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Commission des affaires étrangères

Mercredi 16 mars 2016

Séance de 9 heures 45

Compte rendu n° 55

Présidence de Mme Elisabeth Guigou, Présidente

– Réunion avec Son Exc. Sir Julian King, Ambassadeur du Royaume-Uni en France. 2

– Information relative à la commission.

Réunion avec Son Exc. Sir Julian King, Ambassadeur du Royaume-Uni en France.

La séance est ouverte à neuf heures quarante-cinq.

Mme la présidente Élisabeth Guigou. Nous sommes très heureux d’accueillir Sir Julian King, nouvel ambassadeur du Royaume-Uni en France, pour une audition fermée à la presse. Merci beaucoup d’être avec nous ce matin, monsieur l’ambassadeur. Nous espérons, mais je n’en doute pas, que nous aurons avec vous des relations aussi plaisantes qu’avec votre prédécesseur, Sir Peter Ricketts.

J’attache personnellement une très grande importance au dialogue entre la France et le Royaume-Uni. Notre relation bilatérale est d’ailleurs excellente. Nous faisons beaucoup de choses ensemble, en matière de recherche, d’éducation, de défense. Nous sommes les deux pays européens membres permanents du Conseil de sécurité des Nations unies. Nous avons une approche très similaire des questions internationales, notamment de la question syrienne. Nous y reviendrons, et vous nous direz à ce propos ce que vous pensez de la liste de 22 000 noms de membres de l’État islamique publiée par un média britannique, si vous disposez d’informations à ce sujet.

Une chose nous sépare depuis longtemps : notre conception de l’Europe. C’est à mes yeux la seule, et elle ne doit pas occulter l’excellence de nos relations dans les autres domaines.

Nous allons naturellement vous demander de nous livrer votre point de vue sur le prochain référendum. Nous le savons tous ici, un compromis a été trouvé à Bruxelles lors du dernier Conseil européen à propos des demandes du Premier ministre David Cameron. Il me semble que l’attitude de chacun a été positive. Pour ma part, je souhaite ardemment que le Royaume-Uni reste dans l’Union européenne. Quoi qu’il en soit, une fois ce compromis acquis, comment la campagne se passe-t-elle ? Que donnent les sondages ? Où en est l’UKIP (United Kingdom Independence Party) ? Car ce sera au peuple britannique de se prononcer. Or notre expérience des référendums en France montre que les résultats ne sont pas toujours ceux qu’escomptent leurs organisateurs, et que, souvent, les peuples répondent à côté de la question.

Je précise que la question posée aux électeurs sera une alternative : le Royaume-Uni doit-il rester membre de l’Union européenne ou doit-il la quitter ? Il y aura deux bulletins de vote : l’un en faveur de la première option, l’autre de la seconde.

Mes collègues vont vous poser bien d’autres questions sur la manière dont le peuple britannique se positionne à ce sujet pour l’instant. Nous en avons tous conscience, c’est une question d’importance cruciale, pour le Royaume-Uni d’abord. À mes yeux, il serait en effet le premier à subir les conséquences négatives d’une sortie de l’Union européenne, du point de vue économique, mais aussi parce que l’Écosse – elle commence à le dire par l’intermédiaire de ses dirigeants – pourrait demander l’organisation d’un second référendum, sans compter les messages dépourvus d’ambiguïté du Commonwealth et des États-Unis sur le fait qu’ils ne pourraient servir d’alternative. Mais ce serait aussi un problème pour l’Union européenne, pour son image et son fonctionnement – notamment du fait des renégociations d’accords dans lesquels elle s’enliserait alors pour plus de deux ans.

Bref, je ne partage pas le point de vue de certains en France qui, irrités par les démarches du Royaume-Uni, déclarent : « S’ils veulent partir, eh bien qu’ils partent ! » À mon sens, nous devons au contraire tout faire pour vous aider, ce qui n’est pas facile car nous ne devons pas interférer dans la campagne interne. Vous nous direz donc comment nous pourrions faire.

Nous aborderons enfin, naturellement, la crise migratoire et la situation à Calais, où je me rendrai demain avec quelques-uns d’entre nous, dont Pierre Lellouche et Jean-Marc Germain qui animent au sein de notre commission un groupe de travail sur les migrations, et Yann Capet, député du Pas-de-Calais, ainsi que Marie-Louise Fort.

Sir Julian King, ambassadeur du Royaume-Uni en France. Merci de votre invitation. Ce n’est pas la première fois que je visite l’Assemblée, mais je découvre cette salle, et je suis très heureux d’être là. Cela fait cinq semaines que j’ai repris le flambeau de Sir Peter Ricketts, qui est depuis longtemps, je crois, un ami pour vous, madame la présidente, et pour vos collègues.

J’aborderai devant vous les sujets suivants : le référendum ; le sommet d’Amiens, il y a deux semaines, et les quelques domaines dans lesquels nous travaillons très étroitement ensemble et qui ont été évoqués à cette occasion ; enfin, la question de Calais et, plus généralement, celle des migrations. Je m’efforcerai ensuite de répondre à vos questions sur ces sujets, ou sur d’autres que vous voudriez aborder.

En ce qui concerne tout d’abord le référendum britannique, j’aimerais encadrer la discussion et rappeler quelques faits. Nous avons trouvé un accord de compromis lors du Conseil européen de février, en arrêtant une position commune. C’était important eu égard aux détails, aux questions que nous avions soulevées, mais aussi politiquement, pour nous : c’était nécessaire pour lancer la campagne, et nous avions besoin que nos partenaires nous répondent.

