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Commission des affaires étrangères

Mardi 14 juin 2016

Séance de 17 heures 15

Compte rendu n°79

Présidence de Mme Elisabeth Guigou, Présidente

– Audition de M. Jean-Marc Ayrault, ministre des affaires étrangères et du développement international, sur le Proche et Moyen-Orient. 2

Audition de M. Jean-Marc Ayrault, ministre des affaires étrangères et du développement international, sur le Proche et Moyen-Orient

La séance est ouverte à dix-sept heures quinze.

Mme la présidente Élisabeth Guigou. Nous avons le plaisir d’accueillir aujourd’hui M. Jean-Marc Ayrault, pour une réunion fermée à la presse, afin d’évoquer la situation au Proche et au Moyen-Orient.

Il est convenu que vous allez consacrer votre propos liminaire au dossier israélo-palestinien et que vous répondrez aux questions des commissaires sur les autres dossiers.

Sur le premier sujet, vous évoquerez bien sûr l’initiative française, engagée par Laurent Fabius, d’organiser une conférence internationale au second semestre 2016. Vous nous direz quel bilan vous tirez de la réunion préparatoire qui a eu lieu le 3 juin dernier à Paris, mais surtout, comment vous voyez la suite. Pourriez-vous nous éclairer notamment sur les termes de référence qui devront faire l’objet d’un accord ?

Quelle sera l’implication du Quartet dans la définition des garanties et des mesures incitatives qui doivent aider à la reprise des négociations ? L’Union européenne se prépare-t-elle à jouer un rôle dans le processus de paix qui soit à la hauteur de ses responsabilités dans la région ? Sentez-vous une volonté politique forte du côté de la Haute représentante et de nos partenaires européens, je pense notamment à l’Allemagne, dans ce dossier ?

Ma deuxième question porte sur le degré de mobilisation de nos autres partenaires. Quel est notamment l’état d’esprit des pays arabes qui participeront à la conférence : la réactivation de l’initiative arabe de paix vous semble-t-elle bien engagée ? Par ailleurs, peut-on véritablement compter sur l’appui américain ?

M. Jean-Marc Ayrault, ministre des affaires étrangères et du développement international. Le 3 juin, la France a accueilli cette première réunion ministérielle afin de relancer le processus de paix, alors que tout est aujourd’hui bloqué. La dernière rencontre a été celle d’Annapolis il y a neuf ans, mais depuis, rien ne s’est passé à l’exception de la tentative sincère de John Kerry qui n’a pas abouti. Alors que la situation sur le terrain se dégrade, et même si le premier ministre israélien dit vouloir une négociation directe, rien ne se passe. On a en mémoire les attaques au couteau et plus récemment l’attentat à Tel Aviv. Face à ces violences la solidarité avec Israël est spontanée, mais les mesures prises en réaction à cet attentat, même si elles ont été levées depuis lors, n’ont pas arrangé la situation.

Nous assistons aussi à la montée de la propagande de Daech dans la région. C’est une propagande haineuse qui se diffuse également dans les camps palestiniens. Les divisions inter palestiniennes ne facilitent pas non plus les choses.

Il nous a donc paru nécessaire de prendre l’initiative. Il y a eu beaucoup d’échanges avec John Kerry car les Etats-Unis demeurent un partenaire essentiel, mais aussi avec les membres permanents du Conseil de Sécurité, les Européens, notamment la Haute Représentante, les membres du Quartet et bien sûr les pays arabes. Je me suis notamment rendu au Caire afin de rencontrer les représentants de la Ligue arabe. Ces démarches ont donné lieu à un débat au Conseil Affaires étrangères, entre Européens, qui ont approuvé l’approche, même si chacun en mesure la difficulté. L’Allemagne, dont on connaît la sensibilité sur ces questions, a été très positive. Je me suis rendu sur place pour discuter avec le Président Abbas et le Premier ministre Benjamin Netanyahu de cette initiative ; le Premier ministre, pour sa part, s’est rendu en Israël et en Palestine, pour un déplacement prévu de longue date et dédié aux relations bilatérales, mais a naturellement évoqué également ce dossier.

Le 3 juin, 28 pays sont venus à Paris à l’invitation de la France, parmi lesquels les pays cités précédemment, mais également le Japon et le Canada, dont le nouveau gouvernement souhaite jouer un plus grand rôle sur la scène internationale. Étaient également présents le Secrétaire général des Nations unies, la Secrétaire général de la Ligue arabe et la Haute Représentante de l’Union européenne.

Cette première étape, qui n’était pas facile, a cependant réussi et s’est traduite par un communiqué qui constate la situation sur le terrain, évoque la colonisation et fait référence aux résolutions de l’ONU, ainsi qu’aux travaux du Quartet et à l’initiative arabe de paix qui a été souvent évoquée le 3 juin.

Deux messages se dégagent de cette réunion :

- La solution à deux Etats s’éloigne, mais elle a été réaffirmée solennellement par tous les participants ;

- Il faut recréer les conditions pour qu’Israéliens et Palestiniens se parlent et négocient directement car c’est à eux seuls qu’il appartient de trouver un accord.

