisation des études ? Les Allemands y consacreraient 18,6 millions d’euros, alors que les trois autres ne paieraient que 13,8 millions d’euros chacun. Cette répartition ne laisse-t-elle pas présager une mainmise des Allemands sur ce programme ?

L’étude de faisabilité du système de combat aérien du futur (SCAF), réalisée avec nos amis britanniques, devait être livrée à la fin de l’année 2016. Le calendrier est-il tenu ? Où en sommes-nous aujourd’hui dans ce projet représentant plus de deux milliards d’euros ?

Plusieurs entreprises se lancent dans la construction de ballons, qui peuvent être utilisés pour surveiller les frontières et les camps militaires, mais également pour mener des missions de renseignement et de reconnaissance. Quel avenir leur voyez-vous ?

M. Laurent Collet-Billon. Monsieur Villaumé, le lancement de la phase de réalisation de Syracuse 4 a eu lieu à la fin de l’année 2015. La DGA a notifié le contrat de réalisation du segment spatial à deux industriels, Airbus Defence and Space et Thales Alenia Space. On prévoit de débuter la réalisation du segment sol à la fin de l’année 2017 et de mettre en orbite des satellites en 2021 et 2022. Il fut compliqué de mettre ce programme au point en raison des querelles entre les industriels français opérant dans les satellites de télécom, nourries par l’avance de l’un d’entre eux dans la propulsion ionique des plateformes. Aujourd’hui, une paix armée règne sous la haute autorité de la DGA et le programme se déroule normalement. Cette affaire nous a coûté beaucoup d’énergie, mais on y attache beaucoup d’importance car on connaît très précisément la date de la fin de vie des satellites. Les nouvelles générations de satellites disposeront de capacités d’antibrouillage très fortement accrues. Seront-ils exportables ? La question se pose, car il s’agit de « bêtes de course » dont le prix est élevé et qu’il convient de ne pas vendre à n’importe quel pays au vu de la qualité supérieure de l’antibrouillage.

À l’été 2015, M. Enders s’est engagé auprès M. Jean-Yves Le Drian, ministre de la Défense, à livrer avant la fin de l’année 2016 six avions A400M dotés de capacités tactiques initiales, concernant l’autoprotection, les terrains sommaires et l’aérolargage. Trois de ces avions doivent être mis à niveau dans les usines du constructeur à Getafe, près de Madrid, et les trois autres seront neufs. Quinze jours après l’entretien entre MM. Enders et Le Drian est survenue l’affaire des boîtes relais des réducteurs d’hélices (PGB – Propeller Gear Box) qui nous occupe depuis un certain temps et a connu de nombreux remous.

Aujourd’hui, une solution de changement du boîtier réducteur d’hélice, sans déposer le moteur, a été validée par les nations. On sait en effet à présent changer ce réducteur sans démonter complètement le moteur, ce qui permet de réduire la durée d’immobilisation de l’avion d’une vingtaine de jours à quelques jours environ.

Ensuite, une solution transitoire a été définie sur les actuelles PGB, qui consiste à réaliser une modification nommée truncated plug, en raccourcissant un des pignons ce qui permet de déplacer les fréquences de résonance de la boîte relais. Cette modification est validée, qualifiée, et certifiée par l’Agence européenne de la sécurité aérienne (AESA) depuis le 7 juillet dernier. Cette solution nous permet de décaler la première inspection de chaque boîte relais, à 650 heures au lieu de 50 heures actuellement. En même temps, la définition de la solution définitive est en cours, une solution qui doit nous porter à quelques milliers d’heures. Nous verrons cela ultérieurement ; la priorité pour l’instant est de remettre la flotte en état de vol.

Nous faisons ce qui est nécessaire pour être les premiers bénéficiaires des boîtes relais modifiées, pour une raison très simple, c’est que nous sommes les premiers utilisateurs de l’avion, des utilisateurs massifs et des utilisateurs en opérations.

Nous allons sortir d’une situation pénible. Cela permettra-t-il à M. Enders de respecter son engagement vis-à-vis du ministre à la fin de l’année ? Il reste encore deux mois et demi pour le savoir. Nous le souhaitons car cet avion, quand il vole en Afrique, représente un apport tout à fait remarquable. Dernièrement ont eu lieu les premiers posés tactiques sur des terrains non préparés : l’avion s’est révélé bien meilleur sur ces terrains qu’un C-130.

Il faut que l’industriel trouve les moyens d’assurer la production au rythme prévu dans le contrat, dans des conditions de qualité normales. Or, aujourd’hui, nous ne sommes pas certains que le rythme sera celui qui est attendu par les nations. Je pense néanmoins que la situation à la fin de l’année sera moins terrible que celle en début d’année.

