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Commission des affaires étrangères

Mardi 5 avril 2016

Séance de 18 heures 30

Compte rendu n° 61

Présidence de Mme Elisabeth Guigou, présidente

– Audition, ouverte à la presse, de M. Bernard Cazeneuve, ministre de l’Intérieur, sur les effets de la crise migratoire à Calais.. 2

Audition, ouverte à la presse, de M. Bernard Cazeneuve, ministre de l’Intérieur, sur les effets de la crise migratoire à Calais.

La séance est ouverte à dix-huit heures trente.

Mme la présidente Élisabeth Guigou. Nous avons le plaisir de recevoir à nouveau le ministre de l’intérieur, Bernard Cazeneuve, qui vient très régulièrement devant la commission. Nous allons consacrer cette audition à la crise migratoire et en particulier à la situation à Calais.

Vous souhaitez, monsieur le ministre, que nous commencions par la projection d’un film présentant l’action de l’État. Je suis d’avis que ce sera très utile pour l’information de nos collègues car, si nous nous sommes rendus sur place, le 17 mars dernier, avec Jean-Marc Germain et Marie-Louise Faure, ce n’est pas le cas de tous les membres de la commission. Nous avons fait ce déplacement au nom du groupe de travail sur les migrations, constitué il y a plusieurs mois – et qui, en dehors de vous-même, a déjà entendu de nombreux responsables du ministère de l’intérieur –, et nous avons pu constater sur place la compétence, l’engagement des services de l’État – nous avons été très bien reçus par le sous-préfet et par le directeur départemental de la police aux frontières (PAF) qui nous a accompagnés au long de toute une partie de cette visite –, mais également l’implication des associations et en particulier celle de La vie active et de son directeur.

Nous avons pu mesurer par ailleurs l’ampleur des investissements réalisés par l’État, qu’il s’agisse des travaux impressionnants de sécurisation des infrastructures à proximité du site d’Eurotunnel, du port de Calais, du camp de la Lande pour prévenir les passages vers le Royaume-Uni et, d’autre part, pour installer un centre d’accueil provisoire, (CAP) qui dispose de 1 500 places, et un centre d’accueil de jour, le centre Jules-Ferry, tous deux gérés par l’association La vie active.

Ce que nous avons vu m’a paru assez éloigné de ce qu’on a pu lire ou entendre ici ou là sur les efforts qui sont faits non seulement sur le plan humanitaire mais aussi concernant la sécurité.

Nous étions sur place à la fin des opérations de démantèlement de ce qu’on appelle la zone sud et nous avons visité une partie de la zone nord. Aussi souhaitons-nous connaître, monsieur le ministre, vos intentions sur la partie nord : est-il également prévu de démanteler les campements qui s’y sont installés en dehors des centres d’accueil ?

Notre deuxième grand sujet de préoccupation concerne les mineurs présents sur la Lande. Nos interlocuteurs ont évoqué des projets d’accompagnement spécifiques, avec notamment la mise à disposition d’enseignants et la création de quartiers séparés au centre d’accueil provisoire, sachant qu’il existe déjà des hébergements séparés pour les femmes. Où en sommes-nous sur le sujet ?

La coopération avec les autorités britanniques constitue le troisième grand sujet que nous souhaitons aborder. Il s’agit d’un enjeu essentiel. On nous a dit que, l’an dernier, le Royaume-Uni avait contribué à hauteur de 82 millions d’euros pour les travaux de sécurisation des infrastructures et des dépenses liées à la prise en charge des migrants. Lors du sommet franco-britannique d’Amiens, une contribution supplémentaire de 22 millions d’euros a été annoncée pour 2016.

Reste la question très douloureuse des mineurs non accompagnés qui sont très nombreux : quelque 300 selon les associations – chiffre impressionnant. Quand nous avons reçu l’ambassadeur britannique, il a évoqué le cas d’une trentaine d’enfants reçus au Royaume-Uni – ce qui ne représente que 10 % du total. Pouvez-vous nous indiquer comment la coopération avance sur ce sujet très sensible ?

Nous avons transformé le groupe de travail sur l’immigration en mission d’information et si nous ignorons encore qui la présidera, nous savons en revanche que Jean-Marc Germain en sera le rapporteur.

(Un film d’un peu plus de cinq minutes est projeté.)

M. Bernard Cazeneuve, ministre de l’intérieur. Votre commission m’a demandé de venir devant elle pour évoquer non pas la politique migratoire de l’Union européenne ou celle de la France en général, mais pour aborder plus spécifiquement la question de Calais et de Grande-Synthe. Je le fais bien volontiers car il s’agit d’un sujet complexe et qui ne concerne pas exclusivement la France. En effet, la situation à Calais résulte de flux migratoires qui convergent vers l’Union européenne ; en outre, elle renvoie à notre relation avec le Royaume-Uni ; enfin, la bonne foi est, en cette matière, très difficile à plaider et la vérité très difficile à restituer parce que la manipulation est partout et que cette question, qui a pris une dimension passionnelle, fait l’objet d’une instrumentalisation constante de la part d’un certain nombre d’acteurs qui ont intérêt à ce que le problème s’enkyste.

Je suis donc heureux de me trouver devant vous – alors que votre commission, à travers une mission d’information, s’intéresse déjà à la situation à Calais et à Grande-Synthe – pour vous indiquer avec précision de ce que nous faisons et pour répondre à vos questions.

Il s’agit d’abord, je viens d’y faire allusion, d’un problème de dimension européenne et internationale. Je rappelle qu’un million de migrants sont arrivés sur le territoire européen en 2015 – ce qui n’est pas sans conséquences sur la situation à Calais ou, à la frontière entre la France et l’Italie, à Vintimille et à Menton. Tous ne relevaient pas du statut de réfugié, certains étant des migrants économiques : on estime les premiers à environ à 60 % du total. Les solutions européennes ont été arrêtées trop tard et appliquées avec une lenteur qui a conduit nombre d’associations et de citoyens à s’interroger sur l’efficacité de l’Union européenne.

Contrairement à une antienne très souvent reprise, la France a été très active dans la définition des solutions destinées à maîtriser la situation migratoire avec la préoccupation de contrôler les frontières extérieures de l’Union européenne et la préoccupation de réserver un accueil qui soit le plus conforme possible aux valeurs de la République et au message que la France a délivré aux peuples persécutés par des régimes abjects ou par des groupes n’hésitant pas à perpétrer les pires atrocités.

Qu’avons-nous fait ? Dès le 31 août 2014, bien avant le déclenchement des flux migratoires, sur la base de propositions élaborées au ministère de l’intérieur et en liaison avec le Quai d’Orsay, nous avons rencontré les principaux ministres de l’intérieur des pays de l’Union européenne de manière à présenter une stratégie globale visant à renforcer le contrôle des frontières extérieures de l’UE, en particulier par le biais d’une montée en puissance très significative de l’agence Frontex. Nous avons notamment proposé que Frontex pût s’organiser autour de deux pôles : l’un de gardes-frontières et l’autre de gardes-côtes, ce qui impliquait qu’on allouât à cette agence des moyens qu’on ne lui avait jusqu’à présent pas attribués.