La mobilisation du Secrétaire d’Etat américain est notable et se traduit par des navettes continues. Le rapport du Quartet devrait sortir prochainement, il sera critique pour tout le monde et sévère sur la colonisation. Les pays arabes, notamment l’Arabie saoudite, ont été très actifset joué un rôle constructif pour parvenir à un communiqué commun.

Maintenant, nous allons poursuivre les travaux de façon souple. Nous n’avons pas créé de groupe pilote. Il y a déjà les enceintes existantes comme le Quartet ; nous allons discuter de l’articulation de cette initiative avec son action, mais toute autre initiative est la bienvenue, qu’elle vienne d’Egypte ou des Etats-Unis, éventuellement après l’élection présidentielle. La France ne recherche pas le monopole, mais joue un rôle de facilitateur.

Mon envoyé spécial Pierre Vimont a fait un travail remarquable et le poursuivra. Il ira prochainement en Egypte, en Israël et dans les Territoires palestiniens. J’ai moi-même rendu compte de la conférence au Président de l’Autorité palestinienne et au Premier ministre israélien.

Notre objectif reste d’avancer en direction de la prochaine étape qui consistera en une nouvelle conférence, si possible avant la fin de l’année 2016, en présence des parties.

Des groupes de travail se mettront en place, coordonnés par la France et animés par des pays volontaires, sur le renforcement des institutions palestiniennes, sur l’économie et la société civile, sur la désescalade et la sécurité. L’objectif est d’aboutir à un paquet global d’incitations et de garanties à présenter aux Israéliens et Palestiniens.

Mme Odile Saugues. M. le ministre, dans le rapport que j’ai rendu en mars 2015, j’ai noté l’immobilisme de la communauté internationale face à un des plus anciens conflits. Lors de votre réunion préparatoire du 3 juin, avez-vous noté un changement de l’état d’esprit de la communauté internationale ?

Actionnera-t-on les leviers tels que l’étiquetage des produits fabriqués dans les colonies.

M. Meyer Habib. L’initiative française est une bonne initiative, mais pour parler franchement pouvons-nous être crédibles auprès des Israéliens quand nous multiplions les couacs diplomatiques ? Ainsi, le 29 janvier dernier, Laurent Fabius affirmait que nous reconnaitrions unilatéralement l’État de Palestine en cas d’échec.

Pouvons-nous être crédibles quand le 16 avril dernier, la France votait en faveur de la résolution de l’UNESCO qui islamisait le Mont du Temple ?

Tout récemment, l’application informatique du registre des Français de l’étranger faisait apparaître la mention « Israël et territoires palestiniens » pour indiquer le lieu de résidence de tous les Français vivant en Israël ? Vos services affirment qu’il s’agit d’un bug technique qui devrait être corrigé ans les meilleurs délais, mais qu’en est-il ?

Comment pouvons-nous être crédibles quand nous ne pouvons pas faire rentrer un pays qui comporte un million de francophones dans la Francophonie parce que certains de ses voisins s’y opposent ?

Pour relancer le processus de paix, il faut que Palestiniens et Israéliens s’assoient face à face sans condition préalable. Penser que le conflit israélo-palestinien est le père de tous les conflits est une faute. Arrêtons de penser qu’en résolvant ce problème, on résoudra tous tous les problèmes de l’humanité.

Mme Odile Saugues. Dans mon rapport d’information de l’an dernier, j’écrivais : « l’attentisme, voire l’immobilisme, de la communauté internationale face au non règlement d’un des plus anciens conflits qui enveniment le Proche Orient décrédibilise son discours et ses tentatives de règlement d’autres crises de la région ». Lors de la réunion qui s’est tenue le 3 juin, avez-vous constaté un changement d’état d’esprit ? L’Union européenne est-elle prête à activer tous les leviers économiques – je pense à l’étiquetage des produits fabriqués dans les colonies israéliennes ?

M. Meyer Habib. Cette conférence est une bonne initiative.

Mais sommes-nous crédibles, quand, par ailleurs, nous multiplions les couacs avec Israël ? Le 29 janvier, lors de ses vœux au corps diplomatique, Laurent Fabius annonçait qu'en cas d'échec de son initiative, la France reconnaîtrait l’Etat palestinien. Certes, le Président de la République et le Premier ministre sont ensuite revenus sur ces déclarations. Mais ensuite, en avril, il y a eu le vote français en faveur de la résolution de l’Unesco entérinant l’islamisation des sites historiques juifs de Jérusalem. Là aussi, les autorités politiques ont pris leurs distances à l’égard de cette salafication, mais après coup. Enfin, ce 3 juin, 75 000 Franco-israéliens ont découvert sur l’application informatique des Français de l’Etranger qu’ils résidaient dans les « Territoires palestiniens » quelles que soient leurs adresses… Il paraît que c’est un bug technique. Certes, mais comment être crédibles quand nous ne parvenons pas à faire entrer à l’Organisation internationale de la francophonie un pays où il y a un million de francophones, au nom de la règle de l’unanimité et du fait de l’opposition du Liban ?