Sur les transferts de technologie, Monsieur Le Bris, nous faisons extrêmement attention. Dans les derniers contrats Rafale, par exemple, il n’y a pas de transfert de technologie du tout. Ce qui était prévu dans le cadre des 126 Rafale, en Inde, n’a pas lieu sur les trente-six ; ce sont des offset qui regardent les industriels mais ne concernent pas des transferts de technologies propres au Rafale.

Je n’ai pas de commentaire à faire sur l’annulation du marché d’hélicoptères par la Pologne. Le niveau d’offset était très important parce que la Pologne faisait valoir que l’appel d’offres concernant les hélicoptères avait été lancé avant son entrée dans l’Union européenne et que, par conséquent, les règles prohibant les offset au sein de l’Union ne s’appliquaient pas. S’il y a un nouvel appel d’offres, les règles de l’Union devront forcément s’appliquer. Je suis sûr que le ministre de la Défense et ses équipes seront extrêmement attentifs à la manière dont les choses se passeront.

S’agissant de l’Inde, les trente-six Rafale sont une « tête de gondole ». Quand ils les auront essayés, ils les apprécieront. La facilité de mise en œuvre de l’avion est exceptionnelle, le nombre de personnes nécessaires pour la mise en œuvre est très réduit par rapport à ce que nous avons pu observer sur des avions américains ou russes. Les performances du radar sont extraordinaires. Ce lot de trente-six appareils a été conçu comme une réponse immédiate à un besoin réel des forces indiennes. L’acquisition de ces avions leur permet de constituer un noyau autour duquel les Indiens pourront construire une force aéronautique complémentaire moderne. Ils nous connaissent déjà car ils possèdent une flotte de Mirage 2000, en cours de modernisation, et qui fonctionne très bien. Je pense donc que nous irons assez largement au-delà des trente-six. Dans ce cas se posera peut-être de nouveau la question du transfert d’une chaîne d’intégration en Inde.

L’évolution du dossier KNDS, Monsieur Fromion, est bonne. Les deux équipes s’entendent de mieux en mieux et l’on constate des débuts de coordination sur l’exportation : KMW accepte de ne pas aller sur des marchés où nous proposons des équipements Nexter. Le futur char lourd sera l’occasion de s’assurer que l’on obtient effectivement le meilleur des savoir-faire français et allemands. Je souligne également le bon fonctionnement du conseil de surveillance de l’ensemble, avec une personnalité active et très efficace en son sein, Antoine Bouvier.

M. Gilbert Le Bris. Je n’ai pas eu de réponse à ma question concernant l’impact des bons scores de l’export sur les ressources humaines de la DGA.

M. Laurent Collet-Billon. Au total, 600 personnes seront nécessaires, au vu des contrats et prospects actuels, pour tenir compte de l’évolution de l’implication de l’État dans les contrats d’ici 2025, dont 300 d’ici à la fin de la loi de programmation, en 2019. L’accent est mis sur le recrutement d’ingénieurs de haut niveau. La question, qui sera généralisée à l’ensemble de l’action de l’État, est de savoir comment compenser la charge que représente pour l’État l’action de ces personnels-là au profit de l’industrie française. Concrètement, au-delà du rôle naturel de l’État sur des prospects, telle la démonstration de la qualité des équipements proposés, la réalisation d’actions directement liées à un contrat déterminé représente des prestations concrètes pour la DGA qui doivent être financées.

L’accélération du programme SCORPION est un travail que nous allons conduire avec l’état-major de l’armée de terre pour commencer. Le flux de crédits de paiement prévu aujourd’hui est de l’ordre de 700 millions d’euros par an à partir de 2020. Comment peut-on augmenter ce flux, et quels sont les crédits de paiement que nous pouvons récupérer du fait de l’absence de MCO sur des véhicules très détériorés ? Il faut calculer cela et vérifier que l’on peut atteindre par exemple une augmentation de 30 % par an.

M. Yves Fromion. J’ai souligné qu’il fallait quatre ans pour qualifier le programme. N’est-ce pas un peu long ?

M. Laurent Collet-Billon. Les véhicules ne sont pas encore développés. Ce que vous avez vu à Eurosatory, ce sont des maquettes. L’expérience montre que nous avons intérêt à soigner la préparation de l’introduction des matériels dans les forces, car celles-ci rejettent psychologiquement le matériel qui est mal né, et il n’y a pas de retour en arrière possible. Nous préférons que cette étape soit un peu complexe et longue car elle nous permet de démontrer la bonne adéquation du matériel à ce qu’attendent les personnels des armées, en l’occurrence les sous-officiers et les militaires du rang.

M. Yves Fromion. Pour le VBCI, cela avait été beaucoup moins long.

M. Laurent Collet-Billon. Non, cela avait été beaucoup plus long, car il s’était produit un bogue énorme en plein milieu du développement. Le programme avait débuté en 2000 et les premières livraisons ont eu lieu huit ans après. Mais les matériels ont pu partir en Afghanistan dans la foulée ; c’est à cela que sert l’expérimentation.