La stratégie visait ensuite à mettre en place un mécanisme européen de solidarité. Il n’y avait aucune raison pour que les pays de première entrée supportent à eux seuls le flux migratoire sans que soit organisé, au plan européen, l’accueil de ceux qui relevaient du statut de réfugiés. C’est ainsi qu’a été conçu le processus de relocalisation à partir des hotspots et de réinstallation à partir des camps de réfugiés en Jordanie et au Liban. Nous avons souhaité que ce contrôle aux frontières extérieures de l’UE s’effectue dans des structures où l’on puisse procéder aux vérifications et aux inscriptions d’usage – inscription sur la liste Eurodac (base de données qui répertorie les empreintes digitales de tous les demandeurs d’asile et immigrés illégaux), interrogation du système d’information Schengen, lutte contre la fraude documentaire, mise en place, à partir des hotspots, d’un dispositif de retour vers les pays de provenance dès lors qu’il s’agit d’immigrés économiques irréguliers.

Le Haut représentant de l’Union pour les affaires étrangères, Mme Mogherini, s’était vu confier un mandat par la Commission européenne pour procéder à la négociation de ces conventions de retour.

Nous avons complété toutes ces propositions, après les attentats, par des mesures de sécurité devant assurer que ceux qui entrent dans le territoire de l’Union européenne ne présentent pas de risque sécuritaire : interrogation systématique du dispositif d’information Schengen, alimentation de ce système sur des bases identiques par l’ensemble des services de renseignement de l’Union, connexion du système d’information Schengen aux autres fichiers criminels, possibilité d’utiliser la banque de données Eurodac à des fins de sécurité – ce qui suppose une modification du règlement européen Eurodac –, possibilité de disposer d’une task-force européenne de lutte contre les faux documents. Nous savons en effet qu’une partie de ceux qui nous ont frappés étaient passés par l’île de Leros, dotés de faux documents fournis par l’État islamique qui a récupéré des milliers de passeports vierges et a constitué une véritable industrie du faux document, par laquelle il conduit d’abjects bourreaux à se mêler au flux de leurs victimes. Or si nous voulons éviter – et il le faut à tout prix – que la question migratoire et la question terroriste soient confondues par des discours populistes réducteurs, il faut absolument que des mesures soient prises qui garantissent la sécurité aux frontières extérieures de l’UE.

Après la conclusion de l’accord entre l’Union européenne et la Turquie, nous avons été les premiers à donner à la Grèce les moyens dont elle avait besoin pour faire face aux flux migratoires : la France comme l’Allemagne se sont engagées à envoyer chacune  300 collaborateurs de la PAF, des services de police, de l’Office français de l’immigration et de l’intégration (OFII) et de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA). En matière migratoire, nous sommes le pays de l’UE qui aide le plus la Grèce. Pour ce qui concerne le processus de relocalisation, contrairement, là aussi, à toute une série de propos répétés dans la presse mais qui ne correspondent absolument pas à la réalité statistique, la France est le pays de l’UE qui remplit le plus ses obligations.

Quand un million d’individus entrent sur le territoire européen, dont certains passent par l’Italie, mécaniquement, beaucoup arrivent à Calais, à Grande-Synthe ou à Paris. Il m’est arrivé d’entendre que la France était confrontée à un flux migratoire exceptionnel pour des raisons qui tenaient à l’absence de rigueur de l’administration dans le contrôle des flux. Je rappelle qu’au moment où l’Allemagne accueillait ou voyait transiter sur son sol près de 800 000 migrants, la France a vu le nombre de ses demandeurs d’asile augmenter de 20 %, c’est-à-dire passer de quelque 60 000 à 80 000. Nous sommes par conséquent très loin des chiffres d’autres pays ; non pas que la France ne veuille accueillir personne, mais on doit tenir compte de la géographie, de l’économie, et il est évident que tous ceux qui passent par la Grèce, les Balkans ou l’Autriche rejoignent plus facilement l’Allemagne que la France.

On doit également tenir compte de la volonté politique de la France d’accueillir les migrants convenablement et dignement. Pour cela nous aurons créé, en quelques mois, près de 18 000 places en centres d’accueil des demandeurs d’asile (CADA), alors que le nombre de places disponibles avait stagné au cours des années précédentes. Nous avons augmenté le nombre de fonctionnaires de l’OFPRA et de l’OFII pour permettre l’accueil des arrivants dans de bonnes conditions. Avec le ministre du logement, nous avons présenté un plan d’urgence au mois de juin 2015. Je pense également à la loi relative à la réforme du droit d’asile visant à réduire de vingt-quatre à neuf mois la durée d’examen des dossiers de ceux qui relèvent de l’asile. Nous n’avons donc cessé de rehausser notre dispositif d’accueil.

Qu’avons-nous décidé dès lors qu’arrivent des migrants à Calais et à Grande-Synthe, qui veulent traverser la Manche pour se rendre au Royaume-Uni parce que des passeurs le leur ont promis moyennant parfois jusqu’à 10 000 ou 15 000 euros chacun ? Notre stratégie est simple, lisible et constante.

D’abord, il s’agit de démanteler les filières de passeurs. Y parvenons-nous ? Nous avons augmenté très significativement les effectifs des forces de police à Grande-Synthe et à Calais. Au cours de l’année 2015, nous avons démantelé vingt-huit filières à Calais et vingt-cinq à Grande-Synthe– soit un doublement par rapport à 2014 – et nous maintenons ce rythme depuis le début de l’année. Ces filières correspondent à environ 700 personnes. Nous avons considéré que ce démantèlement ne devait pas concerner que Calais et Grande-Synthe mais également Paris puisque les migrants arrivent dans les gares parisiennes avant de se rendre dans le Nord de la France.

Nous avons par conséquent déployé énormément de moyens dans les TGV et dans les gares, afin de réaliser des contrôles et d’inciter les migrants qui en relèvent, à faire une demande d’asile plutôt que de partir pour Calais ou Grande-Synthe. Nous avons demandé aux Britanniques, qui déployaient insuffisamment d’énergie, à faire à Londres le même travail de démantèlement que celui que nous faisons en France. Pour atteindre ce but, nous avons renforcé notre coopération avec les policiers et, plus généralement, avec l’administration britanniques.

Nous obtenons donc de bons résultats à Grande-Synthe comme à Calais en matière de démantèlement des filières de l’immigration irrégulière et un bon niveau de judiciarisation de notre action – les tribunaux suivent et condamnent durement les passeurs.

La deuxième composante de notre stratégie consiste à convaincre les migrants de ne pas rester dans la boue de Calais ou de Grande-Synthe et de demander l’asile en France plutôt que de rester aux mains des passeurs et de mourir dans les trains, dans le tunnel sous la Manche ou en essayant de traverser la rocade pour prendre d’assaut les camions… Les chiffres que je vais vous donner sont vérifiables par les parlementaires qui ont un pouvoir de contrôle sur pièces et sur place auprès de mes services : nous avons enregistré et orienté vers l’hébergement dédié 300 demandes d’asile à Calais en 2014, 1 500 en 2015, soit cinq fois plus, et cette augmentation, considérable, s’intensifie encore en 2016. La réitération de notre discours ainsi que la mobilisation de notre administration donnent des résultats.