Palestiniens et Israéliens doivent s'asseoir à la même table, mais sans conditions préalables. Votre feuille de route est bonne, mais il faut arrêter de dire que le conflit israélo-palestinien serait le père de tous les conflits dans la région ; c’est de l’angélisme. Regardez les auteurs des attentats, ce sont les mêmes partout !

Mme la présidente Elisabeth Guigou. Personne ici n’est angélique. Cela dit, nous respectons l’émotion particulière de Meyer Habib.

M. Michel Vauzelle. Dans le passé, on parlait de défendre Israël dans des frontières « sûres et reconnues ». Mais les frontières ne sont plus reconnues, car Israël a annexé Jérusalem et le Golan sans que la communauté internationale ne le reconnaisse. Gaza ressemble de plus en plus à Guantanamo. En Cisjordanie, du fait de la colonisation israélienne, la perspective des deux Etats s’éloigne et on a affaire à un espace d’insécurité occupé par Israël.

Dans ces conditions, il est important que la France rappelle la gravité du problème en organisant cette conférence. Les autres questions ne doivent pas occulter le conflit palestinien.

Mais au-delà, quelles perspectives avons-nous pour un Etat palestinien, alors que l’ambassadrice d’Israël, que nous avons auditionnée, nous a expliqué que la colonisation allait continuer ?

M. François Rochebloine. Je me réjouis de l’organisation de cette conférence, dans laquelle vous vous êtes investi, M. le ministre. Mais pour quels résultats ? Il y a certes eu une déclaration commune, mais elle s’en tient au constat de la situation.

Quelles sont les chances de mettre en place la solution à deux Etats ? Nous avons reçu ici le représentant palestinien, qui a été assez ouvert, et l’ambassadrice d’Israël, qui ne veut entendre parler que de discussions directes, mais pas de conférence internationale comme nous la proposons.

Je crains que l’on ne s’enfonce encore plus loin dans le conflit. La colonisation est-elle un des sujets évoqués dans les discussions ?

Mme Linda Gourjade. Le 2 décembre 2014, les députés ont adopté une résolution portant sur la reconnaissance de l’Etat de Palestine. Elle visait à affirmer que la solution des deux Etats, promue avec constance par la France et l’Union européenne, suppose la reconnaissance de l’Etat de Palestine aux côtés de celui d’Israël. Vous avez engagé ce processus dès le 3 juin, avec la première réunion internationale sur la situation au Proche-Orient. Le chemin peut être long, mais seul le succès des discussions internationales engagées pour la création des deux Etats sera gage de paix. Vous l’avez dit, il y a urgence, car la situation se dégrade sur le terrain et les violences montent en puissance. Dans l’hypothèse où ce processus serait bloqué, la France, comme l’y invitent les députés, envisage-t-elle pour sa part une reconnaissance d’un Etat palestinien et, si oui, quels en seraient les contours ?

M. Pierre Lellouche. Je ne reviens pas sur cette initiative lancée par Laurent Fabius. J’avais exprimé, à l’époque, mes plus vives réserves sur la date-butoir pour la reconnaissance de l’Etat de Palestine et sur le vote d’une résolution. Je voyais mal où cela pouvait nous conduire et je ne suis pas très surpris que cette réunion parisienne, pleine de bonne volonté, n’aboutisse pas à grand-chose. Disons que vous avez dû gérer l’héritage.

Au Liban, la guerre par procuration entre Saoudiens et Iraniens empêche tout déblocage de la situation politique. Le pays n’a donc ni Président ni Parlement depuis deux ans, avec une situation économique qui se dégrade et 1,5 million de réfugiés. Qu’attendent la France et sa diplomatie pour tenter une médiation ? Il faut trouver une solution entre Téhéran et Riyad pour obtenir la désignation d’un Président et seule la France peut le faire. Je vous invite, Monsieur le ministre, à faire quelque chose qui pourrait réussir, cette fois, à condition d’y mettre les moyens. Nous avons de très bonnes relations, peut-être trop bonnes, avec un des protagonistes. Avec l’Iran, il reste du travail à faire, mais il me semble qu’on pourrait peut-être y arriver.

Je suis récemment allé avec François Fillon au Kurdistan irakien, qui compte 1,8 million de réfugiés, dont beaucoup de chrétiens. Les Kurdes sont les seuls à se battre sur le terrain face à Daech et à ne pas recevoir un centime d’aide, à la différence de la Jordanie, de la Turquie et de toutes sortes de gens. Comme le robinet financier a été fermé par Bagdad et que le prix du pétrole a baissé, la situation est très compliquée à gérer. La France pourrait mettre son poids dans la balance pour essayer de débloquer des aides du côté du FMI. Là aussi, j’aurais aimé que la France soit plus visible et plus à l’initiative.

Autre sujet, Mme Merkel a signé un marchandage de bazar avec le président Erdogan. Tout cela montre d’ailleurs, en creux, que les Turcs tiennent parfaitement leur frontière quand ils en ont envie, et pas du tout quand ils ne le veulent pas. La contrepartie est que l’Europe doit lever l’obligation de visa fin juin. Nous sommes le 14 et j’ai entendu ce que disent les responsables français, au plus haut niveau, sur le respect des 72 critères, et ce que dit aussi le président Erdogan. Par conséquent, que va-t-on faire fin juin ? Quelle est la position de la France ?