Le calendrier pour les AWACS, Monsieur Vitel, prévoit la livraison du quatrième avion en 2016. La rénovation de l’avionique est lancée et une provision prévue à cet effet.

Selon moi, la question qui se pose désormais porte davantage sur ce qui viendra après l’AWACS. Et une question similaire se pose sur l’E-2C : qu’est-ce qui succédera à l’E-2C à bord du porte-avions ? Il s’agit de matériel américain et je ne crois pas que nous ayons la surface financière, en termes de séries, pour développer nos propres produits. Par ailleurs, l’orientation future devra-t-elle être encore la voie aéroportée ou bien des porteurs divers, drones, avions légers de surveillance et de reconnaissance (ALSR), ballons stratosphériques, tous mis en réseau ? Ce débat s’amorce à l’OTAN et les Américains arrivent évidemment avec des programmes déjà ficelés. C’est un point clé pour nous car l’AWACS est un pivot de nos opérations.

En ce qui concerne les drones, nous avons toujours en perspective quatorze vecteurs Patroller - système de drone tactique - et douze Reaper. Le dernier Reaper sera livré avant la fin de la LPM, dans un standard moderne permettant de voler facilement sur la France. Pour le Patroller, le choix industriel issu de la compétition, Safran, n’était pas le plus probable a priori, mais leurs conditions de performance et de prix l’ont emporté. Il est prévu que le premier Patroller soit livré à l’armée de terre début 2019. Un des points forts du Patroller est la boule optronique Safran, qui apporte des performances remarquables s’agissant de l’identification des objectifs.

En ce qui concerne le SCAF, la phase de faisabilité se termine et nous préparons le contrat de la phase suivante, qui va démarrer en 2017. Le Premier ministre britannique et le président de la République ont indiqué lors du sommet d’Amiens que chaque pays dépenserait de l’ordre d’un milliard d’euros pour la phase de démonstration. Reste à voir si d’autres pays européens seront accueillis, car il ne faut pas se cacher que les développements seront extrêmement onéreux. Il faut développer à la fois un véhicule aérien, de nouveaux senseurs, de nouveaux armements qui se montent en soute, et ainsi de suite ; on refait un système aérien complet, avec en outre de l’intelligence artificielle. C’est un travail vraiment passionnant.

On ne sait pas ce que sera le drone européen MALE. La phase en cours, je l’ai dit, est la phase de spécification, qui permettra de connaître la complexité du produit et donc au final son coût.

M. Philippe Vitel. À ce sujet, je vous lis une note : « Le ministère allemand de la Défense a pris la direction de l’étude et versé une enveloppe de 18,6 millions. » Est-ce que nous n’allons pas nous faire avoir ?

M. Gwendal Rouillard. Pour le programme de frégate de taille intermédiaire (FTI), êtes-vous un partisan du MDCN et de l’Aster 30 ? Pour BATSIMAR, beau sujet, êtes-vous partisan d’avancer le programme, conformément à la volonté réaffirmée ce matin par le chef d’état-major de la marine ici-même ? Où en sommes-nous de l’éventuelle filière française de bouées acoustiques, un sujet qui, je sais, vous préoccupe beaucoup ? Enfin, sur le MCO du NH90, considérez-vous que le consortium initial, NHI, soit toujours pertinent, au vu des délais constatés pour remplacer telle ou telle pièce et le nombre de coups de fil à passer dans telle ou telle capitale européenne ?

M. Pierre Lellouche. Ma première question est financière. Si j’ai bien compris, 1,8 milliard d’euros sont bloqués, c’est-à-dire plus de 10 % du budget d’équipement prévu.

M. Laurent Collet-Billon. Et même 18 %.

M. Pierre Lellouche. Ça fait beaucoup. Lors d’un conseil de défense au mois d’avril, il a été décidé de dépenser trois milliards supplémentaires. Un premier milliard doit être trouvé l’année prochaine mais n’est pas encore totalement budgété, et les deux autres milliards sont pour le prochain gouvernement. Si, donc, je fais la somme des efforts annoncés par le Gouvernement, il en manque 1,8 milliard cette année, un autre milliard reste théorique pour l’année prochaine, et deux milliards sont pour le prochain Gouvernement. C’est cela, l’effort de défense supplémentaire après les attentats, ou bien je n’ai pas compris ?

Plusieurs décisions ont été prises à l’OTAN sur les programmes antimissiles. Il existe un certain nombre d’États proliférateurs à peu de distance de l’Europe, l’Iran et quelques autres. La France mène-t-elle, dans le cadre de la modernisation prévue de sa force de frappe, une réflexion sur les antimissiles au-delà des premières capacités offertes par l’ASTER ?

Enfin, la question des drones armés. Vous avez rappelé dans quelles conditions notre pays a malheureusement fait l’impasse technologique sur ces systèmes. Le Reaper peut-il être armé ou faut-il attendre un hypothétique système MALE, qui n’arriverait de toute façon pas tout de suite et n’est pas budgété ?