Troisième élément de notre stratégie : nous ne pouvons pas laisser les migrants vivre dans des conditions humanitaires inacceptables, sur un terrain marécageux que nous ne sommes pas en mesure, pour des raisons techniques, d’aménager sur toute sa superficie. Il s’agit donc de proposer à ceux qui sont là de sortir de Calais pour aller dans des centres d’accueil et d’orientation (CAO) qui se trouvent dans des bâtiments en dur et qui sont gérés par des associations et par l’État. Ils offrent des conditions de vie sans commune mesure avec ce qu’on peut trouver à Calais – y compris dans des camps pourvus des meilleurs standards d’accueil. Nous avons ouvert 122 centres dans 72 départements. Ils ont permis à 3 250 personnes de sortir de Calais depuis le mois d’octobre, ce qui est considérable, si bien que le nombre de migrants, de 6 000 en octobre dernier, y est passé à 3 500 aujourd’hui après un comptage précis réalisé par la PAF. Je démens donc totalement les chiffres fantaisistes communiqués cet après-midi par des acteurs qui n’ont pas témoigné, jusqu’à présent, d’un grand niveau de responsabilité. Ces chiffres faux ont du reste été démentis au moment où nous avons décidé de procéder à la réduction de la partie sud, ordonnée par le tribunal administratif. Je souhaite que les manipulations cessent et que la rigueur puisse se frayer un chemin.

Le quatrième axe consiste à créer un accueil le plus digne possible pour ceux qui restent ou qui transitent par Calais. C’est pourquoi nous avons investi 18 millions d’euros, avec l’UE, pour assurer un centre d’accueil provisoire (CAP) de 1 500 places adossé à un centre où l’on peut prendre un repas par jour, et où ont été installés des dispositifs sanitaires. On s’est demandé, au moment de son implantation, si ce centre comptait suffisamment de places. Certains considéraient qu’il fallait créer autant de places qu’il y avait de migrants. Or ce n’est pas la stratégie de l’État car cela reviendrait à attirer les migrants : il ne s’agit pas de concentrer tous les migrants à Calais mais de créer, je le répète, les conditions d’un accueil digne en France. Je suis d’ailleurs très étonné que toute une série d’acteurs se soient mobilisés, et au nom de considérations humanitaires, pour maintenir dans la boue de Calais des personnes en situation vulnérable – ce qui me paraît être une approche bien singulière – alors que nous, pour des raisons humanitaires, nous proposions de les en sortir pour les mettre à l’abri. En plus des CAO, nous avons créé des abris dans des tentes de la sécurité civile pour quelque 500 places et un centre dédié pour les femmes et enfants pour 400 places.

La cinquième orientation fait débat : l’étanchéification de la frontière – une position que j’assume et revendique car je recherche la cohérence maximale et l’efficacité la plus grande. En effet, il serait totalement incohérent de démanteler les filières des passeurs, de parvenir à convaincre les réfugiés de demander l’asile en France tout en laissant la frontière ouverte – incitant par-là les passeurs à continuer leur trafic, sachant de surcroît que si nous ouvrons la frontière en France rien n’empêche les Britanniques de fermer la leur ; nous alimenterions ainsi un flux et augmenterions un stock. Cela étant, notre relation avec les Britanniques est très exigeante. Les accords du Touquet étaient totalement léonins.

M. Jean Glavany. Enfin !

M. le ministre. Je n’ai jamais dit le contraire.

Nous gérions la frontière pour eux et ils ne payaient rien. De plus, ils n’accueillaient pas ceux qui y avaient vocation au titre de l’asile parce que pouvant prouver qu’ils avaient de la famille au Royaume-Uni. Nous avons par conséquent demandé que ces accords soient rééquilibrés : le Royaume-Uni doit à la fois financer des équipements de sécurité et les politiques humanitaires en France – notamment les CAO – ; or, en l’espace de dix-huit mois, nos voisins ont engagé 102 millions d’euros en plusieurs tranches, la dernière ayant été allouée à l’occasion du conseil franco-britannique du mois de mars dernier.

La question des mineurs isolés, quant à elle, est fondamentale d’un point de vue humanitaire. Lorsque nous avons décidé de démanteler la partie sud de la Lande, ils étaient, selon l’association France terre d’asile, au nombre de 326. Nous disposions sur place, pour eux, de trois structures d’accueil : le centre Georges-Brassens, un centre à Saint-Omer et les bungalows dans lesquels ils pouvaient rester au moment où nous avons engagé le démantèlement de la partie sud. Par ailleurs, nous avons indiqué aux Britanniques qu’il n’était pas question qu’ils n’accueillent pas les mineurs isolés qui avaient de la famille au Royaume-Uni. Initialement défavorables à cette stratégie, ils s’y sont ralliés à force de dialogue et, depuis le dernier conseil franco-britannique, une vingtaine de dossiers présentés par la France ont abouti et plusieurs dizaines sont à l’examen. La dynamique est donc enclenchée, qu’une réunion régulière avec l’ambassadeur du Royaume-Uni permet d’intensifier. C’est important car nous sommes désormais davantage entendus par les mineurs isolés qui savent qu’en allant dans les centres mentionnés, ils pourront non seulement sortir de ces espaces et échapper aux passeurs, mais encore rejoindre le Royaume-Uni s’ils y ont de la famille.

Dans la partie nord, je l’ai dit, se trouvent 3 500 personnes dont 1 900 dans les bungalows ou dans les tentes de la sécurité civile et le reste dans des habitats de fortune. Nous avons, les concernant, trois objectifs précis. Nous entendons d’abord, en lien avec les associations, que soient renforcés les équipements collectifs pour créer des lieux de vie pour ceux qui sont à Calais. Nous voulons ensuite substituer à l’habitat de fortune un habitat propre et uniformisé de manière à respecter les normes, à pouvoir, en particulier, faire passer les secours et à accueillir ceux qui ne peuvent pas l’être dans les blocs. Il s’agit enfin de continuer la stratégie consistant à faire passer des maraudes de l’OFPRA, de l’OFII, des associations pour sortir ceux qui se trouvent à la fois dans le CAP et autour de Calais pour les diriger vers les CAO et pour continuer, donc, à « réduire » Calais car tel est bien notre objectif.

À Grande-Synthe, la situation est différente. S’y trouvaient, au mois d’octobre, 3 000 migrants. Il y a un mois, ils étaient 1 000. Nous sommes donc parvenus à diminuer des deux-tiers le nombre de migrants. Le maire, en liaison avec Médecins sans frontières (MSF) et des acteurs associatifs, a souhaité déplacer le camp, qui se trouvait dans un espace insalubre, pour créer les conditions d’un meilleur accueil. J’ai eu de nombreuses discussions avec lui, assez directes, pour lui signifier que la stratégie de l’État consistait bien plutôt en la réduction totale du camp de Grande-Synthe. Notre discussion a porté sur trois points, discussion très franche et de très bonne qualité qui s’est poursuivie la semaine dernière place Beauvau.

Premièrement, nous voulons que toutes les normes de sécurité imposées par la loi soient respectées et que la commission de sécurité donne un quitus. En effet, s’il y a le moindre problème, les conséquences juridiques et humanitaires peuvent être terribles. Donc nous souhaitons l’application du processus de mise en conformité avec les préconisations de la commission de sécurité. Or l’accord du maire sur ce point est total.

Ensuite, nous souhaitons que les services de police, en liaison avec les associations, continuent à travailler au démantèlement des passeurs et favorisent certaines médiations pour éviter les violences. Sur ce point aussi le maire est d’accord.

Enfin, nous voulons que ce camp soit provisoire – je n’entends pas changer de stratégie – et entendons que les maraudes destinées à réduire définitivement le nombre des migrants continuent, afin, comme à Calais, de les inciter à demander l’asile. Sur cette question aussi, le dialogue est positif et un comité de pilotage a été mis en place.