J’en viens à la question des sanctions à l’égard de la Russie, qui se posera aussi à la fin du mois. Notre groupe a voté une résolution, avec d’autres députés, invitant le Gouvernement à envisager la levée de ces sanctions. Je ne suis pas pour que ce soit immédiat et inconditionnel, mais on voit bien qu’un calendrier est nécessaire pour sortir du blocage de Minsk. Il faut simultanément une loi votée par la Rada ukrainienne, qu’elle n’a aucun intérêt à adopter puisque les sanctions sont appliquées, une sortie des Russes et un renforcement de l’OSCE. Là aussi, quid d’une initiative française ?

Voilà quatre domaines où la diplomatie française pourrait jouer un rôle sans doute plus efficace que lors de la récente réunion de Paris, et où nous sommes attendus.

M. Jacques Myard. Je comprends bien que vous vouliez faire bouger les lignes et je ne peux qu’approuver la démarche. Mais, pardon d’être un peu brutal, on ne fait pas boire un âne qui n’a pas soif. Il est clair qu’il y a deux blocages dans ce conflit qui empoisonne le Proche-Orient et donne des prétextes aux uns et aux autres. Vous nous dites qu’il faut recréer les conditions de la négociation entre les deux parties. C’est une formule magique ou, comme l’aurait dit l’un de vos prédécesseurs, Hubert Védrine, un mot valise. Je pense que l’on n’y arrivera pas tant que les deux parties ne seront pas parvenues au paroxysme de l’affrontement et de l’impasse. Il y a, de part et d’autre, une accumulation de haine féroce et je ne vois pas comment on peut en sortir de l’extérieur. Cela ne viendra que des deux parties en cause, lorsqu’il y aura une crise psychologique conduisant à la prise de conscience de la situation d’impasse totale dans laquelle on se trouve et de la nécessité de changer de braquet. Toute cette affaire me paraît donc complètement illusoire.

Comme Pierre Lellouche, je souhaite que nous sortions de notre propre impasse, complète et ubuesque, à l’égard de la Russie. Ce n’est pas à vous que je vais expliquer que la Russie est notre alliée en matière de coopération contre le terrorisme. Il faut savoir sérier les problèmes. Il faut dire à nos chers amis ultra-européens, de Pologne, de Lettonie et d’autres pays qu’on peut certes les comprendre mais qu’il faut changer de politique. Il faut également dire aux Américains qu’ils doivent cesser de regarder Poutine comme s’il s’agissait d’un nouveau Staline. Il y a un moment où il va falloir taper du poing sur la table, Monsieur le Ministre, et fortement.

M. Jean-Claude Guibal. Sur le conflit israélo-palestinien, qu’est-ce qui permet d’espérer que l’initiative française sera plus féconde que toutes celles qui l’ont précédée ?

S’agissant de la Libye, maintenant qu’un gouvernement dit « d’union nationale » a été mis en place, quelles sont les mesures prises par l’Union européenne pour maîtriser les flux migratoires venant de ce pays ?

M. Kader Arif. Monsieur le Premier ministre, sur la question israélo-palestinienne beaucoup de choses ont été dites. Je vais essayer de faire attention car on me prêterait beaucoup de subjectivité sur cette question. Je me félicite de l’initiative que vous avez prise car, ayant toujours considéré que la relation bilatérale est une relation du fort au faible, je pense qu’une relation multilatérale telle que vous l’avez engagée permettra au plus petit pays ou à des pays moins puissants de faire entendre leurs voix. Le bilatéral a toujours servi le gouvernement israélien, alors que le multilatéral peut amener à une vision plus juste et équilibrée sur l’avenir de cette partie du monde.

Je repose la question qui a été posée par plusieurs de mes collègues : sentez-vous vraiment une volonté de paix ? Quand on voit comme la colonisation s’est développée ces derniers mois et ces dernières années, il semble que l’idée de deux États, si l’un des États est une espèce de Bantoustan, sera compliquée à faire accepter.

Deuxième élément de réflexion : pour travailler sur Daech depuis quelques mois, je crois qu'il faut faire très attention - je crois que vous l’avez à l’esprit - à ce que Daech, ou les métastases de Daech, ne puissent devenir à court, moyen ou long terme les héros/ hérauts (dans les deux sens du terme) du conflit israélo-palestinien. Cela serait dramatique par rapport à ce que nous connaissons dans des pays comme le nôtre, et en particulier dans un pays comme le nôtre. C’est pour moi une question que nous devons avoir à l'esprit constamment.

J'ai toujours, très sincèrement, beaucoup de tendresse pour ce que dit Meyer Habib, mais il faut faire attention lorsque l’on avance que la question israélo-palestinienne, et son règlement, n’est pas primordiale. Cela reviendrait à dire - j’assume la subjectivité de ce que j’avance - que ce serait le monde arabe dans son ensemble qu’il faudrait remettre en question, ce qui pourrait conduire à amplifier un sentiment qui n’est pas bon à l’égard de nos concitoyens et qu’il faut à mon avis éviter d’amplifier.