À la suite de l’accord, David Cameron a proposé d’organiser un référendum le jeudi 23 juin, sur une question qui, comme vous l’avez dit, est « simple » : le Royaume-Uni doit-il rester dans l’Union européenne ou doit-il en sortir ? Actuellement, les sondages sont assez serrés, la plupart donnant une légère avance au maintien dans l’Union. Selon le plus récent, réalisé par l’institut YouGov, bien connu et respecté dans ce domaine, 40 % veulent rester et 37 % partir. Le nombre d’indécis est toujours élevé, autour de 20 % – il est de 23 % dans ce dernier sondage.

Nous sommes au début d’une campagne qui sera très vive. Les propos tenus des deux côtés seront peut-être parfois difficiles à entendre pour vous et pour d’autres. En effet, dans les deux camps, on attend ce moment depuis longtemps : nous n’avons pas eu de référendum à ce sujet depuis quarante ans.

À partir du 15 avril entreront en jeu les organisations choisies pour mener les campagnes officielles. Les organisations ainsi désignées auront accès à une subvention publique, à des créneaux à la télévision, aux médias et à d’autres moyens.

Un mois avant le référendum, le 27 mai, commencera la période de purdah – en bon français, de réserve électorale –, pendant laquelle les activités du gouvernement et de l’administration seront très restreintes. Mais nous n’en sommes pas encore là, de sorte que je suis aujourd’hui libre d’exprimer devant vous la position du gouvernement.

Car le gouvernement a arrêté une position officielle. Je suis parfois obligé de l’expliquer, dans la mesure où six des vingt-neuf ministres du Conseil se sont déclarés favorables à la sortie. Dans nos traditions, en effet, on laisse aux ministres leur liberté de parole à ce sujet. Il n’empêche que le gouvernement s’est officiellement prononcé pour le maintien au sein de l’Union européenne ; c’est cette position que le Premier ministre soutient depuis deux semaines et va continuer de soutenir de tout son cœur. Il a à ses côtés d’autres ministres importants comme le Foreign Secretary, la ministre de l’intérieur, Theresa May, et, bien sûr, le Chancelier de l’Échiquier, George Osborne.

Le gouvernement publie actuellement une série de papiers pour éclairer le débat public ouvert il y a deux semaines. L’un porte sur les détails de l’accord ; un autre sur les dispositifs de sortie si cette option est choisie, dans le cadre désormais inscrit dans les traités, à l’article 50 du Traité sur l’Union européenne ; le plus récent présente les solutions alternatives à l’appartenance à l’Union européenne – le modèle norvégien, le modèle suisse ou un simple accord de libre-échange.

J’en viens au sommet franco-britannique qui s’est tenu le 3 mars à Amiens. Il a montré une fois de plus la coopération étroite entre nos deux pays dans nombre de domaines et notre ambition partagée de relever les défis d’aujourd’hui ensemble, main dans la main. Nous avons commencé par une visite au cimetière de Pozières, car notre histoire commune dépasse les rivalités du jour ; le Président et le Premier ministre s’y sont recueillis ensemble en mémoire des soldats qui ont donné leur vie pour notre liberté lors de la Première Guerre mondiale.

Lors de ce sommet, nous avons acté de nouvelles coopérations et des projets à poursuivre. En voici quelques exemples. En matière de défense – un domaine d’une haute importance, peut-être le domaine phare de notre coopération –, nous nous sommes mis d’accord sur la validation du concept de force expéditionnaire commune interarmées, avec des scénarios de déploiement d’une force expéditionnaire interarmées franco-britannique de 10 000 hommes ; jusqu’à 7 000 hommes et femmes français et britanniques participeront à un exercice le mois prochain au sud du Royaume-Uni.

Nous nous sommes aussi mis d’accord sur la prochaine étape du projet consistant à développer ensemble un drone, ou avion sans pilote, pour lequel nous allons investir ensemble deux milliards de livres au cours des dix prochaines années.

En ce qui concerne Hinkley Point, il a été établi que la décision finale d’investissement serait prise dans un avenir proche et avec un fort appui du gouvernement français.

Calais a été un autre point important du sommet. Une contribution britannique supplémentaire de 22 millions d’euros sera versée pour appuyer les efforts sécuritaires des autorités françaises, mais aussi pour aider les réfugiés à rejoindre des centres d’accueil ailleurs en France. Nous nous sommes engagés à travailler en étroite collaboration avec le gouvernement français sur le problème des mineurs non-accompagnés, afin que ceux qui ont des liens familiaux au Royaume-Uni puissent quitter Calais et être accueillis dans mon pays.

Nous restons bien sûr des partenaires privilégiés dans la lutte contre le terrorisme – un sujet qui reste malheureusement d’une très grande actualité, comme on l’a vu en Côte d’Ivoire, et même hier à Bruxelles –, à tous les niveaux, que ce soit directement sur le terrain, en Syrie par exemple, ou en renforçant notre coopération en matière de trafic d’armes ou de radicalisation sur internet.

Enfin, nous souhaitons lancer le programme « Young Leaders », un programme d’échange de haut niveau entre jeunes professionnels à fort potentiel. Nous ne devons pas négliger, en effet, les liens qui existent et que nous devons resserrer entre nos deux peuples, nos deux sociétés civiles.

Les sujets internationaux ont également été abordés au cours du sommet. Je tiens à souligner que nous collaborons très étroitement dans le cadre de la gestion de crise, en Syrie comme en Libye ; c’est la valeur ajoutée de notre travail commun.