Dans ces conditions, le maire de Grande-Synthe et moi-même appelons de nos vœux un dispositif qui, sur le plan humanitaire et en ce qui concerne l’accès à l’asile, soit conforme aux objectifs de l’État et aux valeurs de la France, cela dans le cadre rigoureux d’une coopération authentique, sans arrière-pensée.

Je conclurai, car tout doit être dit, sur un point : lorsque j’ai rencontré les associations, avant qu’on ne procède à la mise à l’abri des personnes qui vivaient dans la partie sud, j’ai indiqué souhaiter que cette action se fasse sans la présence des forces de l’ordre. Il s’avère que dès lors que les maraudeurs, qui sont des travailleurs sociaux de l’État, sont arrivés pour convaincre les migrants de rejoindre la partie nord ou les CAO, ils ont été pris à partie, insultés et caillassés – voilà la réalité. J’ai donc pris mes responsabilités : j’ai disposé des forces de sécurité pour garantir l’intégrité physique des travailleurs sociaux qui remplissaient une mission pour le compte de l’État. Les initiateurs de ce caillassage se sont précipités pour expliquer que les engagements que nous avions pris n’avaient pas été tenus et que nous avions envoyé des bulldozers. Or il n’y avait sur place aucun bulldozer mais des forces de l’ordre garantissant aux travailleurs sociaux la possibilité de remplir leur tâche. La totalité de l’espace vidé et les migrants relogés, nous avons fait venir des engins de travaux pour nettoyer cet espace plein d’immondices. Voilà très exactement ce que nous avons fait ; or, là aussi, nous avons été confrontés, en permanence, à des manipulations et des provocations. Je soutiens les fonctionnaires de l’OFII, de l’OFPRA, de la préfecture et de la police, fonctionnaires de l’État qui réalisent le plus souvent leur mission avec passion et qui n’ont pas à être considérés comme ils le sont par certains pour la seule raison qu’ils sont les représentants de l’État.

Mme la présidente Élisabeth Guigou. Je vous remercie pour votre précision, monsieur le ministre ; nous y sommes certes habitués mais elle est particulièrement bienvenue sur ce sujet sur lequel on entend en effet bien des inexactitudes.

J’ai été impressionnée, au cours de mes déplacements, par le travail réalisé en commun par les associations et les services de l’État, notamment par le commissaire qui a l’air d’avoir avec les différents acteurs des relations personnelles exemplaires, à l’image, m’a-t-il semblé, de l’ensemble des fonctionnaires de police présents – nombreux du fait d’échauffourées assez préoccupantes, la veille, entre deux groupes de migrants de nationalité différente.

M. le ministre. J’en profite pour préciser que, depuis le début de l’année, du fait de la volonté des migrants de passer la rocade, ce que l’on peut comprendre compte tenu de la pression que les passeurs exercent sur eux, 167 policiers ont été blessés !

M. Jean-Marc Germain. J’ai eu l’occasion de me rendre à Calais en compagnie de la présidente, elle vient de le rappeler, mais j’étais déjà allé sur place à l’invitation du Secours catholique, un mois auparavant, à savoir avant l’évacuation de la zone sud.

Ce que vous avez exposé, monsieur le ministre, correspond assez bien à ce qui nous a été dit par les associations : les choses, depuis quelques mois, ont vraiment été prises à bras-le-corps et d’une manière cohérente. Le fait que la plupart des réfugiés restent dans les CAO qu’ils ont été convaincus de rejoindre marque un progrès énorme par rapport à la situation antérieure où certains étaient placés dans des centres de rétention. J’ai d’ailleurs pu, à un mois et demi d’intervalle, mesurer combien le travail pédagogique était efficace puisque les réfugiés acceptaient beaucoup plus l’idée que demander l’asile en France pouvait être une étape positive, pour eux et pour leur famille, à défaut d’être une solution définitive. J’ai moi aussi entendu dire que l’action des services de l’État était perçue à la fois comme ferme, sous-tendue par la stratégie que vous avez rappelée, mais aussi soucieuse d’humanité avec la volonté d’améliorer les conditions de vie des migrants. Aussi, entre les images qu’on peut voir dans les grands journaux télévisés et la réalité qu’on peut constater sur place, y a-t-il pour le moins un écart. La situation s’est considérablement améliorée, qu’il s’agisse des conditions de prise en charge alimentaire, sanitaire ou sociale – il y a dans ce camp des restaurants, une école…

Vous avez évoqué la question du démantèlement des filières. Il nous a été dit sur place qu’il était difficile de remonter les réseaux. Avez-vous des informations sur la nature de ces filières : sont-elles « artisanales » ou bien y a-t-il des commanditaires dans les différents pays d’origine, je pense à l’Afghanistan, à l’Érythrée, au Soudan, ou dans les pays de transit comme ceux de l’ex-Yougoslavie ?

Ensuite, je comprends que votre volonté est de limiter l’accueil au CAP qui permet de regrouper 1 500 migrants – sachant qu’alentour quelque 2 000 personnes vivent dans des hébergements provisoires. Envisagez-vous et, si oui, comment, la réduction du nombre de réfugiés de 3 500 à 1 500 ? Une capacité d’accueil de 1 500 places vous paraît-elle compatible avec les flux d’arrivées et le avec le temps nécessaire pour convaincre les migrants de rejoindre d’autres destinations ?

Enfin, quel est votre avis sur l’accord entre l’UE et la Turquie et sur sa mise en œuvre ? La France envisage-t-elle à court terme des relocalisations depuis la Turquie en vertu du principe selon lequel un Syrien ou un réfugié raccompagné depuis la Grèce vers la Turquie implique qu’un réfugié rejoigne l’UE ?

M. Jean-Paul Bacquet. Vos informations sont bienvenues, monsieur le ministre car, vous l’avez souligné, elles ne correspondent pas du tout à ce que nous entendons. Du fait du recours à la désinformation, à la manipulation, à l’émotion, les événements se retrouvent déformés. Je dois vous dire que si j’avais vu le film qui vient d’être projeté sans vous écouter, j’aurais conclu à l’intox. J’aurais pensé à ce qui deviendrait le service d’informations et de relations publiques des armées (SIRPA), quand il montrait les photos de la « pacification » en Algérie. Dès lors, monsieur le ministre, soit vous êtes un mauvais communicant, soit vous n’intervenez pas suffisamment, parce que ce que vous venez de nous dire, la France mériterait de l’entendre. Ne laissez pas la parole aux seules chaînes d’information continue qui jouent sur l’émotion, j’y insiste, pour faire du spectacle et qui ainsi, indirectement, dénigrent l’action de l’État. C’est le seul conseil que je puis vous donner si toutefois vous acceptez les conseils.

Par ailleurs, il y a Calais, certes ; mais, quand j’étais jeune, nous passions également par Le Havre, par Boulogne pour aller au Royaume-Uni. Aussi, existe-t-il d’autres filières ?

Autre question : pouvez-vous nous donner le nombre de policiers et de gendarmes mobilisés en permanence, le nombre de fonctionnaires et le nombre d’associations caritatives qui se trouvent sur le terrain ?

Vous avez indiqué que nous étions passés de 6 000 à 3 500 migrants. Mais vous avez également précisé que les passeurs demandaient 10 000 à 15 000 euros à chaque migrant : cette somme est énorme ! Quand il s’agit d’émigration économique, les sommes ne sont pas celles-ci et pourtant elles sont le fruit de la collecte de tout un village, ce qui du reste condamne celui qui part à ne pas pouvoir revenir s’il n’a pas rempli sa tâche. Expliquez-nous, dès lors, comment on peut trouver 10 000 à 15 000 euros – les migrants en question disposaient-ils de moyens importants dans leur pays d’origine ?