Sur la question turque, le manque de courage et de générosité de l’Union européenne en ce qui concerne les migrants (syriens en particulier) nous a conduits à donner à la Turquie une capacité à jouer qui est dangereuse. Deux millions six-cent mille migrants sur le sol turc laissent à un gouvernement, qui aujourd'hui glisse au-delà l'autoritarisme qui est le sien sur des positions incompréhensibles, ou en tous cas pas démocratiques, la possibilité de renvoyer les deux millions six-cent mille migrants que l’Europe n’a pas été capable d’accueillir. C’est une question qu’il faut avoir à l’esprit. Je voudrais savoir quel est votre sentiment là-dessus, ainsi que sur notre relation avec la Turquie, qui est aujourd’hui par ailleurs fâchée avec la plupart de ses voisins.

Dernière question : on parle beaucoup de la Méditerranée, qui est chère au cœur de beaucoup d’entre nous. Je sens quand même des tensions avec beaucoup de pays méditerranéens. La déclaration du roi du Maroc, il y a quelques semaines, n'était pas vraiment agréable à entendre de ce côté-ci de la Méditerranée. J’aimerais savoir comment vous voyez l’évolution de nos relations avec les pays méditerranéens qui sont pour nous des acteurs et des amis.

Mme la présidente Élisabeth Guigou. À toutes ces questions je vais en rajouter, si vous le permettez Monsieur le Ministre, deux ou trois autres.

D’abord, mon sentiment - mais je pense que c'est aussi ce qui s’est dégagé des questions de mes collègues - est que même si c'est très difficile, je ne vois pas en quoi on vous reprocherait d'essayer. Il est évident que l’on ne peut pas se substituer aux principaux belligérants, mais continuons, parce que sinon on oubliera, comme l’a très bien dit Michel Vauzelle, ce que conflit existe. Pour autant il ne faut bien évidemment pas tout ramener à ce conflit.

Comment voyez-vous l'évolution de la situation intérieure en Irak ? On voit que l’armée irakienne se bat bien pour imposer la reprise de Falloujah, ce qui n’est pas la première idée qui nous viendrait à l’esprit. Le gouvernement irakien est cependant toujours pris dans une crise politique. Par ailleurs, rien n’est résolu avec le Kurdistan.

En Syrie on voit bien que les choses sont bloquées, puisqu’il n’y a même pas de date fixée pour la reprise des négociations. Comment évaluez-vous les intentions des Russes ? Quels sont leur moyens - ou leur absence de moyens - de pression sur Bachar al-Assad ? Celui-ci a quand même déclaré dernièrement que son objectif était la reconquête de chaque centimètre du territoire, et vous-même vous êtes vivement insurgé au sujet de la violation des couloirs humanitaires qui avaient été convenus.

Enfin sur la Libye - et c’est une bonne nouvelle dans cet océan de problèmes - les forces de Daech à Syrte ont été considérablement réduites, et sembleraient retranchées dans l’un des quartiers de Syrte. Comment voyez-vous l’accompagnement futur du gouvernement Sarraj ? Où en est-on dans le désarmement des milices ? Par ailleurs, voyez-vous une possibilité d’unir les milices de Misrata, qui sont arrivées jusqu’à Syrte avant le général Haftar et ses combattants ?

Vous ferez le tri dans tout cela, car c’est un survol général, mais je voulais quand même aborder ces questions.

M. Pierre Lellouche. Pardonnez-moi Monsieur le Premier ministre de cet esprit d’escalier. Nous sommes à quinze jours du sommet de l’OTAN. Ce n’est pas un sommet ordinaire. Il y a des tensions très fortes, y compris comme le disait Jacques Myard entre Européens à propos de la Russie. Le ministre polonais des affaires étrangères dit que la Russie est pour l’Europe une menace plus grave que Daech. Je ne suis pas sûr que l’on soit tous d’accord avec cela. Deuxièmement, il y a des programmes de réarmement, des déploiements de missiles et antimissiles en Roumanie et en Pologne, ainsi qu’un discours de nouvelle guerre froide à Washington. Je suis convaincu que la France et l’Europe ont besoin de tout sauf d’une nouvelle guerre froide. Je voudrais savoir quelle ligne vous allez défendre au sommet de l’OTAN.

M. le ministre. Très bien, merci.

Mme la présidente Élisabeth Guigou. Merci chez collègue.

M. Jean-Marc Ayrault, ministre des affaires étrangères et du développement international. Merci Madame la Présidente. Je ne peux pas me permettre de faire le tri dans ces questions qui sont toutes intéressantes et importantes, même s’il est vrai qu’il y a beaucoup de choses.

Je commencerai avec notre initiative de paix. J’apprécie ce que vous venez de dire, Madame la Présidente. Ce n’est pas parce que c’est difficile qu’il ne faut rien faire. C’est notre responsabilité, dans la mesure où aucune initiative n’a été prise. Il y a bien eu la tentative sincère de John Kerry en 2014, mais qui de lui-même a reconnu avec une forme d’amertume qu’elle n’avait pas fonctionné.