Quelques mots sur Calais et sur les questions migratoires. Concernant Calais, nous comprenons évidemment que les choses sont difficiles pour tous : pour les réfugiés qui se trouvent sur place en situation précaire, mais aussi pour les riverains. Il n’y a pas de solution facile. Nous saluons le travail effectué par le ministre Cazeneuve pour sécuriser le port et soutenir les migrants. Nous pensons que la seule manière de remédier à cette situation est de montrer qu’il n’existe pas de lien entre l’arrivée à Calais et la traversée de la Manche.

Je me suis rendu à Calais mercredi dernier et j’y ai rencontré Madame la maire. Nous avons discuté de deux points principaux : les moyens visant à renforcer les liens économiques entre Calais et le Kent et la situation des migrants. J’ai aussi rencontré Madame la préfète à Arras il y a deux semaines. Nous suivons donc de près l’évolution de la situation sur place, du point de vue non seulement sécuritaire, mais aussi économique. La maire m’a ainsi présenté plusieurs idées pour développer l’économie de Calais et améliorer la réputation du territoire, et je me suis engagé à soutenir cette démarche dans la mesure du possible. Nous travaillons avec le British Council et la chambre de commerce franco-britannique dans cet objectif.

Concernant les migrants, nous avons échangé à propos de l’ensemble des sujets sur lesquels nous coopérons – les améliorations à apporter à la sécurisation du port, le soutien à la police, la communication avec les migrants. La maire a insisté sur la question des mineurs isolés ; nous l’entendons tout à fait. Au cours de ma visite, j’ai aussi rencontré le sous-préfet et j’ai parlé à La Voix du Nord.

S’agissant plus généralement des questions migratoires, notre coopération avec la Turquie est bien évidemment cruciale. Les chefs d’État et de gouvernement de l’Union européenne ont rencontré le Premier ministre turc le 7 mars, comme vous le savez tous. Les solutions trouvées vont être discutées de nouveau au Conseil européen demain et après-demain. La base de cet accord est la suivante : les futurs migrants arrivant en Grèce pourront être renvoyés vers la Turquie. Cela porterait un coup dur à l’activité lucrative des passeurs. C’est cette approche que nous, Royaume-Uni, privilégions depuis maintenant quelques mois : il nous paraît absolument vital de nous attaquer au modèle économique des passeurs.

Le Royaume-Uni est très actif en la matière. Ne faisant pas partie de Schengen, nous ne sommes pas concernés par le programme de relocalisation, mais nous avons un programme national qui doit permettre de réinstaller 20 000 Syriens identifiés directement sur place comme étant particulièrement vulnérables d’ici la fin de la législature. Les 1 000 premiers sont arrivés au Royaume-Uni avant Noël ; nous en sommes aujourd’hui aux alentours de 1 500.

Quant aux fonds discutés au niveau européen, nous attendons que les choses soient formalisées demain. Pour le moment, nous nous sommes engagés à payer notre part, soit 250 millions de livres sur les trois milliards d’euros déjà promis. Je tiens à souligner que simultanément, à titre national, le Royaume-Uni s’est engagé à fournir une aide humanitaire de £1,1 milliards en réponse à la crise humanitaire en Syrie : £561 millions en Syrie, et £559 millions dans les pays voisins.

Voilà, brièvement présentés, quelques domaines dans lesquels nous travaillons ensemble. Si, comme je le souhaite, le peuple britannique se prononce pour le maintien le 23 juin, ce sera l’occasion de cimenter notre appartenance à l’Union européenne, afin de devenir ou de redevenir un partenaire utile pour tous les pays européens, y compris la France, bien évidemment.

Mme la présidente Élisabeth Guigou. Merci beaucoup, monsieur l’ambassadeur, de la précision et de la clarté de votre exposé introductif.

M. Yann Capet. Monsieur l’ambassadeur, étant député du Calaisis, je concentrerai mon propos sur la question migratoire – sachant que celle-ci n’est pas sans intérêt dans le débat actuel sur le référendum, comme l’a montré la manière dont le Premier ministre britannique y a fait référence aux accords bilatéraux du Touquet.

Aujourd’hui, Calais sert souvent à résumer la crise migratoire. Ce n’est toutefois pas seulement l’image de Calais qui est en jeu – vous l’avez dit, nous devons travailler ensemble pour retrouver la voie d’un développement économique commun –, mais celle de la France, de l’Europe et du monde. Il sera impossible de gérer cette crise sans solidarité, sans partenariat, sans compromis.

Au-delà des aspects que vous avez présentés, un problème se pose à Calais depuis quinze à vingt ans. Et, de ce point de vue, les relations franco-britanniques ont connu un changement avec l’investissement supplémentaire de 22 millions d’euros dont vous avez parlé, mais aussi avec un élément nouveau dont j’aimerais que vous le développiez : alors que, jusqu’à présent, le Royaume-Uni ne participait qu’à la sécurisation des infrastructures, aujourd’hui une piste semble s’ouvrir en matière humanitaire. Or j’insiste sur l’impérieuse nécessité de créer, face à la seule filière existante, qui est mafieuse, une filière légale d’immigration vers la Grande-Bretagne. Le cas des mineurs isolés, que certains membres de notre commission croiseront demain dans le camp de la Lande, représente une urgence absolue. Quarante dossiers sont prêts et la volonté d’avancer est là. De même, s’agissant de l’accueil des 20 000 Syriens, il y a à Calais de nombreuses familles syriennes.