Enfin, je me réjouis que le Royaume-Uni paie enfin. La commission a reçu plusieurs de vos collègues avec lesquels nous avons évoqué la question et nous leur avons fait part de notre indignation de ce que le Royaume-Uni sous-traitait à la France la garde des frontières tout en se désintéressant totalement de ce qui pouvait se faire et tout en nous donnant des leçons.

M. David Habib. Hélas, dans la tête des gens, il existe un lien entre la crise migratoire et le terrorisme alors que nous savons tous qu’il ne faut as faire d’amalgame. Toutes sortes de rumeurs fleurissent et, qu’on le veuille ou non, font le terreau du populisme et de l’extrême droite. C’est pourquoi il est fondamental d’essayer de tordre le cou à la rumeur. Certains terroristes du Stade de France étaient issus de vagues de migrants. Quels sont les chiffres exacts, quelle est la manière de lutter contre la fabrication de faux passeports ? Le risque zéro, certes, n’existe pas : il consisterait à arrêter toute immigration, ce qui est contraire à notre tradition. Je crois que la chancelière Merkel a une immense responsabilité : elle est passée, en une spectaculaire volte-face, de l’absence de limites à l’immigration à sa position actuelle. Or la première impression donnée à tous ces gens a été qu’ils pouvaient venir en Europe en nombre illimité. Alors oui au droit d’asile mais non à la cacophonie. Les questions du lien de cette immigration avec le terrorisme, avec la délinquance, sont fondamentales – le patron d’Europol a avancé le chiffre de 4 000 à 5 000 djihadistes potentiels dont une partie pourrait être arrivée par le biais de cette immigration. Je souhaite vous entendre sur ce point.

Ensuite, de jeunes couples mariés arrivent dont la femme n’a que quatorze ou quinze ans. La Suisse a saisi la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) sur ce point. Comment répondons-nous, pour notre part, à ce phénomène ?

Enfin, on ne peut pas laisser la Grèce – qui fait partie de ma circonscription – seule – aussi comment l’aider ? Avons-nous des échos du début de l’application de l’accord entre l’EU et la Turquie ?

M. Jean Glavany. Merci, monsieur le ministre, pour cette précision, cette rigueur qui vous caractérisent. Puisque vous avez fait allusion au dispositif Frontex et à la mise en place de gardes-côtes, pourriez-vous, en passant, relayer auprès du Gouvernement une vieille revendication consistant à installer des gardes-côtes en France car il n’y en a pas ! Chaque administration a en effet ses propres bateaux : la gendarmerie, les affaires maritimes, les douanes, la marine nationale, la société de sauvetage en mer… Il s’agirait donc de mettre un terme à un grand gâchis de moyens publics, et d’ainsi pouvoir montrer l’exemple à l’Europe entière.

Je suis par ailleurs vraiment heureux de vous avoir entendu évoquer les accords du Touquet en ces termes. Refusant de croire qu’un accord bilatéral ait pu être aussi mal négocié, j’étais persuadé qu’existaient des clauses secrètes qu’on ne voulait pas nous dévoiler, au point que j’ai même interrogé l’ambassadeur du Royaume-Uni récemment sur ce point. Vous admettez donc que cet accord était léonin et, de fait, vous avez obtenu une renégociation. Vous mettez donc fin à cette interrogation qui m’a beaucoup tourmenté.

Je souhaite enfin vous interroger sur le phénomène d’aimantation des migrants vers Calais et le Royaume-Uni. Dans le cadre de votre politique de répartition des réfugiés de Calais sur l’ensemble du territoire national, nous avons vu arriver à Tarbes, sous l’égide de la préfecture, une vingtaine de Bidounes – à savoir de sans-papiers koweïtiens. En compagnie de la préfète, d’un interprète et de Pascal Brice, directeur général de l’OFPRA, qui a pris la peine de venir sur place, j’ai essayé de convaincre ces Bidounes de demander l’asile. Or, une semaine plus tard, dix-sept étaient repartis à Calais. J’ai bien noté les chiffres que vous avez donnés et qui montrent une sensible augmentation du nombre de demandeurs d’asile – 1 500 aujourd’hui contre 300 en 2014 –, chiffres que je ne remets pas en cause, mais il faut dans le même temps tenir compte du fait que le nombre de réfugiés a singulièrement augmenté…

J’ai pu personnellement mesurer les énormes efforts faits par l’OFPRA et les services de l’État pour inciter les réfugiés à demander l’asile en France, en leur indiquant qu’il s’agissait d’une étape nécessaire pour éviter de vivre dans le cloaque de Calais ou, pire, de mourir dans le Tunnel sous la Manche. Reste que, j’y insiste, le phénomène d’aimantation vers le Royaume-Uni m’est apparu insurmontable.

Mme Valérie Fourneyron. Je souhaite vous remercier pour vos propos, monsieur le ministre, et, à travers vous, remercier les services de l’État, les travailleurs sociaux et les associations qui œuvrent à Calais, à Grande-Synthe, et qui obtiennent les résultats que vous nous avez présentés, cela grâce à la clarté de votre stratégie faite de fermeté, pour ce qui est du démantèlement des filières de passeurs, et d’humanité, pour ce qui est de la facilitation de la demande d’asile par les migrants qui le souhaitent – sans oublier l’installation des CAO et vos exigences vis-à-vis du Royaume-Uni.

Du fait des moyens supplémentaires que vous avez déployés sur le terrain, les résultats sont très satisfaisants à Calais et à Grande-Synthe en ce qui concerne le démantèlement des filières de passeurs. Toutefois, on constate que d’autres ports – je pense à celui de Dieppe – commencent à accueillir des migrants qui pensent ainsi pouvoir gagner le Royaume-Uni par d’autres voies, risquant de provoquer des tensions.

M. François Loncle. Il est difficile en amont, c’est-à-dire en Libye, en Grèce, en Turquie, de faire la différence entre les réfugiés politiques et les migrants économiques. En revanche, à Calais et dans les autres zones d’accueil, avez-vous établi cette distinction, étant entendu qu’il ne devrait pas y avoir de migrants économiques ?

Vous avez fait allusion à des associations plus ou moins malfaisantes qui alimentaient les rumeurs, qui participaient à la désinformation, qui étaient les invitées préférées de certains médias : s’agit-il d’antennes locales d’associations nationales ou bien d’associations purement locales ?

Cette question rejoint celle posée par M. Bacquet sur la communication. Compte tenu de l’état des chaînes d’information continue et d’autres, mais aussi de la presse écrite – c’est un ancien journaliste qui vous parle –, comment équilibrer, autrement que par le petit film un peu raté qui nous a été présenté au début de l’audition, la communication que vous venez de faire ici brillamment, et qui nous convainc, avec les commentaires, les éditoriaux, les reportages d’une série de crétins qui sévissent dans les médias et en particulier dans des émissions dignes du café du commerce et qui sont à la mode y compris sur les chaînes les plus crédibles – autrefois France Info, par exemple – et qui dépassent aujourd’hui l’imagination en matière de mauvaise foi, de dénigrement, de dérision et de bashing en tout genre ? Je suis très en colère contre ce qu’est devenu mon ancien métier.