Mme Isabelle Bruneau. En tant que rapporteure pour avis du programme 144, je me félicite du maintien des crédits de ce programme à une moyenne annuelle de 730 millions, ainsi que s’y était engagé le ministre de la Défense. Dans un environnement stratégique en mutation, ce programme revêt une importance accrue car il prépare l’avenir de la défense.

L’ONERA, dans ce cadre, apporte une contribution déterminante à notre avenir aéronautique et spatial, militaire et civil, et je salue l’intervention du ministre de la Défense qui a permis en 2016, par une contribution de 20 millions d’euros, dont cinq millions en réserve, de sauver la soufflerie stratégique de Modane menacée d’effondrement. Mais l’ONERA, qui a fêté dernièrement ses soixante-dix ans, est loin d’être assurée de son avenir et de son maintien à un niveau d’excellence, malgré des efforts de réorganisation interne et un haut niveau de commandes de tiers. Le budget prévu pour 2017 – 105 millions d’euros – est en effet identique à celui de 2016, ce qui ne lui permettra pas de faire face à certaines échéances.

Que comptez-vous faire pour permettre la relocalisation des emprises de Meudon et Châtillon, dont la vente ne couvrira vraisemblablement pas le transfert, le déficit étant évalué autour de 40 millions d’euros ? Par ailleurs, quelles sont vos intentions pour le plan ATP de remise à niveau de l’ensemble des souffleries, estimée à 218 millions d’euros sur onze ans ?

M. Alain Rousset. La DGA est notre seul outil de politique industrielle. Nous importons beaucoup de technologies critiques de l’extérieur, des technologies pour lesquelles nous sommes ainsi dépendants de l’Asie, des États-Unis ou d’autres pays. Dans l’état actuel du monde, où les frontières remontent, la DGA conduit-elle une analyse sur ces technologies critiques ? Je pense en particulier aux technologies informatiques. Je ne suis pas sûr que l’on soit aujourd’hui capable en France de faire une carte. Je pense également à certains logiciels ou encore à certains matériaux. Conduisons-nous une veille des technologies critiques concernant notre armement et ses mutations dans l’avenir ?

Mme Geneviève Fioraso. Je souhaite poser des questions sur les satellites, en commençant par les capacités d’observation à visée stratégique, comme l’alerte nucléaire. Un démonstrateur a prouvé que les compétences techniques nécessaires pour le réaliser étaient présentes. Cela rejoint la question de M. Lellouche sur nos capacités à contrer des tirs de missile hostiles. Ce projet est sans cesse repoussé pour des raisons budgétaires. Est-on en mesure de le planifier ? Il me semble que, dans un environnement mondial hostile, c’est un projet nécessaire.

En ce qui concerne la très haute résolution de nouvelle génération, à savoir le post-Pléiades et le post-CSO, vous avez fait allusion aux relations entre nos deux grands industriels, Thales Alenia Space et Airbus Defence and Space (ADS), qui sont en train de s’orienter chacun vers deux technologies, deux modèles économiques différents, avec pourtant un projet commun lancé avec la coordination du CNES. C’est la DGA qui représente les intérêts régaliens de l’État dans cette affaire. Que faites-vous pour harmoniser tout cela, connaissant les risques que ferait courir une totale autonomie de l’industriel dans le domaine de la très haute résolution, sachant qu’il est question de capacités de résolution de 25 à 30 centimètres ?

Croyez-vous qu’il soit possible de faire converger ces deux industriels sur une notion de « coopétition », telle qu’elle existe par exemple dans la microélectronique, c’est-à-dire qu’ils coopèrent dans certains investissements publics amont en R & D et soient plus raisonnables sur les filières de sous-traitance ? Il me semble anormal que certains sous-traitants soient obligés, pour travailler avec l’un et l’autre ou l’un ou l’autre, de développer, souvent avec l’aide de financements publics, des lignes de produits différentes à la demande de ces industriels. Ne peut-on pas les amener à utiliser les fonds publics avec davantage de raison ?

M. Olivier Audibert Troin. S’agissant du programme Griffon, c’est en 2014 que Jean-Yves Le Drian a notifié la commande, et la première livraison devait intervenir en 2018. Début 2016, on nous annonçait que le 126e régiment d’infanterie serait le premier régiment doté, et ce à compter de 2021. Nous sommes plusieurs députés à nous être rendus dans la bande sahélo-saharienne et nous avons vu les énormes difficultés rencontrées par nos hommes à cause de la vétusté du matériel, notamment des VAB, dont le train arrière casse pratiquement à chaque sortie. Que fait-on, dès lors, jusqu’à 2021 ? Renault Trucks nous a expliqué que, s’il avait nommé Ultima son dernier modèle de VAB, c’est qu’il n’y avait plus aucune évolution possible.