La création d’une filière légale est la seule issue possible à cette crise qui s’installe. La France est tout à fait disposée à y contribuer, avec ses 112 centres d’accueil et d’orientation, cofinancés par la Grande-Bretagne depuis le sommet d’Amiens. Mais cela suppose aussi que la border force soit beaucoup plus présente dans le Calaisis, afin de fluidifier le trafic en vue d’éviter certains incidents, mais aussi de transmettre aux migrants sur place notre message : Calais n’est pas une zone d’attente pour ceux qui veulent se rendre au Royaume-Uni.

M. Jacques Myard. Monsieur l’ambassadeur, vous êtes à l’heure, contrairement aux Américains qui arrivent avec trois ans de retard ! C’est donc pour nous un grand plaisir de vous entendre. Je vais vous dire une chose : vous ne sortirez pas de l’Union européenne, car vous appartenez au système européen. En revanche, je me réjouis que vous posiez de bonnes questions concernant sa gouvernance : vous êtes les derniers gaullistes en Europe ! Vous apportez un peu de rationalité au système. Les questions que vous soulevez vont se poser à tous les Européens : la subsidiarité, la gouvernance, l’obésité du système qui est en train d’imploser, non seulement sous la pression des réfugiés mais aussi à cause des problèmes économiques.

Le Gouvernement et nous-mêmes devrions nous y intéresser au lieu de nous lamenter sur une sortie de l’Europe qui n’arrivera pas : toute votre histoire est européenne, ce n’est pas maintenant que vous allez transférer les British Islands aux Caraïbes ! Mais il faut évidemment que nous remettions à plat la construction européenne.

M. Jean-Luc Bleunven. J’aimerais revenir sur la question écossaise. En 2014, la population écossaise s’est prononcée contre l’indépendance. Aujourd’hui, une nouvelle campagne sur l’autodétermination est en cours et les sondages sont plutôt favorables au SNP (Scottish National Party). Le parti conservateur et le parti travailliste sont affaiblis. Comme beaucoup de nations européennes, le Royaume-Uni est confronté à une crise de défiance de la population envers la classe politique. Le SNP est favorable au maintien du pays dans l’Union européenne. Un vote en faveur du Brexit ne conforterait-il pas les nationalistes dans leur choix de sécession ?

M. Pierre Lellouche. Monsieur l’ambassadeur, permettez-moi de vous souhaiter la bienvenue dans notre pays, même si je doute que vous en soyez les derniers gaullistes – auquel cas vous seriez aussi les derniers partisans de Jeanne d’Arc ! Dans ma circonscription, on vend désormais 350 sortes de whiskys écossais et britanniques et j’ai même trouvé de la Marmite dans les supermarchés parisiens : la culture anglaise commence à pénétrer notre pays…

Ma première question est technique. Je ne sais pas si je vous ai bien compris. Vous avez parlé d’organisations – d’associations, en fait – appelées à faire campagne et financées par l’État. Mais alors quel est le rôle des partis politiques ? Vous dites que le gouvernement est divisé ; qu’en est-il du parti d’opposition ?

Notre expérience montre que les référendums ont tendance à mal tourner, surtout quand l’écart est aussi faible. De ce point de vue, je ne suis pas du tout de l’avis de M. Myard : j’ai le sentiment que les choses sont très mal engagées si vous n’avez que trois points d’avance aujourd’hui. D’autant qu’il est beaucoup plus facile de faire campagne pour le non au maintien que pour le oui. Et, toujours d’après notre expérience, on risque la défaite si les deux partis majoritaires ne sont pas, au moins en majorité, favorables au oui. Il est arrivé que l’on perde un référendum malgré un centre de gravité plutôt favorable dans la majorité et dans l’opposition.

En ce qui concerne Calais, M. Macron – vous voyez que nous écoutons la majorité – a récemment donné une interview au Financial Times. J’ai envie de vous poser la même question que lui, de manière peut-être plus carrée encore : qu’allez-vous pouvoir dire aux Calaisiens et aux Français après le référendum si vous sortez de l’Union, vous qui n’êtes déjà pas membres de Schengen ? Au nom de quoi devrions-nous rester vos gardes-frontières, ce qui coûte très cher aux habitants de la région ? Pourquoi ne nous comporterions-nous pas vis-à-vis de vous comme les Grecs ou les Italiens qui, lorsque j’étais chargé de ces questions au Gouvernement, donnaient de « vrais-faux » laissez-passer aux migrants avant de les envoyer en France ?

Troisièmement, quel est votre plan B dans l’hypothèse où vous quitteriez l’Union européenne ? J’imagine que des groupes de travail dans les différents ministères, voire à Downing Street, se sont penchés sur la question. Comment voyez-vous l’avenir du Royaume-Uni hors de l’Europe, en matière financière et de défense notamment ?

M. Jean-Marc Germain. Je suis allé à Calais et j’y ai passé beaucoup de temps avec les migrants. Tous ou presque souhaitent se rendre au Royaume-Uni où la plupart, et pas seulement les enfants, ont des proches. En général anglophones, ils pensent pouvoir s’intégrer plus facilement dans votre pays que dans le nôtre. Si l’on vient à Calais, c’est pour aller à Londres et ailleurs au Royaume-Uni.