Mme la présidente Élisabeth Guigou. Nous le constatons.

Mme Seybah Dagoma. En tant que membre du conseil d’administration de l’OFPRA, je confirme, monsieur le ministre, que l’action menée par le Gouvernement et que les moyens alloués aux différentes structures sont exceptionnels. Reste que vous avez fait allusion à l’action menée dans les trains ; or la gare du Nord fait partie de la circonscription dont je suis l’élue et j’ai eu connaissance d’un certain nombre de dysfonctionnements.

En effet, afin de réduire le délai de traitement des demandes, la loi prévoit un dispositif de pré-accueil en vue d’obtenir un rendez-vous au guichet unique. Si le délai de trois jours maximum entre le rendez-vous en pré-accueil et celui au guichet unique est très satisfaisant, des problèmes ont été constatés dans la région Ile-de-France, notamment pour accéder à ce premier rendez-vous : l’attente peut même durer un mois pour une famille voire plusieurs mois pour une personne isolée. D’aucuns l’expliquent par le nombre limité de rendez-vous au guichet unique dans les préfectures. Du fait de cet engorgement, des migrants se retrouvent très endettés à cause des amendes qu’on leur a infligées au cours de leurs déplacements.

Ensuite, comme plusieurs associations, j’ai pu constater que le temps mis par l’OFII, débordé, à distribuer l’allocation pour demandeurs d’asile (ADA), mettait les migrants en situation de précarité.

Enfin, en matière d’hébergement, l’offre est peu importante à Paris et en région parisienne.

Mme Françoise Dumas. Je vous remercie également pour votre clarté, monsieur le ministre et, au-delà des films et des communiqués, la présente audition devrait être dupliquée sur toutes les chaînes de télévision, ce qui serait un énorme progrès pour la démocratie.

Je reviendrai pour ma part sur le cas des mineurs isolés. Selon vous, 326 sont actuellement pris en charge. Les conditions minimales d’accueil sont assurées par l’un des trois centres concernés. Vous encouragez les rapprochements familiaux, le pays concerné ne faisant toutefois pas montre d’un grand engouement – si bien que nous devons rester très vigilants. Je souhaite avoir plus de précisions sur l’âge de ces mineurs isolés.

La loi de 1989 relative à la prévention des mauvais traitements à l’égard des mineurs et à la protection de l’enfance oblige les départements à prendre en compte l’ensemble des enfants quelle que soit leur situation au regard du droit. Avez-vous la possibilité de faire en sorte que les enfants concernés soient pris en charge dans d’autres départements – dans des conditions peut-être meilleures sur le plan éducatif et sanitaire – en attendant que leur situation soit régularisée ?

Je souhaite enfin avoir plus de précisions sur les modalités de prise en charge sanitaire et scolaire de ces enfants et savoir si un lien est maintenu avec les familles d’origine ?

M. Bernard Lesterlin. Cela fait du bien, monsieur le ministre, de vous entendre rappeler quelle est l’action de l’État sur le terrain. Vous êtes certes sollicité par les médias mais on ne vous entend pas assez faire passer les messages comme celui que vous nous délivrez ici.

Selon vous, les migrants récemment installés au Royaume-Uni, qu’ils soient réguliers ou non, et qui sont l’une des causes importantes de l’appel d’air précédemment évoqué en ce qu’ils sont prêts à accueillir leurs compatriotes, sont-ils davantage des migrants économiques ou des réfugiés ? Ce point est important car il y a une très forte attraction communautaire et l’on peut comprendre que ceux qui sont sous les bombes veuillent se réfugier auprès de gens qui parlent la même langue qu’eux, sont du même village, voire de la même famille.

J’ai par ailleurs été quelque peu surpris de ne pas vous entendre évoquer le service civique. Après les propos très insistants du Président de la République en faveur de la montée en puissance de ce dispositif, le fait que l’État soit très sollicité, que le ministère de l’intérieur ait désigné un préfet pour coordonner les missions que vous êtes susceptibles d’organiser, ne pensez-vous pas que, ne serait-ce qu’en termes d’image, l’engagement de jeunes Français pour accompagner les familles pourrait être un vrai sujet ? Je pense en particulier à la migration à venir, après l’accord avec la Turquie : ne pensez-vous pas qu’une initiative conjointe des Français, des Italiens et des Allemands, qui sont très organisés sur ce plan, ne serait pas de nature à donner une image positive de la façon dont l’Europe accompagne des gens qui ne sont pas des touristes mais de vrais migrants que l’on doit prendre en charge ?

M. le ministre. Je répondrai succinctement aux différentes interventions et, si vous le voulez bien, vous enverrai une note comportant des éléments chiffrés.

Monsieur Germain, des réseaux sont présents partout sur les chemins des migrations. Ainsi, en Libye, des organisations internationales du crime – qui, pour certaines, s’adonnent à la traite des êtres humains – poussent les migrants dans des embarcations de fortune en Méditerranée centrale, avant qu’ils ne soient accueillis par les correspondants de ces organisations en Italie ou en France. Il s’agit de réseaux internationaux de type mafieux que nous ne pouvons démanteler complètement que dans le cadre d’une coopération renforcée entre les services de police et de renseignement. C’est pourquoi, dans la lutte contre l’immigration irrégulière et contre les réseaux de passeurs, nous avons engagé une coopération forte avec les pays de la Bande sahélo-saharienne (BSS), au sein du G5 Sahel, mais aussi une coopération forte avec la police et les services de renseignement turcs. Nous exerçons une pression constante afin de démanteler ces réseaux partout où ils sont.

Pour ce qui concerne Calais, par exemple, une action très forte a été menée en France mais trop faible au Royaume-Uni. Nous avons par conséquent demandé le renforcement de la coopération franco-britannique et de la Border Force à Calais, mais également celui de notre présence à la gare de Saint-Pancras à Londres. Ainsi nous obtenons de meilleurs résultats.

Ensuite, quand j’ai évoqué la somme de 10 000 à 15 000 euros, il s’agissait d’un maximum, le tarif dépendant bien sûr des origines, du parcours, des fonctions de ceux qui veulent passer – et ces montants peuvent être considérables. Il faut savoir que les réseaux de passeurs usent de menaces, de violences contre ceux sur lesquels ils prélèvent ces sommes, y compris lorsque ces derniers demandent l’asile, considérant qu’ils ont trop payé pour rien. L’attitude des réseaux est monstrueuse, aussi suis-je résolu à en sortir les migrants. Depuis le début de l’année, à Calais, 26 condamnations ont été prononcées contre ces têtes de réseau, ce qui est très important et montre que nous continuons à agir.

Pour ce qui est de la suite à Calais, elle est pour nous très simple : nous entendons renforcer les structures collectives et les lieux de vie ; ensuite, nous voulons humaniser l’habitat – ceux qui ne sont pas dans le CAP n’ont pas pour autant vocation à être accueillis dans des structures de fortune soumises au vent, à la pluie et à la saleté ; je veux que l’habitat soit harmonisé de façon foraine afin qu’à mesure que les personnes partent en CAO, on puisse démonter ces structures ; enfin, il s’agit de continuer l’accueil en CAO pour éviter qu’on n’organise un point de convergence, de concentration à Calais ou à Grande-Synthe.