Vous me demandez s’il se passe quelque chose, vous me dites que l’initiative engagée ne sert à rien. En réalité, le fait que la réunion du 3 juin, incluant une bonne part de la communauté internationale, se soit tenue, est déjà une étape politique très importante, qui n’était pas gagnée d’avance.

Je n’ai pas hérité d’un dossier, je suis dans la continuité de la politique française, et je n’ai fait que prendre mes responsabilités en continuant ce que Laurent Fabius avait annoncé. Nous avons besoin aussi de votre soutien, pas de votre scepticisme. Je comprends que vous soyez comme moi inquiets de la situation sur le terrain, et conscients de la difficulté. La porte est effectivement étroite, mais il faut l’emprunter et faire quelque chose : le pire est la résignation au statu quo. J’ai été surpris de ce qu’a dit Jacques Myard, qui a préconisé, et pas sur le ton de la boutade cette fois, que la situation dégénère à un point où les parties se rendront compte qu’il faut faire quelque chose. C’est peut-être comme cela que cela finira, mais je crois que nous devons tout faire pour que ce ne soit pas le cas. L’initiative de la France, qui a permis que cette réunion ait lieu et qui a créé un climat positif, où des choses se sont dites, doit prospérer. Ce n’est pas facile, je le reconnais, mais c’est indispensable.

Je suis à titre personnel très inquiet, de ce qui se passe non seulement à Jérusalem mais aussi à Tel Aviv. On sent la montée des discours de haine, et ce même sur les réseaux sociaux en France, où des gens se sont réjouis de l’attentat de Tel Aviv. Vous avez heureusement adopté des textes qui permettent désormais de poursuivre ce qui s’écrit en matière de haine, et notamment les propos antisémites, sur les réseaux sociaux, et des procédures judiciaires ont été engagées. J’ai récemment rencontré à New York des organisations juives américaines, auxquelles j’ai exposé ce que nous faisons et fait remarquer que leur constitution ne leur permet pas de mettre en place de tels dispositifs, ce qu’elles ont reconnu.

Je reviens au sujet qui nous préoccupe, que plusieurs d’entre vous ont évoqué, à savoir la colonisation. C’est pour moi un vrai drame. J’ai eu des entretiens bilatéraux avec beaucoup de ministres des affaires étrangères de beaucoup de pays. J’ai eu un entretien très approfondi avec John Kerry, qui connaît très bien la situation sur le terrain. Il y a une angoisse à voir, comme Michel Vauzelle l’a évoqué, l’espace disponible pour un État palestinien viable se réduire régulièrement. Je ne peux, personnellement, pas accepter qu’on affirme que la colonisation doit se poursuivre. Cela n’est pas responsable. Si cela est dit par le gouvernement de Benjamin Netanyahou et ses représentants, c’est un désaccord qu’il nous faut assumer. Nous ne pouvons pas l’accepter, car c’est contraire au droit international et à toutes les résolutions que la France a votées au Conseil de sécurité. Nous avons passé un moment avec John Kerry à regarder des cartes et constaté que la colonisation met en péril la solution des deux Etats. . La question du territoire et de la viabilité du futur État palestinien devient de plus en plus difficile. Il faut faire très attention à la question de la colonisation. Il y a une colonisation qui se poursuit de façon linéaire, à Jérusalem et autour de Jérusalem, et une colonisation qui se poursuit de façon diffuse, en Cisjordanie. En outre, la colonisation créée des tensions et des frustrations. C’est donc une question qui nous concerne et qu’il ne faut pas sous-estimer.

Le conflit israélo-palestinien n’est pas la mère de tous les conflits mais un conflit qui, sans faire de hiérarchie, est extrêmement dangereux. En tant que membre permanent du Conseil de sécurité, la France a des responsabilités particulières, et tente, avec ses partenaires européens et la communauté internationale, d’apporter une contribution au règlement des conflits. A ce titre, il valait la peine de prendre cette initiative.

Vous m’avez demandé, Linda Gourjade, si en cas d’échec la France reconnaîtra unilatéralement l’État palestinien. Si je n’ai pas évoqué cette question, ce n’est pas par manque de courage ou d’audace : reconnaître un État palestinien est pour moi à la fois une conviction et une nécessité. Cependant, je ne pars pas avec l’idée d’un échec. Je ne vais pas prendre l’initiative d’une réunion avec un maximum de pays pour les mettre autour de la table tout en leur disant que l’on va échouer, et en mettant sur la table la réponse qu’on utilisera dans ce cas. Cette réponse serait d’ailleurs uniquement franco-française et non multilatérale. La question sera posée, le moment venu.

Les Palestiniens, ne voyant rien bouger, envisageaient de demander une résolution au Conseil de sécurité pour que la colonisation soit condamnée. Ils n’étaient pas sûrs du tout d’avoir un vote favorable, mais c’était un geste politique. Cette demande, qu’ils ont retirée du fait de l’initiative française, pourrait être renouvelée si la situation n’évolue pas. L’initiative française est une tentative difficile mais qui doit prospérer. Je vais écrire à tous ceux qui sont venus dans les prochains jours, avec lesquels nous allons multiplier les échanges pour voir qui peut aider. J’ai déjà cité un certain nombre de pays. Je ne peux pas en dire plus aujourd’hui.