Pourquoi donc les politiques et, sans doute, la population britannique se montrent-ils réticents ? Votre marché du travail est plutôt en tension : un collègue parlementaire de Manchester nous disait qu’il lui suffisait de passer un coup de fil pour trouver un emploi à une personne prête à travailler qui venait le solliciter dans sa permanence. Le problème ne semble donc pas être là. En outre, le Royaume-Uni est un pays multiculturel, qui le revendique – nous parlerions plus volontiers de communautarisme – et qui possède une tradition d’accueil de communautés venues du monde entier, particulièrement de la région dont nous parlons.

Quelle est la position du gouvernement britannique à propos de l’accord qui se dessine entre l’Union européenne et la Turquie ? Plus précisément, approuvez-vous le mécanisme « un contre un » – pour chaque réfugié qui repartirait de Grèce vers la Turquie, un autre viendrait dans l’Union européenne – et êtes-vous prêts à prendre votre quote-part, calculée en fonction de la population ? Êtes-vous favorables aux contreparties que souhaite Ankara concernant l’avancement de l’adhésion à l’Union européenne – même s’il peut sembler paradoxal de vous poser cette question à l’approche du référendum sur le Brexit – et la suppression des visas pour les ressortissants turcs ?

M. Michel Vauzelle. Pardonnez-moi de vous demander cela, monsieur l’ambassadeur, mais vu l’attachement que les Anglais ont témoigné à Calais jusqu’au xive siècle, nos députés ne pourraient-ils, sans être les bourgeois de Calais, proposer à votre pays de reprendre la ville et de s’en occuper ? (Rires.)

Mme la présidente Élisabeth Guigou. L’humour fait du bien, et, en la matière, Michel Vauzelle est un virtuose !

M. Jean-René Marsac. Comment le débat sur l’autonomie de l’Écosse évolue-t-il ? Quel rôle cette question joue-t-elle dans le débat actuel sur le maintien dans l’Union européenne ? Si le Royaume-Uni [plutôt que « la Grande-Bretagne »] quittait l’Union européenne, quelles conséquences cela aurait-il sur sa propre union ? L’Écosse demanderait-elle encore plus fortement son autonomie, voire son indépendance ?

M. Jean-Paul Bacquet. Combien de migrants entrent chaque année en Grande-Bretagne ? Que faites-vous d’eux ? Est-ce que vous les régularisez, est-ce que vous les expulsez ? Combien y a-t-il eu de regroupements familiaux en Grande-Bretagne à partir de Calais, et que faites-vous des personnes qui arrivent dans ce cadre ?

M. Michel Terrot.  Pourquoi le Royaume-Uni montre-t-il si peu d’appétence pour la lutte contre Boko Haram au Nigéria et dans la région ?

M. Pierre-Yves Le Borgn’. Je souhaite que votre pays reste dans l’Union européenne. Mais je veux aussi vous dire, comme député représentant les Français établis à l’étranger, le trouble que m’inspire le frein mis à la libre circulation des personnes dans le cadre de l’accord européen du mois dernier. Je m’interroge sur sa conformité aux règles de libre circulation contenues dans le Traité.

Quel est le montant exact de la contribution apportée par le Royaume-Uni pour Calais ?

Pour prolonger les questions de Jean-Paul Bacquet, quels sont les critères du regroupement familial à partir de Calais ? Dans quelle mesure y intégrez-vous les règles fondamentales concernant les droits des enfants ?

M. François Loncle. Je m’associe à la question de Michel Terrot. Pour bien des raisons, historiques et contemporaines, on attendrait de la Grande-Bretagne qu’elle s’engage davantage en Afrique, même sans aller jusqu’au niveau d’engagement de la France.

Permettez-moi de vous interroger ensuite sur un événement vieux de cinq ans. En 2011, le Premier ministre Cameron et le président français, M. Sarkozy, décident d’intervenir militairement en Libye, avec les résultats que l’on sait : la libération de Benghazi, qui figurait dans la résolution 1973 du Conseil de sécurité des Nations unies ; mais aussi la transgression de cette résolution, puisqu’au bout de quelques jours d’intervention militaire, notamment aérienne, l’ensemble du pays était en proie aux combats. Le président Kadhafi a été éliminé, ce qu’évidemment personne ne regrette. Mais les conséquences de cette intervention franco-britannique sont catastrophiques : cinq ans plus tard, on ne parvient pas à sortir du « chaos libyen », sans parler des répercussions sur la région sahélienne et sur toute l’Afrique de l’Ouest.

Il y a quelques jours, le président Obama lui-même – non sans une certaine hypocrisie, car les États-Unis avaient en quelque sorte sous-traité l’opération au Royaume-Uni et à la France – condamnait très sévèrement l’initiative de MM. Cameron et Sarkozy, dans des termes largement repris par la presse.

Avec le recul, qu’en pensez-vous en Grande-Bretagne ?

M. Jean Glavany. Monsieur l’ambassadeur, peut-être pourrez-vous éclaircir à propos des accords du Touquet un point que nous n’avons jamais réussi à nous faire expliquer par aucun gouvernement français. Ces accords étaient forcément bons, sans quoi les deux gouvernements ne les auraient pas signés ; c’est donc qu’ils étaient équilibrés. Mais c’est sur les termes de cet équilibre que plusieurs d’entre nous s’interrogent. Vous avez obtenu de la France que le verrou soit mis à Calais, de notre côté, et que la « jungle » se trouve sur notre territoire. Et le gouvernement français, qu’a-t-il obtenu en échange ? Il y a manifestement des contreparties cachées : lesquelles ?

M. François Rochebloine. Je m’associe pleinement à cette question.

Par ailleurs, si d’une manière générale le problème des migrants est très douloureux, le cas des enfants empêchés de rejoindre leur famille qui se trouve en Angleterre constitue une urgence particulière. C’est une question d’humanité. Qu’en dites-vous ?