J’en profite pour vous indiquer que les associations nationales et certaines associations locales accomplissent un travail des plus remarquables, qu’il s’agisse de MSF, du Secours catholique ou d’autres. Ces grands partenaires associatifs parfois nous assignent devant les tribunaux mais nous avons avec eux une relation de respect et de reconnaissance. Les associations que j’ai visées, elles, sont des structures comme le réseau No Border.

Mme la présidente Élisabeth Guigou. Qui vient du Royaume-Uni !

M. le ministre. En effet. Il s’agit, pour ce qui les concerne, d’activistes cyniques qui n’ont pour les migrants aucune considération et qui instrumentalisent la question migratoire à des fins politiques. C’est d’eux que je parle, eux qui organisent une agitation perpétuelle, manipulent, mentent, provoquent, qui sont d’un courage très relatif puisque, lorsque les migrants sont sur la rocade, ils se trouvent derrière eux, dans les bosquets, pour les pousser en avant, tandis que les forces de l’ordre tentent d’éviter les tensions et d’éviter des morts. Je n’ai donc aucune considération pour ces groupes et je les qualifie pour ce qu’ils sont. Je les combats puisqu’ils sont à l’origine d’une partie des difficultés. Je tiens à ce que mes propos soient consignés au compte rendu de façon que les choses soient bien claires.

Dans le même temps, je le répète, nous pouvons certes avoir des relations difficiles avec certaines associations comme Médecins du Monde, mais nous reconnaissons qu’elles font un travail très important, sans lequel les choses seraient plus difficiles et, à ce titre, elles méritent toute notre considération.

J’en viens à l’accord entre l’UE et la Turquie. Il est critiqué mais avant qu’il ne soit conclu on critiquait le fait que la Grèce soit seule face à elle-même, on regrettait l’absence de contrôle des frontières extérieures… Nous avons décidé que ceux qui arrivaient irrégulièrement devaient s’en retourner, dans le cadre d’un accord de réadmission, et que ceux qui, s’en étant retournés, relevaient, en Europe, du statut de réfugiés, seraient accueillis dans de bonnes conditions – c’est donc une manière d’éviter à la Grèce d’être confrontée à un problème qu’elle ne sait pas gérer et une manière pour nous de contrôler nos frontières.

On dit des choses fausses sur la façon dont la Turquie accueille les réfugiés. Je me suis rendu sur place avec mon homologue allemand Thomas de Maizière, il y a un mois et demi, et je n’ai pas seulement rencontré les autorités turques. Au cours d’un petit-déjeuner, j’ai été frappé par les propos des représentants d’organisations des Nations-Unies telles que le Fonds des Nations-Unies pour l’enfance (UNICEF), le Programme alimentaire mondial (PAM), le Haut-commissariat des Nations-Unies pour les réfugiés (HCR)… Mes interlocuteurs m’ont en effet indiqué que les Turcs avaient accueilli 2,5 millions de réfugiés et que ceux, parmi ces derniers, qui se trouvaient dans les camps bénéficiaient d’un standard d’accueil bien meilleur que celui dont les organisations onusiennes étaient capables. En outre, les Turcs ont accueilli 250 000 enfants dans les écoles. Ils sont allés chercher les enseignants qui parlaient syrien dans les camps pour que les enfants puissent bénéficier d’un enseignement dans leur langue. Aussi le sujet est-il toujours plus compliqué qu’on ne le croit et je rejoins François Loncle sur le caractère réducteur de certains commentaires et la superficialité de certaines analyses. Les Turcs ont fait beaucoup et nous devons nous organiser avec eux dans le cadre d’une relation équilibrée pour que nous puissions procéder à la réinstallation des réfugiés à partir de la Turquie. La France le fera, pour sa part, en fonction des effectifs convenus, notamment à partir du Liban où je me suis rendu pour dire que nous prendrions nos responsabilités, mais aussi à partir de la Jordanie et, donc, à partir de la Turquie.

Jean-Paul Bacquet estime que la France mériterait d’entendre davantage ce que je dis. Je vais vous envoyer toutes les matinales, toutes les émissions auxquelles j’ai participé et je vous propose de bien vouloir les relayer. M. Bacquet a même comparé le film qui vous a été projeté à ce que faisait le SIRPA et François Loncle n’est pas loin de penser qu’il est digne de la télévision d’avant la Perestroïka.

M. Jean Glavany. C’est un vieux de l’ORTF, il sait de quoi il parle ! (Sourires.)

M. le ministre. Ne considérez pas, certes, que ces films sont parole d’évangile, mais allez donc dans les CAO : en tant que parlementaires, vous avez une capacité d’investigation, de contrôle sur place. Mes services seront ravis d’organiser de telles visites. Mais si vous oubliez de nous prévenir, ce sera encore mieux. Je suis très demandeur que vous examiniez ce que nous faisons dans les CAO. En effet, certains expliquent que quand des migrants partent de la boue de Calais pour aller dans les CAO, l’État organise leur « déportation » – voilà ce que je peux lire dans des lettres qui me sont envoyées, dans certaines tribunes. Si l’on constate des dysfonctionnements, il va de soi que nous y remédierons : nous souhaitons réserver aux migrants le meilleur accueil, faire en sorte que la France soit exemplaire en matière d’asile et nous améliorerons ce qui doit l’être.

Jean Glavany a évoqué l’aimantation de Calais. Il faut savoir que 85 % de ceux qui se rendent dans un CAO y restent. Il s’agit certes d’un taux national qui peut recouvrir des réalités locales différentes. Reste que ce chiffre de 85 % est considérable compte tenu, précisément, de cette aimantation. Et plus nous serons nombreux à valoriser ce que nous faisons pour l’asile en France et pour la protection des personnes vulnérables, plus nous serons convaincants. J’y insiste, ces femmes et ces hommes qui ont subi des persécutions ne nous appartiennent pas : ils doivent construire leur avenir eux-mêmes ; nous n’avons pas à instrumentaliser leur sort à des fins politiques, que ce soit pour dire qu’ils n’ont rien à faire là, en convoquant les populismes les plus abjects, ou pour considérer qu’ils sont mieux entre les mains des associations au prétexte que l’État serait toujours mauvais. Encore une fois, la réalité est toujours beaucoup plus complexe que cela. Or dans un contexte où le populisme gagne du terrain en Europe, nous avons intérêt, État et associations, à agir ensemble pour faire triompher les valeurs de l’asile.

On m’a interrogé ensuite sur le nombre de policiers à Calais : il s’y trouve 14,5 unités de forces mobiles. C’est trop au regard de ce que l’on pourrait souhaiter dans une ville, mais c’est ce dont nous avons besoin pour assurer la sécurisation des infrastructures portuaires. Si l’on y ajoute les effectifs de la sécurité publique, on parvient au chiffre de 1 100 effectifs – je ne sais pas si vous vous rendez compte.

Le député Habib m’a posé une question sur le lien entre délinquance et migration. Je ne confonds pas les deux mais je constate simplement que si nous voulons bien accueillir ceux qui doivent l’être, nous devons pouvoir assurer la sécurité des frontières extérieures de l’UE. En effet, les organisations terroristes et les organisations criminelles sont abjectes et cyniques et l’on ne réagit pas à l’abjection et au cynisme par l’angélisme mais par des mesures. C’est pourquoi j’insiste sur l’interrogation du système d’information Schengen, sur la connexion des fichiers criminels, sur la mise en place d’une task force européenne de lutte contre les faux documents… Quand j’expose ces conditions devant permettre d’accueillir ceux qui doivent l’être en toute sécurité, toute une série d’acteurs vous expliqueront qu’il ne s’agit que d’une approche sécuritaire de la question migratoire. C’est tout le contraire : si l’on veut avoir une approche humanitaire de la question migratoire, il faut éviter que les organisations criminelles ne s’en emparent pour réaliser leurs trafics. Il faut donc protéger les migrants eux-mêmes de cette intrusion d’acteurs pour certains terroristes. Parce que l’impact d’un attentat commis par deux, trois ou dix personnes se mouvant parmi un million de migrants est tel qu’il provoque des craintes et nourrit le populisme, nous devons prendre toutes les précautions pour que cela ne soit pas possible.