Je voudrais revenir un instant sur ce qu’a dit Meyer Habib. C’est une question qu’il faut dépassionner. Il y a bien sûr des points de désaccords avec le gouvernement de Benjamin Netanyahou, ce qui est normal. Lui est contre un cadre international, il le dit et l’assume. Il me l’a dit à nouveau quand je l’ai appelé, le soir même de la conférence. Mais je crois que les choses vont finir par avancer - je l’espère en tous cas.

M. le ministre. Après, vous me dites qu’il y a un problème d’impartialité de la France sur ce sujet. Mais la France n’a pas changé de position. Nous avions eu l’occasion de nous expliquer sur la formulation maladroite de la résolution à l’UNESCO. Nous voulons prioritairement un statut quo sur les lieux saints des trois religions monothéistes à Jérusalem. Nous s’engageons à veiller scrupuleusement à cet équilibre. Faisons donc attention aux mots.

S’agissant de votre référence aux passeports, il faut rester serein et calme. Il n’y a pas d’arrière-pensée ni de mauvaise intention. Il ne s’agit d’ailleurs pas des passeports, mais du registre de tous les Français établis hors de France. Jusqu’ à présent, lorsqu’ils voulaient s’y inscrire, ils étaient contraints de se rendre au guichet du consulat. Afin de leur faciliter la vie, nous avons mis en place un système en ligne qui permet d’éviter ces déplacements. Il se trouve, qu’avant la généralisation de ce système, il y a eu un test, et le système prévoyait, parmi les options d’un menu déroulant des pays de résidence, « Israël/Territoires palestiniens ». Cette formulation réductrice a été immédiatement corrigée par nos services. Le problème est donc derrière nous. Je crois néanmoins qu’il faut détendre l’atmosphère, et ne pas faire de tout un sujet polémique.

La situation au Liban me préoccupe, notamment le fait qu’il n’y ait toujours pas de président de la République. Je me rendrai d’ailleurs dans ce pays le 11 et le 12 juillet. C’est avant tout aux Libanais de régler leurs problèmes et je n’ai pas reçu de mandat pour une quelconque médiation. Mais, néanmoins, je parlerai à tout le monde sur place, car c’est utile. Par ailleurs, j’ai eu l’opportunité d’échanger récemment avec M. Zarif, à l’occasion d’une réunion sur la Syrie à Vienne, et que je rencontrerai à nouveau très bientôt lors de sa visite en France. Le 27 juin, je rencontrerai également M. Mohamed ben Salmane, vice prince héritier d’Arabie saoudite, dans le cadre de la réunion de la commission mixte franco-saoudienne. Évidemment, dans un cas comme dans l’autre, nous parlerons du Liban.

S’agissant de la question irako-syrienne, la lutte contre DAESH progresse et marque des points. Le groupe a perdu 45% du territoire en Irak, et ce notamment grâce à l’appui aérien de la coalition. L’objectif maintenant est de reprendre Fallujah et puis d’aller jusqu’à Mossoul. Les Peshmergas ont engrangé des succès réels, notamment dans la région de Karakoch. La France prend ses responsabilités car, dans le cadre de l’opération Chammal, elle contribue notamment avec 14 avions, basés dans les Émirats arabes unis et en Jordanie, une surveillance, des conseils.

En ce qui concerne l’Irak, nous voulons un gouvernement inclusif. Le Premier ministre Haïder al-Abadi devrait avoir comme priorité d’intégrer tous les représentants des forces politiques dans son gouvernement. En revanche, il ne faut pas être ambigu sur la question kurde et refuser catégoriquement le partage d’Irak. Cela vaut également pour la Syrie. Je crois qu’il ne faut pas jouer avec les frontières.

Hier, j’étais en Pologne et j’ai rencontré les membres du gouvernement et responsables politiques de ce pays, y compris M. Kaczyński. Des rencontres qui étaient intéressantes, même si je ne dis pas que je suis en accord avec leurs positions. Nous avons parlé notamment du rapport avec la Russie et de la prochaine réunion de l’Otan. Nous sommes membres de l’Alliance atlantique, et dans ce cadre, nous respecterons nos engagements, notamment à contribuer à la surveillance de l’espace aérien des Etats baltes. Le président de la République annoncera ce que nous pouvons faire de plus sur ce dossier, mais cela sans être une nation cadre. Néanmoins, nous ne devons pas donner l’impression d’être agressifs et entrer dans une nouvelle guerre froide avec la Russie. La Russie n’est pas un adversaire mais un partenaire de la France. Nous avons évidemment des désaccords, mais nous devons essayer de trouver ensemble des réponses et des solutions, et ce notamment sur le dossier syrien. En ce sens, lorsque j’avais vu M. Poutine, j’avais proposé qu’une nouvelle réunion du conseil Otan-Russie ait lieu avant le sommet. Je vous confirme qu’une première réunion a eu lieu dans un climat qui n’était pas agressif et qui a permis d’échanger des informations en toute transparence. L’objectif est de veiller à ne pas donner des signes qui pourraient contribuer à faire monter la tension et servir de prétexte aux Russes.