M. Axel Poniatowski. La France et la Grande-Bretagne sont probablement les deux pays qui, aujourd’hui, partagent le plus d’intérêts, de valeurs et d’appréciations. En ce qui concerne les grandes questions qui se posent à l’échelle du monde, en particulier les questions de sécurité et de droits de l’homme, nous sommes très proches. Nous avons beaucoup fait ensemble ; c’est très important pour l’avenir.

S’agissant de l’Union européenne, je ne suis pas du tout sûr, tout bien pesé, que la Grande-Bretagne ait intérêt à y rester, ni que nous-mêmes ayons intérêt à ce qu’elle y reste. Ce qui ne nous empêcherait pas de continuer à coopérer très étroitement au niveau international.

Pour vous, que signifie très précisément la sortie de l’Union européenne ? Que conserveriez-vous, que ne conserveriez-vous pas de l’Union européenne ?

Mme Françoise Dumas. En France, nous savons traiter le problème des mineurs isolés ; nous avons d’ailleurs adopté récemment des dispositions en ce sens. Quelles sont les modalités précises d’accueil de ces mineurs sur votre territoire ? On sait que l’éloignement géographique n’est pas la seule difficulté. Quel est le droit actuellement applicable dans votre pays ? Pourquoi n’a-t-il pas permis de résoudre plus vite et de manière plus humaine la situation des quelques centaines d’enfants concernés sur notre territoire ? Comment est-ce possible malgré la Convention internationale des droits de l’enfant ?

M. Didier Quentin. Quelle que soit l’issue du référendum, comment voyez-vous l’avenir de la coopération entre le Royaume-Uni et la France dans le domaine militaire – ce que l’on appelle l’accord de Saint-Malo ?

Sir Julian King. Merci beaucoup de toutes ces questions auxquelles je vais m’efforcer de répondre. Je commencerai, si vous le voulez bien, par les nombreuses questions qui m’ont été posées sur Calais, avant d’en venir au Brexit – un mot désormais banni à l’ambassade, où l’on parle plutôt de Bremain (Rires). En ce qui concerne les questions européennes, je ne sais pas si nous sommes vraiment gaullistes ; à l’origine au moins, le général de Gaulle n’était pas de cet avis ! J’aborderai enfin la coopération en matière de défense, y compris en Afrique.

Qu’avons-nous fait concrètement à Calais, dans différents domaines ? En ce qui concerne le financement – auquel notre coopération ne se limite pas, mais qui est un élément important sur lequel vous m’avez interrogé à juste titre –, nous avons payé à ce jour 82 millions d’euros de travaux destinés à sécuriser le port et les infrastructures, et cela a eu un impact : vous le constaterez demain lors de votre visite. Le 3 mars, nous avons annoncé, je l’ai dit, une contribution de 22 millions d’euros supplémentaires pour financer des travaux de sécurisation qui nous ont été demandés par le Gouvernement français, mais aussi le départ des réfugiés vers des centres d’accueil, que nous soutenons.

Les règles que nous appliquons en matière migratoire sont les mêmes que nos partenaires européens : nous appliquons la réglementation de Dublin. Nous encourageons les migrants à enregistrer leur demande d’asile auprès des autorités françaises ; s’ils ont une demande de regroupement familial à formuler parce qu’ils ont des relations au Royaume-Uni, nous la traitons. Nous venons de renforcer les dispositifs de traitement de ces dossiers, pour les mineurs notamment, mais pas seulement.

Le Royaume-Uni s’est engagé à faire davantage pour traiter les demandes plus rapidement. Mais il faut d’abord se mettre d’accord sur les listes. A cet égard, le gouvernement britannique a détaché un expert auprès du Ministère de l’Intérieur français pour établir des listes communes. Cette décision a déjà un impact concret depuis la semaine dernière puisque les autorités françaises et britanniques se sont d’ores et déjà mises d’accord sur une liste de 31 cas pour lesquels des liens familiaux potentiels au Royaume-Uni semblent avérés. Rien que la semaine dernière, le Royaume-Uni a donné des réponses positives dans 3 cas.

Mme Françoise Dumas. Sur 300 ?

Sir Julian King. Ces chiffres ne sont pas vérifiés. Et toutes les personnes avec des liens familiaux potentiels au Royaume-Uni ne déposent pas forcément des demandes.

Nous ne sommes pas fermés. Nous aimerions traiter ces questions plus rapidement ; voilà pourquoi, la semaine dernière, nous avons détaché un expert au sein du ministère de l’intérieur français. Cela nous permettra de travailler avec les responsables français du vôtre pour arrêter les listes, recueillir les données et les faits nécessaires et les vérifier le plus vite possible.

Il faut dire que, malheureusement, toutes les demandes de regroupement familial qui émanent de mineurs ou de familles ne sont pas justifiées : plusieurs d’entre eux n’ont pas de relations familiales avérées au Royaume-Uni.

Toujours pour répondre à la question de savoir si nous sommes fermés en matière de migrations, l’année dernière notre solde migratoire net dépassait les 300 000 personnes, dont la moitié environ venant d’autres pays de l’Union européenne et l’autre moitié du reste du monde. Ce n’est pas ce que j’appelle un pays complètement fermé.