On m’a demandé quel âge avaient les mineurs isolés : 57, parmi les 326 identifiés, ont moins de quinze ans.

J’en viens à la Grèce. Nous ne la laissons pas seule : la France y est même le pays le plus présent avec l’envoi de près de 200 collaborateurs de mes services. Quand, il y a quelques semaines, je me suis rendu sur place pour rencontrer le président, le premier ministre et plusieurs membres du gouvernement, ils ont reconnu publiquement le rôle de la France dans la maîtrise de la situation dans les Hotspots, ce qui a été rappelé au conseil justice et affaires intérieures, soit devant les 28. Ce qui n’empêche pourtant pas la réitération du discours selon lequel la France aurait laissé la Grèce livrée à elle-même. Or, j’y insiste, nous sommes le pays le plus présent en Grèce, et significativement, par le biais de l’OFPRA et de la police, afin d’alimenter les moyens de l’agence Frontex.

Jean Glavany souhaite depuis longtemps que les accords du Touquet soient révisés.

M. Jean Glavany. De fait, ils le sont.

M. le ministre. Je n’ai pas changé de discours sur la question : la constance et la précision comptent. À chaque fois que vous m’avez interrogé, j’ai répondu que l’idée de Nicolas Sarkozy, lorsqu’il a signé l’accord du Touquet, qui consistait à envoyer le signal du caractère infranchissable de la frontière, me paraissait juste compte tenu de ce qu’était alors la situation. Je n’ai pas changé d’avis. Ensuite, j’ai indiqué que cet accord, qui conduisait la France à gérer la frontière franco-britannique, était déséquilibré dans le sens où nous en assumions seuls, y compris sur le plan financier, la charge. Ma démarche a donc été de demander aux Britanniques de nous accompagner financièrement et en moyens humains, ce qu’ils ont fait en engageant les moyens que j’ai précédemment indiqués. Par ailleurs, ce n’est pas parce que nous gérons la frontière en France que les mineurs isolés ou que les migrants qui ont des relations au Royaume-Uni ne doivent pas y bénéficier de l’asile. Nous avons négocié avec les Britanniques et sommes parvenus à obtenir les réponses que nous attendions, même si elles doivent être amplifiées.

Vous avez raison, madame Fourneyron, il existe d’autres ports d’où l’on peut partir pour le Royaume-Uni. J’ai donc donné des instructions très claires pour qu’on ne laisse pas s’y installer des campements et pour qu’on procède à l’étanchéification de la frontière dans ces autres ports où l’OFPRA et l’OFII sont chargés d’aller chercher les migrants pour leur proposer le même dispositif qu’ailleurs. Je ne souhaite pas, en effet, que le problème se déplace mais bien qu’il soit résolu sur la totalité de la façade septentrionale. Je me souviens que lorsqu’on a démantelé le centre de Sangatte, non pas en installant les migrants dans des structures d’accueil pour leur proposer l’asile mais en les dispersant, certains, à Cherbourg dont j’étais maire à l’époque, dormaient dans des cartons. Quand j’ai alors demandé qu’on accompagne la collectivité locale pour faire face à cette réalité qui n’était pas de son ressort, l’État n’avait pas eu le même comportement qu’aujourd’hui où il prend ses responsabilités.

M. Loncle souhaite savoir, pour sa part, comment nous établissons la différence entre les réfugiés et les migrants économiques. Il y a des migrants économiques à Calais, même s’ils sont moins nombreux qu’ailleurs. Quand des migrants essaient de passer, nous procédons à la reconduite de ceux qui ne relèvent pas du statut de réfugié. Nous avons procédé, depuis le début de l’année, à une cinquantaine de reconduites par semaine, à savoir quelque 500 migrants économiques irréguliers depuis le début de l’année.

Comment, ensuite, rééquilibrer la communication ? Il faut être rigoureux, honnêtes, persévérants ; il faut également garder son calme car on entend parfois des choses susceptibles de nous mettre en colère. Il faut aussi nommer les choses quand les limites sont dépassées. Enfin il faut des relais. Je ne vous demande pas de croire ce que je dis mais de le vérifier en allant à Calais, à Grande-Synthe, dans les CAO, en contrôlant l’action de mes services et, si ce que je dis n’est pas vrai, eh bien, vous le signalerez. Je le répète, je suis demandeur d’une telle coopération avec le Parlement car il peut très bien y avoir des points à améliorer.

J’en viens à l’intervention de Mme Dagoma. Nous avons décidé de mettre en place le guichet unique, il y a quelques semaines, après le vote de la loi relative à la réforme du droit d’asile. Il est vrai que la situation reste particulière dans la région parisienne du fait de la concentration de difficultés dans quelques préfectures. Nous avons obtenu des moyens supplémentaires à cet effet dans le cadre des mesures prises par le Gouvernement pour faire face à la crise migratoire.

Pour ce qui concerne l’ADA, nous rencontrons des difficultés de mise en œuvre même si, globalement, la montée en puissance du dispositif se passe dans de bonnes conditions. Aujourd’hui, plus de 85 000 personnes en bénéficient, ce qui n’est pas négligeable.

En ce qui concerne le service civique, son principe veut que le jeune choisisse lui-même son projet. Aussi, si certains décident de s’engager à Calais, non seulement ils pourront le faire mais l’administration les accompagnera. Reste que le ministère de l’intérieur n’est pas à même d’offrir des postes à cette fin, à moins de dénaturer l’esprit du dispositif lui-même.

Mme la présidente Élisabeth Guigou. Nous vous remercions, monsieur le ministre. Nous allons tâcher de faire le meilleur usage des informations très précises que vous nous avez données. En attendant, vos informations sur les camps en Turquie m’ont été confirmées par Stephen O’Brien, secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires et coordonnateur des secours d’urgence de l’ONU, que j’ai reçu récemment.

La séance est levée à vingt heures quinze.

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Membres présents ou excusés

Commission des affaires étrangères

Réunion du mardi 5 avril 2016 à 18 heures

Présents. - M. Jean-Paul Bacquet, M. Guy-Michel Chauveau, M. Édouard Courtial, Mme Seybah Dagoma, Mme Françoise Dumas, Mme Valérie Fourneyron, M. Jean-Marc Germain, M. Jean Glavany, M. Jean-Claude Guibal, Mme Élisabeth Guigou, M. Meyer Habib, Mme Marylise Lebranchu, M. Bernard Lesterlin, M. François Loncle, M. Alain Marsaud, M. Patrice Martin-Lalande, M. Jean-Luc Reitzer, M. François Scellier

Excusés. - Mme Nicole Ameline, M. Kader Arif, M. Michel Destot, M. David Habib, Mme Françoise Imbert, M. Serge Janquin, M. Pierre Lequiller, M. Jean-René Marsac, M. René Rouquet, M. Boinali Said, M. Michel Vauzelle