M. Laurent Collet-Billon. Concernant les FTI, le MDCN n’est pas prévu dans le premier standard étudié. La question de l’Aster 30 est à l’examen ; le bateau dispose de systèmes de lancement verticaux qui permettent de l’accueillir.

La question est celle de la performance globale du système avec les radars tels qu’ils sont prévus. Ce qu’on a considéré, pour la FTI, c’est qu’il fallait désormais procéder par standard, comme pour le Rafale, plutôt que d’ajouter des éléments au fur et à mesure que le bateau se réalise car cela conduit à une désoptimisation globale du bâtiment. La mission première de la FTI, même si elle sera dotée de capacités anti-aériennes et antinavire, est la lutte anti-sous-marine.

La commande de BATSIMAR est prévue en 2022. Nous avons un certain nombre de navires un peu âgés qu’il va falloir retirer du service, et assez rapidement va donc se poser la question de la présence de la marine nationale sur l’intégralité des eaux françaises. De ce point de vue, le BATSIMAR est un excellent bateau pour l’outre-mer, par exemple. Si le nombre de commandes a été modéré au démarrage, c’est seulement pour des raisons budgétaires. En cas d’augmentation du budget, ce programme pourrait être accéléré sans problème.

En ce qui concerne les bouées acoustiques, nous avons regardé une opération d’acquisition potentielle par Thales d’un industriel américain qui en fabrique. L’affaire n’a pas connu de suites, pour des raisons qui ont surpris Thales mais qui étaient pour moi évidentes : il n’était pas question que cela passe dans des mains françaises. Nous allons faire ce qu’il faut pour remettre en place une capacité nationale de production de bouées acoustiques de bon niveau et dans des conditions acceptables.

Ces bouées font en effet partie du paysage de la détection sous-marine, qui est un point fort de notre marine aujourd’hui. Nos sonars, réalisés chez Thales, et nos professionnels, dans la marine, sont de premier rang mondial. Le niveau de performance est connu de nos alliés, comme l’illustrent nos capacités démontrées dans plusieurs exercices où nous avons trouvé des sous-marins américains. L’Australie a été sensible à la qualité de ce que nous leur avons présenté dans ce domaine, d’autres pays nous connaissent parfaitement, et nous faisons valoir ces performances auprès des Norvégiens et d’autres.

Je ne suis pas responsable du MCO des hélicoptères, et ce depuis une quinzaine d’années. Cela dit, NHI n’est pas réputé pour être un industriel particulièrement performant.

M. Gwendal Rouillard. Que faire ?

M. Laurent Collet-Billon. La réponse traditionnelle, quand l’industriel n’est pas à la hauteur, c’est d’essayer de former un des ateliers industriels de l’aéronautique (AIA) à l’entretien de l’appareil. Il se trouve que les performances des ateliers sont variables. Par exemple, l’AIA de Bordeaux est très performante et nous pensons que cet AIA aura une activité de soutien de moteurs d’avions exportés. Les AIA de Clermont-Ferrand et de Bretagne fonctionnent très bien également.

La question de fond, dans l’entretien du matériel, est toujours la même : au bout de combien de temps l’industriel se désintéresse-t-il d’un matériel qui n’est plus fabriqué ? En l’occurrence, pour le MCO des hélicoptères, l’industriel semble s’être déjà désintéressé du produit, comme le montre sa performance insuffisante, et il faut anticiper autre chose. Cette difficulté a été aggravée par la structure même de NHI. Il y a certainement beaucoup de progrès à faire dans le MCO des hélicoptères. Un groupe de travail tripartite a été créé, avec le général de Villiers, moi-même et l’industriel, pour essayer d’améliorer la situation d’une manière générale. J’ai livré soixante Tigre. Sur ce nombre, une dizaine est en chantier de transformation de standard, les autres sont disponibles.

J’ai indiqué, Monsieur Lellouche, qu’il pourrait y avoir 3,2 milliards de reports de charge à la fin de l’année si aucun crédit n’était dégagé. La mécanique est connue : la réserve va être libérée pour être reversée dans la réserve interministérielle, qui ressortira un milliard pour le surcoût OPEX. La question, pour nous, c’est de savoir à combien nous aurons droit. Nous ne souhaitons pas des reports de charge supérieurs à 1,8 ou deux milliards, compte tenu des perspectives actuelles de la loi de programmation, de manière à être certains de pouvoir respecter les 2,8 milliards indiqués comme la condition de bonne exécution de la LPM à la fin de 2019. Le gel est une décision de gestion de Bercy. L’enjeu à présent, pour nous, est d’obtenir la libération de ces crédits.

Personne n’a demandé que le Reaper soit armé ; ce débat n’a pas encore eu lieu. Techniquement, il peut l’être.