Au-delà de Calais, il existe des cas spécifiques liés à la crise en Syrie. Nous allons donc – c’est un engagement que nous tenons à honorer le plus rapidement possible – accueillir au moins 20 000 ressortissants syriens venus directement des camps de Syrie et des pays voisins, auxquels vont s’ajouter des mineurs isolés qui se trouvent dans ces mêmes camps.

Sur le Brexit, on m’a posé des questions techniques et politiques. Je commencerai par les premières.

Les partis font campagne en ce moment. Je ne vous cache pas qu’ils sont eux-mêmes divisés. Le gouvernement a pris position et l’administration soutient cette position. À l’intérieur du parti conservateur, nombreux sont ceux qui soutiennent également le gouvernement, mais beaucoup se sont déclarés favorables à la sortie et s’organisent au sein même du parti.

M. Pierre Lellouche. Comment se répartissent-ils ? 50-50 ?

Sir Julian King. C’est difficile à dire. Les chiffres bougent en ce moment et tout le monde ne s’est pas encore déclaré.

À l’intérieur du parti travailliste, il y a aussi une organisation qui fait campagne pour le maintien, largement soutenue. Quant au parti nationaliste écossais, il s’est déclaré favorable au maintien, comme formation politique et comme parti de gouvernement en Écosse.

Voilà pour les trois principaux partis de notre Parlement.

En outre, des organisations de campagne seront désignées, qui ne sont pas liées aux partis. Voici ce que j’ai essayé d’expliquer : dans le cadre de l’organisation de notre référendum, qui dépend d’une commission indépendante, sont désignés les leaders des deux côtés, ce qui leur donne accès aux moyens que j’ai cités pour faire campagne. Mais il ne s’agit pas de limiter les possibilités offertes aux partis de mener leur propre campagne en parallèle.

J’en viens aux questions politiques. Je ne suis pas tout à fait d’accord pour dire qu’il est plus facile de faire campagne pour la sortie. Je crois en effet que le gouvernement a de bons arguments en faveur du maintien, ceux que nous allons avancer au cours des semaines à venir. D’une part, des arguments économiques : la moitié de nos échanges commerciaux se font avec nos partenaires européens. D’autre part, des arguments sécuritaires : il suffit malheureusement de regarder les actualités ; il est évident qu’en matière de lutte contre le terrorisme, nous sommes plus efficaces ensemble. Les terroristes, hélas, ne font pas de distinction entre les villes ou entre les pays qu’ils frappent, et c’est ensemble que nous devons les combattre.

Nous n’avons pas de plan B. Cela peut être surprenant à entendre, mais c’est la réalité. Le gouvernement a même demandé à l’administration de ne pas préparer la sortie. Les partisans de la sortie vont avoir des questions à résoudre au cours des semaines à venir ; jusqu’ici, ils n’ont pas vraiment été en mesure d’expliquer vers quoi l’on irait dans l’hypothèse d’une sortie : un statut analogue à celui de nos amis norvégiens, de nos amis suisses, ou la simple application des règles de l’Organisation mondiale du commerce ? Les partisans de la sortie se sont mis d’accord pour demander un référendum ; mais, du moins jusqu’à présent, ils ne se sont pas mis d’accord sur le modèle de remplacement à mettre en place en cas d’une sortie éventuelle. C’est ce que nous attendons, et que nous verrons peut-être dans les semaines à venir.

En ce qui concerne la coopération en matière de défense, j’ai parlé de deux projets qui comptent parmi les plus importants du moment : ils portent sur l’avion sans pilote et sur la force expéditionnaire commune que nous allons bâtir ensemble. Il existe aussi une coopération très étroite entre nous dans le domaine des missiles. La coopération est également quotidienne entre nos armées : il y a des pilotes français dans les avions britanniques et des pilotes britanniques dans les avions français. Nous saluons cette coopération qui va continuer dans tous les cas, mais que nous aimerions poursuivre dans le cadre de l’Union européenne ainsi que de l’OTAN.

Avons-nous fait tout ce que nous pouvions en Afrique ? Je ne sais pas. Mais, en accord avec nos amis français, nous avons renforcé au cours des derniers mois nos dispositifs de lutte contre Boko Haram, en particulier l’entraînement des forces nigérianes, au nord du pays : nous avons aujourd’hui plus de 300 entraîneurs établis sur le terrain. Nous le faisons en coopération étroite avec les forces françaises présentes dans la région.

Enfin, je ne me déroberai pas aux questions qui m’ont été posées sur les accords du Touquet. Il est arrivé de temps en temps que des hommes et des femmes politiques de votre pays les mettent en question, et ceux de mon pays l’ont remarqué. Mais nous avons précisé à Amiens, avant et depuis, que ces accords existent et qu’ils fonctionnent. Nous en soutenons entièrement l’application et nous soutenons l’action de M. Cazeneuve pour les mettre en œuvre. Nous pensons pour notre part qu’ils servent l’intérêt des deux pays. Ces accords, nous les avons établis ensemble, ainsi que quelques-uns d’entre vous l’ont noté. Et les contrôles juxtaposés sont la preuve de leur bon fonctionnement. Cette année, le nombre de visites en France depuis notre pays dépassera 20 millions : c’est fantastique ! Plus de 25 % des produits alimentaires achetés dans les supermarchés du Royaume-Uni sont passés par le port de Calais. Bref, les échanges de toutes sortes dans les deux sens sont essentiels, non seulement pour l’économie, mais aussi pour les liens entre nos peuples. Voilà pourquoi ces accords et ce port sont aussi importants.

S’agissant de la Libye, il est vrai que la situation actuelle n’est pas fantastique, mais nous sommes tous un peu impliqués dans cet état de fait : je ne suis donc pas entièrement d’accord avec la critique formulée par M. Obama.