S’agissant du dossier libyen, nous avons travaillé, avec le Royaume-Uni notamment, sur une résolution du Conseil de Sécurité afin de permettre de mieux contrôler le trafic d’armes et de veiller au respect de l’embargo sur les armes en Méditerranée centrale. Certains voient un rôle pour l’Otan dans ce domaine. Je crois que ce serait une erreur, surtout après l’intervention de 2011 qui a laissé des traces. . Il faut, au contraire, associer les Russes pour que cette résolution aboutisse et j’en ai’ai d’ailleurs parlé à M. Lavrov au téléphone. Nous verrons donc le résultat final. Je pense qu’il faut faire attention, non pas dans une quelconque soumission à tel ou tel dictat russe, mais pour trouver des voies et avancer vers un certain nombre de solutions.

Il est vrai que ce sont les milices de Misrata qui sont parvenues à prendre le contrôle de Syrte alors que certains pensaient que les forces du général Haftar arriveraient les premières. Il faudra prendra en compte cette réalité et encourager le gouvernement Sarraj à unifier les forces militaires. De même il faudra convaincre l’Egypte et les Emirats arabes unis à contribuer à ce que le parlement libyen vote l’investiture du gouvernement Sarraj. Il y a donc des progrès, mais la situation demeure fragile.

Il est clair qu’il n’y aura pas de solution en Syrie sans discussion avec la Russie, notamment dans le cadre du Groupe international de soutien à la Syrie co-présidé par la Russie et les Etats-Unis. Mais il n’y aura pas de solution non plus si le cessez-le-feu décidé à Munich n’est pas à nouveau respecté. On ne peut pas accepter que le régime de Damas autorise le passage d’un convoi humanitaire, pour bombarder immédiatement après les populations auxquelles il était destiné. Dans un contexte de catastrophe humanitaire, les négociations sont impossibles. Or les Russes ont les moyens de faire pression sur le régime. Je compte avoir une explication sur ce sujet avec Monsieur Lavrov lors d’une prochaine rencontre.

S’agissant des sanctions européennes contre la Russie, sachez tout d’abord que la résolution que vous avez votée ne facilite pas les choses. Ces sanctions en effet ont été prises à l’unanimité et ne peuvent être levées que si les choses évoluent positivement en Ukraine. Or, on est loin du compte. La Russie doit accentuer sa pression sur les séparatistes. Dans le Donbass, on constate une amélioration mais elle n’est pas suffisante ; notamment, les observateurs de l’OSCE ne peuvent circuler librement, certains ont même été détenus pendant quelques jours par les séparatistes. Je ne sous-estime pas pour autant les retards imputables au gouvernement de Kiev. Lorsque le Conseil européen examinera cette question, il évaluera les progrès dans la mise en œuvre des accords de Minsk et, à moins d’une évolution d’ici là, constatera que les conditions ne sont pas remplies pour une levée des sanctions, ce qui est regrettable.

L’accord UE-Turquie est effectivement très critiqué, mais y avait-il une autre solution alors que nous étions confrontés à une crise humanitaire gravissime en Grèce ? Je n’entends aucune proposition alternative dans ce concert de critiques. On ironise sur les contreparties que l’on a données à la Turquie, mais ce pays accueille près de trois millions de réfugiés. Quel pays supporterait-il une telle charge ? Les soutiens décidés lors de la Conférence de Londres aux pays d’accueil sont légitimes. La libéralisation des visas n’interviendra que si 72 critères sont respectés, notamment celui de la définition du terrorisme. Même le ministre des affaires étrangères turc reconnaît que tout ceci ne sera pas prêt d’ici la fin du mois.

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Membres présents ou excusés

Commission des affaires étrangères

Réunion du mardi 14 juin 2016 à 17 h 15

Présents. - M. Kader Arif, M. Philippe Baumel, M. Jean-Louis Destans, M. Michel Destot, Mme Françoise Dumas, M. Éric Elkouby, M. Jean Glavany, Mme Linda Gourjade, M. Jean-Claude Guibal, Mme Élisabeth Guigou, M. Meyer Habib, M. Jean Launay, Mme Marylise Lebranchu, M. Pierre Lellouche, M. Patrick Lemasle, M. François Loncle, M. Jacques Myard, M. Didier Quentin, Mme Marie-Line Reynaud, M. François Rochebloine, M. Boinali Said, Mme Odile Saugues, M. François Scellier, M. André Schneider, M. Michel Vauzelle

Excusés. - Mme Nicole Ameline, M. Jean-Luc Bleunven, Mme Seybah Dagoma, M. Jean-Pierre Dufau, Mme Chantal Guittet, Mme Françoise Imbert, M. Serge Janquin, M. Pierre Lequiller, M. Jean-Claude Mignon, M. Jean-Luc Reitzer

Assistait également à la réunion. - M. Gérard Bapt