Comme vous, Madame Bruneau, je me félicite du respect absolu des 730 millions d’euros en moyenne. Nous suivons la situation de l’ONERA très attentivement. Le problème de l’enfoncement de la soufflerie dans le sol a été un peu long à régler, mais c’est parce que nous avons demandé des expertises complémentaires sur la profondeur des travaux nécessaires, ne souhaitant pas devoir y revenir à deux fois. Un COP a été établi sur la situation financière de l’ONERA. La subvention est de 105 millions d’euros en 2017, comme en 2016. Nous invitons l’ONERA à participer de plus en plus à des contrats avec la DGA, sur des études amont ou en collaboration avec des industriels. C’est là son avenir car la situation qu’a trouvée Bruno Sainjon à son arrivée, c’est celle d’un déficit de confiance total de l’industrie envers l’ONERA. Nous l’aiderons. La difficulté est bien le transfert des emprises de Châtillon et de Meudon. L’opération est financièrement très importante et c’est pourquoi il faut trouver des ressources adéquates. Nous tenons à l’ONERA, dont l’apport à la capacité nucléaire aéroportée est très important.

Monsieur Rousset, nous avons environ 4 000 PME dans notre portefeuille et nous en suivons quelque 400 de manière particulièrement étroite car nous estimons qu’elles disposent de savoir-faire pratiques et techniques indispensables à notre base industrielle et technologique de défense (BITD). La DGA dispose d’un département technique composants et matériaux qui surveille ce qu’il se passe dans ces domaines de manière précise. Les composants programmables viennent tous de Californie ou de Taïwan. Nous sommes en train de réfléchir à la façon de réimplanter une chaîne de ce niveau-là en France chez STMicroelectronics. Nous faisons du développement de composants via Thales par exemple, sur le radar aéroporté, et je vous invite à cet égard à visiter son site d’Élancourt. Ces composants sont validés en simulation sur les moyens de calcul intensif du CEA. Au moins dans le monde de la défense, nous n’avons pas du tout lâché la technologie de base, je vous assure. Nous continuons d’avoir des experts en termes de matériaux : par exemple DGA Techniques aéronautiques à Toulouse est très souvent sollicité en cas de crashs aériens pour expertiser les débris et déterminer l’origine des ruptures.

Mme Fioraso connaît toutes les réponses aux questions qu’elle a posées… Un industriel a décidé de réaliser le post-Pléiades sur fonds propres, avec le niveau de performance qu’elle a mentionné, et je pense même qu’il ira au-delà. Cela pose un certain nombre de questions. Quelle attitude tenir vis-à-vis de l’autre industriel ? L’équité d’accès au marché imposerait, fondamentalement, que nous ne fassions rien. Quelle est la garantie de la part d’Airbus que la technologie restera de manière pérenne en France ? Quels sont les composants utilisés ? Quels sont les miroirs utilisés ? Tout cela est suivi avec une grande attention.

Vous avez, Madame, également évoqué les autres composantes spatiales. CERES doit être lancé en 2020 ou 2021. Nous aurons accès à du renseignement d’origine électromagnétique fondamental pour nos forces armées et pour la dissuasion. En ce qui concerne les satellites, CSO nous cause quelques soucis, en termes de réalisation, mais ce sont des objets technologiques extraordinaires. Je vous invite à vous rendre à Cannes pour vous faire présenter le télescope.

Dans le cadre des 2 %, la réalisation d’une capacité d’alerte avancée ne poserait aucun problème. En matière de défense antibalistique, on ne prévoit rien pour le moment au-delà du missile Aster block 1 NT. Mais dans l’absolu, on aurait besoin de détection lointaine, c’est-à-dire de détection spatiale en orbite géostationnaire. Les démonstrateurs nous ont montré que nous avions toutes les technologies voulues et que nous les maîtrisons parfaitement. Il n’y a plus qu’à y aller. Nous sommes partants.

La première livraison de Griffon, Monsieur Audibert Troin, est pour 2018, avec trois exemplaires, et la première capacité opérationnelle est pour 2021. Entre-temps auront lieu les évaluations techniques par la DGA, l’évaluation de la section technique de l’armée de terre (STAT), la montée en puissance et la formation des équipages. Tout cela prend du temps mais, je le répète, ne doit pas être galvaudé. Nous avons failli avoir le problème sur le FELIN, où nous n’avions pas suffisamment pris en compte la transformation de la mentalité des soldats, et le système a failli être laissé dans les placards. Le marché actuel va jusqu’à 2025, avec des tranches optionnelles. Cette affaire est à mesurer avant tout à l’aune de la disponibilité actuelle des matériels de l’armée de terre ; il ne faut pas chercher d’autre critère, afin de ne pas faire d’erreur. Pour le Griffon, nous avons 780 véhicules prévus en étape 1 et mille en étape 2. Inverser les volumes entre ces deux étapes produirait une accélération de presque 30 % du rythme de livraison.

S’agissant des VAB en Afrique, il y a au moins un véhicule qui fonctionne parfaitement bien, dont nous avons des retours très positifs de la part des utilisateurs, c’est le VBCI.