Dans ce domaine aussi, notre collaboration est très étroite au niveau politique. Ce point a été évoqué au sommet d’Amiens, et depuis, c’est-à-dire au cours des deux dernières semaines, notre ministre des affaires étrangères s’est rendu à deux reprises à Paris pour en discuter avec M. Ayrault et d’autres homologues. Nous essayons de trouver un moyen d’avancer en Libye, en soutenant les efforts du représentant spécial du secrétaire général des Nations unies, M. Kobler. D’abord, il nous faut un gouvernement ; une fois celui-ci installé, le Royaume-Uni est prêt à lui fournir un soutien en matière de formation militaire et dans d’autres domaines sécuritaires. Je crois savoir que cette question est également étudiée du côté français.

Mme la présidente Élisabeth Guigou. Qu’en est-il de l’accord entre l’Union européenne et la Turquie ?

M. Jean Glavany. Monsieur l’ambassadeur, en ce qui concerne Le Touquet, je n’ai pas du tout dit que je voulais revenir sur les accords : pour prendre ainsi position, encore faudrait-il que je sois informé du détail de leur contenu ! Nous sommes nombreux, au sein de cette commission, à penser qu’ils ont une « face cachée » ; c’est d’ailleurs la seule explication possible à la conclusion d’accords en apparence aussi déséquilibrés. Certes ils fonctionnent, mais à quel prix !

Sir Julian King. Sur ce point, je ne peux qu’expliquer la manière dont, pour ma part, je comprends les choses : sur ce qui relève de l’appréciation du gouvernement français, ce n’est pas l’ambassadeur britannique qu’il faut interroger.

Quant à l’accord avec la Turquie, nous allons contribuer à son financement. Dès lors que nous sommes en dehors de Schengen, la question des visas ne se pose pas à nous dans les mêmes termes qu’à vous. Mais nous participerons à la mission de l’OTAN destinée à sécuriser la mer entre la Turquie et la Grèce, en déployant quatre navires en même temps que le navire français, et nous continuerons d’aider nos amis grecs à renforcer leurs contrôles frontaliers, domaine dans lequel nous les avons déjà fait bénéficier de notre expertise : le chef de la border force était ce week-end en Grèce. Et si l’on nous demande dans d’autres domaines une aide que nous sommes en mesure d’apporter, nous le ferons.

Mme la présidente Élisabeth Guigou. Merci beaucoup, monsieur l’ambassadeur, de cet échange très franc. Vous aurez compris combien nous sommes inquiets au sujet de Calais, des questions d’immigration en général et de la coopération entre pays européens dans ce domaine. J’espère que nous allons poursuivre ce dialogue avec vous. Vous nous avez très bien expliqué les positions du gouvernement britannique sur tous ces importants sujets ; soyez-en également remercié.

Sir Julian King. C’est un plaisir. Merci à vous.

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Information relative à la commission

Au cours de sa réunion du mercredi 16 mars 2016 à 9h45, la commission des affaires étrangères a nommé :

– M. Guy-Michel Chauveau, rapporteur sur le projet de loi autorisant l'accession de la France au protocole sur le statut des quartiers généraux militaires internationaux créés en vertu du Traité de l'Atlantique Nord (n° 3578).

La séance est levée onze heures quinze.

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Membres présents ou excusés

Commission des affaires étrangères

Réunion du mercredi 16 mars 2016 à 9 h 45

Présents. - M. Kader Arif, M. François Asensi, M. Jean-Paul Bacquet, M. Patrick Balkany, M. Philippe Baumel, M. Jean-Luc Bleunven, M. Alain Bocquet, M. Gérard Charasse, M. Guy-Michel Chauveau, M. Jean-Louis Christ, M. Philippe Cochet, M. Jean-Louis Destans, M. Michel Destot, M. Jean-Pierre Dufau, Mme Françoise Dumas, M. Jean-Paul Dupré, M. François Fillon, Mme Marie-Louise Fort, Mme Valérie Fourneyron, M. Hervé Gaymard, M. Jean-Marc Germain, M. Paul Giacobbi, M. Jean Glavany, Mme Linda Gourjade, Mme Élisabeth Guigou, M. Jean-Jacques Guillet, Mme Chantal Guittet, M. Pierre-Yves Le Borgn', Mme Marylise Lebranchu, M. Pierre Lellouche, M. Patrick Lemasle, M. Bernard Lesterlin, M. François Loncle, M. Noël Mamère, M. Jean-René Marsac, M. Patrice Martin-Lalande, M. Jean-Claude Mignon, M. Jacques Myard, M. Axel Poniatowski, M. Patrice Prat, M. Didier Quentin, M. Jean-Luc Reitzer, Mme Marie-Line Reynaud, M. François Rochebloine, M. René Rouquet, M. Boinali Said, M. André Santini, M. François Scellier, M. André Schneider, M. Michel Terrot, M. Michel Vauzelle

Excusés. - Mme Nicole Ameline, M. Christian Bataille, M. Jean-Christophe Cambadélis, Mme Cécile Duflot, M. Philippe Gomes, M. Jean-Claude Guibal, M. Meyer Habib, M. Benoît Hamon, Mme Françoise Imbert, M. Serge Janquin, M. Pierre Lequiller, M. Lionnel Luca, M. Thierry Mariani, M. Alain Marsaud, Mme Odile Saugues, M. Guy Teissier

Assistait également à la réunion. - M. Yann Capet