II. EXAMEN DES CRÉDITS

Après l’audition de M. Jean-Yves Le Drian, ministre de la Défense, lors de la commission élargie (voir le compte rendu de la réunion du 2 novembre 2016 à 21 heures (2)), la commission de la Défense examine, pour avis, les crédits de la mission « Défense » pour 2017.

Article 29 : État B – Mission « Défense »

La commission examine l’amendement DN9 de M. Jean-Jacques Candelier.

M. Jean-Jacques Candelier. Je vous ferai grâce de la lecture des exposés sommaires en cette heure tardive. Le premier amendement concerne l’augmentation de la subvention consacrée à l’office national d’études et de recherche aérospatiale (ONERA).

Mme Isabelle Bruneau, rapporteure pour avis. Je suis défavorable à cet amendement pour deux raisons. Premièrement, vous souhaitez ôter à cet effet des crédits à la simulation, qui est pourtant la seule alternative aux essais nucléaires. C’est donc peu cohérent. Deuxièmement, vous faites état d’une subvention réajustée de soixante-douze millions d’euros. Il se trouve cependant que le chiffre que vous évoquez ne correspond pas aux besoins qui m’ont été décrits lors des auditions. Je le trouve en effet disproportionné. D’autant que j’ai moi-même proposé l’année dernière d’accroître le budget de l’ONERA de quinze millions d’euros supplémentaires, ce qui me semblait à l’époque être davantage en adéquation avec sa situation.

M. Jean-Jacques Bridey, rapporteur pour avis. Je suis également défavorable à une ponction de soixante-douze millions d’euros des crédits alloués à la simulation nucléaire pour accroitre la subvention accordée à l’ONERA. Les crédits de la simulation sont justement nécessaires à la crédibilité de notre dissuasion nucléaire et permettent de financer une alternative aux essais atmosphériques ou souterrains. Il faut donc continuer à investir dans la simulation nucléaire et je plaide en faveur d’une augmentation des crédits de recherche amont à cet effet, comme j’ai pu le rappeler aujourd’hui, lors d’un déplacement à Valduc avec mon collègue Jacques Lamblin. Nous avons ainsi pris connaissance des dernières avancées technologiques et scientifiques, dont les retombées sur l’emploi sont conséquentes pour un certain nombre d’entreprises françaises, notamment des PME.

Suivant l’avis défavorable des rapporteurs pour avis, la commission rejette l’amendement DN9.

Article additionnel : après l’article 55 – Mission « Défense »

La commission examine l’amendement DN11 de M. Jean-Jacques Candelier.

M. Jean-Jacques Candelier. Il s’agit d’une demande de rapport tendant à renforcer les crédits destinés à l’équipement conventionnel de nos armées, en particulier la rénovation des hélicoptères Cougar.

M. François Lamy, rapporteur pour avis. Je ne suis pas favorable à cet amendement.

M. Jean-Jacques Bridey, rapporteur pour avis. Je souhaiterais exprimer deux remarques, également valables pour les trois prochains amendements. Tout d’abord, les crédits de la dissuasion nucléaire correspondent à une juste suffisance, conformément à notre stratégie nucléaire. De plus, la loi de programmation militaire (LPM) ne prévoit aucune éviction du nucléaire par rapport aux armes conventionnelles et aux équipements de nos armées. Sacrifier les crédits consacrés à la dissuasion ne permettra pas de mieux équiper nos armées. J’émets donc un avis défavorable.

Mme la présidente Patricia Adam. Je vous remercie. La commission attend avec impatience les conclusions de la mission d’information que vous conduisez avec Jacques Lamblin à ce sujet.

Suivant l’avis défavorable des rapporteurs pour avis, la commission rejette l’amendement DN11. Elle examine ensuite l’amendement DN13 de M. Jean-Jacques Candelier.

M. Jean-Jacques Candelier. Il s’agit d’une demande de rapport tendant à la construction et la présence d’un remorqueur de haute-mer à la Rochelle.

M. Gwendal Rouillard, rapporteur pour avis. Premièrement, je rappelle qu’en plus des navires affrétés, les Abeille, nos forces disposeront de huit bâtiments de soutien et d’assistance hauturiers (BSAH) à la fin de la programmation : quatre civils affrétés et quatre militaires. Deux affrétés doivent être livrés en 2017 et les deux suivants en 2018. Pour les BSAH militaires, deux seront livrés en 2018 et les deux suivants en 2019. La LPM a donc bien pris en considération les enjeux capacitaires dans ce domaine. La question qui est posée est la suivante : faudrait-il, à temps plein, un navire de type remorqueur à La Rochelle ? C’est en réalité une question complexe. En effet, en fonction des conditions opérationnelles, direction et force des vents dominants par exemple, une intervention à partir de Brest peut s’avérer plus rapide qu’à partir de La Rochelle pour effectuer une mission dans le golfe de Gascogne. Je crois me rappeler que La Rochelle a disposé d’un remorqueur jusqu’en 2011. Le sujet peut être mis en débat mais pour ce soir, l’avis sera défavorable. Par ailleurs, je remercie notre collègue M. Candelier pour sa solidarité vis-à-vis de Lorient, mais l’invite à se tourner vers les bons canaux d’information et je lui signale que le plan de charge de Lorient est assuré pour dix ans.

Suivant l’avis défavorable des rapporteurs pour avis, la commission rejette l’amendement DN13. Elle examine ensuite l’amendement DN15 de M. Jean-Jacques Candelier.

M. Jean-Jacques Candelier. Il s’agit d’une demande de rapport tendant à acquérir des hélicoptères NH90 pour renforcer la surveillance des zones maritimes dans plusieurs départements et collectivités d’outre-mer.

M. Gwendal Rouillard, rapporteur pour avis. Je partage une partie du constat de notre collègue Candelier puisque je l’ai moi-même exprimé. Les moyens de surveillance maritime, qu’il s’agisse d’ailleurs des moyens navals ou des aéronefs, sont trop modestes par rapport aux étendues à surveiller et par rapport aux intérêts à protéger. En revanche, je ne partage pas sa position concernant la dissuasion nucléaire. L’avis est défavorable.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur pour avis, la commission rejette l’amendement DN15. Elle examine ensuite l’amendement DN17 de M. Jean-Jacques Candelier.

M. Jean-Jacques Candelier. Il s’agit d’une demande de rapport tendant à maintenir la proposition initiale de douze frégates européennes multi-missions (FREMM) aux chantiers navals de Lorient. Une frégate est nécessaire dans les plus brefs délais.

M. Gwendal Rouillard, rapporteur pour avis. Tout d’abord mon cher collègue, sachez que vous êtes dorénavant un invité permanent à Lorient (sourires). Quels que soient nos successeurs, je souhaite livrer un message : à titre personnel, je suis favorable à une augmentation du nombre de FREMM – du moins du nombre de frégates premier rang –, me faisant ainsi l’écho de l’état-major de la marine, eu égard au besoin opérationnel. Mon avis concernant cet amendement est cependant défavorable.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur pour avis, la commission rejette l’amendement DN17.

Mme la présidente Patricia Adam. Nous allons maintenant passer aux votes sur les crédits de la mission « Défense »

Conformément aux conclusions du rapporteur pour avis, la commission émet un avis favorable à l’adoption des crédits « Équipement des forces – Dissuasion » de la mission « Défense ».

ANNEXE

Liste des personnes auditionnées par le rapporteur pour avis

(Par ordre chronologique)

– M. Philippe Coq, secrétaire général des affaires publiques du groupe Airbus,  M. le général (2S) Philippe Tilly, conseiller « air » du président exécutif, M. le général (2S) Jean-Pierre Serra, vice président « défense et sécurité » d’Airbus Defense & Space, et Mme Annick Perrimond-du Breuil, directeur des relations avec le Parlement * ;

– M. le général Bernard Barrera, sous-chef « plans-programmes » de l’état-major de l’armée de terre et M. le lieutenant-colonel Pierre Desquesses, chargé des relations avec le Parlement ;

– M. le général André Lanata, chef d’état-major de l’armée de l’air et M. le colonel Pierre Gaudillière, chargé des relations avec le Parlement ;

– M. l’amiral Christophe Prazuck, chef d’état-major de la marine et M. le capitaine de vaisseau Dominique Caillé, chargé des relations avec le Parlement ;

– M. Laurent Collet-Billon, délégué général pour l’armement ;

– MM. Vincent Moreau, sous-directeur de la 5e sous-direction de la direction du budget du ministère des Finances, et Dominique Blaes, chef du bureau de la défense et de la mémoire ;

– M. François Geleznikoff, directeur des applications militaires du commissariat à l’énergie atomique ;

– M. le général (2S) Jean-Marc Duquesne, délégué général du groupement des industries françaises de défense et de sécurité terrestres et aéroterrestres (GICAT), M. le général (2S) Jean-Albert Épitalon, délégué général adjoint « défense et international », M. François Mattens, directeur de la communication et des affaires publiques, et Mme Mathilde Herman, responsable des études économiques, des services et du développement * ;

– M. Hervé Guillou, président-directeur général du groupe DCNS et M. Fabien Menant, directeur des affaires publiques *.

* Ces représentants d’intérêts ont procédé à leur inscription sur le registre de l’Assemblée nationale, s’engageant ainsi dans une démarche de transparence et de respect du code de conduite établi par le Bureau de l’Assemblée nationale.

© Assemblée nationale

1 () Article 95 du décret relatif à la gestion budgétaire et comptable publique (GBCP) du 7 novembre 2012.

2 () http://www.assemblee-nationale.fr/14/budget/plf2017/commissions_elargies/cr/